En regardant les résultats des élections législatives ce 18 juin, on peut imaginer que les dirigeants du PCF ont ressenti les mêmes émotions que celles qui ont dominé l’empereur Napoléon cent quatre vingt dix sept ans plus tôt, le 18 juin 1815, en contemplant le champ de bataille de Waterloo. Bien entendu, en matière d’empereurs, la direction du PCF fait penser bien plus aux personnages du film de Luc Jacquet qu’a celui d’Abel Gance, mais l’émotion a du être la même: silence, mort et désolation. Cette défaite mettait fin à l’espoire des “100 jours” pendant lesquels l’empereur avait cru pouvoir renverser le cours de l’Histoire… un peu comme les dirigeants du PCF ont cru qu’avec le Front de Gauche ils arriveraient à mettre fin aux déconfitures en série de leur empire. La défaite du 18 juin a ramené les uns et les autres à la réalité. La différence étant que Napoléon a mis seulement trois jours à tirer les conclusions de sa défaite et à abdiquer avec dignité. Quelque chose me dit que les dirigeants du PCF n’auront pas la même élégance.
Le Front de Gauche aura donc dix députés. La FASE en aura deux: Jacqueline Fraysse et François Asensi, tous deux élus en 2007 sous l’étiquette PCF et qui ont depuis préféré rendre leur carte tout en conservant leur mandat (1). Le Parti de Gauche conserve un élu: Marc Dolez. Le PCF quant à lui fait le plus mauvais résultat de son histoire. Il n’a plus que 7 députés: Marie-George Buffet, Patrice Carvalho, Alain Bocquet, André Chassagne, Jean-Jacques Candelier, Gaby Charroux, Nicolas Sansu. Il perd plus de la moitié de ses élus depuis l’élection de 200 (ils étaient 15 dans la précédente législature).
Croyez-vous que cela provoque place du Colonel Fabien quelque autocritique, quelque retour sur soi, sur la stratégie poursuivie, sur les choix politiques faits ces derniers mois ou ces dernières années ? Ce serait mal les connaître. Avec les désastres qui se sont succédés depuis vingt ans, la direction du PCF – et ses militants – sont totalement mithridatisés. Le désastre est devenu une habitude au PCF, et les directions sont passées maîtresses dans l’art de trouver du bon dans le mauvais, et de claironner après chaque catastrophe qu’on est “sur la bonne voie” malgré l’évidence contraire (2). Voyez plutôt: depuis que le Front de Gauche existe, le PCF a perdu le tiers de ses conseillers régionaux, le tiers de ses députés européens, le quart de ses conseillers généraux… et maintenant la moitié de ses députés. Et voici le communiqué publié sous la signature de Pierre Laurent sur le site du PCF pour commenter ce résultat:
Les premières estimations, ce soir, confirment le basculement de l’Assemblée nationale à gauche. La page du pouvoir sarkozyste en France est définitivement tournée mais le parti de l’ancien président sauve un nombre substantiel de sièges. Il ne fait aucun doute que la droite saura s’en servir pour multiplier les obstacles au changement dans notre pays. L’entrée du FN dans l’hémicycle qui reste heureusement circonscrite est un signal d’alarme supplémentaire.
A gauche, le Parti socialiste parvient à son objectif et dispose à lui tout seul d’une majorité absolue. Le Front de gauche aura moins de députés malgré un gain en nombre de voix et en pourcentage mais les conditions semblent ce soir réunies pour la constitution d’un groupe à l’Assemblée. Si cela se confirme, c’est une bonne nouvelle pour la démocratie.
Force est de constater, cependant, que le mode de scrutin et l’inversion du calendrier électoral dénaturent la portée des élections législatives et déforment le paysage de l’Assemblée nationale au profit du bipartisme. A gauche, la majorité législative est ainsi distordue par rapport à la réalité de la majorité politique de gauche dans le pays. Le PS totalise 65% des voix de la gauche à l’élection présidentielle, près de 70% avec ses alliés aux législatives et obtient plus de 90% des députés de gauche. Le Front de gauche totalise 25% des voix de gauche à la présidentielle, 15% aux législatives et compte moins de 5% des députés de gauche. C’est une anomalie provoquée par une logique institutionnelle implacable qui, de scrutins en scrutin, a permis aux deux plus grosses formations de monopoliser aujourd’hui 90% des sièges à l’Assemblée nationale.
En dépit de cette injustice, le Front de gauche avec l’influence qui est la sienne dans le pays, avec ses deux groupes au Parlement, ses élus sur le territoire et au Parlement européen, entend être une force d’initiatives et de propositions active et positive pour la réussite du changement dans notre pays.
Que de bonnes nouvelles, donc. “La page du sarkozysme est tournée”, “l’entrée du FN à l’hémicycle est heureusement circonscrite”. Bon, d’accord, le Front de Gauche “aura moins de députés”, mais ce n’est pas grave puisque d’une part on a “gagne en nombre de voix et en pourcentage” et d’autre part “les conditions semblent ce soir réunies pour la constitution d’un groupe”. Et puis, le Front de Gauche “avec l’influence qui est la sienne dans le pays” – tu parles! – entend être une force d’initiatives et de propositions active et positive pour la réussite du changement dans notre pays”. Tout va bien, bonnes gens, vous pouvez dormir sur vos deux oreilles. Et si certaines choses vont mal, ce n’est sûrement pas de notre faute, mais celle d’un “mode de scrutin injuste” et de “l’inversion du calendrier électoral”.
Chez le Parti de Gauche, c’est exactement la même chose. Voici in extenso le communiqué publié sur son site:
Le Parti de Gauche se félicite de la défaite de la droite. Un mois après le résultat des présidentielles, le Sarkozysme est battu une seconde fois à plate couture. L’axe Sarkozy-Merkel est affaibli : la possibilité de rompre avec le traité qu’ils ont élaboré est plus que jamais possible. Le Président de la République dispose d’une majorité s’il veut proposer une autre voie à l’’Union européenne alors qu’à l’inverse Mme Merkel est affaiblie. Il a donc une lourde responsabilité.
L’assemblée élue ce soir ne représente cependant qu’une réalité déformée du pays. Les conséquences de la présidentialisation du régime font qu’à peine plus d’un français sur deux a voté. Le Front de Gauche, 4 millions de voix à la présidentielle, dispose de moins d’élus que dans l’assemblée sortante ! C’ est un problème pour la démocratie mais aussi pour la gauche toute entière mal représentée dans sa diversité. Aussi, nous espérons à minima que les conditions seront créées pour que le Front de Gauche dispose d’un groupe à l’assemblée.
Seul majoritaire à l’assemblée, le PS a donc toutes les responsabilités sur ses épaules. Dans les semaines à venir, le Front de Gauche appuiera à l’assemblée et dans les mobilisations toutes les mesures qui iront dans le bon sens, refusera toutes mesures d’austérité et sera plus que jamais une force de propositions alternatives. Le bon résultat de Syzira ce soir, qui est en Grèce plus que jamais la première force de gauche, indique le cap à suivre pour le Front de Gauche.
L’élection de deux députés du FN, mauvaise nouvelle pour la République, ne doit pas nous faire perdre de vue l’essentiel. Leur élection n’a été rendue possible qu’à cause de la porosité idéologique entre l’UMP et le FN. Une course de vitesse est désormais engagée. Les idées racistes d’extrême droite ne reculeront que grâce à une bataille idéologique sans concession menée de pair avec une politique sociale en faveur des catégories populaires. Le Parti de Gauche y sera en première ligne.
Là encore, on se félicite de la victoire, de la défaite du “sarkozysme”. On dénonce encore et toujours le FN. Mais les résultats du Front de Gauche ? Ah oui… “il disposera de moins d’élus que dans l’assemblée sortante”. La faute, bien entendu “à la présidentialisation”.
Au lieu de passer leur temps à traiter Marine Le Pen de sémi-démente, les dirigeants du Front de Gauche feraient bien de suivre attentivement sa stratégie. Le FN a adopté, avec une remarquable continuité, une stratégie d’influence sur le débat public. Il a fait en sorte d’attirer le débat public sur son terrain, en faisant un véritable travail en profondeur. Au bout de vingt ans, il a réussi à ce que l’ensemble de la classe politique débatte, commente, admette ou diabolise ses propositions (4). Malgré tous les “cordons sanitaires”, les “fronts républicains” et le système électoral “injuste” qui a rendu l’élection de ses candidats quasi-impossible, le Front National a réussi à s’implanter dans l’électorat populaire et à exercer une véritable influence politique. Cette stratégie contient des leçons importantes que le Front de Gauche ferait bien d’apprendre.
C’est toujours tentant de rejeter la faute des défaites sportives sur l’arbitre, et celle des défaites électorales sur le système électoral. Dans les deux cas, cela évite de regarder ce qui va mal chez soi en rejetant la faute sur un tiers extérieur. Mais ces théories doivent être rejetées, et cela pour trois raisons. La première, c’est qu’en politique il est absurde de tenir pour responsable de ses échecs des paramètres indépendants de notre volonté, particulièrement lorsqu’ils sont prévisibles. Un mode de scrutin n’est pas une catastrophe naturelle: c’est une règle du jeu connue à l’avance. Se poser comme objectif de “conquérir et reconquérir de nombreuses circonscriptions” alors que le mode de scrutin – connu à l’avance, j’insiste – rend cette (re)conquête impossible, pour ensuite expliquer la non-atteinte de ses objectifs par la faute d’un “mode de scrutin injuste”, c’est un comportement infantile. Une stratégie politique digne de ce nom doit tenir compte des contraintes, et son échec ne peut pas être justifié par celles-ci. C’est un peu comme un général qui engagerait la bataille en Janvier et expliquerait ensuite sa défaite par l’arrivée de l’hiver…
La seconde raison est une question de cohérence. On ne peut pas décemment dénoncer “l’injustice” du système électoral à grands coups de calculs, et ensuite se réjouir que “l’entrée du FN dans l’hémicycle soit heureusement circonscrite” par cette même injustice. Peut-on raisonnablement se réjouir d’une “injustice”, même lorsqu’elle touche les gens qu’on n’aime pas ?
Mais la troisième raison pour rejeter cet argument est plus profonde: l’objectif d’un mode de scrutin n’est pas la “justice”, mais la gouvernabilité. Le but d’un système électoral n’est pas d’assurer que chacun a le nombre de sièges qui lui correspond en fonction d’une règle “juste” (“juste” selon quels critères, d’ailleurs ?) pas plus qu’il n’a pour fonction d’assurer que l’Assemblée Nationale est une image sociologique ou ethnique (tant de femmes, tant de noirs, tant d’ingénieurs, tant de sourds-muets) de la société. Le système électoral a pour objectif de constituer une Assemblée Nationale qui permette de gouverner le pays, c’est à dire, de produire des lois qui 1) reflètent au mieux la volonté du peuple et 2) qui soient acceptées par ce peuple comme légitimes. Un système électoral qui, au nom d’une répartition “juste” rendrait le pays ingouvernable – comme c’est le cas dans beaucoup de systèmes de proportionnelle intégrale, voir par exemple le cas israélien – ne remplirait pas son rôle. En d’autres termes, tout système électoral rationnel repose sur l’idée “qu’il vaut mieux une injustice qu’un désordre”. C’est pourquoi la “justice” n’est pas un critère pertinent lorsqu’on examine un tel système. Et que faire des calculs dans tous les sens pour démontrer que, décidément, le monde est trop injuste, est un exercice parfaitement inutile (3).
Certains me diront que perdre quelques élus, ce n’est pas grave, que le but d’un parti politique est d’influencer le réel, et que la question des postes et des sièges est secondaire. Ce n’est pas tout à fait faux. Après tout, le Front National exerce un influence considérable sur le débat public avec un nombre d’élus très réduit. Seulement, et c’est là à mon avis un point fondamental dans la réflexion sur l’avenir du PCF en particulier et du Front de Gauche en général, la constatation la plus amère après ce cycle électoral est que le Front de Gauche n’a, en pratique, aucune influence sur le débat public, et encore moins sur les évènements. Les prises de position du Front de Gauche, disons le franchement, tout le monde – en dehors des quelques dizaines de milliers de militants – s’en fout. Il n’y a qu’à voir la résonance quasi-nulle du débat interne du PCF pour ou contre la participation gouvernementale. Tout le monde sait pertinemment que cela ne changera pas grande chose pour personne, sauf pour l’heureux élu qui héritera peut-être d’un strapontin ministériel.
Le moment est donc venu de laisser de côté les explications auto-justificatrices et regarder froidement le bilan du Front de Gauche. Certains – particulièrement parmi les “orthodoxes” du PCF – tireront de ces résultats une mise en cause de la stratégie de Front de Gauche. Ce serait aller un peu vite en besogne: il ne faut pas confondre la stratégie de Front de Gauche – c’est à dire la question de savoir si le PCF doit rester dans un splendide isolément ou au contraire constituer une structure permanente de coopération avec d’autres organisations – de la stratégie du Front de Gauche – c’est à dire, des choix politiques, stratégiques et tactiques effectués collectivement et mises en oeuvre depuis que le Front de Gauche existe. Bien entendu, ces deux questions ne sont pas totalement indépendantes, puisque le choix de la stratégie de Front de Gauche a pour prix l’acceptation par le PCF d’un certain nombre d’exigences de ses partenaires. Mais il reste qu’il ne faut pas confondre les deux questions. On peut parfaitement infléchir la stratégie du Front tout en restant dans une stratégie de Front.
La question prioritaire pour le Front de Gauche aujourd’hui est d’arriver à formuler un véritable projet. Qui ne peut se réduire à une liste de courses genre “L’humain d’abord”. Un tel projet suppose de se poser en termes réalistes la question des couches sociales qu’il prétend représenter. Après cette expérience, il est clair que l’espace pour un n-ième parti gauchiste des classes moyennes est limité. L’autre solution est de chercher à reconquérir l’électorat populaire aujourd’hui séduit par Marine Le Pen. Mais ce choix implique une véritable réflexion sur les peurs, les envies, les difficultés, les tabous et – last but not least – les intérêts de cet électorat. Quelque soit le positionnement choisi, l’élaboration d’un projet qui soit en même temps crédible et entendable par l’électorat cible nécessite du travail. Beaucoup de travail. Pour faire ce travail, le Front de Gauche a besoin de constituer un véritable pôle d’expertise, ce pôle qui lui a cruellement manqué pendant la campagne présidentielle.
La deuxième priorité, qui rejoint la première, est le besoin d’institutionnalisation. La stratégie du Front de gauche doit pouvoir être débattue et décidée d’une manière transparente et prévisible. Elle ne peut pas dépendre des lubies de ses dirigeants – ou pire encore, de leur entourage – qui se permettent de balancer leurs convictions personnelles comme s’il s’agissait de la ligne officielle de l’organisation. Une telle institutionnalisation du Front implique comme condition nécessaire une institutionnalisation de ses membres. Aussi longtemps que le PG fonctionnera comme une secte, il y a peu de chances que les processus de décision du Front soient transparents.
Institutionnaliser veut aussi dire mettre en place une véritable politique de cadres. Le système darwinien qui préside à la sélection des cadres – autant au PCF qu’au PG – ne produit que des apparatchiks aux capacités de survie et d’adaptation incontestables, à l’échine souple et aux dents longues, mais aux qualités intellectuelles et morales contestables. Une organisation a besoin de cadres formés, qui travaillent pour faire avancer ses buts et non exclusivement pour leur carrière. Institutionnaliser, cela veut aussi dire se placer dans un cadre où la politique est une affaire non pas de “coups” mais de long terme. Où l’on ne court pas derrière la dernière nouveauté, mais où l’on maintient une continuité dans l’action.
Le PCF va devoir abandonner l’illusion que la magie du Front de Gauche allait être suffisante pour inverser son processus de déclin. Le PG va devoir abandonner ses projets d’OPA sur la “gauche radicale” et sur le PCF. Maintenant que les élections sont passées, et que les prochaines échéances sont loin, c’est le moment idéal pour lancer une véritable réflexion sur ces questions. Et les militants du Front de Gauche devraient exiger qu’elle soit lancée le plus vite possible.
Descartes
(1) Il fut un temps, avant que la “mutation” donne le pouvoir aux “notables”, ou les élus communistes qui quittaient le Parti avaient l’élégance de démissionner des mandats auxquels ils avaient été élus sous l’étiquette communiste. Depuis que les élus sont devenus des “notables” propriétaires de leurs sièges à titre personnel, cette coutume décidément trop désuète a été abandonnée…
(2) Tout ça n’est guère nouveau. Et les militants y sont tellement habitués qu’ils n’ont même plus la force de se révolter. Après la catastrophe de 2002 (Robert Hue, 3,5%) et 2007 (Marie-George Buffet, 1,9%) les militants avaient demandé des têtes. Depuis que le Front de Gauche existe, le PCF a perdu une bonne partie de ses élus aux européennes et aux régionales, mais les voix discordantes ont été réduites au silence avec l’argument massue: grâce au Front de Gauche, on allait voir ce qu’on allait voir aux législatives – auxquelles on sacrifiait sciemment la candidature communiste à la présidentielle. Maintenant, on a vu.
(3) Il faut d’ailleurs examiner les faits: imaginons qu’un système “juste”, la proportionnelle intégrale, ait été en vigueur en France. Qu’est-ce que cela aurait donné en 2012 ? Si l’on construit une Assemblée Nationale à partir des résultats de l’élection présidentielle de mai en appliquant la proportionnelle sans seuil, on aboutit à une Assemblée ou la gauche et les écologistes détiennent 44 % des sièges, la droite républicaine 29%, le centre 9% et l’extrême droite 18%. En d’autres termes, ni la droite ni la gauche seraient majoritaires… comment gouverner dans ces conditions ? Avec seuil, ce serait encore pire: si l’on fixe le seuil à 3%, la gauche perd l’appoint des écologistes et de l’extrême gauche…
(4) Mélenchon est d’ailleurs celui qui est le plus tombé dans le panneau: dans chacun de ses discours, dans chacune de ses interventions, il passe un certain temps à commenter – négativement – les propositions du FN sans se rendre compte que ce commentaire, même négatif, contribue à installer le discours du FN dans le paysage, selon le vieux principe bien connu des publicitaires: “il vaut mieux qu’on parle de vous en mal que qu’on ne parle pas de vous du tout”. Et je ne parle même pas de l’épisode Hénin-Beaumont: Mélenchon n’a pas compris que, vu du côté de l’électorat du FN, être diabolisé par Jean-Luc Mélenchon est aussi valorisant que peut l’être pour un électeur mélenchoniste le fait d’être diabolisé par Marine Le Pen…
Puissent les militants du PG t’entendre…
J’ai néanmoins de sérieux doutes que ça puisse arriver. Je pense qu’une partie des militants de JLM est sonnée par son échec à Hénin Beaumont, et qu’elle pourrait être réceptive à ta suggestion
de remise en cause de la stratégie du FDG. Le problème vient de l’entourage de Mélenchon qui de toute façon, verrouillera toute velléïté de remise en question. Je les image plutôt réfléchissant
au prochain coup médiatique de leur champion à mettre en scène (bouquin ? documentaire ? festival de Cannes ? zénith à la Ségolène ?).
J’ai oüie dire que le PG a un congrès en 2013, ce serait l’occasion idéale pour revenir à froid sur la présidentielle et les législatives, discuter d’un programme, d’une stratégie,
d’institutionnalisation. Je leur ai suggéré, au vu de l’actualité grecque, de réfléchir sérieusement à un plan B de sortie de l’euro pour les 5 années à venir ; même si certains admettent que la
probabilité pour que l’euro disparaisse dans les 10 prochaines années est bien plus grande que l’inverse, ils sont tétanisés et ont plus peur d’être pris dans le même sac que le FN ou DLR, que
d’établir un plan qui sera bien pratique pour quand l’euro plongera. C’est fou comme le qu’en dira-t-on peut être plus fort que la réflexion politique. Si le FDG compte (comme les grecs de
Syriza) sur un ébranlement tel pour que ce soit lui qui soit projeté en avant en cas de crise aigüe de l’euro, il se fourre le doigt dans l’oeil jusqu’à l’omoplate. Les électeurs choisiront
plutôt des gens qui ont déjà pas trop mal gouverné (que ce soit droite ou socdems), que des gens qui ont toujours critiqué sans jamais proposer quelquechose de faisable et concret, et jamais
devancé les catastrophes. C’est plus le FN qui en bénéficiera, voire une recomposition de la droite autour de Fillon et de NDA. Hollande qui a les “eurosceptiques” Montebourg et Fabius
dans son équipe, quelques personnalités intéressantes à aller chercher côté MRC, pourra toujours trouver un plan de sortie si ça lui tombe dessus.
Ce n’est pas trop tard pour Mélenchon d’envoyer promener certains de ses proches (et intelligent et charmant comme il peut l’être, il pourrait le faire avec doigté afin de ne pas froisser l’égo
de certains “conseillers”), mais j’ai aussi des doutes sur sa propre lucidité. J’ai toujours pensé que des baffes sonnantes (type l’échec à Hénin Beaumont) devraient briser le cercle du
virtualisme, mais à lire les comuniqués, j’ai les bras qui m’en tombent. Si ces communiqués étaient juste de la com’ pour l’extérieur, mais que le boulot de remise en question était fait, ce
serait pas grave. Mais ce n’est pas le cas dans les directions du PCF et du PG.
Le MRC et le PRG auront sans doute leur groupe parlementaire, et ils ont été bien plus malins que le FDG.
Le problème vient de l’entourage de Mélenchon qui de toute façon, verrouillera toute velléïté de remise en question. Je les image plutôt réfléchissant au prochain coup médiatique de leur
champion à mettre en scène (bouquin ? documentaire ? festival de Cannes ? zénith à la Ségolène ?).
J’avoue que c’est ma crainte aussi. Cela étant dit, je pense que Jean-Luc est suffisamment abattu après l’affaire Hénin-Beaumont qu’il est peut-être en état psychologiquement de commencer à jeter
un regard réaliste sur son entourage.
J’ai oüie dire que le PG a un congrès en 2013, ce serait l’occasion idéale pour revenir à froid sur la présidentielle et les législatives, discuter d’un programme, d’une stratégie,
d’institutionnalisation.
Depuis “lignes d’horizon”, j’ai tellement entendu ce discours que j’ai du mal à y croire aujourd’hui. Le premier pas pour que ce processus soit crédible serait que les débats soient publics, et
que le PG cesse de se comporter en société secrète.
Si le FDG compte (comme les grecs de Syriza) sur un ébranlement tel pour que ce soit lui qui soit projeté en avant en cas de crise aigüe de l’euro, il se fourre le doigt dans l’oeil jusqu’à
l’omoplate. Les électeurs choisiront plutôt des gens qui ont déjà pas trop mal gouverné (que ce soit droite ou socdems),
Tout à fait. La France n’est pas la Grèce, et nos élites politico-administratives ont encore – à juste titre – une image d’efficacité qui leur vaut une certaine confiance du peuple. L’idée que
les français pourraient confier les institutions à un parti sans projet et sans expérience est risible.
Le MRC et le PRG auront sans doute leur groupe parlementaire, et ils ont été bien plus malins que le FDG.
Tout à fait. Je me suis promis de faire un papier sur la stratégie des rapports avec le PS, mais je vous avoue que je n’arrive pas à le finir…
Si, nous communistes, devons engager ce travail de réflexion, il va falloir remonter loin et réfléchir beaucoup. Je suis quant à moi de plus en plus convaincu que nous avons choisi le mauvais
chemin dès 1965 et la candidature unique de Mitterrand à la présidentielle.
Sur le fond, mai 1968 marque déjà l’irruption du néo-libéralisme dans les tendances prospectives de l’idéologie dominante. Charlety, c’est déjà la collusion entre la social-démocratie et Lecanuet
pour abattre le modèle gaulliste de développement, hérité du programme du CNR.
Les communistes ne se sont pas complètement plantés sur la nature profonde de Mai, mais ils ont été incapables d’en tirer les enseignements, pour une stratégie léniniste de défense d’acquis
indéniables. Ils ont au contraire initiés eux-mêmes le mouvement de programme commun et d’union de la gauche qui conduirait à leur perte (celle des communistes et celle des acquis…), comme déjà
l’annonçait Mitterrand devant l’internationale socialiste.
Finalement, sur un plan groupusculaire, le Front de gauche n’est qu’une pitoyable resucée du programme commun de 1971. Depuis 1965, nous sommes prisonniers d’un schéma mental suicidaire : comme
des moustiques qui tournent autour d’une ampoule, nous tournons autour de l’Union de la gauche.
Déjà sous de Gaulle (y compris en mai 1968), et peut-être dans l’union avec certains gaullistes, contre les libéraux de gauche et de droite, il aurait fallu faire de la défense du programme du
CNR le socle de notre politique. Avant d’aller plus loin dans une démarche historique. Mais les blocages sociétaux de la société gaullienne et ses insuffisances démocratiques nous ont aveuglés.
Aujourd’hui, la seule issue est dans l’opposition frontale contre les maastrichtiens de gauche comme de droite, le rejet de l’illusion d’une union de la gauche sans principes, l’union du peuple
de France pour la défense des intérêts de la classe ouvrière et des couches populaires, contre la dictature bruxelloise et ses sbires parisiens, contre les exigences sans limites du patronat et
des actionnaires.
Mais en avons-nous la force ? Il faudra certainement du temps pour reconstruire un parti communiste. Il faudra être capable de théoriser tout ce que je ne fais que pressentir, borné que je suis
par ma propre histoire et mes méconnaissances. L’urgence pour les communistes serait de beaucoup parler. Mais le combat politique ne nous en laisse pas le temps…
Je suis quant à moi de plus en plus convaincu que nous avons choisi le mauvais chemin dès 1965 et la candidature unique de Mitterrand à la présidentielle.
Remonter aussi loin – en dehors des leçons qu’on peut toujours tirer de l’histoire – ne sert à rien. Le vin a été tiré, il faut le boire. La question à se poser est d’essayer d’analyser l’état de
la société – et du Parti – aujourd’hui et voir quelles sont les options possibles.
Sur le fond, mai 1968 marque déjà l’irruption du néo-libéralisme dans les tendances prospectives de l’idéologie dominante. Charlety, c’est déjà la collusion entre la social-démocratie et
Lecanuet pour abattre le modèle gaulliste de développement, hérité du programme du CNR.
Tout à fait. Mai 1968 est l’un des symptomes de la transformation qui amène la bourgeoisie alliée aux classes moyennes à mettre à bas le compromis gaullo-communiste qui préside aux “trente
glorieuses”. De Gaulle sera envoyé aux oubliettes de l’histoire en 1969 puis le gaullisme en 1974, pendant que le PCF amorcera sa lente décrue. Ils céderont tous deux la place au compromis
“libéral-libertaire” qui de Giscard à Mitterrand marquera la transformation libérale de notre pays.
Les communistes ne se sont pas complètement plantés sur la nature profonde de Mai, mais ils ont été incapables d’en tirer les enseignements, pour une stratégie léniniste de défense d’acquis
indéniables.
Je ne serais pas trop dur avec eux. A partir des 1968, ils allaient contre le sens de l’histoire. Si vous êtes léniniste, vous saurez qu’on ne peut pas, par un simple choix de stratégie, aller
contre les conditions objectives. La société a changé avec la prise de pouvoir des classes moyennes et le ralentissement de la croissance après le “rattrapage” de l’après-guerre. Dès lors, le
modèle que voulaient les gaullo-communistes était condamné. Il est dejà miraculeux que Marchais & Co. aient réussi a ralentir la déchéance du PCF et à lui garder une certaine cohésion qui lui
a empêché de connaître le sort du PCI.
Finalement, sur un plan groupusculaire, le Front de gauche n’est qu’une pitoyable resucée du programme commun de 1971.
Certainement pas: le programme commun de 1971 avait donné lieu à un véritable travail politique et programmatique auquel avaient participé les meilleurs cerveaux du PCF et du PS. Quand on relit
le document aujourd’hui, on est étonné par la qualité et l’exhaustivité de ce travail. Le Front de Gauche est un pur accord tactique, sans le moindre véritable travail de fond.
Déjà sous de Gaulle (y compris en mai 1968), et peut-être dans l’union avec certains gaullistes, contre les libéraux de gauche et de droite, il aurait fallu faire de la défense du programme
du CNR le socle de notre politique.
Paul Marie de la Gorce a defendu une idée similaire. C’est un beau rêve, mais un rêve impossible. La tranchée qui divise la gauche de la droite est trop profonde pour que l’accord
gaullo-communiste ait pu être autre chose qu’une alliance de fait.
Mais en avons-nous la force ? Il faudra certainement du temps pour reconstruire un parti communiste. Il faudra être capable de théoriser tout ce que je ne fais que pressentir, borné que je
suis par ma propre histoire et mes méconnaissances. L’urgence pour les communistes serait de beaucoup parler. Mais le combat politique ne nous en laisse pas le temps…
Ca, c’est le prétexte qu’utilisent les directions pour empêcher les gens de penser. Quand on veut réflechir, on trouve le temps. Comme disait ma grande mère, quand on veut on trouve des moyens,
quand on veut pas on trouve des prétextes.
Je vous remercie de cette analyse, elle obéit à la prescrition de ce vieux Baruch Spinoza “Ni s’emballer, ni sanglotter, mais chercher à comprendre ” (traduction libre).
J’ai particulièrement apprécié la distinction entre stratégie de front de gauche, et pratique du front de gauche. Je trouve que c’est un outil intellectuel très efficace pour penser une
difficulté dans laquelle je m’empêtrais depuis quelques jours.
Il y aurait cependant un débat que j’aimerais engager sur “couche moyenne, classes populaires”mais je compte y penser plus avant de vous envoyer quelque chose de précis, car vos remarques à
plusieurs reprises sur les “classes moyennes” auxquelles s’est adressé à tort le Front de gauche négligeant “les couches populaires” me paraît globalement intéressant mais je ne comprends pas ce
qu’est “une classe moyenne”, comment elle se définit dans votre optique.
Bref, je trouve que c’est un terme fourre-tout, où un marxiste ne saurait retrouver ses billes, et pour moi c’est d’une certaine façon le point faible de vos analyses, même si je sens ,mais il
vaudrait mieux comprendre, qu’il y a là un point fondamental pour l’action politique qu’il faudra bien mener.
Restons lucides.
Il y aurait cependant un débat que j’aimerais engager sur “couche moyenne, classes populaires” mais je compte y penser plus avant de vous envoyer quelque chose de précis, car vos remarques à
plusieurs reprises sur les “classes moyennes” auxquelles s’est adressé à tort le Front de gauche négligeant “les couches populaires” me paraît globalement intéressant mais je ne comprends pas ce
qu’est “une classe moyenne”, comment elle se définit dans votre optique.
Je serai ravi d’engager le débat sur cette question, qui a mon sens est fondamentale si l’on veut reviser la théorie marxiste pour la rendre opérative dans le contexte d’aujourd’hui. Cela
suppose, comme vous le signalez, de lui donner une définition qui la lie aux structures du capitalisme, et non d’en faire une pure catégorie sociologique.
J’a commencé un peu ce travail en partant de la description marxiste traditionnelle, qui met d’un côté les exploités et de l’autre les exploiteurs, les uns possédant la force de travail et étant
obligés de la vendre pour vivre, les autres possédant le capital, achetant la force de travail pour un prix inférieur à la valeur produite, la différence constituant la plus-value extraite par le
capitaliste au travailleur.
Maintenant, si on classe les individus en fonction de la plus-value qu’ils génèrent (c’est à dire, la différence entre la valeur produite et la valeur qu’ils empochent), cette plusvalue est
positive pour les prolétaires, négative pour les bourgeois. Quelque part, elle doit donc s’annuler… et ce lieu, ce sont précisement les classes moyennes. En d’autres termes, les classes
moyennes sont le groupe social qui n’empoche pas (directement) de plus-value, mais qui n’en génère pas non plus.
Comment elle arrive à faire cela ? Si le prolétaire est obligé de laisser une partie de la valeur qu’il produit chez le capitaliste, c’est parce qu’il ne possède pas de capital suffisant pour
tirer toute la valeur de sa force de travail. Les classes moyennes arrivent à récupérer la valeur qu’elles produisent parce qu’elles possèdent un capital (matériel et immatériel) et un poids
politique qui leur permet de négocier avec la bourgeoisie en position de force.
Je sais, c’est une théorie qui peut paraître schématique ou partielle et qui l’est certainement. Je ne prétend pas être un nouveau Marx, et j’ai certainement laissé de côté beaucoup de problèmes.
Mais je suis convaincu que c’est à partir de cette construction qu’on peut développer une théorie rendant compte des réalités “de classe” des sociétés post-industrielles.
Bonjour.
Je ne connais pas le PCF et le PG donc je n’interviendrai pas là-dessus.
En revanche plusieurs points me viennent à l’esprit.
Sur l’Assemblée nationale, je pense qu’on peut avoir une assemblée représentative des forces politiques en présence et néanmoins gouvernable. On parle beaucoup de la Grèce en ce moment. Et une
des infos concernant les législatives en Grèce est que le parti arrivé en tête a droit à un bonus de 50 députés. Nous pourrions faire la même chose en France. On élirait 477 députés à la
proportionnelle et le parti arrivé en tête se verrait octroyer 100 sièges supplémentaires. En tout cas je pense que le statut quo actuel est très mauvais. De Gaulle voulait en finir avec le
régime des partis. Ce régime est revenu. Un candidat indépendant ne peut plus rien faire. Plusieurs partis qui représentent les classes moyennes et la bourgeoisie s’allient pour dénier toute
représentation ou levier politique aux classes populaires. Je ne suis pas un soutien du FN qui est selon moi démagogique et ambigu. Toutefois un parti qui représente 17% des suffrages exprimés
lors des présidentielles doit pouvoir se faire entendre à l’Assemblée. Le front républicain qu’on oppose au FN n’est que le front des classes moyennes et de la bourgeoisie contre les classes
populaires.
Ensuite, concernant les votes blancs et l’abstention, je pense qu’on peut leur trouver une utilité qui serait celle de déterminer le niveau de rémunération des élus. On établirait en premier lieu
un niveau de rémunération pour chaque poste (président, ministre, sénateur, député, etc) Cette rémunération ne pourrait être modifiée que par référendum. Le niveau d’abstention et de votes blancs
déterminerait le niveau de réduction du traitement des élus. 30% d’abstention et de votes blancs = un salaire versé inférieur de 30% au salaire de référence du poste. L’argent est le nerf de la
guerre et il est bon de frapper directement dans le portefeuille des partis politiques.
Dernier point. L’Europe. Le PG et le PCF version Laurent et Buffet sont pro-européens et pro-Euro. Nous avons vu que l’Euro pour être pérenne a besoin de l’existence d’une nation européenne,
garante de la solidarité financière inconditionnelle entre les régions de l’Euroland. Pourra-t-on un jour arriver à créer une nation européenne ? Et c’est là que je pense à la Suisse. D’ailleurs
les thuriféraire de la construction européenne ont peut-être ce modèle en tête ? Car la Suisse est-elle réellement une nation ? Si les Suisses y sont parvenus malgré les différences de religions,
les différences linguistiques, peut-être que l’Europe pourrait y parvenir ?
Sur l’Assemblée nationale, je pense qu’on peut avoir une assemblée représentative des forces politiques en présence et néanmoins gouvernable. On parle beaucoup de la Grèce en ce moment. Et
une des infos concernant les législatives en Grèce est que le parti arrivé en tête a droit à un bonus de 50 députés. Nous pourrions faire la même chose en France.
Et qu’est ce que cela a donné en Grèce ? Une assemblée ingouvernable et une crise qui laisse l’Etat sans moyens d’agir, et qu’il faut dénouer en refaisant des élections. Est-ce une bonne chose ?
Imaginons qu’un évènement imprévu nécessitant des décisions rapides ait eu lieu pendant la crise. On fait quoi ?
En tout cas je pense que le statut quo actuel est très mauvais.
Je n’en suis pas persuadé. En tout cas, les électeurs ne considèrent pas que le parlement soit illégitime, et continuent à considérer que les lois votées doivent être appliquées. C’est donc
qu’ils se sentent représentés.
De Gaulle voulait en finir avec le régime des partis. Ce régime est revenu. Un candidat indépendant ne peut plus rien faire.
Tu expliqueras ça à Olivier Falorni… Le “régime des partis”, loin de revenir, est mort. Aujourd’hui, ce sont les élus qui dominent les partis, et non l’inverse. La possibilité d’un parti
d’imposer un candidat dont les électeurs ne veulent pas est pratiquement nulle. Car on oublie souvent que, dans un système de représentation proportionnelle, ce sont les partis politiques qui
choisissent les élus (le peuple ne fait que choisir leur nombre) puisque ce sont eux qui décident d’accorder les places sur les listes.
Plusieurs partis qui représentent les classes moyennes et la bourgeoisie s’allient pour dénier toute représentation ou levier politique aux classes populaires. Je ne suis pas un soutien du FN
qui est selon moi démagogique et ambigu. Toutefois un parti qui représente 17% des suffrages exprimés lors des présidentielles doit pouvoir se faire entendre à l’Assemblée.
Je n’en vois pas la nécessité, aussi longtemps qu’il a les moyens de se faire entendre dans le débat public, et donc d’exercer une pression sur les élus des autres partis. Le FN a beau ne pas
être représenté par des élus de son étiquette, il a réussi à peser sur de nombreux textes législatifs. Et c’est cela l’essentiel.
Je crois qu’il faut sortir de l’idée que les élus “représentent” seulement les gens de leur parti, ou ceux qui ont voté pour eux. On est aussi “représenté” par des gens pour qui on n’a pas voté,
tout simplement parce que ces gens-là sont quand même sensibles à notre pression. Après tout, c’est une assemblée de gauche qui a voté l’amnistie des “généraux félons” de l’Algérie Française pour
faire plaisir à l’électorat “rapatrié”, qui pourtant n’avait pas véritablement voté à gauche…
Ensuite, concernant les votes blancs et l’abstention, je pense qu’on peut leur trouver une utilité qui serait celle de déterminer le niveau de rémunération des élus. On établirait en premier
lieu un niveau de rémunération pour chaque poste (président, ministre, sénateur, député, etc) Cette rémunération ne pourrait être modifiée que par référendum. Le niveau d’abstention et de votes
blancs déterminerait le niveau de réduction du traitement des élus.
Sans vouloir t’insulter, cette vision du traitement des élus comme une récompense qui serait modulée pour tenir compte de leur “performance” est une absurdité. Il faut se souvenir quelle est
l’histoire du traitement des élus, et pourquoi on l’a créé. Pendant très longtemps, les “charges publiques” n’ont pas été rémunérées. Il était admis que c’était un service désintéressé au
Royaume, et qu’à ce titre elles devaient être bénévoles. Seulement, le problème de ce système est que du coup seuls ceux qui avaient une fortune personnelle avaient la possibilité de se dévouer
au service de la patrie, puisque les autres devaient consacrer leur temps à gagner leur vie. A partir de Louis XIII, on commence à rémunérer certaines charges pour permettre à des “roturiers” de
les occuper dans une logique méritocratique. La Révolution généralise le payement de tous les fonctions publiques pour en ouvrir largement l’accès.
Ta proposition revient à récréer le système de l’ancien régime. Pour les députés ayant une fortune personnelle, le vote blanc sera finalement sans importance. Il posera des problèmes seulement à
ceux qui, n’ayant pas de fortune, auront besoin de leur traitement pour vivre.
Car la Suisse est-elle réellement une nation ?
Probablement pas. Ce n’est même pas une fédération, seulement une confédération.
Si les Suisses y sont parvenus malgré les différences de religions, les différences linguistiques, peut-être que l’Europe pourrait y parvenir ?
En politique, il est essentiel de ne pas confondre les échelles. Des choses qui fonctionnent à petite échelle cessent de fonctionner lorsqu’on passe sur une grande échelle. Même si les bernois
sont différents des genevoix en langue et en réligion, ils sont suffisamment proches géographiquement pour être soumis à des contextes et avoir des modes de vie très similaires.
votre réponse au commentaire n°3 posté par Baruch
je reviens sur votre définition des classes moyennes.
1-dans ce type de définition comment classez-vous les retraités (ils ont un revenu, sans produire de plus value) ?
pour tourner la difficulté, on peut dire que c’est un salaire “différé”.
Oui, mais quand je regarde le comportement des retraités dans leur masse, je crois bien qu’ils ont conscience qu’en fait ils vivent de la “solidarité” du système en place, et qu’ils sont donc
tenté de lui accorder leur soutien (voir les votes de ces couches qui “régulièrement” votent pour le pouvoir en place.
Si l’on admet que c’est un salaire différé, alors il faut en tenir compte dans le salaire pour estimer la limite classe moyenne classe productive;
2- comment classez-vous tous les chômeurs et autres personnes en age d’être actifs qui vivent peu ou prou de la redistribution nationale (RSA, allocations diverses …); En fait, c’est la même
question que pour les retraités.
3- comment estimer la position de tous ceux qui ne sont pas directemet insérés dans le processus de production, autrement dit la masse des agents de l’état, des collectivités locales, des
services publics non marchands ?
4- il me semble que Marx ne classait pas dans les travailleurs exploités, tous ceux qui n’étaient pas directement productifs, et encore productifs dans le secteur “matériel”. Pour les anciens,
cela rappellerait les discussions au PCF pour savoir si les camioneurs, les employés etc… faisaient ou non parti des “exploités”. (au temps de Fizbin on lui reprochait son approche “élargie” de
l’exploitation, et en conséquence son adresse aux employés …)
Peut-être que ces questions ne sont pas pertinentes. A vous de voir.
1-dans ce type de définition comment classez-vous les retraités (ils ont un revenu, sans produire de plus value) ? pour tourner la difficulté, on peut dire que c’est un salaire
“différé”.
Cela dépend en fait de la structure du système de retraites: dans un pays de retraite par capitalisation, le retraité est un rentier – c’est à dire, quelqu’un qui vit du revenu du capital – et
son intérêt est le même que celui de n’importe quel bourgeois, à savoir, la plus grande rentabilité du capital. Dans un système par répartition, la retraite est un prélèvement sur l’activité
économique, et les retraités ont donc des intérêts qui coïncident avec ceux des travailleurs et de la bourgeoisie industrielle.
Cela étant dit, on arrive à la retraite tard dans la vie, au moment où les habitudes sociologiques et politiques sont dejà faites. C’est pourquoi même dans les systèmes de capitalisation les
retraités ouvriers tendent à voter comme des ouvriers, et non comme des retraités…
Oui, mais quand je regarde le comportement des retraités dans leur masse, je crois bien qu’ils ont conscience qu’en fait ils vivent de la “solidarité” du système en place, et qu’ils sont donc
tenté de lui accorder leur soutien (voir les votes de ces couches qui “régulièrement” votent pour le pouvoir en place.
Je ne suis pas ce raisonnement. Pourquoi un “système” différent devrait-il être moins solidaire envers les retraités que celui “en place” ? Il faudrait d’ailleurs remettre un peu en cause l’idée
selon laquelle les jeunes votent pour le “nouveau” alors que les vieux votent pour le “système en place”. Je ne suis pas persuadé que voter Besancenot menace plus le système en place que voter
Chèvenement…
Si l’on admet que c’est un salaire différé, alors il faut en tenir compte dans le salaire pour estimer la limite classe moyenne classe productive;
Je ne crois pas qu’il faille raisonner comme cela lorsqu’on essaye de déterminer l’intérêt des retraités. Même si du point de vue économique on peut considérer la retraite comme salaire différé,
pour déterminer les intérêts des uns et des autres il faut regarder quel est le processus sur lequel la retraite est prelevé. S’agit-il d’un prélèvement sur le revenu du capital, ou sur le
travail ?
2- comment classez-vous tous les chômeurs et autres personnes en age d’être actifs qui vivent peu ou prou de la redistribution nationale (RSA, allocations diverses …);
Là encore, il faut regarder d’où vient cette redistribution. Ce n’est pas la même chose si elle provient de la charité, d’un mécanisme fiscal, d’un prélèvement sur le travail… pour ne donner
qu’un exemple, celui qui vit du RSA et celui qui vit des allocations chômage n’a pas tout à fait les mêmes intérêts.
L’autre question à se poser est une question temporelle: l’ouvrier au chômage entre deux emplois reste, du point de vue de ses intérêts et donc de son appartenance de classe, un ouvrier. Le jeune
marginal “installé” dans le RSA de longue durée sans aucune volonté de rentrer dans le monde du travail n’est pas du tout dans la même situation.
3- comment estimer la position de tous ceux qui ne sont pas directemet insérés dans le processus de production, autrement dit la masse des agents de l’état, des collectivités locales, des
services publics non marchands ?
Je ne vois pas pourquoi vous concluez que ceux-ci ne sont pas “insérés dans le processus de production”. Il est vrai que l’estimation de la valeur produite par leur travail est plus difficile,
mais cela n’implique pas qu’ils n’en produisent pas, et que celle-ci ne puisse pas être comparée à leur rémunération. Prenons un exemple concret: en quoi un mécanicien – agent de l’Etat – qui
entretien un camion de l’armée serait moins inséré dans le processus de production que le mécanicien privé qui répare votre voiture ?
4- il me semble que Marx ne classait pas dans les travailleurs exploités, tous ceux qui n’étaient pas directement productifs, et encore productifs dans le secteur “matériel”.
C’est en partie vrai. Mais Marx pensait en 1850, alors que l’immense masse des travailleurs étaient insérés dans des processus de production “matériels” qui produisaient l’essentiel de la valeur.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui: une part importante de la valeur est produite par du travail qui n’est pas purement “matériel”. On ne peut pas laisser cette partie en dehors de l’analyse. Si
l’on veut pouvoir utiliser les instruments d’analyse inventés par Marx, il faut créer des catégories nouvelles, en respectant bien entendu la logique de l’analyse marxiste, qui est de rechercher
des catégories qui partagent des intérêts matériels.
Peut-être que ces questions ne sont pas pertinentes. A vous de voir.
Elles sont au contraire très pertinentes.
Pou revenir sur ce débat, qui dure depuis les staseis des cités grecques archaïques du VIème siècle pour savoir quel est le meilleur régime, je suis convaincu que la solution prônée par Polybe,
Aristote et Cicéron est la meilleure, il faut à la fois de l’aristocratie, de la monarchie et de la démocratie dans un régime. C’est ainsi que je vois la Vème République, une sorte de tentative
de ce mélange, avec le principe électif qui dégage les meilleurs (aristoi) qui forment le Sénat et l’Assemblée. Mais la composante monarchique, nécéssaire pour un pouvoir fort, est incarné dans
le président, qui ne dure cependant qu’un temps. Enfin, la composante démocratique est assurée par les referendums ( même si rares ces temps-ci…), et les jurys. J’estime, comme Aristote, que le
principe électif est aristocratique dans son essence (aristocratique au sens grec) et non démocratique en soit. Je vous renvoie notamment à Claude Nicolet et à Yann le Bohec pour la survivance et
la ressurection (avec adaptation, bien entendu !) des idées antiques à partir de la Révolution dans la société française. Je pense ainsi que la Vème République est donc sur le papier un des
meilleurs régimes, et les prétentions des verts et du fdg à vouloir le transformer en régime parlementaire, c’est à dire en régime aristocratique, m’effraie plus qu’autre chose…
Bon pour revenir sur le Fdg, je suis d’accord avec votre analyse, même si je connais que peu de chose sur ce parti, malgré mon amitié avec une militante. Militante qui m’a avouée, après qu’elle
eut assisté au meeting de Marseille et entendu les propos foncièrement anti-républicains et racistes (pour moi l’apologie du metissage équivaut à l’apologie d’une race) de Mélanchon, que celui-ci
n’aurait du jamais dire cela. Preuve que quand même il existe quelques militants qui ne sont pas encore fanatisés !
Mais la grande question qui se pose est : que faire ? J’ai l’impression que vous êtes une sorte de Salluste, analysant avec brio la situation, sachant et proposant les solutions pour se sortir de
la crise, mais mis au ban par tous. Je crois vous l’avoir déja dit, je suis foncièrement pessimiste. Mes liens familiaux font que je suis plus au fait de ce qu’il se passe au PS et la victoire de
François Hollande a surtout été la victoire de Terra Nova, installée en masse dans les appareils ministériels. Ils ont mêmes osés insultés le groupe de pensée “Gauche Populaire” d’avoir un
“surmoi lépenisant”. Je connais assez bien un des membres de ce groupe qui a faillit avoir de graves problèmes pour avoir enquêté sur l’extrême-extrême droite pour des recherches historiques.
Alors quand on sait cela, ca fout un grand coup au moral. Si aujourd’hui la Gauche Populaire est mise au ban que nous reste t-il ? Le MRC est mourant et à la botte du PS, DLR me donne bon espoir
mais non médiatisés et peu capable de former des alliances solides avec d’autres parti. J’aimerais bien que le rêve de Chevènement de réunir les républicains des deux rives se fasse pour
restaurer la République….mais il y a presque plus de républicain, il n’y a pas de solide tête, de chef charismatique ect. Mais les gens sont dans un tel état d’énervement que j’ai peur que dans
quelques années, ils décident de voter fn sans l’once d’un remord. Le pire est dans tout cela que je les comprend sincèrement.
C’est ainsi que je vois la Vème République, une sorte de tentative de ce mélange, avec le principe électif qui dégage les meilleurs (aristoi) qui forment le Sénat et l’Assemblée.
Je suis d’accord sur la première partie de la phrase, pas sur la seconde. Toutes nos Républiques ont en fait cherché à concilier Démocratie et Aristocratie. Mais c’est le concours, et non
l’élection, qui dégage “les meilleurs”. L’aristocratie – au ses grec du terme – dans notre république est constituée par la fonction publique, les “grands corps de l’Etat”, tous recrutés par
concours qui sélectionnent “les aristoi”. Le principe électif était peut-être “aristocratique” au temps d’Aristote, lorsque le suffrage était réservé à un groupe social qui constituait dejà une
élite. Mais une fois installé le suffrage universel, le principe électif ne relève plus de l’aristocratie mais de la démocratie.
Je pense ainsi que la Vème République est donc sur le papier un des meilleurs régimes, et les prétentions des verts et du fdg à vouloir le transformer en régime parlementaire, c’est à dire en
régime aristocratique, m’effraie plus qu’autre chose…
Je pense aussi que la Vème République était sur le papier et même en pratique l’un des meilleurs régimes que la France ait expérimenté. Mais pour moi, la Vème est morte en 1986, avec la première
cohabitation. Depuis, on est dans un régime mixte qui, selon les équilibres de forces, dérive soit vers un régime d’assemblée, soit vers un présidentialisme pur…
Mais la grande question qui se pose est : que faire ? J’ai l’impression que vous êtes une sorte de Salluste, analysant avec brio la situation, sachant et proposant les solutions pour se
sortir de la crise, mais mis au ban par tous.
La comparaison est très aimable… même si Salluste, si ma mémoire ne me trompe pas, fut accusé de détournement de fonds à la fin de sa carrière politique !
Je crois vous l’avoir déja dit, je suis foncièrement pessimiste
Je partage ce pessimisme, ne serait-ce que pour des raisons méthodologiques. Le pessimisme est l’assurance que si l’on est surpris, ce sera toujours agréablement…
J’aimerais bien que le rêve de Chevènement de réunir les républicains des deux rives se fasse pour restaurer la République….mais il y a presque plus de républicain, il n’y a pas de solide
tête, de chef charismatique ect.
C’est en effet le problème du camp républicain: Chevènement est trop vieux pour constituer un pôle de ralliement, et les autres ne sont pas assez solides intellectuellement. Dupont-Aignant par
exemple est bien gentil, il dit des choses intelligentes… mais il dérape un peu trop facilement dans des fantasmes droitiers ou démagogiques pour attirer autour de lui des gens qui ne sont pas
de sa chapelle et les y maintenir.
Mais les gens sont dans un tel état d’énervement que j’ai peur que dans quelques années, ils décident de voter fn sans l’once d’un remord. Le pire est dans tout cela que je les comprend
sincèrement.
C’est bien le plus effrayant: que d’ici quelques années le champ républicain laissé en déshérence devienne l’apanage de l’extrême droite.
Cher Descartes,
J’espère que tu me pardonneras de faire un peu de hors sujet en reprenant une de tes réponses en commentaire… après tout, ce travail sur l’analyse des classes dans le mode de production
capitaliste est fondamental et préalable à toute réflexion sur le sujet, comme tu le rappelles. Alors autant éclaircir quelques points obscurs.
Plusieurs choses me paraissent étranges. Déjà, tout part de la théorie de la valeur. J’imagine que, comme Marx, pour toi la valeur d’un objet est la quantité de travail incorporée dedans ?
Pourtant, le prix d’un bien est défini selon l’offre et la demande, et cela ne date pas du capitalisme… on pourrait imaginer que ce prix oscille autour de sa “valeur” mais comment expliquer
alors le cas de certains objets particuliers comme l’art ou une vieille bouteille de vin ayant pris beaucoup de valeur ?
Du coup, difficile de projeter cela sur le travail… si je creuse un trou dans le désert, je met du travail donc le de la valeur dedans… mais je n’arriverai certainement pas à vendre mon
travail. La valeur est donc bien liée à la rareté ou tout du moins à la rencontre entre une offre et une demande. On peut critiquer ce système, mais dans le cadre actuel c’est ce qu’il me semble
se passer.
Si un industriel vend un bien 100€ et qu’en déduisant les coûts de production (hors masse salariale) etc. on arrive à 30€ , 20€ sont distribués aux employés, 5€ en investissement pour
l’entreprise et 5€ conservés en plus value, l’exploitation des salariés est claire. Mais si la demande chute et que le prix passe à 80€ ? 70€ ? Les salaire n’étant pas ajustés vers le bas, on
pourrait presque arriver à des cas des figure où l’ouvrier touche plus que ce qu’il produit…
Mais surtout, comment appliquer ce raisonnement à des postes sans lesquels on ne pourrait pas fonctionner mais qui ne produisent pas énormément de valeur ajoutée. Sans contrôleur qualité au bout
de la chaîne, sans commercial, pas de ventes. Mais quelle est la valeur créée par ces deux postes ? Difficile à quantifier…
Je comprend la définition et ton idée d’analyser uniquement la position et pas le salaire lui-même. Mais je pense que cela nécessiterait que chacun ait une conscience de classe… ce qui est loin
d’être le cas. Moi même n’ait aucune idée de “la classe” à laquelle j’appartiens.
Prenons le cas d’un grutier payé 3000€ (exemple et salaire complètement au hasard). Pour toi il peut toujours être un exploité à partir du moment où il génère plus de 3000€ en valeur. Soit. S’il
est payé 3000€ en réalité est plus dû à l’offre de grutiers sur le marché que la valeur qu’il produit… s’il y avait énormément de grutiers, il serait payé au SMIC. Presque aucun et il serait
payé beaucoup plus. Car comme on ne peut pas s’en passer, eh bien… il faut bien le payer plus (et pourquoi pas plus que ce qu’il ne “produit” ! Car si on le retire l’ensemble ne marche pas).
Mon grutier exploité a bien plus intérêt a maintenir l’euro, le libre-échange, l’immigration, etc. (exactement comme les classes moyennes !) que l’ouvrier qui touche le SMIC et travaille à la
chaîne… Raisonner uniquement en terme de salaire peut-être une erreur, je le conçois bien – mais je ne pense pas qu’il faille en faire uniquement abstraction non plus. Si le grutier ne peut pas
savoir qu’il génère plus de valeur qu’il n’est payé, comment l’amener à défendre les classes populaires ?
Désolé pour toutes ces questions, mais je pense ne pas trop m’avancer en disant que si cet outil d’analyse est extrêmement puissant, il suscite énormément d’interrogations et de scepticisme de
part et d’autres. Tu as souvent (TRÈS souvent…) défini le concept de classe moyenne. Mais rarement explicité l’outil d’analyse en soit. Je pense que ça peut être intéressant…
Enfin, plus terre à terre (et rien à voir). Au PCF il doit bien te rester quelques contacts, peut-être certains influents ? Tu ne dois pas être le seul à avoir ce genre d’analyse et d’idées là
bas… c’est vraiment vain d’attendre quoi que ce soit de là bas ? Aucun parti qui ne pourrait s’en dégager ?
Plusieurs choses me paraissent étranges. Déjà, tout part de la théorie de la valeur. J’imagine que, comme Marx, pour toi la valeur d’un objet est la quantité de travail incorporée dedans
?
Tu confonds Ricardo et Marx: pour Ricardo, la valeur d’un objet est la qualité de travail incorporée dans sa fabrication. Pour Marx – et c’est une rutpure essentielle – la valeur est la “quantité
de travail socialement nécessaire” pour produire l’objet en question, c’est à dire, la quantité moyenne de travail nécessaire pour produire l’objet compte tenu de l’état social et technologique
d’une société donnée. En d’autres termes, la voiture qui sort d’une usine avec des machines totalement dépassées et d’une usine équipée des machines les plus modernes a la même valeur, même s’il
a fallu beaucoup plus d’heures de travail pour produire la première que la seconde…
Pourtant, le prix d’un bien est défini selon l’offre et la demande, et cela ne date pas du capitalisme… on pourrait imaginer que ce prix oscille autour de sa “valeur” mais comment expliquer
alors le cas de certains objets particuliers comme l’art ou une vieille bouteille de vin ayant pris beaucoup de valeur ?
Le prix et la valeur sont deux choses différentes. L’un est défini par l’offre et la demande, l’autre par le processus de production. Normalement, le prix et la valeur d’un bien tendent à
converger: si le prix est très supérieur à la valeur, il est intéressant de produire, on construit de nouvelles usines, l’offre augmente… et le prix baisse. Au contraire, si le prix est
inférieur à la valeur, il n’est pas intéressant de produire, les usines ferment, l’offre diminue… et le prix monte. Le point d’équilibre est donc prix=valeur. Mais cela ne marche que pour les
biens dont l’offre dépend du prix. Une vieille bouteille de vin est un exemple du contraire: quelque soit le prix offert, il est impossible de produire plus de bouteilles de Chateau-Margaux 1939.
L’offre est limitée à celles qui restent… et ne peut que se réduire à mesure qu’elles sont bues. Le prix n’a donc plus aucun rapport avec la valeur.
Du coup, difficile de projeter cela sur le travail… si je creuse un trou dans le désert, je met du travail donc le de la valeur dedans… mais je n’arriverai certainement pas à vendre mon
travail.
Encore une fois, la réponse se trouve dans la théorie du “travail socialement nécessaire”. Le travail socialement nécessaire pour creuser un trou – inutile – dans le désert est zéro, puisque
“socialement” personne n’est prêt à y mettre plus.
Si un industriel vend un bien 100€ et qu’en déduisant les coûts de production (hors masse salariale) etc. on arrive à 30€ , 20€ sont distribués aux employés, 5€ en investissement pour
l’entreprise et 5€ conservés en plus value, l’exploitation des salariés est claire. Mais si la demande chute et que le prix passe à 80€ ? 70€ ? Les salaire n’étant pas ajustés vers le bas, on
pourrait presque arriver à des cas des figure où l’ouvrier touche plus que ce qu’il produit…
Tout à fait. Mais pas longtemp: si l’ouvrier touche plus qu’il ne produit, c’est que le capitaliste est en train de perdre de l’argent. Et dans ces cas, généralement il ferme l’entreprise…
Mais surtout, comment appliquer ce raisonnement à des postes sans lesquels on ne pourrait pas fonctionner mais qui ne produisent pas énormément de valeur ajoutée. Sans contrôleur qualité au
bout de la chaîne, sans commercial, pas de ventes. Mais quelle est la valeur créée par ces deux postes ? Difficile à quantifier…
Oui, mais pas pour la raison que vous croyez. Au départ, la “valeur crée” par ces deux postes est… “le temps de travail socialement nécessaire” pour faire leur travail. La problématique est de
déterminer exactement ce temps… C’est d’ailleurs l’une des faiblesses de la pensée marxienne: il n’y a pas de véritable instrument de mesure de la valeur. C’est pourquoi la théorie de la valeur
est généralement utilisée dans des raisonnement qualitatifs.
Je comprend la définition et ton idée d’analyser uniquement la position et pas le salaire lui-même. Mais je pense que cela nécessiterait que chacun ait une conscience de classe… ce qui est
loin d’être le cas. Moi même n’ait aucune idée de “la classe” à laquelle j’appartiens.
Mais – et ce n’est pas une critique – tu as certainement une idée assez claire des intérêts de la classe à laquelle tu appartiens… même sans “conscience”, les classes sociales arrivent
assez bien à défendre leurs intérêts.
Prenons le cas d’un grutier payé 3000€ (exemple et salaire complètement au hasard). Pour toi il peut toujours être un exploité à partir du moment où il génère plus de 3000€ en valeur. Soit.
S’il est payé 3000€ en réalité est plus dû à l’offre de grutiers sur le marché que la valeur qu’il produit… s’il y avait énormément de grutiers, il serait payé au SMIC.
Tout à fait. C’est bien mon point: l’appartenance aux “classes moyennes”, c’est à dire, la faculté de ne pas être exploité, dépend du pouvoir de négociation que chacun de nous détient.
Maintenant, il est évident que plus on dispose d’un capital (matériel ou immatériel), plus notre pouvoir de négociation est grand. Un grutier, qui détient des compétences liées à une formation
longue, aura plus de facilité à négocier un salaire qui se rapproche de la valeur qu’il produit qu’un simple manoeuvre, mais certainement moins qu’un chirurgien neurologue.
Mon grutier exploité a bien plus intérêt a maintenir l’euro, le libre-échange, l’immigration, etc. (exactement comme les classes moyennes !) que l’ouvrier qui touche le SMIC et travaille à la
chaîne…
Bien entendu. Mais pas parce qu’il gagne plus que le SMIC. Il y a intérêt parce qu’il détient un “capital immatériel” important, qui lui permet de négocier en position de force, et que ce
“capital immatériel” ne se trouve pas dévalué par la concurrence de l’immigrant, par le risque de délocalisation, etc. Encore une fois, ce n’est pas son salaire, mais sa position dans l’appareil
de production qui nous dit s’il est plus proche de l’ouvrier ou des “classes moyennes”…
Désolé pour toutes ces questions, mais je pense ne pas trop m’avancer en disant que si cet outil d’analyse est extrêmement puissant, il suscite énormément d’interrogations et de scepticisme
de part et d’autres. Tu as souvent (TRÈS souvent…) défini le concept de classe moyenne. Mais rarement explicité l’outil d’analyse en soit. Je pense que ça peut être intéressant…
Tout à fait. Et je suis ouvert à toute discussion qui permettrait d’enrichir et de préciser mes idées sur la question qui, je veux bien l’admettre, sont encore très schématiques.
Au PCF il doit bien te rester quelques contacts, peut-être certains influents ? Tu ne dois pas être le seul à avoir ce genre d’analyse et d’idées là bas… c’est vraiment vain d’attendre quoi
que ce soit de là bas ?
Je le crains, oui. Les gens qui partagent mon analyse ont pour la plupart quité le PCF après avoir prêché dans le désert pendant des années, et ils n’ont en général pas envie de recommencer un
combat où il n’y a que des coups à prendre et peu d’espoir de changer les choses. Le PCF est aujourd’hui un appareil verrouillé par les gens qui en vivent, et toute tentative de les écarter du
gâteau provoquerait certainement la désintegration.
Je ne comprends pas ce que tu entends par “institutionnalisation du Front de gauche” : le structurer ? En faire un nouveau parti ? Mais dans ce cas, qui aura la légitimité de la prise de décision
? Le Fdg ou les partis qui le composent ? Et les militants ? Ceux des assemblées du Fdg auront-ils la primeur sur ceux des partis ?
Et sur quelle ligne idéologique, politique ? Le Fdg est un groupement gauchiste, composé de gauchistes et de communistes en voie de le devenir. Comme tu l’as écrit dans ton précédent article, je
doute que le Fdg tel qu’il est ou tel qu’il pourrait être soit susceptible d’élargir son audience.
Je préconise quant à moi un PCF indépendant, mais qui s’adresse à l’ensemble du peuple français, et pas seulement “aux électeurs de gauche”, stratégie perdante en son essence.
Je ne comprends pas ce que tu entends par “institutionnalisation du Front de gauche” : le structurer ? En faire un nouveau parti ? Mais dans ce cas, qui aura la légitimité de la prise de
décision ? Le Fdg ou les partis qui le composent ? Et les militants ? Ceux des assemblées du Fdg auront-ils la primeur sur ceux des partis ?
J’entends par “institutionnaliser le Front de Gauche” le fait de lui donner des institutions. Cela n’implique pas d’en faire un parti. La CGT, pour ne donner qu’un exemple, n’est pas un syndicat
mais une confédération de synidicats. Cela ne l’empêche pas d’avoir des institutions (le comité confédéral, le bureau confédéral, le secrétaire général) et des statuts qui disent qui décide de
quoi.
Le Front de Gauche n’a aucune institution. Il n’a même pas de statuts. On ne sait pas qui a le droit de parler pour lui, qui décide de quoi. Prenons par exemple le programme “l’humain d’abord”.
Qui l’a écrit ? Qui l’a approuvé ? Par quelle procédure ? On n’en sait rien et on ne le saura jamais. Un autre exemple: qui a le droit de porter sur son matériel électoral le tampon “front de
gauche” ? Si localement un candidat du FdG se désiste pour un candidat socialiste, par exemple, celui-ci a le droit ? Ou faut-il qu’il ait la bénédiction nationale du Front de Gauche ? Et dans ce
cas, qui est habilité à la donner ?
Que le FdG reste une confédération ou devienne un nouveau parti est un autre débat. Dans les deux cas, il faudrait que les décisions estampillées “Front de Gauche” soient prises en fonction de
mécanismes démocratiques institutionnalisés, connus et transparents. Tu me diras que ce n’est dejà pas le cas dans les organisations qui le composent… mais bon, faut bien commencer quelque
part.
Et sur quelle ligne idéologique, politique ?
Sur celle qui sera adoptée par ces institutions. Le fait d’institutionnaliser obligera aussi à trancher cette question.
Le Fdg est un groupement gauchiste, composé de gauchistes et de communistes en voie de le devenir. Comme tu l’as écrit dans ton précédent article, je doute que le Fdg tel qu’il est ou tel
qu’il pourrait être soit susceptible d’élargir son audience.
Tel qu’il est, certainement. Mais tel qu’il pourrait être… je ne suis pas aussi pessimiste.
Je préconise quant à moi un PCF indépendant, mais qui s’adresse à l’ensemble du peuple français, et pas seulement “aux électeurs de gauche”, stratégie perdante en son essence.
Je suis plus ouvert que toi sur la question de “l’indépendance”. Je ne suis pas persuadé qu’elle soit absolument nécessaire ou même la meilleure solution. Mais il me semble essentiel de
s’adresser, sinon à l’ensemble du peuple français, au moins aux couches populaires.
Tu expliqueras ça à Olivier Falorni… Le “régime des partis”, loin de revenir, est mort. Aujourd’hui, ce sont les élus qui dominent les partis, et non l’inverse. La possibilité d’un parti
d’imposer un candidat dont les électeurs ne veulent pas est pratiquement nulle
Je suis au regret de vous dire que je perçois un peu de mauvaise foi dans votre propos. Se présenter à une élection coûte très cher. C’est donc un exercice périlleux pour un inconnu qui
débute dans la politique. Falorni a longtemps été encarté au PS. Il n’a pu se présenter sans l’investiture du parti que parce qu’il savait que ses frais de campagne seraient remboursés. Il était
connu et a pu capitaliser dessus. Idem pour un Dupont-Aignan qui a longtemps pu profiter de la logistique RPR/UMP avant de prendre ses distances. Les principaux partis sont plus que jamais
incontournables. Si Chevènement a du se résoudre à trouver un accord avec le PS c’est bien parce qu’en dehors de ces grosses structures il n’y a point de salut.
Ta proposition revient à récréer le système de l’ancien régime. Pour les députés ayant une fortune personnelle, le vote blanc sera finalement sans importance. Il posera des
problèmes seulement à ceux qui, n’ayant pas de fortune, auront besoin de leur traitement pour vivre.
ð Je ne suis pas d’accord car je pense que la plupart des élus sont loin d’être des prolétaires. Au contraire je pense qu’ils vivent bien et ils sont rarement issus des
classes populaires.
« Je n’en vois pas la nécessité, aussi longtemps qu’il a les moyens de se faire entendre dans le débat public, et donc d’exercer une pression sur les élus des autres
partis. Le FN a beau ne pas être représenté par des élus de son étiquette, il a réussi à peser sur de nombreux textes législatifs. Et c’est cela l’essentiel. »
Sauf que sur l’essentiel (libre échange, union économique et monétaire, Schengen) il n’a jamais pesé. Tant que l’UMP et le PS sont tranquilles entre eux, Ils peuvent se
réunir en congrès pour modifier la Constitution comme bon leur semble et placer la Constitution en position d’infériorité par rapports aux traités de l’Union européenne
Se présenter à une élection coûte très cher.
Pas tant que ça, en fait. Pour les présidentielles, c’est un peu plus cher, mais finalement Dupont-Aignan a fait figure honorable avec un budget tout à fait raisonnable. Quant aux législatives,
c’est à la portée de toutes les bourses. Et c’est remboursé si l’on dépasse les 5%.
C’est donc un exercice périlleux pour un inconnu qui débute dans la politique. Falorni a longtemps été encarté au PS.
La politique est quelque chose qui s’apprend. On ne s’improvise pas politique, et on ne “débute” pas en se présentant aux élections. Aucun système électoral, aussi “juste” soit-il, ne peut
assurer à n’importe qui de pouvoir se dire “tiens, et si j’étais candidat” et de faire campagne dans les mêmes conditions que les autres.
Il n’a pu se présenter sans l’investiture du parti que parce qu’il savait que ses frais de campagne seraient remboursés.
En tout cas il s’est présenté et il a gagné contre la candidate investie par le Parti, et vedette nationale de surcroît. Ce qui montre que les partis ne sont pas aussi puissants que vous le
pensez, et qu’on est bien loin du “régime des partis”, quand ceux-ci avaient le pouvoir de faire élire n’importe qui.
Si Chevènement a du se résoudre à trouver un accord avec le PS c’est bien parce qu’en dehors de ces grosses structures il n’y a point de salut.
Le système électoral privilégie ceux qui sont en mesure de faire des accords. Ce qui en soit n’est pas une mauvaise chose, vu que ce sont ceux qui sont capables de trouver des accords qui sont
les mêmes à mieux de gouverner. A partir de là, il y a ceux qui comprennent comment le système fonctionne (le PRG, les Chevènementistes, les Verts) et ceux qui soit ne le comprennent pas (FDG) et
qui se complaisent dans la dénonciation de l’injustice du monde, soit ceux qui décident en toute connaissance de cause de rester en marge (FN, LO).
Bonjour Descartes.
Petite disgression. Que pensez-vous de ce nouveau terrain d’affrontemen test/ouest qu’est devenu la Syrie ? J’ai l’impression que nous sommes dans le cas d’une guerre civile alimentée par l’OTAN
+ Les pays Arabes versus la Russie et la Chine.
Il est dommage que les Occidentaux n’aient pas été aussi droit de l’hommistes et bout en guerre quand il s’est agit de Bahrein. Les Saoudiens ont pu intervenir. Nous achetons le pétrole qui
servira à financer les fondamentalistes que l’Arabie Saoudite exporte.
Barack Obama prix Nobel de la paix ! On aura tout vu.
Petite disgression. Que pensez-vous de ce nouveau terrain d’affrontemen test/ouest qu’est devenu la Syrie ? J’ai l’impression que nous sommes dans le cas d’une guerre civile alimentée par
l’OTAN + Les pays Arabes versus la Russie et la Chine.
Franchement, je n’en pense rien. Je ne connais pas la situation syrienne avec assez de profondeur pour m’hasarder à donner publiquement une opinion. Je ne peux que vous mettre en garde contre les
“théories du complot” qui ne s’appuyeraient pas sur des faits.
Il est dommage que les Occidentaux n’aient pas été aussi droit de l’hommistes et bout en guerre quand il s’est agit de Bahrein.
Oui. Enfin, c’est un peché très partagé. On se réjouit que le système majoritaire empêche l’élection de nombreux députés du FN, tout en le déclarant “injuste” lorsqu’il empêche l’élection de
députés du Front de Gauche…
Dupont-Aignant par exemple est bien gentil, il dit des choses
intelligentes… mais il dérape un peu trop facilement dans des fantasmes droitiers ou démagogiques
Pourriez-vous indiquer concrêtement à quoi vous pensez en invoquant des fantasmes droitiers ou démago
?
Au titre de la démagogie, voici un exemple extrait de sa profession de foi: “Placer les radars sur les sites dangereux plutôt que sur les sites où ils rapportent”.
Au titre du fantasme droitier, extrait du même document: “2 millions de familles propriétaires supplémentaires en 5 ans grâce à des prêts garantis à 30 ans par l’Etat”
OK.
Il est vrai qu’on peut très bien vivre en étant locataire.
Je me souviens aussi du discours de Sarkozy favorable à une France de propriétaire.
Je préfère que l’Etat se concentre sur l’aide à la pierre ( taux bonifiés, règles d’amortissement plus conciliantes) pour les bailleurs sociaux et que les locataires s’ils le souhaitent puissent
acheter leurs appartements.
Concernant les radars, sujet secondaire par rapport à d’autres, je pense sincèrement que l’Etat les perçoit plus comme un outil de pub (associations de victimes) et de rentrée d’argent. Ce ne
sont pas les radars qui réduisent la mortalité sur la route mais le progrès technique, la législation (port de la ceinture), l’amélioration de la qualité des routes.
Cependant, il existe des limitations de vitesse. Et c’est le droit de l’Etat (ie de la nation) de mettre un radar n’importe où pour vérifier que les usagers de la route n’enfreignent pas la
loi.
Je me souviens aussi du discours de Sarkozy favorable à une France de propriétaire.
Le fantasme droitier de “la France des propriétaires” date au moins de Guizot. Ce qu’il y a derrière, c’est la conviction que dès lors que les français seront “propriétaires”, ils auront quelque
chose à perdre et n’écouteront plus les sirènes révolutionnaires…
Je préfère que l’Etat se concentre sur l’aide à la pierre ( taux bonifiés, règles d’amortissement plus conciliantes) pour les bailleurs sociaux et que les locataires s’ils le souhaitent
puissent acheter leurs appartements.
Le marché du logement souffre d’un déficit d’offre. C’est pourquoi toute les mesures de soutient à la demande (facilitation du prêt immobilier, taux bonifiés, exemptions fiscales) n’a pour effet
que de faire augmenter les prix. Pour résoudre le problème du logement, il n’y a qu’un seul moyen: mettre plus de logements sur le marché. Et pour cela, il n’y a que deux solutions: mieux
partager le parc existant (par exemple, en réduisant la taille de certains logements) et construire plus.
Concernant les radars, sujet secondaire par rapport à d’autres, je pense sincèrement que l’Etat les perçoit plus comme un outil de pub (associations de victimes) et de rentrée d’argent.
Je ne suis pas d’accord. Les radars ont effectivement réduit le nombre de morts sur les routes. Ce n’est pas rien. Et puis, je déteste ce poujadisme français qui consiste à faire des règles et
ensuite exiger de pouvoir ne pas les respecter. Ou bien les limitations de vitesse ne servent à rien, et il faut les abolir, ou alors elles servent à quelque chose, et doivent être
respectées. Et l’Etat doit exercer tous les contrôles utiles pour assurer le respect de la règle. Et si en plus ces contrôles, rapportent, tant mieux. Après tout, il n’y a que ceux qui
violent la loi qui payent.
Ce ne sont pas les radars qui réduisent la mortalité sur la route mais le progrès technique, la législation (port de la ceinture), l’amélioration de la qualité des routes.
Ce n’est pas vrai. Regardez les chiffres: on voit une rupture de la courbe lorsqu’on a installé les radars, alors qu’il n’y a pas eu ces années là de rupture dans la qualité des routes, dans le
“progrès technique” ou dans le port de la ceinture. Le respect des limitations de vitesse sauve des vies.
votre réponse au commentaire n°12 posté par Trubli
vous écrivez “Le respect des limitations de vitesse sauve des vies.”
oui, mais cela justifie-t-il “toutes ” les limitations de vitesse ?
1- Il y a des portions d’autoroutes ou l’on pourrait fixer la limite de vitesse à 150kmh sans grand accroissement des accidents. La question est de savoir quel serait cet accroisssement (les
experts doivent pouvoir l’estimer) et quel serait le gain de temps pour les usagers. les usagers seraient-ils prêt à faire cet arbitrage coût/avantage ?
Il faut savoir que le risque principal est devenu “l’assoupissement” entraîné par ces limitations de vitesse excessives. Au point que je vois maintenant des panneaux “ne vous endormez pas !”
L’absurdité de ces limitations de vitesse au nom de uniquement de la sécurité, c’est quelles ne prennent pas en compte l’avantage du gain de temps dans les déplacements; Si on suivait le
raisonnement gouvernemental jusqu’au bout, on interdirait la voiture (ou plutôt on imposerait une vitesse “nulle” en voiture, en avion, en train …). Cela me rappelle les arguments sur le
nucléaire et le risque zéro.
2- en ce qui concerne les deux roues, je ne voie pas la raison d’une limitation de vitesse; Ils font très peu de victimes en dehors d’eux-même. C’est le principe de responsabilité et de liberté.
Chacun prend les risques qu’il veut quand ils ne nuisent pas à autrui. Faut-il interdire également l’alpinisme, le ski, la voile ..? Le seul contre-argument est le cout à la société (Samu,
Hopital …). A cela il est facile de répondre par l’assurance obligatoire, ou la non assistance en cas d’accident.
oui, mais cela justifie-t-il “toutes ” les limitations de vitesse ?
Nous vivons dans un état de droit. Il n’appartient pas à chaque citoyen de décider quelles sont les limitations de vitesse qui se justifient, et celles qui ne se justifient pas. Si vous trouvez
qu’une limitation ne se justifie pas, allez voir votre député ou votre maire, écrivez à votre ministre, militez pour que la limitation soit changée. Mais combattre les radars ou justifier les
excès de vitesse sous prétexte que certaines limitations de vitesse ne se justifient pas est le degré zéro de la politique.
1- Il y a des portions d’autoroutes ou l’on pourrait fixer la limite de vitesse à 150kmh sans grand accroissement des accidents.
Je n’en sais rien. Connaissez-vous des études qui arrivent à cette conclusion ?
Il faut savoir que le risque principal est devenu “l’assoupissement” entraîné par ces limitations de vitesse excessives. Au point que je vois maintenant des panneaux “ne vous endormez pas
!”
Je ne comprends pas. Pourquoi s’assoupirait-on plus facilement à 130 km/h qu’à 160 ? A ma connaissance, le phénomène d’assoupissement ne depend pas de la vitesse, et on dort aussi bien dans le
fauteuil du salon que dans un TGV. La théorie des chauffards qui prétendent qu’en conduisant lentement “on s’ennuie” est que de l’ennui nait l’assoupissement n’ont aucune base scientifique.
L’absurdité de ces limitations de vitesse au nom de uniquement de la sécurité, c’est quelles ne prennent pas en compte l’avantage du gain de temps dans les déplacements; Si on suivait le
raisonnement gouvernemental jusqu’au bout, on interdirait la voiture (ou plutôt on imposerait une vitesse “nulle” en voiture, en avion, en train …).
Là encore, votre raisonnement est fallacieux. Personne ne demande le risque zéro. Le fait est que la limitation de vitesse fait baisser les risques d’accident et leur gravité. A la société de
décider quel est le niveau de risque qui est acceptable dans un compromis risque/temps de déplacement. Si la société a décidé que le compromis acceptable c’est 90 sur route et 130 sur autouroute,
je ne vois pas ce qu’il y a “d’absurde” là dedans.
2- en ce qui concerne les deux roues, je ne voie pas la raison d’une limitation de vitesse; Ils font très peu de victimes en dehors d’eux-même. C’est le principe de responsabilité et de
liberté. Chacun prend les risques qu’il veut quand ils ne nuisent pas à autrui.
Si vous n’imposez pas de limitation de vitesse aux deux roues, vous aurez beaucoup plus de sinistres. Et même si ces sinistres ne font “que tres peu de victimes en dehors d’eux mêmes”, leur coût
sera supporté par l’ensemble des motards, par le biais des primes d’assurance. Maintenant, les motards sont-ils prêts a voir leurs primes d’assurance doublées ou triplées en échange de la vitesse
libre ? Personnellement, j’en doute.
Par ailleurs, même si l’accident “ne fait que peu de victimes en dehors d’eux mêmes”, ces accidents ont un coût pour la collectivité qui ne peuvent pas être couverts par un mécanisme d’assurance.
Si la collectivité paye l’éducation et la formation d’un enfant et d’un jeune, c’est parce qu’elle espère recouvrer ces coûts sur la vie de travail de ce jeune devenu adulte. Chaque jeune qui se
tue à moto, c’est un capital investi qui disparaît…
“Maintenant que les élections sont passées, et que les prochaines échéances sont loin, c’est le moment idéal pour lancer une véritable réflexion sur ces questions. Et les militants du Front
de Gauche devraient exiger qu’elle soit lancée le plus vite possible. “
Adhérent du PG (je n’ose écrire militant tant j’ai pris mes distances avec l’organisation) depuis sa création, je me retrouve la plupart du temps dans vos écrits et tiens à vous remercier pour le
travail que vous menez*. A elle seule, la série “Discours de la méthode” vaut mieux que toute la littérature militante que j’ai pu ingurgiter ces dernières années – ce qui n’est pas
grand-chose. Je fais ce que je peux à mon modeste niveau pour relayer vos analyses mais je dois avouer qu’elle ne rencontrent pas toujours l’écho qu’elles méritent pourtant auprès de camarades
imprégnés de phraséologie gauchiste et remarquablement dociles aux chefs… C’est précisément là que le bât blesse: je voudrais bien moi “exiger [qu’une véritable réflexion sur ces questions]
soit lancée le plus vite possible”, mais comment s’y prendre?
A l’image de ce que vous décrivez pour le PCF passé maître dans l’art du “damage control”, rien ne semble devoir entamer le dogmatisme des pégistes qui quoique déprimés par le demi-échec
de la présidentielle et l’échec plus net des législatives ne semblent absolument pas prêts à se remettre en question, et s’évertuent au contraire à minimiser les résultats tout en invoquant
toutes sortes de facteurs externes. J’avais l’intention d’intervenir cette semaine dans le cadre d’une importante assemblée du PG dont l’ordre du jour était le suivant: 1/ Bilan des élections
présidentielle et législatives; 2/ La poursuite du FG; 3/ L’avenir du PG. J’aurais critiqué la stratégie dite de “Front contre Front” et invité mes camarades à profiter de l’accalmie électorale
pour engager une véritable réflexion, ce que l’atmosphère d’urgence perpétuelle qui domine la vie du FG depuis sa constitution n’a pas vraiment permis jusqu’ici. Je vous confesse que je n’en ai
pas eu le courage, persuadé que mon discours serait inaudible et balayé dans l’instant par les caciques présents. Les échos que j’ai eus de cette réunion m’ont conforté dans mon renoncement:
apparemment l’heure était moins à l’autocritique qu’à l’auto-congratulation sur fond d’apéro.
Bref, il n’est pas facile dans cette organisation comme me semble-t-il dans celles du FG en général de faire entendre une voix discordante, a fortiori lorsqu’on est seul et sans légitimité. Si
d’autres militants estiment qu’en l’état actuel le FG ne va nulle part ils se font remarquablement discrets, à moins qu’ils n’aient déjà été poussés vers la sortie ou s’y soient dirigés
d’eux-mêmes. Rien ne vous empêche de les imiter me direz-vous, mais vous savez ce que c’est: tant qu’il y a de la vie… Je vous ai un peu raconté la mienne mais au-delà de l’anecdote, comment
exploiter cette fenêtre de tir (pas d’élections avant 2014, militants quelque peu ébranlés malgré tout) pour remettre la réflexion au centre vu l’état d’auto-intoxication des troupes et l’autisme
des chefs? On ne peut tout de même pas se contenter de guetter chez Jean-Luc Mélenchon (que je ne connais pas comme vous personnellement) les signes pour l’instant imperceptibles d’une
hypothétique prise de conscience qui l’amènerait à faire le ménage dans son entourage…
* Si je puis me permettre cette remarque, peut-être devriez-vous mieux relire vos articles avant publication, on y trouve régulièrement de grosses fautes d’inattention(exemple ici: espoirE). Je
sais bien que l’ortographe est la science des imbéciles, mais c’est parfois gênant.
C’est précisément là que le bât blesse: je voudrais bien moi “exiger [qu’une véritable réflexion sur ces questions] soit lancée le plus vite possible”, mais comment s’y prendre?
Si je le savais… 😉
* Si je puis me permettre cette remarque, peut-être devriez-vous mieux relire vos articles avant publication, on y trouve régulièrement de grosses fautes d’inattention(exemple ici: espoirE).
Je sais bien que l’ortographe est la science des imbéciles, mais c’est parfois gênant.
Vous avez tout à fait raison, et croyez que je fais un effort. Mais il est très difficile de corriger un texte surtout lorsque, comme c’est mon cas, vous retravaillez votre texte plusieurs fois.
Au bout d’un certain nombre de modifications, vous finissez par connaître votre texte par coeur et ne voyez plus les fautes… j’utilise aussi le correcteur d’orthographe, mais il a des ratés…
et quelquefois, je l’avoue, j’ai envie de publier mon travail rapidement et je manque la dernière relecture…
Merci pour la réponse très complète. J’en apprend des choses ici, décidément…
Sur la théorie de la valeur de Marx:
Effectivement, je n’avais pas saisi la différence entre la théorie de la valeur de Marx et de Ricardo. Désolé d’insister, mais j’ai quelques toujours quelques remarques à propos de cette
notion.
Pour que quelque chose ait une valeur il faut donc une demande en face. C’est l’exemple du trou dans le désert: pour Ricardo il a une valeur malgré son inutilité (car il incorpore du travail),
pour Marx il vaut 0 car socialement inutile.
Soit. Maintenant, la demande a-t-elle un impact sur la valeur ? On a vu que pas de demande = pas de valeur. Mais est-ce que beaucoup de demande = beaucoup de valeur ? En gros, si la différence
entre une Dacia et une Ferrari n’est pas la quantité de travail mais le coût des “matières premières”, ces deux modèles ont-ils la même valeur ?
Le travail de l’ouvrier est le même dans les deux cas et disposent d’un même pouvoir de négociation (c’est mon hypothèse).
Si la réponse est “non, les deux n’ont pas la même valeur”, alors un système fondé sur cette théorie de la valeur et faisant en sorte qu’on récupère l’intégralité de la valeur créée (ou presque)
ferait que pour un même travail fourni, on peut être rémunéré différemment. Faisant ainsi de facto une différence entre ceux “qui ont de la chance de bosser pour Ferrari” et ceux qui “n’ont pas
de chance de travailler pour Dacia”. Gênant. Sauf à faire des mécanismes de transferts… mais où s’arrêter ? Comment décider de quelles activités continuer à subventionner et les autres (ex de
la diligence et de la voiture) ?
Si la réponse est “oui, ces deux voitures ont la même valeur”, nous revenons un peu au paradoxe du trou car deux objets de degré d’utilité différents pour la société (oublions les voitures un
instant) ont la même valeur. C’est à dire qu’un trou dans le désert et un trou pour construire un chantier ont la même valeur dès lors qu’il existe au moins UNE personne prête à acheter le trou
dans le désert. Risible.
En résumé: la valeur ne peut se passer de l’utilité sociale, donc de la demande. Mais si elle ne s’en passe pas, elle finit par désolidariser le travail fourni de la valeur. Et c’est ce que tu as
donné dans ton exemple de l’usine plus productive et l’autre moins. Ce qui compte c’est à quel point mon unité de travail est valorisée dans la société.
La valeur d’un objet serait donc quelque chose comme (temps de travail)x(demande “unitaire” pour le produit)x(% de la productivité vis à vis de l’état d’avancée social et technologique de la
société)… mais je vais m’arrêter là car j’ai l’impression de m’être emporté dans mon délire.
Sur la conscience de classe:
Mais – et ce n’est pas une critique – tu as certainement une idée assez claire des intérêts de la classe à laquelle tu appartiens… même sans “conscience”, les classes sociales
arrivent assez bien à défendre leurs intérêts.
J’aimerais bien préciser un peu plus, mais je ne veux pas trop m’exposer publiquement non plus… oh, pas parce que j’ai absolument envie de parler de moi ! Mais pour disséquer “le patient” sur
la table d’opération.
Mes collègues pensent que l’Europe c’est le Bien (ben oui, c’est la paix et la prospérité…), l’euro une idée formidable, qu’il est “très urgent” d’instaurer le mariage homo et que ceux qui sont
contre l’immigration votent FN. Clichés de classe moyenne, n’est-ce pas ? Il est vrai que notre position nous autorise un certain pouvoir de négociation (formation longue, etc…). Pourtant, sans
industrie nous sommes tous au chômage: nous craignons donc les délocalisations comme la peste. Enfin, nous sommes “en bas” de la hiérarchie…
Alors, quel est notre intérêt “de classe” ? A court terme vive le libre-échange, à long terme vive le protectionnisme…
Sur NDA:
Au titre du fantasme droitier, extrait du même document: “2 millions de familles propriétaires supplémentaires en 5 ans grâce à des prêts garantis à 30 ans par l’Etat”
Je suis surpris pas ta réponse. Pour les radars, OK, c’est de la démagogie pure, encore qu’elle soit moins énorme qu’ailleurs. Sur les fantasmes droitiers, je m’attendais pas à ça.
Car franchement… que défendre la propriété pour les Français a pour but de calmer leurs ardeurs révolutionnaires je trouve ça un peu… tiré par les cheveux. Avec ce raisonnement, toute mesure
pour que les citoyens aient une vie plus facile est une mesure pour les inciter à ne rien changer…
Comment définis-tu “la droite” du coup ?
Sur le PCF, le FDG et les maigres espoirs des républicains des deux rives:
Déprimant ta réponse… de ne pas avoir de vraie représentation politique pendant que les gouvernements successifs courent comme des canards sans tête, vraiment, c’est frustrant. Tiens, au fait,
as-tu entendu parler de “la gauche pop” qui essaye de se faire un nom dernièrement ?
Pour que quelque chose ait une valeur il faut donc une demande en face. C’est l’exemple du trou dans le désert: pour Ricardo il a une valeur malgré son inutilité
Pas vraiment. Ricardo part de l’hypothèse – implicite – que si quelque chose est produite, c’est qu’elle est utile. La question de la valeur des objets inutiles ne se pose pas, puisqu’ils ne
seront pas produits. Marx fait un raisonnement semblable, mais à l’échelle sociale.
En gros, si la différence entre une Dacia et une Ferrari n’est pas la quantité de travail mais le coût des “matières premières”, ces deux modèles ont-ils la même valeur ?
S’il fallait la même valeur pour produire une Dacia et une Ferrari, personne ne fabriquerait des Dacia et tout le monde roulerait en Ferrari… Tu poses en fait une question inexistante: dès lors
qu’un objet est produit, c’est qu’il y a une demande (et donc qu’il a une utilité). A partir de là, sa valeur est totalement indépendante de la demande.
J’attire aussi ton attention sur le fait que tu est en train de confondre “prix” et “valeur”. Quand tu écris “En gros, si la différence entre une Dacia et une Ferrari n’est pas la quantité de
travail mais le coût des “matières premières”…” tu parles de quelle “différence” ? De la différence de prix ? Ou de la différence de valeur ?
Mais ton raisonnement est basé sur une prémisse fausse: une Dacia et une Ferrari ne contiennent pas la même quantité de travail. Elles n’ont donc pas la même valeur. J’ajoute que les matières
premières sont elles mêmes produites, et contiennent donc aussi une “valeur” qu’il faut ajouter au produit qu’on fait avec elles…
A supposer qu’ils aient le même pouvoir de négociation, et que les voitures soient vendues à un prix égal à leur valeur (deux hypothèses très fortes), les ouvriers de Ferrari et ceux de Dacia
seraient payés exactement de la même manière.
En résumé: la valeur ne peut se passer de l’utilité sociale, donc de la demande.
Non. Tu confonds “prix” et “valeur”. La demande est nécessaire pour qu’un produit soit fabriqué. Mais une fois qu’il l’est, sa valeur est indépendante de la “demande”.
Alors, quel est notre intérêt “de classe” ? A court terme vive le libre-échange, à long terme vive le protectionnisme…
C’est peut-être pour cela que les jeunes des classes moyennes tendent à être plus protectionnistes et moins favorables à la mondialisation que les vieux…
Merci pour cet échange stimulant, je dois reconnaître que les théories de la valeur en économie me paraissent franchement peu intuitives. J’ai maintenant matière à réflexion…
“C’est peut-être pour cela que les jeunes des classes moyennes tendent à être plus protectionnistes et moins favorables à la mondialisation que les vieux…”
Commencent, oui… tout doucement. Mais en sont encore très hostiles (barrières commerciales=nazisme dans les cours d’histoire).
N’empêche que je te trouve toujours un peu injuste avec NDA sur le coup du logement ! 😉
(je sais que tu n’as pas pu me répondre là dessus, désolé d’avoir lâché un pavé indigeste comme ça)
N’empêche que je te trouve toujours un peu injuste avec NDA sur le coup du logement ! 😉
Qui aime bien châtie bien… je regrette qu’un type qui a des bonnes idées et un discours gaullien s’égare de temps en temps dans ces petites mesures démagogiques…
votre réponse au commentaire n°3 posté par Baruch et commentaire n°5posté par marc.malesherbes
comme la question est importante, j’y reviens.
Je suppose que vous admettez que la position “politique” des individus n’est pas déterminée uniquement par leur position dans le processus de production. Néammoins on peut admettre que c’est un
élément important. (mais il y a aussi la famille, les voisinages, les expériences particulières etc …)
Mon hypothèse de travail serait qu’au bout de “cinq ans” (?), cette position doit produire des effets statistiquement “mesurables”.
Aussi je reviens à la question des retraités; Pour moi ce sont fondamentalement des “extracteurs” de plus-value. Ils ne sont pas des producteurs de richesse, et ils bénéficient du travail des
autres si la retraite est par répartition, comme elle l’est aujourd’hui massivement en France. Ils sont donc amenés à être du coté des patrons, comme exploiteur des autres salariés et divers
actifs (on connaît la phrase typique des vieux: “aujourd’hui les jeunes ne sont plus durs à la tâche, comme nous l’étions”).
Le changement de mentalité ne se fait pas instantanément, mais cela amène, y compris ceux qui viennent des classes populaires, les anciens ouvriers, employés, à adopter en majorité le point
de vue des patrons. On le voit clairement dans le vote des plus de 65 ans qui est beaucoup plus à droite que celui de l’ensemble de la population.
Comme la population française vieilli, cela promet de beau jour à la droite, et à la gauche qui défend les patrons intelligement (le PS).
nb: le succès récent des votes PS paraît aller à l’encontre de cette hypothèse. Mais si on regarde les résultats, N Sarkozy a encore fait nettement mieux chez les plus agés, et JL Mélenchon
nettement moins bien (ainsi que le NPA et LO, mais vu l’étroitesse de leurs scores, l’estimation est moins précise).
Je suppose que vous admettez que la position “politique” des individus n’est pas déterminée uniquement par leur position dans le processus de production.
Celle des individus, non. Celle des classes, oui. Il y eut naguère des grands bourgeois qui finançaient le PCF – c’était le cas de Marcel Dassault, par exemple – par reconnaissance d’une dette
personnelle. D’autres le faisaient pour des raisons éthiques ou politiques. Mais globalement, en tant que classe, la bourgeoisie n’a jamais voté PCF.
Aussi je reviens à la question des retraités; Pour moi ce sont fondamentalement des “extracteurs” de plus-value. Ils ne sont pas des producteurs de richesse, et ils bénéficient du travail des
autres si la retraite est par répartition, comme elle l’est aujourd’hui massivement en France.
Je pense que cette analyse est erronée. Les retraités “bénéficient du travail des autres”, mais dans un rapport qui n’est pas “d’extraction” mais d’échange. En effet, les actifs donnent une
partie de la valeur produite aux retraités en échange de quelque chose: du droit de recevoir eux mêmes cette valeur quand à leur tour ils seront à la retraite. Les rapports intergénerationnels ne
sont pas de rapport d’exploitation: peut-on dire qu’un enfant est un “extracteur de plus-value” par rapport à ses parents ? Là encore, les parents partagent avec l’enfant la valeur qu’ils
produisent, mais c’est un rapport d’échange, puisque l’enfant en contrepartie a envers eux une obligation alimentaire… et payera leurs retraites!
Le changement de mentalité ne se fait pas instantanément, mais cela amène, y compris ceux qui viennent des classes populaires, les anciens ouvriers, employés, à adopter en majorité le
point de vue des patrons. On le voit clairement dans le vote des plus de 65 ans qui est beaucoup plus à droite que celui de l’ensemble de la population.
Je pense que cette analyse tient plus de préjugé que des faits. Les vieux tendent à être plus conservateurs sur certaines questions que les jeunes, mais ce n’est pas pour autant qu’ils votent
plus à droite. Ainsi, par exemple, l’électorat du PCF a une moyenne d’âge plus élevée que celui du PS. Et le FN un électorat plus jeune que l’UMP.
Merci, c’est si juste !
Parmi toutes les choses que vous dites, c’est l’idée de s’adresser à l’electorat populaire réel (“les ouvriers n’ont pas de patrie”, a dit Marx…), d’origine européenne et d’origine lointaine
(maghrebine ou africaine), qui me semble la plus prometteuse.
Le discours du Front de Gauche est catastrophique par rapport à cela :
“1- Le fait de vivre dans un meme espace avec des origines differentes ne pose pas de probleme, par exemple de heurts lies a des difference de moeurs, de regroupements communautaires,
de sentiment d’exclusion ou d’invasion, de sentiment qu’on n’a pas de prise sur la “culturalité” du lieu ou on vit.
2-Il n’y a pas non plus de problemes d’incivilités.
3-Etc…”
L’erreur du Front de Gauche est de croire qu’on ne peut parler de ces choses que de maniere agressive vis a vis des gens d’origine lointaine, ce qui le conduit a refuser d’en parler. C’est
doublement une erreur :
D’abord parce que finalement ca rapproche le Front de Gauche de l’autre Front (national), ça cree un point de jonction entre les extremes : le Front National croit lui aussi qu’on ne peut
parler de ces problemes que de maniere agressive vis a vis des gens d’origine lointaine : la difference est ensuite que le Front national s’autorise a en parler (n’a pas peur d’etre agressif),
tandis que le Front de gauche se l’interdit (par peur d’etre agressif).
Ensuite, le Front de Gauche, croit qu’il n’est pas possible de parler de ces choses de maniere positive, or c’est justement de cela qu’on a besoin. Non pas ne pas en parler, mais en parler
de maniere positive, en proposant des solutions. Un nouveau consensus moral de vie collective malgre nos differences d’origines, et non pas un tabou sur les differences d’origines. Un retour du
sentiment de former une famille de voisins, plutot que le refus du sentiment familial lié au voisinage (par un mauvais “universalisme”).
Parmi toutes les choses que vous dites, c’est l’idée de s’adresser à l’electorat populaire réel (“les ouvriers n’ont pas de patrie”, a dit Marx…), d’origine européenne et d’origine
lointaine (maghrebine ou africaine), qui me semble la plus prometteuse.
Et bien… je pense que vous interprétez mal la formule de Marx. Pour comprendre ce qu’il a voulu dire, il faut revenir à la formule complète: “On accuse les communistes de vouloir abolir la
patrie, la nationalité ; les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu’ils n’ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique,
s’ériger en classe maîtresse de la nation, il est par là encore national lui-même, quoique nullement dans le sens bourgeois”. On voit bien que Marx ne nie nullement le fait national, et
encore moins le fait que les ouvriers appartiennent à une nation déterminée, puisque leur mission historique est de “s’ériger en classe maîtresse de la nation”. En ce sens, le prolétariat est
“national”.
Le discours du Front de Gauche est catastrophique par rapport à cela :(…)
Le discours du Front de Gauche – et pas que lui, la gauche en général a cette tendance – est un discours de négation. Lorsqu’un problème est difficile, lorsqu’il met en opposition le discours et
les intérêts de sa base électorale, la logique de la gauche est simple: nier que le problème existe. Dans cette logique, les problèmes que la gauche ne sait pas comment résoudre sont des faux
problèmes, inventés par l’Ennemi pour distraire les masses des véritables questions.
L’erreur du Front de Gauche est de croire qu’on ne peut parler de ces choses que de maniere agressive vis a vis des gens d’origine lointaine,
Le Front de Gauche a fait le choix tactique du clivage. Son discours ne cherche pas à gagner ceux qui ne sont pas d’accord avec lui, mais à galvaniser ceux qui lui sont acquis. C’est toute la
logique du “Front contre Front”. Contrairement à ce que vous proposez, cette tactique rapproche le Front de Gauche de la tactique Sarkozyenne, et non du Front National qui depuis qu’il a commencé
son “aggiornamento” insiste au contraire sur sa capacité à discuter – et à séduire – des gens qui lui sont historiquement hostiles. Je vous conseille par exemple la lecture de la “lettre aux
fonctionnaires” de Marine Le Pen. La lettre commence en évoquant les “incompréhensions” qui ont rendu l’échange entre le FN et les fonctionnairs difficiles, pour conclure ensuite que tout cela
est du passé et qu’aujourd’hui on peut discuter.
Par ailleurs, je pense que dans votre commentaire vous insistez beaucoup sur la question des “origines”, alors que le sentiment anti-immigré en France est moins une question “d’origine” que de
comportement. En France, les immigrés assimilés sont très rarement discriminés.
Je suis gêné car je vois que vous avez la gentillesse de répondre à tous les commentaires, j’ai donc peur d’abuser de votre temps en répondant à votre réponse, mais je ne peux pas m’en
empêcher…
Sur la citation de Marx (“les ouvriers n’ont pas de patrie”) : c’est vrai que je sortais la citation de son contexte. Mais il me semble que même (et surtout) hors contexte, cette citation reflète
bien la pensée de Marx sur la nation. Marx n’a pas de respect pour la nation. Elle est pour lui un obstacle a l’union de tous les humains en un seul peuple (c’est ce qu’il en dit dans
“l’ideologie allemande”). Elle est pour lui un truc de beauf de son époque, devant sa biere au bar (c’est aussi comme ça qu’il en parle dans “l’idéologie allemande”, peut etre juste pour se
moquer de la vision grandiose de la nation de Fichte et Hegel, derrière laquelle il y aurait des réalités bien plus triviales). Quand les ouvriers seront mieux éduqués, ils n’auront pas de
patrie, car elle n’est qu’une chose archaique dans une mentalité ignorante et manipulée. Bref Marx pense sur la nation la même chose que sur la religion. La dimension affective et culturelle des
sociétés, la fonction de la nation ou de la religion par rapport à un consensus de moralité, d’ethique, de “culturalité” collective, necessaire a la vie dans un meme espace, une meme société :
tout cela est ignoré par Marx.
Sur mon obsession pour les origines. Quand vous parlez d’assimilation, vous parlez du fait que se crée un consensus de vie collective entre nouveaux arrivants et ceux qui etaient deja la. Mais il
me semble que la creation d’un tel consensus n’est pas si evidente que ça. Quelle est alors notre culture commune ? Ce n’est pas si facile a creer…
Je suis gêné car je vois que vous avez la gentillesse de répondre à tous les commentaires, j’ai donc peur d’abuser de votre temps en répondant à votre réponse, mais je ne peux pas m’en
empêcher…
Je vous en prie, faites vous plaisir…
Marx n’a pas de respect pour la nation. Elle est pour lui un obstacle a l’union de tous les humains en un seul peuple (c’est ce qu’il en dit dans “l’ideologie allemande”).
Certainement. Mais encore une fois, Marx est un homme de son époque. Ce qu’il a écrit doit être ramené au monde qu’il pouvait observer et qui alimentait sa réflexion. Vouloir faire de Marx un
oracle intemporel est trahir sa pensée. L’Etat – et Marx n’établit pas de distinction nette entre nation et état – dont Marx parlait était l’Etat-gendarme du XIXèe siècle. Son diagnostic est-il
toujours valable lorsqu’on parle de l’Etat-providence né après la deuxième guerre mondiale ? Par ailleurs, il n’y a pas dans les travaux de Marx une véritable théorie de la nation et de l’Etat.
Ce sont plutôt ses successeurs (Kautsky, Lénine, mais aussi Staline) qui ont travaillé la question.
Sur mon obsession pour les origines. Quand vous parlez d’assimilation, vous parlez du fait que se crée un consensus de vie collective entre nouveaux arrivants et ceux qui etaient deja
la.
Certainement pas. Il n’y a aucun “consensus” là dedans. L’assimilation, comme son nom l’indique, implique que les nouveaux arrivants adoptent le mode de vie des habitants du pays. Point à la
ligne.
On voit mal au nom de quoi on demanderait à ceux qui sont “dejà là” de négocier avec les nouveaux arrivants leur mode de vie. Après tout, les autoctones n’ont demandé rien à personne. Ce n’est
pas eux qui ont demandé aux “nouveaux arrivants” de venir. Leur imposer une négociation sur leurs modes de vie est la meilleure manière pour obtenir d’eux un rejet. Bien sur, les nouveaux
arrivants peuvent amener avec eux des usages, des traditions culturelles, culinaires, sociales qu’ils peuvent proposer aux autoctones. Ceux-ci peuvent choisir de les adopter ou pas. Mais c’est
leur choix souverain, et pas une “négociation”.
Ah bon ? Israël est ingouvernable ???
C’est très drôle !
C’est très simpliste votre analyse des modes de scrutin.
Je me demande toujours pourquoi il n’y a qu’en France (et au Royaume-Uni) que le scrutin majoritaire intégral est appliqué en Europe et si ardemment défendu… C’est très troublant. Peut-être
parce que ce sont de vieilles “démocraties” en contradiction avec leurs principes fondateurs et les deux pays dans lesquels il y a le plus de conservateurs.
Ah bon ? Israël est ingouvernable ??? C’est très drôle !
Je ne sais pas si c’est comique ou au contraire tragique, mais c’est un fait. Un pays ou l’immense majorité des gens sont contre les privilèges d’une petite minorité religieuse sans qu’aucun
gouvernement depuis trente ans n’arrive à les supprimer par peur de perdre sa majorité au Parlement peut être dit “ingouvernable”. Un pays où les décisions de la Cour Suprême ne sont pas
appliquées par le gouvernement parce que des groupuscules nécessaires pour obtenir une majorité s’y opposent peut raisonnablement être considéré “ingouvernable”. Mais peut-être que mon critère
n’est pas le bon: quels sont pour vous les critères qui distinguent un pays “gouvernable” d’un pays “ingouvernable” ?
Je me demande toujours pourquoi il n’y a qu’en France (et au Royaume-Uni) que le scrutin majoritaire intégral est appliqué en Europe et si ardemment défendu…
Désolé de vous contredire, mais le Royaume Uni n’utilise jamais – et n’a jamais utilisé – le “scrutin majoritaire intégral”. Le Parlement anglais est élu suivant le scrutin uninominal à un tour:
le candidat qui obtient le plus de suffrages au tour unique est élu quelque soit son nombre de voix. Cela étant dit, je ne comprends pas votre argument: quand bien même la France serait le seul
pays à élire son Parlement au scrutin majoritaire à deux tours, en quoi cela prouverait que c’est un mauvais système ? Dois-je comprendre que vous croyez à la sagesse des moutons ?
Je pense qu’il faut laisser tomber l’exemple d’Israël pour ne pas envenimer, détourner le fil de discussion.
Cela étant dit, Israël – malgré les innombrables reproches que je pourrais faire à ses gouvernements successifs – est parfaitement gouvernable. A la fin des élections, une période de flotement de
un mois à deux mois maximum précéde la formation d’un gouvernement stable qui dure toute une législature. Ensuite, toutes les lois sont votées ; l’administration les applique ; la justice
sanctionne les violations du droit. C’est un Etat de droit. Par contre, il y a une situation géopolitique et politique très tendue à cause d’une minorité qui phagocyte la tête de millions
d’ISraéliens et d’occidentaux. Bref !
A mon tour je me permets de vous contredire car vous n’êtes pas juriste (c’est pas grave, ce n’est pas un gage de sérieux et de véritologie)
Au Royaume-Uni, il s’agit d’un scrutin uninominal majoritaire à un tour (comme pour nos élections cantonales).
En France, il s’agit d’un scrutin uninominal majoritaire (pour les législatives ou les présidentielles) à deux tours. C’est pourquoi il n’y a qu’un nom sur nos bulletins de vote (+ celui du
suppléant…)
Partout ailleurs – et c’est là que je veux en venir -, il y a des scrutins de “liste” et un système de répartition à la proportionnelle. C’est beaucoup plus démocratique (et plus juste aussi). Et
dans tous ces pays, les gouvernements sont stables (hors circonstances catastrophiques (ex : Belgique ou Portugal récemment)) et les pays peuvent être très développés avec une économie
florissante et parfois de meilleurs systèmes sociaux.
Ca n’enlève rien à votre analyse sur les errements du PCF. C’est juste un problème théorique, juridique, démocratique et j’en ai incroyablement marre que “votre” argument sur le scrutin
majoritaire soit repris en boucle partout (par tous les médias, par certains grands professeurs de droit – quand ils sont à la télé, sinon, devant leurs pairs, ils sont moins loquaces).
S’il n’y avait que le scrutin uninominal majoritaire qui fonctionnait ça se saurait et les 90% des pays utilisant celui de “liste” l’auraient abandonné.
Mon argument est simple : le scrutin majoritaire est injuste et beaucoup moins démocratique (en plus, il permet le bipartisme de facto) ; l’argument selon lequel c’est le seul scrutin qui
permette de gouverner est totalement faux. La preuve, tous les autres pays européens utilisent le scrutin de liste à la proportionnelle et s’en sortent très bien.
Je pense qu’il faut laisser tomber l’exemple d’Israël pour ne pas envenimer, détourner le fil de discussion.
Je ne vois pas pourquoi. Il ne s’agit pas ici de discuter la question du conflit arabe-israélien, mais une pure question de droit constitutionnel. L’état d’Israel reste un des très rares pays à
élire son parlement avec un système proportionnel intégral sans seuil, c’est à dire, le système dont on nous bassine en permanence qu’il est le plus “démocratique” qu’on puisse imaginer. Or, ce
système est tellement dysfonctionnel que même les israéliens, à gauche comme à droite, l’admettent.
Cela étant dit, Israël – malgré les innombrables reproches que je pourrais faire à ses gouvernements successifs – est parfaitement gouvernable. A la fin des élections, une période de
flotement de un mois à deux mois maximum précéde la formation d’un gouvernement stable qui dure toute une législature.
Je pense que vous confondez “stabilité” et “gouvernabilité”. Le reproche qu’on fait au système politique israélien n’est pas qu’il soit “instable”: comme vous le signalez, les gouvernements sont
relativement stables (même s’ils durent rarement une “législature”, puisque rares sont les parlements qui ont complété leur mandat sans être dissous). Le problème, c’est la “gouvernabilité”,
c’est à dire, la possibilité pour les différentes institutions de prendre des décisions en correspondant à leur mandat et de les faire exécuter sur le terrain. Le système israélien est
caractérisé par la possibilité qu’ont certains groupuscules à bloquer le processus décisionnaire ou l’exécution des décisions en prenant le gouvernement en otage.
Ensuite, toutes les lois sont votées ; l’administration les applique ; la justice sanctionne les violations du droit.
Pas vraiment. Il y a une longue liste de décisions de la Cour Suprême qui n’ont pas été executées par le gouvernement. Souvent, parce que les mettre à exécution risquerait de priver le
gouvernement en question de sa majorité à la Knesset. Pour ne donner qu’un exemple, la décision concernant l’interdiction des “interrogatoires renforcés”.
C’est un Etat de droit.
Le principe fondamental d’un état de droit est celui de la légalité des peines: “La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en
vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée”. Pourriez-vous m’indiquer comment la pratique de “l’assassinat ciblé” mise en oeuvre par les services
israéliens est compatible avec ce principe ?
On peut longuement discuter si la situation géopolitique d’Israel justifie ou non moralement ses écarts par rapport au droit. Mais le fait est que l’Etat d’Israel ne remplit pas les conditions
minimales pour être considéré un “état de droit”.
“un système proportionnel intégral sans seuil, c’est à dire, le système dont on nous bassine en permanence qu’il est le plus “démocratique”” (Descartes)
Non… Les constitutionnalistes et les politiciens qui souhaitent l’introduction du système proportionnel intégral ne plébiscite pas celui d’Israël.
Pour ma part, je pense qu’en France, le système allemand représetnerait un bon compromis entre conservateurs et progressistes : 50% scrutin majoritaire ; 50% proportionnel.
Juridiquement ça aurait beaucoup plus de gueule ; politiquement ce serait acceptable par une très grande majorité ; institutionnellement, ça serait parfaitement stable et plus démocratique. Mais
bon, c’est pas demain la veille…
Pour Israël, je pense qu’on partage les mêmes points de vue sur la légitimité politique des politiques publiques israéliennes.
Si j’ai essayé d’écarter cet exemple, c’est parce qu’il clive, suscite des comportements irrationnels de la part de beaucoup d’internautes. C’était pour vous en fait. Moi je veux bien discuter de
la géopolitique, des violations du droit par Israël etc. mais je remarque que ça fout le boxon trop souvent.
Objectivement, c’est tout de même un Etat plus respectable que beaucoup d’autres. Juridiquement, c’est un Etat de droit au sens strict (comme l’Autriche de 1867 à 1920 par exemple avec un
Empereur et pas de démocratie mais une protection des droits fondamentaux et un respect de la légalité par les pouvoirs publics). Mais Israël n’est pas un Etat de droit démocratique exemplaire
(comme la France par exemple et contrairement aux démocraties scandinaves, à l’Autriche, la Belgique, le Portugal, l’Espagne, et d’autres).
Surtout, on peut s’en tenir aux 24 pays de l’UE qui utilisent la proportionnelle pour LE point important que je critiquais à l’origine.
Non… Les constitutionnalistes et les politiciens qui souhaitent l’introduction du système proportionnel intégral ne plébiscite pas celui d’Israël.
Ah bon ? Pourtant j’avais cru comprendre que les partisans de la “VIème République” favorisaient un système de représentation proportionnelle intégrale sans seuil. Les calculs des dirigeants du
FdG démontrant qu’avec la “proportionnelle” ils auraient eu 40 députés sont faits avec ce système, par exemple…
Pour ma part, je pense qu’en France, le système allemand représetnerait un bon compromis entre conservateurs et progressistes : 50% scrutin majoritaire ; 50% proportionnel.
Avant de savoir quel serait le “bon compromis”, il faudrait préciser quel est l’objectif… Si le but est que tout le monde soit représenté, autant demander à chaque parti de désigner un député
(ou deux, ou trois, ou cinq) et répartir le reste des sièges au scrutin majoritaire, par exemple…
Juridiquement ça aurait beaucoup plus de gueule ; politiquement ce serait acceptable par une très grande majorité ; institutionnellement, ça serait parfaitement stable et plus
démocratique.
Par principe – et par expérience – je tends à me méfier des systèmes qui permettent à n’importe qui d’être élu sans autre raison que parce qu’il est choisi par une bureaucratie partisane. Le
problème des systèmes avec une dose importante de proportionnalité est celui-à: un âne peut être élu du moment où il est mis en tête de liste par un parti. L’avantage des scrutins par
circonscription est celui-là: ils réduisent les pouvoirs des bureaucraties des partis. A la proportionnelle, Guéant et Morano seraient à l’Assemblée.
Si j’ai essayé d’écarter cet exemple, c’est parce qu’il clive, suscite des comportements irrationnels de la part de beaucoup d’internautes. C’était pour vous en fait.
J’avais bien compris, et je vous en remercie. Mais la règle de ce blog est: “pas de vaches sacrées”. Je fais confiance à mes lecteurs pour débattre dans un climat rationnel. Et ceux qui ne
respecteraient pas la règle… et bien je n’aurai pas d’état d’âme à les censurer.
Objectivement, c’est tout de même un Etat plus respectable que beaucoup d’autres.
Je ne savais pas que la “respectabilité” faisait partie des attributs d’un Etat… Mais à supposer qu’elle le soit, la “respectabilité” n’est pas mon problème. Je me tiens aux faits:
respectable ou pas, l’Etat d’Israel ne remplit pas les conditions indispensables pour être qualifié d’Etat de droit. Etnotamment, le principe de légalité des peines. Dès lors qu’une personne peut
être privée de ses biens, de sa liberté ou de sa vie sans recours possible sur simple décision administrative, on n’est plus dans le cadre de l’Etat de droit. Et le fait que de telles
mesures soient justifiables par un état d’urgence ne change rien à la question.
Juridiquement, c’est un Etat de droit au sens strict (comme l’Autriche de 1867 à 1920 par exemple avec un Empereur et pas de démocratie mais une protection des droits fondamentaux et un
respect de la légalité par les pouvoirs publics).
Je vous repète ma question: comment peut on concilier la politique des “assassinats ciblés” avec la notion de “respect de la légalité par les pouvoirs publics” ou “la protection des droits
fondamentaux” ? Le principe de légalité des peines n’est il pas un “droit fondamental” ?
Surtout, on peut s’en tenir aux 24 pays de l’UE qui utilisent la proportionnelle pour LE point important que je critiquais à l’origine.
Vous remarquerez que sur les 24 en question, seulement quelques petits pays très homogènes (Danemark, Pays-Bas) pratiquent la proportionnelle intégrale, et tous ont prévu un seuil. Mais je repète
la question fondamentale pour moi: en quoi un système proportionnel fabriquerait une représentation plus “juste” ?
“Pourtant j’avais cru comprendre que les partisans de la “VIème République” favorisaient un système de représentation proportionnelle intégrale sans seuil.”
Ah bon ?!? Je n’avais jamais lu ça dans les revues spécialisées : après une description, généralement on insiste sur le fait qu’il faut tout de même des correctifs pour ne pas tomber dans les
errements de la IVè ou ceux que connaissent régulièrement Israël.
Pour la digression : je ne sais franchement pas de quoi vous parlez avec les “assassinats ciblés”. C’est comme les Etats-Unis ?
Concernant la proportionnelle, hormis l’Italie et l’Allemagne avec un scrutin mixte, le RU et la France et leur système majoritaire intégral, tous les autres pratiquent la proportionnelle
intégrale (mais avec des seuils, des primes au vainqueur etc.)
A mon sens, c’est bien évidemment plus démocratique et donc plus juste. Comment peut-on considérer qu’il est normal qu’aujourd’hui le PS et l’UMP détiennent 90% des sièges ?? Ils n’ont
jamais représenté et ne représenteront jamais autant de Français. Pourtant, ils peuvent décider d’absolument tout, tout seul… Y compris une révision substantielle de la Constitution pour peu
qu’ils s’entendent. L’incidence est que ça favorise le bipartisme et le centrisme institutionnel : comme aux Etats-Unis, on se retrouve finalement avec deux énormes mastodontes qui font la
politique du moins-disant.
Avec la proportionnelle, tous les partis feraient partie du Parlement. Selon les dispositions consitutionnelles, ils pourraient avoir des présidences de commission, la possibilité de désigner à
la proportionnelle les très hauts postes de l’exécutif ou des juges constitutionnels (même s’ils ont des scores modestes).
C’est tout de même mieux ainsi ! Que le FN n’est que deux députés est problématique ; le FG 10 !! LEs verts 17 et les centristes une vingtaine je crois………..
Non seulement ce serait plus juste du point de vue de la représentativité et de la liberté d’expression des opinions politiques (la lutte est inégale s’ils ne sont pas au Parlement, vous le savez
: la machine médiatique est implacable et ne s’attarde que sur le show), mais en plus c’est beaucoup plus efficace institutionnellement car le dialogue, le débat, l’aptitude au consensualisme et
donc l’obligation de concilier des intérêts divergents permet une prise de décision plus efficiente. Je vous renvois sur ce point aux auteurs respectables (notamment P-J Proudhon qui est un
penseur vraiment très intéressant en général et sur les mécanismes de prise de décision en particulier) et aux exemples des démocraties scandinaves exemplaires sur ces derniers points.
Bien sûr c’est mon point de vue ! Je serai curieux de savoir en quoi vous trouvez le système majoritaire juste, démocratique voire efficace (selon l’approche que j’ai développée ci-dessus).
A vous lire
Ah bon ?!? Je n’avais jamais lu ça dans les revues spécialisées : après une description, généralement on insiste sur le fait qu’il faut tout de même des correctifs pour ne pas tomber dans les
errements de la IVè ou ceux que connaissent régulièrement Israël.
Et bien, au lieu de lire les “revues spécialisées” vous devriez lire les documents des partisans de la “VIème République” directement. Tiens, par exemple, je vous renvoie au texte du programme du
Front de Gauche “l’Humain d’abord”. Voici les références à la proportionnelle dans ce texte (disponible in extenso ici):
p31: “Rétablissement (sic) de la proportionnelle à toutes les élections”. Aucune référence à un seuil où n’importe quel autre “correctif”, pas plus qu’à un scrutin mixte.
p32: “La proportionnelle sera rétablie pour toutes les élections”. Là encore, pas la moindre référence à un seuil, un correctif, un scrutin mixte…
p33: là, on devient plus précis concernant l’assemblée constituante: “Elle [l’assemblée constituante] sera élue à la proportionnelle intégrale sans seuil avec la parité” (c’est
moi qui souligne).
Conclusion: le Front de Gauche propose d’établir la proportionnelle à toutes les élections, et même si la proposition de “proportionnelle intégrale sans seuil” ne figure explicitement que pour
l’assembléé constituante, on voit mal pourquoi ce qui est bon pour la constituante serait tout à coup mauvais pour les assemblées parlementaires…
Pour la digression : je ne sais franchement pas de quoi vous parlez avec les “assassinats ciblés”. C’est comme les Etats-Unis ?
Oui. C’est la possibilité qu’à le pouvoir exécutif d’ordonner l’exécution d’une personne.
Concernant la proportionnelle, hormis l’Italie et l’Allemagne avec un scrutin mixte, le RU et la France et leur système majoritaire intégral, tous les autres pratiquent la proportionnelle
intégrale (mais avec des seuils, des primes au vainqueur etc.)
Je vous le repète: le RU n’a pas de système “majoritaire”, ni intégral ni autrement. C’est un scrutin uninominal à un tour. Mais je ne comprends pas votre argument: la grande majorité des états
européens ne sont pas laïques. Est-ce une raison pour revenir sur la séparation des églises et de l’Etat ? Le fait que la grande majorité des pays européens ait recours à la proportionnelle
n’implique nullement que ce système soit meilleur que le scrutin majoritaire…
A mon sens, c’est bien évidemment plus démocratique et donc plus juste.
Encore une fois, je ne vois pas où est “l’évidence”. Vous semblez considérer comme “évident” qu’un système qui permet à tous les partis d’avoir une représentation plus proche de leur poids dans
l’opinion est plus “démocratique”. En fait, vous considérez comme une “évidence” que l’électeur vote pour un parti – ou pour un programme – et non pour une personne. Mais cela n’a rien
“d’évident”: si l’on pose le fait que le choix d’un représentant est d’abord le choix d’un homme, alors la proportionnelle, système où ce sont les partis qui choisissent les hommes qui
représenteront le peuple, est bien moins “démocratique” que celui où les citoyens choisissent leurs représentants directement.
Comment peut-on considérer qu’il est normal qu’aujourd’hui le PS et l’UMP détiennent 90% des sièges ?
Une question n’est pas un argument. Je ne vois pas en quoi cette situation serait “anormale”. Après tout, le parlement n’est pas une émission de télévision. Nous avons besoin d’une assemblée qui
puisse légiférer.
Ils n’ont jamais représenté et ne représenteront jamais autant de Français. Pourtant, ils peuvent décider d’absolument tout, tout seul…
Ils ne décident de rien “tout seul”. La démocratie ne se limite pas aux élections. Elle comprend aussi le débat public. Et l’expérience du FN a bien montré quon peut exercer une influence
considérable sur le vote parlementaire et la politique du gouvernement sans avoir un seul élu. Je pense qu’il y a dans votre position une incompréhension fondamentale sur le rôle d’une assemblée
élue. Si le rôle de celle-ci était d’être une “image” de l’électorat qui la mandate, le meilleur mode de désignation serait non pas la proportionnelle, mais le tirage au sort.
L’incidence est que ça favorise le bipartisme et le centrisme institutionnel : comme aux Etats-Unis, on se retrouve finalement avec deux énormes mastodontes qui font la politique du
moins-disant.
Alors il faudra m’expliquer pourquoi la Vème République a vécu l’essentiel de son histoire sans bipartisme. Jusqu’aux années 1990, on était plutôt dans un régime de “la bande des quatre”. Même
aujourd’hui, les deux grands partis ne représentent au premier tour que deux tiers des votes… ce qui n’est pas beaucoup plus qu’en Allemagne, par exemple.
Avec la proportionnelle, tous les partis feraient partie du Parlement. Selon les dispositions consitutionnelles, ils pourraient avoir des présidences de commission, la possibilité de désigner
à la proportionnelle les très hauts postes de l’exécutif ou des juges constitutionnels (même s’ils ont des scores modestes).
Et qu’est-ce qu’on gagnerait ? J’avoue avoir du mal à comprendre en quoi donner la possibilité au FN ou au NPA – et ne parlons même pas des partis-sectes qui ne manqueraient pas de surgir si par
malheur on leur donnait la possibilité de rentrer au Parlement – de nommer des “très hauts postes de l’exécutif” ou des “juges constitutionnels” améliorérait la vie du citoyen.
Non seulement ce serait plus juste du point de vue de la représentativité et de la liberté d’expression des opinions politiques (la lutte est inégale s’ils ne sont pas au Parlement, vous le
savez : la machine médiatique est implacable et ne s’attarde que sur le show),
Votre commentaire confirme mon idée que vous voyez dans le Parlement un lieu d’expression plus qu’un lieu de délibération. Je suis en désaccord complet avec cette vision. Pour s’exprimer, il y a
le débat public. Le Parlement est là pour légiférer. Ce sont deux choses totalement différentes. Quant à la question médiatique, cela fait vingt ans que Jean-Marie Le Pen “fait le show”, et il
n’a pas besoin pour cela d’avoir des élus. Les gens qui ont quelque chose à dire arrivent à se faire entendre, élus ou pas élus.
car le dialogue, le débat, l’aptitude au consensualisme et donc l’obligation de concilier des intérêts divergents permet une prise de décision plus efficiente.
Là encore, vous tenez pour “évident” quelque chose qui ne l’est pas. Vous me rappelez un vieil dicton anglais qui dit qu’un chameau est un cheval dessiné par consensus. La fonction d’un
gouvernement n’est pas de “concilier des intérêts divergents” mais de trancher entre eux. Le gouvernement par “consensualisme” n’a pas que des qualités. Or, justement, l’avantage du scrutin
majoritaire est de donner au Parlement les moyens de trancher.
Je serai curieux de savoir en quoi vous trouvez le système majoritaire juste, démocratique voire efficace (selon l’approche que j’ai développée ci-dessus).
Je vais essayer de vous répondre. Pour ce qui concerne l’idée de “justice”, je pense que le terme “juste” (ou “injuste”) ne s’applique pas à un mode de scrutin. L’élection a pour but de
sélectionner les organes en qui le peuple délègue les différents pouvoirs, et non pas de partager un gâteau et de donner à chacun la portion qu’il “mérite”.
Sur la question de la “démocratie”, je dirais que pour moi la démocratie représentative n’est pas un “pis aller” en attendant la démocratie directe. Je pense que la démocratie nécessite cette
instance de médiation qui est le représentant. Et c’est pourquoi je préfère un système électoral ou l’on élit un représentant – c’est à dire un être humain que l’on estime digne de nous
représenter – a qui on peut demander personnellement des comptes. Dans la logique proportionnelle, on n’élit pas un homme, on vote pour un parti, et c’est lui qui choisit finalement les hommes. A
la rigueur, si l’on veut la proportionnelle, allons jusqu’au bout de la logique: il n’y a qu’à réunir une assemblée composée d’un représentant par parti politique, le vote de chacun ayant un
poids proportionnel au nombre de voix obtenu par son parti lors des élections. On économiserait un paquet de salaires…
Pour ce qui concerne l’efficacité, je pense qu’il y a une question de cohérence politique. Le peuple doit choisir entre les différents programmes qui lui sont présentés. Je ne crois pas que
l’action du gouvernement doive être un mélange des différents programmes à proportion du poids – ou du pouvoir de nuisance – de chacun. Le système majoritaire a l’avantage d’assurer que le
programme qui déplait le moins puisse être appliqué dans sa totalité. Ce n’est pas, à mon sens, un mauvais compromis.
Je vous le repète: le RU n’a pas de système “majoritaire”, ni intégral ni autrement. C’est un scrutin uninominal à un tour. (Descartes)
Et je vous répète que vous vous trompez ! Allez lire une définition du scrutin majoritaire et vous verrez que le RU a un scrutin majoritaire uninominal à un tour tandis que la France a un
scrutin majoritaire uninominal à deux tours.
Mais je ne comprends pas votre argument: la grande majorité des états européens ne sont pas laïques. Est-ce une raison pour revenir sur la séparation des églises et de l’Etat
? (Descartes)
Je n’ai jamais affirmé que parce que les autres ont ceci, il nous le fallait. C’est un procédé de controverse assez faible.
C’est juste que votre argument de « l’ingouvernementabilité » est démonté dans les faits puisque la quasi-totalité des pays européens sont parfaitement gouvernables alors qu’ils ont un
scrutin proportionnel (et pour ceux qui le pratiquent depuis très longtemps ils sont beaucoup plus avancés – ce n’est pas un hasard à mon avis). C’est tout
Vous semblez considérer comme “évident” qu’un système qui permet à tous les partis d’avoir une représentation plus proche de leur poids dans l’opinion est plus “démocratique”.
(Descartes)
Là évidemment, si vous ne comprenez pas cela, je ne vois pas trop quoi redire…
Une question n’est pas un argument. Je ne vois pas en quoi cette situation serait “anormale”. Après tout, le parlement n’est pas une émission de télévision. Nous avons besoin d’une
assemblée qui puisse légiférer. (Descartes)
Alors sous la forme affirmative : deux partis qui détiennent 90% des sièges alors qu’ils ne représentent pas la même proportion de la population est anormal. D’autre part, encore une fois,
les pays utilisant le scrutin proportionnel savent parfaitement gouverner.
Je pense qu’il y a dans votre position une incompréhension fondamentale sur le rôle d’une assemblée élue. Si le rôle de celle-ci était d’être une “image” de l’électorat qui la
mandate, le meilleur mode de désignation serait non pas la proportionnelle, mais le tirage au sort. (Descartes)
Le tirage au sort serait idéalement le meilleur moyen (dans une démocratie parfaite). Tant que deux partis décideront de tout en n’étant, dans le meilleur cas, que « influencés » par
d’autres courants politiques, l’assemblée ne remplira justement pas son rôle de délibération constructive et de prise de décision démocratique.
Alors il faudra m’expliquer pourquoi la Vème République a vécu l’essentiel de son histoire sans bipartisme. (Descartes)
Ah bon ? Il me semblait pourtant qu’il n’y avait eu que l’UMP (RPR) ou le PS qui avait eu des majorités parlementaires (même relative) en 54 ans d’existence.
Votre commentaire confirme mon idée que vous voyez dans le Parlement un lieu d’expression plus qu’un lieu de délibération. Je suis en désaccord complet avec cette vision. Pour
s’exprimer, il y a le débat public. Le Parlement est là pour légiférer. (Descartes)
Et avant qu’il légifère, il y a un débat public AU Parlement : avec une médiatisation officielle, un compte-rendu exhaustif de tout ce qu’il s’y passe, des votes, des amendements… Bref deux,
trois bricoles dont sont exclus quelques millions de Français (plus d’un quart en comptant vraiment tout le monde).
Le Parlement n’est pas soit un lieu d’expression public et équitable, soit un organe constitutionnel décisionnel. Il est les deux !!! Pour que la prise de décision soit démocratique et le
plus efficace possible la première fonction est même une condition sine qua none.
La fonction d’un gouvernement n’est pas de “concilier des intérêts divergents” mais de trancher entre eux. Le gouvernement par “consensualisme” n’a pas que des qualités.
(Descartes)
Il n’y a pas que des qualités (ça prend plus de temps notamment). Mais pour viser l’idéal de l’unanimité chère à Rousseau on ne peut pas « trancher » entre des intérêts divergents en
excluant l’autre. Il faut le convaincre que son idée est moins bénéfique à la société, et au final à lui-même.
C’est une différence de conception de la démocratie. Effectivement, je préfère que tout le monde prenne part au jeu démocratique plutôt qu’un seul homme – ou une oligarchie ou un clan, corps,
caste, classe – le fasse sans se préoccuper des autres.
Finalement, pour les trois derniers paragraphes il y a quelques incohérences et surtout une contradiction logique dans votre raisonnement.
Tout d’abord, je constate que quel que soit le mode de scrutin, ce sont les partis qui désignent juridiquement et dans les faits qui seront ses représentants
suprêmes. Il y a une démocratie interne au parti et même avec des primaires parfaites, ce sera toujours la direction du parti qui choisira dans les faits ses propres candidats (sélectivité dans
l’admission, évolution de carrière et, finalement, élection aux postes de direction).
Surtout, vous ne pouvez pas à la fois critiquer le scrutin proportionnel parce qu’on n’élit pas un homme mais qu’on vote « pour un parti – ou un
programme » (je vous cite) et en même temps écrire pour défendre le caractère efficace du scrutin majoritaire: « Le peuple doit choisir entre les différents programmes
qui lui sont présentés. »
Encore une fois, vous opposez de manière frontale, irréductible, insurmontable, des composantes qui constituent ensemble l’objet questionné. Oui on vote pour un être de chair et de sang à une
élection ; mais on vote également pour un programme, une tendance idéologique représentée par tel ou tel parti.
J’irai plus loin : le scrutin majoritaire favorise et accentue la personnalisation de la politique et c’est, à mon sens, incompatible avec l’essence même de la démocratie devant laquelle
l’unique doit s’effacer devant le tout.
Je suis d’accord que le scrutin majoritaire permet d’appliquer facilement et sans compromis une politique précise (pour le meilleur comme pour le pire – pour l’instant nous n’avons eu que des
exemples du pire et le jour ou le grand soir arrivera, vous nous écrirez un beau billet pour expliquer quelle chance on a d’avoir des représentants vertueux, bons et progressistes qui vont
pouvoir appliquer la totalité de leur programme rapidement).
Mais le scrutin proportionnel permet aussi de s’essayer à l’art de la contradiction, de s’enrichir des arguments de l’autre pour arriver à une décision qui lèse le moins de personnes au final.
Et je vous répète que vous vous trompez ! Allez lire une définition du scrutin majoritaire et vous verrez que le RU a un scrutin majoritaire uninominal à un tour tandis que la France a
un scrutin majoritaire uninominal à deux tours.
Pourriez-vous m’expliquer quelle est pour vous la différence entre le “scrutin majoritaire uninominal à un tour” et le “scrutin uninominal à un tour” ?
C’est juste que votre argument de « l’ingouvernementabilité » est démonté dans les faits puisque la quasi-totalité des pays européens sont parfaitement gouvernables alors qu’ils ont
un scrutin proportionnel (et pour ceux qui le pratiquent depuis très longtemps ils sont beaucoup plus avancés – ce n’est pas un hasard à mon avis). C’est tout
Je vous rappelle que j’avais invoqué l’ingouvernabilité comme argument contre la “proportionnelle intégrale sans seuil” proposée par les partisans de la VIème république. A ma connaissance, rares
sont les pays européens qui utilisent un tel mode de scrutin.
Là évidemment, si vous ne comprenez pas cela, je ne vois pas trop quoi redire…
Ce n’est pas un problème de “compréhension”. Je “comprends” très bien, mais je ne partage pas votre opinion… car c’est bien une opinion, et non une vérité.
Ce que vous semblez tenir pour une vérité évidente n’est ni l’un ni l’autre. La démocratie implique que les citoyens soient représentés, pas les partis. La question de savoir si une assemblée où
tous les partis sont représentés à proportion de leur poids électoral répresente au mieux les citoyens est une matière fort discutable. Ainsi, par exemple, on peut soutenir que le vote Front
National étant un vote protestataire, les électeurs votent pour ce parti non pas parce qu’il les “répresente”, mais parce que c’est la seule manière de faire connaître aux autres partis leur
mécontentement. Les députés FN ne seraient donc pas représentatifs de leur électorat… et le scrutin majoritaire permettrait justement aux électeurs d’exprimer leur mécontentement sans pour
autant élire des députés dont ils ne partagent pas le projet.
Alors sous la forme affirmative : deux partis qui détiennent 90% des sièges alors qu’ils ne représentent pas la même proportion de la population est anormal.
Encore une fois, cette remarque montre que nous avons une vision totalement opposé de ce qu’est la représentation. Un “parti” ne représente personne. Je n’ai jamais voté pour un parti, j’ai voté
pour des hommes. Ce sont elles qui me “représentent”, pas leur parti. Et je n’ai aucune envie de voter pour des organisations qui se réserveraient elles le droit de décider quels sont les hommes
qui doivent me représenter.
D’autre part, encore une fois, les pays utilisant le scrutin proportionnel savent parfaitement gouverner.
La Belgique me parait un exemple éclatant du contraire. Et ne me dites pas que c’est la conséquence d’une division du pays. Tous les pays sont “gouvernables” quand tout va bien. C’est lorsqu’il y
a une crise que la faiblesse d’un système politique apparaît. La IVème République a été parfaitement “gouvernable” jusqu’à ce qu’une crise survienne.
Le tirage au sort serait idéalement le meilleur moyen (dans une démocratie parfaite).
Seulement si vous postulez que le “meilleur moyen” est une assemblée qui soit une image parfaite de l’électorat. Mais ce principe est très discutable. Personnellement, je pense que les
institutions représentatives n’ont pas seulement un rôle de courroie de transmission, mais un rôle de médiation: elles légifèrent au nom du citoyen, mais pas nécessairement comme le ferait le
citoyen. Lorsque l’Assemblée Nationale abolit la peine de mort (alors qu’une majorité des citoyens souhaite son maintien) elle est dans son rôle. Et pour qu’ils puissent jouer ce rôle, il est
nécessaire que l’assemblée ne soit pas une image de l’électorat.
Tant que deux partis décideront de tout en n’étant, dans le meilleur cas, que « influencés » par d’autres courants politiques, l’assemblée ne remplira justement pas son rôle de
délibération constructive et de prise de décision démocratique.
Eh bien, je n’ai pas l’impression que la délibération constructive et la prise de décision démocratique fonctionnent nettement mieux à la Knesset israélienne, qui pourtant est élue à la
proportionnelle intégrale sans seuil, le mode d’élection qui s’approche le plus possible de ce que vous appelez “le meilleur système”. Je pense que vous surestimez le bon sens des élus et
sous-estimez la question de la gouvernabilité. Comme disait je ne sais plus qui, “le pouvoir corrompt, mais l’impuissance corrompt absolument”. Il y a pire qu’un gouvernement trop fort: c’est un
gouvernement trop faible.
Ah bon ? Il me semblait pourtant qu’il n’y avait eu que l’UMP (RPR) ou le PS qui avait eu des majorités parlementaires (même relative) en 54 ans d’existence.
Si c’est cela que vous appelez “bipartisme”, alors vous aurez du mal à trouver des grandes démocraties, quelque soit le mode d’élection des députés, qui ne soit pas “bipartiste”. En Allemagne,
depuis la guerre, seuls deux partis ont eu des majorités parlementaires. En Espagne aussi. En Italie, jusqu’à l’explosion du système politique il y a une quinzaine d’années, un seul parti a
gouverné sans interruption. Et pourtant tous ces pays ont des scrutins proportionnels… Dans ces conditions, l’équation “scrutin majoritaire=bipartisme” paraît un peu absurde.
Le système français pendant l’essentiel de la Vème République a été quadripartiste: à la division gauche/droite se superpose une division interne de chacun de ces camps: à droite l’UDF et
le RPR, à gauche le PS et le PCF. Ce n’est que depuis une vingtaine d’années qu’on se trouve dans une configuration qui tend de plus en plus vers le bipartisme. Cela n’a donc rien à voir avec le
mode de scrutin.
Et avant qu’il légifère, il y a un débat public AU Parlement : avec une médiatisation officielle, un compte-rendu exhaustif de tout ce qu’il s’y passe, des votes, des amendements… Bref
deux, trois bricoles dont sont exclus quelques millions de Français (plus d’un quart en comptant vraiment tout le monde).
Personne n’est “exclu”. Tout le monde est représenté par un député, que je sache. Encore une fois, vous semblez croire que les citoyens ne sont pas représentés par des élus, mais par des partis.
A la rigueur, pourquoi élire des députés ? Il suffirait de réunir les partis, en leur donnant à chacun un vote qualifié proportionnel au nombre de voix qu’il a obtenu, et on économiserait 577
salaires…
Le Parlement n’est pas soit un lieu d’expression public et équitable, soit un organe constitutionnel décisionnel. Il est les deux !!!
Je n’en suis pas persuadé. Je pense qu’on a intérêt à séparer le débat public d’un “débat” qui fait partie d’un processus décisionnaire. D’ailleurs, les citoyens le font spontanément: alors que
les débats parlementaires sont retransmis, personne ne s’intéresse.
Mais pour viser l’idéal de l’unanimité chère à Rousseau on ne peut pas « trancher » entre des intérêts divergents en excluant l’autre. Il faut le convaincre que son idée est moins
bénéfique à la société, et au final à lui-même.
C’est de l’idéalisme à l’état pur. Imaginer qu’un groupe d’intérêts serait prêt à sacrifier volontairement ses intérêts au nom d’une solution qui est “bénéfique pour la société”, et qu’on peut à
chaque fois trouver des solutions ou tout le monde gagne, c’est se fourrer le doigt dans l’oeil.
C’est une différence de conception de la démocratie. Effectivement, je préfère que tout le monde prenne part au jeu démocratique plutôt qu’un seul homme – ou une oligarchie ou un clan, corps,
caste, classe – le fasse sans se préoccuper des autres.
Moi aussi. Seulement, à la fin du “jeu démocratique” on se retrouvera avec des intérêts divergents. Croire que ces intérêts accepteront volontairement de céder au nom d’un bien commun est une
illusion. Il faut donc prévoir une autorité capable de trancher, une autorité suffisamment légitime pour que toutes les parties s’inclinent devant sa décision.
Tout d’abord, je constate que quel que soit le mode de scrutin, ce sont les partis qui désignent juridiquement et dans les faits qui seront ses représentants suprêmes.
Certainement pas. Aucun parti n’a jamais “désigné” De Gaulle ou Giscard, par exemple… Accessoirement, on discutait des représentants parlementaires, et non les “représentants suprêmes”.
Et pour ce qui concerne les candidatures parlementaires, le pouvoir des partis est assez limité. L’affaire Ségolène est de ce point de vue un bon exemple de la manière dont le scrutin majoritaire
limite le pouvoir des partis.
Il y a une démocratie interne au parti et même avec des primaires parfaites, ce sera toujours la direction du parti qui choisira dans les faits ses propres candidats (sélectivité dans
l’admission, évolution de carrière et, finalement, élection aux postes de direction).
Sauf que les électeurs ne sont pas obligés de suivre leur parti. Olivier Falorni a pu se présenter contre la candidate désignée par la direction du parti, et il a été élu. Avec un scrutin
proportionnel, cela aurait été impossible. Il aurait suffi au parti de mettre Segolène en tête de liste pour garantir son élection.
Surtout, vous ne pouvez pas à la fois critiquer le scrutin proportionnel parce qu’on n’élit pas un homme mais qu’on vote « pour un parti – ou un programme » (je vous cite) et en
même temps écrire pour défendre le caractère efficace du scrutin majoritaire: « Le peuple doit choisir entre les différents programmes qui lui sont présentés. »
La contradiction n’est qu’apparente. J’ai choisi mes mots avec un grand soin: au scrutin proportionnel, on “vote” pour un programme, mais on ne le “choisit” pas. Le programme qui sera mis en
oeuvre ne sera aucun de ceux pour lesquels les électeurs auront voté: ce ce sera nécessairement un compromis entre eux, sauf dans le cas improbable d’un parti réunissant 51% des voix. L’avantage
du scrutin majoritaire, c’est justement qu’en donnant une majorité à un parti, il permet de “choisir” le programme qui sera mis en oeuvre.
Oui on vote pour un être de chair et de sang à une élection ; mais on vote également pour un programme, une tendance idéologique représentée par tel ou tel parti.
Vraiment ? Prenons un exemple: lorsque je vote pour un candidat investi par le Front de Gauche, je me prononce pour l’arrêt de Fessenheim et la sortie du nucléaire ? Ou suis-je en train de voter
pour le maintient du nucléaire ? Lorsque je vote pour un Vert investi par le PS, c’est le projet personner de l’homme, ou celui du PS que je suis en train de voter ?
J’irai plus loin : le scrutin majoritaire favorise et accentue la personnalisation de la politique et c’est, à mon sens, incompatible avec l’essence même de la démocratie devant laquelle
l’unique doit s’effacer devant le tout.
Au delà de la question du mode de scrutin, nous avons deux idées opposées de la représentation. Pour vous, le représentant est une “courroie de transmission” du représenté, il se contente de
transmettre sa volonté et doit donc effacer sa personnalité. Pour moi, le représentant a un rôle de médiation. Pour reprendre l’idée de Condorcet, il n’est pas élu pour voter comme aurait voté
l’électeur, mais pour suivre ce qui lui dicte son intelligence. Car c’est à celle-ci que fait confiance l’électeur. La personnalisation est donc nécessaire.
Je suis d’accord que le scrutin majoritaire permet d’appliquer facilement et sans compromis une politique précise (pour le meilleur comme pour le pire – pour l’instant nous n’avons eu que des
exemples du pire (…)
T’exagères. Je ne crois pas que la paix en Algérie ou le lancement du programme électronucléaire – pour ne prendre que deux exemples – aient été “pour le pire”. Et c’est un fait que si ces
solutions avaient du être prises par “compromis” entre les partis politiques, on y serait encore. D’ailleurs, pour ce qui concerne la guerre d’Algérie, ce fut l’incapacité du système
“proportionnel” de la IVème République à trouver ce “compromis” qui a provoqué sa chute.
Mais le scrutin proportionnel permet aussi de s’essayer à l’art de la contradiction, de s’enrichir des arguments de l’autre pour arriver à une décision qui lèse le moins de personnes au
final.
Je reconnais là votre rousseauisme… seulement, la délibération démocratique n’est pas seulement une question d’arguments, mais surtout une question d’intérêts.