Le petit chat est mort

“Nous devons des égards aux vivants. Aux morts, nous ne devons que la vérité” (Voltaire)

 

Le 5 mars 1953 s’éteignait brusquement à Moscou le “petit père des peuples” Joseph Staline. Soixante ans plus tard exactement, mourait à Caracas le “père du peuple vénézuelien”, Hugo Chavez Frias. L’histoire a ce genre d’étranges ironies, de rapprocher deux hommes qui étaient si différents, mais qui partageaient au moins deux choses: la date de leur mort… et la fascination quasi mystique qu’ils ont tous deux exercé de leur vivant sur la “gauche radicale” française.En 1953, lorsque Iossif Vissarionovitch Djougashvili partit pour son dernier voyage, la façade du siège du PCF fut tendue de noir avec une immense photo du leader décédé, une délégation du PCF au plus haut niveau représenta le Parti aux obsèques du grand leader disparu dont le corps sera embaumé et placé aux côtés de celui du fondateur de l’Etat, Lénine. Soixante ans plus tard,  la ressemblance est frappante: Bien sur, les temps ont changé, et aujourd’hui ce n’est pas le siège du Parti qu’on tend de noir, mais la première page des blogs et des sites internet (1). Mais Mélenchon compte se rendre aux obsèques du dirigeant Vénézuelien dont sont successeur probable déclare que le corps embaumé sera exposé dans un cercueil en cristal “pour que le peuple puisse l’avoir toujours près de lui”, et qu’il sera placé dans le Pantéon aux côtés du père de la Nation, Simon Bolivar. O tempora, o mores.

 

Mais bien entendu, le style n’est pas l’homme et Chavez n’est pas, et de loin, Staline. Pour le comprendre, il faut se demander qu’elle est la nature exacte de  “l’oeuvre” chaviste et dans quel contexte elle s’est accomplie. Pour répondre à cette question, il faut examiner le contexte très particulier du Vénézuela en particulier et de l’Amérique Latine en général. Car Chavez, ce n’est pas un phénomène nouveau et isolé, mais le dernier avatar d’une figure typique de la région, celle du “caudillo” populiste. Mais pas n’importe quel populisme: d’un populisme rentier.

 

Beaucoup d’économies latino-américaines sont, et cela depuis la conquête espagnole, fondées essentiellement sur l’exploitation d’une rente. Au départ, ce fut celle des mines de métaux précieux – or et argent – puis celle des ressources agro-alimentaires, et pour finir celle du gaz et du pétrole. L’économie de ces pays repose donc sur l’extraction d’une ressource primaire, ressource qui est transportée généralement ailleurs, dans les pays développés, pour être transformée. En retour, les devises récupérées servent à importer les produits manufacturés dont le pays a besoin.

 

La question politique essentielle est donc le partage de la rente. Celui-ci est très inégalitaire, à un point qui est difficile de concevoir pour un européen. D’un côté, une grande masse indigente, de l’autre une bourgeoisie peu nombreuse entourée d’une classe moyenne dont les niveaux de vie sont extraordinaires pour les standards européens. La masse de la population exerce des activités à la productivité très faible très faiblement qualifiées, car l’activité économique à forte valeur ajoutée se réduit à l’exploitation de la rente et ne  favorise pas l’apparition d’une “aristocratie ouvrière” consciente de la valeur de son travail et capable, par la lutte politique et syndicale, de gagner des conquêtes sociales. De son côté, la bourgeoise et surtout ces classes moyennes sont d’une extraordinaire rapacité. N’ayant jamais été obligée de consentir des concessions à un véritable mouvement ouvrier organisé, ces couches n’ont ni la culture de la négociation, ni celle du compromis. Dès que leurs intérêts sont menacées, elles en appellent à des régimes répressifs pour défendre leurs intérêts. Le rapport entre la bourgeoisie et le monde du travail est un rapport mi-paternaliste, mi-féodal, où le “patron de estancia” veille comme un père sur “ses” travailleurs qui voient en lui la source de tous les bienfaits qu’ils peuvent recevoir en ce monde (logement, cadeaux, etc.). Car dans un système ou la qualification des travailleurs et la productivité sont très faibles, l’idée que son travail a une valeur et peut être effectivement négociée s’efface devant une vision féodale où le patron n’a pas véritablement besoin de personne, et ce n’est que par “bonté” qu’il emploie et paye le travailleur.

 

Dans ce contexte, qu’on ne retrouve en Europe que dans les régions socialement les plus archaïques, comme le sud de l’Italie ou la Corse, certains secteurs des classes moyennes finissent par prendre conscience de la fragilité du modèle, notamment lorsque une plus grande urbanisation et l’apparition de petites industries permettent le développement d’un mouvement syndical embryonnaire.  Et ces secteurs finissent par tirer la même conclusion que le Prince Salina dans “Le Guépard”: il faut que tout change pour que tout continue comme avant. Il faut savoir partager une partie de la rente pour pouvoir conserver le reste. Et il faut utiliser ce partage de manière à garder un contrôle absolu des masses et de fermer la porte à des idées “dangereuses et contraires à notre mode de vie occidental et chrétien” (sic) qui pourraient pousser les humbles à demander plus qu’on n’est disposé à donner.

 

Le mélange de la tradition féodale avec cette prise de conscience donne un type de populisme bien particulier, qu’on pourrait assimiler à ce qu’étaient les “rois thaumaturges” si extraordinairement décrits par Marc Bloch. En d’autres termes, d’un dirigeant doué de pouvoirs quasi-magiques, et qui devient la seule source de légitimité, de pouvoir, et bien entendu, de richesses. Le couple Peron est peut-être l’exposant le plus connu et le plus achevé de cette sacralisation personnelle et de personnalisation à outrance du pouvoir. C’est entendu, ces nouveaux “rois thaumaturges” s’arrangent pour distribuer une partie de la rente au peuple, finançant des programmes sociaux de toutes sortes. Mais ce financement est fait de telle manière qu’il apparaisse comme ayant sa source non pas dans une activité productive dans laquelle le peuple participe par son travail, mais dans la volonté souveraine d’un seul homme. C’est le “grâce à Chavez, nous avons ceci ou cela”.

 

C’est pourquoi la disparition du leader bien-aimé est aussi traumatisante dans ces pays. De Gaulle avait beau avoir signé l’ordonnance créant les assurances sociales, tous les français savaient que celles-ci survivraient à son départ du pouvoir ou sa mort. Parce que nous, français, sommes habitués à l’idée que les services dont nous jouissons viennent de l’Etat et trouvent en dernière instance leur source dans le droit, et non dans la décision arbitraire de tel ou tel homme providentiel. Les hommes passent, et l’Etat reste. Mais dans un système où les programmes sociaux, les allocations, les logements ne viennent pas de l’Etat, notion vague qui ne désigne en général qu’une poignée de fonctionnaires inefficaces et corrompus, mais sont octroyés par la grâce d’un “caudillo” tout puissant, la disparition de ce “caudillo” équivaut à une remise en cause des avantages que vous avez pu grappiller.

 

“Allo presidente”, l’émission de télévision au cour de laquelle Chavez distribuait logements et couvertures et corrigeait les ministres en direct n’est pas une nouveauté. Ce n’est qu’une variation des techniques utilisés par d’autres avant lui pour créer ce lien direct qui lie le seigneur et son vassal, fondé sur la conviction chez le vassal que tout ce dont il jouit lui est donné par son seigneur et peut lui être enlevé si son seigneur venait à disparaître ou à être mécontent de lui. Eva Peron était célèbre par le fait qu’elle recevait personnellement chaque demandeur qui venait frapper à la porte de la Fondation qui portait son nom et qui venait au secours des plus démunis. Les gens quittaient son bureau avec un bon signé de sa main pour un matelas, une cuisinière, un chauffage, un logement. Mais ces biens n’étaient pas accordés dans le cadre de la loi, ce n’était nullement un droit que ces gens exerçaient. C’était une libéralité, qu’Eva Peron pouvait consentir ou refuser. Et le fait de le consentir crée donc une dette – et donc un lien d’allégeance – entre le dirigeant qui octroie et le dirigé qui reçoit. Avec “Allo presidente”, Chavez a fait la même chose qu’Eva Peron, mais en utilisant les moyens de communication de masse disponibles à son époque.

 

Ce point est fondamental: chez nous, le chômeur qui touche ses allocations à l’ANPE a conscience qu’il ne doit rien à François Hollande. Ce n’est pas le président qui lui octroie ses allocations, c’est l’Etat en application des lois. Et si le chômeur venait à déplaire – par exemple en faisant campagne pour l’opposition – ou bien si Hollande venait à mourir, les allocations continueraient à être payées. Il n’y a donc pas de lien de dépendance – ou d’allégeance – entre ceux qui réçoivent un service de l’Etat et les gouvernants. Les systèmes “caudillistes”, au contraire, reposent sur ce lien personnel. Dans ces régimes, le citoyen n’a droit – au sens d’un droit impersonnel – à rien. S’il reçoit quelque chose, c’est grâce au “caudillo” qui, à la manière d’un père, se charge de son bonheur. Et à qui on ne saurait “manquer” sans que cela apparaisse comme un trahison, quand ce n’est pas un parricide.

 

Il est incontestable que Chavez a distribué une partie de la rente pétrolière à la population la plus modeste. Ce faisant, il a réduit la pauvreté et ce qui va avec. Mais faut-il pour autant en tirer une image positive, ou pire encore, en faire un “modèle” pour des “révolutions citoyennes” en Amérique Latine mais aussi en Europe ? La réponse est, à mon sens, négative. Parce que, comme disait TS Eliot: “La dernière tentation est la pire trahison / c’est faire une bonne chose pour une mauvaise raison“. Qu’un dirigeant distribue la rente de son pays pour acheter des voix – même si cet achat de voix réduit la pauvreté – peut être vu par les pauvres comme une excellente chose. Mais du point de vue politique, la question est plutôt: est-ce que cette rente n’aurait pu être mieux employée ? Est-ce que si elle avait par exemple été investie en infrastructures et dans le développement d’une économie de production, les pauvres ne se seraient trouvés mieux à la fin ?

 

La réponse, malheureusement, est positive. Les “caudillos populistes” qui se sont acheté une popularité en stimulant la consommation des couches populaires avec la rente ont souvent conduit leurs pays au désastre. Tout simplement parce que les économies de rente n’ont qu’un temps. Le retournement de la conjoncture, la découverte de nouveaux gisements peuvent dramatiquement changer la valeur de la rente. C’est ce qui est arrivé à Peron dans les années 1950, lorsque la reconstruction de l’agriculture européenne a dramatiquement réduit la valeur “des blés et des viandes” qui constituaient la rente argentine. Rien ne dit que le prix du pétrole restera dans les sommets où il est maintenant – si les projets d’économies d’énergie et transition énergétique dont on nous rabat les oreilles sont un succès, la demande devrait baisser considérablement – et surtout par défaut d’investissement la production vénézuelienne de pétrole décline depuis des années. La rente donne à un pays une formidable opportunité de financer sa modernisation. L’Angleterre, la France, l’Allemagne sont ainsi devenues des puissances industrielles au milieu du XIXème siècle grace à la manne charbonnière. Encore faut-il veiller à ce que la rente ne s’évapore pas dans un niveau de consommation sans rapport avec la productivité réelle de l’économie, mais soit correctement investie pour fonder l’amélioration du niveau de vie sur une véritable croissance de la production.

 

C’est là que le bât blesse pour ce qui concerne Chavez. Son gouvernement à dépensé l’immense manne pétrolière à toutes sortes de choses… sauf à la modernisation du pays. Et ce n’est pas par erreur, par oubli ou par incompétence. Ce défaut est inhérent à ce type de “caudillismo”. Imaginons un instant que Chavez eut créé au Vénézuela un Etat “socialiste” moderne, capable de gérer une économie industrielle, des services publics de qualité. A quoi servirait alors Chavez ? Quel rôle peut avoir un “caudillo” dans un système où chacun a des droits et des devoirs et où l’Etat veille à ce qu’ils soient respectés ? Quelle possibilité de se perpétuer au pouvoir alors que personne ne vous doit rien personnellement ? Churchill ou De Gaulle ont été renvoyés à leurs études par leurs peuples, et cela malgré le fait qu’ils avaient gagné une guerre. Tout simplement parce que dans nos vieilles démocraties on peut être reconnaissant à à un dirigeant de son travail sans pour autant se sentir lié à lui par une obligation personnelle de lui donner son vote. Cela est possible justement parce que nous avons dans nos vieux pays des Etats “modernes” qui assurent la continuité, et que les droits dont nous bénéficions ne dépendent pas d’un homme. Le “caudillo” a besoin, pour assurer son pouvoir, que l’Etat soit archaïque et faible. Que personne ne puisse être assuré de sa situation autrement que par ses liens personnels avec le dirigeant. C’est pourquoi il était illusoire d’espérer que Chavez – comme Peron en son temps, et comme n’importe quel autre “caudillo” – puisse moderniser l’Etat et la société (2). Comment lui demander de scier la branche sur laquelle il est assis ?

 

Le principal reproche qu’on peut faire à Chavez n’est pas – comme le font certaines voix de droite – qu’il ait muselé l’opposition ou qu’il ait multiplié la corruption et le népotisme. L’opposition a pu s’exprimer assez librement – surtout compte tenu des excès qu’elle a commis dans cette expression – et la corruption et  le népotisme ne datent pas d’aujourd’hui, et ne semblent pas avoir gêné outre-mesure les commentateurs du temps de Carlos Andrés Perez. Peut-être parce que c’était un honorable membre de l’Internationale Socialiste, allez savoir. Ce qu’on peut – et on doit – reprocher à Chavez c’est d’avoir mis en place un système “caudilliste” qui, sous le prétexte de diminuer la pauvreté, ne fait qu’enfoncer le pays dans un système néo-féodal.

 

Mais, me direz-vous, ne faut-il pas prendre en compte le contexte historique, culturel et social du pays ? Ne faut-il pas admettre que dans ce contexte la seule manière d’agir – ce qui suppose de conserver le pouvoir – soit celle choisie par Chavez ? Peut-être. Mais ce type de raisonnement conduit fatalement à admettre n’importe quoi et accepter que nous vivons dans le meilleur des mondes ou, du moins, dans le seul monde possible. Et c’est là que nous sommes rejoints par le fantôme de Staline. Lorsqu’on juge l’action du “petit père des peuples”, ne faut-il pas aussi appliquer la même règle ? Ne faut-il pas excuser Staline au nom d’une continuité avec les traditions politiques russes (3) où l’assassinat politique et la déportation en Sibérie étaient chose banale depuis le XVIIIème siècle ? Et si l’on exige de Staline une rupture avec la tradition politique de son pays, pourquoi ne pas exiger la même chose de Chavez ?

 

Reste une question à laquelle il est difficile de répondre. Pourquoi la figure de Chavez exerce-t-elle une telle fascination sur une partie de la “gauche radicale” ? Comment une expérience aussi éloignée par son contexte et par son fonctionnement de notre propre tradition politique arrive-t-elle à être érigée en “modèle” ? Je pense qu’il y a à cette fascination deux raisons. La première est assez paradoxale: c’est l’attachement de la gauche française à une vision bonapartiste du pouvoir.  La gauche souffre de l’idée qu’une loi qu’elle juge “bonne” ne soit pas possible parce qu’elle viole la Constitution, qu’une mesure qu’elle juge “juste” ne soit pas réalisable parce qu’elle viole des droits fondamentaux. L’idée à gauche est que le gouvernant – du moins le gouvernant “de gauche” – doit pouvoir tendre le doigt et dire “je le veux”, et les choses se faire (4). Chavez – avec d’autres représentants de la nouvelle gauche latinoaméricaine comme Evo Morales – incarne justement cet penchant bonapartiste, qui tend à universaliser la formule léniniste selon laquelle “la fin justifie les moyens”. Dans une Amérique Latine où les Etats sont généralement faibles, on peut tout réformer d’un simple trait de plume. Comment une telle possibilité ne séduirait-elle nos gauchistes pétris de bonne conscience et convaincus de pouvoir faire le bonheur des gens malgré eux ? Derrière cette vision se cache cependant un danger: les barrières constitutionnelles et autres qui empêchent de tout réformer d’un trait de plume sont là non pas pour gêner nos “révolutionnaire citoyens”, mais pour protéger les droits de chacun d’entre nous. Qu’en Amérique Latine on puisse s’affranchir aussi facilement de ces limitations n’est pas quelque chose qui mérite d’être imité, mais un danger qu’il importe d’éviter…

 

Mais la fascination qu’exerce un Chavez est incompréhensible si l’on ne prend pas en compte l’envie de croire – à mon sens, la force la plus puissante qui n’ait jamais existé sur cette terre. Depuis que Dieu est mort (5), on se cherche des divinités – et des pères – de substitution. Nous avons tous envie de croire dans une figure tutélaire, qui connaît tout et qui a une solution à tous les problèmes. Et surtout, qui est infaillible. Car c’est cela qui caractérise aujourd’hui le rapport de cette “gauche radicale” avec Chavez, comme elle caractérisait hier ses rapports avec Staline, Mao, Che Guevara (ou Pol Pot pour les plus atteints, genre Badiou) ou même Mitterrand. Tous ces personnages avaient une qualité quasi-magique – qu’on attribuait elle aussi aux rois de droit divin: l’incapacité de mal faire (6). Seulement, pour que l’illusion puisse tenir il faut que la foi manie les ciseaux pour découper tout ce qui dépasse. Et elle sait y faire: hier, on a vait pu faire comme si les morts du Goulag ou la Révolution Culturelle n’avaient jamais existé. Plus proches de nous, le Mitterrand de Vichy avec sa Francisque, celui de l’Observatoire et des amitiés affairistes, celui de l’Algérie Française et ses copains de l’OAS a miraculeusement disparu derrière l’image paternelle de “Tonton”, homme de gauche “viscéral” et stratège génial. Chavez aujourd’hui – ou du moins jusqu’à hier – joue ce rôle. Et les ciseaux de la foi ont encore fonctionné, découpant tout ce qui peut nous rappeler chez Chavez le “populisme rentier” pour ne laisser que le “comandante” révolutionnaire et aimé de son peuple.

 

Voilà pourquoi, à mon sens, le “comandante” Chavez ne peut et ne doit pas être un “modèle” pour une gauche qui fait de l’émancipation humaine son objectif. Le système chaviste – comme tous les systèmes clientélistes – est un système pervers: il échange une diminution de la pauvreté contre une aliénation totale à la figure d’un “chef” indiscutable et indiscuté. Les scènes d’hystérie qui ont suivi l’annonce de la mort de Chavez devraient de ce point de vue nous alerter. Dans une société saine et libre, il n’y a pas d’hommes indispensables.

 

Descartes

 

 

(1) “Le Parti de Gauche salue la mémoire et l’oeuvre histoirque d’Hugo Chavez” chez le PG, “Le décès de Hugo Chavez, une grande perte pour le Vénézuéla et pour l’Amérique latine tout entière” chez le PCF.

 

(2) D’ailleurs, nous n’avons pas besoin d’aller aussi loin que l’Amérique Latine pour comprendre ce fonctionnement. Nous avons bien des exemples dans nos propres collectivités locales, où certains maires, présidents de conseils généraux et régionaux jouent au même jeu avec, bien entendu, de l’argent public. Dans ces collectivités, lorsqu’une association reçoit une subvention celle-ci est souvent accompagnée d’une lettre du “notable” ne laissant aucune ambiguïté sur le fait que celle-ci est le résultat d’une décision personnelle et que le récipiendaire ferait bien de s’en souvenir… Croyez-vous vraiment que ces “notables” soient enclins à réformer le système qui les fait vivre ?

 

(3) Car on oublie le niveau de violence politique et sociale de la Russie au cours du XIXème et début du XXème siècle. Lorsque Staline nait, le servage, qui concernait 40% de la population russe lors de son abolition, n’a disparu en Russie que depuis 17 ans (1861). Le magnicide et le meurtre est un mode habituel de gestion des conflits entre les différents fractions politiques. Les attentats terroristes sont chose courante pendant le régime tsariste (Alexandre II, par exemple, sera victime de six tentatives, dont la dernière réussie…) et cela ne cesse pas après la Révolution. Ainsi, Lénine sera victime d’un attentat le 30 août 1918.

 

(4) Ce syndrome ne touche pas que la “gauche radicale”, mais est commun à toute la gauche. La meilleure illustration est la réaction lorsque le Conseil constitutionnel annule une mesure qu’elle estime “juste”. Les arguments pour l’annulation ne sont jamais pris en compte. On préfère crier au “complot réactionnaire”. Voir par exemple l’affaire de la QPC sur le délit d’harcèlement sexuel, que j’ai commenté en son temps sur ce même blog.

 

(5) Remarquez, pas pour tout le monde. Les discours de Chavez, par exemple, sont truffés de mentions à la “divina pastora” (nom donné au Vénézuela à la Vierge Marie), à Jesucrist et autres bondieuseries du même acabit. Il est toujours drôle de constater que certains qui à gauche ont l’indignation facile sur le discours de Latran mais se pâment devant des discours comme celui de Chavez ou de Maduro, avec une bondieuserie toutes les trois lignes.

 

(6) D’ailleurs, le simple fait d’insinuer qu’ils avaient pu se tromper – ou pire – vous valait l’excommunication. Non: s’ils avaient fait ce qui pouvait sembler aux non-initiés comme une bourde, c’est qu’il s’agissait d’une stratégie géniale incompréhensible au profane. Ou alors qu’ils avaient été trompés par des incapables ou des traîtres parmi leurs seconds. Où qu’ils avaient été contraints par les circonstances. La simple idée que Mao ou Guevara aient pu mal faire par erreur, par intérêt ou simplement par bêtise était impensable.

 

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52 réponses à Le petit chat est mort

  1. Mohican dit :

    Très bon billet qui montre bien les limites de la personnalisation du pouvoir.

    Je me demande si l’anti-américanisme n’est pas un facteur de plus pour expliquer l’amour de la gauche “radicale” pour Chavez : l’opposition frontale à l’Empire, ça fait toujours un tabac chez
    nous, ça évoque le discours de de Gaulle à Pnom Penh en 1966, le bon vieux temps du rock’n roll et de la guerre froide.

    Cela dit, les Latino-américains ont des raisons tout à fait valables de détester les yanquis.

    Avant que Chavez soit à la mode, il y a de ça une vingtaine d’années, c’était le sous-commandant Marcos qui était furieusement tendance et à l’époque certaines de ses groupies poussaient le
    mimétisme jusqu’au port du passe-montagne ; encore avant c’était le Che qui fit la fortune des marchands de posters (la photo de Korda).

    Bruckner avait raison de parler de “bovarysme tropical” même si c’est un peu cruel.

    • Descartes dit :

      Je me demande si l’anti-américanisme n’est pas un facteur de plus pour expliquer l’amour de la gauche “radicale” pour Chavez : l’opposition frontale à l’Empire, ça fait toujours un tabac chez
      nous, ça évoque le discours de de Gaulle à Pnom Penh en 1966, le bon vieux temps du rock’n roll et de la guerre froide.

      L’anti-américanisme peut expliquer un intérêt… mais certainement pas le genre d’adoration irrationnelle qu’on a pu observer chez certains pour Chavez. Je vous invite à lire les commentaires sur
      le blog de Jean-Luc Mélenchon. J’extrais certains des plus amusants:

      Dans toutes les villes, demandons qu’il y ait des rues Chavez, encore mieux, dans une voie non dénommée, les habitants peuvent signer une pétition dans ce sens.

      Ou encore:

      Pour moi, monsieur Hugo Chavez n’est pas qu’un grand homme, parce que les grands hommes changent le cours de l’histoire, alors que lui a changé le cours de l’histoire de la vie des pauvres
      gens comme jamais personne ne l’avait fait auparavant. Il nous a redonné l’envie de ne plus jamais baisser la tête. Il a fait de nous tous des frères en nous rendant notre identité et en nous
      rappelant que nous étions des êtres humains. Hugo Chavez est un homme immense et il restera pour nous tous, qui aspirons à vivre pour autre chose que le vénal, la véritable lumière de la liberté!
      L’action d’Hugo Chavez ne fait que commencer et bientôt son écho se répercutera dans notre quotidien comme dans celui des Vénézueliens. Les hommes politiques de ce monde ne sont que des pantins
      lâches dont l’hypocrisie n’a d’égale que leurs intérêts égoïstes quand lui est et restera un homme digne de ce nom quoi qu’il arrive. A sa suite, nous resterons des hommes, nous aussi, parce que
      le courage, la “force du coeur” n’appartient qu’à ceux qui le détiennent vraiment et qui désirent le partager! L’amour, l’altruisme, la gratitude, la compassion, la gentillesse, la générosité, le
      partage, l’amitié, la convivialité et le respect d’autrui font de Hugo Chavez, notre ami. Un ami que nous pleurons et que nous avons désormais à coeur de suivre la voie qu’il nous a tracée
      !
      Vive la Révolution Citoyenne et Vive la Liberté des Peuples!

      Au delà du kitch de ce genre de textes, vous remarquerez qu’il y a bien plus qu’une simple adhésion politique. Parler de “l’amour, l’altruisme, la gratitude” (?), la compassion, la
      gentillesse, la générosité, le partage (??), l’amitié, la convivialité” de quelqu’un qu’on ne connait que de loin et par des articles dans les journaux, cela correspond plus à une
      idéalisation qu’à un discours sur une personne réelle. Et que penser du “lui a changé le cours de l’histoire de la vie des pauvres gens comme jamais personne ne l’avait fait auparavant”,
      à part que l’auteur de ces lignes connaît bien mal l’histoire ?

      Bruckner avait raison de parler de “bovarysme tropical” même si c’est un peu cruel.

      Pas assez cruel, à mon avis…

  2. CVT dit :

    Bonsoir Descartes,

    on dirait vous avez trempé votre plume dans de l’acide, ce soir: “le petit chat est mort” comme titre, vous êtes cruel! Vous n’avez pas repris deux fois des moules ?

    J’ai beaucoup de mal avec votre analogie bonapartiste: dieu sait si je déteste particulièrement le personnage de l’empereur, et qu’en bon Corse, il avait attribué force prébendes à ses obligés
    (il a bien inventé la légion d’honneur…), mais Bonparte avait le sens de l’Etat (même à son profit…) et des institutions: le code civil et les préfectures en sont la parfaite illustration.

    Ironiquement, ces deux institutions ont été minées (voire mitées) par les 68-ards dont une partie des descendants font l’éloge de Chavez, eux qui tout comme le “regretté” Commandante, n’ont
    aucun sens des institutions. Voilà pourquoi j’ai du mal à percevoir en quoi l’attitude des “gauchistes chavistes” est bonapartiste, d’autant plus qu’ils sont souvent girondins…

    Pour ma part, j’ai eu de la sympathie au début pour Chavez, car il était moins “goinfre” que ses prédecesseurs quand il s’agissait de répartir les revenus du pétrole; mais dès lors qu’il a opéré
    un changement de constitution pour se faire réélire ad libitum, j’ai fini par changer d’avis, et surtout, j’ai compris que son personnage était un mix de Juan Peron pour la démagogie et le
    populisme, et d’Omar Bongo pour le paternalisme la rente pétrolière…

    • Descartes dit :

      on dirait vous avez trempé votre plume dans de l’acide, ce soir

      C’est peut-être mon éducation anticléricale qui ressort… vous savez, je ne peux pas résister à la tentation de piétiner les hosties. Surtout quand je vois tous ces bigots…

      J’ai beaucoup de mal avec votre analogie bonapartiste: dieu sait si je déteste particulièrement le personnage de l’empereur, et qu’en bon Corse, il avait attribué force prébendes à ses
      obligés (il a bien inventé la légion d’honneur…), mais Bonparte avait le sens de l’Etat (même à son profit…) et des institutions: le code civil et les préfectures en sont la parfaite
      illustration.

      Il y a l’homme et ses circonstances. Mais vous êtes injuste en voyant dans l’empereur un “clientéliste”. Au contraire: s’il a donné des prébendes, c’est moins à ses “obligés” qu’à ceux qui le
      servaient avec dévouement et compétence. L’armée napoléonienne fut la première armée “méritocratique” française, où le fils d’un petit marchand de biens, ancien apprenti teinturier, pouvait
      devenir maréchal. Et s’il est vrai qu’il a “placé” un certain nombre de membres de sa famille, il l’a fait plus pour des raisons de fidélité personnelle – un membre de votre famille a moins de
      chance de vous trahir – que par clientélisme.

      Bonaparte avait certainement le sens de l’Etat. Et surtout, en bon jacobin, il avait le sens des institutions. Le Code Civil et le Code Pénal, bien sur, le corps préfectoral, les lycées, le
      “franc germinal”… Voici d’ailleurs un extrait de l’un de ces discours qui montre combien il était sensible à l’idée qu’un Etat avait besoin d’institutions fortes, ce qu’il appellait “les masses
      de granit”:

      « On a tout détruit, il s’agit de recréer. Il y a un gouvernement, des pouvoirs, mais tout le reste de la nation, qu’est-ce ? Des grains de sable. Nous sommes épars, sans système,
      sans réunion, sans contact. Tant que j’y serai, je réponds bien de la République, mais il faut prévoir l’avenir. Croyez-vous que la République soit définitivement acquise ? Vous vous
      tromperiez fort. Nous sommes maîtres de la faire, mais nous ne l’avons pas, et nous ne l’aurons pas, si nous ne jetons pas sur le sol de France quelques masses de granit. »
      (discours au Conseil d’Etat, pendant la discussion du projet de loi sur la Légion d’Honneur le 8 mai 1802).

      Il y en a beaucoup, surtout à gauche, qui ont a du mal à pardonner à Napoléon d’avoir mis fin au régime républicain et avoir créé l’Empire. Je ne partage pas ce sentiment. Après le “grand
      désordre” de la Révolution, il fallait donner au pays un régime qui ait une certaine stabilité. En tout cas, si l’on juge aux résultats, Napoléon a certainement posé les bases de l’Etat
      méritocratique et efficace qui a permis à la France de briller parmi les nations au XIXème et XXème siècles et qui, même diminué par les libéraux, nous sert d’épine dorsale aujourd’hui.

      Voilà pourquoi j’ai du mal à percevoir en quoi l’attitude des “gauchistes chavistes” est bonapartiste, d’autant plus qu’ils sont souvent girondins…

      Le terme “bonapartisme” ne résume pas la pratique politique de l’Empereur. En fait, elle a été utilisé surtout pour caractériser la doctrine de Napoleon III. Il s’agit d’une idéologie politique
      souhaitant un exécutif fort n’étant limité par aucun contrôle et légitimé directement par le peuple par le biais du plebiscite. Le chavisme peut être dit “bonapartiste”. Bien entendu, il y avait
      chez Bonaparte bien plus que ce qu’on appelle aujourd’hui “bonapartisme”…

      Je n’ai peut-être pas insisté sur le fait que le “bonapartisme” de la gauche est paradoxal. D’un côté, la gauche ressent comme injustes et réactionnaires les contrôles de constitutionnalité et
      autres barrières juridiques, et réclame – lorsqu’elle est au pouvoir – une liberté absolue pour gouverner comme elle l’entend. D’un autre côté, elle critique dans le régime de la Vème République
      les larges pouvoirs donnés à l’exécutif et se prononce souvent pour une révalorisation du rôle du Parlement qui aboutit à un régime d’assemblée. En fait, on s’aperçoit que la gauche n’a pas de
      réflexion globale sur la question institutionnelle, et que son positionnement dépend du rapport de forces: lorsqu’elle est aux affaires, elle est bonapartiste, lorsqu’elle est dans l’opposition,
      elle est parlementariste.

  3. Marencau dit :

    Bonjour Descartes,

     

    Bon résumé sur la situation au Vénézuela ! Il faut reconnaître que ce sujet enflamme la galaxie “front de gauche” sur internet. Maintenant que le PCF a bazardé entre autres la faucille et le
    marteau, peut-être pourrait-on renommer la place du colonel Fabien en place du presidente Chavez ? Une distribution de la rente (“de l’argent il y en a”) sans penser et planifier l’avenir
    (l’industrie: beurk), voilà de quoi plaire à nos joyeux compères gauchistes. On pourrait même avec un petit effort rendre cela compatible avec la décroissance. D’ailleurs, la contradiction entre
    “il est formidable il baisse le prix de l’essence pour tous” avec “il faut taxer le pétrole pour la transition énergétique” ne semble choquer personne. En fait, cela permet d’une certaine manière
    d’imaginer ce que ferait le FDG au pouvoir: distribuer et “relancer la consommation” sans se soucier de la balance commerciale et ayant retenu des politiques keynésiennes que le mot “dépenser”.
    Je n’ose imagine le désastre.

     

    Mais ce qui est désespérant c’est qu’au lieu d’analyser la situation, de comprendre comment un “Chavez” a été rendu possible, ce qu’on peut tirer de l’expérience, les discussions dans les médias
    tournent plutôt autour de “alors Chavez… bien ou mal ? Démocrate ou dictateur ?”. Le manichéisme ambiant m’agace profondément. Chavez n’était certainement pas un modèle à suivre pour “la
    révolution populaire” et qui est à 1000 lieues de notre conception de la politique Européenne mais ça ne va pas dire qu’il rentre dans la case “tout noir” automatiquement. Après tout, il a tout
    de même lancé une campagne d’alphabétisation et donné aux Vénézuéliens plus qu’ils n’aient jamais eu… même si c’était calculé pour son profit personnel, c’est le résultat qui compte et ce n’est
    pas si mal par rapport à ce qui a pu être fait avant.

     

    Au fait… j’étais étonné de ne pas te voir à la chaîne humaine pour sortir du nucléaire à Paris 😉 non plus sérieusement, désolé pour le hors-sujet mais j’étais furieux de voir les journalistes
    laisser répéter en boucle à la télé que le nucléaire était trop cher, dangereux, et qu’on ne savait pas quoi faire des déchets. Personne ne serait-ce que pour sortir le rapport de la cour de
    comptes ? Vraiment ? Aussi… est-ce que tu as vu cette histoire de thyroïdes contaminées chez énormément d’enfants à Fukushima ? Ça me paraît louche cette histoire… la population n’a pas été
    exposée à des doses à risques, je ne vois pas d’où ça peut venir… sans même prendre en compte le régimé iodé des enfants Japonais. Enfin bref, nouvelle petite démonstration de force de
    l’obscurantisme…

    • Descartes dit :

      D’ailleurs, la contradiction entre “il est formidable il baisse le prix de l’essence pour tous” avec “il faut taxer le pétrole pour la transition énergétique” ne semble choquer personne.

      N’est ce pas ? Il y a pire: d’un côté tout le monde affirme qu’il faut en finir avec le pétrole, réduire nos consommations et aller vers les énergies décarbonnées. D’un autre, chaque fois qu’une
      raffinerie ferme – et si elles ferment, c’est bien parce que la consommation de produits pétroliers baisse – les mêmes exigent que l’activité soit maintenue…

      En fait, cela permet d’une certaine manière d’imaginer ce que ferait le FDG au pouvoir: distribuer et “relancer la consommation” sans se soucier de la balance commerciale et ayant retenu des
      politiques keynésiennes que le mot “dépenser”. Je n’ose imagine le désastre.

      C’est bien le problème. Aujourd’hui, le PCF et le PG sont des partis représentant essentiellement les couches moyennes. Des couches qui n’ont un mot à la bouche: “consommer”. Du coup, la relance
      par la consommation est devenue l’alpha et l’oméga des propositions économiques du FdG. Ayant décreté que “la dette n’est pas un problème” (il suffit de la déclarer “illégitime”, on la paye pas
      et le tour est joué), on peut alors se permettre d’ignorer le déséquilibre entre ce qu’on consomme et ce qu’on produit. C’est le dégré zéro de la réflexion économique.

      Le manichéisme ambiant m’agace profondément.

      Moi aussi. Surtout lorsqu’il se pare d’une bonne conscience absolue qui permet de donner des leçons.

      Après tout, il a tout de même lancé une campagne d’alphabétisation et donné aux Vénézuéliens plus qu’ils n’aient jamais eu… même si c’était calculé pour son profit personnel, c’est le
      résultat qui compte et ce n’est pas si mal par rapport à ce qui a pu être fait avant.

      C’est vrai… un peu comme Mussolini, qui avait réussi à faire arriver les trains italiens à l’heure. Jamais les italiens n’auront eu des services ferroviaires aussi ponctuels… 😉

      La question n’est pas de savoir si Chavez était “bon” ou “mauvais”. La question est de comprendre comment le chavisme fonctionnait. Chavez a certainement fait des choses qui, si l’on juge
      uniquement les résultats – ou les objectifs – ne sont pas mauvaises en soi: l’alphabétisation, la réduction de la pauvrété sont bien entendu des choses souhaitables. La question est plutôt du
      rapport qualité/prix de ces politiques.

      désolé pour le hors-sujet mais j’étais furieux de voir les journalistes laisser répéter en boucle à la télé que le nucléaire était trop cher, dangereux, et qu’on ne savait pas quoi faire des
      déchets. Personne ne serait-ce que pour sortir le rapport de la cour de comptes ?

      Tu sais… je suis tellement habitué que je n’arrive même pas à m’indigner. Chaque fois qu’il y a un accident médicamenteux, nos “experts” médiatiques nous expliquent combien les médicaments sont
      dangereux, sans nous expliquer qu’accessoirement pour chaque médicament qui tue il y a des centaines qui sauvent des milliers de vies chaque jour. A chaque anniversaire de Tchernobyl ou de
      Fukushima, on nous explique combien le nucléaire est cher, dangereux et inutile, et personne ne vient nous dire que depuis trente ans le nucléaire nous permet de bénéficier d’une énergie
      abondante, bon marché, peu polluante et sûre. Et ainsi de suite. Non seulement nous avons épousé les politiques budgétaires de l’Allemagne, nous avons aussi incorporé la détestation de la science
      caractéristique du romantisme allemand. Heureusement que contrairement à nos classes bavardantes, le peuple français reste profondément cartésien…

      Aussi… est-ce que tu as vu cette histoire de thyroïdes contaminées chez énormément d’enfants à Fukushima ?

      Ca ne m’étonne pas trop. Chez l’enfant, l’iode radioactif se fixe tres fortement dans la tiroïde, donc une contamination préférentielle ne paraît pas déraisonnable. Mais il faut relativiser les
      effets: si la contamination augmente les risques de cancer, les cancers de tiroïde de l’enfant sont parmi ceux qui ont le taux de guérison le plus élévé…

       

  4. dafdesade dit :

    “Le monde gagnerait à avoir plus de dictateurs comme Chavez”, selon Lurel

    • Descartes dit :

      Il a dit plus que ça:

      «on peut ne pas être d’accord avec telle ou telle action de Hugo Chavez mais les gens sont fiers de ce qui a été fait en 14 ans» (…) «Toute chose égale par ailleurs, Chavez c’est
      de Gaulle plus Léon Blum. De Gaulle parce qu’il a changé fondamentalement les institutions et puis Léon Blum, c’est-à-dire le Front populaire, parce qu’il lutte contre les injustices». «Moi je
      dis, et ça pourra m’être reproché, (…) que le monde gagnerait à avoir beaucoup de dictateurs comme Hugo Chavez puisqu’on prétend que c’est un dictateur. Il a pendant ces 14 ans respecté les
      droits de l’Homme»

      J’avoue que la question de savoir si Chavez était où non un “dictateur” me laisse indifférent. C’est une variante de plus d’une méthode de raisonnement binaire qui réduit le jugement de
      l’histoire à celui d’un tribunal: “coupable ou non coupable”. C’est un démocrate ? Alors c’est bien. C’est un dictateur ? Alors c’est mal. Et voilà, plus rien à dire. En fait, “dictateur” ou pas,
      on s’en fout. Napoléon Ier fut un dictateur. Il n’a jamais gagné une élection. Pétain, au contraire, fut investi par les chambres parlementaires. Et alors ? Lequel des deux a le plus fait pour
      organiser la France, pour la doter d’institutions ?

      Je ne dis pas qu’il ne faille pas défendre la démocratie. Ce que je dis est que l’histoire est beaucoup trop complexe pour se contenter, à l’heure d’apprécier l’oeuvre d’un individu, de se fonder
      sur des critères formels. Chavez a organisé des élections libres, c’est incontestable. Comme c’est incontestable qu’il a acheté les voix avec la “manne” pétrolière. On peut se demander à l’infini
      si un système clientéliste reste un système “démocratique” dès lors qu’il respecte les paramètres formels de la démocratie (élections libres, liberté d’expression, etc.). Personnellement, je ne
      le pense pas. Mais si Chavez laissait derrière lui une oeuvre comparable à celle de Napoléon, de De Gaulle ou même de Blum, je serais prêt à pleurer à sa mort. Mais ce n’est pas le cas: Chavez a
      construit sur du sable. S’il a réduit la pauvreté, c’est parce qu’il a distribué la manne pétrolière. Et ça marchera aussi longtemps que la distribution continue. Le jour où la distribution
      s’arrête – que ce soit parce que son successeur le décide, ou tout simplement parce que le prix du pétrole baisse – les ex-pauvres reviendront à la pauvreté.

      De ce point de vue, il n’est pas inutile de regarder comment se sont terminées les expériences populistes du même type. L’Argentine de 1944-52 était très similaire à la situation vénézuelienne:
      l’Europe détruite par la guerre avait un besoin desespéré “des blés et des viandes” argentines, et Peron se vantait qu’on ne pouvait pas circuler dans les coffres de la Banque Centrale, tant l’or
      s’y accumulait. Peron finance pendant cette période d’ambitieux programmes de redistribution (assurances sociales, logement, distributions de toutes sortes de denrées…). Et contrairement à
      l’idée répandue en Europe, Peron n’était nullement un dictateur, et organisait régulièrement des élections ou tous les partis étaient autorisés à se présenter et les gagnait régulièrement. Comme
      Chavez, il modifia la Constitution pour pouvoir se faire réélire en 1949 et organisa pour cela une véritable constituante, ou même les communistes étaient représentés. Mais avec la reconstruction
      de l’Europe, la roue tourne et entre 1952 et 1955 la rente devient insuffisante pour acheter l’adhésion de la classe ouvrière. La situation se radicalise, avec une montée des revindications que
      le gouvernement est impuissant à satisfaire. Peron cherchercha a rejeter la responsabilité sur “l’oligarchie”, ce qui provoquera des émeutes ou l’on mettra le feu aux institutions traditionnelles
      de la haute bourgeoisie (comme le Jockey Club) mais aussi à un certain nombre d’églises, l’Eglise étant l’alliée traditionnelle de l’oligarchie. Dans cette situation de quasi-guerre civile, les
      classes moyennes prennent peur, retirent leur appui à Peron, et celui-ci est renversé par l’armée en 1955…

  5. bernard dit :

    bonjour Descartes très bonne analyse mais le pire dans tout ça c est quand on aborde ce sujet ou sur celui de l euro avec bon nombre de dirigeants politiques ou syndicaux a gauche on se fait
    taxer de le pen et de l éternel c est le faute des PATRONS et il faut construire l Europe Sociale , beaucoup de postures qui ne font pas avancer !

    • Descartes dit :

      Qui vous a dit que la politique c’était facile ? Les gens ont des schémas de pensée qui correspondent à leurs intérêts. Les dirigeants politiques ou syndicaux appartiennent – comme la plupart de
      leurs militants – à des couches sociale’s qui n’ont aucun intérêt à ce que les choses changent: ils ont bien profité et continuent à profiter de l’Euro et de la construction européenne. Alors
      quoi d’étonnant à ce qu’ils proposent des utopies, comme l’Europe sociale ? C’est la meilleure manière de s’assurer que rien ne change…

      La grande crainte de ces couches sociales, c’est qu’on les tienne pour repsonsables du désastre actuel. C’est pourquoi elles marquent chaque fois que c’est possible qu’elles sont “du côté des
      pauvres” et donc quel a faute est chez les “autres”: Patrons, dirigeants, hauts fonctionnaires… On a même fait une théorie du “peuple classe” déclarant que les classes moyennes et les couches
      populaires avaient les mêmes intérêts… c’est dire!

  6. bernard dit :

    ça me convient que ce ne soit pas facile et ça me conforte dans mes reflexions de trouver sur ce blog  des analyses credibles , et meme dans le syndicat c est devenu un catalogue , gays ,
    sans papiers,femmes, jeunes, precaires, sans vrai analyse des causes du desastre qui avance a grand pas et sans la realité du terrain , merci a vous !

  7. CVT dit :

    Qui vous a dit que la politique c’était facile ? Les gens ont
    des schémas de pensée qui correspondent à leurs intérêts. Les dirigeants politiques ou syndicaux appartiennent – comme la plupart de leurs militants – à des couches sociale’s qui n’ont aucun
    intérêt à ce que les choses changent: ils ont bien profité et continuent à profiter de l’Euro et de la construction européenne. Alors quoi d’étonnant à ce qu’ils proposent des utopies, comme
    l’Europe sociale ? C’est la meilleure manière de s’assurer que rien ne change…

    Je serais presque d’accord avec ce que vous dites, mais j’ai deux réserves: la première, c’est que le discours de l’Europe sociale, cela fait près de trente ans qu’on l’entend, et sans résultat.
    Du coup, presque plus aucun Français n’est dupe, plus personne n’y croit! D’ailleurs, ça se reflète par les urnes…

    Ce qui m’amène à ma deuxième réserve: la sincérité de ceux qui énoncent cet idéal. Pour avoir été membre du PG, je crois que, malheureusement, pas mal de militants sont sincères et ne
    regardent ABSOLUMENT pas la réalité des conséquences des politiques pour lesquels ils prêchent: je songe par exemple au maintien de l’euro… C’est typique d’une pensée gauchiste. Mais en
    revanche, je doute fort de la sincérité des dirigeants politiques qui tiennent le discours de l’Europe sociale car certains d’entre eux ont eu des mandats d’élus, et savent ce qu’il en
    est vraiment: que l’expression d'”Europe Sociale” est un oxymore! Je veux bien que des responsables de partis écoutent leurs troupes, mais elles n’ont pas forcément à leur obéir quand ces
    dernières se font des illusions…

    • Descartes dit :

      Mais en revanche, je doute fort de la sincérité des dirigeants politiques qui tiennent le discours de l’Europe sociale car certains d’entre eux ont eu des mandats d’élus, et savent
      ce qu’il en est vraiment: que l’expression d'”Europe Sociale” est un oxymore!

      Je ne suis pas aussi convaincu que vous. Il y a bien des physiciens qui dans leur laboratoire sont des cartésiens stricts, et qui en dehors croient en Dieu et vont à l’église. J’ai eu le
      privilège de fréquenter un certain nombre d’hommes politiques, et je peux vous assurer qu’au delà du discours convenu, il y en a qui croient vraiment à ce qu’ils racontent. Notamment sur
      l’Europe, qui est devenue pour certains – je pense à Jean Arthuis, par exemple, une sorte de religion laïque. Comme je l’ai dit souvent ici, l’envie de croire est la force la plus puissante que
      je connaisse.

  8. Jean Bricmont dit :

    Pour un autre point de vue sur Chavez (et sur cette magnifique France, où l’état se porte paraît-il si bien), nuancé et pas hagiographique:

    http://www.u-p-r.fr/actualite/monde/le-venezuela-avant-et-apres-hugo-chavez

    Et aussi sur son prédécesseur, tellement proche de la gauche européenne.

    Puis il faut penser à tous ces gens qui n’ont pas eu la chance de naître dans ce pays si bien ordonné (la France) et qui sont reconnaissants à Staline pour la victoire contre le facsisme et
    l’indistrailisation de l’Urss, à Mao pour la victoire contre le féodalisme et le colonialisme, à Chavez pour la “simple” redistribution des richesses et surtout pour son opposition à
    l’impérialisme américain et au sionisme. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des parents français.

     

    • Descartes dit :

      Pour un autre point de vue sur Chavez (et sur cette magnifique France, où l’état se porte paraît-il si bien),

      Vous savez, ce genre d’ironie, ça ne marche pas avec moi. Oui, je suis convaincu que la France est magnifique. Oui, je pense que les choses fonctionnent relativement bien chez nous. Bien sur,
      c’est très loin d’être parfait et beaucoup de choses vont mal. Mais je vois dans ce constat un encouragement à agir pour les améliorer, et non à me frapper la poitrine, à faire répentance et
      encore moins à débiner mon pays comme le veut le déclinisme ambiant. Je laisse à d’autres les gémissements permanents sur le mode “faut faire comme l’Allemagne” ou “faut faire comme au
      Vénézuela”, discours qui, sous l’apparence d’une opposition radicale, sont en fait les deux faces de la même médaille, celle de la “haine de soi”.

      nuancé et pas hagiographique: http://www.u-p-r.fr/actualite/monde/le-venezuela-avant-et-apres-hugo-chavez. Et aussi sur son prédécesseur, tellement proche de la gauche européenne.

      Pour de la nuance, en effet, c’est de la nuance. On ne trouve dans ce texte pas une, je dis bien, pas une seule critique précise du bilan de Chavez ou de son action. Pas une seule. Pourtant, on
      pourrait penser qu’une vision “nuancée et pas hagiographique” aurait pu analyser le régime mis en place ces quinze dernières années et que cela aurait conduit nécessairement à mettre en exergue
      des points positifs et des points négatifs…

      Mais ce n’est pas la logique de cet article, et ce n’est pas la votre non plus. Votre logique ici, je m’excuse de vous le dire, est celle de la guerre civile: on est avec vous ou on est contre
      vous. La moindre petite critique envers Chavez et son régime vous range forcément dans le camp de l’Ennemi. La seule attitude acceptable, c’est celle de la génuflexion acritique. Ou bien on
      chante les louanges de Chavez, ou bien on est un suppôt des américains et du sionisme. Je regrette, mais je refuse ce genre de vision. Je revindique le droit de pointer combien ce que Chavez a
      fait de positif (réduction des inégalités, de la pauvrété, de l’analphabétisme) est fragile du fait de sa conception politique du “caudillo” qui empêche toute éducation politique véritable, et de
      sa gestion populiste de la rente pétrolière. Vous pouvez ne pas être d’accord, mais de grâce ne me sortez pas les vieux trucs rhétoriques du genre “la France aussi est clientéliste”. Quand bien
      même ce serait vrai, quand bien même Hollande serait un démagogue brutal, menteur et sodomite, qu’est ce que cela changerait à l’heure d’analyser le régime chaviste ? Croyez-vous vraiment que
      pour jeter la pierre il faille être sans pêché ? Et dernière question: si au lieu de critiquer Chavez j’avais critiqué Bush ou Netanhiaou, m’auriez vous jeté à la figure les turpitudes d’Hollande
      et de la France en général ?

      Puis il faut penser à tous ces gens qui n’ont pas eu la chance de naître dans ce pays si bien ordonné (la France)

      Moi pour commencer. Vous savez, tous les français ne sont pas nés en France…

      et qui sont reconnaissants à Staline pour la victoire contre le facsisme et l’indistrailisation de l’Urss, à Mao pour la victoire contre le féodalisme et le colonialisme, à Chavez pour la
      “simple” redistribution des richesses et surtout pour son opposition à l’impérialisme américain et au sionisme.

      Et à Pol Pot pour sa victoire sur l’impérialisme américain. Et à Hitler pour  avoir sorti l’Allemagne de la crise économique et permis le retour au plein emploi. Les voies de la
      reconnaissance des gens sont comme les voies du seigneur, impénétrables.

      Comme je l’ai dit dans la réponse à un autre commentateur, on peut trouver de quoi être “reconnaissant” même dans le pire des salauds. La question n’est pas de savoir si Chavez a fait des bonnes
      choses, mais à quel prix. Je pense qu’en distribuant la rente au lieu de l’investir, Chavez a sacrifié une opportunité en or de moderniser son pays. Une opportunité qui risque de ne pas se
      représenter de sitot. C’est votre droit de ne pas être d’accord, et si c’est le cas j’aimerais entendre vos arguments. Qu’au lieu d’exposer ceux-ci vous vous abaissiez à des attaques du genre “en
      France aussi on est clientéliste” ou “tout le monde n’a pas la chance d’être français” est à mon sens un signe de la difficulté qu’éprouve une certaine gauche à se départir d’un raisonnement de
      guerre civile.

      Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des parents français.

      Pas moi, en tout cas. Encore une fois, votre ironie tombe à plat…

       

  9. Jean Bricmont dit :

    un exemple de comment fonctionne l’état en france-rien à voir avec le clientélisme:

    http://www.dailymotion.com/video/xy2v8m_hollande-le-cynisme-c-est-maintenant_news#.UTyheY5BPY4 

    • Descartes dit :

      Et alors ? Ok, Hollande est un salaud, cynique, vénal, il organise des orgies à l’Elysée, viole la bonne et bat le chien (ou l’inverse). Quel rapport avec Chavez ?

      Votre commentaire me rapelle un collègue israelien qui chaque fois qu’il entend critiquer le traitement des palestiniens par les israéliens répond “et vous, vous avez vu comment vous traitez les
      noirs ?” ou bien “et vous, comment vous avez traité les algériens ?”. Comme si pour critiquer un régime politique il fallait soi-même avoir les mains pures…

      Même si Hollande bat sa femme, j’ai quand même le droit de dire que Chavez bat la sienne. Faut arrêter avec le terrorisme intellectuel.

  10. Koko dit :

    C’est vrai, ces latino-américains sont des vrais attardés pour pleurer tant un dirigeant. Il vaut mieux pleurer Lady Di ou Mickael Jackson comme dans nos sociétés occidentales évoluées.

    • Descartes dit :

      C’est vrai, ces latino-américains sont des vrais attardés pour pleurer tant un dirigeant. Il vaut mieux pleurer Lady Di ou Mickael Jackson comme dans nos sociétés occidentales évoluées.

      Tout à fait. Il est triste que les gens dépendent émotionnellement d’une star de la chanson ou d’une princesse de conte de fées au point de tomber dans l’hystérie à leur mort. Mais au moins la
      star et la princesse n’avaient pas le pouvoir de gouverner. Lorsque la dépendance émotionnelle s’établit avec le gouvernant, l’affaire est infiniment plus sérieuse.

      Que les gens soient irrationnels à l’heure de choisir une chanson ou de mettre le portrait d’une princesse sur leur voiture, ce n’est pas très grave. A la rigueur, cela peut servir à un chanteur
      ou une princesse à leur piquer un peu d’argent. Mais lorsque l’irrationnel joue dans la sélection d’un gouvernant et dans l’appui ou non à ses politiques, c’est une toute autre affaire, ne
      trouvez-vous pas ?

    • Descartes dit :

      Qu’ils ne valent pas tripette. Non seulement parce que certaines de ces “vérités” sont fausses (points 31, 32, 26, 40 et la plus amusante, le numéro 45 qui déclare que “le Venezuela dispose de
      ses propres satellites (Bolívar et Miranda) et est désormais souverain dans le domaine de la technologie spatiale”). Mais surtout, parce que quelque soit le dirigeant qu’on puisse choisir, y
      compris les pires dictateurs de l’histoire, il est toujours possible de trouver 50 points positifs. Après tout, Hitler a réduit drastiquement la dette publique allemande, sorti son pays de la
      crise monétaire et de l’hyperinflation, réussi le plein emploi…

      La question n’est pas de savoir si Chavez a fait du bien. La question est de savoir à quel prix. On revient à l’éternel débat entre ceux qui veulent donner au peuple du poisson, et ceux qui
      pensent qu’il vaut mieux lui donner des filets et lui apprendre à pêcher. Chavez est dans le premier cas: en distribuant la rente pétrolière, il a indiscutablement réduit la pauvrété et les
      inégalités. Mais que se passera-t-il lorsque la rente s’épuisera ? N’aurait-on pu investir cette rente dans la formation, dans les infrastructures, dans la création d’une industrie et d’une
      agriculture modernes capable de faire vivre le pays indépendament de la rente ?

      Voilà la question que je voulais poser. Pour moi Chavez n’est ni bon ni mauvais, ni dieu ni diable. Il est ce qu’il est, et il faut comprendre comment fonctionne le chavisme pour en tirer les
      leçons, dont l’une est à mon avis qu’il ne devrait être un modèle pour personne.

  11. Baruch dit :

    Juste pour titiller: “Il y a bien des physiciens qui dans leur laboratoire sont des cartésiens stricts, et qui en dehors croient en Dieu et vont à l’église.”

    Descartes si j’ai bien lu et médité non seulement “croit” en Dieu, mais démontre l’existence de Dieu, il s’y prend même à deux fois dans les Méditations: “Et ,derechef, de Dieu qu’il
    existe”.

    “Il y a bien des physiciens qui dans leur laboratoire sont des cartésiens stricts, et qui en dehors croient en Dieu et vont à l’église.”

    Kant lui, montre que démonstration et croyance sont “extérieures” l’une à l’autre, savoir et croire ce n’est pas la même chose, qu’on ne peut démontrer l’existence de Dieu mais seulement qu’on
    peut y croire, et pour lui qu’on doit postuler la croyance.

    Donc tes physiciens ne sont que relativement cartésiens, et totalement Kantiens ! D’où la difficulté de l’usage de ce terme “cartésien”.

  12. Jo dit :

    Descartes, je vous trouve sévère. Il y a du vrai dans ce que vous dites, mais quand même… rien qu’à voir les réactions du patronat international, de la droite et du gouvernement français à sa
    mort (mis à part V. Lurel, antillais, et C. Taubira, guyanaise, comme par hasard), je me dis que ce qu’il a fait a bien entaillé leurs intérêts, matériels comme idéologiques.

    A cela s’ajoute que vous ne tenez pas compte des initiatives continentales qu’il a lancées, ni  de l’élan qu’il a donné à l’émancipation dans d’autres pays de la région, à l’économie certes
    moins rentière, mais avec autant de succès. A cela s’ajoute que si, oui, la manne pétrolière pouvait être utilisée pour moderniser l’économie, elle a cependant servi à former des cadres de
    haut-niveau, en généralisant l’accès à l’éducation, ce qui pose une des bases d’une économie socialiste performante. Idem pour l’accès à la santé : sans une main d’oeuvre en bonne santé, pas de
    progrès économique.

    Enfin, il faut dire que, contrairement à Staline puisque vous faites cette comparaison, Chavez a eu en face de lui une opposition qui n’a quand même jamais désarmé (c’est le moins qu’on puisse
    dire), et que, pour paraphraser Chirac (pardonnez-moi cette citation !), “chaque pas était un but en soi”. Autrement dit, malgré 14 ans de pouvoir, ce n’était pas une synécure que de, déjà,
    procéder à cette redistribution de l’argent, dont le peuple avait objectivement besoin.

    Après, c’est vrai, il faut s’atteler à construire l’Etat avec un E majuscule, mais, peut-être, le charisme de Maduro, à qui je souhaite vivement de gagner la présidentielle, n’étant pas celui de
    Chavez, c’est sur cette voie que le socialisme vénézuelien devra s’engager pour gagner définitivement.

    • Descartes dit :

      Descartes, je vous trouve sévère.

      J’avoue que la vue de gens intelligents se comportant comme des idiots me fait bouillir le sang. S’il n’y avait pas une partie de la gauche qui veut faire de Chavez un messie, je serais peut-être
      plus incliné à la tolérance. Mais quand j’entends les bêtises qu’on a dit ces derniers jours (Chavez l’égal de De Gaulle et Blum, rien que ça…)…

      rien qu’à voir les réactions du patronat international, de la droite et du gouvernement français à sa mort (mis à part V. Lurel, antillais, et C. Taubira, guyanaise, comme par hasard), je me
      dis que ce qu’il a fait a bien entaillé leurs intérêts, matériels comme idéologiques.

      C’est un peu l’argument que Badiou utilisa naguère pour défendre Pol Pot, et qu’on peut écrire sous la forme “un homme que mon ennemi déteste ne peut pas être mauvais”. Malheureusement, cela
      conduit vite à des paradoxes. Le patronat et la droite britannique on fait la fête en mai 1945 en aprennant la mort de Hitler. Quelle conclusion en tireriez vous ?

      A cela s’ajoute que vous ne tenez pas compte des initiatives continentales qu’il a lancées, ni  de l’élan qu’il a donné à l’émancipation dans d’autres pays de la région, à l’économie
      certes moins rentière, mais avec autant de succès.

      De quel pays parlez vous ? La Bolivie, l’Equateur, l’Argentine sont des économies de rente (gazière, pétrolière, agro-alimentaire respectivement). Si vous parlez des états de la caraïbe qui ont
      bénéficié de remises de pétrole bon marché, c’est une “émancipation” qui est dépendante de la rente. Le jour où la rente disparaît, on retourne au statu quo ante.

      Les “initiatives continentales” lancées par Chavez n’ont pour le moment qu’un caractère symbolique. Elles n’ont débouché sur aucun résultat concret.

      A cela s’ajoute que si, oui, la manne pétrolière pouvait être utilisée pour moderniser l’économie, elle a cependant servi à former des cadres de haut-niveau, en généralisant l’accès à
      l’éducation, ce qui pose une des bases d’une économie socialiste performante. Idem pour l’accès à la santé : sans une main d’oeuvre en bonne santé, pas de progrès économique.

      Vous posez là le vrai problème. Si Chavez avait comme vous dites utilisé la rente pour “former des cadres de haut niveau” et “généralisé l’accès à l’éducation”, je serais d’accord avec vous. Mais
      ce n’est pas ce qu’il a fait. Pour ce qui concerne la “formation des cadres de haut niveau”, elle est inexistente au Vénézuela. Au point que la compagnie pétrolière nationale PDVSA a du mal à
      trouver des techniciens et des ingénieurs de qualité. Ayant travaillé avec eux, je peux vous dire que le niveau de formation des dirigeants et des cadres supérieurs de la compagnie à
      désespérer. Même problème dans les industries éléctriques et gazières. Et je vous parle des secteurs que je connais bien, mais je n’ai pas de raison de penser que ce soit mieux dans les
      autres. Il faut d’ailleurs noter que l’administration chaviste n’est nullement une méritocratie: on ne promeut pas aux postes de direction ceux qui sont compétents, mais ceux qui ont montré la
      plus grande “ferveur révolutionnaire”. C’est là que la comparaision de Lurel entre Chavez et De Gaulle prend tout son sens…

      Pour ce qui concerne “généraliser l’accès à l’éducation”, là encore je crains que ce ne soit pas le cas. Il ne faut pas confondre l’alphabétisation avec l’accès à l’éducation. Si l’une est la
      condition de l’autre, elles ne se confondent pas. L’accès au savoir reste le monopole d’une toute petite élite. L’enseignement secondaire est très mauvais et les “universités populaires” sont en
      fait des sortes de MJC (j’avais commenté ce point dans un papier précédent).

      Enfin, il faut dire que, contrairement à Staline puisque vous faites cette comparaison, Chavez a eu en face de lui une opposition qui n’a quand même jamais désarmé

      Celle de Staline n’a jamais désarmé non plus. C’est lui qui l’a “désarmée” en la contraignant à la prison, la mort ou l’exil…

      (c’est le moins qu’on puisse dire), et que, pour paraphraser Chirac (pardonnez-moi cette citation !), “chaque pas était un but en soi”. Autrement dit, malgré 14 ans de pouvoir, ce n’était pas
      une synécure que de, déjà, procéder à cette redistribution de l’argent, dont le peuple avait objectivement besoin.

      J’ai trop reproché à d’autres leur manichéisme pour tomber dans le même travers. Je vous le répète: Chavez n’est pas pour moi le diable. Je n’ai jamais nié qu’il ait fait beaucoup de bonnes
      choses. Je dis seulement qu’il en a aussi fait beaucoup de mauvaises. Qu’il ait du composer avec des adversaires coriaces et avec des contraintes historiques, sociales et politiques, et
      que cela puisse expliquer beaucoup de choses, je ne le conteste pas. Il ne reste pas moins que l’idéologie qu’il a élaboré et sur laquelle il fondait son action présente à mon avis de tels
      défauts qu’il ne saurait être pris comme modèle. C’est tout.

      Après, c’est vrai, il faut s’atteler à construire l’Etat avec un E majuscule, mais, peut-être, le charisme de Maduro, à qui je souhaite vivement de gagner la présidentielle, n’étant pas celui
      de Chavez, c’est sur cette voie que le socialisme vénézuelien devra s’engager pour gagner définitivement.

      On verra ce que les héritiers feront de l’héritage.

  13. demos dit :

    je te trouve bien dur avec Chavez pour ce coup ci.
    OK, il n’a pas transformé son pays en puissance industrielle, et en cela il n’a donc pas fait mieux que les politiciens néolibéraux auquel il a succédé.
    Mais au moins, il a fait baisser le coefficient de Gini, et quasiment terminé l’alphabetisation du pays.
    rien que ca, vu la periode actuelle, c’est deja pas si mal.

    Pour l’emmergence d’une industrie autochtone, c’est raté c’est vrai.
    Encore faudrait-il savoir ce qu’il faut pour déclencher une industrialisation dans un PVD aujourd’hui.
    Peut etre des techniciens et des ingénieurs… Dans ce cas ca peut etre utile de partir avec une population alphabétisée.
    Peut etre aussi une politique  protectionniste pour protéger les industries naissantes.
    Et dans ce cas un dirigeant qui – comme la Chine en son temps – méprise les recommendations du FMI et de l’OMC, c’est pas forcement un mal.

    Bref, j’ai quand meme l’impression que tu condamnes le Chavisme un peu trop vite et un peu trop categoriquement.
    Peut-etre a t-il jeté des bases pour le futur; peut etre aura t-il juste été un dealer soulageant pour un temps sa clientele populaire.
    L’avenir nous le dira.

    • Descartes dit :

      OK, il n’a pas transformé son pays en puissance industrielle, et en cela il n’a donc pas fait mieux que les politiciens néolibéraux auquel il a succédé.

      “Mal de muchos, consuelo de zonzos” (“Le défaut partagé est la consolation des imbéciles”) comme on dit à Caracas…

      Mais au moins, il a fait baisser le coefficient de Gini, et quasiment terminé l’alphabetisation du pays. Rien que ca, vu la periode actuelle, c’est deja pas si mal.

      C’est vrai. Un peu comme Hitler qui sortit l’Allemagne de la crise et de l’hyperinflation et rétablit le plein emploi. En 1935, c’état dejà pas si mal… n’est ce pas ?

      Au risque de me répéter: on peut trouver du bon dans n’importe quel personnage historique. Mais ce qui importe en fin de comptes, c’est le bilan global. Chavez a fait baisser le coefficient de
      Gini et terminé l’alphabétisation. Il a aussi dilapidé la “rente” pour créer un rapport clientéliste avec son peuple. Ce faisant il a renforcé l’immaturité politique de la société vénézuelienne
      et gâché une opportunité de moderniser son économie. Voilà ce qu’on peut dire de lui. Cela n’en fait pas un démon, mais n’en fait pas un messie non plus.

      Encore faudrait-il savoir ce qu’il faut pour déclencher une industrialisation dans un PVD aujourd’hui. Peut etre des techniciens et des ingénieurs… Dans ce cas ca peut etre utile de partir
      avec une population alphabétisée.

      Des techniciens et des ingénieurs, oui. Mais aussi une administration publique méritocratique et non politisée. Des infrastructures énergétiques, de transport, de communication… tout ce que
      Chavez aurait pu pousser et ne l’a pas fait.

      Et dans ce cas un dirigeant qui – comme la Chine en son temps – méprise les recommendations du FMI et de l’OMC, c’est pas forcement un mal.

      Pas forcément. Mais ce n’est pas forcément un bien non plus. Si au lieu des recommendations du FMI et de l’OMC il se fie à celles d’astrologues, de groupies ou de son doigt mouillé…

      Bref, j’ai quand meme l’impression que tu condamnes le Chavisme un peu trop vite et un peu trop categoriquement.

      Je ne “condamne” personne. Je ne le juge même pas. Je me contente simplement de mettre dans les plateaux de la balance ce qui dans sa politique fut progressiste, et ce qui à mon avis fut néfaste.
      J’en tire la conclusion qu’on ne peut pas en faire un modèle. Mais je ne prétends pas aller plus loin…

       

  14. Bannette dit :

    Cette mise au point sur Chavez, à la lumière du péronisme argentin, met bien les points sur les i et je t’en remercie.

    Pour ma part, c’est l’abus de langage sur le “socialisme du XXIème siècle” que construiraient Chavez ou d’autres dirigeants comme lui qui m’exaspère. Je n’ai pas d’antipathie envers lui, mais
    tout ce que tu rappelles sur les limites de l’économie de rente devrait faire réfléchir ses admirateurs d’ici. Beaucoup de ses programmes sociaux sont appelés des “misiones”, bref le terme de
    mission n’est-il pas spécifique au vocabulaire catho ? Chez nous, les allocations familiales ne s’appellent pas “missions familiales”.

    Bref, ce “socialisme du XXIème siècle” qui en fait n’est qu’une ressucée des missions chrétiennes, grâce à une manne offrete par Dieu, dont on accomplit l’oeuvre envers les plus humbles, c’est
    une conception terriblement regressive du socialisme. La pensée marxiste dont une très grande partie est axée sur le développement des forces productives est trahie : elle est réduite à la peau
    de chagrin de la distribution (mais dans un sens de charité – berk !), et non pas sur l’essentiel c’est à dire ce qu’on produit pour pouvoir redistribuer. Que la gauche en Europe ou ailleurs
    s’émeuve ou soit impressionnée par cette façon de faire me désespère (c’est vrai que mon fonds athée et férocement anti-clérical joue dans ma méfiance envers ce genre de politique).

     

    • Descartes dit :

      Bref, ce “socialisme du XXIème siècle” qui en fait n’est qu’une ressucée des missions chrétiennes, grâce à une manne offrete par Dieu, dont on accomplit l’oeuvre envers les plus humbles,
      c’est une conception terriblement regressive du socialisme.

      Je crois que tu l’as très bien résumé.

       

  15. BolchoKek dit :

    Encore faudrait-il savoir ce qu’il faut pour déclencher une industrialisation dans un PVD aujourd’hui. Peut etre des techniciens et des ingénieurs… Dans ce cas ca peut etre utile de partir
    avec une population alphabétisée.

    Des techniciens et des ingénieurs, oui. Mais aussi une administration publique méritocratique et non politisée. Des infrastructures énergétiques, de transport, de communication… tout ce que
    Chavez aurait pu pousser et ne l’a pas fait.

    Il me semble que l’on touche ici à un débat autrement plus intéressant que d’essayer d’attirer sur un bilan “bon” ou “mauvais” de Chavez.

    Je ne connais pas le Vénézuéla, ni aucun pays d’Amérique latine d’ailleurs. Mais je constate que l’analyse qui est faite de la situation économique du Vénézuéla peut l’être presque à l’identique
    pour un pays que je connais relativement bien, de surcroît allié du Vénézuéla : l’Iran.

    A la révolution, de nombreux “clans” se partagèrent le pays et ses activités économiques – en fait, les différentes rentes. On peut noter qu’alors que tout le monde s’étranglait sur le pétrole,
    la famille Rafsandjani, aujourd’hui la plus puissante (bien qu’isolée politiquement) se ruait sur la pistache. C’est certes moins sexy, mais être le magnat de la pistache du principal producteur
    mondial a ses avantages. Je ne vais pas faire ici toute l’histoire de la révolution, je vais juste essayer de développer les grandes lignes de ce qu’est l’économie Iranienne.

    Le partage par “clans” peut se faire de façon très explicite : le partage de la région Khorasan il y a quelques années, le noyautage par la fratrie Larjiani (Ali, Mohammad-Javad, Sadegh et
    Bagher) de nombreux leviers de pouvoir. Ou alors, ce serait par acquis de conscience “islamique” que certains révèleraient les casseroles des autres : ainsi on a pû apprécier les “révélations” de
    Ahmadi-Nejad (l’homme de paille de Rafsandjani) concernant les frères Larijani.

    Le tout est évidemment malsain, mais est également doublé de malversations en tout genre : c’est le cas par exemple des fondations “semi-officielles” sensées verser des pensions aux invalides de
    la guerre Iran-Iraq. A vrai dire, la corruption a tellement été institutionnalisée qu’elle en est devenue un mode de gouvernement, à tel point que même des institutions comme l’armée ou les
    Pasdaran, sensées défendre la nation et son intégrité territoriale, sont détentrices de certaines exploitations minières ou agricoles. Une fois, j’avais rencontré quelqu’un qui me parlait de son
    riche cousin ; lorsque je demandais ce qu’il faisait dans la vie, on me répondit qu’il était responsable syndical…

    La vie politique est, de fait, bloquée. Les sièges disponibles permettant la validation de l’éligibilité de tout candidat étant cooptés (il va de soi par des gens qui n’ont aucun intérêt à un
    changement quelconque), on se fait une idée du système. Nul besoin de savoir si les élections sont régulières ou pas. J’ai personnellement la conviction que celles de 2009 n’étaient pas truquées,
    et sont un marqueur fort de ce qu’est réellement la société iranienne.

    Je sais que ce que je viens de dire est tabou, mais faisons la part des choses : nous avons la victoire d’un populiste social-conservateur qui propose d’utiliser la rente pétrolière pour la
    construction de logements sociaux face à un libéral-démocrate plus conciliant envers les occidentaux qui propose d’ouvrir les frontières. Le choix des différentes classes sociales était évident :
    le petit peuple préféra l’un, tandis que les classes moyennes (clairement privilégiées dans une économie de rente), rêvant de contribuer à la fuite des cerveaux ou tout simplement désireuses de
    ne pas avoir à prendre l’avion jusqu’à Dubaï pour acheter des marques américaines, votèrent pour le second.

    Le résultat d’un traitement médiatique biaisé et surtout n’ayant aucun sérieux se vit dans nos médias, unanimement : il était évident que le peuple iranien (étrangement composé – si l’on en croit
    les échantillons représentatifs des reportages, quasi-exclusivement de libraires, d’étudiantes en art et de profs de français) était floué. Le méchant “régime d’Arrrmadinédddjade” était en cause
    ; ce qu’ils peuvent être méchants, ces dictateurs qui sont en place par la volonté du saint-esprit ! Ils oppriment toujours les gentils démocrates qui veulent voyager…

    Qu’il s’agisse de diabolisation ou de louanges, il est toujours amusant de constater que, dans le traitement de l’actualité des “pays en voie de développement”, jamais la situation économique
    n’est abordée, et on se retrouve par conséquent avec des “experts” autoproclamés ayant des débats à mille lieues de la réalité des sociétés.

  16. Ifig dit :

    Descartes: “Votre logique ici, je m’excuse de vous le dire, est celle de la guerre civile: on est avec vous ou on est contre vous. La moindre petite critique envers Chavez et son régime vous
    range forcément dans le camp de l’Ennemi. La seule attitude acceptable, c’est celle de la génuflexion acritique.” Ce que tu dis là est très vrai. Tant que c’est un commentateur sur un blog, ce
    n’est pas très grave, mais c’est très clairement la position de Mélenchon. Ses expressions sur son blog sont très violentes et de plus en plus je trouve. Il y a eu un papier dans Le Monde
    récemment sur les tensions entre PG et PCF et ce point de l’expression violente de Mélenchon était relevée. Delapierre (je crois) l’assumait et la justifiait sur le thème “on veut que les masques
    tombent, on se prépare à la lutte finale”.

    • Descartes dit :

      Ses expressions sur son blog sont très violentes et de plus en plus je trouve.

      Tout à fait. Sans aller plus loin, dans le dernier billet sur son blog on peut lire que “Elle [l’insurrection sociale] prend une dure tournure physique depuis que Valls a fait crever un œil à
      un sidérurgiste”. C’est une accusation grave, qui présume que le CRS qui a crevé l’oeil d’un sidérurgiste non seulement l’a fait volontairement – ce dont personne d’autre à ma connaissance
      ne l’accuse – mais qu’il l’a fait par ordre explicite du ministre. Mélenchon croit-il vraiment que Valls a convoqué le CRS en question ou sa hiérarchie pour leur ordonner de crever l’oeil d’un
      sidérurgiste ? Comment ceux qui le suivent peuvent admettre pareil excès ?

      Delapierre (je crois) l’assumait et la justifiait sur le thème “on veut que les masques tombent, on se prépare à la lutte finale”.

      Que veux-tu… comme disait Vian “chantons les joyeux compères / qui déclarent la guerre / mais qui n’y vont pas…”

  17. Martini dit :

    “Aussi… est-ce que tu as vu cette histoire de thyroïdes contaminées chez énormément d’enfants à Fukushima ?

    Ca ne m’étonne pas trop. Chez l’enfant, l’iode radioactif se fixe tres fortement dans la tiroïde, donc une contamination préférentielle ne paraît pas déraisonnable. Mais il faut relativiser les
    effets: si la contamination augmente les risques de cancer, les cancers de tiroïde de l’enfant sont parmi ceux qui ont le taux de guérison le plus élévé…”

    Dites, “Descartes”, avez-vous relu ce paragraphe avant de cliquer pour le poster? (Je ne parle évidemment pas de l’orthographe de “thyroïde”)

     

    • Descartes dit :

      J’assume la faute d’orthographe et je m’en excuse. C’est ce qui arrive quand on essaye de répondre à tout le monde dans un temps forcément limité. Mais en dehors de ça, je ne saisis pas très bien
      ce qui vous gêne dans mon commentaire. Chaque mot dans celui-ci est l’exacte vérité: oui, le cancer de la thyroïde est l’un des cancers qui a le plus fort taux de guérison, particulièrement chez
      l’enfant. C’est d’ailleurs l’une des leçons de l’accident de Tchernobyl: à la suite de celui-ci le nombre de cancers de la thyroïde chez l’enfant ont été relativement nombreux, mais le taux de
      décès a été très faible.

      Mais peut-être ce qui vous gêne, c’est que je parle de ce risque sans pathos, sans pleurer sur les victimes, ce qui semble aujourd’hui être une obligation de respectabilité. Je regrette, mais je
      ne compte pas aller dans cette direction. Je sais bien que nos médias essayent en permanence de nous infantiliser, mais ici j’ai la prétension de vouloir discuter de sujets adultes entre adultes.
      Nous vivons dans un monde dangereux. Depuis que l’homme a appris à faire du feu, chaque conquête humaine s’est accompagnée de la naissance de nouveaux risques: le feu et l’incendie, la navigation
      et la noyade, la chimie et l’explosif, le médicament et l’intoxication médicamenteuse, le nucléaire et les radiations. Et à chaque fois, on a comparé les dégâts liés à la nouvelle découverte avec
      les avantages qu’elle procure, et c’est cela qui a fait qu’on a abandonné ou non la technologie en question.

      Cela suppose qu’on regarde les dégâts avec un oeil adulte, et non avec cette sensiblerie qui semble aujourd’hui être obligatoire pour satisfaire aux standards du politiquement correct. Oui,
      chacun des morts de la route est pour sa famille et ses amis un père, une mère, un fils, un être cher. Mais pour celui qui discute de politiques publiques, c’est essentiellement un chiffre, qui
      se compare à d’autres chiffres. C’est le paradoxe de la vie humaine: elle n’a pas de prix, mais en même temps aucune société n’est prête à faire les sacrifices requis pour réduire le risque à
      zéro. Et d’ailleurs, c’est impossible: renoncer au feu de peur de l’incendie nous mettrait à la merci d’un autre risque, le froid. Nous acceptons donc le feu, et faisons des efforts pour réduire
      le risque à un niveau que nous jugeons acceptable, ce qui n’empêche pas que de temps en temps les incendies font des brulées, une mort aussi horrible que celle des victimes d’un cancer de la
      thyroïde. Et beaucoup plus fréquente.

      Cela vous choque qu’on “relativise” un risque ? Pourtant, c’est ce que vous faites tous les jours. Lorsque vous allumez un feu dans votre cheminée, vous “relativisez” le risque que présente le
      feu par rapport au plaisir qu’il vous procure. Lorsque vous fumez, “relativisez” le risque de cancer. Et lorsque vous sortez dans la rue, vous “relativisez” le risque de vous prendre un pot de
      fleurs sur la tête, ou de vous faire foudroyer – un accident bien plus fréquent en France que celui d’une irradiation… Pourquoi voudriez-vous traiter le risque nucléaire différement des autres
      risques ?

  18. Jo dit :

    Si l’Etat n’a pas été bâti à hauteur de ce que le socialisme exige, il n’en reste pas moins que l’apport de Chavez est, au minimum, politique : les pauvres ont refait irruption sur la scène
    politique (au point de provoquer un coup d’Etat en 2002, et les oligarques qui l’ont lancé ne l’ont pas fait par philanthropie ou sur la base des vos argument, mais bien parce qu’il leur était
    insupportable d’être dépossédés de ce qu’il considérait comme leur dû), au Vénézuela, et dans bien d’autres pays. 

    C’est en cela que Chavez est porteur d’espoir, ici en France. Car, justement, l’Etat en France étant ce qu’il est (une lente construction initiée sous la royauté même, la longueur du temps
    d’existence de l’Etat des pays anciennement colonisés, y compris en Amérique du Sud, étant sans doute une des causes de leur retard économique et institutionnel), il ne pourrait pas y avoir de
    “Allo Presidente” où le président octroirait à ses mandants ce qu’ils demandent.

    L’Etat vénézuelien est corrompu et peu efficace ? La belle affaire ! Ce genre de chose se règle à coup de siècles, pas en un seul mandat politique, fût-il aussi décidé et énergique que celui de
    Chavez. Non, pour moi, c’est vraiment l’aspect politique de son exercice du pouvoir qui est porteur d’espoir même si, de par la faiblesse de l’infrastructure (Etat, formation, économie), qu’il
    n’a pas résorbé, cet acquis peut être remis en cause. Mais pour l’instant, la révolution a l’appui de l’armée, ce qui (et c’est révélateur, je le sais) en empêche toute remise en cause.

     

    • Descartes dit :

      Si l’Etat n’a pas été bâti à hauteur de ce que le socialisme exige, il n’en reste pas moins que l’apport de Chavez est, au minimum, politique : les pauvres ont refait irruption sur la scène
      politique (au point de provoquer un coup d’Etat en 2002, et les oligarques qui l’ont lancé ne l’ont pas fait par philanthropie ou sur la base des vos argument, mais bien parce qu’il leur était
      insupportable d’être dépossédés de ce qu’il considérait comme leur dû), au Vénézuela, et dans bien d’autres pays. 

      Les pauvres ont “fait irruption sur la scène politique”, certainement. Mais dans quel rôle ? Pas dans un rôle actif, un rôle dans lequel ces pauvres prennent les affaires en main et décident de
      ce qui sera ou ne sera pas fait. Non. Leur rôle politique se réduit à boire les paroles du “caudillo” et de voter pour lui. Et il s’épuise là. Les “pauvres” ont beau “faire irruption dans la
      sphère politique”, ils ne le font que dans le rôle de faire-valoir…

      La santé d’un système démocratique ne se mesure pas à la capacité du peuple à élire ses gouvernants, mais à sa capacité à les renvoyer. Churchill a eu beau gagner une guerre, il a été renvoyé par
      les élécteurs dès la paix revenue. A votre avis, qui était au Vénézuela “l’élément viril de l’histoire” (pour reprendre la formule de Marx) ? Les “pauvres”, ou le “caudillo” ? Qui donnait les
      ordres, et qui les exécutait ? Qui choisissait les priorités ? Il y a dans tous les régimes “caudillistes” une savante mise en scène du “leader” écoutant le “peuple”. Chez Chavez, cette mise en
      scène c’était entre autres “allo présidente”. Mais il ne faut pas confondre une mise en scène avec la réalité.

      L’Etat vénézuelien est corrompu et peu efficace ? La belle affaire ! Ce genre de chose se règle à coup de siècles, pas en un seul mandat politique, fût-il aussi décidé et énergique que celui
      de Chavez.

      En d’autres termes, ces peuples sont pour vous condamnés au moins sur le court et moyen terme à un Etat corrompu et inefficace, et cela quelque soient leurs dirigeants ? Vous avez peut-être
      raison. Mais dans ce cas, vous renforcez ma conclusion: Chavez ne peut en aucune manière être un “modèle” pour des pays qui n’en sont plus là.

       

       

  19. Ifig dit :

    Oui, la phrase sur Valls “creveur d’oeil” m’avait choqué aussi.

    Sur le même billet, on trouve “Pour ce qui me concerne, tout se passe comme prévu et la suite sera de même. Le pronostic et la ligne stratégique contenue dans le slogan « Qu’ils s’en aillent
    tous », tiré de l’étude des leçons de la vague démocratique en Amérique latine, qui a guidé ma campagne présidentielle, sont confirmés dans toutes les langues de l’Europe du sud.” sur
    l’infaillibilité du Presidente Mélenchon.

    “La transcroissance insurrectionnelle de la révolution citoyenne repose sur ces mécanismes simples de la conscience spontanée du grand nombre.” sur la nature révolutionnaire du mouvement.

    “Mon époque est en feu. J’y ai ma part. Notre génération politique, tous âges confondus est appelée à jouer un rôle dont on lui avait désappris les grands gestes.” sur l’histoire qui nous mord la
    nuque.

    “Le solférinien arrogant et méprisant a vite percé sous le masque de l’homme des Caraïbes.” sur Lurel.

    Enfin, c’est un style…

    • Descartes dit :

      Oui, la phrase sur Valls “creveur d’oeil” m’avait choqué aussi.

      Elle ne semble pas avoir choqué quiconque parmi les commentateurs de son blog.

      Enfin, c’est un style…

      Si ce n’était que ça… Malheureusement, c’est bien pire.

  20. dudu87 dit :

    Bonjour à tous,

    A propos de ce sidérurgiste bléssé à l’oeil, nous pouvons lire sur le même blog:

    “Vous dites : “Elle prend une dure tournure physique depuis que Valls a fait crever un œil à un sidérurgiste.”
    Je voudrais juste signaler que dans le canard enchaîné du 6 mars 2013 dans l’article Tirs tendus ou tordus? (page 4), on apprend que la police des polices aurait des vidéo prouvant que
    l’intérimaire d’Arcelor aurait perdu son oeil à cause d’un boulon lancé à l’aide d’une fronde qui aurait fracturé la visière du casque que portait le jeune belge.”

    J’ai l’impression que “l’arroseur est arrosé”!!!

    Pour ce qui nous intéresse, je ne suis ni un pro-chavez, ni un anti-chavez, simplement un spectateur qui essaie de comprendre. A chose certaine, son action politique ne laisse personne
    indifférant. Ca me rappelle le débat au sein de la gauche sur la Révolution des Oeillets au Portugual. 

    Le peuple vénézuelien doit être souverain et maître chez lui et j’aurai manifesté si sa souvereinté avait été mise en cause comme je l’ai fait pour le Portugual.

    Tant qu’à nos “illuminés” qui veulent exporter le modèle chaviste en France ( et c’est à mon avis la question de fond), je leur dis danger, vous emmenez le peuple français au
    “casse-gueule” , désolez d’être vulguaire…

     

  21. JMP dit :

    de l’eau pour votre moulin…:

    http://www.journaldumauss.net/spip.php?article938

    après lecture de cet article, je vous trouve encore bien indulgent !

    cordialement

     

  22. LCH dit :

    Descartes, ce texte est, à mon sens, l’un des tous meilleurs depuis l’existence de ton blog. Je n’en dirais pas grand chose d’autre, tant il est bien articulé et convaincant. Marc Saint-Upéry
    avait déjà pointé les limites du “chavisme” il y a quelques années et ton analyse se complète avec la sienne :

    Le pleurnichement de Jean-Luc Mélanchon sur l’impérative “haine des puissants” à déployer m’a proprement désolé et assomé sur le moment. Mais comment peut-on avoir la langue fourchue d’autant de
    gauchisme mal membré…  Je n’ai pu me retenir de le traiter de trou du cul. Oui ce n’est pas une analyse mais fichtre, qu’il est insupportable !

    • Descartes dit :

      Le pleurnichement de Jean-Luc Mélanchon sur l’impérative “haine des puissants” à déployer m’a proprement désolé et assomé sur le moment.

      C’est un peu ce qui m’a encouragé à essayer d’écrire un article – et je suis content de voir qu’il a été apprécié. Francement, Chavez est un de plus dans la longue liste de démagogues. Mais ce
      qui me met littéralement hors de moi est que des leaders “de gauche” racontent des bobards et prétendent nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Je pense que les citoyens, et notamment
      les jeunes, méritent mieux que ça. Que ça arrange Mélenchon de faire croire qu’il n’est que la “section française” d’une Internationale de la Révolution Citoyenne, on peut le comprendre. Mais les
      contorsions auxquelles il se livre pour obtenir ce résultat – y compris de falsifier le contenu réel des régimes populistes latino-américains – ont de quoi exaspérer n’importe quel âme bien
      née…

      J’ajoute que dans son dernier billet, Mélenchon va encore plus loin en accordant crédit aux rumeurs paranoïaques selon lesquelles Chavez aurait été assassiné. Maduro, son successeur désigné,
      avait même affirmé que le cancer lui avait été “inoculé” (comme si on pouvait “inoculer” le cancer…). Mélenchon et ses petits copains vont bien plus loin dans le “pourquoi pas”:

      Evo Moralès soupçonne les gringos.

      Evo Moralès, le président bolivien n’était pas en forme. Pas seulement un peu enrhumé ! Il avait l’estomac très perturbé par son dîner en Autriche, la veille. Quelque chose du repas servi
      n’était pas bien passé et il ne s’en cachait pas. Cela n’a pas de rapport, mais disons que dans le cadre de notre conversation, cela fit ambiance. J’étais là avec Eliane Assassi, la présidente du
      groupe communiste du Sénat. Je crois pouvoir dire que nous fûmes assez surpris du ton très direct avec lequel le président bolivien résuma le caractère criminel des étasuniens. Il dit que les USA
      essaient d’abord d’avoir des gouvernements démocratiques qui fassent leur politique. S’ils ne les ont pas, ils essaient de diviser les peuples entre eux pour justifier des interventions
      extérieures. S’ils n’y parviennent pas non plus ils essaient de diviser les forces de la révolution pour trouver une faille qui déstabilise le processus et permette la revanche de leurs partisans
      par des coups d’état. Enfin, s’ils n’arrivent à rien, ils essaient l’assassinat du dirigeant du processus. Détruire les leaders est une tactique constante des Etats-Unis et de leurs agents
      locaux. Ce point a son importance. Car si évidemment un processus politique, surtout de nature révolutionnaire, est d’abord un phénomène de masse, le point d’appui que donne une personnalité
      correspondant au moment politique et le cristallisant est aussi un paramètre fondamental. Eliane Assassi confirma l’analyse générale en rappelant les innombrables tentatives de meurtres contre
      Fidel. Elles sont aujourd’hui avérées depuis l’ouverture des archives de la CIA. Elle informa Moralès en montrant comment Sarkozy avait joué à fond la carte de la division du peuple et
      l’opposition permanente entre catégories populaires.

      Evo Moralès dit qu’il croit à l’empoisonnement d’Hugo Chavez. Il rappelle que Chavez était sur ses gardes, qu’il se déplaçait partout avec une ambulance et qu’il était toujours accompagné de
      son propre cuisinier. Il raconte comment d’ailleurs l’un des cuisiniers de Fidel fut intercepté au moment même où il s’apprêtait à l’empoisonner. Il nous dit aussi que Fidel et Chavez, les deux,
      l’avaient mis en garde contre l’empoisonnement et les méthodes des gringos pour assassiner les leaders dangereux à leurs yeux.

      Drôle, n’est ce pas ? Le plus comique est le paragraphe sur “le point d’appui que donne une personnalité correspondant au moment politique et le cristallisant est aussi un paramètre
      fondamental”… Si on était méchant, on pourrait voir dans cette phrase une réflexion  sur la vision qu’à Mélenchon de son propre rôle…

  23. Ifig dit :

    A part la parano de Morales, encore des tensions avec Dartigolles/Chassaigne dans la note de Mélenchon, et des commentaires virulents contre le PC.

    • Descartes dit :

      Oui, j’ai aussi remarqué. J’ai du mal à interpréter cette posture. La première fois, j’ai pensé que cela faisait partie de la traditionnelle panoplie de la dissuasion, genre “attention, je
      mords”. Mais remettre le couvert une deuxième fois… surtout quelques jours avant le congrès du PG – congrès sur lequel le PG ne communique publiquement aucune information – il y a de quoi se
      poser des questions. Mélenchon cherche-t-il à faire pression sur les dirigeants du PCF avant les négociations compliquées des listes municipales et européennes ? Ou a-t-il dejà décidé de la
      rupture avec le PCF et d’un répositionnement stratégique avec EELV ? J’avoue que je n’en sais rien.

  24. dudu87 dit :

    Bonjour à vous,

    Merci à JMP de nous avoir fait connaître « journaldumauss »

    Dans cet article, les communistes vénézuéliens nous font part de leur analyse.

    « Les communistes vénézuéliens soulignent en outre que les initiatives économiques de type coopérative ou “entreprise de production sociale” promues marginalement par le régime ont “très
    peu de succès” – un euphémisme poli vu les désastres observables sur le terrain.
    Dénonçant les dégâts de l’hyperprésidentialisme et l’absence totale “d’instances de direction collective “, ils décrivent l’Etat bolivarien comme “hautement inefficace”, constatent une
    “intensification de la corruption” et déplorent, à côté d’avancées sociales partielles et fragiles, une véritable “régression en matière de planification, de coordination et de prestation d’une
    série de services publics fondamentaux”. Conclusion : “On ne peut plus occulter le fossé entre le discours “socialiste” de certains acteurs gouvernementaux et la pratique concrète du
    gouvernement, et la tension qui en résulte atteint un point critique.” »

    J’ai voulu savoir quelles étaient les relations des 2 directions communistes françaises et vénézuéliennes, je n’ai rien trouvé. Bizarre… Aucun communiqué de
    la part du PCF !!!

    Il est vrai, avec un secrétaire général, P. Laurent qui se dit « communiste anarchiste », si, si… rien d’étonnant (j’ai lu ça dans un interview. Son père doit « se retourner dans
    sa tombe » !!!

    Concernant le soi-disant complot sur le cancer de Chavez, à ma connaissance, ce serait le PC russe qui aurait lancé le 1° cette info relayée en France par le Comité Valmy. La pilule est un peu
    grosse, maintenant pour le citoyen « lambda » que je suis, difficile de se faire une opinion précise. L’avenir nous le dira! Par contre que Mélenchon, homme politique
    « d’envergure » lance une telle info en dit long sur son sang froid!

    Lorsque j’ai découvert son blog, il y a 4 ans, j’ai pensé que le « bonhomme » (je n’étais pas naif, je connaissais son passé trotskiste et son opportunisme) avait changé et qu’il puisse
    encore évoluer dans sa pensée politique. J’ai donc participé au débat qu’il nous proposait. Oh ! Il y avait de nombreux gauchistes sur son blog mais à la faveur des arguments des uns et des
    autres, ils évoluaient dans le bon sens. Et le PG a été fondé, appellation qui m’interpellait, et surtout la formation du FdG. Que veut dire Gauche au 21° siècle? Le PS ne se dit-il pas de
    « gauche »?

    L’apothéose est arrivée avec l’arrivée de M. Billard et surtout de sa candidature aux présidentielles avec la complicité de la direction du PCF et ajoutons ses 11 % au 1° tour. Là, il sait
    senti pousser « des ailes » et le trotskiste qu’il était, est redevenu au « grand galop »! L’Etat-Nation, quelle affaire, la presse, son grand ennemi, l’ENA et les élites, à
    supprimer, la planification écologique pour rêver aux « étoiles », les peuples allemand, italien, espagnol, grecque…feront comme nous, si le FdG arrive au pouvoir. D’un seul coup,
    d’un seul…la moitié de l’Europe fait la Révolution !!!

    Alors Dartignolles et Chassaigne me font l’effet de vouloir prendre leur indépendance vis-à-vis du FdG et …du « petit chat ». Regardez leur site, aucune référence à « dieu »
    ni au logo FdG et ça le « petit chat » n’aime pas. Je dis « petit chat » en référence à ton article, Descartes car je pense qu’il y a beaucoup de ressemblance avec Chavez. Ne
    dit-on pas, « Dis-moi qui tu entres, je te dirai qui tu es ! » Le PC vénézuélien a eu droit aux foudres de Chavez lorsqu’ils ont refusé de rejoindre le parti de Chavez mais le PCV
    pesait pour 2 à 3 % chez les électeurs. Alors…

    Que va faire la direction du PCF? Il y aura t-il une « explication de gravure » en privé ou en public ? Est-ce le début de l’OPA de Mélenchon sur le PCF ???

    Je ne parle pas de la façon “démocratique” employée par les directions du PCF et PG et là, il y a un vrai danger… 

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    • Descartes dit :

      J’ai voulu savoir quelles étaient les relations des 2 directions communistes françaises et vénézuéliennes, je n’ai rien trouvé. Bizarre… Aucun communiqué
      de la part du PCF !!!

      Dans cette affaire, la direction du PCF pratique une politique qui ménage la chèvre et le chou. Contrairement au PG, il n’a jamais manifesté un enthousiasme
      excessif pour les nouveaux populismes “de gauche” latinoaméricains, suivant en cela une vieille tradition communiste qui conduit à se méfier des
      personnalismes. Mais en même temps on ne va pas faire de la peine aux JC qui ne jurent que par Che Guevara et aux alliés… qu’est ce qu’ils auraient à y gagner ? Chavez a été une calamité pour
      le Vénézuela, mais Caracas est loin…

      Concernant le soi-disant complot sur le cancer de Chavez, à ma connaissance, ce serait le PC russe qui aurait lancé le 1° cette info relayée en France par le Comité Valmy. (…) Par contre
      que Mélenchon, homme politique « d’envergure » lance une telle info en dit long sur son sang froid!

      Le complotisme est une terrible tentation pour la gauche radicale. Surtout lorsqu’il se conjugue avec le victimisme. Car tout ça a une utilité, celle de légitimer celui qui se présente comme
      victime. Le raisonnement est “ils cherchent à m’éliminer, c’est la preuve que je suis un véritable révolutionnaire”. Pour les lecteurs réguliers du site “bellaciao”, par exemple, ce raisonnement
      devrait être familier.

      L’apothéose est arrivée avec l’arrivée de M. Billard

      Tout à fait. Je pensais – je l’avais écrit sur ce blog à l’époque – et je pense toujours que c’est là où l’on a vu le véritable tournant dans l’histoire du PG, qui aurait pu devenir un “parti
      creuset” et qui est finalement devenu un parti gauchiste-écolo comme n’importe quel autre. Le prochain stade c’est l’accord avec EELV…

      Alors Dartignolles et Chassaigne me font l’effet de vouloir prendre leur indépendance vis-à-vis du FdG et …du « petit chat ». Regardez leur site, aucune référence à
      « dieu » ni au logo FdG et ça le « petit chat » n’aime pas.

      Le “petit chat” c’est Chavez… et c’est une référence à “l’Ecole des Femmes” de Molière: Agnès, le personnage de l’ingenue, lorsqu’elle est interrogée sur les nouvelles – et alors qu’il lui est
      arrivé beaucoup de choses – ne répond que “le petit chat est mort”. Parmi tout ce qui lui est arrivé, elle prend le fait le moins important…

      Sur Dartigolles et Chassaigne… les deux sont des “notables” locaux qui ont leurs accords locaux et ils n’entendent pas se faire dicter leur conduite où leurs alliances par la direction
      nationale du PCF et encore moins par les autres partis du Front de Gauche. Chassaigne en particulier ne fait que suivre la ligne qui est celle du PCF depuis le début de la “mutation”: les élus
      rendent des comptes à leurs électeurs, et non aux militants ou aux instances de leur Parti.

      Que va faire la direction du PCF? Il y aura t-il une « explication de gravure » en privé ou en public ? Est-ce le début de l’OPA de Mélenchon sur le PCF ???

      Plutôt le contraire: Mélenchon commence à comprendre que l’OPA sur le PCF est une OPA sur une entreprise vidée de sa substance, dont toute la valeur est dans les mains des élus et des “notables”.
      A la fondation du PG, Mélenchon croyait que le PCF était encore cet “appareil” tout puissant dont fantasment les gauchistes. Il réalise maintenant que s’entendre avec MGB et compagnie ne garantit
      nullement le comportement des “notables”. La direction du PCF ne fera rien parce qu’elle ne peut rien faire. Tu imagines un instant Pierre Laurent sanctionnant Chassaigne ou Dartigolles ? Ou les
      critiquer publiquement ? Braouezec s’est assis sur les décisions des directions successives du PCF pendant une décennie avec l’espoir de se faire virer, et rien n’est venu.

       

       

       

       

  25. Gugus69 dit :

    Ah ! Cette fois vous le dites, que Mélenchon va se réorienter vers un accord avec EELV. Un post avant, vous étiez dubitatif.

    Moi, c’est aussi mon sentiment depuis fort longtemps. Tout pousse le PG vers les Verts ; il suffira que ces derniers se décollent un tout petit peu du gouvernement.

    Mais n’est-ce pas là la vraie inconnue ? J’ai l’impression que Duflot aime bien être ministre…

    • Descartes dit :

      Ah ! Cette fois vous le dites, que Mélenchon va se réorienter vers un accord avec EELV. Un post avant, vous étiez dubitatif.

      Et je le suis toujours, mais je dois avouer que j’ai du mal à comprendre sa stratégie de voler de manière répétée dans les plumes du PCF, et surtout d’attaquer des “féodaux” aussi puissants que
      Chassaigne et Dartigolles ce qui met Laurent dans une position difficile. Sauf à croire qu’il prend date pour une éventuelle rupture, j’ai du mal à imaginer les raisons d’une telle stratégie.
      Ajoute à cela les clins d’oeil en direction de EELV qui parsèment les documents de congrès PG… Peut-être verra-t-on un peu plus clair après le congrès en question.

       

  26. BolchoKek dit :

    Concernant le bilan qui a pu être fait de “l’ère Chavez” par les communistes Vénézuéliens, j’ai cherché à me renseigner un peu. Ne parlant malheureusement pas espagnol (je sais, quel manque de
    goût), je pense que je n’avais pas accès à de nombreux documents, ceux se retrouvant à l’international montraient jusque-là un deuil poli.

    Mais ce matin je suis tombé là-dessus :

    The Communist Party and the Venezuelan
    working class in the dilemma of the Bolivarian revolution

    L’auteur semble porter le même jugement que notre hôte Descartes quant à la gravité de la récupération politique du prolétariat, notamment :

    In this context emerged the diversionist approach of the “socialism of the 21st century”, more forcefully raised by the leadership of the Bolivarian Revolution in Venezuela,
    followed by the progressive governments of Ecuador, Bolivia and Nicaragua, and also assumed by opportunist political currents from other countries in Latin America and the Caribbean.

    […]

    Thus, from the leadership of the Venezuelan process, some sectors spread theoretical concepts introduced by social-reformist theoreticians, “postmoderns” and reviewers of Marxism,
    bringing the “crowds” (Antonio Negri and Paolo Virnoto), “the People” (devoid of a sense of class) and the regional communities to the category of historical subjects of the revolution.
    The problem with these categories is that they are generic and abstract, not historically specific and therefore lack of specific class content.

    Ce qui est triste, c’est que ce dernier point (que je souligne) est une remarque valable pour la plupart des “socialismes sud-américains” tant en vogue ces temps-ci, notamment en ce qui concerne
    l’indigénisme assumé d’un Evo Morales…

    • Descartes dit :

      Il y a une difficulté théorique à appliquer les catégories marxistes aux sociétés latinoaméricaines. Marx, en tant qu’économiste, était avant tout un analyste du capitalisme industriel du XIXème
      siècle. Il est dejà difficile d’étendre cette pensée aux sociétés dites “post-industrielles” du XXème et XXIème siècles. Mais il est encore plus difficile d’utiliser ces bases pour étudier des
      sociétés qui sont fondamentalement pré-capitalistes.

      Dans les sociétés latinoaméricaines coexiste un accès à des technologies modernes et une structure sociale archaïque de type féodal-tribal. Cela pourrait paraître paradoxal pour un marxiste, pour
      qui les rapports de production déterminent dialectiquement les rapports sociaux. Comment une société peut-elle avoir accès à des technologies modernes et rester archaïque dans ses rapports
      sociaux ? L’explication à cette apparente contradiction est que l’accès aux technologies dans ces pays est largement “magique”: on utilise l’objet technologique comme si c’était un objet
      enchanté, mais on ne le domine pas, on ne comprend pas son fonctionnement, on est incapable de le produire: c’est un objet conçu par d’autres, fabriqué par d’autres, et qui tombe du ciel, payé
      grâce à une “rente”.

      C’est le besoin de produire le téléphone portable qui modifie les rapports sociaux. Si le téléphone portable tombe du ciel, il peut être utilisé comme les miroirs magiques des contes de fées sans
      que cela change les rapports sociaux. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les récits et sagas faussement médievaux sont si prisés depuis les débuts de l’ère industrielle: avec leurs
      magiciens qui sont capables de se transporter rapidement, de voler, de communiquer à distance et de tirer des boules de feu sur un ennemi – toutes choses que la technologie nous permet de faire
      le plus naturellement du monde chaque jour – ces fantaisies médievales font en fait coexister une société aux rapports sociaux archaïques avec une technologie moderne déguisée en magie.

      Mais la profusion d’internet et de téléphones portables ne doit pas occulter la réalité sous-jacente, celle des rapports de production. Une économie de “rente” peut soutenir des modes de
      production archaïques, semi-féodaux, pendant très longtemps. Dans ces conditions, difficile de donner un “contenu de classe” sans avoir recours à des catégories pré-industrielles: seigneurs,
      serfs, prêtres…

       

       

  27. faxmailing dit :

    Merci pour ce partage. Je dois dire que, c’est la première fois que je lis un ouvrage de Descartes. Peut être, c’est assez surprenant mais je ne suis pas très pensive. En tous cas, merci pour ce partage; ce fut enrichissant.

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