De la ZAD au Djihad

C’est le dernier phénomène à la mode. Je ne parle pas du laisser-aller de nos élus à l’heure de payer leurs impôts – laisser-aller qui n’est pas confiné aux élus, hélas ! (1) – qui défraie la chronique, mais des jeunes hommes et femmes qui quittent tout, études, famille, quartier, pays, pour aller combattre en Syrie ou en Iraq aux cotés des groupes islamistes radicaux.

D’habitude, nos classes bavardantes adorent le « don de soi ». On ne compte plus les articles chantant les louanges de tel ou tel jeune quittant tout pour assouvir sa passion individuelle – le tour du monde à la voile, la traversée de l’Atlantique à la rame. Mais la Rolls-Royce du « don de soi », c’est d’habitude le service d’une cause. On admire, et on le dit, ceux qui sont capables de tout sacrifier, de tout abandonner au service de l’Idée, que ce soit pour soigner les enfants sidatiques en Afrique ou pour combattre les injustices en Amérique Latine. On se serait attendu donc à ce que le « don de soi » des fous de l’Islam soit apprécié humainement à sa juste valeur par les derniers tenants du « romantisme révolutionnaire ». Et bien, non. La condamnation de nos grands prêtres intellectuels est unanime et sans réserves. Ce qui est paradoxal, dans un milieu qui porte aux nues Michel Foucault. Après tout celui-ci chanta les louanges à la fin des années 1978 de l’ayatollah Khomeini et de sa « révolution islamique ». Mais bon, on n’est pas à une incohérence près. Et puis, le monde a bien changé depuis les années 1970. A l’époque, c’était des jeunes idéalistes qui faisaient le choix d’aller combattre pour la justice, aujourd’hui ce sont des pauvres victimes dont le cerveau est « lavé » par de subtils recruteurs sur internet. En d’autres termes, leur « don de soi » n’est nullement libre, et ne vaudrait rien.

Regardons donc de plus près : qui sont ces gens qui partent au moyen-orient pour « faire le djihad » ? En fait, ils viennent d’un peu partout en France. Ils viennent des quartiers défavorisés, mais aussi du centre des grandes villes ou de villages campagnards (2). Ils appartiennent pour une petite moitié de la « communauté » musulmane, mais pour une autre moitié – et c’est notable, j’y reviendrai – ce sont des convertis de fraîche date à l’Islam. On en retrouve dans les quartiers défavorisés mais aussi chez les classes moyennes, qui sont en fait surreprésentées. Les femmes (43%) sont presque aussi bien représentées que les hommes.

Difficile donc de trouver un point commun qui pourrait servir de « cause » efficiente pour expliquer la dérive djihadiste ? Non, pas vraiment. Un « point commun » saute aux yeux : pratiquement tous les candidats au djihad sont jeunes. Un signalement sur quatre concerne un mineur, et on constate une très forte diminution des vocations à partir de 25 ans. C’est donc en direction de la jeunesse et de son statut dans notre société qu’il faut chercher les causes du phénomène.

En fait, comme c’est souvent le cas, nous avons devant nous un phénomène qui, à la base, n’a rien de nouveau. S’il n’est remarqué aujourd’hui que parce qu’il prend une forme particulière, parce qu’il présente un danger particulier… ou plus bêtement, parce que les journaux n’ont rien d’autre à se mettre sous la dent. On peut trouver dans l’histoire du dernier siècle de nombreux exemples ou des jeunes ont tout quitté un jour pour aller combattre les armes à la main pour ce qu’ils croyaient – à tort ou à raison – juste. L’exemple le plus emblématique est certainement celui du « Che » Guevara, jeune médecin argentin allé faire la guérilla à Cuba. On se souvient aussi de Régis Debray, parti faire le coup de feu en Bolivie. Dans un autre registre, des dizaines de milliers de jeunes sont allés combattre du côté républicain – et une dizaine de milliers d’entre eux y ont laissé leur vie. Plusieurs centaines sont allés combattre dans les rangs des mouvements de guérilla latino-américains. Des jeunes français en 1940 on quitté famille et amis pour aller à Londres et de là aux Colonies pour se battre pour la France Libre. Et à chaque fois, on retrouve la même constante : ces déplacements touchent toutes les classes sociales, toutes les origines, et les combattants n’ont qu’un point commun, la jeunesse.

Le jeune arrive dans un monde qui existait bien avant lui, dans une société qui s’est constituée avant et en dehors de lui, avec ses règles, son langage, ses contraintes, ses hiérarchies. Au départ, l’affirmation du jeune en tant qu’individu social le pousse à contester cet héritage, d’assumer une position « en dehors », d’imaginer qu’on peut vivre « autrement ». Et puis, avec l’âge et l’expérience, on découvre que ces règles, ces contraintes, ces hiérarchies ont un sens. Qu’elles ne sont pas là pour vous embêter, mais qu’elles contiennent une sagesse du « vivre ensemble » distillée par l’humanité pendant des siècles. Devenir adulte, ce n’est pas du tout se résigner à l’état des choses. C’est au contraire comprendre combien délicat et subtil est l’équilibre dans lequel nous vivons, et combien l’idée de faire « table rase » du passé est erronée. Dans le « jeunisme » ambiant, on a tendance à associer l’âge adulte avec celui de la résignation, alors que la jeunesse est parée de toutes les vertus de l’engagement. C’est une vision fausse : l’adulte n’est pas moins engagé que le jeune. La différence est que l’adulte s’engage pour ce qui vaut la peine, alors que le jeune conteste à tort et à travers, ce qu’il est possible de réformer comme ce qu’il n’est pas possible – ou pas souhaitable – de changer.

La jeunesse, c’est l’âge de l’immaturité. Le monde de l’enfant est en grande partie formé par ses parents, des gents qui l’aiment, qui se sentent responsables et qui cherchent – et cela est d’autant plus vrai avec la baisse de la natalité et l’avènement de l’enfant-roi – à lui faire plaisir en se pliant à ses désirs. Cette situation conduit l’enfant à une sensation de toute-puissance où il lui suffit de demander, plus ou moins fort, pour être exaucé. Mais à partir de l’adolescence, le jeune sort de ce monde douillet pour se confronter aux autres, des « autres » qui ne se sentent aucune obligation de lui faire plaisir, et qui n’ont aucune intention de se plier à ses désirs. La toute-puissance en prend un coup. Le jeune réalise tout à coup que pour faire quelque chose, pour changer quelque chose il faut s’armer de patience, discuter, convaincre. Ou alors… contraindre par la force. C’est dans cette alternative qu’apparaît cette fascination pour la violence si caractéristique de cet âge. Alors qu’on se sent impuissant devant un monde trop grand et trop complexe, le couteau, le flingue, le cocktail Molotov donnent une illusion de puissance. C’est « donnez-moi une Kalachnikov, et je bougerai le monde ». L’engagement dans le « djihad » de jeunes français n’est donc pas si éloigné d’autres formes de contestation violente qui ont séduit et séduisent toujours la jeunesse. La ZAD n’est finalement pas si loin du Djihad.

Et tout cela n’a rien à voir avec la religion. Celle-ci n’est qu’un prétexte, comme le fut en son temps pour les militants d’Action Directe la croyance dans la Révolution (avec un grand « R ») prolétarienne. Pablo Giussani, dans un essai devenu classique sur la violence politique des Montoneros en Argentine (3) avait décrit le problème avec une magnifique formule : « il ne s’agit pas, dans ce contexte, de la question de savoir si la fin justifie les moyens. Pour Montoneros, c’était plutôt les moyens qui justifiaient la fin ». La religion, que ce soit l’Islam pour les candidats au Jihad ou la nouvelle religion « écolo-anti-capitaliste » pour les zadistes, n’est qu’une justification transcendante de l’aventure qu’ils ont choisi de vivre, une manière de sublimer leur choix de se mettre à l’écart de la société et de ses règles en transformant un choix individualiste en devoir sacré.

Pour s’affirmer, la jeunesse cherche donc à contester les règles, les contraintes, les hiérarchies de la vie en société. Ce faisant, elle se met – et nous met – en danger. Parce que certaines de ces règles, de ces contraintes, de ces hiérarchies ont précisément pour fonction de nous protéger des autres et de nous-mêmes. Cette mise en danger est donc nécessaire, mais en même temps elle est socialement coûteuse. Pour réduire ce coût, les sociétés ont de tout temps cherché à organiser cette mise en danger, à la ritualiser, pour lui permettre de jouer son rôle social tout en limitant le risque. Ainsi, par exemple, dans certaines cultures le jeune guerrier s’affirmait en tuant un lion. Mais avec le temps, le combat réel avec le lion a été remplacé par un combat « rituel » sous forme d’une danse où un guerrier âgé, recouvert d’une peau de lion, mime le combat et la mort de l’animal après un coup de lance symbolique. Cela permet que plus de guerriers arrivent en bonne santé l’âge adulte, pour le plus grand profit de la communauté toute entière.

Protéger notre jeunesse, ce n’est pas la mettre dans du coton. C’est au contraire, lui offrir les moyens de s’éprouver sans se mettre en danger autrement que symboliquement. Il faut lui proposer un « cursus honorum » social qui lui permette de se représenter dans un parcours valorisant. Il nous faut des « cérémonies de passage » et des épreuves marquant les étapes de ce parcours qui permettent au jeune de se « mettre en danger » et de prouver socialement sa valeur sans qu’il soit nécessaire pour cela de prendre une kalachnikov ou le cocktail Molotov dans les mains.

Descartes

(1) Que celui qui n’a jamais payé « au noir » un artisan, qui n’a jamais reçu un paiement en liquide et « oublié » de le déclarer leur jette la première pierre. Je trouve d’ailleurs très curieux de voir les mêmes qui proposent la désignation d’une constituante par tirage au sort au nom de la représentativité sociologique soient les mêmes qui exigent la démission de Thévenoud. Après tout, si l’on veut des assemblées « représentatives », il faut bien que le taux de fraudeurs, de meurtriers et de pervers sexuels soit le même que dans la population générale, non ?

(2) Les données qui suivent viennent de la plateforme téléphonique de signalement mise en place par le Ministère de l’Intérieur.

(3) Pablo Giussani, « Montoneros, la Soberbia Armada » (« Montoneros, la superbe armée »), non traduit.

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100 réponses à De la ZAD au Djihad

  1. bovard dit :

    Voilà des propos forts solides qui rejoignent mes constatations d’enseignant.
    Nous avons ,nous les pédagogues,une difficulté infinie à faire comprendre aux élèves que ‘le monde est plus vieux qu’eux’.
    Je voudrais aborder un sujet qui à me tient coeur,et qui concerne la pratique de Descartes dans ce blog.
    Vous ne vous attendiez pas à cela mais ce n’est ni un piège ni une perfidie.
    J’ai déjà relevé la différente qualité des écrits signés Descartes dans ce blog Descartes.
    Je vous l’ai écrit,mais votre réponse alors préservait le mystère.
    Si je vous dis que certaines des plumes signant ‘Descartes’,dans les fins de discussion… vers la trentième réponse..(ou avec la fatigue,je ne jette pas la pierre..), sont plus jeunes ,moins adroites/érudites que d’autres,infirmerez vous?
    Autre question:votre interprétation du Djihad,peut entraîner des attaques pirates informatiques,sur le site.C’est fréquent dans la blogsphère.Ce genre d’ennuis,lorsque ZAD y apparut par exemple,est il advenu?
    En définitive,ne devons nous pas attendre tout simplement que ‘Jeunesse Zadiste ou Jihadiste se passe’?

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [Si je vous dis que certaines des plumes signant ‘Descartes’,dans les fins de discussion… vers la trentième réponse..(ou avec la fatigue,je ne jette pas la pierre..), sont plus jeunes ,moins adroites/érudites que d’autres,infirmerez vous?]

      Vous savez, à mesure que le débat avance, on sort de moins en moins de points nouveaux. Il y a un moment ou l’on commence forcément à se répéter. Peut-être est-ce pour cela que les réponses vous paraissent de moindre qualité…

      [Autre question:votre interprétation du Djihad, peut entraîner des attaques pirates informatiques, sur le site. C’est fréquent dans la blogsphère. Ce genre d’ennuis, lorsque ZAD y apparut par exemple, est il advenu?]

      Pas que je sache. Je ne pense pas que ce blog soit si important, si lu, pour qu’il mérite une attaque de ce type… en tout cas si cela se produisait, ce serait un grand prix pour mon égo !

      [En définitive, ne devons nous pas attendre tout simplement que ‘Jeunesse Zadiste ou Jihadiste se passe’?]

      Oui et non. Bien entendu, on peut attendre que « jeunesse se passe », et admettre un « taux de pertes », c’est-à-dire, accepter qu’un certain nombre de jeunes seront irréversiblement amochés par les expériences qu’ils auront vécues. Je ne pense pas que ce soit une bonne solution. Je pense au contraire que la société doit proposer à nos jeunes des défis, des épreuves et des cérémonies de passage qui lui permettent de grandir avec une « mise en danger » raisonnable. Ce n’est pas facile, parce qu’il faut pouvoir remplacer la mise en danger réelle par une mise en danger symbolique, et que ce qui caractérise notre époque c’est bien une grande difficulté de symbolisation. Mais il faut essayer.

      Pour ne donner qu’un exemple, il faut garder des interdits sociaux qui puissent être violés sans trop de casse. Car comme disait Lacan, là ou tout est permis, rien n’est subversif. Quand il était obligatoire de vouvoyer l’enseignant, le simple fait de le tutoyer était une « mise en danger », qui a fait battre le cœur de beaucoup d’écoliers… et qui somme toute n’impliquait qu’un danger assez « virtuel ». Mais lorsqu’on permet tout ce qui est sans danger, le jeune est obligé d’aller chercher l’infraction chaque fois plus loin. Si on interdit le cannabis, fumer un joint a le goût de l’interdit. Si on autorise le cannabis, les jeunes iront chercher ce goût dans la coke.

  2. Marcailloux dit :

    Bonsoir,

    [Que celui qui n’a jamais payé « au noir » un artisan, qui n’a jamais reçu un paiement en liquide et « oublié » de le déclarer leur jette la première pierre. Je trouve d’ailleurs très curieux de voir les mêmes qui proposent la désignation d’une constituante par tirage au sort au nom de la représentativité sociologique soient les mêmes qui exigent la démission de Thévenoud. Après tout, si l’on veut des assemblées « représentatives », il faut bien que le taux de fraudeurs, de meurtriers et de pervers sexuels soit le même que dans la population générale, non ?]

    Que vient faire cette digression dans un billet- fort pertinent au demeurant- sur l’idéalisme d’une jeunesse en manque et à la recherche de projet ?
    Sur l’exemple Thévenoud, il y a deux grandes catégories de citoyens, pour faire simple. Ceux qui se contentent de voter (ou de s’abstenir), et ceux qui sollicitent un mandat représentatif.
    Les premiers sont ce qu’ils sont par le hasard ou leur propre volonté, et ne prétendent ne représenter qu’eux-mêmes, tout en étant soumis au respect des lois rédigées par ceux qui les représentent.
    Les seconds sont censés dire la vérité, à ne pas confondre avec la réalisation de ce qu’ils promettent. Ne pas dire la vérité, le mensonge, est une escroquerie. Ne pas tenir ses promesses est une faiblesse.
    L’une doit être sanctionnée par la loi, avec d’autant plus de sévérité (clause de circonstance aggravante) qu’il s’agit d’un élu qui a un certain devoir d’exemplarité.
    L’autre sera sanctionnée par les urnes dans la plupart des cas ou par la rue dans les cas les plus graves.
    Non, il n’y a aucune raison de trouver normal que la même proportion d’escrocs, de pervers, d’ignorants, de psychopathes, etc…soit désignée, acceptée et reconnue comme représentant l’ensemble du peuple.
    Si parmi les élus, donc l’élite, il s’en trouve, ils le sont clandestinement en le cachant à leurs électeurs. Et comme –la Providence nous en préserve- nous ne vivons pas dans notre pays sous la terreur d’une police politique, un Stasi hexagonale, nous n’avons que la confiance dans les déclarations de nos élus pour nous faire une opinion. Raison pour laquelle une punition exemplaire doit être appliquée lorsqu’elle est trahie. Thévenoud commettant une telle faute dans toutes les entreprises que j’ai fréquentées aurait été irrémédiablement viré, et ce n’aurait été que justice. Il n’a qu’à changer de métier s’il est incapable de respecter les lois qu’il rédige et vote.
    Pour reprendre un de vos exemples favoris, accepteriez-vous de vous faire opérer par un chirurgien qui ferait fi des règles d’hygiène ? Bien sûr que non, et si il vous occasionne une septicémie au cours d’une intervention, vous porterez plainte et réclamerez des sanctions.
    Pour l’objet principal du billet, vous n’évoquez pas le caractère initiatique du service militaire abrogé par J.Chirac, qui s’il était, dans sa précédente configuration, archaïque, n’en demeurait pas moins un excellent outil de socialisation, avec les aménagements nécessaires, par exemple un service civil en France ou à l’étranger assorti de formations pour certains en rupture avec la société.

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Que vient faire cette digression dans un billet- fort pertinent au demeurant- sur l’idéalisme d’une jeunesse en manque et à la recherche de projet ?]

      Je sais, ce n’est pas très « professionnel ». Mais voilà, ce blog ne prétend pas être une publication académique. C’est une conversation que je poursuis avec vous, mes commentateurs. Et donc, quelquefois, au détour d’une phrase, il me vient une idée que j’ai envie de partager. Pour ne pas rendre l’exposé confus, j’essaie de mettre cela dans une note. Et si cela fait partir une discussion intéressante, quelquefois je réutilise l’idée pour en faire un vrai billet…

      [Sur l’exemple Thévenoud, il y a deux grandes catégories de citoyens, pour faire simple. Ceux qui se contentent de voter (ou de s’abstenir), et ceux qui sollicitent un mandat représentatif. Les premiers sont ce qu’ils sont par le hasard ou leur propre volonté, et ne prétendent ne représenter qu’eux-mêmes, tout en étant soumis au respect des lois rédigées par ceux qui les représentent.
      Les seconds sont censés dire la vérité, à ne pas confondre avec la réalisation de ce qu’ils promettent. Ne pas dire la vérité, le mensonge, est une escroquerie.]

      En d’autres termes, vous postulez que les représentants ne doivent pas être semblables aux représentés. Qu’ils doivent être meilleurs. Je suis bien entendu d’accord avec vous. Mais cette idée n’est pas universellement partagée. En particulier par la « gauche radicale », qui milite au contraire pour l’idée que les élus doivent être sociologiquement représentatifs des électeurs. En d’autres termes, qu’une assemblée représentative doit contenir un pourcentage de blancs, de noirs, de femmes, d’handicapés, d’intellectuels, d’ouvriers, etc. qui soit similaire à celui de la société qu’elle représente. D’où la proposition défendue par certains d’une assemblée tirée au sort. Le tirage au sort garantit en effet – aux variations probabilistes près – une assemblée ayant la même composition que la société.

      Mon but était de signaler combien cette vision est contradictoire avec l’idée qu’il faudrait purger les assemblées des escrocs et des fraudeurs au fisc. En effet, si la condition de représentativité est que l’assemblée contienne autant d’ouvriers, de noirs, de femmes ou de médecins que la société, la condition devrait inclure le même pourcentage de fraudeurs au fisc, d’escrocs et d’assassins. Un tirage au sort ne peut qu’aboutir à ce résultat. Après tout, une assemblée de saints pourrait-elle être « représentative » des pêcheurs que nous sommes ?

      [Non, il n’y a aucune raison de trouver normal que la même proportion d’escrocs, de pervers, d’ignorants, de psychopathes, etc…soit désignée, acceptée et reconnue comme représentant l’ensemble du peuple.]

      Je suis d’accord. Mais cela conduit nécessairement à rejeter l’idée de représentativité que recouvre la pensée « diversitaire ». En effet, si l’on suppose qu’il faut des noirs pour représenter les noirs, des ouvriers pour représenter les ouvriers, des femmes pour représenter les femmes, il faut alors conclure que seuls les escrocs peuvent représenter les escrocs, seuls les analphabètes peuvent représenter les analphabètes. Et qu’il faut alors qu’une assemblée « représentative » compte parmi ses membres des escrocs et des analphabètes a proportion de la population. Autrement, une partie de la population ne serait pas représentée…

      [Si parmi les élus, donc l’élite,]

      Voilà le cœur de la question. Les élus doivent-ils être « l’élite » ? Voulons nous être représentés par des gens qui nous ressemblent, ou plutôt par des gens qui sont meilleurs que nous et en qui nous avons confiance ?

      [Pour l’objet principal du billet, vous n’évoquez pas le caractère initiatique du service militaire abrogé par J.Chirac, qui s’il était, dans sa précédente configuration, archaïque, n’en demeurait pas moins un excellent outil de socialisation, avec les aménagements nécessaires, par exemple un service civil en France ou à l’étranger assorti de formations pour certains en rupture avec la société.]

      Je ne l’ai pas mentionné, mais parmi les « épreuves » et les « cérémonies de passage », je pensais en particulier au service militaire.

    • morel dit :

      @Marcailloux
      Ce que vous écrivez est propos d’honnête homme. Mais en est-il ainsi pour nombre de nos concitoyens ?
      Oui, sans doute mais non aussi, voyez certains élus condamnés parfois à de multiples reprises par les tribunaux pour des faits liés à leur fonction et…réélus triomphalement !
      J’ai bien peur qu’il ait là un « relativisme » de l’électorat.

    • bovard dit :

      Dans la démarche de Descartes outre le brio,retenons sa capacité remarquable en comparaison aux autres blogs ,à nous faire ressentir ‘la palpitation du réel’.
      Cet article en est une illustration supplémentaire pour les désarrois dans ce premier quart de siècle de mes,nos,vos rejetons français..
      Cependant,voici un cas peu fréquent de jeune qui se bat pour un idéal noble.C’est un un artilleur parachutiste,Renaud Regeard,24 ans.Voici ces propos relatés par l’AFP:’L’artillerie est selon moi la plus belle des armes à laquelle j’étais fier d’appartenir.L’artillerie ukrainienne de Kiev,en a fait une arme de terreur contre les populations civiles et ça,c’est inacceptable pour tout artilleur qui se respecte.En vous rendant complice de ces crimes,ce sont tous les artilleurs du monde que vous salissez!’.
      Poussé par son indignation légitime contre ‘tous ces massacreurs de populations civiles de Kiev’,qui dénature ‘les artilleurs’,avant de s’engager côté pronéoRusse,Richard a rédigé et diffusé à son entourage de militaires de carrière dubitatifs et hostiles un vade meccum du révolutionnaire que mes communistes d’ancêtres n’auraient pas reniés:’Au fond de lui même,le révolutionnaire a rompu tout lien avec toute loi,toute convention et condition accéptée.
      En ce qui concerne ce monde civilisé,il en est un ennemi implacable,et s’il continue à y vivre,ce n’est qu’afin de le détruire plus complètement.’
      Ahh…que l’ant-ihumanisme althussérien recyclé est doux au coeur de l’artilleur soucieux de laver l’honneur de son arme salie par les Ukrainiens..Vous ne trouves pas que ce Dombassiste est plus proche de nous,que les Zadistes ou Jihadistes déjantés que j’exècre…?
      C’est d’ailleurs avec une vraie jubilation qui ne manque pas j’imagine,de transparaitre que je vous narre cette histoire.Ah,si ce pouvait être un de mes anciens élèves,mon bonheur serait complet…
      A propos des,jihadistes et piratges informatiques.Je vous signale que hier après avoir lu votre papier et noté mon commentaire,j’ai visité ma boîte mail et là:’Syrian éléctronic Army of libération’,en panneau occultant tout mon écrana avec aigle syrien,drapeau déployé’.Un pavé en anglais ,m’indiquait que j’étais ‘Hacqué’ par Syrian éléctronic Army’.
      En relation avec les mots Jihad?Donbass?
      Par ailleurs comme d’autres bloggeurs cartésiens,j’ai eu des difficultés quelques fois même si au total,je pense que tous mes posts ont été publiés.Bravo encore,car si ce blog n’a pas la quantité,il a la qualité,et ça n’a pas de prix!
      Avant de terminer,je souhaite évoquer mes proches,enfants,neveux,beau frères qui appartiennent à cette catégorie de jeunes mâles de la première moitié de ce 21ième siècle.Ils sont tanguistes,à rebrousse poil du Freudisme mais peut être en réaction au Zadisme,Jihadisme,DonBassisme ?En tout cas,c’est plus confortable de rester auprès de Maman à l’instar des jeunes italiens ou espagnols que d’affronter le salariat /chômage, le monde extérieur et sa furie.
      Suis je déçu?Au fond,non car je suis convaincu qu’il faut se choisir une voie où un individu est bien.Qui sait ,sous couvert de l’anonymat,peut être que les jeune qui m’entourent,s’adonnent ils à une activité quelquefois ‘dangeureuse’,quelque part difficile,à l’occasion blessante,d’autres fois revêche,frustrante ou stérile en tout cas exigeante;celle d’être Blogchévik sur le blog Descartes?
      Peut être comme ils sont jeunes et timides ,sont ils plus Blogrétif ou Blogchétif que Blogchévik?
      Ah pourquoi les parents comme moi,pensent ils si souvent à l’avenir de leurs enfants?

    • Marcailloux dit :

      Bonjour,
      [En d’autres termes, vous postulez que les représentants ne doivent pas être semblables aux représentés]
      Pas tout à fait. Cependant, ce qui me parait inéquitable – mais comment corriger ce défaut? – c’est la quasi absence dans les hémicycles d’une part importante de la population et notamment celle composée des professions de l’industrie et du commerce, du privé en général. La limitation du "carriérisme" me semble un élément porteur d’ouverture, qu’il faut associer à la protection sociale des élus en fin de mandat. Mais cela est un vaste sujet……Les allers-retours de fonctionnaires, d’énarques entre des mandats électifs et leur fonction d’origine devraient être beaucoup plus encadrés.
      Peut être qu’un dispositif, favorisant, au moyen d’élections avec une part de proportionnelle sur listes, certaines catégories de la population, constituerait un bon pied à l’étrier pour des citoyens pour qui l’accès à des missions électives est inenvisageable. Après tout, tout peut se discuter sans pour cela aboutir à l’absurdité que vous mentionnez plus haut.

      [Voilà le cœur de la question. Les élus doivent-ils être « l’élite » ? Voulons nous être représentés par des gens qui nous ressemblent, ou plutôt par des gens qui sont meilleurs que nous et en qui nous avons confiance ?]
      Il y a d’abord, chez les représentés, une certaine proportion de gens que l’on peut considérer, à tort ou à raison, comme faisant partie de l’élite. Encore faut-il définir ce que l’on entend précisément par ce terme. Et pour un certain nombre, le fait de se former, de se préparer, de lutter pour accéder à une fonction élective, peut constituer une voie d’accès à l’élite.
      J’aimerais bien y voir figurer ces gens modestes dont je parlais plus haut. Ce n’est après tout qu’une promotion au mérite.
      Tout effort important, couronné de succès mène tôt ou tard à l’élite. On voit encore beaucoup trop de "filiation" dans les représentants du peuple aux assemblées majeures. Un des exemples marquant est la petite fille Le Pen, qui par le seul miracle du sang a accès urbi et orbi à la péroraison télévisuelle. Et elle n’est pas la seule si on y ajoute les divers parrainages communautaristes. Et puis enfin, être meilleur, n’est pas un jugement global sur l’ensemble d’une personnalité. Je suis probablement bien meilleur que vous au golf, ce qui n’implique pas que que je sois meilleur citoyen, meilleur analyste de la chose politique – il s’en faut et de loin! – meilleur père de famille, etc….et votre bien meilleure connaissance de la politique et des administrations ne prouve pas que vous seriez un meilleur député que moi ou qu’un autre. Nous n’avons pas d’outils pour mesurer l’excellence et la porte est ouverte aux harangueurs de tous poils pour notre plus grand désarrois.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Ce que vous écrivez est propos d’honnête homme. Mais en est-il ainsi pour nombre de nos concitoyens ? Oui, sans doute mais non aussi, voyez certains élus condamnés parfois à de multiples reprises par les tribunaux pour des faits liés à leur fonction et…réélus triomphalement !]

      Bien entendu. Et c’est, à mon sens, un signe de maturité politique. Si vous avez le choix entre l’homme d’Etat qui résout les problèmes de la Nation et se sert en temps dans la caisse et le politicien incapable mais rigoureusement honnête, lequel choisiriez vous ?

      Nos concitoyens sont, de ce point de vue, extrêmement pragmatiques. Ils comprennent parfaitement qu’une élection n’est pas un concours de sainteté, et que le but n’est pas de désigner le récipiendaire du prix de vertu politique. L’élection consiste à choisir celui qui peut au mieux vous représenter, et éventuellement gouverner l’Etat en votre nom. En fait, les scandales sur la malhonnêteté de nos élus sont moins véhiculés dans les couches populaires – qui ont tendance a ne guère se faire d’illusion sur la question – que chez les petits-bourgeois « libéraux-libertaires » qui ont une vision patrimoniale de l’Etat.

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [Cependant, voici un cas peu fréquent de jeune qui se bat pour un idéal noble. C’est un artilleur parachutiste, Renaud Regeard, 24 ans. Voici ces propos relatés par l’AFP: ‘L’artillerie est selon moi la plus belle des armes à laquelle j’étais fier d’appartenir. L’artillerie ukrainienne de Kiev, en a fait une arme de terreur contre les populations civiles et ça, c’est inacceptable pour tout artilleur qui se respecte. En vous rendant complice de ces crimes, ce sont tous les artilleurs du monde que vous salissez!’.]

      J’avoue que ces propos me laissent un peu dubitatif. Que Renaud Regeard soit fier de son métier, cela ne me choque pas. Etre militaire, c’est embrasser un métier où l’on accepte de risquer sa vie sur commande au service des objectifs décidés par les élus de la Nation. C’est un véritable don de soi. Que Renaud Regeard estime que l’arme qu’il s’est choisie est « la plus belle des armes », soit. Mais de là a imaginer qu’il existe une « corporation des artilleurs » dont les membres seraient tenus à une déontologie et dont le mauvais comportement « salirait tous les artilleurs du monde », c’est n’importe quoi. Les médecins qui acceptent de participer aux séances de torture a Guantanamo ne « salissent pas tous les médecins du monde ». Ils ne salissent qu’eux-mêmes.

      Ce genre de raisonnement holiste, qui fait de chacun de nous en quelque sorte le dépositaire et gardien de l’honneur de la communauté doit être combattu avec la plus grande fermeté. Il faut défendre l’esprit des Lumières en ce qu’il a de plus essentiel : la liberté et la responsabilité de chaque individu. Embrasser une profession ne nous rend pas comptables de ce que d’autres professionnels ailleurs dans le monde peuvent faire. Nous ne sommes responsables que des actes dont nous avons le contrôle.

      [Poussé par son indignation légitime contre ‘tous ces massacreurs de populations civiles de Kiev’,qui dénature ‘les artilleurs’,avant de s’engager côté pronéoRusse, Richard a rédigé et diffusé à son entourage de militaires de carrière dubitatifs et hostiles un vadémécum du révolutionnaire que mes communistes d’ancêtres n’auraient pas reniés: ‘Au fond de lui même, le révolutionnaire a rompu tout lien avec toute loi, toute convention et condition acceptée.
      En ce qui concerne ce monde civilisé, il en est un ennemi implacable, et s’il continue à y vivre, ce n’est qu’afin de le détruire plus complètement.’]

      Pablo Giussani, dans le livre que j’ai cité dans mon article, fait aussi la différence entre le « révolutionnaire » et le « rebelle ». Le premier, le révolutionnaire, est disponible pour une construction politique. Son but n’est pas de « détruire », complètement ou pas. Son but est de construire une nouvelle civilisation, et pour cela il est prêt à utiliser les outils les plus efficaces dans chaque situation concrète : cela peut être la Kalachnikov comme le fait de siéger paisiblement dans une assemblée parlementaire. C’est pourquoi un révolutionnaire ne peut jamais « rompre tout lien avec toute loi, toute convention et condition acceptée ». Une proposition révolutionnaire ne peut jamais être terrifiante, puisqu’elle veut au contraire être attirante.

      Le rebelle, lui, poursuit un objectif tout à fait différent : il veut avant tout que sa rébellion soit vue. Quelle soit notée. Et il lui faut donc se parer des atours de la « rupture totale » et prendre un visage terrifiant.

      [Avant de terminer, je souhaite évoquer mes proches, enfants, neveux, beau frères qui appartiennent à cette catégorie de jeunes mâles de la première moitié de ce 21ième siècle. Ils sont tanguistes,à rebrousse poil du Freudisme mais peut être en réaction au Zadisme, Jihadisme, DonBassisme ? En tout cas,c’est plus confortable de rester auprès de Maman à l’instar des jeunes italiens ou espagnols que d’affronter le salariat /chômage, le monde extérieur et sa furie.]

      Méfiez-vous. Le « tanguisme » est une manière de refuser le saut, de rester éternellement enfant sans avoir à se coltiner les contraintes du monde adulte. Seulement, ce n’est qu’une position temporaire. Elle ne peut se prolonger éternellement – sauf dans les films de Chatiliez – sans devenir une pathologie.

      [Suis je déçu ? Au fond, non car je suis convaincu qu’il faut se choisir une voie où un individu est bien. Qui sait ,sous couvert de l’anonymat, peut être que les jeune qui m’entourent, s’adonnent ils à une activité quelquefois ‘dangereuse’, quelque part difficile ,à l’occasion blessante, d’autres fois revêche ,frustrante ou stérile en tout cas exigeante; celle d’être Blogchévik sur le blog Descartes?]

      « Dangereuse » ? Vous exagérez un peu…

      [Ah pourquoi les parents comme moi, pensent ils si souvent à l’avenir de leurs enfants?]

      Parce que c’est pour cela qu’on les a eus. Pour qu’ils aient un avenir et ainsi prolongent le notre.

    • Descartes dit :

      @ marcailloux

      [En d’autres termes, vous postulez que les représentants ne doivent pas être semblables aux représentés.][Pas tout à fait. Cependant, ce qui me parait inéquitable – mais comment corriger ce défaut? – c’est la quasi absence dans les hémicycles d’une part importante de la population et notamment celle composée des professions de l’industrie et du commerce, du privé en général.]

      Faut savoir : si vous postulez que les escrocs peuvent être représentés par des gens honnêtes, pourquoi refusez-vous l’idée que les « professions de l’industrie et du commerce » puissent être représentés par des fonctionnaires ?

      Sur le fond, je demande à être persuadé que l’a plus grande présence des « professions de l’industrie et du commerce » à l’Assemblée Nationale aurait pour résultat des politiques plus sages. Les assemblées de la IIIème République comptaient une plus forte représentation de ce type que celle d’aujourd’hui, et cela ne lui a pas empêché – au contraire… – de soutenir les désastreuses politiques économiques des années 1930 et pour finir de voter les pleins pouvoirs à Pétain. Encore une fois, la représentativité sociologique n’est pas un gage de représentativité politique, et encore moins de bonne gestion.

      [La limitation du "carriérisme" me semble un élément porteur d’ouverture, qu’il faut associer à la protection sociale des élus en fin de mandat. Mais cela est un vaste sujet……Les allers-retours de fonctionnaires, d’énarques entre des mandats électifs et leur fonction d’origine devraient être beaucoup plus encadrés.]

      Je ne suis pas contre. Encore faudrait-il voir en quoi consiste cet « encadrement ». Si j’interdis au fonctionnaire qui aurait eu un mandat d’élu de réintégrer la fonction publique à la fin de son mandat, dois-je interdire au médecin élu député d’exercer la médecine à l’issue du sien ? Si j’exige au fonctionnaire élu à un mandat de démissionner de la fonction publique, ne dois-je aussi exiger au patron de se défaire de son entreprise ? Personnellement, je pense que l’encadrement des allers-retours entre le public et le privé est bien plus prioritaire que celui des élus.

      [Peut être qu’un dispositif, favorisant, au moyen d’élections avec une part de proportionnelle sur listes, certaines catégories de la population, constituerait un bon pied à l’étrier pour des citoyens pour qui l’accès à des missions électives est inenvisageable. Après tout, tout peut se discuter sans pour cela aboutir à l’absurdité que vous mentionnez plus haut.]

      Je vois mal comment. D’abord, pour faire ce que vous proposez il faudrait diviser la population en « catégories », et de donner des droits différents en fonction de la « catégorie » à laquelle vous appartenez. Du point de vue du principe d’égalité, cela me pose déjà un problème insurmontable. Mais surtout, je vois mal quel serait le bénéfice d’une telle politique. Les fonctions électives ne sont ni un prix, ni un droit. On n’élit pas des députés pour leur garantir un repaire douillet et une retraite. On les élit pour nous représenter dans le gouvernement de l’Etat. Le système électoral doit être conçu en fonction de ce but, et non de buts accessoires du genre « permettre aux femmes noires handicapées autistes de devenir députés ».

      Quant au scrutin proportionnel sur liste… cela implique donner aux partis politiques le pouvoir de désigner les représentants. Je suis totalement contre.

      [Voilà le cœur de la question. Les élus doivent-ils être « l’élite » ? Voulons nous être représentés par des gens qui nous ressemblent, ou plutôt par des gens qui sont meilleurs que nous et en qui nous avons confiance ?][Il y a d’abord, chez les représentés, une certaine proportion de gens que l’on peut considérer, à tort ou à raison, comme faisant partie de l’élite. Encore faut-il définir ce que l’on entend précisément par ce terme. Et pour un certain nombre, le fait de se former, de se préparer, de lutter pour accéder à une fonction élective, peut constituer une voie d’accès à l’élite.]

      Admettons. Mais la question demeure. Si « l’élite » représente « une certaine proportion des représentés », faut-il qu’on retrouve la même proportion chez les représentants ? Plus ? Moins ? Votre commentaire montrait que pour vous il fallait que cette « élite » soit surreprésentée chez les représentants élus.

      [J’aimerais bien y voir figurer ces gens modestes dont je parlais plus haut. Ce n’est après tout qu’une promotion au mérite.]

      Non, justement. L’élection n’est pas un concours destiné à sélectionner le plus compétent. C’est un processus par lequel on sélectionne celui qui doit nous représenter, c’est-à-dire, celui qui réunit le meilleur compromis entre la compétence et la confiance.

      [Tout effort important, couronné de succès mène tôt ou tard à l’élite.]

      Dans une République idéale, oui. Mais dans notre République réelle où l’ascenseur social est bloqué par les classes moyennes, un effort important n’est pas nécessairement couronné de succès. Mais même en admettant que nous soyons dans une République idéale, le fait d’appartenir à l’élite ne suffit pas pour vous garantir une position élective.

      [On voit encore beaucoup trop de "filiation" dans les représentants du peuple aux assemblées majeures. Un des exemples marquant est la petite fille Le Pen, qui par le seul miracle du sang a accès urbi et orbi à la péroraison télévisuelle.]

      Il ne faudrait pas exagérer. Si Marion Maréchal-Le Pen a accès à la péroraison télévisuelle, c’est aussi parce qu’elle a été élue député par le suffrage universel. Il y a bien entendu pas mal de « fils de » dans la représentation politique, mais pas plus que dans n’importe quel autre métier. C’est bien pire dans les professions dites « de la culture » : combien de chanteurs, de musiciens, d’artistes sont eux aussi « fils de » et ont eu le pied à l’étrier grâce aux contacts et aux conseils de papa-maman ? Combien de médecins héritent du cabinet de la clientèle de leurs parents ? D’une certaine manière, dès qu’une activité se professionnalise ce phénomène d’hérédité est inévitable : l’individu dont les parents exercent un métier acquiert depuis le plus jeune âge les habitudes, les comportements, le langage, les reflexes du métier. Il peut compter sur la réputation de ses parents dans la profession, de leurs contacts, de leurs conseils. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que beaucoup de jeunes choisissent de suivre la même voie.

    • Marcailloux dit :

      Bonsoir,
      [Faut savoir : si vous postulez que les escrocs peuvent être représentés par des gens honnêtes, pourquoi refusez-vous l’idée que les « professions de l’industrie et du commerce » puissent être représentés par des fonctionnaires ?]
      Je retrouve là, avec une certaine délectation, votre habileté à manier la dialectique.
      Moi, je ne postule rien. c’est vous qui partez de cette hypothèse pour monter votre démonstration. D’autre part, de la même façon, je ne refuse en rien que, dans indifférenciation des assemblées, les citoyens travaillant ou ayant travaillé dans le privé soient représentés par, entre autres, des fonctionnaires. Je déplore, et seulement déplore, en vertu de la loi des grands nombres, plus de représentants élus issus des entreprises ( je mets de coté les professions libérales) n’émargent sur les listes des députés, sénateurs et autres. Il n’y a pas égalité au niveau du risque encouru à la fin du mandat.
      [ Les assemblées de la IIIème République comptaient une plus forte représentation de ce type que celle d’aujourd’hui, et cela ne lui a pas empêché – au contraire… – de soutenir les désastreuses politiques économiques des années 1930 et pour finir de voter les pleins pouvoirs à Pétain. Encore une fois, la représentativité sociologique n’est pas un gage de représentativité politique, et encore moins de bonne gestion.]
      Là vous confondez – je ne doute pas là non plus de la nécessité dialectique – cause et corrélation. Rien ne nous démontre qu’une assemblée uniquement formée de fonctionnaires n’aurait pas fait pire. D’ailleurs, à part Jean Moulin et quelques autres, combien de préfets, combien de fonctionnaires ont refusé de prêter serment de fidélité à ce même Pétain.
      [ L’élection n’est pas un concours destiné à sélectionner le plus compétent. C’est un processus par lequel on sélectionne celui qui doit nous représenter, c’est-à-dire, celui qui réunit le meilleur compromis entre la compétence et la confiance.]
      Faudra nous expliquer comment on peut faire confiance à un menteur patenté, un escroc, une crapule, malgré tout le talent dont il fait preuve, surtout pour la défense de ses intérêts personnels. Et pourquoi, dans la masse des gens globalement honnêtes, il ne s’en trouverait pas suffisamment pour nous diriger. Il n’est pas question de sainteté, mais lorsqu’un ministre prétend avoir une allergie à la chose administrative, ne paie ni ses impôts ni ses loyers pendant des années, soutenu par son épouse, secrétaire du président du Sénat,…..mais je rêve! et qu’il y en ait qui trouve cela compatible avec une fonction représentative, c’est du délire. On est très loin du simple règlement exceptionnel de quelques centaines d’euro à un artisan, qui néanmoins n’est pas tolérable.
      [ Il y a bien entendu pas mal de « fils de » dans la représentation politique, mais pas plus que dans n’importe quel autre métier. C’est bien pire dans les professions dites « de la culture »]
      Là encore, votre raisonnement glisse insensiblement vers la démonstration que vous souhaitez, mais qui ne correspond pas précisément au sujet. M.M. Le Pen a recueillie combien de voix, au premier tour par rapport aux inscrits de sa circonscription? 20 à 25% tout au plus, et la totalité des citoyens de cette même circonscription doit en assumer les conséquences, ce qui me direz-vous est dans la stricte logique démocratique que je ne conteste pas. Quant au fils de Turlututu ou la fille de Pimprenelle accouchent d’une chansonnette, aucun, je dis bien aucun d’entre les citoyens n’est tenu, ni d’acheter, ni d’écouter la romance. Ce qui fait tout de même une belle différence avec un élu du peuple.

    • bovard dit :

      Tanguistes,Dombassistes,Jihadistes,Zadistes ces dénominations descriptives d’une partie de nos 20-35ans actuels,éludent une caractéristique essentielle.
      Ma génération,celle née entre 1945 et avant 1968 n’a pas été formaté à l’esprit 68.Marquée par l’esprit de 1945,le tumulte soixantehuitard a ébranlé education classique.Or celle ci comportait une immense place laissée à la lecture.Y compris en milieu communiste,où la pratique de la lecture était fortement encouragée.
      50 ans après,la révolution audio-vidéo-numérique a produit deux ou trois générations poussettes,au sens de Michel Serre.
      Ces jeunes sont aculturé,sans bagages historico-culturel,sans conscience qu’il est possible d

    • bovard dit :

      ..Oui,prolongeons:les sobriquets de Zadistes,Jihadistes,Dombassistes,Tanguistes soulignent le faible bagage culturel,
      des nouvelles générations.
      Pour m’amuser,j’organise le jeu suivant.Sur un sujet,choisi au hasard,le jeune ‘poussette’ cherche sur son ordi tandis que j’utilise mes propres connaissances.Parfois le jeune poussette gagne,mais très souvent,c’est moi.J’y ai gagné le surnom de ‘Google’…

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [D’autre part, de la même façon, je ne refuse en rien que, dans indifférenciation des assemblées, les citoyens travaillant ou ayant travaillé dans le privé soient représentés par, entre autres, des fonctionnaires.]

      Dont acte. Mais la conclusion logique de cette position est que la « représentativité sociologique » des assemblées n’a aucun effet sur leur caractère représentatif. En d’autres termes, il n’y aucune raison pour qu’une assemblée constituée à 100% de fonctionnaires ne puisse représenter politiquement la société en général.

      [Je déplore, et seulement déplore, en vertu de la loi des grands nombres, plus de représentants élus issus des entreprises (je mets de coté les professions libérales) n’émargent sur les listes des députés, sénateurs et autres. Il n’y a pas égalité au niveau du risque encouru à la fin du mandat.]

      Ah bon ? Et pourquoi ça ? Je ne pense pas que Serge Dassault, par exemple, ait la moindre difficulté à se « recaser » dans son entreprise à la fin de son mandat. Il faut arrêter le discours « les fonctionnaires ont un emploi garanti à l’issue de leur mandat, tandis que les élus issus du privé se retrouvent au chômage, gna gna gna ». Quand on a été élu, on a un carnet d’adresses que les entreprises valorisent largement. Combien d’anciens députés ou sénateurs connaissez vous qui soient aujourd’hui au chômage ? Je pense que vous pouvez les compter avec les doigts d’une main : ceux qui ne trouvent pas un poste dans un cabinet d’avocats ou de conseil – où on se les arrache pour profiter de leurs contacts – fondent en général leur propre structure…

      Si l’on trouve plus de fonctionnaires parmi les élus que de gens issus du privé, c’est pour une raison qui n’a rien à voir avec la question du « risque à la fin du mandat ». Le fait est que pour choisir la profession de fonctionnaire, il faut quelque part avoir une certaine inclination pour la chose publique. C’est particulièrement vrai pour les hauts fonctionnaires, qui a égalité de responsabilités et de carrière gagnent beaucoup plus dans le privé. Cette inclination pour la chose publique les conduit souvent, plus souvent que dans le privé, à s’engager en politique. Et non seulement comme élus, mais aussi comme simples militants.

      [Les assemblées de la IIIème République comptaient une plus forte représentation de ce type que celle d’aujourd’hui, et cela ne lui a pas empêché – au contraire… – de soutenir les désastreuses politiques économiques des années 1930 et pour finir de voter les pleins pouvoirs à Pétain. Encore une fois, la représentativité sociologique n’est pas un gage de représentativité politique, et encore moins de bonne gestion.][Là vous confondez – je ne doute pas là non plus de la nécessité dialectique – cause et corrélation. Rien ne nous démontre qu’une assemblée uniquement formée de fonctionnaires n’aurait pas fait pire.]

      Je vous rappelle que les désastreuses politiques économiques des années 1930 ont été mises en œuvre en grande partie sous la pression des représentants du secteur privé – de la banque aux « pinardiers », des industriels de l’armement aux représentants des professions agricoles – dans les assemblées. Il ne me semble pas déraisonnable de penser qu’une assemblée composée de gens dont la carrière et la rémunération sont fixées par une grille sont moins susceptibles de légiférer en fonction de leurs intérêts qu’une assemblée composée de gens qui peuvent gagner ou perdre de l’argent avec chaque vote…

      [D’ailleurs, à part Jean Moulin et quelques autres, combien de préfets, combien de fonctionnaires ont refusé de prêter serment de fidélité à ce même Pétain.]

      La plupart des fonctionnaires n’ont pas eu l’opportunité de refuser, parce qu’aucun serment ne leur a été demandé. Seul les magistrats et hauts fonctionnaires y étaient tenus. Mais si rares furent les hauts fonctionnaires et magistrats à refuser de prêter serment, beaucoup plus rares encore furent les dirigeants d’entreprises privés qui ont accompli un acte similaire, refusant par exemple de faire des affaires avec le gouvernement de Vichy. On trouvera en fait beaucoup plus de résistants parmi les hauts fonctionnaires que parmi les hauts dirigeants d’entreprises privées… et lorsque De Gaulle recevra, après la libération de Paris, les dirigeants du patronat français, sa première remarque sera « je n’ai pas vu beaucoup d’entre vous à Londres ».

      [L’élection n’est pas un concours destiné à sélectionner le plus compétent. C’est un processus par lequel on sélectionne celui qui doit nous représenter, c’est-à-dire, celui qui réunit le meilleur compromis entre la compétence et la confiance.][Faudra nous expliquer comment on peut faire confiance à un menteur patenté, un escroc, une crapule, malgré tout le talent dont il fait preuve, surtout pour la défense de ses intérêts personnels.]

      Ce n’est pas parce qu’un homme bat sa femme ou fraude ses impôts qu’on ne peut lui faire confiance pour conduire une opération à cœur ouvert ou bâtir un pont. Franchement, avant de confier votre corps à un chirurgien ou votre maison à un architecte, demandez-vous à vérifier sa déclaration fiscale ? Non, bien sur que non. Et si vous connaissez un excellent chirurgien, vous continuerez à lui confier votre corps même après avoir appris qu’il est un mauvais contribuable.

      Richelieu n’était pas ce qu’on appellerait aujourd’hui un homme honnête. Cela n’empêcha pas Louis XIII de lui faire confiance, et il n’a eu qu’à s’en féliciter. Pourquoi le peuple souverain aujourd’hui devrait agir différemment ? Je préfère infiniment un Richelieu à un Hollande…

      [Et pourquoi, dans la masse des gens globalement honnêtes, il ne s’en trouverait pas suffisamment pour nous diriger. Il n’est pas question de sainteté, mais lorsqu’un ministre prétend avoir une allergie à la chose administrative, ne paie ni ses impôts ni ses loyers pendant des années, soutenu par son épouse, secrétaire du président du Sénat,…..mais je rêve! et qu’il y en ait qui trouve cela compatible avec une fonction représentative, c’est du délire. On est très loin du simple règlement exceptionnel de quelques centaines d’euro à un artisan, qui néanmoins n’est pas tolérable.]

      Franchement, si Thévenoud était en train de réduire le chômage, réindustrialiser la France, rebâtir notre école, porter haut la voix de la France dans le monde, et vous découvriez un jour qu’il n’a pas payé ses impôts ? Exigeriez vous son départ au risque de mettre tout cela en danger ? Moi pas.

      Il faut être réaliste. Les gens qui ont fait de grandes choses dans notre histoire n’ont pas forcément été des parangons de vertu. Et beaucoup de gens fort vertueux ont été désastreux en tant que gouvernants. Moralité : on ne peut se permettre de cracher sur un bon gouvernant quand on en trouve un. Et sur ce plan comme sur beaucoup d’autres, les gens sont parfaitement réalistes : ils pardonnent beaucoup plus facilement les « affaires » lorsqu’ils estiment que le gouvernement gouverne bien que lorsqu’il pensent qu’il gouverne mal…

      [Là encore, votre raisonnement glisse insensiblement vers la démonstration que vous souhaitez, mais qui ne correspond pas précisément au sujet. M.M. Le Pen a recueillie combien de voix, au premier tour par rapport aux inscrits de sa circonscription? 20 à 25% tout au plus, et la totalité des citoyens de cette même circonscription doit en assumer les conséquences, ce qui me direz-vous est dans la stricte logique démocratique que je ne conteste pas. Quant au fils de Turlututu ou la fille de Pimprenelle accouchent d’une chansonnette, aucun, je dis bien aucun d’entre les citoyens n’est tenu, ni d’acheter, ni d’écouter la romance. Ce qui fait tout de même une belle différence avec un élu du peuple.]

      Pas vraiment. S’il est vrai que personne n’est obligé d’acheter le disque du fils Turlututu ou de la fille de Pimprenelle, par le biais des médias nous sommes tout de même obligés de les écouter, et cette écoute leur est rémunérée. Car lorsqu’on est le fils de Higelin, par exemple, il est beaucoup plus facile que votre disque passe sur France Inter que lorsqu’on est le fils de personne. Je persiste : le mécanisme qui permet aux « fils de » d’utiliser les réseaux de papa-maman n’est pas très différent dans le champ politique et dans le milieu artistique. Dans les deux cas, il vous faudra gagner le « public » – qu’il vote pour vous dans le premier cas, qu’il vienne remplir les salles et acheter les disques dans le second – mais lorsque vous avez des parents, vous partez dans cette compétition avec un avantage certain.

    • Bovard dit :

      @Marcaillou@v2s
      ll fallait oser le dire, il l’a dit.
      Il ,c’est un pro-zadiste,eurolatre et oligocrate du parlement européen.
      Son Dieu? ‘sa’ planète..
      Il fait partie ‘d’une certaine élite’…celle qui délite nos acquis sociaux.
      C’est une sorte d’apogée dans les échanges sur le blog Descartes qui montre une fois de plus la sensibilité teintée du talent inénarable de Descartes .
      Une citation,comme acmé de notre débat où convergent beaucoup d’idées exprimées par Marcailloux,v2s,Descartes et moi ainsi que d’autres.
      « On pense que ce n’est pas encore le moment de dire à M. Juncker de partir. Au contraire, il faut en profiter pour lui demander d’agir contre le dumping fiscal »
      Philippe Lamberts, un des responsables des Verts a fait cette sortie .Il a fait cette déclaration.Comme une illustration de la nocivité de ceux qui outrepassent leur rôle ou s’y conforme trop.
      Il semble avoir lu les commentaires du blog Descartes et avoir endossé les habits de la caricature de pseudo-élite ici dénoncée.
      Oui j’ai trop de difficultés avec les Verts qui se rangent dans le camps de l’eurolâtrie,de la dérègulation et du soutien au Capital sans limites..Le parti des Vets échappe au Rationnel.
      Nous étions un certain nombre à en avoir la certitude.
      les genouflexions de Cohn Bendit devant les caciques du capital éclairaient mais là, au coeur de notre débat,c’est le Top!De la Zad ,au Jihad ,en passant par la dérégulation,y compris de la responsabilité des élus face à leurs électeurs.
      Demander à Juncker de prendre position contre la fraude fiscale légitimée et organisée, c’est un contre sens!!
      L’UE s’est forgé autour des intérêts des clients du paradis fiscal qu’est le Luxembourg,administré par Junker et ses équipes.
      Mais,ce parlementarisme,n’est pas 100% démocratique,il ne s’agit peut être que d’un vernis comme le sort réservé au ‘Non au TCE’.
      Si junker est le Richelieu luxembourgeois,la France risque de connaître le sort de La Rochelle, lieu des universités d’été du PS.
      Marine est elle ,la nouvelle Jeanne et Filipot,Alliot,Ménard,Collard les nouveaux Moscoutaires?
      Mon tropisme pour le tintamarre politique est il trop fort?Après tout,nombre des idées de ce post ont été discutées à’ satiété’ dans ce blog.
      Mais la citation,s’est imposé à moi,comme le Mont Viso dans le piémont italien.Une dernière fois,pour la route:
      « On pense que ce n’est pas encore le moment de dire à M. Juncker de partir. Au contraire, il faut en profiter pour lui demander d’agir contre le dumping fiscal »
      Philippe Lamberts

    • Marcailloux dit :

      Bonjour et bon dimanche,
      Petit "codicille" à mon précédent commentaire:
      [Richelieu n’était pas ce qu’on appellerait aujourd’hui un homme honnête. Cela n’empêcha pas Louis XIII de lui faire confiance, et il n’a eu qu’à s’en féliciter. Pourquoi le peuple souverain aujourd’hui devrait agir différemment ? Je préfère infiniment un Richelieu à un Hollande…]
      Il ne vous aura sans doute pas échappé qu’entre cette période bénie des dieux et la notre, la France a vécue la nuit du 4 août, que les souverains ont vu (si l’on peut dire) rouler leur tête dans le panier pour n’avoir pas suffisamment tenu compte des exigences du peuple devenu souverain, qu’ ensuite, des millions de morts parmi nos ancêtres ont permis, par leur sacrifice sous différents événements, notre émancipation. Armand Jean du Plessis de Richelieu n’était et ne risquait pas d’être enfant du peuple tel Jean Dupont fils de bûcheron. Parmi ces derniers, combien de milliers avaient, à leur naissance, des capacités intrinsèques supérieures au cardinal? L’absolutisme qu’il a instauré ne représentait pas les prémices d’une démocratie enviée de tous. Ne comparons pas la capacité à réaliser d’un tyran par rapport à celle d’un démocrate, car il faudra aussi comparer les avantages de la tyrannie sur ceux de la démocratie.
      La dynastie Le Pen constitue en cela un avatar de cette nostalgie du droit du sang dont on peut aujourd’hui mesurer les effets depuis plus d’un siècle. Mais l’histoire, dit-on, n’est qu’un éternel recommencement.

    • Marcailloux dit :

      Suite….
      [ Franchement, si Thévenoud était en train de réduire le chômage, réindustrialiser la France, rebâtir notre école, porter haut la voix de la France dans le monde, et vous découvriez un jour qu’il n’a pas payé ses impôts ? Exigeriez vous son départ au risque de mettre tout cela en danger ? Moi pas.]
      Moi non plus sans aucun doute, mais je lui demanderais de payer ce qu’il doit afin de le ramener, de force s’il le faut, dans la communauté d’état de droit avant de lui décerner tous les honneurs mérités dans le cadre de l’État de droit qu’il dirige.
      Mais, à votre connaissance, pouvez vous nous indiquer quelles actions de ce monsieur Thévenoud et son épouse justifie à ce jour la moindre complaisance, et quels sont, à vos yeux les signes avant-coureurs que son action gouvernementale ou parlementaire va extraire la France de son marasme et qu’ainsi il mérite notre confiance A PRIORI ?
      Non, la vérité est que le poisson pourrit toujours par la tête – ne me faite pas dire que la tête du poisson est toujours pourrie – et que c’est dans cette partie du corps qu’il faut montrer le plus de vigilance et d’intransigeance. Et comme "un homme avertit en vaut deux", le binôme ainsi formé est assez fort pour résister à la tentation de turpitude s’il se propose de décider et d’agir au nom du plus grand nombre.
      Pour espérer changer fondamentalement un pays comme le notre, il faut s’opposer à tellement d’intérêts particuliers que celui qui le tente ne peut en aucun cas entrer dans l’action avec la perspective d’une série de casseroles à ses trousses qui ne peuvent que l’affaiblir. A moins qu’il n’instaure une dictature autoritaire ou une monarchie de droit divin. Est-ce cela que vous souhaitez?
      On ne peut pas vouloir le beurre et l’argent du beurre. La démocratie sans l’opinion ça n’existe pas, et par définition ça ne peut exister. Et un peuple pétri du besoin d’égalité peut-il, à priori, absoudre la malhonnêteté au nom d’une très hypothétique compétence?

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Richelieu n’était pas ce qu’on appellerait aujourd’hui un homme honnête. Cela n’empêcha pas Louis XIII de lui faire confiance, et il n’a eu qu’à s’en féliciter. Pourquoi le peuple souverain aujourd’hui devrait agir différemment ? Je préfère infiniment un Richelieu à un Hollande…][Il ne vous aura sans doute pas échappé qu’entre cette période bénie des dieux et la notre, la France a vécue la nuit du 4 août, que les souverains ont vu (si l’on peut dire) rouler leur tête dans le panier pour n’avoir pas suffisamment tenu compte des exigences du peuple devenu souverain,]

      Tout à fait. Mais ce peuple « devenu souverain » ferait bien – et en pratique le fait – de prendre à son services des ministres comme Armand Jean du Plessis de Richelieu. Et si ces ministres ne sont pas tout à fait irréprochables, il faut mettre en regard le coût de leurs frasques et les services qu’ils rendent à l’Etat avant de songer à les congédier…

      [Armand Jean du Plessis de Richelieu n’était et ne risquait pas d’être enfant du peuple tel Jean Dupont fils de bûcheron. Parmi ces derniers, combien de milliers avaient, à leur naissance, des capacités intrinsèques supérieures au cardinal? L’absolutisme qu’il a instauré ne représentait pas les prémices d’une démocratie enviée de tous. Ne comparons pas la capacité à réaliser d’un tyran par rapport à celle d’un démocrate, car il faudra aussi comparer les avantages de la tyrannie sur ceux de la démocratie.]

      Je pense que votre vision est trop morale et pas assez historique. L’absolutisme monarchique instauré par le Cardinal n’était peut-être pas très démocratique, mais il est une prémisse indispensable à cette démocratie que tant de gens nous envient. Le nom de Richelieu est inséparable de la constitution d’un Etat centralisé se posant en défenseur des sujets contre l’arbitraire de la noblesse petite ou grande. Cette mise au pas de la noblesse, que les successeurs du Cardinal ont poursuivie et amplifiée fut indispensable à la construction de la France moderne. La révolution française n’aurait pas pu être jacobine sans Richelieu.

      [La dynastie Le Pen constitue en cela un avatar de cette nostalgie du droit du sang dont on peut aujourd’hui mesurer les effets depuis plus d’un siècle.]

      J’avoue que le rapport m’échappe. On peut reprocher beaucoup de choses à Richelieu, mais certainement pas d’être partisan du « droit du sang ». Au contraire, c’est avec lui qui apparaissent les prémisses d’une vision « méritocratique » ou le mérite passe avant les droits du sang. La mise au pas de la noblesse ne dit pas autre chose. D’ailleurs, lorsque Richelieu se choisit un successeur, ce sera Mazarin, qui n’était ni noble, ni même français…

      [Franchement, si Thévenoud était en train de réduire le chômage, réindustrialiser la France, rebâtir notre école, porter haut la voix de la France dans le monde, et vous découvriez un jour qu’il n’a pas payé ses impôts ? Exigeriez vous son départ au risque de mettre tout cela en danger ? Moi pas.][Moi non plus sans aucun doute, mais je lui demanderais de payer ce qu’il doit afin de le ramener, de force s’il le faut, dans la communauté d’état de droit avant de lui décerner tous les honneurs mérités dans le cadre de l’État de droit qu’il dirige.]

      Mouais, pourquoi pas. Mais ce serait un geste symbolique, une preuve de soumission à la règle commune. Ce n’est pas pour autant que Thévenoud deviendrait, du point de vue de ses convictions, plus honnête. En somme, vous admettez qu’on peut tolérer certains vices chez nous gouvernants lorsque les services qu’ils rendent à l’Etat sont éminents. C’était précisément mon point.

      [Pour espérer changer fondamentalement un pays comme le notre, il faut s’opposer à tellement d’intérêts particuliers que celui qui le tente ne peut en aucun cas entrer dans l’action avec la perspective d’une série de casseroles à ses trousses qui ne peuvent que l’affaiblir.]

      Je ne suis pas persuadé que les casseroles « affaiblissent » tant que ça un véritable homme d’Etat. Je me suis toujours méfié de cette vision bourgeoise – au sens strict du terme, car la vision vertueuse de la politique est concomitante à la prise du pouvoir par la bourgeoisie – qui exige de l’homme politique un comportement en tous points conforme aux règles morales. Cette contrainte ne fait qu’alimenter une énorme hypocrisie, dont on voit l’illustration dans les pays anglo-saxons.

      [A moins qu’il n’instaure une dictature autoritaire ou une monarchie de droit divin. Est-ce cela que vous souhaitez?]

      Ne me tentez pas… Non, je crains que la monarchie de droit divin ait fait son temps, et que la dictature autoritaire, quelques soient ses avantages, n’offre pas la garantie que le dictateur sera un despote éclairé. On en revient donc à la démocratie comme un système mauvais, mais moins mauvais que les alternatives. Cela étant dit, il y a démocratie et démocratie. Moi je préfère une démocratie rationnelle, qui prend les gens comme ils sont et pas comme elle s’imagine qu’ils devraient être. Si l’on interdit tous les menteurs d’occuper une fonction publique, on se privera de talents et de compétences indispensables. On est donc obligé de composer. Je suis prêt à beaucoup pardonner à celui qui apporte beaucoup à l’Etat.

      [On ne peut pas vouloir le beurre et l’argent du beurre. La démocratie sans l’opinion ça n’existe pas, et par définition ça ne peut exister. Et un peuple pétri du besoin d’égalité peut-il, à priori, absoudre la malhonnêteté au nom d’une très hypothétique compétence?]

      La réponse est de toute évidence oui. La preuve en est que certains de nos élus, parce qu’ils sont reconnus comme d’excellents gestionnaires ou des hommes d’Etat, sont élus et réélus malgré toutes leurs turpitudes. On peut être « pétri du besoin d’égalité » tout en réalisant que l’égalité parfaite – comme la vertu parfaite – ne sont pas de ce monde.

  3. Gérard Couvert dit :

    Toujours une belle écriture, un joli vernis humaniste, bien senti, sur un fond technocratique … et de la justesse.
    Sauf que les chiffres sont totalement fantaisistes, par exemple vous croyez que dans les clans, des grandes cités de droit islamique (je vous propose une visite quand vous voulez à Toulouse) il va y avoir des "signalements" ! mais où vivez-vous ? il y a déjà des katibas, et ce sont plutôt 3/4000 "français" qui sont enrôlés par l’E.I.Une immense majorité est d’origine musulmane, et tous les autres ont fréquenté une mosquée, ne serais-ce que pour préparer les aspects matériel du voyage.
    Mais bien sur, surtout continuer à faire l’autruche en ce qui concerne l’immigration et ses conséquences.
    Enfin, toute personne ayant un minimum lu le coran ou ayant quelques lumières d’histoire sait que l’usage militaire des néo-convertis à toujours fait parti de l’islam ; encore une fois il est patent que l’E.I. représente réellement et justement l’islam.
    Alors certes, il y a sans doute quelques individus atteint du mal de vivre que vous décrivez, mais il s’agit de cas individuels, le mouvement lui est d’une autre nature et vous vous masquer les choses à vouloir leur donner cette dimension qu’elles n’ont pas.

    • Descartes dit :

      @Gerard Couvert

      [Sauf que les chiffres sont totalement fantaisistes, par exemple vous croyez que dans les clans, des grandes cités de droit islamique (je vous propose une visite quand vous voulez à Toulouse) il va y avoir des "signalements" ! mais où vivez-vous ?]

      Ne cédons pas à la paranoïa. Le « signalement » est fait en général par des parents désespérés de voir leur enfant leur échapper. Et rien n’indique que les parents des « cités de droit islamique » comme vous dites soient ravis de voir leurs enfants aller risquer leur peau en Syrie, en Afghanistan ou en Irak.

      [il y a déjà des katibas, et ce sont plutôt 3/4000 "français" qui sont enrôlés par l’E.I.Une immense majorité est d’origine musulmane, et tous les autres ont fréquenté une mosquée, ne serais-ce que pour préparer les aspects matériel du voyage.]

      Comment le savez-vous ? Mes chiffres sont peut-être biaisés, mais au moins je donne ma source. Quelle est la votre ?

      [Enfin, toute personne ayant un minimum lu le coran ou ayant quelques lumières d’histoire sait que l’usage militaire des néo-convertis à toujours fait parti de l’islam ; encore une fois il est patent que l’E.I. représente réellement et justement l’islam.]

      Quelques lumières en histoire vous montreront que l’usage militaire des néo-convertis est une constante chez la plupart des religions. Et pas que les religions d’ailleurs : ainsi, on trouvait parmi les naturalisés français un taux supérieur d’engagés militaires que dans la population en général. La conversion, comme la naturalisation, représente une adhésion idéologique, un acte militant, alors que la religion ou la nationalité « héritées » n’est qu’une continuation de la tradition.

      [Alors certes, il y a sans doute quelques individus atteint du mal de vivre que vous décrivez, mais il s’agit de cas individuels, le mouvement lui est d’une autre nature et vous vous masquer les choses à vouloir leur donner cette dimension qu’elles n’ont pas.]

      Je ne demande qu’à être convaincu… mais il faudrait pour cela présenter des arguments factuels. Et surtout, être plus précis dans les affirmations. Lorsque vous écrivez que « le mouvement lui est d’une autre nature », à quelle « nature » faites vous référence ? Pensez-vous qu’il se constitue dans les cités une « armée musulmane » dont le but est de prendre le pouvoir en Syrie, en Irak, en France ? Si tel est le cas, cette « armée » est extraordinairement secrète. Lorsqu’on trouve des armes dans les cités, c’est dans les mains de « combattants » dont le souci principal est défendre leur territoire de trafic de stupéfiants, et non la création d’un quelconque « émirat » ou « califat »…

    • Albert dit :

      ["Je ne demande qu’à être convaincu… mais il faudrait pour cela présenter des arguments factuels. Et surtout, être plus précis dans les affirmations. Lorsque vous écrivez que « le mouvement lui est d’une autre nature », à quelle « nature » faites vous référence ? Pensez-vous qu’il se constitue dans les cités une « armée musulmane » dont le but est de prendre le pouvoir en Syrie, en Irak, en France ? Si tel est le cas, cette « armée » est extraordinairement secrète. Lorsqu’on trouve des armes dans les cités, c’est dans les mains de « combattants » dont le souci principal est défendre leur territoire de trafic de stupéfiants, et non la création d’un quelconque « émirat » ou « califat »…]

      Je pense (pas "je crois") qu’il y a du vrai dans ce qu’écrit G. Couvert et je regrette infiniment que le souci -louable- de rigueur "factuelle" conduise parfois Descartes à écarter ce qui peut lui sembler seulement un "faisceau" de données.

      Quand il demande à G. Couvert à quelle autre "nature" il fait référence, je suis perplexe, car la réponse à sa question est évidente, il ne peut pas ne pas l’avoir compris. G.Couvert estime que le mouvement en question est éminemment (géo)politico-religieux. What else?

      Quant à savoir s’il existe une "armée secrète" djihadiste en France(et en Europe), c’est évidemment mal poser la question. Mais on est en droit de s’interroger …cf. le livre de Samuel Laurent (notamment):"Al Qaida en France".

    • Descartes dit :

      @ Albert

      [Je pense (pas "je crois") qu’il y a du vrai dans ce qu’écrit G. Couvert et je regrette infiniment que le souci -louable- de rigueur "factuelle" conduise parfois Descartes à écarter ce qui peut lui sembler seulement un "faisceau" de données.]

      Je n’écarte nullement les « faisceaux » de présomptions, mais je demande par simple rigueur intellectuelle que ces présomptions soient « concordantes », pour utiliser la vieille formule juridique. J’avoue que je ne vois pas où sont les « présomptions concordantes » qui conduisent à soutenir le point de vue de G. Couvert.

      [Quand il demande à G. Couvert à quelle autre "nature" il fait référence, je suis perplexe, car la réponse à sa question est évidente, il ne peut pas ne pas l’avoir compris. G. Couvert estime que le mouvement en question est éminemment (géo)politico-religieux. What else?]

      Je ne crois pas que la réponse soit si « évidente ». Tel que G. Couvert a présenté la question, on a l’impression au contraire qu’il s’agit d’un mouvement purement religieux. Ainsi il écrit : « encore une fois il est patent que l’E.I. représente réellement et justement l’islam ». Pas de trace de « (geo)politique » là dedans. Si vous et moi pouvons faire une lecture aussi différente des propos de G. Couvert, alors ma question était justifiée.

      [Quant à savoir s’il existe une "armée secrète" djihadiste en France(et en Europe), c’est évidemment mal poser la question. Mais on est en droit de s’interroger…cf. le livre de Samuel Laurent (notamment):"Al Qaida en France".]

      Je ne comprends pas… « la question est mal posée » mais « on est en droit de s’interroger » ? Cette dernière expression suggère au contraire que la question est très bien posée…

      [J’en ajouterais même un 11ème: lors d’une distribution de tracts avant un scrutin, sur un marché, proposant un tract à une femme d’apparence maghrébine -qui fit signe qu’elle n’en voulait pas, je lui ai demandé pourquoi, si elle ne votait pas? elle me répondit gentiment : "c’est pêché" . Sans commentaire.]

      Votre exemple illustre à merveille le point que j’avais exposé : la religion n’est ici qu’un instrument pour maintenir la communauté isolée du reste de la collectivité nationale, et maintenir ainsi le pouvoir des dirigeants communautaires. Cela n’a absolument rien à voir avec le Coran : ce qui est « pêché », c’est tout ce qui vous fait sortir des frontières de la communauté et participer à la vie de la nation.

      [Je voudrais seulement éclaircir un point: vous dites "aucun débat n’est tabou". Vrai sur votre blog, mais assez faux sur la place publique, où toute tentative de débat vous renvoit illico dans la case infernale des "islamophobe, raciste, fsciste…" etc..Et c’est cela que je déplorais.]

      Dans ce cas, je vous accorde le point. L’une des raisons pour moi de créer ce blog était précisément l’impossibilité à laquelle j’étais confronté d’aborder sérieusement des sujets complexes sur les fora internet et les blogs politiques dès lors que je m’écartais du « politiquement correct » sans encourir l’anathème, la censure ou les deux. Depuis cinq ans que ce blog existe, il a accueilli des commentaires de communistes, socialistes, trotskystes, régionalistes, libéraux… et chacun a été, je le pense, traité avec respect. Et j’entends continuer sur cette voie !

  4. v2s dit :

    Ici, je veux dire ici, dans le salon feutré de Descartes, le lecteur n’est jamais en manque de sujets de débat. D’abord, on lit et on relit l’intéressant article sur la [La ZAD … finalement pas si loin du Djihad], on prend des notes, on se prépare à réagir, mais lorsqu’on est prêt à enfourcher son clavier … zut … déjà 10 réactions !
    Alors, avant de se mettre soi-même à écrire, la tentation est grande de lire ce que Marcailloux, Bovard, Morel ont pensé de l’article. Mais là, horreur (ou bonheur !) déjà trois autres débats sont lancés.
    En plus du débat sur les pulsions idéalistes de la jeunesse, le lecteur, qui s’intéresse aux réactions des autres lecteurs, est forcément attiré par les autres échanges :
    L’exemplarité, souhaitable ou pas, des élus dans une démocratie.
    Ou la grandeur d’âme, réelle ou supposée, d’un ex-para de carrière de l’armée française, ex-membre d’un groupuscule d’extrême droite auto-dissous ( « troisième voie », groupuscule qui réussissait l’exploit d’être à la fois anti-communiste, anti-américain, anti-sioniste, ultra nationaliste …), engagé volontaire dans les mercenaires pro-Russes, pour combattre à l’Est de l’Ukraine.
    Alors ? Que choisir ?
    L’exemplarité des élus ? Le débat est déjà clos, Descartes ayant déclaré de façon définitive que le sujet n’intéresse que [les petits-bourgeois « libéraux-libertaires »]
    Alors le mercenaire d’extrême droite pro-Russe ? C’est bien tentant comme sujet. Car, dans l’Ukraine de 2014, il existe beaucoup des points communs entre les deux camps : l’antisémitisme, le racisme et le supranationalisme pan-slave. Mais je ne doute pas que nous reparlerons vite de l’Ukraine. L’Ukraine, l’occasion, peut-être pas définitivement manquée, de construire un mariage de raison entre l’ouest de l’Europe et la gigantesque Russie, tout aussi européenne que nous.
    Donc, revenons-en au Djihad.
    Votre réflexion sur la nécessité pour la société de [garder des interdits sociaux qui puissent être violés (par la jeunesse) sans trop de casse] est très pertinente. Vous nous dites que ces départs sont comparables à celui de Régis Debray ou aux combats du Che Guevara et oui, ils le sont. Ils le sont certainement dans la tête et dans les intentions des intéressés. Mais la comparaison s’arrête là : le départ au combat est le même, c’est tout. Le phénomène c’est bien autre chose.
    En effet, vous parlez de [dernier phénomène à la mode], phénomène, selon vous, [ .. remarqué … bêtement, parce que les journaux n’ont rien d’autre à se mettre sous la dent.]
    Comme vous y allez !
    Vous ne pouvez pas ignorer que, dans le cas des départs pour le Djihad, ces Che Guevara des temps nouveaux, sont embarqués non seulement dans des groupes combattants, mais aussi et surtout dans une démarche sectaire qui tend à les déshumaniser. Arrivés en Syrie, ils sont pris en mains par des vétérans Djihadistes venus d’Afghanistan et surtout de Tchétchénie. En Tchétchénie, plusieurs générations perdues n’ont connu que le Djihad. Les Tchétchènes sont rompus aux techniques de déstabilisation des individus et aux techniques de manipulation médiatiques.
    Loin de leur idéal de départ, ces jeunes sont dressés pour égorger et je trouve un peu léger d’ironiser sur les [pauvres victimes dont le cerveau est « lavé » par de subtils recruteurs sur internet].
    Lorsqu’ils quittent famille et études, ces jeunes ne sont probablement pas conscients d’être les pions de la faction extrémiste d’un des deux camps de la guerre de religion entre Sunnites et Chiites.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Alors, avant de se mettre soi-même à écrire, la tentation est grande de lire ce que Marcailloux, Bovard, Morel ont pensé de l’article. Mais là, horreur (ou bonheur !) déjà trois autres débats sont lancés.En plus du débat sur les pulsions idéalistes de la jeunesse, le lecteur, qui s’intéresse aux réactions des autres lecteurs, est forcément attiré par les autres échanges : (…)]

      C’est le but. Certains blogs exigent des commentateurs qu’ils se tiennent au sujet. Moi, j’aime ce côté « salon ». La discussion devient une sorte d’aventure intellectuelle : qui sait où elle nous conduira ? En sortant du chemin balisé, elle nous oblige insensiblement à chercher des références, à nous documenter… Et finalement, il faut dire que si cela part dans tous les sens, avec le temps les différents fils convergent en général vers quelques principes généraux, ce qui reste pour moi profondément rassurant !

      [Alors ? Que choisir ?]

      Ce que vous voulez. Ici ce n’est pas un menu, c’est « à la carte ». Et vous pouvez même inventer des nouveaux plats…

      [L’exemplarité des élus ? Le débat est déjà clos, Descartes ayant déclaré de façon définitive que le sujet n’intéresse que [les petits-bourgeois « libéraux-libertaires »]]

      Vous êtes injuste : ici, aucun sujet n’est jamais clos. J’ai donné mon avis, et je m’y tiens. Mais si vous voulez le rouvrir et tenter de montrer que j’ai tort, ne vous gênez surtout pas. Je ne crois pas qu’on puisse m’accuser d’avoir jamais mis un point final à un débat.

      Pourquoi ? Je ne vois pas très bien en quoi ce serait « autre chose ». Et quelle « chose » d’ailleurs ?

      [Vous ne pouvez pas ignorer que, dans le cas des départs pour le Djihad, ces Che Guevara des temps nouveaux, sont embarqués non seulement dans des groupes combattants, mais aussi et surtout dans une démarche sectaire qui tend à les déshumaniser. Arrivés en Syrie, ils sont pris en mains par des vétérans Djihadistes venus d’Afghanistan et surtout de Tchétchénie. En Tchétchénie, plusieurs générations perdues n’ont connu que le Djihad. Les Tchétchènes sont rompus aux techniques de déstabilisation des individus et aux techniques de manipulation médiatiques.]

      Mon propos était d’analyser le chemin qui conduit un jeune français moyen à partir à l’aventure en Irak – ou dans une ZAD. Je n’ai pas évoqué ce qui se passe une fois le candidat djihadiste arrivé à destination. C’est là une autre question qui nécessiterait certainement une analyse plus poussée. Je ne suis pas persuadé que les mouvements « aventuristes » des années 1970 n’aient pas été, dans beaucoup de cas, manipulés eux aussi par des « vétérans » fort versés dans l’art de la manipulation. Croyez-vous vraiment que les organisateurs des Brigades Rouges, du FLN ou du « Sentier Lumineux » étaient des enfants de cœur ?

      [Loin de leur idéal de départ, ces jeunes sont dressés pour égorger et je trouve un peu léger d’ironiser sur les [pauvres victimes dont le cerveau est « lavé » par de subtils recruteurs sur internet].]

      Pourquoi ? Franchement, si on admet qu’on peut à travers d’Internet « laver le cerveau » de n’importe quel jeune de 18 à 20 ans au point de contrôler ses actions, alors il est indispensable d’interdire Internet aux jeunes et de relever l’âge de la majorité. Non, on ne peut pas « dresser pour égorger » n’importe qui. Il faut qu’il y ait au départ une faiblesse, un manque, un besoin que ces égorgements peuvent satisfaire.

      Ce que j’ai voulu souligner, c’est que le phénomène n’est pas nouveau, et n’est pas né avec Internet. Lorsque des jeunes italiens ont cru qu’en mitraillant les jambes d’un commissaire de police ou d’un juge, qu’en assassinant un ancien premier ministre on changeait le monde, lorsque des jeunes imaginent qu’en lançant un cocktail Molotov contre un CRS on sauve la planète, leur démarche n’était guère différente de ceux qui croient obtenir le même résultat en égorgeant un journaliste. La « déshumanisation » n’est pas le privilège des vétérans Tchétchènes. Elle nous guette chaque fois que se manifeste une idéologie qui justifie par avance qu’on blesse ou qu’on tue des êtres humains au nom de la cause sans que cela pose un problème éthique.

    • Bovard dit :

      @Gérard Couvert
      Comme enseignant,j’ai déjà évoqué le détestable effet de groupe apparemment très prégnant chez nos élèves issu(e)s des cultures musulmanes,dans nos classes du secondaire.
      Il m’est arrivé d’en être excédé et à l’occasion de me considérer comme Islamophobe.
      Ce terme pour moi n’est pas sectaire.
      Il décrit simplement que je ne suis pas anti-Islam car je reconnais le droit à l’existence de cette religion.
      Autrement dit je ne suis pas anti-islam pas plus qu’anti-sémite mais,comme de nombreux enseignants j’ai développé une ‘phobie’,coupable,j’ai honte mais c’est plus fort que moi.. .Je suis donc islamophobe comme d’autres sont agoraphobes,sans agressivité anti-musulmane.
      Simplement je suis dérangé,par certaines pratiques que Gérard Couvert décrit très bien.
      Précisément,j’ai développé une phobie à cause de ce qui s’appelle ,les soi disant ’10 péchés selon l’Islam’.
      C’est un fascicule vendu 5 euros dans l’Hypermarché de la cité à côté de chez moi,en Français où sont énumérés les ’10 péchés selon l’Islam’.Edité en Français,par une maison d’édition libanaise.
      Intrigué,je l’ai lu car je m’attendais à y trouver au moins les 7péchés capitaux bibliques,’tu ne tueras pas,tu ne voleras pas…’
      En effet le Coran se place lui même en parenté (partielle,Descartes l’a montré) avec le judéo-christianisme.
      Pas du tout,ces ’10 péchés de l’Islam’ ne sont que de la propagande,prosélytisme ,sans intérêt ‘moral’.
      Ce sont des préceptes plus comparables à un règlement d’appartenance au groupe musulman,qu’à des principes moraux universels.En d’autres termes,un esprit de secte est insufflé aux enfants sous prétexte de leur enseigner ‘les 10 péchés selon l’Islam’.Rien à voir,avec le Coran,le soufisme ou le monothéisme des 3 religions du livre.Du sectarisme le plus pur est insuflé par ces préceptes auquels s’identifient certain(e)s élèves.
      Les voici,en résumé,je les ai relu,il y a deux heures:
      -tu paieras l’impôt musulman sinon,c’est péché;
      -tu feras tes prières sinon,c’est péché
      -tu fréquenteras tes coreligionnaires sinon,c’est péché;
      -tu feras le pèlerinage sinon,c’est péché;
      -tu vivras selon l’islam sinon,c’est péché;
      -tu t’occuperas de ta parenté selon l’islam sinon,c’est péché;
      -tu resteras fidèle à ta communauté selon l’islam sinon c’est péché;
      -tu ne remettras pas en cause le Coran sinon c’est péché.
      -tu diffuseras l’islam sinon,c’est péché;
      -tu éviteras les lectures et contacts impies sinon,c’est péché.
      J’ai lu Massignon,Berque ,Chouraki une multitude d’islamologues.L’islam y était travaillé dans des milliers de pages.Or,il est clair que ce n’est pas le même islam que celui des jihadistes actuels contenu dans ce petit vademecum de l’abruti sectaire potentiellement asociable or contexte islamiste.
      Mes élèves eux ont lu,cet opuscule ‘les 10 péchés selon l’Islam’.
      L’islam;pour eux,c’est cela.
      Imaginez,ce que cela donne en Travaux pratiques de sciences naturelles appelées aujourd’hui,sciences de la vie et de la Terre…
      Cependant,je ne suis pas anti-islamique .
      Temps que le totalitarisme islamique ne me menace pas directement,je choisis une attitude de pédagogue qui appaise les tensions.
      Après tout,c’est mon métier.
      Comme vous l’avez lu,tout cela se fait dans une certaine difficulté intérieure que je préfère à l’attitude consistant à devenir raciste,belliciste ou anti jeune.
      En effet la facette,jeunesse est présente dans le Jihadisme même si les aspects Tchéchéne,Pétrodollar , Monarchies du Golfe et naïveté criminelle de certains, sont à prendre en compte.
      Mais en France,quelle partition jouer ?

    • Marcailloux dit :

      @v2s
      Bonsoir,
      Nous sommes l’essence – dans tous les sens du mot que vous souhaiterez – il (Descartes) est l’allumette!
      Bon je plaisante un peu, bien que cette forme d’échange ne me semble pas rencontrer beaucoup de succès sur ce blog.
      Maintenant, rassurez vous, nous sommes tous logés à la même enseigne, et pour peu que l’on ai pris le temps de boire une bière avec des amis, on rate le lancement du pétard et il ne nous reste que les éclats. On se précipite pour les ramasser, et voila que notre hôte botte le postérieur que bien légèrement on offre en cible à son 46 fillette !
      J’interrompt ici ma turlupinade.
      Personnellement, j’accorde plus d’importance aux remarques, pensées plus complètes, axiomes divers qui chacun à leur façon donnent à réfléchir, sur ou hors le sujet traité, que cela vienne de Descartes, en général ou quelquefois des commentateurs. Et puis, cela prend du temps pour rechercher les références, si l’on est prudent et que l’on ne souhaite pas se tailler des verges pour se faire fouetter (amicalement et virtuellement s’entend), d’autant que si notre collègue Bovard est surnommé Google, Descartes serait alors gogolplex. On a peu de chance d’y échapper. lol
      Alors, le fait que l’on ait ou pas l’opportunité de réagir rapidement me parait secondaire par rapport au crédit de matière à réflexion qui nous est offert. J’ai réalisé, depuis plusieurs années que je consulte ce blog, un petit recueil le concernant, dans lequel j’ai consigné toutes les assertions qui me paraissaient sujet à réflexion, et je m’y réfère assez souvent pour alimenter mes cogitations.

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [Autrement dit je ne suis pas anti-islam pas plus qu’antisémite mais, comme de nombreux enseignants j’ai développé une ‘phobie’, coupable, j’ai honte mais c’est plus fort que moi.. .Je suis donc islamophobe comme d’autres sont agoraphobes, sans agressivité anti-musulmane.
      Simplement je suis dérangé par certaines pratiques que Gérard Couvert décrit très bien.]

      Il ne faut pas tout confondre. Il y a d’un côté la question communautaire, et de l’autre la question religieuse. On a aujourd’hui une fâcheuse tendance à confondre ces deux questions, alors qu’elles sont différentes – sans pour autant être totalement indépendantes. En fait, la plupart de ce qu’on appelle les « musulmans français » connaissent très mal l’Islam. Tout au plus, ils connaissent la tradition qui leur a été transmise par leurs parents, et souvent ils attribuent à l’Islam des coutumes et traditions locales de la région d’origine de leurs parents, coutumes et traditions qui ne sont pas liées à des prescriptions religieuses. Un peu comme certains font du sapin de Noël une « tradition chrétienne », ce qui est de toute évidence absurde.

      Les « pratiques » dont vous parlez tiennent plus à l’affirmation identitaire qu’à une véritable affirmation religieuse. Car la question « qui suis-je, qui sont mes semblables » est éternelle. Si la République a réussi à la fin du XIXème siècle à réduire les communautarismes régionaux et religieux, c’est parce qu’elle a été en mesure de fournir une identité désirable et des repères identitaires forts pouvant s’y substituer. Dans la mesure où la société française ne fournit plus universellement ces repères, il ne faut pas s’étonner que les gens aillent les chercher ailleurs, dans les racines – réelles ou réinventées – de leurs ancêtres, dans la religion, dans des « causes » plus ou moins farfelues.

      Et plus ces identités sont artificielles, plus elles se sentent faibles, plus elles sont agressives. Lorsqu’on n’est pas très sûr de ce qu’on est, on est obligé de faire de la surenchère. Le père né au bled, élevé et marié dans la tradition, n’avait pas besoin de proclamer. Il savait d’où il venait et n’avait pas peur de devenir autre chose. Le fils, né dans une cité, élevé dans une société sans rites, dans une école qui rejette les « romans communautaires » mais ne propose plus de « roman national », n’est plus très sûr de qui il est, et à qui il ressemble. Alors, lorsqu’il trouve un « roman » auquel s’accrocher, il en fait des tonnes.

      [Précisément, j’ai développé une phobie à cause de ce qui s’appelle ,les soi disant ’10 péchés selon l’Islam’. (…) Pas du tout, ces ’10 péchés de l’Islam’ ne sont que de la propagande, prosélytisme ,sans intérêt ‘moral’.Ce sont des préceptes plus comparables à un règlement d’appartenance au groupe musulman, qu’à des principes moraux universels.]

      Cet exemple illustre bien mon point. C’est un phénomène qui tient plus à l’affirmation communautaire qu’à l’affirmation religieuse. Et d’ailleurs, si vous cherchez bien, vous pourrez trouver des documents équivalents pour les autres religions, et même, sous des formes légèrement différentes, pour un certain nombre de mouvements communautaires.

      [En d’autres termes, un esprit de secte est insufflé aux enfants sous prétexte de leur enseigner ‘les 10 péchés selon l’Islam’. Rien à voir, avec le Coran, le soufisme ou le monothéisme des 3 religions du livre. Du sectarisme le plus pur est insufflé par ces préceptes auxquels s’identifient certain(e)s élèves.]

      Ce n’est pas un « esprit de secte », mais un esprit de communauté. Il faut comprendre que toute communauté fonctionne sur un ensemble de règles, dont certaines d’ailleurs n’ont d’autre fonction que de délimiter ce qui est « dedans » et ce qui est « dehors ». En d’autres termes, d’établir une frontière.

      [Mes élèves eux ont lu,cet opuscule ‘les 10 péchés selon l’Islam’. L’islam, pour eux, c’est cela.]

      En d’autres termes, c’est une communauté. Pour eux, le monde est divisé en deux : ceux qui appliquent ces règles (« les nôtres ») et ceux qui ne les appliquent pas (« les autres »). Mais il serait injuste d’attribuer cela uniquement à l’Islam. Je me souviens d’avoir assisté à un meeting « nationaliste » corse, où les orateurs se succédaient pour expliquer que « nous les corses » ont des règles et des lois particulières qui ne sont pas celles du commun des mortels.

      [Imaginez, ce que cela donne en Travaux pratiques de sciences naturelles appelées aujourd’hui, sciences de la vie et de la Terre… Cependant, je ne suis pas anti-islamique. Temps que le totalitarisme islamique ne me menace pas directement, je choisis une attitude de pédagogue qui apaise les tensions. Après tout, c’est mon métier.]

      Je ne suis pas persuadé que le « métier » du pédagogue soit « apaiser les tensions ». Le métier du pédagogue, c’est de fournir des repères fondés sur la Raison. Montrer qu’il existe une réalité qui est indépendante de nos croyances, et que la science vise précisément à mieux connaître cette réalité. Que ce n’est pas parce que les églises interdisent de dire que la terre tourne autour du soleil que cela change le moins du monde la trajectoire de la terre. Que chacun peut choisir librement ce qu’il croit – y compris lorsque c’est absurde – mais que personne ne peut choisir ce qu’il sait, parce que le savoir se construit dans une confrontation avec l’expérience d’une réalité qui nous est extérieure.

      Là encore, je ne crois pas que les jeunes soient aussi bêtes que vous ne le pensez. En dehors de quelques mystiques qui relèvent en général de la psychiatrie, personne ne croit aujourd’hui qu’il sera foudroyé ou envoyé en enfer parce qu’il aura mangé du porc ou couché avec sa petite amie avant le mariage. Les règles que certains élèves prétendent s’imposer et imposer à l’institution n’ont rien de religieux. C’est une question de délimitation d’une communauté et de pouvoir institutionnel, et il faut la traiter comme telle. Les « islamistes » qui s’opposent à l’enseignement de la théorie de l’évolution aujourd’hui ne sont pas très différents des féministes qui exigent les modifications du cursus en accord avec leur crédo « de genre » ou les gauchistes qui hier chahutaient les cours de tout philosophe qui ne payait tribut au marxisme. A chaque fois, c’est une question de pouvoir.

    • v2s dit :

      @Bovard
      [En d’autres termes, un esprit de secte est insufflé aux enfants sous prétexte de leur enseigner ‘les 10 péchés selon l’Islam’. Rien à voir, avec le Coran,].

      Rien à voir avec le Coran, dites-vous ? Si, quand même un peu. Sur les dix « péchés » répertoriés par la liste de votre fascicule à 5 euros, la moitié sont une transcription assez fidèle des cinq piliers de l’Islam.
      Il existe en centre ville, à Grenoble, plusieurs petites librairies, tenues par des musulmans adeptes des thèses véhiculées par les prêcheurs d’obédience sunnite radicale.
      Je me suis procuré deux de ces petits ouvrages en français, vendus à tout petits prix. Ils sont explicitement destinés à la communauté arabo-musulmane non arabophone, ainsi qu’à ceux qui seraient à la recherche de repères, tentés par la conversion à l’Islam. Leur lecture est particulièrement ennuyeuse.
      Ils ressemblent à s’y méprendre aux fascicules que les témoins de Jéhovah et plus généralement les prédicateurs des églises évangélistes distribuent généreusement dans les rues commerçantes ou en porte à porte dans les foyers.
      On peut donc, comme vous le faites, les rapprocher d’une démarche sectaire.
      Mais souvenons-nous, il n’y a pas si longtemps, dans les années 50, dans nos villages français, 95% des enfants, sous la pression de leur maman, allaient au catéchisme (au grand damne de l’instit du village). En 1955, dans mon village de 1100 habitants, le pourcentage des enfants de l’école primaire allant au cathé, frôlait les 100%. Les principes et préceptes qu’on y enseignait n’étaient non plus très éloignés de ce que dit votre fascicule. Il fallait, entre autre, bien choisir ses fréquentations, se méfier des ennemis de Dieu, les communistes par exemple et, bien que Darwin eut depuis longtemps publié ses travaux sur l’évolution, le créationnisme restait l’hypothèse favorite de l’immense majorité de ceux dont l’instruction na dépassait pas le certif.

      Quand Descartes dit : [Le métier du pédagogue, c’est de fournir des repères fondés sur la Raison. Montrer qu’il existe une réalité qui est indépendante de nos croyances, et que la science vise précisément à mieux connaître cette réalité] Descartes a mille fois raison, mais il y a parfois loin de la coupe aux lèvres et parfois le parcours est semé de retour en arrière.
      Je prendrais un exemple dans un monde que certains connaissent bien : La Russie. Après 70 ans d’enseignements des [repères fondés sur la Raison] par les enseignants de l’ex URSS, il a suffit de quelques années pour ramener massivement La Russie actuelle vers un Christianisme Orthodoxe qu’on croyait moribond. Il n’y à qu’à voir la magnifique coupole dorée à l’or fin que Poutine a offert aux croyants de Kaliningrad, la ville natale de sa très pieuse épouse. Ou encore, de voir les ministres et dignitaires du régime actuel qui se pressent dans les cathédrales du Kremlin ou officie Cyrille 1er en personne.

      Que ce soit par la religion ou par le communisme, le genre humain a besoin de croire en un monde moins injuste, plus égalitaire, plus fraternel. L’individualisme de notre société actuelle n’aide pas la jeunesse imaginer un monde meilleur pour eux ni pour leur descendance.
      L’enseignement des [repères fondés sur la Raison] ne fera pas tout, il faudra aussi des actions concrètes pour que la jeunesse en général et nos nouveaux compatriotes arabo-musulmans en particulier voient bien les vertus de l’égalité et de la fraternité.

    • v2s dit :

      @Descartes
      [Tout au plus, ils connaissent la tradition qui leur a été transmise par leurs parents, et souvent ils attribuent à l’Islam des coutumes et traditions locales de la région d’origine de leurs parents]
      La région d’origine de leurs parents ? Sans doute un peu, mais beaucoup moins qu’on pourrait le croire. Sans même évoquer les mères et les grands-mères Tunisiennes, nées sous Bourguiba et après, de nombreuses mères, d’origine algérienne arabo-berbère, ayant passé leur petite enfance au bled, et ayant rejoint leur mari dans les années 80-90, nous expliquent qu’elles sont stupéfaites, voire atterrées par le comportement de leurs filles et petites-filles qui déclarent vouloir porter le Hijab, ou le Niquab. Et elles sont encore choquées d’avantage par les déclarations de leurs fils qui recommandent de telles pratiques. Alors qu’elles mêmes, comme leur mères et leurs grands-mères ont toujours évolué tête nue, depuis des générations.
      La triste réalité, c’est que la communauté arabo-musulmane française n’échappe pas à la lame de fond de radicalisation qui déferle sur le monde arabe (Merci les prédicateurs issus des monarchies du golf).
      Les départs pour le Jihad des jeunes, garçons ou filles, Tunisiens de Tunisie et des jeunes Algériens d’Algérie, désolent tout autant leurs parents que les parents des jeunes français.
      Sur les blogs Maghrébins, les musulmans de ces régions (pourtant tous sunnites) ne sont pas tendres envers ce courant fondamentaliste, venu des monarchies du golf. Il n’est pas rare de lire des diatribes que je n’oserais même pas reproduire ici pour ne pas être taxé d’islamophobie primaire. En résumé, et pour rester poli, les prédicateurs envoyés par les monarchies du golf sont considérés par leurs coreligionnaires, comme des ploucs arriérés tout juste sortis de leurs tentes dans le désert et de leur élevage de chameau. Et croyez moi le vocabulaire utilisé est beaucoup plus fleuri.

      [Les « pratiques » dont vous parlez tiennent plus à l’affirmation identitaire qu’à une véritable affirmation religieuse.]
      Sans aucun doute. Mais l’habileté des tenants de l’extrémisme Sunnite, c’est d’avoir tenté et réussi auprès d’une partie de la jeunesse de la diaspora arabo-musulmane, comme de la jeunesse des pays d’origine, a instiller l’idée qu’une pratique rigoureuse de la religion musulmane mettra Allah dans de bonnes dispositions pour aider tout le peuple Arabo-musulman à *retrouver la grandeur sur le plan géopolitique, la richesse et le succès au plan économique et la souveraineté dans les territoires occupés ou contestés de Palestine.
      *J’ai écrit volontairement retrouver, plutôt que trouver, parce que, au Maghreb par exemple, la nostalgie des grandes périodes de L’Islam triomphant est vive. La classe moyenne Tunisienne passe plus volontiers ses vacances ou son voyage de noce en visitant les palais en Andalousie, bâtis par leurs ancêtres qu’à visiter La Mecque ou les villes sacrées d’Arabie.

      [Si la République a réussi à la fin du XIXème siècle à réduire les communautarismes régionaux et religieux, c’est parce qu’elle a été en mesure de fournir une identité désirable et des repères identitaires forts pouvant s’y substituer.]
      Certainement, et, malheureusement, la société individualiste, qui est la notre, est la négation des principes d’égalité et de fraternité qui devraient pourtant être la règle. Si la société française était la vitrine de ces principes d’égalité et de fraternité, les jeunes français, arabo-musulmans ou pas, trouveraient des raisons de croire en l’avènement d’un monde meilleur, sans avoir à se tourner vers les premiers illuminés venus.

      [Alors, lorsqu’il trouve un « roman » auquel s’accrocher, il en fait des tonnes.]
      Parfaitement, s’il trouve un roman auquel s’accrocher il en fait des tonnes. Je suppose que nous n’en tirons pas la même conclusion puisque certains (dont moi) trouveront ici une raison de plus de combattre toute forme de roman. La société pourrait très bien choisir d’agir, comme l’a fait La France du XIXème, pour plus de justice, plus d’égalité, pour un ascenseur social qui fonctionnerait de nouveau, ce serait, je crois, un excellent antidote aux tentations de replis communautaire.

    • Descartes dit :

      @v2s

      [Ils ressemblent à s’y méprendre aux fascicules que les témoins de Jéhovah et plus généralement les prédicateurs des églises évangélistes distribuent généreusement dans les rues commerçantes ou en porte à porte dans les foyers. On peut donc, comme vous le faites, les rapprocher d’une démarche sectaire.]

      Ca me paraît un peu exagéré. A moins de déclarer que les protestants évangéliques sont une « secte » (au sens du droit français) ce qui me semble aller un peu loin. Par ailleurs, vous expliquez vous-même que l’église catholique n’agit pas autrement au catéchisme… En fait, je crains que ce genre de stratégie soit celui de n’importe quel « communautarisme ».

      [Je prendrais un exemple dans un monde que certains connaissent bien : La Russie. Après 70 ans d’enseignements des [repères fondés sur la Raison] par les enseignants de l’ex URSS, il a suffit de quelques années pour ramener massivement La Russie actuelle vers un Christianisme Orthodoxe qu’on croyait moribond.]

      « Massivement » ? Pas vraiment. Malgré l’évident appui que le pouvoir post-soviétique a donné à l’église orthodoxe avec un souci évident d’utiliser l’autorité de l’église à des fins politiques, la pratique religieuse reste fort marginale. Si vous allez à Moscou, entrez un peu dans les églises – fort nombreuses et fort anciennes au fait, ce qui montre que Staline avait la main moins lourde avec l’architecture religieuse qu’on a bien voulu le dire – et vous verrez qu’elles sont fort peu fréquentées. Quant aux processions, si nombreuses à la période tsariste, elles ont pratiquement disparu. Il ne faudrait pas croire que le fait que Poutine fait bénir par un pope les bâtiments officiels ou offre des coupoles aux églises indique une pratique religieuse « massive ».

      [Que ce soit par la religion ou par le communisme, le genre humain a besoin de croire en un monde moins injuste, plus égalitaire, plus fraternel.]

      Certes. Mais la différence réside dans le fait que le communisme – ou la République version 1789 – promettent un monde moins injuste, plus égalitaire et plus fraternel dans ce monde, tandis que les églises le promettent dans l’autre. Cela fait tout de même une grosse différence.

      [L’enseignement des [repères fondés sur la Raison] ne fera pas tout, il faudra aussi des actions concrètes pour que la jeunesse en général et nos nouveaux compatriotes arabo-musulmans en particulier voient bien les vertus de l’égalité et de la fraternité.]

      L’enseignement ne fait pas tout, mais il fait beaucoup. La meilleure preuve en est qu’il fait toujours peur à ceux qui sont obsédés par la préservation des privilèges. Quand les classes moyennes ont eu peur de la concurrence, la première chose qu’ils ont cassé, c’est bien « l’enseignement des repères fondés sur la Raison ». Croyez-moi, il doit bien y avoir une raison.

    • Descartes dit :

      @v2s

      [La région d’origine de leurs parents ? Sans doute un peu, mais beaucoup moins qu’on pourrait le croire. Sans même évoquer les mères et les grands-mères Tunisiennes, nées sous Bourguiba et après, de nombreuses mères, d’origine algérienne arabo-berbère, ayant passé leur petite enfance au bled, et ayant rejoint leur mari dans les années 80-90, nous expliquent qu’elles sont stupéfaites, voire atterrées par le comportement de leurs filles et petites-filles qui déclarent vouloir porter le Hijab, ou le Niquab. Et elles sont encore choquées d’avantage par les déclarations de leurs fils qui recommandent de telles pratiques. Alors qu’elles mêmes, comme leur mères et leurs grands-mères ont toujours évolué tête nue, depuis des générations.]

      Je ne faisais pas référence au port du voile, mais à toute une série d’éléments qui pour beaucoup de français d’origine maghrébine font partie des « règles de l’Islam » alors qu’en fait ce n’est qu’un héritage de la collectivité d’origine. Pour ce qui concerne le port du voile et tout particulièrement du niquab – qui d’ailleurs n’est lui non plus un précepte de l’Islam, mais une tradition locale de certains pays du moyen orient – vous avez raison : c’est une coutume « importée », et qui chez les immigrants maghrébins n’est que rarement transmise par les parents.

      [Les départs pour le Jihad des jeunes, garçons ou filles, Tunisiens de Tunisie et des jeunes Algériens d’Algérie, désolent tout autant leurs parents que les parents des jeunes français.]

      Je partage.

      [Sur les blogs Maghrébins, les musulmans de ces régions (pourtant tous sunnites) ne sont pas tendres envers ce courant fondamentaliste, venu des monarchies du golf. Il n’est pas rare de lire des diatribes que je n’oserais même pas reproduire ici pour ne pas être taxé d’islamophobie primaire. En résumé, et pour rester poli, les prédicateurs envoyés par les monarchies du golf sont considérés par leurs coreligionnaires, comme des ploucs arriérés tout juste sortis de leurs tentes dans le désert et de leur élevage de chameau. Et croyez moi le vocabulaire utilisé est beaucoup plus fleuri.]

      Je ne lis malheureusement pas l’arabe, mais des amis qui le lisent me confirment effectivement que c’est le cas. On a un peu tendance à voir « les arabes » comme un tout homogène ce qui, comme toute « essentialisation », conduit à une vision très schématique des problèmes.

      [Sans aucun doute. Mais l’habileté des tenants de l’extrémisme Sunnite, c’est d’avoir tenté et réussi auprès d’une partie de la jeunesse de la diaspora arabo-musulmane, comme de la jeunesse des pays d’origine, a instiller l’idée qu’une pratique rigoureuse de la religion musulmane mettra Allah dans de bonnes dispositions pour aider tout le peuple Arabo-musulman à retrouver la grandeur sur le plan géopolitique, la richesse et le succès au plan économique et la souveraineté dans les territoires occupés ou contestés de Palestine.]

      Comme je l’ai écrit dans mon papier, je n’y crois pas. Il y a certainement qui croient qu’Allah leur donnera la victoire s’ils prient cinq fois par jour ou vont en pèlerinage à la Mecque. Mais je ne crois pas qu’ils soient très nombreux.

      [Si la société française était la vitrine de ces principes d’égalité et de fraternité, les jeunes français, arabo-musulmans ou pas, trouveraient des raisons de croire en l’avènement d’un monde meilleur, sans avoir à se tourner vers les premiers illuminés venus.]

      Totalement d’accord. Voilà donc quel est le meilleur antidote contre les « illuminés » de tout poil : une société qui met en pratique les principes de la République.

      [Parfaitement, s’il trouve un roman auquel s’accrocher il en fait des tonnes. Je suppose que nous n’en tirons pas la même conclusion puisque certains (dont moi) trouveront ici une raison de plus de combattre toute forme de roman.]

      Vous faites une erreur de raisonnement. Si vous êtes d’accord avec l’idée que lorsque les gens trouvent un « roman » ils en font des tonnes, vous ne pouvez conclure qu’il faille « combattre toute forme de roman ». Parce qu’il y aura toujours des gens pour proposer des « romans », et s’ils ne trouvent pas ils se le créeront eux-mêmes. Je pense que notre différence sur ce point vient du fait que vous croyez possible pour une société de vivre sans « roman », et moi pas. Et c’est pourquoi je préfère infiniment un « roman » partagé, humaniste et Républicain, plutôt que de laisser les gens bricoler leur propre « roman », au risque qu’ils tombent dans les filets d’un gourou quelconque…

      [La société pourrait très bien choisir d’agir, comme l’a fait La France du XIXème, pour plus de justice, plus d’égalité, pour un ascenseur social qui fonctionnerait de nouveau, ce serait, je crois, un excellent antidote aux tentations de replis communautaire.]

      Vous oubliez que pour réussir ce tour de force, la France de la fin du XIXème et du début du XXème a construit un « roman » extrêmement détaillé et puissant. Et la France post 1945 a agi de même…

    • Albert dit :

      ["Les voici,en résumé,je les ai relu,il y a deux heures:
      -tu paieras l’impôt musulman sinon,c’est péché;
      -tu feras tes prières sinon,c’est péché
      -tu fréquenteras tes coreligionnaires sinon,c’est péché;
      -tu feras le pèlerinage sinon,c’est péché;
      -tu vivras selon l’islam sinon,c’est péché;
      -tu t’occuperas de ta parenté selon l’islam sinon,c’est péché;
      -tu resteras fidèle à ta communauté selon l’islam sinon c’est péché;
      -tu ne remettras pas en cause le Coran sinon c’est péché.
      -tu diffuseras l’islam sinon,c’est péché;
      -tu éviteras les lectures et contacts impies sinon,c’est péché."

      C’est un peu schématique (comme tout "cathéchisme") mais pas faux.
      J’en ajouterais même un 11ème:
      lors d’une distribution de tracts avant un scrutin, sur un marché, proposant un tract à une femme d’apparence maghrébine -qui fit signe qu’elle n’en voulait pas, je lui ai demandé pourquoi, si elle ne votait pas? elle me répondit gentiment : "c’est pêché" . Sans commentaire.

    • "Il ne faut pas tout confondre. Il y a d’un côté la question communautaire, et de l’autre la question religieuse."
      C’est à voir. D’une part, on peut observer que beaucoup de religions tendent à alimenter le communautarisme. Ensuite, on peut s’interroger sur le fait que certaines religions versent plus facilement que d’autres dans le communautarisme. Il me semble (vous me direz ce que vous en pensez) que, pour des raisons historiques, le judaïsme et l’islam sont intrinsèquement plus "communautaristes" que le christianisme. En effet, le judaïsme repose sur l’idée de "peuple élu" qui doit se distinguer des autres. Quant à l’islam, dès que le premier empire musulman s’est étendu, il a immédiatement établi une distinction entre les musulmans et les autres, astreints à l’impôt dans le cadre du statut de dhimmis. Ajoutons que les obligations alimentaires sont plus rigoureuses chez les musulmans et les juifs que chez les chrétiens.

      Le christianisme a une histoire un peu différente: il s’est développé dans un empire romain relativement tolérant au point de vue religieux (les persécutions n’ont ni la fréquence ni la violence qu’on leur attribue parfois). Les premiers chrétiens n’étaient pas forcément des marginaux: Paul est citoyen romain. Les chrétiens, pendant quatre siècles, ont cohabité avec les païens, parfois au sein des mêmes familles. Durant tout ce temps, le fait d’être chrétien n’a pas systématiquement cassé les autres solidarités: beaucoup de soldats ont continué à se battre, des fonctionnaires ont continué à servir l’empire, des curiales leurs cités… tout en étant chrétiens. Les chrétiens n’ont pas véritablement constitué une société à part (comme les juifs, d’ailleurs plutôt bien tolérés par le pouvoir romain, après les révoltes du Ier et II° siècles, et reconnus comme une communauté à part entière). Et c’est d’ailleurs ce qui a fait peur à certains empereurs comme Galère: le fait que les chrétiens étaient partout, dans l’armée, dans l’administration, et se conduisaient en citoyens de l’Empire. Autrement dit, les chrétiens ont très tôt fait une distinction entre une identité politique (citoyen romain) et une identité religieuse (chrétien). Et même si plus tard l’Eglise triomphante a imposé une confusion de ces identités, il n’empêche que la distinction a bien existé à l’origine et imprègne le christianisme, d’autant que Jésus lui-même la fait ("rends à César…").

      En est-il de même pour les juifs et les musulmans? Ou, pour le dire autrement, le juif pratiquant et le musulman pratiquant peuvent-ils être autre chose que "communautarisé"?

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [C’est à voir. D’une part, on peut observer que beaucoup de religions tendent à alimenter le communautarisme. Ensuite, on peut s’interroger sur le fait que certaines religions versent plus facilement que d’autres dans le communautarisme. Il me semble (vous me direz ce que vous en pensez) que, pour des raisons historiques, le judaïsme et l’islam sont intrinsèquement plus "communautaristes" que le christianisme.]

      Je suis totalement en désaccord. Je pense que votre vision est faussée par le fait que vous prenez le christianisme dans des pays où il est majoritaire et l’islam ou le judaïsme là où ils sont minoritaires. Mais si vous comparez ce qui est comparable, vous verrez que la différence n’est pas évidente. L’islam en Iran n’est en rien « communautaire », du moins pas plus que ne l’était le protestantisme dans le nord-est des Etats-Unis. Le catholicisme est un cas un peu particulier parce que, contrairement au judaisme, à l’Islam et au protestantisme il a un caractère fortement universel du fait de sa soumission à une hiérarchie unifiée.

      Parmi les monothéismes, la seule religion dont on peut dire qu’elle est « communautaire » est le judaïsme, qui était la religion d’un peuple élu par dieu et qui n’avait aucune prétention à l’universalité, qui s’est d’ailleurs traduite par une absence totale de prosélytisme.

      [Quant à l’islam, dès que le premier empire musulman s’est étendu, il a immédiatement établi une distinction entre les musulmans et les autres, astreints à l’impôt dans le cadre du statut de dhimmis.]

      Mais le statut en question est lié à la religion, et non à la communauté. Quiconque se convertit à l’Islam devient musulman de plein droit et rejointe la communauté musulmane des croyants. Toute religion, c’est une évidence, établit une séparation entre les croyants et les autres.

      [Le christianisme a une histoire un peu différente: il s’est développé dans un empire romain relativement tolérant au point de vue religieux (les persécutions n’ont ni la fréquence ni la violence qu’on leur attribue parfois). Les premiers chrétiens n’étaient pas forcément des marginaux: Paul est citoyen romain. Les chrétiens, pendant quatre siècles, ont cohabité avec les païens, parfois au sein des mêmes familles.]

      Ils n’avaient pas le choix, vu le rapport de forces. Mais dès qu’ils ont eu les moyens, les chrétiens ont été aussi « intolérants » que l’Islam. C’est d’ailleurs logique : une religion universaliste ne peut être que prosélyte, et le prosélytisme devient dès qu’on a le pouvoir de l’intolérance. La chance pour le christianisme est que les premières persécutions sont celles de l’age obscur qui s’étend de la fin de l’empire romain à l’apparition de l’empire carolingien. Mais on sait que pendant ces périodes les cultes païens ont été impitoyablement réduits, que les idoles furent brisées et des églises construites sur les lieux de culte antérieurs. Nous ne pouvons qu’imaginer ce qui est arrivé aux natifs qui persistaient à rendre culte à leurs anciens dieux, mais à juger par ce que nous savons de situations analogues, il ne faut pas tant d’imagination que ça.

      [Et c’est d’ailleurs ce qui a fait peur à certains empereurs comme Galère: le fait que les chrétiens étaient partout, dans l’armée, dans l’administration, et se conduisaient en citoyens de l’Empire. Autrement dit, les chrétiens ont très tôt fait une distinction entre une identité politique (citoyen romain) et une identité religieuse (chrétien).]

      C’est vrai, mais cela tient moins à la nature de la religion chrétienne qu’à la nature de la civilisation romaine, au sein de laquelle le premier christianisme s’est développé. Les romains avaient fait cette séparation entre la sphère politique et la sphère religieuse bien avant que les chrétiens apparaissent, et les armées romaines comptaient des soldats et des officiers qui rendaient culte à des divinités fort différentes. Les chrétiens n’ont fait que s’insérer dans cet environnement. Et cette « tolérance » apparente des chrétiens a disparu lorsque le monde romain s’est effondré.

      Sur ces questions, je ne ferais donc pas une différence aussi nette que vous le faites entre le christianisme et l’Islam. Les deux religions ont été, lorsqu’elles ont eu le pouvoir, également intolérantes. Mais chacune porte aussi la marque de la société politique où elle s’est développée. Les bergers guerriers de la péninsule arabique n’étaient pas tout à fait au même niveau politiquement que les élites romaines.

      [En est-il de même pour les juifs et les musulmans? Ou, pour le dire autrement, le juif pratiquant et le musulman pratiquant peuvent-ils être autre chose que "communautarisé"?]

      Pour le juif, clairement, non. Il y a une différence fondamentale entre le judaïsme et les deux autres monothéismes abrahamiques. Le judaïsme n’est pas universaliste. On ne se convertit pas au judaïsme – du moins traditionnellement, la problématique des mariages mixtes a fait que ces dernières années certains rabbins admettent la conversion – on naît ou on ne naît pas juif. Mais la différence entre l’Islam et le christianisme est à mon avis minime.

    • @ Descartes,

      "L’islam en Iran n’est en rien « communautaire », du moins pas plus que ne l’était le protestantisme dans le nord-est des Etats-Unis."
      Ah bon? La tenue vestimentaire des femmes était réglementée par une loi religieuse dans le nord-est des Etats-Unis? Il y a eu une police religieuse à New York? Décidément, on connaît très mal les Etats-Unis d’Amérique.

      Bien sûr que l’islam iranien est "communautaire", à tel point qu’il réserve des sièges du Parlement aux minorités religieuses (zoroastriens, juifs et chrétiens), qu’il distingue clairement de la communauté musulmane majoritaire. Je ne crois pas qu’on puisse citer beaucoup de pays chrétiens qui ont "confessionnalisé" à ce point leur société, à l’époque contemporaine.

      Prenez l’Allemagne: après s’être entre-massacrés au XVII° siècle, au cours de la guerre de Trente Ans, Allemands protestants et catholiques ont constitué une nation à la fin du XIX° siècle. Et cette nation a survécu aux défaites de 1918 et de 1945, alors même qu’elle était "jeune". A contrario, l’Irak, malgré l’épreuve de la guerre contre l’Iran et la politique nationaliste de Saddam Hussein, est incapable de maintenir l’entente entre Arabes sunnites et Arabes chiites (je ne parle même pas des Kurdes). Pourquoi? Parce que non seulement l’islam est beaucoup plus "communautaire" que le christianisme (ce qui explique en partie les difficultés à bâtir des sentiments nationaux solides) mais en plus il a une dimension plus "politique" que le christianisme. Qui est Jésus? Un prédicateur, rien de plus. Mahomet, lui, est un guerrier et un chef d’Etat, ce qui crée une différence importante entre la définition historique de la communauté chrétienne et celle de la communauté musulmane.

      Très tôt, il a existé plusieurs états chrétiens (le premier en date étant l’Arménie, et non l’Empire romain comme on pourrait le croire). Au contraire, l’islam a d’abord été la religion d’un Empire unifié, un califat dont l’identité politique et religieuse s’est confondue. Bien sûr, le califat unifié a vécu. Mais il reste une référence pour les musulmans.

      "qui s’est d’ailleurs traduite par une absence totale de prosélytisme."
      Tous les historiens ne sont pas d’accord là-dessus. Après les révoltes de 70 et 135, les juifs se dispersent autour de la Méditerranée, certes. Mais au IV° siècle, la vitalité des communautés juives est remarquable et l’on estime que 10% des habitants de l’Empire romain sont juifs. A moins que la Palestine ait hébergé des millions de juifs, on est amené à se demander d’où peut venir une telle expansion démographique… Le judaïsme a été, à certaines périodes, prosélyte.

      "Mais le statut en question est lié à la religion, et non à la communauté."
      Si, la communauté religieuse, justement.

      "La chance pour le christianisme est que les premières persécutions sont celles de l’age obscur qui s’étend de la fin de l’empire romain à l’apparition de l’empire carolingien. Mais on sait que pendant ces périodes les cultes païens ont été impitoyablement réduits, que les idoles furent brisées et des églises construites sur les lieux de culte antérieurs. Nous ne pouvons qu’imaginer ce qui est arrivé aux natifs qui persistaient à rendre culte à leurs anciens dieux, mais à juger par ce que nous savons de situations analogues, il ne faut pas tant d’imagination que ça."
      Oui et non. La conversion ne s’est pas toujours passée dans la violence. Il me semble important à ce sujet de rappeler que le christianisme a malgré tout une tradition de "missionnaires pacifiques" qui est beaucoup moins présente dans l’islam. L’essentiel de l’expansion islamique est le fait de conquêtes militaires et d’annexion. Ce n’est pas systématique pour le christianisme (Pologne, Russie, Hongrie, Bulgarie, Scandinavie).

    • Descartes dit :

      @nationalistejacobin

      ["L’islam en Iran n’est en rien « communautaire », du moins pas plus que ne l’était le protestantisme dans le nord-est des Etats-Unis."][Ah bon? La tenue vestimentaire des femmes était réglementée par une loi religieuse dans le nord-est des Etats-Unis?]

      Bien entendu. Dans la colonie du Massachussets, elles devaient le porter le cheveux couverts d’une coiffe, et des manches longues. Les immigrants anglais qui arrivent dans les colonies britanniques d’Amérique à partir du milieu du XVIIème siècle sont des puritains qui quittent l’Angleterre entre autres choses pour échapper à la « permissivité » et à la « corruption des mœurs » et construire une « communauté idéale » fondée sur la Bible. Ces communautés imposent des règles très précises quant au respect du sabbat, la tenue vestimentaire selon les âges et les sexes, etc. Certaines communautés, comme les Amish, conservent ce type de règles jusqu’à nos jours.

      [Il y a eu une police religieuse à New York?]

      A New York non, mais dans le nord-ouest des Etats-Unis, oui. Je vous renvoie aux grands procès en sorcellerie, dont celui dit « des sorcières de Salem » en 1692, qui servit de modèle à Arthur Miller pour dénoncer le McCarthysme.

      Je pense qu’il suffit d’un petit retour en arrière dans l’histoire pour constater que l’Islam n’est pas en essence très différent du christianisme. Oui, le christianisme lui aussi a dans le passé prescrit l’habillement des femmes. Oui, le christianisme aussi a eu sa « police religieuse ». Oui, le christianisme aussi a eu ses « communautés » fanatisées. Et si tout cela appartient au passé, ce n’est pas parce que le christianisme est fondamentalement différent de l’islam, mais parce que le combat des Lumières a permis non seulement de chasser la religion de la sphère publique, mais de forcer l’église à reconnaître sa défaite et admettre la séparation du civil et du religieux. Je ne doute pas que l’Islam, dans quelques siècles, soit dans les mêmes conditions.

      [Bien sûr que l’islam iranien est "communautaire", à tel point qu’il réserve des sièges du Parlement aux minorités religieuses (zoroastriens, juifs et chrétiens), qu’il distingue clairement de la communauté musulmane majoritaire. Je ne crois pas qu’on puisse citer beaucoup de pays chrétiens qui ont "confessionnalisé" à ce point leur société, à l’époque contemporaine.]

      Et pourtant, malgré votre croyance, ils existent. Ainsi, la constitution argentine en vigueur jusqu’à la réforme de 1994 exigeait dans son article 76 que le président de la république fut « appartienne à la communion catholique apostolique romaine ». Certains hauts-fonctionnaires étaient censés prêter serment « sur Dieu, la Patrie et ces saints évangiles », formule qui excluait les non-catholiques de ces fonctions. Et ce genre de dispositions ne sont pas rares dans les pays de tradition chrétienne…

      [Prenez l’Allemagne: après s’être entre-massacrés au XVII° siècle, au cours de la guerre de Trente Ans, Allemands protestants et catholiques ont constitué une nation à la fin du XIX° siècle.]

      C’est vrai aussi en Iran. La « confessionnalisation » n’empêche pas les juifs iraniens de se sentir pleinement iraniens. Ils constituent d’ailleurs la plus grosse communauté juive du moyen orient. Le Liban a une identité nationale dont la force n’a rien à envier à celle de l’Allemagne, et cela en dépit du fait que la société est totalement confessionnalisée, et que les différents groupes religieux n’ont pas des rapports faciles…

      [Et cette nation a survécu aux défaites de 1918 et de 1945, alors même qu’elle était "jeune". A contrario, l’Irak, malgré l’épreuve de la guerre contre l’Iran et la politique nationaliste de Saddam Hussein, est incapable de maintenir l’entente entre Arabes sunnites et Arabes chiites (je ne parle même pas des Kurdes). Pourquoi? Parce que non seulement l’islam est beaucoup plus "communautaire" que le christianisme (ce qui explique en partie les difficultés à bâtir des sentiments nationaux solides) mais en plus il a une dimension plus "politique" que le christianisme.]

      Vous avez une conception totalement statique du monde. Vous comparez christianisme et Islam aujourd’hui, en oubliant que l’évolution des deux religions n’est pas parallèle. Le christianisme est peut-être moins « communautaire » et moins « politique » aujourd’hui – et encore, en Europe – parce que le travail des Lumières a cantonné la religion dans la sphère privée. Mais cela n’est pas inscrit dans l’essence du christianisme. C’est le fruit de l’histoire. Et si vous allez en Argentine ou au Chili, là où l’histoire est un peu différente, vous serez surpris de constater que l’Eglise catholique là bas n’est pas très différente des ayatollahs.

      [Qui est Jésus? Un prédicateur, rien de plus. Mahomet, lui, est un guerrier et un chef d’Etat, ce qui crée une différence importante entre la définition historique de la communauté chrétienne et celle de la communauté musulmane.]

      Ah bon ? Jesus n’est qu’un prédicateur ? Et moi qui croyais qu’il était dieu lui-même fait homme… en plus d’être le messie. Rien que ça. Ca laisse assez loin ce pauvre Mahomet, qui après tout n’était qu’un prophète, de nature humaine…

      Je ne crois pas que les différences entre l’image de Jesus et celle de Mahomet créent une si grande différence dans la définition des « communautés » respectives. Elles reflètent le contexte de l’époque ou chacune de ces religions est née : religion minoritaire dans un empire dont l’autorité ne tolérait aucune contestation dans le premier cas, religion servant d’unificateur d’une tribu contre les autres dans un conflit local dans le second. Mais je ne pense pas qu’il faille voir plus que cela. Les campagnes de Saladin ou de Souleiman ne sont pas très différentes des campagnes équivalentes menées par les chrétiens.

      [Très tôt, il a existé plusieurs états chrétiens (le premier en date étant l’Arménie, et non l’Empire romain comme on pourrait le croire). Au contraire, l’islam a d’abord été la religion d’un Empire unifié, un califat dont l’identité politique et religieuse s’est confondue. Bien sûr, le califat unifié a vécu. Mais il reste une référence pour les musulmans.]

      C’est discutable. Il est difficile de parler de « états chrétiens » avant Constantin. Il y eut des églises chrétiennes en Arménie, et probablement des princes ou des rois chrétiens. Mais l’idée de religion d’Etat n’apparaît pas encore à cette époque, et les royaumes laissent une assez large liberté de culte. Lorsque le christianisme devient pour la première fois religion d’Etat, c’est dans un empire unifié. Par ailleurs, l’Islam non plus n’a pas été la religion d’un empire unifié, et les princes musulmans se sont souvent fait la guerre entre eux. Le Calife est une sorte de Pape, pas un empereur absolu.

      ["qui s’est d’ailleurs traduite par une absence totale de prosélytisme."][Tous les historiens ne sont pas d’accord là-dessus. Après les révoltes de 70 et 135, les juifs se dispersent autour de la Méditerranée, certes. Mais au IV° siècle, la vitalité des communautés juives est remarquable et l’on estime que 10% des habitants de l’Empire romain sont juifs. A moins que la Palestine ait hébergé des millions de juifs, on est amené à se demander d’où peut venir une telle expansion démographique… Le judaïsme a été, à certaines périodes, prosélyte.]

      En tout cas, il ne reste aucune trace ni dans les textes, ni dans le rituel. Lorsque les rabbins modernes ont été confrontés au problème, ils ont été obligés de construire une cérémonie de conversion – et le droit correspondant – ex nihilo. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle les rabbins traditionnalistes ne reconnaissent toujours pas les conversions. Il faudrait savoir ce qu’on appelait exactement un « juif » au IVème siècle…

      ["Mais le statut en question est lié à la religion, et non à la communauté."][Si, la communauté religieuse, justement.]

      Non. Le dhimmi qui se convertit à l’Islam acquiert par cette conversion tous les droits du musulman. C’est donc la religion, et non l’appartenance à une communauté qui est déterminante.

      [Oui et non. La conversion ne s’est pas toujours passée dans la violence. Il me semble important à ce sujet de rappeler que le christianisme a malgré tout une tradition de "missionnaires pacifiques" qui est beaucoup moins présente dans l’islam.]

      Je ne connais pas de cas ou les missionnaires ont été « pacifiques » lorsqu’ils avaient l’option de ne pas l’être. Pourriez-vous m’illustrer ? Si l’on trouve des idoles brisés, si les lieux de culte chrétien sont construits sur d’anciens sites de culte païen dont le archéologues trouvent les restes détruits, on peut supposer que la chose n’était pas si « pacifique » que cela.

      [L’essentiel de l’expansion islamique est le fait de conquêtes militaires et d’annexion.]

      L’essentiel de l’expansion chrétienne, aussi. D’abord par la force de l’empire romain, puis par celle des « barbares » christianisés qui se sont fait les relais de la « nouvelle religion », souvent parce que cela leur permettait de justifier la conquête de leurs voisins non-chrétiens. Et en dernière instance, c’est logique : pourquoi un peuple irait changer de dieux ? Parce que quelqu’un lui explique qu’avec l’appui du nouveau dieu on peut gagner plus facilement les batailles.

      [Ce n’est pas systématique pour le christianisme (Pologne, Russie, Hongrie, Bulgarie, Scandinavie).]

      Ne me dites pas que vous croyez encore aux récits édifiants des évangélisateurs aux mains nues…

    • BolchoKek dit :

      >A New York non, mais dans le nord-ouest des Etats-Unis, oui. Je vous renvoie aux grands procès en sorcellerie, dont celui dit « des sorcières de Salem » en 1692, qui servit de modèle à Arthur Miller pour dénoncer le McCarthysme.<

      Petite précision, il ne s’agit pas de Salem dans l’Oregon (je ne sais même pas si la région avait été explorée en 1692) mais de Salem dans la colonie du Massachussets. Colonie qui avait cela de particulier qu’elle avait été créée pour accueillir les puritains anglais, et seulement eux. Dans le même genre, le Maryland avait été fondé pour la minorité catholique anglaise.

      >Par ailleurs, l’Islam non plus n’a pas été la religion d’un empire unifié, et les princes musulmans se sont souvent fait la guerre entre eux. Le Calife est une sorte de Pape, pas un empereur absolu.<
      Avant le délitement de l’empire abbasside, on peut dire que le califat était sous tous aspects le titre d’un monarque régnant non seulement sur la communauté des croyants, mais sur un territoire et donc sur les non-croyants de ce territoire. Les arabes, en s’installant à Damas puis à Baghdad, loin de perpétuer leur modèle tribal, se sont très vite dotés de structures administratives inspirées des byzantins et des perses qu’ils avaient conquis. C’est un peu la subtilité du titre de calife : dans les premiers temps, le titre était de fait celui d’un chef d’état. Avec le morcellement en différents potentats dirigés par des seigneurs de type féodal comme les émirs ou les sultans (ou titres non arabes, comme shah ou khan), et l’affaiblissement progressif du pouvoir temporel favorisé par la destruction de Baghdad par les mongols, le titre est devenu exclusivement religieux. Il reviendra dans les mains d’un souverain de premier plan lorsqu’il sera pris par l’ottoman Sélim Ier. Toutefois, les souverains régnaient en tant que sultans. L’abolition du califat aura lieu d’ailleurs deux ans après l’abdication du dernier sultan, à la suite de controverses chez les turcs républicains quant à l’usage à faire du calife : certains souhaitaient en effet l’utiliser pour réformer le dogme.

    • @ Descartes,

      Je ne sais pas vous, mais moi, je ne crois pas tellement au hasard. Les sociétés arabes et chinoises ont été riches et puissantes, or c’est en Europe occidentale que les Lumières sont nées, c’est-à-dire en terre chrétienne. Pourquoi là plutôt qu’en terre musulmane ou bouddhiste? Il y a bien une raison. Je ne pousserais pas jusqu’à prétendre, comme le font certains, que les Lumières sont "filles" du christianisme. Je me borne à relever que les Lumières se sont développées dans une société fortement marquée, intellectuellement et culturellement, par le christianisme. D’ailleurs, un certain nombre de philosophes des Lumières étaient passés, si je ne m’abuse, chez les Jésuites ou les Oratoriens. Il faut dans ce cas, je pense, être reconnaissant aux religieux qui ont su former de si grands esprits… Et vous savez comme moi l’importance de l’éducation. Apparemment, les écoles coraniques n’ont pas formé de Voltaire ou de Diderot. Ce qui m’amène à me demander si l’Eglise catholique, en dépit de ses crimes et de son intolérance, n’a pas malgré tout un autre rapport au savoir que les autorités religieuses musulmanes ou bouddhistes. J’ajouterais de plus qu’il faut distinguer l’Eglise comme institution humaine en quête de pouvoir, et le christianisme en lui-même.

      Je pense également que les Lumières doivent beaucoup à l’humanisme qui s’est développé au XVI° siècle en Europe. Or, si l’Eglise assurément a combattu les Lumières, son attitude à l’égard des humanistes ne fut pas systématiquement hostile. D’ailleurs, certains humanistes étaient membres du clergé, et il me semble que l’humanisme était profondément chrétien. C’est dans le sillage de l’humanisme que quelques états européens ont tenté cette chose impensable jusqu’alors: la tolérance religieuse avec égalité des droits pour les membres des différentes confessions aux Provinces-Unies, en Pologne un temps (oui, il y a eu des protestants en Pologne), en Transylvanie hongroise, et même partiellement en France après l’Edit de Nantes de 1598. Même s’ils se sont entre-tués avec une rare férocité, le fait est que catholiques et protestants ont cherché assez rapidement à établir un modus vivendi en certaines contrées. Les musulmans connaissent la tolérance, mais l’égalité de droit avec le mécréant est très compliquée.

      Sur la violence comparée des chrétiens et des musulmans, je suis en total désaccord avec vous. D’abord, le concept de "guerre sainte" est inconnu du christianisme des débuts. Les empereurs romains ne combattent pas les Goths parce qu’ils sont hérétiques, ni les Huns parce qu’ils sont païens. Ils les affrontent pour se défendre. J’ajoute que le christianisme n’a pas provoqué cet élan que l’islam a engendré et qui a poussé les Arabes à bâtir un empire s’étendant de l’Espagne aux confins de l’Inde. Lorsque l’empire romain devient très officiellement chrétien avec les lois de Théodose en 392-394, il est déjà sur la défensive voire sur le déclin. Le christianisme a d’ailleurs joué un rôle ambigu: ciment apparent de l’empire, il en est aussi un des facteurs d’affaiblissement car, en devenant chrétiens, les empereurs deviennent partie prenante des interminables querelles théologiques. Il n’y a qu’à voir comment Justinien, très brillant empereur du VI° siècle, laisse un empire désuni et divisé entre catholiques-orthodoxes (car le schisme ne s’est pas encore produit) et jacobites de Syrie ou monophysites d’Arabie et d’Egypte. Des discordes que les musulmans ne tarderont pas à exploiter d’ailleurs…

      "Ah bon? Jésus n’est qu’un prédicateur?"
      Dans une perspective historique qui ne se prononce pas sur la foi, oui. Je pensais que vous étiez athée, je vous prie de m’excuser. Lorsqu’on lit les Evangiles, on a en effet l’impression d’avoir affaire à un prédicateur plutôt qu’à un guerrier ou un homme d’Etat. Vous n’êtes pas de cet avis?

      Sur les juifs:
      Je vous renvoie à l’ouvrage de Shlomo Sand intitulé "L’Invention du peuple juif". Il fait observer d’abord que les "expulsions" de juifs après les révoltes anti-romaines de 66-70 et de 132-135 doivent être relativisées: seules les élites ont été touchées, la majorité des juifs, des paysans sans doute peu fortunés, sont restés sur place. L’archéologie ne signale ni destruction massive, et les textes n’indiquent pas la venue de colons pour remplacer les juifs chassés de chez eux. Le spécialiste du Proche-Orient antique Maurice Sartre explique également que la majorité des juifs autour de la Méditerranée sont des païens convertis. Le prosélytisme juif est semble-t-il attesté par certaines sources, et pas seulement dans l’Empire romain, car il faudra m’expliquer comment Mahomet a trouvé trois tribus juives à Yathrib lorsqu’il s’y est réfugié après avoir été chassé de la Mecque… Plus tard, au début du Moyen Âge, une partie des Khazars, peuple nomade de langue turque installé en Russie du sud et en Ukraine, s’est converti au judaïsme.

      Sur les conversions pacifiques au christianisme, je peux illustrer:
      Les Frisons, durant le Haut Moyen Âge, sont plus ou moins tributaires des Mérovingiens. Ces derniers ne leur imposent pas le christianisme, ce qui n’empêche pas des missionnaires de tenter leur chance… avec une fin tragique la plupart du temps. Les rois de Pologne, de Scandinavie ou le grand-prince de Kiev n’ont pas été forcés de se convertir suite à une défaite ou à une invasion. Je connais mal l’histoire de l’Irlande mais, à ma connaissance, la conversion ne s’est pas faite violemment. De même, les Goths et les Burgondes se sont convertis sans y être forcés, puisqu’ils ont adopté une hérésie chrétienne, l’arianisme, combattue par les empereurs romains et leur Eglise. Après, il est vrai que certains de ces rois ont ensuite persécuté leurs compatriotes restés païens, mais la persécution était plus le fait de l’autorité politique que de l’Eglise. J’ai même l’impression que le christianisme est devenu beaucoup plus agressif au contact de l’islam, auquel il a probablement emprunté le concept de guerre sainte: après l’an 1000, on voit effectivement se multiplier les "Croisades", en Espagne, en Orient, contre les Baltes païens… Mais à ma connaissance, les progrès du christianisme en Scandinavie, en Europe centrale et orientale, ne sont pas pour l’essentiel le fait de conquêtes militaires. Lorsque les Bulgares choisissent le christianisme, leur roi est le rival de l’empereur byzantin avec lequel il fait jeu égal dans les Balkans.

      Décidément, à part Charlemagne en Saxe, dont on souligne en effet la politique anti-païenne et les conversions forcées, l’expansion du christianisme, dans un premier temps, est moins guerrière que vous le dites. A partir du milieu du Moyen Âge, ça change, c’est vrai. Et ne parlons pas de la conquête de l’Amérique centrale et du sud, par les Espagnols, des gens qui, comme par hasard, avaient connu l’invasion musulmane et de longues guerres pour se débarrasser de leurs occupants. A se demander si l’agressivité islamique ne leur aurait pas été transmise…

    • Descartes dit :

      @nationalistejacobin

      [Je ne sais pas vous, mais moi, je ne crois pas tellement au hasard. Les sociétés arabes et chinoises ont été riches et puissantes, or c’est en Europe occidentale que les Lumières sont nées, c’est-à-dire en terre chrétienne. Pourquoi là plutôt qu’en terre musulmane ou bouddhiste? Il y a bien une raison.]

      La question que vous posez est à mon avis passionnante. En effet, pourquoi des empires qui ont été plus riches et puissants que l’occident – la Chine, pour ne donner qu’un exemple – se sont « arrêtés » dans l’histoire, alors que l’occident a continué à avancer ? Il y a une raison, mais je ne pense pas qu’elle ait quelque chose à voir avec le christianisme. Je pense que la réponse à cette question réside dans la filiation grecque et latine. Les grecs, ce peuple antique qui est le seul, dans l’histoire de l’humanité, à avoir inventé la philosophie, c’est-à-dire, à avoir cherché à penser le monde en dehors de la religion, par la seule puissance de la raison humaine. Les romains ensuite, ce peuple qui a le premier pensé une systématique de l’Etat et du droit. Ces inventions fondamentales ont donné à la civilisation greco-latine des caractéristiques uniques, et parmi elles une curiosité sur les autres peuples et celle de sa propre histoire, qui le fait sortir d’une vision « cyclique » du temps – qui était la caractéristique de beaucoup de peuples antiques et le reste encore aujourd’hui – pour lui substituer une vision linéaire. Le point de rupture pour l’occident ce n’est pas tant les Lumières que la Renaissance. S’il y a eu les Lumières en Europe, c’est parce qu’il y a eu la Renaissance. Une Renaissance qui – et ce n’est pas un hasard – a cherché à renouer avec l’héritage classique, c’est-à-dire l’héritage grec réinterprété par Rome.

      Si le christianisme a joué un rôle, c’est surtout grâce au fait que l’église chrétienne était l’héritière de Rome et par son intermédiaire de la Grèce. Il était naturel pour le clergé de parler – et donc d’enseigner – le Latin et le Grec. Les musulmans, qui paradoxalement avaient découvert la culture grecque à la fin du Moyen-Âge à un moment ou l’occident chrétien l’avait un peu oubliée, n’avaient pas cet avantage. Même si certains intellectuels musulmans de l’âge d’or se sont passionnés pour Aristote et Platon, ils n’ont pas vraiment incorporé l’héritage grec dans leur culture et notamment dans leur culture religieuse. Le clergé musulman n’a jamais parlé latin et grec. En d’autres termes, si le christianisme a permis que surgissent la Renaissance et les Lumières, c’est surtout en se faisant le véhicule de la culture greco-latine.

      [Apparemment, les écoles coraniques n’ont pas formé de Voltaire ou de Diderot.]

      Non, mais elles ont formé un Averroes, un Ibn Khaldoun ou un Alhazen. Mais les musulmans ont raté la marche de la Renaissance.

      [Ce qui m’amène à me demander si l’Eglise catholique, en dépit de ses crimes et de son intolérance, n’a pas malgré tout un autre rapport au savoir que les autorités religieuses musulmanes ou bouddhistes.]

      Je ne le crois pas. Mais elle a un rapport au monde grec et latin qui en fait le véhicule de la transmission de la culture classique.

      [Je pense également que les Lumières doivent beaucoup à l’humanisme qui s’est développé au XVI° siècle en Europe. Or, si l’Eglise assurément a combattu les Lumières, son attitude à l’égard des humanistes ne fut pas systématiquement hostile. D’ailleurs, certains humanistes étaient membres du clergé, et il me semble que l’humanisme était profondément chrétien.]

      Je n’irais pas jusque là. Il y a un humanisme chrétien – mais aussi un humanisme musulman, lisez Ibn Khaldoun. Mais ce n’est certainement pas celui des Lumières ni même celui de la Renaissance. L’Eglise a combattu l’une et l’autre, pour des raisons doctrinales qui en fait occultent des questions de pouvoir. Et si beaucoup d’humanistes ont été membres du clergé, c’est surtout parce que dans le monde de l’époque c’était une condition pour pouvoir enseigner dans les universités ou se consacrer à l’étude. Mais l’église a essayé – avec plus ou moins de succès – de contrôler les idées de la Renaissance d’abord, des Lumières ensuite. Galilée a été obligé de se rétracter, et ceux qui n’ont pas accepté de le faire ont en général mal fini.

      [C’est dans le sillage de l’humanisme que quelques états européens ont tenté cette chose impensable jusqu’alors: la tolérance religieuse avec égalité des droits pour les membres des différentes confessions aux Provinces-Unies, en Pologne un temps (oui, il y a eu des protestants en Pologne), en Transylvanie hongroise, et même partiellement en France après l’Edit de Nantes de 1598.]

      Faudrait pas pousser. Aucun état européen ne donna « l’égalité des droits pour les membres des différentes confessions » avant le XVIIIème siècle. Je vous rappelle que les juifs n’ont reçu la citoyenneté en France qu’après la Révolution, et que leur situation juridique n’était pas meilleure ailleurs. Avant le XVIIIème siècle, la « tolérance religieuse » ne couvrait que les différentes églises chrétiennes. J’ajoute que les différents « édits de tolerance » doivent moins à « l’humanisme chrétien » qu’a la problématique de la paix civile, indispensable pour le développement des affaires…

      [Même s’ils se sont entre-tués avec une rare férocité, le fait est que catholiques et protestants ont cherché assez rapidement à établir un modus vivendi en certaines contrées. Les musulmans connaissent la tolérance, mais l’égalité de droit avec le mécréant est très compliquée.]

      Je constate que lorsque vous parlez de la « tolérance » chrétienne vous faites référence aux rapports entre les divers groupes chrétiens, alors que lorsque vous parlez des musulmans vous parlez de leurs rapports avec les non-musulmans. Ce n’est pas très honnête. Les rapports des chrétiens avec les « mécréants » ne sont pas très différents de ceux des musulmans. Pensez aux rapports avec les juifs, par exemple : les juifs étaient beaucoup mieux traités en pays musulman qu’en pays chrétien au moins jusqu’au XIXème siècle… et encore, je vous fais grâce du nazisme.

      [Sur la violence comparée des chrétiens et des musulmans, je suis en total désaccord avec vous. D’abord, le concept de "guerre sainte" est inconnu du christianisme des débuts.]

      Normal. L’église chrétienne naît comme culte minoritaire dans un grand empire ou la tolérance religieuse est la règle. Appeler à la guerre sainte dans ce contexte n’a pas de sens. L’Islam apparaît comme la religion d’un peuple en guerre permanente avec ses voisins. Dans ces condition, la tentation d’en faire un instrument politique de conquête est irrésistible. D’ailleurs, les chrétiens n’y résisteront pas lorsqu’ils se trouveront dans la même situation, après la chute de l’empire romain… pensez à Clovis. Je pense que vous ne faites pas la différence entre ce qui relève de la contingence historique et ce qui dépend de la structure même du christianisme ou de l’Islam. Moi je ne peux que constater que placés devant les mêmes impératifs politiques, les deux religions ont réagi de manière très similaire. Lorsque les rois très-chrétiens ont eu besoin de justifier leurs campagnes militaires contre les « infidèles », la doctrine chrétienne leur a prêté main forte sans scrupules.

      ["Ah bon? Jésus n’est qu’un prédicateur?" Dans une perspective historique qui ne se prononce pas sur la foi, oui. Je pensais que vous étiez athée, je vous prie de m’excuser. Lorsqu’on lit les Evangiles, on a en effet l’impression d’avoir affaire à un prédicateur plutôt qu’à un guerrier ou un homme d’Etat. Vous n’êtes pas de cet avis?]

      Tout à fait. Mais il m’a semblé que vous ne vous placiez pas dans une « perspective historique » réduite au rôle respectif de Jésus et Mahomet pendant leur vie, mais que vous faisiez aussi référence à leur image et l’influence de celle-ci dans la doctrine. De ce dernier point de vue, le fait que Jesus soit annoncé comme dieu incarné et messie n’est pas indifférent. D’ailleurs, le dieu chrétien devient assez rapidement un dieu guerrier : selon la légende, Constantin se convertit après avoir perçu un signe lors de la bataille du pont Milvius.

      [Sur les juifs: (…)]

      Merci de ces références très intéressantes. Mais il s’agit toujours de preuves « par défaut », fondées sur des hypothèses sur la démographie et sur l’absence de preuves contraires. En particulier, rien n’indique qu’à l’époque romaine tous les juifs fussent concentrés en Palestine. Il est parfaitement possible que les tribus juives d’Arabie, dont les descendants accueillirent Mahomet, se soient séparés des juifs de Palestine avant la conquête romaine. Il ne faut pas oublier que les juifs étaient un peuple nomade déjà à l’époque de l’empire égyptien. La question des Khazars, comme des juifs de Perse peut recevoir la même réponse. Lorsque les juifs sont déportés à Babylone, beaucoup restent dans le coin et ne reviendront pas en Palestine.

      [Sur les conversions pacifiques au christianisme, je peux illustrer: (…) Les rois de Pologne, de Scandinavie ou le grand-prince de Kiev n’ont pas été forcés de se convertir suite à une défaite ou à une invasion. Je connais mal l’histoire de l’Irlande mais, à ma connaissance, la conversion ne s’est pas faite violemment.]

      Nous ne le savons pas, en fait. Les seules et uniques sources pour l’évangélisation des « barbares »… sont précisément les moines chrétiens, qui avaient tout intérêt à accréditer l’histoire de l’évangélisateur solitaire qui par le seul pouvoir de la foi convertit rois et seigneurs. Il nous reste tout de même un grand nombre d’exemples d’idoles brisés et de temples païens détruits. L’archéologie semble donc suggérer que la chose ne s’est pas passée aussi pacifiquement qu’on peut le croire.

      [De même, les Goths et les Burgondes se sont convertis sans y être forcés, puisqu’ils ont adopté une hérésie chrétienne, l’arianisme, combattue par les empereurs romains et leur Eglise.]

      Là encore, on n’en sait rien. Les seuls – et rares – témoignages que nous avons viennent de sources chrétiennes, qui avaient un certain intérêt à présenter les conversions comme volontaires.

      [Après, il est vrai que certains de ces rois ont ensuite persécuté leurs compatriotes restés païens, mais la persécution était plus le fait de l’autorité politique que de l’Eglise.]

      Mais voyons… Dans ce cas, il vous faudrait appliquer ce même raisonnement à l’Islam. Dans les pays musulmans, la quasi-totalité des persécutions religieuses ont été le fait de l’autorité politique. Et pour cause, le clergé musulman ne représente pas une force unie… Non, soyons sérieux. L’Eglise catholique s’est, depuis l’antiquité, cachée derrière le « bras séculier » et maintenant l’illusion d’une séparation entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel.

      [J’ai même l’impression que le christianisme est devenu beaucoup plus agressif au contact de l’islam, auquel il a probablement emprunté le concept de guerre sainte: après l’an 1000, on voit effectivement se multiplier les "Croisades", en Espagne, en Orient, contre les Baltes païens…]

      Faut pas pousser. Aussi longtemps que l’empire romain était là, le christianisme était l’une des fort nombreuses religions tolérées. C’était certes la religion de l’empereur, mais personne ne vous empêchait de continuer à rendre culte à Jupiter si cela vous chantait. L’idée de « guerre sainte » n’avait dans ce contexte aucun sens. C’est après la chute de l’empire romain que le christianisme commence a se trouver dans une compétition avec d’autres cultes qui tourne à l’affrontement, et que le conflit commence à se radicaliser.

      [Décidément, à part Charlemagne en Saxe, dont on souligne en effet la politique anti-païenne et les conversions forcées, l’expansion du christianisme, dans un premier temps, est moins guerrière que vous le dites.]

      J’aimerais bien connaître une source non-chrétienne qui soutienne cette vision…

    • @ Descartes,

      "Les grecs, ce peuple antique qui est le seul, dans l’histoire de l’humanité, à avoir inventé la philosophie, c’est-à-dire, à avoir cherché à penser le monde en dehors de la religion, par la seule puissance de la raison humaine."
      Faut pas pousser, comme dirait l’autre. Les Grecs ont posé des prémisses, c’est vrai, mais il ne faut pas exagérer. La philosophie grecque peut prendre une dimension religieuse, voire mystique qui nous paraîtrait aujourd’hui très exotique et presque ridicule. Il faut voir ce que les pythagoriciens et les platoniciens ont produit comme magma philosophico-religieux. Les Grecs, indépendamment du christianisme, n’ont jamais renoncé à penser le divin et son rapport au monde sensible. Aujourd’hui, les athées, par rejet du christianisme, font dire un peu n’importe quoi aux philosophes grecs, mais c’est en partie une reconstruction moderne. Il faut d’ailleurs constater que la philosophie grecque s’est assez rapidement "épuisée", que malgré les efforts de quelques-uns elle a perdu son combat contre le christianisme et que la révolution scientifique, technique et industrielle s’est produite bien plus tard dans un monde dominé par la culture chrétienne et non la philosophie grecque.

      "Aucun état européen ne donna « l’égalité des droits pour les membres des différentes confessions » avant le XVIIIème siècle."
      Faux. Spinoza a vécu dans les Provinces-Unies au XVII° siècle, où les juifs ibériques étaient accueillis et laissés en paix. Certains Marranes en ont même profité pour revenir au judaïsme.

      "Je constate que lorsque vous parlez de la « tolérance » chrétienne vous faites référence aux rapports entre les divers groupes chrétiens, alors que lorsque vous parlez des musulmans vous parlez de leurs rapports avec les non-musulmans. Ce n’est pas très honnête."
      Vous avez raison de souligner cette faille dans mon raisonnement. Je reconnais que ma démonstration est biaisée. Mais je vous prie de ne pas douter de mon honnêteté intellectuelle, ni de ma bonne foi. Je crois avoir montré à de multiples reprises dans nos échanges (si toutefois, comme le souligne un commentateur, Descartes est bien une seule et même personne) que je reconnaissais mes torts lorsqu’ils étaient avérés.

      "Pensez aux rapports avec les juifs, par exemple : les juifs étaient beaucoup mieux traités en pays musulman qu’en pays chrétien"
      C’est exact. Il n’empêche que, paradoxalement, c’est dans les états du pape que les juifs étaient les moins maltraités en Occident au Moyen Âge et à l’époque moderne. Il reste donc à démontrer que les persécutions des juifs étaient commanditées et réclamées par l’Eglise, ou décidées par les rois (ou les populations) au nom de ce qui s’apparenteraient aujourd’hui à une forme de xénophobie. D’ailleurs, il arrive qu’en France les Lombards, chrétiens eux, subissent le même sort.

      "L’Islam apparaît comme la religion d’un peuple en guerre permanente avec ses voisins."
      Hein? Comment ça "en guerre permanente avec ses voisins"? Guerre déclenchée par qui? Aucune grande puissance ne menace le Hedjaz au VII° siècle… Les tribus locales se disputent de temps en temps, c’est tout.

      "Dans ces condition, la tentation d’en faire un instrument politique de conquête est irrésistible."
      Ah bon? On se demande bien pourquoi Alexandre le Grand, Attila ou Gengis Khan ne se sont pas sentis obligés de créer une nouvelle religion pour partir à la conquête du monde… Votre argument ne tient pas.

      "pensez à Clovis."
      J’y pense, justement. Et je me dis que Clovis s’est converti pour être mieux accepté des Gallo-romains chrétiens qu’ils voulaient dominer, pas pour lutter contre les païens. D’ailleurs, Clovis n’a quasiment conquis que des régions déjà christianisées, vous pouvez vérifier.

      "D’ailleurs, le dieu chrétien devient assez rapidement un dieu guerrier : selon la légende, Constantin se convertit après avoir perçu un signe lors de la bataille du pont Milvius."
      Vous avez raison… sauf sur le "assez rapidement": la bataille du pont Milvius date de 312 si je ne m’abuse. Il a fallu plus de 250 ans pour que le dieu chrétien devienne guerrier… contre quelques mois pour le dieu musulman. Vous avez le droit de considérer que ça ne fait aucune différence, mais ce n’est pas mon avis.

      "En particulier, rien n’indique qu’à l’époque romaine tous les juifs fussent concentrés en Palestine."
      Il est clair qu’il y avait des juifs en Egypte depuis l’époque hellénistique.

      "Il ne faut pas oublier que les juifs étaient un peuple nomade déjà à l’époque de l’empire égyptien."
      C’est très discutable. J’ajoute que vous confondez un peu hâtivement "juifs" et "hébreux". Les Hébreux ne sont véritablement attestés archéologiquement que tardivement (début du 1er millénaire av. J.-C.). Et l’on est presque sûr aujourd’hui qu’ils n’ont pas été "juifs" tout de suite puisque des traces archéologiques de polythéisme ont été trouvés dans des établissements d’Israël et de Juda, où Yahvé est adoré parmi d’autres divinités.

      "Nous ne le savons pas, en fait"
      C’est vous qui décidez que "nous ne le savons pas". Mais nous avons des chroniques qui, bien que chrétiennes, peuvent difficilement raconter n’importe quoi. Et pourquoi donc se priver, soit dit en passant, de célébrer la victoire d’un souverain chrétien sur les païens? Les chroniques signalent les victoire d’Otton 1er sur les Magyars païens, pourquoi auraient-elles tu des victoires sur les Polonais, les Scandinaves ou les Croates?

      "Là encore, on n’en sait rien. Les seuls – et rares – témoignages que nous avons viennent de sources chrétiennes, qui avaient un certain intérêt à présenter les conversions comme volontaires"
      Eh bien c’est faux, et je peux vous le dire pour avoir travaillé sur cette période. Deux historiens très importants de l’Antiquité tardive, Ammien Marcellin (fin du IV° siècle) et Zosime (fin du V° siècle) sont tous deux païens et comptent parmi les principales sources pour cette période. Chez les Goths, des persécutions contre les chrétiens (accusés d’être favorables aux Romains) sont attestées au IV° siècle, avant les "Grandes Invasions". S’ils sont persécutés par leur roi et son aristocratie, on peut supposer qu’à ce moment les Goths chrétiens n’ont pas été convertis de force… La diffusion du christianisme chez ces barbares est liée à la capture d’esclaves chrétiens en terre d’Empire.

      "Dans les pays musulmans, la quasi-totalité des persécutions religieuses ont été le fait de l’autorité politique."
      Bien sûr. Mais en islam, la distinction entre autorité politique et religieuse est moins nette.

      "L’Eglise catholique s’est, depuis l’antiquité, cachée derrière le « bras séculier » et maintenant l’illusion d’une séparation entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel"
      La séparation est réelle, puisque de la querelle des Investitures à l’attentat d’Anagni, des guerres contre les Hohenstaufen au gallicanisme, l’Eglise n’a jamais cessé d’avoir maille à partir avec les princes chrétiens, lesquels ont toujours voulu avoir une Eglise dévouée à leurs intérêts.

      "C’était certes la religion de l’empereur, mais personne ne vous empêchait de continuer à rendre culte à Jupiter si cela vous chantait."
      Certainement pas. Les lois de Théodose de 392-394, réitérées sous ses successeurs Honorius, Théodose II et Valentinien III proscrivent le paganisme en tant que tel. Les temples sont fermés. Le temps des persécutions (et des luttes contre les hérésies) commence.

      "C’est après la chute de l’empire romain que le christianisme commence a se trouver dans une compétition avec d’autres cultes qui tourne à l’affrontement,"
      Sans doute. Et ce culte s’appelle l’islam, qui en moins d’un siècle conquiert de nombreux territoires chrétiens (Egypte, Syrie, Afrique du Nord, Espagne). Et on en revient toujours à cette idée que je continue à défendre: le christianisme, qui jusqu’alors se cantonnait à une répression "interne" (lutte contre les hérésies et les vestiges du paganisme), parfois très violente, je ne dis pas le contraire, commence à développer une agressivité externe, au contact de l’islam et de son concept de "djihad".

      "J’aimerais bien connaître une source non-chrétienne qui soutienne cette vision…"
      Il y en a peu, c’est vrai. Mais vous êtes très injuste: les sources chrétiennes ne sont pas systématiquement malhonnêtes. Certaines signalent les violences, ce que l’on peut comprendre d’ailleurs, puisque ces violences contre des impies ne sont nullement condamnables aux yeux des chrétiens de l’époque. Pourquoi dans ce cas raconter des sornettes?

    • Descartes dit :

      @nationalistejacobin

      [Faut pas pousser, comme dirait l’autre. Les Grecs ont posé des prémisses, c’est vrai, mais il ne faut pas exagérer. La philosophie grecque peut prendre une dimension religieuse, voire mystique qui nous paraîtrait aujourd’hui très exotique et presque ridicule. Il faut voir ce que les pythagoriciens et les platoniciens ont produit comme magma philosophico-religieux.]

      C’est vrai pour la philosophie archaïque, celle de Pythagore et de ses élèves. Mais du temps de Socrate et Platon, la pensée s’était très largement affranchi des dieux. Et je ne parle même pas d’Aristote… Il faut dire que, contrairement aux autres peuples de la région, les dieux grecs et romains ne sont pas des dieux législateurs. Le droit grec et romain est essentiellement laïque.

      [Les Grecs, indépendamment du christianisme, n’ont jamais renoncé à penser le divin et son rapport au monde sensible. Aujourd’hui, les athées, par rejet du christianisme, font dire un peu n’importe quoi aux philosophes grecs, mais c’est en partie une reconstruction moderne.]

      Une pensée peut s’affranchir du religieux sans nécessairement cesser de « penser le divin ». Je n’ai jamais dit que les philosophes grecs aient ignoré le divin, j’ai dit qu’ils avaient pensé le monde en dehors de la religion, en cherchant à expliquer les choses par leur raison, et non par une référence aux dieux. Descartes n’a pas fait autre chose.

      [Il faut d’ailleurs constater que la philosophie grecque s’est assez rapidement "épuisée", que malgré les efforts de quelques-uns elle a perdu son combat contre le christianisme et que la révolution scientifique, technique et industrielle s’est produite bien plus tard dans un monde dominé par la culture chrétienne et non la philosophie grecque.]

      L’idée d’un « combat perdu » de la philosophie grecque contre le christianisme est assez discutable. Loin de combattre la philosophie grecque, les penseurs chrétiens se sont au contraire efforcés de l’intégrer dans la pensée chrétienne. Plotin ou Saint Augustin sont fils de Platon. Mais c’est surtout la deuxième partie de votre affirmation qui me paraît la plus contestable. La « révolution scientifique, technique et industrielle » s’est produite dans un monde qui redécouvrait la philosophie grecque et s’éloignait au contraire de la scolastique chrétienne.

      ["Aucun état européen ne donna « l’égalité des droits pour les membres des différentes confessions » avant le XVIIIème siècle." Faux. Spinoza a vécu dans les Provinces-Unies au XVII° siècle, où les juifs ibériques étaient accueillis et laissés en paix. Certains Marranes en ont même profité pour revenir au judaïsme.]

      J’attire votre attention sur la différence qui existe entre « être laissé en paix » et « avoir l’égalité de droits ». Avant de crier « faux », lisez avec attention… Spinoza a certainement vécu en paix dans les Provinces Unies, ou les juifs ibériques étaient accueillis et laissés en paix. Mais les magistratures civiques restaient fermées aux juifs, tout comme certaines corporations qui n’admettaient que des chrétiens. L’égalité des droits – et c’était là votre affirmation originale – n’a été accordée que bien plus récemment.

      ["Je constate que lorsque vous parlez de la « tolérance » chrétienne vous faites référence aux rapports entre les divers groupes chrétiens, alors que lorsque vous parlez des musulmans vous parlez de leurs rapports avec les non-musulmans. Ce n’est pas très honnête." Vous avez raison de souligner cette faille dans mon raisonnement. Je reconnais que ma démonstration est biaisée. Mais je vous prie de ne pas douter de mon honnêteté intellectuelle, ni de ma bonne foi. Je crois avoir montré à de multiples reprises dans nos échanges (si toutefois, comme le souligne un commentateur, Descartes est bien une seule et même personne) que je reconnaissais mes torts lorsqu’ils étaient avérés.]

      Je n’en ai jamais douté. Si j’ai donné l’impression de vous accuser de malhonnêteté, je m’en excuse. Ce n’était certainement pas mon intention. Je retire le mot, puisqu’il a dépassé ma pensée.

      ["Pensez aux rapports avec les juifs, par exemple : les juifs étaient beaucoup mieux traités en pays musulman qu’en pays chrétien" C’est exact. Il n’empêche que, paradoxalement, c’est dans les états du pape que les juifs étaient les moins maltraités en Occident au Moyen Âge et à l’époque moderne. Il reste donc à démontrer que les persécutions des juifs étaient commanditées et réclamées par l’Eglise, ou décidées par les rois (ou les populations) au nom de ce qui s’apparenteraient aujourd’hui à une forme de xénophobie. D’ailleurs, il arrive qu’en France les Lombards, chrétiens eux, subissent le même sort.]

      Sur cette question comme sur beaucoup d’autres, je reste marxiste. Un phénomène aussi étendu que la persécution des juifs doit avoir un fondement économique. Les juifs, du fait de leur implantation dans l’ensemble de l’Europe et du pourtour méditerranéen, de leur forte identité communautaire, de l’interdiction aussi qui leur était faite de posséder de la terre dans les états chrétiens, étaient mis dans une situation qui les poussait vers le commerce et les activités financières. C’est pourquoi les princes mais aussi les populations avaient tendance cycliquement à les attirer – pour se faire prêter de l’argent – puis à les rejeter pour ne pas avoir à payer leurs dettes. Le discours « altermondialiste » de la « dette illégitime » plonge ses racines dans cette dualité : on adore les banquiers quand ils vous prêtent, on les chasse quand il faut rembourser. La persécution des lombards, qui eux aussi s’étaient lancé dans le commerce et la banque, montre combien la question religieuse n’était au fond qu’un prétexte.

      ["L’Islam apparaît comme la religion d’un peuple en guerre permanente avec ses voisins."
      Hein? Comment ça "en guerre permanente avec ses voisins"? Guerre déclenchée par qui? Aucune grande puissance ne menace le Hedjaz au VII° siècle… Les tribus locales se disputent de temps en temps, c’est tout.]

      Oui, mais justement, l’Islam apparaît comme la religion d’une tribu, en guerre avec toutes les autres. Si Mahomet avait été le prêcheur d’une secte vivant sous la « pax romana » l’Islam serait probablement bien moins guerrier. Mais il est apparu dans un contexte où chaque secte et tribu arabe ne songeait qu’à massacrer ses voisins. Ca change beaucoup de choses…

      ["Dans ces condition, la tentation d’en faire un instrument politique de conquête est irrésistible."
      Ah bon? On se demande bien pourquoi Alexandre le Grand, Attila ou Gengis Khan ne se sont pas sentis obligés de créer une nouvelle religion pour partir à la conquête du monde… Votre argument ne tient pas.]

      Je crains que vous ne m’ayez pas compris. Les conquérants arabes n’ont pas « créé » l’Islam pour en faire un instrument de conquête. Ils s’en sont saisis. Alexandre et Attila n’avaient pas un tel instrument à leur portée, et c’est peut-être à cause de cela que leurs empires n’ont pas duré… Je ne connais pas le cas de Gengis Khan assez pour répondre à votre question, mais si je me souviens bien il avait créé une forme de « nouvelle religion », le culte de lui-même.

      ["D’ailleurs, le dieu chrétien devient assez rapidement un dieu guerrier : selon la légende, Constantin se convertit après avoir perçu un signe lors de la bataille du pont Milvius."
      Vous avez raison… sauf sur le "assez rapidement": la bataille du pont Milvius date de 312 si je ne m’abuse. Il a fallu plus de 250 ans pour que le dieu chrétien devienne guerrier… contre quelques mois pour le dieu musulman. Vous avez le droit de considérer que ça ne fait aucune différence, mais ce n’est pas mon avis.]

      Je vous ai déjà expliqué pourquoi. Les religions sont avant tout des instruments politiques, et ils s’adaptent donc à la politique des sociétés où elles se développent. La secte chrétienne n’a aucune raison d’avoir un « dieu guerrier » avant le IIIème siècle, parce qu’il n’y a pour elle aucune « guerre » à l’horizon. Elle vit dans un empire pacifié, et l’appel à la violence ne peut qu’attirer sur elle le pouvoir répressif de l’Etat. Elle a au contraire intérêt à se faire toute petite et noyauter le pouvoir romain pour essayer de conquérir le pouvoir. Ce n’est qu’une fois le pouvoir conquis avec Constantin qu’il faut aux chrétiens un dieu guerrier qui justifie les campagnes militaires de l’empire. Le cas des musulmans est différent, puisque dès le départ c’est la religion d’une secte en guerre avec les autres, et qui ne peut s’imposer que par la force. Le fait que dieu soit « guerrier » ou pas est une question d’opportunité politique, et non de doctrine.

      ["Nous ne le savons pas, en fait" C’est vous qui décidez que "nous ne le savons pas". Mais nous avons des chroniques qui, bien que chrétiennes, peuvent difficilement raconter n’importe quoi.]

      Ah bon ? Et pourquoi ça ? L’expérience montre au contraire que l’on peut raconter à peu près n’importe quoi lorsqu’on est le seul à pouvoir écrire et que l’intérêt politique le commande…

      [Et pourquoi donc se priver, soit dit en passant, de célébrer la victoire d’un souverain chrétien sur les païens? Les chroniques signalent les victoire d’Otton 1er sur les Magyars païens, pourquoi auraient-elles tu des victoires sur les Polonais, les Scandinaves ou les Croates?]

      Parce que attribuer la conversion des païens aux victoires des rois donne le beau rôle au pouvoir politique, alors que l’attribuer aux évangélisateurs pacifiques et à la prédication des prêtres donne le beau rôle à l’Eglise. D’où la généralisation du modèle de l’évangélisation « pacifique » dans les récits qui, quelle coïncidence, sont généralement écrits par de religieux. Certains rois, parfaitement conscients de l’importance de ce combat idéologique, ont fait écrire eux-mêmes des chroniques par des lettrés de leur confiance. Otton ou Charlemagne sont des bons exemples. Mais c’est un processus relativement tardif : pour l’évangélisation de l’Irlande, par exemple, nous n’avons que la parole des moines.

      ["Là encore, on n’en sait rien. Les seuls – et rares – témoignages que nous avons viennent de sources chrétiennes, qui avaient un certain intérêt à présenter les conversions comme volontaires" Eh bien c’est faux, et je peux vous le dire pour avoir travaillé sur cette période. Deux historiens très importants de l’Antiquité tardive, Ammien Marcellin (fin du IV° siècle) et Zosime (fin du V° siècle) sont tous deux païens et comptent parmi les principales sources pour cette période.]

      Le problème, c’est que ces deux auteurs, qui n’ont pas été personnellement en contact avec les Goths et les Burgondes, semblent avoir utilisé pour écrire leur récit des sources… ecclésiastiques.

      ["C’est après la chute de l’empire romain que le christianisme commence a se trouver dans une compétition avec d’autres cultes qui tourne à l’affrontement," Sans doute. Et ce culte s’appelle l’islam,]

      Pas forcément. Vous-même donniez l’exemple des lois de Théodose contre les païens, confirmées par ses successeurs. Ces lois faisaient du culte païen une offense capitale. Difficile dans ces conditions de maintenir l’idée que le christianisme se serait « radicalisé » au contacte de l’Islam. Le christianisme se « radicalise » – comme n’importe quelle idéologie – chaque fois qu’il perçoit une menace pour son pouvoir. Il est toujours beaucoup plus facile d’être tolérant lorsqu’on est loin du pouvoir…

      ["J’aimerais bien connaître une source non-chrétienne qui soutienne cette vision…" Il y en a peu, c’est vrai. Mais vous êtes très injuste: les sources chrétiennes ne sont pas systématiquement malhonnêtes. Certaines signalent les violences, ce que l’on peut comprendre d’ailleurs, puisque ces violences contre des impies ne sont nullement condamnables aux yeux des chrétiens de l’époque. Pourquoi dans ce cas raconter des sornettes?]

      Parce que l’Eglise faisait sa propagande. Elle avait donc intérêt à faire écrire ce qui l’arrangeait, et à faire taire ce qui l’arrangeait pas.

    • @ Descartes,

      Permettez-moi d’abord de saluer votre grande culture, et de vous dire que j’ai grand plaisir à débattre avec un contradicteur de votre qualité. Il m’arrive même d’enrager de n’avoir point la possibilité de converser avec vous de vive voix.

      "un monde qui redécouvrait la philosophie grecque"
      Je dirais plutôt qui était en train de dépasser cette philosophie grecque… Vous avez tout à fait raison sur l’héritage de Platon que se partagent, si l’on peut dire, Augustin et Plotin. Mais reconnaissez malgré tout que le triomphe du christianisme est d’une certaine façon une victoire de la foi sur la raison, même si les penseurs chrétiens ont cherché avec une rare persévérance à mettre la raison au service de la foi. Un pari pour le moins audacieux.

      "Spinoza a certainement vécu en paix dans les Provinces Unies, ou les juifs ibériques étaient accueillis et laissés en paix. Mais les magistratures civiques restaient fermées aux juifs, tout comme certaines corporations qui n’admettaient que des chrétiens."
      Vous avez raison. Je m’étais focalisé sur l’idée de liberté religieuse. Mais au sens strict, il n’y a pas en effet d’égalité des droits.

      "Les juifs, du fait de leur implantation dans l’ensemble de l’Europe et du pourtour méditerranéen, de leur forte identité communautaire, de l’interdiction aussi qui leur était faite de posséder de la terre dans les états chrétiens, étaient mis dans une situation qui les poussait vers le commerce et les activités financières. C’est pourquoi les princes mais aussi les populations avaient tendance cycliquement à les attirer – pour se faire prêter de l’argent – puis à les rejeter pour ne pas avoir à payer leurs dettes. Le discours « altermondialiste » de la « dette illégitime » plonge ses racines dans cette dualité : on adore les banquiers quand ils vous prêtent, on les chasse quand il faut rembourser."
      Je souscris tout à fait à ce que vous dites. J’ajoute que le côté "étrangeté" des communautés juives n’a pu qu’attiser l’hostilité. Mais cette intolérance n’est pas le fait de l’Eglise stricto sensu.

      "Parce que attribuer la conversion des païens aux victoires des rois donne le beau rôle au pouvoir politique, alors que l’attribuer aux évangélisateurs pacifiques et à la prédication des prêtres donne le beau rôle à l’Eglise. D’où la généralisation du modèle de l’évangélisation « pacifique » dans les récits qui, quelle coïncidence, sont généralement écrits par de religieux. Certains rois, parfaitement conscients de l’importance de ce combat idéologique, ont fait écrire eux-mêmes des chroniques par des lettrés de leur confiance. Otton ou Charlemagne sont des bons exemples. Mais c’est un processus relativement tardif : pour l’évangélisation de l’Irlande, par exemple, nous n’avons que la parole des moines."
      Ce que vous dites est en partie vrai. Mais je vous ferai remarquer un point important: le fait que l’Eglise ait diffusé pour des raisons de propagande des récits mettant en scène des missionnaires pacifiques armés de leur seul foi n’exclut pas que certains de ces récits reposent sur un fond de vérité, et qu’il est fort possible après tout que ces missionnaires aient existé et qu’ils aient, ici ou là, connu des succès. Vous parliez de temples détruits, mais on peut aussi penser que ces temples sont détruits ou transformés en églises après la conversion de la population locale et avec son accord. Ce que je veux essayer de vous faire comprendre, c’est que le fait que l’Eglise ait intérêt à promouvoir un récit qui lui donne le beau rôle ne disqualifie pas systématiquement ledit récit. Lorsque Thucydide écrit sa "Guerre du Péloponnèse", il a un intérêt à le faire. Faut-il pour autant rejeter la totalité de son récit? N’oubliez pas que celui qui rédige une histoire a toujours des arrière-pensées, mais cela ne fait pas toujours de lui un menteur. Par ailleurs, je ne suis pas d’accord avec votre idée "qu’on peut écrire n’importe quoi": il faut malgré tout que le récit soit un minimum crédible, d’autant qu’il s’adresse à des gens assez cultivés qui, dans un premier temps, peuvent recourir à des témoins. Un récit totalement faux, contrairement à ce que vous pensez, a peu de chance d’être crédible. Longtemps, les historiens ont rejeté les hagiographies, par exemple, en considérant qu’elles n’étaient qu’un tissu d’affabulations. Aujourd’hui, ce jugement a été révisé: en les soumettant naturellement à une critique éclairée, elles peuvent nous apprendre des choses.

      "Le problème, c’est que ces deux auteurs, qui n’ont pas été personnellement en contact avec les Goths et les Burgondes, semblent avoir utilisé pour écrire leur récit des sources… ecclésiastiques"
      Je pense que vous faites erreur. D’abord, les auteurs proprement chrétiens ne sont venus que tardivement à l’histoire. L’essentiel de la littérature chrétienne jusqu’au V° siècle concerne la théologie, la controverse religieuse ou l’histoire de l’Eglise uniquement (Eusèbe). Il faut attendre le V° siècle avec Orose et le VI° siècle avec Grégoire de Tours et Procope pour que les chrétiens commencent à rédiger de véritables histoires. Ensuite, concernant Ammien Marcellin, c’est un militaire, un officier d’état-major vraisemblablement, qui a très certainement côtoyé des Goths. Il n’a rien pris chez les historiens chrétiens puisqu’il n’y avait pas d’historiens chrétiens reconnus à son époque. De même, on ne voit pas bien chez quel auteur chrétien Zosime, sans doute un haut fonctionnaire ayant eu accès à des archives, serait allé chercher ses informations. En revanche, il semble que de nombreux auteurs chrétiens, eux, aient pioché chez les païens, et non l’inverse…

      "Pas forcément. Vous-même donniez l’exemple des lois de Théodose contre les païens, confirmées par ses successeurs. Ces lois faisaient du culte païen une offense capitale."
      Oui. Cela étant, la réitération des édits prouvent que leur application était problématique. En fait, après certaines violences qui sont relevés d’ailleurs au début du V° siècle, une tolérance officieuse se met en place quand il devient clair que le paganisme a perdu. Ainsi, de rares officiers et hauts fonctionnaires païens sont encore signalés à la fin du V° siècle. Et l’école philosophique d’Athènes reste ouverte.

      "Le christianisme se « radicalise » – comme n’importe quelle idéologie – chaque fois qu’il perçoit une menace pour son pouvoir"
      Cet argument me laisse dubitatif. Ce qui est très surprenant, c’est que l’intolérance et les persécutions religieuses atteignent un niveau de violence très important sous Justinien au VI° siècle: or, à ce moment, l’Empire d’Orient a retrouvé la plénitude de sa puissance, le christianisme est devenu largement majoritaire dans l’empire, au sein des élites comme du peuple, il n’y a pas véritablement de culte concurrent, les royaumes barbares sont devenus chrétiens et le plus puissant, celui des Francs, est catholique-orthodoxe. Pourtant, le pouvoir impérial va se déchaîner contre les païens, sans qu’apparemment l’Eglise, davantage préoccupée par les hérésies, n’ait réclamé quoi que ce soit. Il est pourtant excessif d’affirmer que les païens représentaient à ce moment un danger pour l’empereur (alors qu’à l’époque de Théodose le danger est réel). Pourquoi cette flambée d’intolérance alors que le christianisme est solidement installé, sans véritable concurrent?

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Permettez-moi d’abord de saluer votre grande culture, et de vous dire que j’ai grand plaisir à débattre avec un contradicteur de votre qualité. Il m’arrive même d’enrager de n’avoir point la possibilité de converser avec vous de vive voix.]

      Vous me flattez, et j’en ai bien besoin. En discutant avec vous, je me rends compte de tout ce qui me reste à lire et surtout tout ce que j’ai lu et oublié… Sachez donc pardonner certaines de mes approximations ! En tout cas, c’est un grand plaisir d’échanger avec vous, et peut-être un jour de converser directement. Vous êtes à Paris ?

      [Mais reconnaissez malgré tout que le triomphe du christianisme est d’une certaine façon une victoire de la foi sur la raison, même si les penseurs chrétiens ont cherché avec une rare persévérance à mettre la raison au service de la foi. Un pari pour le moins audacieux.]

      Je le reconnais volontiers… mais admettez que ce « triomphe » fut passager. Si la scholastique chrétienne fut un triomphe de la foi sur la Raison, la Raison reprend le poil de la bête à partir avec la renaissance. Justement quand on redécouvre la culture classique… je ne crois pas que ce soit une coïncidence.

      [Mais cette intolérance n’est pas le fait de l’Eglise stricto sensu.]

      Oui et non. L’Eglise a fourni la justification idéologique à l’antisémitisme. Mais en tant qu’institution, elle ne fut pas plus antisémite que les autres institutions de l’époque.

      Ce que vous dites est en partie vrai. Mais je vous ferai remarquer un point important: le fait que l’Eglise ait diffusé pour des raisons de propagande des récits mettant en scène des missionnaires pacifiques armés de leur seul foi n’exclut pas que certains de ces récits reposent sur un fond de vérité, et qu’il est fort possible après tout que ces missionnaires aient existé et qu’ils aient, ici ou là, connu des succès.]

      Bien entendu, je n’ai jamais dit le contraire. Mais vous admettrez alors qu’il est possible de la même manière que tous les récits d’islamisation le cimeterre à la main ne soient pas, eux aussi, exacts, et qu’il y ait eu aussi une islamisation pacifique de certaines populations. Mon point est toujours le même : contrairement à vous je ne crois pas qu’il y ait d’un côté un monothéisme « doux » et de l’autre un monothéisme « dur ». Si l’Islam et le christianisme ont agi différemment, ce n’est pas parce qu’ils sont fondamentalement différents, mais parce que les contextes dans lesquels ils se sont propagés sont différents.

      [Vous parliez de temples détruits, mais on peut aussi penser que ces temples sont détruits ou transformés en églises après la conversion de la population locale et avec son accord.]

      Difficilement. Il y a un thème qui revient d’une manière récurrente dans l’historiographie chrétienne – qui ne fait sur ce point que recopier l’historiographie juive – et c’est la destruction violente des idoles d’une part pour frapper de stupeur des populations hostiles et de démontrer la puissance de la « religion nouvelle » et d’autre part d’empêcher les cultes locaux de se perpétuer. L’Eglise catholique a d’ailleurs renoué avec cette pratique lors de la conquête africaine et américaine.

      Il est rare qu’une conversion volontaire résulte dans la destruction rapide de la religion ancienne. Dans les populations converties pacifiquement – ce fut le cas en Asie, ou les églises chrétiennes n’avaient pas les moyens de coercition dont elles ont disposé dans les Amériques – les cultes anciens coexistent pendant très longtemps avec le culte nouveau. Pourquoi en effet briser les idoles et prendre le risque de se fâcher avec les dieux anciens alors qu’on peut faire plaisir à tout le monde en rendant culte à tous les dieux ? N’oubliez pas que les populations converties n’étaient pas au départ monothéistes, et étaient habituées à l’idée qu’on pouvait rendre culte à plusieurs dieux en même temps…

      [Ce que je veux essayer de vous faire comprendre, c’est que le fait que l’Eglise ait intérêt à promouvoir un récit qui lui donne le beau rôle ne disqualifie pas systématiquement ledit récit.]

      Je l’admets volontiers. Mais l’unanimité même de ce récit le rend, vous me l’accorderez, très suspect.

      [Lorsque Thucydide écrit sa "Guerre du Péloponnèse", il a un intérêt à le faire. Faut-il pour autant rejeter la totalité de son récit?]

      Thucydide est un mauvais exemple, parce qu’il ne s’agit pas d’un politique mais d’un historien, qui revendique d’ailleurs dans son travail une totale rigueur vis-à-vis des faits et un rejet non moins total de l’anecdotique. Il ne prétend nullement écrire un récit édifiant, ce qui n’est pas le cas des religieux qui ont décrit l’évangélisation.

      [N’oubliez pas que celui qui rédige une histoire a toujours des arrière-pensées, mais cela ne fait pas toujours de lui un menteur.]

      C’est un peu plus compliqué que cela. Les propagandistes n’ont pas toujours conscients d’en faire. Tous ne sont pas des cyniques. Je veux bien croire que ceux qui ont décrit l’évangélisation des barbares comme purement volontaire étaient convaincus que c’était le cas, en ne retenant que les sources qui allaient dans ce sens…

      [Par ailleurs, je ne suis pas d’accord avec votre idée "qu’on peut écrire n’importe quoi": il faut malgré tout que le récit soit un minimum crédible, d’autant qu’il s’adresse à des gens assez cultivés qui, dans un premier temps, peuvent recourir à des témoins. Un récit totalement faux, contrairement à ce que vous pensez, a peu de chance d’être crédible.]

      Je pense que vous vous faites beaucoup d’illusions. Oui, les gens cultivés peuvent vérifier les faits et écouter les témoins. Mais ont-ils envie – ou intérêt – à le faire ? Vous négligez la puissance de « l’envie de croire » et des fictions nécessaires. Lorsqu’une croyance est utile, elle s’impose même lorsqu’elle est absurde. Napoléon ne disait pas autre chose lorsqu’il disait « qu’en politique une absurdité n’est pas une impossibilité ». Pensez aux choses que des gens éminemment cultivés ont réussi à croire pendant la guerre froide… de part et d’autre d’ailleurs.

      [Je pense que vous faites erreur. D’abord, les auteurs proprement chrétiens ne sont venus que tardivement à l’histoire.]

      Encore un domaine dans lequel la culture grecque nous montre la voie… 😉

      [Ensuite, concernant Ammien Marcellin, c’est un militaire, un officier d’état-major vraisemblablement, qui a très certainement côtoyé des Goths. Il n’a rien pris chez les historiens chrétiens puisqu’il n’y avait pas d’historiens chrétiens reconnus à son époque. De même, on ne voit pas bien chez quel auteur chrétien Zosime, sans doute un haut fonctionnaire ayant eu accès à des archives, serait allé chercher ses informations.]

      Je ne parlais pas des auteurs, mais des sources. Ammien Marcellin et surtout Zosime ne racontent pas que des faits dont ils ont été personnellement témoins. Ils ont du donc utiliser, pour rédiger leurs ouvrages, des témoignages, des ouvrages littéraires, des documents. Le risque est que ces sources soient chrétiennes, même si Ammien Marcellin et Zosime ne l’étaient pas.

      ["Le christianisme se « radicalise » – comme n’importe quelle idéologie – chaque fois qu’il perçoit une menace pour son pouvoir" Cet argument me laisse dubitatif. Ce qui est très surprenant, c’est que l’intolérance et les persécutions religieuses atteignent un niveau de violence très important sous Justinien au VI° siècle: or, à ce moment, l’Empire d’Orient a retrouvé la plénitude de sa puissance, le christianisme est devenu largement majoritaire dans l’empire, au sein des élites comme du peuple, il n’y a pas véritablement de culte concurrent, les royaumes barbares sont devenus chrétiens et le plus puissant, celui des Francs, est catholique-orthodoxe. Pourtant, le pouvoir impérial va se déchaîner contre les païens, sans qu’apparemment l’Eglise, davantage préoccupée par les hérésies, n’ait réclamé quoi que ce soit.]

      Et vous attribuez ce raidissement à quoi ? Si ce n’est pas parce que le pouvoir se sentait menacé par les païens – attention, il faut analyser la menace telle qu’elle était perçue, et non sa réalité regardée de notre point de vue – il faut trouver une autre explication…

    • @ Descartes,

      "Vous me flattez, et j’en ai bien besoin. […] Vous êtes à Paris ?"
      Je proteste: ce n’était pas flatterie de ma part, car "tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute", et je ne crois pas avoir comme dessein de vivre à vos dépens. Et non, je ne vis pas à Paris et c’est heureux: vues mes opinions sur le multiculturalisme et la diversité, je ne crois pas que je pourrais vivre dans cette Babylone cosmopolite… La "diversité" dans ma petite ville de province me peine suffisamment.

      "Mon point est toujours le même : contrairement à vous je ne crois pas qu’il y ait d’un côté un monothéisme « doux » et de l’autre un monothéisme « dur »."
      Je suis désolé que vous ayez pensé cela, car ce n’est pas là mon idée: je pense que l’islam et le christianisme sont tout autant capables de violence et ils l’ont montré dans l’histoire. Ma thèse est la suivante: le christianisme, dès lors qu’il a pu s’appuyer sur le bras séculier, s’est concentré sur une répression "interne": destruction des hérésies, persécution des "minorités religieuses" (païens, juifs), mais l’usage de la guerre pour étendre le christianisme est plus tardif. L’Eglise, comme les royaumes mérovingiens puis carolingiens, ont finalement toléré à leurs frontières des peuplades païennes, et cela pour une raison: l’Eglise est l’héritière de Rome, donc l’idée au haut Moyen Âge est aussi que le christianisme est bon pour les Romains, pour les gens civilisés. Que les Barbares, même ceux qui servaient l’Empire, comme Childéric, le père de Clovis, demeurassent païens, cela ne dérangeait pas tellement les membres de l’épiscopat gallo-romain par exemple. D’ailleurs, les évêques catholiques préfèrent un païen franc aux hérétiques goths. L’islam a une approche différente: beaucoup plus tolérant à l’intérieur (du moins avec les "peuples du Livre"), il se montre beaucoup plus agressif à l’extérieur, avec les états professant une autre religion. En d’autres termes, le christianisme se préoccupe avant tout de réprimer les dissidences internes et ne s’intéresse que secondairement à son expansion géographique. On peut d’ailleurs noter que les progrès du christianisme vers l’Europe de l’est et du nord sont très lents entre le VI° et le X° siècle. Au contraire, l’islam est tolérant avec ses chrétiens et ses juifs, mais il combat les états chrétiens, tout particulièrement l’Empire byzantin, son proche voisin et rival en Orient. Toutefois, je ne prétends pas que le christianisme est "doux" par rapport à un islam qui serait "dur", mais je soutiens que l’agressivité n’a pas le même objet, le christianisme cherchant à éradiquer toute diversité religieuse à l’intérieur de la société qu’il domine plutôt qu’à s’étendre, tandis que l’islam veut dominer le monde tout en tolérant une relative diversité religieuse au sein de sa société (et encore, il faut voir quelles persécutions subirent les hindouistes). En cela, je dirais que l’islam est plutôt guerrier et conquérant, là où le christianisme serait plutôt "policier" et inquisiteur. Mais la violence est présente dans les deux cas.
      A partir du moment où le christianisme se trouve confronté à l’islam, son agressivité "externe" qui était modérée jusqu’alors (il est tout de même difficile de penser que des croisades aient été organisées entre le VI° et le X° siècle sans avoir fait l’objet d’aucune chronique, d’aucun chant, d’aucune épopée dans une société quand même dominée par des guerriers), s’affirme avec la multiplication des Croisades que j’évoquais, Croisades toutes encouragées et parfois initiées par l’Eglise, ce qui contredit votre idée que l’Eglise valorise principalement les missionnaires solitaires et pacifiques. L’Eglise a soutenu et cherché à diriger des expéditions militaires. Mais le fait est que la plupart de ces Croisades sont lancées dans une logique de reconquête plutôt que de conquête. En 1096, les chrétiens d’Occident, même si leurs motivations sont complexes (et très discutées jusqu’à nos jours) répondent malgré tout à l’appel très officiel lancé par l’empereur byzantin Alexis Comnène, alors que la quasi-totalité de l’Anatolie est tombée aux mains des Seldjoukides.

      "Thucydide est un mauvais exemple, parce qu’il ne s’agit pas d’un politique mais d’un historien, qui revendique d’ailleurs dans son travail une totale rigueur vis-à-vis des faits et un rejet non moins total de l’anecdotique."
      Je m’en veux de vous contredire, mais vous vous trompez. Thucydide, issu d’une riche famille, a été élu stratège et a dû s’exiler vingt années durant parce qu’accusé de n’avoir pas été à la hauteur de son commandement. Pourquoi croyez-vous que Thucydide présente Périclès, eupatride comme lui, comme le chef idéal (malgré sa brutalité avérée contre certains alliés)? Pourquoi pensez-vous que Thucydide dit pis que pendre des successeurs de Périclès, traités de minables démagogues, comme Cléon, alors que ce dernier reprend la politique du "maître"? Et, ô hasard, on s’aperçoit que les chefs du parti démocratique après Périclès sont ceux qui ont accusé Thucydide et l’ont contraint à l’exil. Derrière la rigueur affichée, Thucydide a des comptes à régler, et certains passages ne laissent aucun doute quant au fait que l’historien en avait "gros sur la patate" si vous me passez l’expression. Vous dites que le récit de Thucydide n’est pas édifiant? Eh bien relisez les pages consacrées à Périclès et comparez avec celles qui traitent des chefs du peuple qui lui succèdent, et vous verrez si Thucydide ne trace pas les portraits on ne peut plus édifiants du "bon chef" et du "mauvais chef"…

      "Je ne parlais pas des auteurs, mais des sources. Ammien Marcellin et surtout Zosime ne racontent pas que des faits dont ils ont été personnellement témoins."
      Pour utiliser des sources chrétiennes, il eût fallu en avoir… Or il n’y a guère de littérature chrétienne "historique" avant le V° siècle à ma connaissance. Les historiens des III° et IV° siècles sont quasiment tous païens.

      "Et vous attribuez ce raidissement à quoi ?"
      A la même cause qui conduit Louis XIV à révoquer l’Edit de Nantes en 1685, alors qu’il est en paix (la guerre de la ligue d’Augsbourg n’est pas commencée), que la révolution anglaise anticatholique n’a pas encore eu lieu et que les protestants français ne représentent pas une menace: la logique de l’absolutisme. L’empereur romain jusqu’à Justinien, même chrétien, se considère comme le dirigeant d’une cité, c’est-à-dire d’une communauté politique unie par des lois et une tradition. Avec Justinien, on entre dans une conception plus chrétienne du pouvoir: l’empereur est le berger de son peuple et doit veiller désormais au Salut de ses sujets, et non plus seulement au respect de la loi. C’est un changement majeur. Voilà ce qu’explique en substance Georges Tate dans sa biographie de Justinien (éditions Fayard).

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Je proteste: ce n’était pas flatterie de ma part, car "tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute", et je ne crois pas avoir comme dessein de vivre à vos dépens.]

      Je n’en ai jamais eu le moindre douté. D’ailleurs, vous auriez été déçu, je n’ai pas beaucoup à offrir comme « dépens »… 😉

      [Ma thèse est la suivante: le christianisme, dès lors qu’il a pu s’appuyer sur le bras séculier, s’est concentré sur une répression "interne": destruction des hérésies, persécution des "minorités religieuses" (païens, juifs), mais l’usage de la guerre pour étendre le christianisme est plus tardif. L’Eglise, comme les royaumes mérovingiens puis carolingiens, ont finalement toléré à leurs frontières des peuplades païennes, et cela pour une raison: l’Eglise est l’héritière de Rome, donc l’idée au haut Moyen Âge est aussi que le christianisme est bon pour les Romains, pour les gens civilisés. Que les Barbares, même ceux qui servaient l’Empire, comme Childéric, le père de Clovis, demeurassent païens, cela ne dérangeait pas tellement les membres de l’épiscopat gallo-romain par exemple.]

      C’est un point de vue intéressant. Il est vrai que l’héritage romain fait que le catholicisme a une vision de la question religieuse très segmentée socialement : il y a la religion des classes supérieures, et une religion assez différente pour les classes inférieures, et encore une différente pour les « barbares ». On oublie aujourd’hui qu’au moyen-âge le culte était célébré dans le cœur de l’église, qui n’était accessible qu’aux nobles et au clergé, le reste du peuple étant confiné en dehors de l’enceinte sacrée par le Jubé qui fermait le cœur. L’autel central ne date finalement que d’une période beaucoup plus récente. Et de la même manière, vous avez raison, on s’accommodait chez le bas peuple d’une survivance de certains rites païens, d’autant mieux qu’ils se trouvaient plus loin. Il est vrai que l’alliance du crucifix et de l’épée pour aller évangéliser les contrées lointaines est relativement récente. Même les croisades avaient pour but de « récupérer » des terres anciennement chrétiennes, et non d’évangéliser l’ensemble de l’Arabie.

      [L’islam a une approche différente: beaucoup plus tolérant à l’intérieur (du moins avec les "peuples du Livre"), il se montre beaucoup plus agressif à l’extérieur, avec les états professant une autre religion. En d’autres termes, le christianisme se préoccupe avant tout de réprimer les dissidences internes et ne s’intéresse que secondairement à son expansion géographique.]

      Là, je ne vous suis que partiellement. Les deux religions ne sont pas synchrones. Lorsque le christianisme apparaît, il apparaît dans un empire fort et constitué, qu’il s’agit de conquérir « de l’intérieur » pour en faire son bras séculier, en substituant au syncrétisme religieux romain une religion d’Etat unique. L’Islam, lui, naît dans un contexte complètement différent. Il ne s’agit pas de conquérir de l’intérieur un appareil d’Etat pré-existant, mais d’assurer la conquête des tribus « non-islamisées » par la tribu « islamisée » et de constituer un Etat. Le monde arabe au temps de Mahomet n’est pas au même point que le monde romain au temps de Jesus… sans compter avec le fait qu’en plus le christianisme est pendant six cents ans tout seul sur le marche du prosélytisme monothéiste, alors que l’Islam arrive alors que le christianisme est déjà installé.

      Les premiers chrétiens n’avaient pas à se soucier d’expansion territoriale : l’Empire s’en occupait pour eux. Dans le cas de l’Islam, il fallait que le religieux fasse tout. D’où peut-être une plus grande facilité à concevoir la séparation du civil et du religieux chez les chrétiens que chez les musulmans.

      [Vous dites que le récit de Thucydide n’est pas édifiant? Eh bien relisez les pages consacrées à Périclès et comparez avec celles qui traitent des chefs du peuple qui lui succèdent, et vous verrez si Thucydide ne trace pas les portraits on ne peut plus édifiants du "bon chef" et du "mauvais chef"… ]

      Vous avez tout à fait raison. J’avoue humblement mon erreur.

      ["Je ne parlais pas des auteurs, mais des sources. Ammien Marcellin et surtout Zosime ne racontent pas que des faits dont ils ont été personnellement témoins."
      Pour utiliser des sources chrétiennes, il eût fallu en avoir… Or il n’y a guère de littérature chrétienne "historique" avant le V° siècle à ma connaissance. Les historiens des III° et IV° siècles sont quasiment tous païens.]

      Lorsque je me réfère aux sources, je parle plutôt des documents et des témoins que des travaux d’autres historiens.

      ["Et vous attribuez ce raidissement à quoi ?"][A la même cause qui conduit Louis XIV à révoquer l’Edit de Nantes en 1685, alors qu’il est en paix (la guerre de la ligue d’Augsbourg n’est pas commencée), que la révolution anglaise anticatholique n’a pas encore eu lieu et que les protestants français ne représentent pas une menace: la logique de l’absolutisme.]

      Je ne crois pas qu’on puisse comparer. L’Edit de Nantes, avait permis à Richelieu de jouer à l’intérieur les protestants contre le « parti dévot » et à l’extérieur un système d’alliances dynamique avec des princes protestants. Mais le contexte change après la fin du Protectorat en Angleterre, et surtout lorsque l’expérience de la Fronde pousse Louis XIV à vouloir liquider tout ce qui peut ressembler aux « partis » et aux « fractions » pour imposer l’absolutisme royal. Je ne suis pas persuadé que les motivations de Justinien fussent de cet ordre. Vous non plus d’ailleurs, puisque vous expliquez qu’il s’agit d’une évolution dans la conception du pouvoir de Justinien vers une conception plus « théocratique ». Dans cette vision, le paganisme était en effet une « menace » pour le salut des âmes et donc du peuple.

  5. morel dit :

    Le problème est que sur le sujet on en entend, permettez-moi l’expression, « des vertes et des pas mures » : CPDSI (Centre de Prévention des Dérives Sectaires liées à l’Islam) rattaché à la MILVILUDES, un organisme officiel, nous conte que contrairement à une idée reçue, les recrues de l’islam radical ne se trouvent pas en majorité dans des familles musulmanes très pratiquantes: 80%, des familles ayant affaire au CDPSI se déclarent athées, et seules 10% comportent un grand-parent immigré.
    L’Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat, organisme officiel) ne recense, pour sa part, « que » 23 % de convertis parmi les aspirants au « djihad ».
    Vous vous référez à « la plateforme téléphonique de signalement mise en place par le Ministère de l’Intérieur. » avec un taux différent….
    Par ailleurs, on peut avancer la remarque de M. Guylain Chevrier, membre de la mission laïcité du Haut Conseil à l’Intégration (2010-2013) : « Par ailleurs, on peut se poser aussi la question de savoir, si le fait que ces familles qui l’ont contacté soient très majoritairement athées, tel que cela est rapporté, ne soit pas le reflet d’une certaine réticence des familles musulmanes à se manifester. Ce qui pourrait se comprendre au regard de la façon dont cela peut aussi les exposer autrement, relativement à un attachement à leur religion ainsi mis à l’épreuve. » à propos du rapport CPDSI ne s’applique pas aussi à la plateforme ministérielle.

    Et puis ne pas perdre de vue :
    – Chaque tranche annuelle de la pyramide des âges française des jeunes âgés entre 18 et 25 voire 30 ans comporte en moyenne 770 000 individus des deux sexes, ce qui permet de relativiser, même si ce n’est pas satisfaisant, un phénomène dont la plus haute estimation s’élève à 3000 globalement. Cette précision pour rappeler que notre jeunesse (j’en ai à la maison) est très majoritairement éloignée de tout cela (ZADiste ou Djihadiste).
    – Que l’estimation officielle totale en Europe des « départs » s’élève à 3000, soit autant que la seule Tunisie.
    – Qu’on évalue à 3000 venus de tous les pays du monde servir Tsahal en Israël dont 500 Français sans que cela fasse de « bruit ».

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Le problème est que sur le sujet on en entend, permettez-moi l’expression, « des vertes et des pas mures » :]

      Vous avez raison. C’est un domaine sur lequel la statistique est forcément très fragmentaire, puisqu’on ne peut se fonder que sur deux sources de comptage : soit les « signalements » (aux services de sécurité, à la MIVILUDES, etc.) avec les biais difficiles à estimer du fait que certains groupes sont plus susceptibles d’avoir recours aux services officiels que les autres ; soit la statistique policière et pénale, avec le biais que les méthodes utilisés sont plus efficaces dans certaines communautés que dans d’autres. C’est pourquoi je pense qu’il faut prendre toutes les données avec une certaine prudence, et à chaque fois indiquer les sources pour permettre une confrontation.

      [- Chaque tranche annuelle de la pyramide des âges française des jeunes âgés entre 18 et 25 voire 30 ans comporte en moyenne 770 000 individus des deux sexes, ce qui permet de relativiser, même si ce n’est pas satisfaisant, un phénomène dont la plus haute estimation s’élève à 3000 globalement. Cette précision pour rappeler que notre jeunesse (j’en ai à la maison) est très majoritairement éloignée de tout cela (ZADiste ou Djihadiste).]

      Oui et non. Bien entendu, ces phénomènes restent largement minoritaires dans la jeunesse en son ensemble. Mais il faut tenir compte de ce phénomène comme symptôme. Pour un jeune qui franchit le pas de la violence totale, il y en a dix, cinquante, cent qui restent à une violence « de faible intensité », ou qui en sont tentés sans franchir le pas. Et cela ne peut pas ne pas avoir un effet, difficile à quantifier je vous l’accorde, sur la manière dont ils se construisent. Les jeunes qui franchissent la ligne rouge sont moins un danger qu’un révélateur de ce qui se passe dans la jeunesse, et partant, dans notre société.

      [- Qu’on évalue à 3000 venus de tous les pays du monde servir Tsahal en Israël dont 500 Français sans que cela fasse de « bruit ».]

      La comparaison me paraît aventureuse. Tsahal est une institution nationale. On n’y fait pas n’importe quoi, et certainement pas ce qu’on veut. Ceux qui vont y servir se soumettent à des règles strictes.

    • v2s dit :

      [La comparaison me paraît aventureuse. Tsahal est une institution nationale. On n’y fait pas n’importe quoi, et certainement pas ce qu’on veut. Ceux qui vont y servir se soumettent à des règles strictes.]

      Descartes, si la comparaison est effectivement aventureuse, c’est bien parce que Tsahal est une institution nationale.
      Mais, par contre, s’il est fort probable qu’une joyeuse anarchie règne chez les Zadistes, je douterais fort qu’il en soit de même chez Daesh, et que les nouveaux arrivés fassent [ce qu’ils veulent].
      Il semblerait, au contraire, que, dans le Kalifa des égorgeurs, règne une discipline de fer, une contrainte par la force et la terreur, qui empêche toute tentative de retour en arrière.

    • Descartes dit :

      @v2s

      [Mais, par contre, s’il est fort probable qu’une joyeuse anarchie règne chez les Zadistes, je douterais fort qu’il en soit de même chez Daesh, et que les nouveaux arrivés fassent [ce qu’ils veulent].
      Il semblerait, au contraire, que, dans le Kalifa des égorgeurs, règne une discipline de fer, une contrainte par la force et la terreur, qui empêche toute tentative de retour en arrière.]

      D’après ce que j’ai pu lire des témoignages – mais je vous accorde qu’il faut prendre ces témoignages avec de grandes précautions – la « discipline » chez Daesh est assez relative, et les commandants locaux à tous les niveaux ont une très grande autonomie quant aux actions et aux méthodes utilisées. Un combattant de Daesh peut se trouver assez facilement avec un pouvoir de vie ou de mort sur des centaines de civils. Je doute qu’un combattant de Tsahal puisse choisir de sa propre initiative de tuer quelques centaines de palestiniens sans avoir quelques sérieux ennuis…

    • Bovard dit :

      A propos de Tsahal,je me suis souvent demandé quelles pouvaient être les perceptions qu’en avaient les Arabes israéliens.
      La situation israélienne ne peut pas être projetée telle quelle sur le paysage français actuel.
      En effet chez les Arabes israéliens,la construction des fictions nécessaires actuelles ,doit être plus difficile qu’en France.
      N’oublions pas qu’hormis Tsahal,la police,les gardes frontières,les colons,les employés de sécurité sont armés en Israel et dans les territoires occupés.
      La méfiance armée est avant tout dirigée vers les Arabes israéliens qui sont victimes d’exactions répétées de la part des colons,ce qui entraîne intifada,guerres etc…
      En France,nous ne traitons pas (généralement) les problèmes communautaristes ainsi,heureusement.
      Nous avons ,dans l’idéal une réflexion, fédérative,hors F-haine,avant d’agir (tout au moins dans les principes).
      Après cette disgression hors de France mais hors de noutre problématique,revenons au blog descartes.
      Ma participation dans ce blog m’apporte beaucoup grâce à la très grande qualité de mise en forme,par Descartes et la remarquable pertinence de ses réponses! Chapeau !Cela fait plusieurs années que je ressens ce ‘Nirvana’ interprétatif de Descartes et je serai heureux que nos responsables politiques le lisent.pour moi,ici,Descartes nous offre le meilleur des blogs de réflexions politiques.

      La qualité ,exprimée différemment des autres contributeurs est aussi trés appréciable.
      A cet égard,je suis un peu’ jaloux’ de marcailloux dont les contributions sont ici visibles depuis 2010..J’aimerai bien lire son recueil sur les pensées de Descartes mais je préfère découvrir ces ‘paradigmes’ dans les discussions.
      Quelquefois,je crains d’y lire des phrases insuffisemment anti-Fhaine,mais il est libre de ces propos.
      J’espère que ces digressions subjectives,à colorations sentimentalistes me seront pardonnée car c’est vrai elles n’ont pas de places dans notre débat le plus rationnel possible.cependant,c’est ma façon de remercier et d’encourarger descartes car il fait oeuvre d’utilité publique en ces temps de Zapping déchainés..
      Justement,mettons un peu de couleurs et de chaleur dans le débat:zapettes,zadistes ou jihadistes?
      A propos du traitement de ces problèmes communautaristes ,une information m’a ravi ,en, une bouffée de sympathie pour José Bové et Cohn-Bendit.
      D’abord ,lorsque José Bové a visité les ZADistes de Sivens,
      Cela s’est très mal passé pour lui.
      Il a subi les lazzi,a été conspués,bousculés par les Zadistes lors de sa visite dans les tranchées et fortins zadistes de Sivens.
      Son tort ?
      faire partie de l’établishment alors qu’il était venu soutenir les zadistes,pour quelques supposées retombées (médiatiques favorables dans l’électorat.pan sur le bec!).
      Bové comme le PS,a été mordu par la ‘bête’ qu’il nourrissent eux mêmes….Il faut jamais cracher contre le vent,dirait Descartes.
      Ce n’est pas étonnant car pour ceux qui auraient loupé un épisode,Bové est devenu un des eurolâtres (les plus excessifs) à l’instar du PS.
      Il est loin le temps du Non au TCE qui m’avait rendu les verts sympathiques au point que j’ai voté Mamère en 2002 au lendemain de la ‘Total'(e) catastrophe d’AZF.
      A cette époque Mamère tenait un discours pro-Jacobin,en apparence républicain ,bien éloigné de l’irrationnalisme zadiste.
      Pour en revenir à Bové, je lui reconnais de grandes qualités personnelles, de courage,de persévérance(son combat solitaire et courageux contre l’extension du camp du larzac s’est avéré juste). .
      Il a organisé avec Cohn-bendit,un voyage organisé,à leur demande avec les ‘copains’ de Merah (c’est un faux ‘copinage’bien sûr:Merah devenu ‘fou furieux’ n’avait plus de vrais copains) .
      Ces jeunes viennent de la même cité toulousaine que Merah.D’où,le faux raccourci:’les copains de Merah’qui heureusement n’a pas fait d’émules connus dans cette cité…
      Le couple d’avocats toulousains qui depuis quarante ans défend les jeunes délinquants de toulouse est encarté chez les verts.
      Ils ont sollicité Bové,Cohn-Bendit pour une visite (avec une trentaine de jeunes de la cité de Merah),au sénat,au musée juif d’Anvers,au parlement européen etc…afin de ‘lutter ‘ contre l’islamisme rampant à la Merah.’..Super,enfin Cohn-bendit fait oeuvre utile !
      Ce voyage s’est déroulé sous la houlette du club de foot de la cité,et s’est conclue par un match de foot.En apparence
      Zadistes contre Jihadistes,dans les faits les vieux contre les jeunes.Sympa,non ?
      Bien sûr ,mais Bové et Cohn-Bendit étaient les vieux et ce sont les jeunes de la cité qui ont gagné!C’est la vie,les jeunes de la cité de Merah ont plus d’avenir que Bové et Cohn-Bendit…
      En définitive, construire des souvenirs positifs,est la première étape pour construire du sens ches les jeunes des cités.
      C’est une des solutions,nécessaire à côté du baton,la carotte:la sympathie,le bien être ensemble et aussi la rigueur.
      Or quel est le sens de la république, le drapeau français,chez nos jeunes des cités?ce sont les souvenirs parentaux de la guerre d’Aigérie, leurs propres expériences concernant les contrôles abusifs,au faciès,haineux et piégeux parfois.
      Les images tv des troupes françaises actuelles en guerre contre des ‘islamistes’ (sauf en côte d’ivoire)au Mali,en Irak,en Centrafrique,Syrie ,des alliés de la France,n’aident pas à la construction de fictions nécessaires fédératrices chez les français issus des cultures musulmanes..
      Y a du boulot pour ces fictions nécessaires positives!…
      Bref,dur ,dur de construire du roman national actuellement avec la communauté ‘protéiforme’ des musulmans français.
      En effet il n’y a pas de clergé,pas d’unité ,pas de dogmes communs partagés au sein des différents islam..
      Donc,la meilleure partition en France vis à vis des islamistes en particulier ,les Daeshistes égorgeurs,réside encore dans le rappel de la loi républicaine.
      Mais,il faut le faire avec de l’accompagnement donc de la coercition non-violente.Comme Bové et Cohn-Bendit l’on fait avec les jeunes issus de la cité de Merah,pendant quelques jour.!
      Bové et Cohn-Bendit,ont réinventé,les chantiers de jeunesse !
      Oui recréons un service militaire ou civil(le terme militaire,étymologiquement ‘engagé’ est pour moi le meilleur).
      Ce serait un rite,positif pour la jeunesse.
      Avec des instructeurs militaires,des psychologues,éducateurs spécialisés,enseignants mais aussi moniteurs sportifs qui devront être mobilisé pour encadrer ces jihadistes , les zadistes et pourquoi pas chaque cohorte mixte de notre jeunesse.
      Mais cet ensemble encadrant les jeunes,porterait un nom;’Le service militaire’ ou ‘civil’ ou ‘écologique’ puisque Bové et Cohn-Bendit en ont construit un prémisse..
      Il me semble évident que la mise en place d’un véritable service civique ou militaire,écologique,citoyen, national d’utilité publique,permettrait de socialiser nombre de zadistes,jihadistes et autres asociaux.Cela renforcerait le lien républicain.
      N’est ce pas devenu une nécessité puisque le besoin est manifeste au vu de ces milliers de jihadistes promis au retour et zadistes en dangereuses errances?

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [A propos de Tsahal, je me suis souvent demandé quelles pouvaient être les perceptions qu’en avaient les Arabes israéliens. La situation israélienne ne peut pas être projetée telle quelle sur le paysage français actuel. En effet chez les Arabes israéliens, la construction des fictions nécessaires actuelles, doit être plus difficile qu’en France.]

      Je ne crois pas qu’on puisse comparer. Les « arabes israéliens » sont une communauté qui est « étrangère dans son propre pays ». Citoyens israéliens, ils n’ont pas les mêmes droits et ne sont pas soumis aux mêmes obligations que les autres citoyens. Sur le plan symbolique, les « arabes israéliens » sont citoyens d’un pays qui l’exclut formellement de son « roman national ». La doctrine « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » non seulement exclut les arabes israéliens de la collectivité nationale, mais les frappe d’inexistence.

      Les « arabes français », eux, ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que l’ensemble des citoyens français. Et dans la mesure où le « roman national » français – ou ce qu’il en reste – ne reconnaît guère les « communautés » ethniques ou religieuses, ils n’y sont pas exclus.

      [N’oublions pas qu’hormis Tsahal, la police, les gardes frontières, les colons, les employés de sécurité sont armés en Israel et dans les territoires occupés. La méfiance armée est avant tout dirigée vers les Arabes israéliens qui sont victimes d’exactions répétées de la part des colons, ce qui entraîne intifada, guerres etc…]

      Je pense que vous faites une confusion entre les « arabes israéliens » et les palestiniens vivant dans les territoires occupés par Israël. Les « arabes israéliens » n’ont pas participé à l’intifada, et les exactions des colons à leur encontre sont rares, dans la mesure où ils n’ont guère de contacts avec eux, vivant dans Israël même et non dans les territoires occupés.

      [A propos du traitement de ces problèmes communautaristes ,une information m’a ravi ,en, une bouffée de sympathie pour José Bové et Cohn-Bendit. D’abord ,lorsque José Bové a visité les ZADistes de Sivens, Cela s’est très mal passé pour lui. Il a subi les lazzi, a été conspués, bousculés par les Zadistes lors de sa visite dans les tranchées et fortins zadistes de Sivens.
      Son tort ? faire partie de l’établishment alors qu’il était venu soutenir les zadistes pour quelques supposées retombées (médiatiques favorables dans l’électorat.pan sur le bec!).]

      Bové et Cohn-Bendit peuvent se consoler en imaginant comment ils auraient eux-mêmes accueilli un sexagénaire dans les « tranchées » de Mai 1968… c’est l’anecdote qu’on racontait sur Aragon, venu parler aux étudiants au théâtre de l’Odeon, il avait été conspué aux cris de « casse-toi, vieux con ». Ce qui avait provoqué chez lui cette réponse : « messieurs, c’est avec les jeunes cons qu’on fait les vieux cons, plus tard… ». Et « plus tard », c’est maintenant…

      « Dany le Rouge » et « José du Larzac » sont devenus des notables repus, subventionnés par les indemnités généreuses et les retraites confortables – et défiscalisées – que verse le Parlement européen. Leurs carnets d’adresses leur permettent d’être invités partout et de donner leur avis sur tout. Car on peut imaginer que si Cohn Bendit se voit gratifié d’une émission sur Arte, ce n’est pas à ses éminentes qualités de journaliste qu’il le doit, mais à ses bons copains du marigot « franco-allemand ».

      [Il est loin le temps du Non au TCE qui m’avait rendu les verts sympathiques au point que j’ai voté Mamère en 2002 au lendemain de la ‘Total'(e) catastrophe d’AZF. A cette époque Mamère tenait un discours pro-Jacobin, en apparence républicain, bien éloigné de l’irrationnalisme zadiste.]

      Vous devriez lire ce que les candidats écrivent et écouter ce qu’ils disent avant de voter pour eux. Mamère j’a jamais, je dis bien JAMAIS, tenu un discours qui soit républicain, en apparence ou autrement. Jamais. Ca lui arracherait la gueule. Même lorsqu’on a perfectionné la démagogie au point d’en faire un art, il y a des reniements qu’un être humain – et Mamère est un être humain, même si les apparences sont contre lui – n’arrivera pas à faire. Ce disciple de ce qu’il y a de plus réactionnaire dans la philosophie anti-humaniste, de Heidegger à Ellul, n’est pas plus capable de défendre la République que moi de me faire évêque.

      [Pour en revenir à Bové, je lui reconnais de grandes qualités personnelles, de courage, de persévérance (son combat solitaire et courageux contre l’extension du camp du larzac s’est avéré juste).]

      D’abord, je ne crois pas que la persévérance dans l’erreur soit une « qualité », personnelle ou pas. D’autre part, je ne vois pas très bien en quoi le combat de Bové contre l’extension du camp du Larzac fut « courageux ». Lorsqu’il rejoint le mouvement dans les années 1970, il prend quoi comme risque ? La déportation à Cayenne ? Allons, soyons sérieux : Bové lui-même a qualifié la lutte du Larzac de « woodstock français ». A part les risques d’overdose, je ne vois pas très bien ou était le « courage » du combat en question. Quand à parler de « combat solitaire »… laissez moi rire. Par ailleurs, j’aimerais que vous m’expliquiez en quoi « son combat contre l’extension du camp du Larzac » s’est « avéré juste ». Pourriez-vous être plus précis sur la « justesse » de ce combat et sur les éléments qui ont « avéré » cette justesse ?

      Le « combat » du Larzac fut à l’image de tous les « combats » de cette jeunesse des classes moyennes repues, à qui les efforts de leurs parents pendant la reconstruction du pays garantissaient non seulement un niveau de vie enviable, mais la suprême liberté de ne pas avoir à penser aux moyens de faire bouillir la marmite. Parler de « courage et persévérance » s’agissant d’un homme qui s’est toujours fait plaisir et qui a tourné comme une girouette me paraît pour le moins exagéré.

      [Ils ont sollicité Bové, Cohn-Bendit pour une visite (avec une trentaine de jeunes de la cité de Merah), au sénat, au musée juif d’Anvers, au parlement européen etc…afin de ‘lutter ‘ contre l’islamisme rampant à la Merah.’..Super, enfin Cohn-bendit fait oeuvre utile !]

      Si quelqu’un peut m’expliquer en quoi la visite au parlement européen pourrait « lutter contre l’islamisme rampant à la Merah »… Franchement, ce genre d’opération de communication me laisse de marbre.

      [En définitive, construire des souvenirs positifs, est la première étape pour construire du sens chez les jeunes des cités.]

      Et une visite au Parlement européen est un « souvenir positif » ? Excusez moi, mais tout ça c’est de la bêtise manière bisounours. Arrêtons avec les injonctions du genre « il faut po-si-ti-ver ». Arrêtons de traiter les jeunes comme des imbéciles ou animaux auxquels il faudrait donner un susucre pour qu’ils se sentent encouragés. Les « souvenirs positifs » n’y feront rien, et le « sens » ne se construit pas comme cela. Construire du « sens », c’est donner une perspective. C’est montrer qu’on peut vivre mieux si on fait un effort. C’est montrer que si l’on veut être respecté, il faut respecter les autres. C’est raccrocher le jeune à une histoire. Ce n’est certainement pas visiter le Parlement européen sous la conduite de deux individualistes profiteurs.

      [Or quel est le sens de la république, le drapeau français, chez nos jeunes des cités? ce sont les souvenirs parentaux de la guerre d’Algérie, leurs propres expériences concernant les contrôles abusifs, au faciès, haineux et piégeux parfois.]

      C’est aussi une école gratuite que la République met à leur disposition. Ce sont des routes, des ponts, des bibliothèques, des parcs, des maisons de la culture dont ils peuvent disposer. C’est une police qui essaye – et sans grand soutien de leur part – d’assurer leur sécurité et de limiter les trafics. Faudrait quand même rappeler que ce n’est pas le cas partout dans le monde. Alors moi je veux bien qu’on regarde par le petit bout de la lorgnette les « contrôles abusifs », mais faudrait pas non plus se laisser piéger par le discours « victimiste ». Je me demande par ailleurs ce que vous appelez un « contrôle piegeux »…

      Oui, insister sur le « sens de la République », leur enseigner un « roman national » dans lequel ils peuvent s’identifier et partager une idée de communauté de destin, oui, je suis d’accord. Mais il faut leur parler à leur intelligence, et pas craindre les vérités bien senties.

      [Bref, dur, dur de construire du roman national actuellement avec la communauté ‘protéiforme’ des musulmans français. En effet il n’y a pas de clergé, pas d’unité, pas de dogmes communs partagés au sein des différents islam.]

      Et alors ? Le « roman national » en France ne se fait pas « avec » telle ou telle communauté. La IIIème République n’a pas demandé son avis au « clergé » catholique, protestant ou juif pour rédiger le Lavisse. Pourquoi faudrait-il faire différemment avec l’Islam ? Le « roman national » doit pouvoir être partagé par tous, et précisément pour cela il lui faut être indifférent aux religions comme à tout autre facteur communautaire. Dans notre « roman national », Richelieu est un cardinal fort peu croyant…

      [Donc, la meilleure partition en France vis à vis des islamistes en particulier, les Daeshistes égorgeurs, réside encore dans le rappel de la loi républicaine.]

      Non seulement de la « loi », mais de ce qui fait la République. La « loi républicaine » n’est pas comme la loi de Dieu. Elle est humaine et est compréhensible par la Raison. La loi est l’instrument de la volonté générale, mais c’est cette dernière qu’il faut expliquer. Par exemple, en montrant que lorsque la police contrôle les identités elle ne le fait pas pour s’amuser, ou pour humilier qui que ce soit, mais parce que c’est une nécessité d’ordre public, ordre public qui bénéficie à tout le monde.

      [Mais, il faut le faire avec de l’accompagnement donc de la coercition non-violente. Comme Bové et Cohn-Bendit l’on fait avec les jeunes issus de la cité de Merah, pendant quelques jour.! Bové et Cohn-Bendit,ont réinventé,les chantiers de jeunesse !]

      Ah bon ? Parce que vous croyez qu’en visitant le Parlement européen on « fait de l’accompagnement » ? Tudieu…

      Oui recréons un service militaire ou civil (le terme militaire, étymologiquement ‘engagé’ est pour moi le meilleur). Ce serait un rite, positif pour la jeunesse. Avec des instructeurs militaires, des psychologues, éducateurs spécialisés, enseignants mais aussi moniteurs sportifs qui devront être mobilisé pour encadrer ces jihadistes les zadistes et pourquoi pas chaque cohorte mixte de notre jeunesse.]

      Pardon, pardon. Vous confondez tout. Si vous voulez faire d’un « service militaire » rénové un « rite », quel rôle jouent les « psychologues », les « enseignants » ou les « éducateurs spécialisés » ? Si le service militaire jouant son rôle de rituel de passage, c’est parce qu’il arrachait le jeune à sa famille, et le mettait dans un contexte adulte. Si vous en faites une sorte de collège-bis, avec psychologue, enseignant et tutti quanti, alors ce n’est plus un rituel de passage, mais une continuité.

      Je crains que vous n’ayez rien compris à mon point fondamental. Il ne s’agit certainement pas pour moi « d’encadrer jihadistes et zadistes » ou de leur proposer des activités d’éveil. Pour moi, le jihadisme comme le zadisme traduit un besoin d’affirmation de soi que le jeune éprouve – ce qui est normal – et auquel la société n’offre aucun exutoire institutionnalisé. Il ne s’agit pas de résoudre le problème du désœuvrement des jeunes en leur proposant une visite du Parlement européen en compagnie de Cohn-Bendit ou de José Bové. Il s’agit de proposer un véritable « parcours d’insertion » social, offrant au jeune des défis et des rituels de passage lui permettant de se constituer en citoyen.

      [Il me semble évident que la mise en place d’un véritable service civique ou militaire, écologique, citoyen, national d’utilité publique, permettrait de socialiser nombre de zadistes, jihadistes et autres asociaux.]

      Aaaaargh ! Non, non, non et NON. Vous revenez circulairement à la même idée : les jeunes seraient des imbéciles qu’il faudrait « socialiser », « encadrer » au moyen de visites pédagogiques et de discours bisounours du genre d’un service « écologique ». C’est, à mon avis, exactement LE CONTRAIRE qu’il faut faire. Traiter les jeunes comme les adultes que nous voulons qu’ils deviennent, et non comme les enfants qu’ils voudraient peut-être mais qu’ils ne peuvent demeurer. Le service militaire était un rituel de passage parce qu’il arrachait le jeune à sa famille, à ses amis, à tout cet environnement familial qui faisait sa jeunesse, et le confrontait pour la première fois à ce qui fait le monde adulte : un monde rempli de gens qui n’ont pas de raison de nous aimer à priori, qui ne sont pas là pour nous faire plaisir, et où il faut trouver sa place. Et quand le jeune revenait, un an plus tard au village, il n’était plus le même. Ni pour lui-même, ni pour les autres.

      Les zadistes, les jihadistes NE SONT PAS DES ASSOCIAUX. Souvent d’ailleurs ce sont des gens bien socialisés. Mais ce sont des gens qui cherchent un sens à leur vie dans une société qui ne donne pas les repères nécessaires pour le construire. Et croire qu’une promenade avec Cohn-Bendit ou une visite des caves de Roquefort avec Bové changeront quelque chose est à mon avis une erreur.

    • morel dit :

      @Descartes @ nationalistejacobin

      Passionné par l’histoire sans aucun titre à ce sujet, 2 remarques :

      – L’historien P.Veyne nous pose malignement la « colle » suivante : il est à remarquer que les populations des régions conquises par l’islam se convertissent rapidement alors qu’il s’agit là des régions à la fois d’implantation les plus anciennes dans le christianisme et où ils sont plus nombreux, qui compte les théologiens les plus prestigieux, etc… J’ajoute que le cimeterre sous chaque cou est inenvisageable. et que pour l’Afrique du Nord (où a officié Saint Augustin) les berbères récemment convertis formeront le gros des troupes de conquête de l’Espagne.
      – S.Sand a raison : les chiffres fournis par divers historiens montrent que le judaïsme a connu un période prosélyte sauf à migrer énormément plus que les grecs. Le royaume Khazar en est la meilleure preuve.

    • Descartes dit :

      @morel

      [L’historien P.Veyne nous pose malignement la « colle » suivante : il est à remarquer que les populations des régions conquises par l’islam se convertissent rapidement alors qu’il s’agit là des régions à la fois d’implantation les plus anciennes dans le christianisme et où ils sont plus nombreux, qui compte les théologiens les plus prestigieux, etc… J’ajoute que le cimeterre sous chaque cou est inenvisageable et que pour l’Afrique du Nord (où a officié Saint Augustin) les berbères récemment convertis formeront le gros des troupes de conquête de l’Espagne.]

      Tout à fait. Je pense qu’on gobe un peu trop vite la légende noire qui veut que les infidèles aient converti par la force alors que les bons chrétiens ont converti par la douceur.

      [S.Sand a raison : les chiffres fournis par divers historiens montrent que le judaïsme a connu un période prosélyte sauf à migrer énormément plus que les grecs. Le royaume Khazar en est la meilleure preuve.]

      Je ne suis pas convaincu. Les juifs ont « migré énormément », beaucoup plus que les grecs, pour deux raisons. La première, c’est qu’il s’agit d’un peuple nomade, dont l’urbanisation est relativement tardive. Et la seconde, c’est que le peuple juif a été plusieurs fois expulsé de sa terre et obligé à l’exil. Les témoignages écrits et les preuves archéologiques attestent au moins de trois évènements de ce type : un premier exil en Egypte, un deuxième à Babylone, un troisième dans l’ensemble du monde méditerranéen après l’expulsion par les romains. Il est très probable qu’à chaque opportunité le retour n’ait pas été total, mais que certains groupes soient restés sur leur terre d’exil voir aient émigré vers d’autres terres étrangères. Pas besoin donc d’un quelconque « prosélytisme » pour expliquer le royaume Khazar ou la présence de juifs en Arabie.

      Il faut par ailleurs admettre que si ce prosélytisme a jamais existé, il n’a laissé aucune trace dans les textes des juristes et théologiens juifs, ce qui est pour le moins étrange…

    • @ Descartes;

      "Les témoignages écrits et les preuves archéologiques attestent au moins de trois évènements de ce type : un premier exil en Egypte, un deuxième à Babylone, un troisième dans l’ensemble du monde méditerranéen après l’expulsion par les romains."
      C’est faux.
      1) Rien n’atteste l’exil en Egypte, ni archéologiquement, ni textuellement (voir l’archéologue israélien Finkelstein et son ouvrage sur "la Bible dévoilée"). Les sources égyptiennes mentionnent des envahisseurs hyksos, jamais d’Hébreux.
      2) A Babylone, seules les élites ont été déportées, les autres sont restés et, mêlés aux envahisseurs, ont donné naissance à la population des Samaritains, considérés comme des impurs par les juifs, mais judaïsants malgré tout. Ils étaient encore assez nombreux au VI° siècle.
      3) Les expulsions des Romains sont loin d’avoir été "massives" comme vous dîtes puisque seule la région de Jérusalem est directement concernée par la répression. D’ailleurs, si les juifs se sont répandus d’eux-mêmes dans le Bassin Méditerranéen, comment se fait-il qu’ils sont devenus identiques aux Européens en Europe, aux Berbères en Afrique du Nord, aux Arabes en Arabie, alors qu’ils auraient dû conserver un physique proche-oriental? Les Roms, pourtant arrivés il y a plusieurs siècles, ont eux conservé un type physique particulier…

      Non seulement les juifs se sont sédentarisés au début du 1er millénaire avant Jésus-Christ, mais de plus le triomphe du monothéisme se situerait, d’après les spécialistes, sous le règne des rois de Juda, au VII° ou au VIII° siècle av. J.-C. (puisque les archéologues ont trouvé des traces d’un culte rendu à une déesse qui était la parèdre de Yahvé). C’est à partir de cette époque que l’on peut véritablement parler de judaïsme. Or les Hébreux sont sédentaires depuis quelques temps déjà…

      Ajoutons que toutes les sources qui parlent d’ "expulsion massive" des juifs sont des sources juives, les autres évoquent des déplacements de population sans donner davantage de précision. Les sources chrétiennes ne sont pas fiables, mais les sources juives le seraient… Etonnant.

      Quant au fait que le prosélytisme juif n’ait pas laissé de trace, d’après ce que j’ai lu, cette question a fait débat chez les juifs, et ce sont les opposants au prosélytisme qui l’auraient emporté. Dès lors, les communautés juives se seraient repliées sur elles-mêmes (dans un contexte devenu d’ailleurs plus difficile pour le judaïsme, en butte aux persécutions). Je signale que ce ne serait pas la première fois qu’on perd de vue une partie de la culture juive. Après tout, on sait très peu de choses des Sadducéens et des Pharisiens, en dehors de ce qu’en disent les Evangiles. Il y a tout un pan de l’histoire intellectuelle du judaïsme qui nous échappe. Ce sont les communautés juives qui ont fabriqué le mythe d’une continuité et d’une unité des juifs. La réalité semble un peu différente: le judaïsme a été très divers (et le demeure pour une part). Il faut admettre qu’il y a, non pas une, mais des traditions juives.

    • @ Morel,

      "il est à remarquer que les populations des régions conquises par l’islam se convertissent rapidement"
      Il faudrait savoir ce que vous appelez "rapidement"…
      Quelques éléments de réponse cependant:
      1) En Syrie et en Egypte, les populations sont chrétiennes mais dissidentes, et en conflit avec l’Eglise officielle de l’Empire d’Orient; ce fait a pu faciliter certaines conversions, il a au moins favorisé la conquête arabe.
      2) Toutefois, en Syrie, les chrétiens sont majoritaires jusqu’au XII° siècle (bien que divisés en plusieurs Eglises, comme aujourd’hui); il semble bien que les Croisades aient conduit les musulmans à se montrer moins tolérants, et le christianisme syrien décline ensuite (mais au Liban, les chrétiens restent longtemps majoritaires).
      3) En Afrique du Nord (mais aussi en Orient), il faut tenir compte des effets des pestes du VI° siècle qui semblent avoir considérablement clairsemé une population jusqu’alors très dense et très urbanisée. Dans ce contexte, on a des témoignages de fuite de chrétiens vers la Sicile et l’Italie. Plus tard, l’arrivée des Arabes hilaliens achève d’islamiser le Maghreb. Mais il faut rappeler que les Berbères (chrétiens pour certains) ont opposé une résistance importante à la conquête musulmane.
      4) En Espagne, la majorité de la population ne s’est pas convertie.
      5) La conversion des élites a certainement poussé les masses à se convertir.

      Par conséquent, l’idée d’une conversion "rapide" des populations à l’islam est à relativiser. Les progrès de l’islam sont assez lents en Syrie. Ailleurs, les Arabes musulmans occupent tout simplement le vide. D’importants îlots de christianisme survivent parfois jusqu’à nos jours. J’ajoute que Wikipédia indique que les coptes auraient été majoritaires en Egypte jusque vers le XIV° siècle (ce qui me paraît très tardif, mais bon, c’est Wikipédia).

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [1) Rien n’atteste l’exil en Egypte, ni archéologiquement, ni textuellement (voir l’archéologue israélien Finkelstein et son ouvrage sur "la Bible dévoilée"). Les sources égyptiennes mentionnent des envahisseurs hyksos, jamais d’Hébreux.]

      Qui a parlé « d’invasion » ? J’ai bien écrit « exil », pas « invasion » et encore moins « captivité » ou « esclavage ». Il n’y a en effet aucune preuve archéologique ou textuelle qui authentifie la bible hébraïque sur ce point, comme l’indiquent les auteurs que vous citez. Par contre, des documents attestent de la présence de communautés juives en Egypte avant l’exil a Babylone, notamment le « parchemin de Brooklyn », qui contient des listes de noms dont certains sont de consonance évidement hébraïque.

      [2) A Babylone, seules les élites ont été déportées, les autres sont restés et, mêlés aux envahisseurs, ont donné naissance à la population des Samaritains, considérés comme des impurs par les juifs, mais judaïsants malgré tout. Ils étaient encore assez nombreux au VI° siècle.]

      La question de l’amplitude des déportations reste très discutée. Quoi qu’il en soit, cette déportation explique pourquoi on retrouve des communautés juives jusqu’aux confins de la Perse et du Caucase sans avoir recours à un « prosélytisme » dont, je répète, il ne reste aucune trace textuelle ou archéologique. Je trouve d’ailleurs étrange qu’on puisse nier l’exil en Egypte sur la base de l’absence de traces mais d’admettre en même temps un « prosélytisme » qui n’est nulle part attesté…

      [3) Les expulsions des Romains sont loin d’avoir été "massives" comme vous dîtes puisque seule la région de Jérusalem est directement concernée par la répression. D’ailleurs, si les juifs se sont répandus d’eux-mêmes dans le Bassin Méditerranéen, comment se fait-il qu’ils sont devenus identiques aux Européens en Europe, aux Berbères en Afrique du Nord, aux Arabes en Arabie, alors qu’ils auraient dû conserver un physique proche-oriental?]

      Mais… c’est exactement ce qui est arrivé, comme les nazis ne se sont pas gênés pour le faire remarquer. Encore aujourd’hui, les juifs européens conservent des caractéristiques ethniques (cheveux noirs, yeux obscurs, forme du nez et du visage) qui ne sont pas toujours celles des populations parmi lesquelles ils vivent. Là où le droit et l’histoire ont permis un contact étroit avec la population locale, ces différences se sont estompées… mais les mariages mixtes sont suffisants pour l’expliquer. En effet, la Halakha considère comme juif l’enfant d’une juive, quelque soit la communauté d’origine du père.

      [Les Roms, pourtant arrivés il y a plusieurs siècles, ont eux conservé un type physique particulier…]

      Les juifs bulgares ne sont pas moins différents des bulgares slaves que les roms bulgares…

      [Non seulement les juifs se sont sédentarisés au début du 1er millénaire avant Jésus-Christ, mais de plus le triomphe du monothéisme se situerait, d’après les spécialistes, sous le règne des rois de Juda, au VII° ou au VIII° siècle av. J.-C. (puisque les archéologues ont trouvé des traces d’un culte rendu à une déesse qui était la parèdre de Yahvé). C’est à partir de cette époque que l’on peut véritablement parler de judaïsme. Or les Hébreux sont sédentaires depuis quelques temps déjà…]

      Vous surinterprétez les travaux de Finkelstein. On sait que parmi les hébreux le monothéisme absolu ne s’impose pas avant le VIIème siècle, et que certains groupes parmi les hébreux continuant la tradition syncrétique des religions orientales. Mais de là à « ne pas pouvoir parler de judaisme » avant cette date me paraît un peu exagéré. Qu’on ait trouvé des traces de cultes polythéistes montre que certains hébreux pratiquaient encore ces cultes. Quant à savoir si ces « certains » étaient majoritaires ou minoritaires, nous n’en savons rien.

      [Ajoutons que toutes les sources qui parlent d’ "expulsion massive" des juifs sont des sources juives, les autres évoquent des déplacements de population sans donner davantage de précision. Les sources chrétiennes ne sont pas fiables, mais les sources juives le seraient… Etonnant.]

      Pas particulièrement. Mais les expulsions n’ont pas besoin d’être « massives » pour expliquer l’existence de groupes et tribus juives hors de la Palestine et de ses environs. Quelques centaines d’individus suffisent pour fonder une communauté.

      [Quant au fait que le prosélytisme juif n’ait pas laissé de trace, d’après ce que j’ai lu, cette question a fait débat chez les juifs, et ce sont les opposants au prosélytisme qui l’auraient emporté.]

      A « fait débat » à quelle époque ? Avons-nous des traces écrites de ces « débats » ?

      [Je signale que ce ne serait pas la première fois qu’on perd de vue une partie de la culture juive. Après tout, on sait très peu de choses des Sadducéens et des Pharisiens, en dehors de ce qu’en disent les Evangiles.]

      C’est peut-être pour cela qu’il n’y aurait pas de traces de l’exil en Egypte, par exemple… 😉

    • @ Descartes,

      "Qui a parlé « d’invasion » ? J’ai bien écrit « exil », pas « invasion » et encore moins « captivité » ou « esclavage ». Il n’y a en effet aucune preuve archéologique ou textuelle qui authentifie la bible hébraïque sur ce point, comme l’indiquent les auteurs que vous citez. Par contre, des documents attestent de la présence de communautés juives en Egypte avant l’exil a Babylone, notamment le « parchemin de Brooklyn », qui contient des listes de noms dont certains sont de consonance évidement hébraïque."
      Je voulais dire que les seules populations sémitiques venues massivement en Egypte sont les Hyksos, que ce soit par invasion ou par infiltration pacifique. Votre parchemin ne me convainc guère, car il suppose que les noms hébraïques soient clairement distincts des noms des autres populations sémitiques parlant sans doute des langues très proches de l’hébreu. Il faudrait savoir, par exemple, si la différence entre l’hébreu primitif et l’ancien araméen est si nette que cela… Néanmoins, en admettant que vous disiez vrai, n’est-il pas étonnant qu’aucune source égyptienne ne mentionne les Hébreux (alors mêmes que les archives ne manquent pas)?

      "je répète, il ne reste aucune trace textuelle ou archéologique"
      Le fait de répéter n’implique pas que ce soit vrai, comme le dit quelqu’un que j’apprécie… 🙂 Je me suis replongé dans certains de mes livres, et voici ce que j’y ai trouvé: d’abord, on signale des traces de conversions forcées à l’époque du royaume hasmonéen (II°-Ier siècle av. J.-C.). Ainsi, les Hérode sont des Iduméens, originaires d’une contrée qui n’était pas juive à l’origine, mais convertie après la conquête hasmonéenne. Strabon et Flavius Josèphe (qui est juif) signalent ces conversions.

      Ensuite, concernant le prosélytisme juif dans le monde romain, je me suis renseigné… et l’honnêteté m’oblige à mettre de l’eau dans mon vin (je vois un sourire narquois qui se dessine sur votre visage…). Il n’y a pas eu semble-t-il de prédication juive en direction des païens, donc vous marquez un point. En revanche, il est attesté que des païens, spontanément, ont été attirés par le judaïsme et ont tenté de s’y intégrer. Flavius Josèphe, encore lui, signale qu’au 1er siècle, à Antioche, la communauté juive avait attirée à elle de nombreuses femmes issues du paganisme (or la loi juive que vous citez devrait empêcher cette intégration puisque par définition ces femmes ne sont pas en état de donner naissance à des juifs). Ensuite, des gens d’origine non juive sont signalés dans des listes de donateurs pour la construction d’édifices religieux juifs, à Doura-Europos (Mésopotamie) et Aphrodisias (Asie Mineure). Le judaïsme n’étant pas un culte officiel, on voit mal des personnes qui ne se seraient pas senties proches du judaïsme donner de l’argent pour un lieu de culte juif. D’autant qu’à côté de notables, peut-être tentés de faire plaisir à une communauté importante dans la cité, on trouve des gens d’origine plus modestes. Les historiens appellent "prosélytes" (en grec "théosébeis" dans les documents d’époque) ces païens tentés par le judaïsme. Jusqu’où est allée l’intégration? Je n’ai pas trouvé de réponse, mais il n’est pas du tout impossible que certains de ces païens judaïsants aient fini par intégrer les communautés juives.

      "Mais… c’est exactement ce qui est arrivé, comme les nazis ne se sont pas gênés pour le faire remarquer. Encore aujourd’hui, les juifs européens conservent des caractéristiques ethniques (cheveux noirs, yeux obscurs, forme du nez et du visage) qui ne sont pas toujours celles des populations parmi lesquelles ils vivent."
      Je ne suis pas du tout d’accord. Quelle proportion de juifs les nazis ont-ils réellement arrêtés rien qu’en regardant leurs têtes? Pourquoi avoir imposé le port de l’étoile jaune puisque les juifs étaient si aisément reconnaissables? Pourquoi sur la plupart des photographies et documents des années 30, les juifs que l’on voit sont de type européen? En Pologne et en Russie, où pourtant les mélanges n’ont pas dû être légion vu le statut des juifs, les nazis ont trouvé un nombre non-négligeable de juifs blonds aux yeux bleus… Et il y en avait aussi en Allemagne. A contrario, bien des gens en Europe ont le physique que vous signalez sans être le moins du monde d’origine juive. Quand on regarde la plupart des Ashkénazes, ils sont de type européen. Vous trouvez qu’Anne Sinclair, Kirk Douglas, Dominique Strauss-Kahn, Daniel Cohn-Bendit, Steven Spielberg, Woody Allen, Julien Dray et j’en passe ont des "têtes de juifs"? Après, je ne sais pas à quelle communauté juive précisément vous faites référence.

      "On sait que parmi les hébreux le monothéisme absolu ne s’impose pas avant le VIIème siècle, et que certains groupes parmi les hébreux continuant la tradition syncrétique des religions orientales. Mais de là à « ne pas pouvoir parler de judaisme » avant cette date me paraît un peu exagéré. Qu’on ait trouvé des traces de cultes polythéistes montre que certains hébreux pratiquaient encore ces cultes. Quant à savoir si ces « certains » étaient majoritaires ou minoritaires, nous n’en savons rien."
      J’en reviens à l’origine du mot "juif", dérivé du mot "judéen" et on en déduit logiquement que le judaïsme est né dans le royaume de Juda. Sur le nombre des Hébreux juifs et polythéistes (ou syncrétiques si vous préférez), Finkelstein donne contrairement à ce que vous dites des indications: il ne vous aura pas échappé que l’Ancien Testament peste avec véhémence contre la quasi-totalité des rois d’Israël. Or Finkelstein montre, preuves archéologiques à l’appui, que le royaume des dix tribus est bien plus peuplé, riche et puissant que son voisin du sud. Ce royaume d’Israël accueille de nombreuses influences religieuses, notamment phéniciennes, sous Achab notamment dont la femme Jézabel est originaire de Phénicie. On peut aussi noter que les prophètes monothéistes signalés par la Bible dans le royaume d’Israël ne rencontrent guère de succès. Aucun roi d’Israël à ma connaissance n’est chassé par son peuple pour impiété… On peut en déduire, et la Bible le laisse entendre, que le peuple hébreu d’Israël partageait les "errements" de ses rois. Or cette population représente l’écrasante majorité des Hébreux.

      "C’est peut-être pour cela qu’il n’y aurait pas de traces de l’exil en Egypte, par exemple…"
      Peut-être. Mais qu’il n’y ai aucune trace dans les archives plutôt fournies de l’Egypte pharaonique, voilà qui est plus surprenant.

    • morel dit :

      Effectivement plusieurs facteurs objectifs ont favorisé la conquête musulmane, ce n’est pas tant une question de « force de la foi » que de conditions objectives : l’affaiblissement réciproque entre byzantins et perses (qui ont pris Jérusalem en 614, perdue en 629, fruit mûr car affaibli pour la conquête arabe de 638 ; c’est une illustration). Les dissidences chrétiennes sont une autre cause, d’autant que les conquérants dans un premier temps les laissent libres de confesser ce qu’ils souhaitent sous réserve de payer la jizya, ce qui est un premier désavantage ; viendra un peu plus tard l’imposition de la langue, de l’administration, la multiplication des médersas etc… Et si, comme vous le faites, il faut effectivement nuancer le tableau selon les pays (actuels) il n’en reste pas moins qu’à cette époque, les élites sous peine de disparaître en tant que telles doivent passer par la case « conversion » (idem que le processus inauguré par Constantin).
      Sur la Syrie, avez-vous une estimation ?
      La peste, particulièrement meurtrière en Ifriqya est une troisième cause d’affaiblissement mais ne saurait expliquer le retournement des tribus berbères après avoir fermement combattu l’envahisseur.
      Le cas de l’Hispanie est différent : c’était en quelque sorte la fin du boulevard « offert » aux armées du prophète. La conquête toujours victorieuse et voulant aller toujours plus loin s’est heurtée à l’armée disciplinée du maire du palais. Dès lors, c’est le reflux d’envahisseurs trop pressés loin de leurs bases. On pourrait peut-être parler de début de la Reconquista (péché d’anachronisme ?) conservant l’espoir des populations majoritairement chrétiennes. La marche d’Espagne carolingienne n’est pas loin. Mais c’est sans doute un peu court pour tout expliquer.
      Mes félicitations pour le dialogue que vous entretenez Vous et Descartes. Je ne suis pas de taille, ma scolarité a été trop médiocre et tout ne se rattrape pas.

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Votre parchemin ne me convainc guère, car il suppose que les noms hébraïques soient clairement distincts des noms des autres populations sémitiques parlant sans doute des langues très proches de l’hébreu.]

      Je ne suis pas un philologue. Si des archéologues considèrent ce parchemin comme un indice de la présence d’hébreux en Egypte, c’est probablement que les noms hébraïques étaient suffisamment différentiés de ceux portés par les peuples voisins pour constituer un critère discriminant. Je note par ailleurs que l’on trouve rarement des noms hébraïques (Abraham, Isaac, Jacob, Moïse…) ailleurs que chez les hébreux.

      [Néanmoins, en admettant que vous disiez vrai, n’est-il pas étonnant qu’aucune source égyptienne ne mentionne les Hébreux (alors mêmes que les archives ne manquent pas)?]

      Je ne sais pas quelle vision les égyptiens avaient des immigrants. Dans la mesure où la population égyptienne était elle-même très diverse, et le syncrétisme religieux des égyptiens, je ne suis pas persuadé qu’ils consignaient l’appartenance ethnique des gens. Certains pensent que l’expérience monothéiste sous Akhenaton aurait pu être inspirée par des conseillers juifs, mais je crois que les indices archéologiques ne permettent pas de conclure sur cette question.

      [Je me suis replongé dans certains de mes livres, et voici ce que j’y ai trouvé: d’abord, on signale des traces de conversions forcées à l’époque du royaume hasmonéen (II°-Ier siècle av. J.-C.). Ainsi, les Hérode sont des Iduméens, originaires d’une contrée qui n’était pas juive à l’origine, mais convertie après la conquête hasmonéenne. Strabon et Flavius Josèphe (qui est juif) signalent ces conversions.]

      Si vous avez les références, je serais très intéressé.

      [Ensuite, concernant le prosélytisme juif dans le monde romain, je me suis renseigné… et l’honnêteté m’oblige à mettre de l’eau dans mon vin (je vois un sourire narquois qui se dessine sur votre visage…).]

      Meuh non, meuh non… gnark gnark

      [Mais comme Flavius Josèphe, encore lui, signale qu’au 1er siècle, à Antioche, la communauté juive avait attirée à elle de nombreuses femmes issues du paganisme (or la loi juive que vous citez devrait empêcher cette intégration puisque par définition ces femmes ne sont pas en état de donner naissance à des juifs).]

      Que des non-juifs aient été attirés par les collectivités juives – certaines étant fort riches – n’est pas en soi étonnant. Mais je ne pense pas qu’on puisse trouver beaucoup de cas de prosélytisme – c’est-à-dire de communautés juives qui aient activement fait campagne pour attirer des nouveaux membres. Que dit Flavius Josèphe sur l’accueil qui fut accordé aux païens – et spécialement aux païennes – qui ont essayé de s’intégrer aux communautés juives ?

      [Ensuite, des gens d’origine non juive sont signalés dans des listes de donateurs pour la construction d’édifices religieux juifs, à Doura-Europos (Mésopotamie) et Aphrodisias (Asie Mineure). Le judaïsme n’étant pas un culte officiel, on voit mal des personnes qui ne se seraient pas senties proches du judaïsme donner de l’argent pour un lieu de culte juif.]

      Je ne vois pas pourquoi. Cela pouvait être un moyen de remercier un service rendu, voire de gagner l’estime des dirigeants d’une communauté particulièrement riche ou puissante. Il est très difficile de tirer des conclusions sans avoir des éléments plus précis. Il est parfaitement possible que certains païens aient été intégrés dans des communautés juives et même « convertis ». Mais ce devait être un phénomène suffisamment rare et marginal pour n’avoir laissé aucune trace dans le droit juif, en dehors du cas particulier du mariage mixte.

      [Je ne suis pas du tout d’accord. Quelle proportion de juifs les nazis ont-ils réellement arrêtés rien qu’en regardant leurs têtes?]

      Je ne sais pas s’il y a une statistique. Mais je peux vous assurer qu’il y a des caractéristiques qui sont tout à fait reconnaissables. Elles ne sont pas « juives », bien entendu. Elles sont partagés par tous les peuples sémitiques.

      [Pourquoi avoir imposé le port de l’étoile jaune puisque les juifs étaient si aisément reconnaissables?]

      L’étoile jaune n’avait pas pour seul objectif de rendre les juifs reconnaissables. Elle a été instituée pour stigmatiser une population et la séparer du reste.

      [Pourquoi sur la plupart des photographies et documents des années 30, les juifs que l’on voit sont de type européen? En Pologne et en Russie, où pourtant les mélanges n’ont pas dû être légion vu le statut des juifs, les nazis ont trouvé un nombre non-négligeable de juifs blonds aux yeux bleus…]

      Vous vous trompez : non seulement les mélanges n’étaient pas si rares que cela – toute une littérature juive en porte la trace, pensez à « Tevie le laitier » de Scholem Aleikhem, dont la fille épouse un « goï », mais il y eut de très nombreux viols au cours des persécutions que les juifs ont souffert en Pologne et en Russie tout au long du XIXème siècle. Bien évidement, TOUS les juifs n’ont pas des caractères sémites. Sur mes quatre grands parents – tous juifs d’Europe centrale – trois sont « sémites » (bruns, yeux noirs, etc.) mais le quatrième est blond aux yeux gris, une apparence tout à fait russe.

      [A contrario, bien des gens en Europe ont le physique que vous signalez sans être le moins du monde d’origine juive.]

      Bien entendu. Beaucoup d’arabes, pour commencer, qui sont aussi de racine sémitique.

      [Quand on regarde la plupart des Ashkénazes, ils sont de type européen. Vous trouvez qu’Anne Sinclair, Kirk Douglas, Dominique Strauss-Kahn, Daniel Cohn-Bendit, Steven Spielberg, Woody Allen, Julien Dray et j’en passe ont des "têtes de juifs"?]

      Oh que oui ! Franchement, et sauf pour Kirk Douglas, je n’aurai eu la moindre hésitation…

      [J’en reviens à l’origine du mot "juif", dérivé du mot "judéen" et on en déduit logiquement que le judaïsme est né dans le royaume de Juda.]

      Vous jouez sur les mots… Diriez-vous que Isaac n’était pas juif ?

      [Sur le nombre des Hébreux juifs et polythéistes (ou syncrétiques si vous préférez), Finkelstein donne contrairement à ce que vous dites des indications: il ne vous aura pas échappé que l’Ancien Testament peste avec véhémence contre la quasi-totalité des rois d’Israël. Or Finkelstein montre, preuves archéologiques à l’appui, que le royaume des dix tribus est bien plus peuplé, riche et puissant que son voisin du sud. Ce royaume d’Israël accueille de nombreuses influences religieuses, notamment phéniciennes, sous Achab notamment dont la femme Jézabel est originaire de Phénicie. On peut aussi noter que les prophètes monothéistes signalés par la Bible dans le royaume d’Israël ne rencontrent guère de succès. Aucun roi d’Israël à ma connaissance n’est chassé par son peuple pour impiété… On peut en déduire, et la Bible le laisse entendre, que le peuple hébreu d’Israël partageait les "errements" de ses rois. Or cette population représente l’écrasante majorité des Hébreux.]

      Le problème est que la Bible n’est pas un document historique. L’accusation d’impiété envers le royaume d’Israël peut être une histoire vraie, mais peut être aussi un élément de propagande destiné à souligner la piété de Juda et donc la légitimité de ses rois.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Et si, comme vous le faites, il faut effectivement nuancer le tableau selon les pays (actuels) il n’en reste pas moins qu’à cette époque, les élites sous peine de disparaître en tant que telles doivent passer par la case « conversion » (idem que le processus inauguré par Constantin).]

      Ce processus a duré jusqu’aux temps modernes. Le père de Karl Marx est un juif converti au luthéranisme pour pouvoir exercer son métier dans de meilleures conditions. Le père de Felix Mendelsohn a un parcours similaire. On l’oublie souvent, mais dans beaucoup d’états de l’Europe chrétienne certains métiers, certaines professions, certains postes n’étaient ouverts qu’aux chrétiens – et encore, aux chrétiens de telle ou telle secte particulière – jusqu’au début du XXème siècle.

    • @ Descartes,

      Voici d’abord les références que m’avez demandé:
      "L’extrémité occidentale de la Judée voisine du mont Casius est occupée par l’Idumée et le lac [Sirbonis.] Les Iduméens sont d’anciens Nabatéens chassés de leur patrie à la suite de discordes intestines, et qui, mêlés aux Juifs, ont fini par adopter leurs moeurs et leurs coutumes." Strabon, Géographie, livre XVI, chapitre II, 34

      "Hyrcan prit aussi les villes d’Idumée, Adora et Marissa, soumit tous les Iduméens et leur permit de rester dans le pays à la condition d’adopter la circoncision et les lois des Juifs. Par attachement au sol natal, ils acceptèrent de se circoncire et de conformer leur genre de vie à celui des Juifs. C’est à partir de cette époque qu’ils ont été des Juifs véritables." Flavius Josèphe, Antiquités Judaïques, Livre XIII, Chapitre IX, 1

    • @ Descartes,

      "Je note par ailleurs que l’on trouve rarement des noms hébraïques (Abraham, Isaac, Jacob, Moïse…) ailleurs que chez les hébreux."
      Sauf que nous ignorons presque tout de l’onomastique moabite, édomite, ammonite… Autant de peuples nomades sémitiques étroitement apparentés aux Hébreux, si l’on en croit la Bible.

      "Cela pouvait être un moyen de remercier un service rendu, voire de gagner l’estime des dirigeants d’une communauté particulièrement riche ou puissante"
      Mais qu’est-ce qui permet d’affirmer que les juifs dans l’Empire romain constituaient une "communauté particulièrement riche ou puissante"? Certainement pas plus riche en tout cas que les adorateurs de Cybèle ou de Mithra qui ne recouraient guère à des gens ne partageant pas leur foi pour construire leur lieu de culte. La preuve en est que les curies de notables dans les cités ont très bien fonctionné sans les juifs (lesquels ne pouvaient sacrifier pour des raisons religieuses). Mais si vous avez des sources sur la richesse des communautés juives dans l’Empire romain païen, je suis preneur.

      "Mais ce devait être un phénomène suffisamment rare et marginal pour n’avoir laissé aucune trace dans le droit juif, en dehors du cas particulier du mariage mixte."
      On ne saurait écarter l’hypothèse que les milieux juifs un peu plus "ouverts" aient été discrets sur la question des conversions, afin d’éluder un débat qui les plaçait en contradiction avec leurs traditions…

      "Sur mes quatre grands parents – tous juifs d’Europe centrale – trois sont « sémites » (bruns, yeux noirs, etc.) mais le quatrième est blond aux yeux gris, une apparence tout à fait russe"
      Est-ce à dire que la majorité des Portugais, Espagnols, Italiens, Grecs ou Albanais sont juifs? Allons, j’ai dans ma propre famille des bruns aux yeux foncés et au teint mat, sans aucune ascendance juive connue… Cet argument ne me semble pas très sérieux.

      "Oh que oui ! Franchement, et sauf pour Kirk Douglas, je n’aurai eu la moindre hésitation…"
      Eh bien, vous me communiquerez votre catalogue des "types physiques juifs"! Cohn-Bendit est roux aux yeux et à la peau claire, on dirait un Irlandais. Dray a la bouille ronde et les cheveux châtains d’un "Français moyen". Anne Sinclair pourrait sans difficulté passer pour une actrice italienne. Quant à Strauss-Kahn, il ne jurerait pas au milieu de Slaves (car il y a des Slaves bruns, dans les Balkans). Mais surtout, je connais des gens avec des physiques comparables qui sont Français "bien de chez nous"…

      "Diriez-vous que Isaac n’était pas juif ?"
      Isaac? Le père de Jacob? Je dirais surtout que c’est un personnage mythique. La lignée d’Abraham sert essentiellement à expliquer les noms ethniques des Hébreux: Jacob reçoit le nom d’ "Israël" (qui est utilisé ensuite pour désigné l’ensemble des Hébreux) et ses douze fils donnent leurs noms aux tribus hébraïques. Un peu comme Hellen et ses descendants, Eole, Doros, Ion et Achaios donnent leurs noms aux différentes tribus grecques (Eoliens, Doriens, Ioniens, Achéens). Se demander si Isaac était juif, c’est comme se demander si les rois de Sparte descendent réellement d’Héraclès. Mais après tout, nous n’avons aucune preuve que l’Hydre de Lerne et le lion de Némée n’ont pas existé… Je n’ai jamais compris pourquoi on prend au sérieux chez les juifs des récits qui sont qualifiés sans hésitation de "mythologiques" chez les autres.

      "L’accusation d’impiété envers le royaume d’Israël peut être une histoire vraie, mais peut être aussi un élément de propagande destiné à souligner la piété de Juda et donc la légitimité de ses rois."
      Peut-être. Mais le fait est que les lieux de culte dénoncés par la Bible semblent bien avoir été présents au royaume d’Israël, de même que le "syncrétisme" que nous avons évoqué. Et c’est logique: il eût été problématique pour les rois d’Israël de reconnaître comme centre religieux des douze tribus la capitale du royaume frère et néanmoins rival… Aussi, le récit biblique indiquant que Jéroboam, premier roi d’Israël, pourtant choisi par Yahvé, s’empresse d’établir des veaux d’or sur son territoire, a tout lieu d’être pris au sérieux. Il est évident que le royaume du nord avait ses propres centres religieux.

      Par ailleurs, Finkelstein et d’autres historiens s’interrogent très sérieusement sur l’existence du royaume unifié de David et Salomon. Il est en effet fort étonnant qu’un royaume si puissant n’ait laissé presque aucune trace archéologique, et que Jérusalem ait été, selon toute vraisemblance, une insignifiante bourgade à l’époque présumée de Salomon. Et si le royaume unifié n’a pas existé, on peut alors s’interroger sur les rapports des dix tribus du nord avec le monothéisme…

    • BolchoKek dit :

      @ Descartes
      >Il est très probable qu’à chaque opportunité le retour n’ait pas été total, mais que certains groupes soient restés sur leur terre d’exil voir aient émigré vers d’autres terres étrangères.<
      A propos des Khazars, les documentations byzantine, perse et arabe concernant leur économie et leurs langues sont assez claires : il s’agissait d’une confédération de tribus nomades, pour la plupart turciques dirigée par l’ethnie turque khazare, qui au cours du temps se sont sédentarisées. Ils sont particulièrement notables et originaux pour leur émission monétaire (les tribus turques pendant longtemps utilisaient le sel pour les échanges) leur sédentarisation et leur puissance maritime et commerciale, devenant une étape possible de la route de la soie et la plaque tournante du commerce de fourrures. Leur religion a souvent été mentionnée dans ces textes, bien que de façon lapidaire. Toutefois, un document particulier, un échange entre un ministre juif du calife de Cordoue et le roi des Khazars, semble éclaircir pas mal de choses :

      http://en.wikipedia.org/wiki/Khazar_Correspondence

      Il est assez clair, selon le roi Khazar, que la conversion du tengrisme turc vers le judaïsme avait un motif politique : doter un état en voie de sédentarisation et d’institutionnalisation d’une religion forte et structurée, mais toutefois différente de ses voisins du sud. Alors, peut-on parler de prosélytisme ? Je ne pense pas, puisque le roi s’est converti de son propre chef et en demandant à rencontrer un religieux juif. Mais il s’agit bien d’un exemple de conversion au judaïsme attesté. Il est certes probable que le judaïsme n’ait été adopté que par la seule tribu régnante des Khazars, et pas de toute la confédération, voire uniquement par la classe dirigeante. Il s’agit toutefois d’une conversion attestée d’un non-juif au judaïsme.

      Un passage est en outre particulièrement intéressant :
      "After the days of Bulan there arose one of his descendants, a king Obadiah by name, who reorganized the kingdom and established the Jewish religion properly and correctly. He built synagogues and yeshivot, brought in Jewish scholars, and rewarded them with gold and silver. [The Jewish scholars could have come from Baghdad and Constantinople.] They explained to him the Bible, Mishnah, Talmud and the order of divine services. The King was a man who revered and loved the Torah."

      En mentionnant l’arrivée de juifs hébraïques, on peut imaginer que des communautés se soient formées, ou que pour des communautés juives errantes ce royaume ait servi d’escale, ce qui expliquerait par la suite la forte présence de juifs en Europe orientale…

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Voici d’abord les références que m’avez demandé:]

      Merci beaucoup de votre diligence. Ces textes ne paraissent pas établir le prosélytisme juif. Celui de Strabon parle plutôt de ce qu’en termes modernes on pourrait appeler « assimilation » des immigrés Nabatéens qui ont progressivement pris les mœurs et les coutumes – on peut supposer que pour Strabon ceux-ci incluaient les pratiques religieuses – des habitants majoritaires. Mais nous ne savons toujours pas quelle était la réaction des communautés juives à l’égard de ces nouveaux arrivants. Faisaient-elles du véritable prosélytisme pour chercher à les convertir ? Ou se contentaient-elles de les intégrer au fur et à mesure des mariages mixtes ou de l’adoption de leurs coutumes ?

      Le texte de Flavius Josèphe est plus explicite – peut-être parce qu’étant juif lui-même il avait des sources plus précises ? – mais plus que du prosélytisme il décrit une conversion forcée, qui plus est imposée par le pouvoir civil et non par le pouvoir religieux.

      En tout, cas, merci encore de ces textes ça m’a donné envie de relire Flavius Josèphe pendant les fêtes !

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      ["Je note par ailleurs que l’on trouve rarement des noms hébraïques (Abraham, Isaac, Jacob, Moïse…) ailleurs que chez les hébreux."][Sauf que nous ignorons presque tout de l’onomastique moabite, édomite, ammonite… Autant de peuples nomades sémitiques étroitement apparentés aux Hébreux, si l’on en croit la Bible.]

      Nous savons tout de même que chez les héritiers de ces peuples, lorsqu’ils en ont eu, on ne retrouve pas la même onomastique.

      [Mais qu’est-ce qui permet d’affirmer que les juifs dans l’Empire romain constituaient une "communauté particulièrement riche ou puissante"?]

      Pas « les juifs dans l’Empire romain », mais une certaine communauté à un endroit particulier de l’Empire romain. On connaît des contributions à la construction de certains temples, mais personne à ma connaissance n’affirme que tous les temples juifs dans l’ensemble de l’empire romain étaient construit avec des contributions de « convertis »…

      [Certainement pas plus riche en tout cas que les adorateurs de Cybèle ou de Mithra qui ne recouraient guère à des gens ne partageant pas leur foi pour construire leur lieu de culte.]

      Je ne sais pas. A-t-on des listes de donateurs pour la construction des temples de Cybèle ou Mithra qui montreraient des noms juifs, par exemple ?

      [Mais si vous avez des sources sur la richesse des communautés juives dans l’Empire romain païen, je suis preneur.]

      Je n’ai pas de « sources » en dehors de mes souvenirs de lecture de Flavius Josèphe.

      ["Sur mes quatre grands parents – tous juifs d’Europe centrale – trois sont « sémites » (bruns, yeux noirs, etc.) mais le quatrième est blond aux yeux gris, une apparence tout à fait russe"
      Est-ce à dire que la majorité des Portugais, Espagnols, Italiens, Grecs ou Albanais sont juifs?]

      Non, bien entendu. Mon commentaire visait à vous montrer que là où la population autochtone présente des traits très différents des traits sémitiques, on peut voir que ces derniers se sont quand même perpétués assez consistamment. Ce qui tendrait à montrer que la mixité (que ce soit par mariage, par conversion ou par toute autre voie) était relativement modérée. Là où la population autochtone a des traits similaires aux traits sémitiques, l’effet est bien entendu imperceptible.

      ["Diriez-vous que Isaac n’était pas juif ?"][Isaac? Le père de Jacob? Je dirais surtout que c’est un personnage mythique.]

      Le fait d’être mythique n’a jamais empêché quelqu’un d’être juif, que je sache.

      [Se demander si Isaac était juif, c’est comme se demander si les rois de Sparte descendent réellement d’Héraclès.]

      Non. Se demander si Isaac état juif c’est comme se demander si Pâris était troyen. Dans les deux cas, la réponse est « oui ».
      [Je n’ai jamais compris pourquoi on prend au sérieux chez les juifs des récits qui sont qualifiés sans hésitation de "mythologiques" chez les autres.]

      Je crois que vous avez mal interprété mon propos. Je n’ai jamais dit que Isaac fut un personnage réel. Ce que j’ai dit, c’est que la définition de ce qui est un « juif » ne date pas de la formation de tel ou tel royaume. Il fut un temps ou tous les hébreux n’étaient pas juifs, mais cela n’implique pas que le juif n’existait pas.

      [Par ailleurs, Finkelstein et d’autres historiens s’interrogent très sérieusement sur l’existence du royaume unifié de David et Salomon. Il est en effet fort étonnant qu’un royaume si puissant n’ait laissé presque aucune trace archéologique, et que Jérusalem ait été, selon toute vraisemblance, une insignifiante bourgade à l’époque présumée de Salomon. Et si le royaume unifié n’a pas existé, on peut alors s’interroger sur les rapports des dix tribus du nord avec le monothéisme…]

      Bien entendu, cela reste un domaine de recherche très ouvert.

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [En mentionnant l’arrivée de juifs hébraïques, on peut imaginer que des communautés se soient formées, ou que pour des communautés juives errantes ce royaume ait servi d’escale, ce qui expliquerait par la suite la forte présence de juifs en Europe orientale…]

      Merci de toutes ces informations sur les Khazares. Beaucoup d’hypothèses sont possibles sur l’adoption de la religion juive. Mais la « forte présence de juifs en Europe orientale » n’est pas venue par cette voie. La plupart des juifs ashkénaze proviennent des migrations des juifs d’Europe et de la méditerranée occidentales à partir du XIème siècle.

  6. morel dit :

    « Pour un jeune qui franchit le pas de la violence totale, il y en a dix, cinquante, cent qui restent à une violence « de faible intensité », ou qui en sont tentés sans franchir le pas. Et cela ne peut pas ne pas avoir un effet, difficile à quantifier je vous l’accorde, sur la manière dont ils se construisent. »

    « ils se construisent » ne peut que concerner cette frange.
    Le « symptôme », actuellement, ne touche qu’une marge de notre société (est-il prophète ? J’en doute). Vous évoquez, dans une réponse précédente les « cités » plus préoccupées de trafic de stupéfiants que de califat, je voulais évoquer pour ma part, l’immense majorité de notre jeunesse.
    Il ne s’ensuit pas du tout que le phénomène est négligeable, ni ne doit être analysé mais, vous le savez, doit être ramené à de bonnes proportions d’où mon argumentation « statistique ».

    « La comparaison me paraît aventureuse. Tsahal est une institution nationale. On n’y fait pas n’importe quoi, et certainement pas ce qu’on veut. Ceux qui vont y servir se soumettent à des règles strictes. »

    Il ne s’agit nullement d’une comparaison mais d’un rapprochement : ne peut-on pas aussi s’interroger sur la présence non négligeable de ressortissants Français dans l’armée d’un pays qui pratique le déni des résolutions internationales ? Pourquoi ce silence quant à cet engagement ?
    Ce fait ne mérite-t-il pas aussi d’être intégré dans notre réflexion ?

    Pour ma part, sans savoir quelle réalité cela pouvait recouvrir, je me suis alarmé en passant chez un marchand de journaux où figurait à l’affichage une « une » : « 27 % des jeunes Français voient leur avenir à l’étranger » (je crois qu’il s’agissait du « Monde »). Je ne sais ni la réalité ni la part de rêve mais en relation avec les politiques économiques suivies par nos gouvernements, il me semble qu’il a ici un problème important.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Le « symptôme », actuellement, ne touche qu’une marge de notre société (est-il prophète ? J’en doute).]

      Le « symptôme » ne touche, effectivement, qu’une partie marginale de notre jeunesse. Mais je crains que la maladie que ce symptôme révèle soit bien plus étendue. Je partage votre souci de ramener le phénomène à sa « bonne proportion » statistique, mais cette clarification factuelle ne doit pas conduire à négliger la partie invisible de l’iceberg.

      La tentation de la violence comme « transgression suprême » dans une société qui a banalisé toutes les autres transgressions est pour la jeunesse un danger bien réel. Si l’on ajoute à cela l’effacement progressif de la frontière entre le virtuel et le réel, entre le fantasme et l’acte, on est dans des beaux draps. A ce propos, je crois avoir commenté sur ce blog un texte du PCF ou l’on reprochait à la gauche « sociale-libérale » d’avoir cédé au « principe de réalité ». J’ignore si ceux qui ont écrit ce texte savent vraiment ce qu’est le « principe de réalité » et quelles sont ses alternatives, mais je trouve le lapsus très révélateur.

      [Il ne s’agit nullement d’une comparaison mais d’un rapprochement : ne peut-on pas aussi s’interroger sur la présence non négligeable de ressortissants Français dans l’armée d’un pays qui pratique le déni des résolutions internationales ? Pourquoi ce silence quant à cet engagement ? Ce fait ne mérite-t-il pas aussi d’être intégré dans notre réflexion ?]

      Intégré à notre réflexion, certainement. Mais au bon endroit. Je ne crois pas que l’engagement dans Tsahal – qui n’est d’ailleurs pas tout à fait un engagement, mais la volonté d’accomplir son service militaire dans un pays dont on revendique la citoyenneté – ait pour origine le même mécanisme que l’engagement dans Daesh ou dans une ZAD. Il n’y a dans l’engagement dans Tsahal aucune contestation institutionnelle pas plus qu’un rejet intégral de son environnement. En général, ce geste s’inscrit dans ce que les parents, la famille, les amis, la communauté à laquelle appartient l’engagé soutiennent ou du moins tolèrent. Il s’agit de s’engager dans une armée régulière, en qualité de citoyen-combattant d’un pays dont on partage le « roman national », donc de s’insérer dans un ordre institutionnel. Je ne crois pas que la fascination pour la violence ou la toute puissance que donne une Kalach’ soit vraiment le moteur de ces engagements.

      J’ai plusieurs fois dit sur ce blog mon opposition à l’idée de « double nationalité », qui brouille les repères. Je trouve aussi détestable la manipulation permanente de la diaspora juive à laquelle se livre l’Etat d’Israël et son instrumentalisation du traumatisme que fut la Shoah. Mais je ne crois pas pour autant qu’il faille amalgamer l’engagement des bi-nationaux dans l’armée de leur « second pays » avec le phénomène de la violence politique.

      [Pour ma part, sans savoir quelle réalité cela pouvait recouvrir, je me suis alarmé en passant chez un marchand de journaux où figurait à l’affichage une « une » : « 27 % des jeunes Français voient leur avenir à l’étranger » (je crois qu’il s’agissait du « Monde »).]

      C’est le contraire qui serait étonnant. On répète depuis bientôt trente ans que les nations sont dépassées, que l’Europe est notre avenir. On martèle le message du « déclin » français, on fait de la « haine de soi » un discours officiel, et on nous explique à longueur de pages et de reportages que tout va mieux ailleurs. On ne peut plus citer notre « roman national » sans entendre que Napoléon était un esclavagiste, que Richelieu était « totalitaire », que Robespierre était fou et que De Gaulle… non, De Gaulle on n’a pas encore le droit de toucher, mais on le tue en oubliant ce qu’il fut pour nous servir une version stérilisée de partisan de l’Europe fédérale. Et on fait taire ceux qui veulent encore transmettre « une certaine idée de la France » et de son histoire en les faisant passer pour des guignols poussiéreux, « rances », « maréchalistes » et autres adjectifs du même tonneau. Comment voulez-vous que la jeunesse soit insensible à ce discours ? D’où pourrait-elle tirer l’envie et la force de croire à un autre discours ?

      [Je ne sais ni la réalité ni la part de rêve mais en relation avec les politiques économiques suivies par nos gouvernements, il me semble qu’il a ici un problème important.]

      Certainement. Mais plus qu’un problème, on se trouve devant le résultat d’une politique délibérée. On ne peut pas « casser » systématiquement l’idée de communauté de destin, et ensuite se désoler que les gens ne se voient plus un avenir commun.

    • LDC dit :

      Bonjour Descartes,

      Vous classez Ellul comme un penseur réactionnaire. Le peu de connaissance que je possède sur cet auteur m’incite à partager le diagnostic. Ce qui m’interroge chez Ellul, c’est de savoir comment on peut s’inspirer de Marx (bien qu’il ne soit pas marxiste) pour bâtir un système philosophique réactionnaire. Question importante à mes yeux, car cette critique radicale du progrès et de la technique, je la retrouve relativement souvent chez des jeunes amis du FDG, parfois même chez les souverainistes républicains.

    • Descartes dit :

      @ LDC

      [Ce qui m’interroge chez Ellul, c’est de savoir comment on peut s’inspirer de Marx (bien qu’il ne soit pas marxiste) pour bâtir un système philosophique réactionnaire.]

      Pour Ellul, Marx est avant tout un analyste du capitalisme en économiste et en historien. Mais s’il est indispensable pour comprendre et analyser le capitalisme, Marx de l’avis d’Ellul n’a rien à nous dire par rapport à l’avenir. Cet artifice permet à Ellul de construire sur une base marxienne une idéologie réactionnaire. Et il n’est pas le seul, d’ailleurs. Ellul, d’une certaine manière, est plus honnête que la plupart parce qu’il annonce la couleur et ne prétend pas occulter la rupture avec Marx en mettant des mots dans la bouche de ce dernier…

      [Question importante à mes yeux, car cette critique radicale du progrès et de la technique, je la retrouve relativement souvent chez des jeunes amis du FDG, parfois même chez les souverainistes républicains.]

      Je ne connais pas de souverainistes républicains qui aient adopté une telle position. Le rejet de l’idée de progrès technique va en général en parallèle avec le rejet de l’idée de souveraineté. Car la logique de l’aliénation selon Ellul est incompatible avec l’idée même de souveraineté populaire, qui exige un citoyen libre et non aliéné par la « technique ». La critique du progrès conduit généralement à une vision politique aristocratique, celle d’une minorité de « illuminati » qui savent ce qui est bon pour les autres.

    • morel dit :

      En Israël même les critiques d’historiens du livre de Sand ne portent pas sur la remise en cause du caractère mythique des exodes de masse (on peut plus sérieusement penser qu’il s’agissait de « prises d’otages » d’individus de haut rang). Maurice Sartre, spécialiste de l’histoire du monde grec et du monde romain oriental le confirme aussi.
      Le prosélytisme au début de notre ère n’y est pas non plus nié.
      Les successeurs de Constantin mettront en œuvre les mesures progressives visant l’exclusion du paganisme et du judaïsme (ex : l’interdiction pour les juifs de circoncire leurs esclaves, de posséder des esclaves chrétiens …). D’interdiction en interdiction, la puissance temporelle de l’église se renforçant, le prosélytisme judaïque ne pouvait que disparaître.
      Le juif russe, le falasha, le juif d’Asie ont les traits de leur région d’origine, preuve évidente du mythe d’un peuple « biologique ».

    • morel dit :

      Oui, pour les conversions jusqu’au temps modernes.

      Désolé d’y revenir mais ça me chipote :

      « La question de l’amplitude des déportations reste très discutée. Quoi qu’il en soit, cette déportation explique pourquoi on retrouve des communautés juives jusqu’aux confins de la Perse et du Caucase sans avoir recours à un « prosélytisme »

      Je ne suis pas non plus sûr que l’on ait des preuves que celles-ci procèdent de l’origine que vous évoquez.

      « mais les mariages mixtes sont suffisants pour l’expliquer. En effet, la Halakha considère comme juif l’enfant d’une juive, quelque soit la communauté d’origine du père. »

      Dans des sociétés largement dominées par le patriarcat, qui l’emporte généralement ?

      « Mais les expulsions n’ont pas besoin d’être « massives » pour expliquer l’existence de groupes et tribus juives hors de la Palestine et de ses environs. Quelques centaines d’individus suffisent pour fonder une communauté »

      Cela peut être vrai mais il serait impensable que « l’évaporation » dans le milieu n’ait pas lieu aussi.

      Eléments nouveaux ? : ( comme je n’ai pas toujours les moyens, j’emprunte beaucoup à la bibliothèque municipale y compris via des demandes d’acquisitions et ces livres n’y figurent pas… 2 mois de délais si l’achat est accepté).

      « A la faveur de la diaspora juive, les croyances et les pratiques juives se répandirent dans toutes les régions du monde romain et gagnèrent toutes les classes sociales : les plus riches comme les plus pauvres. Dans un texte souvent cité (Contre Apion, II 39), Flavius Josèphe fait état de nombreux usages d’origine juive qui s’étaient répandus non seulement parmi les Grecs et les Romains, mais encore parmi les peuples barbares.
      S’il en fut ainsi, c’est parce que les Juifs déployèrent alors un vigoureux effort de prosélytisme et s’efforcèrent de convertir au judaïsme les païens parmi lesquels ils vivaient.
      Les écrivains latins font plus d’une fois allusion à la propagande juive qui entrainait de nombreux romains à « judaïser » (Horace, Satires, I, 4, v 129 sq ; I, 9, v 14 sq ; Ovide, Art d’aimer, I, v 397 sq ; Tibulle, Elégies, 1, 3, v 1 sq ; Juvénal, Satires, XIV, v 96-108.). Certains s’en indignent, tel Sénèque qui déplore que « les vaincus aient pu donner des lois aux vainqueurs » (victi victoribus leges dederunt), cité par Saint Augustin dans la Cité de Dieu , 6, 11.
      Or il y avait des païens qui ne se contentaient pas de judaïser, mais sympathisaient avec le judaïsme, certains n’acceptaient d’accomplir qu’une partie des prescriptions de la loi juive ; les craignant-Dieu ou demi-prosélytes en hébreu ger toshav ; certains acceptaient d’accomplir toutes les prescriptions de la loi juive ; c’étaient des prosélytes , en hébreu ger tsedeq et leur entrée dans le judaïsme était marquée par une immersion totale dans l’eau , à laquelle s’ajoutait pour les hommes la circoncision. La plupart des enfants des demi-prosélytes devenaient d’ailleurs des prosélytes complets. »

      In : http://www.observatoiredesreligions.fr/spip.php?article252&artsuite=1

      Parlant d’ouvrages de Paul Sebag et Marcel Simon historiens.
      Mes excuses pour ce « réchauffé ».

    • Descartes dit :

      @ morel

      [« mais les mariages mixtes sont suffisants pour l’expliquer. En effet, la Halakha considère comme juif l’enfant d’une juive, quelque soit la communauté d’origine du père. »][Dans des sociétés largement dominées par le patriarcat, qui l’emporte généralement ? ]

      Qui emporte quoi ? Je ne comprends pas très bien la question. Une société peut parfaitement être patriarcale et matrilinéaire. Ce sont deux questions totalement différentes. Le patriarcat est une forme sociale dans laquelle le pouvoir est réservé aux hommes. La question de la linéarité est ici de savoir si dans les mariages mixtes l’enfant appartient à la « tribu » de la mère ou celle du père. On remarque que beaucoup de cultures pastorales – c’était le cas des hébreux – sont matrilinéaires de ce point de vue. C’est le cas chez certains arabes, ou le rôle du père est pris par l’oncle maternel.

      [Cela peut être vrai mais il serait impensable que « l’évaporation » dans le milieu n’ait pas lieu aussi.]

      La culture hébraïque est particulièrement bien construite pour éviter cette « évaporation ». Deux mille ans de diaspora n’ont pas suffi a diluer les juifs dans les différents pays dans lesquels ils se sont installés.

      [« A la faveur de la diaspora juive, les croyances et les pratiques juives se répandirent dans toutes les régions du monde romain et gagnèrent toutes les classes sociales : les plus riches comme les plus pauvres. Dans un texte souvent cité (Contre Apion, II 39), Flavius Josèphe fait état de nombreux usages d’origine juive qui s’étaient répandus non seulement parmi les Grecs et les Romains, mais encore parmi les peuples barbares.]

      Oui, mais quels usages ? On peut manger du gefelte fish sans pour autant se convertir…

      [S’il en fut ainsi, c’est parce que les Juifs déployèrent alors un vigoureux effort de prosélytisme et s’efforcèrent de convertir au judaïsme les païens parmi lesquels ils vivaient.
      Les écrivains latins font plus d’une fois allusion à la propagande juive qui entrainait de nombreux romains à « judaïser » (Horace, Satires, I, 4, v 129 sq ; I, 9, v 14 sq ; Ovide, Art d’aimer, I, v 397 sq ; Tibulle, Elégies, 1, 3, v 1 sq ; Juvénal, Satires, XIV, v 96-108.). Certains s’en indignent, tel Sénèque qui déplore que « les vaincus aient pu donner des lois aux vainqueurs » (victi victoribus leges dederunt), cité par Saint Augustin dans la Cité de Dieu , 6, 11.]

      Merci de ces références, je vais essayer moi aussi de les sortir de ma bibliothèque pour me faire une idée.

  7. morel dit :

    En fait, nous sommes d’accord sur l’essentiel et je souscris bien évidemment à votre description concernant l’engagement de jeunes Français dans Tsahal, n’ayant jamais tiré un trait d’égalité avec celui avec l’EI.

    Votre fil était à l’origine, les jeunes et la violence. Le mien, puisque vous permettez les digressions,
    était le désenchantement ou plutôt l’absence d’enthousiasme de la jeunesse à l’égard de notre pays qui me semble inquiétant bien au-delà de la violence (je crains qu’il y aura toujours une frange violente dans nos sociétés, en particulier chez les jeunes mais je n’aspire qu’à être détrompé).

    Vous évoquez le problème que je connais mal de la double nationalité. Celle-ci est-elle directement en cause ou est-ce le contexte actuel ?
    Ma démarche est plus pragmatique : si cela conduit à, comme on disait chez moi, « battre dans deux granges », c’est non. La qualité de citoyen d’un pays doit comporter des obligations essentielles parmi lesquelles participer exclusivement aux forces armées de son pays (d’où mon exemple sur Tsahal). Sinon, il y a toujours le statut de résident qui reste dans un cadre démocratique.
    Je suis d’autant plus choqué que les personnes occupent un rang important dans la République : au moins un conseiller d’Etat a servi dans l’armée israélienne et s’il s’en trouve d’autres quel que soit le pays, ils n’y ont pas leur place.
    J’ai appris qu’on pouvait posséder une triple nationalité en France, là je commence à avoir le tournis…

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Votre fil était à l’origine, les jeunes et la violence. Le mien, puisque vous permettez les digressions, était le désenchantement ou plutôt l’absence d’enthousiasme de la jeunesse à l’égard de notre pays qui me semble inquiétant bien au-delà de la violence (je crains qu’il y aura toujours une frange violente dans nos sociétés, en particulier chez les jeunes mais je n’aspire qu’à être détrompé).]

      Comme souvent, les « fils » qui peuvent apparaître comme des digressions finissent en fait par converger. Oui, le « désenchantement » dont vous parlez fait partie des symptômes d’un malaise plus profond dont la fascination pour la violence comme instrument politique est une autre facette. J’avais écrit un papier sur la question en août 2011 – comme le temps passe… – sur ce même blog, dont le titre était « que c’est dur d’être jeune… ». En le relisant, je m’aperçois que déjà j’avais abordé le problème sur l’angle de la violence autant que celui du désenchantement.

      [Vous évoquez le problème que je connais mal de la double nationalité. Celle-ci est-elle directement en cause ou est-ce le contexte actuel ?]

      Pour ce qui concerne l’engagement dans Tsahal, c’est évident. Les jeunes juifs qui s’y engagent ont la citoyenneté israélienne en application de la « loi du retour ». Mais ces engagés renoncent rarement par ailleurs au passeport français. Pour ce qui concerne les « aventuriers » du Djihad, c’est difficile à dire. Le fait qu’il s’agit pour une proportion importante de convertis semble indiquer qu’ils n’ont que la nationalité française. Mais il ne faut pas fermer les yeux à mon avis sur un phénomène très réel, qui est la « double affiliation » par le biais des mariages binationaux et le mécanisme qui permet à l’enfant d’un tel mariage d’avoir la nationalité des deux parents. Encore un domaine où notre société est incapable de demander des choix aux individus…

      [Ma démarche est plus pragmatique : si cela conduit à, comme on disait chez moi, « battre dans deux granges », c’est non. La qualité de citoyen d’un pays doit comporter des obligations essentielles parmi lesquelles participer exclusivement aux forces armées de son pays (d’où mon exemple sur Tsahal). Sinon, il y a toujours le statut de résident qui reste dans un cadre démocratique.]

      Tout à fait. Mais la tendance actuelle est de vider la nationalité de tout contenu. La suppression progressive des obligations attachées à la condition de citoyen et la généralisation de ses droits à l’ensemble des résidents – clandestins y compris – a tend à faire de la citoyenneté une pure question administrative, et de la carte d’identité une sorte de carte de sécurité sociale.

      [Je suis d’autant plus choqué que les personnes occupent un rang important dans la République : au moins un conseiller d’Etat a servi dans l’armée israélienne et s’il s’en trouve d’autres quel que soit le pays, ils n’y ont pas leur place.]

      Je suis tout à fait d’accord. Le service dans une armée étrangère indique un degré d’engagement dans la « deuxième nationalité » incompatible à mon avis avec des fonctions qui impliquent la défense et l’exercice de la souveraineté française.

    • LDC dit :

      Bonjour,

      Je partage votre analyse sur la vision aristocratique. Et j’ai l’impression que cette vision est très influente chez les souverainistes, tout du moins les jeunes. Je vais vous parler de ce que je connais, l’association souverainiste de Sciences Po. Ses membres, de gauche comme de droite, sont très marqués par la lecture de Zemmour, Michéa ou (moins souvent) Clouscard, et ont adopté, dans leur majorité, une position antilibérale radicale et par la même antiprogressiste. J’ai encore été frappé hier par cette orientation philosophique. Nous avons accueilli Perico Legasse qui nous a servis un discours "Petite France" assez incroyable, ainsi on a pu entendre que "la France a gagné toutes les guerres avant 1870, grâce à son agriculture, elle perd en 1870, quand débute l’industrialisation", avant qu’il nous explique que l’identité française résidait tout entier dans la ruralité et l’agriculture, et cela à de nombreuses reprises. Cela n’a soulevé que des approbations… Cette situation m’a fait penser à ce que vous avez écrit sur les "diables de confort" et l’aliénation. Mes camarades se réclament pour la plupart antiprogressistes car le PS ou EELV se proclament progressistes. De même, le simple fait qu’un raisonnement soit considéré comme "libéral" est suffisant pour jeter l’anathème dessus. Je vous dis tout cela, car je me demande si les "républicains des deux rives" ne tournent pas à la réaction, par un mécanisme d’aliénation similaire à celui qui touche la gauche face au FN.

    • Descartes dit :

      @ LDC

      [Je partage votre analyse sur la vision aristocratique. Et j’ai l’impression que cette vision est très influente chez les souverainistes, tout du moins les jeunes. Je vais vous parler de ce que je connais, l’association souverainiste de Sciences Po. Ses membres, de gauche comme de droite, sont très marqués par la lecture de Zemmour, Michéa ou (moins souvent) Clouscard, et ont adopté, dans leur majorité, une position antilibérale radicale et par la même antiprogressiste.]

      Attendez… je croyais que nous parlions des « souverainistes républicains ». Faites attention, il y a des « souverainistes » qui ne sont pas « républicains », et qui sont plus proches du chauvinisme étroit d’un Maurras que de la vision universaliste d’un De Gaulle… un « républicain » ne peut être « radicalement antilibéral » parce que la République est fille du libéralisme.

      Un des problèmes du débat politique aujourd’hui, c’est qu’il n’y a plus de doctrines clairement définies qui pourraient s’affronter dans l’espace public. Au lieu de ça, on a des personnalités qui « picorent » à droite et à gauche, prenant une idée à droite, une idée à gauche, une idée devant, une idée derrière selon ce qui leur plaît ou leur déplaît à un moment donné pour se fabriquer une forme de « doctrine » toute personnelle. Et cela sans le moindre contrôle de cohérence, de logique ou d’enchaînement entre les différentes idées. De la même manière qu’on voit naître l’idée d’une « religion personnelle », fabriquée en prenant ce qui nous plait dans telle ou telle croyance et en touillant le tout, on arrive à des pseudo-doctrines politiques faites de bric et de broc et qui ne servent qu’à se faire plaisir.

      Le « souverainisme » est un peu victime de ce problème. A côté de figures comme Chevènement, Seguin ou Guaino, qui sont arrimés à une doctrine solide et cohérente, on trouve des électrons libres capables de conjuguer des idées républicaines avec d’autres qui le sont moins…

      [J’ai encore été frappé hier par cette orientation philosophique. Nous avons accueilli Perico Legasse qui nous a servis un discours "Petite France" assez incroyable, ainsi on a pu entendre que "la France a gagné toutes les guerres avant 1870, grâce à son agriculture, elle perd en 1870, quand débute l’industrialisation", avant qu’il nous explique que l’identité française résidait tout entier dans la ruralité et l’agriculture, et cela à de nombreuses reprises.]

      Maréchal, nous voilà… comme vous voyez, la « petite France » qui en son temps a « fait » Pétain ou Queuille est bien vivante. Et voilà pourquoi il faut, à mon sens, appliquer une règle simple : ce n’est pas parce que quelqu’un est contre les mêmes choses que moi qu’il est politiquement d’accord avec moi. Il y a des gens qui sont « antilibéraux » ou « anticapitalistes » parce qu’ils veulent dépasser le libéralisme et le capitalisme, et ceux qui sont « antilibéraux » ou « anticapitalistes » parce qu’ils veulent nous ramener à l’époque féodale. On peut s’opposer au présent au nom de l’avenir, mais on peut aussi s’y opposer en songeant à un retour au passé. On peut être « souverainiste » et progressiste, et on peut être « souverainiste » et réactionnaire. C’est pourquoi je n’aime pas ce mot « souverainiste ». Il ne veut politiquement rien dire. Il désigne un groupe de gens qui rejettent les mêmes choses, mais pas pour les mêmes raisons.

      [Cela n’a soulevé que des approbations… Cette situation m’a fait penser à ce que vous avez écrit sur les "diables de confort" et l’aliénation. Mes camarades se réclament pour la plupart antiprogressistes car le PS ou EELV se proclament progressistes. De même, le simple fait qu’un raisonnement soit considéré comme "libéral" est suffisant pour jeter l’anathème dessus. Je vous dis tout cela, car je me demande si les "républicains des deux rives" ne tournent pas à la réaction, par un mécanisme d’aliénation similaire à celui qui touche la gauche face au FN.]

      Gardons aux mots leur sens. La République, c’est le libre débat et le libre examen. Les gens qui « jettent l’anathème » ne sont pas, presque par définition, des républicains. Etre républicain, c’est rejeter tous les fanatismes. Volontairement, je ne dis pas « être tolérant », parce que la Republique est quelquefois obligée d’être intolérante. Mais lorsqu’elle est intolérante, elle l’est au nom d’une nécessité politique, et non au nom d’une « vérité » transcendante dont elle serait la propriétaire. Les gens que vous décrivez ne sont pas des « républicains ». Ce sont des gens qui n’aiment pas la société actuelle, tout en étant aliénés à elle puisqu’ils sont incapables de concevoir une politique autre qu’un rejet de tout. Comme notre société est libérale, il faut être antilibéral. Comme notre société est industrielle, alors il faut afficher une nostalgie d’une « société paysanne ». Comme notre société est europhile, il faut être europhobe. Et ainsi de suite.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      ["On peut être « souverainiste » et progressiste, et on peut être « souverainiste » et réactionnaire."]

      Dans la mesure où la pleine souveraineté, s’agissant de la France, est un état qui appartient au passé, il me paraît difficile d’être autre chose qu’un "souverainiste réactionnaire". N’est-ce pas d’ailleurs ce que nous répètent sans arrêt les européistes : vous autres, souverainistes, vous êtes des "nostalgiques", des "archaïques moisis" etc. ? Je dirais que si un "souverainiste" peut également, par ailleurs, être un "progressiste", en tant que "souverainiste", il est, par là même, nécessairement un "réactionnaire".

      ["C’est pourquoi je n’aime pas ce mot « souverainiste ». Il ne veut politiquement rien dire."]

      Je ne comprends pas très bien. Politiquement, il signifie le souhait que la France récupère sa souveraineté, non ?

      ["Il désigne un groupe de gens qui rejettent les mêmes choses, mais pas pour les mêmes raisons."]

      Et alors ? Le terme "européiste" désigne aussi, me semble-t-il, un groupe de gens dont il est difficile de dire, de Mélenchon à Juppé en passant par Hollande et Cohn-Bendit, qu’ils approuvent l’Europe pour les mêmes raisons. A moins que vous n’aimiez pas non plus ce terme "européiste" ?

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Dans la mesure où la pleine souveraineté, s’agissant de la France, est un état qui appartient au passé, il me paraît difficile d’être autre chose qu’un "souverainiste réactionnaire".]

      Bien sur que non. J’ai pris un café hier, et cela n’implique pas que si je prenais un café demain cela constituerait un retour au passé. Un « souverainiste réactionnaire » est quelqu’un qui ne conçoit le rétablissement de la « pleine souveraineté » que par un retour en arrière. Ce n’est pas mon cas. Moi, je conçois parfaitement que demain on puisse construire une société en France qui sans être celle des années 1950 rétablisse la souveraineté politique la plus pleine…

      [Je ne comprends pas très bien. Politiquement, il signifie le souhait que la France récupère sa souveraineté, non ?]

      Mais « récupérer sa souveraineté » ne constitue pas, en soi, une politique. On peut « récupérer la souveraineté » en revenant à la marine à voile et la lampe à huile, et on peut « récupérer la souveraineté » pour développer une industrie moderne. Appeler les uns et les autres « souverainistes » n’éclaircit pas vraiment le débat.

      ["Il désigne un groupe de gens qui rejettent les mêmes choses, mais pas pour les mêmes raisons."][Et alors ? Le terme "européiste" désigne aussi, me semble-t-il, un groupe de gens dont il est difficile de dire, de Mélenchon à Juppé en passant par Hollande et Cohn-Bendit, qu’ils approuvent l’Europe pour les mêmes raisons.]

      Vous croyez ça ? je pense au contraire que, de Mélenchon à Juppé, de Hollande à Cohn-Bendit, les « raisons » sont assez semblables, même si elles ne sont pas exprimées dans les mêmes termes. Il y a des européens sincères, ancrés dans une véritable conviction que l’Europe doit devenir une nation fédérale qui dépassera les nations existantes – c’est le cas par exemple de Bourlanges – et ces gens-là méritent d’être appelles « européens ». Mais pas « européistes » ou « eurolâtres », adjectifs qui désignent bien ceux qui sans avoir de véritable projet européen reprennent la rhétorique eurolâtre pour des basses raisons carriéristes.

    • Bovard dit :

      A propos des séfarades de Tunisie,André Chouraki écrit dans son ‘histoire des juifs en Afrique du Nord’:
      ‘Comme en Algérie,les juifs de Tunisie,appuieront l’expansionnisme européen qui avait tout intérêt à promouvoir cette minorité,à lui ouvrir toutes grandes les portes des écoles et des emplois.’Toutefois les juifs tunisiens ne recevront pas automatiquement lea nationalité française comme les juifs algériens,en 1870.mais nombre d’entre eux pourront néanmoins l’obtenir à titre individuel.Bien intégré en apparences dans la société msulmane,ils devaient souffrir de diverses discriminations et porter des vétements sombres au moins jusqu’au ‘pacte fondamental’,imposé au Bey par la France en 1857.Certains musulmans,chrétiens et juifs fortunés obtinrent des ‘patentes de protection’,dans tout l’empire ottoman.Ces patentes de protection leur permettait notamment de bénéficier des juridictions consulaires plutôt que des tribunaux musulmans ou israélites(cf:A;Chouraqui).

  8. v2s dit :

    [L’exemple le plus emblématique est certainement celui du « Che » Guevara, jeune médecin argentin allé faire la guérilla à Cuba.]

    Viva la Revolución !

    Dans l’actualité, avant-hier, 41 touristes ont été grièvement blessés dans un accident d’autocar à Cuba.
    Pour sept d’entre eux, le pronostic vital est engagé.
    Rien de drôle !
    Sauf qu’il s’agit de 41 retraités français revenant d’une visite au mausolée Che Guevara.
    Si Che Guevara avait pu imaginer qu’il finirait en parc d’attractions pour retraités européens …
    Oui, je sais, c’est très mal de se moquer des morts.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Viva la Revolución !]

      « Celui qui a 20 ans n’est pas révolutionnaire n’a pas de cœur. Celui qui à 40 ans est encore révolutionnaire n’a pas de tête » (GB Shaw).

      [Sauf qu’il s’agit de 41 retraités français revenant d’une visite au mausolée Che Guevara. Si Che Guevara avait pu imaginer qu’il finirait en parc d’attractions pour retraités européens …]

      Ca lui aurait fait probablement le même effet qu’à Jésus d’imaginer le cirque de Lourdes…

      [Oui, je sais, c’est très mal de se moquer des morts.]

      « Ne fais pas aux autres ce que tu n’aimerais pas qu’on te fasse » (Rabbi Hillel)

    • Bovard dit :

      Mea culpa.
      Ma plume, cher ‘Descartes’,a ‘confusionné’ entre Arabes israéliens,territoires occupés,Cisjordaniens,Gazaouis,Colons,Druzes du Golan etc…
      Alors que mes acquis m’auraient permis d’éviter ces erreurs( pour moi,élémentaires,cette région étant en crise depuis si longtemps).Je regrette même si cette confusion est fréquente..
      La précipitation ne permet pas de construire un texte solide..Désolé,et merci pour votre réponse attentionné mais aussi contraignante pour vous.

      Mon propos suivant ,dans ce post, ira au fond de la problématique exposée dans votre article,telle que je la ressens.
      Vous le savez,je suis conscient que le tissage du lien social,par des fictions nécessaires est une des voies à explorer pour sortir de l’anomie où se trouvent ces zadistes, jihadistes et nombre de nos concitoyens.

      La question coloniale est le levier qui nous permettra d"élever la qualité de notre roman national.
      Vous le savez ,j’ai une conscience claire des exactions abominables commises au nom des rois de France,des empires français et de nos républiques.
      Les aspects ultraviolents du colonialisme sont très grands et occultés dans notre société braquée contre les ‘les blacks et beurs’ en fait essentiellement des mususlmans.
      Cette conscience ,chez moi et quelques uns est proportionnelle à l’ignorance trés répandue dans notre ‘Noosphère’ française sur ces questions.
      Prenons la question hystérisée des Harkis.
      Pour moi,il faut les appeler ‘les tirailleurs’ en français,c’est essentiel.
      Souvent ces tirailleurs,combattaient,avec nos ancêtres comme le mien,engagés pour cause de misères.
      Tirailleurs est un mot français qui signifie,tir hors du rang,lié à l’histoire militaire française multi-séculaire(depuis le 16ième siècle).
      En France,Tirailleur, est rattaché à l’état français depuis des siècles.
      C’est plus interprétatif et compréhensible alors qu’Harkis signifie ‘traitres’ en Arabe.
      C’est péjoratif,pauvres en significations et ça renvoie à la culture musulmane.
      Si lors de la guerre 14-18,ces Tirailleurs,ont participé au conflit dans une proportion de 10%,à la seconde guerre,30 ans plus tard,les Tirailleurs furent la parie essentielle des troupes françaises dans les forces alliées.
      En effet,à 90% des hommes de troupe,l’armée d’Afrique de ‘Monte cassino’ (dite ‘l’armée des bourriquots’),était constituée de tirailleurs,Goumiers etc…
      Ce n’est pas un hasard.
      L’école militaire française de Brazza, Mangin suivis par Leclerc,Giraud,De gaulle et d’autres savaient que ces populations musulmanes constituaient un atout décisif pour la France.
      J’effectue avec d’autres un travail mémoriel sur ces militaires musulmans méconnus qui ont ‘sauvé’ la république.
      Là est la solution,où se rejoignent les fils interprétatifs dont vous attendez la mise en place, au risque de choquer les F-haines à tendances OAS.
      Ce n’est pas en attisant un esprit de revanche ou de rejet (comme les classes moyennes savent trop bien le faire..) que nous amènerons les candidats jihadistes dans le giron de la république.
      C’est une affaire qui prendra tout le 21ième siècle et peut être plus.
      Pour les jihadistes qui sont passés aux actes sanguinaires,la justice devra passer,cela occupera certainement l’actualité dans les mois à venir..
      Maintenant les zadistes:pour eux comme pour l’ensemble des jeunes,il faut organiser une étape militaro-rituello-citoyenne,pour les deux sexes.
      Cette proposition ‘à affiner ) semble avoir eu un écho complaisant sur ce blog,compte tenu des nuances déjà exprimées par Descartes et qui sont essentielles..

      Bon,maintenant,amusons nous un peu.
      Et si nous demandions à Frère Cohn-Bendit de nous écrire des évangiles soixanthuitardo-écologiques?
      La nouvelle religion du ‘sauveplanétisme’ pourrait aussi s’organiser en lithurgies,diverses,exemples:
      -brûler des Macdo à chaque Thanksgiving.
      -faire des processions à Sivens,chaque 1er Novembre.
      -Organiser un rassemblement oecuménique,zadistes et policiers ensemble tous les 15Août au larzac.
      Et pour le sacre mérité de’ frère cohn-Bendit’, en Pape Daniel 1ier,rassembler un conclave d’Europe Ecologie à Bruxelles ,sous la sainte présidence de Junker,apôtre confirmé du développement durable..comme par hasard pour les grands capitaux privés!!…:-)

    • Bovard dit :

      Pour prolonger mon précédent post,voici une illustration de ce que les Jihadistes tunisiens proclament après l’égorgement d’un soldat ce Week end du 01/12/2014.
      Les lecteurs du Blog Descartes,mesureront l’ampleur de travail à effectuer avec les Jihadistes lorsqu’ils reviendront en France.
      Dans quelles conditions,selon quelle repentance ou traitement ,dans quel cadre ?
      Cette revendication est publièe sur le site:tunisie secret’.
      Donc l’authenticité n’est pas garantie mais le fond fanatique des Jihadistes égorgeurs est nettement exprimée.C’est le problème auquel nous serons confronté pour des centaines de Daechistes égorgeurs lorsqu’ils reviendront.
      Le communiqué de Daech-Tunisie:
      « Nous félicitons les nôtres d’abord en Tunisie, puis en Afrique et à leur tête les djihadistes en Orient et en Occident d’avoir franchi une seconde étape dans le djihad en cette Tunisie aliénée, étape qui fera l’effet du tonnerre dans les cœurs des mécréants et des apostats. Nouns vous disons que vos frères, les soldats de Dieu dans le gouvernorat du Kef ont rétabli une vieille tradition, abandonnée depuis des siècles dans cette Tunisie aliénée, à savoir la tradition de l’égorgement. La tête d’un soldat du diable qui s’appelle Hasan Soltani a été effectivement décapitée et nous diffuserons bientôt, si Dieu le veut, un document de cette opération bénie. Cette action vient en réponse au châtiment subi par les pures, à leur tête la sœur Fatma Zouegui, cette femme qui en vaut des milliers d’hommes. Quant à vous les tyrans de Tunisie, nous sommes venus pour vous avec les égorgements et les explosifs et nous vous infligerons ce que vous avez promis aux djihadistes du califat. Nous nous sommes jurésde vous viser, de vous démembrer et de vous décapiter. Ce sera la priorité de nos priorités. On vous fera regretter ce que vous avez fait contre les combattants des montagnes et nous vous réservons dans les jours qui viennent des surprises encore plus effrayantes. Quant à vous, frères en Tawhid (unicité), jusqu’à quand allez-vous vous attacher à la vie ici-bas ? La mort est une, alors autant la sacrifier au nom d’Allah. Vous devez donc éliminer les ennemis de la religion et vous avez pour cela les recommandations de cheikh Abou-Bakr al-Baghdadi, le meilleur testament ».

    • Descartes dit :

      @Bovard

      [La question coloniale est le levier qui nous permettra d’élever la qualité de notre roman national. Vous le savez, j’ai une conscience claire des exactions abominables commises au nom des rois de France, des empires français et de nos républiques.]

      On commence mal. Le « roman national » n’est pas là pour satisfaire telle ou telle revendication « victimiste ». Il est là pour offrir aux citoyens un récit auquel ils puissent s’identifier. C’est, d’une certaine manière, un récit exemplaire. Alors, si vous considérez que la question coloniale est une sorte de vitrine des « exactions abominables » de nos rois et nos républiques, je ne vois pas comment le sujet pourrait « élever notre roman national »…

      [Les aspects ultraviolents du colonialisme sont très grands et occultés dans notre société braquée contre les ‘les blacks et beurs’ en fait essentiellement des musulmans.]

      Arrêtez… ou voyez-vous notre société « braquée contre les blacks et beurs » ? Regardez un panneau publicitaire, regardez une émission de télévision, écoutez les discours de nos politiques. Partout, on n’entend que le discours « diversitaire ». Il est impensable aujourd’hui de présenter une liste aux élections qui n’ait pas son « quota » de blacks et beurs. Il est impensable de faire une campagne publicitaire qui n’associe pas, parmi les figures de référence, quelques représentants des « minorités visibles ». Pas un film, une série télévisée qui n’ait elle aussi son petit quota. Et ne parlons pas d’un nouveau genre cinématographique, le film « diversitaire », qui bénéficie d’un portage sans faille par nos médias dominants. Alors, faut arrêter avec la chanson de la « société braquée contre les blacks et beurs ».

      Par ailleurs, je vous fais remarquer que les « blacks » français ne sont pas « essentiellement des musulmans ». La plupart d’entre eux sont au contraire chrétiens – catholiques ou évangéliques. Là aussi, faut arrêter les fantasmes.

      [Prenons la question hystérisée des Harkis. Pour moi, il faut les appeler ‘les tirailleurs’ en français, c’est essentiel.]

      Je ne pense pas que changer les noms des choses ait une telle importance. Reconnaître le rôle des harkis comme auxiliaires de l’armée française me paraît plus important que leur changer le nom. Je ne suis pas un partisan de la repentance, et je ne crois pas que l’Etat doive demander « pardon » à quiconque au nom des générations passées. Mais cela n’empêche pas de faire entrer les harkis dans l’histoire, et donc de reconnaître la monstrueuse injustice qui leur a été faite en 1962.

      [C’est plus interprétatif et compréhensible alors qu’Harkis signifie ‘traitres’ en Arabe.]

      En arabe, « Harka » signifie, si j’en crois le Larousse, « milice levée par une autorité politique ou religieuse ». Et un « harki » est le membre d’une « harka ». « Harki » veut donc dire « milicien », et non « traitre ». Il ne faut pas dire n’importe quoi.

      [Si lors de la guerre 14-18, ces Tirailleurs, ont participé au conflit dans une proportion de 10%,à la seconde guerre,30 ans plus tard, les Tirailleurs furent la parie essentielle des troupes françaises dans les forces alliées.]

      Je crois que vous confondez les « tirailleurs coloniaux », soldats levées dans les colonies pour constituer des unités integrées à l’armée française en tant que troupes régulières, avec les « harkis », qui étaient des milices auxiliaires qui n’ont jamais eu le statut militaire.

      [L’école militaire française de Brazza, Mangin suivis par Leclerc, Giraud, De gaulle et d’autres savaient que ces populations musulmanes constituaient un atout décisif pour la France. J’effectue avec d’autres un travail mémoriel sur ces militaires musulmans méconnus qui ont ‘sauvé’ la république.]

      « Méconnus » ? Vous voulez rire… pour cette commémoration de 1914, pour ne prendre qu’un exemple, on a consacré plus d’espace médiatique aux « militaires musulmans » qu’a n’importe quel autre catégorie religieuse. Quant à « sauver la République »… sans porter atteinte à la mémoire des soldats musulmans morts pour la France, il n’est pas inutile de rappeler que l’immense majorité des morts de 1914-18 étaient catholiques.

      [Là est la solution, où se rejoignent les fils interprétatifs dont vous attendez la mise en place, au risque de choquer les F-haines à tendances OAS.]

      La « solution » à quel problème ?

    • Descartes dit :

      @Bovard

      [Pour prolonger mon précédent post,voici une illustration de ce que les Jihadistes tunisiens proclament après l’égorgement d’un soldat ce Week end du 01/12/2014.]

      Pour cette fois ça passe, mais évitez à l’avenir de reproduire ce genre de texte, assez répugnant. Je ne trouve pas qu’il apporte grande chose au débat.

  9. Albert dit :

    ["Difficile donc de trouver un point commun qui pourrait servir de « cause » efficiente pour expliquer la dérive djihadiste ? Non, pas vraiment. Un « point commun » saute aux yeux : pratiquement tous les candidats au djihad sont jeunes".]

    Incontestable, mais j’ajouterais un deuxième point commun: ils se revendiquent tous de l’Islam (ce qui n’est évidemment pas le cas des ZADistes), qu’ils le soient "d’origine" ou fraichement convertis. Passons sur le zèle des néophytes (quoique…). Il reste la référence religieuse commune (fondée ou dévoyée).
    Il me parait un peu facile d’en faire purement et simplement abstraction. Le débat est tabou et c’est bien ce qui prépare les drames de demain.

    • Descartes dit :

      @ Albert

      [Incontestable, mais j’ajouterais un deuxième point commun: ils se revendiquent tous de l’Islam (ce qui n’est évidemment pas le cas des ZADistes), qu’ils le soient "d’origine" ou fraichement convertis. Passons sur le zèle des néophytes (quoique…). Il reste la référence religieuse commune (fondée ou dévoyée).]

      Mais est-ce autre chose qu’une mode ? Il y a trente ans, les aventuriers qui allaient combattre pour des « causes » en Afrique, en Amérique Latine ou en Indochine le faisaient au nom d’une « religion » pseudo-marxiste. Ce qui pousse aujourd’hui des paisibles citoyens à peine sortis de l’adolescence à tout quitter pour aller en Syrie ou en Irak – ou a organiser des attentats dans leur propre pays – est-il si différent de ce qui poussait d’autres jeunes s à tout quitter pour combattre à Cuba, au Congo, au Nicaragua, en Bolivie ou de s’engager dans Action Directe ou les Brigades Rouges ? Je n’en suis pas persuadé. Il faut se demander si la « référence à l’Islam » est déterminante, ou si elle ne joue qu’une fonction contingente comme le pseudo-marxisme guévariste ou maoïste naguère.

      [Il me parait un peu facile d’en faire purement et simplement abstraction. Le débat est tabou et c’est bien ce qui prépare les drames de demain.]

      Aucun débat n’est « tabou ». Mais poser une question n’est pas y répondre. Que ce genre d’engagements ait besoin du support d’une idéologie transcendante, cela me paraît assez clair. Mais l’idéologie est construite en fonction de la violence qu’on veut justifier, et non l’inverse. En d’autres termes, ce n’est pas l’Islam qui provoque la fascination pour la violence, mais c’est la fascination pour la violence qui pousse à chercher une idéologie qui la justifie, et aujourd’hui certains la trouvent dans l’islam alors qu’hier ils la trouvaient dans le pseudo-marxisme.

      C’est pourquoi je fais le parallèle entre « la ZAD et le Jihad ». Dans les deux cas, à mon avis, ce n’est pas que la fin justifie les moyens, mais que les moyens justifient la fin. On se construit une idéologie « dogmatique » – Allah ou la Mère Nature, peu importe – qui justifie par avance n’importe quoi. Et met donc l’individu dans une totale liberté de faire ce qu’il veut. C’est le triomphe du principe de plaisir sur le principe de réalité. Et ce n’est pas par hasard si le « principe de réalité » a été autant critiqué dans des documents de la « gauche radicale »…

    • Albert dit :

      ["Aucun débat n’est « tabou ». Mais poser une question n’est pas y répondre. Que ce genre d’engagements ait besoin du support d’une idéologie transcendante, cela me paraît assez clair. Mais l’idéologie est construite en fonction de la violence qu’on veut justifier, et non l’inverse. En d’autres termes, ce n’est pas l’Islam qui provoque la fascination pour la violence, mais c’est la fascination pour la violence qui pousse à chercher une idéologie qui la justifie, et aujourd’hui certains la trouvent dans l’islam alors qu’hier ils la trouvaient dans le pseudo-marxisme."]

      Je reconnais tout l’intérêt de votre paragraphe repris ci-dessus.

      Je voudrais seulement éclaircir un point: vous dites "aucun débat n’est tabou". Vrai sur votre blog, mais assez faux sur la place publique, où toute tentative de débat vous renvoit illico dans la case infernale des "islamophobe, raciste, fsciste…" etc..Et c’est cela que je déplorais.

    • bovard dit :

      Entièrement d’accord avec cette phrase de Descartes:[En d’autres termes, ce n’est pas l’Islam qui provoque la fascination pour la violence, mais c’est la fascination pour la violence qui pousse à chercher une idéologie qui la justifie, et aujourd’hui certains la trouvent dans l’islam alors qu’hier ils la trouvaient dans le pseudo-marxisme.]
      Pour illustrer,ce propos,Pascal Bruckner,raconte une anecdote vécue vers1970d.C’est dans sa bio intéressante :’un bon fils’ 04/2014 grasset en bas de la page135[..je me souviens de Michel Rocard nous enseignant les rudiments de la guérilla urbaine sur une plage de Corse.]
      Dans ce livre,le Moloch Nazi avec ses ravages massifs dans toute l’Europe est très présent.
      C’est moins amusant que Rocard,prof de guérilla, mais c’est plein d’enseignements par rapport aux dérives actuelles des Maïdanistes…

    • Descartes dit :

      @ Bovard

      [Pour illustrer,ce propos,Pascal Bruckner,raconte une anecdote vécue vers1970d.C’est dans sa bio intéressante :’un bon fils’ 04/2014 grasset en bas de la page135 « ..je me souviens de Michel Rocard nous enseignant les rudiments de la guérilla urbaine sur une plage de Corse. »]

      Très bonne illustration en effet. Elle montre bien qu’au delà des formes différentes qu’elle peut prendre, la fascination pour la violence politique d’une jeunesse à la recherche d’une cause repose sur un mécanisme qui n’a rien de nouveau. Le jeune Rocard, énarque venant d’une classe moyenne supérieure, se mettait dans la peau d’un guérilléro. Aujourd’hui peut-être lancerait-il des cocktails Molotov à Notre-Dame des Landes où prendrait-il l’avion pour la Syrie.

      Il y a cependant une évolution qu’il faut signaler : la génération de Rocard était beaucoup plus solide que l’actuelle à l’heure de faire la distinction entre la fiction et le réel, et donc des freins beaucoup plus puissants à l’heure du passage à l’acte. On s’entraînait peut être à la guérilla urbaine sur les plages de Corse, mais au moment de passer à l’acte, de s’engager dans une véritable guérilla urbaine, rares ont été ceux qui ont franchi le pas. L’histoire de l’autodissolution de la « gauche prolétarienne » après la mort de Pierre Overney est de ce point de vue révélatrice. Je ne suis pas sur que dans notre société où les frontières entre le réel et la fiction s’estompent, ces freins existent toujours.

    • Albert dit :

      @ Descartes

      Une illustration criante (et désespérante) de votre propos quant à l’origine réelle de la haine et de la violence, l’idéologie étant un habillage se voulant justificatif:
      Je regardais hier soir l’émission de Taddéi réunissant divers "sachants" autour de la loi Macron ou de l’attitude dominante de Mme Merkel: économistes, journalistes, etc…et F.Philippot (ce dernier pour combler un déficit de temps du FN dancette émission pour 2014).
      Chacun fit valoir son point de vue, très correctement, sauf l’avocat communiste et le chroniqueur alter-mondialiste (j’ai oublié leurs noms) qui n’ont pu s’empêcher de laisser, N PLUS, sortir (même brièvement) leur HAINE pour les "fascistes" comme Philippot et plus largement tous les Français qui mettent en cause l’euro ou l’immigration(que personne n’avait évoquée…).

  10. morel dit :

    @ Descartes

    Un point de vue qui me paraît intéressant sur le sujet :

    «Indirectement, le départ de ces jeunes questionne le monde que nous avons à leur offrir, commente le psychiatre Jean-Claude Métraux, spécialiste des adolescents. Nous vivons dans des sociétés à la fois très atomisées et extrêmement focalisées sur le présent. Le rapport au passé a été chamboulé par une dévalorisation progressive de la notion d’héritage, et en même temps, nous peinons à formuler des perspectives d’avenir. Dans ces conditions, la difficulté de développer un monde de sens partagé est aujourd’hui beaucoup plus répandue qu’il y a 30 ans. Et pas uniquement chez les adolescents. Pour cette raison, l’idée d’adhérer à un collectif, aussi radical soit-il, apparaît tout à fait désirable.»

    @ Bovard

    « 30 ans plus tard,les Tirailleurs furent la parie essentielle des troupes françaises dans les forces alliées.
    En effet,à 90% des hommes de troupe,l’armée d’Afrique de ‘Monte cassino’ (dite ‘l’armée des bourriquots’),était constituée de tirailleurs,Goumiers etc…
    Ce n’est pas un hasard. »

    Permettez que je vous mette en garde contre une vue par trop « ethnique » de l’histoire. Savez-vous, par exemple, que le premier groupe de résistants dans Algérie pétainiste était composé très majoritairement de juifs (José Aboulker fait compagnon de la Libération) ?
    Ils ont été un atout précieux pour le débarquement allié en Afrique du Nord et ne revendiquaient que le titre de patriote.
    La composition de la 1ère armée de Libération était majoritairement « indigène » (terme que je n’aime pas mais utilise pour la compréhension). Pourquoi ? Difficile pour les métropolitains (estimés à 8% cependant) de la rejoindre depuis la France occupée. La population « pied noirs » elle, a fait l’objet d’une conscription généralisée dès la libération de l’Afrique du Nord en 43, appelant jusqu’aux classes 45. L’armée ne deviendra plus métropolitaine qu’après le débarquement de Provence.
    Quant à la forte proportion « d’indigènes » dans les formations de tirailleurs, il découle de la même logique qu’en 1914. : les paysans jugés moins éduqués et plus résistants formeront le gros de l’infanterie qui paiera le plus lourd tribu à la guerre, les armes plus techniques comme l’artillerie ou à plus forte raison, l’aviation aux plus instruits.

    Le drame pour les combattants « indigènes », c’est qu’ils n’ont guère été payés de retour par l’égalité des droits.
    L’hommage doit être rendu à tous.

  11. @Descartes
    "On se serait attendu donc à ce que le « don de soi » des fous de l’Islam soit apprécié humainement à sa juste valeur par les derniers tenants du « romantisme révolutionnaire ». Et bien, non. La condamnation de nos grands prêtres intellectuels est unanime et sans réserves. Ce qui est paradoxal, dans un milieu qui porte aux nues Michel Foucault. Après tout celui-ci chanta les louanges à la fin des années 1978 de l’ayatollah Khomeini et de sa « révolution islamique »."

    Les plus zélés à nous bassiner sur le thème des banlieues islamisées sont surtout Finkielkraut, Zemmour, etc. Je doute qu’il compose le milieu qui encense Foucault. Vous pensez à quelqu’un à particulier ?

    Par ailleurs, s’il est exact que Foucault a soutenu la révolution iranienne, il faut rappeler qu’elle avait commencé avec une forte composante de gauche, que Khomeini a manipulé puis réduite au silence une fois le pouvoir pris. Je ne dis pas ça parce que j’aurai une sympathie particulière pour les idées de Foucault, simplement il ne s’est pas réveillé pro-chiite un bon matin…

    • Descartes dit :

      @Johnathan R. Razorback

      ["On se serait attendu donc à ce que le « don de soi » des fous de l’Islam soit apprécié humainement à sa juste valeur par les derniers tenants du « romantisme révolutionnaire ». Et bien, non. La condamnation de nos grands prêtres intellectuels est unanime et sans réserves. Ce qui est paradoxal, dans un milieu qui porte aux nues Michel Foucault. Après tout celui-ci chanta les louanges à la fin des années 1978 de l’ayatollah Khomeini et de sa « révolution islamique »."][Les plus zélés à nous bassiner sur le thème des banlieues islamisées sont surtout Finkielkraut, Zemmour, etc. Je doute qu’il compose le milieu qui encense Foucault. Vous pensez à quelqu’un à particulier ?]

      Je pense que vous faites une confusion entre la question des « banlieues islamisées » et celle des français qui partent faire le Djihad en Syrie ou en Irak, dont une bonne moitié ne vient d’ailleurs pas des banlieues en question. Il ne faut pas tout confondre. Finkielkraut s’inquiète peut-être de l’islamisation des banlieues, mais je ne connais aucune prise de position de sa part quant à la question des départs de citoyens français pour s’enrôler dans les mouvements islamistes à l’étranger.

      Quant à la condamnation de l’enrôlement en question, je ne pense à personne en particulier. Pendant des semaines on a entendu toutes sortes de personnalités politiques ou intellectuelles commenter le sujet. Pas une seule n’a tenté de défendre l’engagement de ces jeunes, ni même de l’excuser. Pas même ceux qui en général sont sensibles à un certain romantisme révolutionnaire, comme Besancenot ou Mélenchon.

      [Par ailleurs, s’il est exact que Foucault a soutenu la révolution iranienne, il faut rappeler qu’elle avait commencé avec une forte composante de gauche, que Khomeini a manipulé puis réduite au silence une fois le pouvoir pris.]

      Soyons précis : Foucault n’a pas soutenu « la révolution iranienne » en général. Il a soutenu l’Ayatollah en particulier, l’appelant « le saint homme exilé à Paris » et écrivant à propos de lui qu’il « rappelait quelque chose que l’Occident avait oublié depuis la Renaissance et les grandes crises de la chrétienté, c’est-à-dire, la possibilité d’une spiritualité politique.. ». C’est cette « spiritualité » qui a séduit Foucault, et non pas une « révolution iranienne avec une forte composante de gauche ».

    • Bovard dit :

      @morel
      Attention de ne pas prêter le flanc aux accusations ‘d’inexactitudes.’
      Natacha Polony a vu son excellent livre ‘ce pays qu’on abat’,descendu par A.Caron,puis par J.Attali à cause des quelques inexactitudes contenues dans ce livre.La forme peut nuire au fond.
      Or,ni vous ni moi ni personne,sommes à l’abri des inexactitudes.
      Voilà pourquoi,cette question cruciale du colonialisme français pour le roman national,(souvent évoqué sur le blog Descartes),ne peut être laissé aux personnes focalisées,partiales donc partielles, car ils peuvent avoir trop de lacunes.
      De tendances guesdistes, jauressienne ou communistes,d’autres travaux sur le colonialisme français,me semblent utiles pour une publication complémentaire à d’autres sur cet excellent blog Descartes.
      La condition minimale,vérifiée ici,est une certaine rigueur intellectuelle.voilà pour la méthode,maintenant les éléments :
      Je cite Paul Vigné (cf:bio sur Wikipédia):’La terreur en Afrique du nord’:Qui donc sait que,sur,les 80000 diables d’Afrique du Nord tués en 14/18,les 2/3,au moins représentés par la presse nationaliste comme des volontaires enthousiastes volant à la frontière dès le premier appel de la Patrie menacée,furent arrachés de force à leurs tentes,à leurs gourbis,à leur oasis,par des administrateurs et des contrôleurs civils implacables…’cf:Eric Deroo;Livre noir du colonialisme.
      Selon Ganiage,300000 soldats maghrébins auraient été mobilisés et 180000 transportés dans les usines françaies.Selon la ‘Tunisie martyre’,ce pays aurait fourni 65000 combattants-dont 45000 seront tués,ainsi que 30000 ouvriers.’
      Ces éléments ne concernent que 14/18.
      Pour 39/45 la part des tirailleurs comparés à l’effort(relatif) de l’armée française hexagonale fut au moins aussi important …

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [La condition minimale, vérifiée ici, est une certaine rigueur intellectuelle. voilà pour la méthode, maintenant les éléments : Je cite Paul Vigné (cf:bio sur Wikipédia): ‘La terreur en Afrique du nord’:Qui donc sait que, sur, les 80000 diables d’Afrique du Nord tués en 14/18, les 2/3, au moins représentés par la presse nationaliste comme des volontaires enthousiastes volant à la frontière dès le premier appel de la Patrie menacée, furent arrachés de force à leurs tentes, à leurs gourbis, à leur oasis, par des administrateurs et des contrôleurs civils implacables…’cf:Eric Deroo; Livre noir du colonialisme.]

      Justement, si on veut faire preuve de « rigueur intellectuelle », il faut séparer les ouvrages qui relèvent de la recherche historique et ceux qui assument une position militante. « tout est bon à la guerre et à l’amour », disent nos cousins anglais, et c’est vrai : lorsqu’on assume une position militante, on a une certaine tendance à sélectionner les faits ou à les tordre pour les besoins de la cause. Déjà, un livre dont le titre commence par « le livre noir de… » est éminemment suspect.

      Le texte de Vigné d’Octon est, de l’évidence même, un texte militant. L’auteur n’est pas historien – il est médecin et homme politique –, il n’a pas fait de recherche poussée. Lorsqu’il dit que « les deux tiers au moins » des « 80000 diables d’Afrique du Nord tués en 14/18 » ont été « arrachés à leurs tentes etc. » il aurait pu mettre aussi bien les trois quarts, la moitié ou les quatre cinquièmes. Je ne crois pas qu’il ait été fait de statistiques pour savoir combien de combattants venus d’Afrique du Nord ont été volontaires et combien ont été « arrachés ».

      [Selon Ganiage, 300000 soldats maghrébins auraient été mobilisés et 180000 transportés dans les usines française. Selon la ‘Tunisie martyre’, ce pays aurait fourni 65000 combattants-dont 45000 seront tués, ainsi que 30000 ouvriers.’]

      Les écarts vont donc selon les auteurs de 1 à 5. Cela montre à quel point les chiffres sont manipulés en fonction des objectifs idéologiques de chacun.

  12. morel dit :

    Toutes mes excuses pour ce "tribu" auquel il convient de substituer tribut.

    • bovard dit :

      Bonnes fêtes de fin d’année,cher Descartes.
      Cependant je souhaite vous exprimer des idées assez sombres qui m’assaillent depuis quelques mois.En effet exilé en RP,près de la célèbre cité des indes à Sartrouville,je suis abonné à la dépêche du midi car mes enfants sont étudiants à Toulouse.J’y avais croisé,il y a 3 ans des niqabées et autres jeunes hommes en uniformes de Talibans mais depuis l’affaire Merah,les dizaines de mercenaires français de Daech et des – morts de Lunel,je ne rigole plus.
      D’autant que ce sont par dizaines que les jeunes fêtards de Toulouse sont poignardées,noyés dans la garonne,le tout étant expliqué par leur état d’ébriété.Sauf que ce sont des assassinats,correspondants à des rites d’initiation des bandes islamisées des cités du grand Mirail de Toulouse.
      Agés de 14 à 19 ans,ces jeunes maraudent à la recherche de jeunes ‘jambons’ comme ils disent alcolisée ou vulnérables,pour les ‘plantés’ afin j’imagine de les punir d’être des mécréants plus vraissemblablement par fascination enfantine pour la violence.Nombreuses sont les familles à Bordeaux ou Toulouse qui pleurent des jeunes hommes,étudiants fêtards,tués inexplicablement.
      Moi même,j’ai été victime d’un guet-apens automobile par un trentenaire déséquilibré qui a exigé que je lui donne 100 euros parceque par ma faute sa voiture avait été éraflée.
      ll me menaçait de coups de couteau si je lui donnais pas les 100 euros que je venais de retirer au distributeur.
      Echaudé par la facilité de ces jeunes a donné des coups de couteau,j’ai donné les 100 euros.Qu’auriez vous fait?
      Je pense avoir fait le bon choix car cela l’a calmé et il est parti depuis je ne l’ai plus croisé.
      Sur le fond,ces jeunes niqabées ou talabanisés ne se montnet -ils pas eux mêmes la tête car ils ont choisi une potentielle violence contre les’ jambons’ ou ‘les yankees’?
      Quels doivent être les comportements des républicains de progrès comme moi?
      Mon angoisse vis à vis de cette montée de la violence,peut elle trouver un éxutoire qui ne soit pas le vote FN?
      Le fantasme de l’éventuelle abominationde la construction d’un monument aux morts pro-jihadistes à Lunel où 5 jeunes originaires de ce village sont morts dans les rangs de Daesh,est il partagé par d’autres? Est ce pur délire de ma part ou vivons nous une période grave?Mon grand père qui était gendarme m’a dit que dans les années trente à cinquante (hors période d’occupation) la violence était plus prégante qu’actuellement,cette information était elle connue par vous ?

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [D’autant que ce sont par dizaines que les jeunes fêtards de Toulouse sont poignardées,noyés dans la Garonne, le tout étant expliqué par leur état d’ébriété. Sauf que ce sont des assassinats, correspondants à des rites d’initiation des bandes islamisées des cités du grand Mirail de Toulouse. Agés de 14 à 19 ans, ces jeunes maraudent à la recherche de jeunes ‘jambons’ comme ils disent alcoolisée ou vulnérables, pour les ‘plantés’ afin j’imagine de les punir d’être des mécréants plus vraisemblablement par fascination enfantine pour la violence. Nombreuses sont les familles à Bordeaux ou Toulouse qui pleurent des jeunes hommes, étudiants fêtards, tués inexplicablement.]

      Avez-vous la moindre référence, la moindre preuve de ce que vous avancez ? Il faut faire attention à ce qu’on dit. Vous vous faites ici l’écho de rumeurs, plus ou moins malveillants, qui n’ont pas le moindre fondement factuel. Ce n’est pas très rationnel, et dans ce cas comme dans d’autres « le sommeil de la raison peut engendrer des monstres ».

      Non, les « bandes islamisées » et les « rituels d’initiation » en question ne sont que des fantasmes qui rappellent les fantaisies romantiques des « mystères de Paris » avec leur description de la pègre comme une sorte de « contre société » avec leurs lois et leurs rites. Ce genre de représentation oublie combien la ritua lisation est un phénomène socialement complexe. Si les « bandes » en question étaient en mesure de définir des « rituels », on n’en serait pas là.

      [Moi même,j’ai été victime d’un guet-apens automobile par un trentenaire déséquilibré qui a exigé que je lui donne 100 euros parce que par ma faute sa voiture avait été éraflée. ll me menaçait de coups de couteau si je lui donnais pas les 100 euros que je venais de retirer au distributeur. Echaudé par la facilité de ces jeunes a donné des coups de couteau,j’ai donné les 100 euros. Qu’auriez vous fait?]

      La même chose. Mais j’avoue que le rapport avec les « rituels » des « bandes islamisées » m’échappe. Les psychopathes ont toujours existé, et les vols avec violence aussi. Rien à voir avec l’islam, d’ailleurs.

      [Quels doivent être les comportements des républicains de progrès comme moi?]

      D’abord, de garder la tête froide, et ne pas se laisser emporter par les fantasmes. Non, il n’y a pas de « bandes islamisées » qui font la chasse aux jeunes hommes « de souche » pour les noyer dans la Garonne au cours d’on ne sait pas très bien quel rituel satanique. Arrêtons de raconter n’importe quoi. Il n’est pas question d’ignorer le problème de la violence, ou celui qui pose l’immigration et notre incapacité à l’assimiler. Mais ces problèmes doivent être attaqués avec la raison pour instrument, sans se laisser distraire par les épouvantails et les croquemitaines qu’inventent certains.

      Etre progressiste, c’est faire confiance à la raison humaine.

      [Le fantasme de l’éventuelle abomination de la construction d’un monument aux morts pro-jihadistes à Lunel où 5 jeunes originaires de ce village sont morts dans les rangs de Daesh, est il partagé par d’autres? Est ce pur délire de ma part ou vivons nous une période grave?]

      Je pense que c’est un pur délire. A ma connaissance, ce monument n’existe que dans votre imagination.

      [Mon grand père qui était gendarme m’a dit que dans les années trente à cinquante (hors période d’occupation) la violence était plus prégnante qu’actuellement,cette information était elle connue par vous ?]

      Oui. La violence de la société française – et des autres sociétés de l’Europe occidentale – a baissé continûment jusqu’aux années 1970-80, notamment par la substitution progressive de « l’Etat-gendarme » des libéraux par « l’Etat-providence ». C’est particulièrement notable pour les conflits du travail : il est aujourd’hui difficile de croire qu’il fut un temps ou l’on faisait tirer à balles réelles contre les grévistes. Mais cela est vrai dans pratiquement tous les domaines.

      Depuis les années 1980, on voit une inversion de cette courbe, avec l’apparition de la violence dans des domaines où elle était pratiquement absente – dans les écoles, par exemple. Je ne sais pas si l’on est déjà revenu au niveau des années 1930 ou 1950, probablement pas.

      Je ne pense pas par contre que ce soit un retour en arrière. Comme j’ai essayé de l’expliquer ici, je pense que la violence aujourd’hui n’a pas les mêmes ressorts ni les mêmes causes qu’en 1930.

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