Demain n’arrive jamais

Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, je voudrais vous parler de l’incompréhensible. Prenons pour donner un exemple concret la page 17 du « Monde » daté du 22 février 2011 et intitulée « Le SOS des médecins de banlieue ». Bien qu’intitulé « décryptage », l’article en question ne « décrypte » rien du tout : elle présente une situation qu’on ne peut en toute honnêteté qu’appeler « incompréhensible ».

Que nous dit l’article en question ? Il nous parle de Josselyne Buruchian et de Joselyne Rousseau, deux médecins qui exercent leur métier respectivement à Stains et à Pierrefitte en Seine-Saint-Denis. Il nous raconte comment le climat de violence oblige ces praticiens, installés pourtant dans leur quartier depuis des décennies, à transformer leurs cabinets en forteresses. Et on ne parle pas d’un « sentiment d’insécurité» : les professionnels ont pris cette décision après plusieurs agressions, dont une dernière avec arme. L’article nous explique aussi la multiplication « des agressions violentes envers médecins, infirmiers, kinés ou pharmaciens » qui « risquent de faire partir les soignants les uns après les autres ». Et la désertification médicale menace : « Josselyne Rousseau travaille seule. Ils étaient quatre au départ. Les autres sont partis pour raisons personnelles ou a cause de l’insécurité. Elle n’espère plus quiconque ». Comme beaucoup de ses confrères. Ce qu’on nous décrit ici, c’est tout un climat. Ainsi, on nous parle de Nicole Legrand, pédiatre à Stains, qui désormais ferme à clé la porte de son cabinet. « Quand elle oublie, il arrive que les chaises de sa salle d’attente disparaissent. C’est devenu le jeu d’une bande de jeunes ».

Au delà des solutions proposées (plus de policiers, plus d’emplois, plus de caméras de surveillance, plus de…), il faut se poser une question de fond : Pourquoi ? Quelle est la logique qui peut pousser des « jeunes » a dégrader l’outil de travail d’une personne qui est là pour leur rendre service ? Que se passe-t-il pour qu’un gamin cagoulé braque une arme sur un médecin ?

Cette question n’est pas nouvelle. Lors des émeutes de 2005, on avait remarqué qu’un grand nombre de bâtiments publics avaient été partis en fumée. Et pas seulement ceux qui peuvent se confondre avec les représentants de l’Etat ou les forces répressives. Non : on a vu mettre le feu à des gymnases, à des maisons de quartier, à des bibliothèques. Et on voit quotidiennement des jeunes – et des moins jeunes – mettre le feu à des poubelles ou à la voiture de leur voisin. Et la question est la même : Pourquoi ?

On m’expliquera que le chômage, que le racisme, que la discrimination, que l’horizon bouché, que gnagnagna… mais tout ça n’explique rien. A la rigueur, on pourrait comprendre qu’une population condamnée au chômage et à la misère, discriminée et méprisée se révolte et qu’elle déchaîne sa violence sur ceux qui, réelle ou symboliquement, portent la responsabilité de cette situation. Mais les médécins ? les bibliothèques ? les poubelles ? la voiture du voisin ? Pourquoi chercher à détruire et à dégrader les rares services et équipements qui rendent la vie un peu vivable ? Pourquoi contribuer au délabrement d’un environnement déjà passablement délabré ?

Mais allons plus loin : lorsqu’un problème est incompréhensible, c’est souvent parce qu’il est mal posé. Qu’une collectivité détruise son propre environnement paraît incompréhensible parce qu’on se situe dans une logique de temps linéaire, où nos actes ont des conséquences irréversibles. Mais comment verrait le monde un être qui serait persuadé que le temps se condense dans le présent ? Un tel être serait incapable de percevoir que ses actes ont des conséquences. Il pourrait détruire une école sans s’apercevoir que s’il met le feu aujourd’hui il ne pourra pas y aller demain. Il pourrait brûler la voiture de son voisin sans anticiper sa détresse en découvrant son bien détruit. Il pourrait menacer un médecin avec une arme sans réaliser qu’en tirant sur la gâchette il supprime une vie humaine et que cet acte a des conséquences irréversibles.

C’est une constante de beaucoup d’affaires récentes dans des quartiers « difficiles » : elles ne sont compréhensibles que si l’on admet que les participants vivent exclusivement dans le présent et n’ont pas conscience d’avenir. Car on voit mal comment une personne rationnelle pouvant se projeter dans l’avenir pourrait participer à une agression avec arme pour voler quelques euro à un commerçant de quartier. Le simple examen du rapport risque/avantage devrait convaincre n’importe qui que ce n’est pas une bonne idée. Que valent quelques centaines, peut-être quelques milliers d’euros, comparés au risque d’une condamnation pénale qui vous suivra toute votre vie ? Une telle action montre que la clé de toute l’affaire se trouve précisément dans l’impossibilité de se projeter dans l’avenir. Et là, tout devient compréhensible. En particulier, le pourquoi du fossé entre les jeunes et l’école : l’école est par excellence l’institution de construction de l’avenir, celle qui exige le plus d’efforts aujourd’hui au nom de demain. Elle n’a de sens que dans un rapport au temps.

 

Nous sommes en présence d’une génération pour qui les conduites adultes de prévision et d’accumulation sont étrangères. Seule compte la satisfaction immédiate. Et cette génération ne fait que reproduire les comportements véhiculés par la société toute entière. Lorsque les médias transforment des ultra-médiocres en « stars » d’une émission de télé-réalité, le message est clair : il n’y a que l’instant qui compte. Demain n’existe pas, c’est aujourd’hui qu’il faut briller. Pas la peine d’investir des années à étudier, à travailler, à se former, à construire un parcours. Mieux vaut compter sur le « coup de chance » – et le « vote du public » qui transforme la grenouille en princesse.

 

Descartes

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36 réponses à Demain n’arrive jamais

  1. JG45 dit :

    Chapeau, rien à ajouter, l’analyse est excellente, no futur,
    retraité je vais dans les écoles pour motiver les jeunes, tous ne sont pas comme cela, heureusement, mais c’est souvent, pour les plus faibles, c’est tout, tout de suite.
    Je ne suis pas toujours d’accord avec les analyses économiques, mais ce billet est une perle. Bravo

  2. dudu87 dit :

    Bonjour,

    “je voudrais vous parler de l’incompréhensible.”

    Incompréhensible, tu crois…

    Je voudrai illustrer mon propos par 2 exemples que j’ai vécu.
    D’abord, la jeunesse actuelle est-elle différente de la notre?
    Avoue que nous n’étions pas des…anges!
    1° Armés de nos lance-pierres, à plusieurs “chenappants”, notre passe-temps était de visser les isolateurs des poteaux électriques.
    Tu vois les dégâts produits jusqu’au jour où les gendarmes sont venus frapper à la porte de nos parents. La suite tu peux l’imaginer, punitions…ect…
    Quelle est la différence avec aujourd’hui? Pas de portables, des vélos, pas d’armes à feu à notre disposition… Des adultes et des services publiques qui fonctionnaient en toute intelligence entre
    eux!

    2° C’était l’époque des grandes luttes des vignerons du Midi. Lors d’une rencontre entre vacanciers et militants syndicalistes viticulteurs occitants (MIVOC), ils nous expliquaient que la lecture
    des feuilles d’impots et autres facture par certains agriculteurs provoquaient une violence individuelle chez certains face à la mévente de leur récolte. Cette violence pouvait se traduire par le
    plasticage des poteaux électriques ou téléphoniques. Un bien public utile à tous y compris ses compagnons de lutte.
    Le rôle du MIVOC était de canaliser cette colère individuelle en action revendicative et collective.
    Un petit rappel, la manifestation de Montredon et la mort de ce lieutenant des forces de l’ordre.

    Que nous montre ces 2 faits?

    1° Que l’état et l’autorité parentale sont bien présentes? Que la “répression” est exercée par l’autorité parentale, que l’état n’a pas été réprécif.
    2° Que les organisations syndicales jouaient leurs rôles de collectif et d’utilité publique.

    Où en sommes-nous?
    L’état, en tant qu’appareil “gestionnaire” de la NATION, n’est plus
    au service du + grand nombre mais de “l’économique” voir du “financier”. Que les lois ne sont répressives que dans un sens.
    Notre jeunesse, l’avenir d’une Nation, “nage” ou essaie de maintenir sa tête hors de cette eau trouble.

    Une NATION qui a peur, qui condamne sa jeunesse est une NATION qui se condamne elle-même!

    • Descartes dit :

      D’abord, la jeunesse actuelle est-elle différente de la notre? Avoue que nous n’étions pas des…anges!

      Nous n’étions pas des anges, ça non! Mais il y a tout de même beaucoup de différences. On faisat bien entendu des “bêtises”, mais on avait une idée de la hiérarchie des choses. Oui, on visait
      avec une fronde un isolateur électrique, mais cela ne nous serait pas venu à l’idée de viser avec une arme un commerçant ou un professeur. Nous savions qu’il y avait des choses qu’on pouvait
      faire (même si on était conscients que c’était mal…) et des choses qui étaient du domaine de l’impensable.

      Tu vois les dégâts produits jusqu’au jour où les gendarmes sont venus frapper à la porte de nos parents. La suite tu peux l’imaginer, punitions…ect…

      Oui, et après, on le faisait plus. Et on n’était pas convaincu que les gendarmes nous “persecutaient” ou nous “discriminaient”. Nous assumions nos actes, et nous acceptions les punitions parce
      qu’au fonds nous avions la même échelle de valeurs que les gendarmes et que nos parents: nous savions que nous avions mal agi, et nous trouvions normal que celui qui a mal agi soit puni. On
      savait que nos actes avaient des conséquences, et on les assumait. La grande différence, justement, est celle-là: la jeunesse aujourd’hui baigne dans le discours de l’irresponsabilité et du
      victimisme. On n’est jamais conduit à assumer les conséquences de ses actes, parce que c’est toujours la faute à quelqu’un d’autre.

      Que nous montre ces 2 faits? 1° Que l’état et l’autorité parentale sont bien présentes? Que la “répression” est exercée par l’autorité parentale, que l’état n’a pas été réprécif.

      J’irai plus loin: je pense qu’il y avait un consensus général sur la repression et son but: le gendarme, le parent, et nous mêmes enfants nous partagions en fait une vue du monde dans laquelle il
      y avait des choses “bien” et d’autres “mal”, et un système qui récompensait ceux qui faisaient les premières et punissaient les secondes. Cela ne veut pas dire que nous ne faisions jamais rien de
      mal. Mais lorsqu’on le faisait, on savait ce qu’on faisait et on acceptait par avance les conséquences. Il faut aujourd’hui relire le livre de Pergaud “la guerre des boutons”. C’est un témoignage
      qui montre combien l’enfance était courte en ce temps là et combien les enfaints intégraient rapidement des valeurs adultes. Aujourd’hui, nous sommes dans la logique inverse: on vit dans une
      société ou les valeurs adultes ont été chassées et où l’on pousse les gens à rester infantiles le plus longtemps possible.

      L’état, en tant qu’appareil “gestionnaire” de la NATION, n’est plus au service du + grand nombre mais de “l’économique” voir du “financier”. Que les lois ne sont répressives que dans un
      sens.

      Ca a presque toujours été le cas: pense à la France du début du siècle où à celle de l’entre-deux-guerres. Les “trente glorieuses” ont été l’exception, et non pas la règle.

      Notre jeunesse, l’avenir d’une Nation, “nage” ou essaie de maintenir sa tête hors de cette eau trouble. Une NATION qui a peur, qui condamne sa jeunesse est une NATION qui se condamne
      elle-même!

      Il ne s’agit pas de “condamner la jeunesse”. D’autant plus que la jeunesse actuelle est en grande partie le produit des idées “libérales-libertaires” de la génération qui l’a précédée. La
      responsabilité est une responsabilité collective, elle n’est pas dans telle ou telle génération. Notre responsabilité d’adultes est de remettre en route les mécanismes de transmission, pour
      permettre aux jeunes de bénéficier de l’expérience et du savoir accumulés par les générations précédentes. C’est à nous de combattre ce “jeunisme” démagogique qui prive en fin de compte la
      jeunesse de tout répère.

       

  3. Marcailloux dit :

    Bonjour,
    Vos deux derniers billets pourraient finalement n’en faire qu’un. Nous sommes dans la même problématique.Partageant l’essentiel de votre approche, je suis néanmoins tenté de la relativiser par le
    “chiffrage”.
    Ceux que vous évoquez représentent combien en pourcentage dans la population des jeunes de 12 à 20 ans ? Sans doute pas beaucoup plus que 2à3%.
    Et lorsque l’on parle des “jeunes” dans la presse écrite ou radio-télé, c’est à 9 fois sur 10 pour dénoncer des vandalismes ou magnifier des situations oniriques.Jamais ou presque de la majorité
    qui étudie, fait du sport, milite,oeuvre dans des asso., travaille dur toute la semaine….., en un mot, ne fait pas parler d’elle.
    Nos attitudes collectives sont par trop réactives et pas assez actives en ce sens que nous sommes plus prompts à dénoncer qu’à énoncer les exemples et initiatives constructives.Observons la teneur
    des commentaires dans le domaine qui nous réunit souvent, le blog de JLM. Le plus grand nombre, et de loin, constitue une dénonciation ou quelque chose qui y ressemble.JLM, lui même, la pratique
    avec la vigueur qu’on lui connait.Que nenni de propositions concrètes et utiles pour une évolution !
    Les turpitudes d’autrui ne font pas un programme constructif.
    Et puis ne faut il pas admettre que ce que nous vivons est peut être la forme inéluctable de la marche du temps et que c’est à nous adultes de trouver des méthodes pour préserver l’essentiel qu’est
    le progrès social.
    Nous, gens de “gauche” conservons des grilles de lecture de notre société qui me paraissent obsolètes, notamment dans l’acceptation systématique d’une forme d’oisiveté et de paresse
    généralisée(physique comme intellectuelle). Mais dès que l’on aborde ce genre de sujet, on se fait immédiatement traiter de facho.
    Je rêve quelquefois, d’une France dans laquelle le droit d’y vivre en qualité de citoyen serait lié à une obligation d’utilité au service de tous, d’une liaison inséparable droits-devoirs. Il m’est
    difficile de condenser cette aspiration en quelques lignes.La justice pour le plus grand nombre passe par une contrainte forte sur toutes les minorités déviantes des règles de vie en société, que
    ce soit au niveau des élites ou celle des banlieues.
    Vous écrivez:”Cet aboutissement est une terrifiante crise de la transmission” Fort bien, mais c’est, comme au rugby, celui qui est à l’origine de la passe qui commet l’en avant, et c’est nous les
    ainés qui par manque de lucidité ou par avidité déléguée poussons le destinataire de la passe à bruler une étape.
    A méditer !

    • Descartes dit :

      Vos deux derniers billets pourraient finalement n’en faire qu’un. Nous sommes dans la même problématique.

      Oui, jusqu’à un certain point. La crise de la transmission et la priorité à la jouissance immédiate sont deux phénomènes qui traduisent notre rapport au temps (celui qui passe, pas celui qu’il
      fait).

      Ceux que vous évoquez représentent combien en pourcentage dans la population des jeunes de 12 à 20 ans ? Sans doute pas beaucoup plus que 2à3%.

      Peut-être, je ne sais pas. Vous avez raison de rappeler qu’il faut toujours regarder les chiffres pour avoir une idée de la représentativité des exemples. Cependant, même si j’ai pris pour
      exemple des cas limites qui représentent un pourcentage négligéable, je pense qu’on trouve ce tropisme vers l’instant à des degrés divers dans l’ensemble de la jeunesse. Bien entendu, une
      majorité de jeunes “étudie, fait du sport, milite ou travaille dur”. Mais même chez ces jeunes qui ont des vies qu’on peut appeler “normales”, je sens un rapport au temps qui a de quoi inquiéter.

      Les turpitudes d’autrui ne font pas un programme constructif.

      Sans aucun doute. Je pense que nous sommes d’accord sur la nécessité d’élaborer un projet qui soit en même temps ambitieux et réaliste.

      Nous, gens de “gauche” conservons des grilles de lecture de notre société qui me paraissent obsolètes, notamment dans l’acceptation systématique d’une forme d’oisiveté et de paresse
      généralisée(physique comme intellectuelle) (…) La justice pour le plus grand nombre passe par une contrainte forte sur toutes les minorités déviantes des règles de vie en société, que ce soit
      au niveau des élites ou celle des banlieues.

      Oui! 100% d’accord. C’est pourquoi je refuse de me qualifier “de gauche”. J’ai cessé de l’être du jour ou j’ai ressenti comme une baffe l’abandon par la gauche de toute posture exigeante pour
      plonger dans la facilité et dans le victimisme.

      c’est nous les ainés qui par manque de lucidité ou par avidité déléguée poussons le destinataire de la passe à bruler une étape.

      Tout à fait. Mon commentaire n’avait pas pour but de stigmatiser la jeunesse. Au contraire: c’est la génération qui avait vingt ans en 1968 qui porte la plus lourde responsabilité. Plus par
      inconscience que par méchanceté: en prenant le pouvoir au nom d’un discours “jeuniste”, elle a scié la branche sur laquelle elle était assise. Ou plus précisement, elle a scié la branche sur
      laquelle elle aurait dû s’asseoir plus tard, lorsque le passage des ans ont ridé son visage…

       

       

  4. dudu87 dit :

    Bonjour Marcailloux,

    “Les turpitudes d’autrui ne font pas un programme constructif.”
    Chez JLM, j’ai essayé d’aller vers le constructif (3ans de présence) mais ça n’intéresse peu de monde. D’ailleurs, de nombreux participants sont partis. Le débat “droite-gauche” et je rejoins
    Descartes, est véritablement stérile. Non pas que la “lutte de classe” ou que Marx soit dépassé, entendons- nous bien! Il est impossible de gouverner la France avec seulement 50,01% des votants
    surtout avec un programme disons,…progressif.

    Mais revenons au “papier” de Descartes.
    Peut-être que le % de délinquance de notre jeunesse n’est pas important mais notre société veut du “parfait” avec un temps court.
    N’est-ce pas la “culture de nos entreprises”?
    Je suppose que vous êtes “pères et…grand-pères de famille”, regardez vos enfants et petits enfants vivre! Ils sont toujours pressés…le temps, c’est de l’argent, quelle connerie!!!

    Autre problème, l’urbanisme! Va t-on continuer à concentrer des millions de populations dans des mégapoles comme Paris? Quelle gabegie! Financièrement, c’est un véritable trou sans fond et nous
    pouvons y mettre toutes les sommes que nous voulons, au détriment d’autres régions, nous n’arriverons jamais à une qualité de vie.
    L’être humain n’est pas fait pour être “concentré”.

    • Descartes dit :

      Autre problème, l’urbanisme! Va t-on continuer à concentrer des millions de populations dans des mégapoles comme Paris? Quelle gabegie! Financièrement, c’est un véritable trou sans fond et
      nous pouvons y mettre toutes les sommes que nous voulons, au détriment d’autres régions, nous n’arriverons jamais à une qualité de vie.

      Ca c’est ton avis. Mais d’autres te diront exactement le contraire. Personnellement, je trouve la “qualité de vie” bien plus grande à Paris ou dans les grandes villes que dans les villes moyennes
      où à la campagne. C’es parce qu’il y a “des millions de populations” qu’on a à Paris la Bibliothèque Nationale, les grands musées, les cinémas, les théatres… sans une masse critique suffisante,
      on n’aurait jamais ce foyer de vie intellectuelle.

      L’être humain n’est pas fait pour être “concentré”.

      L’être humain est “fait” pour telle ou telle chose, maintenant ? Ca, c’est la meilleure… En quoi l’être humain serait “fait” pour vivre à la campagne plutôt que dans une mégalopole ?

  5. Je ne voudrais point faire prendre au débat un virage que d’aucun qualifierait de “nauséeux”, mais tout de même.

    Ne soyons pas hypocrites: ces “jeunes” sont très souvent issus de l’immigration maghrébine et subsaharienne. Pour ma part, et je puis me tromper, je crois que nous assistons à la construction d’une
    identité “immigrée” fondée pour une part sur le rejet de la France, et sur la haine des Français (et je dis bien “haine”). Il y a dans cette identité un mélange, un cocktail détonant de références
    nationales (ah! le cher pays d’origine…), historiques (le souvenir de la colonisation), religieuses (avec l’islam, ça fait peur aux natifs…). Ainsi peut s’expliquer l’attaque des symboles de la
    collectivité, même les poubelles, la voirie étant du ressort des communes… or la commune est la plus petite unité où s’exerce la démocratie. De plus, comment expliquer que les pics de violence
    soient atteints à la Saint-Sylvestre et au 14 juillet? N’est-ce pas la volonté manifeste de “pourrir” des dates chères au coeur de nombreux Français?
    Cela n’invalide pas l’analyse de Descartes, mais apporte d’autres explications.

    Je ne prétends pas connaître toute la France, mais je puis témoigner d’un fait: j’ai travaillé dans des zones rurales défavorisées où la misère est réelle… Et la ville et ses maigres perspectives
    (que les “jeunes” de banlieue ont) sont bien loin. Là-bas, dans ces campagnes, tout n’est pas rose: la violence et la délinquance existent. Pourtant, on n’assiste jamais à des destructions
    comparables de la part des habitants. Et cependant, l’argent investi pour ces populations (notamment dans les établissements scolaires) est sans commune mesure avec les sommes parfois astronomiques
    qui sont déversées dans certains quartiers sensibles. Les jeunes ont aussi des poubelles à brûler à la campagne, et ils auraient parfois des raisons de les brûler tant la République les laisse de
    côté, alors qu’elle se préoccupe de contenir et de calmer les “jeunes” du 9-3 ou d’ailleurs, parce que ceux-là font peur, ceux-là ont un poids médiatique.

    • Descartes dit :

      Je ne voudrais point faire prendre au débat un virage que d’aucun qualifierait de “nauséeux”, mais tout de même. Ne soyons pas hypocrites: ces “jeunes” sont très souvent issus de
      l’immigration maghrébine et subsaharienne.

      Ce n’est pas étonnant. C’est peut-être pour ce groupe de jeunes que les mécanismes de transmission sont les plus dégradés. Il y a une rupture radicale entre leur expérience et  l’expérience
      de leurs aînés, dont les références sont acquises dans une culture et un contexte totalement différent. Et les institutions du pays d’accueil, qui avaient assuré la “francisation” des générations
      précédentes d’immigrants sont aujourd’hui trop dégradées pour assumer cette fonction de transmission.

      Pour ma part, et je puis me tromper, je crois que nous assistons à la construction d’une identité “immigrée” fondée pour une part sur le rejet de la France, et sur la haine des Français (et
      je dis bien “haine”).

      Malheureusement, cette vision n’est pas confinée aux immigrés. Le “rejet de la France” et la “haine des Français”, tu peux la trouver dans une bonne proportion des tribunes, articles et discours
      de toute une frange de la “gauche intellectuelle” qui a repris tous les thèmes de la “haine de soi” qui caractérisait la France des années 1930. Entre les “déclinistes” qui ne perdent pas une
      occasion de condamner tout ce qui fait la spécificité française, les atlantistes qui nous appellent à enterrer De Gaulle au plus vite, les fédéralistes européens qui nous expliquent combien
      nation=égoisme et les gauchistes de tout poil qui dénoncent “la France moisie”, il n’y a que l’embarras du choix.

      Les immigrés ne demandent souvent qu’à s’assimiler. Mais il devient difficile d’aimer et d’adopter une patrie qui ne s’aime pas elle même. Je trouve donc injuste de parler d’une “identité
      immigrée fondée sur le rejet de la France”. Je préfère parler d’une “identité fondée sur le rejet de la France”. Parce que ce phénomène touche peu ou prou une portion non négligéable de la
      population, dont les immigrés ne sont qu’une partie.

      Ainsi peut s’expliquer l’attaque des symboles de la collectivité, même les poubelles, la voirie étant du ressort des communes… or la commune est la plus petite unité où s’exerce la
      démocratie. De plus, comment expliquer que les pics de violence soient atteints à la Saint-Sylvestre et au 14 juillet?

      Justement, je ne pense pas que ces attaques soient “symboliques”. Je l’ai expliqué dans mon papier. Supposer qu’il s’agit d’attaquer des “symboles” suppose une capacité de se projeter dans le
      futur, de prendre en considération l’acte et ses conséquences. Or, justement ce qui caractérise le fonctionnement de ces personnes est l’incapacité de projeter leurs actes dans le futur. Le fait
      que les pics de violence soient atteints à la Saint-Sylvestre et au 14 juillet, loin d’être une référence symbolique, ramène au caractère ludique des destructions.

      j’ai travaillé dans des zones rurales défavorisées où la misère est réelle… Et la ville et ses maigres perspectives (que les “jeunes” de banlieue ont) sont bien loin. Là-bas, dans ces
      campagnes, tout n’est pas rose: la violence et la délinquance existent. Pourtant, on n’assiste jamais à des destructions comparables de la part des habitants.

      Là, on est tout à fait d’accord. Le vandalisme, la violence gratuite ne sont pas véritablement liées à la misère où à la discrimination. Il y a des populations qui ont été persécutées pendant des
      siècles et qui pourtant ont des niveaux de violence et de vandalisme très faibles (les juifs sont peut-être les meilleurs exemples). Je persiste à croire que ce sont les mécanismes de
      transmission – et leur conséquence, qui est la capacité à se projeter dans le temps – qui sont la clé de la “civilisation” d’une population.

  6. Nous sommes d’accord sur certains points, mon cher Descartes.

    Le rejet et le mépris de la France sont bien théorisés par tout un pan de la gauche, modérée ou radicale d’ailleurs. Mais aussi par une partie de la droite. Lorsque quelqu’un comme de Villiers
    réclame repentance pour le “génocide vendéen”, il ne fait pas autre chose. Et donne l’exemple d’une posture victimaire. Je te rejoins sur ce que tu dis pour les déclinistes et les atlantistes.

    Toutefois, ce rejet et ce mépris de la France rencontrent un écho particulier dans une partie de la population immigrée. Si ces immigrés et Français issus de l’immigration peuvent se sentir
    encouragés par une partie de la gauche qui les couve du regard avec une étonnante bienveillance, il n’empêche que leurs motivations ne sont pas tout à fait les mêmes. Les intellos de gauche sont
    dans une posture masochiste de “haine de soi”, comme tu le dis. Une partie des immigrés au contraire sont bien dans la “haine de l’autre”, nuance. Certains refusent de se dire français. Et les
    références (souvent confuses) du pays d’origine, de la religion, voire de l’origine ethnique sont bien présentes. Je te conseille de faire un tour sur le site des Indigènes de la République qui
    poussent cette idéologie à l’extrême, tu comprendras de quoi je parle. Il est vrai qu’il y a des ponts avec la gauche, et je dois le dire, avec des universitaires de gauche, notamment en histoire
    où tout un courant entend “déconstruire” totalement l’histoire nationale, parce que ça “ne sentirait pas bon” le passé de notre pays. Donc nous avons affaire à deux mouvements différents qui
    communient dans le rejet de la France.

    Enfin, je ne suis pas tout à fait d’accord avec toi quand tu dis que ces “jeunes” n’ont pas conscience de s’en prendre à des symboles. Peux-tu me dire pourquoi ils brûlent très rarement une mosquée
    ou une salle de prière? A contrario pourquoi les églises sont la cible d’agression?
    Pour ma part, je distinguerais les destructions gratuites (poubelles, voitures, échoppes…) des destructions ciblées et symboliques (commissariat, mairie, maison de quartier, établissement
    scolaire…). Je ne suis pas sûr qu’elles relèvent de la même logique. Il y a je crois la conscience claire de défier les autorités. Bien que je sois d’accord avec toi sur le fait que ces “jeunes”
    ne se projettent guère dans l’avenir, je pense en revanche qu’ils ont beaucoup plus conscience que tu ne le crois de la symbolique de certains de leurs actes.

    • Descartes dit :

      Si ces immigrés et Français issus de l’immigration peuvent se sentir encouragés par une partie de la gauche qui les couve du regard avec une étonnante bienveillance, il n’empêche que leurs
      motivations ne sont pas tout à fait les mêmes. Les intellos de gauche sont dans une posture masochiste de “haine de soi”, comme tu le dis. Une partie des immigrés au contraire sont bien dans la
      “haine de l’autre”, nuance.

      Je ne le crois pas. Les “immigrés” dont on parle sont en grande partie français. Et non seulement par leur passeport: ils sont, que cela leur plaise ou pas, de culture française. Lorsqu’ils
      proclament une détestation de la France, ils proclament une détestation d’eux mêmes. Leur identification à un pays d’origine largement mitifié joue exactement le même rôle que l’identification à
      une Europe-nation inexistante où à un statut de “citoyen du monde” joue chez les intellos de gauche (ou de droite). Dans tous ces comportements, on retrouve la même structure: celle de la “haine
      de soi”.

      Certains refusent de se dire français.

      Oui. Mais cela rappelle la banderolle sous laquelle défilaient les adversaires de Darwin: “nous ne sommes pas des singes, et nous réfusons de descendre d’eux”. On peut “refuser” de se reconnaître
      tel qu’on est, les faits demeurent les faits.

      Et les références (souvent confuses) du pays d’origine, de la religion, voire de l’origine ethnique sont bien présentes. Je te conseille de faire un tour sur le site des Indigènes de la
      République qui poussent cette idéologie à l’extrême, tu comprendras de quoi je parle.

      Je connais cette mouvance, et je sais de quoi tu parles. Ce que je récuse, c’est la différence que tu fais entre la “haine de soi” de l’immigré et la “haine de soi” du gaulois. Je suis convaincu
      que c’est la même structure qui est derrière ces deux comportements. D’ailleurs, dans le mouvement des Indigènes de la République tu trouveras beaucoup de “français de souche”: ce ne sont pas les
      immigrés qui ont fait le succès des films de Bouchareb.

      Peux-tu me dire pourquoi ils brûlent très rarement une mosquée ou une salle de prière? A contrario pourquoi les églises sont la cible d’agression?

      Lors des évènements de 2005, aucune immeuble religieux n’a à ma connaissance été détruit. Et ce fait apporte de l’eau à mon moulin: la seule institution symbolique qui est transmise à cette
      jeunesse, c’est la religion (c’est à dire, la plus primitive et la plus ancienne). La jeunesse a parfaitement conscience que mettre le feu à un lieu de culte est un acte symbolique, qui n’est
      plus de l’ordre du ludique, et c’est pour cela qu’elle ne le fait pas. Par contre, une école ou une bibliothèque ont le même statuts symbolique qu’un centre commercial, un parking, un bus: on
      peut y mettre le feu sans que cela sorte du domaine du jeu. 

      Pour ma part, je distinguerais les destructions gratuites (poubelles, voitures, échoppes…) des destructions ciblées et symboliques (commissariat, mairie, maison de quartier, établissement
      scolaire…). Je ne suis pas sûr qu’elles relèvent de la même logique.

      Les destructions d’une maison de quartier ou d’un commissariat te paraissent symboliques à toi. Mais ce qu’il faut se demander est si les attaques contre les établissements
      scolaires ou les maisons de quartier soit “ciblées et symboliques” dans l’esprit de leurs auteurs. Je ne le crois pas, et pour une bonne raison: lorsque des commissariats de police sont attaqués,
      on trouve un discours qui justifie l’attaque en termes de symbolique. Je n’ai pas une seule fois entendu un discours justifiant l’incendie de l’école ou de la bibliothèque. Je pense qu’il faut
      bien faire la différence, en effet: d’un côté le “symbolique” (essentiellement les commissariats de police), d’un autre le ludique (tout le reste). Et c’est le ludique qui est largement dominant.

       

  7. Marcailloux dit :

    Votre conclusion sur le commentaire n°5 :
    “Il y a des populations qui ont été persécutées pendant des siècles ……(les juifs sont peut-être les meilleurs exemples). Je persiste à croire que ce sont les mécanismes de transmission …..qui
    sont la clé de la “civilisation” d’une population”.
    Tout à fait, néanmoins nous pourrions tenter de nous pencher sur les causes originelles de ce constat universel.
    N’étant pas historien ni spécialement passionné par cette discipline, je m’en tiendrai à un “ressenti”.
    L’histoire de notre pays depuis plus de 500 ans a probablement imprimé dans notre subconscient un sentiment de supériorité, une vocation de messianisme,la conviction d’un droit à la reconnaissance
    qui sont battus en brèches depuis peut être 1940.
    Au lieu de se poser la question: qui sommes nous réellement, et particulièrement par rapport à tous les autres peuples, nous nous sommes laissés câliner par tout ceux qui avaient un intérêt-
    électoral, financier, médiatique, etc…-à nous maintenir dans un état de torpeur confortable.
    Aujourd’hui, et même depuis qques années, le voile se déchire, nous arrivons aux limites de l’exercice.
    L’exemple du peuple juif est plus que le “meilleur exemple”, c’est l’exemple exemplaire si je peux me permettre cette tautologie.
    Voilà une population soumise depuis des millénaires à un impératif de survie. Elle s’est naturellement dotée-je dirais même selon une forme darwinienne-d'”outils” lui permettant de faire face à
    l’adversité.
    Que constatons nous en France ? Ils sont environ 1% de la population, et combien représentent ils de l’intelligentsia, des postes de pouvoir ou d’influence ? Probablement 10 ou 20 fois plus.Et ceci
    depuis des siècles.
    Analysez les biographies sur Wikipédia.
    Qu’avons nous comme alternative ?
    La position des antisémites qui voient là la source de tout nos maux, et c’est vrai qu’il y a des profiteurs abusifs et des crapules parmi les juifs, comme chez tout ceux qui détiennent la
    possibilité à un moment ou un autre de se “gaver”.
    Ou alors de nous poser la question : comment font ils pour réussir plus et mieux que les autres, en général.
    Ce qui est constaté chez les juifs l’est aussi chez de nombreux immigrés, notamment chez les jeunes maghrébines.
    Je vis actuellement au Maroc (5 à 6 mois par an)et j’ai l’occasion de mesurer ici l’espoir et l’ambition que suscite notre situation en France chez ces jeunes sans état d’âme.
    Nous avons d’eux, en France, une image d’indolence que je ne vérifie pas au Maroc, leur force est dans leur volonté et capacité à conquérir, à progresser. Les transmettons nous à nos enfants ?
    En revenant au débat sur les classes moyennes dont je ne sais toujours pas très bien ce que cela représente, je serais tenter de proposer une « fracture » qui passerait par cette capacité traduite
    dans les actes, à transmettre les « outils » du progrès.

    • Descartes dit :

      Voilà une population soumise depuis des millénaires à un impératif de survie. Elle s’est naturellement dotée-je dirais même selon une forme darwinienne-d'”outils” lui permettant de faire face
      à l’adversité.

      Oui. Mais quels sont ces “outils” ? C’est d’abord et avant tout une tradition qui repose sur deux piliers solides: la transmission et l’éducation. Peu de cultures a autant l’obsession du passé et
      de sa transmission. Il y a même une malédiction terrifiante prévue pour celui qui en la copiant modifiérait une seule lettre de la Torah… C’est ce rapport si particulier au temps et à
      l’histoire qui marque profondément la culture juive, et qui explique pourquoi elle a irrigué aussi fortement la culture occidentale alors même que les juifs étaient une minorité infime et
      persécutée.

      Il y a un deuxième élément qui éclaire le succès des juifs, malgré les persécutions et les discriminations, à s’intégrer aux sociétés d’accueil: c’est la tradition qui commande justement de
      s’assimiler à la culture d’accueil et de rompre avec la culture d’origine. Cette tradition figure aussi dans la Torah: c’est l’épisode de la femme de Lot, a qui Yahvé commande, lors de la fuite
      de Sodome, de partir “sans regarder en arrière” sous peine d’être transformé en statue de sel.

      En revenant au débat sur les classes moyennes dont je ne sais toujours pas très bien ce que cela représente, je serais tenter de proposer une « fracture » qui passerait par cette capacité
      traduite dans les actes, à transmettre les « outils » du progrès.

      Certainement pas. Toutes les classes cherchent à transmettre leur statut social.

  8. Marcailloux dit :

    “Toutes les classes cherchent à transmettre leur statut social” Objectif à minima….voire plus si opportunité.
    Et à condition que leur situation ou leur statut actuel les satisfasse.
    Je n’observe pas de gros efforts dans le “précariat” pour léguer à leurs enfants les délices de la galère qu’ils vivent.
    Je pencherais volontiers pour une tendance naturelle vers un accès à ce que l’on considère comme un mieux “vivant”, c’est à dire un confort matériel d’abord, synonyme de sécurité puis une
    reconnaissance sociale et enfin après satisfaction des deux précédents, d’un épanouissement plus intellectuel, d’une “réalisation” de soi.
    Il me semble par ailleurs que l’aspiration, pas toujours avouée des membres de la classe moyenne, c’est d’accéder à l’élite, celle considérée comme telle par les “gens”.
    Rien à redire sinon le hiatus entre l’envie et l’action à mener pour y arriver, c’est à dire la velléité induite, source de frustrations qui créent et entretiennent le malaise.
    @dudu87
    j’ai pour la première fois envisager d’adhérer au PG de mon département il y a quelques mois. Mais probablement plus “vieux singe” que vous, j’ai pris la peine de retourner mon bulletin d’adhésion
    7 fois avant de le remplir. En conclusion, j’ai ressenti, comme vous, une vanité sans beaucoup d’espoir à vouloir par ce biais participer et construire un avenir collectif en progression. Je
    cherche toujours une voie. JLM a été, est toujours une voix,mais pas encore pour moi une voie.
    Cordialement.

    • Descartes dit :

      Je n’observe pas de gros efforts dans le “précariat” pour léguer à leurs enfants les délices de la galère qu’ils vivent.

      Quand quelqu’un aura pris la peine de définir clairement ce qu’est le “précariat” et aura réussi à lui donner la structure d’une “classe”, on pourra peut-être en discuter. Pour le moment, je ne
      connais aucun développement théorique sérieux sur cette notion.

      Mais pour te répondre plus généralement, il n’est nullement besoin d’être “satisfait” de son statut social pour que la transmission s’opère. Autrement, il faudrait conclure que les gitans sont
      extrêmement satisfaits de leur sort… parce que c’est l’une des communautés qui transmet le plus rigoureusement son statut social de génération en génération. En fait, l’immense majorité des
      parents aimerait que leurs enfants leur ressemble. Et beaucoup de parents modestes craignent la promotion sociale de leur enfant, parce qu’ils y voient un risque d’abandon d’un ensemble de
      pratiques et de valeurs auxquels ils sont attachés.

       

       

       

  9. Ton interprétation de l’épisode biblique sur la femme de Loth me paraît très contestable: il s’agit de ne pas se retourner pour regarder Sodome, l’antre du mal. Cela n’a rien à voir avec la culture
    et le passé de son peuple (Loth est accueilli à Sodome, il n’est pas natif de la ville).

    Il n’y a aucun impératif d’intégration ou d’assimilation dans la Torah. La loi juive est justement là pour distinguer les juifs des autres. D’ailleurs la communauté juive s’est déchirée lorsqu’elle
    s’est trouvée confrontée à la culture hellénistique après la conquête d’Alexandre, une civilisation terriblement séduisante… Certains juifs ont cédé à l’attrait de l’hellénisme. Inutile de te
    préciser la réaction d’autres juifs plus “traditionalistes”.

    • Descartes dit :

      Ton interprétation de l’épisode biblique sur la femme de Loth me paraît très contestable: il s’agit de ne pas se retourner pour regarder Sodome, l’antre du mal.

      Elle est certainement discutable (comme toute interprétation biblique), mais c’est celle qui fait autorité parmi les interprètes de la Torah, et cela depuis au moins Maimonides. Tu noteras que
      l’interdiction prononcée par Yahvé n’est pas “ne regarde pas Sodome”, mais “ne regarde pas derrière toi” (Genèse, 19:17). Et la femme de Lot n’est pas trasformée en
      statue parce qu’elle a regardé Sodome, mais parce qu’elle “a regardé en arrière” (Genèse 19:26).

      Il n’y a aucun impératif d’intégration ou d’assimilation dans la Torah.

      Le contraire serait étonnant… à l’époque où la Torah a été écrite, la question de l’intégration ou de l’assimilation ne se posait même pas. Ce qui est intéressant pour notre débat, c’est de
      regarder l’interprétation qui en a été faite lorsque la question est devenue d’actualité. Et cette interprétation a été toujours dans le sens de l’obéissance à la loi et à la coûtume du pays
      d’accueil, de l’allégéance à ses autorités légitimes.

      D’ailleurs la communauté juive s’est déchirée lorsqu’elle s’est trouvée confrontée à la culture hellénistique après la conquête d’Alexandre, une civilisation terriblement séduisante…
      Certains juifs ont cédé à l’attrait de l’hellénisme. Inutile de te préciser la réaction d’autres juifs plus “traditionalistes”.

      Dans toutes les cultures il y a des intégristes. Mais que ce soit à la période hellenistique ou plus tard au moyen-âge et à la renaissance, les juifs se sont partout et dans leur très grande
      majorité assimilés aux pays d’accueil sauf là où les autorités politiques ou l’église ont pris des mesures pour l’empêcher. Le ralliement de la communauté juive à la République après que la
      révolution leur ait reconnu le statut de citoyens ne s’est jamais démentie, pour ne donner qu’un exemple.

  10. JMP dit :

    Bonjour
    Vous dites : » On m’expliquera que le chômage, que le racisme, que la discrimination, que l’horizon bouché, que gnagnagna… mais tout ça n’explique rien. «
    Je ne partage pas tout à fait votre avis ; que cela n’explique_ et surtout n’excuse_ pas tout, oui ; mais cela y participe.
    Une première remarque : j’ai il a quelques temps vu une émission sur Arte qui montrait des phénomènes semblables dans les banlieues ouvrières anglaises sinistrées ; on y voyait des ados filmés de
    nuit à la caméra infrarouge qui tendaient de véritables embuscades aux pompiers, attirés dans ces guet-apens par des incendies provoqués. la violence des agressions subies dénotait un véritable
    désir de blesser gravement, voire de tuer des pompiers. Ces adolescent étaient majoritairement des anglais de souche : comme quoi maghrébin, noir du sahel , anglo-saxon ou gaulois, les mêmes
    conditions créent les mêmes effets.

    La violence existe dans toutes les sociétés, a toutes les époques ; que je sache les apaches qui sévissaient en banlieue parisienne dans les années 1900 n’étaient pas de doux humanistes. Ce qui
    varie c’est son niveau et sa fréquence, et elle est toujours plus importante en temps de crise, de régression sociale et économique. La question que vous posez, c’est celle du pourquoi une violence
    aveugle, incohérente dans la mesure ou elle s’exerce sur des individus et des biens collectifs sans responsabilité par rapport aux frustrations subies par les responsables de ces violences ;

    Il me semble qu’il y a une réponse à cette interrogation, et qui n’est pas contenue dans un rapport au temps ; elle est vieille comme le monde et parfaitement exprimée dans le discours que fit
    Miguel De Unamuno , recteur de l’université de Salamanque en réponse aux insanités proférées par le général franquiste Millan Astray ( vive la mort., mort à l’intelligence….) il lui répond : « le
    général Astray est un infirme ( il était manchot) ce n’est pas discourtois , Cervantes l’était aussi .. Mais un infirme qui n’a pas la grandeur morale d’un Cervantes recherche habituellement des
    compensations dans les mutilations qu’il peut faire subir à son entourage …
    Il me semble que tout est dit : il existe toujours une proportion plus ou moins importante d’individus qui vivent leurs malheurs, leurs mal être, leurs échecs, leur misère sociale, affective, tout
    ce que vous voulez, comme une mutilation personnelle, sans être capable de penser leur situation dans une perspective plus large, disons politique. et c’est cette frange là, souvent issue du
    lumpenprolétariat , qui a fourni par exemple( je prend un cas extrême) la lie des armées depuis la nuit des temps ; elle fourni ces individus capables du mal pour le mal, prête a mutiler les autre
    au sens propre pour trouver les compensations dont parle Unamuno ; c’est de ce réflexe que participe l’agression de femmes médecins,les violences aux plus faibles, la destruction de bibliothèques,
    d’écoles etc ; autant d’actes incompréhensibles aux individus dotés d’un minimum de morale civique
    Si ces comportements sont plus fréquent à la St sylvestre , c’est parce qu’il est plus jouissif de gâcher une fête _ surtout collective , on emmerde plein de monde en même temps _ qu’une journée
    ordinaire.

    Bien entendu, j’y reviens, plus la situation sociale est difficile, plus ce genre de comportement est fréquent ; et vous avez raison de souligner le caractère dévastateur du jeunisme pédagogique
    ambiant : flatter le désir du tout tout de suite au moment ou il devient de plus en plus difficile d’obtenir peu et pas immédiatement loin de là, ne peut qu’aggraver le phénomène

    Reste que le passage à l’acte de ceux dont nous parlons me parait procéder plus d’un rapport à l’impunité que d’un rapport au temps ; d’une part, l’urbanisation déshumanisée telle qu’elle existe en
    banlieue favorise l’anonymat ; la raréfaction des acteurs sociaux, la suppression de la police de proximité favorise l’impunité ; et analyse que je partage, la destruction de l’autorité à l’école
    contribue chez ces jeunes à la négation de l’idée même de sanction en cas de comportement déviant .
    De ce point de vue, la trahison des élites est sans doute la plus grave que nous ayons subie

    Avec mes remerciements pour votre animation de ce blog

    • Descartes dit :

      Je ne partage pas tout à fait votre avis ; que cela n’explique_ et surtout n’excuse_ pas tout, oui ; mais cela y participe.

      Je n’en suis pas convaincu. Comme je l’ai expliqué par ailleurs, il y a des groupes qui ont été infiniment plus discriminés et persécutés (le cas historique des juifs en Europe est un bon
      exemple) et qui pourtant n’ont jamais eu recours à la violence aveugle.

      Ces adolescent étaient majoritairement des anglais de souche : comme quoi maghrébin, noir du sahel, anglo-saxon ou gaulois, les mêmes conditions créent les mêmes effets.

      Mais quelles “conditions” ? S’il s’agissait d’anglais “de souche”, alors on ne peut pas dire que la violence gratuite soit la conséquence des discriminations raciales ou de la xénophobie. Alors
      ce serait quoi, l’élément causal ? La misère ? Cependant, il y a des exemples de situations où la misère était bien plus extrême sans que pour autant on voit se déclencher une violence gratuite
      (par exemple, les banlieues ouvrières dans les années 1930).

      La violence existe dans toutes les sociétés, a toutes les époques

      Oui. Mais mon commentaire faisait référence à la violence gratuite et au vandalisme. Et ça, ça n’a pas existé partout et dans toutes les époques à une telle échelle.

      Il me semble que tout est dit : il existe toujours une proportion plus ou moins importante d’individus qui vivent leurs malheurs, leurs mal être, leurs échecs, leur misère sociale, affective,
      tout ce que vous voulez, comme une mutilation personnelle, sans être capable de penser leur situation dans une perspective plus large, disons politique.

      Je me méfie des explications psychologisantes. D’abord, il faudrait m’expliquer pourquoi cette proportion de la population devrait aujourd’hui être plus grande qu’elle ne l’était hier. Mais
      surtout, il faudrait m’expliquer comment on arrive à des comportements totalement disproportionnés en terme de coût/avantage. Car ce qu’on constate va bien plus loin que l’incapacité de se placer
      dans une perspective politique, c’est une incapacité même à se placer dans la perspective d’un intérêt purement individuel à moyen terme. De la mon idée qu’il s’agit d’une question de rapport au
      temps, et plus précisement, d’une incapacité à voir tout ce qui n’est pas immédiat.

      Reste que le passage à l’acte de ceux dont nous parlons me parait procéder plus d’un rapport à l’impunité que d’un rapport au temps ;

      C’est une explication séduisante. Mais je suis frappé par la réaction des individus lorsqu’ils sont pris par la police: ils semblent incapables de réaliser les conséquences de leurs actes et
      d’établir une hiérarchie. Quand un adolescent se justifie d’avoir tué un camarade d’un coup de couteau “parce qu’il m’a regardé de travers”, il y a une évidente incapacité à établir une liaison
      entre l’acte et ses conséquences, qui n’a rien à voir avec une “impunité”.

      Avec mes remerciements pour votre animation de ce blog

      Et les miennes pour votre participation !

  11. JMP dit :

    “Comme je l’ai expliqué par ailleurs, il y a des groupes qui ont été infiniment plus discriminés et persécutés (le cas historique des juifs en Europe est un bon exemple) et qui pourtant n’ont
    jamais eu recours à la violence aveugle”.
    Oui, mais ceux là n’aurai jamais pu se là permettre ; ils subissaient déjà les pogroms, le bûcher ou l’exil en étant innocents, alors en étant coupable…
    “Cependant, il y a des exemples de situations où la misère était bien plus extrême sans que pour autant on voit se déclencher une violence gratuite (par exemple, les banlieues ouvrières dans les
    années 1930).”
    Dans ces années là, ceux qui auraient été tenté d’y recourir se seraient fait démolir par les ouvriers ; aujourd’hui,si un habitant d’une citée met une branlée à un petit voyou surpris en train de
    dégrader ou d’agresser une vieille primo il sera convoqué par la justice, et secundo
    Il prendra_ lui et sa famille_ toute la bande sur le dos ; et les flics seront loin
    “mon commentaire faisait référence à la violence gratuite et au vandalisme. Et ça, ça n’a pas existé partout et dans toutes les époques à une telle échelle.”
    Si , mais dans un cadre précis :la guerre ; c’est pour cela que je faisait référence à la lie des armées : les grandes compagnies du moyen âge , les dragonnades de Louvois , la liste est longue ,
    qui voit des individus rajouter gratuitement de l’horreur a la brutalité de la guerre ; mais en temps de paix, c’était réprimé, et durement
    “Mais surtout, il faudrait m’expliquer comment on arrive à des comportements totalement disproportionnés en terme de coût/avantage. Car ce qu’on constate va bien plus loin que l’incapacité de se
    placer dans une perspective politique, c’est une incapacité même à se placer dans la perspective d’un intérêt purement individuel à moyen terme. De la mon idée qu’il s’agit d’une question de
    rapport au temps, et plus précisément, d’une incapacité à voir tout ce qui n’est pas immédiat…… Quand un adolescent se justifie d’avoir tué un camarade d’un coup de couteau “parce qu’il m’a
    regardé de travers”, il y a une évidente incapacité à établir une liaison entre l’acte et ses conséquences, qui n’a rien à voir avec une “impunité”.”

    Il y a à mon sens surtout une incapacité totale a admettre l’autre en tant qu’être humain : il n’est perçu que comme élément du décor, et éventuellement comme défouloir a ses frustrations ; et
    cette incapacité là est plus répandue qu’on ne croit, mais elle est masquée en général par la peur de la sanction. Si le sentiment d’impunité est présent, les vannes s’ouvrent ; c’est pour cela,
    j’y reviens , que l’on découvre a l’occasion des guerres des comportements que l’on aurait pas soupçonnés de la part des mêmes individus dans le civil

    • Descartes dit :

      Oui, mais ceux là n’aurai jamais pu se là permettre ; ils subissaient déjà les pogroms, le bûcher ou l’exil en étant innocents, alors en étant coupable…

      Justement, le fait d’être persécuté qu’on soit innocent ou coupable n’encourage pas à l’innocence. Et pourtant, la violence dans les communautés juives a toujours été très faible, même aux pires
      moments de persécution. C’est un contre-exemple intéressant, à mon avis.

      mais en temps de paix, c’était réprimé, et durement

      Oui. La différence est à mon sens là: on admettait que la repression était une fonction fondamentale de la société, et cette idée faisat consensus dans toutes les couches de la société. Le fait
      que chaque génération avait une expérience de la guerre faisait que chacun avait conscience que la paix et l’ordre (même injuste) sont des valeurs en soi et que rien n’est pire que le chaos.
      C’est cette expérience qui a manqué à la génération de 1968 et à celles qui l’ont suivie. D’où un renversement total des perspectives: l’insolence, le désordre, l’indiscipline ont été promues au
      rang de valeurs positives. C’est de ce renversement que nous revenons aujourd’hui.

      Il y a à mon sens surtout une incapacité totale a admettre l’autre en tant qu’être humain

      C’est aussi vrai. Mais les comportements que je décris ne concernent pas que les personnes: ils concernent aussi les choses et les symboles.

  12. JMP dit :

    « la violence dans les communautés juives a toujours été très faible, même aux pires moments de persécution. C’est un contre-exemple intéressant, à mon avis. »

    La violence était très faible dans les communautés juives dans un contexte historique précis : celui d’une minorité servant de défouloir a une majorité et un pouvoir ; elle ne pouvais pas se
    permettre des écarts de violence sous peine d’être exterminée ; l’état d’Israel aujourd’hui pratique une violence colonialiste contre les palestiniens , ce qui prouve tout simplement une chose :
    que les juifs, dans un contexte identique aux autres peuples ,ne sont ni meilleurs ni pires .

    « Mais les comportements que je décris ne concernent pas que les personnes: ils concernent aussi les choses et les symboles. »

    notre discussion porte sur les actes d’une minorité _ malgré tout_ de jeunes de banlieue ; les actes auxquels nous faisons référence sont choquants ; vous les attribuez à un rapport au temps.
    Je persiste a penser qu’ils sont la conséquence d’un rapport à l’impunité et a une négation de l’autre ; sont-ils fondamentalement différents des actes d’une autre minorité , qui elle aussi
    s’attaque aux personnes , aux choses et aux symboles: les dirigeants de la société actuelle ? Quand Servier ou Monsanto vendent des poisons en toute connaissance de cause pour faire du fric, quand
    des spéculateurs condamnent des millions de gens a la famine en jouant sur le cours des produits agricoles , quand des dirigeants d’entreprise provoquent des vagues de suicides par un management
    inhumain ,est ce parce qu’il n’ont pas de rapport au temps ? çà m’étonnerai : il sont comme les voyous de base, ils n’ont aucune valeurs d’humanité et de solidarité, et ils le font parce qu’il sont
    en situation d’impunité . De ce point de vue, la seule différence, c’est que comme ils sont beaucoup plus intelligents et puissants, cette impunité ils l’organisent politiquement, en orientant les
    lois par le lobying par exemple ; dans la mesure ou le choix politique est entre Sarko et DSK, quel risque de sanctions ? alors, pourquoi se gêner ?

    • Descartes dit :

      La violence était très faible dans les communautés juives dans un contexte historique précis : celui d’une minorité servant de défouloir a une majorité et un pouvoir

      Non. La violence était très faible dans un grand nombre de contextes différents sur quatre ou cinq siècles. Et il y a d’autres communautés “servant de défouloir à une majorité et un pouvoir” ou
      les niveaux de violence étaient infiniment plus élévés (les noirs au sud des Etats-Unis, pour ne donner qu’un exemple). Encore une fois, la violence sociale – et surtout la violence gratuite, qui
      était le sujet du débat – ne semble pas corrélée à la situation de persécution ni même à la pauvrété, mais plutôt à des paramètres culturels.  

      (…) vous les attribuez à un rapport au temps. Je persiste a penser qu’ils sont la conséquence d’un rapport à l’impunité et a une négation de l’autre

      Je vous ai déjà montré que ce n’est pas le cas: si c’était une question d’impunité, alors les personnes arrêtées pour ces faits n’auraient aucune difficulté à comprendre la gravité de leurs actes
      et de leurs conséquences. Quant à la négation de l’autre, elle n’explique pas le pourquoi des actes de vandalisme contre des biens dont le vandale est lui même l’usager…

      Quand Servier ou Monsanto vendent des poisons en toute connaissance de cause pour faire du fric, quand des spéculateurs condamnent des millions de gens a la famine en jouant sur le cours des
      produits agricoles , quand des dirigeants d’entreprise provoquent des vagues de suicides par un management inhumain ,est ce parce qu’il n’ont pas de rapport au temps ?

      Certainement pas: aucun de ces actes n’est gratuit. Tous ces forfaits sont commis dans l’espoir d’un gain, et à l’issue d’un calcul risque/avantage qui est souvent fort
      raisonnable. La différence avec la violence des jeunes est que celle-ci est gratuite, ou répond à un calcul risque/avantage délirant.

       

  13. Marcailloux dit :

    Tout d’abord très intéressant échange avec JMP
    Vous écrivez:
    “Justement, le fait d’être persécuté qu’on soit innocent ou coupable n’encourage pas à l’innocence. Et pourtant, la violence dans les communautés juives a toujours été très faible, même aux pires
    moments de persécution. C’est un contre-exemple intéressant, à mon avis.”
    En effet c’est un contre exemple, mais ne faut-il pas voir dans celui ci, la conséquence de l’image qu’ont, et/ou se donnent, les juifs d’être un peuple supérieur, notamment dans les domaines
    spirituels et intellectuels. Leur supériorité étant “reconnue” et cependant souvent combattue,leur besoin de “reconnaissance” est satisfait et n’a pas à utiliser le “vedettariat” médiatique que
    confère la violence urbaine, encore plus maintenant qu’autrefois. Cela ne les empêche pas d’exercer eux aussi, dans le cadre de l’État d’Israël, les violences que l’on sait.

    • Descartes dit :

      En effet c’est un contre exemple, mais ne faut-il pas voir dans celui ci, la conséquence de l’image qu’ont, et/ou se donnent, les juifs d’être un peuple supérieur, notamment dans les domaines
      spirituels et intellectuels.

      Mon point est qu’il s’agit d’un peuple historiquement persécuté et discriminé, et qui cependant a toujours eu un niveau de violence très bas dans tous les pays où il s’est installé en tant
      qu’immigrant. Ce qui prouve, s’il en était besoin, que le lien entre “discrimination” et “violence” n’est pas aussi automatique que certains voudraient nous faire croire.

      Pour moi, l’explication de ce phénomène n’est pas dans une quelconque “supériorité” ethnique, mais dans une culture qui met historiquement la transmission et le respect de la Loi au centre de la
      vie collective.

  14. cécilum dit :

    Bonjour Descartes,
    De la transmission dont il est question plus haut, j’en viens à l’enseignement, et je voudrais vous demander ce que vous pensez du diagnostic de Nicolas Dupont Aignan sur l’état de l’école actuelle
    et ses propositions pour l’améliorer.
    http://www.valeursactuelles.com/parlons-vrai/parlons-vrai/pour-sauver-l%E2%80%99%C3%A9cole20110203.html
    En vous remerciant.

    • Descartes dit :

      Je pense que Nicolas Dupont-Aignant dans ce texte a raison sur l’essentiel: l’école doit revenir exigeante. Ce n’est pas l’élève qui doit être au centre du système, mais la
      transmission de savoirs. L’école est une institution, pas un commerce qui doit s’adapter à la demande des parents ou des élèves.

      Le seul point qui me semble contentieux est celui de confier les élèves perturbateurs “à des écoles à encadrement militaire”. Pas que je sois contre par principe, mais il faudrait clairement
      préciser ce qu’on entend par là. Pour le reste, j’aurais pu signer ce texte…

      Cordialement,

  15. Je voudrais revenir sur certains points du débat :
    « les immigrés ne demandent souvent qu’à s’assimiler »
    « ils [les immigrés et leurs descendants] sont, que cela leur plaise ou pas, de culture française ils sont, que cela leur plaise ou pas, de culture française »

    Mais c’est quoi « être de culture française » ?

    De plus, je viens de prendre connaissance du rapport du Haut Conseil à l’Intégration (HCI) sur l’Education nationale face aux communautarismes, remis au Premier ministre en janvier. C’est édifiant
    et je te conseille de le lire :
    http://www.ladocumentationfrancaise.fr/sinformer/enseignement/index.shtml

    La partie 3 s’intitule « L’Ecole aux prises avec des difficultés d’ordre culturel ». Petit florilège :
    « il n’est plus rare que, dès l’école primaire, des parties du programme soient refusées :
    alors que le programme d’histoire en CM1 prévoit expressément « les Gaulois, la
    romanisation de la Gaule et la christianisation du monde gallo-romain », au même titre que
    l’étude « des conflits et échanges en méditerranée au Moyen Âge : les Croisades, la
    découverte d’une autre civilisation, l’islam », des enseignants se voient systématiquement
    opposés un refus de parents musulmans à l’étude, par leurs enfants, de la christianisation. Les
    mouvements migratoires, conséquences des Croisades sont remis en cause au prétexte que les
    Chevaliers n’ont pas existé ou que dans le meilleur des cas, ils n’ont jamais atteint le Proche-
    Orient ! Qui imaginerait que l’éducation musicale soit contestée ? Pourtant, des enfants
    refusent de chanter dans une chorale ou de jouer de la flûte à bec au prétexte d’une
    interdiction religieuse. »

    « Depuis peu, les professeurs du domaine scientifique ne sont pas davantage à l’abri de
    contestations qu’ils doivent sans cesse contrer. L’évolutionnisme est remis en cause au profit
    d’une action divine ou créationniste imposée par l’élève, sans argumentation. Loin d’être
    marginales, ces contestations sont suffisamment récurrentes pour être remarquées et nous
    avoir été signalées au cours de nos auditions comme perturbant le bon déroulement des cours. »

    « depuis plusieurs années, dans un nombre croissant d’établissements, les cours d’histoire sont le lieu de contestations ou d’affrontements, de mise en concurrence de mémoires particulières qui
    témoignent du refus de partager une histoire commune. »

    « Plusieurs incidents sont liés à la visite de lieux de culte ou mémoriaux (refus de visiter des
    églises ou des mosquées, refus de visiter les cimetières de Verdun…). Des revendications
    religieuses se font jour : demande de pause pour la rupture du jeûne lors du Ramadan, rupture
    du jeûne de professeurs musulmans avec leurs élèves dans un collège du Nord de Paris, refus
    de représentation de figures humaines en cours de dessin… »

    « La vision du monde qui semble s’opérer est binaire : d’un côté, les opprimés, victimes de
    l’impérialisme des Occidentaux, et ce, depuis les temps les plus reculés, et de l’autre, les
    oppresseurs, les Européens et Américains blancs, pilleurs des pays du Tiers-Monde. »

    « Certaines classes des établissements des quartiers où la mixité sociale et ethnique est absente, se revendiquent comme étant « 100% musulmanes ». La religion est affichée ouvertement et chaque
    élève se définit ou est défini par rapport à ses origines nationales, ethniques et religieuses, s’enfermant ainsi dans une assignation. »

    « L’école est en effet perçue comme l’école de la France par des jeunes en perte de repères, qui se vivent comme Algériens, Marocains, Camerounais… avant d’être Français. Ni d’ici, ni de là-bas,
    ils s’enferment dans une vision idéalisée de leur origine et revendiquent leur altérité au travers de leur religion. Des enseignants ont pu être traités de “sales Français” et la culture
    française et ses valeurs rejetées. Le rapport Obin notait déjà qu'”un grand nombre d’élèves
    d’origine maghrébine, Français, voire de parents français, la majorité sans doute dans
    certains établissements, se vivent comme étrangers à la communauté nationale, opposant à
    tout propos deux catégories : les “Français” et “nous”. »

    « Or, pour nombre de jeunes, aussi bien nouvellement arrivés qu’issus de familles
    en France depuis une ou deux générations, la pratique du français ne s’exerce pas ou peu
    suffisamment en dehors de l’école. Les parents, l’environnement familial ne constituent pas
    toujours des espaces de pratique linguistique de la langue d’accueil puisque la langue
    d’origine y est le plus souvent la seule parlée. »

    « De nombreux témoignages s’accordent à dire qu’un grand nombre de jeunes vivant dans les
    quartiers défavorisés ne disposent que d’un éventail de vocabulaire restreint et qu’ils
    perçoivent le français utilisé par l’enseignant comme une langue étrangère et
    incompréhensible. Le langage qu’ils utilisent est circonscrit à un territoire et mélange dans
    une même phrase des mots empruntés à des langues étrangères, à des mots français et au
    verlan. Les jeunes des quartiers ont ainsi développé ce que les linguistes appellent le principe
    « d’économie linguistique », réduisant leur vocabulaire à un nombre limité de mots, ce qui
    leur permet de communiquer entre eux dans un espace dont ils n’envisagent pas de sortir.
    D’autre part, leur langage exclut de la communication les interlocuteurs qui ne partagent pas
    l’implicite commun au groupe. »

    Je suis désolé de la longueur. Cela m’amène à deux questions :
    1) Es-tu sûr que la plupart des immigrés veulent s’assimiler ?
    2) Qu’est-ce qui constitue la « culture française » de ces jeunes lorsqu’ils rejettent l’histoire nationale, la langue française et la laïcité ?

    • Descartes dit :

      1) Es-tu sûr que la plupart des immigrés veulent s’assimiler ?

      Oui. Le rapport que tu cites est fort intéressant, mais en fait très pauvre en chiffres. Oui, il y a des constestations du “roman national” ou des éléments qui font à la “culture française”. Mais
      combien sont-ils ? Les rares données chiffrées du raport conviennent que ce type de contestation est tout de même relativement peu fréquente. Par ailleurs, une école qui place “l’élève au centre
      du système” encourage ce type de contestation dans un contexte de rébellion adolescente.

      Mais la question que tu poses contient une ambiguïté. L’assimilation “demandée” n’a jamais été très majoritaire parmi les immigrés, pour des raisons psychologiques faciles à comprendre.
      L’assimilation dans beaucoup de cas résulte d’une dialectique entre l’exigeance de la culture d’accueil et la disponibilité des individus à admettre cette exigeance comme raisonnable.

      2) Qu’est-ce qui constitue la « culture française » de ces jeunes lorsqu’ils rejettent l’histoire nationale, la langue française et la laïcité ?

      Depuis mai 1968, le rejet de l’histoire nationale est une constante des élites “de gauche”. Faut-il rappeler comment les célébrations de 1989 se sont appliqués à enlever tout son sens au
      bicentenaire de la révolution française ? Comment Chirac a finalement renoncé à commémorer l’épopée napoléonienne sous la pression des organisations “antiracistes” ? Et je ne parle même mas du
      courant révisonniste dont le but est de dévaluer systèmatiquement toutes les pages de notre histoire. On ne peut que le regretter, mais à l’heure de “rejetter l’histoire nationale”, les jeunes ne
      font que suivre une pente bien “française”.

      Et même chose avec la langue. Je te rappelle combien le fait de pouvoir dire “merde” et “con” sur les ondes de la radio et de la télévision fut considéré en 1981 comme une grande conquête…

       

  16. Cher Descartes, je crains que ta passion du chiffre ne te conduise à certains excès, pardonne ma franchise. Et je ne suis pas de ceux qui refusent les chiffres et statistiques, loin s’en faut.
    Le rapport est « pauvre en chiffres » : et alors ? L’absence de chiffres est-elle suffisante pour balayer la possible ampleur d’un phénomène ? Cette étude est partielle bien sûr, pour autant
    pourquoi ne serait-elle pas représentative ?

    Rien que dans les extraits que j’ai indiqué, je relève :
    « il n’est pas rare que »
    « dans un nombre croissant d’établissements »
    « un grand nombre d’élèves d’origine maghrébine »
    « nombre de jeunes »
    « de nombreux témoignages »…

    Tout cela est flou sans doute, mais la récurrence de ces expressions prouvent que ces phénomènes ne sont pas si marginaux que cela. Et d’autre part, j’attire ton attention sur le fait que certaines
    réalités sont difficilement quantifiables. Le chiffre n’est pas la seule vérité, même s’il est fort utile. La vérité est qu’on ne peut pas compter les élèves qui contestent tel ou tel point du
    programme. De plus il faut tenir compte de l’effet de groupe : certains se laissent entraîner dans la contestation sans conviction, d’autres contestent en leur for intérieur.

    Je suis d’accord avec ce que tu dis sur les élites « de gauche », mais tu dois prendre en compte quelques différences :
    1) Les enfants des élites « de gauche » peuvent difficilement se réclamer d’un autre pays ou d’une autre culture ; voilà pourquoi ces élites sont dans la réécriture du « roman national » là où une
    partie (ne mettons pas tout le monde dans le même sac) des populations issues de l’immigration rejettent purement et simplement le passé de la France, y compris les quelques points « positifs »
    auxquels se raccrochent les bobos de gauche (les droits de l’homme, les congés payés, la Résistance…).
    2) Pour ce qui est de la langue française, ne t’inquiète pas pour les élites « de gauche » et leurs rejetons : ils en ont une maîtrise bien suffisante pour s’assurer de rester à une place enviable
    dans la société… La médiocrité, c’est bien, mais pour les autres…
    3) Les élites « de gauche » ne vivent pas dans des quartiers communautaires où ils cultivent un entre-soi pesant comme c’est le cas de certains immigrés et Français d’origine étrangère qui parfois,
    en certains endroits, se soudent dans la haine de la France.

    De plus la pente bien « française » que tu dénonces est loin de faire l’unanimité dans les milieux universitaires et même intellectuels. Il y a une résistance réelle. Ajoutons que ce rejet de
    l’histoire ne trouve pas un si grand écho dans la population française attachée (et c’est bien légitime) à ce passé qui nous permet tout de même de vivre dans un pays qui n’est pas le pire du
    monde…
    Mais j’ai été atterré (et des universitaires l’ont été aussi, et l’ont dit publiquement) qu’on ne commémore pas Austerlitz en 2005 (entre autres).

    • Descartes dit :

      Le rapport est « pauvre en chiffres » : et alors ? L’absence de chiffres est-elle suffisante pour balayer la possible ampleur d’un phénomène ?

      Sans chiffres, il est impossible de savoir quelle est exactement “l’ampleur du phénomène”. Dire “il y a des élèves qui rejettent l’histoire de France” ne nous apprend absolument rien. Il y a
      toujours eu quelques élèves qui ont rejetté, et il y en aura tojours. La question est “combien”. Parce que si c’est un élève sur cent mille, ce n’est pas grave. Si c’est un élève sur deux, ce
      n’est plus la même chose.

      Cette étude est partielle bien sûr, pour autant pourquoi ne serait-elle pas représentative ?

      Sans chiffres ont prend toujours le risque de faire d’une exception la règle. Reprenons par exemple les affirmations que tu donnes en exemple:

      « il n’est pas rare que » peut vouloir dire un sur mille ou un sur deux. Tout dépend ce qu’on appelle “rare”.

      « dans un nombre croissant d’établissements » ne veut rien dire. Si l’on est passé d’un établissement sur 100.000 a un sur 99.999, le nombre est “croissant”. Il n’empêche qu’on ne peut tirer
      aucune conclusion.

      « un grand nombre d’élèves d’origine maghrébine » n’a pas de sens: c’est quoi un “grand” nombre ? un sur mille ? un sur dix ?

      « de nombreux témoignages » mérite la même remarque. A partir de combien on est “nombreux” ?

      Et d’autre part, j’attire ton attention sur le fait que certaines réalités sont difficilement quantifiables.

      Peut-être, mais cela ne s’applique à aucune des affirmations listées ci-dessus: je ne vois pas où est la difficulté à quantifier le nombre de témoignages…

      La vérité est qu’on ne peut pas compter les élèves qui contestent tel ou tel point du programme.

      Alors, on ne peut pas affirmer que “de nombreux élèves contestent tel ou tel point du programme”. Je veux bien qu’on me dise qu’on ne sait pas mesurer, mais alors mieux vaut s’abstenir de tirer
      des conclusions.

      1) Les enfants des élites « de gauche » peuvent difficilement se réclamer d’un autre pays ou d’une autre culture

      Bien sur que si. Il n’y a qu’à voir la manière dont certains revindiquent des racines dans des “cultures régionales” souvent largement idéalisées lorsqu’elles ne sont pas carrément inventées. La
      différence entre la manière dont certains bobos réinventent leur “bretonnitude” ou leur “corsitude” n’est pas très différente de celle dont certains enfants d’immigrés réécrivent l’histoire du
      pays d’origine de leurs parents. 

      2) Pour ce qui est de la langue française, ne t’inquiète pas pour les élites « de gauche » et leurs rejetons : ils en ont une maîtrise bien suffisante pour s’assurer de rester à une place
      enviable dans la société… La médiocrité, c’est bien, mais pour les autres…

      Sur ce point, je ne peux que te donner raison. Il y a une grande schyzophrénie entre ce que les “élites” boboisées proclament comme principe et ce qu’ils font effectivement dans l’éducation de
      leurs enfants.

      De plus la pente bien « française » que tu dénonces est loin de faire l’unanimité dans les milieux universitaires et même intellectuels. Il y a une résistance réelle.

      Aujourd’hui, peut-être. Mais c’est un phénomène relativement nouveau. Dans les années 70-80, la vulgate soixante-huitarde était parole d’évangile.

       

       

       

       

  17. J’admire ta perspicacité, cher Descartes. Ta réponse est pertinente. Que te dire? Je veux croire que ce rapport a été rédigé par des gens honnêtes et soucieux d’alerter les autorités sur un
    phénomène alarmant. Je ne puis croire qu’ils aient signalé des faits très marginaux, et ce qu’ils évoquent est sans doute un phénomène d’une réelle ampleur, même s’il y a une part de subjectivité.
    N’oublions pas que c’est un travail collectif: les impressions d’un observateur peuvent être corrigées ou nuancées par ses pairs… Or ils se sont mis d’accord sur ce constat.

    Ta réflexion sur le réenracinement “régional” des bobos me laisse songeur. Je pense que c’est un phénomène assez marginal (pour le coup). En plus, il n’y a pas que des bobos là-dedans. Et je
    m’appuie sur des chiffres: les scores des mouvements régionalistes restent faibles (Corse exceptée, mais y a-t-il seulement des bobos chez Talamoni?). Certes, nombre de régionalistes “marchent”
    avec Europe Ecologie, mais comment distinguer la part de l’électorat “régionalisant” du reste? A-t-on des chiffres?

    Enfin, faut-il rappeler que moult bobos habitent Paris et la région parisienne…

    Encore merci pour ces échanges stimulants.

    • Descartes dit :

      Je veux croire que ce rapport a été rédigé par des gens honnêtes et soucieux d’alerter les autorités sur un phénomène alarmant.

      J’en suis persuadé. Ce que je trouve dommage, c’est qu’il y ait beaucoup de “gens honnêtes et soucieux” du bien commun qui ne prennent pas le temps d’objectiver leurs constats. Du coup, ils
      produisent des documents qui reflètent plutôt des impressions (pas toujours injustifiées, je te l’accorde) qu’un examen rigoureux des faits.

      Ta réflexion sur le réenracinement “régional” des bobos me laisse songeur. Je pense que c’est un phénomène assez marginal (pour le coup).

      Vu de Paris, certainement. Mais lorsqu’on travaille en province, on est étonné de voir à quel point ce processus est enclenché. Lorsqu’on voit qu’en Languedoc-Roussillon il existe un
      vice-président du conseil régional “chargé de la catalanité”, et que dans les Bouches du Rhône les panneaux d’entrée d’agglomération sont bilingues français-provençal (langue que par ailleur
      seule une infime minorité parle), on reste songeur.

      Certes, nombre de régionalistes “marchent” avec Europe Ecologie, mais comment distinguer la part de l’électorat “régionalisant” du reste? A-t-on des chiffres?

      Le seul indicateur de l’influence de l’électorat “régionalisant” se trouve dans le fait que dans diverses régions la gauche donne sur ses listes des places éligibles aux partis régionalistes.
      Ainsi, pour ne donner qu’un exemple, sur les trois élus sur la liste de la gauche unie à Aix en Provence aux dernières municipales, un était du “Partit Occitan”.

      Enfin, faut-il rappeler que moult bobos habitent Paris et la région parisienne…

      Mais pas du tout! La boboïté provinciale n’est guère mieux que la parisienne…

      Encore merci pour ces échanges stimulants.

      C’est un plaisir pour moi aussi.

  18. Trubli dit :

    Lors des émeutes, les jeunes s’en prennent peut-être aux écoles car ils jugeraient cette institution respioable de leur échec. 

    • Descartes dit :

      Je ne le crois pas: ils ont aussi incendié des bibliothèques et des gymnases, et j’ai franchemen du mal à comprendre en quoi ces deux institutions pourraient être jugées “responsables de leur
      échec”.

      Mais admettons un instant que vous ayez raison, et qu’effectivement les “jeunes” (en fait, les “émeutiers” serait une description plus exacte, parce que l’immense majorité des “jeunes” de notre
      pays n’ont pas incendié d’écoles, et certains incendiaires n’étaient nullement “des jeunes”) aient incendié des écoles pour cette raison. Qu’est ce que ce geste nous dit à propos de leur vision
      du monde ?

      Si vous avez raison, alors les émeutes en question ne sont pas du domaine du politique, mais de la pure vengeance. On brûle l’école non pas pour transmettre un message ni pour exercer une
      pression sur les institutions en vue d’un changement, mais en retribution de son “l’échec” personnel pour lequel on la tient pour responsable. Mais il faut se souvenir que la vengeance repose
      toujours sur un mécanisme de rétribution: détruire quelque chose non pas parce qu’elle nous est odieuse, mais parce que quelqu’un d’autre la tient pour chère. La vengeance est une aliénation: la
      pensée du vengeur n’est plus libre, elle est subordonnée à ce que pensent les autres. Difficile de fonder un projet politique sur une telle vision.

       

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