Le retour de la haine de classe
On nous annonçait la fin de l’histoire, l’avènement d’une société apaisée où la lutte des classes ne serait plus qu’un – mauvais – souvenir, où entrepreneurs dynamiques – on ne dit plus « patrons », c’est ringard – et syndicats raisonnables discuteraient autour d’une table de solutions « gagnant-gagnant » que le gouvernement mettrait en œuvre par de sages réformes structurelles pour « libérer les énergies ».
Hélas, hélas, trois fois hélas… la doctrine du dialogue social dont Hollande avait fait sa « méthode » n’a pas résisté aux réalités. Malgré les prédictions futuristes de Rifkin et consorts, le lieu de travail reste traversé par une contradiction fondamentale qui fait que le patron – pardon, « l’entrepreneur » – et le salarié n’ont pas tout à fait les mêmes intérêts. Alors, plutôt que de perdre leur temps dans d’interminables nuits de négociations – et donc d’inévitables compromis – les entrepreneurs dynamiques, rien à voir avec les patrons du XXème siècle ont fait ce qu’ils savent faire de mieux : pleurer misère auprès du gouvernement. Gouvernement qui, ne sachant plus à quel saint se vouer pour inverser la courbe du chômage, a décidé de leur donner satisfaction avec une loi qui saccage le Code du travail et nous ramène à l’époque du patron de droit divin et du « si vous n’êtes pas content, c’est la porte ». Mais tout ça, en y mettant les formes « démocratiques », celles du référendum d’entreprise, par exemple, permettant de court-circuiter ces affreux syndicalistes qui, décidément, n’ont toujours pas compris que « entrepreneurs » et « collaborateurs » sont dans le même bateau, même les uns couchent dans la soute et les autres dans les cabines de première classe.
Il suffit en général d’un conflit social pour faire voler la belle façade consensuelle que vendent les magazines pour « managers »,et pour voir refleurir une rhétorique qui nous ramène un siècle – sinon deux – en arrière. Dirigeants politiques et patronaux, journalistes et « faiseurs d’opinion » se lâchent. Cela donne un discours qui fleure bon l’extrême droite, non pas celle de Florian Philippot et Marine Le Pen, mais celle de son père. Et cela dans la bouche de gens que l’on considère – à tort, semble-t-il – comme étant « de gauche ». Ce discours qui mêle l’indignation feinte à propos des « usagers pris en otage » (1) ; le mépris ouvert pour des organisations syndicales « passéistes » et « ringardes », recroquevillés sur leurs « avantages acquis » ; l’amalgame avec les groupuscules violents que, et le gouvernement le sait très bien, les syndicats ont toujours combattus ; les appels aux travailleurs à se résigner à la perte de leurs « avantages » au nom de la « mondialisation ».
Et le tout dans un langage de guerre civile. Lire Libération ou L’Obs aujourd’hui c’est lire Céline – celui des « Bagatelles », pas celui du « Voyage » – le talent en moins. La CGT n’est pas seulement critiquée, elle est haïe, et cette haine s’exprime dans les médias pourtant généralement considérés « démocratiques » sans fard. Pour leurs auteurs, il faut non seulement détruire la CGT, il faut l’humilier. Le paradoxe apparent est que la haine de classe fait son retour sous un gouvernement présumé « de gauche ». Il est d’ailleurs intéressant de comparer les positions prises par Nicolas Sarkozy vis-à-vis des manifestations contre la réforme des retraites et celles prises par le couple Hollande-Valls aujourd’hui. Dans le premier cas, le gouvernement avait assumé une position de fermeté bienveillante. Le discours était « le projet sera maintenu parce que nous l’estimons nécessaire, mais on comprend que les gens soient inquiets et ils ont le droit de le manifester ». Après tout, il est normal en démocratie que les gouvernements fassent ce qu’ils estiment devoir faire, et que les gens s’expriment dans la rue s’ils ne sont pas d’accord. Aujourd’hui, la position est totalement inverse : Dans leur rhétorique, Valls et Cazeneuve traitent les manifestations syndicales comme s’il s’agissait d’actes de sédition. La menace d’interdire les manifestations est une illustration parfaite, tant cette mesure nous ramène à un passé lointain, celui de la guerre d’Algérie. On n’ose imaginer ce que Hollande aurait dit du temps où il était député socialiste si Nicolas Sarkozy avait ne serait-ce qu’évoqué une telle possibilité.
En fait, le paradoxe n’est qu’apparent : Il traduit un terrible malentendu, celui qui consiste à croire que la droite est « libérale » alors que la gauche serait le contraire. En fait, c’est exactement l’inverse : Contrairement à ce qui se passe en Grande Bretagne, par exemple, en France les libéraux ont toujours été minoritaires à droite. La droite française est bonapartiste par tradition, et donc profondément antilibérale. Cette réalité, Alain Madelin l’a apprise à ses dépens lorsqu’il a essayé de faire une politique véritablement libérale après la victoire de la droite en 1986. Il a été vite renvoyé dans ses foyers après quelques déclarations tonitruantes que l’électorat de droite n’était pas prêt à accepter. Au-delà de sa rhétorique, c’est à droite qu’on trouve les partisans les plus acharnés de l’interventionnisme étatique, de la primauté de l’Etat et des institutions sur les inclinations individuelles, les critiques les plus sévères du libéralisme européen.
C’est au contraire à gauche que le long processus initié à la fin des années 1960 a accouché des gouvernements les plus libéraux qu’on ait connu depuis la libération. Là encore, il ne faut pas se laisser tromper par les discours. Tout en rejetant ostensiblement la compétition, le marché et autres épouvantails traditionnellement associés – souvent à tort – au libéralisme, les gouvernements de la gauche ont mis en œuvre les réformes bien plus inspirées par les idées libérales. C’est évident dans le domaine « sociétal », ou les idées « libérales-libertaires » sur la famille ou l’école sont devenues une pensée unique incontestable à défaut d’être incontestée. C’est aussi assez clair dans le domaine des institutions politiques, avec l’élévation d’idées comme la décentralisation ou la démocratie participative au rang d’évidences. Mais c’est surtout clair dans le domaine économique, ou les gouvernements de gauche ont été les meilleurs serviteurs des bonzes de Bruxelles, pratiquant sans le moindre état d’âme l’ouverture des marchés et la privatisation des services publics. Et ce reproche ne s’applique pas seulement au Parti Socialiste. La « gauche radicale » a elle aussi contribué à ce saccage, par véritable conviction idéologique dans le cas des eurolâtres de EELV, par lâcheté et carriérisme dans le cas du PCF « muté ». Seules les formes sont différentes : un « social-libéral » à la sauce PS n’a pas du tout le même discours qu’un « libéral-libertaire » mélenchonien ou écologiste. Mais en pratique, ces gens se rejoignent dans une pensée anti-institutionnelle, dans une approche a-historique, dans une eurolâtrie plus ou moins assumée. Et surtout, dans un mépris du « peuple », franchouillard, raciste, sexiste, toujours prompt à voter Le Pen. Un mépris qui peut-être agacé ou paternaliste, mais qui aboutit toujours à la même conclusion : il faut faire son bonheur sans lui, et éventuellement contre lui.
Cette transformation aboutit à un résultat intéressant : aujourd’hui, l’électorat populaire penche à droite, alors que ce sont les « classes moyennes » et les couches aisées qui apportent leurs voix à la gauche. Le phénomène est maintenant bien documenté chez le FN, mais il est aussi de plus en plus visible pour ce qui concerne la « droite républicaine ». Les dernières élections locales ont vu de grandes villes traditionnellement ouvrières – comme Le Havre ou Hénin-Beaumont – se donner des maires de droite alors que les villes les plus riches et bourgeoises – Paris, Lyon – ont donné de fortes majorités de gauche. Et ne parlons même pas des dernières élections régionales, ou le sort des urnes dans le Nord et dans l’Est s’est joué entre la droite et l’extrême droite. Ce phénomène n’est pas que français. En Grande Bretagne, sur la question du « Brexit », le vote « in » et « out » se divise suivant les lignes de la richesse et de la pauvreté. Les classes moyennes du sud prospère et « branché » votent « in », les ouvriers de la « ceinture noire » du nord de l’Angleterre, qui concentre la pauvreté, le chômage, la désaffiliation vote « out ». Au moment ou l’on nous annonce la fin de la « lutte des classes », pour la première fois depuis de très longues années l’électorat se fracture à nouveau autour de lignes de classe.
Rien d’étonnant dans ces conditions à ce que le gouvernement et les médias reprennent la rhétorique de la haine de classe. Après tout, c’est bien un conflit de classe qui se joue entre un gouvernement au service des « classes moyennes » et une société où les couches populaires se sentent de plus en plus exclues du débat politique et abandonnées à leur triste sort. Mais si cette rhétorique prend une telle violence, c’est aussi qu’il reste une différence culturelle entre la droite et la gauche. Pour la droite, qui assume son caractère de classe, les syndicats sont des adversaires. Le conflit avec eux est fait partie de l’ordre des choses. La gauche, au contraire, cherche toujours à se convaincre qu’elle reste le défenseur de la classe ouvrière. Elle n’a pas envie d’assumer son véritable caractère de classe. Et c’est pourquoi elle réagit beaucoup plus violemment lorsque la classe ouvrière lui dit « merde ». La droite n’attend rien de la bienveillance des syndicats, et c’est pourquoi elle n’est jamais déçue. Malgré toutes ses trahisons, la gauche s’attend à ce que les syndicats soutiennent et éventuellement prolongent son action. Elle est donc toute surprise lorsque ceux-ci persistent à défendre les intérêts de leurs mandants et refusent de comprendre le « grand dessein » politique qu’on leur propose.
A cette problématique s’ajoute une autre, plus conjoncturelle. Le gouvernement est faible, son autorité est déjà chancelante. La moindre défaite, même partielle, risque de détruire le peu de crédibilité qui lui en reste. La peur de perdre la face pousse le gouvernement à une comédie de la fermeté caricaturale. Valls semble vouloir s’inspirer de Thatcher lors de la grande grève des mineurs. Mais si Thatcher pouvait se permettre d’humilier les mineurs, c’est parce qu’elle avait son camp uni derrière elle. Le parti conservateur assumait pleinement et sans frilosité le fait d’avoir pris fait et cause pour la bourgeoisie et les couches moyennes aisées. Il ne s’en cachait pas. Le PS n’est pas encore là, et on peut douter qu’en France, étant donnée notre tradition politique, elle puisse se permettre un tel écart idéologique sans disparaître. Après tout, en France le PS sert depuis trente ans d’alibi à ces classes « qui ont le cœur à gauche mais le portefeuille à droite ». Pour s’assumer de droite, on n’a pas besoin de lui.
Thatcher avait le libéralisme triomphant, le PS et son électorat ont toujours le libéralisme honteux, et cela malgré tous les efforts de Terra Nova et consorts. L’épuisement rapide de l’expérience Macron montre d’ailleurs les difficultés de la chose. On a le droit d’être libéral à gauche, à condition de protester en permanence de son attachement aux « valeurs » et aux grands ancêtres. Le mouvement social d’aujourd’hui révèle cette contradiction et les oblige à s’assumer. D’où la violence de la réaction en retour.
La caractéristique essentielle du paysage politique aujourd’hui est la rupture chaque fois plus importante entre la gauche et les couches populaires de l’électorat. On se plaint que gauche et droite de gouvernement représentent les mêmes couches sociales, les mêmes intérêts, et qu’elles font les mêmes politiques. Mais c’est pire que ça : la gauche fait aujourd’hui une politique bien plus antisociale que la droite, non pas parce qu’elle aurait « trahi » son électorat, mais parce qu’elle le suit. Et ne vous trompez pas : ce que l’électorat de gauche reproche à Hollande, ce n’est pas d’en faire trop dans le registre libéral et européiste, c’est de n’en faire pas assez. Pas assez de « réformes », et on sait ce que ce que ce terme veut dire dans la vulgate eurolâtre. Si Hollande coule dans les sondages, ce n’est pas tant parce qu’il perd des voix sur sa gauche – les candidats d’extrême gauche font à quelques points de pourcentage près les mêmes résultats qu’il y a cinq ans – mais parce qu’il les perd sur sa droite. La grande majorité des déçus du Hollandisme vont chez Juppé, et non chez Mélenchon. C’est d’ailleurs pour cela que le gouvernement drague à droite. Le discours de François Hollande devant le congrès à Versailles reprenant à son compte la proposition de déchéance de nationalité, vieille revendication de la droite et de l’extrême droite, était le dernier exemple en date. Nous avons aujourd’hui un nouvel exemple avec l’idée d’interdire les manifestations syndicales ou de vouloir faire des syndicats les responsables du maintien de l’ordre. Le gouvernement est parti tellement à droite que même l’extrême droite trouve qu’il en fait trop.
A cela s’ajoute la faiblesse de l’exécutif. D’un côté un président incapable de définir une doctrine et de s’y tenir, négligeant les grandes affaires et se mêlant des petites, navigant à vue comme s’il était encore premier secrétaire d’un parti politique. De l’autre, un Premier ministre qui s’est coulé dans son personnage de Dark Vador avec une constance bornée qui rappelle que « pour celui qui a un marteau, toutes les solutions ressemblent à des clous ». Et enfin, une équipe ministérielle composée de rares poids lourds politiques – Macron, Royal – qui ne pensent qu’à leur image, quelques besogneux – Sapin, Cazeneuve – qui font leur boulot sans éclat, et un grand nombre de nullités trop effacées ou trop incompétentes pour apporter quoi que ce soit au travail du gouvernement. L’exemple le plus insigne est celui de Myriam El Khomri, qui porte à moitié un texte qu’elle n’a pas conçu, qui a besoin de l’autorisation du Premier ministre pour recevoir les syndicats, et seulement pour leur dire qu’elle ne peut rien changer.
Mais, me direz-vous, la gauche ne se limite pas au Parti socialiste. Il y a une « autre gauche », qui va du PCF aux différents groupuscules de l’extrême gauche, et qui tient un discours violemment antilibéral. C’est vrai. Seulement, il y a le dire et il y a le faire. Comment se traduit cet « antilibéralisme » dans la pratique ? Par la défense de l’Euro au nom d’un possible « smic européen ». Par la défense du voile islamique et autres conduites communautaires au nom de la « liberté des choix personnels ». Par la contestation des institutions traditionnelles comme la filiation au nom de « le droit des individus à s’aimer ». « L’autre gauche », derrière son discours antilibéral, a fait sien le principe les plus fondamentaux du libéralisme le plus libertaire : la toute-puissance de l’individu face aux institutions.
Si elle n’épouse pas aujourd’hui le discours de haine de classe des sociaux-libéraux, « l’autre gauche » l’a copieusement fait par le passé. Souvenez-vous par exemple de l’opération montée par certains collectifs de sans-papiers contre la CGT qui avait abouti à l’occupation de la Bourse du Travail à Paris. A l’époque, « l’autre gauche » n’avait pas été très active pour soutenir les syndicats, et c’est un euphémisme. Sociaux-libéraux et « autre gauche » passent en fait leur temps à critiquer les syndicats. Mais leurs reproches sont inversés : là où les socio-libéraux les accusent de saboter le travail en demandant trop, « l’autre gauche » leur reproche systématiquement de ne pas en faire assez. Pour les uns ils sont trop attachés aux avantages acquis, pour les autres ils ne les défendent pas suffisamment. Les uns envoient les CRS charger les manifestations, les autres applaudissent les groupuscules violents qui provoquent les charges…
Ce point mériterait d’ailleurs un long développement. En France, les syndicats « de masse » ont toujours rejeté la violence groupusculaire, considérant – à juste titre – que la dégradation des biens publics et privés et la violence de rue n’apportaient rien au mouvement et lui aliènent le soutien de l’opinion publique, essentiel dans une société démocratique. Cela n’a jamais empêché « l’autre gauche » de montrer une sympathie coupable envers ces actes violents, de les encourager, de les glorifier, de les justifier. C’est que, voyez-vous, « l’autre gauche » sait mieux que les travailleurs eux-mêmes de quoi ces derniers ont besoin pour développer leurs luttes… et si les syndicats – qui représentent les travailleurs – ne sont pas contents, tant pis pour eux.
Si la gauche social-libéral fait dans la haine de classe, « l’autre gauche » est plutôt dans une logique de mépris de classe. Vive la « souveraineté populaire », mais à condition que le « peuple » fasse ce qu’on lui dit de faire. Il ne s’agit tout de même pas de donner le pouvoir à tous ces « beaufs » franchouillards qui aiment la viande et le nucléaire et ne trient pas leurs déchets, tout de même…
Il y a de cela quelques mois, Manuel Valls avait adressé à l’ensemble de la gauche un avertissement solennel. La gauche, disait-il, peut mourir. Et Manuel Valls avait raison : non seulement la gauche peut mourir, mais la gauche – entendue comme le courant politique qui dans le conflit entre capital et travail prend le parti de ce dernier – est déjà morte. Que ce soit dans son versant social-libéral ou sous les traits de « l’autre gauche », elle ne s’intéresse aux couches populaires que pour confisquer leur parole et défendre en leur nom les intérêts des « classes moyennes ».
A ceux qui trouveraient le faire-part un peu prématuré, je conseille de regarder froidement les faits : En juin 2012, la gauche – et je dis bien toute la gauche, parce que « l’autre gauche » avait bien voté pour François Hollande et s’était ensuite désistée pour les candidats socialistes aux législatives – avait comme jamais la possibilité de lancer des réformes ambitieuses, de mettre en œuvre son projet politique. En sus de la présidence de la République, elle commandait une majorité dans les deux chambres du Parlement, dans tous les conseils régionaux à une exception près, dans la moitié des conseils départementaux. Elle tenait la mairie dans la majorité des villes de France, dont les deux plus grandes. Et tout ça, pour quel résultat ? Quels sont les réalisations dont elle pourra se prévaloir lorsqu’elle aura à présenter son bilan ? Et surtout, quelle différence avec la droite ? Parce que la gauche en 2012 c’était d’abord ça : une alternative à la droite. Une possibilité de faire autre chose, d’apporter d’autres réponses aux problèmes que celles proposées par la droite. Cette altérité, de toute évidence, n’existe plus.
Le défi des progressistes aujourd’hui, c’est de mettre sur la table une alternative qui soit à la fois attractive et crédible pour une large partie de nos concitoyens. Et cela passe, il faut bien le dire, par un compromis entre les intérêts des différentes classes sociales. Cela horrifiera peut-être ceux de mes lecteurs qui restent des communistes convaincus, mais je les conjure de regarder les réalités en face. Si nous étions dans une situation révolutionnaire, on pourrait réfléchir à une logique « classe contre classe ». Mais voilà, ce n’est pas le cas. Nous ne sommes pas dans une situation révolutionnaire, parce que le capitalisme n’est pas dans un moment de crise systémique. Au contraire, il est dans un moment d’expansion. Dans une telle situation, la mieux que les couches populaires puissent obtenir est un compromis dans la répartition de la richesse créée comme celui conclu à la Libération. Bien entendu, certains amis voudraient en finir avec l’exploitation capitaliste tout court. Moi aussi. Seulement, les choses ne sont pas mûres pour cela. Et poser la question sous la forme « c’est ça ou rien » est la meilleure manière de ne rien avoir.
Mélenchon pourrait – aurait pu ? – prendre la tête d’un tel mouvement si au lieu de tomber dans le piège gauchiste il avait mis la priorité dans un travail programmatique ambitieux, au lieu de consacrer son temps à des querelles de clocher avec les communistes. Aujourd’hui, c’est presque trop tard pour 2017, surtout si l’on tient compte que le processus d’élaboration programmatique lancé par Mélenchon dans le cadre « JLM2017 » est programmé pour ne pas aboutir à autre chose qu’une lettre au père Noël. C’est vraiment dommage, parce que Jean-Luc était à gauche l’une des rares personnalités assez transgressives pour pouvoir mener un tel mouvement. A droite, un secteur chez « Les Républicains » mais aussi chez le FN se positionnent – plus ou moins sincèrement – en direction d’un tel compromis entre capital et travail, qui implique à mon sens un rétablissement du cadre national comme cadre de la souveraineté, et des institutions capables de réguler efficacement le partage de la richesse, au premier rang desquelles l’Etat. Mais ce secteur est aujourd’hui trop faible pour présenter un candidat crédible, et ne pourra peser que par un effet d’influence sur le pouvoir qui sera issu des urnes en 2017.
Alors, faut-il désespérer ? Non, je ne le crois pas. D’abord, parce que l’histoire nous enseigne qu’une école de pensée peut influencer puissamment la politique sans jamais arriver au pouvoir. Or, on voit bien aujourd’hui que la « pensée unique » issue de la vague libérale-libertaire et qui connut son apogée dans les années 1980-90 est en train de perdre de sa force et que d’autres voix commencent à s’élever et à devenir crédibles. Il y a dix ou quinze ans, douter de la pertinence d’une « union toujours plus étroite » en Europe pouvait vous valoir l’ostracisme social ou l’échec à un concours. Aujourd’hui, ces doutes sont exprimés sans fard par des premiers ministres en exercice. Il y a dix ou quinze ans, le TAFTA aurait été considéré comme une évidence. Aujourd’hui, même Valls s’en démarque. Il y a dix ou quinze ans, mettre sur la table la question migratoire vous classait immédiatement dans l’extrême droite. Aujourd’hui, on commence à pouvoir discuter de la question sans tomber dans l’anathème. Bien sur, il y a beaucoup de chemin à parcourir pour reconquérir des espaces de débat public rationnel. Il y a une génération à former au débat. Mais le mouvement est là, et petit à petit les bouches s’ouvrent….
Descartes
(1) Vous noterez que les « usagers » des services publics, devenus dans le discours public des « clients » au fur et à mesure que l’idéologie eurolâtre de l’ouverture du marché s’est imposée, redeviennent à cette occasion des « usagers ». Il est rare d’entendre parler de « prise en otage des clients »…
Pas certain que les “choses soient pliées” pour 2017, mais avec 51/49 ce ne sera pas possible de résister à la violence de l’U.E et des anglo-saxons contre la France, il faut donc dés Septembre poser clairement le duel souverainistes / mondialistes. Il faut allez le plus loin dans une définition d’un cadre d’action national … c’est comme cela que les troisièmes et quatrièmes tours pourront apporter une divine surprise.
@ Gérard Couvert
[Pas certain que les “choses soient pliées” pour 2017,]
Ca dépend quelles « choses ». Il reste neuf mois avant l’élection. A ce jour, aucun candidat ne propose un projet progressiste qui soit à la fois attractif et crédible. Est-il possible de produire un tel projet, de l’expliquer, de le défendre, de persuader nos concitoyens que c’est ce qu’il faut faire ? Je ne le pense pas. D’autant plus qu’un tel projet ne peut qu’être un projet de rupture et que, comme le montre la campagne du « Brexit » chez nos voisins, la peur de l’inconnu reste un argument très puissant pour que tout reste comme c’est.
Oui, la campagne présidentielle est un moment important. Oui, elle permet de s’adresser à un public plus réceptif et faire avancer des idées. Mais je crains qu’il n’y a pas beaucoup de chances qu’un « outsider » arrive à s’établir et à devenir crédible pour un programme de changement.
[il faut donc dés Septembre poser clairement le duel souverainistes / mondialistes.]
Implicitement, c’est ce qui est en train d’arriver. La question des frontières – et donc de l’espace national – sera probablement un gros sujet de campagne. L’Euro aussi, comme le montrent les efforts considérables faits par les médias pour montrer que personne – y compris le FN – ne veut VRAIMENT quitter l’Euro…
Reste à voir quel sera le résultat du référendum britannique. Je crains malheureusement que nos voisins anglais ne cèdent à la peur de l’inconnu. Il faut noter d’ailleurs que – comme ce fut le cas chez nous en 1992 et 2005, le camp du « in » a fondé toute sa stratégie non pas sur l’évocation des acquis positifs de la construction européenne, mais sur ma menace des ineffables catastrophes qui s’abattraient sur l’Angleterre si ses habitants ne faisaient pas le « bon » choix.
@ Descartes
[D’autant plus qu’un tel projet ne peut qu’être un projet de rupture et que, comme le montre la campagne du « Brexit » chez nos voisins, la peur de l’inconnu reste un argument très puissant pour que tout reste comme c’est.]
“très puissant”, mais pas rédhibitoire : c’est heueux !!!
[“
Reste à voir quel sera le résultat du référendum britannique. Je crains malheureusement que nos voisins anglais ne cèdent à la peur de l’inconnu. Il faut noter d’ailleurs que – comme ce fut le cas chez nous en 1992 et 2005, le camp du « in » a fondé toute sa stratégie non pas sur l’évocation des acquis positifs de la construction européenne, mais sur ma menace des ineffables catastrophes qui s’abattraient sur l’Angleterre si ses habitants ne faisaient pas le « bon » choix.”]
Les Brits out ! Ils vous ont donné tort. Ne jamais désespérer des couilles de ce peuple et de son indépendance. (du moins les Anglais)
@ Ruben
[Les Brits out ! Ils vous ont donné tort.]
Il est des cas ou avoir tort est un plaisir… 😉
[Ne jamais désespérer des couilles de ce peuple et de son indépendance.]
D’aucun peuple. On peut désespérer des dirigeants, il ne faut jamais désespérer du peuple.
A propos de la peur de l’inconnu :
Si je la comprend pour les gamins nés entre 1995/2000 (quoique pour eux, il y a aussi l’absence de transmission de la part de leurs parents), j’avoue que j’ai un peu de mal à la concevoir pour les adultes de mon âge (trentenaires). Ma maman m’emmenait faire les courses, et je me souviens très bien qu’avant l’euro, avec 150 FR, on arrivait à remplir le chariot, alors qu’avec 20 €, tu peux toujours courir. Dans tous les quartiers populaires où j’ai milité, j’ai toujours entendu : la vie est chère avec l’euro.
@ Bannette
[A propos de la peur de l’inconnu : Si je la comprend pour les gamins nés entre 1995/2000 (quoique pour eux, il y a aussi l’absence de transmission de la part de leurs parents), j’avoue que j’ai un peu de mal à la concevoir pour les adultes de mon âge (trentenaires).]
En effet, pour ce qui concerne la sortie de l’Euro, on parle d’un « inconnu » fantasmé, puisque ce n’est qu’un retour au statu quo ante. Je trouve d’ailleurs la perte de mémoire remarquable : hier, dans l’émission de Dordain – qui s’appelle « le téléphone sonne Europe » mais qui devrait plutôt s’appeler « le rendez-vous des eurolâtres » – des auditeurs appelaient pour poser des questions du genre « pourra-t-on toujours voyager en Angleterre ? » ou « les Anglais pourront toujours venir en France ? », oubliant que les Suisses ou les Norvégiens ne sont pas dans l’UE et que ma foi ils ne semble pas que leurs frontières soient étanches…
[Ma maman m’emmenait faire les courses, et je me souviens très bien qu’avant l’euro, avec 150 FR, on arrivait à remplir le chariot, alors qu’avec 20 €, tu peux toujours courir. Dans tous les quartiers populaires où j’ai milité, j’ai toujours entendu : la vie est chère avec l’euro.]
C’est un reproche qui n’est pas tout à fait juste. Si l’Euro a provoqué une dérive de prix lors de sa création, l’inflation est ensuite restée faible. On a oublié un peu vite que les prix augmentaient bien plus vite dans les années 1960 et 70. Et on l’oublie pour une bonne raison : à l’époque les salaires suivaient. Ce qu’ils ne font plus depuis l’arrivée de l’Euro.
Bonjour,
Je me demande si vous n’êtes pas un peu pessimiste sur la possibilité de voir émerger une alternative politique à brève échéance, qui veuille, comme à l’époque du CNR, discuter posément d’un compromis nécessaire entre les différentes couches sociales, sans tomber dans les slogans et sophismes.
A gauche, je crois Montebourg sincère sur ce créneau ; et naturellement, Chevènement (même s’il est vieux) et M.F. Bechtel (même si elle manque de notoriété).
A droite, vous pensiez sans doute à Guaino, au sein des républicains. Mais Dupont Aignan, avec son parti, obtient de plus en plus d’audience. Si on peut critiquer son côté “coups médiatiques”, il faut reconnaître que cela a été utile, et je le crois lui aussi tout à fait sincère.
J’ai d’ailleurs eu des échos sérieux comme quoi une alliance avait été envisagée entre lui et Chevènement pour les dernières européennes et les dernières régionales, bonne preuve qu’ils ne sont pas si éloignés idéologiquement.
Enfin, au FN, vous pensiez également, je pense, à Philippot… S’il y a un éclatement en 2 du FN, le FN du Nord (avec Philippot) pourrait être une bonne base d’alternative politique…
@ Vincent
[Je me demande si vous n’êtes pas un peu pessimiste sur la possibilité de voir émerger une alternative politique à brève échéance, qui veuille, comme à l’époque du CNR, discuter posément d’un compromis nécessaire entre les différentes couches sociales, sans tomber dans les slogans et sophismes.]
Je ne doute pas qu’une telle alternative puisse surgir. Par contre, je ne pense pas qu’elle puisse s’imposer en à peine dix mois comme une alternative crédible, capable d’arriver au deuxième tour et de gagner l’élection. Il faut du temps pour établir un candidat, pour le rendre familier aux français.
[A gauche, je crois Montebourg sincère sur ce créneau ;]
Je n’ai qu’une confiance limitée en Montebourg. Sur beaucoup de points, je pense qu’il a les bonnes intuitions. Mais les intuitions ne suffisent pas. Il faut une pensée systémique. Parce que le combat sera très dur, parce que pour pouvoir le livrer il faudra garder la confiance des français, il faut être capable d’inscrire son action dans une cohérence compréhensible par les gens, et donc explicable. Je me trompe peut-être, mais je ne crois pas qu’il ait en lui une véritable pensée, ou qu’il soit capable de s’entourer des gens qu’il faut pour lui en construire une. C’est un intuitif, un politicien « de terrain », probablement un bon ministre. Mais je ne le vois pas en homme d’Etat.
[et naturellement, Chevènement (même s’il est vieux) et M.F. Bechtel (même si elle manque de notoriété).]
Chevènement est un véritable homme d’Etat, mais son temps est passé. Et on peut lui reprocher de ne pas avoir cherché à former un successeur… Bechtel est une femme intelligente, mais elle a le profil d’un haut fonctionnaire, pas celui d’un politique.
[A droite, vous pensiez sans doute à Guaino, au sein des républicains.]
Guaino a la tête d’un homme d’Etat. Mais, comme disait un homme d’Etat britannique, « il ne supporte pas les imbéciles, et c’est là un grave défaut chez un homme politique ». Pour faire de la politique – au sens noble du terme – il faut pouvoir convaincre, mais il faut aussi pouvoir séduire. Il y a dans l’adhésion des choses qui ont trait à la raison, mais aussi des choses qui tiennent à la séduction. C’est cela qui manque chez Guaino, et qui d’ailleurs est à l’origine de l’admiration réciproque entre lui et Sarkozy. Sarkozy admire chez Guaino l’intelligence, la culture, la rigueur intellectuelle. Guaino admire chez Sarkozy la capacité à séduire. Chacun voit chez l’autre ce qu’il n’est pas.
[Mais Dupont Aignan, avec son parti, obtient de plus en plus d’audience. Si on peut critiquer son côté “coups médiatiques”, il faut reconnaître que cela a été utile, et je le crois lui aussi tout à fait sincère.]
Probablement. Mais il lui manque toujours la même chose : l’esprit de système, la capacité à définir un projet cohérent. Se battre pour la sortie de l’Euro c’est très bien. Mais la sortie de l’Euro ne peut pas être un but, c’est le moyen d’une politique. Et sur cette politique, Dupont-Aignan n’a pas beaucoup à dire. Et par certains côtés, c’est logique : Dupont-Aignan, Guaino, Chevènement ont quelque chose en commun : ce sont avant tout des solitaires. Ils ne sont pas capables de bâtir un parti, de l’institutionnaliser, de créer un « intellectuel collectif ». Leurs collaborateurs sont souvent des serviteurs zélés et fidèles, pas des interlocuteurs. Or, il est impossible de fabriquer un projet tout seul.
[Enfin, au FN, vous pensiez également, je pense, à Philippot… S’il y a un éclatement en 2 du FN, le FN du Nord (avec Philippot) pourrait être une bonne base d’alternative politique…]
Je ne crois pas à un éclatement du FN. Ce qui les unit – l’espoir de conquérir des postes et des places – est bien plus fort que ce qui les sépare…
@ Descartes
[Je n’ai qu’une confiance limitée en Montebourg. Sur beaucoup de points, je pense qu’il a les bonnes intuitions. Mais les intuitions ne suffisent pas. Il faut une pensée systémique. (…). Je me trompe peut-être, mais je ne crois pas qu’il ait en lui une véritable pensée, ou qu’il soit capable de s’entourer des gens qu’il faut pour lui en construire une. C’est un intuitif, un politicien « de terrain »]
La manière dont vous le décrivez semble effectivement bien correspondre au personnage ; je me désole que vous ayez sans doute raison.
[Chevènement est un véritable homme d’Etat, mais son temps est passé. Et on peut lui reprocher de ne pas avoir cherché à former un successeur…]
Et je crois que le seul qui aurait pu lui faire face sur ce créneau, était Séguin, qui n’est pas mort que politiquement…
[Bechtel est une femme intelligente, mais elle a le profil d’un haut fonctionnaire, pas celui d’un politique.]
Je ne la connais pas directement, mais à travers ses écrits, il me semble qu’elle a tout d’un homme d’état (je suis sûr que, si elle me lisait, elle me pardonnerait de ne pas avoir écrit femme d’Etat).
Si on tentait de la comparer au plus grand (de Gaulle), il se démarquait lui aussi, à la base, surtout par ses écrits… Et n’est devenu un politique (dans le sens : en communion directe avec les citoyens) que par la force des évènements. Si le fond (l’intellect) est bon, il me semble qu’il devrait devnir facile de faire suivre le reste…
[Sarkozy admire chez Guaino l’intelligence, la culture, la rigueur intellectuelle. Guaino admire chez Sarkozy la capacité à séduire. Chacun voit chez l’autre ce qu’il n’est pas.]
Je ne sais pas ce que vaut cette analyse psychologique, mais elle a le mérite d’être percutante…
[Probablement. Mais il lui manque toujours la même chose : l’esprit de système, la capacité à définir un projet cohérent.]
Je crois que, contrairement à Montebourg, il a une meilleure capacité à savoir s’entourer de personnes qui ont cet esprit de système… Mais certes… N’est pas de Gaulle (ou Chevènement) qui veut…
[Dupont-Aignan, Guaino, Chevènement ont quelque chose en commun : ce sont avant tout des solitaires. Ils ne sont pas capables de bâtir un parti, de l’institutionnaliser, de créer un « intellectuel collectif ». Leurs collaborateurs sont souvent des serviteurs zélés et fidèles, pas des interlocuteurs. Or, il est impossible de fabriquer un projet tout seul.]
Je ne suis pas du tout d’accord concernant Chevènement : quand il était au MRC, il y avait des gens qui travaillaient vraiment sur de nombreux sujets. Et il suffit de suivre ce qu’il continue à faire avec ResPublica pour se rendre compte qu’il s’entoure bien et ne cherche pas à faire son projet seul.
J’ai cru comprendre que Dupont-Aignan aussi, faisait travailler des cellules sur bien des sujets.
[Je ne crois pas à un éclatement du FN. Ce qui les unit – l’espoir de conquérir des postes et des places – est bien plus fort que ce qui les sépare…]
Cette phrase montre que vous êtes un cynique là où je suis un utopiste.
Je crois, peut être naivement, que ceux qui s’engagent dans des partis en marge de l’échiquier politique le font plus pour leurs convictions que par intérêt. Peut être avez vous raison ?
Vincent
@ Vincent
[La manière dont vous le décrivez semble effectivement bien correspondre au personnage ; je me désole que vous ayez sans doute raison.]
Cela étant dit, le fait qu’il ne soit pas un homme d’Etat ne le rend pas pour autant invotable. Après tout, à défaut de grives…
[Et je crois que le seul qui aurait pu lui faire face sur ce créneau, était Séguin, qui n’est pas mort que politiquement…]
Tout à fait. Séguin était probablement encore plus lucide. Il a bien compris qu’il perdait son temps dans le marigot politique dans un contexte où son discours n’avait aucune chance de peser, et a préféré revenir dans la haute administration, où il a fait un travail remarquable.
[Je ne la connais pas directement, mais à travers ses écrits, il me semble qu’elle a tout d’un homme d’état (je suis sûr que, si elle me lisait, elle me pardonnerait de ne pas avoir écrit femme d’Etat).]
Il lui manque cette empathie, cette séduction, ce rapport « charnel » au citoyen qu’on trouve chez les vrais hommes d’Etat.
[Si on tentait de la comparer au plus grand (de Gaulle), il se démarquait lui aussi, à la base, surtout par ses écrits… Et n’est devenu un politique (dans le sens : en communion directe avec les citoyens) que par la force des évènements. Si le fond (l’intellect) est bon, il me semble qu’il devrait devenir facile de faire suivre le reste…]
Je ne suis pas aussi sur. De Gaulle avait, et cela depuis sa jeunesse, un charisme, un art de se mettre en scène. Bechtel – que par ailleurs je connais personnellement et pour qui j’ai une grande estime – n’a pas ce caractère.
[Je ne suis pas du tout d’accord concernant Chevènement : quand il était au MRC, il y avait des gens qui travaillaient vraiment sur de nombreux sujets. Et il suffit de suivre ce qu’il continue à faire avec ResPublica pour se rendre compte qu’il s’entoure bien et ne cherche pas à faire son projet seul.]
Oui et non. Si j’en crois l’un de ses fidèles, Chevènement a travaillé toute sa vie politique durant avec un petit entourage formé des mêmes gens, les seuls en qui il ait une totale confiance. Au MRC, beaucoup de gens travaillaient sur beaucoup de sujets… mais le dernier mot appartenait toujours au Maître. Il n’y a jamais eu au MRC de véritable direction collective, capable de discuter et même de mettre Chevènement en minorité.
[Cette phrase montre que vous êtes un cynique là où je suis un utopiste.]
« Le cynisme, c’est la fumée qui se lève des illusions qui brûlent »…
Je suis bien entendu d’accord avec cet article… personnellement, un des aspects qui m’horripile le plus dans le traitement gouvernemental de ce mouvement social, c’est que ce gouvernement qui se montre aussi réactionnaire à l’égard de la protestation est le même qui a cherché à éviter toute vague lors des diverses dégradations commises notamment par les “gens du voyage” il n’y a pas si longtemps…
Au delà de ça, je suis peut-être un peu jeune pour avoir l’expérience de situations similaires, mais il me semble en effet que la légitimité du gouvernement est vraiment fragile ces temps-ci, non ? Je m’adresse à ceux qui ont connu cette période, on fait souvent la comparaison avec la contestation à laquelle Juppé avait dû faire face, à quel point cette comparaison est-elle pertinente ?
@ BolchoKek
[personnellement, un des aspects qui m’horripile le plus dans le traitement gouvernemental de ce mouvement social, c’est que ce gouvernement qui se montre aussi réactionnaire à l’égard de la protestation est le même qui a cherché à éviter toute vague lors des diverses dégradations commises notamment par les “gens du voyage” il n’y a pas si longtemps…]
J’y avais pas pensé, mais je trouve ta remarque très pertinente. En effet, lors de l’occupation de l’A1 il y avait eu pour un demi-million d’Euros de dégâts rien que pour l’infrastructure autoroutière, sans compter le coût indirect induit par la paralysie d’une infrastructure essentielle. A l’époque, le préfet s’était contenté de regarder et de compter les points, en disant « on poursuivra plus tard » (ce qui, soyons honnête, il a fini par faire). A Saint-Aignan, il y avait des dommages pour une centaine de milliers d’euros, et aucune poursuite. Et il n’est pas venu à l’idée de personne au gouvernement de menacer les gens du voyage d’une « interdiction » quelconque…
[Au delà de ça, je suis peut-être un peu jeune pour avoir l’expérience de situations similaires, mais il me semble en effet que la légitimité du gouvernement est vraiment fragile ces temps-ci, non ?]
Ce qui est passionnant dans cette affaire pour celui qui s’intéresse à l’histoire des institutions, c’est de constater à quel point nos institutions sont solides. Alors que le président de la République est de toute évidence incapable d’assurer correctement son rôle, que le Premier ministre est dépassé par les événements et que le gouvernement est une véritable cour des miracles, la machine institutionnelle continue à fonctionner, les lois continuent à être appliquées, l’ordre public est maintenu. Le chaos en haut ne se traduit pas par un chaos en bas.
[Je m’adresse à ceux qui ont connu cette période, on fait souvent la comparaison avec la contestation à laquelle Juppé avait dû faire face, à quel point cette comparaison est-elle pertinente ?]
Difficile de comparer. En 1995, le conflit était tranché. Juppé assumait pleinement sa réforme, et n’était prêt à aucune modification pour chercher la bienveillance des syndicats « réformistes ». De l’autre côté, les syndicats étaient unis dans leur rejet de la réforme et ne pouvaient accepter qu’une issue, le retrait. C’était un conflit franc sur un texte précis, entre des adversaires forts. D’un côté, Juppé était en début de mandat, de l’autre les syndicats étaient unis et mobilisés sur une affaire qui touchait leurs plus gros bataillons. Et il faut dire que Juppé était un adversaire fiable, avec lequel les discussions étaient possibles.
Aujourd’hui, on est dans un contexte très différent. D’abord, la loi El Khomri est une de ces lois fourre-tout, qui plus est vidée en partie de son objectif initial pour ne pas déplaire à la CFDT. Elle est portée par un gouvernement tellement erratique dans son comportement qu’il est difficile d’entrer en négociation avec lui. avec Les syndicats eux aussi ont changé. Les confédérations sont beaucoup plus atomisées et les directions beaucoup plus divisées – il n’y a qu’à voir les coups bas à la tête de la CGT – qu’il y a quinze ans. Et dans cette affaire, elles sont affaiblies par le fait que la réforme ne touche en principe que les salariés du privé, c’est-à-dire, les moins syndiqués et ceux dont le pouvoir de nuisance est plus faible. De plus, on est en pleine pré-campagne électorale… ce qui fait que le positionnement des uns et des autres répond à des calculs différents !
@ Descartes
> Et il n’est pas venu à l’idée de personne au gouvernement de menacer les gens du voyage d’une « interdiction » quelconque…< Globalement c’est en fait la différence de traitement politico-médiatique des violences et dégradations qui me frappent le plus : la tolérance dont on fait preuve systématiquement à l’égard de certains groupes (minorités, agriculteurs, étudiants, indépendantistes…) par rapport au traitement de mouvements “ouvriers”… >Ce qui est passionnant dans cette affaire pour celui qui s’intéresse à l’histoire des institutions, c’est de constater à quel point nos institutions sont solides.< Je pense que les français ne réalisent vraiment pas à quel point cela est vrai. On pouvait également le constater à l’époque de la quatrième république, par ailleurs : malgré l’inefficacité et l’instabilité gouvernementale chronique, les institutions et l’administration fonctionnaient sans grand problème, et ce sera au final une crise avant tout politique qui mettra fin au régime. Par ailleurs, j’ai été surpris de constater sur l’internet anglophone à quel point les européistes d’outre-manche sont déchaînés après l’annonce du Brexit ! Franchement, malgré tout le mal que je pense des eurolâtres chez nous, je ne sais pas si même eux seraient prêts à aller jusqu’à ce niveau de violence verbale. Bien sûr, les Écossais demandent un nouveau référendum, mais on trouve des choses plus exotiques comme une pétition pour l’indépendance de Londres…
@ BolchoKek
[Globalement c’est en fait la différence de traitement politico-médiatique des violences et dégradations qui me frappent le plus : la tolérance dont on fait preuve systématiquement à l’égard de certains groupes (minorités, agriculteurs, étudiants, indépendantistes…) par rapport au traitement de mouvements “ouvriers”…]
Ça c’est une constante de l’histoire. Cela montre d’ailleurs que le combat du prolétariat n’est pas de même nature que celui des féministes ou celui des sans papiers, n’en déplaise à ceux qui veulent tout confondre. La violence des étudiants, des indépendantistes ou des agriculteurs est une violence rituelle. Ni les étudiants, ni les minorités, ni les agriculteurs n’ont envie de prendre le pouvoir ou de changer les rapports économiques. Tout au plus des sous, des papiers, et qu’on leur mette une bonne note sans avoir à passer l’examen. Les ouvriers, eux, présentent un véritable danger…
[Par ailleurs, j’ai été surpris de constater sur l’internet anglophone à quel point les européistes d’outre-manche sont déchaînés après l’annonce du Brexit ! Franchement, malgré tout le mal que je pense des eurolâtres chez nous, je ne sais pas si même eux seraient prêts à aller jusqu’à ce niveau de violence verbale. Bien sûr, les Écossais demandent un nouveau référendum, mais on trouve des choses plus exotiques comme une pétition pour l’indépendance de Londres…]
Là encore, on constate que les europhiles sont profondément démocrates aussi longtemps que le vote va dans leur sens. Dites, si en mai 2017 la France élit un président de droite et Paris vote à gauche, on fait sécession ? On demande à revoter ?
Descartes,
[Mais je crains qu’il n’y a pas beaucoup de chances qu’un « outsider » arrive à s’établir et à devenir crédible pour un programme de changement.]
Je ne milite en rien mais est-ce une raison suffisante pour n’évoquer nulle part l’UPR d’Asselineau ?
Pour ma première intervention chez vous, alors que je vous suis assidu depuis deux belles années édifiantes, je ne résisterai pas à vous faire part de ma considération envers votre méthode. Et de ma reconnaissance allons-y.
Montescalier.
@ Montescalier
[Je ne milite en rien mais est-ce une raison suffisante pour n’évoquer nulle part l’UPR d’Asselineau ?]
J’ai eu l’occasion d’évoquer l’UPR sur ce blog, et d’expliquer pourquoi je ne crois pas à cette option. C’est moins leurs positions qui me gênent, mais le fonctionnement interne, qui ressemble trop à mon goût à celui d’une secte. Vous-même vous parlez de « l’UPR d’Asselineau », comme s’il en était le propriétaire…
Comme je l’ai dit dans un autre commentaire, le camp souverainiste ne manque pas de personnalités de qualité. Le problème, c’est que ces personnalités sont souvent des solitaires, qui supportent difficilement le collectif. Ces personnalités ne constituent pas de véritables équipes, ne construisent pas d’institutions dans leurs organisations, ne forment jamais un successeur. Je ne sais pas si c’est parce qu’elles n’en sont pas capables, parce que cela ne les intéresse pas, ou plus prosaïquement parce qu’elles ont peur de perdre le contrôle de leur bébé. Mais le fait est là. Or, je ne crois pas qu’on puisse faire de la politique au premier niveau sans une équipe, sans un parti qui fonctionne démocratiquement.
[Pour ma première intervention chez vous, alors que je vous suis assidu depuis deux belles années édifiantes, je ne résisterai pas à vous faire part de ma considération envers votre méthode. Et de ma reconnaissance allons-y.]
Merci de votre encouragement ! Et n’hésitez pas à intervenir. Ce sont aussi les lecteurs qui font ce blog…
@ Descartes
Je ne trouve rien en tapant le nom de la “secte” ou de son “propriétaire” dans la recherche associée à votre salon… si vous pouvez m’aider à retrouver votre pensée à leur sujet (si jamais elle est plus précise que ce que vous en dites là)…
Je partage votre ressenti mais je l’entendais plutôt comme “fondateur” que “propriétaire”.
Néanmoins pour un citoyen lambda -comme moi- qui aurait tôt fait de trouver tous les partis plus ou moins sectaires (le jeu des primaires entre quelques gourous bien en vue venant a contrario renforcer cette impression et quant à choisir la réincarnation du futur Dalaï Lama…), ignorant tout ou quasiment de leur fonctionnement interne, la candidature d’Asselineau si elle souffre de sa faiblesse d’exposition et de rendement électif me semble être avantagée par sa “jeunesse” d’où vient peut-être une bonne part de sa régularité de point de vue. Je me trompe où les “jeunes” candidatures de rupture (ou soi-disant) ont le vent en poupe en Europe ? Podemos ou Syriza, Corbyn,… mais contrairement (?) à celles-ci, pourrait-il plaire à la droite de l’électorat et engranger les défections de la gauche trahie ? en prime d’appliquer ce qu’il propose ?
Mélenchon, un autre “propriétaire” à mes yeux (de citoyen lambda toujours), solitaire, a-t-il quelques chances de prendre des voix à droite si jamais il passe au second tour ? peut-il remporter la mise sans ces voix-là ? ou est-ce alors une voix royale pour un Juppé ? Sa “vieille” candidature et tous ses aléas, ses positions un tantinet eurolâtres encore ont-elles le vent en poupe ? Ses déclarations enthousiastes et violentes sur l’intervention en Libye m’ont quant à moi profondément exaspéré…
Et dommage pour Chevènement, son poulain semble bien fade.
Mais plus que de voir les défauts du fonctionnement interne des groupes dont ces “personnalités de qualité” tiennent la tête, comment fait-on pour atténuer leur défiance et les amener à s’unir, avec tout autre souverainiste, pour espérer capter une majorité de l’électorat en 2017 en jouissant des attraits respectifs de leurs “jeunes ” ou “vieilles” candidatures ? Comment, pourquoi ce genre d’union se sont-elles produites par le passé ? Les prendre en otage et les enfermer dans une cave est-il permis dans le cadre de l’état d’urgence ? Existe-t-il quelques options de chantage ? Ont-ils des enfants ou des petits-enfants à l’école ? C’est que j’suis instit’, je pourrais peut-être m’arranger pour qu’ils redoublent… Ah non j’oubliais, je n’peux pas.
Navré pour la naïveté et la confusion de mes propos, ils sont à l’image de celle de mes sentiments.
Montescalier
@ Montescalier
[Je ne trouve rien en tapant le nom de la “secte” ou de son “propriétaire” dans la recherche associée à votre salon… si vous pouvez m’aider à retrouver votre pensée à leur sujet (si jamais elle est plus précise que ce que vous en dites là)…]
Le problème est que la fonction recherche ne va pas dans les commentaires… et que c’est à l’occasion d’échanges avec des commentateurs que j’avais écrit sur le sujet ! Je vais essayer de les retrouver…
En tout cas, j’ai essayé de les retrouver à travers Google… et j’ai découvert que plusieurs de mes articles ont été cités sur le site de l’UPR !
[la candidature d’Asselineau si elle souffre de sa faiblesse d’exposition et de rendement électif me semble être avantagée par sa “jeunesse” d’où vient peut-être une bonne part de sa régularité de point de vue. Je me trompe où les “jeunes” candidatures de rupture (ou soi-disant) ont le vent en poupe en Europe ? Podemos ou Syriza, Corbyn,… mais contrairement (?) à celles-ci, pourrait-il plaire à la droite de l’électorat et engranger les défections de la gauche trahie ? en prime d’appliquer ce qu’il propose ?]
Je pense qu’il faut prendre l’habitude d’ignorer les querelles de façade et d’aller un peu plus en profondeur. Le succès d’un candidat tient au fait qu’il répond à une demande des électeurs. Il est donc important de comprendre quelle est la véritable demande. Des « candidatures de rupture » font dans beaucoup de pays jeu égal – ou même mieux – que les candidats des partis ou des groupes « installés » dans l’alternance, tout simplement parce que cette alternance, voulu par l’électorat dominant – bourgeoisie et classes moyennes – ne fait plus illusion face à l’électorat populaire. Cet électorat se déverse alors sur des « outsiders », sur des hommes et des organisations qu’il perçoit comme déconnectés de cette alternance. Mais il ne suffit d’être un « outsider » pour avoir un boulevard devant soi. Vous remarquerez d’ailleurs qu’en général on ne voit pas prospérer plusieurs « outsiders » dans chaque pays. Tout se passe comme si dans un pays donné l’électorat populaire se déversait sur celui qu’il juge le plus en mesure de troubler le jeu politique. Dans certains pays, le rôle tribunicien est rempli par un détachement de la gauche, dans d’autres par un détachement de la droite. En Espagne, en Italie et en Grèce, les troublions sont à gauche. Mais dans l’Europe nordique ils se placent plutôt à droite. En France, ce rôle est déjà occupé par le FN. Difficile, pour les « outsiders » comme l’UPR ou NDA de se faire une place.
[Mélenchon, un autre “propriétaire” à mes yeux (de citoyen lambda toujours), solitaire, a-t-il quelques chances de prendre des voix à droite si jamais il passe au second tour ? peut-il remporter la mise sans ces voix-là ? ou est-ce alors une voix royale pour un Juppé ?]
Ne rêvons pas. Mélenchon ne sera pas au deuxième tour. Le ticket pour le deuxième tour est autour de 25%. Pour y arriver, il lui faudrait prendre la quasi-totalité des voix des électeurs socialistes – dont beaucoup ne lui pardonnent pas ce qu’ils voient comme une trahison. Au niveau local, les notables socialistes se souviendront que Mélenchon a cherché à torpiller tout accord avec les organisations du Front de Gauche. Et puis, la gauche dans son ensemble ne représente qu’un peu plus de 30%…
[Mais plus que de voir les défauts du fonctionnement interne des groupes dont ces “personnalités de qualité” tiennent la tête, comment fait-on pour atténuer leur défiance et les amener à s’unir, avec tout autre souverainiste, pour espérer capter une majorité de l’électorat en 2017 en jouissant des attraits respectifs de leurs “jeunes ” ou “vieilles” candidatures ? Comment, pourquoi ce genre d’union se sont-elles produites par le passé ?]
C’est le plus dur. Si on laisse de côté le FN, le camp « jacobin » n’a pas de véritables organisations. C’est un ensemble assez informe de personnalités. Certaines continuent à militer dans des partis politiques où leurs idées ne sont pas majoritaires avec l’espoir d’infléchir leur ligne politique dans le bon sens. D’autres ont créé une organisation qui repose totalement sur leur personnalité. En plus, comme souvent chez les gens qui rament à contre-courant, ce sont des fortes personnalités… difficile dans ces conditions de voir comment les fédérer. La seule organisation « lourde » dans le camp souverainiste est le FN, mais son passé lui interdit de devenir fédérateur…
Je ne suis pas persuadé que ce soit un problème insurmontable. Même s’il ne gagne pas des élections, el camp souverainiste est arrivé à amorcer une prise de conscience au point qu’il ne peut plus être tenu pour quantité négligeable. On peut parfaitement faire de la politique sans gagner des élections…
[Navré pour la naïveté et la confusion de mes propos, ils sont à l’image de celle de mes sentiments.]
Pas grave. On est tous passés par là…
Dans le genre mépris de classe il y avait cet article qui était assez explicite : http://leclairon.tv/site/index.php/2015/12/07/la-fracture-francaise/
Vos deux réponses à Vincent et moi m’inspirent ceci : auriez-vous – aurez-vous -peur de vous salir les mains en appelant à voter Marine Le Pen pour tenter, dans votre sphère, cette cristallisation nationale qui pourrait tout changer. Bien sur le FN Marine n’est ni parfait ni assez vigoureux en cadres de valeur, mais si nous apportions ce qui lui manque, pourrait-il mener une politique contraire à nos espérances ?
Pourquoi ne pas détromper Vincent encore accroché à la “la gauche” comme une moule au piquet perdu en pleine mer ? Montebourg dernier avatar genre MAIF, l’abus de mythes nuit gravement à la politique ! Chevènement, pour lequel je me suis présenté à des élections, à choisi le 14 Février 2002 de perdre pour ne pas faire gagner la droite social-gaulliste (j’étais à cette terrible réunion publique à Toulouse).
Bechtel, un instant proche de Debout La France est sans intérêt politique, non seulement enfermée dans sa posture de haut-fonctionnaire mais aussi de grande bourgeoise de gauche, circulez !
Mélanchon est un pitre, il joue son rôle de guignol, inconséquent il ne croit en vérité à rien, même pas en lui-même et encore moins en la France ; une espèce d’esthète vaguement anar qui se complait dans le faire-croire.
Il faut redire, avec ménagement et respect, à VIncent que le CNR fut imposé par un homme de droite, inspiré par Péguy ; c’est de ce coté qu’il faut rechercher l’honnêteté et l’humilité ; la gauche est moralement décomposée, pour longtemps.
Je vous trouve injuste avec Nicolas Dupont-Aignan, son programme est cohérent et aussi structuré que le permettent les faibles moyens dont dispose Debout La France – je le sais je suis membre depuis la fondation de son conseil national !
Sa sincérité et sa farouche intégrité ne doivent pas être suspectées, parfois même on l’aimerait un peu moins rigide ! Quand à ses coups qui sont quand même peu nombreux et peu médiatisés c’est le seul moyen qu’il a eu de nous faire surnager, et croyez-moi, il fait cela en se forçant,et a refusé nombre de nos propositions plus musclées.
Réduire son combat à la sortie de l’Euro est largement réducteur, lui aussi considère cela comme un moyen, celui de recouvrer la première des souverainetés sans laquelle il n’y a pas de possibilité de construire les deux autres : populaire et nationale.
Certes il manque encore beaucoup à rédiger et à inventer, venez, vous seriez accueilli sans arrières-pensées.
“Ils ne sont pas capables de bâtir un parti, de l’institutionnaliser, de créer un « intellectuel collectif ». Leurs collaborateurs sont souvent des serviteurs zélés et fidèles, pas des interlocuteurs. Or, il est impossible de fabriquer un projet tout seul”
Il y a du vrai, mais NDA tente de le faire pas toujours avec les bonnes personnes, mais cela n’est pas simple car il faut des moyens (financiers entre autres) et les voies pour acquérir ces moyens s’opposent souvent à l’ouverture et à la délégation … si vous avez une idée n’hésitez pas, éprouvez-la ou bien faites-nous en profiter.
Les deux tendances FN sont une réalité mais plus acceptées en interne que vous l’imaginez, les militants dans leur majorité sont prêts à des concessions, suffiront-elles, je ne sais pas ; sont-elles possibles sans démembrer le FN ?
Rares sont les politiques qui n’espèrent pas “un poste” mais là aussi ne négligez pas les qualités d’abnégation des militants du FN ; leur ambition est réellement pour la France, ils sont de cette race de citoyens charnellement reliés à la nation ; il peuvent se tromper, être ombrageux, calculateurs jamais ; même Philipot je pense.
Bien sur que c’est lui qui à le plus de cartes en mains, mais son homosexualité comme la féminité de Marine Le Pen, pourrait absorber le petit pourcentage nécessaire à la victoire ; c’est ainsi. Il n’y a que les crétins post-modernistes pour ne pas le savoir !
Qui reste-t-il ?
@ Gérard Couvert
[Vos deux réponses à Vincent et moi m’inspirent ceci : auriez-vous – aurez-vous -peur de vous salir les mains en appelant à voter Marine Le Pen pour tenter, dans votre sphère, cette cristallisation nationale qui pourrait tout changer.]
Vous devriez savoir que la pureté de mes mains est le cadet de mes soucis. J’ai déjà expliqué sur ce blog mes interrogations quant à la transformation du FN en « parti populaire » – ce qui par ailleurs m’a valu d’être trainé dans la boue dans plusieurs blogs de gauche – et la difficulté d’arrêter une position envers un parti tiraillé entre un héritage que nous connaissons tous et un projet qui, sur beaucoup de points, reprend celui que j’avais pu soutenir à la fin des années 1970 lorsqu’il était défendu par le PCF. Sur la question du vote, je me vois en toute honnêteté intellectuelle obligé de suspendre le jugement.
[Bien sur le FN Marine n’est ni parfait ni assez vigoureux en cadres de valeur, mais si nous apportions ce qui lui manque, pourrait-il mener une politique contraire à nos espérances ?]
La question est bien celle-là. Quelle est la part d’opportunisme et quelle est la part de conviction chez ceux qui au FN ont amorcé le virage vers le « parti populaire » ? Assiste-t-on à la naissance d’un vrai parti tribunicien ? J’observe l’expérience avec intérêt, mais je n’ai pas pour le moment une réponse satisfaisante à ces questions, qui permettrait de prendre parti.
[Pourquoi ne pas détromper Vincent encore accroché à la “la gauche” comme une moule au piquet perdu en pleine mer ?]
Je ne sais pas si Vincent est « accroché à la gauche comme une moule au piquet », mais je pense avoir essayé de lui apporter les éléments de clarification dont je dispose. Après, chacun fait son choix…
[Chevènement, pour lequel je me suis présenté à des élections, à choisi le 14 Février 2002 de perdre pour ne pas faire gagner la droite social-gaulliste (j’étais à cette terrible réunion publique à Toulouse).]
J’avoue que la référence ne me parle pas. Pourriez-vous être plus explicite ? Qu’est ce qui s’est passé à cette « terrible réunion » ?
[Il faut redire, avec ménagement et respect, à Vincent que le CNR fut imposé par un homme de droite, inspiré par Péguy ; c’est de ce coté qu’il faut rechercher l’honnêteté et l’humilité ; la gauche est moralement décomposée, pour longtemps.]
Vous exagérez un peu. Non, le CNR n’a pas été imposé « par un homme de droite inspiré par Péguy ». Il a été imposé par le PCF, ou plutôt par le besoin qu’avait « l’homme de droite inspiré par Peguy » en question d’intégrer les communistes à son mouvement, ce qui supposait de leur donner une participation dans un organe représentatif. De Gaulle n’aurait pas été le De Gaulle que nous vénérons s’il n’y avait pas eu devant lui un PCF puissant qui l’a obligé à trouver des compromis et à explorer de nouvelles voies. Ce n’est donc pas « de ce côté-là » qu’il faut chercher, mais du côté de ce « compromis », ce « gaullo-communisme » qui a permis à chacun de donner le meilleur de lui-même.
[Je vous trouve injuste avec Nicolas Dupont-Aignan, son programme est cohérent et aussi structuré que le permettent les faibles moyens dont dispose Debout La France – je le sais je suis membre depuis la fondation de son conseil national !]
C’est peut-être moi qui méconnait le fonctionnement interne de ce mouvement. Mais je ne peux m’empêcher de penser qu’un parti qui n’a qu’une seule tête visible, qui ne donne le moindre signe d’avoir mis sur place un système de délibération collective a un sérieux problème.
[Sa sincérité et sa farouche intégrité ne doivent pas être suspectées,]
Je ne crois pas avoir jamais mis en doute ni l’une, ni l’autre.
[Certes il manque encore beaucoup à rédiger et à inventer, venez, vous seriez accueilli sans arrières-pensées.]
Cela m’a été plusieurs fois proposé. J’avoue qu’en ce moment le boulot ne me laisse guère le temps de m’engager vraiment – et lorsque je m’engage, c’est toujours à fond – dans un tel travail. Peut-être à la rentrée ?
[Il y a du vrai, mais NDA tente de le faire pas toujours avec les bonnes personnes, mais cela n’est pas simple car il faut des moyens (financiers entre autres) et les voies pour acquérir ces moyens s’opposent souvent à l’ouverture et à la délégation … si vous avez une idée n’hésitez pas, éprouvez-la ou bien faites-nous en profiter.]
Mon expérience est qu’on trouve plein de jeunes sortant des meilleures écoles et qui ont envie de s’investir dans une véritable réflexion programmatique. A côté, il faut trouver deux ou trois hauts fonctionnaires blanchis sous le harnois et qui aient envie d’encadrer ce travail. Ces gens-là sont prêts à travailler pour l’honneur… à une seule condition : celle de se sentir écoutés par le décideur politique.
[Rares sont les politiques qui n’espèrent pas “un poste” mais là aussi ne négligez pas les qualités d’abnégation des militants du FN ; leur ambition est réellement pour la France, ils sont de cette race de citoyens charnellement reliés à la nation ; il peuvent se tromper, être ombrageux, calculateurs jamais ; même Philipot je pense.]
Je ne sais pas. Je ne connais qu’un tout petit nombre de militants FN, et de par ma culture et tradition politique je ne connais ni leurs codes, ni leur fonctionnement. C’est pourquoi je suis aussi prudent. Vous remarquerez quand même que je ne les condamne pas à priori aux feux de l’enfer, ce qui est déjà assez rare pour quelqu’un venu de la « gauche »… 😉
Pour ce que je sais, on retrouve chez beaucoup de militants du FN « nordiste » cet esprit militant « charnel », ce dévouement à la cause qu’on retrouvait naguère chez les militants communistes, même s’ils sont beaucoup moins bien formés et surtout moins encadrés. C’est un matériel humain de qualité, avec lequel on peut faire beaucoup de choses. Mais la mutation du FN est loin d’être complète aujourd’hui…
@Descartes,
je ne sais si c’est le probable échec du “Brexit” qui vous fait sortir du bois, mais j’ai eu l’impression de lire un manifeste politique comme j’aimerais en voir: c’est un discours très “gaullien” ou “churchillien” (pour le sang, les larmes et la sueur…) que je vois là…
Toutes les insuffisances, pour ne pas dire les impostures, de la quasi-totalité de la gauche y sont décrites: allez vous donc étonner que plus personne de sensé n’ait envie de voter pour la gauche…
Ca fait plus de cinq ans que je vous lis, et rarement je n’avais vu une synthèse d’une telle qualité, alors que le niveau habituel est déjà très relevé: à part l’anarchie et l’anomie qui règnent dans notre beau pays, et l’échec quasi-certain du Brexit, qu’est-ce qui a bien pu vous faire sortir de vos “sommeil dogmatique”, comme disait jadis E.Kant?
@ CVT
[je ne sais si c’est le probable échec du “Brexit” qui vous fait sortir du bois, mais j’ai eu l’impression de lire un manifeste politique comme j’aimerais en voir: c’est un discours très “gaullien” ou “churchillien” (pour le sang, les larmes et la sueur…) que je vois là…]
Ce n’est pas tellement la crainte d’un « probable échec du Brexit » qui m’a motivé. C’est plutôt l’angoisse de voir un mouvement social de rejet d’une loi qui compte avec un soutien massif de la population – plus de 60% des personnes interrogés disent être favorables au retrait de la loi El Khomri, et cela malgré les gênes réelles causées par les grèves et les images de la violence imbécile s’étalant dans les médias – et qui malgré ce soutien n’arrive pas à trouver une traduction politique. Il y a là dehors une énorme énergie politique qui ne trouve pas d’exutoire, une énorme demande qui ne trouve pas satisfaction. Si cette énergie tombait dans de mauvaises mains, elle pourrait faire d’énormes dégâts.
C’est pourquoi la tâche urgente des progressistes est pour moi d’offrir une réponse à cette demande, sous la forme d’un véritable projet. Ce n’est pas facile pour plein de raisons. Parce que l’expérience de ces dernières années a rendu les citoyens méfiants. Parce que l’école, les médias et les partis politiques – TOUS les partis – ont contribué pour construire la « fabrique du crétin » dont parle Jean-Paul Brighelli, et qu’en conséquence beaucoup de nos concitoyens n’ont plus les outils pour examiner un projet et s’en faire un jugement. Parce que nos élites médiatico-politique sont tout simplement incapables de penser un monde différent de celui qu’ils ont sous les yeux. Mais il faut essayer quand même.
Et essayer en pariant sur notre seul capital : les gens. Il faut traiter le peuple en adulte. Lui raconter que tel ou tel projet fera couler demain le lait et le miel des fontaines gratuitement est une imposture. Les gens ne sont pas idiots, et savent ce qu’il faut en faire de ces discours. Mais par ailleurs les gens sont parfaitement capables d’entendre le langage de l’effort, à condition que cet effort soit équitablement reparti et qu’il y ait un espoir crédible de retour proportionné à l’effort consenti. Comparez le discours de « rigueur » de De Gaulle en 1959 et celui des dirigeants européens aujourd’hui. Dans le premier cas, on explique un programme de rigueur intelligent, qui serre la ceinture sur les dépenses courantes sans sacrifier la recherche et l’investissement, car l’idée est de préparer un futur plus riche. Dans le second, c’est l’austérité à perpétuité au nom d’une hypothétique « compétitivité » qui ne profitera qu’à quelques uns, et le sacrifice chez les salariés des conquêtes sociales au nom d’un discours culpabilisant sur le partage du travail, alors que les revenus du capital explosent.
[Toutes les insuffisances, pour ne pas dire les impostures, de la quasi-totalité de la gauche y sont décrites: allez vous donc étonner que plus personne de sensé n’ait envie de voter pour la gauche…]
Pour moi, la gauche est morte. C’est devenu une pure désignation traditionnelle, un peu comme les titres de noblesse. Le PS est « de gauche » comme certains sont « comte de ceci » ou « marquis de cela ». C’est le souvenir d’une dignité passée, c’est tout.
Comme tu dis, traiter les gens en adultes…
Je n’aime pas Cameron, mais il s’est comporté comme un vrai homme d’état pour le coup : il a remis en jeu la question essentielle de la souveraineté aux mains du peuple (en se tirant une balle dans le pied politiquement parlant), reconnait le résultat et a annoncé qu’il le respectera et devrait démissionner bientôt.
C’est une attitude éminemment honorable et respectable, comparable au respect que j’ai pour Chirac quand il a eu son sursaut républicain en 2005. Souvenons-nous de nos hommes de “gauche” qui s’accrochent au pouvoir quand ils se prennent une gifle dans les urnes (Mitterrand l’inventeur de la cohabitation), de nos “frondeurs de gauche” qui pouvaient censurer le gouvernement devant la grogne populaire contre la Loi El Khomri, à vomir tous les gens. la gauche chez nous n’a aucun honneur.
@ Bannette
[Je n’aime pas Cameron, mais il s’est comporté comme un vrai homme d’état pour le coup : il a remis en jeu la question essentielle de la souveraineté aux mains du peuple (en se tirant une balle dans le pied politiquement parlant), reconnait le résultat et a annoncé qu’il le respectera et devrait démissionner bientôt.]
Oui. Il faut remercier ces hommes politiques qui, comme Chirac en 2005 – mais aussi en 1997 – ont le courage de s’en remettre à la volonté des électeurs pour trancher les véritables questions. Et la bienpensance ne s’y trompe pas d’ailleurs. Comme en 2005, on commence à entendre les voix qui brocardent « la folie » de Cameron d’avoir posé la question.
@Descartes,
dont acte, je me suis laissé démoraliser par les sondages de la journée d’hier, qui donnaient 10 points d’avance pour le Bremain; alors que j’avais dit, à qui voulait l’entendre, que les Anglais voulaient partir (oui, les Anglais et non les Britanniques: l’Ecosse et l’Ulster, eux, voulaient rester dans l’UE…) !
En même temps, si le résultat est historique et porteur d’espoir, j’ai commencé à éprouver une certaine angoisse devant le chemin qui nous reste à parcourir pour retrouver notre souveraineté (plutôt notre indépendance, comme l’aurait dit Mongénéral), mais c’est le même type de sentiment qu’on éprouve quand tout commence: ce n’est pas si désagréable, et surtout, l’horizon se dégage…
Tenez, prochaine étape du chemin de croix de nos « amis » européistes: l’élection d’un président américain isolationniste, j’ai nommé Donald Trump, soit Tapie et Berlusconi réunis en un seul homme! Croyez-moi, cela me faire rire jaune, car vu le palmarès de ces arsouilles, je partage votre désarroi quand vous constatez qu’il n’y a aucun parti ou mouvement progressiste (ou de gauche…) qui incarne une volonté de défendre les intérêts des classes populaires. Il est donc piquant (pour ne pas dire autre chose…) qu’il revienne au milliardaire Trump d’incarner cette fonction tribunicienne, alors que c’est un homme de “droite”, au sens classique du terme, et non à candidat démocrate “liberal” (au sens américain du terme, donc gauchiste); un peu, d’ailleurs, à l’instar de Nigel Farage, ancien trader, tête de pont de pont de UKIP et thatchérien devant l’Eternel. Cela souligne également les limite de l’autre “démagogue” de la campagne américaine, Sanders, qui rappelle bien trop Syriza ou Podemos pour être un candidat populiste digne de ce nom…
Si ma prédiction est exacte, cela marquera une nouvelle période en Occident, de la même ampleur que l’arrivée quasi-simultanée au sommet des satanés Thatcher et Reagan. Sans vouloir faire de téléologie, l’arrivée d’un Trump et la sortie des Britanniques de l’UE sonnent le triomphe du populisme, populisme que je ne confonds JAMAIS avec de la démagogie.
J’espère juste que ce populisme saura éviter de tomber dans les pièges du Chavisme, et qu’il cherchera à s’institutionnaliser. Il ne faut pas désespérer, notamment si on songe à la mise en ordre et à la dépersonnalisation du mouvement Cinq Etoiles en Italie, parti fondé par Beppe Grillo, et qui vient de voir Rome et Turin tomber dans son escarcelle. D’ailleurs, il faudra surveiller la probable sortie de l’Italie de la zone euro: c’est une des revendications fortes des électeurs du M5S, partagée d’ailleurs par ceux de Forza Italia du sus-nommé Berlusconi…
@ CVT
[En même temps, si le résultat est historique et porteur d’espoir, j’ai commencé à éprouver une certaine angoisse devant le chemin qui nous reste à parcourir pour retrouver notre souveraineté (plutôt notre indépendance, comme l’aurait dit Mongénéral), mais c’est le même type de sentiment qu’on éprouve quand tout commence: ce n’est pas si désagréable, et surtout, l’horizon se dégage…]
Une vieille formule chinoise consiste à souhaiter à son hôte « de vivre des temps intéressants ». Je pense que le vote britannique ouvre une telle séquence. Tout à coup, des processus qui avaient été « naturalisés » – l’appartenance à l’UE, par exemple, relevait d’un « destin » – redeviennent des décisions humaines, précaires et réversibles. On va pouvoir donc en débattre…
[Tenez, prochaine étape du chemin de croix de nos « amis » européistes: l’élection d’un président américain isolationniste, j’ai nommé Donald Trump, soit Tapie et Berlusconi réunis en un seul homme!]
Le cas de Trump est intéressante parce qu’il montre combien le phénomène est global. Les succès du FN ne tiennent pas à un racisme, à une xénophobie spécifique au peuple français. Il répond à un phénomène global : le détachement des « classes moyennes » globalisées de leurs bases nationales pour donner naissance à une « élite » globale capable de tirer le plus grand parti de la libéralisation des échanges. Et en contrepartie, la relégation des couches populaires, contraintes d’abandonner l’ensemble des avantages que le partage accordé à la fin de la dernière guerre mondiale leur avait assuré. Que cette protection prenne la forme d’un Etat-providence – comme en Europe – ou d’une croissance sans limite de la consommation fondée sur le crédit – comme aux Etats-Unis – n’a pas d’importance. Ces avantages avaient pour fondement un rapport de forces construit dans un cadre national, qui obligeait aux « élites » essentiellement nationales de partager pour avoir la paix chez elles. Les « élites » globales n’ont pas ce problème : elles n’ont pas à vivre là où leur argent travaille.
Le succès de Trump est à la mesure de la détestation que lui voue l’establishment. Parce que c’est exactement ce que recherche l’électorat : un homme que l’establishment ne supporte pas.
[Si ma prédiction est exacte, cela marquera une nouvelle période en Occident, de la même ampleur que l’arrivée quasi-simultanée au sommet des satanés Thatcher et Reagan. Sans vouloir faire de téléologie, l’arrivée d’un Trump et la sortie des Britanniques de l’UE sonnent le triomphe du populisme, populisme que je ne confonds JAMAIS avec de la démagogie.]
Le problème est qu’il s’agit d’un triomphe en négatif. Ce n’est pas le triomphe d’un projet, c’est le triomphe d’un rejet. Les couches populaires se révoltent partout contre un système qui les a oubliés, mais on ne voit pas surgir un véritable projet qui puisse rassembler cette énergie disponible. C’est là pour moi que réside le véritable danger, et c’est pour cela que j’insiste sur le besoin absolu, pour les progressistes, de construire un tel projet.
A propos de ce que tu nommes le triomphe en négatif, cet article concernant le populisme de Bernie Sanders :
https://histoireetsociete.wordpress.com/2016/05/29/bernie-sanders-ou-le-populisme-imparfait/
Je quote plu particulièrement ces passages là :
“Pourtant, cet électorat populaire ne constitue pas la seule base sur laquelle s’appuie Sanders ; celle-ci se compose aussi d’agitateurs classés à gauche, sévissant principalement sur les campus universitaires. Ces militants, s’ils se réclament d’un peuple imaginaire et fantasmé, ont au final un mépris à peine voilé pour le peuple réel. Ce dernier, se sentant menacé, observe le système économique détruire une à une les structures communes qui lui sont chères et se campe dès lors sur celles qu’il estime les plus proches de lui, les plus ardues à écraser : valeurs morales, famille, village, nation, etc. Cette foi dans certains des repères protecteurs, pointée du doigt comme étant rétrograde et réactionnaire, est aujourd’hui le principal objet des moqueries et la cible de cette « gauche ». (…)
L’idéologie progressiste, par son relativisme moral et culturel, par son adversité fondamentale à l’égard d’une conception publique et commune du bon, du bien et du juste, prône un monde fondé sur l’affirmation radicale des individualités de tous contre tous.
Depuis que cette « gauche » a renoncé au socialisme, il ne lui reste que ses multiples combats de substitution, tous liés au prétendu refus des discriminations, appliquant dès lors la grille d’analyse de la lutte des classes, à laquelle elle renonçait, à tous les rapports sociaux… sauf aux classes. Le peuple n’est plus à libérer du système économique, c’est la minorité qui serait à libérer de la majorité : les toilettes pour transgenres et la légalisation de la marijuana devenant les grands combats de la « gauche » contemporaine.”
Et l’auteur observe comme CVT que Trump pourrait être le bénéficiaire de cette grogne populaire. Si j’étais une conseillère de Sanders, je lui soufflerais de se contenter d’un rôle de tribunicien comme l’a fait si bien Farage.
@ Bannette
[A propos de ce que tu nommes le triomphe en négatif, cet article concernant le populisme de Bernie Sanders]
Très bon article. Il donne envie de relire Lasch…
Merci pour ce bon papier. Si je comprends bien votre logique, la classe moyenne est partout dans les partis et les médias, et cherche part tous les moyens à rendre inéluctable et moderne l’idée que la classe populaire s’aligne sur les tous les pays à bas coût sans que elle, ne change en rien son mode de vie et ce privilège de ne pas être trop soumise à la mondialisation ? En gros, c’est une forme de hold up déguisé sur les richesses restantes, et qui ne dit pas son nom ? Est-ce à dire que la classe moyenne et la bourgeoise sont en danger si elles n’arrivent pas à leur fin ? Faut-il à ce point sacrifier la moitié du pays pour que survive une minorité situé dans les grandes villes mondialisées ? Est-ce viable dans le temps ? Merci.
@ rodolphe
[ Si je comprends bien votre logique, la classe moyenne est partout dans les partis et les médias, et cherche part tous les moyens à rendre inéluctable et moderne l’idée que la classe populaire s’aligne sur les tous les pays à bas coût sans que elle, ne change en rien son mode de vie et ce privilège de ne pas être trop soumise à la mondialisation ?]
Exactement. Mais je ne voudrais pas que mon propos soit interprété sous une lumière « complotiste ». Il n’existe pas de Grand Conseil des Classes Moyennes qui coordonne la chose. Simplement, une classe dominante – et les « classes moyennes » participent aujourd’hui à ce que j’appellerais le « bloc dominant » – fabriquent toujours une idéologie qui justifie leurs propres intérêts. Les « classes moyennes » n’ont pas besoin de se coordonner pour tenir un discours uniforme. L’uniformité est garantie par le fait que ces gens ont un intérêt commun.
[En gros, c’est une forme de hold up déguisé sur les richesses restantes, et qui ne dit pas son nom ?]
Oui. Par ce biais, la bourgeoisie et les « classes moyennes » ont réussi à augmenter leur part dans le partage de la valeur ajoutée, aux dépens des couches populaires.
[Est-ce à dire que la classe moyenne et la bourgeoise sont en danger si elles n’arrivent pas à leur fin ?]
Cela dépend de ce que vous appelez « en danger ». Pendant les « trente glorieuses », la bourgeoisie et les « classes moyennes » – certes bien moins nombreuses qu’aujourd’hui – avaient accepté, contraintes et forcées par un autre rapport de forces, un partage bien plus généreux. Et le capitalisme ne s’est pas écroulé pour autant. Le danger, c’est surtout de devoir mieux partager le gâteau.
[Faut-il à ce point sacrifier la moitié du pays pour que survive une minorité situé dans les grandes villes mondialisées ?]
On parle pas de « survivre ». Vivre mieux serait plus juste.
[Est-ce viable dans le temps ?]
Non, je ne le crois pas. Une société aussi complexe que la notre ne peut fonctionner avec une efficacité raisonnable que s’il y a un « consentement commun » au système. En d’autres termes, chacun doit sentir que son lot serait encore plus maigre si l’équilibre était rompu. Or, ce sentiment est de moins en moins partagé. Le vote sur le Brexit en donne un exemple éclatant : une majorité d’anglais sent que le partage des richesses imposés par l’appartenance à l’UE est pire que ce qu’il pourrait obtenir en étant dehors. Et alors, le système casse.
INCROYABLE ! FABULEUX ! Je me réveille avec fébrilité ce matin, en espérant de tout cœur que nos voisins britons ne se sont pas laissés dominés par le terrorisme intellectuel (cf par ex la façon dont a pu être traitée la nouvelle de l’assassinat de Jo Fox), et je n’arrive pas à y croire, mais OUI ILS L’ONT FAIT, LEAVE LEAVE LEAVE le Titanic eurolâtre !!!! SEE EU LATER (toujours l’humour).
Comme en 2005; la même mine de commentateurs abasourdis, atterrés, estomaqués, au bord des larmes de BFMTV, I-TELE, etc ; ils n’arrivent pas à y croire, malgré toute la propagande de leurs collègues outre-Manche, le peuple (et très majoritairement, les classes populaires) ont voté contre l’UE ! Je jubile, je bois du lait, MERCI à eux. Pourtant en bonne française, je me méfie des britons (tout en les admirant sincèrement), mais là, j’achèterai direct un drapeau British ce we (le seul drapeau étranger que j’achèterai de ma vie).
Bon OK, tu m’excuseras de mon enthousiasme si je ne commente pas vraiment ton papier, mais le mépris de classe envers les quartiers populaires britanniques dans les reportages que j’ai vus précédent le referendum était aussi visible que celui que tu dénonces. La même description ordurière des vieux anglais “blancs” (le miroir du beauf franchouillard) qui va au pub et qui peste contre l’immigration imposée VS le jeune mondialisé ou la star de cinéma engagée.
Un verrou mental a sauté, et chez nous, ceux qui en bénéficieront seront bien sûr le FN et dans une moindre mesure, Dupont-Aignan. La “gauche radicale” UK a fait campagne pour le REMAIN comme l’aurait très certainement faite celle chez nous qui vénère Corbyn comme elle a porté aux nues les Tsipras and Co. Mélenchon s’il avait enfourché ce cheval (au lieu de censurer les pro-sortie UE et sortie de l’Euro dans son parti) aussi. Tant pis, l’histoire se fera sans eux. On voit la même chose chez eux même si leur spectre politique est différent : les questions vraiment importantes sont débattues par la droite populiste et même une partie des conservateurs, quand les travaillistes “de gauche” donnent l’impression aux classes populaires britanniques de collaborer avec des politiques anti-sociales. Et bien la sanction est méritée.
Une autre chose en écho avec un de tes commentaires : Nigel Farage n’a peut être pas gagné un poste de 1er ministre ou plus de sièges pour son parti (rappelons nous la jubilation de nos médias lors d’une défaite électorale locale de l’UKIP dernièrement), mais il a su imposer SES thèmes depuis 10 ans par son côté tribunicien, et il peut hurler victoire.
Après tant de mauvaises nouvelles ces derniers mois, je suis guillerette, ILS L’ONT FAIT ! Merci aux anglais de nous rappeler à quel point la démocratie est indissociable de la Souveraineté. Bravo, Churchill doit aussi se saoûler de bonheur dans sa tombe comme il se doit.
@ Bannette
[INCROYABLE ! FABULEUX ! Je me réveille avec fébrilité ce matin, en espérant de tout cœur que nos voisins britons ne se sont pas laissés dominés par le terrorisme intellectuel (cf par ex la façon dont a pu être traitée la nouvelle de l’assassinat de Jo Fox), et je n’arrive pas à y croire, mais OUI ILS L’ONT FAIT, LEAVE LEAVE LEAVE le Titanic eurolâtre !!!! SEE EU LATER (toujours l’humour).]
Oui ! Champagne pour tout le monde ! Caviar pour les autres !
J’avais du mal à croire – ou je ne voulais pas y croire, par pure superstition – mais en fait j’étais rationnellement convaincu que le résultat serait celui-là. J’ai vécu plusieurs années en Grande-Bretagne et je connais un peu le pays… Mais surtout je sais que le Sun, journal opportuniste, a toujours choisi le parti vainqueur depuis 1970, et ses journalistes connaissent parfaitement leur pays. Lorsqu’ils ont choisi finalement de se positionner franchement pour le « out », ils savaient ce qu’ils faisaient.
Maintenant, on sait que le roi est nu. L’éléphant au milieu de la pièce que tout le monde bruxellois faisait semblant de ne pas voir est maintenant bien visible. Même les commentateurs les plus europhiles – je pense à Bellanger et Cohen sur France-Inter – découvrent tout à coup, et le disent sans fard, que l’ Europe a failli aux pauvres, que ce vote illustre une « révolte dans les urnes » des couches populaires « qui en ont marre de faire la queue dans le hôpitaux, dans les écoles publiques, qui ne peuvent se loger à Londres ou doivent quitter leur quartier chassés par la spéculation immobilière ». Ceux qui jusqu’ici nous expliquaient que l’UE est une merveille parlent maintenant de « faillite » et de « construction bancale ».
Mon seul regret est que ce soit de la droite et l’extrême droite – conduite quelquefois par des personnalités douteuses ou instables – qu’est venue cette clarification. Le camp progressiste – moi-même je n’ose pas écrire « la gauche » – est absent depuis de longues années. Le versant social-libéral s’est fait l’avocat de la construction délorienne de l’Europe, le versant radical s’est laissé séduire par les sirènes de « l’autre Europe » et par le mirage de la réforme radicale d’un système irréformable. Toutes deux ont relayé, on s’en aperçoit maintenant, le discours des « classes moyennes », alors que pendant ce temps les mouvements populistes travaillaient les couches populaires.
[le peuple (et très majoritairement, les classes populaires) ont voté contre l’UE ! Je jubile, je bois du lait, MERCI à eux.]
Depuis quarante ans, le « compromis de classe » bâti après 1945 autour de l’Etat-providence s’est progressivement érodé sous l’action d’une bourgeoisie alliée aux classes moyennes qui voulait récupérer la valeur ajoutée concédée aux couches populaires après la guerre. Or, c’est ce compromis qui avait assuré la cohésion des sociétés, la paix sociale et in fine la prospérité économique en faisant adhérer capital et travail à des objectifs communs. C’est ce compromis qui a permis d’écrire que la lutte des classes était finie, que dans nos sociétés apaisées capitalistes et salariés avaient globalement les mêmes intérêts. Et c’était vrai… à condition que tout le monde joue le jeu. Aujourd’hui, on voit bien la divergence entre les couches populaires et le bloc bourgeoisie-« classes moyennes ». Et dans nos sociétés a tradition démocratique, cela va poser un problème fondamental : le bloc en question n’a plus de majorité pour faire passer ses projets, que ce soit la construction d’une Europe supranationale ou le passage d’une loi qui ravage le code du travail.
[Pourtant en bonne française, je me méfie des britons (tout en les admirant sincèrement), mais là, j’achèterai direct un drapeau British ce we (le seul drapeau étranger que j’achèterai de ma vie).]
Ne soyons pas trop durs. Ce sont nos voisins, ils ont leurs intérêts, nous avons les nôtres. Mais ils ont toujours été là en cas de coup dur. Contrairement à l’Allemagne…
[Bon OK, tu m’excuseras de mon enthousiasme si je ne commente pas vraiment ton papier, mais le mépris de classe envers les quartiers populaires britanniques dans les reportages que j’ai vus précédent le referendum était aussi visible que celui que tu dénonces. La même description ordurière des vieux anglais “blancs” (le miroir du beauf franchouillard) qui va au pub et qui peste contre l’immigration imposée VS le jeune mondialisé ou la star de cinéma engagée.]
Mais… je pense que tu est au contraire tout à fait dans la thématique du papier…
[Un verrou mental a sauté, et chez nous, ceux qui en bénéficieront seront bien sûr le FN et dans une moindre mesure, Dupont-Aignan. La “gauche radicale” UK a fait campagne pour le REMAIN comme l’aurait très certainement faite celle chez nous qui vénère Corbyn comme elle a porté aux nues les Tsipras and Co. Mélenchon s’il avait enfourché ce cheval (au lieu de censurer les pro-sortie UE et sortie de l’Euro dans son parti) aussi. Tant pis, l’histoire se fera sans eux.]
Ca me rappelle une histoire drôle : « combien de gauchistes faut-il pour changer une ampoule ? Un seul, mais il lui faut trente ans pour découvrir qu’elle est grillée ». La gauche radicale est toujours à contresens. Elle est devenue europhile quand l’europhilie était en train de passer de mode. La « gauche radicale » a laissé tomber le drapeau, la Marseillaise, la Nation, la République, la laïcité. Il ne faut pas s’étonner que d’autres les aient ramassé.
[Une autre chose en écho avec un de tes commentaires : Nigel Farage n’a peut être pas gagné un poste de 1er ministre ou plus de sièges pour son parti (rappelons nous la jubilation de nos médias lors d’une défaite électorale locale de l’UKIP dernièrement), mais il a su imposer SES thèmes depuis 10 ans par son côté tribunicien, et il peut hurler victoire.]
Exacte. Il faut revaloriser la fonction du parti tribunicien, celui qui sans exercer le pouvoir porte une position intellectuelle et cherche à peser sur ceux qui gouvernent. Il faut se convaincre que la fonction d’un parti n’est pas nécessairement de gagner les élections.
@ Descartes et Bannette
En effet, je suis moi-même euphorique ! Je viens de passer la plus grande partie de la matinée à me délecter de l’air défait des commentateurs politiques et journalistiques et de la déconfiture mêlée de haine de tous ceux qui avaient brillamment annoncé le “remain”, BHL en tête…
A ce titre cette courte vidéo du directeur du Point, triste sire dont j’apprenais l’existence est une illustration parfaite : la France et le R-U “petits pays qui ne pèsent plus” les souverainistes “rabougris, racornis”, l’auto-dénigrement et la haine de soi poussées à leur paroxysme…
http://www.lepoint.fr/video/etienne-gernelle-le-brexit-est-une-tragedie-pour-l-europe-24-06-2016-2049313_738.php
Les interventions de Hollande et Valls étaient vraiment pathétiques, ils n’avaient pas d’autre choix que d’envoyer quelques “signaux” eurosceptiques tout en promettant de “refonder”, “relancer” l’Europe, mais on sentait que ça tournait totalement à vide. Et la grande unanimité sur les plateau pour dire qu’il faut à tout prix éviter ce genre de référendum en France de peur que le peuple “ne vote mal” et “cède au FN” c’est un classique mais c’est toujours aussi indécent.
Cette fois je pense qu’un cap psychologique important a été franchi, pour nous il reste encore le verrou de l’euro mais je crois qu’on peut avoir bon espoir que les dix années à venir voient un effondrement progressif de l’UE, le principal argument des eurolâtres était le TINA et ça commence à prendre sérieusement l’eau…
Je suis vraiment frappé par l’accélération de l’Histoire, quand je suis entré à Sciences Po en 2009 le consensus européiste était tellement puissant que le remettre en cause c’était se condamner à passer pour un original dans le meilleur des cas, voire un nationaliste excité, aujourd’hui je suis frappé comme ça ne prend plus et comme jusque dans les milieux les plus “pensées uniques” les voix dissonantes se font de plus en plus entendre.
@ Carnot
[En effet, je suis moi-même euphorique ! Je viens de passer la plus grande partie de la matinée à me délecter de l’air défait des commentateurs politiques et journalistiques et de la déconfiture mêlée de haine de tous ceux qui avaient brillamment annoncé le “remain”, BHL en tête…]
Ah… ce n’est pas pal de s’offrir de temps en temps un peu de schadenfreude… Au demeurant, en écoutant France Inter ce matin j’ai trouvé que pour une fois nos chroniqueurs habituellement europhiles faisaient un effort louable d’introspection…
[Et la grande unanimité sur les plateau pour dire qu’il faut à tout prix éviter ce genre de référendum en France de peur que le peuple “ne vote mal” et “cède au FN” c’est un classique mais c’est toujours aussi indécent.]
Comme disait Brecht : « puisque le peuple n’est pas d’accord avec le Comité central, il faut dissoudre le peuple et en élire un autre ».
[Cette fois je pense qu’un cap psychologique important a été franchi, pour nous il reste encore le verrou de l’euro mais je crois qu’on peut avoir bon espoir que les dix années à venir voient un effondrement progressif de l’UE, le principal argument des eurolâtres était le TINA et ça commence à prendre sérieusement l’eau…]
Je suis d’accord. J’ai craint moi aussi que les anglais prennent peur en écoutant le discours des sept plaies d’Egypte qui s’abattraient sur la Grande Bretagne au cas où le Brexit serait voté. J’avais tort : il semble que le discours TINA ne fasse plus peur à personne, ou du moins pas suffisamment pour infléchir le vote. Il faut croire qu’à force crier « au loup ! » sans que celui-ci ne se matérialise, les europhiles ont fini par épuiser leur crédibilité.
[aujourd’hui je suis frappé comme ça ne prend plus et comme jusque dans les milieux les plus “pensées uniques” les voix dissonantes se font de plus en plus entendre.]
Je reste frappé par la clairvoyance de Jean-Louis Bourlanges, que j’avais entendu lors d’une conférence au Parlement européen en 2001. Alors qu’on était encore dans l’euphorie europhile, il avait expliqué combien cette apparence était trompeuse, combien les défauts structurels du traité de Maastricht conduisaient la construction européenne à sa perte.
[“
Je reste frappé par la clairvoyance de Jean-Louis Bourlanges, que j’avais entendu lors d’une conférence au Parlement européen en 2001. Alors qu’on était encore dans l’euphorie europhile, il avait expliqué combien cette apparence était trompeuse, combien les défauts structurels du traité de Maastricht conduisaient la construction européenne à sa perte.”]
http://www.cvce.eu/obj/jean_louis_bourlanges_la_fin_de_l_europe_communautaire-fr-6c75fb02-d2de-438b-afbb-f00a06a71e89.html
Cela correspond-il aux arguments de sa conférence ?
@ Ruben
[Cela correspond-il aux arguments de sa conférence ?]
Pas tout à fait. Ce papier est une analyse technique du traité de Nice. La conférence à laquelle j’ai assisté, pour autant que je m’en souvienne, était moins sur les questions techniques que sur le rapport entre la supranationalité européenne et les compétences nationales des Etats. Bourlanges pensait à l’époque qu’on avait été trop vite avec l’Euro, et que cette attaque frontale contre la souveraineté des Etats risquait en retour de se transformer en machine infernale.
“Ne soyons pas trop durs. Ce sont nos voisins, ils ont leurs intérêts, nous avons les nôtres. Mais ils ont toujours été là en cas de coup dur. Contrairement à l’Allemagne…”
Faux l’Allemagne était aussi présente dans les coups durs … pour les donner !
Les Anglais ont toujours eu une vision claire de leurs intérêts et une absence totale de scrupules pour y satisfaire ; on ne peut pas le leur reprocher, quand bien même nous en avons souffert.
@ Gérard Couvert
[Faux l’Allemagne était aussi présente dans les coups durs … pour les donner !]
Vu comme ça… il est en tout cas assez frappant de constater que nos rapports avec la Grande Bretagne ont été variables. Ils ont été nos adversaires, mais à des moments difficiles ils ont aussi été nos alliés. L’Allemagne, elle, n’est jamais venue à notre secours dans les moments difficiles…
[Les Anglais ont toujours eu une vision claire de leurs intérêts et une absence totale de scrupules pour y satisfaire ; on ne peut pas le leur reprocher, quand bien même nous en avons souffert.]
Tout à fait. La « perfide Albion » est en fait bien moins « perfide » qu’on ne pourrait le penser.
Je trouve assez fascinante question des rapports et des représentations respectives entre la France et le Royaume-Uni. J’ai tendance à penser que les nombreux points communs que nous avons avec les Britanniques quant à notre histoire (vieil Etat centralisé où la capitale pèse d’un poids écrasant, sentiment national ancien né notamment pendant la guerre de Cent Ans, modèles politiques pour l’Europe jusqu’au milieu du XXe siècle, ambition mondiale) se combinent de façon saisissantes avec nos différences radicales (étatisme/libéralisme, citoyenneté universaliste/vision communautaire et stratifiée de la société, etc.) pour donner naissance à une relation extrêmement spécifique sur le mode des “frères ennemis”. Tout ça est très schématique évidemment mais il y a ici quelque chose de sans équivalent en Europe..
Avec l’Allemagne c’est très différent, j’ai l’impression qu’il y a davantage sur la longue période une incompréhension très forte de part et d’autre tant nos catégories mentales sont différentes, mâtinée d’une certaine hostilité d’ailleurs…
[La « perfide Albion » est en fait bien moins « perfide » qu’on ne pourrait le penser.]
En fait cette réputation n’est pas usurpée mais effectivement elle date beaucoup puisqu’elle vient essentiellement du XVIIIe siècle pendant lequel le Royaume-Uni avait la désagréable habitude de sortir systématiquement des guerres en concluant des paix séparées et en abandonnant ses alliés en rase campagne dès que ses buts de guerres étaient atteints. D’ailleurs il a fini par en payer le prix, on estime que ça a beaucoup joué dans l’incapacité de la Grande-Bretagne à se trouver des alliés de revers en Europe contre la France pendant la guerre d’indépendance américaine.
@ Carnot
[Je trouve assez fascinante question des rapports et des représentations respectives entre la France et le Royaume-Uni.]
Je partage. J’y ai vécu pendant de longues années et je connais assez bien le pays. En fait, nous avons des histoires pratiquement opposées. Chez nous, la nation s’est formée à partir d’un ensemble hétérogène autour d’un Etat central vécu comme protecteur contre la rapacité et les excès des « barons » locaux. En Angleterre, c’est le processus inverse : à partir d’une population beaucoup plus homogène, ce sont les communautés locales qui apparaissent comme protectrices contre les excès de l’Etat central. En Angleterre, c’est le juge qui est le protecteur contre l’arbitraire de l’exécutif. En France, c’est l’exécutif qui est le protecteur contre la corruption des juges…
[Avec l’Allemagne c’est très différent, j’ai l’impression qu’il y a davantage sur la longue période une incompréhension très forte de part et d’autre tant nos catégories mentales sont différentes, mâtinée d’une certaine hostilité d’ailleurs…]
C’est que malgré nos différences, il y a des éléments qui nous rapprochent de l’Angleterre. Dans l’histoire d’abord, et notamment avec la révolution anglaise des années 1650, que nos philosophes auront regardé de très près. Ensuite, l’appel du grand large au XVII et XVIII siècles, qui vit sortir les deux pays de leurs frontières pour aller explorer le monde…
@ Descartes
[Chez nous, la nation s’est formée à partir d’un ensemble hétérogène autour d’un Etat central vécu comme protecteur contre la rapacité et les excès des « barons » locaux]
Oui c’est paradoxalement la grande force de l’Etat construit presque ex nihilo par Guillaume le Conquérant et ses successeurs immédiats qui s’est retournée contre l’exécutif par la suite là où en France, parti de rien, l’Etat a su tirer du sentiment de sa fragilité même une force sans équivalent qui s’est perpétuée jusqu’à nous.
[ En Angleterre, c’est le processus inverse : à partir d’une population beaucoup plus homogène, ce sont les communautés locales qui apparaissent comme protectrices contre les excès de l’Etat central]
Tout à fait, je trouve par exemple que l’histoire de Robin de Bois et la figure du Shérif de Nottingham sont à ce titre particulièrement révélatrices.
Hâte de voir comme nos élites vont gérer l’après-Brexit après toutes les menaces proférées pour éviter ce vote et maintenant qu’ils sont au pied du mur. Ils sont dans la même situation qu’avec l’interdiction des manifestations, ils se mettent dans une position où ils n’ont guère de choix que de maintenir ce qu’ils avaient dit (interdiction de la manif et dureté envers les Brits) qui est stupide et dangereux ou de perdre la face en revenant dessus.
L’art de s’empêtrer.
@ Ruben
[Hâte de voir comme nos élites vont gérer l’après-Brexit après toutes les menaces proférées pour éviter ce vote et maintenant qu’ils sont au pied du mur.]
Le choix est en effet assez limité. Pour les eurolâtres, un Brexit réussi serait un précédent dangereux, qui pourrait donner des idées subversives à d’autres peuples. D’un autre côté, un Brexit raté pourrait être lourd de menaces pour l’économie européenne, étant donnés les liens économiques entre la Grande Bretagne et l’Europe continentale. Par ailleurs, une position trop dure des institutions européennes pourrait provoquer des dégâts considérables si elle était perçue comme une tentative de « punir » un peuple pour avoir fait le « mauvais choix ». Les dirigeants européens vont devoir faire un choix difficile…
J’aime le tournant national-populiste de mélenchon. Unique à gauche en France.
L’HEURE DU PLAN B SONNE EN 2017!
Le Brexit est le cri du petit peuple du Royaume-Uni contre tout ce qui est la réalité quotidienne de l’Europe des traités : pauvreté, précarité, privilèges pour les riches et ultra riches, arrogance des donneurs de leçon de flexibilité et autres loi El Komri, tyrannie sans visage des comptables de la Commission européenne, talon de fer des troïkas et autres proconsuls pillant les pays comme la Grèce.
Le Brexit c’est le début de la fin d’une époque. L’idée d’une Union européenne a été tuée par la caste des eurocrates et la politique d’austérité imposée par le gouvernement allemand avec la complicité active des deux présidents français qui, depuis 2005 ont violé le vote de notre peuple.
La leçon est que l’Union européenne on la change ou on la quitte. Comme d’habitude, les eurocrates préparent déjà depuis plusieurs mois en secret avec madame Merkel un nouveau traité pour 2017 qui ne tiendra compte d’aucune des leçons évidentes de la situation.
L’heure du plan B va sonner. Ma candidature pour l’élection présidentielle est celle de la sortie des traités européens. Plus que jamais l’intérêt de notre pays est celui d’une politique de coopération sur le vieux continent et avec le monde plutôt que le libre-échange et la concurrence libre et non faussée.
Bien sûr, la caste des eurolâtres ne tiendra aucun compte de ce qui vient de se passer et continuera de fustiger les « extrêmes », le « repli sur soi » et l’amour des peuples pour leurs libertés et dignité sociale. Plus dure sera leur chute. L’élection présidentielle de 2017 en France en est l’occasion.
@ Coma81
[J’aime le tournant national-populiste de Mélenchon. Unique à gauche en France.]
Oui. Il est d’ailleurs drôle de le voir voler au secours de la victoire alors qu’il a été fort discret pendant la campagne du « Brexit ». Et cette discrétion se comprend : c’est la droite britannique, et non la gauche, qui a fait campagne pour le « Brexit ». Quel est le rôle de la gauche britannique dans cette victoire ? Il est négligeable. Seul RESPECT, petit parti d’extrême gauche a pris fait et cause pour la sortie. Jeremy Corbyn, dont Mélenchon a applaudi l’élection, a fait campagne contre la sortie, tout comme l’ensemble des médias et de la presse de gauche.
Mélenchon peut bien constater que « le Brexit est le cri du petit peuple du Royaume-Uni contre tout ce qui est la réalité quotidienne de l’Europe des traités ». Seulement, ce « cri » n’a été possible que grâce à l’engagement d’une partie du Parti Conservateur et surtout de l’UKIP. Des gens à qui Mélenchon refuserait de serrer la pince. Il serait peut-être temps de se demander pourquoi le « petit peuple » est obligé de se retourner de ce côté-là pour trouver une représentation politique. Peut-être parce que l’engagement de la gauche contre « tout ce qui est la réalité quotidienne de l’Europe des traités » n’est pas suffisamment clair… souvenez vous du « il faut rester dans l’Euro pour avoir un smic européen »…
Rien qu’un exemple. Dans l’article que vous citez, Mélenchon tient les propos suivants : « Le Brexit c’est le début de la fin d’une époque. L’idée d’une Union européenne a été tuée par la caste des eurocrates et la politique d’austérité imposée par le gouvernement allemand avec la complicité active des deux présidents français qui, depuis 2005 ont violé le vote de notre peuple ». En d’autres termes, le traité de Maastricht – avec sa monnaie unique, sa BCE indépendante et sa « concurrence libre et non faussée » – n’est pas en cause. Ce sont les méchants « eurocrates » et les non moins méchants allemands qui sont à blâmer. Mélenchon ne veut toujours pas comprendre que le vers était dans le fruit dès la signature du traité de Maastricht. C’est toujours le mythe de « l’autre Europe » idéale qui ressurgit…
Quel opportuniste girouette çui là !
J’ai des copains du PG qui ont tenté démocratiquement de faire passer les idées de sortie de l’UE et de l’euro, avant même la campagne présidentielle de 2012, en suppliant Méluche de faire siens ces thèmes pour ne pas les laisser au seul FN. Ils se sont faits insulter, expulser, poussés poliment vers la sortie par la garde rapprochée de Méluche. Ils m’ont expliqué que toutes les procédures étaient verrouillées pour empêcher les conseillers nationaux de parler entre eux du sujet (des fois qu’ils réfléchiraient mal).
Ils avaient osé critiquer Jacques Généreux et son idée fumeuse d’Euro du Sud, les conneries de plan A et critiqué la position de Syrisa qui n’a pas osé travailler en amont à l’idée de sortie de l’UE dans ses 6 mois de négociations.
Ah ah ah, et JLM espère récupérer à gauche les voix que le FN a pris depuis 2002 car il sent le vent tourner ? Il nous prend pour des imbéciles à la mémoire courte, les gens vont très bien sentir ce tournant eurosceptique comme opportuniste.
Le FN est loin devant et est le plus crédible pour porter l’idée de sortie de l’UE, il ne reste que quelques mois avant la présidentielle, on ne rattrape pas en 6 mois un travail qui aurait du être fait dès la création du PG ou le NON de 2005.
JLM doit intérieurement se mordre les doigts d’avoir raté une occasion en or, d’être le porte parole eurosceptique de gauche ou le Leftist Farage. En plus, il a perdu beaucoup de militants qui étaient eurosceptiques qui pleurent de n’avoir aucune force politique à gauche pouvant porter leurs idées. C’est foutu pour lui, s’il fait 5 % il peut déjà s’estimer heureux.
@ Bannette
[J’ai des copains du PG qui ont tenté démocratiquement de faire passer les idées de sortie de l’UE et de l’euro, avant même la campagne présidentielle de 2012, en suppliant Méluche de faire siens ces thèmes pour ne pas les laisser au seul FN. Ils se sont faits insulter, expulser, poussés poliment vers la sortie par la garde rapprochée de Méluche.]
Bien entendu. Quand on écoute Mélenchon, il faut se souvenir qu’il n’a toujours pas coupé le cordon avec Mitterrand, et qu’il n’est donc pas et ne sera jamais un jacobin. Pour lui, la souveraineté n’est pas un principe fondamental de la politique, mais un caractère contingent. L’idéal, reste la fusion de la France dans une Europe supranationale, mais bien sur une Europe sociale, écologique et tout le tralala. C’est pourquoi son faux souverainisme dérive d’un raisonnement ad hoc : on est contre la supranationalité lorsqu’il s’agit de CETTE Europe, mais on est tout à fait prêt à la consentir pour une AUTRE Europe. On voit bien ce raisonnement lorsqu’il s’agit de l’Euro : c’est CET Euro qui est en cause, mais si demain la BCE acceptait de financer les Etats dans les conditions demandées par Mélenchon, il deviendrait tout à fait acceptable.
Le problème de cette position est qu’elle ne tient pas compte des raisons pour lesquelles cette « autre Europe » fantasmée n’a jamais vu le jour, pourquoi nous sommes coincés avec celle que nous avons. Le problème n’est pas conjoncturel, ce n’est pas la faute des « mauvais dirigeants » qui ont fait fausse route. Le problème est structurel : la nation est la plus grande collectivité dont les membres sont inconditionnellement solidaires les uns des autres. Et cette solidarité inconditionnelle, qui est une autre face de la communauté de destin, est un élément fondamental dans la création d’une communauté politique. Il ne peut exister « d’autre Europe » parce que cette Europe idéale suppose des mécanismes de solidarité qui n’existent pas et qui ne peuvent exister.
[Ils m’ont expliqué que toutes les procédures étaient verrouillées pour empêcher les conseillers nationaux de parler entre eux du sujet (des fois qu’ils réfléchiraient mal).]
Trotskyste un jour, trotskyste toujours… Un débat ouvert ? Des décisions collectives ? Tu ne t’imagines pas tout de même que Méluche et son équipe vont prendre le risque que leur bébé leur échappe et ait une vie autonome, non ?
[Ah ah ah, et JLM espère récupérer à gauche les voix que le FN a pris depuis 2002 car il sent le vent tourner ? Il nous prend pour des imbéciles à la mémoire courte, les gens vont très bien sentir ce tournant eurosceptique comme opportuniste.]
Et surtout, il ne faut pas oublier que ce qu’on gagne d’un côté, on le perd de l’autre. Mélenchon n’est pas le seul mitterrandien dans le paysage. Il ne faudrait pas oublier que les libéraux-libertaires se sont convertis massivement à la vision mitterrandienne de l’Europe. Il n’y a qu’à écouter l’ineffable Cohn-Bendit, dont la pensée s’est arrêtée en 1992, pour s’en convaincre. Si Mélenchon a tellement tergiversé sur la question européenne dans ses discours publics, c’est parce qu’il veut ménager cet électorat. Il aura du mal à lui tourner le dos maintenant, même s’il sent que le vent tourne… ça promet une campagne riche en contradictions.
[Le FN est loin devant et est le plus crédible pour porter l’idée de sortie de l’UE, il ne reste que quelques mois avant la présidentielle, on ne rattrape pas en 6 mois un travail qui aurait du être fait dès la création du PG ou le NON de 2005.]
Le réalisme oblige à le reconnaître. Comme il oblige à reconnaître que, contrairement à l’accusation d’opportunisme qui lui est faite souvent, le FN n’a pas attendu que cette position soit populaire pour la porter. En 1992 déjà, il n’y eut que deux partis politiques pour prendre officiellement position contre la ratification de Maastricht : le FN et le PCF. Aujourd’hui, le FN a toutes les chances de toucher les dividendes de sa longue constance… le PCF, quant à lui, aura raté les siens en vendant trop tôt. Ce fut au congrès de Martigues que le père UbHue décida de supprimer la dénonciation du traité de Maastricht comme objectif…
[C’est foutu pour lui, s’il fait 5 % il peut déjà s’estimer heureux.]
Il fera plus. Autant il ne faut pas surestimer la capacité stratégique de Mélenchon, autant on a tort se sous-estimer son génie tactique. En partant avant les autres, il a pris une bonne option sur le marigot de la « gauche radicale », qui pèse bon an mal an 10%…
@Descartes
[Le problème de cette position est qu’elle ne tient pas compte des raisons pour lesquelles cette « autre Europe » fantasmée n’a jamais vu le jour, pourquoi nous sommes coincés avec celle que nous avons. Le problème n’est pas conjoncturel, ce n’est pas la faute des « mauvais dirigeants » qui ont fait fausse route. Le problème est structurel : la nation est la plus grande collectivité dont les membres sont inconditionnellement solidaires les uns des autres. Et cette solidarité inconditionnelle, qui est une autre face de la communauté de destin, est un élément fondamental dans la création d’une communauté politique. Il ne peut exister « d’autre Europe » parce que cette Europe idéale suppose des mécanismes de solidarité qui n’existent pas et qui ne peuvent exister.]
Peut-être pas à court terme, mais dans quelques décennies c’est possible. Entre l’indépendance en 1776 et l’entrée de l’Arizona en 1912, il a fallu 136 ans aux Etats américains qui constituent aujourd’hui les Etats-Unis pour que cela se réalise. En fait, le succès de la solidarité inconditionnelle entre la plupart de ces Etats remonte probablement à plus tôt, quelque part entre la fin de la guerre de sécession (1865) et 1912. Donc cela leur a pris environ 100 ans. L’idée de l’Union Européenne traine depuis très longtemps, en tout cas depuis bien plus de 100 ans, et même plus de 200 ans. Il ne me paraît pas impossible que dans quelques décennies les mentalités aient à ce point changé qu’une solidarité inconditionnelle entre certains pays soit possible. Peut-être pas entre n’importe quelle paire de pays de l’actuelle UE, je n’imagine pas cela possible en 100 ans entre l’Allemagne et la Grèce, mais peut-être entre l’Espagne et la France, la France et l’Italie, l’Allemagne et l’Autriche…
@Jean-François
[Peut-être pas à court terme, mais dans quelques décennies c’est possible. Entre l’indépendance en 1776 et l’entrée de l’Arizona en 1912, il a fallu 136 ans aux Etats américains qui constituent aujourd’hui les Etats-Unis pour que cela se réalise.]
La comparaison avec les Etats-Unis est trompeuse. Pour constituer les Etats-Unis, on n’a pas unifie les Sioux, les Algonquins, et autres habitants natifs du territoire. La population américaine est en quasi-totalité venue de l’extérieur. En fait, c’est une population très homogène en termes de références : ce sont tous des descendants d’immigrés, venus « faire l’Amérique » fuyant les persécutions ou la misère dans leurs pays d’origine, et ayant une très forte motivation pour s’intégrer au pays d’accueil. Il est donc beaucoup plus facile pour un américain de voir l’habitant d’un autre état américain un « autre soi-même » que pour un européen. S’il y a des divisions dans la société américaine, ces divisions opposent moins les états les uns aux autres que les communautés à l’intérieur d’une même ville ou d’un même état.
Bonjour Descartes,
Petite erreur factuelle, c’est en 1995 que Madelin a été viré du gouvernement, dès l’été. Excellente analyse par ailleurs.
@Pierre 93
Vous avez raison. Madelin fut bien ministre de l’industrie entre 1986 et 1988, mais à l’époque il ne s’était pas encore fait le porte parole visible du libéralisme en France. Il redeviendra ministre de l’Economie en 1995, et restera en poste trois mois, ses positions ayant été jugés par trop libérales.
@ Descartes,
Deuxième petite erreur factuelle: si Madelin a été viré en 1995, ce n’est pas parce qu’il était trop libéral mais parce qu’il s’était opposé, avec Séguin, à la politique du franc fort que Juppé soutenait. Et Chirac trancha en faveur de Juppé. De fait, en 1995, Madelin n’était ni plus ni moins libéral qu’en 1986-1988 où il avait été Ministre de l’Industrie et qu’en 1993-1995 où il avait été Ministre des Entreprises et du Développement Economique; Juppé ne pouvait tout simplement pas supporter qu’il y ait plus d’un coq dans la basse-cour et a donc éliminé Séguin et Madelin. L’un libéral, l’autre gaulliste.
Quant à dire qu’en 1986 Madelin ne s’était pas fait le porte-parole visible du libéralisme, je ne sais pas ce qui vous permet d’affirmer cela. Madelin a toujours été explicitement “ultra-libéral”, fondateur d’Occident. De fait, la campagne de 1986 a été, à droite, une campagne ouvertement libérale, quasiment Thatchérienne et le fruit d’un accord “secret” passé entre Chirac et le trio Madelin-Longuet-Léotard pour éliminer Giscard, Barre et Chaban-Delmas. La “bande à Léo” à laquelle appartenait, avec Gérard Longuet, Madelin, portait alors, avec le Parti Républucain, fièrement le le flambeau de libéralisme: en 1985, la tournée du PR est d’ailleurs soutenue par une campagne d’affichage massive dont les termes sont explicites: “le printemps des libertés”, “la passion de vos libertés”.
De fait, à l’époque, le libéralisme est considéré à droite (et à l’extrême droite) comme la solution miracle de tous les problèmes de la France et même le RPR, traditionnellement sceptique, se laisse séduire. Jaques Toubon, son nouveau Sécrétaire Général, déclare ainsi: “le gaullisme, c’est le libéralisme, plus un grand dessein national”. Et Chirac de renchérir: “le libéralisme n’est pas un choix mais une nécessité”. Le grand rassemblement pré-électoral de de toute la droite, en juin 1985, au Palais de Congrès prend même le nom de “Convention Libérale”.
D’une manière générale, quand vous dites que la droite française est Bonapartiste par tradition et donc anti-libérale vous simplifiez à outrance. Comme chacun sait, la droite française est divisée entre Orléanistes et Bonapartistes qui se partagent alternativement le pouvoir – avec néanmoins, c’est vrai, une empreinte plus profonde des Bonapartistes, particulièrement depuis la 5ème République.
Vous dites par ailleurs que c’est à droite qu’on trouve les partisans les plus acharnés de l’interventionnisme étatique. Pouvez-vous me citer depuis 40 ans un Ministre de l’Economie de droite qui incarne ce courant de pensée ? Raymond Barre? Edouard Balladur? Edmond Alphandéry? Jean Arthuis? Thierry Breton? Christine Lagarde?
Ceci dit, ce qui caractérise la droite française depuis Chirac, c’est son absence totale d’idéologie: son seul et unique objectif est de coller aux attentes de l’électorat; quitte à faire des voltes-face massifs par la suite. Ceux de Chirac sont connus: anti-libéral dans les années 70 pour prendre la tête des gaullistes, libéral dans les années 80 pour prendre celle de la droite, à nouveau gaulliste lors de l’élection de 1995 pour la gagner contre le candidat libéral (Balladur), puis ordo-libéral une fois au pouvoir (franc fort, lutte contre le déficit, réforme des retraites…); le tout pour finir radical-socialiste entre 2002 et 2007…
Sarkozy est évidemment dans la même veine: contempteur du laxisme judiciaire mais suppresseur de la double peine, partisan de la souveraineté populaire mais artisan du traité de Lisbonne, “patriote” mais se désolidarisant en 2003 de la position de la France sur l’Irak en se rendant à l’ambassade américaine pour y dénigrer Chirac et réintégrant la France dans l’OTAN en 2009, anticommunautariste mais membre régulier du dîner du CRIF, contre l’immigration mais faisant augmenter le nombre d’immigré légaux de 120 000 à 230 000 pour complaire au patronat… on en a vraiment le tournis.
Quant au sujet qui nous occupe (le libéralisme), Sarkozy est libéral en 1995 (il soutien Balladur), libéral en 2002 (par anti-chiraquisme), libéral en 2007 (son modèle est alors Tony Blair). Pour 2017, seul lui sait ce qu’il sera; mais il sera dans l’air du temps vous pouvez en être sûr.
@ odp
[Deuxième petite erreur factuelle: si Madelin a été viré en 1995, ce n’est pas parce qu’il était trop libéral mais parce qu’il s’était opposé, avec Séguin, à la politique du franc fort que Juppé soutenait. Et Chirac trancha en faveur de Juppé.]
Et pourtant, Seguin n’a pas été viré… il est resté président de l’Assemblée jusqu’en 1997. Ce qui tend à prouver que cette « opposition » n’était pas la véritable raison. En fait, Madelin avait énervé beaucoup de monde avec ses sorties ultralibérales à un moment où la politique de Chirac, après avoir été élu grâce à son discours sur la « fracture sociale », était de se donner une image de président social et non de rouvrir la guerre civile entre libéraux et étatistes. Ce sont ces sorties médiatiques qui ont provoqué son renvoi : la goutte qui a fait déborder le vase étant une déclaration évoquant la nécessité de « remettre en cause certains avantages acquis ». Ces déclarations avaient provoqué un tollé et avaient conduit Juppé à demander sa démission, qu’il avait accepté en ces termes : « Les déclarations du ministre de l’Economie et des Finances contrarient la volonté réformatrice du gouvernement fondée sur une politique de justice sociale et fiscale et sur une méthode de concertation large et responsable. Dans ce contexte, Alain Madelin m’a présenté sa démission et je l’ai acceptée ». Pas la moindre mention là-dedans à la politique du franc fort…
[De fait, en 1995, Madelin n’était ni plus ni moins libéral qu’en 1986-1988 où il avait été Ministre de l’Industrie et qu’en 1993-1995 où il avait été Ministre des Entreprises et du Développement Economique;]
C’est discutable. Madelin a – de son propre aveu – beaucoup évolué idéologiquement dans les années 1980 et 90. A droite d’abord par anticommunisme, thatchérien par ambition, pendant très longtemps il ne s’embarrasse pas de cohérence idéologique. On peut difficilement parler de « Occident » comme un mouvement « libéral »… Ce n’est que plus tard qu’on trouve chez lui une véritable réflexion idéologique sur ce qu’est le libéralisme. La dernière fois que j’ai assisté à l’une de ses interventions, son ton était presque civilisé…
[La “bande à Léo” à laquelle appartenait, avec Gérard Longuet, Madelin, portait alors, avec le Parti Républucain, fièrement le le flambeau de libéralisme: en 1985, la tournée du PR est d’ailleurs soutenue par une campagne d’affichage massive dont les termes sont explicites: “le printemps des libertés”, “la passion de vos libertés”.]
A l’époque, le PCF fait une affiche reprenant la formule d’Eluard, « j’écris ton nom, Liberté ». Y aurait-il une veine thatchérienne chez Georges Marchais ?
[De fait, à l’époque, le libéralisme est considéré à droite (et à l’extrême droite) comme la solution miracle de tous les problèmes de la France et même le RPR, traditionnellement sceptique, se laisse séduire. Jaques Toubon, son nouveau Sécrétaire Général, déclare ainsi: “le gaullisme, c’est le libéralisme, plus un grand dessein national”. Et Chirac de renchérir: “le libéralisme n’est pas un choix mais une nécessité”. Le grand rassemblement pré-électoral de de toute la droite, en juin 1985, au Palais de Congrès prend même le nom de “Convention Libérale”.]
Encore une fois, il faut distinguer les mots et les actes. La droite française avait devant elle les triomphes de Thatcher et de Reagan, et s’est imaginé que reprenant leur rhétorique elle allait obtenir les mêmes résultats. Mais c’est un effet de langage, pas une véritable conversion aux idées. Ceux qui à droite ont essayé de traduire ce libéralisme en actes dans la période 1986-88 s’en sont mordu les doigts. Ils ont mis du temps à comprendre que les français attendent trop de l’Etat pour qu’un véritable discours thatchérien ait une chance de passer. A partir de là, les références « libérales » se sont évaporées aussi vite qu’elles étaient venues…
[D’une manière générale, quand vous dites que la droite française est Bonapartiste par tradition et donc anti-libérale vous simplifiez à outrance. Comme chacun sait, la droite française est divisée entre Orléanistes et Bonapartistes qui se partagent alternativement le pouvoir – avec néanmoins, c’est vrai, une empreinte plus profonde des Bonapartistes, particulièrement depuis la 5ème République.]
Je vous accorde qu’il s’agit d’une simplification. Mais je ne pense pas qu’elle soit « outrancière ». Au-delà encore une fois des postures, même la droite « orléaniste » s’est comporté d’une manière « bonapartiste » lorsqu’elle est arrivée au pouvoir. La présidence Giscard est un bon exemple. C’est en partie les institutions de la Vème République qui veulent ça, mais aussi la vision que les français ont de l’Etat. Lorsque Jospin – l’un des rares vrais libéraux qui aient gouverné chez nous – a déclaré que « l’Etat ne peut pas tout », ça ne lui a pas porté bonheur.
[Vous dites par ailleurs que c’est à droite qu’on trouve les partisans les plus acharnés de l’interventionnisme étatique. Pouvez-vous me citer depuis 40 ans un Ministre de l’Economie de droite qui incarne ce courant de pensée ? Raymond Barre? Edouard Balladur? Edmond Alphandéry? Jean Arthuis? Thierry Breton? Christine Lagarde?]
J’ai dit que c’est à droite qu’on trouve les étatistes les plus acharnés. Je n’ai pas dit qu’ils deviennent ministre de l’économie… La logique politique veut qu’on nomme à chaque ministère une personnalité qui rassure les clientèles du ministère en question. On a toujours une personnalité « écolo-compatible » à l’environnement, un productiviste à l’industrie, un « social » au ministère du travail, un « autoritaire » au ministère de l’Intérieur. Et au ministère de l’Economie, on nomme des gens qui rassurent les financiers et les patrons. Ca fait partie du jeu.
[Ceci dit, ce qui caractérise la droite française depuis Chirac, c’est son absence totale d’idéologie: son seul et unique objectif est de coller aux attentes de l’électorat; quitte à faire des voltes-face massifs par la suite.]
Vous généralisez un peu trop. Ce que vous dites est parfaitement vrai en matière économique. Un leader comme Sarkozy a été tour à tour libéral ou étatiste selon le sens du vent, et c’est encore plus clair pour Chirac, le gaulliste pompidolien devenu thatchérien puis radical socialiste lorsque le thatchérisme est passé de mode. Mais ce n’est pas aussi visible par exemple dans le domaine de la politique étrangère, domaine dans lequel Chirac est resté toute sa vie fidèle à la vision gaulliste.
[Quant au sujet qui nous occupe (le libéralisme), Sarkozy est libéral en 1995 (il soutien Balladur), libéral en 2002 (par anti-chiraquisme), libéral en 2007 (son modèle est alors Tony Blair). Pour 2017, seul lui sait ce qu’il sera; mais il sera dans l’air du temps vous pouvez en être sûr.]
Un parfait démocrate, en somme…
La haine des classes : le patronat ne peut accorder une hausse des salaires de 1% (il serait ruiné) mais peut augmenter de 30% les dividendes distribués aux actionnaires (éventuellement en empruntant (‘Total par exemple) : les taux sont bas ! !
Aucun gouvernement n’ose imposer les transactions boursières à la milliseconde. Même avec un taux de 0,01%, pensez : les capitaux fuiraient : donc plus de possibilités d’investir ! lorsque l’on sait que, en moyenne, un titre de bourse reste moins de 15 minutes entre les mains du même actionnaire, sert-il vraiment à investir ?
Que les gouvernements se désintéressent du bas peuple, c’est certain. Qu’il favorise la classe moyenne basse, j’en doute. Mais oui, les gouvernements (dits de droite ou de gauche) favorisent la classe moyenne supérieure : voir les publicité proposant des déductions fiscales pour ceux qui payent plus de 3000€ d’impôt annuel (et ceux qui ne payent que 3000€ ne gagnent pas assez pour bénéficier totalement des possibilités offertes)). Et ce n’est pas le correctif limitant la valeur de la part des enfants qui change la donne !
Des articles de Médiapart laissent à penser que la politique (loi travail en particulier) serait imposée par l’UE ou le ministre des finances allemand : “c’est ça, sinon rejet du projet de budget” . Cela donne raison à Mélenchon ou Marine pour un Francexit.
@ popeye-66
[La haine des classes : le patronat ne peut accorder une hausse des salaires de 1% (il serait ruiné) mais peut augmenter de 30% les dividendes distribués aux actionnaires (éventuellement en empruntant (Total par exemple) : les taux sont bas ! !]
Je ne saisis pas le rapport. Je ne trouve pas que ce soit une bonne idée de tout mélanger. On n’a pas besoin de « haïr » ses ouvriers pour les exploiter.
[Aucun gouvernement n’ose imposer les transactions boursières à la milliseconde. Même avec un taux de 0,01%, pensez : les capitaux fuiraient : donc plus de possibilités d’investir ! lorsque l’on sait que, en moyenne, un titre de bourse reste moins de 15 minutes entre les mains du même actionnaire, sert-il vraiment à investir ?]
Les transactions à la milliseconde sont dangereuses pour la stabilité du système financier, mais n’ont pas d’effet sur l’économie réelle dès lors que l’on ne cède pas à l’illusion monétaire. Que les actions d’une entreprise soit vendues et achetées mille fois par seconde ne change absolument rien au fonctionnement réel de l’entreprise. Ses salariés continuent à travailler, ses dirigeants à diriger, ses machines à fonctionner.
[Que les gouvernements se désintéressent du bas peuple, c’est certain. Qu’il favorise la classe moyenne basse, j’en doute.]
Et bien sur, chacun d’entre nous est « classe moyenne basse »… c’est le raisonnement classique qui permet à chaque membre des « classes moyennes » de se mettre du bon côté de la barrière…
J’attire votre attention sur le fait que j’utilise sur ce blog le terme « classe moyenne » dans un sens bien précis (c’est pourquoi je mets toujours l’expression entre guillemets). Il s’agit des individus qui ont un capital propre – matériel et immatériel – qui leur permet dans le rapport de production de négocier leur rémunération et donc de récupérer la totalité de la valeur qu’ils produisent, contrairement aux prolétaires qui, eux, n’ont pas de pouvoir de négociation et doivent accepter de laisser une partie importante de la valeur produite dans les mains de leurs patrons. Pour moi, appartenir aux « classes moyennes » est une question de rapport de production, et non de revenu.
[Des articles de Médiapart laissent à penser que la politique (loi travail en particulier) serait imposée par l’UE ou le ministre des finances allemand : “c’est ça, sinon rejet du projet de budget”. Cela donne raison à Mélenchon ou Marine pour un Francexit.]
C’est la réalité : à chaque semestre budgétaire, la Commission tonne sur la nécessité absolue de faire les « réformes structurelles », avec le soutien appuyé du gouvernement allemand. Les uns et les autres ne peuvent ensuite, lorsque les gouvernements obtempèrent, se cacher derrière leur petit doigt sur le mode « ce n’est pas moi qui l’ai voulu ».
Cela étant dit, je ne vois pas pourquoi vous parlez de « donner raison à Mélenchon » dans le cadre d’un « Frexit ». A ma connaissance, Mélenchon n’a jamais parlé de sortir de l’UE. Tout au plus de « sortir des traités européens », qui dans son esprit devraient être remplacés par d’autres traités allant vers « l’autre Europe ». Il faut être très clair là-dessus : les souverainistes estiment que la souveraineté nationale est un principe fondamental, et que subordonner la nation à quelque structure supranationale que ce soit, qu’elle soit « libérale » ou « sociale » est inacceptable. La position de Mélenchon est qu’il faut au contraire construire une Europe supranationale qui soit écologique, sociale et tout le tralala. Il n’est donc pas sur une position souverainiste, mais en fait sur la position mitterrandienne classique : « l’Europe est notre avenir »…
Cher Descartes, j’ai découvert votre blog par l’intermédiaire d’un ami “jacobin de gauche” et je trouve vos articles exceptionnels et passionnants. Bravo notamment pour celui sur Denis Baupin qui exprimait parfaitement ma pensée, ce qui était un grand plaisir car tout le monde me faisait les gros yeux quand j’osais la donner. Celui sur l’ego-politique était remarquable également.
Sur votre présent article, je vous trouve extrêmement dur avec “l’autre gauche”… D’autre part, comparer l’Obs à “Bagatelle pour un massacre”, n’est-ce pas un peu exagéré ? Enfin, les déçus de Hollande, j’en reste convaincue, l’ont été parce qu’il n’a pas mené une politique de gauche, et non parce qu’il n’était pas assez à droite…
@ Nana85
[Cher Descartes, j’ai découvert votre blog par l’intermédiaire d’un ami “jacobin de gauche” et je trouve vos articles exceptionnels et passionnants.]
C’est gentil à vous, même si ça doit écorner ma modestie légendaire… en tout cas, merci de l’encouragement, il est très apprécié.
[Sur votre présent article, je vous trouve extrêmement dur avec “l’autre gauche”…]
Qui aime bien châtie bien. Quelque soit ma position aujourd’hui, « l’autre gauche » – ou pour être plus précis, le PCF – est ma famille. C’est là que j’ai été formé intellectuellement, que j’ai acquis mes réflexes et mon langage. C’est là que pendant très longtemps j’ai mis mes espoirs. J’ai donc un rapport « charnel » avec ces gens que je n’ai pas avec la droite ou l’extrême droite. Je peux observer avec une certaine neutralité les travaux d’un Philippot, d’une Le Pen, d’un Guaino, d’un Sarkozy ou d’un Juppé. Ces personnages peuvent m’intéresser ou me rebuter, mais ils ne peuvent me décevoir puisque je n’attends rien d’eux. Ce n’est pas tout à fait la même chose avec le PCF ou le PG…
Or, les leaders de « l’autre gauche » en général et Mélenchon en particulier m’ont profondément déçu. Mélenchon s’est révélé finalement n’être qu’une baudruche : un tribun exceptionnel, oui, un tacticien hors pair, oui, mais incapable d’aller plus loin, de fonder un véritable parti, d’établir une véritable doctrine, de penser sur le long terme. Il n’est qu’un bébé Mitterrand qui n’a jamais coupé le cordon, un tacticien de congrès socialiste, un politicien professionnel qui crache sur les professionnels de la politique. Ce n’est pas l’homme – charmant au demeurant – qui est en cause, c’est le politique.
[D’autre part, comparer l’Obs à “Bagatelle pour un massacre”, n’est-ce pas un peu exagéré ?]
A peine. Les termes sont un peu moins orduriers, certes, mais l’esprit y est.
[Enfin, les déçus de Hollande, j’en reste convaincue, l’ont été parce qu’il n’a pas mené une politique de gauche, et non parce qu’il n’était pas assez à droite…]
Regardons les chiffres. En 2012, François Hollande fait 29% au premier tour. Aujoud’hui, il est crédité d’à peine 14%. Où sont passés les 15% restants ? Chez Mélenchon, chez Poutou, chez Arthaud, chez Duflot ? Pas du tout : dans ces mêmes sondages, ces quatre candidats font, à quelques points près, les mêmes scores qu’en 2012. Alors, où sont passées ces voix, ces « déçus du hollandisme » ? Eh bien, vous verrez la réponse en regardant ce que les sondages disent des scores à droite… maintenant, si on arrive à la conclusion que plus d’un tiers des électeurs hollandais de 2012 sont partis à droite alors que seuls quelques pourcents ont migré vers sa gauche, on peut en déduire que les électeurs hollandais sont bien plus nombreux à lui reprocher une politique « pas assez à droite » que le contraire…
Et Mélenchon qui continue a faire ses pirouettes et le grand écart avec son plan B
Un de vos meilleurs billets, sans aucun doute.
Il y a quand même quelque chose d’incroyable dans toute cette histoire. Pourquoi tous les eurocrates et dirigeants ont-ils si peur des referendums ? On voit partout dans les médias des journalistes et des hommes politiques dire à qui mieux mieux qu’il faut craindre la volonté du peuple parce que le projet européen est si grand et si généreux que ces ignares d’électeurs ne peuvent le comprendre. Donc votre billet est peut-être l’un des meilleurs mais il est aussi le plus actuel. On a eu droit aussi aux mêmes promesses post-élection européenne, où tout le monde jure que ça va changer, que l’Europe libérale c’est finie, même si ces cons de citoyens n’ont pas compris tout le bien qu’elle nous fait. Je me demande qui cela peut-il encore berner.
En ce qui concerne le Brexit proprement dit, avez un éclairage pour ce qui concerne les Bourses qui jouent au yoyo ? De ma culture économique basique, je ne vois là que le résultat d’un doute passager, mais sachant que les négociations avec l’Union peuvent durer jusqu’à deux ans, ce serait un doute bien long et dangereux.
Le Brexit en lui-même est bien sûr formidable, surtout pour l’effet d’exemple. Mais si en plus il permet le démantèlement du Royaume-Uni sans tirer un seul coup de feu, ce serait le plus beau jour de ma vie. Toutes ces révoltes écossaises financées pour rien, toutes les aides aux Irlandais, toutes ces guerres, quant il fallait seulement laisser faire les Britanniques.
@ Ozymandias
[Il y a quand même quelque chose d’incroyable dans toute cette histoire. Pourquoi tous les eurocrates et dirigeants ont-ils si peur des referendums ?]
La réponse est simple : parce qu’ils les perdent. Lorsque la Grande Bretagne a voté « oui » à l’Europe dans les années 1970, lorsque la France a voté « oui » à Maastricht, on n’a pas vu partout des médiacrates déclarer que les électeurs avaient compris la question, ou qu’ils avaient voté en fait pour autre chose que la question posée. Au contraire : à l’époque, tout le monde avait applaudi à la sagesse des peuples. Maintenant que les peuples refusent de ratifier ce que leurs élites politico-médiatiques ont décidé, on découvre que le référendum n’est finalement pas un bon moyen de consultation, que le peuple est bête et manipulable… encore un exemple de raisonnement ad hoc : la question n’est pas de savoir si telle ou telle méthode de consultation permet au peuple d’exprimer un avis réfléchi. La question est de savoir s’il procure le résultat désiré.
Il y a aussi une deuxième raison : nos hommes politiques sont aujourd’hui essentiellement des hommes de cabinet. Le « cursus honorum » du politicien d’aujourd’hui fait qu’on peut faire une brillante carrière en se frottant un minimum au peuple, en pilotant sa campagne grâce aux sondages. Et du coup, les politiques « sentent » de moins en moins l’opinion publique. Il faut se souvenir que les Clemenceau, les Blum ou les Thorez n’avaient pas à leur disposition des sondages. Pour guider leurs discours, ils n’avaient que leur connaissance du peuple et la capacité de leur parti à plonger ses racines dans la population et à faire remonter le sentiment des électeurs. Et du coup la sélection naturelle éliminait ceux qui n’avaient pas du « nez »…
[On voit partout dans les médias des journalistes et des hommes politiques dire à qui mieux mieux qu’il faut craindre la volonté du peuple parce que le projet européen est si grand et si généreux que ces ignares d’électeurs ne peuvent le comprendre.]
Classique. Les « classes moyennes » savent ce qui est bon pour tout le monde, et sont là pour faire le bonheur des gens malgré eux, et contre eux s’il le faut. Il faut comprendre que ces trente dernières années on a progressivement enlevé aux couches populaires leurs moyens d’expression politique. Disparition des partis ouvriers, affaiblissement des syndicats, éloignement des centre-ville, rétrécissement des canaux méritocratiques d’accès à certaines fonctions. La seule chose qu’on n’ait pas – encore – réussi à leur enlever c’est le vote. Et c’est donc à une « rébellion par les urnes » – l’expression vient du « Sun » – qu’on assiste. Pour les élections, les « classes moyennes » peuvent contrôler les résultats puisqu’elles contrôlent les candidats – ou du moins la plupart d’entre eux. Mais contrôler le référendum, c’est plus difficile. C’est pourquoi maintenant on va nous expliquer qu’il ne faut plus en faire. En attendant de rétablir le suffrage censitaire…
[En ce qui concerne le Brexit proprement dit, avez un éclairage pour ce qui concerne les Bourses qui jouent au yoyo ? De ma culture économique basique, je ne vois là que le résultat d’un doute passager, mais sachant que les négociations avec l’Union peuvent durer jusqu’à deux ans, ce serait un doute bien long et dangereux.]
Il y a plusieurs choses. D’abord, les bourses détestent l’incertitude. Mettez vous dans la peau d’un investisseur ou même du spéculateur : pour choisir de mettre votre argent dans tel titre plutôt que tel autre, vous avez des calculs de probabilité. Et ces calculs se fondent sur le fait que la situation future ressemble peu ou prou aux situations passées. Par contre, lorsque vous vous trouvez dans une situation inédite, pour laquelle il n’y a pas de précédent, vous n’avez aucun fondement sur lequel faire des prédictions. Dans ces conditions, personne ne prend de risque puisque personne ne peut le quantifier. On vend l’actif risqué et on sort l’argent de l’aire d’incertitude. Ainsi, les opérateurs vendent de la livre ou des titres britanniques pour acheter des valeurs « sûres » ou pour conserver la liquidité. C’est pourquoi les bourses baissent…
Il y a un deuxième phénomène : les spéculateurs avaient tous parié sur la victoire du « in », et pris des positions en conséquence. Et c’est comme à la roulette : quand on fait le mauvais pari, on perd ses mises. Beaucoup d’opérateurs de bourse ont donc perdu beaucoup d’argent et ils récupèrent les liquidités dont ils ont besoin en vendant des titres.
[Le Brexit en lui-même est bien sûr formidable, surtout pour l’effet d’exemple.]
Il casse un tabou, et remet le débat sur la table. L’appartenance à l’UE n’est plus un « destin », elle est remise dans les mains des hommes. Rien que pour cela, c’est un grand pas en avant.
[Mais si en plus il permet le démantèlement du Royaume-Uni sans tirer un seul coup de feu, ce serait le plus beau jour de ma vie. Toutes ces révoltes écossaises financées pour rien, toutes les aides aux Irlandais, toutes ces guerres, quant il fallait seulement laisser faire les Britanniques.]
Ne vous faites pas trop d’illusions… malgré les jérémiades, l’Ecosse et le Pays de Galles ont des liens trop étroits avec l’Angleterre pour que la séparation soit envisageable. Il ne faudrait pas oublier par ailleurs que l’Ecosse est, comme la Catalogne, souffre du syndrome de la province riche qui veut se séparer d’un pays pauvre pour ne pas avoir à partager le gâteau. Or, dans le cas de l’Ecosse le gâteau – les hydrocarbures de la mer du Nord – se réduit dangereusement d’année en année…
@ Ozymandias, Descartes
[En ce qui concerne le Brexit proprement dit, avez un éclairage pour ce qui concerne les Bourses qui jouent au yoyo ? De ma culture économique basique, je ne vois là que le résultat d’un doute passager, mais sachant que les négociations avec l’Union peuvent durer jusqu’à deux ans, ce serait un doute bien long et dangereux.]
Bonjour,
Si je peux mettre mon grain de sel, les bourses mondiales se sont cassées aussi violemment la figure vendredi parce qu’elles se demandent si le Brexit ne sonne pas le début de la fin pour l’UE et plus encore pour l’Euro. Or, la fin de l’UE c’est déjà une très mauvaise nouvelle pour des marchés financiers qui par ailleurs sont sous assistance respiratoire depuis 6 ans et la “crise grecque”; mais alors la fin de l’Euro, là, c’est “fin de partie”. Si cela se produit, la faillite de Lehmann Brothers apparaîtra comme une aimable plaisanterie et les sociétés occidentales vivront un choc à peu près similaire à celui qu’ont vécu celles du Bloc de l’Est quand le mur s’est effondré. Une page se tournera et une autre sera à écrire. Entre temps, bien évidemment, un cataclysme financier se sera produit (le fameux incinérateur à épargne de J. Sapir) et l’épargne mondiale, artificiellement inflatée par tant d’années de stimulation monétaire, fiscale et financière sera divisée par 2 et 3. Avec un peu de chance, on n’en mourra pas…
@ odp
[Si je peux mettre mon grain de sel, les bourses mondiales se sont cassées aussi violemment la figure vendredi parce qu’elles se demandent si le Brexit ne sonne pas le début de la fin pour l’UE et plus encore pour l’Euro.]
Je ne sais pas si les bourses ont une vision à aussi long terme. Mais vous avez raison : même si cela n’a aucun rapport, le Brexit a pu braquer les projecteurs sur l’UE et sur la zone Euro. Or, il y a des craquements sinistres du côté de l’Italie et de l’Espagne qui semblent indiquer qu’une nouvelle séquence « à la grecque » mais avec des pays beaucoup plus gros cette fois-ci pourrait être en préparation.
Les journalistes sont ils des idiots pour la plupart,ceux qui monopolisent les médias à la gloire de la pensée unique européiste?
La question mérite d’être posée au vu des réactions hystérico-débiles aprés le vote favorable au brexit,chez les gibus,en GB.
Revenons sur Terre ,en ce jour d’aprés..
La GB reste en Europe,le channel reste ouvert et des accords de libre échange auront de l’avenir entre la GB et les autres états dont la France.
N’est ce pas la force de la propagande européiste qui rend abrutis tous ces jeunes journaliste?
Pourquoi cette propagande aboutit elle à rendre les jours en même temps très imbus et aussi abruti?
N’est ce pas le force des idéologies mensongères qui rend les gens manipulables comme des pions décervelés?
En 1940,les anglais résistaient,tandis que nombre de français collaboraient avec les nazis eux aussi porteurs d’une idéologie mensongère basée sur le sentiment de supériorité.
En 2016,de nouveau les anglais nous montrent la voie de la confiance en soi,et des issues pour s’extirper des idéologies mensongères.Bravo,les anglais!
Nous ne savons pas ce qu’aurait fait la majorité des anglais si la Wehrmacht avait pu traverser la Manche, ne pas oublier que le parti nazi anglais avait pignon sur rue (et le père de JF Kennedy comme soutient).
Ce qui les rends abrutis c’est d’une part le manque de culture, historique notamment, et surtout, le manque d’imagination. Ils sont incapables d’inventer en leurs chemins intérieurs d’autres réalités possibles à confronter au réel extérieur ; ce manque d’imaginaire est un frein partout [même dans mon métier ou je vois des jeunes programmeurs privés d’autonomie intellectuelle] … jeux vidéo, QCM, chansons en anglais, normes, encadrement sécuritaire toute la modernité techno-propre y concoure.
Le populisme a aussi ce ressort propre au gens simples : comprendre et faire par soi-même.
@ Gérard Couvert
[Le populisme a aussi ce ressort propre au gens simples : comprendre et faire par soi-même.]
Je le pense aussi. Les « gens simples », pour reprendre votre terme, ne sont pas idiots. Ils aiment comprendre. La grandeur du PCF à son apogée a été bâtie en grande partie sur sa capacité pédagogique à inscrire l’expérience quotidienne des « gens simples » dans l’usine, dans le quartier, dans le centre commercial, dans une cohérence idéologique générale. On peut beaucoup discuter sur la portée réelle de cette idéologie, mais on ne peut pas lui contester sa cohérence. On n’y trouve pas de trace d’argument ad hoc, si courant de nos jours.
Cette idéologie était un puissant aiguillon pour l’imagination. Chaque communiste se sentait investi d’une “méthode” qui lui permettait d’analyser le réel et de tirer ses propres conclusions…
@Descartes
Une petite illustration pratique du mépris de classe avec le petit Gaspard Koenig qui tient des propos hallucinant au Figaro;
http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2016/06/24/31001-20160624ARTFIG00316-brexit-le-coup-de-gueule-de-gaspard-koenig.php
Et ça, c’est un agrégé de philosophie. Une illustration de l’effondrement du niveau scolaire sans doute. Le monsieur veut l’indépendance de Londres pour en faire un Boboland planétaire. Je me demande s’il sait qu’elle serait la durée de vie de son rêve en cas d’embargo des Anglais sur Londres. Il devrait relire Rousseau pour comprendre sa propre ignominie :
« Défiez-vous de ces cosmopolites qui vont chercher au loin dans leurs livres des devoirs qu’ils dédaignent de remplir autour d’eux. Tel philosophe aime les Tartares, pour être dispensé d’aimer ses voisins. »
Au train où vont les choses, je me demande si l’on ne va pas bientôt voir des hurluberlus proposer une “solution finale” pour les pauvres qui votent mal en Europe. Des chambres à gaz pour chômeurs, dernière solution pour un régime en perdition. En tout cas comme vos autres lecteurs je me régale de la situation, il va falloir que je me remette à mon blog, l’occasion est trop belle. L’énervement de Cohn Bendit, ou celui de cet eurolatre délirant de Jean-Marie Cavada confronté à Dupont Aignan c’était vraiment drôle. Il n’est pas habitué à la confrontation lui qui organisait des débats complètement déséquilibrés en faveur de ses idées lorsqu’il présentait la Marche du Siècle. Ils ont des réactions d’adolescents attardés qui se mettent en colère dès qu’on leur refuse quelque chose. On va devoir appeler Pascal le grand frère pour les remettre dans le droit chemin.
@ yann
[Une petite illustration pratique du mépris de classe avec le petit Gaspard Koenig qui tient des propos hallucinant au Figaro;]
Je ne vois pas trop dans cet article un « mépris de classe ». Mais d’un normalien agrégé de philosophie on attend qu’il fasse un peu plus en termes de réflexion que d’enfiler les poncifs à la mode comme d’autres enfilent des perles. Tiens, une pour la route : « La «souveraineté nationale», c’est un os à ronger lorsqu’on a perdu la seule souveraineté qui compte: celle de soi-même ». On croirait une maxime du Readers Digest.
[Au train où vont les choses, je me demande si l’on ne va pas bientôt voir des hurluberlus proposer une “solution finale” pour les pauvres qui votent mal en Europe. Des chambres à gaz pour chômeurs, dernière solution pour un régime en perdition.]
Sans aller à de telles extrémités, on ne peut que constater l’amorce d’un discours qui vise clairement à soustraire au regard démocratique le plus possible de décisions. Entre ceux qui voudraient faire revoter les britanniques – ce qui est aussi ridicule que d’exiger qu’on revote après une élection présidentielle – et ceux qui expliquent que le résultat n’a aucun sens parce que les électeurs « n’ont pas compris la question »…
[L’énervement de Cohn Bendit, ou celui de cet eurolatre délirant de Jean-Marie Cavada confronté à Dupont Aignan c’était vraiment drôle.]
Moi, ça ne me fait pas rire. Ces énervements traduisent une véritable incompréhension, une véritable coupure avec la réalité. Les élites ont toujours vécu dans un contexte protégé, mais il fut un temps où elles avaient au moins la curiosité de comprendre comment vivaient les autres. Aujourd’hui, Cavada et Cohn-Bendit parlent avec passion d’un monde qui n’existe pas, d’une Europe dispensant ses bienfaits aux pauvres comme aux riches. Ils n’ont aucune idée de ce que vivent aujourd’hui les couches populaires, pire, ça ne les intéresse même pas.
Le mépris de classe tient dans le fait qu’il cherche en quelque sorte à créer un monde, une structure qui permettrait aux gens de sa classe sociale de vivre coupés des gueux. C’est l’étape terminale, fantasmagorique d’une nation pour les riches, les supérieurs, les ariens, même s’ils ne se désignent pas eux même sous cette appellation. C’est de la pure haine de classe justement qui se transforme en racisme.
Pour ce qui est de la coupure des élites, l’explication provient à mon sens de l’évolution démographique et scolaire. Je crois qu’Emmanuel Todd a raison lorsqu’il explique que la hausse du niveau scolaire, s’il a accompagné dans un premier temps la démocratie par la généralisation de l’apprentissage de la lecture, a fini par recréer une nouvelle forme de stratification chez les très diplômés. Ils forment une nouvelle noblesse avec les diplômes en guise de légitimité. Autrefois les élites scolaires étaient peu nombreuses , elles ne pouvaient raisonnablement ne pas vivre en vase clos, et elles étaient obligées de se mélanger à la masse et donc de vivre avec elle. Ce qui signifiait que les problèmes de la masse étaient aussi le problème des élites. Cela n’empêchait pas des divergences de point de vue, ce qui est normal, mais en aucun cas le peuple n’était vu comme quantité négligeable. En revanche aujourd’hui les diplômés (ce que vous appelez en partie la classe moyenne même si elle est elle-même stratifiée en couche de niveau disparate) représentent entre 20 et 30 % de la masse de la population. Ils sont suffisamment nombreux pour vivre coupé du reste de la population, et ce d’autant plus que la différence de niveau de vie et le progrès technique permettent justement de se séparer de plus en plus facilement du reste de la population. On reste entre soi, ce qui produit cette espèce de coupure incroyable que l’on peut observer aujourd’hui.
L’espoir c’est que de toute manière la mondialisation et l’Europe finiront par nuire y compris aux plus diplômés et à la classe moyenne. On le voit déjà aux USA, le phénomène Trump est la marque de la perte de contrôle des classes moyennes par les 1 % d’en haut.
@ yann
[Le mépris de classe tient dans le fait qu’il cherche en quelque sorte à créer un monde, une structure qui permettrait aux gens de sa classe sociale de vivre coupés des gueux. C’est l’étape terminale, fantasmagorique d’une nation pour les riches, les supérieurs, les ariens, même s’ils ne se désignent pas eux même sous cette appellation. C’est de la pure haine de classe justement qui se transforme en racisme.]
Je n’avais pas pensé à cette approche. Je la trouve intéressante, notamment au vu des mouvements pour l’indépendance de régions riches – la Catalogne, la Flandre – dont le but pas toujours inavoué est de ne pas avoir à payer pour les régions plus pauvres.
[Pour ce qui est de la coupure des élites, l’explication provient à mon sens de l’évolution démographique et scolaire (…).]
C’est une explication intéressante, même si à mon avis elle est partielle. Je pense que la coupure tient surtout au fait que nous sommes passés à une société de croissance faible. Dans le contexte d’un gâteau qui ne croit plus que lentement, l’opposition entre les « classes moyennes » et les couches populaires devient antagonique. Contrairement à ce qui se passait pendant les « trente glorieuses », ou les uns pouvaient améliorer leur niveau de vie sans faire baisser celui des autres, aujourd’hui les « classes moyennes » ne peuvent conserver leur statut qu’en interdisant l’accès aux autres. Cet antagonisme larvé empêche toute « fraternisation » entre les classes. Chacune se replie sur elle-même. On voit même que la mixité sociale dans l’espace, si caractéristique de la France jusqu’aux années 1970 a pratiquement disparu.
[L’espoir c’est que de toute manière la mondialisation et l’Europe finiront par nuire y compris aux plus diplômés et à la classe moyenne. On le voit déjà aux USA, le phénomène Trump est la marque de la perte de contrôle des classes moyennes par les 1 % d’en haut.]
Je ne pense pas qu’on en soit là, mais il est vrai que certaines transformations commencent à menacer le statut des « classes moyennes ». Les barrières qui protègent leurs emplois de la délocalisation commencent à craquer… Cela étant, je fais confiance à la bourgeoisie pour continuer à rétrocéder suffisamment de valeur pour garder les « classes moyennes » de leur côté !
[“« La «souveraineté nationale», c’est un os à ronger lorsqu’on a perdu la seule souveraineté qui compte: celle de soi-même ». On croirait une maxime du Readers Digest.”]
Je pense que vous sous-estimez quelque peu la profondeur de cette maxime. Supposons, en effet, que Koenig soit le “souverain de lui-même”. Nous pourrions alors affirmer qu’il serait, en quelque sorte, le “Koenig” de lui-même. Supposons, à présent, qu’il ne soit plus ce “Koenig” de lui-même. Etant donné qu’il n’était, jusqu’à présent, le “Koenig” que de lui-même, il ne serait donc plus le “Koenig” de rien. D’où il suit qu’il ne serait plus “Koenig” du tout, et par conséquent, qu’il serait décédé. En ce sens, on peut donc bien affirmer qu’il aurait, effectivement perdu la “seule souveraineté qui compte”, celle de son âme sur son corps. Mais en quoi tout ceci ferait-il de la souveraineté nationale un “os à ronger”, me direz-vous ? Eh bien, c’est que la souveraineté nationale est elle-même un “Koenig”. Un “Koenig” sur un Koenig mort, réduit à l’état d’os à ronger. Un “Koenig”, donc, qui se ronge lui-même. CQFD.
@dsk
Roland Barthes n’aurait pas dit mieux…
Bonjour,
Je voudrais d’abord saluer le vote des Britanniques (et tout particulièrement des Anglais, qui ont voté à 53,4 % pour le Brexit, les Ecossais et les Nord-Irlandais ayant plutôt fait pencher la balance du côté du “in”; j’ai du mal à savoir si l’on peut oui ou non parler de “nation britannique” ou s’il faut envisager le Royaume-Uni comme une sorte de fédération, mais il me paraît significatif que l’ethnie dominante, numériquement et culturellement, ait aussi été la plus eurosceptique).
Maintenant, je m’interroge sur l’avenir de la démocratie dans les états d’Europe. Je ne crois pas que David Cameron reviendra sur le vote britannique, il est réglo et c’est tout à son honneur. Mais je trouve certains signes inquiétants:
– Parmi les enseignants, pour la plupart largement acquis à l’UE comme les autres membres des classes moyennes, j’ai entendu ces jours-ci des propos inquiétants: “la démocratie quand les gens ne sont pas éduqués (sous-entendu les eurosceptiques sont des incultes) c’est une connerie” ou encore “oui, le gouvernement peut demander son avis au peuple, mais il ne devrait pas être obligé de le suivre”. Il me semble gravissime d’entendre ce type de propos, parce qu’ils signifient que certains européistes sont prêts à piétiner la démocratie et l’assument ouvertement, et j’insiste parce que c’est ce qui me frappe, sans une once de mauvaise conscience ou de réticence. Les gens sont des couillons, passons-nous d’eux, privons-les du droit de vote, obligeons-les à fermer leur gueule. A part ça, bien sûr, ce sont les eurosceptiques qui sont des fascistes…
– Je suis outré que nos médias relaient complaisamment cette pétition signée par 1 million de Britanniques demandant un 2ème vote, sans s’interroger sur la signification d’une telle démarche. Très honnêtement, je ne crois pas un instant que les parlementaires britanniques donneront suite à cette demande, mais le simple fait que certains entament ce type de démarche est très inquiétant. On se souvient des Irlandais contraints de voter deux fois, ou de Cohn-Bendit appelant à un nouveau vote des Suisses suite à une votation (interdisant les minarets, je crois). Le principe de base de la démocratie, c’est accepter que quand on perd, on perd et c’est comme ça. Si le “in” l’avait emporté à 50,1 %, les européistes n’auraient certainement pas admis que leurs adversaires réclament un 2ème scrutin, ils auraient hurlé au “déni de démocratie”. Seulement voilà, le camp du Bien et du Beau a perdu, alors d’aucuns se croient autorisés à dire: “ça compte pour du beurre, faut rejouer”. Dans tous les cas, une partie non-négligeable de la société n’est manifestement plus d’accord pour jouer le jeu de la démocratie. Et cette partie de la population est composée des bienpensants, des tolérants, des gens ouverts. Et les autres sont les fascistes. Je suis stupéfait qu’une telle inversion des rôles ne frappe pas davantage quelques journalistes qui auraient conservé quelques vestiges de raison et de rigueur intellectuelle.
– Entendu hier Sylvie Goulard, eurodéputée centriste, déclarer à la radio, concernant le vote des plus de 60 ans en faveur du “out”: “on peut se demander s’il est normal que des gens qui n’ont plus que 10 ou 15 ans à vivre décident de l’avenir de leurs petits-enfants” (lesquels ont plutôt voté pour le “in”… si on laisse de côté le fait que l’abstention est quand même forte chez les jeunes). Je n’avais jamais entendu un argument d’une telle mauvaise foi: c’est vrai ça, on devrait retirer le droit de vote aux vieux, hein, puisqu’ils vont bientôt crever. Et puis aussi aux cancéreux, aux handicapés, aux cardiaques, tant qu’on y est! Mais j’ai pensé à vous, Descartes, en lisant le témoignage d’une Britannique âgée ayant opté pour le Brexit: “nous, les vieux, nous savons qu’il y a eu un monde avant l’UE, et ce monde n’était pas si mal. Les jeunes sont apathiques et apeurés”. Contrairement à ce que l’on entend partout, l’audace n’est pas le propre de la jeunesse… D’ailleurs, le seul argument d’une jeune Anglaise partisane du “in” était le suivant: “L’UE, je n’ai connu que ça depuis que je suis née”. Si l’on va par là, en 1990, tous les Sud-africains de 20 ans n’avaient connu que l’Apartheid, et il n’aurait rien fallu changé… On peut dire que c’est un argument brillant, qui en dit long sur la réflexion politique des jeunes. Mais on comprend dans ces conditions que les européistes aiment tant la jeunesse: manipulable, dotée d’une faible conscience historique, davantage sensible à la peur de l’avenir, une bonne clientèle somme toute.
Toujours est-il qu’on assiste à une contestation croissante des principes démocratiques, de la part des européistes, des zadistes (qui s’opposent au référendum sur l’aéroport de Notre-Dame des Landes, ce qui en dit long sur leurs chances de l’emporter), et de tout un tas d’individus, d’associations, de courants convaincus de détenir la Vérité, la Bien, le Beau. Un vent de sectarisme inquisiteur et antidémocratique est en train de souffler sur le Vieux Continent. Encore une exemple: une pétition pour demander l’indépendance Londres (favorable au “in”): on se croirait dans certains états d’Afrique, on a perdu alors on préfère faire sécession plutôt que d’accepter le verdict des urnes. Vous avez dit démocratie?
@ nationaliste-ethniciste
[Je voudrais d’abord saluer le vote des Britanniques (et tout particulièrement des Anglais, qui ont voté à 53,4 % pour le Brexit, les Ecossais et les Nord-Irlandais ayant plutôt fait pencher la balance du côté du “in”; j’ai du mal à savoir si l’on peut oui ou non parler de “nation britannique” ou s’il faut envisager le Royaume-Uni comme une sorte de fédération, mais il me paraît significatif que l’ethnie dominante, numériquement et culturellement, ait aussi été la plus eurosceptique).]
Parler des anglais comme une « ethnie » me parait une grosse exagération, d’autant plus que les gallois ont eux aussi voté pour le « out ». En Irlande du Nord on voit bien que le vote est très influencé par les divisions sectaires : les protestants ont vote le « out », les catholiques le « in », et ce vote s’explique pour des raisons évidentes. Il n’y a qu’en Ecosse ou l’on voit une vrai vote pour le « in ». Difficile de savoir si cela traduit un véritable attachement à l’UE où le simple esprit de contradiction européen…
[- Parmi les enseignants, pour la plupart largement acquis à l’UE comme les autres membres des classes moyennes, j’ai entendu ces jours-ci des propos inquiétants: “la démocratie quand les gens ne sont pas éduqués (sous-entendu les eurosceptiques sont des incultes) c’est une connerie” ou encore “oui, le gouvernement peut demander son avis au peuple, mais il ne devrait pas être obligé de le suivre”.]
C’est une forme de l’argument ad hoc que je dénonçais dans un précédent papier. Personne parmi nos élites n’est venu dire que le référendum sur la ratification du traité de Maastricht n’était pas significatif parce que les gens n’étaient pas éduqués ou qu’ils n’avaient pas compris la question. Mais lorsque le peuple devient un obstacle, alors les couches dominantes fabriquent une idéologie qui permet justifier le contournement du vote populaire. Tout ça n’est pas nouveau : on trouvait déjà pareils discours dans la Grèce antique.
[Il me semble gravissime d’entendre ce type de propos, parce qu’ils signifient que certains européistes sont prêts à piétiner la démocratie et l’assument ouvertement,]
Ca vous étonne ? Souvenez-vous des paroles de Juncker : « il n’y a pas de décision démocratique contre les traités européens ». Nous étions prévenus.
[- Je suis outré que nos médias relaient complaisamment cette pétition signée par 1 million de Britanniques demandant un 2ème vote, sans s’interroger sur la signification d’une telle démarche. Très honnêtement, je ne crois pas un instant que les parlementaires britanniques donneront suite à cette demande, mais le simple fait que certains entament ce type de démarche est très inquiétant.]
Et surtout idiot. Demain, les gens qui ne sont pas contents avec les résultats d’une élection présidentielle ou législative feront aussi une pétition pour demander qu’on revote. Pourquoi, si le peuple est incapable de décider s’il veut rester ou non dans l’UE sans revoter serait-il capable de choisir du premier coup ses gouvernants ?
[Dans tous les cas, une partie non-négligeable de la société n’est manifestement plus d’accord pour jouer le jeu de la démocratie. Et cette partie de la population est composée des bienpensants, des tolérants, des gens ouverts. Et les autres sont les fascistes. Je suis stupéfait qu’une telle inversion des rôles ne frappe pas davantage quelques journalistes qui auraient conservé quelques vestiges de raison et de rigueur intellectuelle.]
La bourgeoisie et les « classes moyennes » n’ont jamais eu un attachement démesuré pour la démocratie. Seulement, pendant la guerre froide cette « démocratie » était un drapeau dans le combat contre l’affreux communisme. Maintenant que le communisme n’est plus là, on peut se lâcher, et la référence démocratique perd chaque jour du terrain parallèlement à la montée d’un discours méprisant envers l’électorat populaire.
[- Entendu hier Sylvie Goulard, eurodéputée centriste, déclarer à la radio, concernant le vote des plus de 60 ans en faveur du “out”: “on peut se demander s’il est normal que des gens qui n’ont plus que 10 ou 15 ans à vivre décident de l’avenir de leurs petits-enfants” (lesquels ont plutôt voté pour le “in”… si on laisse de côté le fait que l’abstention est quand même forte chez les jeunes). Je n’avais jamais entendu un argument d’une telle mauvaise foi: c’est vrai ça, on devrait retirer le droit de vote aux vieux, hein, puisqu’ils vont bientôt crever.]
Mais pour l’observateur cet argument est un signe extraordinairement intéressant. Dans presque toutes les cultures, l’avis des anciens a toujours été valorisé. Dans les cultures anciennes, on retrouve presque partout des institutions du type « conseil des anciens » avec des fonctions législatives ou judiciaires et où seuls ceux qui ont une longue expérience sont admis. La Géroussie grecque est un bon exemple. A Rome, le cursus honorum établissait un âge minimum pour chacune des postes, pour réserver les plus élevés aux personnes les plus âgées. La logique étant qu’avec l’âge vient une connaissance des précédents et une expérience dont la société toute entière doit profiter.
Le commentaire de Sylvie Goulard – qu’on a écouté aussi venant d’autres quartiers – fait partie de ce mouvement contemporain qui prétend couper tout lien de la société avec son histoire. Pour ceux qui soutiennent cette position, le passé n’a rien à nous apprendre, et il vaut mieux se tourner vers l’avenir. Seulement, si le passé n’a rien à nous apprendre, alors l’expérience ne sert à rien. D’où ce jeunisme imbécile qui voudrait donner aux jeunes leur « juste place » dans les plus hautes fonctions. Or, si on regarde de plus près, cette sous-représentation est saine. Elle montre que la société est capable de valoriser l’expérience, et donc d’apprendre de ses erreurs. C’est entendu, les jeunes ont l’énergie et la créativité. Mais sans l’expérience, toute cette énergie risque d’être gâchée à refaire les mêmes erreurs que leurs prédécesseurs. Par ailleurs, le fait que les vieux, qui ont été témoins des destructions de la guerre et des sacrifices de la reconstruction, et qui devraient être les premiers sensibilités au principal bénéfice produit par l’UE avec lequel on nous rabat les oreilles en toute occasion, à savoir la paix, aient voté « out » montre à quel point même cet argument massue a cessé de fonctionner.
[Mais j’ai pensé à vous, Descartes, en lisant le témoignage d’une Britannique âgée ayant opté pour le Brexit: “nous, les vieux, nous savons qu’il y a eu un monde avant l’UE, et ce monde n’était pas si mal. Les jeunes sont apathiques et apeurés”.]
C’est un peu ce que je disais plus haut : la voix des vieux est la voix de l’expérience. Que les tranches d’âge les plus expérimentées aient été celles qui ont voté le plus pour le « out » – et on voit d’ailleurs le vote « out » monter linéairement avec l’âge – renforce plus qu’autre chose le message envoyé par les électeurs britanniques.
[Contrairement à ce que l’on entend partout, l’audace n’est pas le propre de la jeunesse…]
Au contraire. La jeunesse a vote beaucoup plus en fonction de ses propres intérêts, parce qu’elle a beaucoup plus à perdre. Les vieux peuvent se permettre le luxe de voter en fonction de convictions ou de l’idée qu’ils se font des intérêts de leurs enfants…
[D’ailleurs, le seul argument d’une jeune Anglaise partisane du “in” était le suivant: “L’UE, je n’ai connu que ça depuis que je suis née”. Si l’on va par là, en 1990, tous les Sud-africains de 20 ans n’avaient connu que l’Apartheid, et il n’aurait rien fallu changé… On peut dire que c’est un argument brillant, qui en dit long sur la réflexion politique des jeunes.]
Cet argument dit beaucoup surtout sur l’incapacité des jeunes à concevoir que le monde puisse être différent de ce qu’il est. Là encore on voit les ravages de la perte de repères historiques. On s’aperçoit que le fait de connaître l’histoire – même déformée sous forme de « roman national » – avait une vertu essentielle : nos chères têtes blondes apprenaient que les sociétés ne sont pas figées, et que tout peut être remis en question. Que les empires naissent, grandissent, puis meurent pour laisser la place à d’autres. Et qu’il n’y a pas de fatalité ou de prédestination dans cette affaire. Que l’histoire est d’abord œuvre humaine.
[Toujours est-il qu’on assiste à une contestation croissante des principes démocratiques, de la part des européistes, des zadistes (qui s’opposent au référendum sur l’aéroport de Notre-Dame des Landes, ce qui en dit long sur leurs chances de l’emporter), et de tout un tas d’individus, d’associations, de courants convaincus de détenir la Vérité, la Bien, le Beau. Un vent de sectarisme inquisiteur et antidémocratique est en train de souffler sur le Vieux Continent.]
Tout a fait. Il y a une multiplication de prophètes tous persuadés de détenir la vérité et tous prêts à envoyer ceux qui ne partagent leur position au bûcher. Face à ce déferlement, il faut défendre mordicus l’esprit français de tolérance, de curiosité, de politesse, de plaisir de discuter pour la discussion même.
@nationaliste-ethniciste
Entendu hier Sylvie Goulard, eurodéputée centriste, déclarer à la radio, concernant le vote des plus de 60 ans en faveur du “out”: “on peut se demander s’il est normal que des gens qui n’ont plus que 10 ou 15 ans à vivre décident de l’avenir de leurs petits-enfants”
C’est très drôle cette réflexion, parce que si effectivement on limitait le droit de vote des vieux le FN et les anti-européens seraient déjà au pouvoir en France. Mais peut-être qu’en France cette même personne voudrait limiter le droit de vote des jeunes cette fois pour que cela coïncide mieux avec ses intérêts. Mais cette personne pose en faite une excellente question même si son but est surtout de condamner un vote qui ne lui plaît pas. Le vieillissement du corps électoral est effectivement un problème. Emmanuel Todd a sous-entendu il y a peu que le vieillissement massif était effectivement un problème pour les démocraties. En effet de telles sociétés pourraient prendre démocratiquement des choix nuisibles aux jeunes dans l’intérêt des plus vieux se condamnant à terme à un déclin inéluctable. On pourrait résumer ça à plus d’aides aux vieux, moins d’allocations familiales. L’Allemagne actuelle est un peu l’exemple de ce à quoi cette évolution démographique pourrait nous mener. Avec en ligne de mire un effondrement démographique total.
Todd en parle à un moment dans cette réunion informelle :
https://www.youtube.com/watch?v=J6io9pnVLsc
Mais le paradoxe ici c’est qu’effectivement ce sont les vieux Britanniques qui ont finalement agi dans l’intérêt des jeunes à long terme. Même si ce n’était pas la raison de leur vote. L’histoire est farceuse parfois. On voit que la question est difficile. Je dirai que tout dépend de la culture des personnes et des peuples. Comme le dit Descartes il y a des cultures où l’âge est valorisé. Au Japon les vieux s’inquiètent du vieillissement et de l’avenir de leurs jeunes justement. Cependant dans une société ultra-individualiste les propos ici tenus sont cohérents avec l’ambiance culturelle du chacun pour soi. Dans de telles sociétés les vieux n’agissent que dans leurs intérêts, les jeunes aussi, c’est le struggle for life individualiste absolu. La mentalité des Français et l’esprit de solidarité sont-ils à ce point abîmés qu’il nous faille en arriver à vouloir limiter l’âge de votant dans l’intérêt de la jeunesse?
@ yann
[Le vieillissement du corps électoral est effectivement un problème. Emmanuel Todd a sous-entendu il y a peu que le vieillissement massif était effectivement un problème pour les démocraties. En effet de telles sociétés pourraient prendre démocratiquement des choix nuisibles aux jeunes dans l’intérêt des plus vieux se condamnant à terme à un déclin inéluctable.]
Je ne crois pas à cette hypothèse. Je pense que Todd fait une erreur fondamentale, celle qui consiste à traiter la « jeunesse » et la « vieillesse » comme si c’étaient deux groupes sociaux fermés, alors qu’il s’agit de deux périodes de la vie des mêmes individus. Les vieux conservent la mémoire des jeunes qu’ils étaient, les jeunes la conscience du fait qu’ils deviendront vieux. Une décision « dans l’intérêt des vieux » est aussi dans l’intérêt des vieux que les jeunes d’aujourd’hui deviendront un jour.
Vous noterez, comme je l’ai dit dans un autre commentaire, que par le passé la plupart des sociétés non seulement valorisaient l’opinion des vieux, mais qu’elles ont fait en sorte de leur réserver une part importante du pouvoir. Pourquoi croyez-vous que beaucoup de sociétés aient des « conseils d’anciens » sous différentes formes, des « anciens » des tribus africaines à nos sénateurs, en passant par les « Gérontes » grecs ? Parce qu’on sait depuis longtemps qu’avec l’âge vient l’expérience et le savoir. Une société gouvernée par des jeunes serait une société sans mémoire, et donc condamnée à refaire génération après génération les mêmes erreurs.
[On pourrait résumer ça à plus d’aides aux vieux, moins d’allocations familiales.]
Pourquoi ? Les vieux ont aussi des enfants et des petits enfants. Et l’expérience montre que souvent ils pensent aux intérêts des générations suivantes plutôt qu’à leurs propres intérêts. Le raisonnement de Todd transpose la « lutte des classes » pour créer une « lutte des âges ». Mais au risque de me répéter, il y a une très grosse différence tout simplement parce que si le prolétaire n’a aucune raison de devenir bourgeois avec le temps, une des rares choses dont on peut être absolument sûr est que le jeune d’aujourd’hui sera le vieux de demain… et aura des enfants et petits enfants qui seront alors jeunes. La chaîne intergénérationnelle créé une solidarité entre les âges qui n’existe pas entre les classes, et qui atténue l’égoïsme de chacun.
[Comme le dit Descartes il y a des cultures où l’âge est valorisé.]
Toutes, en fait. Pour qu’il y ait « culture », il faut qu’il y ait transmission. Et comment les vieux pourraient transmettre aux jeunes si leurs connaissances et leur expérience n’est pas valorisée ?
[Une décision « dans l’intérêt des vieux » est aussi dans l’intérêt des vieux que les jeunes d’aujourd’hui deviendront un jour.]
Si on en juge par les accomplissements de la génération du baby-boom, j’ai plus l’impression d’un « après moi le déluge ».
Ils ont eu une école excellente, le plein-emploi, un capital (financier et immobilier) qui n’a jamais été plus facile à acquérir et profitent d’un système de retraite sans précédent qui voit les retraités (des gens qui ne travaillent plus, donc qui ne travaillent pas) avoir un niveau vie supérieur aux actifs (ceux qui travaillent).
J’oubliais : aucun Français ne tuait des Français parce qu’ils étaient Français durant leurs 65 premières années.
Et personne n’allait passer sa retraite à l’étranger (« parce que m’voyez on se sent plus chez soi ») à dépenser les revenus que leur versent solidairement les travailleurs français et qui, en ces temps de crise, seraient bons de faire profiter à leur activité.
Comparons avec un jeune de 20 ans qui a suivi l’enseignement de plus en plus médiocre du système scolaire, qui va rentrer sur un marché de l’emploi de plus en plus pourri (ce qui est une performance vu qu’il est déjà très bas), ce qui ajouté au prix des actifs rend très compliqué la constitution d’un capital.
Et là j’oublie pas : qui va devoir profiter de la vie aux côtés des « chances pour la France » qui ne rêvent que de massacrer du babtou.
Dernier point : avant eux la France était un pays libre et indépendant. Après eux, on réfléchit à savoir si la France est toujours un Etat souverain ou une province de seconde zone d’un empire étranger (on ne sait d’ailleurs même pas bien lequel…).
Nous ne décidons plus de la plupart de nos lois, nous ne contrôlons plus nos frontières ni notre monnaie et nos forces armées pourraient être engagées dans un conflit sur décision étrangère.
Si la génération de ceux qui ont fait 68 avaient pu oublier de vivre, je doute que la défense des intérêts des jeunes d’aujourd’hui aurait pu être pire.
[Et l’expérience montre que souvent ils pensent aux intérêts des générations suivantes plutôt qu’à leurs propres intérêts.]
Pourcentage du NON au Référendum TCE 2005 : 18-24 (56%), 25-34 (55 %), 35-44 (61 %), 45-59 (62 %), 60-69 (44%), +70 (42 %).
(http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http%3A%2F%2Fwww.ipsos.fr%2FCanalIpsos%2Fpoll%2F8074.asp)
Les élections actuelles où ce sont les +65 ans qui figent la situation avec l’UMPS ?
Marx a écrit des trucs là-dessus ? Parce qu’après tout, à n’importe quel moment, la majorité de la population est constituée de parents, de grands-parents, d’arrière etc.
Donc si à chaque moment, la majorité de la population pense « aux intérêts des générations suivantes plutôt qu’à leurs propres intérêts », on peut oublier la lutte des classes ?
@ bip
[Si on en juge par les accomplissements de la génération du baby-boom, j’ai plus l’impression d’un « après moi le déluge ».]
Peut-être parce que c’est la première génération qui ait refusé de vieillir. C’est une génération qui est resté adolescente, refusant l’âge adulte et les responsabilités qui vont avec, et qui incluent de préparer l’arrivée des générations suivantes. Ecoutez Cohn-Bendit et vous verres un bon exemple de cette génération Peter Pan.
[Comparons avec un jeune de 20 ans qui a suivi l’enseignement de plus en plus médiocre du système scolaire, qui va rentrer sur un marché de l’emploi de plus en plus pourri (ce qui est une performance vu qu’il est déjà très bas), ce qui ajouté au prix des actifs rend très compliqué la constitution d’un capital.]
Mais pensez au jeune des « classes moyennes » qui pourra accéder aux bons emplois sans trop se fouler, puisqu’il n’aura pas à affronter la concurrence des enfants des couches populaires disqualifiés précisément par l’enseignement médiocre qu’ils auront reçu… Voyez-vous, lorsque les bobos de la génération du baby-boom ont cassé l’ascenseur social, c’était un acte de générosité : elle pensait à ses propres enfants…
[« Et l’expérience montre que souvent ils pensent aux intérêts des générations suivantes plutôt qu’à leurs propres intérêts ». Pourcentage du NON au Référendum TCE 2005 : 18-24 (56%), 25-34 (55 %), 35-44 (61 %), 45-59 (62 %), 60-69 (44%), +70 (42 %).]
Je pense que vous avez ici l’effet de la mémoire de la guerre plutôt qu’un égoïsme de génération. Les couches les plus âgées sont celles qui sont le plus sensibles à l’argument « l’Europe c’est la paix ». Il est d’ailleurs intéressant de noter que cet effet n’a pas joué en Grande Bretagne. Peut-être parce que le pays n’a pas été occupé ?
[Donc si à chaque moment, la majorité de la population pense « aux intérêts des générations suivantes plutôt qu’à leurs propres intérêts », on peut oublier la lutte des classes ?]
Pas vraiment : en général les génération suivantes appartiennent à la même classe que leurs géniteurs…
@ Descartes,
“Parler des anglais comme une « ethnie » me parait une grosse exagération”
Disons “peuple” si vous préférez, mais je ne vois pas bien ce qui empêche de considérer les Anglais “de souche” comme une ethnie de Grande-Bretagne…
“Face à ce déferlement, il faut défendre mordicus l’esprit français de tolérance, de curiosité, de politesse, de plaisir de discuter pour la discussion même.”
Ce que vous dites est intéressant parce que nous nous rejoignons largement sur le constat, mais nous n’en tirons pas du tout les mêmes conséquences. Je ne comprends pas l’intérêt de vouloir poursuivre vainement le débat avec des gens qui non seulement refusent d’écouter, mais sont prêts à priver les autres de leurs droits politiques (car rejeter le verdict des urnes revient à ça) voire à user de la violence pour imposer leurs convictions même quand ils sont minoritaires (vous citez les zadistes plus haut). Discuter est en passe de devenir une perte de temps avec des gens prêts à la guerre civile. Il arrive un moment, malheureusement, où il faut répondre à la violence par la violence sous peine de disparaître par faiblesse. Et s’ils veulent la guerre, eh bien ils l’auront… Après tout la France, y compris révolutionnaire, a une solide tradition de mise au pas brutale des minoritaires agités.
Pour en revenir au Brexit, je commence même à me demander s’il aura lieu, tant la pression est forte.
@ nationaliste-ethniciste
[Disons “peuple” si vous préférez, mais je ne vois pas bien ce qui empêche de considérer les Anglais “de souche” comme une ethnie de Grande-Bretagne…]
Le fait que le terme « ethnie » désigne en général des gens qui partagent des caractères physiques héréditaires. Le peuple anglais n’est pas ethniquement homogène.
[Ce que vous dites est intéressant parce que nous nous rejoignons largement sur le constat, (…)]
C’est déjà ça…
[mais nous n’en tirons pas du tout les mêmes conséquences. Je ne comprends pas l’intérêt de vouloir poursuivre vainement le débat avec des gens qui non seulement refusent d’écouter, mais sont prêts à priver les autres de leurs droits politiques (car rejeter le verdict des urnes revient à ça) voire à user de la violence pour imposer leurs convictions même quand ils sont minoritaires (vous citez les zadistes plus haut).]
Vous direz que c’est encore mon optimisme méthodologique qui perce… mais je vois deux raisons pour le faire. Le premier, c’est qu’en essayant de poursuivre le débat on peut mieux comprendre comment ces gens fonctionnent, quel est leur univers mental, quelles sont leurs références, et donc de trouver les meilleurs arguments pour les faire changer d’avis… ou les meilleures façons de les réprimer si on en arrive là. Le deuxième est que ces gens étant des êtres humains, ils sont doués de raison. Et il faut parier sur la raison. Même si chacun de nous arrive à faire ouvrir les yeux à l’un d’eux, c’est déjà une énorme victoire.
[Discuter est en passe de devenir une perte de temps avec des gens prêts à la guerre civile.]
C’est difficile, c’est vrai. Nous vivons un âge de sectarisme. Mais ce n’est pas une raison pour baisser les bras.
[Il arrive un moment, malheureusement, où il faut répondre à la violence par la violence sous peine de disparaître par faiblesse. Et s’ils veulent la guerre, eh bien ils l’auront… Après tout la France, y compris révolutionnaire, a une solide tradition de mise au pas brutale des minoritaires agités.]
Je ne crois pas qu’on puisse m’accuser de faiblesse ou de complaisance dans ce domaine. Je pense qu’il faut toujours essayer de discuter. Mais à ceux qui ne respectent pas les règles du débat public et prétendent s’imposer par la violence, la société doit répondre par la force sans la moindre hésitation. Sur ce point, nous sommes parfaitement d’accord.
[Pour en revenir au Brexit, je commence même à me demander s’il aura lieu, tant la pression est forte.]
Je vois surtout une autre difficulté : en votant le Brexit, nos amis anglais ont décidé de faire quelque chose de nouveau, quelque chose qui n’a jamais été faite avant. Or, pour faire du nouveau il faut de la créativité, de l’enthousiasme… et un leader capable de mobiliser ces qualités. Le problème est que le camp du Brexit n’a pas véritablement un homme d’Etat à sa tête, pas d’équipes, pas d’experts. C’est un peu le problème que j’évoquais dans l’un de mes commentaires : nous avons dans plusieurs pays d’Europe des mouvements de colère populaire puissants, mais pas de personnalités ou d’organisations capables de canaliser cette colère et en faire une force positive. Nos « populistes » se contentent en général de se laisser porter par la vague.
Si j’ai bien compris, Boris Johnson a déserté les médias et passe son temps à réunir des équipes. S’il arrive à monter une véritable équipe et à bâtir une dynamique, il pourrait être un nouveau Churchill – qui, rappelons-le, était en politique un affreux opportuniste qui a changé plusieurs fois de parti…
J’étais en train de réfléchir à ce que vous disiez de la haine de classe, et je pensais à ce salmigondis qu’on nous ressert sur la nécessaire union, collaboration dans l’intérêt de tous pour la plus grande gloire de la machine UE;
J’ai pensé alors à la fable dont Tite Live parle : Menenius Agrippa est allé raconté à la plèbe qui avait fait sécession sur l’Aventin la petite histoire suivante:
“« les membres du corps humain, voyant que l’estomac restait oisif, séparèrent leur cause de la sienne, et lui refusèrent leur office. Mais cette conspiration les fit bientôt tomber eux-mêmes en langueur ; ils comprirent alors que l’estomac distribuait à chacun d’eux la nourriture qu’il avait reçue, et rentrèrent en grâce avec lui. Ainsi le sénat et le peuple, qui sont comme un seul corps, périssent par la désunion, et vivent pleins de force par la concorde ». Les plébéïens ont renoncé à leur sécession et sont allés faire corps avec le Sénat.
Bref, l’apologue qu’on nous ressert à chaque fois.
J’ai donc essayé sur le net de voir la référence exacte, car moi j’avais traduit en 5ème le passage du de “viris illustribus” de l’abbé Lhomond qui rapporte cette histoire et je me souviens m’être insurgée (j’étais la seule fille d’ouvrier dans cette classe de latinistes dans ces années 50) contre ce discours, disant qu’il n’aurait pas fallu redescendre mais partager les richesses et libérer les esclaves!
Or en cherchant j’ai trouvé ceci, c’est une “fiche” à l’usage des enseignants qui traite (pour les Terminales de la fable de la Fontaine les membres et l’estomac)
Je vous laisse la joie de découvrir le troisième “objectif pédagogique” proposé aux enseignants ce qui permet de comprendre le degré de neutralité qui “sort” des prescriptions pédagogiques:
– Susciter l’intérêt des élèves pour l’Histoire romaine.
-Les amener à réfléchir sur l’aspect universel des faits historiques.
-Adapter cet apologue à l’ouverture européenne actuelle.
Outre, le vocabulaire technocratique et pédacogicon, le caractère piteux de la vision de ce qu’est le rapport aux textes, je suis ébahie du rapport à l’Europe qui ne saurait être qu’actuelle et surtout ouverte pour les têtes blondes.
Bref, rien de nouveau sous le soleil depuis la république Romaine, les mêmes recettes,la même tambouille, l’Europe à toutes les sauces même où on ne l’attend pas, pour faire dire aux textes ce qu’ils ne disent pas.
Ils sont en train de faire descendre le Brexit de l’Aventin, en inventant l’inflation de référendum, la partition sauvage des régionalismes,le corps politique numérique, le vote par clic, l’atomisation et le pays des fractales !!!
@ Baruch
[Je vous laisse la joie de découvrir le troisième “objectif pédagogique” proposé aux enseignants ce qui permet de comprendre le degré de neutralité qui “sort” des prescriptions pédagogiques: (…) -Adapter cet apologue à l’ouverture européenne actuelle.]
Encore un exemple – terrifiant – de la manière dont la neutralité de l’éducation nationale – et plus largement de la fonction publique – est foulée aux pieds sur la question européenne. Un lecteur assidu m’avait aussi envoyé une affichette d’invitation à une conférence organisée dans les locaux d’un ministère pour permettre aux fonctionnaires « de mieux connaître les apports de l’Union européenne », conférence organisée quelques jours avant les élections européennes. Une coïncidence, certainement.
Dans un cas comme dans l’autre, on prétend nous faire croire que les questions sur le fonctionnement de l’UE ne sont pas politiques, mais morales. On parle de l’UE comme on parlerait de l’institution familiale.
oui, enfin… la fiche date de 2007 quand même !
http://www.ac-strasbourg.fr/fileadmin/pedagogie/lettres/APOLOGUE-1.pdf
“la neutralité de l’éducation nationale – et plus largement de la fonction publique – est foulée aux pieds sur la question européenne”?????
Les individus des 28 Etats membres sont citoyens européens, ils votent pour un parlement européen, cela ne me parait pas aberrant qu’ils en apprennent les institutions à l’école. C’est simplement du civisme.
Vous êtes incroyables sur ce blog: vous vous félicitez du vote des glaouich, sans réaliser qu’ils sont à mille lieues de vos vos intérêts. Quand vous prônez le partage des richesses (souvenez-vous de vos diatribes lors de la crise grecque), les godons ont juste dit qu’ils ne voulaient rien partager. Tant mieux pour eux ou tant pis, c’est leur affaire, bon vent!
@ Françoise
[oui, enfin… la fiche date de 2007 quand même !]
Vous pensez qu’entre 2007 et 2016 la manière dont la construction européenne est présentée à l’école de la République a changé ? Personnellement, j’en doute fort. Mais si vous avez un exemple qui montre que les choses ont changé, j’aimerais bien le connaître…
[“la neutralité de l’éducation nationale – et plus largement de la fonction publique – est foulée aux pieds sur la question européenne”?????]
Oui madame. La neutralité de l’éducation nationale implique que celle-ci ne prenne jamais position dans une question d’opinion. L’école est là pour transmettre des savoirs, pas pour faire la propagande de telle ou telle opinion. Elle a pour seule fonction de transmettre des savoirs, et lorsqu’il y a débat, de faire connaître les termes du débat sans prendre parti. Or, ce n’est pas ce qui se passe dans la pratique sur la question européenne et la fiche en question le montre : il s’agit, à travers d’une fable, de montrer que la construction européenne est du côté du « bien ».
[Les individus des 28 Etats membres sont citoyens européens, ils votent pour un parlement européen, cela ne me parait pas aberrant qu’ils en apprennent les institutions à l’école. C’est simplement du civisme.]
Moi non plus. On peut parfaitement enseigner les institutions européennes à l’école. Mais ce n’est pas le débat ici. Il ne s’agit pas d’expliquer comment l’Europe fonctionne, mais de faire entrer dans la tête des élèves que l’Europe est un « bien ». Voici ce que dit le paragraphe « européen » de la fiche :
« Réécrivez l’apologue en tenant compte de notre actualité historique et politique. Quel rôle l’EUROPE a-t-elle à jouer ? Vous pouvez imaginer le discours d’un député européen qui tente de convaincre les récalcitrants. Ou vous pouvez écrire une fable « à la manière de La Fontaine »…
Exemple
L’Europe, morcelée, ne pouvait plus lutter
Bientôt par l’Amérique, elle serait broyée.
Pour parer au désastre, il lui vint une idée… »
Il ne s’agit pas ici d’expliquer le fonctionnement des institutions, mais d’instiller dans le cerveau de nos chères têtes blondes l’idée que l’Europe est un « bien », que sans elle nous serions « broyés par l’Amérique », que l’Europe est notre mère nourricière comme l’estomac dans l’apologue. C’est de la propagande, pure et simple.
Que cela vous plaise ou non, le rôle et l’utilité de l’UE sont matières à opinion. Ce ne sont pas des connaissances. Et l’école n’a pas à se mêler des questions d’opinion. Si elle le fait, elle viole le principe de neutralité, qui est le fondement sur lequel les parents lui font confiance. En tant que parent, je n’ai pas envie que mes enfants soient endoctrinés.
[Vous êtes incroyables sur ce blog:]
C’est ce qui rend ce blog aussi attractif. D’ailleurs, vous même vous revenez toujours…
[vous vous félicitez du vote des glaouich, sans réaliser qu’ils sont à mille lieues de vos vos intérêts.]
Je n’a rien compris. C’est qui les « glaouich » ?
[Quand vous prônez le partage des richesses (souvenez-vous de vos diatribes lors de la crise grecque),]
Pardon, mais… quand ais-je « prôné le partage des richesses » ? Comme d’habitude, vous vous faites des ennemis en carton pour mieux les combattre ensuite. J’ai écrit ici exactement le contraire sur l’affaire grecque: que les allemands avaient parfaitement raison de « ne pas partager », puisque le propre d’un Etat est de poursuivre ses intérêts. C’est précisément pour cette raison que je ne crois pas et que je n’ai jamais cru à une « nation européenne » ou à une construction fédérale. Une telle construction n’est possible que si les membres sont prêts à partager, et ce ne sera jamais le cas.
[les godons ont juste dit qu’ils ne voulaient rien partager.]
Ils n’ont rien dit de tel. Ce qu’ils ont dit, c’est qu’ils préféraient décider souverainement ce qu’ils voulaient ou non partager et avec qui, et qu’ils n’avaient pas envie que Bruxelles leur dicte ce qu’ils devaient faire. Et ils ont parfaitement raison. Nous devrions faire de même.
[Tant mieux pour eux ou tant pis, c’est leur affaire, bon vent!]
Et bien, pas tout a fait. Pendant des années on nous a expliqué que la construction européenne était « irréversible ». Les britanniques ont décidé de faire l’expérience contraire. Et on peut toujours apprendre de l’expérience des autres, non ?
@ Descartes
Je suis moi-même scandalisé par la propagande européiste qu’on trouve dans les manuels scolaires d’Histoire, et je peux effectivement vous confirmer que rien n’a changé de ce côté si ce n’est en pire, j’en ai encore eu l’illustration récemment. Cependant je m’interroge sur les limites du devoir de neutralité qui s’impose à l’Ecole.
En ce qui me concerne je suis en effet partisan d’une école républicaine qui cherche à transmettre, en plus des savoirs, le goût de la vertu civique et l’attachement à la patrie. Pensez-vous donc que le projet civique de Lavisse qu’il s’exprimait, dans le style de l’époque, en disant que l’enseignement de l’histoire devait faire du jeune français “un citoyen pénétré de ses devoirs et un soldat qui aime son fusil” est simplement assimilable à de la propagande, contraire à l’ambition de l’école républicaine ?
@ Carnot
[Cependant je m’interroge sur les limites du devoir de neutralité qui s’impose à l’Ecole. En ce qui me concerne je suis en effet partisan d’une école républicaine qui cherche à transmettre, en plus des savoirs, le goût de la vertu civique et l’attachement à la patrie.]
Ce n’est pas contradictoire. La réponse à ce dilemme se trouve dans la magnifique « lettre aux instituteurs » adressée par Jules Ferry, alors ministre de l’instruction publique, le 27 novembre 1883. Voici comment la question était abordée alors :
« Si parfois vous étiez embarrassé pour savoir jusqu’où il vous est permis d’aller dans votre enseignement moral, voici une règle pratique à laquelle vous pourrez vous tenir : avant de proposer à vos élèves un précepte, une maxime quelconque, demandez-vous s’il se trouve, à votre connaissance, un seul honnête homme qui puisse être froissé de ce que vous allez dire. Demandez-vous si un père de famille, je dis un seul, présent à votre classe et vous écoutant, pourrait de bonne foi refuser son assentiment à ce qu’il vous entendrait dire. Si oui, abstenez-vous de le dire ; sinon, parlez hardiment, car ce que vous allez communiquer à l’enfant, ce n’est pas votre propre sagesse, c’est la sagesse du genre humain, c’est une de ces idées d’ordre universel que plusieurs siècles de civilisation ont fait entrer dans le patrimoine de l’humanité. Si étroit que vous semble, peut-être, un cercle d’action ainsi tracé, faites-vous un devoir d’honneur de n’en jamais sortir, restez en deçà de cette limite plutôt que de vous exposer à la franchir : vous ne toucherez jamais avec trop de scrupule à cette chose délicate et sacrée, qui est la conscience de l’enfant. »
Pour le dire autrement, l’école doit bien enseigner le goût de la vertu civique et l’attachement à la patrie. Mais elle doit le faire dans des termes qui ne puissent « froisser un seul honnête homme ». La neutralité de l’école n’implique pas qu’elle ne puisse pas enseigner une morale, mais implique que cette morale acceptable par tous, ou du moins, par tous les « honnêtes hommes ». Et il ne s’agit pas là d’une règle de principe, mais d’un raisonnement purement pragmatique : c’est la condition sine qua non pour que les parents confient leurs enfants à l’instituteur. Quel parent mettrait son enfant à l’école avec confiance sachant que l’instituteur peut enseigner à son enfant une morale qui est pour lui inacceptable ?
[Pensez-vous donc que le projet civique de Lavisse qu’il s’exprimait, dans le style de l’époque, en disant que l’enseignement de l’histoire devait faire du jeune français “un citoyen pénétré de ses devoirs et un soldat qui aime son fusil” est simplement assimilable à de la propagande, contraire à l’ambition de l’école républicaine ?]
Non, parce que ce projet civique était un projet partagé. Lavisse n’entendait pas faire régler à l’école un conflit politique dans la société. Il ne s’agissait pas pour lui de faire triompher une vision politique contre une autre, mais de transmettre aux générations naissantes un très large consensus social. Et la meilleure preuve que ce consensus était large est qu’il a fonctionné : les parents ont fait confiance à l’école, ils n’ont pas craint dans leur immense majorité, que l’école endoctrine leurs enfants dans des principes qui n’étaient pas les leurs.
Lorsque je défends la neutralité de l’école, je ne me fais pas le défenseur d’un relativisme intégral. Il y a des principes qui sont nécessaires au fonctionnement de notre société, et ces principes doivent être enseignés. Mais justement parce que ces principes sont nécessaires, ils sont généralement consensuels et considérés comme faisant partie « sagesse du genre humain, de ces idées d’ordre universel que plusieurs siècles de civilisation ont fait entrer dans le patrimoine de l’humanité ».
@ Descartes
Merci pour cette citation magnifique, si j’avais déjà entendu parler de ce texte je n’avais jamais pris la peine d’aller le lire et c’était un grand tort, c’est en effet particulièrement juste et fin.
[Lavisse n’entendait pas faire régler à l’école un conflit politique dans la société. Il ne s’agissait pas pour lui de faire triompher une vision politique contre une autre, mais de transmettre aux générations naissantes un très large consensus social]
Oui je comprends, mais du coup puisqu’il faut bien constater même si je le déplore que l’attachement à la patrie, par exemple, est loin de faire autant consensus qu’à l’époque de Lavisse, cela entraîne-t-il pour vous que l’école républicaine au XXIe siècle devrait adopter une position plus “tiède” en la matière ? En ce qui me concerne j’aurais tendance à penser qu’au-delà des fluctuations du consensus social certaines valeurs sont inscrites dans nos institutions comme les fondements mêmes de notre vie en société (et notamment dans notre Constitution) ce qui justifie que l’école en fasse la promotion, même si elle doit être prudente sur sa façon de le faire afin de ne pas tomber dans la propagande.
Je change de sujet pour en revenir à un autre que nous avions abordé il y a quelque temps, je viens de tomber sur très bonne tribune contre la CEDH d’un groupe de hauts fonctionnaires anonymes :
http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2016/06/21/31001-20160621ARTFIG00149-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme-pourquoi-en-sortir-est-un-imperatif-democratique.php
Je suis ravi de constater que le Brexit semble avoir servi d’aiguillon à certains parmi nos nombreux hauts fonctionnaires qui partagent notre défiance vis-à-vis de la “construction européenne”. D’ailleurs c’est dommage qu’ils ne détaillent pas mais ils semblent partager mon avis sur la récente décision du Conseil d’Etat sur le transfert de gamètes.
Allez messieurs les Anglais, encore un effort pour être souverainistes et feu sur la CEDH !
La fiche date de 2007: dire que par cette fiche (qui d’ailleurs n’est pas le programme officiel de l’Education Nationale mais une piste) “Ils sont en train de faire descendre le Brexit de l’Aventin” est, au mieux, une malhonnêteté intellectuelle.
Vous pouvez dénoncer la morale du bien ou du mal, je n’ai pas bien compris pourquoi ce qui s’applique à la France ne s’applique pas à l’Europe puisque les valeurs européennes sont rassemblées dans une charte ratifiée par les Etats membres qui ont voulu s’unir après les guerres. Et ce n’est pas une opinion mais des faits historiques.
Avec un tel discours, il ne faudrait plus apprendre les fables de La Fontaine, ou les proverbes, parce qu’il y aurait trop de morale?
Le partage des richesses, c’est le fondement du communisme, que vous avez certes renié, sans avoir abandonné la “lutte des classes”… Les Anglais (glaouich, godons je ne sais encore…, bref, nos meilleurs ennemis) se fichent éperdument des autres, c’est conforme à votre morale ça?
“Pendant des années on nous a expliqué que la construction européenne était « irréversible »”
Qui est ce ON à part un c…? Vous confondez encore une fois UE et zone euro. On peut très bien sortir de l’UE (art 50) mais pas de la zone euro (à part en sortant de l’UE mais vous et la Miss Marine ne l’avez pas encore bien saisi)
@ Carnot
[Merci pour cette citation magnifique, si j’avais déjà entendu parler de ce texte je n’avais jamais pris la peine d’aller le lire et c’était un grand tort, c’est en effet particulièrement juste et fin.]
Il faut dire qu’à l’époque, on savait écrire une circulaire…
[Oui je comprends, mais du coup puisqu’il faut bien constater même si je le déplore que l’attachement à la patrie, par exemple, est loin de faire autant consensus qu’à l’époque de Lavisse, cela entraîne-t-il pour vous que l’école républicaine au XXIe siècle devrait adopter une position plus “tiède” en la matière ?]
Pas nécessairement plus tiède, mais certainement plus conforme aux sensibilités actuelles. L’école ne pourrait pas aujourd’hui utiliser le vocabulaire et l’imaginaire de Lavisse pour parler de l’attachement à la Patrie sans « froisser » certains parents, et donc sans compromettre sa neutralité. Je peux regretter certaines transformations de la société, mais je ne peux pas faire comme si elles n’existaient pas. Il y a des combats politiques à mener sur les questions de l’attachement à la Patrie, mais l’école n’est pas le lieu approprié pour le faire.
[En ce qui me concerne j’aurais tendance à penser qu’au-delà des fluctuations du consensus social certaines valeurs sont inscrites dans nos institutions comme les fondements mêmes de notre vie en société (et notamment dans notre Constitution) ce qui justifie que l’école en fasse la promotion, même si elle doit être prudente sur sa façon de le faire afin de ne pas tomber dans la propagande.]
Si ces valeurs sont « les fondements mêmes de notre vie en société », alors elles ne devraient « froisser » personne, même lorsqu’elles ne sont pas consensuelles. Le patriotisme ne prend certainement pas aujourd’hui les mêmes formes que sous la IIIème République, mais il reste une valeur cardinale, et on le voit bien lorsqu’une crise survient.
[Je suis ravi de constater que le Brexit semble avoir servi d’aiguillon à certains parmi nos nombreux hauts fonctionnaires qui partagent notre défiance vis-à-vis de la “construction européenne”. D’ailleurs c’est dommage qu’ils ne détaillent pas mais ils semblent partager mon avis sur la récente décision du Conseil d’Etat sur le transfert de gamètes.]
J’en suis ravi aussi !
@ Françoise
[La fiche date de 2007: dire que par cette fiche (qui d’ailleurs n’est pas le programme officiel de l’Education Nationale mais une piste) “Ils sont en train de faire descendre le Brexit de l’Aventin” est, au mieux, une malhonnêteté intellectuelle.]
Possible. Mais ce n’est pas ce que dit Baruch. Relisez son texte. Il parle d’abord de la fiche, qu’il commente, et ensuite en fin de commentaire il écrit : « Ils sont en train de faire descendre le Brexit de l’Aventin, en inventant l’inflation de référendum, la partition sauvage des régionalismes, le corps politique numérique, le vote par clic, l’atomisation et le pays des fractales !!! ». Il est clair que cette formule s’applique non pas à la fiche – puisque celle-ci ne contient rien sur « l’inflation de référendum, la partition sauvage des nationalismes », etc. mais au discours des médias sur le Brexit.
Comme d’habitude, vous ne savez échanger autrement qu’en agressant votre interlocuteur. A supposer même que Baruch ait tort, rien ne vous permet de l’attribuer à la « malhonnêteté intellectuelle » (au mieux !) plutôt qu’à une erreur commise de bonne foi.
[Vous pouvez dénoncer la morale du bien ou du mal,]
Pas vraiment. La morale étant précisément « la science du bien et du mal », dénoncer la morale du bien et du mal est une impossibilité logique.
[je n’ai pas bien compris pourquoi ce qui s’applique à la France ne s’applique pas à l’Europe puisque les valeurs européennes sont rassemblées dans une charte ratifiée par les Etats membres qui ont voulu s’unir après les guerres. Et ce n’est pas une opinion mais des faits historiques.]
Que les valeurs européennes soient rassemblées dans une charte ratifiée par les Etats est un fait historique. Que ces Etats « aient voulu s’unir après les guerres », c’est déjà une interprétation qui ne fait pas l’unanimité. Mais il ne s’agit pas ici des « valeurs européennes », mais du jugement qu’on peut avoir sur la construction européenne. Et ce jugement ne fait pas aujourd’hui l’objet d’un consensus social.
[Avec un tel discours, il ne faudrait plus apprendre les fables de La Fontaine, ou les proverbes, parce qu’il y aurait trop de morale ?]
Pas du tout. La morale des fables de La Fontaine ou des proverbes est parfaitement consensuelle. Vous ne trouverez pas un seul parent qui se sente « froissé » par le fait que l’école enseigne cette morale à son enfant. Or, c’est là le point fondamental : l’école étant une institution de l’Etat, sa neutralité implique qu’elle ne prenne pas parti dans un débat d’opinion qui divise la société, puisqu’elle est tenue au respect de toutes les opinions. Beaucoup de parents pensent que la construction européenne est un désastre. L’école ne peut donc pas enseigner le contraire. La seule morale que l’école peut enseigner est celle qui est acceptable par tous.
[Le partage des richesses, c’est le fondement du communisme,]
Ah bon ? Pourriez-vous m’indiquer un seul texte de Marx où « fonde » le communisme sur « le partage des richesses » ? Je crois que vous confondez Marx et Jesus… Non, le communisme est fondé sur la fin de l’exploitation du travail humain – ce qui suppose que chacun dispose librement de la valeur produite par son travail. Le « partage » ne fait pas partie de la spécification.
[que vous avez certes renié, sans avoir abandonné la “lutte des classes”…]
Je n’ai jamais « renié » quoi que ce soit. Encore une fois, vous ne savez échanger sur un autre mode que l’agression…
[Les Anglais (glaouich, godons je ne sais encore…, bref, nos meilleurs ennemis) se fichent éperdument des autres, c’est conforme à votre morale ça?]
Dans cette affaire, la morale n’intervient pas. Le Brexit est une décision politique, et la politique est par essence amorale. « Salus populo suprema lex esto ».
[« Pendant des années on nous a expliqué que la construction européenne était « irréversible » ». Qui est ce ON à part un c…? Vous confondez encore une fois UE et zone euro.]
Pas du tout. Figurez vous qu’il y a beaucoup de c… pour présenter la construction européenne comme « irréversible ». C’est du moins ce qu’écrivent les chercheurs de la FONDAPOL (Fondation pour l’innovation politique) Alain LAQUIEZE et Anne PAYNOT, dans un rapport intitulé « L’Union Européenne tend-t-elle à devenir un Etat ?». Voici quelques extraits : « l’édification de l’Europe unie est présentée généralement comme un processus à la fois réaliste et original, ainsi qu’irréversible dans le sens de l’intégration » (p 21), « La construction européenne apparaît également, depuis ses débuts, comme un processus inexorable et irréversible » (p 24). Faut croire qu’il y a beaucoup de c…, selon la FONDAPOL…
[On peut très bien sortir de l’UE (art 50) mais pas de la zone euro (à part en sortant de l’UE mais vous et la Miss Marine ne l’avez pas encore bien saisi)]
Du point de vue juridique, c’est vrai. Mais on est ici dans le domaine politique. Et dans le domaine politique, tout se négocie. Si la France annonce à ses partenaires qu’elle à l’intention de rétablir le Franc et de ne pas appliquer les dispositions des traités concernant la monnaie commune, on ne va pas nous envoyer les chars pour nous faire changer d’avis. Il y aura une négociation, et on verra le résultat. Le résultat sera peut-être l’expulsion de l’UE, ou des mesures de rétorsion… ou peut-être une modification des traités pour permettre cette sortie. Difficile à dire. Cela dépendra des rapports de force et de la volonté des uns ou des autres. C’est ça que moi, et peut-être la Miss Marine, avons compris…
Je vous rappelle à ce propos les paroles de De Gaulle :
– Alain Peyrefitte : Le traité de Rome n’a rien prévu pour qu’un de ses membres le quitte.
– De Gaulle : C’est de la rigolade ! Vous avez déjà vu un grand pays s’engager à rester couillonné, sous prétexte qu’un traité n’a rien prévu pour le cas où il serait couillonné ? Non. Quand on est couillonné, on dit : « Je suis couillonné. Eh bien, voilà, je fous le camp ! » Ce sont des histoires de juristes et de diplomates, tout ça. »
(Alain Peyrefitte, C’était De Gaulle, Fayard, tome 2, page 267.)
@Descartes (re-bonjour à vous), vous dites :
> Et dans le domaine politique, tout se négocie. Si la France annonce à ses partenaires qu’elle à l’intention de rétablir le Franc et de ne pas appliquer les dispositions des traités concernant la monnaie commune, on ne va pas nous envoyer les chars pour nous faire changer d’avis. Il y aura une négociation, et on verra le résultat.
Est-ce que vous validez par cela la proposition mélenchonienne (ou généreusienne) de “sortir des traités” pour forcer l’UE à la négociation ?
Que Baruch s’explique sur “faire descendre le Brexit de l’Aventin” alors?
pour le fondement du communisme, veuillez m’excuser, je ne suis pas spécialiste mais je comprends donc que vous reniez aussi le partage et la solidarité? Dommage cela me parait pourtant assez noble comme “morale”.
pour La Fontaine, vous nous laissez apprendre Les Membres et l’estomac à nos élèves ou c’est une mauvaise morale? Quelles fables ont des bonnes morales consensuelles? Déjà ce mot “consensuel” est à pleurer de rire pour une fable de La Fontaine…
l’art 50 date du traité de Lisbonne, De Gaulle était mort depuis longtemps…
@ Carnot aussi, la CEDH n’a rien à voir avec l’UE, ne mélangez pas tout svp, c’est déjà assez compliqué comme ça.
@ Antoine
[Est-ce que vous validez par cela la proposition mélenchonienne (ou généreusienne) de “sortir des traités” pour forcer l’UE à la négociation ?]
Cela dépend du but. Si l’idée est de « forcer l’UE à la négociation » avec le but de sauver l’Euro ou pour obtenir une « Europe sociale », la réponse est non. Je ne vois pas l’intérêt de perdre du temps dans une négociation qui n’a aucune chance d’aboutir. Si par contre l’objectif est de détricoter les traités pour en finir avec le cœur même de la construction européenne qu’est la supranationalité, alors pourquoi pas. Contrairement à Mélenchon, je fais la différence entre buts et moyens. Une stratégie n’est ni bonne ni mauvaise en elle-même. C’est au regard de l’objectif poursuivi qu’il faut la juger.
Le problème avec Mélenchon et Généreux, c’est qu’ils sont l’un comme l’autre attachés au maintien de la supranationalité. Ils font un raisonnement ad hoc : l’UE est mauvaise parce qu’elle impose aux peuples des politiques libérales. Elle deviendrait bonne si elle imposait aux peuples des politiques sociales. Moi, je défends la souveraineté populaire : une institution qui impose des politiques en dehors de cette souveraineté est structurellement mauvaise, quelque soit le contenu des politiques en question. Il n’y a pas de « bon » dictateur.
@ Françoise
[Que Baruch s’explique sur “faire descendre le Brexit de l’Aventin” alors?]
Je vous demande de ne pas agresser les commentateurs de ce blog. Si vous êtes intéressée par des explications, vous pouvez les demander gentiment sans prendre un ton comminatoire. Je note aussi que vous ne vous excusez toujours pas de l’avoir accusé de « malhonnêteté intellectuelle »…
[pour le fondement du communisme, veuillez m’excuser, je ne suis pas spécialiste mais je comprends donc que vous reniez aussi le partage et la solidarité?]
Non. Vous avez affirmé que « le partage des richesses c’est le fondement du communisme», je vous ai dit que vous aviez tort. Vous m’avez accusé d’avoir « renié le communisme », je vous ai répondu que je n’avais jamais rien fait de tel. Comment à partir de ces réponses vous vous arrivez à « comprendre » que « je renie le partage et la solidarité » est un mystère pour moi.
[Dommage cela me parait pourtant assez noble comme “morale”.]
Cela dépend. L’idée que les pauvres doivent « partager » le peu qu’ils ont entre eux alors que les riches se goinfrent du produit de leur travail me paraît une morale plutôt stupide. « Le partage et la solidarité » in abstracto, cela ne veut rien dire. Le « partage » de quel bien ? Entre qui et qui ? Les voleurs qui « partagent » égalitairement le fruit de leur rapine sont ils « nobles » ?
[pour La Fontaine, vous nous laissez apprendre Les Membres et l’estomac à nos élèves ou c’est une mauvaise morale?]
Excellente. Ce qui serait une mauvaise morale, c’est d’enseigner que cette fable s’applique au rapport entre l’UE – dans le rôle de l’estomac qui distribue la nourriture – et les Etats membres – dans le rôle des autres organes qui la reçoivent. Je me demande si vous faites semblant de ne pas comprendre, ou si vous ne comprenez vraiment pas. Dans cet échange, la question n’était pas de savoir si on pouvait enseigner la fable, mais si on pouvait utiliser la fable comme accroche de la propagande eurolâtre.
[Quelles fables ont des bonnes morales consensuelles?]
Presque toutes, en fait. Les fabulistes ont généralement cherché à créer des situations ou l’on dénonce des vices et on promeut des vertus qui faisaient un large consensus à leur époque, et qui le restent largement aujourd’hui. Franchement, quel parent, quel « honnête homme » pourrait aujourd’hui s’offusquer du fait qu’on enseigne à leur enfant que « tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute » ?
[Déjà ce mot “consensuel” est à pleurer de rire pour une fable de La Fontaine…]
Ah bon ? Et pourquoi ça ?
[‘art 50 date du traité de Lisbonne, De Gaulle était mort depuis longtemps…]
Encore une fois, j’arrive à me demander si vous le faites exprès ou si vous avez des difficultés de compréhension. Le dialogue entre De Gaulle et Peyrefitte illustre mon commentaire comme quoi il ne faut pas confondre la dimension juridique et la dimension politique. Du point de vue juridique, un traité est contraignant et si le traité ne prévoit pas une procédure de sortie, il est en théorie impossible de se dégager en vertu du principe « pacta sunt servanda » (ce n’est pas tout à fait vrai puisque le la Convention de Vienne sur le droit des traités prévoit des procédures de dénonciation même pour les traités qui n’ont prévu ce cas, mais admettons). Mais du point de vue politique, comme le dit De Gaulle, il est illusoire de croire qu’un Etat « couillonné » dans un traité restera « couillonné » poru les siècles des siècles simplement parce qu’il n’y a pas de clause de sortie. En d’autres termes, si un Etat veut vraiment sortir de l’UE, il sort et puis c’est tout. Et c’était vrai bien avant le traité de Lisbonne. L’ajout de l’article 50 ne fait que définir une procédure « propre » pour le faire.
[@ Carnot aussi, la CEDH n’a rien à voir avec l’UE, ne mélangez pas tout svp, c’est déjà assez compliqué comme ça.]
Vous attribuez à Carnot ce qu’il n’a jamais dit. Dans son commentaire, Carnot prend bien soin d’indiquer « Je change de sujet » avant d’aborder la question de la CEDH, et ne l’associe nulle part avec l’UE. Vous devriez lire avec attention ce qu’ils écrivent et vous assurer que vous avez compris avant d’agresser les gens…
D’accord, Baruch et vous pouvez taper sur l’Education Nationale en l’affublant de maux imaginaires et fantasmés mais je ne peux répondre ni demander des éclaircissements; vous êtes le maître sur votre blog (cf Le Loup et l’agneau!)
Quand La Fontaine écrit contre le pouvoir absolu et la société de son époque, vous le considérez, anachroniquement, comme consensuel alors qu’il était fortement critiqué.
Carnot change effectivement complètement de sujet en donnant un lien vers un article d’un certain “groupe Plessis” douteux.
@ Françoise
[D’accord, Baruch et vous pouvez taper sur l’Education Nationale en l’affublant de maux imaginaires et fantasmés mais je ne peux répondre ni demander des éclaircissements; vous êtes le maître sur votre blog (cf Le Loup et l’agneau!)]
Quiconque lit ce blog peut constater que malgré votre manie de vous poser en victime, non seulement vous « pouvez répondre et demander des éclaircissements », mais que vous le faites systématiquement, et que vos messages sont tout aussi systématiquement publiés. Alors arrêtez de jouer les Calimero, c’est parfaitement ridicule.
Personne ne vous a interdit de « répondre » ou de « demander des éclaircissements ». Je vous ai simplement demandé de ne pas le faire sur le ton comminatoire et agressif que vous avez l’habitude d’employer. Les autres participants à ce blog ne vous doivent ni obéissance, ni soumission. Et ils ont même le droit de vous contredire…
[Quand La Fontaine écrit contre le pouvoir absolu et la société de son époque, vous le considérez, anachroniquement, comme consensuel alors qu’il était fortement critiqué.]
Non. Je le considère « consensuel » AUJOURD’HUI. La question de savoir si l’école républicaine devait enseigner les fables de La Fontaine à l’époque de La Fontaine ne se pose pas, pour des raisons évidentes.
[Carnot change effectivement complètement de sujet en donnant un lien vers un article d’un certain “groupe Plessis” douteux.]
En quoi ce groupe est « douteux » ? Connaissez-vous ses membres ? Non ? Et alors, comment savez-vous qu’il est « douteux » ? Parce qu’il ne dit pas ce que vous aimez entendre ?
Voilà un exemple supplémentaire de votre technique de discussion. Vous commencez à accuser Carnot d’avoir associé l’UE et la CEDH. Quand on vous montre que ce n’est pas le cas, au lieu de vous excuser platement vous changez d’argument et l’accusez de donner un lien vers un article « douteux », et cela sans avoir la moindre justification. Le prochain étage sera certainement de jouer les victimes en m’accusant de vouloir vous bâillonner… vous savez, on commence à connaître la musique…
Carnot change de sujet et passe du Lavisse du XIXè à
“Je suis ravi de constater que le Brexit semble avoir servi d’aiguillon à certains parmi nos nombreux hauts fonctionnaires qui partagent notre défiance vis-à-vis de la “construction européenne””:
pourrait-il, par extrême gentillesse (;)), nous expliquer qu’il “ne l’ (la CEDH) associe nulle part avec l’UE”?
“le communisme est fondé sur la fin de l’exploitation du travail humain – ce qui suppose que chacun dispose librement de la valeur produite par son travail” Je n’ai jamais lu cela… vous n’êtes pas en train de définir le libéralisme? ou l’anarchie? Pourriez-vous, par extrême rigueur intellectuelle (;)), citer vos sources?
@ Françoise
[pourrait-il, par extrême gentillesse (;)), nous expliquer qu’il “ne l’ (la CEDH) associe nulle part avec l’UE”?]
Probablement. C’est une affaire entre lui et vous.
[“le communisme est fondé sur la fin de l’exploitation du travail humain – ce qui suppose que chacun dispose librement de la valeur produite par son travail” Je n’ai jamais lu cela… vous n’êtes pas en train de définir le libéralisme? ou l’anarchie?]
Absolument pas. Pour Marx, le capitalisme se caractérise par l’exploitation du travail humain. En d’autres termes, le travailleur vend sa force de travail au capitaliste, et reçoit en retour seulement une partie de la valeur produite. L’autre partie – appelée « plusvalue » – va au capitaliste. Le capitalisme est donc une société ou les travailleurs ne disposent pas librement de la valeur qu’ils produisent. Cela, selon Marx, n’est possible que dans une société communiste. Rien à voir donc avec le libéralisme et encore moins avec l’anarchie.
[Pourriez-vous, par extrême rigueur intellectuelle (;)), citer vos sources?]
Karl Marx, « Le Capital », Livre Ier.
Marx/Engels, Manifeste du Parti communiste:
“Vous nous reprochez donc de vouloir abolir une forme de propriété qui ne peut exister qu’à la condition que l’immense majorité soit frustrée de toute propriété. En un mot, vous nous accusez de vouloir abolir votre propriété à vous. En vérité, c’est bien ce que nous voulons.”
(…)
“Cependant, pour les pays les plus avancés, les mesures suivantes pourront assez généralement être mises en application:
Expropriation de la propriété foncière et affectation de la rente foncière aux dépenses de l’Etat.
Impôt fortement progressif.
Abolition de l’héritage.
Confiscation des biens de tous les émigrés et rebelles.
Centralisation du crédit entre les mains de l’Etat, au moyen d’une banque nationale, dont le capital appartiendra à l’Etat et qui jouira d’un monopole exclusif.
Centralisation entre les mains de l’Etat de tous les moyens de transport.
Multiplication des manufactures nationales et des instruments de production; défrichement des terrains incultes et amélioration des terres cultivées, d’après un plan d’ensemble.
Travail obligatoire pour tous; organisation d’armées industrielles, particulièrement pour l’agriculture.
Combinaison du travail agricole et du travail industriel; mesures tendant à faire graduellement disparaître la distinction entre la ville et la campagne.
Education publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu’il est pratiqué aujourd’hui. Combinaison de l’éducation avec la production matérielle, etc.”
Bref, la liberté dont tout le monde rêve…
Proudhon, “La propriété moderne peut être considérée comme le triomphe de la liberté. La propriété est destinée à devenir, par sa généralisation, le pivot et le ressort de tout le système social.”
@ Françoise
[Marx/Engels, Manifeste du Parti communiste: « Cependant, pour les pays les plus avancés, les mesures suivantes pourront assez généralement être mises en application : »]
Je vous prie de noter le « pourront », qui ne signifie pas la même chose que « devront »…
1) Expropriation de la propriété foncière et affectation de la rente foncière aux dépenses de l’Etat
2) Impôt fortement progressif
3) Abolition de l’héritage
4) Confiscation des biens de tous les émigrés et rebelles
5) Centralisation du crédit entre les mains de l’Etat, au moyen d’une banque nationale, dont le capital appartiendra à l’Etat et qui jouira d’un monopole exclusif
6) Centralisation entre les mains de l’Etat de tous les moyens de transport
7) Multiplication des manufactures nationales et des instruments de production
8) défrichement des terrains incultes et amélioration des terres cultivées, d’après un plan d’ensemble
9) Travail obligatoire pour tous; organisation d’armées industrielles, particulièrement pour l’agriculture, Combinaison du travail agricole et du travail industriel; mesures tendant à faire graduellement disparaître la distinction entre la ville et la campagne
10) Education publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu’il est pratiqué aujourd’hui. Combinaison de l’éducation avec la production matérielle, etc.”]
En lisant cette liste, je ne peux m’empêcher de penser combien était « communiste » le gouvernement de la Libération. En effet, la plupart de ces mesures étaient mises en œuvre en 1945-46, soit totalement (impôt fortement progressif, confiscation des biens des collabos, nationalisation du crédit, multiplication des manufactures nationales, plan d’ensemble pour l’agriculture, obligation de tous de travailler inscrite dans la Constitution de 1946, éducation publique et gratuite jusqu’à 16 ans, ce qui de facto abolit le travail des enfants…), soit partiellement (forte imposition de l’héritage, large étatisation du secteur des transports…). De Gaulle aurait-il été un communiste qui s’ignorait ?
En fait, il n’y a que dans le domaine de l’agriculture que le CNR et le gouvernement de la Libération se sont significativement écartés du « programme du Parti Communiste ». Il est vrai que l’agriculture n’occupait pas en 1946 la même place ni avait la même organisation qu’en 1848…
[Bref, la liberté dont tout le monde rêve…]
A chacun ses rêves… il est rare que « tout le monde » rêve de la même chose.
[Proudhon, “La propriété moderne peut être considérée comme le triomphe de la liberté. La propriété est destinée à devenir, par sa généralisation, le pivot et le ressort de tout le système social.”]
Exactement ce que disaient Thatcher et plus tard Sarkozy…
Merci de rappeler que les communistes étaient au pouvoir avec De Gaulle après la guerre, ce n’est pas un scoop. Quant à votre supposition d’un De Gaulle communiste, je vous en laisse l’entière responsabilité, tant que vous ne balancez pas sans preuves.
Vous ne citez toujours pas Marx, ou un autre gourou, quand vous affirmez librement que “chacun dispose librement de la valeur produite par son travail”, j’en conclus que ce n’est donc que votre propre opinion, de plus, non fondée. Vous ne pouvez parler au nom des communistes mais du pseudo D.
Vous pouvez lire ceci de Marx, la troisième partie est assez édifiante sur la liberté dans la société communiste:
https://www.marxists.org/francais/marx/works/1875/05/18750500a.htm
@ Françoise
[Merci de rappeler que les communistes étaient au pouvoir avec De Gaulle après la guerre, ce n’est pas un scoop.]
Pas un scoop, non… mais pour vous, cela semble être une nouveauté.
[Quant à votre supposition d’un De Gaulle communiste, je vous en laisse l’entière responsabilité, tant que vous ne balancez pas sans preuves.]
Vous semblez avoir quelques difficultés à comprendre l’ironie. Je n’ai rien « supposé » de tel. Je vous ai simplement fait remarquer que les propositions contenues dans le « manifeste du Parti communiste » et que vous citez ont été pour une grande part mises en œuvre par le gouvernement présidé par mongénéral.
[Vous ne citez toujours pas Marx, ou un autre gourou,]
Pour vous, Marx est peut-être un « gourou ». Pas pour moi. Et je n’ai pas l’habitude de citer des « gourous ».
[quand vous affirmez librement que “chacun dispose librement de la valeur produite par son travail”, j’en conclus que ce n’est donc que votre propre opinion, de plus, non fondée.]
Vous pouvez conclure ce que vous voulez. Je n’ai jamais prétendu que la définition que j’ai proposé soit une citation de qui que ce soit. C’est ma compréhension des développements que fait Marx dans le livre I du « Capital ». Lisez-le, et si vous pensez que j’ai mal interprété, on pourra discuter.
[Vous ne pouvez parler au nom des communistes mais du pseudo D.]
Evidement. Moi, je ne parle jamais que pour moi, et jamais au nom de personne. Pas vous ?
Ce qui m’inquiète pour le brexit c’est la pétition de 2 millions de personnes surtout jeunes, pour que Londres reste EU ou qu’ils refassent un vote. On voit bien que l’Eu et les villes connectées et mondialisées ont détruits tout sentiment collectif et de frontières et surtout le vote démocratique. C’est vraiment inquiétant pour la classe populaire. Elle est vraiment lâchée en rase campagne et ne comptant pour rien. Je me demande bien comment cela va finir maintenant que se dévoile au grand jour la rupture entre les gens. Une guerre civile soft serait-il possible ou un replie géographique entre villes Eu et les autres territoires sur fond d’effondrement des États comme pendant la guerre de 100 ans ?
@ rodolphe
[Ce qui m’inquiète pour le brexit c’est la pétition de 2 millions de personnes surtout jeunes, pour que Londres reste EU ou qu’ils refassent un vote. On voit bien que l’Eu et les villes connectées et mondialisées ont détruits tout sentiment collectif et de frontières et surtout le vote démocratique. C’est vraiment inquiétant pour la classe populaire. Elle est vraiment lâchée en rase campagne et ne comptant pour rien.]
Tout a fait. Le succès de cette « pétition » – qui est en fait un trait d’humour – montre combien l’idée de « communauté de destin » à l’intérieur des frontières nationales s’est érodée. Jusqu’ici, on savait que les riches avaient plus que les pauvres, mais on acceptait l’idée qu’on était dans le même bateau, dont on décidait collectivement la direction. On voit aujourd’hui que la bourgeoisie et les « classes moyennes » assument de plus en plus ouvertement un « destin particulier » qui les sépare des autres, sur le mode « on fait comme nous on veut ou on s’en va ». L’illusion financière a donné aux bourgeois et « classemoyens » l’illusion qu’ils n’ont plus besoin des autres. De plus en plus les membres des couches populaires sont vues comme un problème, et non comme des concitoyens. Ils nous coûtent de l’argent, ils votent mal… Ah, si seulement on pouvait s’en débarrasser…
[Je me demande bien comment cela va finir maintenant que se dévoile au grand jour la rupture entre les gens. Une guerre civile soft serait-il possible ou un replie géographique entre villes Eu et les autres territoires sur fond d’effondrement des États comme pendant la guerre de 100 ans ?]
La question me semble importante, en effet. En dehors de grands moments de prise de conscience – comme ce fut le cas pour les événements de janvier 2015 – le bloc dominant est tenté de compléter la ségrégation sociale, déjà largement avancée, par une sécession nationale. Des nations aussi anciennes que la Grande Bretagne ou l’Espagne – et c’est encore pire dans les nations plus récentes – se trouvent confrontées à la force centrifuge des régions riches qui pensent avoir un « destin » plus favorable une fois débarrassées des régions plus pauvres. Leur modèle : Singapour. Une cité-état où les riches gouvernent et font travailler des pauvres ailleurs, le plus loin possible.
Ce modèle est-il viable sur le long terme ? Je ne le pense pas. Talleyrand disait qu’on peut se faire un trône avec des baïonnettes, mais qu’il était ensuite difficile de s’asseoir dessus. C’est un peu la même chose avec l’argent. L’argent n’achète pas tout, et il y a une qualité de vie à vivre dans une société apaisée où l’on peut laisser ses enfants jouer dans la rue qu’on ne retrouve pas dans une société fragmentée où les pauvres vivent dans des ghettos et les riches dans des quartiers fermés entourés de vigiles. Sans compter que la mixité sociale est cruciale pour éviter la dégénérescence endogamique des élites.
@ Descartes et rodolphe
Tout à fait d’accord, et on ne dira jamais assez dans ce contexte à quel point la décentralisation est une pente glissante. Dans ce contexte “révolte des élites” pour reprendre l’expression de C. Lasch les institutions nationales anciennes et solides et le caractère traditionnellement centralisé de la France sont notre meilleur atout et il faut plus que jamais les protéger et les restaurer.
Si les Anglais avait géré l’unification de leur espace comme en France ils n’en seraient pas là avec l’Ecosse, en fait je suis même convaincu que les îles britanniques ne formeraient aujourd’hui qu’une seule nation qui s’appellerait simplement l’Angleterre. Mais sans remonter jusque là la devolution de 1997 a été un choix désastreux pour l’unité du R-U, comme c’est toujours le cas…
Merci, c’est vraiment ça, j’y avais pas pensé. L’émergence de cité Etat. A ce sujet, j’ai une anecdote révélatrice je pense. Invité en Bretagne par des amis, une amie d’enfance est venue un soir manger avec nous que je connaissais pas. Elle venait de Singapour ou Hongkong et y vivait à cause de son mari travaillant dans une boite informatique. Elle nous disais qu’elle payait 8000 euros de loyer par mois et avait fait venir sa voiture en Bretagne par avion. Véridique. Mais elle le disait avec une simplicité confondante de telle manière qu’on a rien su dire de plus. Je crois que c’est ça qui m’a vraiment troublé. Cette déconnexion aussi naturelle que simple. C’était presque génétique. En résumé, je crois que la mondialisation a aussi fabriqué des sortes d’hybrides humains viscéralement déconnectés du sens commun. Il ne pense plus comme nous et ne le cherche pas.
@ Carnot
[Tout à fait d’accord, et on ne dira jamais assez dans ce contexte à quel point la décentralisation est une pente glissante. Dans ce contexte “révolte des élites” pour reprendre l’expression de C. Lasch les institutions nationales anciennes et solides et le caractère traditionnellement centralisé de la France sont notre meilleur atout et il faut plus que jamais les protéger et les restaurer.]
Tout à fait d’accord. Et pour donner aux gens envie de les protéger, le premier pas est de les faire connaître. Vous allez dire que je reviens à ma marotte, mais je persiste à croire qu’aujourd’hui l’action politique doit être d’abord une action pédagogique. Il faut expliquer à nos concitoyens – et surtout aux jeunes – quel est le sens profond de la centralisation à la française : la mise en coupe réglée du pouvoir des « barons » et des cliques. Il faut aider les gens à entrer dans un débat rationnel, au lieu de cette politique des épouvantails ou certains mots – nation, centralisation, etc. – sont diabolisés au point que la « décentralisation » devient un bien en soi.
[Si les Anglais avait géré l’unification de leur espace comme en France ils n’en seraient pas là avec l’Ecosse, en fait je suis même convaincu que les îles britanniques ne formeraient aujourd’hui qu’une seule nation qui s’appellerait simplement l’Angleterre.]
Oui, mais si les anglais avaient pu faire ça, ils ne seraient pas anglais… chaque nation a son génie propre et son histoire. Les anglais n’ont jamais été disposés à payer le prix d’une véritable uniformisation. Cela ne les intéresse pas. En fait, il faut faire attention à ne pas prendre une fausse perspective. Pour nous, la sécession d’une région de la France « une et indivisible » serait vécue comme une catastrophe. Mais les anglais ne le voient pas vraiment de cet œil. Si l’Ecosse prenait demain son indépendance – ce qu’elle a fait plusieurs fois dans son histoire – ce ne serait qu’un avatar de plus dans les rapports entre l’Ecosse et l’Angleterre.
@ rodolphe
[En résumé, je crois que la mondialisation a aussi fabriqué des sortes d’hybrides humains viscéralement déconnectés du sens commun.]
Ce n’est pas tant “déconnectés du sens commun” que “déconnectés du reste de l’humanité”. Si vous viviez dans un milieu ou tout le monde gagne 50.000€ par mois et paye 8000€ par mois de loyer, si tous les gens que vous connaissiez étaient dans cette situation, vous trouveriez cela parfaitement normal et naturel. C’est au contacte de gens qui vivent avec un SMIC qu’on réalise combien notre position est privilégiée, combien des plaisirs et des douceurs qui nous semblent aller de soi ne sont pas accessibles à tout le monde. Le brassage social qui se faisait naguère à l’école, au service militaire ou dans les partis politiques servait à ça: même les riches savaient qu’il y avait des pauvres. Aujourd’hui, les groupes sociaux vivent de plus en plus isolés.
@ Descartes
http://www.leparisien.fr/politique/l-appel-commun-des-maires-de-londres-et-de-paris-27-06-2016-5917127.php
Je ne sais pas si vous avez vu ça, mais c’est un véritable scandale et on est en plein dans la “révolte des élites”. Et le projet de loi transférant des compétences du préfet de police au maire de Paris m’inquiète, à long terme si on continue comme cela à terme on va se retrouver avec un véritable vice-roi à la tête d’une métropole unique et qui fera sa propre politique… Espérons que le calendrier parlementaire chargée ne permette pas d’adopter le texte avant la débâcle des socialistes l’année prochaine.
J’ai toujours pensé que la réforme de 1976 créant un maire de Paris avait été une grave erreur : étant donné l’importance particulière de la capitale dans notre pays et son rôle au cours de notre histoire celle-ci devrait être gérée directement par l’Etat, je n’ai aucune envie que Madame Hidalgo devienne un nouveau Prévôt des marchands et nous impose sa ligue hanséatique 2.0. D’ailleurs je trouve intéressant de constater que Margaret Thatcher, qui avait le sens de l’autorité de l’Etat, avait sans doute bien compris la menace potentielle et avait supprimé en 1986 les élections locales à Londres – tout comme d’ailleurs elle s’était opposée à toute dévolution à l’Ecosse.
@ Carnot
[Je ne sais pas si vous avez vu ça, mais c’est un véritable scandale et on est en plein dans la “révolte des élites”.]
Je pense qu’on n’a toujours pas pris la mesure du mépris et de la morgue des « classes moyennes » pour tout ce qui ne leur ressemble pas. Finalement, si on suit Hidalgo et Khan, il y a les êtres supérieurs qui habitent dans les « villes-monde », les seuls qui sachent « célébrer la diversité » et « lutter contre la pollution », et puis il y a les êtres inférieurs qui habitent ailleurs, et qui, à contrario, sont des racistes pollueurs.
[J’ai toujours pensé que la réforme de 1976 créant un maire de Paris avait été une grave erreur : étant donné l’importance particulière de la capitale dans notre pays et son rôle au cours de notre histoire celle-ci devrait être gérée directement par l’Etat, je n’ai aucune envie que Madame Hidalgo devienne un nouveau Prévôt des marchands et nous impose sa ligue hanséatique 2.0.]
Je partage. La décentralisation n’est qu’une machine à créer des « barons » locaux et à leur donner les moyens d’alimenter leur « clientèle ». Et c’est encore plus vrai à Paris qu’ailleurs, étant donné le poids de la capitale dans tous les domaines.
Surtout dans cette “fiche”( qui sort de je ne sais où ,je l’ai simplement trouvée par un clic car je recherchais la référence exacte de Tite Live, mais qui se présentait comme un outil pédagogique pour permettre aux profs “d’organiser leurs séquences” selon le vocabulaire technocratique de la pédagogie) , j’ai repéré plusieurs choses:
D’abord la torsion qui était faite sur le texte, devenu un “document” pour susciter “l’intérêt des élèves”, depuis quand l’éducation consiste-t-elle à capter l’intérêt ?
Un texte a un intérêt où pas, c’est au professeur qui en sait plus que l’élève d’en décider, par rapport aux programmes et à l’élaboration de son cours, dont il est le maître: cela s’appelle la “liberté pédagogique” réaffirmée dans tous les textes officiels, le professeur par concours ayant été reconnu apte à le faire et si j’ose dire comme cela, “intronisé” par le titre qu’il possède comme celui par exemple de “certifié” (c’est à dire que l’Etat le certifie capable de cette “liberté pédagogique” et est le garant du savoir de ce professeur) ou “d’agrégé” (il est intégré au corps des professeurs de l’enseignement secondaire).
Deuxièmement: vous avouerez que “faire réfléchir l’élève sur le caractère universel de l’histoire” est singulièrement hors de propos: d’abord c’est une phrase creuse qui ne veut rien dire, je peux bien faire réfléchir les élèves sur le caractère universel de la loi de la pesanteur (qui est rude comme chacun sait, mais c’est la loi!), ou sur le caractère universel du rôle des marées dans l’océan Atlantique, c’est à peu près aussi en rapport avec ce petit texte ou cette fable.
Quand il y a un texte que l’on étudie autant se donner des “objectifs” qui aient rapport au texte,: par exemple en l’occurrence on aurait pu se poser la question de la permanence des mêmes fables “organiques” quand il s’agit de parler de la société, toujours identifiée à un “corps” , et se poser la question des antagonismes dans la société, cela aurait eu rapport à CE texte ,mais pas ce grand fourre-tout où “toutes les vaches sont grises” de l’histoire universelle.
Enfin le pompon du rapport des textes de Tite-live ou de La Fontaine à la construction européenne ?
Je dois dire que moi, cela ne m’avais pas sauté aux yeux …
Que les “fiches” pégago aient tiré immédiatement ce troisième item de la lecture de Tite-live ,je dois dire que les bras m’en sont tombés et oui ! j’y ai vu une orientation “idéologique”, peut-être parfaitement inconsciente, celle de l’air du temps, peut-être aussi y ai-je vu plutôt une incitation à la “propagande” par des gens parfaitement conscients de ce qu’ils disent, ne soyons pas méchants!
J’ai enseigné quarante ans en Terminale, ce que j’avais appris de ma formation “pratique” après la réussite au concours, c’est que je devais enseigner a/ l’esprit critique à mes élèves, b/ éviter soigneusement la “prévention et la précipitation” comme disait le vieux René Descartes c/ leur donner les moyens intellectuels de savoir “d’où” je parlais et de pouvoir s’opposer à ce que je n’aurais su gommer d’idéologie inconsciente, sans qu’ils aient à la fin de mon cours un “bulletin d’adhésion à remettre au militant connu de vous” comme on disait quand par ailleurs on militait.Ce qui suppose de la part du professeur un travail intellectuel sur son propre savoir et sur la façon dont il doit le transmettre, je dis “doit” car il s’agit là d’un “devoir”, c’est là que se trouve “le travail” proprement pédagogique d/ C’est à ces conditions qu’un cours est possible dans des matières à “esprit de finesse” et non seulement de “géométrie”.
L’histoire ce n’est pas de la propagande, les Lettres et la philosophie non plus. le professeur n’est pas un “prescripteur” d’opinions, il ne délivre pas un catéchisme, son cours n’est pas un manifeste, cela s’appelle la laïcité, le professeur de philosophie n’est pas un “philosophe” dans sa classe, l’historien qui transmet son savoir n’a pas a prononcer un discours sur l’histoire universelle à la manière d’un Ibn Khaldoun, la tache est plus humble, répétitive, mais elle n’est pas celle de porte-voix propagandiste de l’idéologie dominante qui est comme chacun le sait depuis 1845 l’idéologie de la “classe dominante”.
Bref, Descartes, désolé d’avoir repris le clavier si longuement sur un sujet totalement éloigné de votre propos précis, mais je m’énerve un peu de ces remarques sur ce que devraient être les programmes scolaires. Qu’on parle (et dans plusieurs disciplines enseignées) des institutions européennes oui, qu’on veuille controuver dans tout texte un rapport avec celles-ci me paraît ahurissant.
@ Baruch
[Deuxièmement: vous avouerez que “faire réfléchir l’élève sur le caractère universel de l’histoire” est singulièrement hors de propos: (…)]
Surtout, c’est faire un énorme contresens. L’universalité impliquerait de trouver des exemples de la même anecdote sous d’autre cultures, et non de retrouver la même anecdote chez des auteurs qui appartiennent à la même filiation culturelle…
[Enfin le pompon du rapport des textes de Tite-live ou de La Fontaine à la construction européenne ? (…) j’y ai vu une orientation “idéologique”, peut-être parfaitement inconsciente, celle de l’air du temps, peut-être aussi y ai-je vu plutôt une incitation à la “propagande” par des gens parfaitement conscients de ce qu’ils disent, ne soyons pas méchants!]
Je ne sais pas si les auteurs de ces fiches sont « conscients » de faire de la propagande, ou bien s’ils ont tellement internalisé le discours moralisant de la construction européenne que celui-ci est devenu pour eux un discours « naturel », aussi incontestable que le tabou de l’inceste. Mais qu’ils soient conscients ou pas, le résultat est le même : on retrouve aujourd’hui au sein de l’éducation nationale un discours idéologique déguisé en « bon sens ».
[c/ leur donner les moyens intellectuels de savoir “d’où” je parlais et de pouvoir s’opposer à ce que je n’aurais su gommer d’idéologie inconsciente, sans qu’ils aient à la fin de mon cours un “bulletin d’adhésion à remettre au militant connu de vous” comme on disait quand par ailleurs on militait. Ce qui suppose de la part du professeur un travail intellectuel sur son propre savoir et sur la façon dont il doit le transmettre, je dis “doit” car il s’agit là d’un “devoir”, c’est là que se trouve “le travail” proprement pédagogique]
Cela suppose aussi une réflexion sur la différence entre ce qui est matière à « savoir » et ce qui est matière à « opinion ». Si l’enseignant détient une autorité en matière de « savoirs », son opinion n’est que l’une des opinions possibles et n’a aucun statut particulier par rapport à celle de ses élèves. Et l’enseignant doit clairement établir une différence entre l’expression d’un savoir et l’expression d’une opinion.
[Bref, Descartes, désolé d’avoir repris le clavier si longuement sur un sujet totalement éloigné de votre propos précis,]
Ne vous excusez pas, c’est exactement l’esprit de ce blog que d’encourager la digression intelligente…
Au sujet de la neutralité de l’école, il me semble me souvenir vous avoir lu prendre exemple sur l’école de la IIIe république, qui façonnait des “bon citoyens français”. (Je n’ai hélas pas la référence exacte)
Sur le moment, j’ai trouvé le rejet de l’esprit critique étonnant de votre part. Mais à partir de ce moment-là, n’est-il pas justifiable que l’enseignement vise désormais à créer de “bons citoyens européens”, l’UE remplaçant la France en tant qu’entité qui vise à sa pérennité, là ou enseigner l’esprit critiquer reviendrait à scier la branche sur laquelle on est assis ?
(A moins que ma mémoire ne me fasse défaut ou que je vous aie mal interprété)
Pouvez-vous préciser votre opinion ?
@ Boris
[Au sujet de la neutralité de l’école, il me semble me souvenir vous avoir lu prendre exemple sur l’école de la IIIe république, qui façonnait des “bon citoyens français”. (Je n’ai hélas pas la référence exacte)]
C’est exact. Mais les fondateurs de l’école de la IIIème République avaient justement tracé aux instituteurs une limite précise dans l’enseignement moral. Je vous conseille la lecture de la circulaire aux instituteurs du 17 novembre 1883, dont j’ai reproduit un extrait dans ma réponse à un autre commentaire.
[Sur le moment, j’ai trouvé le rejet de l’esprit critique étonnant de votre part. Mais à partir de ce moment-là, n’est-il pas justifiable que l’enseignement vise désormais à créer de “bons citoyens européens”, l’UE remplaçant la France en tant qu’entité qui vise à sa pérennité, là ou enseigner l’esprit critiquer reviendrait à scier la branche sur laquelle on est assis ?]
Non, tout simplement parce qu’il n’y a pas de consensus dans la société pour estimer que « l’UE remplace la France », ou qu’il s’agit pour l’école de former des « bons européens ». En prenant une telle position, l’école prendrait position pour groupe contre un autre, pour une opinion contre une autre. Exactement ce que l’école ne doit pas faire, ne peut pas faire sans faillir à sa mission. L’école a toute autorité lorsqu’il s’agit de diffuser des savoirs. Mais lorsqu’il s’agit de diffuser des opinions – et toute morale est une opinion – elle doit se cantonner aux principes qui sont acceptables par tous.
Vous avez tout a fait raison en ce qui concerne la droite francaise. A part une infime minorite, elle n est pas liberale.La grosse majorite est simplement conservatrice (en gros les riches doivent rester riches et les pauvres a leur place: pauvre). Car le liberalisme c est aussi supprimer les protections des taxis, des notaires ou les subventions des paysans (pour citer 3 professions ou les LR vont de tres bons scores)
Par contre je suis pas sur que le PS soit vraiment liberal, a part leur dirigeants. Il faut quand meme rappeler que Valls a fait 5 % aux primaires du PS … ET au moins lui annoncait la couleur. Car comment un Hollande peut faire toute une carriere en denoncant la finance et l ultra liberalisme pour une fois au pouvoir en faire plus ? Hypocrisie ? simple positionnement tactique afin d etre elu (de type mitterrand en 81 ou chirac en 95) ?
Et ce qui est encore plus interessant, comment personne dans les ministres concerne n a tire la sonnette d alarme au vu du texte de loi ?ca devait aller contre les convictions de n importe quel socialiste !
Ayant lu les commentaires, j ai par contre certaines objections a ce qui a ete ecris:
– jeunes contre vieux: il est clair que les interets ne sont pas les memes. Les seconds souhaitent des soins medicaux pas cher, un rendement du capital élevé (surtout si fond de pension comme en GB) et de l immobilier cher. Les seconds au contraire veulent un travail peu taxé (donc peu de cotisations sociales payant retraite/soins), veulent que les actionnaires investissent sur du long terme (et non pas pour un ROI dans 1 an) et pas trop gourmants mais aussi pouvoir se loger sans engloutir 50 % de ses revenus.
Mais le vieillissement de la population fait pencher la balance du cote des vieux et va donc générer de plus en plus de tensions, surtout si tous les investissements a long terme ont été supprimes (demandez vous par ex ou sont les successeurs des TGV ou d ariane….)
– les partisans d un retour aux frontières (brexit ou autres) vont une erreur majeure: ils méprisent complètement l impact de la technologie ! On ne peut pas revenir aux années 70 (où en effet certains en GB vivaient mieux).
En 1970, quand vous vouliez produire quelque chose, il fallait envoyer des plans papiers. C etait long et cher.Dans pas mal de cas, il fallait envoyer quelqu un en personne
Meme telephoner etait cher et dans certains cas carrément impossible. Et dans l autre pays, vous aviez assez peu de chance de trouver quelqu un qui vous comprenne (quasiment personne ne parlait anglais)
Maintenant vos équipes de plusieurs pays peuvent travailler sur les memes plans (CAM/CAD), le changement est répercuté instantanément a l autre bout du monde. Vous pouvez suivre votre production, les stocks, l expedition (merci DHL et RFID) …
@ cdg
[Par contre je suis pas sur que le PS soit vraiment libéral, a part leur dirigeants. Il faut quand même rappeler que Valls a fait 5 % aux primaires du PS …]
C’est bien la contradiction du PS : on fait des politiques libérales, mais il ne faut surtout pas le dire. Les « classes moyennes » que le PS représente veulent le beurre et l’argent du beurre : elles veulent profiter des politiques libérales tout en ayant la conscience tranquille. Et pour avoir la conscience tranquille, rien de plus facile que de se raconter qu’on est toujours du côté du petit peuple…
Vous me dites ne pas croire que le PS soit « vraiment libéral ». Mais comment expliquer alors que le PS ait soutenu mordicus et depuis quarante ans une construction européenne dont le caractère libéral ne laisse aucune ambiguïté ?
[- jeunes contre vieux: il est clair que les intérêts ne sont pas les mêmes. Les seconds souhaitent des soins médicaux pas cher, un rendement du capital élevé (surtout si fond de pension comme en GB) et de l immobilier cher. Les seconds au contraire veulent un travail peu taxé (donc peu de cotisations sociales payant retraite/soins), veulent que les actionnaires investissent sur du long terme (et non pas pour un ROI dans 1 an) et pas trop gourmants mais aussi pouvoir se loger sans engloutir 50 % de ses revenus.]
Sauf qu’en donnant satisfaction aux vieux, on donne aussi satisfaction aux jeunes qui seront un jour vieux et bénéficieront de ces dispositifs… encore une fois, parler de « jeunes contre vieux » comme on parlerait de « salariés contre employeurs » n’a pas de sens. La jeunesse n’est qu’un état temporaire.
[Mais le vieillissement de la population fait pencher la balance du cote des vieux et va donc générer de plus en plus de tensions, surtout si tous les investissements a long terme ont été supprimes (demandez vous par ex ou sont les successeurs des TGV ou d ariane….)]
Mais paradoxalement ceux qui regrettent le plus la baisse de l’investissement sont les vieux, et ceux qui se battent contre les infrastructures – les « grands projets inutiles » dont parlent les férus d’écologie – ce sont les jeunes… je pense que vous oubliez un point essentiel : les jeunes ne pensent qu’à eux, les vieux pensent à leurs enfants et leurs petits enfants. Ce n’est pas par hasard si toutes les grandes civilisations confient le pouvoir aux « anciens »…
[- les partisans d un retour aux frontières (brexit ou autres) vont une erreur majeure: ils méprisent complètement l’impact de la technologie ! On ne peut pas revenir aux années 70 (où en effet certains en GB vivaient mieux). En 1970, quand vous vouliez produire quelque chose, il fallait envoyer des plans papiers. C’était long et cher. Dans pas mal de cas, il fallait envoyer quelqu’un en personne (…)]
Je ne vois pas très bien le rapport. Les partisans d’un « retour aux frontières » dans leur grande majorité ne pensent pas que ces frontières doivent être étanches. Ils exigent simplement que les règles collectives applicables à ceux qui sont à l’intérieur de ces frontières soient décidées par la collectivité nationale, et non imposées par une autorité extérieure.
Bonjour @Descartes
> Mais paradoxalement ceux qui regrettent le plus la baisse de l’investissement sont les vieux, et ceux qui se battent contre les infrastructures – les « grands projets inutiles » dont parlent les férus d’écologie – ce sont les jeunes…
Je ne suis pas d’accord avec votre constat. Pour fréquenter certain site “participatif” où pullulent les opposants aux soi-disant “grands projets inutiles”, il y a là beaucoup de vieux (qui ressassent à occasion leurs combats des années 70) qui soutiennent avec obstination l’action des “jeunes” zadistes. S’ils ne sont pas eux-mêmes souvent sur place, c’est à mon avis pour des raisons bêtement physiques ou parce qu’ils ont un travail…
Et sur cette vidéo tournée sur la ZAD elle-même à l’issue du vote, on voit bien que les soutiens des zadistes (ceux qui déclarent qu’ils vont continuer à s’opposer, en négation du verdict démocratique) sont loin d’être majoritairement jeunres : https://www.youtube.com/watch?v=kJO1GcM5P8c
Pour en avoir le coeur net, il faudrait avoir une ventilation des résultats de la consultation par classe d’âge.
Sinon, merci pour votre très bon article.
@ Antoine
[Je ne suis pas d’accord avec votre constat. Pour fréquenter certain site “participatif” où pullulent les opposants aux soi-disant “grands projets inutiles”, il y a là beaucoup de vieux (qui ressassent à occasion leurs combats des années 70) qui soutiennent avec obstination l’action des “jeunes” zadistes. S’ils ne sont pas eux-mêmes souvent sur place, c’est à mon avis pour des raisons bêtement physiques ou parce qu’ils ont un travail…]
Ce n’est pas mon impression, mais vous avez peut-être raison. La seule façon de le savoir serait de trouver une étude pour voir la corrélation entre les positions politiques et l’âge.
Pour le PS, je ne saurai dire si c est de hypocritie, de l opportunisme ou simplement un liberalisme honteux. Peut etre ont ils soutenu la construction europeenne simplement en pensant que la torpiller etait encore pire. Je ne suis pas membre du PS donc je ne peux repondre
En ce qui concerne jeune/vieux. Certes les jeunes d aujourd hui seront les vieux de demain. Mais ce n est pas en assurant une vieillesse doree aux vieux actuels qu un jeune assurera que la sienne le soit 40 ans plus tard. Si on regarde l ex des baby boomers ont pourrait meme dire l inverse (dans les annees 60-70 les retraites etaient extremement pauvres (je me rappelle bien, j etais gosse a l epoque).
Maintenant que nos boomers sont retraites, ils ont un niveau de vie plus eleve que les actifs
Aujourd hui il y avait sur le site web du monde un article de jeunes elus ump.
L article en soit avait peu d interet, la solution aux problemes des jeunes etait de faire ce que veut gattaz.
Par contre les reactions etaient interessantes. Certes le lectorat du monde n est pas tres jeune mais on est content du voyage
2/3 des reactions sont pour demander de privilegier … les vieux. Et qu on me dise pas que baisser les droits de succession est une bonne mesure pour preparer l avenir
Attention a ce qu on appelle investissement !
Certains projet sont en effet inutile ou ruineux. Les espagnols ont construit plein d aeroports dont certains sont vide (un a ete brade aux chinois pour 1 €). Et je crains que NDLL soit typiquement la meme chose (quand on lit dans le canard enchaine que le nouvel aeroport sera plus petit que l existant on se pose des questions)
De meme est il vraiment judicieux d avoir construit des stades immenses pour l euro ?
Quand on voit ce qui aurait pu etre fait avec le cout d une coupe de foot ou des JO …
Certes decider ou investir n est pas facile. Il faut aussi accepter de perdre si on va hors des sentiers battus (et alors certains vont crier a la gabegie)
Pire, meme un investissement a priori porteur peut etre saborde par le copinage (le cloud souverain etait pas forcement une idee debile. Par contre, le confier a des bras casses comme Orange ou DS … surtout qu on a en france des gens competants comme OVH. Certes, je suppose qu ils ne font pas dans l emploi fictif et le recasage d enarques
En tout cas, il est sur que c est pas en mettant de l argent dans le BTP qu on va faire le nouvel ariane
Mes remarques sur l impact technologique viennent du fait qu une grosse motivation du vote souverainiste (en GB mais aussi en France) est :”c etait mieux avant”. Mais meme si on retablit les memes regles qu en 1970 on aura plus la meme economie qu en 70.
@ Descartes et Antoine
Je ne sais pas si c’est significatif comme nombre. Les “vieux gauchistes attardés”, on en connait tous, sont-ils si nombreux ou juste vocaux par contre ?
@ cdg
[Peut être ont ils soutenu la construction européenne simplement en pensant que la torpiller était encore pire.]
Ca n’a jamais été le discours des socialistes, ni en public, ni même en privé. J’ai toujours été frappé par la sincérité des convictions européennes de la plupart des militants et dirigeants socialistes que j’ai pu fréquenter. On peut leur reprocher beaucoup de choses, mais pas l’hypocrisie dans ce domaine. Ce sont de véritables croyants.
[En ce qui concerne jeune/vieux. Certes les jeunes d’aujourd’hui seront les vieux de demain. Mais ce n est pas en assurant une vieillesse dorée aux vieux actuels qu un jeune assurera que la sienne le soit 40 ans plus tard. Si on regarde l ex des baby boomers ont pourrait même dire l’inverse (dans les années 60-70 les retraites étaient extrêmement pauvres (je me rappelle bien, j’étais gosse a l’époque). Maintenant que nos boomers sont retraités, ils ont un niveau de vie plus élevé que les actifs.]
Mais qui vous dit que les générations suivantes ne bénéficieront pas du même phénomène ?
[2/3 des reactions sont pour demander de privilegier … les vieux. Et qu on me dise pas que baisser les droits de succession est une bonne mesure pour preparer l avenir]
Je ne vous suis pas. Baisser les droits de succession est une mesure en faveur des jeunes. Ce ne sont pas les vieux qui auront à payer leurs droits de succession, ce sont leurs héritiers…
[Certains projet sont en effet inutile ou ruineux. Les espagnols ont construit plein d aeroports dont certains sont vide (un a ete brade aux chinois pour 1 €). Et je crains que NDLL soit typiquement la même chose (quand on lit dans le canard enchaîne que le nouvel aéroport sera plus petit que l’existant on se pose des questions)]
Si on avait suivi le Canard Enchaîné, on n’aurait fait ni les autoroutes, ni le TGV, ni le programme électronucléaire, ni le minitel. Il faut toujours se souvenir qu le Canard est un journal satyrique. Il faut en rire, mais pas le prendre au sérieux. Il est toujours très facile depuis une tour d’ivoire de taper sur ceux qui font des choses et décréter que ce qu’ils font est inutile. D’ailleurs, je ne me souviens pas que le Canard se soit jamais excusé ou reconnu son erreur lorsque des choses qu’il a brocardées comme « inutiles » se sont révélées d’excellents investissements.
[De même est il vraiment judicieux d avoir construit des stades immenses pour l euro ?]
Je ne sais pas. Je ne suis pas un expert. Mais je préfère que la décision soit prise par les élus du peuple, et non par quelques dizaines d’illuminés persuadés de détenir la vérité.
[Mes remarques sur l’impact technologique viennent du fait qu une grosse motivation du vote souverainiste (en GB mais aussi en France) est :”c’était mieux avant”.]
Je ne crois pas. Je dirais plutôt que le moteur du vote est le « c’est pire maintenant ». Et ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas parce qu’on conteste une institution qui vous a ruiné qu’on veut revenir à l’état antérieur. Tout le monde réalise que le monde ne sera jamais comme avant. Simplement, l’UE avait promis à chacun que grâce à elle ce serait de mieux en mieux, et ce n’est pas le cas pour une large part de la population.
@ BolchoKek
[Je ne sais pas si c’est significatif comme nombre. Les “vieux gauchistes attardés”, on en connait tous, sont-ils si nombreux ou juste vocaux par contre ?]
Je ne sais pas s’il sont très nombreux. Mais ils appartiennent en général à la classe sociale qui a confisqué les porte-voix…
Quelle superbe week-end avons-nous connu : les classes populaires qui se dressent dignement face aux bobos des classes moyennes. Ils ont dit OUI à Notre Dame des Landes, un beau bras d’honneur aux zadistes, je suis aux anges !
N’habitant pas dans la région, j’avoue que je ne m’intéresse pas techniquement aux tenants et aboutissants de cette affaire, mais pourtant je sais que toutes les procédures ont été respectées, donc si ça s’installe après que toutes les étapes préalables aient été suivies, je ne vois pas pourquoi il faut s’y opposer. Il ne s’agit que d’une poignée de gens qui ne pensent qu’à leur gueule et leur petit confort personnel.
J’avoue que dans l’absolu, je suis contre le principe de démocratie participative pour les grands équipements, qui relèvent du National. S’il y a un besoin vital de construire une route, un aéroport, un port, une prison, etc, dans une région où le besoin se fait sentir, on n’a pas à demander aux locaux leur avis personnel, c’est une décision nationale. Mais là le referendum (et peu importe ce que je pense de Valls que je n’aime pas) c’était la dernière cartouche pour faire définitivement cesser ce feuilleton.
Je glousse d’avance de voir les circonvulations sémantiques des écolos, Mélenchon, et autres fanatiques de la “démocratie participative” et de la décentalisation, pour commenter ce résultat. La sagesse populaire a pris ces gens à leur propre piège, que c’est délicieux.
Je vois d’ici les arguments qui seront échangés : la question était mal posées ; à cause du chômage, les gens sont désespérés donc ils sont prêts à tout accepter pour pouvoir travailler ; le panel électoral était trop large car plus on s’éloigne du site plus le oui est massif, blablabla. Mais le fameux aéroport, est-il seulement pour les 3 pelés et 4 tondus qui sont autour ? Un aéroport est un équipement à la fois national et régional, c’est normal de demander à l’ensemble habitants de la région.
Quant aux agriculteurs qui disent qu’ils vont être lésés, si on avait tenu compte de l’avis de chacun quand on a électrifié jusqu’au fin fonds du pays, on s’éclairerait encore à la lampe à huile…
Nous vivons une période passionnante montrant le vrai visage des gentils bobos écolos compatibles : égoïstes, haineux envers les classes populaires, méprisant la démocratie.
@ Bannette
[Ils ont dit OUI à Notre Dame des Landes, un beau bras d’honneur aux zadistes, je suis aux anges !]
Deux fois du Champagne en un seul week-end ! C’est trop…
[J’avoue que dans l’absolu, je suis contre le principe de démocratie participative pour les grands équipements, qui relèvent du National. S’il y a un besoin vital de construire une route, un aéroport, un port, une prison, etc, dans une région où le besoin se fait sentir, on n’a pas à demander aux locaux leur avis personnel, c’est une décision nationale. Mais là le referendum (et peu importe ce que je pense de Valls que je n’aime pas) c’était la dernière cartouche pour faire définitivement cesser ce feuilleton.]
En fait, ce référendum était une tentative des politiques de sortir d’une situation de blocage sans avoir à prendre leurs responsabilités. On notera au passage que le pouvoir actuel est disposé à prendre des mesures de force pour interdire une manifestation syndicale ou pour dégager les dépôts de carburants occupés, mais laisse une petite minorité violente bafouer les décisions des assemblées démocratiquement élues, décisions confirmées par la justice.
Cela étant dit, les politiques se font beaucoup d’illusions quant aux effets du référendum. Les adversaires de l’aéroport sont convaincus de détenir la Vérité, et la Vérité n’a que faire du suffrage universel. Cela fait des années qu’ils défient le vote des instances démocratiques, ce n’est pas un référendum qui leur fera céder. Au lendemain du référendum, on est toujours dans la même situation : une minorité qui n’écoute qu’elle-même est qui est disposée à utiliser tous les moyens, y compris violents, pour faire prévaloir sa position, une majorité dont les représentants sont incapables de prendre leurs responsabilités et d’exercer le pouvoir dont ils ont été investis de peur de mécontenter les bobos.
Bonsoir Descartes,
En parlant de mépris de classe je viens de lire ce papier. Mon Dieu c’est édifiant, j’ai lu des abominations mais ça… Il dépasse tout ce que j’ai jamais vu ou presque…
http://laregledujeu.org/2016/06/25/29456/bernard-henri-levy-etrange-defaite-a-londres/
C’est à pleurer…
Je vous mets au défi de le lire de bout en bout.
@ Bruno
[En parlant de mépris de classe je viens de lire ce papier. Mon Dieu c’est édifiant, j’ai lu des abominations mais ça… Il dépasse tout ce que j’ai jamais vu ou presque…]
BHL fait périodiquement ce numéro, au gré de ses indignations. Et comme il a beaucoup d’argent et donc beaucoup d’amis, ses indignations trouvent toujours à s’étaler dans les gazettes, surtout celles dont il est le propriétaire…
[Je vous mets au défi de le lire de bout en bout.]
Comme disait Victor Hugo, je l’ai parcouru d’un derrière distrait…
Ce matin je lis le journal L’Humanité…désespérant!
C’est ailleurs, dans Marianne, que je trouve une analyse de classe du Brexit.
http://www.marianne.net/probleme-europe-c-est-peuple-100243883.html
Les leaders d’opinions reprennent aujourd’hui tous leur propagande inepte.
– E.Guigou fait la leçon sur France info pour réclamer, exiger docilité et soumission à des règles technocratiques renforcées, pour le bien des « sans dents « qui ne comprennent rien.
– Un représentant anglais des expatriés anglais de Dordogne dit qu’il ne s’en fait pas trop car ils vont bien trouver un moyen de s’en sortir comme cela a pu être fait en France en 2005.
Bref, les grandes manoeuvres de contournement des résultats sont commencées.
Le pire c’est bien sûr que le PCF de Laurent n’a aucune vision de classe et attend une réforme de l’Europe grâce à Podemos …
Aujourd’hui,Podemos allié aux néo-communistes est en déroute alors que séparés ils faisaient un meilleur score.
De toute façon la « City » qui a plusieurs siècles d’existence, en a vu et subi des crises bien plus fortes que le « Brexit ». Il serait étonnant que dans les cartons ce résultat n’est été envisagé. Attendons-nous à des manoeuvres d’envergure pour retarder la mise en place des mesures à prendre, ou sinon refaire le coup de 2005. Je ne serais pas étonné de voir les « LRPS» en première ligne dans cette affaire.
Apres des analyses considérant cet évenement comme une victoire de classe voici les thèses maoïstes nettement plus pessimistes
http://lesmaterialistes.com/pcfmlm-declaration-85-theses-brexit
On peut ne pas partager leur différenciation entre capital industriel et financier ni croire a un futur bloc européo-russe s’opposant militairement à un bloc Anglo-Saxon mais le reste est intéressant et idéologiquement structuré.
Au fond,la Solution FRABRICS est la meilleure selon moi!Voici quelques explications,réalistes ou pas?
Quelques heures après la victoire du BREXIT, ma réaction pour la France est :« Sortons de cette UE « Prison des peuples » impérialiste, plus ou moins complice des Etats-Unis impérialiste. Rapprochons nous de l’autre pôle de la mondialisation, autour de la Chine socialiste( les BRICS, soit Brésil, Russie, Chine socialiste, Afrique du Sud) . »
Mon slogan, c’est FRABRICS (France avec les BRICS),et vous?
@ Maurice
[Ce matin je lis le journal L’Humanité…désespérant!]
Vous êtes masochiste ou quoi ?
[Le pire c’est bien sûr que le PCF de Laurent n’a aucune vision de classe et attend une réforme de l’Europe grâce à Podemos …]
C’est le prix de l’adhésion au PGE…
[Apres des analyses considérant cet évenement comme une victoire de classe voici les thèses maoïstes nettement plus pessimistes]
Il avait raison, Talleyrand : « ils n’ont rien oublié, et rien appris ». Franchement, ce genre d’analyses ossifiées à mon avis sont strictement inutiles. Quelque soit l’événement qu’on analyse, la conclusion est écrite à l’avance.
[Mon slogan, c’est FRABRICS (France avec les BRICS),et vous?]
Moi pas.
Le PCF est piégé dans son enfermement proeuropéen alors que de 1945 à 1994,il a été avec superbe et bonheur opposé à l’UE atlantico-libérale:Nostalgie..
Dans ce contexte d’anomie , en 2015,Pierre Laurent est piégé par son enfermement proeuropéen et il ne peut que reprendre le discours médiatique dominant.Or si nous refusions le faux dilemme imposé par les partisans de l’austérité, entre l’enfoncement dans la crise sociale et l’autoritarisme, ou la dislocation sur fond de rivalités nationalistes,Il y aurait une autre option: celle de la reprise en main du projet européen par la gauche.Sur cette base, Laurent peut se retrouver avec François Hollande sur la politique européenne !Et Christian Favier, sénateur PCF et président du Conseil départemental du Val-de-Marne ajoute: « C’est un événement considérable et je suis très inquiet. La sortie de la Grande Bretagne de l’Union européenne est une mauvaise chose. Mais nous payons les orientations très libérales d’une Europe qui s’est construite pour faciliter la finance plus que les besoins sociaux. Cela va encourager ceux qui, face à la crise et à l’arrivée des migrants, préconisent des replis nationalistes extrêmement dangereux, voire des dérives autoritaires. Ce n’est pas bon signe pour la démocratie. J’espère que cela sera l’occasion pour les Européens de réfléchir à une meilleure construction de l’Europe sociale, par le haut, avec pourquoi pas un salaire minimum européen. »
Le salaire minimum est mis en cause en France, mais un dirigeant communiste propose de se battre pour l’obtenir dans toute l’U.E.Pierre Laurent ,précédé par l’Européiste Mélenchon,avait déjà passé le trait en Juillet 2015, annonçant qu’il soutiendrait le plan européen signé par Tsipras avant que le débat des communistes ne poussent les parlementaires à faire marche arrière.
Sortir à gauche pour défendre partout les intérêts des travailleurs,ne peut se concrétiser qu’en quittant l’UE !
Mais le Brexit augmente la pression sur la position européiste du PCF. Les ouvriers anglais qui ont voté massivement pour le Brexit sont-ils tous des racistes ignares ? Ont-ils tous cédés à l’UKIP comme certains le disent en France du vote ouvrier FN ?
Pour les européistes du PCF, il faut absolument accuser les peuples en colère de tous les maux, et, comme Hollande, utiliser le repoussoir du FN pour ne pas ouvrir enfin le véritable débat : Est-il pour les travailleurs plus facile de créer un rapport de forces favorable dans un pays ou dans l’union européenne globalement.. ? Poser la question, c’est y répondre. Les syndicalistes des groupes multinationaux ont une longue expérience des difficultés à dépasser la concurrence et les histoires nationales pour organiser la convergence des actions des travailleurs, et ils savent bien que les luttes ne s’amplifient pas par des décisions d’en haut, mais par la convergence de luttes ancrées dans le terreau social.
Tout le monde le comprend avec les “travailleurs détachés”. Réclamer les mêmes droits pour tous les travailleurs d’un chantier en France, c’est désobéir à une directive européenne !
Tout le monde le comprend sur la loi travail. Personne n’ose proposer aux manifestants de cesser de réclamer le retrait de la loi El Khomri au nom d’une future europe sociale qui viendrait accorder de nouveaux droits aux travailleurs ! Au contraire, les manifestants comprennent bien qu’ils se heurtent au diktat européen qui impose ces “jobs act”, et qu’il faut créer un rapport de forces social en France qui impose au gouvernement, quel qu’il soit, de désobéir à une injonction européenne.
Le retrait de la loi El Khomri, c’est le début d’une sortie par la gauche du diktat de l’Union Européenne !
Si le Brexit a été porté par des forces de droites, dans le contexte particulier de l’Angleterre et si les médias font tout pour le réduire à une décision nationaliste et réactionnaire, il est d’abord un coup de colère populaire d’un monde du travail qui refuse cette “concurrence libre et non faussée”. Et il révèle surtout que les peuples ont le pouvoir de dire NON au diktat européen. Tout l’enjeu d’une bataille pour la “sortie à gauche” de l’Union Européenne, c’est d’aider notre peuple à prendre conscience que ce rejet de la dictature de l’U.E. doit être associé à une bataille pour les droits de tous les travailleurs, pour les salaires, les services publics, bref pour une politique progressiste qui pose la question du changement de société dans chaque pays.
Et comme pour le mouvement social, les progressistes ne doivent pas se laisser détourner de leur bataille à cause du discours nationaliste de l’extrême-droite. Que Marine Le Pen demande le retrait de la loi travail ne nous fait ni chaud ni froid, et les puissantes manifestations contre cette loi ont été le meilleur antidote au racisme du FN. Que les peuples se lèvent et disent NON, qu’ils reprennent leur souveraineté et ouvre une nouvelle ère de coopération, et les nationalismes seront isolés ! Ce sont des peuples debout qui feront reculer les extrêmes-droites !
@ luc
[Dans ce contexte d’anomie , en 2015,Pierre Laurent est piégé par son enfermement proeuropéen et il ne peut que reprendre le discours médiatique dominant.]
Plus que par son « enfermement proeuropéen », il est piégé par la transformation de l’électorat PCF, qui aujourd’hui se recrute principalement chez les « classes moyennes ». Difficile alors de défendre une approche souverainiste sans perdre son électorat.
[Et Christian Favier, sénateur PCF et président du Conseil départemental du Val-de-Marne ajoute: « C’est un événement considérable et je suis très inquiet. La sortie de la Grande Bretagne de l’Union européenne est une mauvaise chose. Mais nous payons les orientations très libérales d’une Europe qui s’est construite pour faciliter la finance plus que les besoins sociaux. Cela va encourager ceux qui, face à la crise et à l’arrivée des migrants, préconisent des replis nationalistes extrêmement dangereux, voire des dérives autoritaires. Ce n’est pas bon signe pour la démocratie. J’espère que cela sera l’occasion pour les Européens de réfléchir à une meilleure construction de l’Europe sociale, par le haut, avec pourquoi pas un salaire minimum européen. »]
Favier ne fait que répéter le discours devenu canonique dans la gauche radicale, celui de « l’autre Europe ». Pour les tenants de ce discours, le fait que la construction européenne soit libérale et antipopulaire est contingent. C’est la faute des mauvais politiciens et des méchants technocrates. Si seulement on avait fait ça autrement, la joie et la solidarité régneraient en Europe. C’est pourquoi il ne faut pas jeter l’Europe, mais plutôt la réformer.
Je pense que ceux qui soutiennent cette position se trompent. La faillite du projet européen n’est pas contingente, elle est structurelle. Le cadre national étant le seul cadre où peut se manifester une solidarité inconditionnelle, toute tentative d’aller au delà de ce cadre ne peut que fabriquer un ensemble dont la solidarité est absente. L’UE n’est pas libérale à cause des mauvais bergers, elle l’est parce que c’est la seule Europe possible. La BCE refuse de financer les Etats non par méchanceté, mais parce que si elle finançait les Etats cela équivaudrait à donner à chaque pays un carnet de chèques pour tirer sans limite sur la caisse commune, donc sur les pays les plus riches, et ceux-ci ne l’accepteront jamais.
[Pour les européistes du PCF, il faut absolument accuser les peuples en colère de tous les maux, et, comme Hollande, utiliser le repoussoir du FN pour ne pas ouvrir enfin le véritable débat : Est-il pour les travailleurs plus facile de créer un rapport de forces favorable dans un pays ou dans l’union européenne globalement.. ? Poser la question, c’est y répondre.]
Tout à fait. Le cadre national est par définition un cadre solidaire. Etre citoyen d’une nation, c’est avoir des droits sur les autres et des devoirs envers eux. C’est cela qui matérialise la « solidarité inconditionnelle » qui pour moi est l’essence de la nation. Etre citoyen européen ne vous donne aucun droit sur les autres citoyens européens, et aucun devoir.
[Si le Brexit a été porté par des forces de droites, dans le contexte particulier de l’Angleterre et si les médias font tout pour le réduire à une décision nationaliste et réactionnaire, il est d’abord un coup de colère populaire d’un monde du travail qui refuse cette “concurrence libre et non faussée”.]
Et surtout, c’est la confirmation de ce que j’essaye de dire sur ce blog depuis des années : si la gauche refuse de porter cette colère, il s’en trouvera d’autres qui la porteront.
@ Descartes
En regardant les prises de position de tout un chacun à la suite du vote britannique, je trouve que vous êtes bien sévère envers vos amis et en revanche bien indulgent avec la droite bonapartiste telle que Sarkozy l’incarne (faute de mieux).
En effet, s’il est vrai que le tropisme souverainiste est probablement plus naturel à “droite” qu’à “gauche” (la faute à ce foutu internationalisme que Marx inventa), il n’en empêche pas moins qu’à droite, et plus particulièrement chez Sarkozy, on ne se contente pas d’être les idiots utiles du CAC 40 comme au PS: on en est clairement les fidéicommis, ce qui exclue, me semble-t-il, un “compromis” entre capital et travail. Sarkozy est un homme obsédé par l’argent: on a énormément de mal à l’imaginer mener le Grand Capital vers l’abattoir. Bolloré, Bettencourt, Bouygues ou Arnault lui retiendront la main…
A contrario, si JLM cède bien souvent aux sirènes gauchistes, il a fait, sur le sujet de l’UE et de l’Euro, sa révolution copernicienne (au point d’adopter la phraséologie du FN: l’Europe, tu la changes ou tu la quittes) et me paraît bien plus proche du modèle que vous préconisez que ne le sera très probablement jamais Sarkozy. Le problème bien évidemment c’est qu’ayant choisi dès le début le mauvais cheval (la Gauche radicale plutôt que le Gaullisme de Gauche), il manque de crédibilité et risque de rester toujours marginal.
@ odp
[En effet, s’il est vrai que le tropisme souverainiste est probablement plus naturel à “droite” qu’à “gauche” (la faute à ce foutu internationalisme que Marx inventa),]
Je ne crois pas que ce soit le cas, en tout cas en France. La gauche française est en effet autant l’héritière de Marx que de Robespierre, et s’est construite dans une synthèse très particulière entre marxisme et jacobinisme. Ainsi, le PCF a eu jusqu’à sa « mutation » dans les années 1990 un fort tropisme « souverainiste ». N’est ce pas Aragon qui écrivait « mon Parti m’a rendu les couleurs de la France » ?
[il n’en empêche pas moins qu’à droite, et plus particulièrement chez Sarkozy, on ne se contente pas d’être les idiots utiles du CAC 40 comme au PS: on en est clairement les fidéicommis, ce qui exclue, me semble-t-il, un “compromis” entre capital et travail. Sarkozy est un homme obsédé par l’argent: on a énormément de mal à l’imaginer mener le Grand Capital vers l’abattoir. Bolloré, Bettencourt, Bouygues ou Arnault lui retiendront la main…]
Mais justement, il ne s’agit pas dans mon propos de « mener le Grand Capital vers l’abattoir ». Cela supposerait une situation révolutionnaire qui n’existe pas aujourd’hui. Ma position est que dans le contexte qui est le notre, celui d’un capitalisme toujours en expansion, l’objectif réaliste est de reconstruire un compromis entre capital et travail qui revienne à une répartition plus juste du revenu, à l’image de ce que fut le compromis « gaullo-communiste ». Et c’est parce que ce compromis n’est concevable que dans le cadre national qu’il s’agit de restaurer ce cadre.
Après, si on regarde qui sont les dirigeants politiques qui aujourd’hui semblent le mieux pouvoir aboutir à un tel « compromis »… j’avoue que j’ai tendance à faire plus confiance à Sarkozy qu’à Juppé, par exemple. Sarkozy a une empathie avec le monde du travail – et en particulier le monde industriel – que n’ont ni Hollande, ni Juppé. J’ai pu le constater de visu lors des visites de Sarkozy a des installations industrielles, et notamment sa visite à la centrale nucléaire de Chinon.
[A contrario, si JLM cède bien souvent aux sirènes gauchistes, il a fait, sur le sujet de l’UE et de l’Euro, sa révolution copernicienne (au point d’adopter la phraséologie du FN: l’Europe, tu la changes ou tu la quittes) et me paraît bien plus proche du modèle que vous préconisez que ne le sera très probablement jamais Sarkozy.]
Si JLM a peut-être commencé à réfléchir sérieusement à la question, on est loin d’une « révolution copernicienne ». La formule même « l’Europe, tu la changes ou tu la quittes » montre bien qu’il conserve encore un espoir de « changer » l’Europe, d’installer une « autre Europe » dans laquelle la supranationalité deviendrait tout à coup désirable. Or, cela montre qu’il n’a rien compris. Si l’Europe n’est pas telle que JLM la rêve, ce n’est pas parce que des méchants dirigeants ou des méchants technocrates ont salopé le boulot. C’est parce que cette Europe là est structurellement impossible.
L’Europe que JLM voudrait impliquerait l’existence d’un « demos » européen, d’une solidarité inconditionnelle entre les citoyens européens. En d’autres termes, une nation européenne. Or, cette nation n’existe pas, et une nation ne se constitue pas comme ça, en quelques années. Dans ces conditions, parler d’une Europe « qu’on change ou qu’on quitte » c’est tromper les gens en leur faisant croire qu’il existe une option.
L’Europe telle que la conçoit Mélenchon est aussi éloignée du « modèle que je préconise » qu’on puisse l’être. Moi, je préconise une Europe de coopérations bilatérales, avec un contenu supranational réduit au strict minimum. Mélenchon, lui, en est toujours à la vision mitterrandienne d’une Europe politique, avec des institutions supranationales. Pour Mélenchon, si la BCE acceptait de financer les Etats, on pourrait s’en accommoder. Pour moi, l’idée d’une banque supranationale est structurellement mauvaise. De ce point de vue, je me demande si Sarkozy, avec son volontarisme assumé au niveau national n’est pas plus proche de moi que JLM.
@ odp
>la faute à ce foutu internationalisme que Marx inventa< Vous faites trop d’honneur à Marx. Je pense que vous parlez de cet internationalisme antinationaliste ; franchement, Marx n’était pas le seul à le professer dans la “gauche radicale” de son époque, car il faut rappeler que s’il nous semble naturel que le marxisme soit l’idéologie naturelle des mouvement socialistes, Marx n’a pas vécu assez longtemps pour le voir, car il était très contesté à son époque, et ne parlons même pas du fait que les mouvements anarchisants étaient toujours, de son vivant, très puissants… >Sarkozy est un homme obsédé par l’argent< Sachons raison garder : je n’ai jamais cru que Sarkozy fut un bolchévik. J’aurais franchement du mal à voter pour lui. Mais entre lui et Juppé, le choix est vite fait. De par leur bilan et leurs rapports respectifs avec la classe ouvrière, entre autres. >A contrario, si JLM cède bien souvent aux sirènes gauchistes, il a fait, sur le sujet de l’UE et de l’Euro, sa révolution copernicienne< Ce qui m’amuse – pour ne pas en pleurer – avec Mélenchon est son rapport aux journalistes. Il les déteste, leur crache à la gueule à toute occasion, mais ne vit que par eux. Donc non, son discours n’aura malheureusement que de suites sur Twitter, car il ne “propose” rien, de nos jours, il en est réduit à l’agitation médiatique… @ Descartes >Ainsi, le PCF a eu jusqu’à sa « mutation » dans les années 1990 un fort tropisme « souverainiste ».< La plupart des anciens partis de la troisième internationale, en fait.. L’internationalisme a pris une couleur franchement nationaliste à la faveur de la deuxième guerre mondiale, que ce soit en URSS, au Vietnam, en Inde ou à Cuba… Il n’y a au final que les trotskistes pour être restés dans l’idée de la Nation qui était celle prévalente avant les conflits mondiaux. >Moi, je préconise une Europe de coopérations bilatérales, avec un contenu supranational réduit au strict minimum. < C’est ce que préconisait Villepin, en son temps. Sic transit gloria mundi…
@ BolchoKek
[La plupart des anciens partis de la troisième internationale, en fait.. L’internationalisme a pris une couleur franchement nationaliste à la faveur de la deuxième guerre mondiale, que ce soit en URSS, au Vietnam, en Inde ou à Cuba… Il n’y a au final que les trotskistes pour être restés dans l’idée de la Nation qui était celle prévalente avant les conflits mondiaux.]
Globalement tu as raison. Mais il y des variations. En Grande Bretagne, aux Etats-Unis ou en Allemagne, par exemple, les communistes ne chantent pas l’hymne national et n’utilisent pas le drapeau national, alors qu’en France le PCF fait chanter « La Marseillaise » et utilise le drapeau tricolore dès la fin des années 1930 et jusqu’aux années 1990. Il y a une tradition jacobine qui nous est particulière… ne serait-ce que parce que chez nous les symboles nationaux viennent d’une Révolution, ce qui n’est pas le cas chez nos voisins…
@ Descartes
>En Grande Bretagne, aux Etats-Unis ou en Allemagne, par exemple, les communistes ne chantent pas l’hymne national et n’utilisent pas le drapeau national, alors qu’en France le PCF fait chanter « La Marseillaise » et utilise le drapeau tricolore dès la fin des années 1930 et jusqu’aux années 1990.< Je te fais déjà remarquer que les communistes allemands ont bel et bien chanté l’hymne national, et pas qu’un peu, justement jusqu’aux années 1990 : l’hymne de la RDA !
Pour ce qui est des anglo-saxons, il faut dire que leurs communistes ont toujours été marqués par un certain gauchisme. Mais si on fait le compte, ils sont l’exception plus que la règle…
>Il y a une tradition jacobine qui nous est particulière… ne serait-ce que parce que chez nous les symboles nationaux viennent d’une Révolution, ce qui n’est pas le cas chez nos voisins…< Tout à fait. Le drapeau rouge est un vieux symbole républicain, l’Internationale est un chant communard, il me semble même que le terme “camarade” vient des travailleurs parisiens, et ne parlons même pas du fait que Lénine fut reçu en Russie par une foule chantant la Marseillaise… Pour changer complètement de sujet, je ne sais pas si tu as vu à quel point les personnalités britanniques ayant pris position pour le “out” se sont faites lyncher par la bienpensance publique. Je pense notamment à John Cleese, l’ancien Monty Python, qui avait déclaré quelque chose du genre “si je pensais que l’Europe était réformable, je voterais in. Ce n’est pas le cas”. Il est vrai qu’il avait aussi parlé de pendre Juncker… Inutile de dire qu’il a été quelque peu attaqué ces derniers jours !
@ BochoKek
[Je te fais déjà remarquer que les communistes allemands ont bel et bien chanté l’hymne national, et pas qu’un peu, justement jusqu’aux années 1990 : l’hymne de la RDA !]
Je n’ai pas été précis, et je m’en excuse. En parlant des communistes allemands, je pensais au KPD de la RFA.
[Pour ce qui est des anglo-saxons, il faut dire que leurs communistes ont toujours été marqués par un certain gauchisme. Mais si on fait le compte, ils sont l’exception plus que la règle…]
Oui et non. Chez nous, l’idée de « nation » est liée à l’aventure révolutionnaire. C’est pourquoi c’est un concept qui jusqu’à une période récente était plutôt « de gauche » que « de droite ». Au point que De Gaulle pouvait dire « le malheur dans ce pays est que la droite n’aime pas la Nation et la gauche n’aime pas l’Etat ». Ailleurs – et pas seulement dans les pays anglosaxons – l’idée de « nation » est souvent une construction de la droite. Et dans ces pays, il est rare que les partis communistes aient réussi « la synthèse du drapeau rouge et du drapeau national », pour paraphraser Thorez.
[Pour changer complètement de sujet, je ne sais pas si tu as vu à quel point les personnalités britanniques ayant pris position pour le “out” se sont faites lyncher par la bienpensance publique. Je pense notamment à John Cleese, l’ancien Monty Python, qui avait déclaré quelque chose du genre “si je pensais que l’Europe était réformable, je voterais in. Ce n’est pas le cas”. Il est vrai qu’il avait aussi parlé de pendre Juncker… Inutile de dire qu’il a été quelque peu attaqué ces derniers jours !]
Que Cleese, représentant éminent de l’humour et du bon sens britannique, ait pris le parti du « out » et l’ai justifié aussi rationnellement me rassure. Mais il ne faut pas s’étonner des lynchages médiatiques. Souvenez-vous, on a eu les mêmes après la victoire du « non » en 2005. Pour les eurolâtres, la construction européenne n’est pas un choix rationnel, c’est une croyance quasi religieuse. Et celui qui est contre cette construction est vu comme rendant culte à Satan. D’où cette violence irrationnelle – qui reste pour le moment verbale.
@ Descartes
>Je n’ai pas été précis, et je m’en excuse. En parlant des communistes allemands, je pensais au KPD de la RFA.< Tu n’as pas vraiment à t’excuser, le quiproquo était mutuel… Mais il faut dire que si sous la RFA les communistes étaient assez antinationalistes, c’est parce qu’en face il existait une Allemagne tout aussi allemande, mais communiste. Je pense que la situation de l’Allemagne dans la guerre froide est assez exceptionnelle pour que justement, ça ne soit pas un exemple. >Oui et non. Chez nous, l’idée de « nation » est liée à l’aventure révolutionnaire. C’est pourquoi c’est un concept qui jusqu’à une période récente était plutôt « de gauche » que « de droite ».< J’y ai un peu réfléchi – ça m’arrive – et j’en suis arrivé à la conclusion qu’assez systématiquement, les communistes pro-soviétiques se positionnaient vis-à-vis de la Nation en fonction du rôle historique qu’ils avaient joué et du contexte dans lequel ils se plaçaient. Dans les luttes de libération anti-coloniale, ils sont arrivés à quasiment incarner l’esprit National. Dans d’autres pays qui n’ont pas connu ces difficultés internes, ils se sont positionnés comme anti-nationaux. Le cas du PCF est intéressant, puisque c’est justement la lutte contre l’occupant qui a “fait” le Parti…
@ BolchoKek
[Tu n’as pas vraiment à t’excuser, le quiproquo était mutuel… Mais il faut dire que si sous la RFA les communistes étaient assez antinationalistes, c’est parce qu’en face il existait une Allemagne tout aussi allemande, mais communiste. Je pense que la situation de l’Allemagne dans la guerre froide est assez exceptionnelle pour que justement, ça ne soit pas un exemple.]
Mais cela montre que la position des partis communistes « orthodoxes » vis-à-vis de l’idée de Nation a été très variable selon l’histoire nationale de chaque pays. Là où l’idée de Nation fait partie d’un processus révolutionnaire, les communistes ont eu tendance à l’incorporer dans le discours. Là où l’idée nationale est issue d’un processus réactionnaire, on observe le phénomène inverse. En France, le PCF avait une double référence nationale: celle du jacobinisme, et celle – comme tu le signales justement – de la lutte contre l’occupant.
@ BolchoKek
La position de John Cleese sur le Brexit me donne envie de me refaire “La Vie de Brian”.
Vous remarquerez que l’un des gauchistes outre-Manche les plus connus, Ken Loach, avait fait campagne pour le REMAIN…
Ce rappel des Monty Python me fait regretter l’absence d’artistes aussi talentueux qui nous pondrait une “Soupe aux Canards” ou “Dr Folamour” version satire de l’UE, il y aurait vraiment à faire ; mais où sont les Marx Brothers d’aujourd’hui ?
@ Bannette
[La position de John Cleese sur le Brexit me donne envie de me refaire “La Vie de Brian”.]
Je l’ai revu il y a une semaine. Toujours aussi extraordinaire. La scène sur la militante qui veut changer de « genre » reste un morceau de bravoure…
[Vous remarquerez que l’un des gauchistes outre-Manche les plus connus, Ken Loach, avait fait campagne pour le REMAIN…]
Oui, mais sans joie. Loach défend une ligne opportuniste : l’UE est libérale, mais moins que le gouvernement britannique. La question n’est pas donc le principe de souveraineté, mais un pur raisonnement pragmatique.
[Ce rappel des Monty Python me fait regretter l’absence d’artistes aussi talentueux qui nous pondrait une “Soupe aux Canards” ou “Dr Folamour” version satire de l’UE, il y aurait vraiment à faire ; mais où sont les Marx Brothers d’aujourd’hui ?]
Je n’y avais jamais pensé mais vous avez raison. La satyre, qui s’est tellement attaqué aux gouvernements nationaux, n’a pas encore mordu à l’UE. Ni dans la littérature, ni dans le cinéma. Et pourtant, il y aurait de quoi faire… mais il faut dire qu’alors que le pouvoir national fascine, le pouvoir bruxellois ne suscite guère d’intérêt…
Le choc du Brexit, enfermé dans la seule alternative Europe de droite ou Angleterre de droite, est-il pour les travailleurs un risque ou une opportunité ? Les communistes anglais pensent que c’est une opportunité pour la souveraineté populaire permettant de mener la bataille contre l’extrême-droite… En France, Pierre Laurent réaffirme la nécessité de “la reprise en main du projet européen par la gauche”. Ce Brexit va-t-il conduire à ouvrir au fonds les débats sur la question européenne ?
Pas sûr, tant les dirigeants européens ont imposé y compris dans le Brexit, un débat enfermé dans un faux dilemme entre une “paix” européenne et la guerre des nationalismes, faisant fi de toute la violence de la “concurrence libre et non faussée”… Hollande insiste “L’Europe est une grande idée et pas seulement un grand marché”. C’est tout l’intérêt de la construction idéologique “européenne” qui cache la réalité capitaliste derrière “de grandes idées”. Ni Hollande ni Sarkozy, ni Le Pen ne pourraient dire “le capitalisme est une grande idée, et pas seulement un grand marché”.Pour les communistes, il est urgent de refuser ce “faux dilemme” et d’ouvrir largement le débat du point de vue des intérêts populaires : Pour faire reculer la concurrence et gagner des progrès sociaux, faut-il plutôt s’inscrire dans le pari de l’europe sociale ou dans celui de la désobéissance européenne ? Autrement dit, refusant Europe de droite et nationalisme, faut-il chercher une “Europe de gauche” ou une sortie par la gauche ? Contre le piège du débat In-Out à droite, il est urgent d’ouvrir le débat In-Out à gauche, débat interdit par les médias, les institutions… et malheureusement, débat interdit pour l’instant au PCF.C’était il y a quelques jours la réponse à Anne Savourin, représentante du PCF au PGE qui constatait que “Le référendum ne laisse que deux options au peuple : rester dans l’UE néolibérale, ou sortir par la droite..” sans se rendre compte que la logique voulait alors d’interroger l’hypothèse de “sortir par la gauche”?Bien entendu, ce carré politique est une simplification. L’alternative gauche-droite recouvre mal en fait l’affrontement capital travail qui est au coeur du vote anglais, comme du NON français de 2005. L’alternative In Out est aussi une simplification des faux “out” qui veulent sortir de l’europe politique pour renforcer la concurrence libre et non faussée dans le grand marché… Mais il a le mérite de montrer clairement que le débat progressiste sur les alternatives à l’Union Européenne est indispensable, en lien avec la sortie de l’OTAN.Car le Brexit est immédiatement utilisé par les dirigeants européens pour tenter d’aller vers une intégration encore plus forte de l’europe utile, la francallemagne débarrassée de l’Angleterre,
@ poum
[Le choc du Brexit, enfermé dans la seule alternative Europe de droite ou Angleterre de droite, est-il pour les travailleurs un risque ou une opportunité ? Les communistes anglais pensent que c’est une opportunité pour la souveraineté populaire permettant de mener la bataille contre l’extrême-droite… En France, Pierre Laurent réaffirme la nécessité de “la reprise en main du projet européen par la gauche”. Ce Brexit va-t-il conduire à ouvrir au fonds les débats sur la question européenne ?]
On peut l’espérer. Mais notez que chez Pierre Laurent il n’y a aucun débat sur la « question européenne ». Il a d’ailleurs été très clair lors des débats du congrès : il est hors de question d’ouvrir un débat de fond chez les communistes sur la question européenne. L’appartenance à l’UE et à l’Euro sont intangibles. Tout au plus on peut discuter des « réformes » qu’on voudrait faire à cette architecture.
[Pour les communistes, il est urgent de refuser ce “faux dilemme” et d’ouvrir largement le débat du point de vue des intérêts populaires : Pour faire reculer la concurrence et gagner des progrès sociaux, faut-il plutôt s’inscrire dans le pari de l’europe sociale ou dans celui de la désobéissance européenne ?]
Pardon, mais… c’est quoi la « désobéissance européenne » ?
[Autrement dit, refusant Europe de droite et nationalisme, faut-il chercher une “Europe de gauche” ou une sortie par la gauche ? Contre le piège du débat In-Out à droite, il est urgent d’ouvrir le débat In-Out à gauche, débat interdit par les médias, les institutions… et malheureusement, débat interdit pour l’instant au PCF.]
Oui, et c’est dommage. Mais on ne peut pas commencer ce débat par des mises à l’index. Un tel débat implique qu’on réexamine le concept de « nation » avec sérieux, et sans commencer par prononcer des anathèmes contre les « nationalistes ». De même, il est illusoire de croire qu’on arrivera à peser sur ce débat en se contentant de parler à la « gauche » – quelque soit le sens qu’on puisse donner à ce mot. En 2005, c’est le « non » qui a gagné. Pas le « non de gauche », pas plus que le « non de droite ». Commencer à poser la question en termes « droite vs. gauche » me paraît une erreur.
@ Descartes
[Les dernières élections locales ont vu de grandes villes traditionnellement ouvrières – comme Le Havre ou Hénin-Beaumont – se donner des maires de droite alors que les villes les plus riches et bourgeoises – Paris, Lyon – ont donné de fortes majorités de gauche]
Je ne suis pas tout à fait d’accord avec cette citation. D’une part, il faut rappeler que la ville du Havre a quitté le giron communiste pour rejoindre celui du RPR dès 1995, ce qui est bien en avance par rapport à d’autres villes comme Hénin-Beaumont. De plus, l’actuel maire de la ville Édouard Philippe est l’un des bras droits d’Alain Juppé, le candidat des classes moyennes. Ajoutons à cela; qu’une ville qui auparavant était à gauche, Toulouse a basculé à droite aux dernières municipales alors que c’est une ville bien intégrée dans la mondialisation. S’il est indéniable que le caractère systémique des politiques municipales existe de façon flagrante dans des villes comme Paris, dans beaucoup de villes, nous avons à faire à des maires qui sont élus en raison de leur personnalité et de la gestion de leur ville sans que des considérations idéologiques rentrent en compte.
Autrement, concernant le Brexit, après m’en être réjoui, je commence à me demander si ce n’est pas un cadeau empoisonné. Au fond, les britanniques étaient là pour freiner les ardeurs fédéralistes des autres pays. Maintenant qu’ils ne sont plus là, on peut voir nos dirigeants demander plus de fédéralisme européen avec le mépris de classe qui va avec, Juppé expliquant qu’il ne faut pas faire voter le peuple en temps de crise, car cela ferait le jeu du Front National. La palme revenant à Fillon proposant qu’un vote de “jeune” compte le double de celui d’un “vieux” (proposition au passage complètement stupide car avec elle le FN serait au pouvoir).
Si un traité instaurant un fédéralisme serait ratifié sans demander une fois de plus l’avis populaire, il deviendrait évident que nous aurions à faire à un acte de haute trahison et toutes les formes de résistance seraient alors légitimes.
@ François
[Je ne suis pas tout à fait d’accord avec cette citation. D’une part, il faut rappeler que la ville du Havre a quitté le giron communiste pour rejoindre celui du RPR dès 1995, ce qui est bien en avance par rapport à d’autres villes comme Hénin-Beaumont. De plus, l’actuel maire de la ville Édouard Philippe est l’un des bras droits d’Alain Juppé, le candidat des classes moyennes.]
Vous avez raison de le rappeler. Mais mon point était qu’il est de plus en plus fréquent de voir les villes ouvrières avoir des maires de droite, alors que pendant longtemps elles ont été les bastions du PCF ou du PS/SFIO. A la même époque, Paris ou Lyon étaient des bastions imprenables de la droite. Depuis le milieu des années 1990, cette tendance s’inverse. Paris et Lyon passent à gauche, alors que des bastions ouvriers passent au contraire à droite. A mon avis, ce phénomène est significatif.
[S’il est indéniable que le caractère systémique des politiques municipales existe de façon flagrante dans des villes comme Paris, dans beaucoup de villes, nous avons à faire à des maires qui sont élus en raison de leur personnalité et de la gestion de leur ville sans que des considérations idéologiques rentrent en compte.]
Bien entendu, il y a des spécificités locales. Certaines villes ouvrières sont toujours à gauche, et des municipalités bourgeoises à droite. Mais il y a un glissement qui me semble suffisamment marqué pour être significatif.
[Autrement, concernant le Brexit, après m’en être réjoui, je commence à me demander si ce n’est pas un cadeau empoisonné. Au fond, les britanniques étaient là pour freiner les ardeurs fédéralistes des autres pays. Maintenant qu’ils ne sont plus là, on peut voir nos dirigeants demander plus de fédéralisme européen avec le mépris de classe qui va avec,]
D’abord, ce n’est pas parce que les anglais seront dehors qu’ils cesseront d’empoisonner la vie des bonzes de Bruxelles. Il y a une constante dans la politique britannique des quatre derniers siècles : empêcher à tout prix l’apparition d’une puissance dominante sur le continent. C’est pourquoi ils se sont alliés avec les Espagnols contre les Français, puis avec les Français contre les Espagnols, avec les Prussiens contre les Français, puis avec les Français contre le Kaiser puis contre Hitler… et ce n’est pas fini ! D’autre part, les britanniques n’étaient pas les seuls eurosceptiques. Et les mouvements de cette couleur se renforcent dans beaucoup de pays.
[Juppé expliquant qu’il ne faut pas faire voter le peuple en temps de crise, car cela ferait le jeu du Front National. La palme revenant à Fillon proposant qu’un vote de “jeune” compte le double de celui d’un “vieux” (proposition au passage complètement stupide car avec elle le FN serait au pouvoir).]
Ca… vous pouvez être sûr que ce n’est pas demain qu’on organisera un nouveau référendum sur les questions européennes…
@Descartes
“une construction européenne dont le caractère libéral ne laisse aucune ambiguïté.”
Et pourtant, bon nombre de libéraux, tels Charles Gave, Charles Boyer (cf: http://www.contrepoints.org/2016/06/26/258173-lunion-europeenne-est-morte-vive-leurope ), etc., ont soutenus le Brexit. Un sondage réalisé parmi les membres du forum libéraux.org donne une large majorité aux partisans du Leave (43 pour, 11 contre, cf: http://www.liberaux.org/index.php/topic/53555-brexit-aux-urnes-liborgiens-sauce-à-la-menthe/ ). Et je pourrais rappeler les positions sur l’UE de M. Jean-Jacques Rosa, qui sont en fin de compte les mêmes que celles de M. Pascal Salin dans son ouvrage intitulé Libéralisme (chapitre sur l’euro). Les opinions de M. Gaspard Koenig, qui souhaite instaurer un revenu minimum universel et interdire l’enseignement privé (cf: http://libertarien.overblog.com/2015/05/notes-de-lecture-le-revolutionnaire-l-expert-et-le-geek-de-gaspard-koenig.html ) sont heureusement loin de représenter fidèlement le rapport des libéraux à l’UE… On est donc fondé à penser qu’ils sont soit idiots, soit que c’est le caractère libéral de l’Union européenne qui n’est pas si avéré que ça… Parce qu’à la vérité l’UE est à peu près n’importe quoi: libérale, protectionniste, social-démocrate, anti-immigration, sans-papiériste, catholique mais favorable à l’entrée de la Turquie à grand renfort de distribution de poignon, pro LGBT (cf: http://hydra.forumactif.org/t758-pourquoi-le-lobby-lgbt-a-bruxelles-est-il-subventionne-par-l-union-europeenne-et-le-departement-d-etat-americain?highlight=lobby), pour la paix des peuples mais pas hostile à l’idée d’une grande armée européenne, pour le libre-échange (interne !) mais favorable à un simulacre d’embargo économique contre la Russie, pour l’austérité nationale mais toujours plus bureaucratique et fédéraliste, etc etc.
@ Johnathan R. Razorback
Et pourtant, bon nombre de libéraux, tels Charles Gave, Charles Boyer (…), etc., ont soutenus le Brexit. Un sondage réalisé parmi les membres du forum libéraux.org donne une large majorité aux partisans du Leave (43 pour, 11 contre, (…) ). Et je pourrais rappeler les positions sur l’UE de M. Jean-Jacques Rosa, qui sont en fin de compte les mêmes que celles de M. Pascal Salin dans son ouvrage intitulé Libéralisme (chapitre sur l’euro).]
C’est un débat intéressant. Vous avez raison de signaler que beaucoup de libéraux trouvent la prétention des fédéralistes à construire un « Etat européen » adossé à une « nation européenne » aussi dangereuse sinon plus que les vieux Etats nationaux. En effet, ils pressentent qu’un tel Etat serait encore plus interventionniste, et au vu de la mentalité de la bureaucratie eurocratique, on ne saurait leur donner tort.
Cela étant dit, il y a les jérémiades des fédéralistes, et il y a la réalité. Et l’UE telle qu’elle se construit dans la réalité est, incontestablement, toute dédiée à stimuler la concurrence entre les entreprises, entre les pays, entre les travailleurs. De cet « Etat européen » capable de mettre des barrières à la concurrence dont les libéraux craignent l’apparition, on ne voit même pas les prémisses. C’est dans ce sens qu’on peut dire que la construction européenne – celle qu’on a dans la réalité, pas celle fantasmatique des fédéralistes – est incontestablement libérale. Elle pourrait l’être plus : on aurait par exemple pu laisser les banques faire faillite sans que la BCE – autrement dit le contribuable – vole à leur secours. Mais l’expérience de 1929 a montré, même aux libéraux les plus extrémistes, qu’il y a des situations où le coût du « laissez faire » est prohibitif.
[Parce qu’à la vérité l’UE est à peu près n’importe quoi: libérale, protectionniste, social-démocrate, anti-immigration, sans-papiériste, catholique mais favorable à l’entrée de la Turquie à grand renfort de distribution de poignon, pro LGBT (…), pour la paix des peuples mais pas hostile à l’idée d’une grande armée européenne, pour le libre-échange (interne !) mais favorable à un simulacre d’embargo économique contre la Russie, pour l’austérité nationale mais toujours plus bureaucratique et fédéraliste, etc etc.]
Dans les mots, sans doute. Mais dans les faits, non. Si vous regardez les politiques effectivement mises en œuvre, elles sont toutes nettement orientées à stimuler la concurrence, à casser les monopoles, à affaiblir les possibilités d’intervention des Etats.
@ Johnathan R. Razorback
Je pense que c’est notamment dû au fait que les libéraux de conviction sont très largement intellectuels, et n’ont pas beaucoup de prise sur les choses. Et c’est une tendance que vous faites bien de souligner, vous faites bien de commenter ici.
Mais en réalité, je pense que l’on doit voir l’orientation politique de l’Europe comme orientée par une sorte de libéralisme technicien, qui rejoint en ce sens l’ordolibéralisme allemand. C’est à dire la croyance déterminée en des “réformes” plus ou moins magiques, une sorte d’équivalent gouvernemental d’une argu-type étudiante qui amènerait la prospérité partout et nonobstant toute particularité locale non seulement dans la structure économique mais aussi humaine ; vous savez, cette pression pour découper la France et les autres pays en régions euro-compatibles, ce technicisme forcené qui nous force à adopter les “bonnes politiques”… Je sais bien que les libéraux de conviction comme vous ont de nombreuses réticences vis-à-vis de ce modèle, et c’est logique du point de vue idéologique. Mais ce que l’on observe est que la politique européenne mène depuis des décennies à accroître les profits des entreprises et à écraser le revenu du travail, à compresser les systèmes redistributifs, à briser les États. Et tout cela au nom d’une certaine “modernité”…
Je n’ai aucun doute que bien des libéraux ont un problème avec tout cela, mais bon, ce blog est tenu par un marxiste et ancien communiste, fréquenté surtout par des gens qui ont de la sympathie sinon une adhésion pour ce courant de pensée, il est normal que nous fassions des généralisations quand nous parlons des “libéraux” – en fait comme quand les libéraux parlent des “marxistes”, vous savez 😉
Tout ce monde médiatique,monolithique 100% libéral,parle de « choc »,inadmissible!
Propager l’ignorance comme les journalistes le font actuellement est,alors là,Oui,INADMISSIBLE!
Certains ont été jusqu’à constater comme Sarkozy, Hollande, Valls et consort que l’Europe ne fonctionne pas, mais je n’ai pas entendu un de ces types mettre en relation le refus de l’Europe avec le dumping social qui est imposé aux travailleurs et leur nouvelle loi travail… Pas un pour faire le lien entre ces mois de manifestations, de refus d’une loi de dégradation de leurs conditions, le rôle des diktats européens, la surdité de ce gouvernement, de ces « élites » médiatico-politiques et de ce vote britannique, et pourtant… Non il leur faut encore traiter comme des abrutis, des racistes ceux qui subissent de plein fouet leur politique… Rendez-vous compte les jeunes, ceux qui sont beaux, diplômés, les golden boys de la City, les nôtres quoi! ont tous voté pour l’Europe, les vieux, les moches , les édentés sont pour le Brexit…Il sont de plus en plus écœurants dans leur mépris du peuple…
@ danielle
C’est un peu ce sentiment qui m’avait poussé à parler d’un “retour de la haine de classe”. Le Brexit semble avoir fait tomber les dernières inhibitions…
“Si vous regardez les politiques effectivement mises en œuvre, elles sont toutes nettement orientées à stimuler la concurrence.”
Toutes ? Non ! 😉
Il est certain que le mouvement libéral ne serait pas divisé vis-à-vis de l’UE si un certain nombre des politiques de l’Union ne trouvaient pas grâce à ses yeux… Néanmoins, la PAC est l’un des plus anciens et plus importants programme de l’UE, et elle n’a que peu à voir avec le marché libre, n’est-ce-pas ? Et on pourrait citer nombre d’autres situations où l’Union intervient dans l’économie (cf: http://www.france24.com/fr/20141105-ue-europe-depense-erreur-milliard-euros-budget-cour-compte-exemples ), subventionne divers lobbys (cf: http://hydra.forumactif.org/t758-pourquoi-le-lobby-lgbt-a-bruxelles-est-il-subventionne-par-l-union-europeenne-et-le-departement-d-etat-americain#1366 ), etc, sans parler des “fonds de mise à niveau” pour les pays entrant, qui ne sont pas si différents de ce que vous appelez la “solidarité nationale inconditionnelle” (en fait de la redistribution qui passe largement inaperçue pour les contributeurs).
J’en profite pour rajouter à ma précédente liste le point de vue libéral-conservateur d’Aristide Renou: http://aristidebis.blogspot.fr/2016/06/brexit-et-apres.html . On pourrait y ajouter encore le Free Citizens’ Party (libéral-souverainiste), de République Tchèque (cf: https://en.wikipedia.org/wiki/Party_of_Free_Citizens#Philosophy ), les britanniques Daniel Hannan et Richard North (cf: https://www.contrepoints.org/2016/03/03/241407-9-tromperies-du-referendum-britannique-sur-lunion-europeenne )… Force est de constater que le débat sur l’Union ne recoupe pas plus le clivage droite/gauche que le clivage girondins / jacobins.
@ Johnathan R . Razorback
[Néanmoins, la PAC est l’un des plus anciens et plus importants programme de l’UE, et elle n’a que peu à voir avec le marché libre, n’est-ce-pas ?]
Non. La PAC est un programme de la Communauté européenne, et vient d’une époque ou le choix libéral n’était pas encore affirmé. L’UE a hérité le bébé et fait d’ailleurs tous les efforts possibles et imaginables pour y mettre fin, précisément parce qu’elle considère qu’elle fausse les mécanismes de marché…
[Et on pourrait citer nombre d’autres situations où l’Union intervient dans l’économie (…),]
L’article que vous citez donne des exemples de mauvaise utilisation des deniers de l’UE, mais aucun d’entre eux ne montre une situation où l’UE soit intervenue en contrant les mécanismes de marché. Ces interventions ne sont donc en rien contraires à la logique « libérale ».
[subventionne divers lobbys (…), etc,]
Là encore, je ne vois pas en quoi ce serait « antilibéral ». Le libéralisme ne s’oppose nullement au financement de « divers lobbys »…
[sans parler des “fonds de mise à niveau” pour les pays entrant, qui ne sont pas si différents de ce que vous appelez la “solidarité nationale inconditionnelle” (en fait de la redistribution qui passe largement inaperçue pour les contributeurs).]
Ces fonds doivent être dépensés dans le plus stricte respect de la logique du marché. On est donc bien dans le cadre d’une politique libérale. Je vous rappelle que les libéraux ne s’opposent pas à une certaine redistribution lorsqu’elle est dans l’intérêt public, à condition que celle-ci ne perturbe pas le fonctionnement des marchés.
Par ailleurs, il n’y a pas de « solidarité inconditionnelle » dans les fonds de mise à niveau. Ceux-ci sont accordés pour des durées limitées et pour des montants fixés à l’avance.
[Force est de constater que le débat sur l’Union ne recoupe pas plus le clivage droite/gauche que le clivage girondins / jacobins.]
Le clivage « girondins/jacobins » n’existe que chez nous. Il serait donc difficile de le projeter dans des débats qui se passent ailleurs en Europe…
Jacques Sapir trés inspiré ,a écrit d’excellents articles sur le Brexit,non?
@luc
Sapir est toujours très intelligent… et surtout ne se sent pas obligé d’adhérer au politiquement correct!
@poum,vous écrivez ‘[ L’alternative In Out est aussi une simplification des faux “out” qui veulent sortir de l’europe politique pour renforcer la concurrence libre et non faussée dans le grand marché… ]’
En vous prenant aux mots,je réalise en effet qu’une sortie de l’UE peut se faire en vue de ‘renforcer la concurrence libre et non faussée’.
Si c’est le cas un gouvernement sans volonté de protéger son marché national,se heurterait à des mouvements sociaux-politiques trés forts.
Jack London dans le talon de fer avait imaginé ce scénario,mis en pratique aux USA,par l’utilisation des mafias afin d’anéantir les militants ouvriers,sous la férule du fbi dirigé par Howar R. Hugues.
Un tel gouvernement souverainiste – libéral, serait obligé de réprimer.
Valls manifestement est tenté par l’autoritarisme,même si Hollande le freine seule la maitrise des forces de police a évité pour l’instant des drames..
Son mode de gouvernance serait d’instaurer le fascisme comme au Chili aprés le coup d’état du 11/09/1973,où l’école de Chicago avait mis en oeuvre ses concepts libéraux,sous la férule souverainisto-fasciste,n’est ce pas ?,
Brexit!Déjouant tous les pronostics et les pressions de l’oligarchie, les britanniques ont voté massivement pour le Brexit ce 23 juin dans le referendum pour la sortie de l’UE.La campagne a été marqué par un faux dilemme imposé par les partisans de l’austérité : soit rester dans l’UE néolibérale soit sortir par la droite pour une politique néolibérale en Grande-Bretagne.Si le rejet de l’UE et de ses politiques est légitime tant il n’y a pas grand-chose à garder de cette Europe de l’austérité, les travailleurs britanniques peuvent craindre que les puissants se servent du Brexit pour accentuer les politiques thatchériennes dans le pays. Cependant, l’Union Européenne n’est pas un rempart contre l’ultralibéralisme, bien au contraire. La priorité de l’Europe actuelle, c’est de favoriser le monde des affaires, l’austérité et les privatisations sur tout le continent.
Je ne m’y trompe pas. « L’économie de marché » et la « concurrence libre et non faussée » prescrites par l’Union Européenne sont des prétextes formidables pour permettre au patronat de comprimer les salaires et d’attaquer les services publics ainsi que la protection sociale.
Je suis également fortement attaché au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à exercer leur souveraineté. L’UE peut donc, à beaucoup d’égard, représenter une « prison des peuples ». Cela n’intéressait plus les britanniques.
Contre le piège d’une « sortie de droite » ou d’un « maintien de gauche » dans l’UE, proposons une « sortie de Gauche », pour pouvoir renationaliser les secteurs stratégiques de notre économie cassée, remettre le monde du travail au centre de la vie nationale, coopérer avec tous les pays de tous les continents et rouvrir à notre pays la voie de la coopération internationale.
La reconquête de la souveraineté britannique peut être un appel d’air pour tous les peuples d’Europe qui étouffent sous la poigne des traités supranationaux et néolibéraux de l’UE avec en prime, leur complément belliqueux obligé, l’appartenance à l’OTAN.
@ Jean-jacques
[La campagne a été marqué par un faux dilemme imposé par les partisans de l’austérité : soit rester dans l’UE néolibérale soit sortir par la droite pour une politique néolibérale en Grande-Bretagne.]
Je crois qu’il y a là une erreur de raisonnement. Le choix entre le « in » et le « out » n’est pas le choix d’une politique économique ou sociale. C’est un choix de souveraineté. La question était « voulez vous que les décisions soient prises à Londres par des gens que vous avez élu parmi vos concitoyens, ou plutôt à Bruxelles par des représentants élus ou nommés dans toute l’Europe ». Cela ne dit rien de la nature de la décision.
Il y a dans le débat européen une erreur funeste, qui repose sur un raisonnement ad hoc. Pour beaucoup, il faut s’opposer à l’UE supranationale parce qu’elle fait une politique libérale, mais cette supranationalité deviendrait tout à fait acceptable si elle servait à imposer une politique sociale. En d’autres termes, on juge la construction européenne à ses résultats, et non à son essence. Pour moi, le souverainisme ne peut être qu’une position de principe : les autorités et les pouvoirs résident essentiellement dans la Nation. Tout pouvoir qui n’en émane pas est par essence tyrannique, et finira tôt ou tard par être confisqué par les intérêts dominants. La supranationalité est mauvaise par essence, et non en fonction de la politique qu’elle sert à un moment donné.
[Si le rejet de l’UE et de ses politiques est légitime tant il n’y a pas grand-chose à garder de cette Europe de l’austérité,]
« Le rejet de l’UE » et « le rejet de ses politiques » ne peuvent pas être regroupés de cette manière. Les deux « rejets » reposent sur des bases différentes. On peut être antilibéral et favorable à la supranationalité, on peut être libéral et souverainiste. Vous faites ici l’erreur que j’ai dénoncé plus haut : penser que le rejet de l’UE et de ses politiques vont en parallèle.
[les travailleurs britanniques peuvent craindre que les puissants se servent du Brexit pour accentuer les politiques thatchériennes dans le pays.]
Le Brexit rapatriera les pouvoirs à Londres. Ce que le peuple britannique fera avec ces pouvoirs est une autre question.
[Contre le piège d’une « sortie de droite » ou d’un « maintien de gauche » dans l’UE, proposons une « sortie de Gauche »,]
Il n’y a pas de « sortie de gauche » ou de « sortie de droite ». Si on commence à diviser ceux qui à droite et ceux qui à gauche croient à la souveraineté nationale, on n’arrivera jamais à rien. Il faut au contraire favoriser le rassemblement des souverainistes autour de cette simple revendication : le rapatriement des pouvoirs de décision à Paris. Ensuite, on pourra se diviser sur ce qu’il faudra faire avec les pouvoirs ainsi récupérés…
[La reconquête de la souveraineté britannique peut être un appel d’air pour tous les peuples d’Europe qui étouffent sous la poigne des traités supranationaux et néolibéraux de l’UE]
Encore faut-il qu’elle soit réussie. C’est pourquoi il faudrait une mobilisation générale de ceux qui croient à l’importance de la souveraineté pour soutenir l’expérience britannique…
« L’expérience de 1929 a montré, même aux libéraux les plus extrémistes, qu’il y a des situations où le coût du « laissez faire » est prohibitif. »
Ce que je sais de l’interprétation libérale des causes et des réponses à apporter à la crise de 1929 ne correspond pas à ce que vous sous-entendez. La Grande dépression n’a pas fait évoluer la théorie libérale (à la différence de l’apparition du marxisme, par exemple). En revanche, elle a mené de gros bataillons d’économistes et d’intellectuels vers le keynésianisme (et le planisme).
« Si vous regardez les politiques effectivement mises en œuvre, elles sont toutes nettement orientées à stimuler la concurrence. »
Pas toujours, semble-t-il : « Prenons l’exemple de l’unification du marché de l’électricité. Quand un marché s’unifie et s’élargit, en principe les coûts baissent, et les consommateurs sont gagnants. Rien de tel en Europe, où le coût de l’électricité ne cesse de se renchérir dans les 28 — bientôt 27 — États membres, alors qu’il diminue sur les autres continents. En janvier 2014, la Commission concédait une augmentation moyenne de 4% par an sur les cinq dernières années. Pourquoi ? Parce que l’UE s’est résolument engagée dans l’abandon des énergies fossiles — qui émettent du CO2 — mais également dans la renonciation au nucléaire — qui n’émet pas de CO2, mais qui déplaît à l’Allemagne et aux lobbys écologistes.
Cette politique du tout au renouvelable, massivement nourrie de subventions publiques, explique le coût exorbitant de l’électricité européenne. Le résultat de cette politique anti-libérale est que les principaux opérateurs économiques dans le domaine de l’électricité se trouvent aujourd’hui, en dépit de subventions publiques sans précédent, dans une situation financière précaire. » (cf : http://www.contrepoints.org/2016/07/12/260095-lunion-europeenne-liberale ).
@ Johnathan R . Razorback
[Ce que je sais de l’interprétation libérale des causes et des réponses à apporter à la crise de 1929 ne correspond pas à ce que vous sous-entendez. La Grande dépression n’a pas fait évoluer la théorie libérale (à la différence de l’apparition du marxisme, par exemple).]
Je n’ai jamais dit que la Grande Dépression ait fait « évoluer la théorie libérale ». J’ai dit qu’elle avait fait évoluer beaucoup de libéraux. Avec ou sans théorie, beaucoup de ceux qui avant la crise avaient mis leur foi dans le « laisser faire, laisser passer » ont pris des positions bien plus interventionnistes, et certains sont même devenus keynésiens… comme vous le précisez d’ailleurs.
[« Si vous regardez les politiques effectivement mises en œuvre, elles sont toutes nettement orientées à stimuler la concurrence. » Pas toujours, semble-t-il :]
Non, vous avez raison. Dans quelques opportunités, un lobby particulièrement puissant à réussi à mettre en échec les penchants libéraux de la commission. C’est le cas du lobby écologiste, qui a réussi à imposer des objectifs contraignants de développement des énergies renouvelables par la subvention… mais ces cas sont marginaux. Dans la plupart des cas, c’est la logique libérale qui préside aux politiques communautaires.
[ Ce point mériterait d’ailleurs un long développement. En France, les syndicats « de masse » ont toujours rejeté la violence groupusculaire, considérant – à juste titre – que la dégradation des biens publics et privés et la violence de rue n’apportaient rien au mouvement et lui aliènent le soutien de l’opinion publique, essentiel dans une société démocratique. ]
Je me demandais si faire un billet sur les syndicats “de masse” est encore d’actualité selon vous ? Notamment le fait que les syndicats sont de plus en plus inaudibles ou que certains servent de godillots pour le pouvoir en place (cf. la CFDT).
@ Glarrious
[Je me demandais si faire un billet sur les syndicats “de masse” est encore d’actualité selon vous ?]
Il faut s’entendre sur le sens des mots. Une « organisation de masse » n’est pas nécessairement une organisation qui a beaucoup d’adhérents. Une « organisation de masse » est une organisation qui n’exige pas de ses adhérents une adhésion à une ligne politique particulière, et qui de ce fait peut attirer des gens professant une variété d’opinions politiques. Le concept de « organisation de masse » a été pensé par Lénine : a côté du Parti ouvrier lui-même, organisation disciplinée exigeant de ses membres d’adhérer à une ligne politique décidée collectivement, il fallait aux communistes encourager les travailleurs – même ceux qui n’adhéraient pas à la ligne du Parti – de s’organiser pour poursuivre des revendications partielles. C’est dans ce cadre que le PCF par exemple a toujours animé des « organisation de masse » dans des domaines variés : syndical avec la CGT, pacifistes avec le Mouvement de la Paix, scoutisme avec les Francs et Franches Camarades, sportif avec la FSGT, culturels (Chœur populaire de Paris)…
Les syndicats restent aujourd’hui des « organisations de masse » en ce qu’elles s’adressent à la « masse » des travailleurs, dans un spectre très large d’opinions politiques, sociales ou éthiques.
[Notamment le fait que les syndicats sont de plus en plus inaudibles ou que certains servent de godillots pour le pouvoir en place (cf. la CFDT).]
La conception de la CFDT est bien connue : « si le gouvernement rétablissait l’esclavage, la CFDT irait négocier le poids des chaînes ». Mais si les syndicats sont « de plus en plus inaudibles », c’est moins une question de choix stratégique que de rapport de forces. Le monde du travail est, depuis les années 1980, en situation de faiblesse. Depuis cette date, il a perdu tous les combats qu’il a engagé ou presque. Comment voulez-vous que les organisations ouvrières soient « audibles » dans ces conditions ? Seuls arrivent à se faire entendre les syndicats qui représentent des groupes qui bénéficient d’un rapport de force raisonnable : policiers, enseignants…