Des promesses, des promesses…

Au risque de décevoir – et chose encore plus grave, d’ennuyer – mes lecteurs, je reviens sur une question économique. Mais dans un contexte où la question de la dette revient comme un leitmotiv, il faut je pense continuer à réflechir sur cette question.

 

Qu’est ce qui constitue le patrimoine d’une personne ? Et bien, il est constitué d’abord de biens matériels, tangibles et utilisables: votre maison (si vous avez la chance d’être propriétaire), votre voiture, votre ordinateur, la table de votre salon. Ces biens-là, vous les avez acquis et vous les conservez pour une raison simple: vous en avez l’usage.

 

Mais au fur et à mesure que les sociétés avancent, le patrimoine est chaque fois moins sous cette forme matérielle (ce qu’on appelle les “biens rééls” en droit) et plus sous une forme différente: de l’argent liquide, des comptes d’épargne, des plans d’assurance vie, des actions, des obligations, des droits aux prestations santé ou retraite. Je vais vous surprendre en vous montrant que tout ce patrimoine “irréel” est constitué en fait de promesses.

 

L’argent ? C’est une promesse: la promesse que si vous vous rendez chez un commerçant, vous pourrez l’échanger pour n’importe quel bien offert. Le compte en banque ? C’est la promesse que le jour ou vous vous rendez au guichet, on vous remettra les espèces correspondantes. L’assurance vie, l’action ? C’est la promesse d’un revenu et de récupération du capital. Les droits d’assurance maladie ? C’est la promesse de remboursement de vos soins si par malheur vous étiez malade. Les droits à la retraite ? C’est la promesse d’un revenu régulier à partir d’un certain âge.

 

La substitution dans le patrimoine des biens “réels” par des biens “irréels” est un élément important du progrès économique. En nous contenant d’épargner non pas des biens réels mais des promesses, nous permettons à d’autres d’utiliser ces mêmes biens en attendant que nous en ayons besoin. Imaginons qu’au lieu d’accumuler des droits de retraite nous devions accumuler la nourriture, les vêtements, l’essence, tout ce dont nous aurons besoin pendant notre retraite. En dehors des problèmes de stockage, cela rendrait indisponible pendant de longues années ces biens… mieux vaut permettre à d’autres de les consommer, en échange de la promesse de les racheter pour nous à une date future.

 

On le voit, le mécanisme de la promesse fait un lien entre le présent et le futur. Il est la manifestation d’une solidarité sociale intertemporelle, par laquelle quelqu’un renonce à consommer aujourd’hui en échange de la promesse de pouvoir consommer demain. Mais cela pose un problème sérieux: la génération qui devra tenir la promesse n’est pas celle qui aura bénéficié du depôt qui la constituent. Pour reprendre l’exemple précédent, celui qui permet aujourd’hui à d’autres de consommer en échange de la promesse de voir demain les enfants de ces “autres” le lui rendre prend un certain risque: après tout, pourquoi les enfants devraient se sentir liés par les promesses de leurs parents ?  Le problème est résolu de la manière suivante: ceux qui demain rendront au retraité ce que leurs parents auront consomme aujourd’hui doivent avoir confiance qu’apres demain leurs petits enfants feront de même. En d’autres termes, le système repose dans une chaîne de solidarité intergénerationnelle infinie, chaque génération cédant à la précédente en confiant que la suivante fera de même (1).

 

Qui dit promesse dit confiance. Si nous acceptons de fonctionner dans un monde de promesses, c’est parce que nous avons une confiance raisonnable dans le fait que ces promesses seront tenues. Et si nous avons confiance, c’est pour plusieurs raisons: d’abord, parce qu’une expérience de plusieurs siècles nous montre que ces promesses sont en général tenues. Mais surtout, parce que nous savons aussi par expérience que l’Etat se charge de garantir que la plupart de ces promesses seront tenues: le commerçant qui refuserait d’accepter la monnaie ayant cours légal, la banque qui refuserait de nous rendre nos dépôts risquent de sérieux ennuis avec les tribunaux. L’Etat va même jusqu’à se substituer aux agents économiques défaillants, en garantissant les dépôts bancaires par exemple. Voilà pourquoi plus une société progresse, plus elle est fondée sur la confiance dans un certain nombre de promesses – encadrées par la loi, mais promesses tout de même.

 

Mais au delà de la volonté de l’Etat de voir les promesses tenues, il y a un autre problème qui nous ramène à l’actualité: il ne suffit pas de vouloir, encore faut-il pouvoir. Et c’est là que les choses se compliquent. A tout moment la société doit faire un arbitrage entre les promesses qu’elle a fait par le passé et les dépenses présentes. Ou pour le dire d’une autre manière, entre tenir ses promesses passées et faire de la dépense utile aujourd’hui. C’est un arbitrage est un arbitrage entre le passé et le présent.

 

Pour certains, le choix est évident: le présent c’est les jeunes, le passé c’est les vieux. Privilégions donc les jeunes en oubliant nos promesses. Seulement, cette solution est deletère parce qu’elle détruit la confiance sur laquelle tout le système est fondé. On peut gloser sur le fait qu’il faut choisir les jeunes plutôt que les vieux. Seulement, la question de la jeunesse ne se réduit pas au présent. Une génération qui contemple la destruction du patrimoine de la génération précédente saura que la même chose peut lui arriver demain. Les jeunes d’aujourd’hui seront vieux un jour, et si l’on veut qu’ils puissent s’insérer dans le système économique et se constituer un patrimoine, il faut qu’ils puissent avoir raisonnablement confiance que l’investissement qu’ils font aujourd’hui sera récompensé demain. En d’autres termes, ils doivent avoir confiance dans le fait que les promesses seront tenues.

 

D’autres, dans une position aussi dogmatique mais inverse, diront qu’il faut toujours tenir ses promesses, la pays dut-il en crever. Mais cette solution a aussi des inconvénients: celui de sacrifier la génération “courante” aux promesses faites par les précédentes. Avec la suspicion que la génération précédente aurait vécu au dessus de ses moyens, en laissant le passif à la suivante (2). Cette suspicion est au moins aussi dangereuse pour la confiance qui fonde nos rapports sociaux qu’un reniement pur et simple des promesses.

 

La raison se trouve certainement entre ces deux positions. Il n’est pas faux de dire que ces dernières quinze années nous avons tous vécu au dessus de nos moyens. Et il faudra donc payer aujourd’hui la facture de ces folies, et le débat devrait être le partage de cette facture. Certains commencent dejà à payer: les travailleurs, avec la réforme des retraites. Mais il serait injuste de ne pas rappeler que les actionnaires ont eux aussi payé leur part: leur capital a perdu plus d’un tiers de sa valeur depuis 2007. Nous devrons tous payer, et la manière dont le fardeau sera partagé est la seule question qui vaille.

 

En dernière instance, ce ne sont pas des considérations de justice plus ou moins abstraites qui doivent nous dire ou placer le curseur entre les promesses du passé et la dépense courante. Le critère essentiel de la politique économique devrait être la croissance. Car plus la croissance est élevée, plus il sera facile demain de tenir ses promesses d’aujourd’hui. Une insistance excessive sur les promesses passées risque de provoquer une dépression. Un refus généralisé de les tenir risque d’aboutir au même résultat. Entre les deux, il y a un “défault” doux: l’inflation qui réduit la valeur réelle des promesses faites tout en maintenant leur valeur faciale. Et, comme disait Ben Gurion, on peut faire confiance à nos gouvernements pour faire ce choix raisonnable une fois qu’ils auront épuisé toutes les alternatives.

 

Vous aurez remarqué que pas une seule fois je n’ai parlé dans ce qui precède de dette… C’est volontaire. Mon but était de bien montrer que derrière l’idée abstraite de “dette” il y a une idée bien plus concrète, qui est l’idée d’engagement.   “Ce qui est promis est dû”, dit un ancient proverbe, et il a raison: à l’origine de toute dette se trouve une promesse. Et comment une société pourrait-elle inspirer confiance en ses promesses d’avenir si elle n’est pas capable de tenir celles du passé ?

 

Les promesses libérales des deux dernières décennies ne pourront pas être tenues. Il faut l’admettre et l’assumer. Le “défaut” sur ces promesses est inévitable. Il ne faut pas essayer de faire croire aux gens qu’on peut sortir de la crise gratuitement, qu’il y a des solutions miracle, par exemple, qu’il suffirait que la BCE se mette à acheter la dette des états pour que tout s’arrange sans que cela ne coûte à personne. Il ne faut pas non plus croire qu’on arrivera à faire payer “les autres” (les riches, l’Allemagne, le FMI) une folie qui a été collective. Il faut expliquer au citoyen-électeur, qui est bien plus intelligent que l’on veut bien le croire, qu’il faut maintenant payer la facture des débordements que Maastricht et le règne du “tout marché” ont rendu possibles, et que cette facture sera douloureuse pour tous puisque son juste partage est la condition nécessaire au maintien de la confiance et du consensus social sur laquelle toute économie moderne est fondée.

 

Descartes

 

(1) C’est pourquoi le langage “moderne” qui prétend isoler chaque génération de la suivante est dangereux et nous ramène en arrière. On voudrait nous faire croire qu’il est injuste de laisser à nos successeurs des dettes. Mais dans ce cas, est-il juste qu’on leur laisse gratuitement nos réalisations, des infrastructures que nous avons construit, un pays aménagé et organisé ? Nous avons reçu de nos parents leur patrimoine et leurs dettes… en quoi serait-il injuste de laisser la même chose à nos enfants ?

 

(2) C’est pourquoi la “gauche radicale” devrait réflechir avant de relayer le discours selon lequel “la nouvelle génération vivrait moins bien que la précédente”. Outre le fait que c’est faux, ce discours risque d’allumer une guerre des générations en détruisant l’idée de solidarité intergénérationnelle.

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27 réponses à Des promesses, des promesses…

  1. Trublion dit :

    Très bonne production. Ce titre me fait penser au titre du livre de Pierre Noel Giraud, “Le commerce des promesses”

    “il y a un “défault” doux: l’inflation qui réduit la valeur réelle des promesses faites tout en maintenant leur valeur faciale”

    En temps normal, dans une crise normale, oui. Mais vu la gravité de la crise, il n’y a plus que le haircut de 70% qui soit viable. Les petits épargnants seront épargnés et les gros
    lessivés.

    • Descartes dit :

      Je ne suis pas aussi pessimiste que vous… a condition de faire une politique de croissance. Avec les programmes d’austerité à répétion, par contre, votre prediction risque de se réaliser.

  2. morel dit :

    Descartes,

    La volonté de procation de le but d’inciter à la réflexion est souvent salutaire. Mais acceptez que je ne puisse vous suivre ici.

    Sauf erreur de ma part, il me semble lire que tout un peuple est responsable de la dette contractée aujourd’hui. Or, il ne me semble pas que les salariés modestes dont je suis, si vous le
    souhaitez, je peux vous fournir le montant net de mes émoluements, soumis depuis un certain temps à des mesures restrictives limitant largement toute augmentation du pouvoir d’achat soient
    responsables et, à ce titre, doivent payer la dette dont je crois pouvoir affirmer, au nom du mode de vie que nous avons au quotidien depuis longtemps qu’elle n’est pas la nôtre. Merci de
    votre réponse argumentée.

    G.Morel 

     

    • Descartes dit :

      Sauf erreur de ma part, il me semble lire que tout un peuple est responsable de la dette contractée aujourd’hui.

      Vous avez bien compris.

      Or, il ne me semble pas que les salariés modestes dont je suis, si vous le souhaitez, je peux vous fournir le montant net de mes émoluements, soumis depuis un certain temps à des mesures
      restrictives limitant largement toute augmentation du pouvoir d’achat soient responsables et, à ce titre, doivent payer la dette dont je crois pouvoir affirmer, au nom du mode de vie que nous
      avons au quotidien depuis longtemps qu’elle n’est pas la nôtre.

      Je pense que vous vous trompez. La dette dont on parle est le résultat des politiques qui ont été mises en oeuvre. Or, si ma mémoire ne me trompe pas, ces politiques ont été mises en oeuvre par
      des gouvernements démocratiquement élus. Elles ont été mises en oeuvre de manière parfaitement transparente, au vu et au su de tout le monde. Et pourtant, je ne me souviens pas que le peuple soit
      sorti dans la rue en nombre pour protester. Le traité de Maastricht, source de bonne partie de nos malheurs, a été voté par référendum après un débat public de haute tenue. C’est donc un peu trop
      facile pour les salariés modestes (ou pour toute autre catégorie d’ailleurs) de déclarer que “cette dette n’est pas la notre”.

      La démocratie, ce n’est pas seulement le droit d’élire les gouvernements et de manifester. C’est aussi une responsabilité collective pour les mesures prises. Ceux qui ont laissé faire sont
      aussi responsables que ceux qui ont fait. Et il faut tenir clairement ce langage si l’on veut que demain les peuples prennent leurs responsabilités. J’ai toujours rejeté la logique victimaire qui
      fait des “salariés modestes” (ou de toute autre catégorie) des victimes impuissantes de forces qui les dépassent. Les “salariés modestes” ne sont pas des pantins. Ils ont les moyens de se faire
      entendre. S’ils ne les ont pas utilisés, ils en assument collectivement une responsabilité.

  3. Trubli dit :

    Les politiques de croissance de la droite et de la gauche libérale consistent à vouloir une convergence avec le soi-disant modèle allemand, donc baisse du coût du travail même s’il est plus bas
    que dans l’industrie allemande, flexibilisation accrue, etc.

    Pour moi la croissance c’est employer les ressources du pays à la satisfaction des besoins du pays. Je ne trouve donc pas anormal qu’on fabrique par exemple des chaussettes en France, quit à
    utiliser des droits de douanes et de la TVA sociale pour cela. Ce n’est pas du tout ce que veulent nos politiques qui pensent que notre “salut” est dans l’exportation et donc la compétitivité.

    • Descartes dit :

      Les politiques de croissance de la droite et de la gauche libérale consistent à vouloir une convergence avec le soi-disant modèle allemand, donc baisse du coût du travail même s’il est plus
      bas que dans l’industrie allemande, flexibilisation accrue, etc.

      Ca, ce n’est pas une “politique de croissance”. Ce qui fait une politique de croissance, c’est qu’on donne au niveau des politiques publiques une priorité à la croissance par rapport à d’autres
      indicateurs (l’inflation, la stabilité de la monnaie, les taux d’intérêt…). Cela fait trente ans (1983, pour être précis) que les politiques publiques ne visent pas à titre principal la
      croissance. Il n’y a qu’à voir les traités européens: nulle part ils ne font de la croissance un objectif de la politique économique.

      Pour moi la croissance c’est employer les ressources du pays à la satisfaction des besoins du pays.

      C’est une définition très personnelle. Pour le reste du monde, la croissance est l’accroissement de la valeur des biens produits. Si l’on veut se comprendre, mieux vaut utiliser les mots dans
      leur sens couramment admis.

  4. Trubli dit :

    J’ai écrit “Pour moi la croissance c’est “, il fallait plutôt lire “Pour moi une politique de croissance c’est”

  5. morel dit :

    A suivre votre logique nous serions dans une culpabilité collective que nous devrions assumer. A la trappe la lutte des classes ! Exit l’aliénation ! Même ceux qui subissent en se battant depuis
    30 ans le renversement des rapports de classes doivent se présenter au guichet…

    Ma position n’est pas victimaire, bien/mal, noir/blanc. Maastricht : à des vieux collègues partisans du oui au nom de la paix et la prospérité en Europe, je leur ai fermement demandé s’ils
    croyaient à une guerre avec l’Allemagne et expliqué que les fameux critères ne pouvaient être qu’un carcan. Pas toujours convaincu, bien sûr mais pour peu qu’on ne mette pas personnellement son
    interlocuteur en cause, les choses progressent, moins vite qu’on ne le souhaiterait, la voie de la résignation a aussi sa propre force d’inertie qui, désolé, incite à dire « il faut casquer ».

    Après une gestion par la « gôche » regroupant toutes ses composantes crédibles, vous étonnez vous qu’une fraction des citoyens choisissent le représentant de la droite qui dénonce « la fracture
    sociale » ? Puis devant l’inanité de la candidate PS (qui dénoncera après coup jusqu’à une augmentation du Smic- ce sujet mériterait bien des développements, mais hors de propos) qu’une autre
    fraction vote (hélas) pour le bateleur volontariste d’estrade qui va au contact des ouvriers (et le même scénario s’est dessiné à propos du nucléaire)… J’arrête là. Vous ne m’avez toujours pas
    démontré, au-delà d’un schéma fort intellectuel en quoi les salariés devraient se sentir comptable de la dette.    

    • Descartes dit :

      A suivre votre logique nous serions dans une culpabilité collective que nous devrions assumer.

      Vous opérez ici un étrange glissement sémantique. Dans notre échange, nous parlions jusqu’ici de responsabilité. Et tout à coup vous transformez la responsabilité en
      culpabilité. Non, “à suivre ma logique”, vous n’aboutirez jamais à une “culpabilité collective”. La “culpabilité” n’est pas une catégorie politique, mais morale. La culpabilité
      implique qu’on ait fait quelque chose de mal. La responsabilité, c’est la simple conséquence d’un choix, qu’il soit “bon” ou “mauvais”.

      A la trappe la lutte des classes ! Exit l’aliénation ! Même ceux qui subissent en se battant depuis 30 ans le renversement des rapports de classes doivent se présenter au guichet…

      J’avoue ne pas trop saisir ce que vient faire la “lutte des classes” là dedans. Quant à l’aliénation, il y a là un choix idéologique à faire: si vous supposez que l’aliénation est telle que le
      choix des gens est totalement conditionné, alors effectivement ils ne peuvent être tenus pour responsables, mais en même temps on peut se demander à quoi peut bien servir la démocratie et quel
      sens peut avoir la “souveraineté populaire” dont nous nous réclamons, puisqu’il n’y a aucune véritable liberté de choix. A l’opposé, si vous admettez qu’il y a une parcelle de liberté dans les
      choix que les gens font, alors vous ne pouvez pas effacer la responsabilité qui résulte nécessairement de ces choix.

      En d’autres termes, ou bien les gens sont des marionettes, et alors à quoi bon leur demander leur avis, ou bien ils font des choix, et alors ils doivent en assumer la responsabilité.

      Ma position n’est pas victimaire, bien/mal, noir/blanc.

      Alors je ne comprends pas très bien pourquoi vous parlez de “culpabilité”. Parler de culpabilité amene nécessairement à une position bien/mal.

      Après une gestion par la « gôche » regroupant toutes ses composantes crédibles, vous étonnez vous qu’une fraction des citoyens choisissent le représentant de la droite qui dénonce « la
      fracture sociale » ?

      Non, pas du tout. De la même manière qu’il ne faut pas s’étonner que devant une gauche et une droite qui défendent les intérêts des classes moyennes et dont toutes les composantes sont prêtes
      joyeusement à abandonner la souveraineté nationale pour sauver l’Euro, une fraction de citoyens choisissent Marine Le Pen. Mais j’attire sur le fait que votre remarque admet implicitement que les
      gens en question font un choix libre et rationnel. Pourquoi refusez vous donc de les tenir pour responsables de ce choix ?

      Vous ne m’avez toujours pas démontré, au-delà d’un schéma fort intellectuel en quoi les salariés devraient se sentir comptable de la dette. 

      En ce qu’ils avaient des instruments pour s’opposer, et qu’ils ne les ont pas utilisé.  

       

  6. morel dit :

    Responsables mais pas coupables. Soit mais
    puisque nous sommes dans la sémantique :

    Responsable : Qui doit accepter et subir les conséquences de ses actes, en répondre.

    (Le Robert)

    La vraie question politique est : qui
    payera l’addition ?

    La lutte des classes n’est pas une figure de
    style grandiloquente, c’est son résultat défavorable  qui a abouti aux privatisations, baisses de prélèvements en faveur des plus riches, ouverture
    des frontières, perte de souveraineté,  chômage de masse,  augmentation de 10 % des revenus en faveur du
    capital etc…

    Soit on énonce une tautologie : si nous
    perdons encore il faudra payer…alors que nous avons déjà beaucoup perdu. A l’autre pôle, on renfloue ou on enrichit les mêmes.

    Soit ce « responsable » signifie
    c’est bien fait pour eux, ils n’ont qu’à payer

    Enfin, on peut aussi, préférer combattre
    pour avancer vers la République sociale.

    L’aliénation joue son rôle lors des choix
    électoraux tels que vous ou moi les avons évoqués, mais avouez honnêtement que je n’ai jamais utilisé « marionnettes » , c’est bien plus compliqué.

    • Descartes dit :

      Responsables mais pas coupables. Soit mais puisque nous sommes dans la
      sémantique :

      Non, nous n’en sommes pas dans le “sémantique”. Les mots ont un sens, et si l’on veut raisonner finement, il
      faut faire attention à ne pas effacer les distinctions fines entre les notions. Il ne s’agit pas de couper les cheveux en quatre, mais de bien différentier deux concepts qui n’appartiennent pas
      au même ordre. La “culpabilité” implique l’idée d’avoir “mal” agi (ce qui implique une qualification morale des faits) et, dans notre imaginaire, renvoie à l’idée de “punition”. La
      “responsabilité” n’implique nullement une qualification morale, simplement qu’on assume les conséquences (positives ou négatives d’ailleurs) de ses actes.

      La vraie question politique est : qui payera l’addition ?

      La vraie question politique est: qui devrait payer l’addition ?

      La lutte des classes n’est pas une figure de style grandiloquente, c’est son résultat défavorable qui a
      abouti aux privatisations, baisses de prélèvements en faveur des plus riches, ouverture des frontières, perte de souveraineté,  chômage de masse,  augmentation de 10 % des revenus en
      faveur du capital etc…

      Non. La “lutte des classes” est une expression pour résumer le fait que dans le mode de production
      capitaliste les intérêts de la bourgeoisie et du prolétariat sont antagoniques, et qu’il ne peut donc y avoir en général de synthèse “gagnant-gagnant” entre ces intérêts. Mais attribuer les
      privatisations au “résultat défavorable de la lutte des classes” est pour le moins hasardeux. En particulier si l’on admet – comme le fait un bonne partie de la “gauche radicale” que l’Etat n’est
      qu’un instrument dans les mains de la bourgeoisie. Il faudrait m’expliquer en quoi le fait qu’une entreprise passe des mains d’un “instrument de la bourgeoisie” aux mains de la bourgeoisie elle
      même changerait quelque chose…

      Soit on énonce une tautologie : si nous perdons encore il faudra payer…

      Excuse moi, mais c’est qui “nous” ? Si tu te refères à la “lutte des classes”, tu sais que cette “lutte” ne
      concerne que la bourgeoisie et le prolétariat. N’étant moi même ni l’un ni l’autre, je peux difficilement m’inclure dans le “nous” en question.

      Soit ce « responsable » signifie c’est bien fait pour eux, ils n’ont qu’à
      payer

      Tu réviens encore une fois à l’idée de culpabilité, par le biais de l’idée de punition (“c’est bien fait pour
      eux”). Non: ce “responsable” signifie qu’il faudra qu’ils payent, et qu’ils comprennent qu’ils doivent payer parce qu’ils ne se sont pas opposés en temps utile. C’est tout.

      Enfin, on peut aussi, préférer combattre pour avancer vers la République sociale.

      On peut faire l’un et l’autre. Par ailleurs, j’ai du mal à comprendre en quoi considérer les gens comme
      irresponsables fait avancer vers la république sociale.

      L’aliénation joue son rôle lors des choix électoraux tels que vous ou moi les avons évoqués, mais avouez
      honnêtement que je n’ai jamais utilisé « marionnettes » , c’est bien plus compliqué.

      Je vous donne acte volontirs du fait que vous n’avez jamais utilisé le terme “marionettes”. Mais l’idée y
      est: si vous estimez que l’aliénation est suffisante pour rendre les gens irresponsables, alors vous leur déniez toute véritable liberté.

  7. morel dit :

    Ces dernières remarques avant d’arrêter le
    débat :

    1/ Responsable : Qui doit accepter et subir les conséquences de ses actes, en répondre. (Le Robert).

    Où ai-je tordu les mots ?

    2/ Désolé, la lutte des classes n’est pas
    qu’une « expression » mais la réalité d’un combat entre les classes sociales ayant pour enjeu l’appropriation de la plus-value née du travail. L’exigence d’un taux de retour sur
    investissement à deux chiffres et dans le plus court terme n’est pas une chimère.

    3/ Qu’à cette fin, les besoins du capital
    poussent à la privatisation n’est pas étrange.

    4/ Je ne me réclame pas de la
    « gauche » radicale ou non ; ce terme a depuis longtemps perdu toute signification. 

    5) l’Etat est pour moi un enjeu de la lutte
    des classes. (Rien de contradictoire avec le 2), idem que les privatisations).

    6) Au train où vont les choses, il n’est pas
    sûr que la « classe moyenne » soit épargnée.

    7) La notion de responsabilité s’est
    toujours déclinée : le gogo qui croit trouver une solution avec « la fracture sociale » ou avec « travailler plus pour gagner plus » ne peut être mis sur  le même plan que celui qui la première fois a prononcé ces slogans.  Sinon, autant inculper tout le peuple Allemand
    à Nuremberg et pourquoi pas une bonne partie du peuple Français qui crût au « maréchal ».

    8) Pour compléter Condorcet voulait donner
    une « compagne républicaine », une citoyenne au citoyen. Son œuvre est-elle achevée pour l’une et l’autre ?

    • Descartes dit :

      1/ Responsable : Qui doit accepter et subir les conséquences de ses actes, en répondre. (Le Robert).

      Où ai-je tordu les mots ?

       

      Lorsque vous écrivez que “responsable signifie que c’est bien fait pour eux, qu’ils n’ont qu’à payer”. Dès
      lors qu’on parle de “c’est bien fait pour eux”, on n’est plus dans la responsabilité mais dans
      la culpabilité.

      2/ Désolé, la lutte des classes n’est pas qu’une « expression » mais la
      réalité

      Si la réalité nous était accessible directement, sans passr par le langage, tout serait beaucoup plus simple.
      Malheureusement, ce n’est pas le cas: la “lutte des classes” est une bien une  expression qui exprime une certaine interprétation de la réalité. 

      7) La notion de responsabilité s’est toujours déclinée : le gogo qui croit trouver une solution avec
      « la fracture sociale » ou avec « travailler plus pour gagner plus » ne peut être mis sur  le même plan que celui qui la première fois a prononcé ces
      slogans.

      Mais sans le mettre sur le même plan, celui qui “croit trouver une solution” reste responsable du choix qu’il
      a fait.

      Sinon, autant inculper tout le peuple Allemand à Nuremberg et pourquoi pas une bonne partie du peuple
      Français qui crût au « maréchal ».

      Tu confonds une fois de plus “responsabilité” et “culpabilité”. Le Tribunal de Nurnberg a été constitué pour
      juger de la culpabilité. Pas de la responsabilité. Et oui, l’ensemble du peuple allemand a été responsable du nazisme, et en a souffert les conséquences.

      8) Pour compléter Condorcet voulait donner une « compagne républicaine », une citoyenne au
      citoyen. Son œuvre est-elle achevée pour l’une et l’autre ?

      Je n’ai pas compris la question.

       

  8. J.Halpern dit :

    “Il n’est pas faux de dire que ces dernières quinze années nous avons tous vécu au dessus de nos moyens”

    Comment fonder cette affirmation ? Si tu évoques la montagne de dettes, c’est inexact : elles constituent comme tu le dis fort bien par ailleurs des promesses sur la production des autres. Mais
    ces transferts de richesses restent entre nous… Le problème de la finance dérégulée c’est en effet qu’elle produit des promesses excédentaires sur la production future, promesses dont le
    premier effet de la réalisation sera de réduire la part de richesse de ceux qui n’en bénéficient pas. En d’autres termes les “marchés financiers” opèrent une redistribution des “pauvres” vers les
    “riches”. Et c’est quand les “riches” passent au guichet que nous ressentons le prélèvement… En tout cas, globalement la dette ne sugnifie pas que “nous” vivons au-dessus de nos moyens !

    par ailleurs, il est vrai qu’il existe une mesure de nos “excès” : c’est le déficit commercial (des biens et services avec l’étranger). Il frôle 3% du PIB, ce qui va dans ton sens. d’une manière
    ou d’une autre, nous devrons rattraper ces 3 %, plus les arriérés : une ou deux année de croissance environ.

    • Descartes dit :

      Comment fonder cette affirmation ? Si tu évoques la montagne de dettes, c’est inexact : elles constituent comme tu le dis fort bien par ailleurs des promesses sur la production des
      autres.

      Oui. Mais ces promesses ont été remises en échange de biens sonnants et trébuchants. Des biens que nous avons consommé en espérant les payer plus tard. C’est dans ce sens où l’on peut dire qu’on
      a vécu au dessus de nos moyens.

      Tu comprends bien que ce que j’écris ici n’est ni un papier de recherche ni une thèse en économie, mais des impressions fondées bien entendu sur des faits, mais sans prétendre à une rigueur
      scientifique. Cet avertissement ayant été fait, je vais essayer de “fonder mon affirmation”.

      Le premier élément qui fait penser qu’on a vécu “au dessus de nos moyens” est pour moi la dégradation des infrastructures. En effet, nous vivons sur un énorme capital qui nous a été legué par les
      générations précédentes (réseau électrique, réseau ferroviaire, ports, routes et autouroutes, centrales électriques…). Ces infrastructures vieillissent et se dégradent sans qu’on voit venir les
      investissements nécessaires à leur renouvellement. En ce sens, on peut dire qu’on est en train de bouffer notre capital. Ce qui est caractéristique du fait qu’on dépense plus qu’on ne produit.

      Le second élément est l’augmentation importante de l’endettement global de la société, et notamment lié au déficit commercial. Là encore, cela suggère que nous consommons globalement plus que
      nous ne produisons (ou pour le dire d’une manière plus exacte en répondant à ton argument sur les “promesses”) que nous avons fait des promesses pour l’avenir qui ne sont gagées sur aucune
      production présente.

      Le problème de la finance dérégulée c’est en effet qu’elle produit des promesses excédentaires sur la production future, promesses dont le premier effet de la réalisation sera de réduire la
      part de richesse de ceux qui n’en bénéficient pas

      Je suis d’accord. Mais quelle est la contrepartie de ces “promesses” ? N’est-ce pas de permettre aux consommateurs d’aujourd’hui de consommer plus qu’ils ne produisent ? Cela n’a rien de
      condamnable: la logique même du crédit est de permettre de bénéficier aujourd’hui d’un produit en le payant demain. Seulement, on ne peut pas s’étonner lorsque demain on nous demande de consommer
      moins pour payer.

      En d’autres termes les “marchés financiers” opèrent une redistribution des “pauvres” vers les “riches”.

      Je pense que cette affirmation mériterait d’être examinée au fond. Les “marchés financiers” ne peuvent opérer une redistribution des pauvres vers les riches que si les pauvres investissent sur
      les marchés, ce qui me semble assez difficile à croire, du moins aussi longtemps que le système de retraite par repartition est dominant.

      Il faut se méfier de la vulgate à la “monde diplomatique”. Les “marchés financiers” commettent beaucoup de pêchés et contiennent beaucoup d’imperfections (voir à ce propos l’excellent article de
      André Orlean dans Le Monde daté du 6 décembre que je compte essayer de résumer ici dans les prochains jours). Mais il faut pas en faire des croquemitaines. Le marché financier est un jeu à somme
      nulle. Il ne fait que redistribuer l’argent qu’on y met. Rien de plus.

      En tout cas, globalement la dette ne sugnifie pas que “nous” vivons au-dessus de nos moyens !

      Bien entendu. Celui qui vit au dessus de ses moyens, c’est toujours l’autre…

      il est vrai qu’il existe une mesure de nos “excès” : c’est le déficit commercial (des biens et services avec l’étranger). Il frôle 3% du PIB, ce qui va dans ton sens. d’une manière ou d’une
      autre, nous devrons rattraper ces 3 %, plus les arriérés : une ou deux année de croissance environ

      Avec les arriérés, c’est bien plus!

       

  9. J.Halpern dit :

    Pour ce qui est des infrastructures, tu as raison.

    Pour la dette, non, car l’essentiel de la dette n’a pas été souscrite par les particuliers, mais par les entreprises, l’Etat, et surtout les institutions financières qui se doivent énormément
    entre elles. Les entreprises, l’Etat, les particuliers seraient raisonnablement solvable avec une croissance “normale” ( de l’ordre de 2-3%). Le problème du marché financier est qu’il n’est pas
    “à somme nulle” : il se gonfle de toute cette monnaie créée par les “dettes” financières et construit une quantité insoutenable de promesses liées à la spéculation et non la production.

    Quand je dis que “nous” ne vivons pas au dessus de nos moyens, je parle du pays dans son ensemble. Certains s’enrichissent des bulles, et d’autres subissent les plans d’austérité ou les défauts
    de paiement, pour les entrepreneurs. En moyenne, celà se compense : le problème est que le chancre financier déforme la répartition du revenu.

    • Descartes dit :

      Les entreprises, l’Etat, les particuliers seraient raisonnablement solvable avec une croissance “normale” ( de l’ordre de 2-3%).

      La question en discussion ici n’était pas la “solvabilité” des acteurs, mais le fait de savoir s’ils avaient ou pas vécu ces dernières années “au dessus de leurs moyens”. Etre “solvable” signifie
      qu’on peut payer ses dettes – même si pour cela il faut se serrer la ceinture. Et non qu’on peut payer ses dettes sans rien toucher à son niveau de vie.

      Mon point est que le niveau de consommation des “années folles” 1997-2007 n’est pas soutenable à long terme. Pour arriver à consommer autant, la production ne suffisait pas. Il a fallu acheter à
      l’étranger, il a fallu sacrifier l’investissement, les infrastructures, le long terme. Les dettes traduisent – au moins en partie – ce fait. Ce qui veut dire que tôt ou tard il allait falloir se
      serrer la ceinture. Ce qui n’exclut bien entendu pas le débat sur quelles sont les ceintures qu’on serre et de combien. Mais je crois qu’il est démagogique de prétendre qu’il suffirait serrer la
      ceinture d’une infime part de la population alors que tout le reste peut continuer comme avant.

      Le problème du marché financier est qu’il n’est pas “à somme nulle” : il se gonfle de toute cette monnaie créée par les “dettes” financières et construit une quantité insoutenable de
      promesses liées à la spéculation et non la production.

      Si l’on parle en termes de “richesses” (c’est à dire de biens réels), c’est un jeu à somme nulle. Les marchés financiers n’ont pas la possibilité de changer la quantité de biens réels
      disponibles. Ils peuvent par contre produire – et détruire – des quantités illimitées de “promesses”. Mais il faut arrêter de croire que ce sont ces “promesses” qui font marcher l’économie. Si
      les gens vont devoir réduire leur consommation, ce n’est pas parce que des milliards de “promesses” en bourse se sont révelées sans valeur, mais parce que nous produisons moins.

  10. J.Halpern dit :

    “Nous produisons moins”, rien ne permet pour l’instant de le croire. le PIB de la France augmente malgré tout en moyenne…. je t’accorde que cette production est mal orientée, qu’elle ne prépare
    pas l’avenir – mais elle existe bel et bien. Et nos forces productives sont en sous-emploi, nous pourrions rapidement produire bien plus. Le problème c’est qu’au lieu d’avoir tiré la production à
    un taux raisonable, l’endettement s’est englouti dans des boucles spéculatives qui ne produisent jamais de richesses réelles en face des dettes. Gager des droits sur la productivité futur, c’est
    un risque raisonnable et necessaire, les gager sur l’augmentation du prix des actifs, c’est un boulevard vers le krach.

    • Descartes dit :

      “Nous produisons moins”, rien ne permet pour l’instant de le croire. le PIB de la France augmente malgré tout en moyenne….

      Dans le contexte du commentaire, on comprennait bien qu’il s’agit de ce qu’on produit par rapport à ce qu’on consomme. Si la production ne diminue pas relativement à la consommation, il faudra
      m’expliquer comment on arrive à creuser le déficit commercial…

      Et nos forces productives sont en sous-emploi, nous pourrions rapidement produire bien plus.

      Sur ce point, on est parfaitement d’accord. Nous sous-utilisons nos machines et nous sous-utilisons aussi notre capital humain: les trente-cinq heures représentent un sacrifice de 12% de nos
      ressources humaines. Le chômage, un peu moins du 4%.

      Le problème c’est qu’au lieu d’avoir tiré la production à un taux raisonable, l’endettement s’est englouti dans des boucles spéculatives qui ne produisent jamais de richesses réelles en face
      des dettes.

      Encore une fois tu enfourches le cheval idéologique. Je n’ai pas contesté qu’il y ait un problème avec les marchés financiers. Mais ce n’est pas le seul problème. Le creusement
      du déficit commercial – qui par ailleurs semble ne préoccuper personne – génère lui aussi de la dette. Une dette bien plus pernicieuse, parce qu’elle ne peut être effacée par un simple “défault”
      ou par l’inflation, ce qu’on peut toujours faire avec la dette financière. Un pays – l’exemple de l’Argentine est révélateur – peut se passer de crédit international lorsque sa balance
      commerciale est positive. Mais que fait-on lorsqu’on ne peut payer les importations et que personne ne vous fait du crédit ?

  11. J.Halpern dit :

    “une fois de plus tu enfourches le cheval idéologique” : Je ne vois pas ce qu’il y a d'”idéologique” dans ce que j’ai écrit ; le problème ici est plutôt technique : l’endettement
    anticipe-t-il une production probable, qui permettra son remboursement, ou anticipe-t-il une augmentation du cours d’actifs – ce qui prépare une crise de la dette le jour où la spéculation se
    retournera ? Comme tu te réfères à Orléan, je ne pense d’ailleurs pas que tu sois en désaccord avec moi sur ce point…

    “Ce n’est pas le seul problème”, bien sûr ! les bulles financières s’analysent plutôt comme une fuite en avant par rapport au problème de la crise de surproduction que prépare le blocage
    des revenus salariaux mis en place dans les années 80. le pouvoir d’achat qui n’est pas distribué dans la production l’est sous forme de dette ou de souys-produit des bulles financières. Quant au
    déficit commercial, tu ne pourras pas me reprocher de ne pas en avoir parlé ! mais il est financé, et même produit, par les mouvementsde capitaux… dans un système financier régulé, leur entrée
    serait freinée et d’éventuels déséquilibre commerciaux seraient corrigés part les variations du cours de la monnaie. “Quand personne ne vous fait du crédit”… il faut ajuster le cours
    du change, ce n’est un drame que pour un pays totalement dépendant de l’aide étrangère, mais ce n’est pas encore notre cas. Ce qui se passe au contraire c’est que la monnaie unique et les entrées
    de capitaux permettent un déficit durablement (mais pas définitivement) indolore… le déséquilibre se cumule jusqu’à irruption d’une crise majeure qui bloque l’injection de drogue !

    • Descartes dit :

      “une fois de plus tu enfourches le cheval idéologique” : Je ne vois pas ce qu’il y a d'”idéologique” dans ce que j’ai écrit ;

      Je faisais référence à cette idéologie qui fait des “marchés financiers” l’alpha et l’oméga de tous les problèmes, en oubliant qu’il y a aussi des déséquilibres redoutables dans l’économie
      réelle.

      le problème ici est plutôt technique : l’endettement anticipe-t-il une production probable, qui permettra son remboursement, ou anticipe-t-il une augmentation du cours d’actifs – ce qui
      prépare une crise de la dette le jour où la spéculation se retournera ?

      Pas tout à fait: même si “l’endettement anticipe-t-il une production qui permettra son remboursement”, cela suppose que lorsque cette production se réalise on l’utilise pour payer l’endettement,
      et non pour consommer. Or, ces dernières trente années, on a fait exactement l’inverse. On s’est endetté pour construire des infrastructures, et au lieu d’utiliser leurs fruits pour payer
      l’endettement (et préparer ainsi leur renouvellement), on a consommé.

      Quant au déficit commercial, tu ne pourras pas me reprocher de ne pas en avoir parlé ! mais il est financé, et même produit, par les mouvementsde capitaux…

      Je ne vois pas comment les “mouvements de capitaux” peuvent “produire” le déficit commercial. Pourrais-tu expliquer, s’il te plait ?

       

  12. J. Halpern dit :

    “Je faisais référence à cette idéologie qui fait des “marchés financiers” l’alpha et l’oméga de tous les problèmes, en oubliant qu’il y a aussi des déséquilibres redoutables dans l’économie
    réelle”

    C’est bien ce que je pensais, mais as-tu de solides raisons de m’amalgamer à cette “idéologie” ?

    “lorsque cette production se réalise on l’utilise pour payer l’endettement, et non pour consommer.”

    En fait c’est les deux à la fois : la production elle-même est consommée (ou investie) et en même temps le revenu qui en est la contrepartie sert au remboursement.

    “je ne vois pas comment les “mouvements de capitaux” peuvent “produire” le déficit commercial. Pourrais-tu expliquer, s’il te plait ? “

    Une entrée nette de capitaux accroît les ressources qui, sauf variation du taux de change, génèrent des importations supplémentaires équivalentes.(soit on importe directement, soit ces entrées
    initient une croissance économique qui elle même accroît les revenus, donc les importations).

    • Descartes dit :

      C’est bien ce que je pensais, mais as-tu de solides raisons de m’amalgamer à cette “idéologie” ?

      Je crois en avoir: lorsque tu écris “Le problème c’est qu’au lieu d’avoir tiré la production à un taux raisonable, l’endettement s’est englouti dans des boucles spéculatives qui ne produisent
      jamais de richesses réelles en face des dettes”, tu sembles attribuer un déséquilibre de l’économie “réelle” à une question purement financière. Quand tu écris plus loin que “le déficit
      commercial (…) est produit par des mouvements de capitaux”, là encore, tu fais le même type de raisonnement. Maintenant, si j’ai mal interprété ta position, je m’en excuse par avance.

      Je crois qu’il ne faut pas confondre deux processus qui sont paralèlles. D’un côté, le gonflement d’une “bulle” financière, conséquence de la déréglementation des marchés financiers et des
      politiques monétaires de désinflation. D’un autre, la désindustrialisation et l’abandon des activités productives accompagné d’une sur-consommation sous l’effet de politiques libérales. Les deux
      phénomènes ne sont pas indépendants, mais l’un n’est pas non plus la conséquence de l’autre.

      En fait c’est les deux à la fois : la production elle-même est consommée (ou investie) et en même temps le revenu qui en est la contrepartie sert au remboursement.

      Non. Ce que tu décris, c’est l’immaculée conception de la richesse. Tu fais l’erreur de raisonner en monnaie et non en biens réels, comme si le prêteur une fois remboursé ne faisait rien de la
      monnaie qu’il récupère. Pour simplifier, fais le raisonnement en biens réels. Monsieur X possède une machine à coudre qu’il prête à monsieur Y pendant dix ans (sa durée d’amortissement). Monsieur
      X utilisera la machine pour coudre des chemises, et s’engage à payer en chemises la valeur de la machine (remboursement du capital) et de donner à X la moitié des chemises qui resteront après
      cette déduction (payement des intérêts, ou pour être précis, du dividende). On voit bien qu’en bout de processus la richesse supplémentaire disponible pour être consommée n’est que l’autre moitié
      du réliquat, et non la totalité.

      Une entrée nette de capitaux accroît les ressources qui, sauf variation du taux de change, génèrent des importations supplémentaires équivalentes.

      Pas du tout. Si je rentre des capitaux et je les mets dans un coffre fort, cela ne genère rien du tout. Je crois que tu vois une causalité là ou il n’y a que coïncidence: la simple application du
      principe de conservation oblige à ce que le flux des paiements équilibre le déficit commercial. En d’autres termes, si j’importe pour 2000 € et que j’exporte pour 1000 €, il faut bien que je
      reçoive 1000 € de quelque part pour pouvoir payer les factures. Mais cela n’implique nullement qu’il y ait un rapport de cause à effet: s’il y a causalité, ce serait plutôt une causalité inverse:
      d’abord j’achète des biens dont j’ai besoin, et puis je vais chez les banquiers emprunter ce qu’il me faut pour payer la facture…

  13. Trubli dit :

    Je ne crois pas à la responsabilité collective.

    Je ne souhaite pas qu’on me mette dans le même sac que les “idiots” qui ont voté Pompidou ou VGE ou Mitterand ou Chirac ou Sarkozy. Que ces gens là assument leur responsabilités et leur
    culpabilité. 

    • Descartes dit :

      Je ne souhaite pas qu’on me mette dans le même sac que les “idiots” qui ont voté Pompidou ou VGE ou Mitterand ou Chirac ou Sarkozy.

      Dans ce cas là, il faudrait te mettre dans le sac des “idiots” qui ont voté Poher, Mitterrand, VGE, Jospin ou Royal. Parce que vois-tu, c’est là l’alternative…

      On ne peut pas réclamer un régime démocratique et ensuite rejeter la responsabilité collective. Parce que le régime démocratique est par essence lié à l’idée que chacun assume une partie de la
      responsabilité pour le gouvernement que nous élisons, même s’il n’a pas voté pour lui.

  14. Trubli dit :

    “Dans ce cas là, il faudrait te mettre
    dans le sac des “idiots” qui ont voté Poher, Mitterrand, VGE, Jospin ou Royal. Parce que vois-tu, c’est là l’alternative…”

     

    Alternance surement. Alternative
    certainement pas. Par exemple je n’ai pas voté au second tour de la présidentielle de 2007, parce qu’entre une folle et un incompétent beau parleur…

    • Descartes dit :

      Ca ne change rien. Dès lors qu’on accepte de jouer le jeu démocratique, on accepte ses règles. La première de ces règles est que le gouvernement issu du processus électoral représente l’ensemble
      des citoyens, et pas seulement ceux qui l’ont élu. Et que nous assumons collectivement la responsabilité pour les décisions issues du processus démocratique, même si elles nous déplaisent.

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