Les politiciens aiment la jeunesse, c’est bien connu. On pourrait se demander pourquoi des hommes qui ont en général dépassé la cinquantaine sont tellement friands de jeunes dont la culture, les repères, les réactions sont si différentes des leurs. La raison est simple: les jeunes présentent pour les politiques une qualité que les autres âges de la vie n’ont pas: ils n’ont pas de mémoire, pas d’histoire. Les adultes, les vieux, eux, se souviennent des fausses promesses, des trahisons, des mensonges, des erreurs. Ils sont moins sensibles au “storytelling”, parce qu’ils ont vécu les “storys” et peuvent faire la part du “telling”. Ils ont éprouvé par expérience la différence entre la réalité et ses embellissements. Hollande et Mélenchon peuvent raconter beaucoup de bobards sur Mitterrand et son œuvre aux jeunes, c’est beaucoup plus difficile de le faire avec les vieux.
C’était peut-être le symbole de la soirée. Le 10 mai 1981, je m’en souviens, la Bastille était remplie de gens de tous âges, jeunes ayant voté pour la première fois et vieux de la vieille qui attendaient depuis vingt ans le retour des socialistes au pouvoir. Trente et une années plus tard, la place de la Bastille était remplie de jeunes. De quelque part qu’on regarde – sauf sur la scène, bien entendu – on avait du mal à trouver des gens au dessus de 40 ans. Ceux qui auraient pu se souvenir du 10 mai 1981 avaient de toute évidence préféré rester chez eux. Cette petite bouderie est en elle même tout un symbole. Aujourd’hui, seuls ceux qui n’ont pas de mémoire sont enthousiastes. C’est d’ailleurs ce qu’indiquent toutes les études: plus d’un électeur sur deux (55% pour être précis) parmi les électeurs ayant voté pour Hollande disent l’avoir fait pour renvoyer Nicolas Sarkozy. Interrogés sur le fait de savoir si l’élection de François Hollande allait améliorer, dégrader ou rien changer à la situation, 46% déclarent croire à une dégradation, 28% que cela ne changera rien, et seulement 26% croient à une amélioration. C’est dire si les espoirs sont modérés. Contrairement à Mitterrand, Hollande ne risque pas de décevoir beaucoup de monde.
C’est heureux, parce que 2012 n’est pas 1981, et Hollande n’est pas Mitterrand. En 1981, la France avait une monnaie, des frontières, le contrôle du système financier, des infrastructures saines, des services publics puissants et donc des marges de manœuvre considérables. En 2012, les marges de manœuvre – sauf à s’affranchir de la contrainte européenne – sont nulles. Nous n’avons plus la maîtrise de la monnaie, nous avons une politique budgétaire contrainte, des banques qui font ce qu’elles veulent, des infrastructures vieillissantes, des services publics largement privatisés. Sarkozy, qui était un volontariste, en a souffert. Hollande, en bon disciple de Jacques Delors, s’y coulera dans cette impuissance sans états d’âme. Je suis prêt à prendre les paris sur la ratification du TSCE…
La victoire de François Hollande est la victoire de la médiocrité. Il suffit d’écouter ses discours pour s’en convaincre: on y trouve un discours artificiel, terriblement artificiel, tout simplement parce que celui qui le prononce n’a en fait rien de véritablement consistant à dire. C’est du “je suis avec les gentils contre les méchants”, ou bien “je suis pour tout ce qui est bon et contre tout ce qui est mauvais”. La gauche a gagné en jouant de la détestation de l’adversaire, et en choisissant pour candidat celui qui avait le moins d’idées personnelles et qui s’est contenté de dire à chaque public ce qu’il voulait entendre (1). Que la gauche ne puisse produire pour la représenter qu’un personnage auquel personne – même dans son propre parti – ne reconnaît la moindre qualité intellectuelle en dehors de ses capacités de tacticien, cela mérite réflexion. Que la France se donne un tel président, aussi.
Mais la victoire de François Hollande est surtout une victoire de la continuité. Ceux qui pensent que “le changement c’est maintenant” vont très vite déchanter. Au delà du style personnel, abrasif et clivant pour l’un, consensuel et “rond” pour l’autre, Sarkozy et Hollande se ressemblent bien plus qu’on ne veut le croire. Tous deux sont des “professionnels” de la politique, pour lesquels, pour reprendre une formule célèbre, “gouverner est une pénible corvée entre deux élections”. Ce qui les intéresse, c’est la conquête du pouvoir, et non son exercice. Ils ne sont pas entrés en politique pour réaliser une œuvre (comme c’était le cas pour un Badinter avec la peine de mort, pour un Newirth avec la légalisation de la contraception), mais pour conquérir un poste. Il ne faut pas croire que c’est une nouveauté: l’histoire de la IIIème et la IVème Républiques est truffée de ce genre de personnages. En sacralisant le rôle du président, en le faisant élire par le suffrage universel – et non par les tractations obscures des partis – De Gaulle avait pensé mettre la Vème à l’abri de cette “professionnalisation”. Et cela n’a pas si mal marché, du moins jusqu’à la fin de la Vème République en 1988. Avec la cohabitation, la fonction présidentielle s’est progressivement banalisé jusqu’à être à la portée d’un homme “normal”.
Cette “professionnalisation” peut plaire à certains parce qu’elle nous éloigne du messianisme gaullien dont la symbolique a toujours choqué le côté “libéral-libertaire” de la gauche française. Mais elle reflète aussi une “normalisation” du rôle de l’Etat, conçu non plus comme une institution transcendente mais comme une simple entreprise prestataire de services. Le débat sur le salaire du président est de ce point de vue révélateur: peu importe que l’un l’ait augmenté et que l’autre s’apprête à le réduire. Ce qui leur est commun, ce qui les réunit, c’est que tous deux considèrent que ce sujet mérite d’être discuté publiquement, ce que n’importe quel de leurs prédécesseurs aurait refusé. Pour De Gaulle, Pompidou, Giscard et même Mitterrand ce salaire n’avait aucune importance. C’était un petit détail administratif dans une fonction qui dépassait ce genre de contingences. Pour Sarkozy comme pour Hollande, il faut au contraire en discuter, comme on discuterait du salaire du PDG dans une assemblée générale d’actionnaires.
Sarkozy, avec ses immenses défauts personnels, garde au moins un langage qui rappelait la grandeur gaullienne, et à titre personnel, adhère à une vision de la France qui est modernisatrice, industrielle, urbaine. Hollande, lui, est sans complexe représentatif de la “petite France” dont parle Crémieux-Brilhac: celle du retour à sa “communauté naturelle”, au village, à la terre, au quotidien, aux petites institutions de l’environnement immédiat, et qui n’aspire qu’à vivre, prospère, dans son “ça m’suffit”. Cette “petite France” a toujours coexisté avec la “grande France” des idées universelles, des expéditions étrangères et de la “grandeur”. Et comme le montre si bien Alain-Gérard Slama, la “petite France” reprend ses droits dès que les gardiens de la “grande France” ont le dos tourné et surtout dès qu’une crise fait craindre les couches moyennes pour leur niveau de vie. Ce fut le cas en 1940, lorsque les français ont, dans leur grande majorité, adhéré à un projet “européen” qui faisait de la France une province de l’Europe allemande (2). Hollande partage cette position qui, toutes proportions gardées, rappelle celle de Pierre Laval du moins en ce qui concerne la résignation par avance aux “contraintes européennes” et l’acceptation implicite dans cette résignation d’une “provincialisation” et une vassalisation de la France (3). Le discours du “rassemblement” et de la “république apaisée” rappelle furieusement le discours pétainiste appelant à “finir avec les divisions qui nous ont fait tant de mal”. Et Slama a raison de dire que ce qui fait la démocratie, c’est la capacité à assumer les différences et les oppositions, alors que la pensée totalitaire cherche au contraire à les effacer pour fondre la société dans un moule consensuel. Que François Hollande ait prononcé son premier discours de président-élu à Tulle – rappelant cet autre grand pétainiste qui prononça le sien à la mairie de Chateau-Chinon – n’est pas innocent.
Mais si les espoirs de changement politique sont faibles, d’autres espoirs de changement sont forts. Il était amusant de regarder le défilé des intervenants sur la scène de la Bastille. On y trouvait bien entendu les notables socialistes, mais aussi un certain nombre d’étranges compagnons de route. Jean-Vincent Placé, on peut comprendre… mais Robert Hue ? Qui a bien pu inviter le Père UbHue à prendre la parole ? Quel rôle joue-t-il ? C’était un peu le défilé des ambitieux. Là aussi, il risque d’avoir pas mal de cocus.
Car les élections législatives se présentent assez mal. La gauche bienpensante semble convaincue que les politiques sarkozyennes sont l’objet d’une détestation unanime. Mais c’est loin d’être le cas: un français sur deux à voté Sarkozy. Les politiques proposées par François Hollande, si l’on croit les enquêtes ci-dessus, ne suscitent pas une adhésion enthousiaste. Une cohabitation est cependant peu probable, parce que l’ampleur du vote protestataire à droite met dans un certain nombre de circonscriptions le candidat de droite en situation difficile. Il y a par contre un risque réel que le PS n’ait pas une majorité homogène, ce qui nous conduit tout droit vers une nouvelle “gauche plurielle”. Une situation à laquelle la “gauche radicale” n’est guère préparée politiquement. Mieux vaudrait commencer à réfléchir sur la hiérarchie des revendications qui seront négociées avec le PS pour constituer une majorité. Car il ne faut pas se faire des illusions: il serait impensable de voir les députés du Front de Gauche faire tomber un gouvernement socialiste en votant contre lui, et le PCF en a fait plusieurs fois l’amère expérience. Pour pouvoir assumer politiquement une telle décision sans être laminé par l’opinion il faudrait avoir préparé une stratégie de rechange, et l’avoir expliqué à son électorat et ses militants pendant des années. Ce travail n’ayant pas été fait, il n’y a pas de stratégie alternative.
L’attitude du Front de Gauche est d’ailleurs assez étrange. Naguère, Hollande était pour le candidat du Front un “capitaine de pédalo dans la tempête”. Aujourd’hui, au contraire, Mélenchon le félicite et lui souhaite “le meilleur”. Pierre Laurent va plus loin en déclarant que l’élection de Hollande “ouvre un nouvel espoir en France et en Europe”. On a vu les drapeaux du PG et du PCF à la Bastille agités toute la nuit pour fêter l’élection de celui qui avait dit “il n’y a plus de communistes en France”. Ces revirement sont significatifs de l’incapacité du Front – et des organisations qui le composent – de produire une analyse politique du réel qui donne une certaine cohérence à ses positions. Si le Front avait une telle analyse, ses prises de position découleraient “naturellement” de celle-ci; mais en son absence, chaque position est gouvernée exclusivement par des considérations tactiques, par des initiatives personnelles déconnectées d’une stratégie d’ensemble, et par le besoin des camarades ayant le complexe du gyrophare de ne pas insulter l’avenir. Devant cette difficulté à définir une ligne politique, Mélenchon semble être retombé dans sa tactique habituelle de se trouver des ennemis. Alors que Sarkozy s’est bien débrouillé, le soir de l’élection et plus encore depuis, à dédramatiser sa défaite et à sortir d’une logique de guerre civile en invitant par exemple François Hollande à partager les cérémonies du 8 mai, Mélenchon continue à contretemps à tonner un message de haine. Et Sarkozy disparu, il ne lui restera bientôt plus comme faire-valoir que Marine. D’où son numéro d’enfant mal élevé sur les plateaux de télévision dès qu’un représentant du FN montrait le bout de son nez. Numéro qui, a force d’être prévisible, perd de son efficacité. Les représentants du FN l’ont d’ailleurs bien compris, prennent les traits mélenchoniens avec humour et en fin de compte Jean-Luc apparaît comme un énergumène.
Des temps difficiles s’annoncent au Front de Gauche. Pour faire élire des députés, il lui faudra compter sur des contextes locaux tous différents. Les élus sortants et les “notables” ayant une chance de se faire élire en sont pleinement conscients. Beaucoup sont tentés de négociations d’arrière-cour avec le PS, comme la lettre de Martine Billard à Martine Aubry, que j’ai commenté dans un précédent billet, le montre. Il y aura aussi des négociations locales avec le MODEM, avec des partis régionalistes… il sera difficile de maintenir une certaine cohérence autour de “l’humain d’abord”.
Descartes
(1) Le discours sur la finance est le plus symptomatique: entre son discours à la City de Londres et celui qu’il a tenu dans les estrades en France, il y a une totale opposition. La question est: quand était-il sincère ?
(2) On oublie aujourd’hui – et ce n’est pas une coïncidence – combien le projet de la “révolution nationale” a été vendu comme un projet d’intégration dans la “nouvelle Europe” voulue par l’Allemagne, et combien les élites françaises étaient alors convaincues qu’une fois la guerre terminée (avec un probable accord germano-britannique) la France pourrait “à côté de l’Allemagne” participer, en position subordonnée bien entendu, à la construction de cette “nouvelle Europe” que beaucoup d’entre eux appelait de leurs vœux.
Je découvre par hasard trop tardivement votre blog. C’est un délice pour moi de vous lire aujourd’hui…. et dorénavant à l’avenir.
Mais il n’est jamais “trop tard”… en tout cas, bienvenu et n’hésitez pas à participer au débat.
C’est heureux, parce
que 2012 n’est pas 1981, et Hollande n’est pas Mitterrand. En 1981, la France avait une monnaie, des frontières, le contrôle du système financier, des infrastructures saines, des services publics
puissants et donc des marges de manœuvre considérables.
Malgré ces
marges de manœuvre il y a le virage à 180° de 1983 et ensuite une totale capitulation devant la « révolution » néolibérale de Thatcher-Reagan. Quelle que soit l’époque il n’est jamais
facile d’affronter le capitalisme, et choisir le déshonneur n’évite pas la guerre……..
En 2012, les marges de manœuvre – sauf à s’affranchir de la contrainte européenne – sont nulles. Nous n’avons
plus la maîtrise de la monnaie, nous avons une politique budgétaire contrainte, des banques qui font ce qu’elles veulent, des infrastructures vieillissantes, des services publics largement
privatisés. Sarkozy, qui était un volontariste, en a souffert. Hollande, en bon disciple de Jacques Delors, s’y coulera dans cette impuissance sans états d’âme. Je suis prêt à prendre les paris
sur la ratification du TSCE…
Je ne suis pas
certain que Sarkozy en ait beaucoup souffert, s’il avait mis en œuvre le discours que Guaino lui avait rédigé pour Toulon 1 il aurait pu rentrer dans l’histoire, comme Napoléon ou De Gaulle. En
se couchant devant l’oligarchie et Mme Merkel il part par la petite porte, les Français ayant tiré la chasse……..
Que la gauche ne
puisse produire pour la représenter qu’un personnage auquel personne – même dans son propre parti – ne reconnaît la moindre qualité intellectuelle en dehors de ses capacités à conquérir le
pouvoir, cela mérite réflexion. Que la France se donne un tel président, aussi.
Tu es sévère, le
parcours de François Hollande témoigne à l’évidence de grosses facultés intellectuelles. Mais il ne faut pas oublier que c’est un bourgeois et que l’objectif de la social-démocratie n’est pas de sortir du cadre néolibéral de la construction Européenne.
Mais la victoire de
François Hollande est surtout une victoire de la continuité. Ceux qui pensent que “le changement c’est maintenant” vont très vite déchanter. Au delà du style personnel, abrasif et clivant pour
l’un, consensuel et “rond” pour l’autre, Sarkozy et Hollande se ressemblent bien plus qu’on ne veut le croire. Tous deux sont des “professionnels” de la politique, pour lesquels, pour reprendre
une formule célèbre, “gouverner est une pénible corvée entre deux élections”. Ce qui les intéresse, c’est la conquête du pouvoir, et non son exercice.
Oui, sans aucun
doute. Mais Hollande est à priori plus fin, moins grossier à l’heure de mettre les doigts dans le pot de caviar, par exemple je le vois mal partir en
vacances sur le yacht de Bolloré et revenir en disant « cela n’a rien coûté au contribuable….. »
Mais si les espoirs
de changement politique sont faibles, d’autres espoirs de changement sont forts. Il était amusant de regarder le défilé des intervenants sur la scène de la Bastille. On y trouvait bien entendu
les notables socialistes, mais aussi un certain nombre d’étranges compagnons de route. Jean-Vincent Placé, on peut comprendre… mais Robert Hue ? Qui a bien pu inviter le Père UbHue à prendre la
parole ? Quel rôle joue-t-il ?
Je me suis posé
la même question quand je l’ai vu écumer les meetings de F. Hollande. Réponse dès que les
prébendes auront été distribuées ???
Mélenchon continue à
contretemps à tonner un message de haine. Et Sarkozy disparu, il ne lui restera bientôt plus comme faire-valoir que Marine. D’où son numéro d’enfant mal élevé sur les plateaux de télévision dès
qu’un représentant du FN montrait le bout de son nez. Numéro qui, a force d’être prévisible, perd de son efficacité. Les représentants du FN l’ont d’ailleurs bien compris, prennent les traits
mélenchoniens avec humour et en fin de compte Jean-Luc apparaît comme un énergumène.
Méluche avait un boulevard pour fédérer 20 % des électeurs et in fine influencer la politique
que va mener Hollande, mais ce côté cabot agressif, associé à l’indigence de son programme, lui a probablement coûté pas mal de voix.
Je ne suis pas certain que Sarkozy en ait beaucoup souffert,
Je peux t’assurer du contraire. Imagine-toi ce qu’à pu être pour le volontariste Sarkozy la
découverte de la tutelle qu’exerce l’Union Européenne sur ses membres. Si l’on croit certaines confidences, c’est l’une des grandes amertumes de son mandat.
s’il avait mis en œuvre le discours que Guaino lui avait rédigé pour Toulon 1 il aurait pu
rentrer dans l’histoire, comme Napoléon ou De Gaulle.
Certainement. Mais Sarkozy n’était ni Napoléon, ni De Gaulle. Et quand bien même il l’aurait
été, sa majorité ne l’aurait pas suivi et le pays non plus, et il aurait fini comme De Gaulle en 1969. Les gens comme Guaino ont sur eux la malédiction de Cassandre.
Tu es sévère, le parcours de François Hollande témoigne à l’évidence de grosses facultés
intellectuelles.
Si l’on excepte ses capacités à conquérir le pouvoir, j’aimerais que tu me cites un seul exemple, une seule opportunité qui
ait fait paraître une quelconque qualité intellectuelle. Lui connaît-on une idée originale ? Un projet – autre que la conquête du pouvoir – qu’il ait mené à bien ? Une institution qu’il ait
construite ? A-t-il écrit un article mémorable ? Un livre peut-être ? Un projet de loi qui ait marqué l’histoire parlementaire ? Ok, il a été un bon élève et est rentré à l’ENA. Ce qui après tout
arrive à une centaine d’étudiants chaque année. Rien de bien “exceptionnel”.
Mais il ne faut pas oublier que c’est un bourgeois et que l’objectif de la social-démocratie
n’est pas de sortir du cadre néolibéral de la construction Européenne.
Delors était un idéologue, au point de renoncer à se présenter à l’élection présidentielle parce
qu’il sentait que l’état de l’opinion allait l’obliger à dire des choses qu’il ne pensait pas pour être élu. Je ne crois pas que Hollande ait un engagement quelconque. Si demain pour gagner
l’élection présidentielle il fallait se proclamer souverainiste, je pense que François Hollande n’hésiterait pas une seconde.
Oui, sans aucun doute. Mais Hollande est à priori plus fin, moins grossier à l’heure de
mettre les doigts dans le pot de caviar, par exemple je le vois mal partir en vacances sur le yacht de Bolloré et revenir en disant « cela n’a rien coûté au
contribuable….. »
C’est certain. Hollande n’a aucun des vices personnels de parvenu qui ont rendu Sarkozy si
détestable à l’opinion, et tout particulièrement aux classes moyennes toujours attachées à un certain conformisme “comme il faut”. Ce qui d’ailleurs contraste avec l’attitude les électeurs des
couches populaires, qui pardonnent plus facilement les vacances de luxe et autres Rolex lorsqu’ils sentent que le gouvernant s’occupe d’eux. Les bobos ont voté contre Sarkozy parce qu’il est
“vulgaire”, les ouvriers ont voté contre lui parce qu’il n’a pas tenu sa promesse de “gagner plus quand on travaille plus”.
Je me suis posé la même question quand je l’ai vu écumer les meetings de F. Hollande.
Réponse dès que les prébendes auront été distribuées ???
Certaines l’ont dejà été. Robert Hue n’est pas sénateur du Val d’Oise par opération du
Saint-Esprit. Mais je ne serais pas étonné de voir quelques “huistes” du PCF recevoir de miraculeuses récompenses…
Méluche avait un boulevard pour fédérer 20 % des électeurs et in fine influencer la
politique que va mener Hollande, mais ce côté cabot agressif, associé à l’indigence de son programme, lui a probablement coûté pas mal de voix.
J’ai tendance à être plus indulgent avec Jean-Luc. Il n’avait pas – loin de là – un boulevard
devant lui. Comme je l’ai dit plusieurs fois, il s’adressait à un “électorat naturel” qui ne représente guère plus de 15% des voix à condition de fédérer l’ensemble de la “gauche radicale”. Pour
conquérir d’autres électorats, il aurait fallu changer de vocabulaire, de discours, de programme. Au risque de perdre le soutien de cet électorat acquis. Un tel changement ne peut se
concevoir que dans un projet de longue haleine de reconquête de l’électorat populaire, qui n’aurait certainement donné de bons résultats immédiatement. Or, le propre des gauchistes, c’est
l’impatience. L’électorat “naturel” de Mélenchon n’était pas près de s’embarquer dans un projet ou l’on gagne deux pour cent à chaque élection (comme l’a fait, avec une remarquable constance, le
FN).
« Aujourd’hui, seuls ceux qui n’ont pas de mémoire sont enthousiastes »
J’aimerais bien vous croire mais la réaction de mon père me fait douter de ce que vous écrivez.
En l’appelant dimanche soir, pour un tout autre sujet, il me racontait d’un ton guilleret comment les jeunes du quartier étaient tous allés voter.
Lui qui a fait quelques mois de militantisme à l’UMP, en est revenu et soutenait à nouveau les socialistes. Je ne sais pas ce qu’il attend des socialos. Mais je pense qu’il sera déçu.
« Sarkozy, qui était un volontariste, en a souffert. Hollande, en bon disciple de Jacques Delors, s’y coulera dans cette impuissance sans états d’âme ».
J’en doute. Il a apporté sa voix à Maastricht. Il n’a pas soutenu les séguinistes au sein du RPR. Il était un des partisans du traité constitutionnel en 2005.
Il a été ministre du budget sous Balladur, ministre de l’économie, ministre de l’intérieur dans les années 2000. J’ose croire que ce n’est pas en 2007 qu’il a découvert l’impuissance qu’il a
contribué à mettre en place.
« Et Slama a raison de dire que ce qui fait la démocratie, c’est la capacité à assumer les différences et les oppositions, alors que la pensée
totalitaire cherche au contraire à les effacer pour fondre la société dans un moule consensuel. »
Slama fait parti de ces libéraux qui ont soutenu la construction européenne. Il est donc curieux que vous vous référiez à lui. Il est un des ces éditocrates qui nous expliquent à longueur
de journée que la France es trop petite.
Il était par exemple favorable à la réintégration de l’OTAN. Honnêtement il n’y aura jamais de défense européenne parce que les pays européens ont des intérêts divergents et que les Etats-Unis ne
permettront jamais que l’institution (L’OTAN) soit détournée par l’un des membres et réorientée vers une défense européenne autonome.
Quant aux tenants de la grande France, leur faiblesse est de toujours vouloir se trouver des alliés au sein du monde occidental. De Gaulle a pensé au couple franco-allemand. Mauvaise idée comme
l’expérience l’a prouvée. Les partisans de la « grande » France on tété dupés. Ils ont pensé que l’Europe pourrait être une France en grand. Il n’en a rien été.
La puissance n’est pas seulement militaire, il y a également le soft power : mais dans ce domaine les universités françaises sont en 2e division en comparaison des meilleurs
établissements américains que sont Harvard, Stanford ou le MIT. Nos séries, nos films et notre littérature n’inondent pas la planète.
Il y a également la puissance économique mais dans ce domaine nous avons régressé depuis 81 et nous n’avons pas une dé
« Aujourd’hui, seuls ceux qui n’ont pas de mémoire sont enthousiastes ». J’aimerais bien vous croire mais la réaction de mon père me fait douter de ce que vous écrivez.
Les jeunes n’ont pas de mémoire, mais certains adultes l’ont perdue…
J’en doute. Il a apporté sa voix à Maastricht. Il n’a pas soutenu les séguinistes au sein du RPR. Il était un des
partisans du traité constitutionnel en 2005.
Sans doute. Mais si l’on suit un peu son évolution depuis son élection en 2007, il est clair que la lourdeur des
contraintes européennes a été pour Sarkozy à la fois une découverte et un traumatisme. Avant son élection, il attribuait une partie de “l’impuissance” au style Chirac. Lorsqu’il s’y est frotté
lui même, cela fut une découverte.
Slama fait parti de ces libéraux qui ont soutenu la construction européenne. Il est donc curieux que vous vous
référiez à lui. Il est un des ces éditocrates qui nous expliquent à longueur de journée que la France es trop petite.
Je me refère non pas à Slama – comme on le ferait avec un gourou dont on pense que chaque parole est la sagesse incarnée
– mais à l’un de ses livres, “Le siècle de monsieur Pétain” que je trouve excellent et que j’ai cité plusieurs
fois dans mes billets. Je ne vois pas pourquoi il faudrait jeter l’anathème sur un excellent livre sous
prétexte que son auteur défend dans d’autres textes des idées qui ne m’agréent pas…
Quant aux tenants de la grande France, leur faiblesse est de toujours vouloir se trouver des alliés au sein du monde
occidental.
Je ne vois pas où est la “faiblesse”. Nous appartenons, culturellement, politiquement, juridiquement, historiquement au
“monde occidental”. Ou voulez-vous qu’on aille chercher nos alliés, en Tasmanie ? Cela n’a pas empêché les
partisans de la “grande France” à établir des liens d’amitié et de coopération avec d’autres pays: la Chine du temps du Général en est le meilleur exemple.
De Gaulle a pensé au couple franco-allemand. Mauvaise idée comme l’expérience l’a prouvée.
L’expérience n’a rien prouvé de tel. S’appuyer sur le couple franco-allemand dans les années soixante était un choix de
raison. L’erreur commise par les successeurs de De Gaulle a été de faire comme si ce couple était un mariage d’amour, et non d’intérêt.
Les partisans de la « grande » France on tété dupés. Ils ont pensé que l’Europe pourrait être une France
en grand. Il n’en a rien été.
Les partisans de la “grande France” n’ont jamais trop cru à l’Europe. Leur horizon a toujours été le monde.
La puissance n’est pas seulement militaire, il y a également le soft power : mais dans ce domaine les universités
françaises sont en 2e division en comparaison des meilleurs établissements américains que sont Harvard, Stanford ou le MIT.
Ah bon ? Et suivant quel critère ? Le
budget, le nombre de prix nobel qui y enseignent, le nombre d’ordinateurs par étudiant ? Le nombre de publications ? Mais on oublie peut-être le critère plus important: le niveau de connaissances
des étudiants à la sortie… Arrêtons de nous frapper la poitrine en nous comparant aux autres suivant des critères qui ne sont pas les notres. Lorsqu’on compare la formation des étudiants
français des grandes écoles du groupe A avec les meilleures universités américaines ou britanniques, nous n’avons certainement pas à rougir. La fonction d’un système d’enseignement supérieur est
de former des étudiants et de produire des connaissances. Pas de maximiser le nombre de prix Nobel dans son corps professoral (et d’ailleurs, on peut être un chercheur génial et un horrible
pédagogue…).
Nos séries, nos films et notre littérature n’inondent pas la planète.
C’est certain. La barrière de la langue fait que nos séries et nos films doivent être amortis dans un marché beaucoup
plus petit, et sont donc beaucoup plus difficiles de financer. Pour ce qui concerne notre litérature, c’est moins évident: dans les campus américains Derrida ou Foucault sont bien plus vénérés
que n’importe quel philosophe américain…
Il y a également la puissance économique mais dans ce domaine nous avons régressé depuis 81 et nous n’avons
pas une dé
Votre message est arrivé coupé. J’insiste: utilisez pour le composer l’éditeur de texte d’over-blog, autrement il y a
des accidents !
“Imagine-toi ce qu’à pu être pour le volontariste Sarkozy la découverte de la tutelle qu’exerce l’Union Européenne sur ses membres. Si l’on croit certaines confidences, c’est l’une des
grandes amertumes de son mandat.”
Je ne doute pas de tes sources, mais la “découverte” par Sarkozy de la “tutelle européenne” est une joyeuse plaisanterie ! Ce que nous dénonçons à longueur de blogs depuis des années, ce que
répètait Seguin, Dupont-Aignan, Chevènement depuis des années, le ministre Sarkozy ne l’aurait découvert qu’en 2007 ??? Qu’il en fasse une excuse pro domo a postériori – “c’est pas moi, c’est
l’Europe” – ne mérite pas tant de compassion.
“Sarkozy n’était ni Napoléon, ni De Gaulle. Et quand bien même il l’aurait été, sa majorité ne l’aurait pas suivi et le pays non plus, et il aurait fini comme De Gaulle en 1969”
Si Napoléon ou De Gaulle avaient raisonné ainsi, ils ne seraient jamais entrés dans l’histoire… “Le pays” a tout de mêrme voté “Non” en 2005, contre l’essentiel de ses hierarques politiques.
Aurait-il été incapable de soutenir un président qui lui aurait proposé de reprendre son indépendance ? Il en avait les moyens institutionnels, le coup aurait été jouable politiquement… mais
tel n’était pas sa politique, voilà tout. Les discours de Guaino pour la gallerie, et la soumission à la politique européenne pour ce qui compte. On ne juge pas un homme politique pour ses
“confidence” ni pour ses discours verbaux, mais pour ses actes. Et de ce côté-là : zéro volontarisme. C’est justement ce gouffre entre les paroles et les actes qui l’a discrédité, plus encore que
ses mauvaises manières et la baisse du pouvoir d’achat.
N’oublions pas la fameuse couverture de “Paris-Match” en 2005, ou Sarkozy et Hollande posaient ensemble pour le “Oui” au traité Constitutionnel. L’Union Européenne ne leur est pas imposée, c’est
leur conviction ; c’est eux qui la mettent aux commandes.
Je ne doute pas de tes sources, mais la “découverte” par Sarkozy de la “tutelle européenne” est une joyeuse plaisanterie ! Ce que nous dénonçons à longueur de blogs depuis des années, ce que
répètait Seguin, Dupont-Aignan, Chevènement depuis des années, le ministre Sarkozy ne l’aurait découvert qu’en 2007 ???
Comme disait je ne sais plus qui, “le savoir c’est une chose, et le croire c’en est une autre”. Que Sarkozy sut bien avant d’avoir pris la présidence qu’il y avait une contrainte européenne,
c’est évident. Mais comme ministre, il pensait que cette contrainte pouvait être dépassée si l’on avait la volonté, et que c’était la faute à l’immobilisme de Chirac si rien n’était fait. Ce
n’est qu’en devenant président, quand il a essayé le volontarisme et qu’il s’est cassé les dents, qu’il a compris l’étendue des dégâts.
Qu’il en fasse une excuse pro domo a postériori – “c’est pas moi, c’est l’Europe” – ne mérite pas tant de compassion.
Ce n’est pas une question de “compassion”, c’est une question de comprendre l’évolution d’un homme. Croire que Sarkozy n’a rien appris pendant son quinquennat est absurde. J’avoue que j’ai du mal
à comprendre pourquoi une partie de la gauche a besoin de voir en Sarkozy une espèce d’automate incapable d’apprendre ou de changer. Peut-être parce que l’une des caractéristiques classiques des
“méchants” dans les conte classique est précisement leur immutabilité ?
“Sarkozy n’était ni Napoléon, ni De Gaulle. Et quand bien même il l’aurait été, sa majorité ne l’aurait pas suivi et le pays non plus, et il aurait fini comme De Gaulle en 1969” Si Napoléon
ou De Gaulle avaient raisonné ainsi, ils ne seraient jamais entrés dans l’histoire…
Et Napoléon et De Gaulle ont bien raisonné de cette manière pourtant. Il y a une mythologie du “grand homme” jouant le destin sur un coup de dés sans se soucier des conséquences. Mais c’est une
mythologie: dans la réalité, les “grands hommes” étaient d’abord des grands calculateurs, capables d’évaluer finement les rapports de forces et d’en tirer le meilleur parti. Croire que De Gaulle
est parti à Londres ou que Napoléon s’est embarqué le 8 brumaire sur un coup de tête c’est méconnaître l’histoire: dans les deux cas, leur geste était minutieusement calculé. Il leur arrivait
d’ailleurs de se tromper (De Gaulle est parti en 1947 persuadé qu’on le rappelerait au bout de quelques mois, il a attendu onze années).
“Le pays” a tout de mêrme voté “Non” en 2005, contre l’essentiel de ses hierarques politiques. Aurait-il été incapable de soutenir un président qui lui aurait proposé de reprendre son
indépendance ?
Oui, il en aurait été incapable. La majorité qui a voté “non” était trop hétéroclite pour servir d’appui à un projet politique positif. Imaginez-vous un instant les partisans du “non de gauche”
et ceux du “non de droite” gouvernant ensemble ? Présentant ensemble des candidats aux législatives ? Constituant un gouvernement d’union ? Imaginons un instant Sarkozy proposant un projet de
quinquennat incluant la sortie de l’Euro. Imaginez-vous un seul instant Mélenchon appelant à voter pour lui ?
La faiblesse du “non” est qu’il est soutenu par les extrêmes du spectre “gauche/droite”, c’est à dire par des gens qui sont incapables de gouverner ensemble, et même de se parler poliment. La
force du “oui” est qu’il était soutenu par la partie centrale du spectre, c’est à dire, par des gens qui peuvent gouverner ensemble sans problème. Tant que la fausse alternative gauche/droite
fragmente le spectre politique, tant que les patriotes de l’un et de l’autre bord sont empêchés par ce réflexe de discuter ensemble et d’élaborer un “projet minimum”, le “oui” aura l’avantage.
Il en avait les moyens institutionnels, le coup aurait été jouable politiquement…
Certainement pas. La main sur le coeur, posez-vous cette question: si Sarkozy vous avait proposé pour son deuxième quinquennat la sortie de l’Euro, auriez vous voté pour lui ?
On ne juge pas un homme politique pour ses “confidence” ni pour ses discours verbaux, mais pour ses actes.
Excellent principe. Mais si vous l’appliquez, vous noterez qu’en matière européenne, la présidence de Sarkozy est – et de loin – le plus “souverainiste” qu’on ait connu depuis de très longues
années. La préférence de Sarkozy pour l’intergouvernemental contre le communautaire est assez évidente dans lesdifférentes négociations. Avec Giscard nous avons eu le SME, avec Mitterrand nous
avons eu Maastricht, avec Chirac le TCE. A côté de ces monuments, Lisbonne est un pêché venniel.
“Ce n’est qu’en devenant président, quand il a essayé le volontarisme et qu’il s’est cassé les dents, qu’il a compris l’étendue des dégâts.”
Quand Sarkozy aurait-il “essayé le volontarisme” ?
“j’ai du mal à comprendre pourquoi une partie de la gauche a besoin de voir en Sarkozy une espèce d’automate incapable d’apprendre ou de changer”
La question n’était pas s’il en était capable… mais s’il l’a fait !
“dans la réalité, les “grands hommes” étaient d’abord des grands calculateurs, capables d’évaluer finement les rapports de forces et d’en tirer le meilleur parti”
Voilà qui est plus interessant que la psychologie de Sarkozy. Mais en 1799 ou en 1940, l’avenir n’était pas écrit d’avance, et la plupart des “grands calculateurs” de ces époques liaient leur
sort à celui du statu quo. La différence de ceux qu’on appelle a posteriori des “grands hommes” est que ces derniers ont pris de grands risques – calculés, certes, mais suffisant pour effrayer la
plupart des politiciens.
“Il leur arrivait d’ailleurs de se tromper (De Gaulle est parti en 1947 persuadé qu’on le rappelerait au bout de quelques mois, il a attendu onze années).”
En effet, l’action politique n’est pas une science exacte. Les politiciens qui réussissent une belle carrière sont des calculateurs routiniers, des Hollandes ou des Sarkozy. Les “grands hommes”,
comme les innovateurs en économie, ont engagé des paris risqués. La plupart échouent, seule une petite minorité fait avancer l’histoire.
“Imaginez-vous un instant les partisans du “non de gauche” et ceux du “non de droite” gouvernant ensemble ? Présentant ensemble des candidats aux législatives ? Constituant un gouvernement
d’union ?”
Eh bien oui ! Certes pas dans les conditions actuelles. Celà suppose des circonstances exceptionnelles dont fait partie l’émergence d’une force alternative centrale capable de fédérer non pas les
“extrêmes” mais les gens raisonnables qui gravitent aujourd’hui autour du FdG ou du FN faute de mieux.
“La main sur le coeur, posez-vous cette question: si Sarkozy vous avait proposé pour son deuxième quinquennat la sortie de l’Euro, auriez vous voté pour lui ?”
“La main sur le coeur”, oui… mais justement Sarkozy ne s’est jamais engagé sur cette voie.
Il est fort possible que le déblocage de la situation passe par des ruptures à l’intérieur de l’UMP-PS confrontée au dépouillement du pouvoir d’Etat par l’UE. Si celà se produit, il faudra la
soutenir sans état d’âme.
Quand Sarkozy aurait-il “essayé le volontarisme” ?
Quand il a essayé d’inclure un volet de politique industrielle dans le traité de Lisbonne, par exemple.
La question n’était pas s’il en était capable… mais s’il l’a fait !
Je pense qu’il a beaucoup changé, justement. Tu noteras qu’une bonne partie du “bling-bling” de la première année ne s’est jamais réproduite dans la deuxième partie de son mandat.
Mais en 1799 ou en 1940, l’avenir n’était pas écrit d’avance, et la plupart des “grands calculateurs” de ces époques liaient leur sort à celui du statu quo.
Pas tant que ça, finalement. Un “grand calculateur” comme Talleyrand, par exemple, ne s’est pas trompé, et parmi les “grands calculateurs” de la IVème, bien peu suivirent le Maréchal après les
premiers mois. D’autres ont parié sur le statu quo et se sont trompés – personne n’est infaillible – mais lefait demeure que le pari d’un Napoleon ou d’un De Gaulle ne sont pas de paris faits au
hasard.
La différence de ceux qu’on appelle a posteriori des “grands hommes” est que ces derniers ont pris de grands risques – calculés, certes, mais suffisant pour effrayer la plupart des
politiciens.
Ou plus banalement, qu’ils ont une telle finesse d’analyse qu’ils sont capables de réaliser que les risques en question ne sont pas si grand que d’autres le pensent… Le cas de De Gaulle est
symptomatique: il a fait à tellement d’occasion pris des “grands risques” et gagné que soit il avait une chance exceptionnelle, soit le risque n’était pas aussi grand qu’on ne le pense
généralement.
“Imaginez-vous un instant les partisans du “non de gauche” et ceux du “non de droite” gouvernant ensemble ? Présentant ensemble des candidats aux législatives ? Constituant un gouvernement
d’union ?” Eh bien oui ! Certes pas dans les conditions actuelles.
Un jour mon prince viendra…
Celà suppose des circonstances exceptionnelles dont fait partie l’émergence d’une force alternative centrale capable de fédérer non pas les “extrêmes” mais les gens raisonnables qui gravitent
aujourd’hui autour du FdG ou du FN faute de mieux.
Vaste programme… Je partage avec toi l’idée qu’il faut essayer de construire cette force pour préparer le chemin. Mais je ne vois pas les “circonstances exceptionnelles” apparaître dans un
avenir prévisible.
Voici la fin de mon message et mes réponses :
Il y a également la puissance économique mais dans ce domaine nous avons régressé depuis 81 et nous n’avons pas une démographie adaptée à nos ambitions. Si la France avait connu la
transition démographique des états voisins, il y aurait aujourd’hui entre 120 et 150 millions d’habitants !!!
« Le discours sur la finance est le plus symptomatique: entre son discours à la City de Londres et celui qu’il a tenu dans les estrades en
France, il y a une totale opposition. La question est: quand était-il sincère ? »
Je pense qu’il était sincère à la City. Parce qu’il est l’homme de la synthèse, je ne le vois pas aller à un clash avec les banques et les grandes institutions internationales.
Il essaiera seulement de sauver les apparences en obtenant quelques concessions.
Je ne vois pas où est la “faiblesse”. Nous appartenons, culturellement, politiquement, juridiquement, historiquement au “monde occidental”. Ou
voulez-vous qu’on aille chercher nos alliés, en Tasmanie ?
En 36, la France aurait pu régler son compte à Hitler au moment où il remilitarisait la Rhénanie. Mais pour cela il aurait fallu ne pas écouter les protestations des anglo-américains. La
France depuis 1918 prend souvent des décisions politiques en se souciant de ce qu’en pensera Londre ou Washington ou Berlin. Je crains, comme l’avait prévu l’historien d’extrême-droite Jacques
Bainville qu’il n’y a rien de bon à attendre des anglo-américain ou des Allemands. il vaut mieux tracer nous même notre voie.
Et si nous devons faire des alliances, je préfère jouer la Russie contre l’Allemagne eu Europe de l’Est et le Brésil pour contrecarrer les Etats-Unis sur le continent américain. Les BRICS sont
une meilleure alliance que le cadre étouffant de l’Union Européenne.
Il y a également la puissance économique mais dans ce domaine nous avons régressé depuis 81 et nous n’avons pas une démographie adaptée à nos ambitions. Si la France avait connu la
transition démographique des états voisins, il y aurait aujourd’hui entre 120 et 150 millions d’habitants !!!
Je n’ai jamais été vraiment convaincu par l’argument de la démographie comme source de puissance. C’était vrai au XIXème et au début du XXème, lorsque le poids stratégique et la capacité
militaire étaient étroitement liée à la taille des armées. Mais ce n’est plus guère le cas depuis que l’arme nucléaire et la révolution des technologies militaires ont changé la donne. C’est la
qualité plus que la quantité qui pèse aujourd’hui.
Je pense qu’il était sincère à la City. Parce qu’il est l’homme de la synthèse, je ne le vois pas aller à un clash avec les banques et les grandes institutions internationales.
Je me le demande. Personnellement, je pense qu’il n’était sincère ni à la City, ni en France. Tout simplement parce qu’il n’a pas de véritable politique qui lui soit propre. Il suivra la ligne de
moindre résistance. Si le rapport de force est en faveur de la City, il suivra cette ligne là. Si le rapport de force s’inverse, il est capable de l’affronter.
En 36, la France aurait pu régler son compte à Hitler au moment où il remilitarisait la Rhénanie. Mais pour cela il aurait fallu ne pas écouter les protestations des
anglo-américains.
Il aurait surtout fallu ne pas écouter le camp pacifiste qui se manifestait en France même, et qui couvrait la majorité de la gauche. Il ne faut pas réécrire l’histoire: si la France n’a pas
réagi en 1936, c’est avant tout pour des raisons internes, et non parce que les méchants “anglo-américains” l’ont empêchée. Relisez “Les français de l’an 40” de Crémieux-Brilhac, vous trouverez
une explication détaillée et documentée du poids du pacifisme en France dans l’entre-deux-guerres. En dehors de quelques personnalités (généralement de droite, comme de Kerillis), le “plus jamais
ça” était encore très puissant en 1936 et même jusqu’en 1940.
Et si nous devons faire des alliances, je préfère jouer la Russie contre l’Allemagne eu Europe de l’Est et le Brésil pour contrecarrer les Etats-Unis sur le continent américain. Les BRICS
sont une meilleure alliance que le cadre étouffant de l’Union Européenne.
Il faut un minimum de réalisme. Jouer la Russie contre l’Allemagne est la stratégie traditionnelle de la France, mais la Russie fait partie, quoi qu’on en dise, du “monde occidental”. Quant aux
BRICS, on peut bien entendu cultiver de bonnes relations, mais aucun pour le moment ne semble disposé à entrer dans une “alliance” avec nous. Tout simplement parce que nous n’avons pas les mêmes
intérêts. Il ne faut pas oublier que, comme disait De Gaulle, “les états n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts”.
“Si l’on excepte ses capacités à conquérir le pouvoir, j’aimerais que tu me cites un seul exemple, une seule opportunité qui
ait fait paraître une quelconque qualité intellectuelle. Lui connaît-on une idée originale ? Un projet – autre que la conquête du pouvoir – qu’il ait mené à bien ? Une institution qu’il ait
construite ? A-t-il écrit un article mémorable ? Un livre peut-être ? Un projet de loi qui ait marqué l’histoire parlementaire ?”
D’accord, mais dans ce cas qui peut être Président ? Et plus encore, qui peut être Président à gauche ?
D’accord, mais dans ce cas qui peut être Président ? Et plus encore, qui peut être Président à gauche ?
Une excellente question ! Ils ne sont pas nombreux – c’est normal, après tout, c’est la plus haute magistrature de l’Etat – mais il y en a. A droite je pense à quelqu’un comme Guaïno, comme
Fillon, ou même comme Dupont-Aignan, qui même s’il n’est pas très profond, a au moins le mérite d’avoir pris clairement position, et dans un sens qui de toute évidence compromet une brillante
carrière ministérielle.
A gauche, il y en a aussi quelques uns: Valls, par exemple, a pris des positions claires sur toute une série de questions (immigration, sécurité) et a gouverné sa ville en fonction de ces
principes avec de bons résultats. Chevènement, sans discussion, laisse derrière lui un paquet d’écrits et pas mal de politiques précises (comme la police de proximité, le 80% d’une classe d’age
au niveau bac ou le retour de la Marseillaise à l’école). Laurent Fabius, lui aussi, laisse pas mal d’innovations législatives et surtout une prise de position nette sur le TCE sur l’autel du
“non” à laquelle il a sacrifié sa carrière.
Je ne suis pas forcément d’accord avec leurs idées ou leurs politiques, mais au moins ils en ont. Dans le cas de Hollande, peut on citer une seule fois où il n’ait pas suivi la ligne de moindre
résistance ?
Dire que la victoire de François Hollande est la victoire de la médiocrité est faire preuve d’une impressionnante mauvaise foi. Qu’un homme méprisé par son propre parti, sans charisme et sans
avoir jamais exercé de haute fonction arrive à se hisser au rang de président de la République est au contraire la preuve d’une formidable patience, persévérance et habileté.
Et penser de Nicolas Sarkozy que son style est preuve de courage est d’une naïveté déconcertante. François Hollande est une anguille, Nicolas Sarkozy un roquet, chacun fait sait ce qu’il sait
faire le mieux. Dans une campagne électorale l’esquive n’a pas moins de valeur que l’aboiement, seul le résultat compte.
L’aveuglement dont font preuve une fraction considérable de la population m’amuse. Nicolas Sarkozy n’est ni Dieu ni Diable, juste un ambitieux doté d’un grand talent oratoire et conscient que la
foule est manipulable à merci pour peu qu’on la flatte. Penser un seul instant qu’il eut poursuit son action dans l’intérêt du plus grand nombre est aussi ridicule que de croire que François
Hollande a les capacités de sauver le pays. Il faudrait un homme doté d’une vision pour cela, et la plupart des politiques n’ont de vision que la leur. Il serait grand temps que les sympathisants
UMP se réveillent et réalisent que Nicolas Sarkozy n’est qu’un homme de spectacle, et que ce dont la droite a besoin c’est d’hommes rassembleurs comme François Fillon et Alain Juppé plutôt que
d’énergumènes comme Nicolas Sarkozy ou Jean-François Copé prompts à cliver la population au nom de leur irrésistible ambition et du “j’ai raison et tous les autres ont tort”.
Mais l’humain a sans cesse le besoin de se confronter à son voisin et de prendre des positions rigides et imbéciles, et François Hollande comme Nicolas Sarkozy l’ont tous deux bien compris.
Pendant encore longtemps je me gausserais des discours partisans de ceux de droite comme de gauche, persuadés de détenir la vérité et ignorant que les valeurs comme la morale sont affaires de
subjectivité.
Dire que la victoire de François Hollande est la victoire de la médiocrité est faire preuve d’une impressionnante mauvaise foi. Qu’un homme méprisé par son propre parti, sans charisme et sans
avoir jamais exercé de haute fonction arrive à se hisser au rang de président de la République est au contraire la preuve d’une formidable patience, persévérance et habileté.
D’une part, la patience, la perséverance et l’habileté n’excluent pas la médiocrité. Il y a des médiocres fort habiles, patients et persévérants. Mais surtout, je ne vois pas en qui Hollande aura
été plus “patient” et “persévérant” que vous ou moi. On peut parler de “persévérance” au sujet de Mitterrand ou de Chirac, élus après plusieurs candidatures malheureuses. On peut parler de
“patience” à propos de De Gaulle, qui, préférant quitter le pouvoir plutôt que de cautionner une constitution qu’il exècre, part s’enterrer à Colombey en 1947 et refuse tout poste ou
responsabilité pendant onze ans. Mais où est la “patience” et la “persévérance” d’Hollande ? Quant à son “habileté”, j’aimerais un ou deux exemples concrets de situations où cette exceptionnelle
habilité se soit manifestée…
Hollande a été élu non parce qu’il présente des qualités exceptionnelles, mais au contraire parce que son manque de relief fait de lui un homme “lisse” et consensuel à un moment où l’opinion
publique, fatiguée du “clivant” Sarkozy, cherche précisement cela.
Et penser de Nicolas Sarkozy que son style est preuve de courage est d’une naïveté déconcertante.
C’est à moi que ce discours s’adresse ? Je ne me souviens pas d’avoir dit le contraire…
Dans une campagne électorale l’esquive n’a pas moins de valeur que l’aboiement, seul le résultat compte.
Je ne suis pas sûr de partager votre vision purement instrumentale de la politique.
Il serait grand temps que les sympathisants UMP se réveillent et réalisent que Nicolas Sarkozy n’est qu’un homme de spectacle, et que ce dont la droite a besoin c’est d’hommes rassembleurs
comme François Fillon et Alain Juppé plutôt que d’énergumènes comme Nicolas Sarkozy ou Jean-François Copé prompts à cliver la population au nom de leur irrésistible ambition et du “j’ai raison et
tous les autres ont tort”.
Je ne suis pas très convaincu que Juppé soit un grand “rassembleur”, et encore moins qu’il soit capable d’écouter le peuple, ce qui me semble le minimum syndical pour quelqu’un qui prétend à la
magistrature suprême. De ce point de vue sa gestion de la reforme des régimes spéciaux en 1995 me paraît assez révélatrice. Et je ne crois par ailleurs un instant qu’il ait une vision personnelle
à défendre. Fillon… c’est autre chose. Comme tous ceux qui ont été formés dans l’entourage de Philippe Séguin, il a au moins le sens de l’Etat.
“Le discours du “rassemblement” et de la “république apaisée” rappelle furieusement le discours pétainiste appelant à “finir avec les divisions qui nous ont fait tant de mal”. Et Slama a raison
de dire que ce qui fait la démocratie, c’est la capacité à assumer les différences et les oppositions, alors que la pensée totalitaire cherche au contraire à les effacer pour fondre la société
dans un moule consensuel.”
Après la récente polémique sur ne 8 mai, il fallait oser sortir la comparaison ! Très intéressant en tout cas. D’ailleurs à force de votre insistance vous avez fini par me faire acheter le
bouquin de Slama….
Je n’ose du coup imaginer ce que vous pensez de François Bayrou ?
Qu’avez-vous pensé également de la polémique des drapeaux étrangers à la Bastille ? Je suis peut-être un affreux nationaliste/nazi/pédophile (oui tout ça c’est synonyme…) mais je me suis senti
mal à l’aise. J’ai l’impression que FH n’était pas le président des Français maos d’abord président des habtitants de Tulle ET des Français d’origine africaine ET des homosexuels, etc.
Après la récente polémique sur ne 8 mai, il fallait oser sortir la comparaison ! Très intéressant en tout cas. D’ailleurs à force de votre insistance vous avez fini par me faire acheter le
bouquin de Slama….
Maintenant il ne vous reste qu’à le lire! Personnellement, je l’ai trouvé excellent et pour moi qui suis un passionné de l’histoire des années 30 et du régime de Vichy cela m’a donné un éclairage
très intéressant des enjeux idéologiques du pétainisme.
Je n’ose du coup imaginer ce que vous pensez de François Bayrou ?
François Bayrou… ce nom me dit quelque chose… ah oui, un celèbre éleveur de chevaux!
Qu’avez-vous pensé également de la polémique des drapeaux étrangers à la Bastille ?
Rien. Je ne pense pas qu’il faille lui donner une signification: dans ce genre de manifestation ou chacun fait ce qu’il veut, il y aura toujours un imbécile pour amener le drapeau de sa
communauté/pays/région/orientation sexuelle/… Ce que je me suis demandé, est ce qui a pu se passer dans la tête de celui qui a amené le drapeau. Qu’à-t-il voulu dire au monde ? Etait-il
conscient de la réaction de rejet que cela risquait de provoquer chez beaucoup de spectateurs ?