Quelqu’un se souvient-il encore du débat lors du référendum sur le traité de Maastricht ? Pour la première fois, on avait débattu publiquement du rapport entre la souveraineté nationale et la construction européenne. Et les doctes docteurs de l’Europe nous avaient expliqué qu’il ne s’agissait pas de renoncer à notre souveraineté, mais de la transférer à Bruxelles pour pouvoir la “partager”. Défiant toutes les théories juridiques sérieuses qui font de la souveraineté une catégorie indivisible et inaliénable – et par conséquent impartageable – un discours de la “souveraineté partagée” par le biais de transferts partiels de la souveraineté aux institutions européennes s’est imposé dans l’opinion.
Vingt ans ont passé… et avec eux beaucoup d’illusions ont été balayées. Il semblerait que cette “partage de souveraineté” en fasse partie. Aujourd’hui, plus personne ne parle de “partager” quoi que ce” soit. Quelque soit le journal qu’on lit, on ne trouve qu’une seule expression: “abandon de souveraineté”. Une expression qui à première vue a au moins le mérite de la clarté: il ne s’agit pas de partager, d’exercer conjointement la souveraineté, mais de s’en dépouiller. Ce qui pose une question évidente: si la France abandonne sa souveraineté, c’est au profit de qui ?
Serait-ce de la Commission européenne ? Ce serait tout de même paradoxal. La Commission n’a en effet aucune légitimité propre pour exercer un pouvoir souverain. Elle n’a pas la légitimité démocratique, puisqu’elle n’est pas élue par les citoyens et ne leur doit nullement des comptes. Elle n’a pas la légitimité technocratique, puisque les commissaires ne sont pas recrutés au mérite. Elle n’a même pas la légitimité aristocratique, puisque les fonctions à la commission ne sont pas héréditaires… alors d’où tirerait-elle une légitimité pour s’opposer aux parlements et aux gouvernements nationaux ?
On dit beaucoup de bêtises sur la souveraineté. Et on dit beaucoup de bêtises parce qu’on ne comprend bien de quoi il s’agit. Pour reprendre une définition classique mais toujours aussi éclairante, une entité est souveraine dans la mesure où elle n’est soumise à aucune norme extérieure à elle même. Cela n’implique nullement que l’entité en question puisse faire ce qu’elle veut. Le fait de ne pas pouvoir abolir la gravitation ou s’affranchir d’une tempête n’implique pas qu’un entité cesse d’être souveraine. Et de la même manière, la dette, pour grande qu’elle soit, ne rend pas un pays “moins souverain”. La nature ou le fait des hommes peut réduire l’indépendance d’un pays, ses marges de manoeuvre, sa capacité même à exister. Mais ils ne peuvent pas le priver de la souveraineté.
Il faut se pénétrer de cette idée, qui est celle de l’universalisme des lumières. Une chose est de priver un homme de l’exercice de ses droits, et une autre est de le priver des droits eux mêmes. Et lorsqu’il s’agit des droits de l’homme, un homme ne peut jamais en être privé, puisque ces droits sont consubstantiels à sa condition. Je peux emprisonner un homme, mais je ne peux pas le priver de son “doit à la liberté”. Et de la même manière, lorsque la déclaration de 1789 constate que “la souveraineté réside essentiellement dans la Nation”, elle établit que nulle Nation ne peut en être privée (ou se priver elle même) de la souveraineté. On peut la priver (par la force, par exemple) de l’exercice de sa souveraineté, mais pas de la souveraineté elle même. De la même manière que le voleur qui me prend mon portefeuille ne me prive pas du droit de propriété que j’ai sur lui, mais de la possibilité de l’exercer. Si le voleur est pris, on me rendra mon portefeuille, preuve que mon droit sur lui n’a jamais cessé.
C’est pourquoi il est intéressant de regarder l’affrontement France-Allemagne. Parce que cet affrontement traduit une vision très différente de la souveraineté. Car il y a un élément que peu de commentateurs ont noté: l’Allemagne semble prête à consentir un abandon de souveraineté majeur, c’est à dire, de voir son propre budget fédéral examiné et éventuellement corrigé par la Commission européenne. Car le mécanisme de contrôle que l’Allemagne propose pour les autres fonctionnera aussi envers elle. Et contrairement à ce que beaucoup de gens croient, l’Allemagne n’a pas, elle non plus, été irréprochable à l’heure d’appliquer le “pacte de stabilité” (1). Avouez que c’est étrange: le gouvernement de la première puissance économique de l’Europe est prêt à mettre son pays sous la tutelle d’un organisme étranger.
En fait, l’Allemagne a une tradition politique aristocratique, qui se méfie profondément du peuple. L’interdiction constitutionnelle du référendum, l’existence d’une Cour Constitutionnelle ayant des pouvoirs très étendus en est la meilleure illustration. Confier la surveillance des processus démocratiques à une élite technocratique ne pose donc aucun problème de fond. De toute manière – et de cela l’allemand de la rue en est convaincu – l’Allemagne étant toujours dans le vrai, l’élite qui peuple la Commission européenne et la Cour de justice européenne ne pourront que lui donner raison. Les allemands ont une vision idéalisée de leur pays, et vous les surprendriez beaucoup en leur expliquant que leur pays a pris autant que les autres des libertés avec les traités et notamment avec le pacte de stabilité…
Là ou les allemands sont idéalistes, les français sont réalistes, pour ne pas dire cyniques. Ils se souviennent que, comme disait Robespierre, tout système fondé sur l’idée que le juge est incorruptible est foncièrement mauvais. Ils ne se font guère d’illusions sur la rectitude et la neutralité politique de la Commission ou de la Cour européenne. Et ils restent convaincus que le recours au peuple, avec tous les risques et les limitations qu’il peut avoir, reste la manière la plus légitime de trancher entre les intérêts contradictoires.
C’est parce que les deux pays sont très différents que l’idée d’un “axe franco-allemand” a de plus en plus du plomb dans l’aile. Cela marchait du temps où l’Allemagne était candidate à la réadmission dans l’espèce humaine, et pour ce faire était prête à accepter une Europe “à la française”. Ce n’est plus le cas: en redevenant une puissance, l’Allemagne a renoué avec un comportement de puissance. Et du coup, “l’idéal européen” et autres balivernes ne l’intéressent plus que dans la mesure où ils vont dans le sens de ses intérêts (2). Dire comme le fait Montebourg que la politique de Merkel vise a augmenter la puissance de l’Allemagne n’a rien de scandaleux. C’est même un truisme: Mme Merkel ne ferait pas son boulot si elle ne visait pas cet objectif. Parce que Mme Merkel, comme M. Sarkozy d’ailleurs, ont été élus pour veiller aux intérêts de leur pays, et non pas de “l’Europe”. Pour le dire simplement, l’Allemagne ne défend plus “la construction européenne”, elle défend ses intérêts, et elle a parfaitement raison. A nous de comprendre que ces intérêts ne sont pas les nôtres, et de réfléchir dans les mêmes termes, au lieu de sacrifier notre pays à une vision fédéraliste de l’Europe qui n’a plus aucun sens.
Descartes
(1) Ainsi, par exemple, le 26 novembre 2003 le conseil de l’Union refuse d’appliquer à l’Allemagne les sanctions demandées par la Commission pour non respect de la limite de 3% pour ses déficits publics. Si le contrôle que l’Allemagne réclame aujourd’hui avait existé en novembre 2003, elle aurait eu de sérieux ennuis.
(2) Et il faut le dire, sans avoir peur du terrorisme intellectuel des fédérastes qui agitent le croquemitaine de l’antigermanisme fauteur de guerres. Lorsqu’un politicien allemand de premier plan commence à se réjouir que “l’Europe entière parle allemand” sans qu’à ma connaissance cela soulève des protestations en Allemagne, on a le droit de se poser des questions et d’appeler un chat un chat.
Je n’ai pas encore lu ton libelle (Du”Partage” à “l’abandon”) mais je réponds à ton commentaire sur mon blog, j’irai le lire ultèrieurement.
Commentaire n°7 posté par Descartes aujourd’hui à 12h28
“Si tu veux créer un journal, il va falloir que tu fasses un choix de
départ: s’agit-il d’un journal “ouvert” ou pourront s’exprimer des points de vue divers, ou s’agit-il au contraire d’un journal “fermé”, simple outil de propagande ou seules seront admises les
appels plus ou moins déguisés à voter pour ton candidat ? Il n’est pas inutile de rappeler ici la formule de Beaumarchais: “sans liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur”…
En tout cas, s’il s’agit d’un journal “ouvert”, alors je suis volontaire
pour collaborer. S’il s’agit d’un outil de propagande… non.”
Je te rappele simplement qu’il ne faut pas demander aux autres ce que soi même l’on ne peut tenir, toi même tu modères les commentaires puisque tu le signales sous le bloc servant à les recevoir,
donc ma réponse est la suivante :
Ce
journal sera ouvert, les rédacteurs auront la libre expression dans la limite de la non agression à la raison d’être du journal qui est d’amener la gauche française à la victoire, toute la gauche
française, mais que la gauche française ; à savoir que la sociale démocratie de la rue de Solférino y sera villipendée et attaquée, elle même se reconnaissant dans les valeurs du centre jusqu’au
centre droit, et, ayant abandonné les valeurs de la gauche française ; que les socialistes, les vrais ceux de cœur, et autres gens de gauche y seront reçus à bras ouverts, chaque article sera lui
même ouvert aux commentaires sauf avis contraire de son rédacteur, de même il possédera une rubrique courrier des lecteurs libre mais sans commentaires. L’ensemble du journal sera modéré bien
évidement afin de lui garder une tenue, la totale liberté ayant montré ses propres limites.
Par contre une exigence non négociable est que chaque auteur signe non d’un pseudo mais de son nom réel, et qu’il n’y a qu’un administrateur sur ce journal c’est son rédacteur en chef, dont
j’assumerais la charge du démarrage du journal jusqu’aux élections présidentielles en tout état de cause.
Espérant avoir répondu à tes interrogations, crois à toute mon attention quant à ta décision.
Denis Faict
Je te rappele simplement qu’il ne faut pas demander aux autres ce que soi même l’on ne peut tenir, toi même tu modères les commentaires puisque tu le signales sous le bloc servant à les
recevoir,
Tout à fait. Elementaire précaution pour éviter des commentaires qui pourraient être contraires aux lois en vigueur ou tout simplement des châpelets d’injures. Mais je n’ai jamais – je répète,
jamais – censuré un commentaire sur la base des opinions qu’il exprime. Dès lors qu’un commentaire respecte les lois et les formes normales de politesse et de correction dans un
débat, il est assuré d’être publié.
Le choix que je te demande, je l’ai fait moi même depuis longtemps: ce blog est un blog de débat, et non pas de propagande pour tel ou tel candidat.
Ce journal sera ouvert, les rédacteurs auront la libre expression dans la limite de la non agression à la raison d’être du journal qui est d’amener la gauche française à la victoire, toute la
gauche française, mais que la gauche française ; à savoir que la sociale démocratie de la rue de Solférino y sera villipendée et attaquée (…)
Ton paragraphe répond tout à fait à mon interrogation. Dans ton journal auront droit de s’exprimer les idées qui pour toi vont dans un sens donné, et seront exclues les
expressions qui pour toi vont dans le sens contraire. En toute honneteté, je ne vois pas trop ce qu’un tel journal apporterait de nouveau par rapport aux différents sites de
propagande du Front de Gauche. Pour polir ses arguments, il faut les confronter aux arguments opposés. Et cela n’est possible que si l’on laisse ces arguments s’exprimer. Si vous avez confiance
dans vos idées et votre projet, alors vous ne devriez pas craindre cette confrontation dont vous devriez être sur de sortir gagnant… le fait qu’il soit si difficile de faire naître un journal
qui soit autre chose qu’un tract déguisé montre à quel point le fondement idéologique du FdG est faible.
Par contre une exigence non négociable est que chaque auteur signe non d’un pseudo mais de son nom réel,
Dans ce cas, je crains qu’il ne me soit impossible de contribuer à votre projet. Comme je l’ai déjà expliqué, je n’écrit pas sous pseudo parce que cela me fait plaisir ou parce que j’aurais des
problèmes à assumer mes opinions. Simplement, des contraintes professionnelles contiennent des obligations de réserve, ce qui exclut que mon nom puisse apparaître publiquement. C’est tout. Si
vous n’arrivez pas à comprendre cela, je crains que vous ne priviez votre projet d’un certain nombre de collaborations qui pourraient lui être utiles.
on avait débattu publiquement du rapport entre la souveraineté nationale et la construction européenne……….
C’était aussi, et ce fut la raison de mon vote négatif, une bifurcation pour sortir de la trajectoire du
CNR et rentrer de plein pied dans le néolibéralisme à la mode Thatcher-Reagan (libre échangisme et délocalisations, privatisation des services publics, réduction de la
fiscalité pour les riches, dérégulation du secteur financier….).
20 ans après on constate le fiasco mais personne ne rend hommage, même à titre posthume, à ceux qui
avaient vu clair (Seguin, le PCF, la CGT, Chevènement…), et ceux qui se sont trompés sont toujours aux manettes, ou le seront dans 6 mois, sans avoir tiré les leçons de l’échec
et ils persévèrent dans cette voie mortifère (même Meluche semble timoré à l’heure de faire son aggiornamento).
(même Meluche semble timoré à l’heure de faire son aggiornamento).
Mélenchon a une attitude très ambigue envers le traité de Maastricht (la même ambiguïté qu’on trouve chez
lui envers l’oeuvre de son idole François Mitterrand). D’ailleurs, tu remarqueras qu’il se polarise
totalement sur le traité de Lisbonne mais ne parle jamais de Maastricht…
bonjour
“Mélenchon a une attitude très ambiguë envers le traité de Maastricht (la même ambiguïté qu’on trouve chez lui
envers l’œuvre de son idole François Mitterrand)”
en effet ; et quand il déclare que « prôner la sortie de l’euro relève du maréchalisme »,je me demande jusqu’où va cette ambiguïté ; argumenter
sur l’opportunité de cette décision est une chose,insulter tous les les tenants sans distinction de cette position (exemple le MPEP ) en est une autre . La méthode est répugnante . Melenchon m’a
fait espérer un moment, mais aujourd’hui c’est fini
il existe un proverbe arabe qui
dit : si tu te fais voler une fois, c’est la faute de ton voleur ; si tu te fais voler deux fois, c’est de ta faute ; j’ai été escroqué une fois par Mitterand , mais il n’y aura
pas de deuxième fois avec un idolâtre du grand homme . Et je suis curieux de voir la tête que les électeurs communistes ( ceux qui sont sincères dans leurs convictions, qui y croient encore..)
auront l’occasion de faire dans les mois qui viennent
Bonsoir Descartes !
Tout d’abord un grand merci pour vos articles, toujours intéressants et bien argumentés !
Je partage tout comme vous une réelle inquiétude face à une vision féréraliste de l’Europe…
Je tiens moi-même un blog et je serais curieux d’avoir à l’occasion votre avis sur certains de mes papiers !
Cordialement,
Bruno
Merci de vos encouragements. Je suis allé sur votre blog, et j’ai trouvé les articles intéressants… mais malheureusement, pas de possibilité de commenter!
J’ai encore un peu de mal avec ce nouvel hébergeur blogspot, mais je crois qu’on peut laisser un commentaire en cliquant tout en bas d’un article sur le lien “0 commentaires” justement.
Si ça ne fonctionne pas je me pencherai un peu plus sérieusement dans les réglages !
Effectivement, ça marche. Mais il faut être dévin…
Serait-ce de la Commission européenne ?
Cher Descartes, comme beaucoup de commentateur de la situation européenne vous êtes dans le fantasme, je fais même la supposition que vous avez dans les 55ans. Pour information si nous étions
confrontés à un éventuel abandon de notre souveraineté, le transfert ne se ferait à aucun moment vers la Commission. En effet, celle-ci ne fait que proposer et dans certains cas fait appliquer la
mise en place de directive. La majeure partie du temps c’est le Conseil et le Parlement qui décide. Actuellement nous nous trouvons dans une période inter-gouvernementale où il n’y a plus que le
Conseil qui décide. Donc, ne vous inquiétez pas, la méchante Commission n’aura pas le pouvoir, d’une part les traité ne les lui laissent pas et d’autre part le Parlement et le Conseil ne lui
laisseront jamais, non pas par soucis démocratique mais par soif de pouvoir.
Pour reprendre une définition classique mais toujours aussi éclairante, une entité est souveraine dans la mesure où elle n’est soumise à aucune norme extérieure à elle même.
Dans ce cas les États européens ne sont plus souverains puisqu’ils sont soumis aux normes européennes, non?
l’Allemagne semble prête à consentir un abandon de souveraineté majeur, c’est à dire, de voir son propre budget fédéral examiné et éventuellement corrigé par la Commission
européenne.
Dans le cas Allemand, il est aussi possible de penser qu’un éventuel contrôle de son budget fédéral par la Commission aurait des conséquences très différentes qu’un contrôle du Budget d’un État
centralisé tel que la France. Ne pensez-vous pas que la constitution en Landers et les prérogatives incomparables qu’ils possèdent par rapport aux régions françaises à un impact sur le calcul
Allemand?
Les allemands ont une vision idéalisée de leur pays, et vous les surprendriez beaucoup en leur expliquant que leur pays a pris autant que les autres des libertés avec les traités et notamment
avec le pacte de stabilité…
Vous exagérez un peu je pense.
Cela marchait du temps où l’Allemagne était candidate à la réadmission dans l’espèce humaine, et pour ce faire était prête à accepter une Europe “à la française”. Ce n’est plus le cas: en
redevenant une puissance, l’Allemagne a renoué avec un comportement de puissance.
Vous touchez là un point important. Un des tournants aura eu lieu lorsque les socio-démocrates allemands se sont adressés aux socialistes français au début des années 2000, lorsque leur
économie était mal. Nous leur avons tourné le dos. Schroder dût mener des politiques très dures pour redresser la barre. A partir de là, l’Allemagne a compris qu’elle serait seule. En 2003,
l’Allemagne décida de ne pas aller en Irak, événement historique puisque depuis la fin de la seconde guerre mondiale les Etats-Unis étaient considérés comme son protecteur. Dès lors nous
assistions à un renouveau du sentiment national, sentiment qui engendre une vision réaliste se traduisant par « l’intérêt national avant tout ».
Cher Descartes, comme beaucoup de commentateur de la situation européenne vous êtes dans le fantasme,(…) si nous étions confrontés à un éventuel abandon de notre souveraineté, le transfert
ne se ferait à aucun moment vers la Commission
Et pourtant, c’est bien ce qui est proposé par les allemands: une surveillance des budgets nationaux par la Commission, qui aurait le pouvoir de demander des changements, de prononcer des
sanctions “automatiques” ou de saisir la Cour de justice en cas de non respect des règles du pacte de stabilité… contrairement à ce que vous croyez, il s’agit bien de transférer des
pouvoirs à la Commission, et non au Parlement ou au Conseil.
Par ailleurs, je crois que vous sous-estimez les pouvoirs de la Commission en les réduisant à la simple “proposition”. Non seulement elle a le monopole de la proposition, ce qui
lui donne un pouvoir considérable, mais en plus elle est “gardienne des traités” et à ce titre détient un pouvoir considérable à l’heure d’interpréter les traités eux mêmes mais aussi la
normative dérivée…
Dans ce cas les États européens ne sont plus souverains puisqu’ils sont soumis aux normes européennes, non?
Non. Les “normes européennes” sont une normative dérivée des traités, et les traités sont des normes faites par les Etats européens. Dans la mesure où les Etats européens gardent la possibilité
de dénoncer les dits traités, ils ne sont “soumis” aux normes européennes que parce qu’ils l’ont ainsi décidé, décision qu’ils peuvent à tout moment revertir. C’est pourquoi il est impropre de
parler de “transferts de souveraineté”. Les Etats européens n’ont jamais transmis que des compétences. C’est ce qu’a reconnu le Conseil Constitutionnel, lorsqu’il a admis, contre
la jurisprudence de la CJUE, que les normes européennes étaient supérieures aux lois (puisque dérivés de traités qui sont eux mêmes, d’après la constitution, supérieurs aux lois) mais pas
supérieures à la constitution française. Cela revient à admettre que le peuple français exerce la plénitude de la souveraineté, puisqu’il peut faire des normes qui sont supérieures à toute norme
européenne.
Ne pensez-vous pas que la constitution en Landers et les prérogatives incomparables qu’ils possèdent par rapport aux régions françaises à un impact sur le calcul Allemand?
Je ne le crois pas. Même si les Länder ont des prerrogatives incomparables par rapport aux collectivités locales françaises, il n’ont pas la possibilité de voter des budgets en déficit. En
d’autres termes, le contrôle de la dette n’est pas très différent à celui de la France. Mais votre point n’est pas tout à fait faux: c’est une longue tradition fédérale qui fait que
l’Allemagne n’a pas la même conception de la souveraineté – et en particulier de la souveraineté budgétaire – que la France.
“Les allemands ont une vision idéalisée de leur pays, et vous les surprendriez beaucoup en leur expliquant que leur pays a pris autant que les autres des libertés avec les traités et
notamment avec le pacte de stabilité…” Vous exagérez un peu je pense.
Connaissant relativement bien l’Allemagne, je peux vous assurer que non.
Dès lors nous assistions à un renouveau du sentiment national, sentiment qui engendre une vision réaliste se traduisant par « l’intérêt national avant tout ».
A nous d’en tirer toutes les conséquences…
Le secrétaire national du Mouvement républicain et citoyen (MRC), présidé par Jean-Pierre Chevènement, se souvient de quelques perles prononcées au sujet du traité de Maastricht. Un rappel que
l’élu a jugé pertinent à quelques mois de la Présidentielle.
http://www.marianne2.fr/Souvenons-nous-des-promesses-formulees-lors-du-traite-Maastricht_a213323.html
De Profundis