Un fantasme parcours la France, et ce fantasme est celui de l’autodéfense. Ces dernières semaines, plusieurs faits divers ont mis cette notion à la une. Il y eut ce retraité, assassiné alors qu’il cherchait à empêcher la fuite de deux braqueurs. Il y eut ce bijoutier qui, après avoir été frappé et pillé, tire sur ses agresseurs en fuite et atteint mortellement l’un d’entre eux. La couverture médiatique dont ces faits ont bénéficié, la réaction populaire, et surtout la gêne perceptible dans les réactions de la classe politique en général et du camp progressiste en particulier montre que ces faits méritent qu’on s’y arrête.
Ces faits ne sont que la partie émergée d’un très gros iceberg, celui de « l’insécurité ». Un homme politique aujourd’hui injustement oublié a dit que la sécurité était la première des libertés. Il n’avait pas tort. Historiquement, la motivation première dans la constitution des sociétés humaines a toujours été la sécurité. Les hommes se sont regroupés parce qu’ils ont compris qu’ensemble on est plus forts. Plus forts pour se protéger des éléments en construisant des abris. Plus forts pour se protéger des prédateurs – animaux mais aussi humains. Plus forts pour se protéger des aléas de la chasse ou des cultures en partageant les fruits.
En France, on lit beaucoup trop Jean-Jacques Rousseau et trop peu Thomas Hobbes. Ce philosophe est d’ailleurs quasi inconnu dans le débat politique en France. Pourtant, ce contemporain de René Descartes – avec qui il eut des rapports conflictuels à propos du sens du « cogito » – reste l’un des premiers philosophes politiques qui cherchèrent à fonder les institutions politiques sur une conception rationnelle qui laisse de côté la théologie ou la tradition. Hobbes rejette le postulat aristotélicien selon lequel l’homme serait naturellement un « animal politique ». Pour lui, si l’homme se regroupe pour constituer des sociétés ce n’est pas parce qu’il suit « nature », mais par crainte et par intérêt. L’état de nature, conçu plus comme un état théorique d’un homme sans société que comme une réalité historique, serait celui « où règne la guerre de tous contre tous, condamnés à une vie solitaire, pauvre, désagréable, brutale et brève ». C’est donc la crainte de la mort et de la brutalité et la recherche d’une plus grande richesse qui pousse les hommes à se réunir et à conclure entre eux un contrat réglant les droits et les devoirs de chacun en société.
Le problème de ce contrat, c’est que chaque individu a personnellement tout intérêt à le violer. Dans une société où les citoyens respectent généralement le contrat, j’ai tout intérêt à être l’un de ceux qui le violent. Le « passager clandestin » gagne à ne pas payer son billet: il bénéficie gratuitement de la même prestation que les passagers qui ont respecté le contrat et payé leur voyage sans avoir à débourser un centime. Cette situation n’est pas seulement injuste, elle est un germe de dissolution sociale : après tout, c’est la contribution des voyageurs qui permet au train de rouler. S’ils assument tous le comportement que leur dicte leur intérêt individuel immédiat, le train disparaîtra et tous les voyageurs en pâtiront.
C’est pourquoi le contrat de droits et obligations ne suffit pas. Pour Hobbes, ce contrat doit aussi être un contrat de souveraineté, délégant à une entité politique, le « Léviathan » – c'est-à-dire l’Etat – le pouvoir répressif pour s’assurer que chacun satisfait effectivement aux obligations qu’il a contracté. Il faut bien comprendre que le « contrat » dont parle Hobbes ne lie pas les sujets au prince. Ce n’est pas un contrat asymétrique de « protection », caractéristique du système féodal, où le seigneur légitimait son autorité et ses privilèges par son devoir de protéger ses sujets. Le contrat hobbésien est un contrat entre les citoyens, par lequel ceux-ci renoncent à leur « liberté naturelle » et délèguent à une autorité le pouvoir de faire des règles et surtout le pouvoir répressif de les faire obéir.
Le raisonnement de Hobbes a une grande qualité : celle de remettre la « nature » à sa place. Là ou Rousseau nous enjoint de « craindre de violer la nature », le réalisme hobbésien montre combien la construction sociale est artificielle. Et ce faisant, Hobbes réhabilité la société : loin de constituer comme pour Rousseau le lieu où l’être humain « naturellement bon » est corrompu, la société est le mécanisme qui nous sort de « l’état de nature » pour nous civiliser. Vous commencez à voir pourquoi, dans les années qui ont suivi mai 1968, Hobbes a été jeté aux oubliettes alors que Rousseau a été porté aux nues. Rousseau, c’est la négation du rôle nécessaire de la répression. Hobbes, au contraire, montre que c’est un élément fondamental du rôle de l’Etat pour civiliser les rapports entre les hommes.
La fonction répressive déléguée au « Léviathan » hobbésien contient en germe la renonciation par les individus à exercer une justice personnelle. On y trouve en germe l’idée du monopole étatique de la violence légitime, indissociable de l’idée moderne de l’Etat. Cette idée n’est pas naturelle dans toutes les cultures politiques. Ainsi, par exemple, la culture américaine est marquée par une méfiance quasi-maladive envers l’Etat, au point de constitutionnaliser le droit de posséder et de porter des armes, droit conçu comme un rempart contre un pouvoir excessif et tyrannique de l’Etat. Mais en France, l’idée du monopole de la violence légitime dans les mains de l’Etat repose sur un consensus quasi-général. Même ceux qui tendent à justifier un acte particulier d’autodéfense hésitent à généraliser la justification à l’autodéfense en général. La conscience des abus auxquels conduit inévitablement la justice personnelle soutiennent fortement ce consensus.
Mais que se passe-t-il lorsque l’Etat ne remplit plus, parce qu’il ne le peut pas ou, pire, parce que ceux qui en ont la charge ne le veulent pas, le rôle répressif ? C’est la question qui nous est posée aujourd’hui. Après trente ans de domination quasi-générale d’une « pensée unique » qui fait de l’acte répressif un acte contre-nature et qui rêve d’une société débarrassée de toute répression, la question de la répression – et en particulier de savoir ce qu’est une répression légitime – est devenue tabou. Et parce que le propre du tabou est d’empêcher de penser, on se trouve désarmé lorsque la situation se présente concrètement.
Prenons un exemple : le lieu, la commune de La Roquette, dans le Var, dont la population n’atteint pas 5000 habitants (1). Une commune qui possède un stade municipal, dont la pelouse vient d’être refaite par la commune moyennant quelques milliers d’euros. Arrivée d’un groupe de « gens du voyage » : le portail du stade est fracturé, deux cents caravanes s’installent sur la pelouse du stade. Les gendarmes, arrivés sur les lieux, ne peuvent que constater l’installation. Ils n’ont pas les effectifs suffisants pour agir, et de toute manière la Préfecture ne leur donne pas l’autorisation. Elle n’a pas envie de se voir traîner dans la boue par les informations régionales sur fond de femmes et enfants éplorés. Devant l’insistance du maire, les gendarmes dresseront tout de même un procès verbal d’infraction qui, en droit, leur permettrait de confisquer les véhicules utilisés pour commettre l’infraction. Devant cette menace, les « gens du voyage » partiront tout de même le jour suivant, laissant derrière eux une pelouse dévastée et une dizaine de milliers d’euros de dégâts qui bien entendu seront à la charge de la commune, donc des citoyens-contribuables.
Vous me direz que ce sont des pauvres gens, qu’il faut bien qu’ils vivent quelque part, que… le fait n’en demeure pas que les lois ont été bafouées sans que l’Etat n’utilise la violence légitime dont il dispose pour faire cesser l’abus.. Que les citoyens respectueux des lois sont appelés à payer les dégâts provoqués par un groupe social qui, en toute impunité, fait supporter ses choix de vie par les autres sans leur demander leur avis.
Deuxième exemple : le lieu, une parcelle agricole quelque part en France. Sur cette parcelle, l’INRA conduit une expérience de culture de vigne transgénique en plein champ. Et un beau matin, un groupe de « faucheurs volontaires » débarque, et au nez des gendarmes dévaste le champ, détruisant ainsi le résultat de plusieurs années de travaux scientifiques et plusieurs dizaines de millions d’euros d’argent public. Pourtant, l’INRA dispose de toutes les autorisations exigées par la loi, et aucune négligence ne lui est reprochée. Et que croyez vous qu’il arriva ? Et bien, personne n’est puni (2). Personne n’est obligé de rembourser les dégâts. Le cochon de contribuable, celui qui travaille dur et paye ses impôts, réglera la facture.
Que devient dans ces conditions le contrat social ? Comment peut-on exiger des contribuables qu’ils continuent à payer les impôts locaux alors que l’Etat, gardien de la loi, admet sans réagir qu’un groupe social dégrade ce qui est payé avec eux ? Si le maire de La Roquette ou le directeur de l’INRA avaient pris un fusil et tiré pour défendre le bien public dont ils ont la garde, aurait-il fallu les mettre en prison, ou bien leur donner la Légion d’Honneur ?
Vous serez peut-être surpris que, pour parler de l’autodéfense, j’aie volontairement choisi des exemples qui nous éloignent de la confrontation classique « bijoutier / voyou ». Si je l’ai fait, c’est pour qu’on comprenne bien ce qui est en jeu ici. L’idéologie devenue dominante depuis la fin des années 1970 qui perçoit toute limite – même lorsqu’elle dérive de la loi, expression de la volonté générale – à la volonté toute puissante de l’individu comme une insupportable atteinte aux droits de l’homme a abouti à affaiblir l’Etat au point que celui-ci hésite à utiliser les pouvoirs dont il dispose pour faire appliquer les règles communes. De l’idée que « force doit rester à la loi » on est passé à une conception de négociation permanente où quelques centaines voire quelques dizaines de personnes peuvent dévaster un stade où une parcelle, empêcher la construction d’un ouvrage public ou la recherche minière, mettre en coupe réglée une cité et cela sans que l’Etat ne fasse mine d'agir pour faire respecter la loi.
Cette idéologie a pour corrélat une deuxième dérive, celle de l’inversion des rôles. Le « voyou » devient facilement, aux yeux de l’opinion, une « victime ». Ce mouvement vient de loin, de la fin des années 1960 pour être précis. Après la trahison impardonnable de la classe ouvrière, qui préféra la ligne raisonnable du PCF et la CGT aux lendemains qui chantent promis par les groupuscules gauchistes, la jeunesse dorée du quartier latin s’est cherché d’autres icônes. Parmi celles-ci, apparaît la figure du « taulard » (3). Le sophisme était imparable : la société est injuste, la société enferme les taulards, ergo, les taulards sont injustement enfermés. On a alors vu fleurir toute une galerie de personnages élevés au rang de Comtes de Montecristo des temps modernes par une gauche se réclamant des mânes de Michel Foucault : Jacques Mesrine, Roger Knobelspiess… et bien d’autres. Autour de ces personnages, s’est développé une véritable inversion : ces gens, qui avaient pris des vies humaines – et en général pour des motifs bassement matériels – sont devenus les victimes innocentes d’une société injuste et répressive. Un mouvement suffisamment puissant pour que François Mitterrand, tout frais élu, prenne la peine de gracier Knobelspiess (4). A trente ans de distance, l’indifférence de cette gauche bienpensante pour les victimes de ces personnages a de quoi glacer le sang (5).
La gauche bienpensante a tort de répondre à l’affaire du bijoutier niçois en poussant des cris d’orfraie sur le « déchaînement de haine » sur les réseaux sociaux et autres balivernes du même genre. Elle a tort aussi de chercher à nous attendrir sur la « victime », ce jeune homme qui à 19 ans capitalisait sur son nom une dizaine de condamnations pour faits de vol et de violence. En faisant cela, elle ne rend service à personne, pas même aux jeunes qui seraient, comme le braqueur de la bijouterie niçoise, tentés de prendre ce type de risques. La tragédie de Nice l’est doublement. C’est une tragédie parce qu’un homme est mort, et que cela ne doit jamais banalisé. C’est une tragédie aussi parce qu’en punissant le bijoutier – et il doit être puni parce qu’il a violé la loi en se faisant justice lui-même – on renforcera cette impression que l’Etat protège les voyous et punit les honnêtes gens. C'est ce dernier point qui devrait pousser les progressistes de ce pays à sortir d'une réflexion manichéenne pour se poser la véritable question: comment on fait pour que les honnêtes gens soient convaincues que l'Etat est de leur côté et fera son possible pour que les lois soient exécutées ?
Pour le dire autrement, il est grand temps de réhabiliter la fonction répressive. Le dicton « qui aime bien châtie bien » contient une profonde sagesse. Punir, contrairement à ce que les bonnes âmes veulent nous faire croire, ce n’est pas stigmatiser. C’est donner de l’importance à l’acte, et donc à la personne qui le commet. Nous punissons nos enfants parce qu’ils sont importants pour nous, et que nous ne voulons pas qu’ils prennent le mauvais chemin. La société devrait punir ses délinquants exactement pour la même raison. Ne pas punir, c’est faire preuve d’indifférence, quand ce n’est pas de lâcheté bureaucratique. Comment un délinquant pourrait réaliser la gravité de ses actes si le juge lui-même lui accorde son indulgence ? En nous abstenant de punir, nous ne rendons pas service au délinquant, au contraire. Nous lui donnons l’illusion de l’impunité, et l’encourageons donc à commettre des faits encore plus graves. Jusqu’au jour où un bijoutier excédé lui collera une balle dans le dos. Et ce jour là on dira : c’est la faute au « climat de haine entretenu par le Front National » et autres bêtises du même style.
L’idée que la répression est négociable, que le délinquant est lui aussi une « victime » à qui la société aurait mauvaise grâce de lui reprocher de ne pas respecter ses lois, mettent en danger le pacte hobbésien par lequel les citoyens ont délégué à l’Etat le soin d’exercer la violence à leur place en échange d’une renonciation à la violence privée. Les « libéraux-libertaires » se sont battus pour affaiblir la capacité répressive de l’Etat sans s’apercevoir que c’est cette capacité, et le fait qu’elle soit effectivement utilisée, qui constitue la seule barrière contre la renaissance de la violence privée. Là où l’Etat est faible, là où il est incapable de faire appliquer les lois, d’autres s’en chargeront y compris par la violence.
Avec la notion de répression, il faut aussi réhabiliter une autre notion qui est aujourd’hui anathème, la notion de peur. Nous avons tous intérêt à ce que l’Etat fasse peur. Il faut que le citoyen ait peur de l’instituteur, du policier, du juge, de l’inspecteur des impôts. Parce que c’est cette peur qui nous empêche de faire bien des bêtises. Le jeune qui a peur de frapper son instituteur, peur d’insulter le policier, peur de frauder le fisc, peur de se retrouver devant le juge ou d’aller en prison, peur de sauter la clôture d’un transformateur EDF aura un bien meilleur départ dans la vie que celui chez qui cette peur est inconnue. L’homme courageux, ce n’est pas celui qui n’a pas peur, mais celui qui agit malgré la peur. Malheureusement, on confond facilement le courage avec l’inconscience. Ma grand-mère, paix à son âme, disait que « la peur du gendarme est le début de la sagesse ». Elle avait raison.
Descartes
(1) Rappelons que la loi ne fait pas obligation aux communes de moins de 5000 habitants de prévoir une aire de stationnement pour les « gens du voyage ».
(2) Pour être complet, il faut noter que depuis quelque temps la justice a commencé à sévir dans des cas du même type. Mais pour le moment, aucune condamnation obligeant les personnes concernés à indemniser intégralement les dégâts n’a été prononcée ou même, à ma connaissance, requise.
(3) Ainsi, par exemple, « Libération » qui était à l’époque le journal de la jeunesse dorée du quartier latin, ouvre une rubrique « taulards » dans sa page courrier, qui permet à ses lecteurs d’établir des contacts épistolaires avec les pensionnaires des prisons…
(4) Le gentil Knobelspiess ne se rangera pas pour autant. Condamné en 1972 à 15 ans de prison pour un braquage qu’il n’nie avoir commis, il bénéficiera d’une campagne d’opinion réunissant tout ce que la France bienpensante compte de signataires de pétitions professionnels. Gracié par Mitterrand en 1981, il sera arrêté en flagrant délit – difficile cette fois-ci de nier – lors du braquage de la Banque Populaire de Thuir en 1987. Ce braquage lui lui vaudra une nouvelle condamnation à 9 ans de prison prononcée en 1989, qui s’ajoute à celle prononcée en 1987 pour sa participation à une fusillade à Saint-Pierre-les-Elbeuf en 1982, l’année suivant sa grâce présidentielle. Il plaidera alors le guet-apens policier et l’acharnement d’une justice qui ne lui a jamais vraiment pardonné… sans grand succès. Il faut dire que le climat en 1987 n’était plus du tout celui des années 1970… Notons d’ailleurs que Knobelspiess fut l’auteur de plusieurs livres dans lesquels il se présente invariablement comme une victime de la société.
(5) Dans le même registre, il n’est pas inintéressant de lire les élucubrations des associations qui militent aujourd’hui pour la libération des derniers détenus d’Action Directe. Là encore, on n’a pas de mots assez forts pour décrire « l’acharnement de l’Etat » contre ces pauvres prisonniers. Pas un mot, en revanche, sur les gens que ces criminels – pardon, ces « militants révolutionnaires » – ont envoyé prématurément dans la tombe.
Bonsoir Descartes,
voilà un billet qui fait vraiment du bien! Je croyais devenir fou, tant l’inversion des valeurs a atteint un degré sans précédent depuis que je suis venu au monde, soit au début des années 70. En clair, les médias bien-pensants défendent systématiquement les délinquants au titre de victime de la société. A preuve, la mère Taubira projette de ne plus exécuter les peines de moins de 5 ans, soit pratiquement tous les délits! Il ne faut pas être trop injuste, Rachida Dati avait ouvert la voie, en n’exécutant plus les peines inférieures à 2 ans…
A vrai dire, je me demande ce qui est premier dans ce raisonnement: est-ce parce qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses que les gouvernements habillent cette pénurie d’angélisme ou est-ce que le rousseauisme est à l’origine du refus de dépenser de l’argent non pour la répression pure, mais simplement pour exécuter des décisions judiciaires?
De toute façon, le gouvernement actuel est conséquent avec sa philosophie libérale-libertaire, mais également avec une certaine haine du peuple…
@CVT
[En clair, les médias bien-pensants défendent systématiquement les délinquants au titre de victime de la société. A preuve, la mère Taubira projette de ne plus exécuter les peines de moins de 5 ans, soit pratiquement tous les délits! Il ne faut pas être trop injuste, Rachida Dati avait ouvert la voie, en n’exécutant plus les peines inférieures à 2 ans…]
Oui. Et tout cela au nom d’un très étrange raisonnement selon lequel puisque une proportion non négligéable des gens qui sortent de prison récidive, il faut conclure que la prison est inefficace. Avec ce genre de raisonnement, on devrait conclure que la médecine est totalement inefficace, puisque 100% des patients finissent par mourir quelque soient les soins qui leurs sont prodigués…
Le débat autour de la prison permet d’évacuer le véritable problème de notre système pénal, qui est sa lenteur. Pour qu’un châtiment soit dissuasif, il faut que le délinquant puisse faire le lien entre l’acte et sa conséquence. Pour cela, il faut que le châtiment soit rapide. Pour un voleur qui est convoqué au tribunal deux ans après l’infraction, qui a eu pendant ce temps une illusion d’impunité et commis d’autres infractions dans cette période, la condamnation est peu efficace.
Le problème est qu’une répression rapide est une répression coûteuse, et que les classes moyennes qui supportent l’essentiel de l’effort fiscal ne sont pas disposées à payer pour une justice qui bénéficie d’abord aux couches populaires, les plus exposées à la délinquance. C’est pour cette raison que les autorités politiques décident de ne pas réprimer certains types de délinquance. Il ne reste ensuite qu’à trouver un discours idéologique pour habiller cet abandon, et c’est le discours de "la prison ne sert à rien". Et ce n’est pas irrationnel: dès lors qu’on a décidé de ne pas y mettre les moyens pour que la justice soit rapide, effectivement ce n’est pas la peine de dépenser de l’argent dans les prisons…
[A vrai dire, je me demande ce qui est premier dans ce raisonnement: est-ce parce qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses que les gouvernements habillent cette pénurie d’angélisme ou est-ce que le rousseauisme est à l’origine du refus de dépenser de l’argent non pour la répression pure, mais simplement pour exécuter des décisions judiciaires?]
Comme disait le vieux Karl, c’est en fait une dialectique. Une classe fabrique l’idéologie qui lui permet de justifier son intérêt en le faisant apparaître comme l’intérêt général en même temps qu’elle fait avancer cet intérêt. L’idéologie anti-répression a le bon goût de réduire le coût de la justice, payé par les classes moyennes, et ses conséquences transfèrent le coût de la délinquance sur les couches populaires. Je ne crois pas qu’il faille chercher beaucoup plus loin la raison de l’adhésion systématique à cette vison angélique des classes moyennes, alors que vous noterez bien combien les couches populaires restent attachées à un système plus répressif.
[De toute façon, le gouvernement actuel est conséquent avec sa philosophie libérale-libertaire, mais également avec une certaine haine du peuple…]
Je ne crois pas qu’il faille parler de "haine". Ce n’est pas une question de sentiments, c’est une question d’intérêts. La couche sociale qui a confisqué le champ politique défend des intérêts, et si elle adhère à l’idéologie "libérale-libertaire" c’est parce que celle-ci permet d’habiller ces intérêts pour qu’ils n’apparaissent pas crûment.
[Le débat autour de la prison permet d’évacuer le véritable problème de notre système pénal, qui est sa lenteur. Pour qu’un châtiment soit dissuasif, il faut que le délinquant puisse faire le lien entre l’acte et sa conséquence. Pour cela, il faut que le châtiment soit rapide. Pour un voleur qui est convoqué au tribunal deux ans après l’infraction, qui a eu pendant ce temps une illusion d’impunité et commis d’autres infractions dans cette période, la condamnation est peu efficace. ]
Désolé, mais cette question ne date pas d’hier: depuis pratiquement toujours, la justice est le parent pauvre des pouvoirs en France. D’ailleurs, on ne parle même pas de pouvoir judiciaire, mais d’autorité judiciaire…
La justice est servile en France, elle est très liée à l’exécutif… Que la séparation exécutif-judiciaire ne soit pas plus marquée que cela ne me pose pas de problème, tant que la justice est efficace, mais ce n’est pas le cas! On peut tolérer l’erreur judiciaire, mais pas l’impunité; or, notre système judiciaire la génère, et c’est l’impunité est la pire des injustices, de celles qui mine la société le plus sûrement…
Je n’aime pas trop faire de comparaison avec l’étranger car chaque pays a une organisation politique qui lui est propre, mais les montants consacrés à l’appareil judiciaire sont parlants: l’Allemagne et la Grande-Bretagne consacrent près de deux fois plus d’argent par habitant que la France pour leur système judiciaire. Et cet écart ne date pas d’hier…
Bref, je cherche à comprendre pourquoi en France, l’Etat veut toujours avoir une justice faible…
["Le problème est qu’une répression rapide est une répression coûteuse, et que les classes moyennes qui supportent l’essentiel de l’effort fiscal ne sont pas disposées à payer pour une justice qui bénéficie d’abord aux couches populaires, les plus exposées à la délinquance. C’est pour cette raison que les autorités politiques décident de ne pas réprimer certains types de délinquance. Il ne reste ensuite qu’à trouver un discours idéologique pour habiller cet abandon, et c’est le discours de "la prison ne sert à rien". Et ce n’est pas irrationnel: dès lors qu’on a décidé de ne pas y mettre les moyens pour que la justice soit rapide, effectivement ce n’est pas la peine de dépenser de l’argent dans les prisons…"]
Le sujet de ce papier est capital en effet et le papier de Descartes très sensé – de même que la plupart des commentaires à cette heure. Et je salue ce retour à Hobbes dont le principe n’a pas pris une ride.
Je ferai quelques remarques marginales, notamment à partir de l’extrait reproduit ci-dessus:
1. Je suis souvent, et là encore, gêné par cette mise en cause permanente des "classes moyennes" par Descartes. Plutôt que d’essayer encore une fois de contester son a priori contre elles, ou cette "agrégation" discutable de tout un tas de gens fort différents à divers égards, je voudrais juste rapporter un propos qui m’a été tenu à ce sujet et qui va bien au-delà de l’intérêt des classes moyennes: "assurer- ou rétablir- la sécurité coûterait très très cher, et donc cela ne sera pas fait tant que l’insécurité n’empêchera pas le bon déroulement des affaires." Et qui principalement fait "des affaires"?
2. Les lenteurs de la justice: un fléau, certes, mais elles sont bien plus importantes en matière civile que pénale, donc l’argument perd une bonne part de sa valeur en matière pénale- et au niveau des "simples" délits en particulier. Et l’effort financier qu’il faudrait faire pour accélérer les choses n’est pas inaccessible, l’exemple de l’Allemagne et celui de la GB le prouve. C’est la volonté politique qui manque.
3. Le problème des prisons et de la récidive, enfin. Complexe car problème à la fois de moyens et d’idéologie -avec interaction dans les deux sens: chez certains, l’habillage est dans un sens, chez d’autres c’est l’inverse, le point commun étant l’hypocrisie. La situation carcérale en France est INDIGNE d’un pays civilisé, avec toutes les conséquences que cela entraine, mais en conclure seulement qu’il faut écarter toute sanction de la case prison est intellectuellement plus que débile. Alors Mme Taubira n’est-elle que débile intellectuellement?
Affaire de moyens seulement? J’en doute fort, même si la question des moyens est réelle.
La pusillanimité de notre société s’observe pareillement dans d’autres domaines, l’école par exemple. C’est mai 68 qui est encore- plus que jamais?- au pouvoir. A savoir la conjonction du libéral-libertarisme.
@CVT
[Désolé, mais cette question ne date pas d’hier: depuis pratiquement toujours, la justice est le parent pauvre des pouvoirs en France. D’ailleurs, on ne parle même pas de pouvoir judiciaire, mais d’autorité judiciaire…]
Et à juste titre. Dans notre tradition républicaine, il ne saurait y avoir un « pouvoir » qui ne soit pas l’expression de la volonté populaire. Faire de la justice un « pouvoir » implique lui reconnaître, en plus de la fonction de faire appliquer les lois, la faculté de les faire. C’est le cas aux Etats-Unis, où les juges ont la possibilité de changer les lois : ainsi, c’est une décision de la Court Suprême (Roe vs. Wade) et pas un vote parlementaire qui y a légalisé l’avortement. En France – comme dans beaucoup de pays européens – on n’admet pas que des personnalités nommées et inamovibles puissent décider ce qui relève de la volonté générale. Et c’est pourquoi la justice est une « autorité », au même titre que l’autorité de la concurrence ou l’autorité se sûreté nucléaire, et non pas un « pouvoir ». Une entité qui applique les lois faites par les représentants du peuple.
Il est inexact de dire que la justice ait de tout temps en France été le « parent pauvre ». Tout au long du XIXème siècle et jusqu’à la deuxième guerre mondiale, la justice était fort bien dotée et le métier de magistrat un métier prestigieux et bien rémunéré. C’est à partir de la fin des années 1970 que la justice suit la même pente que l’ensemble des services publics « régaliens »…
[La justice est servile en France, elle est très liée à l’exécutif… Que la séparation exécutif-judiciaire ne soit pas plus marquée que cela ne me pose pas de problème, tant que la justice est efficace, mais ce n’est pas le cas!]
Arrêtons de confondre les problèmes. Que la justice soit « liée à l’exécutif » est peut-être un problème lorsqu’il s’agit de poursuivre un homme politique ou un « notable ». Mais l’immense majorité des justiciables ne sont pas des hommes politiques et encore moins des notables. Ce sont des gens comme toi et moi. Si la justice est inefficace à l’heure de mettre derrière les barreaux un braqueur de bijouterie quatorze fois récidiviste, ce n’est pas parce qu’elle est « trop proche de l’exécutif ».
[On peut tolérer l’erreur judiciaire, mais pas l’impunité;]
On ne peut tolérer aucune des deux. La justice est humaine, et parce qu’elle est humaine elle est faillible. L’erreur judiciaire est donc une fatalité. Mais cela ne le rend pas « tolérable ». Voir un criminel libre est « intolérable », voir un innocent en prison aussi. Une bonne justice est un compromis très délicat entre ces deux risques.
[Je n’aime pas trop faire de comparaison avec l’étranger car chaque pays a une organisation politique qui lui est propre, mais les montants consacrés à l’appareil judiciaire sont parlants: l’Allemagne et la Grande-Bretagne consacrent près de deux fois plus d’argent par habitant que la France pour leur système judiciaire. Et cet écart ne date pas d’hier…]
D’où sortent ces chiffres ? Je crains que ce genre de comparaison soit peu probante. La justice britannique est infiniment pire que la notre. Non seulement elle est très coûteuse – le recours à l’avocat étant obligatoire et les professions juridiques étant très bien rémunérées, mais elle est très aléatoire – du fait de l’enchevêtrement de normes quelquefois très archaïques et de son caractère largement coutumier – et totalement incompréhensible pour le citoyen. Je ne connais pas bien la justice allemande, et je ne peux donc pas te répondre sur ce point. Mais comparée à la justice britannique, la notre est infiniment préférable.
[Bref, je cherche à comprendre pourquoi en France, l’Etat veut toujours avoir une justice faible…]
Je ne vois pas d’où tu sorts que la justice est « faible » en France… La justice en France est mal financée, comme sont mal financés tous les services régaliens. Et cela tout simplement parce que les services régaliens ne permettent pas de gagner des voix. On gagne des voix en finançant des profs, des infirmières ou des gardes d’enfant. On ne gagne pas des voix en payant des policiers, des juges, des militaires, des inspecteurs.
@albert
[1. Je suis souvent, et là encore, gêné par cette mise en cause permanente des "classes moyennes" par Descartes.]
J’ai déjà expliqué pourquoi : à mon sens, les classes moyennes dominent aujourd’hui la scène politique. Chercher à comprendre notre société sans inclure dans le raisonnement cet acteur essentiel me paraît un exercice peu productif.
[je voudrais juste rapporter un propos qui m’a été tenu à ce sujet et qui va bien au-delà de l’intérêt des classes moyennes: "assurer- ou rétablir- la sécurité coûterait très très cher, et donc cela ne sera pas fait tant que l’insécurité n’empêchera pas le bon déroulement des affaires." Et qui principalement fait "des affaires"?]
La question n’est pas tellement « qui » mais « avec qui ». Celui qui vent ne peut faire des affaires que si ceux qui achètent continuent à le faire. Si les classes moyennes ont peur d’aller acheter leurs iPad, Apple ne tardera pas à avoir des ennuis. C’est pourquoi la sécurité est convenablement assurée dans le 7ème arrondissement, ou l’on trouve facilement un Apple Store, et pas à Clichy-sous-Bois, ou l’on n’en trouve pas…
[2. Les lenteurs de la justice: un fléau, certes, mais elles sont bien plus importantes en matière civile que pénale,]
C’est d’abord actuellement inexact. La justice pénale est beaucoup, beaucoup plus lente que la justice civile. Un exemple au hasard : on juge cette semaine en première instance l’ancien président de l’association des élèves de l’Ecole Centrale, accusé d’homicide involontaire dans la mort par consommation excessive d’alcohol d’un jeune dans une fête organisée par l’association. Les faits se sont déroulés début 2005. Il a donc fallu plus de sept ans pour juger une affaire qui ne présente aucune difficulté particulière, ou les faits ont été immédiatement établis et l’accusé est évidement désigné. Je ne connais pas d’affaire civile aussi simple qui ait pris un temps aussi long pour être jugée.
Mais à supposer même que la justice civile soit aussi lente que la justice pénale, le problème est de nature différente. La justice pénale est faite pour dissuader, alors que la justice civile est faite pour dire le droit dans un conflit. Ce sont deux choses complètement différentes.
[Et l’effort financier qu’il faudrait faire pour accélérer les choses n’est pas inaccessible, l’exemple de l’Allemagne et celui de la GB le prouve. C’est la volonté politique qui manque.]
Je ne vois pas très bien la « preuve ». Qu’est ce qui vous fait penser que la justice pénale britannique soit plus rapide que la justice pénale française ?
[La situation carcérale en France est INDIGNE d’un pays civilisé,]
Comment expliquez vous alors qu’elle soit aussi peu dissuasive ? Si les conditions sont si « indignes », pourquoi les jeunes des cités n’éprouvent pas la crainte d’y retourner après une première expérience ?
Les conditions d’emprisonnement ne sont pas, c’est le moins qu’on puisse dire, agréables. Et c’est normal : si la prison doit être dissuasive, elle ne doit donner à personne l’envie d’y revenir. On se trouve dans le cadre de ce qu’on appelle le « théorème de Badinter » : aucune société ne peut permettre que la vie en prison soit plus agréable que celle des personnes libres les plus pauvres. Autrement, ces personnes ne seraient pas dissuadées de violer la loi…
D’abord je voudrais rappeler que nous dissertons "autour" de l’auto-défense et que j’ai déjà dit clairement mon accord avec l’essentiel de votre article. Point capital philosophiquement et concrètement par rapport au "débat" actuel.
Cela dit, la réflexion s’élargissant, il est normal que des divergences d’analyse apparaissent, notamment au sujet de cette notion de classe moyenne et conséquemment du rôle de ladite classe dans le sujet qui nous occupe.
["Chercher à comprendre notre société sans inclure dans le raisonnement cet acteur essentiel me paraît un exercice peu productif."]
Je n’exclus pas du tout cet acteur, je conteste seulement ce rôle de bouc émissaire que vous lui conférez -ce n’est pas pareil.
[" Un exemple au hasard : on juge cette semaine en première instance l’ancien président de l’association des élèves de l’Ecole Centrale, accusé d’homicide involontaire dans la mort par consommation excessive d’alcool d’un jeune dans une fête organisée par l’association. Les faits se sont déroulés début 2005…."]
Vous avouerez que cet exemple particulier n’est pas significatif de la généralité.
Il est beaucoup plus fréquent de lire dans les faits-divers que de jeunes délinquants -pour affaires plus banales mais pas négligeables cependant – "seront convoqués dans [x] mois devant le tribunal correctionnel" (ils auront ainsi tout le temps d’oublier leur méfait (s’ils n’en commettent pas d’autres) et ceci justifiera de surcroît qu’il n’y ait plus lieu de les sanctionner (ou alors par un énième sursis).
[La situation carcérale en France est INDIGNE d’un pays civilisé,]
[" Comment expliquez vous alors qu’elle soit aussi peu dissuasive ? Si les conditions sont si « indignes », pourquoi les jeunes des cités n’éprouvent pas la crainte d’y retourner après une première expérience ?"]
Là ,c’est vraiment le plat de résistance central. Je dirai donc, en vrac:
-Oui, les conditions carcérales sont indignes dans la plupart des prisons les plus anciennes, vétustes et non entretenues, et où de surcroît les caïds font la loi, type les Baumettes à Marseille. Elles sont indignes parce que humiliantes, insécures et destructrices pour les condamnés ( et souvent les prévenus mélangés) qui autrement seraient récupérables (il y en a, même s’il est certain que tous ne le sont pas), et elles sont pour d’autres une école du vice .Ce dernier point permet justement aux bonnes âmes (adeptes des amalgames justement) de dire que la prison "n’est pas la solution". Voilà justement encore un domaine où la "pensée" de la plupart des autorités et des commentateurs mélange tout comme il est malheureusement d’usage dans notre société aujourd’hui. Une pensée-marmelade qui, encore malheureusement, n’est pas seulement le propre des classes moyennes.
@Albert
[Je n’exclus pas du tout cet acteur, je conteste seulement ce rôle de bouc émissaire que vous lui conférez -ce n’est pas pareil.]
Je n’ai jamais fait des classes moyennes un « bouc émissaire ». Au contraire : comment l’acteur central de l’espace politique pourrait-il être un « bouc émissaire » ? Il ne reste pas moins que l’essentiel des politiques mises en œuvre aujourd’hui visent à protéger les intérêts de l’alliance conclue entre la bourgeoisie et les classes moyennes.
[" Un exemple au hasard : on juge cette semaine en première instance l’ancien président de l’association des élèves de l’Ecole Centrale, accusé d’homicide involontaire dans la mort par consommation excessive d’alcool d’un jeune dans une fête organisée par l’association. Les faits se sont déroulés début 2005….". Vous avouerez que cet exemple particulier n’est pas significatif de la généralité.]
Comme tout exemple. Mais cela fait réflechir…
[Oui, les conditions carcérales sont indignes dans la plupart des prisons les plus anciennes, vétustes et non entretenues, et où de surcroît les caïds font la loi, type les Baumettes à Marseille. Elles sont indignes parce que humiliantes, insécures et destructrices pour les condamnés]
Vous ne répondez toujours pas à la question : si tel étaitle cas, comment expliquez que des jeunes qui pour certains ont déjà tâté de ces prisons vétustes, non entretenues, ou les caïds font la loi, indignes, humiliantes, insécures et destructrices n’aient pas de crainte d’y retourner ? Plus vous noircissez le tableau, plus le phénomène devient inexplicable…
["Vous ne répondez toujours pas à la question : si tel était le cas, comment expliquez que des jeunes qui pour certains ont déjà tâté de ces prisons vétustes, non entretenues, ou les caïds font la loi, indignes, humiliantes, insécures et destructrices n’aient pas de crainte d’y retourner ? Plus vous noircissez le tableau, plus le phénomène devient inexplicable…"].
Mais je vais le faire, cher Descartes, non sans avoir d’abord relevé que vous avez tronqué mon propos en me citant.
Je m’explique:
1°-la question de la situation carcérale m’a toujours intéressé -pour plusieurs raisons, la première étant que nul n’en est absolument à l’abri. Plus largement, je déplore le débat manichéen concernant la réinsertion des détenus. Je pense que certains sont parfaitement capables de retourner dans la société, d’autres pas, d’autres enfin: peut-être que oui, peut-être que non -affaire d’individus, affaire de circonstances- y compris les conditions de détention , qui doivent toujours respecter la dignité comme la sécurité des uns et des autres.(ce qui ne signifie pas le confort ou l’agrément, ne mélangeons pas tout).
2°- pour répondre plus précisément à votre question, le retour de certains jeunes à la case prison s’explique par diverses causes qui peuvent tenir à ce que sont profondément certains (mauvaise graine, faiblesse de caractère…etc) ou aux conditions sociales (avant ou après la prison), mais également aux conditions de la détention -qui peuvent amplifier une révolte préalable contre la société, ou qui peuvent nécessiter (parfois pour survivre) un accroissement d’agressivité et d’enfoncement dans le non-droit, sans parler du simple mimétisme qu’encourage la toute-puissance de certains caïds ou truands qui règnent dans beaucoup (euphémisme?) de prisons.
Ai-je répondu à la question ou faut-il que je développe davantage?
@Albert
[Mais je vais le faire, cher Descartes, non sans avoir d’abord relevé que vous avez tronqué mon propos en me citant.]
Votre propos complet est disponible dans votre réponse. Je ne cite dans les miennes que ce qui est nécessaire à mon avis au suivi du débat…
[2°- pour répondre plus précisément à votre question, le retour de certains jeunes à la case prison s’explique par diverses causes (…)]
Vous ne répondez pas à ma question. Qui ne porte pas sur le fait que les jeunes retournent en prison, mais sur le fait qu’ils n’éprouvent aucune crainte d’y retourner. C’est ça mon point: pourquoi, si selon vous la prison est si terrible, si inhumaine, si invivable, des jeunes qui ont une vie relativement vivable – car la France ce n’est tout de même pas la Somalie – n’éprouvent aucune crainte d’y retourner ? J’aimerais que vous essayiez de répondre à cette question précise.
["Vous ne répondez pas à ma question. Qui ne porte pas sur le fait que les jeunes retournent en prison, mais sur le fait qu’ils n’éprouvent aucune crainte d’y retourner. C’est ça mon point: pourquoi, si selon vous la prison est si terrible, si inhumaine, si invivable, des jeunes qui ont une vie relativement vivable – car la France ce n’est tout de même pas la Somalie – n’éprouvent aucune crainte d’y retourner ? J’aimerais que vous essayiez de répondre à cette question précise."]
Je pensais avoir répondu, mais encore une fois, par souci de ne pas être trop long, j’ai dû être trop elliptique et ai traité plusieurs problèmes à la fois.Je vais donc cibler plus pointu sur votre question, mais dans une démarche dont je pense que, pour nécessaire qu’elle soit, elle est intellectuellement tronquée.
Ma critique des prisons insalubres, insécures,…est une chose en soi (importante); le problème des récidivistes qui n’auraient pas peur de retourner en prison en est une autre (même si à l’évidence cela se retrouve forcément dans une réflexion plus large).
Car, je n’ai pas dit que TOUTES les prisons sont infectes. Et, je n’ai pas traité QUE des jeunes récidivistes.
Maintenant, quand vous dites que "les jeunes des cités" ne craignent pas de retourner en taule après une première expérience, j’ai avancé -avec précaution- quelques raisons: tenant à la personnalité de chacun, à l’environnement social, ET parfois à l’expérience carcérale, qui peut renforcer des dispositions potentielles – non à vouloir revenir en prison mais à se situer délibérément hors de la loi et hors de la société "de droit".
Quand vous ciblez "les jeunes des cités"(ce qui est fondé statistiquement),vous soulevez aussi un aspect à la fois spécifique et "global" du problème, mais qui n’infirme pas mon propos sur le lien avec la prison et "le monde carcéral" dans ses divers "aspects"( le physique en étant un, mais pas le seul).
Enfin, je rappellerais mon précédent propos relativement à un certain nombre de délinquants -dont je pense que (peu importent les raisons) ils sont probablement irrécupérables en tout état de cause.
@Albert
[Ma critique des prisons insalubres, insécures,…est une chose en soi (importante); le problème des récidivistes qui n’auraient pas peur de retourner en prison en est une autre (même si à l’évidence cela se retrouve forcément dans une réflexion plus large).]
Mais vous m’accorderez que les deux problèmes sont liés. Parce qu’une prison sûre, salubre, où l’on mangerait bien, on aurait une chambre individuelle avec télé cable et adsl, on pourrait sortir se promener quand on veut dans la cour ne serait que très moyennement dissuasive. Par ailleurs, en raisonnant à contrario on peut se dire que si la prison n’est pas dissuasive, si des jeunes qui peuvent vivre agréablement dehors ne craignent pas d’y retourner, c’est qu’elle ne doit pas être si insalubre, si insécures que vous ne le pensez.
[Maintenant, quand vous dites que "les jeunes des cités" ne craignent pas de retourner en taule après une première expérience, j’ai avancé -avec précaution- quelques raisons: tenant à la personnalité de chacun, à l’environnement social, ET parfois à l’expérience carcérale, qui peut renforcer des dispositions potentielles – non à vouloir revenir en prison mais à se situer délibérément hors de la loi et hors de la société "de droit".]
Mais encore une fois, vous devriez réaliser que quelque soient les raisons pour choisir de se situer délibérément hors la loi, l’anticipation de devoir passer quelques mois ou quelques années dans un lieu que vous décrivez comme un enfer devrait être une corde de rappel puissante. Que cette corde ne fonctionne pas me fait douter que votre caractérisation de la prison soit la bonne. Bien sur, on peut trouver des histoires et des situations horribles en prison, tout comme on peut les trouver dans le monde « libre ». Sont elles plus courantes dans l’univers carcéral ? Je me le demande.
les défenseurs de la Nation sincères des autres…
@Albert
[Ma critique des prisons insalubres, insécures,…est une chose en soi (importante); le problème des récidivistes qui n’auraient pas peur de retourner en prison en est une autre (même si à l’évidence cela se retrouve forcément dans une réflexion plus large).]
Mais vous m’accorderez que les deux problèmes sont liés. Parce qu’une prison sûre, salubre, où l’on mangerait bien, on aurait une chambre individuelle avec télé cable et adsl, on pourrait sortir se promener quand on veut dans la cour ne serait que très moyennement dissuasive. Par ailleurs, en raisonnant à contrario on peut se dire que si la prison n’est pas dissuasive, si des jeunes qui peuvent vivre agréablement dehors ne craignent pas d’y retourner, c’est qu’elle ne doit pas être si insalubre, si insécures que vous ne le pensez.
[Maintenant, quand vous dites que "les jeunes des cités" ne craignent pas de retourner en taule après une première expérience, j’ai avancé -avec précaution- quelques raisons: tenant à la personnalité de chacun, à l’environnement social, ET parfois à l’expérience carcérale, qui peut renforcer des dispositions potentielles – non à vouloir revenir en prison mais à se situer délibérément hors de la loi et hors de la société "de droit".]
Mais encore une fois, vous devriez réaliser que quelque soient les raisons pour choisir de se situer délibérément hors la loi, l’anticipation de devoir passer quelques mois ou quelques années dans un lieu que vous décrivez comme un enfer devrait être une corde de rappel puissante. Que cette corde ne fonctionne pas me fait douter que votre caractérisation de la prison soit la bonne. Bien sur, on peut trouver des histoires et des situations horribles en prison, tout comme on peut les trouver dans le monde « libre ». Sont elles plus courantes dans l’univers carcéral ? Je me le demande.
["Mais vous m’accorderez que les deux problèmes sont liés. Parce qu’une prison sûre, salubre, où l’on mangerait bien, on aurait une chambre individuelle avec télé cable et adsl, on pourrait sortir se promener quand on veut dans la cour ne serait que très moyennement dissuasive…"]
Je crois que nous sommes mal barrés: soit je m’exprime mal, soit vous me prêtez une philosophie laxiste qui n’est pas du tout la mienne -bien au contraire. Dommage, mais c’est la vie!
@Albert
[Je crois que nous sommes mal barrés: soit je m’exprime mal, soit vous me prêtez une philosophie laxiste qui n’est pas du tout la mienne -bien au contraire. Dommage, mais c’est la vie!]
De grâce, ne me jouez pas la scène des violons. Vous avez décidé de ne pas répondre à la question qui vous était posée. C’est votre droit. Mais ne vous faites pas plus bête que vous ne l’êtes. Vous avez parfaitement compris que la question ici n’est pas celle du « laxisme », mais de la cohérence entre la vision que vous avez de la prison et les effets observables. Vous décrivez la prison comme l’enfer de Bosch, mais d’un autre côté vous êtes obligé de constater que cet « enfer » ne semble pas susciter la crainte des premiers concernés. La question que je vous ai posée – par trois fois, je dois préciser – vous met devant cette contradiction.
Puisque vous insistez, je vais encore vous répondre: J’AI répondu à votre question -relisez-moi et à votre tour ne vous faites pas plus bête que vous n’êtes. Mais je réitère: que le milieu carcéral (qui varie selon les endroits – il est évident que "Bois d’Arcy" n’est pas les Baumettes, donc toute généralisation est malvenue) ne fasse pas plus peur que ça, en tout état de cause, à des délinquants débutants, chevronnés ou enragés ne tient pas qu’à l’état des locaux. Il serait erroné de polariser sur ce point -ce que je n’ai pas fait. D’autant plus que ce serait oublier (dans mon propos) tous ceux qui vont une fois en prison mais n’ont pas vocation, a priori, à y retourner.
Je sais que la méthode cartésienne, sauf erreur de ma part car mes cours de philo sont très loin, consiste à décomposer les problèmes complexes en leurs segments de détail, à traiter ceux-ci puis à reconstruire le tout; mais si cela vaut pour les sciences exactes, cela est beaucoup moins probant pour les "sciences" humaines. Donc, ne nous acharnons pas vainement sur un petit segment de la problématique objet de votre billet.
J’ajouterai deux points:
1. je suis de ceux qui pensent que les "condamnations" à nièmes sursis encouragent la délinquance, que les jugements fermes doivent être appliqués…etc.
2. ce qui suppose de construire le nombre de places de prisons nécessaires. Pourquoi en aurait-on beaucoup moins en France qu’ailleurs?
@Albert
[Puisque vous insistez, je vais encore vous répondre: J’AI répondu à votre question -relisez-moi]
Je vous ai relu. Et je persiste : vous n’avez pas répondu à la question…
[Mais je réitère: que le milieu carcéral (qui varie selon les endroits – il est évident que "Bois d’Arcy" n’est pas les Baumettes, donc toute généralisation est malvenue) ne fasse pas plus peur que ça, en tout état de cause, à des délinquants débutants, chevronnés ou enragés ne tient pas qu’à l’état des locaux.]
Et cela tient à quoi alors ? Franchement j’admire l’effort que vous faites à éviter la question posée. Pourtant, elle est simple : comment conciliez-vous votre affirmation selon laquelle les prisons françaises seraient « inhumaines » et le fait que des gens qui ont une vie raisonnablement agréable à l’extérieur n’ont pas peur d’y retourner ?
[" Franchement j’admire l’effort que vous faites à éviter la question posée. Pourtant, elle est simple : comment conciliez-vous votre affirmation selon laquelle les prisons françaises seraient « inhumaines » et le fait que des gens qui ont une vie raisonnablement agréable à l’extérieur n’ont pas peur d’y retourner?"]
1.D’abord, je n’ai pas dit que TOUTES les prisons françaises étaient "inhumaines". Donc, vous "m’enfermez" dans un simplisme injuste. C’est une façon de tordre ma pensée, même sans le vouloir.
2.Ensuite, je n’ai jamais dit que des prisons trop confortables n’étaient pas elles aussi de nature à les rendre moins dissuasives. C’est évident. Mais c’est aussi affaire de mesure.
3.S’agissant des prisons que je qualifiais d’ indignes (il y en a encore!), il faut bien comprendre qu’elles sont surtout destructrices pour les détenus les plus "humains", éventuellement fragiles, arrivés là par des mauvais hasards de la vie.
Pour les autres, plus dangereux, criminels ou simples délinquants mais déjà probablement irrécupérables, ou pervers (tout ce qui pourrait être qualifié de mauvaise graine -innée ou acquise), les conditions carcérales ne sont pas forcément dissuasives, et peuvent au contraire endurcir davantage, voire pour certaines faire office d’école du crime – dès lors qu’il y a un terrain favorable.
La promiscuité (et elle se trouve surtout dans les vieilles prisons), surtout avec des populations "hétérogènes", ne peut rien donner de bon. Et dans tous les sens. Mais vous me direz que ceci n’a aucun rapport avec la question posée….
@Albert
[1.D’abord, je n’ai pas dit que TOUTES les prisons françaises étaient "inhumaines".]
Parfait. Et puisque vous proposez cette affirmation comme élément d’explication du fait que la prison n’est pas dissuasive, j’en déduis que non seulement "toutes" les prisons françaises ne sont pas inhumaines, mais que celles qui le sont sont l’exception plutôt que la règle. Mais pourquoi écriviez vous alors que "la situation carcérale en France est INDIGNE d’un pays civilisé" ?
Je me doutais bien qu’un "gros" billet était en préparation.
Rousseau lui-même était conscient des lacunes du "Contrat Social" dans ses postulats. Seulement, remanier une telle œuvre n’est pas facile, surtout quand on sait l’état mental dans lequel il était à la fin de sa vie… C’est au final tout aussi triste de constater qu’en effet, la vision de la société que certains promeuvent est inspirée de celle d’un Rousseau qui avait l’intuition de s’être planté.
Mais au final, on peut se demander si Robespierre aurait été sans Rousseau. Son influence intellectuelle n’a pas été si néfaste.
>Le dicton « qui aime bien châtie bien » contient une profonde sagesse.<
Je suis d’accord, mais le dicton souvent assez mal compris. On comprend par "bien", "beaucoup". Or "bien" a ici un sens plus proche de "justement". Quand on aime quelque chose, on le traite avec égard : on n’est ni cruel, ni laxiste, mais on espère bien que le "châtiment" soit le plus profitable à celui qui le reçoit.
>Ainsi, par exemple, la culture américaine est marquée par une méfiance quasi-maladive envers l’Etat, au point de constitutionnaliser le droit de posséder et de porter des armes, droit conçu comme un rempart contre un pouvoir excessif et tyrannique de l’Etat.<
"La Constitution", c’est un texte quasi-sacré pour les américains. Je sais bien qu’il faut essayer de comprendre les autres cultures, mais je trouve cela un peu inquiétant comme rapport au politique. Je me demande bien ce que penseraient Franklin ou Jefferson s’ils savaient qu’on avait fait de leurs écrits un culte…
Il est intéressant en outre de regarder la législation des états sur le sujet durant les cinquante dernière années. On se rend compte que lorsqu’on fait abstraction des cris d’orfraie de la droite américaine, loin d’être un complot de l’Etat (ou du "government" comme ils disent) contre les citoyens, les projets de régulation vont plutôt à contre-courant. Le droit de port d’armes était bien plus répressif dans de nombreux états dans les années 1960. Aujourd’hui en Louisiane, un civil peut plus ou moins monter un blindé léger à partir de pièces détachées sans avoir d’ennuis avec la loi.
@BolchoKek
[Mais au final, on peut se demander si Robespierre aurait été sans Rousseau. Son influence intellectuelle n’a pas été si néfaste.]
Je n’ai pas dit le contraire. Il faut éviter l’anachronisme, ce piège qui consiste à juger les penseurs d’hier comme s’ils écrivaient aujourd’hui. Que Descartes se soit planté sur sa vision cosmologique n’en fait pas moins le père de la science moderne. Tout simplement parce que chaque penseur écrit dans un contexte donné, et généralement « contre » une idée donnée. Rousseau peut nous apparaître aujourd’hui réactionnaire sur certaines idées, mais seulement si on oublie contre qui il écrivait. Sa vision de l’état de nature était peut-être idéaliste, mais elle permettait de remettre en question l’absolutisme et d’imaginer une société démocratique reposant sur un contrat social. C’était pour l’époque un progrès considérable, et la Révolution lui doit beaucoup. On ne peut pas reprocher à Rousseau de ne pas avoir été Marx.
Il ne faut pas faire la même erreur avec Hobbes. Sa vision peut paraître plus « moderne » grâce au filtre du temps, mais il ne faut pas oublier que le but de Hobbes était de trouver un fondement à l’ordre politique monarchique de son temps. Là où Hobbes innove, c’est qu’il construit une argumentation détachée de toute considération religieuse – c’est d’ailleurs cela qui lui valut beaucoup d’ennuis.
[Je suis d’accord, mais le dicton souvent assez mal compris. On comprend par "bien", "beaucoup". Or "bien" a ici un sens plus proche de "justement". Quand on aime quelque chose, on le traite avec égard : on n’est ni cruel, ni laxiste, mais on espère bien que le "châtiment" soit le plus profitable à celui qui le reçoit.]
Là encore, Hobbes est intéressant à lire. Il fait la différence entre les « peines » et les « actes d’hostilité ». Les peines sont les châtiments strictement nécessaires pour obtenir l’obéissance à la loi. Toute punition qui irait au-delà – la vengeance, par exemple, dont le but n’est pas d’obtenir l’obéissance mais de satisfaire la victime – est considérée par Hobbes un « acte d’hostilité » et justifie que les citoyens se révoltent contre un Etat tyrannique.
["La Constitution", c’est un texte quasi-sacré pour les américains. Je sais bien qu’il faut essayer de comprendre les autres cultures, mais je trouve cela un peu inquiétant comme rapport au politique. Je me demande bien ce que penseraient Franklin ou Jefferson s’ils savaient qu’on avait fait de leurs écrits un culte…]
Ils en seraient très tristes probablement, mais pas très surpris. Pour les hommes des Lumières, la question de savoir si l’on pouvait fonder un corpus politique en se passant totalement d’une transcendance était vif. Renverser un ordre politique voulu par dieu pour le remplacer par un ordre politique purement humain, ce n’est évident à faire accepter par le peuple. En France, Robespierre a essayé de résoudre le problème en instituant le culte d’un « Être Suprême ». Aux Etats-Unis, on a fait de la Constitution une nouvelle Bible. D’ailleurs, la lecture que font les juges américains de leur constitution est oraculaire : elle est censée contenir les réponses à toutes les question, même celles que ses rédacteurs ne se sont pas posés.
[Il est intéressant en outre de regarder la législation des états sur le sujet durant les cinquante dernière années. On se rend compte que lorsqu’on fait abstraction des cris d’orfraie de la droite américaine, loin d’être un complot de l’Etat (ou du "government" comme ils disent) contre les citoyens, les projets de régulation vont plutôt à contre-courant. Le droit de port d’armes était bien plus répressif dans de nombreux états dans les années 1960.]
Tout à fait. La raison est que la perception du « government » (les américains ne font pas une distinction claire entre l’Etat et le gouvernement) dépend d’une multitude de facteurs. Avec la crise de 1930, la deuxième guerre mondiale puis la guerre froide, le besoin d’une protection que seul l’Etat peut donner était ressenti par des citoyens qui étaient donc prêts à lui déléguer plus de pouvoir. Avec la fin de la guerre froide et les « années folles » de la spéculation financière, l’Etat n’est plus apparu comme nécessaire et les citoyens américains sont revenus à une position de méfiance systématique. Là encore, le raisonnement hobbesien reste le plus lucide : les gens se regroupent face au danger, et non parce qu’ils ont envie de « faire société ».
L’affaire Snowden donne d’ailleurs un aperçu de l’échelle du changement de perception. Pendant la guerre froide, l’idée que la CIA savait tout était plutôt vécue positivement, c’était un gage qu’on était en sécurité et que les « rouges » n’avaient qu’à bien se tenir. Aujourd’hui, c’est vécu comme un attentat insupportable aux libertés publiques.
Bonjour Descartes,
Bon texte qui remet les choses dans leur perspective.
Comme toi je suis plus "Hobbesien", pour autant j’ai envie de me faire un peu l’avocat du diable car je te trouve un peu dur avec ce pauvre Rousseau. Certes, sa vision idéalisée d’un Homme naturel est très naïve et on peut lui reprocher bien des choses. Mais malgré par exemple sa détestation de la ville, il ne plaide pas pour un retour en arrière qu’il sait d’ailleurs impossible: il en tire comme conclusion la nécessité du contrat social.
Contrat Social qui a été un des textes fondateurs de la révolution Française, nous devons beaucoup à Rousseau… avec des concepts très forts comme la souveraineté populaire, l’intérêt général qui n’est pas celui du plus fort, la nécessité de maintenir ce contrat social pour ne pas retourner dans l’état de nature dans lequel toute association serait "tyrannique ou vaine". Au fond, pour Rousseau, le contrat social est le moyen pour chaque Homme de faire valoir ses "droits naturels" (même si nous savons que cette notion est absurde) en renonçant à ses droits particuliers ou du plus fort. Alors d’une certaine manière, dans la nécessité de déléguer une partie de sa liberté au Léviathan, en partant de points de vue opposés, Hobbes et Rousseau n’aboutiraient-il pas à pratiquement la même conclusion ? Certes, pour Rousseau c’est un pis-aller tandis que pour Hobbes c’est une chose positive et dans la mise en place et le contrôle du maintien de ce pacte social ils n’ont rien à voir mais sinon ? Ou je n’ai rien compris à Rousseau ? Je vais aller relire "l’origine des inégalités’", ça fait longtemps…
D’ailleurs ton texte m’interpelle sur un autre point. Hobbes a eu plus d’importance dans la culture Anglaise et Américaine. Pourtant, je te cite, "la culture américaine est marquée par une méfiance quasi-maladive envers l’Etat" tandis qu’en France "l’idée du monopole de la violence légitime dans les mains de l’Etat repose sur un consensus quasi-général." D’où vient cette différence ? A croire justement que les Français soient devenus Hobbesien pendant que les Américains étaient plus Rousseauistes (et ensuite Tocqueville) ?
Pour revenir au sujet: j’aime bien les exemples que tu as choisi. Même si, hélas, ils sont de plus en plus nombreux. On a eu ce démantèlement de camp de rom par les habitants eux-même dans le sud, et aujourd’hui même on pourrait parler de l’ouverture des magasins de bricolage en opposition à la loi. C’est très grave ce qui se passe ici, et terrible. Le contrat social a justement quelques fissures, l’Etat semble de moins en moins légitime pour une partie de la population. Et là où tu attendais les classes moyennes, grandes pourfendeuses de l’Etat, on se retrouve avec des classes populaires au contraire qui le critiquent de plus en plus et lui refusent sa légitimité. Comment analyser cela ?
Et il n’y a pas que l’axe "police", il y a le versant de la pièce qui est celui de la justice. Je ne suis pas un expert des questions pénales aussi je n’ai pas envie de raconter des bêtises sur le sujet. Mais si toi ou des lecteurs du blog voudraient commenter les réformes Taubira, j’en serais très heureux.
Une dernière chose qui m’interpelle dans ton texte et ce n’est pas la première fois: "’ce dernier point qui devrait pousser les PROGRESSISTES de ce pays à sortir d’une réflexion manichéenne pour se poser la véritable question:" Qu’entend-tu exactement par "progressistes" ?
Sinon encore une fois, superbe texte !
Marencau
P.S: petite coquille dans ton texte au second mot: phantasme au lieu de fantasme !
@Marencau
[Contrat Social qui a été un des textes fondateurs de la révolution Française, nous devons beaucoup à Rousseau… avec des concepts très forts comme la souveraineté populaire, l’intérêt général qui n’est pas celui du plus fort, la nécessité de maintenir ce contrat social pour ne pas retourner dans l’état de nature dans lequel toute association serait "tyrannique ou vaine".]
Je sens que mon papier va me valoir un torrent de commentaires des amis de Rousseau… alors soyons clair. Je ne fais pas un match Hobbes vs. Rousseau, et je n’ignore nullement l’énorme contribution du genevois. Il a joué un rôle capital dans la vision moderne de la souveraineté. Il faut d’ailleurs garder à l’esprit que presque deux siècles séparent Hobbes de Rousseau… ils ne pensaient donc pas « contre » les mêmes choses.
Le problème avec Rousseau, c’est la lecture qu’on en fait. Faire de Rousseau l’apôtre de l’écologie sous prétexte de sa nostalgie pour la « nature » constitue un énorme anachronisme. L’idée de « nature » du XVIIIème siècle n’a rien à voir avec l’idée qu’on s’en fait aujourd’hui. Rousseau n’est d’ailleurs pas du tout un « libéral » au sens où on l’entend aujourd’hui, et certains en font même un apôtre de la tyrannie du collectif sur l’individu.
Si je trouve intéressant de relire Hobbes, c’est parce que sur un point particulier je le trouve plus rationnel que Rousseau. Alors que Rousseau fonde la communauté politique dans une impulsion « naturelle » des hommes au bien, Hobbes, plus réaliste – on dirait aujourd’hui plus cynique – fonde cette communauté sur la nécessité, celle de se protéger d’une vie qui sans cela serait « pauvre, brutale, solitaire et courte ». La vision roussauienne conduit à considérer qu’une société idéale serait sans répression, les individus conscients et rationnels respectant d’eux-mêmes le « contrat ». La vision hobbesienne montre pourquoi une telle société est utopique.
[Alors d’une certaine manière, dans la nécessité de déléguer une partie de sa liberté au Léviathan, en partant de points de vue opposés, Hobbes et Rousseau n’aboutiraient-il pas à pratiquement la même conclusion ?]
Pas tout à fait. La différence fondamentale me semble être la fonction et la nature du « Léviathan ». Il faut rappeler que Rousseau était opposé par principe à la démocratie représentative, et que pour lui le citoyen délègue une partie de sa liberté à la collectivité en général – par sa soumission à la « volonté générale » – et non à une entité extérieure qu’on pourrait assimiler à l’Etat. Pour Hobbes, au contraire, les citoyens se mettent d’accord pour confier l’autorité souveraine à un individu où un groupe d’individus qui s’assurent que les lois soient obéies.
[D’ailleurs ton texte m’interpelle sur un autre point. Hobbes a eu plus d’importance dans la culture Anglaise et Américaine. Pourtant, je te cite, "la culture américaine est marquée par une méfiance quasi-maladive envers l’Etat" tandis qu’en France "l’idée du monopole de la violence légitime dans les mains de l’Etat repose sur un consensus quasi-général." D’où vient cette différence ? A croire justement que les Français soient devenus Hobbesien pendant que les Américains étaient plus Rousseauistes (et ensuite Tocqueville) ?]
Une première réponse est que chacun théorise ce qu’il n’a pas. Hobbes théorise son « Léviathan », véritable appel à un Etat fort, à une époque troublée où l’état britannique tombe en morceaux avec le conflit permanent entre le Roi et le Parlement qui aboutira à la guerre civile et au « Commonwealth » cromwellien. La philosophie française s’écrit au contraire dans le contexte d’une monarchie absolue bien établie et d’un état centralisé fort… Lorsqu’on lit les philosophes, il faut se souvenir à chaque fois « contre quoi » ils ont écrit. La deuxième raison, plus sérieuse, est que les systèmes politiques doivent plus à l’histoire qu’à la philosophie. L’histoire anglaise et encore plus l’histoire américaine est celle de pays isolés, dans lequel l’Etat central constituait une menace plus importante pour les libertés locales qu’une invasion extérieure. La France se trouve dans la situation inverse, avec une continuité territoriale qui en a fait un territoire de passage et d’invasion. Dans ces conditions, le besoin d’un pouvoir central fort capable d’assurer la sécurité des frontières est devenu primordial. Là encore, le raisonnement hobbésien se vérifie : c’est le danger, et non une volonté naturelle de faire société, qui commande les regroupements.
[Le contrat social a justement quelques fissures, l’Etat semble de moins en moins légitime pour une partie de la population.]
Je crois que cette formulation est trompeuse. L’Etat, lorsqu’il agit, reste parfaitement légitime pour l’immense majorité de la population. La mise en cause de la légitimité de l’Etat se manifeste chaque fois que l’Etat hésite à agir, voire laisse faire. L’exemple de la loi interdisant les signes religieux dans les écoles me semble un exemple lourd d’enseignements. Aussi longtemps que l’Etat a hésité, la contestation s’est développée. Une fois que la loi a été votée et que l’Etat a montré qu’elle serait appliquée, le problème a disparu.
[Et là où tu attendais les classes moyennes, grandes pourfendeuses de l’Etat, on se retrouve avec des classes populaires au contraire qui le critiquent de plus en plus et lui refusent sa légitimité. Comment analyser cela ?]
Je ne vois pas les classes populaires « refuser la légitimité » à l’Etat. Pourrais-tu donner quelques exemples ? Ce que je perçois personnellement est exactement le contraire : les couches populaires reconnaissent la légitimité de l’Etat à agir. Ce qu’elles exigent, c’est que fort de cette légitimité l’Etat agisse. Ce que les couches populaires réclament c’est justement que l’Etat agisse. Les seules qui contestent la légitimité de l’Etat à agir, ce sont les couches moyennes.
[Une dernière chose qui m’interpelle dans ton texte et ce n’est pas la première fois: "’ce dernier point qui devrait pousser les PROGRESSISTES de ce pays à sortir d’une réflexion manichéenne pour se poser la véritable question:" Qu’entend-tu exactement par "progressistes" ?]
J’utilise le terme « progressiste » pour désigner tous ceux qui croient au progrès et qui pensent qu’on peut améliorer la société en la changeant. J’utiliser le terme faute de mieux pour éviter celui de « gauche »… qui à mon avis ne désigne plus rien.
>Je sens que mon papier va me valoir un torrent de commentaires des amis de Rousseau…<
J’aime bien Rousseau, mais j’espère que ça ne soit pas le cas.
>Le problème avec Rousseau, c’est la lecture qu’on en fait. Faire de Rousseau l’apôtre de l’écologie sous prétexte de sa nostalgie pour la « nature » constitue un énorme anachronisme.<
Entre autres anachronismes. Il faut dire que la pensée de Rousseau est très subtile, et prête justement le flanc à divers anachronismes. C’est un peu la même chose avec Nietzsche…
"La nature" dont se réclament certains écologistes n’a d’ailleurs rien à voir avec celle de Rousseau. Là où Rousseau essaye d’expliquer l’Homme, les écologistes essayent de lui constituer un adversaire qui puisse à terme, en fonction de ses pêchés – ou de l’obstruction à leur opinion politique – le détruire. On est clairement là dans une vision anti-matérialiste…
>L’idée de « nature » du XVIIIème siècle n’a rien à voir avec l’idée qu’on s’en fait aujourd’hui.<
Naturellement ;)…
Que l’on parle d’une nature autre qu’humaine aurait été assez bouleversant au XVIIIeme… Aujourd’hui, c’est un peu "la nature contre l’homme" : est-ce une tornade ou une chute de météorite qui va achever ces gens décadents ..?
Assez étrangement, pendant que certains attendent les OVNIs, d’autres continuent à avoir une vie bassement terrestre..
>La vision hobbesienne montre pourquoi une telle société est utopique.<
Et même le penseur d’Utopie savait qu’elle n’était nulle part. D’où le nom…
> Il faut rappeler que Rousseau était opposé par principe à la démocratie représentative, et que pour lui le citoyen délègue une partie de sa liberté à la collectivité en général – par sa soumission à la « volonté générale » – et non à une entité extérieure qu’on pourrait assimiler à l’Etat. Pour Hobbes, au contraire, les citoyens se mettent d’accord pour confier l’autorité souveraine à un individu où un groupe d’individus qui s’assurent que les lois soient obéies. <
Cette explication est cruciale, et très précise. On pourrait citer des philosophes divers, mais bien postérieurs. Merci de ramener Hobbes dans le débat. Personnellement, je me suis toujours promis de m’intéresser aux philosophes britanniques, "d’un bloc" : d’abord Hobbes, puis Locke et Hume. Mais je pense que tu as un peu précipité la liste de mes lectures…
>qui aboutira à la guerre civile et au « Commonwealth » cromwellien<
Même sans Léviathan ayant chair, les irlandais ont sûrement ressenti…
>La philosophie française s’écrit au contraire dans le contexte d’une monarchie absolue bien établie et d’un état centralisé fort…<
J’avoue que c’est un peu taquin de ma part mais… "Contre quoi" a écrit Emmanuel Kant ?
>L’histoire anglaise et encore plus l’histoire américaine est celle de pays isolés, dans lequel l’Etat central constituait une menace plus importante pour les libertés locales qu’une invasion extérieure. La France se trouve dans la situation inverse,<
Exactement. Il faudrait que je retrouve les sources, mais les "Act" votés sous Wellington, c’est à dire sous la menace d’une invasion, sont remarquablement différents de ceux votés avant et après..
>Là encore, le raisonnement hobbésien se vérifie : c’est le danger, et non une volonté naturelle de faire société, qui commande les regroupements.<
C’est un peu déprimant.
> L’Etat, lorsqu’il agit, reste parfaitement légitime pour l’immense majorité de la population. La mise en cause de la légitimité de l’Etat se manifeste chaque fois que l’Etat hésite à agir, voire laisse faire.<
C’est très intéressant : l’État ne serait pas blâmé par son action, mais plutôt par son inaction. Là encore, désolé de faire une analyse de classe, mais j’ai remarqué que l’État, tout "bourgeois" qu’il est, protège les plus faibles au détriment de ceux qui sont protégés. Et les détrimentaires semblent en avoir un peu marre. Quoi ! c’est peut-être ça, la "révolution citoyenne"…
>J’utiliser le terme faute de mieux pour éviter celui de « gauche »… qui à mon avis ne désigne plus rien.<
En ce qui concerne les termes.., je suis arrivé à eux-même avec eux…
@Bolchokek
[J’avoue que c’est un peu taquin de ma part mais… "Contre quoi" a écrit Emmanuel Kant ?]
J’avoue à ma grande honte avoir une connaissance de la pensée kantienne qui dépasse à peine le niveau du bac de philosophie… Ma réponse est donc de ce niveau, et si des contributeurs peuvent apporter une réponse plus complète, je m’inclinerai devant leur connaissance. Kant, comme la plupart des philosophes des Lumières, écrit fondamentalement contre l’Eglise. Pas nécessairement contre la religion en tant que fait social, mais contre la pretension d’une institution à prescrire ce que l’on doit penser et à punir ou exclure de la société ceux qui ne se soumettent pas. Au-delà de leurs différences, Kant, Voltaire, Rousseau ou Diderot coïncident sur un point : l’homme peut comprendre l’univers et se gouverner par la raison seule. Cette pensée qui nous semble aujourd’hui si évidente était à l’époque totalement novatrice. Elle le reste d’ailleurs dans une bonne partie du monde d’aujourd’hui, où on ne conçoit toujours pas qu’une chose puisse être vraie si elle est contraire au dogme religieux, et où la loi divine reste la base de la législation.
[« Là encore, le raisonnement hobbésien se vérifie : c’est le danger, et non une volonté naturelle de faire société, qui commande les regroupements ».C’est un peu déprimant.]
Ce n’est pas moi qui a fait le monde comme il est. Je me contente d’essayer d’y vivre…
[C’est très intéressant : l’État ne serait pas blâmé par son action, mais plutôt par son inaction.]
En France, je pense que c’est assez constant.
[Là encore, désolé de faire une analyse de classe, mais j’ai remarqué que l’État, tout "bourgeois" qu’il est, protège les plus faibles au détriment de ceux qui sont protégés. Et les détrimentaires semblent en avoir un peu marre. Quoi ! c’est peut-être ça, la "révolution citoyenne"…]
Très bonne remarque. Je pense que les marxistes de l’après 1945 se sont trompés fondamentalement dans leur vision de l’Etat. Si l’Etat au XIXème siècle est l’instrument d’une classe, à partir de la moitié du XXème il devient plutôt l’institution qui organise la société de manière à ce que les rapports de force entre les classes sociales puissent se manifester de la manière la plus pacifique possible. Ainsi, à la sortie de la deuxième guerre mondiale l’Etat tire les conséquences du nouveau rapport de force entre capital et travail, et impose au patronat la création de la Sécurité Sociale, des régimes de retraite universels et autres conquêtes du programme du CNR. L’Etat, d’une certaine manière, protège effectivement « les plus faibles » en empêchant les plus forts de tout prendre.
Bien que je conseille très fortement la lecture de Hobbes (avec toute la tradition républicaine réaliste, commençant avec Machiavel), je défendrais également Rousseau, qui n’est absolument pas un défenseur de l’individualisme ! Pour Rousseau, contrairement à ce qu’on pourrait penser avec le slogan des hommes qui « naissent libres et sont partout en chaînes », la liberté individuelle s’epanouie par la collectivité (ou la Nation).
Ainsi, concernant le respect des lois, il écrit dans le Contrat social : « Le citoyen consent à toutes les lois, même à celles qu’on passe malgré lui, et même à celles qui le punissent quand il ose en violer quelqu’une. La volonté constante de tous les membres de l’État est la volonté générale : c’est par elle qu’ils sont citoyens et libres. »
Je n’arrive pas à trouver un autre passage où, sur le châtiment, il dit qu’il est bon que les criminels emprisonnés aient taillé sur leurs chaînes le mot « liberté », parce que la liberté de tous est défendue par la répression juste.
Comme je l’ai expliqué à Marencau, mon propos n’était pas de nier l’importance de la contribution de Rousseau. Cependant, sur un point précis je trouve que Hobbes est plus réaliste. Pour Rousseau, les sociétés humaines se constituent un peu par opération du Saint Esprit. Pourquoi les hommes se sont ils regroupés et fait des lois alors qu’ils étaient si heureux et libres à l’état de nature ? La position "matérialiste" de Hobbes, pour qui les hommes se regroupent pour se protéger des menaces et pour améliorer leur vie me paraît bien plus à même d’expliquer les transformations sociales…
Bonjour Descartes, votre définition du "progressisme" comme volonté d’action sur la société pour l’améliorer n’est-elle pas celle de quasiment toute action politique? Il me semble que le PS, l’UMP, EELV, le FdG et le FN s’y reconnaîtraient sans trop de difficultés.
[Bonjour Descartes, votre définition du "progressisme" comme volonté d’action sur la société pour l’améliorer]
Mais ma définition ne se réduit pas à ça… elle inclut aussi le fait de "croire au progrès". Je doute que l’ensemble du PS, de l’UMP, du FdG ou du FN se reconnaissent vraiment dans cette idée…
>Bonjour Descartes, votre définition du "progressisme" comme volonté d’action sur la société pour l’améliorer n’est-elle pas celle de quasiment toute action politique?<
C’est le problème quand un marxiste essaye de se rendre audible et évince toute la vulgate : plus de gens l’écoutent, mais au final ils n’entendent pas l’intégralité de son message. Et il est obligé de se défaire d’une part de sa pensée.
La "volonté d’action" de notre hôte sur la société fait du tort à certains. Mais si l’on ne veut faire de tort à personne, on ne fait pas de politique.
Toutes les formations politiques actuelles sont des formations qui, dans leur intégralité ou dans leur sphères dirigeantes, sont issues des classes moyennes et de la bourgeoisie. Pour les marxistes se pose la question de la représentation politique du prolétariat : un "cadre léniniste", s’il est honnête, ne peut qu’essayer de soutenir les formations qui prétendent défendre le prolétariat ou recueillent son suffrage.
Je doute, en outre, que l’idée du "progrès" que se font EELV, le PS, et malheureusement le FdG, soit partagée par notre hôte…
Après un pareil billet j’ai peur que quelques uns de vos amis ne vous battent froid !
Il y a un exercice physique qui se nomme "le rétablissement", pendu par les mains à un plan horizontal il faut se hisser pour rétablir le centre de gravité de son corps au niveau de ce plan, pour ensuite s’y installer. Je trouve que "la gauche" en est là, mais démobilisée par l’errance idéologique et les misérables destins personnels, elle ne peut trouver l’énergie, les forces propres et un désir de lutter contre l’inertie et la pesanteur pour parvenir au rétablissement.
Je suis beaucoup intervenu sur la "page" de soutien au bijoutier, c’était une sorte de "manif pour tous" numérique, les "cow-boys" et les primaires réactifs n’étaient pas majoritaires, pourtant la plupart des "de gauche" ne le voyaient pas et restaient prisonniers de leur fantasme "FN".
Je ne crois pas que le bijoutier se soit trouvé en état de légitime défense, et encore moins qu’il ait agit par vengeance.
La peur et l’exaspération sont les causes du drame ; bien sur il n’aurait pas du posséder une arme, mais il sentait que sa délégation à l’État de sa protection personnelle et de ses biens n’était plus réellement efficiente, qui s’en est préoccupé, quelle autorité lui à démontré le contraire ?
@Gérard Couvert
[Après un pareil billet j’ai peur que quelques uns de vos amis ne vous battent froid !]
Mais connaissances, peut-être. Mais mes amis, certainement pas.
[Je ne crois pas que le bijoutier se soit trouvé en état de légitime défense, et encore moins qu’il ait agit par vengeance. La peur et l’exaspération sont les causes du drame ]
Nous sommes d’accord. C’était le sens de mon papier.
Je ne crois pas m’éloigner de l’esprit de votre billet en rappelant l’actualité où des supermarchés du bricolage malgré la condamnation de ces enseignes par le tribunal de commerce à 120 000 € d’astreinte par jour et par magasin ouvert le dimanche, enfreignent sciemment la loi.
Comme il est moins facile (ou de « gauche » ?) de défendre les patrons de ces entreprises qui, seuls, détiennent la décision, on fait appel à la « volonté des salariés de travailler le dimanche » et à celle aussi des « consommateurs » (comme si la loi devait se faire sous la pression de lobbies) à grand renfort parfois d’arguments sur l’emploi ou la relance de la consommation…
Le plus grave est que ce gouvernement ne semble pas prendre la voie de la sanction légitime mais de la capitulation en rase campagne sous couvert de « dialogue et concertation ».
Notons au passage que la CFTC est favorable à l’ouverture. Ont-ils oublié que c’était péché de ne pas aller ce jour-là à la messe ?
@morel
[Je ne crois pas m’éloigner de l’esprit de votre billet en rappelant l’actualité où des supermarchés du bricolage malgré la condamnation de ces enseignes par le tribunal de commerce à 120 000 € d’astreinte par jour et par magasin ouvert le dimanche, enfreignent sciemment la loi.]
Tout à fait. Et il n’y a pas que les patrons des magasins. Il y a aussi les employés qui manifestent leur désir de travailler le dimanche, sans s’apercevoir qu’en défendant leur intérêt individuel ils risquent de mettre à bas une conquête collective. Quand ces gentils étudiants qui ne voient pas d’inconvénient à travailler le dimanche seront devenus pères et mères de famille, et qu’on leur expliquera qu’il faut aller travailler le dimanche, et que c’est possible parce qu’une bande d’imbéciles quelques années auparavant ont aidé les patrons à dynamiter le repos dominical, que diront-ils ?
Oui, cette affaire met en évidence non seulement le mépris de la loi, mais combien ce mépris est alimenté par la religion de la toute-puissance de l’individu.
[Le plus grave est que ce gouvernement ne semble pas prendre la voie de la sanction légitime mais de la capitulation en rase campagne sous couvert de « dialogue et concertation ».]
Ca vous étonne ? On négocie avec les "faucheurs volontaires", on négocie avec les "défenseurs" à Notre Dame des Landes. On négocie avec les opposants à la prospection pétrolière. On négocie avec les imams qui dirigent les prières de rue. Pourquoi ne négocierait-on avec les magasins de bricolage ?
@ Decartes et morel
Vos propos sont nauséabonds. En effet, ils rejoignent ceux de Marine Le Pen (de 0’00” à 3’15”) :
http://www.frontnational.com/videos/marine-le-pen-sur-france-bleu-ile-de-france/
@dsk
[Vos propos sont nauséabonds. En effet, ils rejoignent ceux de Marine Le Pen]
D’une manière générale, j’ai tendance à refuser la publication aux messages injurieux. Mais comme vous êtes un vieux contributeur de ce blog, je vais faire une exception et je vais essayer de vous répondre.
Je trouve curieuse cette idée que le seul fait qu’un propos « rejoigne ceux de Marine Le Pen » suffirait à pour le qualifier de « nauséabond ». Et pourtant c’est ce que vous faites en utilisant la formule « en effet ». Si je suis votre raisonnement, tous ceux qui proposent de sortir de l’Euro ou de restaurer l’autorité de l’Etat tiendraient eux aussi des « propos nauséabonds », puisque Marine Le Pen a tenu plusieurs fois des propos semblables. Pensez-vous vraiment que ce soit le cas ?
Le bon Dr Goodwin a montré combien la « reductio ad hitlerum » est finalement le dernier argument de ceux qui n’ont pas d’arguments. Nous avons en France une forme nationale de ce type de terrorisme intellectuel : c’est la « reductio ad Le Pen ». Je trouve fort regrettable qu’une personne comme vous, capable de soutenir une argumentation rationnelle, tombe dans ce travers.
Si vous pensez que mes propos sont « nauséabonds », c’est votre droit de le dire. Mais exposez alors des arguments sérieux. Je n’ai jamais cédé au terrorisme intellectuel, et je ne vais pas commencer maintenant.
@ Descartes
Mais non, Descartes, je ne trouve pas vos propos nauséabonds. Bien au contraire, je trouve qu’ils sentent très bons. Depuis le temps, vous devriez savoir que je suis un peu farceur…
Plus sérieusement, il m’a semblé intéressant de signaler au progressiste que vous êtes, ainsi qu’à morel, ce discours de tonalité clairement anti-libérale et sociale de Marine Le Pen, et ce dans le prolongement du questionnement qui fut le vôtre après l’élection de Villeneuve sur Lot. Au fait, peut-on vous demander où vous en êtes ?
@dsk
[Depuis le temps, vous devriez savoir que je suis un peu farceur…]
Honnêtement, je ne vois pas où est la "farce". Je pense que votre sens de l’humour a besoin d’une sérieux contrôle technique. De toute évidence, il a des freins défaillants.
[Plus sérieusement, il m’a semblé intéressant de signaler au progressiste que vous êtes, ainsi qu’à morel, ce discours de tonalité clairement anti-libérale et sociale de Marine Le Pen, et ce dans le prolongement du questionnement qui fut le vôtre après l’élection de Villeneuve sur Lot.]
Dans cette affaire, Marine Le Pen joue le rôle du thermomètre. Si la direction du FN assume chaque jour plus un discours de tonalité anti-libérale et sociale – et on pourrait ajouter d’autres éléments – qui appartiennent traditionnellement au discours de la gauche jacobine ou du gaullisme social, c’est parce qu’elle sent qu’il y a une fraction importante de l’électorat dont les préoccupations rejoignent ce discours. Et si le FN peut occuper cet espace tout seul – si on laisse de côté quelques personnalités en fin de vie politique et quelques organisations groupusculaires – c’est parce que les partis majoritaires n’ont cure de cet électorat-là.
[Au fait, peut-on vous demander où vous en êtes ?]
Au même endroit qu’avant. Je regarde et je m’interroge.
Bonjour Descartes,
Votre exemple des faucheurs volontaires… Je ne suis pas sûr qu’il soit dans la bonne catégorie. De leur point de vue, ils sont plutôt dans le rôle du citoyen contraint de recourir à l’auto-défense parce que l’État ne le protège pas. Eux aussi sont des « contribuables », qui « travaille[nt] dur et paye [leurs] impôts », et voudraient voir ces impôts mieux utilisés. On peut être en désaccord avec leurs arguments, leur logique est plus proche de celle du bijoutier niçois que de celle de son agresseur et victime. Plus proche, sans être forcément identique, hein, mais ils n’ont agit que parce qu’ils étaient convaincu que l’État avait failli à les protéger / à protéger l’environnement. Ils ne demandent pas moins de répression, ils demande au contraire plus de répression pour ce qu’ils jugent comme des atteintes à l’environnement et, à travers ça, à leur sécurité. Le problème en ce qui les concerne ne passe sans doute pas tant pas la peur du gendarme que par l’information et la formation scientifique, et une vraie discussion sur les risques.
Bon, c’est un peu hors sujet, mais je tenais à le préciser. Et à ce propos, avez-vous entendu parler des démêlés récents des chercheurs italiens avec les opposants à l’expérimentation animale ? À côte de ça, les faucheurs volontaires vous paraîtront des gens extrêmement raisonnables et modérés dans leurs actions…
@adrien
[Votre exemple des faucheurs volontaires… Je ne suis pas sûr qu’il soit dans la bonne catégorie. De leur point de vue, ils sont plutôt dans le rôle du citoyen contraint de recourir à l’auto-défense parce que l’État ne le protège pas.]
Votre argument serait recevable si l’Etat n’appliquait pas sa propre réglementation. Mais ce n’est pas le cas : les cultures OGM que les « faucheurs volontaires » ont détruit n’étaient pas des essais clandestins, mais des cultures autorisées en application des lois faites par les représentants du peuple, et appliquées effectivement sur le terrain. Dans les dépredations des « faucheurs volontaires », ce sont les propriétaires du champ qui sont du côté de la loi, et les « faucheurs » qui sont du côté du délit.
Les « faucheurs » ne cherchent pas à mettre hors d’état de nuire des gens qui violent la loi. Ils s’arrogent au contraire le droit de décider que telle ou telle loi n’a pas à être respectée. Ils sont comparables à un braqueur qui prétendrait que son forfait est justifié parce que la société injuste ne lui donne pas l’argent dont il a besoin, et non à un bijoutier qui répond par la violence à une infraction préalable.
[Eux aussi sont des « contribuables », qui « travaille[nt] dur et paye [leurs] impôts », et voudraient voir ces impôts mieux utilisés.]
Dans une république, aucun citoyen – fut il un honnête travailleur et contribuable – n’a le droit de décider quelles sont les lois qu’il faut appliquer et quelles sont celles dont on peut se dispenser.
[On peut être en désaccord avec leurs arguments, leur logique est plus proche de celle du bijoutier niçois que de celle de son agresseur et victime.]
Je le répète : NON. Le bijoutier contrevient à la loi, mais c’est en réponse à une violation de la loi antérieure. Le « faucheur volontaire » viole la loi en portant préjudice à ceux qui la respectent. Le bijoutier exige que l’Etat fasse appliquer les lois, le « faucheur volontaire » demande exactement le contraire.
[Plus proche, sans être forcément identique, hein, mais ils n’ont agit que parce qu’ils étaient convaincu que l’État avait failli à les protéger / à protéger l’environnement.]
Si je tue mon voisin au prétexte que « je suis convaincu » qu’il est possédé par le diable, je vais en prison quand même. La « conviction » n’est pas une justification.
[Ils ne demandent pas moins de répression, ils demande au contraire plus de répression pour ce qu’ils jugent comme des atteintes à l’environnement et, à travers ça, à leur sécurité.]
Comment peuvent-ils demander « plus de répression » envers des actes que la loi ne réprime pas ? Non, les « faucheurs volontaires » ne demandent pas « plus de répression », ils demandent un changement des lois, ce qui est très différent du cas du bijoutier qui, lui, ne demande que l’application de la loi existante.
[Le problème en ce qui les concerne ne passe sans doute pas tant pas la peur du gendarme que par l’information et la formation scientifique, et une vraie discussion sur les risques.]
Je ne le crois pas un instant. Ce sont des fanatiques, et le fanatisme n’a jamais été convaincu par « l’information et la formation scientifique ». Il n’y a pas d’impulsion plus puissante, et plus difficile à combattre, que l’envie de croire.
[À côte de ça, les faucheurs volontaires vous paraîtront des gens extrêmement raisonnables et modérés dans leurs actions…]
Comme disait Clemenceau, « pour les traîtres, douze balles dans la peau ; pour les demi-traîtres, six balles suffiront ».
À mon avis, ami, si vous flinguez votre voisin parce que vous le croyez "possédé par le Diable", vous n’irez pas en prison.
Vous irez en hôpital psychiatrique.
D’ailleurs, je crois que pas mal de nos écolos voient "le Diable" dans les OGM, dans les centrales nucléaires, dans les antennes-relais de téléphonie, dans les lignes à très haute tension, etc.
@Gugus69
[À mon avis, ami, si vous flinguez votre voisin parce que vous le croyez "possédé par le Diable", vous n’irez pas en prison.Vous irez en hôpital psychiatrique. D’ailleurs, je crois que pas mal de nos écolos voient "le Diable" dans les OGM, dans les centrales nucléaires, dans les antennes-relais de téléphonie, dans les lignes à très haute tension, etc.]
Vous voulez dire qu’il faudrait enfermer nos écolos dans des hôpitaux psychiatriques ? Faut dire que l’idée a du charme…
@Adrien
[Pour moi ils sont entre les deux. Effectivement, ils étaient, légalement, en tort, et, toujours légalement, ils n’étaient pas victimes des cultures OGM. Mais ils ne retirent aucun profit personnel de leur action.]
Bien sur que si. Pensez-vous par exemple que Bové ne tire pas un profit de ce genre d’action ? A votre avis, comment est-il arrivé à se faire élire pour son mandat européen grassement payé ? Mais admettons un instant qu’ils ne tirent aucun profit. Serait-ce une raison pour admettre leur acte ? Le vandale qui détruit un abribus ou met le feu à une voiture ne tire aucun profit de son acte. Cela le rendrait-il plus admissible ?
[Si vous voulez les comparer à des braqueurs, ce serait des braqueurs qui s’en prennent uniquement au trésor public et redistribuent l’argent des impôts au contribuable. (Ça me rappelle quelqu’un, tiens.)]
Non. Si vous voulez faire cette comparaison – assez capilotractée, je dois dire – alors il faudrait le comparer à des gens qui envahiraient le trésor public et brûleraient les billets qui s’y trouvent. Parce que la destruction des cultures expérimentales de l’INRA ne rapporte rien à personne. Tout au plus, pour reprendre votre analogie, vous pourriez les comparer à des gens qui pillent le trésor public en croyant le redistribuer aux contribuables…
Vous dites que cela vous rappelle quelqu’un… tiens, je me demande qui cela peut bien être… Robin Hood, peut-être ? Si c’est le cas, vous connaissez bien mal l’histoire. Robin Hood, personnage par ailleurs mythique remis à l’honneur par les romantiques à l’époque de la bourgeoisie triomphante qui – quelle coïncidence, n’est ce pas – était déjà en révolte contre toute forme de redistribution de la richesse par l’impôt, ne braquait pas le « trésor public », notion inexistante à son époque, mais le trésor privé d’un tyran, le roi usurpateur Jean Sans Terre. Que les « faucheurs volontaires » vous rappellent Robin Hood n’est pas innocent…
[« Le bijoutier exige que l’Etat fasse appliquer les lois, le « faucheur volontaire » demande exactement le contraire ». Pas vraiment : ils demandaient un changement de la loi, et que cette loi soit respectée.]
Vous voulez dire que si le braqueur de Nice avait envoyé au préalable aux journaux une lettre exigeant que la loi qui interdit de braquer les bijoutiers soit abrogée son cas serait plus défendable ? Arrêtons ces analogies sans queue ni tête : la loi, c’est l’expression de la volonté générale. Les citoyens ont le droit de demander qu’elle change, mais cette demande ne les autorise pas à la violer entre-temps. Je ne vois pas en quoi le bijoutier qui prend son flingue pour défendre sa bijouterie serait plus condamnable que le faucheur volontaire qui détruit la culture d’autrui parce qu’il est convaincu qu’elle menace sa santé.
[En outre ils avançaient (pas entièrement à tort…) que la loi était basée sur des évaluations mal menées, autrement dit la conséquence d’une mauvaise application d’une loi antérieure.]
Si les lois sont mal appliquées, c’est aux juges d’en décider. Encore une fois, vous semblez trouver beaucoup de circonstances atténuantes à un groupe qui a piétiné la loi au nom de sa vision personnelle des choses et ce faisant détruit le bien d’autrui. Pourquoi ne pas reconnaître aux bijoutiers aussi le droit de décider que la loi est mal faite ou mal appliquée, et prendre le soin de refaire les lois et les appliquer eux-mêmes ?
[L’état leur a d’ailleurs plus ou moins donné raison par la suite avec le moratoire sur les OGM.]
Le moratoire ne donne « raison » à personne. C’est l’expression d’un rapport de forces politique où la « raison », la pauvre, n’a pas voix au chapitre. C’est comme pour Fessenheim : sa fermeture tient au fait que le PS veut garder EELV dans la majorité. L’état réel de la centrale et les risques qu’elle pose n’entrent nullement en ligne de compte.
[« Si je tue mon voisin au prétexte que « je suis convaincu » qu’il est possédé par le diable, je vais en prison quand même. La « conviction » n’est pas une justification ». Si, si vous tuez votre voisin au prétexte qu’il vous menace de son arme, vous êtes en état de légitime défense, même si à ce moment vous ne saviez pas que l’arme n’était pas chargée ou qu’elle était factice, du moment que vous aviez de bonnes raison d’être convaincu que la menace était réelle].
Donc le fait d’être « convaincu » n’est pas une justification suffisante. Encore faut-il que cette « conviction » soit fondée sur une « bonne raison » (i.e. une raison qui serait suffisante pour convaincre toute personne raisonnable, si je me souviens bien de la jurisprudence…). Ce n’est pas le cas des « faucheurs volontaires », puisque les raisons pour douter les OGM n’ont pas été en mesure de convaincre une majorité de nos députés siégeant à l’Assemblée Nationale. Par ailleurs, vous oubliez une condition indispensable de la légitime défense : le danger doit être immédiat, c’est-à-dire, ne pas vous laisser le temps d’avoir recours à l’Etat. Ce n’est de toute évidence pas le cas des « faucheurs volontaires », qui ont eu amplement le temps de présenter leurs recours à un juge… et d’être déboutés. Le discours de la « légitime défense » ne tient pas pour ce qui concerne les « faucheurs volontaires ».
[On en a vu pourtant certains changer d’avis (mais bon, je n’essaierai pas de vous en convaincre).]
Quelques exemples seraient les bienvenus…
[Comment voulez-vous que l’État fasse peur à ces gens ?]
En les frappant là où les classes moyennes sont les plus sensibles : la caisse. Des amendes et la réparation intégrale du préjudice avec saisie de leurs comptes et de leurs revenus seraient à mon avis bien plus efficaces. Et l’inéligibilité, bien entendu. Ce sont des châtiments qui ne sont pas faciles à médiatiser, et qui ont des effets longs…
Quelques petits points sur Hobbes et Rousseau,
Je pars de Rousseau: La théorie de Rousseau est en fait une critique radicale et complexe des théories de ses prédécesseurs (Grotius, Puffendorf, Locke aussi en un sens) que sont les théoriciens du droit naturel (il n’est en rien l’un d’entre eux).A proprement parler dans l’état que Rousseau appelle l’état de "pure nature", si les hommes sont libres, on ne peut dire qu’ils sont heureux, car l’état de pure nature est un état dans lequel les hommes ne se rencontrent pas, un état fictif, antérieur à toute société. Il se caractérise par une absence de relations totale des hommes entre eux, qui ne doivent leur rencontre qu’au hasard et à la "poussée" des nécessités de la reproduction. Courtes, épisodiques , les relations des hommes entre eux dans cet état (qui n’est pas historique ,mais"hypothétique et fictif") ne sont pas des relations sociales, dans cet état l’homme est et reste isolé, il n’a ni raison, ni parole, il est en deçà du bien et du mal "aucune sorte de relation morale ni de devoirs connus,…,ni vices ni vertus" ni bon, ni méchant sauvage, ni remord, ni éloge: rien. Même pas la parole,(la voix n’articule pas ,au mieux elle crie et chante). Donc impossibilité de passer un contrat politique d’association ou de soumission qui le ferait passer de l’état de nature à celui de société (contrairement à Hobbes), les seuls caractères qui spécifient l’espèce humaine et vont lui permettre de passer à l’état de société c’est le sentiment vague de la pitié qui pousse les congénères les uns vers les autres et la perfectibilité qui grâce aux circonstances permettra à l’homme de vivre en société quand il y sera CONTRAINT. Car à la question " pourquoi les hommes se sont ils regroupés sous les lois en société?" la réponse rousseauiste est "ils n’ont pas pu faire autrement", Car, la nature de bonne mère nourricière devient marâtre (la fiction des catastrophes, séismes, déluges, incendies), l’homme DOIT poussé par la nécessité vitale et pas par les relations (fussent-elles de guerre généralisée) avec les autres hommes, collaborer, s’associer. Mais cette association n’est qu’un palliatif, qui laisse toujours un reste (une jambe de bois ou la meilleure des prothèse ne remplaceront pas ma jambe), la société supplée à la nature, elle produit les rapprochements et les regroupements,puis le langage, la raison, les lois, morales politiques.
Il n’y a pas chez Rousseau de contrat volontaire qui ferait sortir l’homme de l’état de nature. Rousseau est un critique des théoriciens de l’état de nature.
Mais il n’est pas totalement par ailleurs en opposition frontale avec Hobbes, non sur ce point de la place du contrat à la jointure entre état de pure nature et société, cela il le refuse, mais il retient de Hobbes le caractère absolu de la manifestation de la Volonté générale (qu’il ne faut pas confondre avec la volonté de tous) sous la forme de la loi qui s’impose à tous.
Comme le Léviathan, la volonté générale s’impose, on ne peut lui échapper, les termes de Rousseau (s’y référant Robespierre parlera de "despotisme de la liberté") sont singulièrement semblables dans la formulation qu’il donne de la formule de la souveraineté de la volonté générale (du contrat social II 3), avec les termes de Hobbes formulant le contrat unique (à la fois en un seul geste soumission et association ) dans le Léviathan au chapitre 17. Rousseau parlant du citoyen qui transgresse la loi dit "on le forcera à être libre", car "l’obéissance à la loi qu’on S’est prescrite est liberté", Hobbes ne dit pas cela bien sûr mais l’imposition par le souverain de la loi force le sujet à sortir de l’état de nature qui est un état de guerre généralisée de tous contre tous et de chacun contre chacun.
Bref, je pense que tant Rousseau que Hobbes font de la Souveraineté (de la Volonté Générale pour l’un, de la Civitas ou Léviathan pour l’autre) quelque chose d’irréfragable et d’inaliénable.
Rousseau n’est pas "un tendre" écolo avant l’heure ou le théoricien de Marie Antoinette en son hameau, Hobbes n’est pas un ogre totalitaire, mais à partir des problèmes de leurs temps la révolution anglaise pour l’un les prodromes de la révolution française pour l’autre et sans référence à des analyses de classes (je ne parle pas des considérations "sociologiques" de bazar excusant les pires turpitudes) , à partir des problèmes de leur temps donc, ils ont pensé cette question de la légitimité du pouvoir de façon cohérente et structurée.
Une référence remarquable: Jean Jacques Rousseau et la science politique de son temps de Derathé chez Vrin, et tous les textes politiques, leurs notes et leurs introductions de feue la petite bibliothèque "des classiques du peuple" aux feues Editions Sociales.
Amicalement
@Baruch
[A proprement parler dans l’état que Rousseau appelle l’état de "pure nature", si les hommes sont libres, on ne peut dire qu’ils sont heureux, car l’état de pure nature est un état dans lequel les hommes ne se rencontrent pas, un état fictif, antérieur à toute société. Il se caractérise par une absence de relations totale des hommes entre eux, qui ne doivent leur rencontre qu’au hasard et à la "poussée" des nécessités de la reproduction.]
Mais qui a dit que pour être « heureux » il faut être avec les autres ? Pourquoi ne pourrait-on être heureux tout seul, dès lors que le contact avec vos semblables ne vous manque pas ? Et s’il vous manque, qu’est ce qui vous empêche de les rencontrer tout en restant à l’état de nature ?
Je pense que votre raisonnement contient une prémisse cachée : celle que l’homme ne peut être heureux qu’en société, qu’il est « naturellement » social. Or c’est cette « naturalité » du lien social que Rousseau (tout comme Hobbes, d’ailleurs) rejette.
[Bref, je pense que tant Rousseau que Hobbes font de la Souveraineté (de la Volonté Générale pour l’un, de la Civitas ou Léviathan pour l’autre) quelque chose d’irréfragable et d’inaliénable.]
Oui. Mais alors que Rousseau fait de la volonté générale une abstraction, le Léviathan de Hobbes est une structure politique concrète. En fait, on voit mal dans Rousseau quelle est l’institution qui se chargera de « forcer les hommes à être libres ». Hobbes est de ce point de vue beaucoup plus précis. C’est pourquoi je pense qu’on peut voir en Hobbes un théoricien de l’Etat, alors que chez Rousseau la question reste dans le vague.
d’accord avec pas mal de points, mais pas sur la peur. la peur c’est facile à infliger et cela ne requière que de la force, de la brutalité. et pour faire encore plus peur l’idéal est d’être totalement imprévisible. On sort de l’état de droit et de la démocratie.
la crainte serait plus juste : c’est une peur qui a un objet. ce qui est important c’est que le fraudeur sache qu’il y aura, à toute infraction, une sanction. la peur implique d’une certaine façon que cette sanction serait disproportionnée.
@edgar
[la crainte serait plus juste : c’est une peur qui a un objet. ce qui est important c’est que le fraudeur sache qu’il y aura, à toute infraction, une sanction. la peur implique d’une certaine façon que cette sanction serait disproportionnée.]
C’est dans ce sens que j’avais entendu le mot « peur ». Mais si « crainte » vous paraît plus précis, va pour la crainte…
[Quand ces gentils étudiants qui ne voient pas d’inconvénient à travailler le dimanche seront devenus pères et mères de famille, et qu’on leur expliquera qu’il faut aller travailler le dimanche, et que c’est possible parce qu’une bande d’imbéciles quelques années auparavant ont aidé les patrons à dynamiter le repos dominical, que diront-ils ?]
Les fils et filles de familles modestes qui ne peuvent compter sur l’aide financière de leurs parents sont bien obligés, Descartes, de bosser (et le dimanche principalement) pour se payer leurs études si ils veulent pouvoir espérer avoir un sort plus enviable socialement parlant, que celui de leurs parents, qui bien évidemment sont dépités de n’être pas en mesure d’aider leurs enfants comme le font les familles des classes bourgeoises ou tout simplement moyennes !
Cette infantilisation permanente des gens à leur guider leurs choix de vie, leur dicter ce que doit être des loisirs à la hauteur etc, ça m’irrite ! J’aime l’idée que les gens soient responsables et pour cela il faut leur laisser le choix de décider ce qui est bon pour eux, tant que ce n’est pas mauvais pour les autres !
Personnellement, le travail du dimanche ne me choque pas plus que cela, si encadré très strictement au niveau de la loi (et que les patrons profiteurs soient sanctionnés), si basé sur le volontariat et pas imposé à tous ! tout comme ne doit pas être imposé à tous le travail du dimanche, pourquoi devrait-on imposer à tous le repos dominical obligatoire et je n’oublie pas pour autant les conquêtes sociales de nos aînés qui sont morts sous les barricades ! Cependant, il faut vivre avec son temps et avec ses possibilités de jongler offertes à l’instant T avec ce qu’il est permis ou possible de faire pour sortir la tête de l’eau et d’autant plus quand on n’a pas eu le bonheur de naître dans une famille friquée !
L’excuse mise en avant de l’abandon des enfants le dimanche tombe à l’eau, sachant que cela fera d’heureux grands parents qui pourront profiter de leurs petits enfants ! et puis récupérer le mercredi d’avoir bosser le dimanche permet tout autant à un père ou une mère de famille de faire des sorties avec ses enfants.
Ah, les beaux dimanches au bord de l’eau comme le chantait si joyeusement le talentueux Gabin dans "la belle équipe" (j’en ai des souvenirs de jeunesse bien que pas vieille du tout) oui, c’était du temps où les ouvriers avaient encore de l’espoir dans leur besace ! de l’espoir de voir leurs enfants s’élever là où eux n’avaient eu que le choix de subir ! aujourd’hui, le salaire est insuffisant certes et le coût des loyers et de la nourriture trop élevé par rapport au salaire alors le système D, mon bon monsieur, le système D s’impose en force !
Il fait bien Mélenchon de parler d’augmentation de salaire mais en attendant ce jour béni où les citoyens feront le choix de voter pour lui en 2017 (on peut toujours rêver), ils n’ont d’autres solutions pour l’instant que de trimer plus pour mettre un peu de beurre dans leurs épinards et ceux qui critiquent leurs choix sont sûrement parmi ceux qui ont des revenus hautement suffisants qui jamais ne verront leurs enfants devoir se prostituer (au propre comme au figuré) pour se donner les moyens d’une existence moins pavée d’embûches !
Doivent-ils donc se résigner ces pauvres étudiants ? Doivent-ils accepter la fatalité qu’en tant que fils de pauvres, ils n’auront accès à aucune facilité dans la vie ? ils sont au contraire bien méritants de se battre, de saisir les opportunités de se donner les moyens de s’en sortir, et de ne pas baisser les bras, fusse-t-il prix de l’indignation des bobos, qui revendiquent le droit au repos dominical pour tous parce que pour eux et leurs enfants, c’est d’une simplicité telle dans leur vie de jouisseurs qu’ils n’aient que cela à faire que de donner une définition sacrée au dimanche !
Je hais les dimanches chantait Greco, cependant…..
@L’inconnue de l’Orient Express
[Les fils et filles de familles modestes qui ne peuvent compter sur l’aide financière de leurs parents sont bien obligés, Descartes, de bosser (et le dimanche principalement) pour se payer leurs études si ils veulent pouvoir espérer avoir un sort plus enviable socialement parlant, que celui de leurs parents,]
C’est émouvant, toute cette sollicitude envers les « familles modestes »… un peu plus, et il faudra donner la légion d’honneur aux patrons de Castorama et de Leroy-Merlin pour avoir permis à tant de jeunes de famille modeste d’avoir accès à la promotion sociale. D’une manière totalement désintéressée, cela va sans dire…
C’est toujours comme ça. Quand les classes moyennes veulent un avantage, c’est au nom des « familles modestes » qu’elles le justifient. Qu’on ait envie de pouvoir faire ses courses le dimanche, on peut le comprendre. Après tout, dans notre société de contentement immédiat, il est insupportable de devoir attendre quelques jours pour se procurer ce bien convoité et qu’on a oublié d’acheter le samedi.
Le problème de ce raisonnement, c’est qu’il conduit à tous les abus. Si le but est de donner aux jeunes modestes les moyens d’étudier, pourquoi pas les autoriser à vendre leur sang ? Ou un rein, peut-être ? Après tout, personne ne serait obligé. On ne prendrait que des « volontaires »…
[Cette infantilisation permanente des gens à leur guider leurs choix de vie, leur dicter ce que doit être des loisirs à la hauteur etc, ça m’irrite ! J’aime l’idée que les gens soient responsables et pour cela il faut leur laisser le choix de décider ce qui est bon pour eux, tant que ce n’est pas mauvais pour les autres !]
Très bien. Pensez-vous qu’il faut légaliser la vente d’organes ? Après tout, il faut laisser les gens décider ce qui est bon pour eux, et si je vends mon rein je ne fais de mal à personne, non ?
Votre raisonnement est vicié parce qu’il suppose que l’on peut choisir librement. Mais dans les rapports entre l’employeur et l’employé, comme dans les rapports entre le riche et le pauvre, les parties ne sont pas placées dans un plan d’égalité. C’est pourquoi la société est obligée d’intervenir pour protéger la partie la plus faible, y compris contre sa « volonté », dans la mesure ou cette volonté est viciée par le rapport de forces. Une personne qui n’a d’autre ressource que de vendre un rein n’est pas en mesure d’effectuer un choix véritablement libre et informé.
[Personnellement, le travail du dimanche ne me choque pas plus que cela, si encadré très strictement au niveau de la loi (et que les patrons profiteurs soient sanctionnés), si basé sur le volontariat et pas imposé à tous !]
Mais voyons… et à votre avis, lorsqu’il faudra choisir les promus ou les partants au prochain plan social, le fait que Paul ait été « volontaire » et Pierre ait refusé n’aura, bien entendu, aucune influence… Vous croyez vraiment que cela marche comme ça ? Comment comptez vous vérifier que ceux qui se déclarent « volontaires » le font librement ?
[pourquoi devrait-on imposer à tous le repos dominical obligatoire]
Parce que dans un système concurrentiel, c’est la seule manière d’empêcher que la recherche permanente de la compétitivité aboutisse à pousser toujours plus loin les limites de ce qui est exigé des salariés. Les patrons l’ont très bien compris. Comme le décrit Christopher Hill, ce sont les patrons eux-mêmes qui ont soutenu les efforts des puritains pour imposer une interdiction absolue du travail dominical en Angleterre au XVIIème siècle. Et ils l’ont fait parce qu’ils ont compris qu’une journée de repos hebdomadaire améliorait les conditions économiques globales, mais qu’on n’arriverait jamais a donner une telle journée parce qu’il y aurait toujours un patron « astucieux » qui continuerait à travailler les dimanches pour tailler les croupières de ses concurrents. La seule possibilité d’instaurer un jour chômé, c’était qu’une institution extérieure l’impose.
[et je n’oublie pas pour autant les conquêtes sociales de nos aînés qui sont morts sous les barricades !]
J’ai du mal à voir comment nos aînés ont fait pour mourir « sous les barricades ». Il faut être très distrait pour se laisser bâtir une barricade dessus…
[L’excuse mise en avant de l’abandon des enfants le dimanche tombe à l’eau, sachant que cela fera d’heureux grands parents qui pourront profiter de leurs petits enfants !]
Oui, si vous avez de la chance de vivre dans la même ville que vos parents. Mais il est vrai que les pauvres ne bougent pas beaucoup…
[et puis récupérer le mercredi d’avoir bosser le dimanche permet tout autant à un père ou une mère de famille de faire des sorties avec ses enfants.]
Peut-être, mais pas avec son conjoint…
[Il fait bien Mélenchon de parler d’augmentation de salaire mais en attendant ce jour béni où les citoyens feront le choix de voter pour lui en 2017 (on peut toujours rêver),]
Quel cauchemar !
[Je hais les dimanches chantait Greco, cependant…..]
Je crois que vous confondez Greco avec Piaf…
Bonjour Descartes,
Je lis régulièrement vos billets et réagis que très rarement, néanmoins j’aurais aimé avoir votre avis sur quelques remarques à propos de votre appel à plus de répression Hobbsienne dans notre beau pays, mais aussi d’autres sujets abordés sur votre blog.
1 – A propos de la philosophie politique de Hobbes : je ne suis pas spécialiste, mais je m’étais intéressé à Hobbes il y a quelques temps et regrette du coup un peu votre présentation qui utilise le contraste avec le Rousseauisme – dont d’ailleurs vous précisez en commentaire qu’il s’agit plus d’une lecture nouvelle gauche de Rousseau que de Rousseau lui-même – qui ne retient du Léviathan que l’exercice de la violence légitime. En effet, Hobbes en fondant pour la première fois une légitimité politique sur une anthropologie (dont Rousseau lui reprochera à raison à mon avis le pessimisme), libère la politique du droit divin et de l’ascendant du discours religieux. Il veut à mon avis fonder une cité libre de citoyens libres sur la base d’un contrat libérant du discours religieux et des passions humaines. La liberté, plus que la répression, est au cœur de sa démarche, et il la définit comme le ‘silence de la loi’. Parler du Léviathan demande donc à mon sens de préciser que Hobbes le comprends bel et bien comme un monstre. Il n’en fait pas l’apologie béate. Un monstre extériorisant dans l’Etat les pulsions violentes de chacun que la société peut ainsi (et doit) domestiquer par la loi. Une loi qui se doit d’être la plus silencieuse possible pour garantir la liberté de chacun et la sécurité de tous. Si Hobbes a pour projet de donner un fondement anthropologique à la cité, c’est une vision de l’homme a minima pour obtenir l’autonomie politique de la citée. Rousseau de son côté refuse ce ‘minimalisme’ qui consiste à ne retenir que les passions humaines et préfère remettre la liberté au cœur de la nature des individus, concept qui est en effet tout à fait non-matérialiste. Le projet social de Rousseau est donc en fait bien plus exigeant pour les citoyens (on peut lui reprocher d’être utopique en effet): à aucun moment il ne prétends qu’il faudrait laisser les citoyens enfreindre la loi : « Si chacun fait ce qui lui plaît, qui, du fort ou du faible, arrivera à ses fins ? S’il n’y a pas de loi, qui fait la loi ? » écrit il dans Le Contrat Social L.I ch. 3 – « Du Droit du Plus Fort ». Donc Hobbes et Rousseau sur votre sujet sont en fait tout à fait d’accord : le droit du plus fort n’ont pas vraiment un droit, mais le chaos et la négation de la société, il faut que les hommes se donnent une loi comme contrat passés entre eux (et pas avec Dieu ou une autre instance supérieure).
2 – Qu’en est il du silence de la loi en France ? C’est une question clef à mon avis pour comprendre pourquoi l’Etat se mets souvent lui-même dans une position d’impuissance. Les hommes politiques français (et j’y inclue les extrêmes au premier chef, avec le NPA qui souhaite interdire le licenciement ou Marine Le Pen interdire l’immigration etc etc) me donnent l’impression d’avoir abandonné l’action sur le réel au profit d’une inflation législative qui confine au délire (Sarkozy et le discours de Grenoble ou les peines planchers illustrent bien ce problème à mon avis). Délire qui consiste, par ‘nostalgie de l’impuissance‘- titre de Duverger que vous avez mentionné sur ce blog à propos de la construction Européenne, et qui pointe une problématique à mon avis bien plus large – à fuir le réel comme la peste pour mieux exister personnellement dans le paysage de la communication politique. C’est une tension psychologique qui nous touche tous. Une destruction de notre relation collective à la réalité, une crise de la politique (pas qu’Européenne d’ailleurs). Cela explique l’angoisse, le pessimisme et l’essor impressionnant des désirs archaïques cristallisés politiquement par le FN bien plus justement à mon sens que le présumé rapport entre classes moyenne et populaire dont vous faites la pierre angulaire de votre analyse politique.
3 – L’Europe est un Léviathan : ai-je vraiment besoin de détailler plus ? C’est sans doute le principal défaut de l’Europe actuelle, celui d’être un Léviathan livré à lui –même. C’est le despotisme d’une élite symbolique ne se parlant qu’à elle-même pour reprendre C Lasch, qui tout en voulant le bien du peuple (si si M. Rehn veut sincèrement notre bien) n’a au final aucun respect pour leur citoyenneté ou plus simplement leur vitalité politique. C’est un Léviathan qui parle beaucoup trop de principes politiques (dogme libre échangiste ou de la concurrence en politique économique) et pas assez de la réalité (pas de politique de défense commune, aucune pas de définition de l’intérêt économique d’une Europe en dépression, Shengen et la sécurité, les exemples sont innombrables). Il y a donc une petite contradiction à se déclarer hobbesien pour un euro-sceptique tel que vous, mais surtout, vous voyez bien que la répression par le Léviathan est un principe politique insuffisant en soi seul.
4 – Classes moyennes et médiocrité du temps : à mon avis votre analyse ‘marxiste’ de ce que nous vivons n’est pas tout à fait satisfaisante sur le plan théorique. Les classes moyennes en tant que (de mémoire) ‘détenant suffisamment de capital, matériel ou immatériel, pour ne pas subir d’aliénation’ vivent structurellement entre deux états antagonistes – un jour capitaliste, le lendemain exploitées. Remarquez, en passant, que cette situation est en elle-même aliénante, mais pas sur un plan purement économique, mais social : elles n’ont pas de ‘place’ claire dans la société. Du point de vue marxiste, si le rapport de domination économique définit l’essence du prolétariat, c’est justement car il y a un antagonisme entre capital exploitant et travail exploité. Un antagonisme irréconciliable. Dès lors qu’il est possible pour certains (et en fait la majorité) de détenir une partie du capital, cet antagonisme est dépassé, et devient une question de degré: est ce que je détiens assez de capital pour négocier un bon niveau de salaire pour mon travail? cette question fait basculer dans un monde où il n’y a plus de lutte des classes mais une lutte individualisée et marginaliste pour que la répartition du capital permette une rémunération proportionnelle à la productivité sociale marginale. On peut tout à fait critiquer l’économie de marché en disant que le système de prix du marché libre conduit toujours à une allocation insatisfaisante en confondant productivité monétaire et productivité sociale mais là on est dans la social démocratie, plus du tout dans la lutte des classes.
Mais, revenons au sujet de ce billet, la médiocrité des temps en matière de sécurité ou d’action de l’Etat, ne touche pas uniquement les classes populaires. Les classes moyennes sont ultra-angoissées aussi de se voir pillées ou laminées par l’incivilité croissante et l’effacement du respect des normes sociales qu’elles partagent – en fait les normes sociales, au premier titre desquelles, la loi, sont le socles d’un ‘capital immatériel’ le mieux partagé dans la population. Seuls quelques uns (élites mondialisées ?) peuvent s’imaginer pouvoir s’en passer. Donc le besoin de ‘sécurité’ (cheval de bataille traditionnel de l’UMP ce qui montre bien qu’il n’y a pas du tout de rupture classe moyenne/populaires sur ce sujet) n’est à mon sens pas le fait d’une dialectique de classe, mais plutôt le retour vers des symboles archaïques collectifs (au sens Jungien) rendus nécessaires par l’anomie du discours politique ‘responsable’ qui a perdu le sens du réel et de l’action.
Croire que le FN (ou Mélenchon) parleraient du réel, à rebours de l’UMPS est faux. Les extrêmes construisent aussi des fantasmes en hystérisant des symboles partagés par tous (la République, la Laïcité pour le nouveau FN par exemple, la domination économique pour le FdG) qui ont étés galvaudés par le discours ‘responsable’. Ils assument simplement un rôle de compensation, d’un discours ‘conscients’ ou responsable qui non seulement nie le réel, mais en plus le combat et le fuis ardemment. Les classes moyennes, qui votent encore UMP-PS devraient plutôt se définir comme les personnes qui respectent encore les tabous hérités de l’après guerre et de la nouvelle gauche. Briser un tabou est forcément coûteux pour toute personne qui a un minimum de sur-moi (ie. d’éducation, mais pas forcément d’autonomie) politique, mais n’est absolument pas impossible. C’est dans ce mouvement que les extrêmes accroissent leur puissance, bien plus que sur la peur d’un déclassement social qui concerne qu’une faible partie de l’électorat (celui-ci concerne déjà à peu près tout le monde à part les ‘global executives’). C’est à mon avis pour cette raison que l’extrême gauche a perdu contre le FN : la gauche reste éprise de lutte des classes entre possédant et possédés dont l’icône est aujourd’hui déchue. Il n’est plus tabou d’aimer l’argent ou de vouloir être riche, pas plus que de vouloir imposer sa volonté à d’autre au prétexte d’une excellence ou d’un génie productif. Mais revenons au sur-moi et à la classe moyenne : prenez les profs, leur déclassement économique et symbolique ne date pas d’hier mais des années 90, or ils commencent à peine à bouger politiquement pris dans la tenaille de la dissonance entre la réalité de leur vie et leurs (nos ?) totems républicains égalitaires. Ils devraient déjà faire partie des ‘classes populaire’ selon votre analyse puisqu’ils sont exploités et méprisés, mais continuent majoritairement à voter PS (ou UMP parfois). Or un parcours à la nationaliste jacobin (cf. ses commentaires sur votre blog et son blog) illustre bien à mon avis que le basculement relève bel et bien de l’effondrement d’un tabous sous les coups d’une dissonance entre discours politique creux et réalité symboliquement douloureuse. Il progresse lentement. Or, malheureusement, le rôle des extrême est nécessaire pour conserver l’espoir d’un retour à la raison politique des partis traditionnels, malheureusement il très est loin d’être suffisant. Et le jour ou une majorité de profs auront brisé leurs icônes comme nationaliste jacobin, nous auront une société plus violente contre elle-même, symboliquement en guerre civile mais certainement pas plus de Lumières ou de Raison…
5 – La raison d’odp : vous avez à plusieurs reprises eu des débats tendus avec odp (par qui j’ai connu votre blog) sur des sujets historiques, à chaque fois extrêmement chargés symboliquement (de mémoire Vichy, l’Algérie, l’Action française, le repentir allemand). Loin de moi l’idée de vouloir les relancer, voire les trancher, mes lacunes historiques m’en rendraient bien incapable. Au-delà de leur intérêt informatif, je trouve symptomatique le besoin de reconstruire un discours sur les points souvent tabous de notre histoire contemporaine et voudrais souligner que malgré la forme provocatrice d’odp, je crois qu’il a raison sur un point essentiel : vous êtes au fond en lutte contre un forme de modernité que vous jugez destructrice. Or ce type de lutte politique – à mon avis tout à fait légitime a priori – présente toujours quelque danger de réveiller des monstres, qui font basculer d’un conservatisme lucide (vous êtes plus conservateur que marxiste à mon avis, mais ce n’est que mon avis) dans la folie réactionnaire. J’avoue que je serais déçu de voir ce blog abandonner l’amour de la raison et d’un idéal politique éclairé au profit de la médiocre jubilation de l’iconoclastie.
Merci pour votre blog et ses débats passionnants.
@axelzzz
[En effet, Hobbes en fondant pour la première fois une légitimité politique sur une anthropologie (dont Rousseau lui reprochera à raison à mon avis le pessimisme), libère la politique du droit divin et de l’ascendant du discours religieux. Il veut à mon avis fonder une cité libre de citoyens libres sur la base d’un contrat libérant du discours religieux et des passions humaines.]
Je ne suis pas convaincu que pour Hobbes la question de la « liberté » soit la question essentielle. Pour Hobbes, la question de l’ordre, la capacité d’une société à mettre fin à la « guerre de tous contre tous » était une finalité suffisante pour une société.
[La liberté, plus que la répression, est au cœur de sa démarche, et il la définit comme le ‘silence de la loi’.]
C’est une conception résiduelle de la liberté : la liberté est finalement de faire tout ce que la société ne considère pas nécessaire d’interdire… ce n’est pas vraiment la conception qui sera celle de Rousseau ou celle de la Révolution…
[Si Hobbes a pour projet de donner un fondement anthropologique à la cité, c’est une vision de l’homme a minima pour obtenir l’autonomie politique de la citée. Rousseau de son côté refuse ce ‘minimalisme’ qui consiste à ne retenir que les passions humaines et préfère remettre la liberté au cœur de la nature des individus, concept qui est en effet tout à fait non-matérialiste.]
Tout à fait…
[2 – Qu’en est il du silence de la loi en France ? C’est une question clef à mon avis pour comprendre pourquoi l’Etat se mets souvent lui-même dans une position d’impuissance.]
Mais justement, nous ne sommes plus dans une conception « résiduelle » de la liberté, mais au contraire dans une conception « essentialiste ». L’homme est « par essence » pourvu de droits chaque fois plus étendus que le Léviathan ne saurait prendre même pour cause de nécessité publique… dans ces conditions, il est un peu étrange de parler du « silence de la loi ». La loi est au contraire très bavarde !
[C’est une tension psychologique qui nous touche tous. Une destruction de notre relation collective à la réalité, une crise de la politique (pas qu’Européenne d’ailleurs). Cela explique l’angoisse, le pessimisme et l’essor impressionnant des désirs archaïques cristallisés politiquement par le FN]
Je pense que vous avez tout à fait raison de signaler cette problématique.
[bien plus justement à mon sens que le présumé rapport entre classes moyenne et populaire dont vous faites la pierre angulaire de votre analyse politique.]
Il n’y a pas de contradiction. La « destruction de notre relation collective à la réalité » a une genèse, et cette genèse tient beaucoup aux intérêts de la couche sociale qui domine aujourd’hi le champ politique, à savoir, les classes moyennes. Sans cette « destruction », il aurait été impossible pour les couches moyennes de se poser en représentant unique de l’ensemble du peuple, et de priver les couches populaires de toute représentation politique.
[3 – L’Europe est un Léviathan : ai-je vraiment besoin de détailler plus ?]
Oui, si vous voulez me convaincre. Si le Léviathan est un monstre, tout monstre n’est pas un Léviathan. L’Europe n’est pas le résultat d’un contrat par lequel les citoyens européens lui ont délégué le monopole de la violence légitime. Cette question n’a jamais été posée aux citoyens, et d’ailleurs l’Europe n’a guère les moyens d’imposer ses lois par la force. L’Europe est une construction qui repose exclusivement sur la veulerie et la « nostalgie de l’impuissance » des élites politiques nationales.
[Il y a donc une petite contradiction à se déclarer hobbesien pour un euro-sceptique tel que vous, mais surtout, vous voyez bien que la répression par le Léviathan est un principe politique insuffisant en soi seul.]
Bien sur que non, pour les raisons exposées plus haut. Si la construction européenne réposait effectivement sur une délégation des citoyens, cela pourrait se discuter. Mais ce n’est pas le cas, au contraire : si Monnet et ses congénères ont proposé la « politique des petits pas », c’est parce qu’ils comprenaient parfaitement que jamais les peuples européens ne donneraient leur accord si la question leur était posée clairement et formellement.
[Remarquez, en passant, que cette situation est en elle-même aliénante, mais pas sur un plan purement économique, mais social : elles n’ont pas de ‘place’ claire dans la société.]
Je partage cette analyse. Les couches moyennes sont des dominants qui se vivent comme des dominés. Mais cela relève de la psychologie sociale, pas de l’économie politique…
[Du point de vue marxiste, si le rapport de domination économique définit l’essence du prolétariat, c’est justement car il y a un antagonisme entre capital exploitant et travail exploité. Un antagonisme irréconciliable. Dès lors qu’il est possible pour certains (et en fait la majorité) de détenir une partie du capital, cet antagonisme est dépassé, et devient une question de degré: est ce que je détiens assez de capital pour négocier un bon niveau de salaire pour mon travail? cette question fait basculer dans un monde où il n’y a plus de lutte des classes mais une lutte individualisée et marginaliste pour que la répartition du capital permette une rémunération proportionnelle à la productivité sociale marginale.]
Non. Notez d’abord que la situation que vous décrivez a toujours existé. Ce qu’on désignait au XIXème siècle comme « l’aristocratie ouvrière », c’est-à-dire les ouvriers hautement qualifiés de certaines industries qui nécessitaient une main d’œuvre particulièrement compétente. Cette « aristocratie ouvrière » arrivait à négocier individuellement et collectivement des salaires bien plus élevés que le reste des ouvriers… et dans certains cas ont eu un véritable comportement de « classe moyenne » moderne. Cela n’a pas empêché la lutte des classes de se développer.
La question essentielle qui définit le prolétariat est la question de l’exploitation, c’est-à-dire, le fait qu’à la fin du mois j’empoche une valeur inférieure à celle que mon travail a produit. L’antagonisme entre le travailleur exploité et le capitaliste exploiteur est là, et le fait que le travailleur puisse négocier un « meilleur salaire » ou qu’en possédant quelques actions il puisse récupérer une partie de la valeur qu’il produit – et donc de réduire le taux d’exploitation – ne change rien à l’affaire.
[Mais, revenons au sujet de ce billet, la médiocrité des temps en matière de sécurité ou d’action de l’Etat, ne touche pas uniquement les classes populaires. Les classes moyennes sont ultra-angoissées aussi de se voir pillées ou laminées par l’incivilité croissante et l’effacement du respect des normes sociales qu’elles partagent – en fait les normes sociales, au premier titre desquelles, la loi, sont le socles d’un ‘capital immatériel’ le mieux partagé dans la population.]
La question de la sécurité touche tous les milieux. Les bourgeois eux aussi sont « ultra angoissés » de voir leurs villas cambriolées. La meilleure preuve en est qu’ils recrutent des services de sécurité privés pour les protéger. Les classes moyennes sont certainement affectées elles aussi, mais pas au point d’être prêtes à payer plus d’impôts pour financer une véritable politique de sécurité. Si elles avaient les vendeurs de drogue au pied de leur immeuble du 7ème arrondissement, leur position sur la sécurité serait fort différente…
[Donc le besoin de ‘sécurité’ (cheval de bataille traditionnel de l’UMP ce qui montre bien qu’il n’y a pas du tout de rupture classe moyenne/populaires sur ce sujet) n’est à mon sens pas le fait d’une dialectique de classe, mais plutôt le retour vers des symboles archaïques collectifs (au sens Jungien) rendus nécessaires par l’anomie du discours politique ‘responsable’ qui a perdu le sens du réel et de l’action.]
Mais alors, à votre avis, pourquoi les classes moyennes soutiennent les politiques pénales permissives, alors que les couches populaires appuient les politiques pénales répressives ? Si tout le monde est « ultra-angoissé », si tout le monde est « touché », pourquoi cette différence de réaction ?
[Croire que le FN (ou Mélenchon) parleraient du réel, à rebours de l’UMPS est faux.]
Je n’en suis pas persuadé. Le FN arrive à attirer des électeurs des couches populaires parce qu’il leur parle de leurs problèmes, qui sont des problèmes bien réels. Mélenchon aussi attire les électeurs parce qu’il leur parle de leurs problèmes, mais comme il s’agit des problèmes des classes moyennes affluentes (écosocialisme, mariage pour tous…), il attire ce type d’électorat qui est bien plus limité.
[Les classes moyennes, qui votent encore UMP-PS devraient plutôt se définir comme les personnes qui respectent encore les tabous hérités de l’après guerre et de la nouvelle gauche.]
Je ne vois pas très bien à quels « tabous » vous faites allusion.
[Mais revenons au sur-moi et à la classe moyenne : prenez les profs, leur déclassement économique et symbolique ne date pas d’hier mais des années 90,]
Je vois le « déclassement symbolique »… mais d’où tirez-vous l’idée qu’ils sont déclassés économiquement ?
[Ils devraient déjà faire partie des ‘classes populaire’ selon votre analyse puisqu’ils sont exploités et méprisés,]
Méprisés peut-être… mais pourriez-vous m’indiquer ce qui vous fait penser qu’ils sont « exploités » ?
[mais continuent majoritairement à voter PS (ou UMP parfois). Or un parcours à la nationaliste jacobin (cf. ses commentaires sur votre blog et son blog) illustre bien à mon avis que le basculement relève bel et bien de l’effondrement d’un tabous sous les coups d’une dissonance entre discours politique creux et réalité symboliquement douloureuse.]
Encore une fois, je ne vois pas très bien à quels « tabous » vous faites allusion.
[Et le jour ou une majorité de profs auront brisé leurs icônes comme nationaliste jacobin, nous auront une société plus violente contre elle-même, symboliquement en guerre civile mais certainement pas plus de Lumières ou de Raison…]
Je pense que c’est exactement le contraire. Les profs ont brisé leurs icônes depuis longtemps. Depuis mai 1968, pour être précis. C’est là que les « tabous » ont été brisés. Et cela a donné effectivement le recul des Lumières et de la Raison que nous éprouvons aujourd’hui. Je pense que les gens comme nationalistejacobin essayent au contraire de remettre sur pied les idoles qui ont été brisées alors. Et que cela peut conduire à remettre la Raison à sa juste place…
Et si les profs ont brisé les idoles, ce n’est pas par hasard : ils les ont brisés parce que ces idoles permettaient aux enfants des couches populaires d’acquérir un bagage qui aurait pu leur permettre de concurrencer leurs propres enfants. Chose que les profs et les classes moyennes en général ne sont pas prêts de permettre.
[vous êtes au fond en lutte contre un forme de modernité que vous jugez destructrice. Or ce type de lutte politique – à mon avis tout à fait légitime a priori – présente toujours quelque danger de réveiller des monstres, qui font basculer d’un conservatisme lucide (vous êtes plus conservateur que marxiste à mon avis, mais ce n’est que mon avis) dans la folie réactionnaire.]
Je vous remercie de ce que j’estime être un compliment. Toute réflexion capable de changer le monde est une réflexion dangereuse, et je suis parfaitement conscient du fait que s’attaquer à des questions de fond contient toujours le danger de partir dans la mauvaise direction.
[J’avoue que je serais déçu de voir ce blog abandonner l’amour de la raison et d’un idéal politique éclairé au profit de la médiocre jubilation de l’iconoclastie.]
Je vous assure que je suis prêt à tout faire pour que cela n’arrive pas. Cependant, le risque que vous dénoncez ne devrait pas nous dissuader de remettre en question les icônes. Autrement, on prend un risque que j’estime encore plus grand, celui de tuer toute pensée adogmatique.
[Merci pour votre blog et ses débats passionnants.]
Et merci à vous de votre participation, trop rare à mon goût.
J’aimerais savoir à quelle solution à court et long terme vous pensez pour votre exemple n°1 : une amende ? La prison ? Expulsion hors du pays ? Leur permettre d’accéder à un logement ? Vous conviendrez qu’en pratique ce n’est pas simple…
Sur le braqueur de Nice, ses condamnations dataient d’avant ses 18 ans, et ne concernaient de ce que j’en ai lu rien de comparable avec le braquage, mais des vols et délits routiers… Donc je ne sais pas si mettre en cause le manque de répression est vraiment valable. Il serait d’ailleurs très intéressant de savoir s’il aurait été plus fermement condamné il y a cinquante ans pour les mêmes faits.
Au passage ce reproche d’une répression devenue tabou est quand même paradoxal, la conquête du pouvoir par Sarkozy depuis le ministère de l’intérieur en ne parlant que de réprimer plus durement n’est pas si vieille… (et Valls me semble en quelque sorte reprendre cette tactique à son compte).
Et sinon à propos de Hobbes et Rousseau, j’avais lu un livre intitulé « Le paradoxe de Robinson » de F. Flahaut, qui en quelque sorte renvoyait les deux conceptions dos à dos, l’idée étant que les hommes sont hommes parce qu’ils vivent en société et que « pour les êtres humains, l’état de nature c’est l’état social ». Un très beau livre, même si je ne suis pas vraiment en mesure d’avoir un avis critique sur ces questions.
@tMn
[J’aimerais savoir à quelle solution à court et long terme vous pensez pour votre exemple n°1 : une amende ? La prison ? Expulsion hors du pays ? Leur permettre d’accéder à un logement ? Vous conviendrez qu’en pratique ce n’est pas simple…]
La confiscation du corpus delicti comme garantie du paiement des dommages. On n’aurait pas besoin de le faire plusieurs fois : une fois suffirait, et l’ensemble de la communauté comprendrait que certaines choses ne se font pas.
[Sur le braqueur de Nice, ses condamnations dataient d’avant ses 18 ans, et ne concernaient de ce que j’en ai lu rien de comparable avec le braquage, mais des vols et délits routiers… Donc je ne sais pas si mettre en cause le manque de répression est vraiment valable. Il serait d’ailleurs très intéressant de savoir s’il aurait été plus fermement condamné il y a cinquante ans pour les mêmes faits.]
Sans aucun doute. Mais surtout, il aurait eu moins de probabilité de commettre les mêmes faits, parce qu’il aurait été réprimé bien avant. Dans la cité populaire ou j’habitais quand j’étais enfant, le gardien mettait des amendes de 5 F (et pour un gosse c’était une somme !) à ceux qui marchaient sur les pelouses. Tu le faisais une ou deux fois, et ensuite tu comprenais. La surveillance sociale, c’était quelque chose à l’époque : tu ne te levais pas pour céder le siège dans l’autobus à une vieille dame, il y avait toujours un voyageur pour te le faire remarquer et pour te forcer à le faire si nécessaire.
[Au passage ce reproche d’une répression devenue tabou est quand même paradoxal, la conquête du pouvoir par Sarkozy depuis le ministère de l’intérieur en ne parlant que de réprimer plus durement n’est pas si vieille…]
Parler de réprimer n’est pas la même chose que réprimer…
@Descartes et (surtout) à tMn: (si je peux me permettre d’interférer, sinon effacer).
Je suis bien d’accord avec la réponse de Descartes:
"Parler de réprimer n’est pas la même chose que réprimer…"
Et si tMn ne voit pas la différence, c’est parce que comme beaucoup de gens, il confond la réalité (les actes) avec les mots, la réalité avec le "story telling". Mme Taubira (qui va un peu fort, certes) s’inscrit quand même, en fait, dans un mouvement initié par Sarkozy et R. Dati (loi de 2009).
Dans un autre domaine, Normal 1er déclarait que son ennemi était la finance sans visage….Sans commentaire.
Bonjour Descartes,
> Ils sont comparables à un braqueur qui prétendrait que son forfait est justifié parce que la société injuste ne lui donne pas l’argent dont il a besoin, et non à un bijoutier qui répond par la violence à une infraction préalable.
Pour moi ils sont entre les deux. Effectivement, ils étaient, légalement, en tort, et, toujours légalement, ils n’étaient pas victimes des cultures OGM. Mais ils ne retirent aucun profit personnel de leur action. À la limite on pourrait dire que les meneurs comme Bové pouvaient espérer en retirer un prestige politique, mais pour les anonymes ça me paraît négligeable par rapport à la motivation première de l’acte militant. Si vous voulez les comparer à des braqueurs, ce serait des braqueurs qui s’en prennent uniquement au trésor public et redistribuent l’argent des impôts au contribuable. (Ça me rappelle quelqu’un, tiens.) Baissez les impôts et ils arrêteront. Pas un braqueur classique, qui n’a pas de cible politique, n’a pas vocation à vider tous les coffres de France (contrairement aux faucheurs qui souhaitent mettre un terme à toutes les cultures OGM en milieu ouvert).
> Dans une république, aucun citoyen – fut il un honnête travailleur et contribuable – n’a le droit de décider quelles sont les lois qu’il faut appliquer et quelles sont celles dont on peut se dispenser.
D’où ma remarque. Sur ce plan les faucheurs sont exactement au même point que le « cochon de contribuable » lambda et chacun d’eux participera dans la même mesure au paiement de la facture.
> Le bijoutier exige que l’Etat fasse appliquer les lois, le « faucheur volontaire » demande exactement le contraire.
Pas vraiment : ils demandaient un changement de la loi, et que cette loi soit respectée. En outre ils avançaient (pas entièrement à tort…) que la loi était basée sur des évaluations mal menées, autrement dit la conséquence d’une mauvaise application d’une loi antérieure. L’état leur a d’ailleurs plus ou moins donné raison par la suite avec le moratoire sur les OGM.
> Si je tue mon voisin au prétexte que « je suis convaincu » qu’il est possédé par le diable, je vais en prison quand même. La « conviction » n’est pas une justification.
Si, si vous tuez votre voisin au prétexte qu’il vous menace de son arme, vous êtes en état de légitime défense, même si à ce moment vous ne saviez pas que l’arme n’était pas chargée ou qu’elle était factice, du moment que vous aviez de bonnes raison d’être convaincu que la menace était réelle.
> Je ne le crois pas un instant. Ce sont des fanatiques, et le fanatisme n’a jamais été convaincu par « l’information et la formation scientifique ». Il n’y a pas d’impulsion plus puissante, et plus difficile à combattre, que l’envie de croire.
On en a vu pourtant certain changer d’avis (mais bon, je n’essaierai pas de vous en convaincre). Ceci dit, même en admettant qu’il soit impossible de les raisonner, on peut douter que la répression que vous préconisez ait beaucoup d’effet : ils la recherchent, dans la mesure où elle leur offre l’assurance de la médiatisation. On a d’autant plus parlé des faucheurs que Bové risquait la prison — on en a encore parlé qu’en il l’a obtenue, et encore quand il en est sorti. Les faucheurs volontaire n’ont absolument pas peur du gendarme : ils agissent à visage découvert, et quand ils ont fini ils vont voir le gendarme et lui disent voilà, on vient de faucher des OGM dans le champ là-bas, arrêtez-nous s’il vous plaît, on voudrait un procès et passer au 20h, merci. C’est ça que je voulais souligner. Demander plus de répression dans ce cas, ça n’a aucun sens. Comment voulez-vous que l’État fasse peur à ces gens ?
@ Dsk :
Je vous remercie de bien vouloir expliquer en quoi votre petite phrase relative à la patronne du FN contribue utilement au débat mais simplement à chanter les louanges de l’intéressée.
En matière de défense du travail, certains ont, de par leur histoire et leurs engagements constants plus de titres que d’autres et au premier chef, des syndicats qui, constamment ont combattu et combattent cette « libéralisation ».
@ L’inconnue de l’orient express
Ne vous est-il jamais venu à l’esprit que l’avancée progressive au travail le dimanche de secteurs non indispensables à, disons, la vie, pourrait aboutir à sa banalisation, sa généralisation dû à l’effet de concurrence (ne pas laisser les autres réaliser un surplus de chiffres d’affaires) donc à la disparition des compensations salariales dès lors qu’il reste exceptionnel ?
De plus, une telle généralisation pourrait contribuer à un éclatement encore plus grand de nos sociétés : dans telle famille, le père de congé le lundi, la mère le mercredi (attention la réforme Peillon devant être généralisée, il n’y aura d’enfant présent que le mercredi après-midi) le fils le jeudi etc… Faudra-t-il poser des RTT pour se réunir ? Idem pour les amis et autres…
Particulièrement dans le commerce, les vendredi, samedi et dimanche seront particulièrement difficiles à obtenir du fait du potentiel client ces jours-là.
Légende ? Je peux vous témoigner de mon expérience en mes débuts de carrière où l’on avait besoin de tout l’effectif pour faire face au samedi matin.
@ morel
["Je vous remercie de bien vouloir expliquer en quoi votre petite phrase relative à la patronne du FN contribue utilement au débat mais simplement à chanter les louanges de l’intéressée."]
Je vous dirais que pour moi, la réflexion n’a de sens que si elle débouche sur l’action. A partir de là, ce qui me semble, non pas utile au débat, mais donner sa pleine utilité au débat, c’est d’en tirer toutes les conséquences sur le plan politique. Autrement dit, une fois que l’on a dénoncé l’idéologie libérale-libertaire qui voudrait, ces jours-ci, s’en prendre à l’interdiction du travail le dimanche, ce qui me semble, précisément, "utile", c’est de bien voir qui, dans le champ politique, partage le mieux cette dénonciation.
["En matière de défense du travail, certains ont, de par leur histoire et leurs engagements constants plus de titres que d’autres et au premier chef, des syndicats qui, constamment ont combattu et combattent cette « libéralisation »."]
Sans doute. Mais les syndicats, surtout en France, ne sauraient se désintéresser du pouvoir politique. Il me paraît donc, là encore, on ne peut plus "utile", de se demander quel parti politique serait le mieux à même de défendre, non pas les sans-papiers, ni l’égalité hommes-femmes, mais l’intérêt des travailleurs.
@dsk
[Il me paraît donc, là encore, on ne peut plus "utile", de se demander quel parti politique serait le mieux à même de défendre, non pas les sans-papiers, ni l’égalité hommes-femmes, mais l’intérêt des travailleurs.]
C’est une bonne question. Le fait est qu’aujourd’hui la question n’a pas véritablement de réponse. Il est vrai que le FN a pris des positions générales sur un nombre de points – l’Euro, l’Europe, le rétablissement de l’autorité de l’Etat, la sécurité – qui vont dans le sens des intérêts des travailleurs. Il est vrai aussi que pour le moment le FN ne s’est jamais engagé de leur côté dans une bataille concrète sur le terrain. C’est en partie parce qu’il manque de relais en termes de réseaux syndicaux ou d’élus, mais c’est surtout parce qu’il a encore une frange importante de son électorat qui reste profondément libéral en matière économique. Marine Le Pen ne peut crier "sus aux patrons" sans se couper immédiatement de cet électorat. Les élus FN participant aux piquets de grève ou votant des subventions aux ouvriers grévistes, ce n’est pas pour tout de suite, même si l’on observe l’apparition ici ou là de dirigeants syndicaux qui ne font pas secret de leurs engagements politiques chez Marine Le Pen. Mais la tradition syndicale française, contrairement à celle de nos voisins, n’a que rarement fait de la place à des organisations de droite, et à fortiori de droite extrême. C’est un frein important pour le développement d’un parti de droite qui voudrait assumer les revendications ouvrières.
Se demander "quel parti est à mieux de défendre l’intérêt des travailleurs" est donc une question particulièrement déprimante…
[Se demander "quel parti est à mieux de défendre l’intérêt des travailleurs" est donc une question particulièrement déprimante…]
Une idée en passant…
Étant donné votre engagement envers l’exploitation des nouveaux moyens d’expression pour débattre, je me demandais ce que vous pensiez de l’approche du Parti Pirate : leur programme ne me paraît pas du tout défendre l’intérêt des travailleurs, mais il semble qu’il est le résultat de débats en ligne. À mon humble avis, étant donnés vos connaissances, votre faculté à fournir des arguments percutants et le temps que vous êtes prêt à passer à ce type d’activité, votre simple participation à leur forum pourrait avoir une influence considérable sur le parti. Non pas que je croie en la possibilité pour ce parti de proposer un jour un programme qui tienne la route ou d’intégrer des membres suffisamment expérimentés, mais je pense que l’influence que vous auriez serait décuplée en comparaison de celle que vous avez sur ce blog.
http://forum.partipirate.org/
PS : je vous remercie aussi au passage pour le document sur le coût des transports vers lequel vous m’avez dirigé il y a quelques jours.
@ Descartes
["Il est vrai aussi que pour le moment le FN ne s’est jamais engagé de leur côté dans une bataille concrète sur le terrain. C’est en partie parce qu’il manque de relais en termes de réseaux syndicaux ou d’élus, mais c’est surtout parce qu’il a encore une frange importante de son électorat qui reste profondément libéral en matière économique. Marine Le Pen ne peut crier "sus aux patrons" sans se couper immédiatement de cet électorat."]
Je ne partage pas cette analyse, Descartes. Je crois qu’il est fondamental de bien comprendre que pour Marine Le Pen, tout tourne autour d’un seul et unique objectif, auquel tout le reste est subordonné : la défense de la Nation.
C’est ainsi qu’elle a, me semble-t-il, parfaitement identifié l’adversaire principal de notre souveraineté nationale comme étant le grand patronat. Du reste, si vous avez pris la peine de l’écouter ou de la lire, vous avez dû très souvent noter qu’elle s’en prenait aux grands patrons. Ceux-ci ne s’y sont d’ailleurs pas trompé puisque Laurence Parisot est allée jusqu’à écrire un livre contre Marine Le Pen.
C’est donc dans cette objectif de défense de la Nation, mais uniquement dans cet objectif, que Marine Le Pen cherche à rassembler toutes les victimes de la "mondialisation libérale" promue par le grand patronat : classes populaires, mais aussi, petits patrons. Et c’est d’ailleurs en ce sens qu’il faut comprendre, à mon avis, sa proposition quelque peu curieuse de réserver les autorisations d’ouverture le dimanche aux petits commerçants, afin de leur donner un avantage compétitif face aux grandes surfaces.
A partir de là, il me semble que la question des rapports entre les syndicats et le FN se présente de la manière suivante : le FN n’a pas vocation à " s’engager dans une bataille concrète sur le terrain " avec les syndicats, à moins qu’une telle bataille ne touche à un enjeu de souveraineté, ce qui est tout de même une raison plus profonde qu’un simple souci de ne pas déplaire à son électorat libéral.
Quant aux syndicats, je crois qu’ils devraient simplement se demander si la restauration de notre souveraineté nationale serait bien conforme à l’intérêt des travailleurs, et ce n’est que sur la base d’une réponse affirmative, à mon avis, que FN et syndicats pourraient, éventuellement, envisager de faire un bout de chemin ensemble.
Toutefois, les syndicats ne sauraient attendre de Marine Le Pen qu’elle se métamorphose en Georges Marchais. Pour celui-ci, la Nation n’était qu’un objectif secondaire, au service de son objectif principal qu’était la défense des travailleurs, tandis que pour Marine Le Pen, c’est exactement l’inverse.
["Mais la tradition syndicale française, contrairement à celle de nos voisins, n’a que rarement fait de la place à des organisations de droite, et à fortiori de droite extrême."]
Vous aurez noté que Marine Le Pen cherche à se délester totalement de ces labels "droite" ou "extrême-droite". Là encore, cela s’explique par le fait que la seule chose qui l’intéresse, c’est la Nation.
["Se demander "quel parti est à mieux de défendre l’intérêt des travailleurs" est donc une question particulièrement déprimante…"]
Pour moi, la réponse est très claire : c’est le FN. Car le danger mortel, pour les travailleurs, c’est la disparition de notre souveraineté nationale.
"D’où ma remarque. Sur ce plan les faucheurs sont exactement au même point que le « cochon de contribuable » lambda et chacun d’eux participera dans la même mesure au paiement de la facture."
Pas d’accord. Il n’appartient pas plus aux faucheurs de décider que la France ne doit pas autoriser les cultures d’OGM qu’il ne leur appartient d’engager la dépense publique. Il y a des responsables politiques pour ça.
"Les faucheurs volontaire n’ont absolument pas peur du gendarme : ils agissent à visage découvert, et quand ils ont fini ils vont voir le gendarme…".
Je me souviens d’un leader de mouvement de petits commerçants et artisans, Gérard Nicoud, très actif en son temps, mais que la prison a calmé. Contrairement à lui, les faucheurs n’ont pas de volonté politique face à eux, seulement des ectoplasmes.
@Jean-françois
Merci des indications… mais au vu du faible nombre de messages sur le forum que vous citez, je doute beaucoup de l’intérêt de participer. J’ai déjà assez de mal à garder le rythme avec ce blog… alors m’imposer le travail d’écrire des contributions pour un autre blog, ce n’est pas trop pour moi en ce moment.
@ dsk
[Je ne partage pas cette analyse, Descartes. Je crois qu’il est fondamental de bien comprendre que pour Marine Le Pen, tout tourne autour d’un seul et unique objectif, auquel tout le reste est subordonné : la défense de la Nation.]
C’est que vous êtes bien moins cynique que moi… j’ai toujours tendance à chercher les moteurs de l’action de nos politiques dans leurs bas intérêts personnels ou, à la rigueur, de classe. Et – oh ! coïncidence – dans 95% des cas je le trouve ! Je veux bien qu’il y a des hommes qui agissent pour des motifs plus hauts : Chevènement, Séguin, Mongénéral… et chacun d’entre eux l’ont prouvé avec des actes. Mais j’attends une preuve avant d’accorder ce statut exceptionnel à Marine Le Pen.
[C’est ainsi qu’elle a, me semble-t-il, parfaitement identifié l’adversaire principal de notre souveraineté nationale comme étant le grand patronat. Du reste, si vous avez pris la peine de l’écouter ou de la lire, vous avez dû très souvent noter qu’elle s’en prenait aux grands patrons. Ceux-ci ne s’y sont d’ailleurs pas trompé puisque Laurence Parisot est allée jusqu’à écrire un livre contre Marine Le Pen.]
Vous avez raison je pense sur un point : Marine Le Pen tient sur la question de la Nation un discours cohérent. Et on ne peut pas se réclamer de la Nation et ne pas attaquer ceux qui au nom d’une mondialisation conçue comme « inévitable » sont prêts à la mettre en terre, pas plus qu’on ne peut parler de souveraineté de la Nation et défendre l’Euro qui en est la négation. Mais je pense que vous allez un peu trop vite en besogne en considérant que ce discours est sincère. Moi, j’attends des preuves par les actes avant de conclure.
[A partir de là, il me semble que la question des rapports entre les syndicats et le FN se présente de la manière suivante : le FN n’a pas vocation à " s’engager dans une bataille concrète sur le terrain " avec les syndicats, à moins qu’une telle bataille ne touche à un enjeu de souveraineté, ce qui est tout de même une raison plus profonde qu’un simple souci de ne pas déplaire à son électorat libéral.]
Soit. Par exemple, une bataille pour défendre nos usines d’armement, ou pour s’opposer à la privatisation du gaz et de l’électricité ? Je comprends votre argument, mais il ne me convainc pas vraiment. Un parti politique ne peut pas se contenter des grands combats visionnaires, il doit inscrire ces combats dans la lutte quotidienne hic et nunc. La force du PCF fut sa capacité de faire la synthèse entre les grands objectifs révolutionnaires et la lutte quotidienne pour des objectifs limités.
[Vous aurez noté que Marine Le Pen cherche à se délester totalement de ces labels "droite" ou "extrême-droite". Là encore, cela s’explique par le fait que la seule chose qui l’intéresse, c’est la Nation. ]
Sur ce point là, je converge avec Marine Le Pen… 😉 Les étiquettes du genre « gauche » et « droite » n’ont plus aucun sens. Elles ne servent qu’à menacer d’excommunication tous ceux qui se posent certaines questions gênantes à propos des vaches sacrées. Pas étonnant que ceux qui gagnent leur vie grâce au lait des vaches en question voient dans toute remise en question du fossé gauche/droite une menace…
[Pour moi, la réponse est très claire : c’est le FN. Car le danger mortel, pour les travailleurs, c’est la disparition de notre souveraineté nationale.]
Et vous ne trouvez pas cela déprimant ?
["C’est que vous êtes bien moins cynique que moi…"]
Personnellement, le critère qui me permet de juger de la sincérité d’un discours, c’est sa cohérence interne. Généralement, celui qui ment se contredit. Or je suis frappé, justement, de l’extrême cohérence du discours de Marine Le Pen. Par exemple, je trouve très cohérent de dire que l’on n’est ni de droite et de gauche et de dire que l’on défend la Nation, qui est composée de gens de droite et de gauche.
["j’ai toujours tendance à chercher les moteurs de l’action de nos politiques dans leurs bas intérêts personnels ou, à la rigueur, de classe."]
On ne peut pas dire, en tout cas, que son père était animé par de bas intérêts personnels sans quoi, pour les satisfaire, il serait devenu un homme politique de droite classique. Quant à ses intérêts de classe, étant donné ses origines populaires, ils auraient dû plutôt le porter vers la gauche. Et j’ajouterais d’ailleurs que je crois que c’est ce qui faisait justement sa force. Vis-à-vis des autres hommes politiques, il apparaissait comme le contraire d’un carriériste. Quant aux classes populaires, elles ne le percevaient pas comme un représentant de la bourgeoisie. A partir de là, je vous dirais que mon sentiment est qu’en même temps que son parti, il a transmis cette conception à sa fille.
["Et – oh ! coïncidence – dans 95% des cas je le trouve !"]
Ah bon ? Et dans le cas de Marine Le Pen ?
["Je veux bien qu’il y a des hommes qui agissent pour des motifs plus hauts : Chevènement, Séguin, Mongénéral… et chacun d’entre eux l’ont prouvé avec des actes. Mais j’attends une preuve avant d’accorder ce statut exceptionnel à Marine Le Pen."]
En attendant, je crois que vous pouvez tout de même l’accorder à Philippot, qui a pris le risque de sacrifier un brillant avenir en rejoignant le FN.
["Vous avez raison je pense sur un point : Marine Le Pen tient sur la question de la Nation un discours cohérent."]
Vous voyez ? Qu’est-ce que je vous disais ?
["Mais je pense que vous allez un peu trop vite en besogne en considérant que ce discours est sincère. Moi, j’attends des preuves par les actes avant de conclure."]
Comment voulez-vous qu’elle fasse ses preuves si elle n’est pas élue ? Et comment voulez-vous qu’elle soit élue si on attend qu’elle fasse ses preuves ?
["Soit. Par exemple, une bataille pour défendre nos usines d’armement, ou pour s’opposer à la privatisation du gaz et de l’électricité ?"]
Exactement.
["Un parti politique ne peut pas se contenter des grands combats visionnaires, il doit inscrire ces combats dans la lutte quotidienne hic et nunc. La force du PCF fut sa capacité de faire la synthèse entre les grands objectifs révolutionnaires et la lutte quotidienne pour des objectifs limités."]
Je ne comprends pas très bien. En quoi trouvez-vous que le FN se contenterait de grands combats visionnaires ? L’étiquetage du hallal, par exemple, vous trouvez que c’est un grand combat visionnaire ?
[Pour moi, la réponse est très claire : c’est le FN. Car le danger mortel, pour les travailleurs, c’est la disparition de notre souveraineté nationale.] [Et vous ne trouvez pas cela déprimant ?]
Ce qui me déprime, ce sont surtout ceux qui n’en ont pas conscience, et ne font pas le lien entre lutte des classes et défense de la Nation. Si le vrai clivage, aujourd’hui, n’est plus entre gauche et droite, mais entre adversaires et défenseurs de la Nation, c’est que la vraie droite, aujourd’hui, ce sont les premiers, tandis que la vraie gauche, ce sont les seconds.
@dsk
[« Personnellement, le critère qui me permet de juger de la sincérité d’un discours, c’est sa cohérence interne ». Généralement, celui qui ment se contredit.]
Pas nécessairement. Vous devez fréquenter des menteurs de seconde zone… Un menteur intelligent et qui comprend ce qu’il dit ne se contredit pas.
[On ne peut pas dire, en tout cas, que son père était animé par de bas intérêts personnels]
Bas certainement, mais personnels, c’est en effet douteux. Jean-Marie Le Pen a beaucoup de défauts, mais la sincérité de ses convictions me paraît difficile à contester.
["Et – oh ! coïncidence – dans 95% des cas je le trouve !". Ah bon ? Et dans le cas de Marine Le Pen ?]
Dans le cas de Marine Le Pen, les intérêts personnels sont évidents puisque c’est une stratégie de conquête du pouvoir, ce qui n’était pas le cas de son père. Cela ne prouve pas qu’elle soit insincère, mais cela en fait une possibilité.
[En attendant, je crois que vous pouvez tout de même l’accorder à Philippot, qui a pris le risque de sacrifier un brillant avenir en rejoignant le FN.]
Je réserve mon jugement. Je ne sais pas si la carrière qui l’attendait était si « brillante » que cela. Mais je peux au moins lui reconnaître un énorme courage.
[Comment voulez-vous qu’elle fasse ses preuves si elle n’est pas élue ? Et comment voulez-vous qu’elle soit élue si on attend qu’elle fasse ses preuves ?]
Je vous accorde que c’est plus difficile sans être au pouvoir. Mais pas impossible : elle peut faire ses preuves en défendant des causes alors qu’elle n’a aucun intérêt à le faire. Mais je pense que nous n’aurons pas à attendre longtemps. Les prochaines municipales risquent de mettre au pouvoir quelques représentants du FN. On verra alors…
["Soit. Par exemple, une bataille pour défendre nos usines d’armement, ou pour s’opposer à la privatisation du gaz et de l’électricité ?". Exactement.]
« Exactement » ? Je ne me souviens pas que MLP ait été du côté des agents EDF pour lutter contre l’ouverture du capital de leur entreprise. Aurais-je manqué quelque chose ?
[Je ne comprends pas très bien. En quoi trouvez-vous que le FN se contenterait de grands combats visionnaires ? L’étiquetage du hallal, par exemple, vous trouvez que c’est un grand combat visionnaire ?]
Non. Je trouve que ce n’est même pas un « combat ». Tout au plus une petite escaramouche… je doute que l’étiquetage de la viande halal touche vitalement les intérêts des couches populaires.
[Si le vrai clivage, aujourd’hui, n’est plus entre gauche et droite, mais entre adversaires et défenseurs de la Nation, c’est que la vraie droite, aujourd’hui, ce sont les premiers, tandis que la vraie gauche, ce sont les seconds.]
Oui, tout à fait. Reste aussi a séparer les défenseurs de la Nation sincères des autres…
@ Descartes
["Personnellement, le critère qui me permet de juger de la sincérité d’un discours, c’est sa cohérence interne ». Généralement, celui qui ment se contredit."] ["Pas nécessairement. Vous devez fréquenter des menteurs de seconde zone… Un menteur intelligent et qui comprend ce qu’il dit ne se contredit pas."]
Vous avez raison. La "cohérence interne" va plus loin que la simple absence de contradiction. Plutôt que de dire : "celui qui ment se contredit", j’aurais dû dire : "celui qui est sincère confirme ses dires".
["Dans le cas de Marine Le Pen, les intérêts personnels sont évidents puisque c’est une stratégie de conquête du pouvoir, ce qui n’était pas le cas de son père."]
Cette réflexion est très révélatrice. Elle montre que désormais, l’accession au pouvoir de Marine Le Pen vous paraît envisageable. Mais très honnêtement, était-ce le cas lorsqu’elle a pris la direction du Front National ?
["« Exactement » ? Je ne me souviens pas que MLP ait été du côté des agents EDF pour lutter contre l’ouverture du capital de leur entreprise. Aurais-je manqué quelque chose ?"]
Encore faudrait-il que les idiots utiles du grand capital que sont aujourd’hui les syndicats ne fassent pas systématiquement obstacle aux tentatives de rapprochement du FN avec le monde du travail. Voyez à ce sujet le post de morel, qui nous rappelle que "Les « syndicats » type « FN de… » sont morts devant les tribunaux Républicains dans un autre genre.".
P.S. : ma réponse à morel sur Wallerand de St Just et sur les rapports entre "politique" et "syndical" a disparu. Vous est-il possible de la rétablir ?
@dsk
[Vous avez raison. La "cohérence interne" va plus loin que la simple absence de contradiction. Plutôt que de dire : "celui qui ment se contredit", j’aurais dû dire : "celui qui est sincère confirme ses dires".]
Je crois que c’est plus complexe que ça. On peut « confirmer ses dires » – y compris par des actes – alors qu’on est parfaitement insincère, dès lors que les actes en question sont conformes à vos intérêts. Ainsi, par exemple, l’engagement de Mitterrand contre la peine de mort était parfaitement insincère : comme l’a montré Benjamin Stora dans son livre « François Mitterrand et la guerre d’Algérie », le futur président fut, lors de son passage au ministère de la Justice, partisan d’une application sévère de al peine capitale aux militants de l’indépendance algérienne. Mais Mitterrand avait compris l’intérêt qu’il pouvait tirer d’une prise de position contre la peine de mort pendant la campagne, et d’une abolition après son élection. Ses « actes » ne prouvent donc nullement sa sincérité.
Par contre, lorsqu’un homme politique prend une position qui va contre ses intérêts, on peut supposer que celle-ci révèle une conviction sincère. Lorsque Mitterrand gracie les généraux félons ou refuse la « répentance » dans son discours du Vel d’Hiv, on peut y voir l’expression d’une véritable conviction, et non un calcul politique.
["Dans le cas de Marine Le Pen, les intérêts personnels sont évidents puisque c’est une stratégie de conquête du pouvoir, ce qui n’était pas le cas de son père." Cette réflexion est très révélatrice. Elle montre que désormais, l’accession au pouvoir de Marine Le Pen vous paraît envisageable.]
Certainement pas. Je n’ai rien dit sur ce qui est « envisageable » ou pas. Je me contente de considérer que, contrairement à son père, Marine Le Pen a pour objectif la conquête du pouvoir. Je ne me prononce pas sur la question de savoir si l’objectif est atteignable ou pas.
["« Exactement » ? Je ne me souviens pas que MLP ait été du côté des agents EDF pour lutter contre l’ouverture du capital de leur entreprise. Aurais-je manqué quelque chose ?". Encore faudrait-il que les idiots utiles du grand capital que sont aujourd’hui les syndicats ne fassent pas systématiquement obstacle aux tentatives de rapprochement du FN avec le monde du travail.]
Je ne saisis pas le raisonnement. Ce ne sont tout de même pas les syndicats qui ont empêché Marine Le Pen de prendre position clairement contre l’ouverture du capital d’EDF ou la privatisation des services publics. Je vous accorde qu’à l’époque le FN n’avait pas encore fait totalement sa « mue » lorsque le capital d’EDF a été ouvert en 2005… mais il aurait pu se rattraper depuis.
[P.S. : ma réponse à morel sur Wallerand de St Just et sur les rapports entre "politique" et "syndical" a disparu. Vous est-il possible de la rétablir ?]
Je l’avais enlevée le temps de modifier votre message pour supprimer le lien vers son site. Vous n’êtes pas sans savoir que les moteurs de recherche construisent des « cartes » des blogs en fonction des renvois des uns vers les autres. Je n’ai pas envie d’apparaître dans ces listes comme un blog renvoyant vers des sites d’extrême droite. Ce blog a une réputation suffisamment sulfureuse sans avoir besoin d’être mis à l’index.
[Vous avez raison. La "cohérence interne" va plus loin que la simple absence de contradiction. Plutôt que de dire : "celui qui ment se contredit", j’aurais dû dire : "celui qui est sincère confirme ses dires".] [Je crois que c’est plus complexe que ça. On peut « confirmer ses dires » – y compris par des actes – alors qu’on est parfaitement insincère, dès lors que les actes en question sont conformes à vos intérêts.]
Vous m’obligez à être plus précis, ce qui est très bien. Tout d’abord, ce que j’entends par "cohérence interne" ne concerne que le discours, et non les actes. Ensuite, cette "cohérence interne" ne démontre la sincérité que lorsqu’elle est manifestement involontaire. Chez le menteur, en effet, la cohérence sera le résultat d’un effort, d’une volonté, puisque par hypothèse, il y aura discordance entre son discours et sa pensée. Prenons un exemple : votre blog. Quel est le rapport entre votre papier intitulé "Conseils d’un vieux con" et celui-ci, qui touche à l’autodéfense ? C’est votre attachement au rôle de l’État. Or je doute qu’une telle cohérence puisse être l’effet d’un calcul. Je vous crois donc sincèrement attaché au rôle de l’État.
["Je me contente de considérer que, contrairement à son père, Marine Le Pen a pour objectif la conquête du pouvoir. Je ne me prononce pas sur la question de savoir si l’objectif est atteignable ou pas."]
Il se pourrait donc que Marine Le Pen soit une menteuse suffisamment intelligente pour ne jamais se contredire, mais qu’elle soit quand même suffisamment bête pour croire qu’elle possède une chance réelle d’accéder au pouvoir ? Tout est possible, me direz-vous…
@dsk
[Ensuite, cette "cohérence interne" ne démontre la sincérité que lorsqu’elle est manifestement involontaire.]
C’est bien là le problème… qu’est ce qui vous permet de déterminer que la cohérence du discours de Marine Le Pen est involontaire et non le fruit d’un savant calcul et d’un grand contrôle de soi ?
@dsk
[Il se pourrait donc que Marine Le Pen soit une menteuse suffisamment intelligente pour ne jamais se contredire, mais qu’elle soit quand même suffisamment bête pour croire qu’elle possède une chance réelle d’accéder au pouvoir ?]
Vous savez… l’intelligence nécessaire pour mentir n’est pas la même que pour analyser correctement une situation politique… j’avais une tante qui était une menteuse confirmée mais toujours parfaitement cohérente, et qui n’entendait rien à la politique!
["Vous savez… l’intelligence nécessaire pour mentir n’est pas la même que pour analyser correctement une situation politique…"]
Vous allez peut-être me trouver aussi compétent que votre tante, mais j’ai quand même le sentiment que Marine Le Pen n’analyse pas si mal que cela la situation politique…
["j’avais une tante qui était une menteuse confirmée mais toujours parfaitement cohérente, et qui n’entendait rien à la politique!"]
Tous mes respects à votre tante, mais aurait-elle été capable de diriger avec succès le FN ?
["C’est bien là le problème… qu’est ce qui vous permet de déterminer que la cohérence du discours de Marine Le Pen est involontaire et non le fruit d’un savant calcul et d’un grand contrôle de soi ?"]
Eh bien notamment sa spontanéité, sa rapidité de réaction lorsqu’on l’interviewe. Par ailleurs, je prendrais sa position contre l’intervention "humanitaire" en Libye, qui me paraît cohérente avec sa défense de la souveraineté nationale. En l’état de l’unanimité régnant à l’époque contre le méchant dictateur Khadafi, cette position était assez risquée, et pouvait difficilement s’expliquer par un quelconque calcul politique. De même pour la Syrie, où le FN a longtemps été le seul à critiquer la volonté d’ingérence de la France. Plus globalement, elle a pris un certain nombre de risques vis-à-vis de son électorat traditionnel, en prenant des positions assez marquées à gauche, dont un exemple est justement son hostilité au travail dominical. A ce propos, je vous invite à regarder la vidéo disponible sur le site du FN du 7 octobre intitulée "Marine Le Pen sur France 3", dans laquelle on lui présente un sondage montrant que 76% des électeurs FN seraient favorables à l’ouverture le dimanche, ce qui ne l’empêche pas de réaffirmer nettement son hostilité (à 50’55”).
["Ce ne sont tout de même pas les syndicats qui ont empêché Marine Le Pen de prendre position clairement contre l’ouverture du capital d’EDF ou la privatisation des services publics. Je vous accorde qu’à l’époque le FN n’avait pas encore fait totalement sa « mue » lorsque le capital d’EDF a été ouvert en 2005… mais il aurait pu se rattraper depuis."]
Je vous engage à aller tout simplement consulter le projet du FN sur son site, en sa partie "services publics". Vous verrez que son hostilité aux privatisations est très nette. Je cite : "Les participations actuelles de l’État dans les grandes entreprises de service public seront sanctuarisées. Les ouvertures de capital et privatisations d’entreprises de service public seront donc empêchées. Les collectivités territoriales seront incitées à en faire de même à leur niveau.
La Poste sera de nouveau un établissement public de l’État.". Vous me direz qu’il ne s’agit pas là de pures et simples renationalisations. Mais n’oubliez pas que le FN est systématiquement attendu au tournant sur sa crédibilité économique. On lui reprocherait de vouloir dépenser des sommes considérables en rachats d’actions, sans que cela se justifie vraiment en termes d’avantages concrets pour le public.
@dsk
[Tous mes respects à votre tante, mais aurait-elle été capable de diriger avec succès le FN ?]
Je préfère ne pas le savoir !!!
[Plus globalement, elle a pris un certain nombre de risques vis-à-vis de son électorat traditionnel, en prenant des positions assez marquées à gauche, dont un exemple est justement son hostilité au travail dominical.]
C’est vrai. En même temps, ce sont toujours des risques très calculés et qui compensent largement le risque de perdre une partie de son électorat traditionnel par la possibilité de gagner les déçus de la gauche. Je ne suis pas sur que ces risques soient aussi "spontanés" que vous le pensez. Mais comme je vous ai dit, je réserve mon jugement. Je n’ai pas de preuve qu’elle soit hypocrite non plus.
[Je vous engage à aller tout simplement consulter le projet du FN sur son site, en sa partie "services publics". Vous verrez que son hostilité aux privatisations est très nette.]
C’est vrai. C’est justement le problème que je voulais souligner. Pourquoi après avoir écrit le paragraphe que vous citez on ne voit pas le FN joindre le geste à la parole et soutenir les travailleurs qui se battent pour défendre le service public ? Un tel geste prouverait pour moi la volonté du FN de devenir un véritable acteur social alors qu’il reste pour le moment dans une stratégie de communication.
@ dsk :
« Autrement dit, une fois que l’on a dénoncé l’idéologie libérale-libertaire qui voudrait, ces jours-ci, s’en prendre à l’interdiction du travail le dimanche, ce qui me semble, précisément, "utile", c’est de bien voir qui, dans le champ politique, partage le mieux cette dénonciation »
Vous devriez consulter un ORL, votre oreille droite seule, semble fonctionner. Mais au-delà d’une revendication qui nous est chère, un syndicaliste, comme tout citoyen exerce son jugement sur un ensemble programmatique, sa crédibilité et celle de ceux qui le représentent etc…
Au-delà, la Charte d’Amiens prône sagement la non confusion des genres politique/ syndical et c’est pour ne pas l’avoir respecté (appel au vote par ex,..) que certains ont connu des déconvenues. Les « syndicats » type « FN de… » sont morts devant les tribunaux Républicains dans un autre genre. A propos la même Charte pose « la reconnaissance de la lutte des classes », qu’en pense Me Le Pen ?
Concernant le syndicalisme, ouverture le dimanche ou autre, nous sommes loin de nous contenter d’une « dénonciation »
Je vous invite à lire la position de Wallerand de Saint Just (ça ne s’invente pas) sur le site du FN : on est très loin de celle que vous avancez et plus proche d’une position traditionnelle du poujadisme en faveur du petit commerce avec même une ouverture vers les grands (les salariés des unes et des autres, en passant par les moyennes étant priés de s’accomplir…).
Veuillez comprendre que je ne mette pas le lien qui se trouve assez aisément.
« Mais les syndicats, surtout en France, ne sauraient se désintéresser du pouvoir politique. Il me paraît donc, là encore, on ne peut plus "utile", de se demander quel parti politique serait le mieux à même de défendre, non pas les sans-papiers, ni l’égalité hommes-femmes, mais l’intérêt des travailleurs. »
Concernant la première phrase, à la restriction que cela ne concerne pas que notre pays, je suis tout à fait d’accord. Quel intérêt, ensuite de vous sentir obligé d’évoquer les sans-papiers qui n’est pas une revendication syndicale, par contre je défends l’égalité de salaires à égalité de qualification et de responsabilité indépendamment des catégories du politically correct…Vulgairement : à travail égal, salaire égal. Un point c’est tout.
@ morel
[Au-delà, la Charte d’Amiens prône sagement la non confusion des genres politique/ syndical et c’est pour ne pas l’avoir respecté (appel au vote par ex,..) que certains ont connu des déconvenues.]
Pas vraiment. Au-delà du texte de la Charte – texte plus connu pour sa violation que pour son observance – le syndicalisme français a toujours été largement politique. Le spectre syndical français a d’ailleurs été modelé par des considérations politiques. La scission de FO de la CGT a pour moteur essentiel l’anticommunisme de certaines fédérations et a d’ailleurs été largement financée par de l’argent américain dans le cadre de la guerre froide. Penser que le combat syndical peut se dérouler dans on ne sait quel univers parallèle où la politique n’entrerait pas est une fiction.
[A propos la même Charte pose « la reconnaissance de la lutte des classes »,]
Attendez… je croyais qu’on ne confondait les genres politique/syndical. A votre avis, la « reconnaissance de la lutte des classes » appartient à quel registre ?
[Quel intérêt, ensuite de vous sentir obligé d’évoquer les sans-papiers qui n’est pas une revendication syndicale,]
Pourtant, c’est un sujet sur lequel les organisations syndicales ont amplement pris position. C’est d’ailleurs ses prises de position relativement modérées – régularisation des travailleurs sans papiers – qui ont valu à la CGT une confrontation assez violente avec les « collectifs ».
[par contre je défends l’égalité de salaires à égalité de qualification et de responsabilité indépendamment des catégories du politically correct…Vulgairement : à travail égal, salaire égal. Un point c’est tout.]
C’est tout ? Vous voulez dire que si le patronat proposait de baisser le salaire des travailleurs réguliers pour le mettre au même niveau que celui des sans papiers, vous considéreriez cette proposition comme une avancée ? J’ai du mal à le croire…
@ morel
["Vous devriez consulter un ORL, votre oreille droite seule, semble fonctionner."]
Comment ?
["Au-delà, la Charte d’Amiens prône sagement la non confusion des genres politique/ syndical et c’est pour ne pas l’avoir respecté (appel au vote par ex,..) que certains ont connu des déconvenues."]
Oui, mais qui définit ce qui appartient au genre politique et ce qui appartient au genre syndical ? Vous noterez que les libéraux auront tendance, bien entendu, à donner la définition la plus restreinte possible de ce qui appartient au genre syndical. Pour ma part, je pense que dès l’instant où un sujet a une incidence sur l’intérêt des travailleurs, alors les syndicats sont légitimes à s’en emparer.
["A propos la même Charte pose « la reconnaissance de la lutte des classes », qu’en pense Me Le Pen ?"]
Là-dessus, je crois qu’il faut lever toute ambigüité. Comme je l’ai dit plus haut à Descartes, le FN n’est pas, et ne sera jamais le PCF de Georges Marchais. Pour autant, cela n’empêche que son projet de restauration de la souveraineté nationale soit conforme à l’intérêt des travailleurs français.
["Concernant le syndicalisme, ouverture le dimanche ou autre, nous sommes loin de nous contenter d’une « dénonciation » Je vous invite à lire la position de Wallerand de Saint Just (ça ne s’invente pas) sur le site du FN : on est très loin de celle que vous avancez et plus proche d’une position traditionnelle du poujadisme en faveur du petit commerce avec même une ouverture vers les grands (les salariés des unes et des autres, en passant par les moyennes étant priés de s’accomplir…)."]
La position de M. Wallerand de St Just est relative à cette proposition, qui m’avait semblé, au premier abord, quelque peu curieuse, de réserver l’autorisation d’ouverture le dimanche aux petits commerces. J’observe en tout cas qu’on ne saurait qualifier une telle proposition de libérale, puisqu’elle va directement à l’encontre du dogme de la concurrence libre et non faussée, à tel point, d’ailleurs, que je me demande si elle ne poserait pas un problème d’ordre juridique. Ensuite, elle me paraît cohérente avec l’idée de protectionnisme. Enfin, si elle aboutit effectivement à sauver des emplois dans le petit commerce, elle aura peut-être alors un effet social de nature à compenser l’inconvénient de la perte du repos dominical.
["Veuillez comprendre que je ne mette pas le lien qui se trouve assez aisément."]
Veuillez comprendre que pour ma part, je mette le lien, afin que chacun puisse plus aisément se faire son opinion.
[[Lien effacé: désolé, mais ce genre de liens sont suivis par les moteurs de recherche, et cela peut valoir à ce blog d’être classé parmi les sites d’extrême droite. Une recherche sur google permet facilement d’accéder au site en question, pas la peine de tenter donc le diable]]
["Quel intérêt, ensuite de vous sentir obligé d’évoquer les sans-papiers qui n’est pas une revendication syndicale, par contre je défends l’égalité de salaires à égalité de qualification et de responsabilité indépendamment des catégories du politically correct…Vulgairement : à travail égal, salaire égal. Un point c’est tout."]
Moi aussi, bien entendu. Le problème est lorsque cela sert de cache-sexe à l’abandon des travailleurs.
Bonsoir Descartes,
vous parliez d’Action Directe, et vos propos me rappellent la moralité à géométrie variable de la gauche. J’ignore si cela a un rapport, mais je voulais avoir votre opinion sur ce qui arrive actuellement à deux artistes, à savoir le chansonnier Jean Roucas et le chanteur Bertrand Cantat.
Je sais que vous n’êtes pas trop fan de rock, mais Noir Désir a marqué ma jeunesse en matière de musique française, à une époque où la musique anglo-saxon a commencé à prendre le pas sur la chanson française, soit au début des années 90. Je ne reviendrais pas sur l’affaire Cantat-Trintignant, mais plutôt sur ses suites. Sauf à habiter la planète Mars, vous n’êtes pas sans savoir qu’un a sorti un nouvel album, produit par la major Universal. L’ennui, c’est que comme bien des personnes, j’éprouve un immense malaise à propos de cette nouvelle, et même une grande colère de B.Cantat, car j’estime qu’en tant que personnage public, il fait preuve d’une indécence assez rare, ne manifestant aucun remord, et plus grave selon moi, on a l’impression qu’il n’a rien retenu de ce drame personnel.
Je vous ai donné mon sentiment personnel, mais ce n’est pas le plus important: en fait, je suis choqué de la mansuétude dont font preuve les médias bien-pensants de gauche, particulièrement pour un homme qui s’est rendu coupable d’homicide suite à des violences conjugales. Mais où sont donc passées ces fameuses associations féministes? Tous les beaux esprits de gauche disent en choeur que Bertrand Cantat a payé sa dette, et qu’il faut lui laisser vivre sa vie d’artiste…
Bizarrement, au même moment, quand l’humoriste et chansonnier Jean Roucas annonce à la presse qu’il soutient le mouvement Bleu Marine, sensible à ce qu’il se passe en ce moment dans sa ville d’origine Marseille, celui-ci est ostracisé du jour au lendemain par les médias, qui ont signé son arrêt de mort artistique: certaines de ses représentations sont annulées, et des collègues comédiens refusent désormais de jouer avec lui!
La gauche bien-pensante, qu’elle soit radicale ou socialiste, a une drôle de notion de la justice et du droit: Roucas, qui soutient de fait le FN, est cloué publiquement au pilori, et n’a pas le droit à la moindre indulgence des associations bien pensantes, tant que B.Cantat, ancien héros de la gauche bien-pensante et surtout défenseur des bonnes causes, lui a accès aux médias et à la promotion de son disque, malgré les faits qui lui sont reprochés, et qui auraient dû lui valoir la censure des ligues de vertu féministes, au nom de la lutte contre la violence faite aux femmes…
Ce deux poids, deux mesures est profondément révoltant car injuste, en plus d’être indécent: dans un cas, Roucas est victime d’un délit d’opinion, alors que dans l’autre, si Cantat a purgé sa peine, la décence aurait voulu qu’il se fasse oublier, particulièrement après le suicide de son ex-femme, pour lequel on dit qu’il serait loin d’être clair…
Le cas de Cantat me rappelle très exactement la réaction des médias bien-pensants lors des affaires Polanski, DSK, voire des anciens d’Action Directe ou des Brigades Rouge, en particulier Jean-Marc Rouillan et Cesare Battisti: comment se fait-il que la gauche bien-pensante pardonne aussi vite à ces personnages, alors qu’ils ont allègrement piétinés les principes qu’ils professaient? Ils sont exonérés de leur faute parce qu’ils sont dans le "bon camp" ou qu’ils pensent "bien", mais dès qu’ils font savoir qu’ils ont une opinion dissidente, alors c’est le pilori!
@CVT
[Je ne reviendrais pas sur l’affaire Cantat-Trintignant, mais plutôt sur ses suites. Sauf à habiter la planète Mars, vous n’êtes pas sans savoir qu’un a sorti un nouvel album, produit par la major Universal. L’ennui, c’est que comme bien des personnes, j’éprouve un immense malaise à propos de cette nouvelle, et même une grande colère de B.Cantat, car j’estime qu’en tant que personnage public, il fait preuve d’une indécence assez rare, ne manifestant aucun remord, et plus grave selon moi, on a l’impression qu’il n’a rien retenu de ce drame personnel.]
Je ne sais pas ce qui vous fait dire que Cantat n’a manifesté « aucun remords ». Je me rappelle qu’à l’époque de son procès il a au contraire regretté profondément ses actes. Maintenant, que demandez vous de lui ? Qu’il aille vivre dans quelque caverne isolée et coupée du monde ? Qu’il se fasse moine ? Qu’il passe le reste de sa vie a demander pardon ? Il a fauté, il a été condamné, il a purgé la peine que la société lui a infligé. Il a gagné le droit de tourner la page. Et pour un créateur comme lui, tourner la page implique pouvoir créer.
[Je vous ai donné mon sentiment personnel, mais ce n’est pas le plus important: en fait, je suis choqué de la mansuétude dont font preuve les médias bien-pensants de gauche, particulièrement pour un homme qui s’est rendu coupable d’homicide suite à des violences conjugales.]
Pourquoi « particulièrement » ? En quoi les violences conjugales seraient-elles plus graves que les autres ?
[Mais où sont donc passées ces fameuses associations féministes? Tous les beaux esprits de gauche disent en choeur que Bertrand Cantat a payé sa dette, et qu’il faut lui laisser vivre sa vie d’artiste…]
Et pour une fois, ils ont raison. Je vous trouve d’ailleurs bien optimiste si vous pensez que ls associations féministes ont admis la chose. Elles continuent à faire du bruit, tout comme la famille de Marie Trintignant. Mais ils ont tort. La justice pénale n’a pas prononcé contre Cantat une peine de silence à vie, que je sache. La lui imposer, c’est encore une fois prendre la justice dans ses propres mains.
[La gauche bien-pensante, qu’elle soit radicale ou socialiste, a une drôle de notion de la justice et du droit: Roucas, qui soutient de fait le FN, est cloué publiquement au pilori, et n’a pas le droit à la moindre indulgence des associations bien pensantes, tant que B.Cantat, ancien héros de la gauche bien-pensante et surtout défenseur des bonnes causes, lui a accès aux médias et à la promotion de son disque, malgré les faits qui lui sont reprochés, et qui auraient dû lui valoir la censure des ligues de vertu féministes, au nom de la lutte contre la violence faite aux femmes…]
Je vous fais noter que vous faites le même raisonnement à l’envers. Vous trouvez scandaleux l’ostracisme imposé à Roucas et vous êtes scandalisé par la mansuétude qu’on montre envers Cantat. C’est aussi « deux poids, deux mesures », non ?
[si Cantat a purgé sa peine, la décence aurait voulu qu’il se fasse oublier, particulièrement après le suicide de son ex-femme, pour lequel on dit qu’il serait loin d’être clair…]
Pourquoi ? Cantat a été condamné à une peine de prison qu’il a exécutée. Pas à une peine d’oubli perpétuel.
[Le cas de Cantat me rappelle très exactement la réaction des médias bien-pensants lors des affaires Polanski, DSK, voire des anciens d’Action Directe ou des Brigades Rouge, en particulier Jean-Marc Rouillan et Cesare Battisti]
Vous mélangez tout. Dans le cas de Polanski, la France l’a protégé d’une persécution qui devait bien plus à la bigoterie américaine qu’a la justice. C’est d’ailleurs pourquoi l’extradition n’a jamais prospérée. Pour ce qui concerne DSK, je ne vois pas de quelle mansuétude vous parlez. A ma connaissance, il n’a jamais été condamné par la justice. Il est donc innocent. A moins que vous vouliez mettre en cause la présomption d’innocence.
>Je sais que vous n’êtes pas trop fan de rock, mais Noir Désir a marqué ma jeunesse en matière de musique française, à une époque où la musique anglo-saxon a commencé à prendre le pas sur la chanson française, soit au début des années 90.<
Noir Désir est très intéressant parce que c’est un groupe de rock qui chante en français. Habituellement, et ce depuis les années 60, le rock se chante en anglais ; ça a toujours été la musique des jeunes de bonne famille…
Je fais également remarquer que les rappeurs les plus connus, d’une musique qui a émergé à la fin des années 80 sous le mécénat de Jack Lang, ont beau "niquer la police" et "baiser la France", ils chantent en français, bien que ce genre soit profondément américain…
En réalité, beaucoup ont été les "yéyés" des années Mitterrand.
>on a l’impression qu’il n’a rien retenu de ce drame personnel<
Si on lui donne la chance de tourner la page, je ne vois pas pourquoi il n’en profiterait pas. Au final, il faudrait plutôt se demander pourquoi il a eu cette chance.
>je suis choqué de la mansuétude dont font preuve les médias bien-pensants de gauche, particulièrement pour un homme qui s’est rendu coupable d’homicide suite à des violences conjugales<
C’est pas nouveau. Souvenez-vous de Althusser…
>Tous les beaux esprits de gauche disent en choeur que Bertrand Cantat a payé sa dette, et qu’il faut lui laisser vivre sa vie d’artiste<
Je ne connais pas vraiment le dossier, mais s’il est en liberté, c’est que la justice aussi considère qu’il a "payé sa dette". On peut être en désaccord avec ce point de vue, mais je remarque que ce n’est pas "la gauche" qui a décidé de le libérer.
>Mais où sont donc passées ces fameuses associations féministes?<
Je crois qu’elles ont eu des bons de réduction sur la larmichette au Front de Gauche, donc elles sont un peu occupées à faire du shopping…
>celui-ci est ostracisé du jour au lendemain par les médias, qui ont signé son arrêt de mort artistique<
Eh ! oui. C’est le "milieu" artistique. Toujours de "gôôche", prêt à lutter contre ces infâmes déviationnistes. Bizarrement, il n’a pas tant à se plaindre du "milieu" marseillais que du "milieu" artistique…
>certaines de ses représentations sont annulées, et des collègues comédiens refusent désormais de jouer avec lui!<
Ils refusent de leur plein gré, dans la défense d’un cadenas artistique qui vise à maintenir loin ceux qui nuisent au "milieu". Leur réaction est tout à fait compréhensible.
>lui a accès aux médias et à la promotion de son disque<
Oui, mais la promotion ne fait pas tout. Clairement, je pense qu’en 2013, ce que peut chanter Cantat, tout le monde s’en fout…
>lui valoir la censure des ligues de vertu féministes, au nom de la lutte contre la violence faite aux femmes<
Si les féministes étaient logiques, elles n’existeraient pas.
>la décence aurait voulu qu’il se fasse oublier<
Je me souviens que Nadine Trintignant, dans les semaines qui ont suivi la mort de sa fille, a trouvé le moyen de sortir un livre très "bankable". L’indécence est dans le milieu du spectacle quelque chose d’assez bien partagé.
>comment se fait-il que la gauche bien-pensante pardonne aussi vite à ces personnages<
Parce qu’ils sont "de gôôche". Ou que Mitterrand ait besoin des antifascistes à un moment donné, pour des affaires similaires. Mais ça revient au même.
>Ils sont exonérés de leur faute parce qu’ils sont dans le "bon camp" ou qu’ils pensent "bien", mais dès qu’ils font savoir qu’ils ont une opinion dissidente, alors c’est le pilori!<
C’est le principe même du "milieu" artistique, qui comme tout "milieu" a des réflexes de défense et d’auto-préservation très belliqueux.
[Je ne sais pas ce qui vous fait dire que Cantat n’a manifesté « aucun remords ». Je me rappelle qu’à l’époque de son procès il a au contraire regretté profondément ses actes. Maintenant, que demandez vous de lui ? Qu’il aille vivre dans quelque caverne isolée et coupée du monde ? Qu’il se fasse moine ? Qu’il passe le reste de sa vie a demander pardon ? Il a fauté, il a été condamné, il a purgé la peine que la société lui a infligé. Il a gagné le droit de tourner la page. Et pour un créateur comme lui, tourner la page implique pouvoir créer.]
En fait, je vous aurais suivi à 100% si son ex-compagne Kristina Rady ne s’était pas suicidée il y a trois ans. Ce n’est peut-être qu’une impression, mais je crois que B.Cantat n’a rien appris de ses drames personnels. Ceci est corroboré par les accusations de la famille Rady, ainsi que celle de son dernier compagnon. Oh bien sûr, elles émanent de proches, mais elle décrivent un personnage pervers, narcissique et manipulateur, donc peu enclin aux remords. Enfin, si on veut mettre de côté la psychologie de bazar, je dirais qu’il troublant pour le même homme d’avoir deux compagnes qui meurent de mort aussi violente…
Pour ce qui est de refaire sa vie, il a largement le choix: écrire pour les autres, faire des concerts dans des petites salles comme il le faisait auparavant, produire des artistes, trouver des talents. Toute chose qui peuvent se faire en toute discrétion, tout en permettant de vivre de sa passion musicale…
[Je vous fais noter que vous faites le même raisonnement à l’envers. Vous trouvez scandaleux l’ostracisme imposé à Roucas et vous êtes scandalisé par la mansuétude qu’on montre envers Cantat. C’est aussi « deux poids, deux mesures », non ?]
Pas vraiment: si je suis en porte à faux par rapport à la mansuétude envers Cantat, je peux parfaitement entendre qu’ayant purgé sa peine, d’autres personnes soient d’un avis contraire au mien. La seule chose que je reproche, c’est que ce sont souvent les mêmes qui appellent à la vindicte contre Roucas; j’aurais aimé donc qu’elles eurent la même mansuétude pour J.Roucas, si tant est qu’il ait pu commettre une faute en exprimant son soutien au FN. Je ne défends pas Roucas, ni n’approuve son choix, mais simplement, j’ai envie de défendre sa liberté de choix.
[Vous mélangez tout. Dans le cas de Polanski, la France l’a protégé d’une persécution qui devait bien plus à la bigoterie américaine qu’a la justice. C’est d’ailleurs pourquoi l’extradition n’a jamais prospéré. Pour ce qui concerne DSK, je ne vois pas de quelle mansuétude vous parlez. A ma connaissance, il n’a jamais été condamné par la justice. Il est donc innocent. A moins que vous vouliez mettre en cause la présomption d’innocence.]
En fait, dans l’affaire Polanski, je ne me prononce pas sur le fond, mais surtout sur les soutiens du réalisateur: c’est vrai qu’en droit, la France n’avait pas à extrader Polanski; mais je me pose toujours la question suivante: si cela n’avait pas été Polanski, mais un lambda ou un réalisateur d’extrême-droite, est-ce qu’il y aurait eu une telle mansuétude, un tel soutien? Pas certain, et c’est bien mon propos: la gauche bien-pensante a une conception "sectaire" du droit…
Dans le cas de DSK, je ne pensais pas à son jugement (pour moi, le verdict me paraît correct car aussi bizarre que ça puisse paraître, je crois sincèrement que Strauss-Kahn s’est fait avoir…), mais je songeais surtout au début de son procès: rappelez-vous de l’attitude des hiérarques socialistes féministes qui l’ont défendu (ce en quoi elles avaient raison…), alors que généralement, elles oublient toutes précaution et sont souvent les premières à fustiger les dérapes machistes de leurs adversaires de droite…
@Bolchokek,
[Je ne connais pas vraiment le dossier, mais s’il est en liberté, c’est que la justice aussi considère qu’il a "payé sa dette". On peut être en désaccord avec ce point de vue, mais je remarque que ce n’est pas "la gauche" qui a décidé de le libérer.]
Je ne remets pas en cause sa libération, la peine a été exécutée.
[Oui, mais la promotion ne fait pas tout. Clairement, je pense qu’en 2013, ce que peut chanter Cantat, tout le monde s’en fout…]
La preuve que non, puisque tous les médias bien-pensants nous diffusent son dernier disque. Je veux bien vivre dans un pays non-francophone pour ne pas avoir à l’écouter, mais tout de même, c’est presque de la propagande…
[Je me souviens que Nadine Trintignant, dans les semaines qui ont suivi la mort de sa fille, a trouvé le moyen de sortir un livre très "bankable". L’indécence est dans le milieu du spectacle quelque chose d’assez bien partagé.]
C’est vrai, et d’ailleurs, j’avais été saisi par le contraste entre la dignité de JL Trintignant et les débordements de son ex-femme Nadine.
En fait, si je suis fumasse contre Cantat, c’est moins à cause de la mort choquante et brutale de Marie Trintignant qu’à cause du suicide de son ex-femme K.Rady, qui avait eu durant cette tragédie un comportement admirable. D’ailleurs, j’ai l’impression que je ne suis pas le seul choqué par cette mort car il semblerait que les autres membres du groupe Noir Désir n’ont pas voulu reprendre la route à cause de cette dernière tragédie: cela aurait eu un côté indécent…
Sinon, pour le reste, votre post exprime bien ce que je ressens par rapport au milieu artistique actuel…
@CVT
[En fait, je vous aurais suivi à 100% si son ex-compagne Kristina Rady ne s’était pas suicidée il y a trois ans. Ce n’est peut-être qu’une impression, mais je crois que B.Cantat n’a rien appris de ses drames personnels. Ceci est corroboré par les accusations de la famille Rady, ainsi que celle de son dernier compagnon. Oh bien sûr, elles émanent de proches, mais elle décrivent un personnage pervers, narcissique et manipulateur, donc peu enclin aux remords.]
Franchement, j’évite les bruits de chiottes. Si la famille Rady pense qu’un crime a été commis, alors elle n’a qu’à porter plainte et laisser un les juges décider. Sinon, elle ferme sa gueule. On peut comprendre que des gens qui ont perdu un être aimé cherchent un coupable sur qui rejeter la faute. Et c’est d’autant plus vrai que l’on n’a pas la conscience tranquille. Que les rapports entre Bernard Cantat et Marie Trintignant étaient violents – des deux côtés, d’ailleurs – et marqués par la drogue et l’alcool était su et connu du « milieu » artistique, et Nadine Trintignant n’a rien trouvé à redire jusqu’au jour où le drame est arrivé. Après, bien entendu, elle poursuit B. Cantat d’une haine proportionnelle à cette culpabilité. Mais ce n’est pas parce que Nadine Trintignant a un problème – et un réseau – qu’il faut que le reste de la société partage sa névrose.
Je ne sais pas si Cantat est un saint ou un salaud, et je m’en fous. Il y a un grand nombre d’artistes et de créateurs qui étaient des salauds dans leur vie privée. Faut-il arrêter de lire Althusser parce qu’il a tué sa femme ? Faut-il oublier Sartre parce qu’il s’est mal conduit avec un certain nombre de ses étudiantes ? Combien de femmes Picasso a abandonnées comme des vieilles chaussettes ?
[Enfin, si on veut mettre de côté la psychologie de bazar, je dirais qu’il troublant pour le même homme d’avoir deux compagnes qui meurent de mort aussi violente…]
Pas vraiment. Etant donné les flots d’alcool et de substances prohibées qui circulent dans ce milieu, je suis surpris en fait que ce ne soit plus fréquent.
[Pour ce qui est de refaire sa vie, il a largement le choix: écrire pour les autres, faire des concerts dans des petites salles comme il le faisait auparavant, produire des artistes, trouver des talents. Toute chose qui peuvent se faire en toute discrétion, tout en permettant de vivre de sa passion musicale…]
Vous semblez penser que la condamnation pénale entraîne avec elle une obligation perpétuelle de discrétion. J’attire votre attention sur l’exemple de Jean Genet, qui fit lui aussi de la prison à plusieurs reprises. Pensez-vous qu’il aurait du faire preuve de discrétion le restant de sa vie ? S’abstenir de publier ?
[Je ne défends pas Roucas, ni n’approuve son choix, mais simplement, j’ai envie de défendre sa liberté de choix.]
Alors, il faut défendre celle de Cantat aussi. La liberté n’est pas divisible.
Je pense avoir touché un point sensible, votre dernière phrase contournée en témoigne.
Est-il utile de continuer ainsi ?
Un dernier mot : vous idéalisez le PCF d’antan ne voyant que ses qualités. Sa chute est structurelle, les peuples eux-mêmes ayant rejeté ce modèle lié à une histoire et une réalité chargée. Il me souvient d’avoir lu la biographie de Thorez sous la plume d’A. Wieworka qui soulignait l’adulation « de Maurice dans le parti » (des mères allant jusqu’à envoyer les dernières reliques d’un fils hélas disparu en camp de concentration pour l’anniversaire du premier) mais aussi son rejet parfois tout aussi violent par une majorité de nos compatriotes. On peut toujours barrer les faits sous le mot définitif : anti-communisme. On peut aussi se poser la question pourquoi de nombreux ouvriers et honnêtes gens n’en voulaient pas pour tout l’or du monde.
@morel
[Je pense avoir touché un point sensible, votre dernière phrase contournée en témoigne.]
Je ne suis pas très sur d’avoir compris de quoi vous parlez ici. Je n’ai "contourné" rien du tout. Votre dernière phrase contenait une prémisse cachée, je me suis contenté de la mettre en lumière. Vous prétendez échapper à une définition politique en posant simplement le principe d’égalité. Mais en fait, lorsqu’on creuse, on s’aperçoit que l’égalité ne vous suffit pas. Encore faut-il que pour atteindre l’égalité, on suive un certain chemin qui en fait est un choix politique, à savoir, l’égalisation au niveau le plus élevé.
[Est-il utile de continuer ainsi ?]
Si vous ne lisez pas ce que les autres écrivent, avant de répondre, non.
[Sa chute est structurelle, les peuples eux-mêmes ayant rejeté ce modèle lié à une histoire et une réalité chargée.]
C’est un peu simple, non ? En fait, il est difficile de savoir ce que les peuples ont vraiment rejeté. La question du modèle n’ayant jamais véritablement été posée, on ne peut que faire des suppositions. Les citoyens de la Russie capitaliste de Poutine sont ils plus heureux, plus libres, plus maîtres de leurs destin que ceux de la Russie socialiste de Brezhnev ? S’ils avaient le choix, laquelle choisiraient-ils ? On n’en sait rien, et il n’y a pas de véritable moyen pour le savoir. Alors, invoquer le "jugement du peuple"… vous savez, le peuple allemand n’a jamais rejeté le nazisme…
[On peut aussi se poser la question pourquoi de nombreux ouvriers et honnêtes gens n’en voulaient pas pour tout l’or du monde.]
Bien entendu. Il faut se poser cette question. Mais la réponse est bien moins schématique et bien plus complexe que vous ne le croyez…
@ Descartes
> Bien sur que si. Pensez-vous par exemple que Bové ne tire pas un profit de ce genre d’action ? A votre avis, comment est-il arrivé à se faire élire pour son mandat européen grassement payé ?
C’est un peu agaçant quand vous répondez à un passage en ignorant la suite du texte, mais ça me permet de répondre sans trop me fatiguer, en m’auto-citant : « À la limite on pourrait dire que les meneurs comme Bové pouvaient espérer en retirer un prestige politique, mais pour les anonymes ça me paraît négligeable par rapport à la motivation première de l’acte militant. »
> Mais admettons un instant qu’ils ne tirent aucun profit. Serait-ce une raison pour admettre leur acte ? Le vandale qui détruit un abribus ou met le feu à une voiture ne tire aucun profit de son acte. Cela le rendrait-il plus admissible ?
Ça va plus loin que l’absence de profit personnel : ils agissaient, ou pensaient agir, pour le bien commun. On peut penser qu’ils ont tort, mais la motivation n’est ni le profit personnel, ni le vandalisme, mais bien la défense de l’intérêt général.
> Non. Si vous voulez faire cette comparaison – assez capilotractée, je dois dire – alors il faudrait le comparer à des gens qui envahiraient le trésor public et brûleraient les billets qui s’y trouvent. Parce que la destruction des cultures expérimentales de l’INRA ne rapporte rien à personne.
Ils y voient une menace pour l’environnement, pour tout le monde, donc. Peut-être à tort, encore une fois, mais l’important est que la différence avec un simple braqueur est patente.
> Vous dites que cela vous rappelle quelqu’un… tiens, je me demande qui cela peut bien être… Robin Hood, peut-être ?
Vous êtes perspicace.
> Si c’est le cas, vous connaissez bien mal l’histoire. Robin Hood, personnage par ailleurs mythique remis à l’honneur par les romantiques à l’époque de la bourgeoisie triomphante qui – quelle coïncidence, n’est ce pas – était déjà en révolte contre toute forme de redistribution de la richesse par l’impôt, ne braquait pas le « trésor public », notion inexistante à son époque, mais le trésor privé d’un tyran, le roi usurpateur Jean Sans Terre. Que les « faucheurs volontaires » vous rappellent Robin Hood n’est pas innocent…
Vous m’apprenez quelque chose, j’étais persuadé que Robin Hood était un renard antropomorphique.
…
Blague à part, c’est évidemment du Robin Hood de la légende que je parlais, et peu importe la réalité historique dans ce cas. L’image est puissante, et pertinente : c’est comme ça qu’ils se voient. Robin des bois, Mandrin… Enfin, il y a même une association écolo qui s’appelle les Robins des Bois ! Et, tenez : http://www.youtube.com/watch?v=YTCT86rV-gE#t=16 (Je vous jure que ne ne connaissais pas cette vidéo, je viens de la trouver, et elle confirme en plein mon analyse.)
> Vous voulez dire que si le braqueur de Nice avait envoyé au préalable aux journaux une lettre exigeant que la loi qui interdit de braquer les bijoutiers soit abrogée son cas serait plus défendable ?
Hm… Je ne vois pas pourquoi il aurait fait ça — un braqueur n’y a pas intérêt, si le braquage est autorisé, les risques légaux diminuent, mais ça risque d’augmenter le nombre de braqueurs et diminuer ainsi les profits potentiels d’un braquage. Et le risque de tomber sur un bijoutier armé risque d’augmenter aussi… Bref, le braqueur a intérêt à ce que son acte soit illégal.
Par contre, s’il braquait, mettons, uniquement les bijouteries qui revendent « des diamants de conflit » et demandant à ce que l’État agisse pour mettre un terme aux traffics… Ça serait une autre affaire.
> Arrêtons ces analogies sans queue ni tête : la loi, c’est l’expression de la volonté générale. Les citoyens ont le droit de demander qu’elle change, mais cette demande ne les autorise pas à la violer entre-temps.
Je suis d’accord.
> Je ne vois pas en quoi le bijoutier qui prend son flingue pour défendre sa bijouterie serait plus condamnable que le faucheur volontaire qui détruit la culture d’autrui parce qu’il est convaincu qu’elle menace sa santé.
Exactement : les faucheurs sont comparables au bijoutier. Pas au braqueur.
> Si les lois sont mal appliquées, c’est aux juges d’en décider. Encore une fois, vous semblez trouver beaucoup de circonstances atténuantes à un groupe qui a piétiné la loi au nom de sa vision personnelle des choses et ce faisant détruit le bien d’autrui. Pourquoi ne pas reconnaître aux bijoutiers aussi le droit de décider que la loi est mal faite ou mal appliquée, et prendre le soin de refaire les lois et les appliquer eux-mêmes ?
C’est ce que je fais… pour la première partie. Je ne dis pas que les faucheurs ont eu raison d’agir ainsi, mais que leurs actions sont à mettre sur un plan comparable à celle du bijoutier.
> Le moratoire ne donne « raison » à personne. C’est l’expression d’un rapport de forces politique où la « raison », la pauvre, n’a pas voix au chapitre. C’est comme pour Fessenheim : sa fermeture tient au fait que le PS veut garder EELV dans la majorité. L’état réel de la centrale et les risques qu’elle pose n’entrent nullement en ligne de compte.
Toutes les décisions politiques sont l’expression d’un rapport de force, Descartes. L’autorisation des OGM comme leur interdiction. Et les avis favorables aux OGM, ceux rendus par l’EFSA en particulier, sont essentiellement basés sur des tests effectués par les fabricants eux-mêmes, avec des méthodes dont la fameuse étude de Séralini, pour critiquable qu’elle soit (et elle l’est !) a au moins eu le mérite de (re-)mettre en lumière le manque de fiabilité. Au reste, si le moratoire a été décidé en 2008, à l’époque du « Grenelle de l’environnement », c’était sur l’avis du Haut Conseil des Biotechnologies (ou plutôt de son prédécesseur provisoire), avis qui était justifié scientifiquement — la moitié des membres du Conseil sont des scientifiques… Rien à voir avec Fessenheim.
> Donc le fait d’être « convaincu » n’est pas une justification suffisante. Encore faut-il que cette « conviction » soit fondée sur une « bonne raison » (i.e. une raison qui serait suffisante pour convaincre toute personne raisonnable, si je me souviens bien de la jurisprudence…).
Je n’ai jamais dit que c’était le cas, ni que toutes les conditions de la légitime défense étaient réunies. Simplement que, contrairement à ce que vous affirmiez, la conviction est bien une justification, susceptible d’influer une décision de justice.
> Quelques exemples seraient les bienvenus…
L’inconvénient d’internet, c’est que je ne peux pas citer d’exemple personnel. L’avantage d’internet, c’est qu’il est très facile de trouver des exemples, pour peu qu’on se donne la peine de chercher. Ainsi tombé-je sur le nom de Mark Lynas. Ça en fait au moins un.
> En les frappant là où les classes moyennes sont les plus sensibles : la caisse. Des amendes et la réparation intégrale du préjudice avec saisie de leurs comptes et de leurs revenus seraient à mon avis bien plus efficaces. Et l’inéligibilité, bien entendu. Ce sont des châtiments qui ne sont pas faciles à médiatiser, et qui ont des effets longs…
Coïncidence ? Ce sont des peines de cet ordre qui ont été prononcées dans plusieurs affaires de ce type. Étonnant, non ? L’effet dissuasif n’a cependant pas été frappant, puisqu’ils ont remis ça. Pas très convaincant…
@ adrien
[Ça va plus loin que l’absence de profit personnel : ils agissaient, ou pensaient agir, pour le bien commun. On peut penser qu’ils ont tort, mais la motivation n’est ni le profit personnel, ni le vandalisme, mais bien la défense de l’intérêt général.]
Non. La motivation est la volonté d’imposer aux autres ce qu’on pense être bien pour eux. C’est un acte par lequel on s’octroie à soi même le pouvoir de décider pour les autres. Cela va bien plus loin qu’un simple acte militant.
[Ils y voient une menace pour l’environnement, pour tout le monde, donc. Peut-être à tort, encore une fois, mais l’important est que la différence avec un simple braqueur est patente.]
Je ne vois pas pourquoi. Qui vous dit que le braqueur en question ne compte pas faire don de l’argent qu’il a volé à un orphelinat ? Est-ce que cela rendrait le fait de frapper le bijoutier et de le menacer avec une arme plus légitime ? Je ne le pense pas… en fait, il ne faut pas trop croire que l’action militante soit « désintéressée », et que les militants soient une sorte de moine laïque. Le militantisme rapporte des avantages : le pouvoir sur les autres, la bonne conscience, la récompense symbolique…
[Blague à part, c’est évidemment du Robin Hood de la légende que je parlais, et peu importe la réalité historique dans ce cas. L’image est puissante, et pertinente : c’est comme ça qu’ils se voient. Robin des bois, Mandrin…]
Sauf que Mandrin ne donnait rien aux pauvres. C’était un bandit de grand chemin qui dépouillait les honnêtes gens – souvent les plus riches, bien entendu, parce que ce sont eux qui rapportent le plus et non pour des raisons morales – qui a lui aussi été remis au goût du jour par les romantiques, pour des raisons analogues à celles qui ont fait la gloire de Robin Hood, à savoir, le fait que l’un et l’autre étaient censés attaquer les infâmes percepteurs. Que voulez-vous, la haine de la bourgeoisie contre l’impôt ne date pas d’aujourd’hui…
[« Je ne vois pas en quoi le bijoutier qui prend son flingue pour défendre sa bijouterie serait plus condamnable que le faucheur volontaire qui détruit la culture d’autrui parce qu’il est convaincu qu’elle menace sa santé ». Exactement : les faucheurs sont comparables au bijoutier. Pas au braqueur.]
Non. Le bijoutier est du côté de la loi, les faucheurs volontaires sont contre elle. Car c’est là toute la différence. Le bijoutier qui prend son flingue et tire sur un braqueur défend sa bijouterie contre une menace objective. Le « faucheur volontaire » défend la société contre une menace subjective, puisqu’elle n’existe que dans sa tête. Le bijoutier exige de l’Etat qu’il applique la loi, le « faucheur volontaire » se met volontairement en marge de celle-ci.
[Toutes les décisions politiques sont l’expression d’un rapport de force, Descartes.]
C’est bien ce que je disais. C’est pourquoi elles ne « donnent raison » à personne. On peut parfaitement avoir tort et faire pencher la balance du rapport de forces de son côté.
[Et les avis favorables aux OGM, ceux rendus par l’EFSA en particulier, sont essentiellement basés sur des tests effectués par les fabricants eux-mêmes, avec des méthodes dont la fameuse étude de Séralini, pour critiquable qu’elle soit (et elle l’est !) a au moins eu le mérite de (re-)mettre en lumière le manque de fiabilité.]
Je ne vois pas en quoi l’escroquerie intellectuelle qu’est l’étude de Séralini – j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur la question dans un papier sur ce blog – a « mis en lumière » quoi que ce soit. Les avis des autorités sanitaires sur les OGM sont fondés sur des tests faits par les fabricants tout simplement parce que personne d’autre n’a envie de financer ce genre de tests, qui sont fort coûteux. Mais j’aimerais savoir si vous croyez vraiment que les fabricants ont intérêt à falsifier ces tests. Imaginons que Séralini ait raison, et que les OGM vendus par Monsanto ou n’importe quel autre industriel entrainent des centaines de cancers. A votre avis, quelle serait la facture pour Monsanto ? Avez-vous l’ombre d’une idée de combien cela pourrait coûter, en termes d’indemnisations, de frais de justice, de perte d’image à une entreprise comme Monsanto une telle catastrophe sanitaire ?
Tout l’argumentaire sur l’insuffisance des tests effectués par les industriels se fracasse contre cette simple réalité : les industriels sont les premiers à avoir intérêt à ce que les produits qu’ils vendent soient sûrs, parce que ce sera à eux de payer les pots cassés si les choses tournent mal. Croire qu’un industriel comme Monsanto est prêt à prendre d’énormes risques au civil et au pénal pour économiser quelques rats de laboratoire et quelques jours d’essais me semble ridicule.
[Au reste, si le moratoire a été décidé en 2008, à l’époque du « Grenelle de l’environnement », c’était sur l’avis du Haut Conseil des Biotechnologies (ou plutôt de son prédécesseur provisoire), avis qui était justifié scientifiquement — la moitié des membres du Conseil sont des scientifiques… Rien à voir avec Fessenheim.]
Vraiment ? L’histoire mérite pourtant d’être racontée. Rappelons que le CPHA (Comité de préfiguration de la Haute Hautorité, qui deviendra plus tard le Haut Conseil des Biotechnologies) créé en 2007 est un organisme qui intègre quinze scientifiques mais aussi des personnalités associatives et politiques, sous la présidence du sénateur Jean-François Le Grand. C’est lui qui déclarerait qu’il y aurait « des doutes sérieux » concernant le maïs MON810. Cette déclaration provoquera une protestation de douze des quinze membres scientifiques de l’instance, qui déclareront que nulle part on retrouve de « doute sérieux » dans le projet d’avis qu’ils ont rédigé, et dénoncent une manipulation du politique. La « justification scientifique » dans cette affaire ne semble donc pas très solide…
Pour plus de détails, lire (http://lci.tf1.fr/science/environnement/2008-01/ogm-scientifiques-haute-autorite-sentent-trahis-4896599.html)
[L’inconvénient d’internet, c’est que je ne peux pas citer d’exemple personnel. L’avantage d’internet, c’est qu’il est très facile de trouver des exemples, pour peu qu’on se donne la peine de chercher. Ainsi tombé-je sur le nom de Mark Lynas. Ça en fait au moins un.]
Dites-donc… pour trouver un écolo qui ait changé d’avis il faut aller les chercher à l’étranger et avec google ? C’est dire si c’est rare…
[Coïncidence ? Ce sont des peines de cet ordre qui ont été prononcées dans plusieurs affaires de ce type. Étonnant, non ? L’effet dissuasif n’a cependant pas été frappant, puisqu’ils ont remis ça. Pas très convaincant…]
Pour le moment, je ne connais pas de cas où l’on ait prononcé des peines incluant la réparation intégrale du préjudice, pas plus qu’un cas où la saisie des comptes et des revenus ait été prononcée. Pourriez-vous me donner ne serait-ce qu’un exemple ?
> Je ne vois pas pourquoi. Qui vous dit que le braqueur en question ne compte pas faire don de l’argent qu’il a volé à un orphelinat ?
Même si c’était le cas (je pense qu’on le saurait), encore faudrait-il que le braqueur revendique son geste, se livre à la justice et demande un changement de la loi afin d’interdire les bijouteries. Ça fait beaucoup de conditions à respecter pour que votre comparaison soit valable.
> en fait, il ne faut pas trop croire que l’action militante soit « désintéressée », et que les militants soient une sorte de moine laïque. Le militantisme rapporte des avantages : le pouvoir sur les autres, la bonne conscience, la récompense symbolique…
On dit même qu’ils sont fiers de ce qu’ils font. Vous avez bien raison, Descartes : tous des pourris, ces militants. Ils se remplissent la conscience de récompenses symboliques… Et tout ça sur le dos de ces pauvres industriels qui osent prendre le risque de mettre en danger l’environnement. Sans parler de ces pauvres chasseurs de baleines, je vous dis pas la bonne conscience que Greenpeace se fait sur leur dos. Ignoble.
> Sauf que Mandrin ne donnait rien aux pauvres.
Oh là là Descartes, mais j’en apprends des choses, grâce à vous. Le Mandrin historique n’était pas le même que celui de la légende ? Et c’est au personnage romancé que s’identifient ces gens ? Ça alors, je ne m’en doutais pas du tout. Et ça change… ah, ben, absolument rien à ce que je disais.
> Non. Le bijoutier est du côté de la loi, les faucheurs volontaires sont contre elle.
Atttttendez, là : du côté de quelle loi ? Celle qui lui interdisait de posséder une arme ? Ou celle qui lui interdisait de tirer sur les braqueurs alors qu’il n’était plus en légitime défense ? Celle qui a aboli la peine de mort ? Celle qui avait remis le braqueur en liberté après qu’il ait purgé sa peine précédente ?
Et les faucheurs volontaires, ils sont contre quelle loi ? Celle qui instaure le principe de précaution en matière environnementale ? Celle sur l’état de nécessité, qu’ils ont invoquée pour leur défense — et qui leur a valu plusieurs relaxes : relaxes cassées par la suite, certes, mais qui montrent bien que les faucheurs, s’ils ne sont pas tout blancs, ne sont pas non plus tout noirs aux yeux de la loi.
> C’est bien ce que je disais. C’est pourquoi elles ne « donnent raison » à personne. On peut parfaitement avoir tort et faire pencher la balance du rapport de forces de son côté.
Mais l’expression « donner raison » ne veut rien dire d’autre, Descartes. Vous êtes libre de penser que le moratoire a été pris à tort, mais il allait dans le sens des faucheurs : il leur a donné raison. Point. Et plaignez-vous à la langue française si ça vous dérange.
> Je ne vois pas en quoi l’escroquerie intellectuelle qu’est l’étude de Séralini – j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur la question dans un papier sur ce blog – a « mis en lumière » quoi que ce soit.
Elle a relancé le débat. Évidemment, d’un point de vue scientifique, son étude est mauvaise, mais il en a profité pour mettre en lumière la faiblesse des études publiées par les fabricants eux-mêmes, et sur la base desquelles les OGM sont autorisés. Séralini a eu beau jeu de défendre son papier en renvoyant la balle aux fabricants d’OGM sur le petit nombre de rats testés et la durée des études. Les conclusions du HCB et de l’ANSES, aussi critiques qu’elles soient envers le papier de Séralini, vont dans le même sens que lui en recommandant une meilleure évaluation des OGM. En outre l’étude de Séralini a conduit l’EFSA a publier certaines données qu’elle gardait secrète, et dont la publication était réclamée depuis longtemps par le CRIIGEN. Bref, aussi douteuses que soit la méthode, Séralini et le CRIIGEN ont marqué des points.
> Les avis des autorités sanitaires sur les OGM sont fondés sur des tests faits par les fabricants tout simplement parce que personne d’autre n’a envie de financer ce genre de tests, qui sont fort coûteux.
On pourrait, comme cela a été proposé suite à l’affaire Séralini, confier l’évaluation à une agence indépendante, financée indirectement par les fabricants d’OGM. Ils faut bien qu’ils les financent, mais ce n’est pas à eux de les réaliser, le conflit d’intérêt est trop évident.
> Tout l’argumentaire sur l’insuffisance des tests effectués par les industriels se fracasse contre cette simple réalité : les industriels sont les premiers à avoir intérêt à ce que les produits qu’ils vendent soient sûrs, parce que ce sera à eux de payer les pots cassés si les choses tournent mal.
« Cette simple réalité » ? Et l’argumentaire sur la nocivité du tabac et de l’amiante, Descartes, il se fracasse aussi sur la bonne conscience des industriels qui ont intérêt à ce que leurs produits soient sûrs ?
> La « justification scientifique » dans cette affaire ne semble donc pas très solide…
M’ouais. J’ai comme des doutes sur les doutes sur les doutes… Vous avez lu l’avis en question ? Effectivement, l’expression "doute sérieux" n’y figure pas, ni le mot doute d’ailleurs. Mais il y a un synonyme, celui d’interrogation. Et si ces interrogations n’étaient pas sérieuses, que font-elles dans l’avis ? Je ne sais pas ce qui a poussé ces scientifiques à critiquer les déclarations de Le Grand, mais les remarques rapportées dans l’article que vous citez sont absolument bénignes, de l’ordre de la guerre de mots. Elles portent sur la forme, pas sur le fond — ou alors, il aurait fallu le faire clairement en critiquant l’avis lui-même, parce que tel qu’il est rédigé, ce fameux avis qui ne comporte pas l’expression « doute sérieux », il exprime bien des doutes — et si ce n’est pas un avis sérieux, on se demande à quoi ces scientifiques jouaient.
> Dites-donc… pour trouver un écolo qui ait changé d’avis il faut aller les chercher à l’étranger et avec google ? C’est dire si c’est rare…
Les faucheurs d’OGM sont rares, oui, quelques centaines, à l’échelle internationale peut-être quelques milliers, et ils sont a priori parmi les plus convaincus des écolos. En trouver ne serait-ce qu’un seul qui ait changé d’avis suffit à prouver, vos sarcasmes mis à part, que les faucheurs volontaires peuvent être convaincus — ce que vous disiez ne pas croire un instant, et en quoi vous aviez donc tort.
> Pour le moment, je ne connais pas de cas où l’on ait prononcé des peines incluant la réparation intégrale du préjudice, pas plus qu’un cas où la saisie des comptes et des revenus ait été prononcée. Pourriez-vous me donner ne serait-ce qu’un exemple ?
D’après Wikipédia, ce fut le cas pour « le fauchage d’un essai de maïs OGM à Menville le 25 juillet 2004 » ou Bové, mamère et quelques autres ont été condamnés à de la prison ferme, et 110 000 euros de domages et intérêts. J’ignore si cela couvre « l’intégralité du préjudice subi », mais c’est une somme assez conséquente, et toujours d’après Wiki, « Ces sommes ont fait l’objet de saisies sur les comptes de Noël Mamère. » À Riom, c’est gilles Lemaire, des Verts, qui faisait partie des condamnés, ce qui a abouti à la saisie et à la vente aux enchères de son appartement pour couvrir les dommages et intérêts, plus frais de justice, dont le montant était de l’ordre de 200 000 euros.
@adrien
[On dit même qu’ils sont fiers de ce qu’ils font. Vous avez bien raison, Descartes : tous des pourris, ces militants.]
Des pourris non, des fanatiques oui. Certains croient qu’ils gagnent le paradis en assassinant quelques dizaines d’innocents, d’autres sont convaincus qu’ils le gagnent en détruisant une expérience scientifique de l’INRA. Je me méfie instinctivement des gens qui sont tellement convaincus de détenir la vérité qu’ils sont incapables de concevoir que l’autre puisse, lui aussi, avoir une défense à présenter.
[Et tout ça sur le dos de ces pauvres industriels qui osent prendre le risque de mettre en danger l’environnement.]
Et qui nous permettent de bénéficier d’une qualité de vie et d’une espérance de vie en bonne santé jamais égalée dans l’histoire de l’humanité. Oui, je pense que nous parlons des mêmes.
[Oh là là Descartes, mais j’en apprends des choses, grâce à vous. Le Mandrin historique n’était pas le même que celui de la légende ? Et c’est au personnage romancé que s’identifient ces gens ? Ça alors, je ne m’en doutais pas du tout.]
Eh bien, vous aurez appris quelque chose. Maintenant, il vous reste à apprendre un minimum de politesse et à reconnaître vos erreurs… malheureusement là, je ne peux rien pour vous.
[Et ça change… ah, ben, absolument rien à ce que je disais.]
Ah bon ? Je vous cite donc : « c’est comme ça qu’ils se voient. Robin des bois, Mandrin… ». Si vous pensez que « cela ne change rien à ce que vous dites » que les écologistes se voient comme un vulgaire bandit de grand chemin ou qu’ils s’identifient à un bienfaiteur qui vole les riches pour donner aux pauvres, je n’ai rien à ajouter.
[« Non. Le bijoutier est du côté de la loi, les faucheurs volontaires sont contre elle ». Atttttendez, là : du côté de quelle loi ? Celle qui lui interdisait de posséder une arme ?]
Non, de celle qui interdit de frapper les gens et de les dépouiller. Je vous rappelle que je n’ai jamais prétendu que l’autodéfense du bijoutier fut légale. Elle est aussi illégale que l’autodéfense des « faucheurs volontaires ». La différence, c’est que le bijoutier entendait réagir à un acte illégal, tandis que les faucheurs volontaires, de leur côté, cherchent à s’opposer à un acte parfaitement légal.
[Et les faucheurs volontaires, ils sont contre quelle loi ?]
Celle qui interdit de détruire le bien d’autrui. Celle qui permet la culture des OGM. Les expériences de l’INRA étaient parfaitement légales et autorisé conformément à la réglementation.
[Celle qui instaure le principe de précaution en matière environnementale ?]
Aucune loi que je sache ne permet à chaque citoyen de s’ériger en juge de ce qui doit être interdit en vertu du « principe de précaution ». Encore une fois, l’expérience de l’INRA était parfaitement légale.
[Celle sur l’état de nécessité, qu’ils ont invoquée pour leur défense — et qui leur a valu plusieurs relaxes : relaxes cassées par la suite, certes, mais qui montrent bien que les faucheurs, s’ils ne sont pas tout blancs, ne sont pas non plus tout noirs aux yeux de la loi.]
C’est une drôle d’idée que vous avez là. Une décision de justice cassée est réputée n’avoir jamais produit d’effet. Quand une condamnation est cassée, la personne est considérée « toute blanche » aux yeux de la loi. Quand une relaxe est cassée et une condamnation prononcée, la personne est « toute noire » aux yeux de la loi.
[Mais l’expression « donner raison » ne veut rien dire d’autre, Descartes.]
Pardon. L’expression « donner raison » veut dire quelque chose d’autre. Cela implique un jugement au mérite des arguments ou des preuves, et non une décision en vertu d’un rapport de force. Un tribunal peut « donner raison » à telle ou telle partie. Mais une décision politique ne donne jamais « raison » à qui que ce soit. Diriez vous qu’en 2007 les électeurs ont « donné raison » à Nicolas Sarkozy et tort à Ségolène Royal ? Bien sur que non.
[Vous êtes libre de penser que le moratoire a été pris à tort, mais il allait dans le sens des faucheurs : il leur a donné raison.]
Non. Il leur a donné satisfaction peut-être, mais une telle décision n’implique aucun jugement en termes de « raison » ou « tort ».
[Point. Et plaignez-vous à la langue française si ça vous dérange.]
Heureusement pour elle, la langue française ne vous a pas pour représentant pour parler en son nom.
[« Je ne vois pas en quoi l’escroquerie intellectuelle qu’est l’étude de Séralini – j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur la question dans un papier sur ce blog – a « mis en lumière » quoi que ce soit ». Elle a relancé le débat.]
Oui, un peu comme le « board of éducation » du Kansas a « relancé le débat » en décidant d’enseigner le créationnisme. Je doute personnellement qu’il soit intéressant de relancer le débat entre les scientifiques et les marchands de peur.
[Évidemment, d’un point de vue scientifique, son étude est mauvaise, mais il en a profité pour mettre en lumière la faiblesse des études publiées par les fabricants eux-mêmes, et sur la base desquelles les OGM sont autorisés.]
Pourriez-vous expliquer en quoi il a « mis en lumière » pareille chose ? Je pense que vous confondez « affirmer » et « mettre en lumière ». Mais peut-être faudrait-il se plaindre à la langue française ?
[Séralini a eu beau jeu de défendre son papier en renvoyant la balle aux fabricants d’OGM sur le petit nombre de rats testés et la durée des études. Les conclusions du HCB et de l’ANSES, aussi critiques qu’elles soient envers le papier de Séralini, vont dans le même sens que lui en recommandant une meilleure évaluation des OGM.]
Le contraire eut été étonnant. Dans le climat de terrorisme intellectuel qui règne aujourd’hui, tout le monde a besoin de se couvrir. Personne n’oserait recommander une moins bonne évaluation des OGM.
[En outre l’étude de Séralini a conduit l’EFSA a publier certaines données qu’elle gardait secrètes, et dont la publication était réclamée depuis longtemps par le CRIIGEN.]
Et cela a change quoi, exactement ?
[Bref, aussi douteuses que soit la méthode, Séralini et le CRIIGEN ont marqué des points.]
C’est vrai. Contre la science et la raison.
[On pourrait, comme cela a été proposé suite à l’affaire Séralini, confier l’évaluation à une agence indépendante, financée indirectement par les fabricants d’OGM].
Il faudra m’expliquer comment une agence financée par les fabricants d’OGM pourrait être « indépendante ». Nous avons ça dans le domaine nucléaire, avec une Autorité de Sûreté Nucléaire financée par une taxe sur les installations nucléaires, n’est ce pas ? Je n’ai pas l’impression que cela satisfasse les antinucléaires…
[« Tout l’argumentaire sur l’insuffisance des tests effectués par les industriels se fracasse contre cette simple réalité : les industriels sont les premiers à avoir intérêt à ce que les produits qu’ils vendent soient sûrs, parce que ce sera à eux de payer les pots cassés si les choses tournent mal ». « Cette simple réalité » ? Et l’argumentaire sur la nocivité du tabac et de l’amiante, Descartes, il se fracasse aussi sur la bonne conscience des industriels qui ont intérêt à ce que leurs produits soient sûrs ?]
Bien sur que si. Les études faites par les industriels de l’amiante n’ont à ma connaissance jamais caché le caractère cancérigène des fibres d’amiante. C’est une réalité connue depuis un demi siècle. Si l’amiante n’a pas été interdit d’usage, ce n’est certainement pas parce que les industriels ont caché leurs études où les ont mal faites, mais parce que les pouvoirs publics ont jugé le risque acceptable. Vous pouvez penser qu’ils avaient tort, mais l’exemple est mal choisi pour dénoncer une occultation de la dangerosité du produit par les industriels.
La question du tabac est assez semblable, du moins en France : la dangerosité de la cigarette est connue depuis plus d’un demi siècle, et ce sont les pouvoirs publics qui ont choisi de mettre sur le marché le produit en parfaite connaissance de cause – puisque la vente de tabac était jusqu’à il y a quelques années un monopole d’Etat. Là encore, on peut difficilement accuser la SEITA d’avoir mal fait les études ou de les avoir cachées.
[Vous avez lu l’avis en question ? Effectivement, l’expression "doute sérieux" n’y figure pas, ni le mot doute d’ailleurs. Mais il y a un synonyme, celui d’interrogation.]
Pardon, le mot « interrogation » n’est pas synonyme de « doute sérieux ». Je peux parfaitement avoir des interrogations sur le temps qu’il fera demain, et cela n’implique aucun « doute »… Mais peut-être qu’il faut là encore se plaindre à la langue française ?
[Je ne sais pas ce qui a poussé ces scientifiques à critiquer les déclarations de Le Grand,]
Pourtant il l’ont écrit noir sur blanc : ils ont accusé Le Grand d’avoir manipulé pour des raisons politiques l’avis du comité en leur faisant dire ce qu’ils n’avaient pas dit.
[mais les remarques rapportées dans l’article que vous citez sont absolument bénignes, de l’ordre de la guerre de mots. Elles portent sur la forme, pas sur le fond — ou alors, il aurait fallu le faire clairement en critiquant l’avis lui-même, parce que tel qu’il est rédigé, ce fameux avis qui ne comporte pas l’expression « doute sérieux », il exprime bien des doutes]
Non. Il exprime des interrogations. Ce n’est pas la même chose de se dire « je m’interroge sur ce que vous dites » que « je doute que ce soit vrai ».
[Les faucheurs d’OGM sont rares, oui, quelques centaines, à l’échelle internationale peut-être quelques milliers, et ils sont a priori parmi les plus convaincus des écolos. En trouver ne serait-ce qu’un seul qui ait changé d’avis suffit à prouver, vos sarcasmes mis à part, que les faucheurs volontaires peuvent être convaincus]
Beh non… pour montrer que les « faucheurS volontaireS peuveNT être convaincuS » il faudrait au moins en montrer deux…
[D’après Wikipédia, ce fut le cas pour « le fauchage d’un essai de maïs OGM à Menville le 25 juillet 2004 » ou Bové, Mamère et quelques autres ont été condamnés à de la prison ferme, et 110 000 euros de domages et intérêts. J’ignore si cela couvre « l’intégralité du préjudice subi », mais c’est une somme assez conséquente, et toujours d’après Wiki, « Ces sommes ont fait l’objet de saisies sur les comptes de Noël Mamère. » À Riom, c’est gilles Lemaire, des Verts, qui faisait partie des condamnés, ce qui a abouti à la saisie et à la vente aux enchères de son appartement pour couvrir les dommages et intérêts, plus frais de justice, dont le montant était de l’ordre de 200 000 euros]
Selon mes informations, un essai comme celui de l’INRA – c’était de la vigne, pas du maïs – avait coûté de l’ordre de 1 M€. J’ignore si dans le cas du maïs c’est moins cher, mais je me permet de douter que dans les cas que vous citez 100 k€ aient couvert l’intégralité du préjudice. Je n’ai pas par ailleurs trouvé de trace rapportant l’exécution des condamnation pécuniaires en question.
"> Non. Le bijoutier est du côté de la loi, les faucheurs volontaires sont contre elle.
Atttttendez, là : du côté de quelle loi ? Celle qui lui interdisait de posséder une arme ? Ou celle qui lui interdisait de tirer sur les braqueurs alors qu’il n’était plus en légitime défense ? Celle qui a aboli la peine de mort ? Celle qui avait remis le braqueur en liberté après qu’il ait purgé sa peine précédente ?"
=> Les faucheurs sont contre la loi qui autorise l’INRA à faire des tests. L’INRA est dans la légalité. Les faucheurs sont hors-la-loi. Au lieu de lutter pour changer la loi ils s’érigent en arbitre et juges seuls aptes à décider ce qui est bon pour la collectivité. Les militants ne sont rien d’autres que des dictateurs en puissance.
Bonjour Descartes,
Je tombe des nues en lisant votre réponse. Pas le temps de répondre en détail pour l’instant, mais si quelqu’un veut prendre le relais, vous gênez pas…
Une citation, quand même, du petit Robert : "Interrogation : Type de phrase logiquement incomplète qui a pour objet de poser une question ou qui implique un doute."
Y’a pas marqué "un doute sérieux", mais encore une fois, si ce n’était sérieux, pourquoi donc en parler ?
@adrien
[Je tombe des nues en lisant votre réponse.]
Eh bien, j’espère que vous ne vous êtes pas fait trop de mal. Lorsqu’on a passé quelque temps dans les nuages, le contact avec le sol du réel peut être violent.
[Une citation, quand même, du petit Robert : "Interrogation : Type de phrase logiquement incomplète qui a pour objet de poser une question ou qui implique un doute."]
Oui. Je vous signale le "ou" dans votre citation, que vous semblez remplacer un peu trop vite par un "et". Vous semblez avoir décidé que dans le cas qui nous occupe les scientifiques auraient exprimé "un doute", alors que sans violer le mot "interrogation" il peut s’agit tout simplement de "poser une question".
[Y’a pas marqué "un doute sérieux", mais encore une fois, si ce n’était sérieux, pourquoi donc en parler ?]
Il n’y a pas marqué "doute" non plus… j’ajoute qu’un doute posé sérieusement ne devient pas pour autant un "doute sérieux". Et qu’on peut parfaitement dans un rapport faire état d’un doute sans que celui soit nécessairement "sérieux".
Bonjour Descartes,
Toujours pas le temps d’écrire une réponse détaillée, mais je voulais au moins vous suggérer de vous intéresser à l’opération Berkshire, et au site http://legacy.library.ucsf.edu/ qui contient des documents révélateurs sur les pratiques de l’industrie du tabac. En gros les industriels ont mis en place un conspiration (le mot n’est pas de moi, mais de la justice des États-Unis qui a eu à se prononcer sur l’affaire) visant à occulter les méfaits du tabac, y compris en manipulant les données scientifiques.
@Adrien
Pourriez-vous donner des références précises des documents "révélateurs des pratiques" auxquelles vous faites références ? Parce que le site que vous indiquez contient plus de 14 millions de documents…
[En gros les industriels ont mis en place un conspiration (le mot n’est pas de moi, mais de la justice des États-Unis qui a eu à se prononcer sur l’affaire)]
Oui, et dans l’immense majorité des cas a conclu négativement…
À votre service : http://www.justice.gov/civil/cases/tobacco2/amended%20opinion.pdf (Il s’agit de la "final opinion" de la cour dans le procès contre Philipp Morris. Cf. http://www.justice.gov/civil/cases/tobacco2/index.htm C’est un peu longuet, mais en voici un résumé : http://publichealthlawcenter.org/sites/default/files/resources/tclc-verdict-is-in.pdf)
Les documents rendus publics lors de cette affaire (et disponible sur le site indiqué dans mon message précédent) ont aussi donné lieu à des publications comme : http://publishing.cdlib.org/ucpressebooks/view?docId=ft8489p25j;brand=ucpress ou http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0140673605178714#
Bonne lecture.
@adrien
On progresse… de quelques millions de documents, on est passé à quelques milliers de pages… maintenant, pourriez-vous donner les références exactes des pages ou l’on parle de "manipulation des données scientifiques" ? Une recherche rapide m’a permis de trouver des cas d’occultation ou de destruction de données scientifiques, mais aucun cas de "manipulation". D’ailleurs, l’accusation contre les groupes du tabac n’est pas d’avoir manipulé les données scientifiques, mais d’avoir fourni des informations fausses ou tronquées au public.
@ Descartes : Cherchez le mot "falsified" dans les documents. D’ailleurs même sans aller jusque là, je dirais que le fait d’occulter des données est aussi une forme de manipulation…
Bref, je ne sais pas ce qu’il en est de l’amiante ou du cas particulier de la Seita en France, mais si les pouvoirs publics ont tant tardé à prendre des mesures contre le tabac, ce n’est pas seulement « parce qu'[ils] ont jugé le risque acceptable », mais bien parce que l’industrie du tabac a pesé de tout son poids pour s’opposer à ces mesures, en falsifiant certaines données, en en occultant d’autres, en tentant de détourner l’attention sur d’autres sources de pollution de l’air ; en finançant en secret des congrès, des publications, des chercheurs, des éditeurs de revues scientifiques dans la seule mesure où ils allaient dans son sens (l’article du lancet des recherches montrant que les papiers financés par l’industrie du tabac ont 88 fois plus de chances de conclure à l’innocuité du tabagisme passif) ; en ciblant les toubibs, pour qu’ils encouragent les fumeurs à passer à des cigarettes à faible teneur en goudrons, plutôt qu’à arrêter de fumer — sans parler du lobbying envers les parlementaires ; ou encore en manipulant les cigarettes pour qu’elles soient le plus addictives possible, c’est à dire en augmentant volontairement la dangerosité de leur produit.
Alors votre argument sur "cette simple réalité" qui voudraient que les industriels aient intérêt à ce que les produits qu’ils vendent soient sûrs… Non, les industriels ont intérêt à ce que le public _pense_ que leurs produits sont sûrs. Que les produits le soient réellement n’est qu’un moyen parmi d’autres d’y parvenir, et l’exemple de l’industrie du tabac montre que ce n’est hélas pas toujours celui qui est choisi.
Et c’est bien votre argument qui se fracasse sur cette réalité.
@ Adrien
[Cherchez le mot "falsified" dans les documents.]
J’ai cherché. Il ne figure qu’une seule fois, et dans un paragraphe qui n’a qu’un rapport lointain avec notre discussion. J’en déduis que vous n’avez pas vraiment lu les documents que vous me recommandez de lire. Ce n’est pas très correct…
[D’ailleurs même sans aller jusque là, je dirais que le fait d’occulter des données est aussi une forme de manipulation…]
Vraiment ? Dans ce cas, vous aurez du mal à trouver quelqu’un qui mérite votre confiance. Je ne connais guère d’organisation qui publie les données qui sont défavorables aux thèses qu’elle entend défendre…
[Bref, je ne sais pas ce qu’il en est de l’amiante ou du cas particulier de la Seita en France, mais si les pouvoirs publics ont tant tardé à prendre des mesures contre le tabac, ce n’est pas seulement « parce qu'[ils] ont jugé le risque acceptable », mais bien parce que l’industrie du tabac a pesé de tout son poids pour s’opposer à ces mesures,]
Voyons si je comprends bien: les gouvernements qui ont tardé par exemple a augmenter massivement les taxes sur les cigarettes l’auraient fait non pas parce qu’ils craignaient la réaction des fumeurs-électeurs, mais parce que "l’industrie du tabac a pesé de tout son poids" ? Vous croyez vraiment cela ? A votre avis, qui les politiques craignent le plus, les cigarettiers, ou les électeurs ?
[en finançant en secret des congrès, des publications, des chercheurs, des éditeurs de revues scientifiques dans la seule mesure où ils allaient dans son sens]
Un peu comme la CRIIRAD, quoi…
[Alors votre argument sur "cette simple réalité" qui voudraient que les industriels aient intérêt à ce que les produits qu’ils vendent soient sûrs… Non, les industriels ont intérêt à ce que le public _pense_ que leurs produits sont sûrs.]
C’était peut-être vrai en 1950 aux Etats-Unis. Ce n’est certainement pas le cas maintenant, compte tenu du montant des amendes et surtout des dommages et intérêts accordés par la jurisprudence.