La théorie du recul permanent

"Les français ont inventé un nouveau char. Il a une marche avant et cinq marches arrière" (vieille plaisanterie britannique)

Mes lecteurs le savent bien, je peux difficilement prétendre à être un « déçu du hollandisme ». François Hollande a réussi en trente ans de vie politique à ne jamais exprimer une opinion passionnée, personnelle sur quelque question que ce soit. Au-delà de l’opportunisme inévitable dans toute carrière – politique ou autre, d’ailleurs – la plupart des hommes politiques qu’on connaît tiennent au moins à quelque chose qui les transcende, qui donne sens à leur action politique. Ils peuvent au cours de leurs vies politiques trahir beaucoup d’idées, mais pas celle-là. C’est Badinter et la peine de mort, Chevènement et la République, De Gaulle et la constitution, Taubira et le « mariage pour tous »… mais à quoi rêve Hollande ? Quel est pour lui le principe intangible, l’objectif non-négociable qu’il ne pourrait renier sans se renier ? Hollande est au plus strict sens du terme un homme politique creux. La politique hollandienne est une tactique. Mais une tactique qui n’aurait pas véritablement d’objectifs autres que la conquête et le maintien au pouvoir.

Comment pourrais-je donc être déçu, moi qui n’attendait rien ? Il n’empêche que même lorsqu’on n’attend rien, on attend quelque chose. Je ne m’attendais pas à trouver en Hollande un homme d’Etat. Mais j’avais l’ingénuité de croire qu’il était un bon tacticien, un fin connaisseur de la chose politique, et surtout, un homme capable d’organiser une équipe, de s’entourer des gens qui ont les compétences qui lui manquent cruellement et de les faire travailler ensemble. J’attendais de lui non pas une présidence inspirée, mais au moins une présidence organisée.

Les événements de ces derniers jours montrent qu’il n’est même pas capable de ce minimum syndical. Après seulement quinze mois d’exercice du pouvoir, alors que son parti a une majorité solide à l’Assemblée et peut compter sur la bienveillance des collectivités locales, la présidence a sombré dans la cacophonie permanente, l’incertitude, l’incompétence, l’incapacité à définir une ligne politique et de s’y tenir.

Il est à mon sens essentiel de comprendre comment on est arrivé là. Et avant de commencer l’analyse, évacuons le discours classique de la gauche qui voit à l’origine de tous les maux les institutions de la Vème République. Ce n’est certainement pas là que se trouve le problème. Nous ne sommes pas dans le contexte d’une crise institutionnelle : Le président, le gouvernement, ont les moyens de gouverner. Ils peuvent passer des lois et des lois, l’administration les applique. Et la légitimité institutionnelle n’est pas en cause. Personne parmi les différents groupes contestataires qui à plusieurs occasions ont fait reculer le gouvernement ne contestent son droit à gouverner. Ce serait plutôt le contraire.

La situation actuelle montre combien les institutions de la Vème République sont bien moins « dictatoriales » qu’on le dit souvent. La preuve en est qu’un gouvernement qui pourtant détient tous les leviers du pouvoir institutionnel se voit obligé de reculer devant les protestations. Les institutions ont été affaiblies au fil des réformes constitutionnelles, certes , mais il reste que la position institutionnelle qu’occupe aujourd’hui Hollande n’est pas fondamentalement différente de celle qu’occupèrent naguère De Gaulle, Mitterrand ou Sarkozy. Si les ministres craignaient De Gaulle et persiflent sous Hollande, ce n’est pas une question d’institutions, mais d’hommes et de politiques. L’impression que la Vème République repose sur la toute-puissance présidentielle est trompeuse. La constitution de la Vème République fait du président un monarque, certes. Mais être monarque dans un pays qui est essentiellement régicide n’est pas forcement une promenade de santé.

La France est un pays divers. Divers et divisé. Nous avons une longue tradition de particularismes locaux, régionaux, professionnels, culturels, communautaires qui au cours de notre histoire se sont affrontés régulièrement pour avoir un plus grand morceau du gâteau. Nous sommes un pays où les groupes d’influence et de pression fleurissent, plus discrets que dans les pays anglosaxons, mais tout aussi présents. Devant cette société civile qui tient beaucoup de la tribu gauloise façon Asterix, l’Etat est perçu comme l’arbitre. C’est à lui qu’on fait confiance pour mettre des limites à la toute-puissance des « barons » locaux, des groupes de pression, des groupes d’influence. Et c’est pourquoi on attend de lui qu’il prenne des décisions et qu’il s’y tienne, quitte à affronter les intérêts particuliers.

Prendre des décisions d’abord. Cela paraît simple. En fait, c’est très compliqué. Le président de la République est appelé à prendre des décisions dans les domaines les plus variés, les plus complexes et quelquefois les plus triviaux. Personne n’est capable de faire cela tout seul. La première décision que prend un président, celle qui finalement détermine en grande partie son échec ou son succès, c’est le choix de ses conseillers et de ses ministres, des gens qui vont l’entourer et préparer les décisions pour lui. Et sur ce point, Hollande a catastrophiquement failli. Son cabinet, son premier ministre, ses ministres sont des personnalités qui ont peut-être une longue expérience « politicienne », mais une totale méconnaissance de la manière dont un gouvernement fonctionne et de la manière dont les décisions sont préparées, arbitrées et annoncées.

S’y tenir ensuite. Si une décision est mûrement réfléchie, si elle a été préparée correctement, le président n’a aucune raison d’accepter d’y revenir. Chaque reculade transmet un double message : d’une part, un message d’incompétence, puisque reculer revient à admettre que la décision était mal préparée ou mal expliquée. La première fois, cela peut passer pour une erreur isolée, pas la deuxième. Mais chaque reculade transmet un message plus dangereux : elle indique aux lobbies, aux corporations, aux « communautés » que toute décision peut être remise en cause à condition de crier assez fort. C’est pourquoi chaque reculade prépare en fait la reculade suivante dans une spirale qu’il devient difficile de contrôler.

Les français ne sont pas idiots, et contrairement à ce qu’on croit, ils écoutent le discours politique. Et lorsque celui-ci est rationnel, on peut leur faire accepter pas mal de choses. Souvenons-nous de Sarkozy et sa réforme des retraites. Elle avait provoqué un tollé, elle avait mis des centaines de milliers de manifestants dans la rue, bien plus que l’Eco-taxe. Et pourtant, jamais le gouvernement n’a été en difficulté et la réforme est avec quelques modifications marginales. Et tout cela assez tard dans le quinquennat, alors que sa cote d’amour n’était déjà plus au beau fixe. Comment Sazrkozy a réussi cet exploit ? D’abord, par la pédagogie : le débat sur les retraites avait été préparé par une campagne qui a martelé un argument précis, celui de l’allongement de l’espérance de vie et du besoin de rééquilibrer le rapport actifs/inactifs. On peut être d’accord ou pas avec les conséquences de ce fait incontestable, mais l’interprétation qu’en a fait le gouvernement n’était pas irrationnelle, et le projet de loi proposé était cohérent avec son diagnostic. Ensuite, Sarkozy avait fait preuve de fermeté tranquille. D’un côté, une empathie réelle avec les manifestants dont il déclarait comprendre et respecter les motivations. D’un autre, une fermeté appuyée là encore par un argument rationnel qu’on peut résumer ainsi : « ma réforme est dans l’intérêt de tous, et y renoncer serait donc trahir mon mandat ».

Je pense que cet exemple remarquable n’a pas été assez étudié par la gauche en général et par ceux qui conseillent François Hollande en particulier. Car cet exemple montre plusieurs choses. La première, c’est que notre peuple est sage, et comprend lorsqu’on lui explique rationnellement une mesure bien conçue même lorsqu’elle est dure. Ils n’iront pas applaudir le gouvernement, certes. Ils ne lui adresseront pas des félicitations. Ils protesteront dans les rues, gueuleront dans les gazettes. Mais en fin de compte, laisseront passer. Il est d’ailleurs assez facile en France de voir quand un mouvement devient véritablement dangereux pour le gouvernement, et quand il reste confiné au domaine du grognement pour la forme. Mais pour que cela marche, il faut que les dirigeants aient l’air au moins de croire à ce qu’ils proposent. Lorsqu’un dirigeant a l’air de penser que finalement si on doit renoncer ce n’est pas si grave, comment pourrait-il imposer aux intérêts particuliers une vision de l’intérêt général ?

Hollande est sur ce point comme sur d’autres l’anti-Sarkozy. Dans chaque situation, il recherche une synthèse qui est ensuite impossible d’expliquer rationnellement, puisqu’elle ne résulte pas d’une ligne politique choisie mais d’une tentative de contenter le plus grand nombre de lobbies. Des lobbies qui n’ont même pas la reconnaissance du ventre, et qui une fois qu’ils ont obtenu le fromage recommencent les pressions pour avoir le dessert. Ils auraient tort de se gêner : l’expérience a montré que ça marche.

L’homme politique et l’enseignant ont cela en commun que ce sont deux métiers qu’on ne peut bien faire sans une petite dose de sadisme. Le politique, comme l’enseignant, n’est pas là pour faire plaisir. Il est là pour mettre des limites. Il est là pour dire « non ». Or, la politique hollandaise repose sur ce simple axiome : ne jamais dire « non ». Ne jamais se fâcher avec personne. Ne jamais se faire un ennemi. Et de la même manière que l’enseignant qui dit toujours « oui » se trouve rapidement débordé par ses élèves, le politique qui essaye de dire « oui » à chaque lobby, à chaque groupe de pression, à chaque communauté finit immanquablement perdre toute crédibilité et par mécontenter tout le monde. La vision hollandaise repose sur l’idée que dans chaque situation il existe une « synthèse », un compromis qui contentera tout le monde. Cela n’existe pas. On peut au mieux trouver un équilibre qui mécontente tout le monde, mais que tout le monde est prêt à accepter. C’est cela, la politique.

Descartes

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74 réponses à La théorie du recul permanent

  1. Gérard Couvert dit :

    Ainsi donc le spleen primautomnal vous à quitté, tant mieux !
    L’un des drames de la France et que depuis au moins deux décennies il faut des qualités pour être élu qui ne sont pas celles qu’il faut pur gouverner. Ajoutez à cela l’étiolement de la morale républicaine et vous aurez Hollande.
    C’est sans issue et ce n’est pas en sur-ajoutant les "primaires", les régionalismes et les quotas de potiches aux minorités visibles (les "normaux" ils sont quoi invisibles ?) que nous allons enfin retrouver un personnel politique digne de notre nation.
    Je ne suis pas certain de ce que vous écrivez sur la taubiboche ;les "PD" elle s’en fou ! elle n’est mue que par la haine de la France, elle en veut au monde entier d’être noire, elle est la stricte négation de L.S. Senghor.
    Votre comparaison avec les enseignants est amusantes, particulièrement si l’on considèrent la pratique des quadraPS de faire ami-ami avec leurs élèves, de leur demander leur opinion sur tout est n’importe quoi, de ne jamais trancher, d’éviter les notes, voire d’en donner de trop bonnes … pour ne pas stigmatiser.
    La question reste de savoir comment nous allons nous réveiller de ce cauchemar ?

    • Descartes dit :

      @Gérard Couvert

      [Ainsi donc le spleen primautomnal vous à quitté, tant mieux !]

      Pas tout à fait… mais je me soigne ! En tout cas, en relisant ce blog je me suis dit que son ton avait bien dérivé vers le pleurnichard. Et le pleurnichard, je déteste ça. J’essaye d’écrire une série de papiers « programmatiques » pour essayer quelque chose de plus positif… mais pour le moment, l’actualité commande !

      [L’un des drames de la France et que depuis au moins deux décennies il faut des qualités pour être élu qui ne sont pas celles qu’il faut pur gouverner. Ajoutez à cela l’étiolement de la morale républicaine et vous aurez Hollande.]

      Sans doute. Mais il faut aussi tenir compte d’un facteur important, celui de la « provincialisation » de la gauche. Le rééquilibrage du pouvoir des dirigeants nationaux vers les « barons » locaux affecte le PS comme le PCF. Et aboutit à mettre aux commandes nationalement des dirigeants neutres, sans personnalité, dont le seul mérite est la capacité de convaincre les « notables » qu’ils auront chacun sa part du gâteau. Pierre Laurent, François Hollande et Harlem Désir sont des exemples de ce processus délétère. Pourquoi Hollande est sorti vainqueur de la « primaire » ? Parce que les « barons » socialistes ont eu peur de Martine Aubry. Avec Aubry, il y aurait eu des « en cour » et des disgraciés. Avec Hollande, chacun était sûr d’avoir sa part.

      [C’est sans issue et ce n’est pas en sur-ajoutant les "primaires", les régionalismes et les quotas de potiches aux minorités visibles (les "normaux" ils sont quoi invisibles ?) que nous allons enfin retrouver un personnel politique digne de notre nation.]

      Tout à fait. Toute sélection sur des critères autres que le mérite aboutit à affaiblir une élite. Sélectionner les politiques par un « cursus honorum » qui teste leur capacité à gouverner est la seule moyen de former un personnel politique de qualité. Qu’on aime ou pas De Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterrand, Chirac ou Sarkozy, on doit leur reconnaître au moins une chose : ils sont arrivés à la magistrature suprême après avoir fait leurs preuves dans des situations autrement plus difficiles, complexes et dangereuses, où un faux pas pouvait signifier la mort politique. Hollande, lui, arrive au trône presque vierge…

      [Votre comparaison avec les enseignants est amusantes, particulièrement si l’on considèrent la pratique des quadraPS de faire ami-ami avec leurs élèves, de leur demander leur opinion sur tout est n’importe quoi, de ne jamais trancher, d’éviter les notes, voire d’en donner de trop bonnes … pour ne pas stigmatiser.]

      J’avoue, votre Honneur, le choix de ma comparaison était parfaitement prémédité…

      [La question reste de savoir comment nous allons nous réveiller de ce cauchemar ?]

      La question est plutôt : « allons nous nous réveiller ? »

    • Gérard Couvert dit :

      "…. cachaient l’une et l’autre derrière le ton péremptoire une mollesse et une pusillanimité étonnantes chez qui aspire au pouvoir. En fait elles sont les « qualités » de celui qui a su naviguer entre les courants et pratiquer les compromis comme les compromissions au sein du milieu politique …"
      http://www.christianvanneste.fr/2013/10/31/le-courage-et-la-verite/
      Les positions politiques sont tranchées chez cet homme, mais son esprit est droit.

    • Descartes dit :

      @Gerard Couvert

      Je me fais un principe de faire abstraction du pedigree des gens lorsque je lis leurs arguments. Dans le cas de Vanneste c’est un peu dur, parce que son pedigree est particulièrement riche en conneries et en ex-abrupts. Mais dans le cas présent, je pense qu’il a tort. L’exercice du pouvoir passe par un certain nombre de "fictions" nécessaires. Au niveau du principe, on ne paye pas de rançon. Au niveau d’un cas concret… c’est beaucoup plus compliqué. Si un homme vous menace avec un couteau dans le métro et vous demande un euro, vous lui donnez. Faire le contraire est un acte de stupidité. Maintenant, si le voleur menace non pas vous mais votre voisine de siège et vous demande un euro pour la laisser tranquille, payeriez-vous ? Bien sur que vous payez, qui prendrait sur lui de mettre en danger une vie pour un euro ? Mais alors, pourquoi demander des ministres d’agir autrement ? Et si c’est dix euros ? Cent euros ? 10.000 ? Un million ? A quelle somme commencent les principes ?

  2. dsk dit :

    Sur le mariage gay cependant, Hollande n’a pas laissé libre cours à son penchant pour le recul. Peut-être était-ce de peur qu’on l’enc…?

    • Descartes dit :

      @dsk

      Je reconnais là votre goût exquis à l’heure de titiller la métaphore… mais au demeurant, vous avez tort. Dois je vous rappeler que sur le "mariage pour tous" le président a essayé de réconcilier tout le monde en proposant le bénéfice d’une "clause de conscience" aux maires qui ne souhaiteraient pas marier des homosexuels ? C’était le même mécanisme que le "elle peut retourner, mais seule" adressé à Léonarda: un recul partiel, supposé calculer pour plaire aux adversaires sans déplaire aux partisans. Et ça avait provoqué à peu près le même résultat: les partisans du mariage homosexuel avaient crié au scandale, et les autres avaient ridiculisé une concession qui n’en était pas une.

    • CVT dit :

      @Descartes,
      en même temps, nous sommes dans une époque où personne ne veut mourir pour ses idées: la preuve, les maires qui s’opposent au mariage de couple de même sexe veulent une clause de conscience, pour pouvoir continuer à exercer leur mandat, tout en violant la neutralité républicaine! S’ils étaient plus conséquents, ils devraient démissionner de leur mandat!
      Cette tendance à ne pas assumer les conséquences de ses choix est typique de notre époque, elle irrigue toutes les couches de l’Etat, et pas seulement le gouvernement ou à l’Elysée…
      Voilà un des stigmates du principe de "jouir sans entraves": le pouvoir sans la responsabilité, la liberté sans les contraintes, les droits sans les devoirs…

    • Descartes dit :

      @CVT

      [Cette tendance à ne pas assumer les conséquences de ses choix est typique de notre époque, elle irrigue toutes les couches de l’Etat, et pas seulement le gouvernement ou à l’Elysée… ]

      Vous rejoignez là mes commentaires sur la mort du tragique en politique et ailleurs…

  3. Baumgarten dit :

    Malheureusement je crois que vous avez raison. J’ai voté Hollande avec quand-même un peu d’espoir. Je croyais qu’il avait bien compris la situation de la France et qu’il serait pédagogue sur la nécessité de ruptures. Je tarde à exprimer ma déception (C’est la première fois).

    • Descartes dit :

      @Baumgarten

      Je ne peux que vous féliciter de votre franchise, à défaut de pouvoir louer votre clairvoyance…
      Franchement, connaissant ce qu’est le Parti socialiste – une machine électorale au service des "barons" locaux et de quelques figures nationales – et ce qu’est François Hollande – un homme d’appareil dont la carrière a été bâtie sur sa capacité à convaincre les gros crocodiles qu’il était inoffensif, comment pouviez-vous penser qu’Hollande pouvait être l’homme des "ruptures" ?

  4. samuel dit :

    J’ai toujours ce sentiment que vous êtes injuste envers Hollande, et aussi que vous vous méprenez en vous imaginant qu’il est médiocre.
    Vous êtes injuste envers lui, parce que me semble-t-il, et même si globalement notre pays est beau, il a des petits côtés médiocres qui finissent par déteindre sur son président…
    Et vous le mésestimez parce qu’il faut beaucoup de force pour arriver au niveau de pouvoir où il est arrivé, et parce qu’il a une idée, qu’il cherchera peut-être à servir : la construction européenne. Il aura peut-être la grandeur de faire le bon choix par rapport à ce sujet : savoir ce qu’on peut attendre d’une poursuite de la construction fédérale, savoir les sacrifices qu’elle va encore demander, savoir décider quelque chose qui soit vraiment le mieux, entre ces sacrifices et le fédéralisme, ou une réorientation en Europe des nations…

    • Descartes dit :

      @samuel

      [J’ai toujours ce sentiment que vous êtes injuste envers Hollande,]

      Vous avez raison. J’ai tendance à faire preuve à l’encontre de François Hollande d’une trop grande bienveillance par rapport à ce que le personnage mérite…

      [et aussi que vous vous méprenez en vous imaginant qu’il est médiocre.]

      Je n’ai pas dit qu’il fut « médiocre ». C’est probablement un tacticien et un connaisseur hors pair du marigot qu’est le parti socialiste. Seulement, aujourd’hui nous ne sommes pas appelés à juger Hollande le premier secrétaire, mais Hollande le président de la République. Le meilleur des tournevis est inutile lorsqu’il s’agit de planter un clou.

      [Vous êtes injuste envers lui, parce que me semble-t-il, et même si globalement notre pays est beau, il a des petits côtés médiocres qui finissent par déteindre sur son président…]

      Je ne me souviens pas qu’ils aient « fini par déteindre » sur De Gaulle, sur Pompidou, sur Giscard, sur Mitterand, sur Chirac ou sur Sarkozy. Ces personnages, très différents les uns des autres, ont quand même gardé pendant tout leur mandat une capacité à trancher les conflits et à donner une direction sans chercher en permanence à ménager la chèvre et le chou. Et pourtant, plusieurs d’entre eux ont fait face à des chocs extérieurs bien plus forts que le présent gouvernement. L’argument qui ferait de Hollande une victime des circonstances est donc à mon avis irrecevable.

      [Et vous le mésestimez parce qu’il faut beaucoup de force pour arriver au niveau de pouvoir où il est arrivé,]

      Je ne doute pas de sa « force », pas plus que de son sens tactique pour naviguer le marigot socialiste. Mais ces qualités – si on peut parler de qualités – ne sont pas, de toute évidence, suffisantes pour assumer la charge qui est la sienne aujourd’hui. Un commentateur de ce blog a remarquée très justement que les qualités requises pour se faire élire ne sont pas celles requises pour bien exercer la charge à laquelle on est élu… dans le cas Hollande, c’est flagrant.

      [et parce qu’il a une idée, qu’il cherchera peut-être à servir : la construction européenne.]

      Je ne peux que remarquer votre « peut-être ». Même vous n’êtes pas sur qu’il « cherchera à servir » la seule idée que vous lui accordez…
      Je ne sais plus quel penseur nous avait mis en garde contre « les hommes d’une idée ». Surtout une idée aussi vague que la « construction européenne ». Mais vous dites que c’est l’idée d’Hollande. Comment le savez-vous ? Pourriez-vous citer un document quelconque écrit de sa main qui détaille « l’idée » de François Hollande ? Que pensez-vous d’un homme qui a une « idée » et qui en trente ans de vie politique ne prend pas la peine de prendre la plume pour expliquer en quoi elle consiste ?

      [Il aura peut-être la grandeur de faire le bon choix par rapport à ce sujet : savoir ce qu’on peut attendre d’une poursuite de la construction fédérale, savoir les sacrifices qu’elle va encore demander, savoir décider quelque chose qui soit vraiment le mieux, entre ces sacrifices et le fédéralisme, ou une réorientation en Europe des nations…]
      Je ne peux que remarquer encore une fois vos « peut-être »… croyez-vous vraiment, le cœur sur la main, que Hollande « décidera » quoi que ce soit dans ce domaine ? A votre avis, pourquoi n’a-t-il rien décidé de tel dans les quinze mois depuis son élection, alors qu’il a eu dix ans d’opposition pour préparer une telle décision ?

    • CVT dit :

      @Samuel,

      [Et vous le mésestimez parce qu’il faut beaucoup de force pour arriver au niveau de pouvoir où il est arrivé, et parce qu’il a une idée, qu’il cherchera peut-être à servir : la construction européenne]
      Vous savez parfaitement que Hollande n’a pas été élu pour faire une politique pro-UE, c’est même plutôt le contraire!
      Malheureusement, nous savons depuis 2005, certains bien avant, que la "construction européenne" est contraire aux intérêts des Français! Nous avons élu les socialistes pour défendre les intérêts de notre pays, pas pour la construction européenne, dont je me moque comme de ma première chemise (et c’est le cas de bien des Français).
      Pire, l’euro (et son ancêtre le franc fort) est en grande partie responsable de la désindustrialisation de notre pays: il en à la fois la cause et l’outil. Outil car il faut reconnaître une chose, cette désindustrialisation (et concomitamment le chômage) est un choix politique CONSCIENT datant de 1983, avec le tournant de la rigueur… C’est selon moi, la pire ERREUR QUE NOUS, FRANÇAIS, avons commise!
      Hollande est un enfant de Delors, un épigone. A vrai dire, quand il avait été élu, j’ai espéré, à l’instar de Nixon qui avait reconnu la Chine Populaire en 1972, qu’il serait celui qui mettrait en bière la construction européenne. Malheureusement, il n’en a pas l’étoffe, comme nous le montre son comportement désinvolte dans l’affaire Léonarda…

    • J. Payen dit :

      Vous pointez un sujet encore tabou.
      Le rôle éminent et particulièrement néfaste exercé par Jacques Delors
      a) dans la fabrication d’une illusion tenace, celle d’une Europe solidaire qui serait la contrepartie d’une ouverture au Monde et au libre-échangisme;
      b) dans le désarmement progressif (aujourd’hui aveuglant) de l’État face aux banques privées, aux groupes de pression, aux multinationales etc.

      Tant à Paris qu’à Bruxelles, de 1981 à 1995, le simple rappel des "actes" dont Delors fut l’inspirateur et le maitre d’œuvre, révèle qu’ils sont à la source du décrochage moral, économique, industriel de notre pays et de sa perte de leadership dans l’UE.

    • Descartes dit :

      @ J. Payen

      [Vous pointez un sujet encore tabou. Le rôle éminent et particulièrement néfaste exercé par Jacques Delors]

      Tout à fait. Delors partage avec Monnet cette sorte d’immunité à la critique. Sanctifié en vie dans le panthéon des "grands européens", il est lavé par avance de tout pêché. Il contribue d’ailleurs lui même en publiant de temps en temps des papiers expliquant combien ses idées étaient bonnes, et combien si elles n’ont pas marché et abouti à des catastrophes c’est la faute aux autres qui ne les ont pas comprises ou appliquées jusqu’au bout…

  5. dsk dit :

    ["Comment Sazrkozy a réussi cet exploit ? D’abord, par la pédagogie : le débat sur les retraites avait été préparé par une campagne qui a martelé un argument précis, celui de l’allongement de l’espérance de vie et du besoin de rééquilibrer le rapport actifs/inactifs."]

    Sarkozy n’a réussi aucun "exploit". La réforme des retraites faisait partie de l’agenda libéral, et le rapport de forces capital/travail était par trop inégal, si bien que la réforme est passée sans encombres. Voilà tout. S’il y a eu "pédagogie", elle n’a été l’œuvre que des organes de propagande libéraux. Sarkozy, lui, pendant ce temps-là, se bronzait au Cap Nègre. Franchement, je vous avoue que je ne comprends absolument pas cette tendresse pour Sarkozy qui est la vôtre.

    • Descartes dit :

      @dsk

      [Sarkozy n’a réussi aucun "exploit". La réforme des retraites faisait partie de l’agenda libéral, et le rapport de forces capital/travail était par trop inégal, si bien que la réforme est passée sans encombres.]

      Je ne vois pas très bien ce que le rapport de forces capital/travail vient faire dans l’histoire. En quoi le « capital » aurait souffert si la réforme des retraites n’avait pas abouti ? L’équilibre financier du système de retraites dépend d’un jeu entre trois paramètres : l’âge de départ, le montant des cotisations et le montant des pensions. Si l’on n’avait pas touché à l’âge de départ, c’est le montant des pensions qu’il aurait fallu toucher, à moins d’augmenter les cotisations qui pèsent sur le salaire. Le choix entre ces différentes options est assez largement neutre pour le « capital »…

      En fait, votre raisonnement est circulaire. « le rapport de forces capital/travail était trop inégal » ergo « la réforme est passée sans encombre ». Mais comment savez-vous que le rapport de force était inégal ? Mais… parce que la réforme est passée sans encombre, bien sur ! En fait, vous n’apportez aucun élément qui permette de conclure que « le rapport de forces capital/travail était par trop inégal ». Notez que la réforme du SMIC « fait partie de l’agenda libéral » depuis très longtemps. Si « le rapport de forces capital/travail était par trop inégal », comment expliquez-vous que toutes les tentatives de réforme aient abouti à des impasses (pour ne donner qu’un exemple, le CET) ?

      [Voilà tout. S’il y a eu "pédagogie", elle n’a été l’œuvre que des organes de propagande libéraux. Sarkozy, lui, pendant ce temps-là, se bronzait au Cap Nègre.]

      Vraiment ? J’ignorais que Sarkozy était resté au Cap Nègre entre le 16 avril 2010 (date du début de la concertation) et le 10 novembre 2010, date de la promulgation de la loi. Et même au Cap Nègre, il est assez difficile de bronzer en novembre…

      [Franchement, je vous avoue que je ne comprends absolument pas cette tendresse pour Sarkozy qui est la vôtre.]

      Franchise pour franchise, je vous avoue que je ne comprends absolument pas cette détestation irrationnelle que vous éprouvez pour Sarkozy et tout ce qui le touche. On peut être critique de Sarkozy sans pour autant constituer des fables du genre « qu’il est resté bronzer au Cap Nègre » pendant le débat sur la réforme des retraites au mépris des faits. La réforme des retraites est un exemple remarquable d’une réforme difficile et à priori impopulaire qu’un gouvernement a réussi à faire accepter au pays, alors que pourtant il était déjà dans la deuxième partie de son mandat et politiquement affaibli. Considérant ce qui est arrivé à d’autres gouvernements qui ont essayé le même type de réforme, c’est une réussite remarquable. Il me semble donc très intéressant d’analyser avec un regard clinique les ressorts de cette réussite. Bien entendu, cela suppose de regarder les faits, au lieu de répéter des bobards sur les habitudes de bronzage de Sarkozy.

    • dsk dit :

      ["Je ne vois pas très bien ce que le rapport de forces capital/travail vient faire dans l’histoire. En quoi le « capital » aurait souffert si la réforme des retraites n’avait pas abouti ?"]

      Et en quoi le capital a-t-il donc souffert de l’aboutissement de la "réforme" des retraites ? En rien, précisément. Tout l’effort a pesé sur le monde du travail. Or comment l’expliquez-vous, si ce n’est par un rapport de force inégal capital/travail ?

      ["L’équilibre financier du système de retraites dépend d’un jeu entre trois paramètres : l’âge de départ, le montant des cotisations et le montant des pensions. Si l’on n’avait pas touché à l’âge de départ, c’est le montant des pensions qu’il aurait fallu toucher, à moins d’augmenter les cotisations qui pèsent sur le salaire. Le choix entre ces différentes options est assez largement neutre pour le « capital »…"]

      Pourquoi l’augmentation des cotisations devrait-elle forcément peser sur les salaires, si ce n’est parce qu’un rapport de forces inégal empêche de les faire peser sur les profits ?

      ["Mais comment savez-vous que le rapport de force était inégal ?"]

      Eh bien, si les travailleurs ont dû supporter intégralement le coût de cette "réforme" alors pourtant que le rapport de forces était égal, c’est que leurs syndicats sont encore plus nuls et corrompus que tout ce que l’on peut imaginer.

      ["Et même au Cap Nègre, il est assez difficile de bronzer en novembre…"]

      Je vous concède qu’il a dû se rendre à Marrakech à compter du mois d’octobre.

      ["La réforme des retraites est un exemple remarquable d’une réforme difficile et à priori impopulaire qu’un gouvernement a réussi à faire accepter au pays, alors que pourtant il était déjà dans la deuxième partie de son mandat et politiquement affaibli."]

      Vous l’avez dit : c’est le gouvernement. Je pense, en effet, que cette réforme est essentiellement l’œuvre de spécialistes, au premier rang desquels Fillon. Sarkozy n’a rien à voir là-dedans.

      ["Franchise pour franchise, je vous avoue que je ne comprends absolument pas cette détestation irrationnelle que vous éprouvez pour Sarkozy et tout ce qui le touche."]

      En tout cas, il semble que je ne sois pas le seul. Emmanuel Todd, par exemple, paraissait atteint du même syndrome que moi. J’en conclus que je ne dois pas être si irrationnel que cela.

    • Descartes dit :

      @CVT

      ["Je ne vois pas très bien ce que le rapport de forces capital/travail vient faire dans l’histoire. En quoi le « capital » aurait souffert si la réforme des retraites n’avait pas abouti ?". Et en quoi le capital a-t-il donc souffert de l’aboutissement de la "réforme" des retraites ?]

      En rien. Donc nous sommes d’accord que le succès où l’échec de la réforme n’ajoutait rien et ne retranchait rien aux intérêts du capital. Dans ces conditions, le rapport de forces capital/travail est parfaitement neutre. CQFD.

      Je vous rappelle que votre argument était que la réforme était passée parce que le rapport de forces capital/travail était très déséquilibré en faveur du premier. Ce qui suppose implicitement que la réforme allait dans le sens des intérêts du capital. C’est pourquoi je vous repose la question, pour être sur d’avoir bien compris : en quoi la réforme des retraites façon Sarkozy servait les intérêts du capital ?

      [Pourquoi l’augmentation des cotisations devrait-elle forcément peser sur les salaires, si ce n’est parce qu’un rapport de forces inégal empêche de les faire peser sur les profits ?]

      Pour une question de coût marginal du travail. Imaginez que je sois le patron d’une entreprise, et supposez que j’aie un carnet de commandes bien rempli. Je n’ai intérêt à embaucher que si le coût salarial « tout compris » d’un travailleur supplémentaire est supérieur ou égal à l’avantage que j’en tire. Je continuerai à embaucher aussi longtemps que cette condition sera remplie, et donc je m’arrêterai d’embaucher lorsque le coût du travailleur « tout compris » sera égal à la valeur qu’il génère. Il y a donc équilibre à un coût « tout compris » du travailleur. Si j’augmente les cotisations – qui sont un salaire indirect – l’équilibre ne peut être maintenu qu’en réduisant le salaire direct… et si le salaire direct est rigide à la baisse, je serai obligé à licencier le salarié.

      [Eh bien, si les travailleurs ont dû supporter intégralement le coût de cette "réforme" alors pourtant que le rapport de forces était égal,]

      Un bien grand « si ». Pour le moment, vous n’avez nullement montré que les travailleurs aient supporté un quelconque « coût ». Il y a une réalité : a productivité constante, une génération ne peut consommer plus qu’elle ne produit. Si elle vit plus longtemps, et qu’elle travaille autant, alors il faut qu’elle accepte une réduction du niveau de vie. Si elle veut conserver son niveau de vie, il lui faut travailler plus. Seule une augmentation de la productivité permet d’amodier cette règle évidente. Mais nous sommes engagés durablement dans un cycle de faible augmentation de la productivité. C’est un fait. A partir de là, le recul de l’âge de la retraite est un pas logique, qui n’a aucun rapport avec les désirs des méchants capitalistes.

      Si la réforme est injuste, c’est sur un autre aspect : l’espérance de vie n’est pas la même selon les couches sociales, et le système tel qu’il est est lourdement biaisé en faveur des classes moyennes. S’il faut parler d’un rapport de forces déséquilibré, c’est surtout là qu’il se trouve.

      [Vous l’avez dit : c’est le gouvernement. Je pense, en effet, que cette réforme est essentiellement l’œuvre de spécialistes, au premier rang desquels Fillon. Sarkozy n’a rien à voir là-dedans.]

      La réforme est l’œuvre de spécialistes. Mais ce qui est en discussion ici n’est pas la réforme en elle-même, c’est son pilotage politique. Et celui-là a été piloté au plus haut niveau. La décision de céder sur tel ou tel point secondaire tout en restant ferme sur le principal n’a pas été prise à Matignon, mais à l’Elysée. Même en supposant que Sarkozy eut délégué la conduite de l’affaire au premier ministre, cette décision de délégation est en elle-même une décision politique dont le mérite reviendrait au président…

      [En tout cas, il semble que je ne sois pas le seul. Emmanuel Todd, par exemple, paraissait atteint du même syndrome que moi. J’en conclus que je ne dois pas être si irrationnel que cela.]

      Vous me décevez… pensez-vous vraiment que le fait qu’une idée soit partagée est suffisant pour qu’elle soit rationnelle ? Avez-vous une idée combien de personnalités estimables ont cru pendant des siècles à l’immortalité de l’âme ? Diriez-vous que cela prouve que cette idée n’est « pas si irrationnel que cela » ?

      Non, si cela peut vous consoler, vous n’êtes pas « seul » autour de la détestation irrationnelle de tout ce qui concerne Sarkozy. C’est bien là le problème : cette détestation a rendu toute analyse de la geste sarkozienne impossible. Dès que vous essayez de décortiquer ses actes, ses méthodes, ses discours, on vous somme de les condamner sans réserve sous peine d’excommunication. Personnellement, je ne trouve pas cette attitude très « rationnelle » : si Sarkozy a réussi d’abord à se faire élire, puis à gouverner avec un minimum de résistance populaire, c’est bien qu’il avait correctement analysé et compris l’état de la société française, qu’il avait proposé aux français une figure présidentielle qui n’était pas trop éloignée de ce qu’ils demandaient. Il faut d’ailleurs noter que si Sarkozy a fait des erreurs dans ce domaine – son « casse toi pov’con », l’affaire de la « princesse de Clèves », le « bling-bling » des débuts – il a montré une remarquable capacité d’apprentissage pour ne pas les refaire.

      Cela ne suppose aucune indulgence coupable pour Sarkozy que d’admettre par exemple qu’il a su apprendre de ses erreurs, ou qu’il s’est entouré à l’Elysée d’une équipe de qualité dont les membres connaissaient à merveille les arcanes de l’art de gouverner et qui accessoirement étaient animés d’une véritable esprit d’équipe. Une équipe qui d’ailleurs était assez diverse politiquement, sans que cela se traduise par une cacophonie permanente. Si la gauche avait étudié mieux sa manière de faire au lieu de décréter qu’il fallait faire le contraire, Hollande ne serait peut-être pas dans la situation où il est.

      Le problème de la gauche, c’est qu’elle est toujours dans l’étape animale. Pour unir le groupe, comme l’écrivait Konrad Lorentz dans ses études sur l’agression, il faut canaliser l’agressivité vers un ennemi extérieur, pour empêcher qu’elle se manifeste entre les membres du groupe. La figure de Sarkozy a joué ce rôle. Mais cela n’a rien de « rationnel », tout au contraire. C’est le degré zéro de l’analyse politique.

    • bovard dit :

      Sarkozy a eu l’habileté de réformer uniquement le régime général de la retraite.
      Pour se préserver de la CGT ,Sarkozy a donné encore plus d’avantages au régimes particuliers des cheminots,de la ratp,des journalistes etc..Les leçons de l’échec de Juppé,en 1995 ont été benoitement appliquées par Sarkozy,sans véritable vision de l’intérêt du pays.Il a laissé les finances encore plus exsangues qu’avant cette pseudo réforme,que la CGT transports n’a pas réellement combattue puisqu’elle lui était avantageuse..

    • Descartes dit :

      @bovard

      [Sarkozy a eu l’habileté de réformer uniquement le régime général de la retraite.]

      Oui et non. Certaines mesures prises dans la réforme Sarkozy touchent les régimes spéciaux. Ainsi, par exemple, l’âge limite pour départ sans décote, porté de 65 à 67 ans, touche tous les régimes. Certaines mesures touchent spécifiquement certains régimes: par exemple, l’augmentation du taux de cotisations des fonctionnaires, portées de 7% à 10%. Il est vrai que, contrairement à Juppé, Sarkozy n’a pas fait du "haro sur les régimes spéciaux" pour plaire à son électorat. Entre autres choses, parce qu’il a compris qu’un alignement des régimes spéciaux sur le régime général n’est pas forcément avantageux pour le régime en question. Avec des règles différentes tant sur l’age de départ que sur les règles de calcul des pensions, les régimes aboutissent en fait à un taux de couverture assez similaire. Mais vous avez raison de signaler qu’à l’heure d’orgainser sa communication, Sarkozy a préféré passer sa réforme plutôt que céder au plaisir d’humilier l’adversaire, ce qui fut l’erreur fatale de Juppé.

      [Il a laissé les finances encore plus exsangues qu’avant cette pseudo réforme,]

      Pourriez-vous m’indiquer sur quelles données se fonde ce diagnostic ?

      [que la CGT transports n’a pas réellement combattue puisqu’elle lui était avantageuse..]

      Vous voulez dire que Sarkozy n’était finalement qu’un suppôt de la CGT ? On en apprend, des choses…

    • dsk dit :

      ["En rien. Donc nous sommes d’accord que le succès où l’échec de la réforme n’ajoutait rien et ne retranchait rien aux intérêts du capital."]

      Je n’ai jamais dit que la réforme "ajoutait aux intérêts du capital". J’ai dit qu’elle "faisait partie de l’agenda libéral", ce qui n’est pas la même chose. Un libéral peut fort bien être mû par ce qu’il pense sincèrement être l’intérêt général, sans forcément viser l’accroissement des profits. Là où cette réforme est néanmoins d’essence libérale, c’est qu’elle occulte complètement de son horizon toute possibilité d’augmenter ce salaire indirect que représente la retraite.

      ["Dans ces conditions, le rapport de forces capital/travail est parfaitement neutre. CQFD."]

      Non, puisque si le rapport de forces avait été autre, le capital aurait été mis à contribution.

      ["Si j’augmente les cotisations – qui sont un salaire indirect – l’équilibre ne peut être maintenu qu’en réduisant le salaire direct… et si le salaire direct est rigide à la baisse, je serai obligé à licencier le salarié."]

      Je vous avoue que je comprend pas très bien, mais après tout peu importe, admettons que vous ayez raison, augmenter les salaires, ce serait impossible, car ce serait accroître le chômage. Eh bien voilà en quoi le rapport de forces serait inégal, puisque le salarié n’aurait le choix qu’entre son salaire ou la porte.

      ["Un bien grand « si ». Pour le moment, vous n’avez nullement montré que les travailleurs aient supporté un quelconque « coût ». Il y a une réalité : a productivité constante, une génération ne peut consommer plus qu’elle ne produit. Si elle vit plus longtemps, et qu’elle travaille autant, alors il faut qu’elle accepte une réduction du niveau de vie. Si elle veut conserver son niveau de vie, il lui faut travailler plus. Seule une augmentation de la productivité permet d’amodier cette règle évidente. Mais nous sommes engagés durablement dans un cycle de faible augmentation de la productivité. C’est un fait."]

      Il me semble que vous êtes là dans une logique de retraite par capitalisation. Dans une logique de répartition, une génération peut consommer plus qu’elle ne produit, ou plutôt qu’elle n’a produit. Ce qui compte, c’est ce que produit la génération qui lui sert a pension. Or qui vous dit que dans 20 ans, la productivité ne repartira pas à la hausse ?

      ["A partir de là, le recul de l’âge de la retraite est un pas logique, qui n’a aucun rapport avec les désirs des méchants capitalistes."]

      C’est un pas logique, si l’on admet que la désindustrialisation et le chômage de masse sont notre horizon indépassable.

      ["Si la réforme est injuste, c’est sur un autre aspect : l’espérance de vie n’est pas la même selon les couches sociales, et le système tel qu’il est est lourdement biaisé en faveur des classes moyennes. S’il faut parler d’un rapport de forces déséquilibré, c’est surtout là qu’il se trouve."]

      Tiens donc… Sarkozy aurait donc quand même reculé devant les trop fameuses classes moyennes ? Ce grand homme, injustement méprisé, se serait, en réalité, surtout montré inflexible envers les plus pauvres ?

      ["Non, si cela peut vous consoler, vous n’êtes pas « seul » autour de la détestation irrationnelle de tout ce qui concerne Sarkozy. C’est bien là le problème : cette détestation a rendu toute analyse de la geste sarkozienne impossible."]

      Je trouve ce qualificatif d’"irrationnelle" assez curieux. Qu’est-ce qui vous permet de penser que détester Sarkozy serait "irrationnel" ? En ce qui me concerne, il peut y avoir un côté, disons subjectif plutôt qu’irrationnel dans ma détestation de Sarkozy. Un homme politique, pour moi, c’est une sorte d’artiste, un acteur. Or j’ai détesté la prestation de Sarkozy dans le rôle de Président de la république. Sarkozy est, à mon goût, un épouvantable cabot, qui joue faux, et me fait toujours l’effet de penser l’exact contraire de ce qu’il dit. Cela dit, vous avez le droit d’être d’une opinion différente, mais je n’irais pas dire pour autant que vous êtes "irrationnel". Si vous voulez, à présent, des raisons plus objectives de ma détestation, je ne vous en donnerai que la principale : il se trouve que je suis souverainiste. Or Sarkozy est celui qui a trahi le vote des français de 2005, qui a réintégré l’OTAN, puis qui a détruit l’État Libyen sous prétexte d’ingérence "humanitaire".

      ["si Sarkozy a réussi d’abord à se faire élire, puis à gouverner avec un minimum de résistance populaire, c’est bien qu’il avait correctement analysé et compris l’état de la société française, qu’il avait proposé aux français une figure présidentielle qui n’était pas trop éloignée de ce qu’ils demandaient."]

      Eh oui, un sacré malin ce Sarkozy. Aidé de ses spécialistes en marketing politique, il a su faire mouche en 2007 auprès des classes populaires, en leur tenant exactement les discours qu’elles voulaient entendre. Au Fouquet’s, on en rigole encore.

    • Descartes dit :

      @dsk

      ["En rien. Donc nous sommes d’accord que le succès où l’échec de la réforme n’ajoutait rien et ne retranchait rien aux intérêts du capital." Je n’ai jamais dit que la réforme "ajoutait aux intérêts du capital".]

      Faudrait savoir : vous avez affirmé que la réforme est passée parce que « le rapport de force capital/travail était trop déséquilibré ». Mais pourquoi le capital aurait donc utilisé sa « force » pour faire passer une loi qui ne l’avantageait en rien ? Si la réforme était indifférente pour le capital, alors le « rapport de force capital/travail » n’aurait eu aucune influence dans le résultat final…

      [Là où cette réforme est néanmoins d’essence libérale, c’est qu’elle occulte complètement de son horizon toute possibilité d’augmenter ce salaire indirect que représente la retraite.]

      Je ne vois pas très bien le rapport avec « l’essence libérale ». Le problème à résoudre est le déséquilibre introduit dans le système par l’allongement de la durée de vie à retraite constante. Si en plus vous augmentez les retraites, vous ne faites qu’aggraver encore le problème.

      [Non, puisque si le rapport de forces avait été autre, le capital aurait été mis à contribution.]

      Pourquoi ? Dans toute l’histoire des retraites en France, on n’a jamais fondé le financement des pensions sur le capital. Et pourtant, le rapport de forces a longtemps été plutôt favorable au travail. Avec votre raisonnement, on arriverait à croire que le capital ne fut jamais aussi faible qu’au début des années 1980. N’est ce pas alors qu’on a créé l’impôt sur la fortune ?

      [Eh bien voilà en quoi le rapport de forces serait inégal, puisque le salarié n’aurait le choix qu’entre son salaire ou la porte.]

      Vous connaissez beaucoup d’époques ou le choix n’était pas celui-là ?

      [Il me semble que vous êtes là dans une logique de retraite par capitalisation. Dans une logique de répartition, une génération peut consommer plus qu’elle ne produit, ou plutôt qu’elle n’a produit. Ce qui compte, c’est ce que produit la génération qui lui sert a pension. Or qui vous dit que dans 20 ans, la productivité ne repartira pas à la hausse ?]

      Si elle repart à la hausse, et que les actifs acceptent que cette hausse ne leur soit pas intégralement répercutée, on pourra réfléchir à avancer l’âge de départ à la retraite, ou bien d’augmenter les retraites. Mais en l’absence d’une rupture technologique majeure, le plus probable est que la croissance ne dépasse pas en moyenne 1% à 2%. Et encore, à supposer qu’on arrive à se débarrasser de l’Euro. Et le rôle du législateur est de se préparer au scénario le plus probable.

      [C’est un pas logique, si l’on admet que la désindustrialisation et le chômage de masse sont notre horizon indépassable.]

      Vous seriez prêt à parier votre retraite que le chômage disparaîtra et la France sera réindustrialisée d’ici dix à vingt ans ? Non ? Et alors, pourquoi faudrait-il que la société fasse le pari que vous n’êtes pas prêt à faire ?

      [Tiens donc… Sarkozy aurait donc quand même reculé devant les trop fameuses classes moyennes ? Ce grand homme, injustement méprisé, se serait, en réalité, surtout montré inflexible envers les plus pauvres ? ]

      Eh oui… aucun politique aujourd’hui, qu’il soit de droite ou de gauche, ne peut défier les classes moyennes et vivre pour le raconter… et Sarkozy, qui n’est peut-être pas un « grand homme » mais qui a un excellent flair politique, l’a très bien compris. Ses successeurs aussi, d’ailleurs. C’est pourquoi la différence entre la réforme Sarkozy et la réforme Hollande est minime…

      [Je trouve ce qualificatif d’"irrationnelle" assez curieux. Qu’est-ce qui vous permet de penser que détester Sarkozy serait "irrationnel" ?]

      Je n’ai pas dit ça. Il y a des gens qui détestent Sarkozy pour des raisons parfaitement rationnelles. Mais une grande partie de la bienpensance déteste Sarkozy d’une manière totalement irrationnelle, soit en lui attribuant des actions/pensées/déclarations qui ne sont pas les siennes, soit en interprétant des actions/déclarations de manière à lui donner un statut quasi-démoniaque. Avez-vous besoin que je donne des exemples ?

      [En ce qui me concerne, il peut y avoir un côté, disons subjectif plutôt qu’irrationnel dans ma détestation de Sarkozy. Un homme politique, pour moi, c’est une sorte d’artiste, un acteur. Or j’ai détesté la prestation de Sarkozy dans le rôle de Président de la république. Sarkozy est, à mon goût, un épouvantable cabot, qui joue faux, et me fait toujours l’effet de penser l’exact contraire de ce qu’il dit.]

      Jusque là, c’est parfaitement rationnel. Mais lorsque vous affirmez que Sarkozy n’eut aucun rôle dans le vote de la réforme des retraites puisqu’à l’époque « il était resté bronzer au Cap Nègre », quel statut a cette affirmation à votre avis ? Ce n’est pas là une question de « subjectivité », mais une pure invention. Maintenant, pensez-vous que ce genre d’inventions permettent un débat rationnel sur le bilan des années Sarkozy ?

      [Si vous voulez, à présent, des raisons plus objectives de ma détestation, je ne vous en donnerai que la principale : il se trouve que je suis souverainiste. Or Sarkozy est celui qui a trahi le vote des français de 2005, qui a réintégré l’OTAN, puis qui a détruit l’État Libyen sous prétexte d’ingérence "humanitaire".]

      Je partage ces reproches. Mais je n’oublie pas non plus que s’il a pu trahir le vote des français de 2005, c’est avec l’aide des socialistes qui ont voté la réforme constitutionnelle nécessaire à la ratification. Que l’intervention en Libye fut elle aussi soutenue par la plus grande partie des « bienpensants », tout comme la réintégration de l’OTAN… A l’heure de choisir entre Hollande et Sarkozy, ces reproches ne sont donc pas véritablement rédhibitoires…

      [Eh oui, un sacré malin ce Sarkozy. Aidé de ses spécialistes en marketing politique, il a su faire mouche en 2007 auprès des classes populaires, en leur tenant exactement les discours qu’elles voulaient entendre.]

      Si c’était si facile, qu’est ce que vous attendez pour faire de même ? En fait, le succès de Sarkozy tient précisément à ce qu’il a fait exactement le contraire de ce que les « spécialistes en marketing politique » lui suggéraient…

    • dsk dit :

      ["Le problème à résoudre est le déséquilibre introduit dans le système par l’allongement de la durée de vie à retraite constante. Si en plus vous augmentez les retraites, vous ne faites qu’aggraver encore le problème."]

      Je ne pensais pas à l’augmentation du montant des pensions. Je pensais à une augmentation des cotisations, prise en charge par les employeurs, afin de combler le déficit. Ceci reviendrait bien à une augmentation du salaire indirect.

      ["Pourquoi ? Dans toute l’histoire des retraites en France, on n’a jamais fondé le financement des pensions sur le capital."]

      C’est le contraire. Depuis toujours, c’est le capital qui paye les retraites. Supposons que le système de retraite par répartition soit purement et simplement supprimé. Croyez-vous que les employeurs rétrocèderaient spontanément le montant des cotisations sous forme de salaires ? En tout cas, je suis marxiste sur ce point : ce qui détermine le montant du salaire, ce n’est en réalité que le coût de l’entretien de la force de travail. Si le SMIC est déjà supérieur à ce coût, la loi du marché fera en sorte qu’il n’augmente pas, retraite ou pas retraite. Incidemment, ceci implique aussi que l’on aura beau toujours "travailler plus plus pour gagner plus", le salaire restera toujours le même, puisqu’en réalité, il ne dépend pas du temps de travail.

      [Eh bien voilà en quoi le rapport de forces serait inégal, puisque le salarié n’aurait le choix qu’entre son salaire ou la porte.] ["Vous connaissez beaucoup d’époques ou le choix n’était pas celui-là ?"]

      En 1968, il me semble que le SMIC a fait l’objet d’une augmentation substantielle, sans que cela donne lieu à une explosion du chômage.

      ["Si elle repart à la hausse, et que les actifs acceptent que cette hausse ne leur soit pas intégralement répercutée, on pourra réfléchir à avancer l’âge de départ à la retraite, ou bien d’augmenter les retraites."]

      Je doute que les libéraux, à ce moment, réfléchissent à cette possibilité. Ils nous expliqueront que le travail, c’est l’épanouissement, qu’avec le retour de la croissance, on a besoin de tous les travailleurs, y compris ceux qui sont âgés, et qui sont en pleine forme grâce aux progrès de la médecine etc. Voici peut-être d’ailleurs en quoi le capital avait bien quelque chose à gagner à cette réforme : en cas de retour à meilleure fortune, il sera difficile de rétablir la situation antérieure.

      ["Vous seriez prêt à parier votre retraite que le chômage disparaîtra et la France sera réindustrialisée d’ici dix à vingt ans ?"]

      Si Sarkozy revient aux affaires, certainement pas. Le rôle d’un dirigeant n’est pas de "parier" sur la réindustrialisation et la disparition du chômage. Il est d’agir concrètement et efficacement pour atteindre ces objectifs, ce qui implique évidemment qu’il soit tout sauf un libéral.

      ["Mais une grande partie de la bienpensance déteste Sarkozy d’une manière totalement irrationnelle, soit en lui attribuant des actions/pensées/déclarations qui ne sont pas les siennes, soit en interprétant des actions/déclarations de manière à lui donner un statut quasi-démoniaque. Avez-vous besoin que je donne des exemples ?"]

      Et vous trouvez que quelqu’un qui est capable d’inspirer de tels sentiments de défiance, confinant à la paranoïa, serait un bon dirigeant ? Pour ma part, je dirais que même à supposer qu’il n’y soit pour rien, ce que je ne pense évidemment pas, il n’est pas bon pour la France d’avoir un tel personnage à l’Élysée. Il paraît que Chirac avait dit un jour à son propos : "Donner le pouvoir à Sarkozy, ce serait comme allumer un barbecue en plein mois d’août dans l’Estérel.".

      ["Mais lorsque vous affirmez que Sarkozy n’eut aucun rôle dans le vote de la réforme des retraites puisqu’à l’époque « il était resté bronzer au Cap Nègre », quel statut a cette affirmation à votre avis ? Ce n’est pas là une question de « subjectivité », mais une pure invention."]

      C’était une image. Pour avoir entendu un certain nombre de fois Sarkozy discourir à bâtons rompus, sans le support de Guaino, je suis parvenu à la conviction qu’il n’avait probablement pas la capacité intellectuelle de pénétrer les détails techniques d’un dossier comme celui de la réforme des retraites, par exemple. D’où ma conviction que ce sont en réalité les techniciens de son gouvernement qui s’en sont chargés.

      ["A l’heure de choisir entre Hollande et Sarkozy, ces reproches ne sont donc pas véritablement rédhibitoires…"]

      Je ne suis pas en train d’essayer de vous convaincre qu’Hollande vaudrait mieux que Sarkozy. Mon point est que Sarkozy, en tout cas, ne vaut pas mieux qu’Hollande.

      [Eh oui, un sacré malin ce Sarkozy. Aidé de ses spécialistes en marketing politique, il a su faire mouche en 2007 auprès des classes populaires, en leur tenant exactement les discours qu’elles voulaient entendre.] ["Si c’était si facile, qu’est ce que vous attendez pour faire de même ?"]

      Bien que Sarkozy ait pris soin, dès son arrivée, de doubler son salaire de Président de la République, je trouve que ce n’est pas encore suffisamment bien payé.

      ["En fait, le succès de Sarkozy tient précisément à ce qu’il a fait exactement le contraire de ce que les « spécialistes en marketing politique » lui suggéraient…"]

      Ah bon. J’avais cru comprendre qu’il avait suivi les conseils de Buisson. Peut-être ne considérez-vous pas celui-ci comme un spécialiste en marketing politique ?

    • Descartes dit :

      @dsk

      [Je ne pensais pas à l’augmentation du montant des pensions. Je pensais à une augmentation des cotisations, prise en charge par les employeurs, afin de combler le déficit. Ceci reviendrait bien à une augmentation du salaire indirect.]

      L’idée qu’une partie des cotisations est « prise en charge par l’employeur » est une fiction. Toute cotisation est prise en fait sur le salaire. Il est facile de comprendre pourquoi : lors de la négociation du salaire entre l’employeur et l’employé, l’employeur juge s’il a intérêt à embaucher ou pas un salarié supplémentaire en considérant combien le salarié lui coûte « tout compris », c’est-à-dire part patronale incluse. En fait, pour l’employeur ce qui importe c’est combien d’argent le travailleur lui coûte, et le fait que cet argent parte en salaire direct ou en cotisations lui est parfaitement indifférent. S’il n’y avait pas de « part patronale », la négociation aboutirait donc à un salaire direct plus élevé

      [C’est le contraire. Depuis toujours, c’est le capital qui paye les retraites. Supposons que le système de retraite par répartition soit purement et simplement supprimé. Croyez-vous que les employeurs rétrocèderaient spontanément le montant des cotisations sous forme de salaires ?]

      Bien sur que oui. J’ai expliqué pourquoi plus haut…

      [En tout cas, je suis marxiste sur ce point : ce qui détermine le montant du salaire, ce n’est en réalité que le coût de l’entretien de la force de travail. Si le SMIC est déjà supérieur à ce coût, la loi du marché fera en sorte qu’il n’augmente pas, retraite ou pas retraite. Incidemment, ceci implique aussi que l’on aura beau toujours "travailler plus plus pour gagner plus", le salaire restera toujours le même, puisqu’en réalité, il ne dépend pas du temps de travail.]

      Je ne comprends pas très bien ce raisonnement. Le « coût d’entretien de la force de travail » fixe un plancher pour les salaires, mais ne fixe pas le salaire lui-même. La preuve est qu’on paye des salaires très supérieures au coût d’entretien de la force de travail. Par ailleurs, si comme vous dites « le salaire reste toujours le même » indépendamment du temps de travail, comment expliquez vous que les travailleurs qui font des heures supplémentaires gagnent plus que ceux qui n’en font pas ?

      [En 1968, il me semble que le SMIC a fait l’objet d’une augmentation substantielle, sans que cela donne lieu à une explosion du chômage.]

      Oui, parce que le SMIC avait un retard important sur les augmentations de productivité. Mais c’est aussi à partir de 1968 que le chômage, pratiquement inexistant auparavant, commence à décoller…

      [Je doute que les libéraux, à ce moment, réfléchissent à cette possibilité. Ils nous expliqueront que le travail, c’est l’épanouissement, qu’avec le retour de la croissance, on a besoin de tous les travailleurs, y compris ceux qui sont âgés, et qui sont en pleine forme grâce aux progrès de la médecine etc.]

      Ce qui revient à privilégier dans la distribution des fruits de la croissance l’augmentation du niveau de vie plutôt que la réduction du temps de travail. C’est tout…

      [Voici peut-être d’ailleurs en quoi le capital avait bien quelque chose à gagner à cette réforme : en cas de retour à meilleure fortune, il sera difficile de rétablir la situation antérieure.]

      Et pourquoi ça ? L’expérience montre qu’il est plus facile d’avancer l’âge de la retraite que de le retarder…

      [Et vous trouvez que quelqu’un qui est capable d’inspirer de tels sentiments de défiance, confinant à la paranoïa, serait un bon dirigeant ?]

      Non. Je dirais que quelqu’un capable d’inspirer de tels sentiments mérite, tout comme n’importe qui, qu’on juge son action d’après les faits, et non d’après les fantasmes. Par ailleurs, je vous rappelle que mongénéral, que nous admirons tant aujourd’hui, a suscité dans beaucoup de quartiers des sentiments de haine irrationnelle pas très différents à ceux de Sarkozy. Pour les pieds-noirs, c’était un traître, pour l’extrême gauche, un « général fasciste ».

      ["Mais lorsque vous affirmez que Sarkozy n’eut aucun rôle dans le vote de la réforme des retraites puisqu’à l’époque « il était resté bronzer au Cap Nègre », quel statut a cette affirmation à votre avis ? Ce n’est pas là une question de « subjectivité », mais une pure invention." C’était une image.]

      Une « image » de quoi ? Même comme « image », elle était fausse. Sarkozy a participé à toute la procédure de réforme des retraites, depuis la « concertation » qu’il a lancée lui-même, jusqu’aux derniers arbitrages. Votre idée qu’il n’aurait participé que de loin à l’affaire est une pure invention, je persiste et signe.

      [Pour avoir entendu un certain nombre de fois Sarkozy discourir à bâtons rompus, sans le support de Guaino, je suis parvenu à la conviction qu’il n’avait probablement pas la capacité intellectuelle de pénétrer les détails techniques d’un dossier comme celui de la réforme des retraites, par exemple. D’où ma conviction que ce sont en réalité les techniciens de son gouvernement qui s’en sont chargés.]

      Si tel était le cas, il mérite encore plus mon admiration. Il est difficile à un homme politique de piloter un tel dossier, il est encore plus difficile pour lui de reconnaître qu’il n’en est pas capable, de s’entourer des techniciens capables de le faire et de leur laisser les mains libres tout en les « couvrant » politiquement. C’est cela aussi le mérite de Sarkozy – et le grand problème de Hollande : connaître ses limites et savoir s’entourer.

      ["En fait, le succès de Sarkozy tient précisément à ce qu’il a fait exactement le contraire de ce que les « spécialistes en marketing politique » lui suggéraient…" Ah bon. J’avais cru comprendre qu’il avait suivi les conseils de Buisson.]

      Pas en 2007. Et en 2007, il a gagné. Je vous accorde qu’à vaincre Ségolène on triomphe sans gloire, mais c’est un triomphe quand même.

    • dsk dit :

      ["Il est facile de comprendre pourquoi : lors de la négociation du salaire entre l’employeur et l’employé, l’employeur juge s’il a intérêt à embaucher ou pas un salarié supplémentaire en considérant combien le salarié lui coûte « tout compris », c’est-à-dire part patronale incluse."]

      Pas seulement. Il juge aussi de la valeur, sur le marché du travail, du candidat à l’emploi. Même si, avec un salaire de 10.000 €, il y gagnait encore, pourquoi voulez-vous qu’il paie autant, s’il trouve un autre candidat acceptant le SMIC ?

      ["En fait, pour l’employeur ce qui importe c’est combien d’argent le travailleur lui coûte, et le fait que cet argent parte en salaire direct ou en cotisations lui est parfaitement indifférent. S’il n’y avait pas de « part patronale », la négociation aboutirait donc à un salaire direct plus élevé"]

      Encore faut-il que le salarié ait un pouvoir de négociation.

      ["Je ne comprends pas très bien ce raisonnement. Le « coût d’entretien de la force de travail » fixe un plancher pour les salaires, mais ne fixe pas le salaire lui-même."]

      Lorsque le salarié n’a à offrir que sa force de travail, qualité que l’on trouve chez tous les individus, son pouvoir de négociation est nul. Le plancher tend alors à se confondre avec le plafond.

      ["La preuve est qu’on paye des salaires très supérieures au coût d’entretien de la force de travail."]

      Cela prouve juste que certains salariés ont un pouvoir de négociation, du fait qu’ils possèdent une compétence rare, par exemple.

      ["Par ailleurs, si comme vous dites « le salaire reste toujours le même » indépendamment du temps de travail, comment expliquez vous que les travailleurs qui font des heures supplémentaires gagnent plus que ceux qui n’en font pas ?"]

      Parce que c’est la loi. Mais celle du marché tend, d’un autre côté, à ramener toujours le prix de la force de travail au prix qu’elle vaut, c’est-à-dire au prix strictement nécessaire pour la produire, indépendamment du temps pendant lequel elle est utilisée. Autrement dit, tandis que d’un côté, on "travaille plus pour gagner plus", de l’autre le salaire horaire baisse, si bien qu’avec de la chance, on travaille plus pour gagner autant.

      ["Oui, parce que le SMIC avait un retard important sur les augmentations de productivité. Mais c’est aussi à partir de 1968 que le chômage, pratiquement inexistant auparavant, commence à décoller…"]

      Ah bon. Je croyais que c’était à partir de 1973, à cause de la crise du pétrole.

      ["Ce qui revient à privilégier dans la distribution des fruits de la croissance l’augmentation du niveau de vie plutôt que la réduction du temps de travail. C’est tout…"]

      Et vous croyez que les "fruit de la croissance" seront ainsi distribués généreusement ? Pour la première fois de son histoire, le MEDEF déclarera que, puisque les fruits de la croissance sont là, il convient de les distribuer, sous forme d’augmentation du niveau de vie ?
      Si vous le permettez, Descartes, je vais me faire un peu taquin : je trouve que votre discours exprime un point de vue typique de la "classe moyenne", c’est-à-dire celui d’un travailleur "ni exploiteur ni exploité", car il dispose d’un pouvoir important de négociation. Si son patron l’embauche, c’est à condition qu’il n’y perde pas, mais ce n’est pas non plus sur lui qu’il compte pour réaliser une plus-value…

      ["C’est cela aussi le mérite de Sarkozy – et le grand problème de Hollande : connaître ses limites et savoir s’entourer."]

      Sarkozy ne connaît aucune limite, c’est bien cela, entre autres, que je lui reproche. D’autre part, ce que l’on peut dire, c’est surtout qu’il a bénéficié de l’expérience et de la compétence de l’équipe Chirac. Les ministres purement "sarkozystes" étaient, quant à eux, nullissimes. En réalité, je serais prêt à vous suivre dans tout ce que vous dîtes, si vous me parliez de la droite en général, plutôt que de Sarkozy. Il est vrai que la droite est plus professionnelle, plus sérieuse, plus cohérente, et à moins tendance à reculer que la gauche. Sarkozy, encore une fois, n’a rien à voir là-dedans.

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Pas seulement. Il juge aussi de la valeur, sur le marché du travail, du candidat à l’emploi. Même si, avec un salaire de 10.000 €, il y gagnait encore, pourquoi voulez-vous qu’il paie autant, s’il trouve un autre candidat acceptant le SMIC ?]

      Il faut raisonner en termes de coût marginal. Les salaires tendent à s’aligner sur le prix du dernier travailleur embauché, et non sur le premier. Mais quelque soient les termes de la négociation, ce que l’employeur regarde est le coût « tout compris ». Si l’accord se fait – en fonction des pouvoirs de négociation de l’un et de l’autre – à 1500 € par mois, peut importe pour le patron quelle est la partie qui part en cotisations et quelle est le montant qui va en salaire direct. La conséquence est alors évidente : lorsque l’Etat impose une augmentation des cotisations, comme cela ne change en rien l’équilibre dans la négociation, l’augmentation se traduit par une réduction du salaire direct, et non par un coût supplémentaire pour le patron. Et cela même si la cotisation figure comme « patronale »…

      Il est vrai qu’il existe une rigidité des contrats, qui fait que DANS LE COURT TERME une augmentation de la part patronale ne se traduit pas par une réduction du salaire direct, puisque l’employeur ne peut changer facilement les termes du contrat de travail une fois que celui-ci est conclu. Mais dans le long terme, au cours des négociations subséquentes, l’augmentation sera transférée sur le salaire direct.

      [Cela prouve juste que certains salariés ont un pouvoir de négociation, du fait qu’ils possèdent une compétence rare, par exemple.]

      En d’autres termes, c’est bien un rapport de marché qui fixe le salaire en fonction du rapport offre/demande. Et le SMIC n’est qu’un plancher. CQFD.

      ["Par ailleurs, si comme vous dites « le salaire reste toujours le même » indépendamment du temps de travail, comment expliquez vous que les travailleurs qui font des heures supplémentaires gagnent plus que ceux qui n’en font pas ?" Parce que c’est la loi.]

      Mais… vous m’avez expliqué que la Loi était le résultat d’un rapport déséquilibré entre le capital et le travail. Si la loi ordonne de payer les heures supplémentaires, c’est donc que c’est la volonté du capital de le faire, non ?

      Soyons sérieux : les patrons payent les heures de travail supplémentaires tout simplement parce que s’ils ne le faisaient pas, personne n’en ferait. Le salaire dépend donc bien du temps de travail.

      [Mais celle du marché tend, d’un autre côté, à ramener toujours le prix de la force de travail au prix qu’elle vaut, c’est-à-dire au prix strictement nécessaire pour la produire, indépendamment du temps pendant lequel elle est utilisée.]

      Je trouve votre idée comme quoi la loi du marche ramènerait le « prix » d’un bien à la valeur strictement nécessaire pour le produire assez étrange. Pensez-vous vraiment que ce soit le cas ?

      ["Oui, parce que le SMIC avait un retard important sur les augmentations de productivité. Mais c’est aussi à partir de 1968 que le chômage, pratiquement inexistant auparavant, commence à décoller…" Ah bon. Je croyais que c’était à partir de 1973, à cause de la crise du pétrole.]

      Eh oui, et vous n’êtes pas le seul… mais c’est inexact.

      [Et vous croyez que les "fruit de la croissance" seront ainsi distribués généreusement ? Pour la première fois de son histoire, le MEDEF déclarera que, puisque les fruits de la croissance sont là, il convient de les distribuer, sous forme d’augmentation du niveau de vie ?]

      Bien entendu. Parce que plus de niveau de vie, c’est plus de consommation, et donc plus de demande pour les produits que le MEDEF fabrique et vend. Ce n’est pas une question de « générosité ». Le choix de « travailler moins pour consommer moins » n’est certainement pas dans l’intérêt du capital…

      ["C’est cela aussi le mérite de Sarkozy – et le grand problème de Hollande : connaître ses limites et savoir s’entourer." Sarkozy ne connaît aucune limite, c’est bien cela, entre autres, que je lui reproche.]

      Vous vous laissez encore emporter par la haine irrationnelle. Ce n’est pas avec ce genre d’affirmations à l’emporte-pièce que vous arriverez à cerner le personnage. Sarkozy connaissait bien ses limites. S’il a attiré et conservé à côté de lui un Guaino, c’est précisément parce qu’il comprenait très bien qu’il était capable de faire pour lui des choses qu’il n’était pas capable de faire lui-même.

      [D’autre part, ce que l’on peut dire, c’est surtout qu’il a bénéficié de l’expérience et de la compétence de l’équipe Chirac. Les ministres purement "sarkozystes" étaient, quant à eux, nullissimes.]

      Bénéficier de l’expérience d’autrui implique connaître ses propres limitations. Quant aux ministres sarkozystes, je ne pense pas qu’on puisse qualifier Fillon, Borloo, Bertrand ou NKM de « nullissimes ».

      [En réalité, je serais prêt à vous suivre dans tout ce que vous dîtes, si vous me parliez de la droite en général, plutôt que de Sarkozy. Il est vrai que la droite est plus professionnelle, plus sérieuse, plus cohérente, et à moins tendance à reculer que la gauche. Sarkozy, encore une fois, n’a rien à voir là-dedans.]

      Je ne crois pas que Copé, par exemple, vaille mieux que Hollande en termes de professionnalisme, de sérieux ou de tendance à reculer. Non, c’est bien de Sarkozy que je parle. Un personnage qui, avec ses immenses défauts, reste un « ovni » dans l’univers de la droite. Et qui ressemble beaucoup plus à De Gaulle que certains ne veulent le reconnaître…

    • dsk dit :

      ["Il est vrai qu’il existe une rigidité des contrats, qui fait que DANS LE COURT TERME une augmentation de la part patronale ne se traduit pas par une réduction du salaire direct, puisque l’employeur ne peut changer facilement les termes du contrat de travail une fois que celui-ci est conclu. Mais dans le long terme, au cours des négociations subséquentes, l’augmentation sera transférée sur le salaire direct."]

      Vous commencez par dire qu’il y aurait une première négociation qui aboutirait à un accord à 1500 € par mois. Puis, vous dîtes qu’au cours des "négociations subséquentes", l’augmentation serait entièrement transférée sur le salaire direct. Autrement dit, vos "négociations subséquentes" n’en sont pas, puisque l’employeur n’y fait aucune concession.

      ["En d’autres termes, c’est bien un rapport de marché qui fixe le salaire en fonction du rapport offre/demande. Et le SMIC n’est qu’un plancher. CQFD."]

      Je ne vous suis pas. En quoi aurais-je dit le contraire ?

      ["Mais… vous m’avez expliqué que la Loi était le résultat d’un rapport déséquilibré entre le capital et le travail. Si la loi ordonne de payer les heures supplémentaires, c’est donc que c’est la volonté du capital de le faire, non ?"]

      C’est un malentendu. Ce que je dis, c’est juste que la loi du marché conduit à fixer le prix de la force de travail au niveau du prix des moyens de subsistance du travailleur. Je ne fais là, d’ailleurs, que reprendre la théorie de Marx :

      "Il nous faut maintenant examiner de plus près la force de travail. Cette marchandise, de même que toute autre, possède une valeur [5]. Comment la détermine t on ? Par le temps de travail nécessaire à sa production.

      En tant que valeur, la force de travail représente le quantum de travail social réalisé en elle. Mais elle n’existe en fait que comme puissance ou faculté de l’individu vivant. L’individu étant donné, il produit sa force vitale en se reproduisant ou en se conservant lui même. Pour son entretien ou pour sa conservation, il a besoin d’une certaine somme de moyens de subsistance. Le temps de travail nécessaire à la production de la force de travail se résout donc dans le temps de travail nécessaire à la production de ces moyens de subsistance; ou bien la force de travail a juste la valeur des moyens de subsistance nécessaires à celui qui la met en jeu."

      Le Capital; Livre 1er; IIème section; Chapitre VI : Achat et vente de la force de travail;

      Or ces moyens de subsistance demeurent les mêmes, que le travailleur fournisse 35 heures par semaine ou 60…

      ["Sarkozy connaissait bien ses limites. S’il a attiré et conservé à côté de lui un Guaino, c’est précisément parce qu’il comprenait très bien qu’il était capable de faire pour lui des choses qu’il n’était pas capable de faire lui-même."]

      Ce n’est pas ainsi que je vois les choses. On peut estimer que l’on aurait des choses à dire, mais que l’on ne saurait pas les écrire et, pour cette raison, faire appel à un écrivain. Dans ce cas, on serait effectivement "conscient de ses limites". Mais on peut aussi, tout simplement, ne rien avoir à dire, faute de pensée propre. Faire alors appel à un écrivain pour rédiger ses discours, c’est s’approprier la pensée d’un autre, ce qui n’est rien d’autre qu’une sorte de fraude.

      ["Quant aux ministres sarkozystes, je ne pense pas qu’on puisse qualifier Fillon, Borloo, Bertrand ou NKM de « nullissimes »."]

      Je parlais des ministres "purement sarkozystes", autrement dit de ceux que l’on n’aurait jamais vus ministres sans Sarkozy.

      ["Non, c’est bien de Sarkozy que je parle. Un personnage qui, avec ses immenses défauts, reste un « ovni » dans l’univers de la droite. Et qui ressemble beaucoup plus à De Gaulle que certains ne veulent le reconnaître…"]

      En ce qui me concerne, j’apprécie surtout deux choses chez De Gaulle : son souverainisme et sa maîtrise de la langue française. Dois-je aller plus loin ? Quant à vous, quelle ressemblance voyez-vous entre De Gaulle et Sarkozy ?

    • Descartes dit :

      @dsk

      [Vous commencez par dire qu’il y aurait une première négociation qui aboutirait à un accord à 1500 € par mois. Puis, vous dîtes qu’au cours des "négociations subséquentes", l’augmentation serait entièrement transférée sur le salaire direct. Autrement dit, vos "négociations subséquentes" n’en sont pas, puisque l’employeur n’y fait aucune concession.]

      Je pense que vous n’avez pas compris mon point. Le salaire se négocie. Mais il ne se négocie pas tous les jours. Une fois le contrat conclu, il est difficile pour l’employeur de réduire le salaire nominal. C’est pourquoi une augmentation des « cotisations patronales » ne peut être récupérée immédiatement en réduisant le salaire nominal, ce qui serait le cas si le salaire se négociait quotidiennement. C’est au cours des négociations subséquentes que le transfert s’opère. C’est-à-dire que même si temporairement l’augmentation des cotisations se traduit en un coût supérieur du travail pour l’employeur, cette situation n’est que temporaire et le coût « tout compris » revient au prix d’équilibre.

      ["En d’autres termes, c’est bien un rapport de marché qui fixe le salaire en fonction du rapport offre/demande. Et le SMIC n’est qu’un plancher. CQFD." Je ne vous suis pas. En quoi aurais-je dit le contraire ?]

      Je vous cite : « Lorsque le salarié n’a à offrir que sa force de travail, qualité que l’on trouve chez tous les individus, son pouvoir de négociation est nul. Le plancher tend alors à se confondre avec le plafond ». Si « le plancher tendait à se confondre avec le plafond », tous les salaires seraient alignés sur le SMIC. Ce n’est de toute évidence pas le cas.

      [C’est un malentendu. Ce que je dis, c’est juste que la loi du marché conduit à fixer le prix de la force de travail au niveau du prix des moyens de subsistance du travailleur. Je ne fais là, d’ailleurs, que reprendre la théorie de Marx (…) :)]

      La citation de Marx que vous reproduisez parle de la VALEUR de la force de travail, pas de son PRIX. Marx était suffisamment bon connaisseur du marché du travail pour avoir réalisé expérimentalement que tous les salariés ne touchaient pas la même chose. Comment dans ces conditions aurait-il pu soutenir que le prix du travail était le même pour tous ?

      [Ce n’est pas ainsi que je vois les choses. On peut estimer que l’on aurait des choses à dire, mais que l’on ne saurait pas les écrire et, pour cette raison, faire appel à un écrivain. Dans ce cas, on serait effectivement "conscient de ses limites". Mais on peut aussi, tout simplement, ne rien avoir à dire, faute de pensée propre. Faire alors appel à un écrivain pour rédiger ses discours, c’est s’approprier la pensée d’un autre, ce qui n’est rien d’autre qu’une sorte de fraude.]

      Peut-être, mais c’est aussi connaître ses limitations. Si vousêtes convaincu d’avoir de bonnes idées, vous n’irez pas les piquer chez les autres… et personnellement, je préfère l’imposteur intelligent qui va chercher les bonnes idées chez les autres, que l’honnête homme qui préfère imposer des idées ineptes sous prétexte que ce sont les siennes…

      [En ce qui me concerne, j’apprécie surtout deux choses chez De Gaulle : son souverainisme et sa maîtrise de la langue française. Dois-je aller plus loin ? Quant à vous, quelle ressemblance voyez-vous entre De Gaulle et Sarkozy ?]

      D’abord, tous deux étaient des pragmatiques. Ensuite, ils avaient tous deux un véritable intérêt pour la modernité et l’activité industrielle, qui les oppose au personnel politique français qui tend au contraire à exagérer le côté terrien. Enfin, ils avaient tous deux une vision politique qui n’était pas obscurcie par l’opposition « gauche/droite ». Combien de dirigeants de droite imaginez vous ordonner que soit lue dans tous les collèges de France la lettre d’un martyr communiste ? Ah, j’oubliais : une conception de l’Europe qui ne laisse guère de place à l’idée fédérale…

    • dsk dit :

      ["C’est au cours des négociations subséquentes que le transfert s’opère. C’est-à-dire que même si temporairement l’augmentation des cotisations se traduit en un coût supérieur du travail pour l’employeur, cette situation n’est que temporaire et le coût « tout compris » revient au prix d’équilibre."]

      Il me semble que j’avais bien compris. Mais ce que vous n’expliquez pas, c’est pourquoi ce "prix d’équilibre" devrait être le prix "tout compris" que le patron avait accepté de payer au départ, et pas un centime de plus. Pourquoi le salarié devrait-il forcément supporter une diminution de son salaire net, là où le patron ne supporte, in fine, aucune augmentation du salaire brut ? S’il y avait une véritable "négociation subséquente", les deux parties devraient supporter une part de l’augmentation de cotisation.

      ["Je vous cite : « Lorsque le salarié n’a à offrir que sa force de travail, qualité que l’on trouve chez tous les individus, son pouvoir de négociation est nul. Le plancher tend alors à se confondre avec le plafond ». Si « le plancher tendait à se confondre avec le plafond », tous les salaires seraient alignés sur le SMIC. Ce n’est de toute évidence pas le cas."]

      La "force de travail" est une qualité que l’on trouve chez tous les individus, mais chez certains, on trouve en plus, par exemple, une compétence rare, qui leur donne un pouvoir de négociation. Celui qui n’a à vendre que sa force travail n’a aucun pouvoir de négociation, car la force de travail existe en abondance. C’est seulement pour lui que le plancher se confond avec le plafond.

      ["personnellement, je préfère l’imposteur intelligent qui va chercher les bonnes idées chez les autres, que l’honnête homme qui préfère imposer des idées ineptes sous prétexte que ce sont les siennes…"]

      A la limite, je vous suivrais si votre "imposteur intelligent" mettait ensuite en œuvre ces bonnes idées. Mais je n’ai franchement pas l’impression que les discours de Guaino se soient traduits concrètement dans les faits sous le quinquennat de Sarkozy.

    • Descartes dit :

      @dsk

      [Il me semble que j’avais bien compris. Mais ce que vous n’expliquez pas, c’est pourquoi ce "prix d’équilibre" devrait être le prix "tout compris" que le patron avait accepté de payer au départ, et pas un centime de plus.]

      C’est le raisonnement marginaliste : le patron embauche, et continue à embaucher aussi longtemps que l’embauche d’un salarié supplémentaire lui rapporte de l’argent. Le coût d’embauche « tout compris » du dernier travailleur est donc tel que son embauche rapporte zéro. Il s’ensuit, avec une implacable logique, que si le coût « tout compris » pour l’employeur devait augmenter, celui-ci aurait intérêt à licencier le travailleur en question. Le coût du salarié « tout compris » ne peut donc – sauf temporairement – bouger.

      [La "force de travail" est une qualité que l’on trouve chez tous les individus, mais chez certains, on trouve en plus, par exemple, une compétence rare, qui leur donne un pouvoir de négociation.]

      Mais pourquoi leur donne-t-il un certain « pouvoir de négociation » ? Parce que cette compétence les rend plus productifs. Toutes les « forces de travail » ne se valent donc pas, et dire que « la force de travail se trouve chez tous les individus » oublie cet élément essentiel.

      [A la limite, je vous suivrais si votre "imposteur intelligent" mettait ensuite en œuvre ces bonnes idées. Mais je n’ai franchement pas l’impression que les discours de Guaino se soient traduits concrètement dans les faits sous le quinquennat de Sarkozy.]

      Pour la plupart, vous avez raison. Mais dans beaucoup de cas les conseils de ses conseillers les plus compétents (Guaino, Subie…) se sont traduits par des actes. Vous-même vous le reconnaissez lorsque vous parlez d’une réforme des retraites pensée par des conseillers alors que « Sarkozy était resté bronzer au Cap Nègre ». Ce fut le cas par exemple dans le domaine nucléaire, avec la décision de construction de l’EPR de Penly…

  6. CVT dit :

    Bonjour Descartes,
    [Pas tout à fait… mais je me soigne ! En tout cas, en relisant ce blog je me suis dit que son ton avait bien dérivé vers le pleurnichard. Et le pleurnichard, je déteste ça. J’essaye d’écrire une série de papiers « programmatiques » pour essayer quelque chose de plus positif… mais pour le moment, l’actualité commande !]

    Difficile de rester positif devant une telle incurie! De mon côté, je ne suis pas tant triste que révolté par tant d’impéritie: je n’ai jamais vu une chienlit pareil de ma vie, alors que le gouvernement a tout les pouvoirs. Comme vous le dites, cela s’explique aisément: nous sommes gouvernés par des prébendiers, sinon comment expliquer la scandaleuse présence des verts au gouvernement? Aux Etats-Unis, ils appellent cela le "spoil-system". En attendant, tout le monde se focalise sur la seule personne qui pourrait ramasser la mise, pour peu qu’elle fasse preuve d’un minimum de sens politique, c’est Marine Le Pen. L’ennui, avec cette dernière, c’est son incohérence idéologique, dont la dernière illustration est son programme pour l’éducation: comment un partie qui appelait il y a deux ans à la fin de l’Education Nationale et à la promotion des chèques éducation, peut tout d’un coup se retrouver à défendre le retour des hussards noirs de la République? D’une certaine manière, Les Le Pen sont atteints du même mal que Hollande: l’opportunisme et la démagogie à tous les étages, sans compter qu’ils sont plus intéressés par leur destin personnel que d’être au service de l’Etat…

    • Descartes dit :

      @CVT

      [L’ennui, avec cette dernière, c’est son incohérence idéologique, dont la dernière illustration est son programme pour l’éducation: comment un partie qui appelait il y a deux ans à la fin de l’Education Nationale et à la promotion des chèques éducation, peut tout d’un coup se retrouver à défendre le retour des hussards noirs de la République?]

      Je ne crois pas, contrairement à vous, que ce soit de l’opportunisme de la part de Marine Le Pen.Je pense qu’il y a dans le FN un profond aggiornamento idéologique, qui l’éloigne de sa position "classique" qui était anti-Etat, anti-fonctionnaire pour le rapprocher sur beaucoup de questions de la ligne "populaire" qui fut celle du PCF dans les années 1970.

    • CVT dit :

      @Descartes,
      [Je pense qu’il y a dans le FN un profond aggiornamento idéologique, qui l’éloigne de sa position "classique" qui était anti-Etat, anti-fonctionnaire pour le rapprocher sur beaucoup de questions de la ligne "populaire" qui fut celle du PCF dans les années 1970]

      Ce que vous dites pourrait se réaliser à une condition: que Florian Philippot réussisse là où Bruno Mégret a échoué, à savoir arracher le FN des griffes de la PME Le Pen, et là, c’est pas gagné!
      Certes, Mégret voulait transformer le FN en une institution, mais pour faire une politique ultra-droitière. Dans le cas de Filippot, ce serait plutôt le pôle inverse, à savoir une politique proche de celle du PCF d’antan ou très chevènementiste. Mais gare, la famille Le Pen a de bons chiens de garde qui veillent à l’orthodoxie: Marion Maréchal est plus proche du FN originel que sa tante, et pour beaucoup, elle est la gardienne du temple…

    • Descartes dit :

      @CVT

      C’est clair: le FN ne peut à la fois s’institutionnaliser et rester une affaire familiale. Le succès le plus éclatant de Philippot est d’avoir réussi à convaincre MLP de mettre en marche une mécanique de formation de cadres et de leaders locaux. Chose à laquelle son père s’était toujours refusé, tout simplement parce qu’il comprenait très bien qu’un appareil avec des dirigeants locaux formés et implantés pouvait lui tenir tête. On verra dans les années qui viennent comment cet appareil pourrait constituer un pôle de pouvoir autonome par rapport à la "famille" et quel sera l’effet institutionnel.

  7. samuel dit :

    [une idée aussi vague que la « construction européenne ». Mais vous dites que c’est l’idée d’Hollande. Comment le savez-vous ?]

    1/ Aux alentours de la funeste année 1983, Hollande était le jeune président du "Club témoins", qui soutenait la construction européenne telle qu’elle a été mis en oeuvre, comme la voulait Delors.
    2/ Les hommes lucides et informés, dont Hollande fait partie, savent que les mauvais choix qui ont appauvri, affaibli économiquement, dévitalisé démocratiquement, la France, ont tous été faits au nom de cette construction, et que c’est à sa réorientation que tient la possibilité de faire de meilleurs choix.
    3/ Si on observe le long de sa carrière, Hollande, dans des petits meetings ou réunions de militants, on voit qu’il y a des points sur lesquels il est inflexible, pourvu qu’on l’engage à parler de ces points, et ces points touchent à la construction européenne
    4/ Si on observe Hollande, on voit aussi que sous son enveloppe de bisounours, il y a un regard d’acier. Il sait à quels choix importants il se tient pour l’instant. Seul le reste est cette gestion apparemment soucieuse de consensus et de concessions. On verra bien s’il décide ou non de changer de cap pour de bonnes raisons.

    • Descartes dit :

      @samuel

      Vous admettez donc que pour arriver à la conclusion quant à ce que Hollande a dans la tête concernant cette "idée" que vous lui attribuez, vous en êtes réduit à considérer des sources secondaires. Vous n’êtes pas en mesure de citer un document, un discours, un rapport, une livre, un article signé de sa main où il expose ses convictions. Ne trouvez-vous cela étrange, pour un homme qui a derrière lui trente longues années de carrière politique ?

      Maintenant regardons vos arguments:

      [1/ Aux alentours de la funeste année 1983, Hollande était le jeune président du "Club témoins", qui soutenait la construction européenne]

      Admettons. Mais y croyait-il ? Ou a-t-il pris ce poste que lui offrait Jacques Delors, qui n’était pas n’importe qui à l’époque, pour faire avancer sa carrière ? Vous n’en savez rien. Le fait est qu’en tant que président du club en question, Hollande n’a laissé aucun discours mémorable, aucun article, aucun livre expliquant ses conceptions.

      [2/ Les hommes lucides et informés, dont Hollande fait partie, savent que les mauvais choix qui ont appauvri, affaibli économiquement, dévitalisé démocratiquement, la France, ont tous été faits au nom de cette construction, et que c’est à sa réorientation que tient la possibilité de faire de meilleurs choix.]

      Là, vous plaquez sur Hollande vos propres conceptions. Vous n’avez aucun élément factuel qui vous permette de conclure que Hollande soit convaincu que les "mauvais choix" ont été faits "au nom de la construction européenne". Pour autant qu’on le sache, il pense au contraire que c’étaient les "bons choix", et que le problème est qu’on n’est pas allés assez loin dans leur mise en œuvre. La réalité, est que nous n’en savons rien tout simplement parce que Hollande ne s’est jamais exprimé à titre personnel sur ces questions.

      [3/ Si on observe le long de sa carrière, Hollande, dans des petits meetings ou réunions de militants, on voit qu’il y a des points sur lesquels il est inflexible, pourvu qu’on l’engage à parler de ces points, et ces points touchent à la construction européenne]

      L’ennui, c’est que ceux qui ont été témoins de cette "fermeté" l’ont toujours été dans des contextes où l’audience était convaincue qu’il fallait être inflexible. Je ne connais aucun écrit, aucun discours, aucune intervention de Hollande pour défendre la construction européenne "inflexiblement" devant une audience dont l’opinion allait dans le sens contraire. Il reste donc un doute sur la sincérité de ses convictions dans la mesure où il ne les a jamais exprimé sans ambiguité.

      [4/ Si on observe Hollande, on voit aussi que sous son enveloppe de bisounours, il y a un regard d’acier.]

      Je n’en doute pas. Je suis persuadé que Hollande peut être très dur lorsque sa carrière est en jeu. Mais le "regard d’acier" ne suffit pas pour diriger un pays comme la France. Il faut aussi savoir ce qu’on veut, et savoir s’entourer des compétences nécessaires pour le construire. Hollande donne depuis quinze mois la preuve qu’il n’est pas capable de le faire. Vous pouvez toujours vous consoler en vous répétant que le toquard que vous avez devant vous se révélera un pur-sang dans les cent derniers mètres de la course. Mais une personne raisonnable peut se demander pourquoi Hollande a choisi de nous cacher toutes ses qualités et se déguiser en incompétent.

      [On verra bien s’il décide ou non de changer de cap pour de bonnes raisons.]

      Vous voulez parier ?

  8. Jo dit :

    "J’attendais de lui non pas une présidence inspirée, mais au moins une présidence organisée."
    J’avais le même sentiment avec le précédent secrétaire départemental de la fédération du Paris du PCF. Mais, même pour l’organisation de son travail, le choix de son entourage, il ne savait pas comment faire.

    • Descartes dit :

      @Jo

      C’est que choisir ses collaborateurs n’est pas une évidence. C’est probablement l’acte le plus difficile pour un dirigeant… et celui pour lequel les dirigeants sont le moins formés. Il fut un temps – o tempora, o mores – où il y avait au PCF une "section des cadres", dont la fonction était précisément de constituer des viviers de cadres formés et fiables où l’on pouvait puiser à l’heure d’assister un dirigeant…

  9. Jo dit :

    Encore un commentaire : ce président se trouve obligé d’intervenir sur des sujets sur lesquels jamais on n’aurait imaginé de Gaulle, Mitterrand ou même Chirac. Il s’est penché sur la composition des lasagnes Spanghero, sur le cas d’une expulsion d’une réfugiée kosovare mineure, et vient récemment de recevoir les présidents de clubs de football de ligue 1. C’est du boulot pour les ministres, ça, pas pour un président ! Et quand bien même il interviendrait sur des sujets d’actualité, on pourrait espérer que ce serait pour prendre du recul, identifier un problème structurel. Que nenni ! Il "règle" (et encore) le problème particulier, et c’est tout.

    • Descartes dit :

      @Jo

      Tout à fait. On revient au problème de la délégation. Il est vrai que le quinquennat n’aide pas: en ajustant le temps présidentiel sur le temps parlementaire, il n’aide pas le président à prendre de la hauteur. Mais c’est aussi un problème lié à la "politique de l’émotion". Pour exister, le président a besoin de passer à la télé. Et on passe bien plus sûrement à la télé en s’occupant des lasagnes qu’en définissant une politique. Parce qu’une politique, cela prend des années à fructifier et les résultats sont ambigus, alors qu’avec les lasagnes, le résultat est immédiat et visible.

    • Albert dit :

      Je voudrais poursuivre sur le dernier échange entre Jo et Descartes, notamment.
      Et aussi sur le problème (lié) des convictions(ou non) de Hollande sur la construction européenne, évoqué plus haut.

      "Hollande s’occupe de détails", certes, mais n’est-ce pas ce qui intéresse les Français? Surtout s’il y a en plus de l’émotionnel. Et puis, peut-il faire autre chose, lui qui est un dévôt de l’UE et qui sait (et veut!) ce que Mme V. Reding, Commissaire luxembourgeoise et VP de la Commission de Bruxelles déclare en toutes occasions à Bruxelles comme à Paris devant les huiles de l’assemblée nationale (et sans être contredite!!!) qu’"il faut bien comprendre qu’il n’y a plus de politique intérieure nationale". Je vous assure que la voir et l’entendre(ce fut mon cas) le dire fait froid dans le dos!

      Alors, bien sûr, l’européisme de Normal 1er est-il sincère (ou tactique)? Rien dans son parcours ne permet d’en douter même s’il n’a pas écrit de thèse sur le sujet. Encore une fois les actes parlent et les siens depuis son accession au trône (difficile de dire "au pouvoir"!) n’indiquent aucun début de soupçon de commencement de réorientation.

    • Descartes dit :

      @Albert

      ["Hollande s’occupe de détails", certes, mais n’est-ce pas ce qui intéresse les Français?]

      Les français s’intéressent à la cuisine, au tour de France et aux amours de Lady Di. Et pourtant, je ne pense pas qu’ils verraient d’un bon œil de voir le président de la République donner des leçons de cuisine, faire des chroniques sportives ou remplacer Bern dans ses activités mondaines. La fonction du président de la République ce n’est pas de s’occuper des domaines qui « intéressent les français » – au sens qu’ils aiment bien les regarder à la télévision – mais de s’occuper des affaires que les français estiment importantes. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Les français ont apprécié la fermeté de Chirac sur l’affaire iraquienne, alors que le moins qu’on peut dire c’est que l’immense majorité des français se fout éperdument des questions internationales en général.

      J’irais même plus loin : ce que les français demandent de l’Etat en général et des politiques en particulier, c’est qu’ils s’occupent des affaires qui n’intéressent personne et qui sont pourtant importantes. Tant que l’électricité sort de la prise, la politique énergétique n’intéresse personne.

      [Et puis, peut-il faire autre chose, lui qui est un dévôt de l’UE et qui sait (et veut!) ce que Mme V. Reding, Commissaire luxembourgeoise et VP de la Commission de Bruxelles déclare en toutes occasions à Bruxelles comme à Paris devant les huiles de l’assemblée nationale (et sans être contredite!!!) qu’"il faut bien comprendre qu’il n’y a plus de politique intérieure nationale". Je vous assure que la voir et l’entendre(ce fut mon cas) le dire fait froid dans le dos!]

      « Ceux que les dieux veulent perdre, ils rendent d’abord aveugles ». Ecouter les hauts fonctionnaires et les commissaires de Bruxelles « dans leur sauce » fournit d’innombrables illustrations de ce principe. A force de vivre en vase clos, entouré de gens qui pensent comme eux, ils finissent par croire que leurs idées sont évidentes, et qu’elles font consensus. Je me souviens de l’ambiance à Bruxelles après le rejet du TCE par le peuple français. La réaction dominante était l’incrédulité. Comment le peuple français, peuple cultivé et politisé s’il en est, avait pu rester insensible à l’évident bonheur que lui apporterait évidement la merveilleuse constitution qui lui était proposée ? Au point où ils en sont, à Bruxelles, ils ne se rendent même pas compte combien certains de leurs discours sont contreproductifs et sabotent les idées mêmes qu’ils entendent défendre.

      Mais il y a un point que vous soulevez qui mérite à mon sens examen. Vous dites que Hollande est « dévot de l’UE ». Mais… est-ce vrai ? Peut-on dire que Hollande a vraiment une opinion personnelle sur la question européenne ? Ou a-t-il fait sienne, comme l’ont fait tant de brillants jeunes ambitieux dans les années 1980, une sorte d’europhilie passe-partout pour plaire à la maffia des « vrais européens » de l’époque Mitterand-Delors ? On disait d’un candidat à la présidence américaine que si les cannibales votaient, il commencerait a engraisser un missionnaire pour Noël. Si demain l’élection du président de la République passait par l’eurosceptiscisme, pensez-vous que Hollande resterait un « dévôt » ? J’ai mes doutes. Souvenez-vous de sa promesse électorale de renégocier le TCICG. Pensez-vous qu’un vrai « dévot » genre Delors aurait consenti à se faire violence de cette manière ?

      J’insiste. Je pense que discuter les « idées » et les « positions » personnelles de François Hollande en matière politique est aussi utile que de discuter du sexe des anges. Hollande n’a pas d’idées, positions ou projets à proprement parler politiques. C’est le tacticien à l’état pur.

      [Encore une fois les actes parlent et les siens depuis son accession au trône (difficile de dire "au pouvoir"!) n’indiquent aucun début de soupçon de commencement de réorientation.]

      Ni d’orientation, d’ailleurs. Pour le moment, la ligne est de ne rien faire. Faire un nouveau traité ? Hors de question. Changer un ancien ? Non plus. On dénonce les conséquences de Schengen ou de la « libre circulation » mais il est hors de question d’y changer quelque chose. C’est la politique du chien crevé au fil de l’eau dans toute son horreur.

    • Albert dit :

      [ "Si demain l’élection du président de la République passait par l’eurosceptiscisme, pensez-vous que Hollande resterait un « dévôt » ? J’ai mes doutes. Souvenez-vous de sa promesse électorale de renégocier le TCICG. Pensez-vous qu’un vrai « dévot » genre Delors aurait consenti à se faire violence de cette manière ?"]

      "Parole, parole…"
      C’est tout le problème de nos hommes et femmes politiques actuels, Hollande inclus,(mais non Delors qui est inapte à la politique politicienne, et "deviendra Président de la République quand les Présidents seront nommés", dixit Mitterrand, un expert.), à savoir le grand écart entre les paroles et les actes. Moi, je juge aux actes.

    • CVT dit :

      @Descartes,

      [J’insiste. Je pense que discuter les « idées » et les « positions » personnelles de François Hollande en matière politique est aussi utile que de discuter du sexe des anges. Hollande n’a pas d’idées, positions ou projets à proprement parler politiques. C’est le tacticien à l’état pur.]

      C’est justement la raison qui m’a fait penser qu’il aurait pu être celui qui allait être le fossoyeur de l’UE, pour peu que les événements et les rapports de force s’y prêtent. Malheureusement, c’était sans compter sur l’inconsistance, le peu d’épaisseur du personnage, que j’avais largement surestimée…

    • Descartes dit :

      @Albert

      [Moi, je juge aux actes.]

      Vous pensez donc que Laurent Fabius est un eurosceptique ? Après tout, il a bien combattu le TCE, non?
      Le problème de "juger aux actes", c’est qu’il faut derrière les actes, interpréter les intentions. On peut faire quelque chose par intérêt, par conviction, par erreur. Et le "jugement" ne peut être indépendant de cette interprétation…

    • Descartes dit :

      @CVT

      [C’est justement la raison qui m’a fait penser qu’il aurait pu être celui qui allait être le fossoyeur de l’UE, pour peu que les événements et les rapports de force s’y prêtent.]

      C’est sûr. Si demain la dynamique populaire allait dans ce sens là, on aurait pu s’attendre à ce qu’un Delors ou un Moscovici y résistent. Pas Hollande. Je pense sincèrement qu’il est prêt à suivre le courant. Encore faudrait-il que le courant aille dans le bon sens.

    • Albert dit :

      Pardon d’insister, mais je crois que je me suis mal fait comprendre.

      Ce que je voulais dire, au-delà des affirmations sans cesse martelées par Mme Reding ( Barroso est beaucoup plus fûté, donc discret -à moins qu’il y ait un partage des rôles?), le fait qu’elle tienne ces propos notamment à Paris, devant les huiles de notre assemblée "nationale", sans que cela provoque la moindre réaction de leur part (la réunion était présidée par M. Bartolone!) montre à quel point notre classe politique (et particulièrement PS-Verts en l’occurrence, et Hollande a fortiori!) a intégré cette réalité.
      Pour ces gens-là, la France Etat-Nation n’existe plus. Donc, c’est très logiquement qu’ils en abandonnent le gouvernement réel à Bruxelles, et cela va si loin dans leurs sinistres têtes qu’ils ne cherchent même pas- contrairement aux Anglais ou aux Allemands -à agir dans le cadre du peu de pouvoirs qui leur restent encore (pour combien de temps?). Ils se contentent juste de "gérer" leur clientèle, pour durer eux-mêmes le plus possible, en attendant l’alternance…and so on…

      Le Général Gallois disait, il y a à peine quelques années, que les Français avaient choisi de se fondre dans une grande Europe pour ne plus avoir à se prendre en charge eux-mêmes, et qu’ils s’y tiendraient -sauf catastrophe véritable – pour cette même raison. Vous me direz qu’ils ont voté Non en 2005. Certes, mais c’était peut-être le chant du cygne…

    • Descartes dit :

      @Albert

      [le fait qu’elle tienne ces propos notamment à Paris, devant les huiles de notre assemblée "nationale", sans que cela provoque la moindre réaction de leur part (la réunion était présidée par M. Bartolone!) montre à quel point notre classe politique (et particulièrement PS-Verts en l’occurrence, et Hollande a fortiori!) a intégré cette réalité.]

      Je pense que c’est plutôt la preuve que lors de ce genre de réunions personne n’écoute personne. La novlangue européenne est devenue tellement répétitive que personne n’y fait plus vraiment attention.

      [Le Général Gallois disait, il y a à peine quelques années, que les Français avaient choisi de se fondre dans une grande Europe pour ne plus avoir à se prendre en charge eux-mêmes, et qu’ils s’y tiendraient -sauf catastrophe véritable – pour cette même raison.]

      Gallois a toujours été un homme clairvoyant… cela étant dit, la catastrophe n’est peut-être pas aussi loin qu’on ne le pense…

    • Albert dit :

      ["Je pense que c’est plutôt la preuve que lors de ce genre de réunions personne n’écoute personne. La novlangue européenne est devenue tellement répétitive que personne n’y fait plus vraiment attention."]

      J’aimerais tant vous croire!!!

  10. CVT dit :

    @Descartes,
    je suis tombé sur le dernier post de votre grand "ami" J.Sapir. Il écrit souvent du lourd, mais cette fois-ci, son propos est plus solennel que d’habitude: il appelle carrément Hollande à choisir Chevènement comme premier ministre!
    Voici son dernier billet: http://russeurope.hypotheses.org/1652

    • Descartes dit :

      @CVT

      Oui. Un billet lourd mais bien pensé en effet… mais je pense que Sapir se fait beaucoup d’illusions. Si un homme comme Chevènement devait aujourd’hui accéder à Matignon, ce serait de toute évidence pour un mandat qui serait tout sauf un long fleuve tranquille. Or, ce n’est pas faire injure à Chevènement que de constater que le temps passe. Chevènement a peut-être toujours des capacités intellectuelles remarquables, il a – comme le dit Sapir – une trajectoire qui parle pour lui. Il a tout ce qu’il faut pour assumer le rôle de vieux sage. Mais a-t-il la résistance physique pour être premier ministre, et encore plus, un premier ministre de combat ? JPC a 75 ans, l’âge certes qu’avait mongénéral lorsqu’il fut élu à la présidence de la République par le suffrage universel…mais je ne suis pas sur que les situations soient parallèles…

      Le problème des grandes figures "souverainistes" (Chevènement, Séguin…) est qu’elles ont été solitaires. Pour garder leur liberté intellectuelle, ils ont négligé de structurer des organisations et de former des dauphins. Aujourd’hui, on se retrouve dans une situation où l’on ne peut trouver des figures ayant une certaine autorité qu’en allant faire les maisons de retraite…

    • CVT dit :

      @Descartes,
      Sapir raisonne en économiste, pas en homme politique: en clair, parmi tous les scénarios possibles, il préconise toujours le plus optimal, selon lui. Evidemment, il faut être réaliste, car nommer un septuagénaire premier ministre en 2013, ça ferait un choc!
      En revanche, si on est un peu rêveur, la présence de Chevènement au pouvoir (soit en tant que visiteur du soir, comme en 83, soit comme ministre à plein temps) aurait quelques vertus, la première étant de fédérer les républicains de tout bord, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche: on sait que F.Philippot au FN, se réclame du Che, et ne ferait pas obstacle à une de ses idoles. Idem pour N.Dupont-Aignan, et une bonne partie de ce que l’UMP compte de gaullistes nostalgiques (il en reste très peu, il est vrai…). Enfin, au Front de Gauche, tout le monde sait qu’à titre personnel, Jean-Luc Mélenchon n’est pas hostile aux idées du Lion de Belfort…
      Ca ferait un sacré attelage: l’aile marchante du FN+le chef du FDG, ainsi que tous les bonaparto-jacobins… Je sais, c’est un rêve, mais cette alliance serait à mon avis la seule qui pourrait tirer le pays d’affaire, du moins, qui pourrait assumer des changements radicaux (sortie de l’UE ET de l’OTAN, protectionnisme et réindustrialisation).

    • Descartes dit :

      @CVT

      [En revanche, si on est un peu rêveur, la présence de Chevènement au pouvoir (soit en tant que visiteur du soir, comme en 83, soit comme ministre à plein temps) aurait quelques vertus, la première étant de fédérer les républicains de tout bord, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche: on sait que F.Philippot au FN, se réclame du Che, et ne ferait pas obstacle à une de ses idoles. Idem pour N.Dupont-Aignan, et une bonne partie de ce que l’UMP compte de gaullistes nostalgiques (il en reste très peu, il est vrai…).]

      Vous rêvez un peu trop… Chevènement est certainement une figure très largement respectée, y compris par ses adversaires politiques. Il est une référence pour les républicains, à gauche comme à droite. Je ne crois pas qu’il pourrait "fédérer", mais au moins ouvrir un dialogue politique de fond.

      [Enfin, au Front de Gauche, tout le monde sait qu’à titre personnel, Jean-Luc Mélenchon n’est pas hostile aux idées du Lion de Belfort…]

      Là, vous rêvez vraiment trop. Chevènement n’aurait à attendre le moindre soutien de Mélenchon, et encore moins des gens qui sont autour de lui.Chevènement est le concentré de tout ce qui donne des boutons au gauchisme français: ses positions sur le nucléaire, sur l’industrie, sur les fantaisies "sociétales", sur les frontières, sur les sans-papiers… imaginez-vous Mélenchon, qui a consacré la première partie de son dernier grand discours à fustiger Fessenheim et le programme nucléaire, soutenir le Che ? Si oui, vous avez beaucoup plus d’imagination que moi.

  11. Marcailloux dit :

    Bonjour,
    Tout d’abord, à vous Descartes et à votre attachement à tout ce qui touche à la Nation, vous employez souvent une minuscule pour désigner les Français, alors que ce qui touche au gentilé prend toujours une majuscule.Veuillez pardonner mon pinaillage, mais comme nous sommes, aujourd’hui, le jour des défunts, je me sens particulièrement incité à protéger notre langue qui est en voie d’expirer.
    – [ Ils peuvent passer des lois et des lois, l’administration les applique. ]
    C’est là que le bât blesse. C’est sans doute un génie bien français que de voter, et encore voter en empilant les lois les unes sur les autres jusqu’à les rendre inapplicables parce que souvent incompréhensibles ou contradictoires. Mais il faut bien justifier l’occupation de centaines de parlementaires sans compter tout le personnel périphérique des chambres et des ministères.
    Indépendamment du coût direct de ce beau monde, les conséquences en matière de réactivité, d’adaptation, d’efficience et d’efficacité deviennent désastreuses pour le pays et le condamne peu à peu à l’ankylose.

    [La situation actuelle montre combien les institutions de la Vème République sont bien moins « dictatoriales »]
    dictatoriales sûrement pas, mais omniprésentes, envahissantes, et entravantes certainement.

    [……C’est pourquoi chaque reculade prépare en fait la reculade suivante dans une spirale qu’il devient difficile de contrôler……]
    – petit instant de politique fiction: devant l’impossibilité de réformer en profondeur, c’est à dire pas avec des réformettes de façade, Hollande a peut être choisi de soigner le mal par le mal, pratiquer la méthode du judo ( tu pousses et tu résistes, je tire et utilise ton énergie). Quand la Nation sera au bord de la guerre civile et du chaos la conscience et la conviction de la nécessité de réforme généralisée sera alors évidente. ………….. on peut encore rêver n’est ce pas?
    A moins que tout cela ne relève d’une stratégie démoniaque qui pourrait s’articuler autour d’une nomination, avant l’été, de Valls à Matignon suivie d’une plus que probable désillusion qui aurait l’avantage de disqualifier un concurrent interne suivie d’une dissolution de l’Assemblée, en début 2015, qui enverrait une bonne partie des baronnets locaux à leurs chères études et une probable majorité FN/UMP avec MLP en cohabitation à Matignon, et qui lui donnerait pour deux ans avant l’élection présidentielle, toute probabilité de se griller durablement. Hollande se revêtant de l’habit du recours conciliateur.N’est ce pas, après tout la seule chance qu’il a de se faire réélire, et démontrerait par là même sa filiation mittérandienne.
    Ayant voté blanc, j’étais sans aucune illusion à son égard. Cependant, j’ai observé pendant 16 mois sa "rondeur" qui tranchait avec les outrances de son prédécesseur et j’ai longtemps espéré qu’il s’agissait d’un mode de gouvernance décidé, tout aussi efficace que les rodomontades sarkozyennes, et qui, par des chemins détournés permettrait d’endormir les velléités inconséquentes de ses électeurs, pour aboutir à de réelles réformes fondamentales . Je crains bien maintenant devoir faire le deuil de mes minces espérances.
    Nous avons eu un candidat "par défaut" qui doit son élection à la défaillance de DSK, nous avons un président sans défauts, sans "rugosité" c’est à dire , inodore, incolore et sans saveur .

    • Descartes dit :

      @Marcailloux

      [Tout d’abord, à vous Descartes et à votre attachement à tout ce qui touche à la Nation, vous employez souvent une minuscule pour désigner les Français, alors que ce qui touche au gentilé prend toujours une majuscule.]

      Je confesse mon erreur. Je suis allé consulter la règle, et vous avez tout à fait raison de la rappeler. Les gentilés, qui sont des noms, portent la majuscule, alors que l’adjectif dérivé n’en porte pas. J’essaierai à l’avenir de m’en tenir strictement. Défendons notre langue, c’est notre patrimoine !

      [C’est là que le bât blesse. C’est sans doute un génie bien français que de voter, et encore voter en empilant les lois les unes sur les autres jusqu’à les rendre inapplicables parce que souvent incompréhensibles ou contradictoires. Mais il faut bien justifier l’occupation de centaines de parlementaires sans compter tout le personnel périphérique des chambres et des ministères.]

      Ce n’est pas une question « d’occuper les gens ». Le problème est surtout que la loi est devenue pour un politique un moyen d’exister médiatiquement. Chaque ministre veut « sa » loi, celle qui lui permettra d’occuper la une des gazettes – et accessoirement, de distribuer quelques petits cadeaux à tel ou tel groupe de pression. C’est pourquoi la première demande que fait un nouveau ministre à son administration est « qu’est ce qu’on pourrait bien mettre dans une loi ? ». Le résultat, c’est des lois « catalogue », ramassis de mesures disparates avec une cohérence douteuse, longues et bavardes. Des lois qui ne sont pas « tirées » par un objectif législatif mais au contraire « poussées » par le syllogisme administratif : « 1) il faut faire quelque chose ; 2) ceci est quelque chose ; donc, 3) il faut faire ceci ».

      [La situation actuelle montre combien les institutions de la Vème République sont bien moins « dictatoriales » dictatoriales sûrement pas, mais omniprésentes, envahissantes, et entravantes certainement.]

      Je ne crois pas que le problème se trouve dans les institutions. Un régime parlementaire n’arrangerait rien.

      [petit instant de politique fiction: devant l’impossibilité de réformer en profondeur,]

      Mais pourquoi serait-il « impossible de réformer en profondeur » ? Où est la proposition de « réforme en profondeur » qui serait bien pensée, bien préparée, clairement définie, et qui n’arriverait pas à passer du fait d’une « impossibilité de réformer » ?

      [c’est à dire pas avec des réformettes de façade, Hollande a peut être choisi de soigner le mal par le mal, pratiquer la méthode du judo ( tu pousses et tu résistes, je tire et utilise ton énergie). Quand la Nation sera au bord de la guerre civile et du chaos la conscience et la conviction de la nécessité de réforme généralisée sera alors évidente. On peut encore rêver n’est ce pas?]

      C’est la vision chère au gauchisme français, celle de la politique du pire. S’opposer à tout, paralyser tout avec l’espoir que le chaos rendra la révolution – forcément progressiste – inévitable. Le problème, c’est que c’est le contraire qui se passe : devant les catastrophes, le premier réflexe – fort rationnel – des gens est de rechercher dans le passé les solutions qui ont à peu près marché, et non d’essayer des solutions nouvelles. Les cas où le chaos a enfanté une révolution existent, certes. Mais sont finalement très rares. Dans la plupart des cas, le chaos a enfanté des régimes conservateurs.

      Je fais une analyse un peu différente de la votre. Aujourd’hui, le système est bloqué parce que les couches moyennes, de par leur position dans la production, vivent dans le présent et n’ont aucune projection dans l’avenir. Elles réagissent violemment – et généralement avec succès, voir l’affaire de la taxation des PEA – dès qu’on cherche à toucher à leurs privilèges, mais elles ne s’interrogent guère sur la soutenabilité à long terme du système. En d’autres termes, elles continuent à jouir de leurs avantages sans réaliser qu’après avoir jeté au crocodile les couches populaires c’est elles qui risquent de faire les frais de l’appétit du reptile. Et ce n’est pas nouveau : on l’a vu avec l’Argentine de Menem ou les USA sous Bush : les classes moyennes dansent sur un volcan et sont toutes étonnées lorsque les « bulles » éclatent.

      Aussi longtemps que le système tient, les classes moyennes mettront leur considérable poids dans la balance pour que rien ne bouge. Et lorsque le système s’effondrera, les classes moyennes soutiendront n’importe quel démagogue qui leur promettra de défendre leur petit pré carré. C’est là le problème…

      [A moins que tout cela ne relève d’une stratégie démoniaque qui pourrait s’articuler autour d’une nomination, avant l’été, de Valls à Matignon suivie d’une plus que probable désillusion qui aurait l’avantage de disqualifier un concurrent interne suivie d’une dissolution de l’Assemblée, en début 2015, qui enverrait une bonne partie des baronnets locaux à leurs chères études et une probable majorité FN/UMP avec MLP en cohabitation à Matignon, et qui lui donnerait pour deux ans avant l’élection présidentielle, toute probabilité de se griller durablement.]

      C’est le genre de pensée qui va au personnage. Hollande est loin d’être un imbécile. C’est un tacticien hors pair lorsqu’il s’agit des jeux de pouvoir et des magouilles en coulisse. Dès lors que l’objectif est clair – se faire réélire – j’ai toute confiance en Hollande pour trouver une stratégie. Le problème d’Hollande est que pour lui la politique se réduit à ces jeux-là. En trente ans de vie politique, il n’a pas une seule fois articulé rationnellement un objectif autre que tactique.

      [Ayant voté blanc, j’étais sans aucune illusion à son égard. Cependant, j’ai observé pendant 16 mois sa "rondeur" qui tranchait avec les outrances de son prédécesseur et j’ai longtemps espéré qu’il s’agissait d’un mode de gouvernance décidé, tout aussi efficace que les rodomontades sarkozyennes, et qui, par des chemins détournés permettrait d’endormir les velléités inconséquentes de ses électeurs, pour aboutir à de réelles réformes fondamentales.]

      C’est peut être une des leçons qu’on peut tirer de l’expérience Hollande. La position de président de la République n’est pas un poste administratif. Il a une dimension symbolique qui nécessite une forme de démesure, « d’outrance » – pour utiliser votre propre terme – pour ne pas tomber dans la banalité. Il ne peut y avoir de « président normal », parce qu’on peut difficilement imaginer quelque chose de plus « anormal » que la position d’un président de la République. C’est pourquoi la rationalité énarchique ou polytechnicienne, qui est si précieuse dans l’appareil de l’Etat, est un handicap presque insurmontable lorsqu’on exerce la fonction de démiurge. Hollande nous parle de modestie, d’efficacité, de consensus. S’il dirigeant la SNCF, son discours serait impeccable. Mais voilà, il n’est pas le PDG de la SNCF. Il porte sur les épaules non seulement la France qui est, mais aussi l’esprit de celle qui fut. Et cela, on ne peut le faire en se voulant « normal ».

    • Albert dit :

      [" Il porte sur les épaules non seulement la France qui est, mais aussi l’esprit de celle qui fut."]

      Ca, c’est ce qui devrait être, mais qui n’est plus, et surtout depuis que les Présidents sont issus de Polytechnique(Giscard) ou de l’ENA (Chirac, Hollande) -Notez bien que Mitterrand ou Sarko , avocats, ne valaient guère mieux, le seul objectif de ces nuisibles étant de réussir leur vie personnelle.

      Que voulez-vous, depuis qu’on parle de gouvernance et non plus de gouvernement, le travail des…gouvernants ne consiste plus qu’à "gérer"…les hommes et les choses, comme jadis les intendants du château – le "gouvernement", lui, étant ailleurs, "délocalisé" en quelque sorte.
      En fait, tout ça n’est peut-être pas très nouveau, mais prend peut-être aujourd’hui des proportions démesurées.

    • Descartes dit :

      @Albert…

      [Ca, c’est ce qui devrait être, mais qui n’est plus, et surtout depuis que les Présidents sont issus de Polytechnique(Giscard) ou de l’ENA (Chirac, Hollande) ]

      J’en était sûr… l’hameçon "Ena" ne pouvait que vous attrapper…
      Je ne suis pas d’accord avec vous. Giscard et Chirac ne sont pas "issus" que de Polytechnique ou de l’ENA. Ils sont issus d’une longue expérience politique et humaine. Jeune homme, Giscard participe à la Libération de Paris, s’engage dans la 1ère Armée et fait la campagne d’Allemagne. Il occupa ensuite plusieurs postes ministériels, et son nom est attaché à toute une série de décisions de premier niveau. Chirac, lui, fait la guerre d’Algérie comme Lieutenant, occupe lui aussi plusieurs postes ministériels, fonde son propre parti politique… la formation qu’ils ont reçu à Polytechnique pour l’un et à l’ENA pour les deux ne fait qu’une toute petite partie de leur formation politique. Comparez avec Hollande: quelle est sa guerre ? Quels ont été ses combats ? Quelles sont les grandes politiques qui portent son nom ?

      Que ce soit De Gaulle ou Pompidou, Giscard ou Mitterrand, Chirac ou Sarkozy, tous ont endossé le rôle et le personnage de président de la République – même si le dernier a eu quelque mal au début. Deux d’entre eux ont voulu au départ être "normaux" – Giscard ou Sarkozy – et ont compris très vite que c’était impossible. Seul Hollande semble coincé dans son rôle de "pépère sympa".

  12. Koko dit :

    Moi je trouve au contraire que la façon de procéder de Hollande est tout à son honneur et véritablement démocratique. Au lieu de faire passer ses idées en force comme l’ensemble des monarques qui l’ont précédé, il est à l’écoute des idées des citoyens. Je ne m’explique donc vraiment pas l’impopularité de François Hollande, peut-être tout simplement que les français sont à la recherche d’un papa et sont trop immatures, pas assez adultes pour apprécier à sa juste mesure la démocratie participative hollandienne. Mais ceci dit je ne me fais pas de souci pour la popularité future de François Hollande, tot ou tard le réel reprendra le dessus et le Hollande-bashing permanent des journaleux et de la classe politique incapable ne pèsera pas bien lourd face à la reprise économique obtenue grâce à la politique clairvoyante de François Hollande. J’espère qu’à ce moment-là, tous ceux qui l’ont insulté, tous ceux qui l’ont trainé dans la boue auront la décence de s’excuser à genou devant notre président. Hollande mérite la France mais les français ne méritent pas Hollande, les français ne méritent pas d’avoir un président aussi compétent.

    Petit hors-sujet, en fait je me demandais pourquoi vous écrivez sous un pseudonyme plutot que sous votre véritable nom ? Il me semble que vos idées auraient davantage d’impact si vous écriviez sous votre nom et je ne vois pas bien quel serait le risque dans la mesure où aucune des idées que vous professez est contraire à la loi. Peut-être êtes vous haut-fonctionnaire et vous pensez que ça serait mal vu, mais Asselineau aussi l’est et il ne me semble pas que ses idées soient particulièrement "politiquement correct".

    • Descartes dit :

      @Koko

      [Moi je trouve au contraire que la façon de procéder de Hollande est tout à son honneur et véritablement démocratique. Au lieu de faire passer ses idées en force comme l’ensemble des monarques qui l’ont précédé, il est à l’écoute des idées des citoyens.]

      Franchement, la « démocratie » et « l’écoute » ont bon dos. J’ai trop de respect pour l’une et l’autre pour les confondre avec l’irrésolution, l’incompétence, l’inconséquence. La démocratie, l’écoute, c’est AVANT de prendre les décisions, pas APRES. Parce qu’un homme politique véritablement démocratique consulte, écoute, discute… et ensuite décide après mûre réflexion. Et si la réflexion est véritablement mûre, s’il a écouté et consulté correctement, alors il doit être convaincu que la décision prise est dans l’intérêt du pays, et que revenir dessus équivaut donc à une forfaiture.

      [Je ne m’explique donc vraiment pas l’impopularité de François Hollande, peut-être tout simplement que les français sont à la recherche d’un papa et sont trop immatures, pas assez adultes pour apprécier à sa juste mesure la démocratie participative hollandienne.]

      Il ne vous reste donc qu’à dissoudre le peuple et en élire un autre… peut-être finirez vous par trouver un peuple assez « adulte » pour apprécier à sa juste valeur tout ce que notre président fait pour lui et l’excellence de sa méthode…

      La « démocratie participative » consiste à faire participer les gens au processus de prise de décision. Pas à revenir sur les décisions prises dès que quelqu’un gueule suffisamment fort…

      [Mais ceci dit je ne me fais pas de souci pour la popularité future de François Hollande, tot ou tard le réel reprendra le dessus et le Hollande-bashing permanent des journaleux et de la classe politique incapable ne pèsera pas bien lourd face à la reprise économique obtenue grâce à la politique clairvoyante de François Hollande.]

      Ce n’est pas tous les jours qu’on dispose sur ce blog de quelqu’un qui croit encore aux politiques de François Hollande. Alors, j’en profite pour vous poser une question précise : Pourriez-vous détailler spécifiquement et concrètement en quoi consiste la « politique clairvoyante de François Hollande » à laquelle vous faites référence, et expliquer comment les mesures qu’il prend permettront une « reprise économique » ? D’avance, merci.

      [J’espère qu’à ce moment-là, tous ceux qui l’ont insulté, tous ceux qui l’ont trainé dans la boue auront la décence de s’excuser à genou devant notre président.]

      Je vous assure que je suis tout à fait disposer, si les « politiques clairvoyantes de François Hollande » amènent une reprise économique, à aller à genoux à la porte de l’Elysée demander pardon au président. A une condition : qu’il s’engage au cas ou ses politiques ne se révéleraient pas efficaces, à venir à genoux demander pardon chez moi. Pensez-vous pouvoir le convaincre ?

      [Hollande mérite la France mais les français ne méritent pas Hollande, les français ne méritent pas d’avoir un président aussi compétent.]

      Vous parlez de Hollande comme s’il était un monarque de droit divin, donné à la France par on ne sait quelle puissance. Au cas où vous l’auriez oublié, c’est le peuple français qui est le souverain. Il n’a donc pas à « mériter » quoi que ce soit. Il choisit souverainement ses gouvernants, et s’ils lui déplaisent, il a le droit de les renvoyer à leurs chères études. Un point c’est tout. La politique, ce n’est pas une condition de « mériter ».

      Chacun a le droit à avoir ses opinions. Mais votre discours enflammé sur notre « président aussi compétent » présente un tel décalage avec les faits qu’il devient comique. Pensez-vous vraiment que son discours dans l’affaire Léonarda était le signe d’une exceptionnelle compétence ? Vraiment ? « Ceux que les dieux veulent perdre, d’abord ils rendent aveugles ».

      [Petit hors-sujet, en fait je me demandais pourquoi vous écrivez sous un pseudonyme plutot que sous votre véritable nom ? Il me semble que vos idées auraient davantage d’impact si vous écriviez sous votre nom et je ne vois pas bien quel serait le risque dans la mesure où aucune des idées que vous professez n’est contraire à la loi.]

      Je vous rappelle que tout fonctionnaire est tenu à un devoir de réserve. Ce devoir va bien plus loin que le fait de taire les informations confidentielles dont il a accès du fait de ses fonctions ou de s’abstenir de propos contraires à la loi. Dans son expression, le fonctionnaire ne doit en aucun moment tenir publiquement en son nom des propos qui mettent en doute la justesse des politiques qu’il est censé mettre en œuvre, portent atteinte à la réputation du service qui l’emploie ou sur l’administration en général, ou critiquent le gouvernement auquel il est soumis hiérarchiquement. Ce devoir est d’autant plus strict que la position du fonctionnaire est plus élevée dans la hiérarchie. J’ai toujours respecté ce principe, qui me semble absolument indispensable à un bon gouvernement : quelle confiance pourraient avoir les citoyens dans la neutralité de l’administration s’ils apprenaient qu’un directeur d’administration ou un préfet critiquent le gouvernement ?

      [Peut-être êtes vous haut-fonctionnaire et vous pensez que ça serait mal vu,]

      Ce n’est pas une question d’être bien ou mal vu. C’est une question de déontologie dans l’exercice de mon métier.

      [mais Asselineau aussi l’est et il ne me semble pas que ses idées soient particulièrement "politiquement correct".]

      A ma connaissance, Asselineau n’exerce plus aucune fonction dans l’administration. Et puis chacun a sa propre conception de l’éthique du métier.

    • Albert dit :

      Bravo, Descartes, pour cette réponse à Koko rigolo. Allo? d’où il sort, ce mec, non mais allo?

    • Koko dit :

      @Albert, vos références culturelles me dispensent de vous répondre.

      @Descartes, la politique économique de François Hollande suit 3 grands axes :

      1) réduire les inégalités économiques ou plutot empecher qu’elles se creusent de façon abyssale comme sous Sarkozy. Il ne va pas assez loin, il aurait du mener une réforme fiscale plus ambitieuse et plus juste en allégeant les impots sur le revenu et en alourdissant considérablement les impots sur le patrimoine, il aurait du suivre complètement les recommandations du grand économiste Thomas Piketty mais c’est mieux que rien ou de continuer à faire des cadeaux aux riches comme Sarkozy.

      2) Favoriser l’activité des petites et moyennes entreprises en évitant de les surtaxer et faciliter leur accès au financement avec la création du PEA-PME. On me dira que c’est du capitalisme et qu’on est loin d’une politique socialiste. Je suis d’accord mais dans la mesure où il n’existe nul part dans le monde (et surtout pas au Vénézuela)une alternative socialiste viable et efficace face au capitalisme, on ne peut pour l’heure rien faire d’autre que d’essayer de donner un visage humain, moins inégalitaire au capitalisme. On ne peut pas reprocher à François Hollande de ne pas avoir su créer une alternative socialiste efficace que personne dans le monde n’a su créer depuis plus d’un siècle.

      3) Préparation des investissements et des innovations qui feront notre croissance de demain. On peut citer par exemple la mise en place de la commission Innovation 2030 présidée par Anne Lauvergeon, cette grande dame que la France a la chance d’avoir.

      Je pense que François Hollande restera dans l’Histoire comme le plus grand président de la Vème République. Le temps parlera en sa faveur.

    • Descartes dit :

      @ Koko

      [ la politique économique de François Hollande suit 3 grands axes :]

      Je me fous des « axes » de la politique économique de François Hollande. Ce n’est pas là la question. Des objectifs nobles, tout le monde en produit à la pelle. Ma question portait sur les mesures concrètes. Je vous avais demandé de « détailler spécifiquement et concrètement en quoi consiste la « politique clairvoyante de François Hollande » à laquelle vous faites référence » et de « expliquer comment les mesures qu’il prend permettront une reprise économique ».

      [1) réduire les inégalités économiques ou plutot empecher qu’elles se creusent de façon abyssale comme sous Sarkozy. Il ne va pas assez loin, il aurait du mener une réforme fiscale plus ambitieuse et plus juste en allégeant les impots sur le revenu et en alourdissant considérablement les impots sur le patrimoine, il aurait du suivre complètement les recommandations du grand économiste Thomas Piketty mais c’est mieux que rien ou de continuer à faire des cadeaux aux riches comme Sarkozy.]

      La référence à Sarkozy est le genre de chose qui fait toujours sonner mon « détecteur de conneries ». Pourquoi ? Parce qu’une politique doit se défendre par elle-même. Lorsqu’on est obligé de se justifier sur le mode « mais avec Sarkozy c’était pire », c’est qu’on est mal barrés. Si je comprends bien, « la politique clairvoyante de François Hollande » à laquelle vous faisiez référence n’est pas celle qu’il fait effectivement, mais celle qu’il aurait du faire en suivant les recommandations de Piketty. Mais en pratique, ce n’est pas ce qu’il fait, c’est plutôt le contraire…

      [2) Favoriser l’activité des petites et moyennes entreprises en évitant de les surtaxer et faciliter leur accès au financement avec la création du PEA-PME. On me dira que c’est du capitalisme et qu’on est loin d’une politique socialiste.]

      Non, je vous dirais plutôt que c’est totalement inefficace. Le problème des PME n’est pas le financement, mais les débouchés. Personne n’ira investir pour fabriquer des produits qu’il ne peut pas vendre, soit parce que la demande intérieure est atone, soit parce qu’il ne peut concurrencer les produits chinois ou indiens fabriqués par une main d’œuvre surexploitée et par des installations soumises à des réglementations environnementales et sociales permissives. Et d’ailleurs on voit bien que malgré la « politique clairvoyante de François Hollande », l’hécatombe des plans sociaux se poursuit.

      [3) Préparation des investissements et des innovations qui feront notre croissance de demain. On peut citer par exemple la mise en place de la commission Innovation 2030 présidée par Anne Lauvergeon, cette grande dame que la France a la chance d’avoir.]

      Ah… si on a mis en place une commission, c’est comme si le problème était résolu…

      Après avoir lu vos explications, je reste sur ma faim. En dehors de la création du PEA-PME, rien de concret. Rien de tangible…

      [Je pense que François Hollande restera dans l’Histoire comme le plus grand président de la Vème République.]

      Mieux que De Gaulle ? Vous y croyez vraiment ?

      [Le temps parlera en sa faveur.]

      Vous avez raison, avec le temps, tout s’oublie. Et c’est ce qui peut arriver de mieux à François Hollande.

  13. Denis dit :

    "Et la légitimité institutionnelle n’est pas en cause. Personne parmi les différents groupes contestataires qui à plusieurs occasions ont fait reculer le gouvernement ne contestent son droit à gouverner. Ce serait plutôt le contraire." (Descartes)

    Non, ce n’est pas tout à fait vrai. Au contraire, les contestataires situés à sa droite n’accepte pas sa politique "gouvernementale" (ça ne veut rien dire mais merci la Vè). Ils refusent que le PS puisse mener une politique un peu différente de celle des précédentes législatures de droite.
    On peut le constater sur : la politique pénale, la politique économique (y compris la fiscalité), la loi sur le mariage pour tous, etc.

    C’est navrant… Mais c’est un fait ! Ils refusent l’application d’une politique légèrement différente et qui irait contre leurs intérêts.

    • Descartes dit :

      @Denis

      [Non, ce n’est pas tout à fait vrai. Au contraire, les contestataires situés à sa droite n’accepte pas sa politique "gouvernementale"]

      C’est bien ce que je dis. En démocratie, il est normal que l’opposition conteste la politique faite par le gouvernement. Mais à ma connaissance personne dans l’opposition ne conteste la légitimité du président à la faire. Personne n’appelle à désobéir aux décisions de Hollande sous prétexte qu’elles seraient "illégitimes".

      [C’est navrant… Mais c’est un fait ! Ils refusent l’application d’une politique légèrement différente et qui irait contre leurs intérêts.]

      En démocratie, c’est normal, non ?

  14. Bannette dit :

    Quand le concept de démocratie est vidé de sa portée pour devenir faire plaisir à tout le monde et vociférer qu’on est en dictature si on n’a pas eu sa sucette…

    Il suffit juste de comparer avec un autre homme du compromis permanent, très admiré par les bobos du PS : Barack Obama lors du récent government shutdown aux USA. Même lui n’a pas cédé aux vociférations et tentatives de blocage venant de la mouvance Tea Party par rapport à l’Obamacare : résultat il a gagné le bras de fer (en attendant le prochain shutdown…) et il est sorti renforcé politiquement de l’épreuve. Et pourquoi aurait-il reculé ? Sa réforme est passée légalement, ses adversaires ont utilisé tous les ressorts pour tenter de la faire annuler sans succès, il avait été réélu, point barre. J’ose même pas imaginer l’attitude de Hollande dans une situation analogue. Ce président médiocre en arrive même à vouloir flinguer la laïcité avec la "clause de conscience" pour des maires qui ne voudraient pas appliquer la loi dorénavant passée sur le mariage entre personnes du même sexe.

    • Albert dit :

      ["Ce président médiocre en arrive même à vouloir flinguer la laïcité avec la "clause de conscience" pour des maires qui ne voudraient pas appliquer la loi dorénavant passée sur le mariage entre personnes du même sexe."]

      Sans vouloir prendre parti sur ce point, qu’est-ce que la LAICITE a à voir ici ??? Encore un qui mélange tout.

    • CVT dit :

      @Albert,
      [Sans vouloir prendre parti sur ce point, qu’est-ce que la LAICITE a à voir ici ??? Encore un qui mélange tout.]
      Pour moi, Bannette a raison: en invoquant la "clause de conscience", on met fin de fait à l’état de droit pour entrer dans le royaume de l’arbitraire, donc vider la démocratie de tout contenu…
      Dans le cas de la laïcité, si la clause de conscience s’applique pour un officier d’état civil "intégriste" (juif, musulman, catholique), cela signifierait que ce dernier pourra l’invoquer pour ne pas faire son devoir (ex: un prof d’histoire qui refuse d’enseigner certains faits historiques à cause de sa religion, ou un médecin qui refuse d’avorter,etc…).
      C’est en ça que la clause de conscience est dangereuse, notamment en matière de laïcité, où la neutralité religieuse serait attaquée au nom de convictions personnelles…

    • Denis dit :

      [Mais à ma connaissance personne dans l’opposition ne conteste la légitimité du président à la faire. Personne n’appelle à désobéir aux décisions de Hollande sous prétexte qu’elles seraient "illégitimes".]

      Justement, c’est bien là que je ne suis pas d’accord.
      A propos de plusieurs sujets, il y a une communication politique qui nie à l’actuelle majorité la légitimité politique d’infléchir certaines politiques publiques :
      – l’économie => réponse d’une partie de l’opposition : "pas de discussion ! on n’augmente pas les impôts et on ne fait que baisser les dépenses publiques sans entraver les entreprises. Si vous souhaitez faire autrement, vous êtes incompétents et n’avez rien compris : il faut maintenir les mêmes méthodes que précédemment et ne pas tenter d’atténuer les effets pervers de l’actuelle économie".
      – la réforme pénale et la récidive => réponse d’une partie de l’opposition "non", on ne touche pas aux méthodes précédentes, vous n’êtes ni compétents, ni légitimes pour lutter contre l’insécurité".
      – exemple encore plus flagrant sur une réforme purement sociétale : le mariage pour tous => réponse d’une partie de l’opposition "NON" (Pire, appel à l’inexécution de la loi et incitation de certains maires de droite à ne pas célébrer les mariages)

      Je ne sais pas si j’arrive à me faire comprendre (c’est bien dans ce genre de contexte que la virtualité montre ces limites lors d’un débat rhétorique).
      Mais j’ai l’impression qu’une bonne partie de "la communication" de l’opposition se résume à rejeter les réformes du PS en arguant qu’elles sont ineptes, illégitimes.

      Alors je suis parfaitement d’accord : [En démocratie, c’est normal, non ?]
      Oui, mais dans certaines limites : on peut vivement critiquer, dire qu’on fera différemment une fois élu, etc. Mais à partir d’un certain point, il faut accepter qu’une ancienne opposition devenue majorité a parfaitement le droit de tenter des politiques différentes. Il faut accepter ce principe et combattre idéologiquement et politiquement avec une certaine retenue et certains moyens rhétoriques qui ne génèrent pas l’excitation générale et de la frustration.

    • Descartes dit :

      @ denis

      [A propos de plusieurs sujets, il y a une communication politique qui nie à l’actuelle majorité la légitimité politique d’infléchir certaines politiques publiques : ]

      Je pense que vous faites une confusion sur la question de la légitimité. L’opposition conteste la compétence du gouvernement, estime que ses mesures sont erronées. C’est une chose. Mais l’opposition ne conteste nullement la légitimité politique du gouvernement. En d’autres termes, elle ne dit pas que les lois votées par le parlement sont nulles et de nul effet, et que les décrets signés par le chef du gouvernement sont nuls et non avenus. Même pour l’opposition la plus acharnée le Parlement reste le dépositaire du pouvoir législatif et le chef du gouvernement le dépositaire du pouvoir exécutif. Personne à ma connaissance n’appelle à la désobéissance.

      [Mais j’ai l’impression qu’une bonne partie de "la communication" de l’opposition se résume à rejeter les réformes du PS en arguant qu’elles sont ineptes, illégitimes.]

      Mais certainement pas que le gouvernement est « illégitime » pour les mettre en œuvre.

      [Oui, mais dans certaines limites : on peut vivement critiquer, dire qu’on fera différemment une fois élu, etc. Mais à partir d’un certain point, il faut accepter qu’une ancienne opposition devenue majorité a parfaitement le droit de tenter des politiques différentes. Il faut accepter ce principe et combattre idéologiquement et politiquement avec une certaine retenue et certains moyens rhétoriques qui ne génèrent pas l’excitation générale et de la frustration.]

      Relisez les discours prononcés par les différents leaders de l’opposition du temps ou Sarkozy officiait à l’Elysée. Pensez vous que la « retenue » dont vous parlez ait été observée ?

  15. CVT dit :

    Bonjour Descartes,
    avez-vous écouté le discours de François II sur le début des cérémonies commémorant la Grande Guerre? Sacré tour de force que d’oublier l’immense majorité des Poilus (mot inusité d’ailleurs chez Hollande) pour ne mettre en exergue que les Tirailleurs, mais plus grave, les Fusillés pour l’exemple! Sans parler du mélange des genres, entre Résistance, persécution des juifs et guerre de tranchées…
    J’ai déjà dit que je redoutais ces cérémonies (et puis d’ailleurs, pourquoi commencer en 2013, alors que la Première Guerre Mondiale n’a débuté qu’en août 1914?), mais avec un président aussi cynique en matière d’histoire (bien plus que Sarkozy, c’est dire!), j’ai bien peur que mes pires crainte ne soient vérifiées…

    • Descartes dit :

      @CVT

      Oui, moi aussi j’ai été choqué par les références permanentes aux "minorités" (troupes coloniales, fusillés pour l’exemple) en oubliant que la Grande Guerre fut d’abord un combat national où la "fraternité des tranchées" a effacé les différences de classe, de race, de religion. Voir à ce propos "La grande illusion" de Jean Renoir…

    • Albert dit :

      @ CVT et Descartes.

      Je m’interroge parfois sur la santé mentale de Hollande dès qu’il est question de racisme, de colonisation, d’immigration.

      Il est normal d’être hostile au racisme, de porter un jugement moral négatif sur certains faits du passé- telle la colonisation (et parfois les circonstances de la décolonisation), mais un Président de la République en 2013 doit diriger son pays au présent et vers l’avenir – sans racisme ni colonisation mais aussi sans états d’âme excessifs sur le passé dont il n’est pas personnellement responsable (ni le peuple actuel dont il a sollicité la charge de le conduire dans l’intérêt général de celui-ci.).Les Français ne sont pas pires que tant d’autres, merde!!! Et même leurs ancêtres n’étaient pas pires que tant d’autres.

      Ce type ou bien est pétri d’un complexe de culpabilité maladive ou bien -ce qui est pire encore- veut faire endosser aux Français, pour s’en libérer lui-même, le complexe de culpabilité qui est le sien. Les psy connaissent bien ce mécanisme d’"externalisation", qui conduit ici à déformer les proportions de la réalité de la guerre de 14-18.

    • Denis dit :

      Cher Descartes,
      Je suis d’accord avec vous sur l’essentiel, et en effet, durant la présidence Sarkozy, il y a eu des débordements de violence (pas tant contre M. Sarkozy lui-même, mais contre sa politique, ce qu’il incarnait, etc.).

      Mais bon, depuis près de 18 mois, j’assiste à autre chose de plus général, dans une atmosphère plus violente contre le président et le gouvernement socialistes – parce qu’ils sont "socialistes" et ont le malheur de changer un chouia les politiques des conservateurs des précédentes majorités.
      Même le 11 novembre quoi… J-F Copé est obligé de reconnaître que, en gros, visiblement ce n’était pas : tolérable, pas très malin, très mal venu…

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