Où que l’on regarde, on ne voit qu’indignation et pleurs. Sur les ondes de la radio et de la télévision nationales, dans les journaux bienpensants, dans les magasines et sans doute bientôt dans les livres, notre classe politico-médiatique porte le costume qu’elle préfère, celui de l’indignation vertueuse qui ne coûte pas grande chose. Je parle, vous l’aurez deviné, de cette « crise migratoire » provoquée par l’arrivée massive d’une immigration africaine et proche-orientale sur les côtes italiennes et grecques, et qui grâce à la magie de Schengen diffuse lentement dans le reste de l’Europe.
Entendons nous bien : Qui n’est pas ému par le regard de ces hommes, ces femmes et ces enfants qui arrivent sur les côtes européennes à la recherche d’une vie meilleure n’est pas humain. Mais il y a ce qui est de l’ordre de l’émotion, et ce qui est de l’ordre de la politique. Et il n’est pas bon de mélanger ces deux dimensions. Les décideurs politiques ne sont pas là pour larmoyer sous l’œil dévorant des caméras de télévision. Leur boulot, c’est de prendre des décisions réalistes et conformes à l’intérêt général. Et ces décisions sont quelquefois tragiques. Celui qui croit qu’on peut gouverner l’Etat en conservant une conscience d’une pureté virginale et des mains propres ne devrait pas faire de la politique. Gouverner, c’est faire des choix entre des options viables. Et il est des situations où il s’agit de choisir entre le mal et le pire.Gouverner un Etat, ce n’est pas la même chose que diriger « Médécins sans frontières » ou l’Armée du Salut.
C’est pourquoi il convient de recevoir les injonctions taxatives des autorités morales autoproclamées avec une certaine méfiance, d’autant plus qu’elles ne leurs coûtent pas grande chose. Ainsi, par exemple, on pouvait entendre l’ineffable Bernard Guetta, bien connu par son eurolâtrie acritique et sa tendance bien affirmée à donner des leçons à la terre entière, qui opposait l’attitude frileuse des pays européens à celle de pays comme le Liban ou la Jordanie, qui accueillent paraît-il généreusement un nombre de réfugiés bien supérieur. Bien sur, le discours de Guetta oublie convenablement quelques enseignements de l’histoire, par exemple comment les réfugiés palestiniens furent enfermés dans des camps au Liban, ou massacrés en Jordanie dans cet épisode aujourd’hui oublié qu’était « Septembre Noir ». Mais bon, Guetta ne fait ici que se livrer au sport préféré de nos élites, celui qui consiste à se frapper la poitrine en constatant que tout est mieux ailleurs.
Il y a dans ces pleurnicheries quelque chose de puéril. Car il faut être cohérent : si le fait de fuir la misère en Erythrée ou la guerre en Libye est un motif suffisant pour obtenir le droit de vivre en Europe, cette règle devrait s’appliquer autant à ceux qui débarquent à Lampedusa qu’à ceux qui demandent une visa à l’Ambassade de France dans leur pays ou essayent d’embarquer dans un avion pour Roissy. Pourquoi exiger pour les uns ce qu’on refuse – dans la plus grande indifférence – aux autres ? Pourquoi ceux-là mêmes qui manifestent pour la régularisation des clandestins à Paris n’exigent pas l’ouverture totale des frontières aux Syriens, Erythréens, Afghans ou Libyens qui souhaitent quitter leur pays ? Cette solidarité à géométrie variable montre combien nos élites fonctionnent sous la dictature de l’émotion. L’Afghan qui se voit refuser l’embarquement pour Paris à l’aéroport de Kaboul ne passe pas à la télévision, il n’a pas l’occasion de montrer son visage émacié et ses yeux de caniche dans les étranges lucarnes. Il n’intéresse donc personne. Celui qui arrive à Lampedusa ou se fait expulser de la halle Paillol, lui, passe au vingt heures. Et du coup, son expulsion est un scandâââââle.
Il faut d’ailleurs noter combien cette affaire permet – comme les sans-papiers ou les sans-logement en leur temps – à la bienpensance boboïsée de se forger une bonne conscience à l’épreuve des balles. Et à peu de frais. Car on notera un petit glissement dans le sens du mot « solidarité ». Pour l’illustrer, permettez-moi de raconter un souvenir personnel. Je me souviens encore aujourd’hui du couple chilien que mes grands-parents ont hébergés quelques mois chez eux quand j’étais gamin, en 1973, après la chute d’Allende. A leurs frais et sans la moindre subvention ou allocation de qui que ce soit. Pourtant, ils habitaient dans un modeste appartement, et ils n’avaient pas de fortune. Mais bon, c’était des communistes chiliens et cela suffisait pour que mes grands parents partagent avec eux le peu qu’ils avaient. Aujourd’hui, j’entends avec effarement un Laurent ou un Mélenchon saluer la « solidarité » démontrée par quelques centaines de personnes, élus, écrivains, acteurs, qui se mobilisent contre l’expulsion par les forces de l’ordre d’un campement de clandestins à Paris. En quoi consiste leur « solidarité » ? En demander à l’Etat – traditionnelle vache à lait – qu’il reloge les clandestins en question. Pourtant, il n’y avait qu’une centaine de familles. Si chacun de ces manifestants avait hébergé l’une d’elles chez lui comme le firent mes grands-parents, le problème est résolu. Aucune de ces « personnalités » à ma connaissance n’a donné l’exemple. Pourtant, elles ont certainement bien plus de moyens que mes grands parents… mais peut-être hébergent-elles des gens et ne le disent pas aux médias par modestie ?
Le fait est que dans cette matière, comme dans beaucoup d’autres, nos gouvernants refusent de regarder la réalité en face. On ne peut pas gérer un problème comme celui de l’asile – et encore moins celui de l’immigration – au cas par cas en fonction de la pression médiatique et des échéances politiques. Il faut définir une doctrine qui donne une cohérence à l’action publique et la protège de la dictature de l’émotion. Et il y a urgence, parce que la logique de l’asile, définie au départ pour protéger les personnes victimes d’une persécution politique, a une certaine tendance à dériver et finira, si on continue dans cette voie, par couvrir n’importe quel inconfort. On peut comprendre que la France ait vocation à accueillir sur son sol ceux qui sont menacés de mort pour leurs opinions ou leurs écrits politiques. Mais faut-il conclure que toute personne qui quitte son pays pour fuir un mariage arrangé a le droit d’être accueilli en France ? Si tel est le cas, nous prenons le risque d’avoir la moitié de l’Inde à nos portes…
Et une fois qu’on aura défini des critères, il faut les appliquer. Et c’est là le plus dur, comme on a pu le voir dans l’affaire Léonarda. Le domaine de l’asile comme celui de l’immigration clandestine a été choisi par les « classes moyennes » pour se donner une bonne conscience. C’est ce qui explique l’attitude des partis politiques de la « gauche radicale » et la prolifération d’associations dites « d’aide aux migrants ». Ces associations, dont les membres – et croyez-moi, pour les avoir fréquentés, il faut les écouter parler, c’est une expérience – se sentent investis d’une « mission » quasi-divine qui justifie tout, y compris la violation de la loi, se sont fait une spécialité dans le détournement du dispositif d’asile. Ainsi, on pousse le clandestin a demander le statut de réfugié auquel on sait pertinemment qu’il n’a pas droit, n’étant nullement persécuté dans son pays. Pourquoi ? Parce que entre l’instruction de la demande et les nombreux recours administratifs que notre droit prévoit, on peut faire durer la chose 18 mois au moins. Cela donne du temps pour conclure un mariage, blanc ou pas, de scolariser les enfants, de trouver un travail, de s’installer… éléments au nom de quoi on plaidera plus tard une demande de régularisation. Et si celle-ci est rejeté, ne croyez pas que l’association en question acceptera la décision. Elle aidera le clandestin à se maintenir sur le territoire envers et contre tout.
Il faut dire que pour les nouvelles dames patronnesses des « classes moyennes », le clandestin est le « pauvre » idéal, tout simplement parce qu’il est apolitique. Et surtout, parce que lui faire plaisir ne leur coûte guère. Le clandestin régularisé n’ira pas concurrencer le médecin, l’enseignant, l’ingénieur, le conseiller en communication. Lorsqu’il entre sur le marché du travail, lorsqu’il faut se loger, lorsqu’il a accès aux dispositifs de solidarité, il concurrence les couches populaires. Celles-ci ne se trompent pas d’ailleurs, et ce n’est pas un hasard si c’est dans ces couches qu’on trouve la plus forte opposition aux schémas « généreux » de nos élites boboïsées.
Au fond, la question est simple, même si les réponses sont complexes : pendant des siècles nous avons construit chez nous un système économique, institutionnel, social qui nous permet de vivre des vies raisonnablement riches, raisonnablement libres, raisonnablement agréables. D’autres hommes, dans d’autres contrées, voudraient bénéficier de tout cela et viennent chez nous à cet effet. Si l’on peut comprendre ce qui les pousse, est-ce qu’ils ont pour autant un droit inaliénable à exiger que nous partagions notre gâteau avec eux ? Selon la réponse qu’on donne à la question, les politiques seront fondamentalement différentes.
Personnellement, je ne crois pas à ce droit. Nous bénéficions de tous ces avantages non par décision divine : notre pays n’est pas béni par un climat particulièrement tendre, par des ressources minérales que les autres n’auraient pas. Si nous sommes riches et libres, c’est par le travail, l’effort, le sacrifice des générations qui nous ont précédé. Le seul devoir que cette situation nous impose est d’enrichir encore le patrimoine que nous transmettrons aux générations futures. Mais rien de plus. Nous pouvons accueillir des gens, si nous le décidons ainsi, mais ce n’est nullement une obligation.
Alors faut-il fermer les frontières ? Pas nécessairement. Mais si on les ouvre, il faut que ce soit par notre décision, et non sous la pression des autres. Et certainement pas en cédant au chantage au suicide. Mais si on décide d’ouvrir nos frontières, il faut estimer le coût de cette ouverture et le faire payer par les couches sociales qui en profitent le plus. C'est-à-dire, par la bourgeoisie et par les « classes moyennes », à qui l’immigration permet de bénéficier d’une main d’œuvre bon marché, rendue plus docile par la taille de « l’armée de réserve ». On verra alors quel est le prix que les « classes moyennes » sont prêtes à payer pour acheter leur bonne conscience.
Descartes
Ouh la la ! le vilain fasciste ! beurk, caca !
Il me semble pourtant que depuis le milieu du XIXeme nous avons accueilli pas mal de gens, tout aussi pauvres et peu éduqués, et dans une période de prospérité moins grande, sans compter les risques de guerres avec nos irascibles voisins (vous savez ceux qui commémorent Waterloo) . Dans les années 60 un français sur quatre avait un Italien parmi ses grands-parents, ceux-la même qui arrivèrent “ritals” et que l’on retrouve dans les cimetières militaires, les dépôts de brevets, ou les familles méritantes. Parfois, mais rarement sommes toutes, ils furent violemment pris à partie, parfois les argousins tardaient à venir, mais ils baissaient la tête, jamais les bras . Aujourd’hui la moindre rondelle de saucisson abandonnée devant une officine à rendre con (je veux dire une mosquée) fait la une du 20 heures, les bonnes âmes se pannent d’indignation et les starlettes frétillent de compassion, à tout prendre je préfère encore B. Bardot !
Pour être assimilé il faut le vouloir et être assimilable ; uand vous croisez une voilée, ou un groupe parlant arabe (par exemple), quand vous savez que les “français” ne peuvent plus vivre dans des quartiers devenus des ghettos volontaires où le “bled” est reconstitué, quand les demandes communautaires sont de plus en plus nombreuses et insistantes, posez-vous la question : sont-ils assimilables ? Et s’ils ne le sont pas pourquoi ?
Cher Descartes, pour “ouvrir volontairement les frontières” il faudrait qu’elles existent, ce qui n’est plus vraiment le cas, justement pour que la notion même de culture -cf. R. Debray et son éloge des frontières- s’évanouisse. A l’autre bout du chantier de démolition il y la destruction des Serres d’Auteuil ou la Samaritaine.
Il y a quelques mois il y eu un naufrage – probablement organisé par les passeurs- faisant plus de 300 noyés, la décision politique qu’il fallait prendre c’était d’attendre les 300 suivants, et ainsi de suite, jusque ce que la nouvelle soit suffisamment connue pour que les passeurs ne trouvent plus de clients, ce n’est pas plus monstrueux que de continuer à vider l’Afrique de ses forces vives. Bien sur, me direz-vous, on pourrait empêcher les bateaux de partir, mais alors tôt ou tard il faudra maintenir sur place des forces, et puis peser sur les décisions des pays exportateurs, et comme cela sera impossible y aller pour remettre de l’ordre, et de la prospérité … bref il faudra recoloniser. C’est là que la phrase de L.S. Senghor prend tout son sens prophétique : “la France à décoloniser trop tôt”.
Contrairement à ce que disait René Dumond l’Afrique n’était pas si mal parti que cela.
@ Gérard Couvert
[Il me semble pourtant que depuis le milieu du XIXeme nous avons accueilli pas mal de gens, tout aussi pauvres et peu éduqués, et dans une période de prospérité moins grande, sans compter les risques de guerres avec nos irascibles voisins (vous savez ceux qui commémorent Waterloo). Dans les années 60 un français sur quatre avait un Italien parmi ses grands-parents, ceux-la même qui arrivèrent “ritals” et que l’on retrouve dans les cimetières militaires, les dépôts de brevets, ou les familles méritantes.]
Tout a fait. Je pense avoir dit très clairement que je ne suis pas contre l’immigration par principe. Au contraire, j’ai une grande confiance dans la capacité du modèle français à assimiler des gens venus d’ailleurs, pour le plus grand avantage de tous. Mais pour cela, la politique migratoire doit prendre compte des réalités. Lorsque nous avons intégré nos « ritals », nos « polacks » et même nos « arabes », nous étions un pays en pleine expansion économique, sûr de lui, avec des institutions fortes, un ascenseur social qui fonctionnait et sans le moindre état d’âme quant à l’exigence d’assimilation. Aujourd’hui, nous sommes en situation de stagnation économique, l’ascenseur social est arrêté, et le discours dominant est celui de la « haine de soi ». Dans ces conditions, pouvons nous accueillir une immigration importante ?
[Pour être assimilé il faut le vouloir et être assimilable ;]
Il faut surtout que la société d’accueil exerce fermement et sans états d’âme une pression pour l’assimilation. Il ne faut pas se faire d’illusion : l’assimilation est un effort important, et rares sont les immigrants qui ont spontanément une volonté de faire cet effort. S’ils ne ressentent pas un appel de la société d’accueil, rien ne se passe.
[quand vous croisez une voilée, ou un groupe parlant arabe (par exemple), quand vous savez que les “français” ne peuvent plus vivre dans des quartiers devenus des ghettos volontaires où le “bled” est reconstitué, quand les demandes communautaires sont de plus en plus nombreuses et insistantes, posez-vous la question : sont-ils assimilables ? Et s’ils ne le sont pas pourquoi ?]
Je réponds « oui, ils sont assimilables ». Et si la France était encore assimilationniste, le problème n’existerait pas. La difficulté, c’est que l’assimilation coûte cher, particulièrement aux classes moyennes, puisqu’il leur faut accepter que les assimilés deviennent des concurrents.
[Il y a quelques mois il y eu un naufrage – probablement organisé par les passeurs- faisant plus de 300 noyés, la décision politique qu’il fallait prendre c’était d’attendre les 300 suivants, et ainsi de suite, jusque ce que la nouvelle soit suffisamment connue pour que les passeurs ne trouvent plus de clients, ce n’est pas plus monstrueux que de continuer à vider l’Afrique de ses forces vives.]
C’est à ce genre de dilemme que je faisais référence lorsque je disais que les hommes politiques ne peuvent pas vouloir en même temps gouverner et avoir les mains propres et la conscience tranquille. Je l’ai dit d’une manière un peu moins explicite que vous, mais l’idée est la même.
Mon propos n’était pas de souligner des différences mais au contraire de dire plus crument et avec moins de lissé et de distance thérapeutique ce que vous avez écrit.
Vous évoquez l’Inde, que penser alors de l’indépendance et de la partition ? qui ne pouvait vivre avec les autres ; même si parfois il vaut mieux être Hindou en Inde, c’est toujours qu’il fait mauvais être chrétien au Pakistan.
Vous n’hésitez pas à vous inscrire en faux contre cette idée -culture CAMIF- que notre prospérité serait due à des spoliations constantes et particulièrement lors de l’époque coloniale “réelle” (1880/1960), bien sur, mais vous savez comme moi ce que cela déclenche dans les diners en ville (et moi en plus je suis pied-noir !), cependant, durant que génération après génération nous bâtissions notre société, globalement libre et prospère, que faisaient ceux qui avaient hérité de meilleures conditions climatiques, de moins de destructions et de pertes de savoirs durant l’antiquité tardive, des chemins vers l’Asie, qui bénéficièrent de moins de guerres fratricides, d’une réserve d’esclaves (slaves et noirs), de quelques contrées “clefs en main” comme l’Espagne ?
Qu’est-ce qui fit que le développement intellectuel, sociétal et économique s’arrêta et ne repris jamais ?
“enlevez à l’islam la science indienne et l’art Persan [ainsi que l’infrastructure romaine], il vous restera un bédouin, son chameau et son sabre”.
@ Gérard Couvert
[Vous évoquez l’Inde, que penser alors de l’indépendance et de la partition ? qui ne pouvait vivre avec les autres ; même si parfois il vaut mieux être Hindou en Inde, c’est toujours qu’il fait mauvais être chrétien au Pakistan.]
La question que vous posez est celle de savoir si un état-nation doit nécessairement être homogène en termes ethnique et religieux. On revient au conflit entre la vision allemande, fondée sur le sang, et la vision française fondée sur une « communauté de destin ». Je continue à adhérer à cette dernière conception. Mais il est vrai que la construction d’un état-nation hétérogène nécessite un Etat fort et une vigilance permanente pour confiner les appartenances ethniques et religieuses dans la sphère privée. L’Inde n’avait pas, lors de son indépendance, ni un Etat fort, ni des structures capables d’imposer une indifférence générale aux origines. On s’aperçoit en regardant le vaste monde combien le cas français est finalement exceptionnel.
[Vous n’hésitez pas à vous inscrire en faux contre cette idée -culture CAMIF- que notre prospérité serait due à des spoliations constantes et particulièrement lors de l’époque coloniale “réelle” (1880/1960),]
J’avoue humblement que pendant des années j’y ai cru. Deux choses m’ont fait changer d’avis : d’une part, un livre dont je ne saurais pas donner maintenant le nom et l’auteur, et qui faisait une analyse très précise et documentée des flux économiques entre la France métropolitaine et ses colonies, et démontrait ainsi que si l’empire colonial apportait à la France une « surface » politique et diplomatique ainsi qu’un marché intégré et ouvert pour ses produits, la métropole cesse de tirer un profit direct de ses colonies vers la fin du XIXème siècle. A partir du début du XXème, les colonies coûtent plus cher qu’elles ne rapportent…
Le deuxième élément qui m’a fait changer d’avis est l’étude de la reconstruction de l’Allemagne après la deuxième guerre mondiale. En 1945, l’Allemagne est un pays virtuellement détruit, ses villes en ruines, ses usines rasées. Vingt ans plus tard, l’Allemagne est redevenue l’une des premières économies de la planète. Et cela sans aucun apport colonial. Cet exemple montre que la richesse des pays dits « riches » est liée autant au capital matériel qu’à un capital immatériel, celui d’une population éduquée, formée, mais aussi d’institutions, de traditions, de disciplines sociales. La « spoliation » du tiers monde existe bien, mais elle joue un rôle secondaire dans la richesse des nations développées.
[bien sur, mais vous savez comme moi ce que cela déclenche dans les diners en ville (et moi en plus je suis pied-noir !), cependant, durant que génération après génération nous bâtissions notre société, globalement libre et prospère, que faisaient ceux qui avaient hérité de meilleures conditions climatiques, de moins de destructions et de pertes de savoirs durant l’antiquité tardive, des chemins vers l’Asie, qui bénéficièrent de moins de guerres fratricides, d’une réserve d’esclaves (slaves et noirs), de quelques contrées “clefs en main” comme l’Espagne ? Qu’est-ce qui fit que le développement intellectuel, sociétal et économique s’arrêta et ne repris jamais ?]
C’est une question qui m’a toujours passionné. En effet, on trouve dans l’histoire beaucoup de civilisations qui sont arrivés à un haut degré de raffinement – pensez à la Chine – et qui d’une certaine manière se sont arrêtées, répétant à l’infini les mêmes schémas, les mêmes styles artistiques, les mêmes savoirs. Au Xème siècle, alors que l’Europe savait à peine forger, les japonais et les arabes savaient déjà fabriquer des aciers de très haute qualité. Les sabres japonais, les aciers « damassés » étaient à mille lieues de ce qu’on savait faire en Europe. Pourtant, neuf siècles plus tard, alors que les japonais et les arabes faisaient toujours la même chose, l’Europe invente le convertisseur et fabrique l’acier industriellement.
Pourquoi cette différence ? Je pense d’abord qu’il y a une singularité dans l’histoire des cultures, et c’est l’héritage greco-latin. Les grecs restent le seul peuple à avoir inventé la philosophie, à s’être posé la question du « pourquoi » là ou les autres peuples se sont contentés de se demander « comment ». Et c’est de la philosophie que sont successivement nées les autres sciences. Les latins inventent, eux, la civilité. L’idée que la loi n’est pas faite par les dieux, mais par les hommes. C’est la combinaison de ces deux cultures qui a donné à l’Occident cette particularité de ne jamais se répéter, de vouloir toujours aller de l’avant.
@ Descartes & Gérard Couvert,
“En effet, on trouve dans l’histoire beaucoup de civilisations qui sont arrivés à un haut degré de raffinement – pensez à la Chine – et qui d’une certaine manière se sont arrêtées, répétant à l’infini les mêmes schémas, les mêmes styles artistiques, les mêmes savoirs. Au Xème siècle, alors que l’Europe savait à peine forger, les japonais et les arabes savaient déjà fabriquer des aciers de très haute qualité. Les sabres japonais, les aciers « damassés » étaient à mille lieues de ce qu’on savait faire en Europe.”
Si je puis me permettre, je pense également qu’il y a une question de curiosité et de capacité d’apprentissage. Les Chinois et les Arabes, à un moment, ont cru être parvenus à un système parfait, indépassable, et ils se sont contentés de le reproduire comme vous le relevez très justement. Du coup, ils ont cessé d’être curieux et ne se sont plus intéressés aux autres. Au XV° siècle, un amiral chinois entame de grandes explorations dans l’Océan Indien. Puis tout s’arrête: l’empereur estime que ça ne sert à rien, que le coût de ces voyages ne se justifie pas. La Chine ne ressent pas le besoin de connaître le vaste monde (contrairement à ses voisins mongols, par exemple, qui s’étaient ouverts de vastes horizons à l’époque de Gengis Khan et de ses descendants).
Dès le Moyen Âge, les Européens, malgré leur brutalité et leur fanatisme religieux, apprennent des autres. Les Occidentaux prennent en compte les avancées de la science arabe ou les progrès techniques venus de Chine (usage du papier ou de la poudre par exemple). Les Croisades, au-delà de l’aspect militaire, ont permis à l’Occident d’apprendre des autres. Et il faut noter que le rattrapage s’est ensuite opéré assez rapidement à partir du XII° siècle. Dès les XIV°-XV° siècles, techniquement, artistiquement, intellectuellement, scientifiquement, les Européens prennent l’avantage. Les cathédrales du gothique flamboyant n’ont rien à envier aux plus élégantes mosquées ou aux palais chinois. En terme d’armement (puisque vous citiez l’exemple de la forge), les progrès des Européens sont fulgurants: je ne crois pas me tromper en disant qu’au XVI° siècle, les Européens disposent déjà des armes à feu parmi les plus efficaces.
Ce n’est pas un hasard si c’est Christophe Colomb qui découvre l’Amérique et non un amiral barbaresque au service du sultan ottoman: alors qu’il est encore une grande puissance politique capable d’expansion, le monde musulman est déjà surclassé au niveau technique, intellectuel et scientifique. Lorsque les Ottomans prennent Constantinople, les Portugais ont déjà accompli de très gros progrès dans la construction navale et longent les côtes africaines vers le cap de Bonne-Espérance. Henri le Navigateur est le précurseur et le promoteur de cette vaste entreprise de découverte du monde. Les Occidentaux ont su apprendre des autres, bien plus que les autres n’ont su apprendre de lui jusqu’à une période récente, à quelques exceptions près (dont le Japon de l’ère Meiji qui opère un rattrapage aussi spectaculaire qu’inattendu dans un pays où le conservatisme et la tradition sont de mise).
@ nationalistejacobin
[Si je puis me permettre, je pense également qu’il y a une question de curiosité et de capacité d’apprentissage.]
On est d’accord. Mais d’où vient cette « curiosité » ? Je pense qu’elle nous vient aussi des grecs. Qui sont tout de même le premier peuple de l’antiquité à s’être intéressé à l’histoire, aux mœurs, aux coutumes des autres peuples. Nous ne connaissons pas d’historien égyptien, assyrien ou hébreu qui ait voyagé loin de son peuple pour rapporter descriptions et récits de la vie des autres. Mais du côté grec, on en connait un certain nombre…
Quant à savoir le pourquoi de cette singularité grecque et latine, j’avoue que je n’ai pas d’idée et que je n’ai pas lu d’argument convainquant. C’est peut-être tout simplement une coïncidence. Mais ce n’est pas par hasard à mon avis si le grand décollage de la civilisation européenne à la fin du moyen-âge correspond à la redécouverte de l’héritage gréco-latin.
@ nationalistejacobin
[Les Occidentaux prennent en compte les avancées de la science arabe ou les progrès techniques venus de Chine (usage du papier ou de la poudre par exemple). Les Croisades, au-delà de l’aspect militaire, ont permis à l’Occident d’apprendre des autres.]
Vous croyez déceler, chez l’homme occidental, une sorte d’atavisme inscrit dans ses gènes ou dans sa culture qui le différencierait du reste du genre humain. Une particularité qui le pousserait, lui et pas les autres, à apprendre des autres cultures.
C’est une jolie histoire, mais elle ne résiste pas à l’observation : Lorsque vous dites que [Les Croisades (…) ont permis à l’Occident d’apprendre des autres] vous reconnaissez explicitement que « les autres », en l’occurrence les Arabes, avaient su apprendre des peuples qu’ils avaient conquis ou côtoyés. Sinon qu’aurions nous appris en nous confrontant à eux ?
Qu’il s’agisse des riches cultures d’Asie centrale, des connaissances empruntées aux Perses dans le domaine des arts, de la médecine, de la poésie ou des acquis de la civilisation gréco-romaine partiellement oubliés en Occident et conservés par Constantinople, les Arabes ont accumulés un savoir considérable, à notre tour nous leur avons « emprunté » à l’occasion des croisades.
Puisque nous avons pu, comme vous le dites justement [apprendre des autres] à l’occasion des croisades, il fallait bien que les autres en question aient eux même appris à travers leurs conquêtes.
Affirmer que l’homme occidental serait, plus qu’un autre, capable de curiosité, ça ne me semble pas démontrable.
NB : Et je préfère ne pas relever vos propos sur les [capacités d’apprentissage] dont nous serions doués, nous et pas d’autres. Parce qu’une telle affirmation, non seulement n’est pas démontrable, mais s’approche dangereusement d’une idéologie raciste. Pourquoi pas un peuple élu pendant qu’on y est.
[Les Occidentaux ont su apprendre des autres, bien plus que les autres n’ont su apprendre de lui jusqu’à une période récente]
Vous avez raison de préciser « jusqu’à une période récente ».
Parce que dorénavant, avec la libre circulation des produits, des techniques, des idées et des hommes, l’Asie par exemple, apprend très vite de l’occident.
Dans les années 60 on riait beaucoup à l’arrivée des premières voitures japonaises. On les considérait, à juste titre, comme de mauvaises copies de nos voitures. Personne ne peut dire aujourd’hui que le degré d’innovation, la qualité, le rapport qualité / prix, des voitures japonaises ne sont pas au niveau des meilleurs standards mondiaux.
Si on regarde la téléphonie et l’électronique grand publique, hormis APPLE qui est américain, les nouveautés viennent d’Asie. SAMSUNG pour la Corée mais aussi des dizaines de fabricants Chinois proposent, pour l’instant seulement sur leur marché, des appareils très performants, quand nous-mêmes ne proposons plus rien du tout dans ces domaines.
Dans les nouvelles technologies Internet, l’Asie n’est pas non plus en retard sur nous.
Il est vrai que l’occident a bénéficié d’un âge d’or pendant lequel il a vécu Les Lumières, la révolution industrielle et la colonisation.
Durant cet âge d’or, les occidentaux ont installé leur domination sur le monde. Mais une nouvelle ère s’est déjà ouverte.
Le coup suivant, c’est la mondialisation. Les idées, les techniques, les savoirs sont à la portée des penseurs, des chercheurs, des futures génies du monde entier.
La civilisation occidentale aura servi de base, de marchepied, à une nouvelle civilisation, universelle. L’occident y aura sa place, mais le reste du monde aussi.
@ v2s
[Vous croyez déceler, chez l’homme occidental, une sorte d’atavisme inscrit dans ses gènes ou dans sa culture qui le différencierait du reste du genre humain.]
Le fait est que la civilisation européenne a une caractéristique très particulière qu’elle est pratiquement la seule à posséder : elle a une vision linéaire, et non cyclique, de l’histoire. Là où les autres civilisations – a différents stades d’évolution, d’ailleurs – sont à un certain moment rentré dans le cycle de la répétition, la civilisation occidentale a toujours marché de l’avant.
[Une particularité qui le pousserait, lui et pas les autres, à apprendre des autres cultures.]
Plus que cela : une particularité qui la pousse à S’INTERESSER aux autres cultures. Et ce n’est pas rien. De Hérodote et Strabon jusqu’à l’expédition d’Egypte montée par Napoléon, l’occident ne s’est pas contenté de conquérir, il s’est intéressé à l’histoire des autres peuples. Tiens, je vais vous donner un exemple : on connaît des fouilles archéologiques en orient faites par des français, des anglais, des allemands, des américains… connaissez vous beaucoup de chinois ou de japonais qui soient allés fouiller les pyramides d’Egypte, les cités du moyen orient, les temples mayas ?
C’est là la « particularité » de notre civilisation. Il y a bien entendu des historiens classiques chinois. Mais ils se sont intéressés essentiellement à l’histoire de la Chine. Pas à celle des autres nations.
[Dans les années 60 on riait beaucoup à l’arrivée des premières voitures japonaises. On les considérait, à juste titre, comme de mauvaises copies de nos voitures. Personne ne peut dire aujourd’hui que le degré d’innovation, la qualité, le rapport qualité / prix, des voitures japonaises ne sont pas au niveau des meilleurs standards mondiaux.]
Oui, mais cela reste une copie. Une copie dont la qualité s’améliore chaque jour, mais une copie quand même. Car il y a une grosse différence entre construire une voiture et inventer une voiture. Pour le moment, il n’y a pratiquement pas de concept nouveau qui nous vienne d’ailleurs que l’occident. Quand les japonais ou les chinois produiront un Einstein, un Freud, un Marx on pourra en parler… faut croire que c’est plus difficile que de produire un téléphone portable.
[Durant cet âge d’or, les occidentaux ont installé leur domination sur le monde. Mais une nouvelle ère s’est déjà ouverte.]
Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche !
@ v2s,
“Vous croyez déceler, chez l’homme occidental, une sorte d’atavisme inscrit dans ses gènes ou dans sa culture qui le différencierait du reste du genre humain.”
Non, je me bornais à des observations vérifiables. Maintenant, si vous me demandez la cause de cette attitude de l’homme occidental, je proposerai deux pistes de réflexion: 1) la géographie, en effet nous sommes un peu à l’étroit en Europe occidentale, alors que les civilisations islamiques ou chinoises s’ouvrent sur des espaces immenses, très variés, souvent sous-peuplés. Pourquoi les Vénitiens, les Génois, les Portugais se sont-ils lancés à l’aventure sur les mers? Parce qu’ils étaient bloqués du côté de la terre. Au contraire, les musulmans avaient des perspectives d’expansion en Asie centrale, en Inde, en Afrique même, les Chinois aussi (Asie centrale, Sibérie). Les historiens ne négligent pas l’impact des conquêtes ottomanes dans le mouvement des grandes découvertes européennes. Au XV° siècle, la Méditerranée orientale se ferme pour les Occidentaux, l’accès aux produits de l’Orient lointain se réduit. Christophe Colomb est un Génois, ce n’est pas un hasard: il vient d’une ville qui a fait fortune dans le grand commerce avec l’Orient et qui est en train de perdre le bénéfice de ce juteux négoce. Il faut ouvrir de nouvelles routes; 2) la structure sociale: il s’est trouvé en Occident une bourgeoisie de marchands, de négociants, de banquiers disposée à investir dans le grand commerce, et intéressée par le progrès technique et scientifique; ajoutons à cela le soutien apporté par les gouvernements: Colomb, Cartier, Vasco de Gama sont tous partis avec la bénédiction, le soutien, financier et politique, et les instructions d’un roi, ne l’oublions pas.
“C’est une jolie histoire, mais elle ne résiste pas à l’observation”
Alors nous n’observons pas la même chose.
“vous reconnaissez explicitement que « les autres », en l’occurrence les Arabes, avaient su apprendre des peuples qu’ils avaient conquis ou côtoyés. Sinon qu’aurions nous appris en nous confrontant à eux ?”
Bien sûr que je le reconnais. Je n’ai jamais dit que les “autres” n’étaient pas capables d’apprendre. Mais, d’une part les Arabes ont beaucoup plus compilé qu’innové, ensuite, pour une raison que je ne m’explique pas (mais peut-être avez-vous une hypothèse), ils ont cessé d’apprendre, à partir du XIV° siècle, et ils ont perdu leur avance assez rapidement en fait. Il n’en demeure pas moins qu’ils ont joué un rôle d’intermédiaires très important, notamment pour faire découvrir aux Européens les sciences et techniques chinoises et indiennes. Puis l’Orient musulman s’est assoupi et, à part quelques tentatives chez les Ottomans, s’est refusé catégoriquement à aller à “l’école de l’Occident”, persuadé de détenir la meilleure civilisation. La meilleure, peut-être, mais pas la plus efficiente d’un point de vue économique, politique et militaire. Et je vous mets au défi de me faire observer le contraire après le XVI° siècle (apogée de l’empire ottoman).
“les Arabes ont accumulés un savoir considérable, à notre tour nous leur avons « emprunté » à l’occasion des croisades.”
Je suis d’accord, mais vous serez forcé d’observer avec moi que “nous” avons su exploiter ce “savoir considérable” bien mieux qu’eux. Peut-être parce qu’ils n’en ont pas ressenti le besoin, peut-être parce qu’ils tiraient suffisamment de revenus des activités (parmi lesquelles la traite négrière…) de leur espace propre, peut-être parce que leur culture les portait davantage à la contemplation. On peut imaginer plein d’hypothèses et je n’émets aucun jugement de valeur: la poésie persane des XV°-XVI° siècles est admirable. Mais le fait est que les musulmans ont perdu la maîtrise des mers et l’avance scientifique et technique qu’ils avaient acquises.
“Affirmer que l’homme occidental serait, plus qu’un autre, capable de curiosité, ça ne me semble pas démontrable”
A moi, ça me paraît facilement démontrable: pouvez-vous me citer un explorateur iroquois, aztèque, sénégalais, congolais, aborigène, indien qui soit venu en Europe “par curiosité”? Mais, pour prendre une civilisation techniquement avancée, pouvez-vous me citer l’explorateur chinois qui a atteint l’Europe ou l’Amérique? Le marin chinois qui a réalisé la première circumnavigation? Non? Eh bien demandez-vous pourquoi…
“Et je préfère ne pas relever vos propos sur les [capacités d’apprentissage] dont nous serions doués, nous et pas d’autres”
Mon expression était malheureuse, j’aurais plutôt dû dire “capacités d’innovations”. D’autre part, je situe ces capacités au niveau collectif, à l’échelle d’une société, pas d’un individu. Je voudrais aussi vous faire remarquer une chose: les sociétés qui n’innovent pas n’agissent pas nécessairement de la sorte parce qu’elles ne le peuvent pas, mais parce qu’elles ne le veulent pas, elles n’en ont pas besoin. Les Aztèques et les Incas ne connaissaient pas la roue, pas parce qu’ils étaient trop stupides pour l’inventer, mais parce que leur société et leur économie arrivaient à fonctionner sans la roue. Je pense qu’une société innove lorsqu’elle y est plus ou moins contrainte.
“Parce qu’une telle affirmation, non seulement n’est pas démontrable, mais s’approche dangereusement d’une idéologie raciste.”
Nous parlons de progrès technique et scientifique, je ne vois pas ce que la “race” vient faire là-dedans. Je ne crois pas avoir employé le terme, même de manière implicite.
“Pourquoi pas un peuple élu pendant qu’on y est.”
Si sentiment de supériorité il y a, c’est chez les autres qu’il faut aller le chercher, ne vous en déplaise. Pourquoi croyez-vous que les Chinois et les Arabes ont longtemps méprisé les Occidentaux jugés “barbares”? Mais parce qu’ils étaient convaincus d’être les meilleurs. En fait, l’Occident est moins arrogant qu’on le dit dans la mesure où il reconnaît ses dettes: les Grecs déjà connaissaient l’origine phénicienne de leur alphabet, ils savaient que certains de leurs dieux venaient d’ailleurs, ils admiraient des civilisations qu’ils savaient plus anciennes que la leur, l’Egypte, la Babylonie. Les Chinois se croient le centre du monde (“l’Empire du Milieu”), les musulmans croient que Dieu les a choisis pour la dernière révélation. Pour les Occidentaux, c’est un peu différent: Jérusalem, le “centre du monde”, ne se trouvait pas chez eux; Dieu n’a pas choisi les Occidentaux: Jésus est un Sémite de l’Orient, pas un Occidental, et il ne parlait ni le latin ni le grec; les chrétiens ont la deuxième révélation, la moins confortable d’une certaine façon, n’ayant ni le privilège d’être les premiers, ni l’honneur d’être les derniers. Les Européens, au fond, sont une population des marges: si l’on admet que la Méditerranée est le centre du monde (de la mondialisation disent même certains historiens) au Moyen Âge, regardez une carte du Bassin méditerranéen au XII° siècle, et vous verrez que les musulmans et les Byzantins contrôlent bien plus de littoraux que les Occidentaux. Les Croisades doivent se comprendre aussi comme une tentative des Occidentaux “marginaux” de se faire une place dans le monde. Elles sont une preuve que l’Occident a compris à un moment que les grandes choses se faisaient en dehors de lui-même (ce que les Byzantins, les Arabes et les Chinois n’ont jamais compris). Les autres avaient tout: ressources à portée de mains, maîtrise des routes commerciales, ports florissants. Les Occidentaux, eux, ont dû lutter pour avoir leur part, plus que d’autres civilisations. Et ils ont dû innover là où les autres se contentaient de profiter des ressources aisément accessibles.
“Parce que dorénavant, avec la libre circulation des produits, des techniques, des idées et des hommes, l’Asie par exemple, apprend très vite de l’occident”
Je ne doute pas que le Japon aujourd’hui est en avance sur la France. Mais les Etats-Unis ont une avance technologique considérable sur la Chine et même le Japon. N’enterrez pas l’Occident trop vite. Après tout, une bonne partie de la prospérité chinoise vient de la production massive d’objets de qualité médiocre vendus à bas prix… Je me garderai de surestimer les ingénieurs chinois si j’étais vous. Pourquoi croyez-vous qu’on leur envoie les nôtres?
“Dans les nouvelles technologies Internet, l’Asie n’est pas non plus en retard sur nous.”
Sur les Français et les Européens en général, peut-être (et encore). Mais sur les Américains, c’est autre chose. Or les Etats-Unis font partie de l’Occident.
“Mais une nouvelle ère s’est déjà ouverte”
Bof. Vous oubliez un peu vite que les Etats-Unis possèdent toujours le premier arsenal militaire du monde. Vous oubliez également que des pays comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France sont militairement présents sur toute la surface du globe. Je vous rappelle que la France est présente en Amérique du Sud, dans les Antilles, dans l’Océan Indien et le Pacifique, en Afrique. Idem pour le Royaume-Uni. Pendant ce temps-là, la Chine lutte pour s’approprier une poignée d’îlots à quelques centaines de kilomètres de ses côtes. Taïwan, le Japon et le Viêtnam lui font obstacle. Je sais que ça ne vous plaît pas, mais la mondialisation reste largement occidentale.
“La civilisation occidentale aura servi de base, de marchepied, à une nouvelle civilisation, universelle. L’occident y aura sa place, mais le reste du monde aussi”
Mais je ne suis pas hostile à l’enrichissement des autres. Certains pays d’Asie semblent assez bien partis, j’en conviens. Mais quand on regarde le monde musulman, l’Afrique et l’Amérique latine, il faut raison garder et un optimisme mesuré est de mise.
@ nationalistejacobin
[D’autre part, je situe ces capacités au niveau collectif, à l’échelle d’une société, pas d’un individu. Je voudrais aussi vous faire remarquer une chose: les sociétés qui n’innovent pas n’agissent pas nécessairement de la sorte parce qu’elles ne le peuvent pas, mais parce qu’elles ne le veulent pas, elles n’en ont pas besoin. Les Aztèques et les Incas ne connaissaient pas la roue, pas parce qu’ils étaient trop stupides pour l’inventer, mais parce que leur société et leur économie arrivaient à fonctionner sans la roue. Je pense qu’une société innove lorsqu’elle y est plus ou moins contrainte.]
Je pense que c’est plus compliqué que cela. Il y a des civilisation qui, lorsque la « contrainte » s’est présentée – par exemple, la baisse des rendements agricoles chez les mayas – n’a pas répondu par l’innovation, mais au contraire par un retour en arrière. Je pense qu’il ne faut pas négliger l’aspect culturel : il y a des cultures du « toujours plus », et des cultures du « ça me suffit ». Il y a des civilisations qui s’intéressent aux autres – pour commercer avec eux, pour les conquérir, ou pour d’autres raisons – et des civilisations qui fortifient leurs frontières et s’y retranchent, persuadées d’avoir atteint le « nec plus ultra » de la civilisation. Cela ne s’explique pas seulement par la « contrainte » à un moment donné, mais aussi par la manière dont la « contrainte » a été gérée par le passé. Nous sommes héritiers de l’esprit aventureux des grecs et des romains, et cet héritage pèse alors même que les « contraintes » qui lui ont donné origine ont depuis longtemps disparu.
[Si sentiment de supériorité il y a, c’est chez les autres qu’il faut aller le chercher, ne vous en déplaise. Pourquoi croyez-vous que les Chinois et les Arabes ont longtemps méprisé les Occidentaux jugés “barbares”? Mais parce qu’ils étaient convaincus d’être les meilleurs.]
Tout à fait d’accord. L’idéologie dominante veut que les occidentaux soient méprisants et racistes, alors que les autres seraient – ou du moins auraient été avant l’intervention du méchant homme blanc – tolérants et « diversitaires »…
[« Parce que dorénavant, avec la libre circulation des produits, des techniques, des idées et des hommes, l’Asie par exemple, apprend très vite de l’occident »][Je ne doute pas que le Japon aujourd’hui est en avance sur la France.]
Vraiment ? Pourriez-vous citer le nom d’un seul philosophe japonais pouvant se frotter à un Derrida, à un Althusser ou même à un Onfray ? Je pense qu’il faut arrêter les fantasmes. Je ne doute pas que le Japon puisse fabriquer des écrans plats ou des mémoires d’ordinateur bien mieux que nous. C’est le résultat d’investissements massifs attirés par une main d’œuvre bon marché. Mais sur le plan des « idées » ? Non, non et non. On attend toujours de voir les asiatiques inventer une théories juridique, créer une institution politique originale. Pour le moment, leurs institutions restent copiées sur les nôtres.
[Pour le moment, il n’y a pratiquement pas de concept nouveau qui nous vienne d’ailleurs que l’occident]
Affirmer qu’aucun concept nouveau ne vient d’ailleurs, c’est oublier que, par exemple, Gutenberg n’a fait que perfectionner un procédé utilisé depuis longtemps en Chine.
Donc, si je vous suis, quand les Japonais font de meilleures voitures que les nôtres ils ne font que nous « copier », mais quand Gutenberg perfectionne l’impression il l’invente.
Quand les arabes forgent des armes en acier bien supérieures aux nôtres il n’ont fait que copier et améliorer ce qui se faisait avant, mais quand nous industrialisons le procédé nous sommes de géniaux créateurs.
Il y a peu, vous nous disiez faire vôtre cette métaphore :
« Nous sommes comme des nains sur des épaules de géants. Nous voyons mieux et plus loin qu’eux, non que notre vue soit plus perçante ou notre taille plus élevée, mais parce que nous sommes portés et soulevés par leur stature gigantesque »
Mais en réalité non, ce dont vous semblez être convaincu, c’est que si « nous voyons mieux et plus loin », c’est parce que nous sommes Occidentaux. Seuls héritiers des Grecs et des Romains. Une sorte de nouveau peuple élu en quelque sorte.
[Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche !]
Encore et toujours ces remarques abaissantes et insultantes.
Dire que les « non occidentaux » avancent et nous rattrapent ce n’est ni appeler à la repentance ni annoncer la fin du monde.
Les investisseurs Chinois installent des centrales solaires, pour l’instant surtout chez eux et en Asie Pacifique, mais pourquoi pas bientôt partout ou il y aura une demande solvable : Péninsule Arabique, Iran, Afrique …
Leur modèle commercial consiste à construire des centrales dont ils restent propriétaires, et à revendre l’électricité aux distributeurs. Bien entendu ça ne marche pas la nuit, mais il ne vous aura pas échappé que, de La Floride à L’Australie en passant par l’Afrique, l’Inde et l’Océanie, c’est les ¾ de la population mondiale qui vivent dans des zones ou la climatisation en journée représente la plus grande partie des besoins des particuliers et du secteur tertiaire.
A Myanmar, l’ancienne Birmanie, une centrale de 500 MWe solaire est en construction. L’équivalent de la moitié d’un réacteur nucléaire.
Ça bouscule probablement vos certitudes mais ça ne vous autorise pas à me classer parmi les prédicateurs qui annoncent la fin du monde.
@ v2s
[Pour le moment, il n’y a pratiquement pas de concept nouveau qui nous vienne d’ailleurs que l’occident][Affirmer qu’aucun concept nouveau ne vient d’ailleurs, c’est oublier que, par exemple, Gutenberg n’a fait que perfectionner un procédé utilisé depuis longtemps en Chine.]
En d’autres termes, Gutemberg n’a pas exploité un procédé « nouveau », mais un procédé très ancien. C’est bien ce que je disais : la Chine a inventé pas mal de choses : la poudre, le papier, l’imprimerie à caractères mobiles. Mais c’était il y a très longtemps. Ensuite, la civilisation chinoise a cessé d’inventer et s’est contentée de répéter. Et quand vous dites aujourd’hui que la Chine s’est réveillée, je ne peux que constater qu’il nous vient de chine pas mal de produits nouveaux, mais pas de concept nouveaux.
[Donc, si je vous suis, quand les Japonais font de meilleures voitures que les nôtres ils ne font que nous « copier », mais quand Gutenberg perfectionne l’impression il l’invente.]
Pas du tout. Quand Gutemberg perfectionne l’impression, il ne fait que reprendre une technologie et l’améliorer, exactement comme le font les japonais avec nos voitures. Mais quand Einstein invente la relativité générale et Freud l’inconscient, ils ne se contentent pas d’améliorer, ils créent de nouvelles idées, de nouveaux concepts. Et je suis curieux de voir quelles sont les nouveaux concepts qui nous viennent d’orient. Franchement, je ne vois pas.
[Quand les arabes forgent des armes en acier bien supérieures aux nôtres il n’ont fait que copier et améliorer ce qui se faisait avant, mais quand nous industrialisons le procédé nous sommes de géniaux créateurs.]
Encore une fois, vous ne voulez pas comprendre. Les arabes n’ont pas « copié et amélioré », ils ont bien « inventé ». Mais la question qui se pose est : pourquoi ne sont-ils pas allés plus loin ? Pourquoi alors qu’ils avaient la maitrise de l’art de la forge manuel ils n’ont pas cherché plus loin, et trouvé le convertisseur et la possibilité de faire des aciers meilleurs et plus économiquement ? Pourquoi se sont-ils contentés de ce qu’ils avaient, alors qu’ils avaient les moyens d’aller plus loin ?
[Il y a peu, vous nous disiez faire vôtre cette métaphore : « Nous sommes comme des nains sur des épaules de géants. Nous voyons mieux et plus loin qu’eux, non que notre vue soit plus perçante ou notre taille plus élevée, mais parce que nous sommes portés et soulevés par leur stature gigantesque »]
Tout à fait. Mais pour des raisons qu’il me semble intéressant de comprendre, certains peuples, une fois juchés sur les épaules du géant, n’ont plus eu envie de regarder au loin.
[Mais en réalité non, ce dont vous semblez être convaincu, c’est que si « nous voyons mieux et plus loin », c’est parce que nous sommes Occidentaux. Seuls héritiers des Grecs et des Romains. Une sorte de nouveau peuple élu en quelque sorte.]
Pas du tout. Si nous voyons mieux et plus loin, c’est surtout parce que nous avons envie de regarder. Je crois que c’est ce point-là que vous ne prenez pas en considération. Pourtant il est essentiel. L’occident « riche » n’a pas seulement consacré son argent aux technologies, à l’industrie, au commerce. Il a consacré une partie non négligeable à financer des collèges et des universités et à payer des gens dont le boulot était de se dire « pourquoi quelque chose plutôt que rien » et à déduire que « cogito ergo sum ». Ce n’est pas par hasard si la philosophie est un phénomène exclusivement occidental.
[Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche !][Encore et toujours ces remarques abaissantes et insultantes.]
Je vous l’ai déjà dit : par chez moi, on considère un devoir sacré de se moquer des vaticinations.
[Les investisseurs Chinois installent des centrales solaires, pour l’instant surtout chez eux et en Asie Pacifique, mais pourquoi pas bientôt partout ou il y aura une demande solvable : Péninsule Arabique, Iran, Afrique …]
Pourriez-vous citer vos sources, s’il vous plait ? A ma connaissance, les chinois sont d’abord fabriquant et vendeurs de panneaux solaires, mais construisent fort peu que ce soit à l’extérieur ou à l’intérieur de leurs frontières.
[Leur modèle commercial consiste à construire des centrales dont ils restent propriétaires, et à revendre l’électricité aux distributeurs. Bien entendu ça ne marche pas la nuit, mais il ne vous aura pas échappé que, de La Floride à L’Australie en passant par l’Afrique, l’Inde et l’Océanie, c’est les ¾ de la population mondiale qui vivent dans des zones ou la climatisation en journée représente la plus grande partie des besoins des particuliers et du secteur tertiaire.]
Il ne vous aura pas non plus échappé que la plupart de ces pays ont des moyens plus économiques de produire de l’électricité, dont le charbon. Si les panneaux solaires sont rentables, il faudrait m’expliquer pourquoi ces pays font des investissements massifs dans la production d’électricité à partir du charbon.
[A Myanmar, l’ancienne Birmanie, une centrale de 500 MWe solaire est en construction. L’équivalent de la moitié d’un réacteur nucléaire.]
Pourriez-vous là encore citer vos sources ? J’ajoute que votre comparaison est trompeuse : un réacteur nucléaire produit 80% du temps, une centrale solaire à peine 20%. Même si la puissance installée est la même, l’énergie produite est quatre fois inférieure. Votre centrale n’est pas « l’équivalent de la moitié d’un réacteur nucléaire », mais l’équivalent d’un huitième de réacteur nucléaire.
[Ça bouscule probablement vos certitudes mais ça ne vous autorise pas à me classer parmi les prédicateurs qui annoncent la fin du monde.]
Absolument pas. Cela confirme au contraire ma certitude qu’il y a beaucoup de désinformation concernant ces sujets.
@ Descartes,
“Vraiment ? Pourriez-vous citer le nom d’un seul philosophe japonais pouvant se frotter à un Derrida, à un Althusser ou même à un Onfray ? Je pense qu’il faut arrêter les fantasmes”
Vous fâchez pas, vous fâchez pas. Je parlais uniquement d’un point de vue technique. Les Japonais sont quand même à l’origine de quelques progrès en robotique. La culture japonaise, tout en reprenant des savoir-faire occidentaux, a su produire des oeuvres intéressantes et originales, dans le domaine artistique (cinéma, film d’animation, manga). Dans le domaine des jeux vidéos, les Japonais ont été pionniers en leur temps. En ce qui concerne la philosophie, les mathématiques, l’astrophysique et autres sciences dures, j’ignore ce que le Japon a pu apporter.
En revanche, je ne crois pas que les Japonais aient à nous envier Onfray. Onfray n’est pas un philosophe, c’est un prédicateur. Un prédicateur intelligent, mais rien qu’un prédicateur. Les vrais philosophes ont en général une solide culture historique (c’est le cas des professeurs de philosophie que j’ai connu), or Onfray n’a pas de véritable culture historique: il faut entendre les énormités qu’il sort sur Robespierre et la Terreur, qu’il condamne sans nuance. On n’est pas philosophe quand on a une vision manichéenne de l’histoire. Même s’il dit parfois des choses justes, c’est au fond un guignol (et un ennemi des institutions…).
@ nationalistejacobin
[« Vraiment ? Pourriez-vous citer le nom d’un seul philosophe japonais pouvant se frotter à un Derrida, à un Althusser ou même à un Onfray ? Je pense qu’il faut arrêter les fantasmes ». Vous fâchez pas, vous fâchez pas. Je parlais uniquement d’un point de vue technique. Les Japonais sont quand même à l’origine de quelques progrès en robotique. La culture japonaise, tout en reprenant des savoir-faire occidentaux, a su produire des oeuvres intéressantes et originales, dans le domaine artistique (cinéma, film d’animation, manga).]
En fait très peu de choses vraiment nouvelles. Le plus grand cinéaste japonais, Akira Kurosawa, se considérait un disciple de Serge Eisenstein (on y trouve quantité de références dans son cinéma). On ne voit pas non plus dans l’animation ni dans le manga rien qui puisse être considéré comme un mode d’expression original, tout au plus un « style ».
[En revanche, je ne crois pas que les Japonais aient à nous envier Onfray. Onfray n’est pas un philosophe, c’est un prédicateur. Un prédicateur intelligent, mais rien qu’un prédicateur. Les vrais philosophes ont en général une solide culture historique (c’est le cas des professeurs de philosophie que j’ai connu), or Onfray n’a pas de véritable culture historique: il faut entendre les énormités qu’il sort sur Robespierre et la Terreur, qu’il condamne sans nuance.]
Onfray n’a peut-être pas une grande culture historique, mais il a une culture philosophique certaine. Je l’avais donné comme exemple pour vous montrer que je me contentais de peu. Mais si vous préférez un « vrai » philosophe, prenez Bouveresse. Qui est à votre avis le « Bouveresse » japonais ?
@Descartes
[un réacteur nucléaire produit 80% du temps, une centrale solaire à peine 20%.]
En France peut-être.
Mais vous ne pouvez pas comparer les 80% du temps « utile » pour le nucléaire, avec les 20% du temps utile pour le solaire.
Concernant le solaire, votre chiffre de 20% est un chiffre qui doit refléter la réalité sous nos climats mais certainement pas en Floride, en Indonésie, en Inde ou en Australie. Dans ces pays, ce serait plutôt
50% x 80% = 40%.
Ce qui est déjà beaucoup mieux que ce que vous dites.
Mais comme le capital investi par puissance installée est environ 20% du capital nécessaire pour une puissance équivalente avec le nucléaire*, l’investissement reste très inférieur.
Quand à l’exploitation elle n’a évidemment rien de comparable : pas de combustible, pas de retraitement, pas de gestion des risques, une maintenance sans commune mesure.
*Une centrale solaire chinoise de 500 MW, vient d’être vendu à l’Inde pour 150M $.
http://cleantechnica.com/2015/05/28/ja-solar-plans-500-mw-solar-modules-facility-india/
En laissant de coté le cas des EPR, et pour s’en tenir uniquement aux centrales traditionnelles, AREVA a vendu à la Chine des réacteurs de 1,6 GW pour des prix difficiles à comprendre et a comparer selon que l’infrastructure sera ou non fournie la Chine, qui vont de 2,6 Mds € à 4,5 Mds €.
Même si on retient le plus petit chiffre on arrive quand même à
2,6 / 1,6 x 0,5 = 0,8 Mds € pour 500 MW installés soit 5,3 fois plus que le dernier prix du solaire chinois.
Chaque pays tend aujourd’hui à diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique.
Les pays chauds n’ont aucun besoin de chauffage ni le jour ni la nuit et ils rencontrent leur pic de consommation pendant les heures de la journée, quand les particuliers, les bureaux, les commerces, les administrations utilisent la climatisation et quand les industries légères produisent. C’est précisément à ce moment que les centrales solaires sont disponibles.
Pendant les heures creuses il faut faire appel à d’autres sources d’énergie.
Je n’annonce pas la fin du monde comme vous le prétendez, par contre je vous annonce que des investisseurs Chinois sont en contact avec les distributeurs, partout ou l’ensoleillement est abondant, pour leur vendre de l’électricité d’origine solaire à bas coût.
Le prix des panneaux chinois ne cessent de baisser.
Ce site fournit des graphiques sur l’évolution des prix du KWH dans les différentes régions du monde et selon les différentes sources d’énergie :
http://seekingalpha.com/article/1935161-solar-energy-poses-a-threat-to-the-shale-gas-revolution
Les premiers à s’en inquiéter sont les investisseurs qui détiennent les actions des compagnies pétrolières :
http://www.treehugger.com/renewable-energy/solar-power-cheaper-natural-gas-coal-and-nuclear-power-texas.html
Les sources qui confirment cette tendance sont abondantes, voici un autre article :
http://interfaxenergy.com/gasdaily/article/7564/asian-lng-under-threat-from-solar
Je pourrais vous citer une page entière de sites Internet qui suivent l’évolution de ces marchés.
Il vous suffit de taper sur votre moteur de recherché :
“LNG under threat from solar”
Nous pouvons continuer à faire l’autruche, et nous boucher les yeux. Mais il semble bien que, contrairement aux Allemands qui fournissent les machines de fabrication de panneaux aux Chinois, nous soyons en train de regarder passer le train de la transition énergétique.
Et encore les panneaux à haut rendement (46% contre 25% dans le meilleur des cas aujourd’hui*) ne sont pas encore industrialisés.
http://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/20141202.OBS6722/46-de-la-lumiere-convertie-en-electricite-record-mondial-pour-une-cellule-solaire.html
*J’avais avancé de mémoire et par erreur le chiffre de 50% de rendement au lieu de 46% réellement, veuillez m’en excuser, mais ça ne change rien à la situation puisqu’avec les mauvais rendements actuels le solaire chinois est déjà largement rentable.
@ v2s
[Mais vous ne pouvez pas comparer les 80% du temps « utile » pour le nucléaire, avec les 20% du temps utile pour le solaire. Concernant le solaire, votre chiffre de 20% est un chiffre qui doit refléter la réalité sous nos climats mais certainement pas en Floride, en Indonésie, en Inde ou en Australie. Dans ces pays, ce serait plutôt 50% x 80% = 40%.]
Pas vraiment. D’une part, parce que le soleil ne brille pas à pleine intensité douze heures par jour dans aucun pays du monde. Même dans les meilleures conditions, difficile de compter sur plus de 8 heures de plein ensoleillement théorique, et cela même dans les régions les plus favorables (les heures proches de l’aube et le crépuscule le soleil est trop rasant pour produire à pleine puissance). Et encore, il faut des panneaux solaires avec mécanisme suiveur, autrement la puissance maximale n’est atteinte qu’à une heure précise de la journée, lorsque le soleil se trouve à l’orthogonale du panneau. Et il faut encore retrancher les jours nuageux (rares peut-être en Floride ou en Australie, mais fréquents en Indonésie ou en Inde), les jours de maintenance (car les panneaux doivent être lavés, traités et remplacés de temps en temps), les évènements climatiques (tempête de sable…)… non, croyez-moi, le chiffre de 20% est assez représentatif de la situation dans les pays sub-tropicaux. Sous nos climats, c’est encore pire : on peut tabler sur un rendement moyen par rapport à la puissance installée autour de 15%.
[Mais comme le capital investi par puissance installée est environ 20% du capital nécessaire pour une puissance équivalente avec le nucléaire*, l’investissement reste très inférieur.]
Vous avez raison de dire que l’investissement par MW installé est très inférieur dans le cas du solaire. Mais ce qui nous intéresse, ce n’est pas l’investissement par MW installé, mais l’investissement par MWh produit. Si le capital investi par MWh produit était le même pour le nucléaire et pour le solaire, alors le coût du MWh nucléaire serait supérieur à celui produit par les centrales solaires, puisque le nucléaire doit payer en plus de l’investissement le coût du combustible. Or, qu’observe-t-on en pratique ? Pour que les installations solaires se développent, on et obligé de les subventionner en rachetant le MWh entre 200 et 500 € du MWh, alors que le nucléaire en produit autour de 40 €.
[Quand à l’exploitation elle n’a évidemment rien de comparable : pas de combustible, pas de retraitement, pas de gestion des risques, une maintenance sans commune mesure.]
Pas de combustible, pas de gestion des risques… oui. Pas de « retraitement » ? C’est moins évident. Les panneaux solaires contiennent toute sorte de matériaux dangereux et toxiques (cadmium, sélénium, arsenic…) et leur recyclage n’est nullement une évidence.
[Une centrale solaire chinoise de 500 MW, vient d’être vendu à l’Inde pour 150M $. http://cleantechnica.com/2015/05/28/ja-solar-plans-500-mw-solar-modules-facility-india/%5D
Vous avez mal lu. L’article fait référence à un accord pour la construction d’une usine pour la fabrication de panneaux solaires – c’est même écrit dans le titre de l’article – et non à la construction d’une « centrale solaire ». Tous vos calculs n’ont donc pas de sens : les 150 M$, c’est le coût d’investissement pour construire une usine de production de modules solaires d’une capacité de 500 MW/an. Pas d’une centrale solaire de 500 MW.
J’ajoute que des annonces de ce genre, je vous en trouve treize à la douzaine et dans tous les domaines. Lorsque les premiers ministres vont visiter d’autres premiers ministres, on signe habituellement toute sortes d’accords de « Joint Venture » qui sont très rarement suivis d’effet.
[Chaque pays tend aujourd’hui à diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique.]
Non. L’Allemagne, par exemple, a choisi de sortir du nucléaire. Chez nous, on ferme les dernières centrales à charbon et au fuel… Cela réduit la « diversité » de ses sources d’approvisionnement, non ?
[Les pays chauds n’ont aucun besoin de chauffage ni le jour ni la nuit et ils rencontrent leur pic de consommation pendant les heures de la journée, quand les particuliers, les bureaux, les commerces, les administrations utilisent la climatisation et quand les industries légères produisent. C’est précisément à ce moment que les centrales solaires sont disponibles.]
Que le solaire est plus adapté aux pays chauds, c’est une évidence qu’à ma connaissance nul ne conteste. Mais curieusement, ce n’est pas dans les pays chauds que le solaire se développe le plus rapidement. Pour une raison simple : même dans ces pays, le solaire reste très cher. Beaucoup plus cher que d’autres sources d’approvisionnement, comme le charbon.
[Je n’annonce pas la fin du monde comme vous le prétendez, par contre je vous annonce que des investisseurs Chinois sont en contact avec les distributeurs, partout ou l’ensoleillement est abondant, pour leur vendre de l’électricité d’origine solaire à bas coût.]
J’attends toujours un exemple circonstancié de cette « électricité à bas coût ».
[Le prix des panneaux chinois ne cessent de baisser.]
Oui, du fait du dumping. Je vous renvoie à une analyse fort intéressante du cabinet SIA (http://www.energie.sia-partners.com/20140611/europe-de-lenergie-lechec-de-la-filiere-photovoltaique) dont j’extrais le paragraphe qui concerne cette discussion :
« Toutefois, l’inondation du marché mondial par des modules PV de fabrication chinoise n’a été possible que par le dumping. En effet, ni le faible coût de la main d’œuvre chinoise, ni la baisse du prix du silicium ne permettent d’expliquer les prix extrêmement faibles du photovoltaïque chinois. Selon une étude du RSC Publishing sortie Septembre dernier, le coût de la main d’oeuvre ne représente pas plus de 10% du prix de vente du panneau solaire. La marge dégagée sur cet axe par une fabrication en Chine des panneaux solaires ne compense aucunement les coûts de transport vers le marché européen. L’étude américaine a d’ailleurs mis en avant que le coût du transport augmente le coût de fabrication d’une cellule photovoltaïque en Chine de 5 % par rapport au coût global de production aux États-Unis. La Chine n’a donc pu être compétitive sur le marché européen qu’en exerçant une politique agressive de subventions aux entreprises chinoises de la filière, par l’intermédiaire de banques publiques qui leur ont permis de pratiquer des prix inférieurs aux coûts de revient pour les fabricants. »
La baisse des prix obéit donc non pas à une réalité industrielle, mais aux subventions. Subventions qui ont été rendues nécessaires par le durcissement des politiques de subvention des pays développés. La réduction drastique des subventions a provoqué une situation de surproduction sur le marché du panneau photovoltaïque, et l’effondrement des prix. Les Chinois ont choisi de sauver leur industrie photovoltaïque par la subvention, c’est tout.
[Les premiers à s’en inquiéter sont les investisseurs qui détiennent les actions des compagnies pétrolières : http://www.treehugger.com/renewable-energy/solar-power-cheaper-natural-gas-coal-and-nuclear-power-texas.html%5D
Encore une fois, vous devriez lire avec attention les articles que vous citez. Car si cet article montre que le solaire est compétitif par rapport au gas… il explique aussi que cette compétitivité tient aux subventions (ici, une exemption fiscale). Sans cette exemption, le gas est 15% moins cher. Par ailleurs, je ne vois pas pourquoi cela devrait inquiéter « les investisseurs qui détiennent des actions des compagnies pétrolières ». Aussi longtemps qu’on n’aura pas inventé les voitures solaires, ils n’ont pas à s’inquiéter.
[Les sources qui confirment cette tendance sont abondantes, voici un autre article : http://interfaxenergy.com/gasdaily/article/7564/asian-lng-under-threat-from-solar%5D
Oui… Tout comme dans les années 1980 on nous annonçait quel le japon dominerait l’économie mondiale, que la dérégulation allait nous enrichir tous et la « fin de l’histoire ». N’oubliez pas qu’il y a chez nos élites médiatiques un effet « moutonnier » extrêmement puissant. La doxa aujourd’hui est que les renouvelables c’est l’avenir. Jusqu’à la prochaine mode.
[Nous pouvons continuer à faire l’autruche, et nous boucher les yeux.]
Vous êtes très bien placé pour le savoir, puisque c’est ce que vous faites, oui…
[Mais il semble bien que, contrairement aux Allemands qui fournissent les machines de fabrication de panneaux aux Chinois, nous soyons en train de regarder passer le train de la transition énergétique.]
C’est ce qu’il y a de mieux à faire quand un train va dans le mur.
[*J’avais avancé de mémoire et par erreur le chiffre de 50% de rendement au lieu de 46% réellement,]
Vous avez surtout fait l’erreur de confondre ce que peut être le rendement d’une expérience de laboratoire avec ce que peut être le rendement d’une cellule dans un véritable environnement industriel.
[veuillez m’en excuser, mais ça ne change rien à la situation puisqu’avec les mauvais rendements actuels le solaire chinois est déjà largement rentable.]
Mais alors, pourquoi continue-t-on de combler le photovoltaïque de subventions ? Et pourquoi dès qu’on arrête le robinet à subventions, l’industrie s’effondre ? Il faudra m’expliquer pourquoi une production « largement rentable » vit toujours sur des subventions publiques. Et des subventions considérables : pour une production de l’ordre de 5% de notre électricité nous payons chaque année près de 4 Md€ d’euros rien qu’en subvention.
@nationalistejacobin
[… pouvez-vous me citer un explorateur iroquois, aztèque, sénégalais, congolais, aborigène, indien qui soit venu en Europe “par curiosité”?]
J’avoue ne connaître aucun Aztèque ni aucun Iroquois.
Par contre j’ai côtoyé beaucoup d’indiens Guaranis lorsque je travaillais au Brésil. Après que les collons Portugais aient fait fuir leurs ancêtres au fin fond de les forets primaires humides, les descendants des survivants ont été rattrapés par la déforestation, les plantations de soja et de palmiers à huile.
Aujourd’hui ils survivent dans les faubourgs de Curitiba, de Sao Paulo ou sur les trottoirs des petites villes de l’état du Paraná.
Leur inscription à l’état civil est facultative, la plus part ne sont même pas recensés comme citoyens Brésiliens, un peu comme des sous-hommes, qui n’existeraient pas.
Ils sont abrutis par l’alcool, non scolarisés mais ne sont pas violents. Sans doute la peur de la police.
Ils forment les bataillons des ramasseurs de déchets recyclables. Les filles se prostituent auprès des camionneurs, parfois contre un sandwich, sur les parkings d’autoroute.
Et je dois bien reconnaître que non, ils n’ont jamais envoyé d’explorateurs en Europe.
Je vais vous donner un exemple récent de la suprématie occidentale :
« C’est une forme d’épidémie, qui suscite de fortes fièvres dans les pays qu’elle touche : pour un certain nombre de jeunes touristes, la mode consiste depuis quelque temps à se photographier tout nu dans les grands monuments ou sur les sites sacrés de la planète. L’heure est au « selfie » dans le plus simple appareil. »
La suite de l’article est ici :
http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2015/06/24/les-touristes-nus-irritent-les-gardiens-du-temple_4660863_3216.html#u7EfIKV2LyXJJRwH.99
Et bien moi je trouve que ces peuples arriérés ne résisteront plus bien longtemps à nos lumières.
Si j’ai envie de me foutre à poil en haut d’une montagne sacrée malaysienne ou dans un temple bouddhiste en Thaïlande, c’est quand même pas ceux qui vivent de mon tourisme qui vont m’en empêcher.
Et puis j’ai pris l’option « carbon-neutral » pour le vol – ca m’a quand même coûté 15 euros — et mon tour-opérateur reverse 0,5% de ses profits aux enfants des rues de Manille, alors je suis à fond dans le tourisme durable.
Quoi ?! Les chamanes de Bornéo pensent qu’en se mettant à poil on a déclenché un tremblement de terre ?? J’hallucine ! Les villageois veulent nous mettre à mort !! Non mais c’est le Moyen-Age ici ! Bande de fascistes ! Et mes droits de l’homme ? Et ma liberté d’expression ?
Puisque c’est comme ça, l’année prochaine, on ira montrer nos culs et nos nichons en Birmanie ou à Oulan-Bator — en attendant de pouvoir enlever le bas dans la grande mosquée de Bagdad ou devant le mausolée de Khomeiny à Téhéran.
On est des touristes d’Occident.
On est les missionnaires de la nouvelle religion occidentale, la religion du Moi, infiniment plus attrayante que la précédente. Ce que les pauvres missionnaires de l’Eglise n’ont pas réussi à faire en 500 ans de prédication, de vie partagée, d’acculturation et de martyre, on va l’achever en moins de 30 ans par la festivisation générale du monde. On va unifier l’humanité dans la vacuité satisfaite et narcissique, la musique techno, et la sexualité super-sympa qui va avec.
Rien ne nous résistera.
D’ailleurs, un rapide coup d’œil sur la planète montre que le travail est déjà bien avancé. Tous les pays vont « s’ouvrir ». C’est cool…
J’arrête, Descartes va encore me traiter de prédicateur, annonciateur de la fin du monde.
PS : NJ, malgré nos désaccords fréquents, je suppose que si nous nous trouvons si bien sur ce blog, c’est qu’on doit y lire des choses qui rassemblent.
Je saisis cette occasion, ou je m’adresse directement à vous, pour vous dire que votre analyse de l’évolution réelle des programmes d’histoire géo au collège était très instructive. Merci.
@ v2s
[… pouvez-vous me citer un explorateur iroquois, aztèque, sénégalais, congolais, aborigène, indien qui soit venu en Europe “par curiosité”?][(…) j’ai côtoyé beaucoup d’indiens Guaranis lorsque je travaillais au Brésil. Après que les collons Portugais aient fait fuir leurs ancêtres au fin fond de les forets primaires humides, les descendants des survivants ont été rattrapés par la déforestation, les plantations de soja et de palmiers à huile. Aujourd’hui ils survivent dans les faubourgs de Curitiba, de Sao Paulo ou sur les trottoirs des petites villes de l’état du Paraná. Leur inscription à l’état civil est facultative, la plus part ne sont même pas recensés comme citoyens Brésiliens, un peu comme des sous-hommes, qui n’existeraient pas. Ils sont abrutis par l’alcool, non scolarisés mais ne sont pas violents. Sans doute la peur de la police. Ils forment les bataillons des ramasseurs de déchets recyclables. Les filles se prostituent auprès des camionneurs, parfois contre un sandwich, sur les parkings d’autoroute. Et je dois bien reconnaître que non, ils n’ont jamais envoyé d’explorateurs en Europe.]
J’avoue que le rapport entre cette liste des malheurs du monde et la question posée par NJ m’échappe. La question posée était de savoir pourquoi les autres cultures n’ont pas cherché à « explorer » l’Europe, alors que la civilisation occidentale a commencé, et cela depuis les grecs, à « explorer » les royaumes étrangers. La civilisation occidentale compte depuis la plus haute antiquité des peuples navigateurs : les phéniciens, les grecs ont repoussé les frontières du monde connu, et dans leurs expéditions outre des commerçants ils embarquaient historiens et géographes. Plus tard, les danois arriveront en Islande et même, selon certains auteurs, en Amérique. Connaissez-vous beaucoup d’autres peuples qui aient fait preuve d’une telle curiosité ? Et s’il vous plait, ne me répondez pas que les guaranis ramassent les déchets recyclables ou prostituent leurs filles, cela n’a aucun rapport.
[Je vais vous donner un exemple récent de la suprématie occidentale : « C’est une forme d’épidémie, qui suscite de fortes fièvres dans les pays qu’elle touche : pour un certain nombre de jeunes touristes, la mode consiste depuis quelque temps à se photographier tout nu dans les grands monuments ou sur les sites sacrés de la planète. L’heure est au « selfie » dans le plus simple appareil. »]
Là encore, le rapport m’échappe. Pensez-vous vraiment que les autres cultures aient un respect « naturel » pour les sites sacrés des autres ? Allez à Notre-Dame de Paris, et vous verrez des touristes chinois ou japonais entrer dans l’édifice en short et sandalettes, bras nus et chapeau sur la tête, et se prendre en photo avec flash dans l’édifice. En quoi la sacralité de Notre-Dame serait-elle moindre que celle du mont Kinabalu ? Et pourtant, il ne s’agit pas d’horribles occidentaux, mais de gentils orientaux…
Faudrait quand même pas pousser la haine de soi trop loin. On a compris que vous n’aviez que mépris pour la civilisation occidentale. Mais de là à faire de trois imbéciles qui se mettent à poil en haut d’une montagne des paradigmes de celle-ci…
[Quoi ?! Les chamanes de Bornéo pensent qu’en se mettant à poil on a déclenché un tremblement de terre ?? J’hallucine ! Les villageois veulent nous mettre à mort !! Non mais c’est le Moyen-Age ici ! Bande de fascistes ! Et mes droits de l’homme ? Et ma liberté d’expression ?]
Parfait. La prochaine fois que je verrai un touriste chinois entrer couvert à Notre-Dame, je lui jette dessus une bouteille d’essence et une allumette enflammée. Le sacré, c’est sacré. Vous m’avez convaincu.
@ v2s,
Je n’ai pas bien compris, je l’avoue, votre paragraphe sur les Guaranis. Voulez-vous me faire dire que les explorations européennes ont ouvert la voie à la conquête coloniale, la domination brutale et la marginalisation de populations indigènes? Que la curiosité n’exclut ni la violence, ni la cruauté? Si tel est le cas, je vous l’accorde bien volontiers.
Mais je voudrais vous faire remarquer deux choses:
1/ Les civilisations “non-occidentales” ne sont pas plus tendres. Nous avons évoqué dans nos échanges la civilisation islamique. Je vous invite, vraiment, à vous pencher sur la conquête ottomane des Balkans aux XIV° et XV° siècles. Je vous assure que la violence et la brutalité qui a accompagné cette conquête feraient passer la plupart des conquistadores espagnols pour des enfants de choeur (ne serait-ce que parce que Cortès et Pizarro avaient relativement peu d’hommes, ce qui rendait difficile les massacres de masse… du moins sans recourir à des auxiliaires indigènes). Cette conquête s’est accompagnée d’une authentique colonisation: à côté des conversions, qu’il ne faut pas négliger, des milliers de Turcs sont venus d’Anatolie dans les Balkans (surtout en Macédoine, Thrace, Bulgarie, Grèce) où ils ont pu profiter des meilleures terres confisquées aux chrétiens. Rappelons d’ailleurs que Mustapha Kémal était un Turc de Macédoine. Pendant quatre siècles, les révoltes ont été noyées dans le sang. J’ai eu le plaisir de visiter la Bulgarie: je peux vous dire qu’on garde là-bas un souvenir très vif de la domination ottomane et de la très violente répression turque lors de la guerre de libération nationale. Il y aurait beaucoup à dire aussi sur la conquête musulmane de l’Inde.
2/ Puisque vous me parlez des Guaranis, je pense que nous pourrions évoquer les réductions jésuites. Alors, évidemment, il s’agit d’une entreprise d’évangélisation, fleurant bon le paternalisme condescendant. N’empêche. Les jésuites ont de facto organisé la résistance, culturelle et même militaire, des Guaranis face aux “bandeirantes” portugais qui cherchaient à réduire en esclavage les Indiens. Ces jésuites, ce sont des Occidentaux, non?
Par ailleurs, concernant les jeunes filles guaranies qui se prostituent, je vous signale que dans le sud de la France, j’ai vu de toutes jeunes filles gitanes faire de même le long des routes. On ne peut pas dire que la France ait “colonisé” les Gitans…
Enfin, concernant ce que vous écrivez sur les touristes occidentaux, là encore, je ne comprends pas: personne n’a jamais prétendu que les Occidentaux ne pouvaient pas être grossiers, irrespectueux, arrogants et se conduire comme des imbéciles. Mais je m’oppose à toute généralisation abusive. J’ai peu voyagé, mais chaque fois que je me suis rendu dans un pays étranger, j’ai été le plus respectueux possible. J’ajoute que les Occidentaux sont d’abord irrespectueux… en Occident. Il faut voir avec quelle tenue les gens entrent dans les églises, ne serait-ce qu’en France (et pas seulement les touristes chinois). En Italie, on oblige les femmes à se couvrir les épaules. J’ai vu des gamins s’amuser à faire des glissades sur le sol de la basilique Saint-Pierre à Rome, et ils étaient “occidentaux”. Tout ça pour vous dire que l’irrespect de certains Occidentaux n’est pas seulement un mépris pour les autres civilisations mais un rejet (ou une incompréhension) de toute sacralité. Les Néerlandais visitent une église comme une boutique: j’ai vu des gamins faire de la trottinette à l’intérieur, et la mère n’a pas compris lorsqu’une vieille femme lui a fait remarquer que ce n’était pas une façon de se tenir dans un tel édifice! Mais il y a aussi beaucoup de touristes occidentaux respectueux et curieux des autres cultures. Les trésors de la civilisation islamique intéressent beaucoup d’Européens. A contrario, les élites des pays du Golfe, immensément riches, s’intéressent bien peu au patrimoine occidental. La seule chose qui intéresse les princesses saoudiennes, c’est le shopping à Paris, et on ne peut pas dire que Chambord ou le Mont Saint-Michel reçoivent beaucoup de visites des émirs aisés… Demandez-vous pourquoi.
@nationalistejacobin
>Nous avons évoqué dans nos échanges la civilisation islamique. Je vous invite, vraiment, à vous pencher sur la conquête ottomane des Balkans aux XIV° et XV° siècles. Je vous assure que la violence et la brutalité qui a accompagné cette conquête<
C’est vrai que les chrétiens, à l’égard des musulmans, n’ont à la même époque eu qu’égards… Dans l’ancienne Grenade, par exemple…
Franchement, je préfère laisser à d’autres la concurrence victimaire. Je m’étonne de vous la voir pratiquer. Imaginons un instant ce que Ladislas III aurait fait avec les musulmans s’il avait été victorieux…
>ne serait-ce que parce que Cortès et Pizarro avaient relativement peu d’hommes, ce qui rendait difficile les massacres de masse… du moins sans recourir à des auxiliaires indigènes<
Cortès s’imaginait en grand conquérant d’un empire qui, dans son idée, rivaliserait avec l’Espagne ; un arriviste et un opportuniste certes, mais pas dénué d’ambition et d’une certaine vision. Pizarro était un pillard dont la loyauté, étant donné les rapports de force lorsqu’il a lancé son expédition vers le sud, était toutefois solide. On se souvient surtout des expéditions espagnoles réussies d’ailleurs, et peu de celles qui ont échoué.
>Cette conquête s’est accompagnée d’une authentique colonisation: à côté des conversions, qu’il ne faut pas négliger, des milliers de Turcs sont venus d’Anatolie dans les Balkans (surtout en Macédoine, Thrace, Bulgarie, Grèce) où ils ont pu profiter des meilleures terres confisquées aux chrétiens.<
Ce qui était à peu près la pratique habituelle de l’époque. Vous savez, les russes n’ont pas conquis une steppe vide au sud, par exemple…
>J’ai eu le plaisir de visiter la Bulgarie: je peux vous dire qu’on garde là-bas un souvenir très vif de la domination ottomane et de la très violente répression turque lors de la guerre de libération nationale.<
“Vif souvenir” qui n’a bien sûr rien à voir avec les tensions actuelles entre les deux pays, ni avec la traditionnelle tendance des peuples des Balkans à falsifier l’Histoire… Je vous accorde que les Turcs sont les champions, mais les Slaves méridionaux ne sont qu’une coudée derrière.
>Il y aurait beaucoup à dire aussi sur la conquête musulmane de l’Inde.<
En effet, beaucoup, étant donné que c’est un mouvement progressif qui a duré près de huit siècles. Il y aurait encore plus à dire sur les guerres internes aux royaumes hindous, étant donné qu’aussi loin que remonte l’écriture historique en Inde, il n’est fait mention que de massacres, de suicides collectifs et d’exécutions sommaires.
Vous semblez vouloir assimiler de force à l’islam la pratique du meurtre collectif, de la colonisation, de la violence ; franchement, je vous ai connu meilleur. Je comprends que vous en ayez marre des musulmans en France, de leurs ostentation et arrogance, je vous rejoins d’ailleurs pour tout vous dire ; mais ce n’est pas une raison pour décerner à l’islam la médaille de la barbarie inhumaine pour les siècles des siècles…
@ BolchoKek
[Franchement, je préfère laisser à d’autres la concurrence victimaire. Je m’étonne de vous la voir pratiquer. Imaginons un instant ce que Ladislas III aurait fait avec les musulmans s’il avait été victorieux…]
Je suis d’accord avec vous. Mais si on laisse de côté la « concurrence victimaire », il faut aussi abandonner une autre constante de la « haine de soi », qui est la présomption de sainteté appliquées aux vaincus de l’Histoire. Pour prendre l’exemple de Cortès, il existe une littérature abondante qui explique combien les indiens étaient pacifiques, tolérants, civilisés et – on rajoute cela depuis quelques années – protecteurs de la nature et de l’environnement. Tout le contraire de Cortès. Avec Franz Fanon on atteindra les sommets : le colonisé devient une sorte de saint laïque, dont la supériorité morale est incontestable.
A cette vision manichéenne, il faut opposer une vision objective de l’histoire : Si les vaincus de l’histoire avaient été les vainqueurs, ils auraient fait la même chose. L’histoire, on ne le répétera jamais assez, est tragique. Elle ne fournit certainement pas un message moral.
@ Bolchokek,
“C’est vrai que les chrétiens, à l’égard des musulmans, n’ont à la même époque eu qu’égards… Dans l’ancienne Grenade, par exemple…
Franchement, je préfère laisser à d’autres la concurrence victimaire. Je m’étonne de vous la voir pratiquer.”
Votre reproche m’étonne. Mes remarques s’insèrent dans un débat avec notre ami v2s qui, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, dénonce régulièrement les méfaits impardonnables de l’ “hommes occidental”. Je me devais de lui rappeler que les “Autres” sont loin d’être des enfants de choeur. Je n’ai jamais prétendu que les Occidentaux fussent des tendres. Je l’avais d’ailleurs précisé dès le début de l’intervention que vous incriminez. Je n’ai aucun problème avec les massacres et les exactions commises par les Européens, mais j’accepte plus difficilement qu’on “oublie” ceux des autres.
Ensuite, oui, je suis désolé de vous contredire, les chrétiens ont longtemps eu, sinon “des égards”, du moins une indifférence frisant parfois la bienveillance, pour les musulmans. Ainsi, arrêtez-moi si je me trompe, les Arabes ont assiégé Constantinople à deux reprises au VIII° siècle, envahi la Sicile, menacé Rome, pris pied en Provence, et une de leurs armées est arrivée non loin de Poitiers, en 732 je crois. Tout ça en réponse à quelle agression, s’il vous plaît? La volonté de conquérir le monde chrétien est indéniable. A contrario, au plus fort des “abominables” Croisades, les Occidentaux n’ont jamais véritablement tenté de subjuguer la totalité du monde islamique: ni Bagdad, ni la Mecque n’ont véritablement été menacées. Et lors de la progression des Ottomans, les Occidentaux ont quand même globalement laissé faire et, si l’on excepte deux expéditions (Nicopolis en 1396 et Varna en 1444), ils ont assisté à l’invasion des Balkans et de la Hongrie en spectateurs indifférents, préférant se lancer dans l’aventure ultramarine. Et dès François 1er, la France a noué de cordiales relations avec le Grand Turc, alliance à laquelle Louis XIV était loyal deux siècles plus tard. Parler d’ “égards” est peut-être excessif, mais le fait est que globalement les chrétiens ont été moins obnubilés par la “guerre sainte” que les musulmans. Et je persiste à penser que l’islam est par nature plus expansionniste que le christianisme. Lorsque les Européens se lancent vraiment à la conquête du monde à partir du XVI° siècle, la motivation proprement religieuse est secondaire.
“Imaginons un instant ce que Ladislas III aurait fait avec les musulmans s’il avait été victorieux..”
Vous ne savez pas plus que moi ce qu’il aurait fait. Mais le fait est qu’en 1402 Tamerlan a écrasé les Ottomans (et “écraser” est le mot, le sultanat ottoman est à terre après la bataille d’Ankara), et on ne peut pas dire que les chrétiens aient cherché à en profiter plus que cela… Il y avait pourtant une opportunité à saisir.
“Ce qui était à peu près la pratique habituelle de l’époque.”
Oui. Pas seulement pour les Occidentaux, c’est ce que je voulais souligner.
“Vous savez, les russes n’ont pas conquis une steppe vide au sud, par exemple..”
Ce n’est pas avant le XVI° siècle, et les tsars ont d’abord pratiqué une politique d’entente avec les groupes de Cosaques par exemple. Par ailleurs, la densité dans la steppe russo-ukrainienne est moindre. La colonisation turque dans les Balkans commence dès le milieu du XIV° siècle, dans des régions très peuplées depuis le 1er millénaire avant notre ère.
“ni avec la traditionnelle tendance des peuples des Balkans à falsifier l’Histoire…”
Une tendance des peuples des Balkans? Car bien sûr, ni la Turquie, ni l’Algérie, ni l’Iran, ni aucun pays musulman d’ailleurs ne falsifie l’histoire, c’est bien connu…
“Je vous accorde que les Turcs sont les champions, mais les Slaves méridionaux ne sont qu’une coudée derrière.”
A ceci près que les Slaves méridionaux ne sont pas allés exercer leurs cruautés jusqu’en Egypte ou au Turkestan. Cela fait une sacrée différence.
“étant donné qu’aussi loin que remonte l’écriture historique en Inde, il n’est fait mention que de massacres, de suicides collectifs et d’exécutions sommaires.”
De ce point de vue, je ne pense pas que l’invasion musulmane ait entraîné un “progrès” ou une baisse de la violence endémique. Au contraire.
“Vous semblez vouloir assimiler de force à l’islam la pratique du meurtre collectif, de la colonisation, de la violence”
Pas du tout, et je suis désolé que vous l’ayez compris ainsi. Je voulais simplement montrer à v2s que les Occidentaux n’ont pas le monopole “du meurtre collectif, de la colonisation, de la violence”, et j’ai pris l’exemple ottoman parce que je le connais un peu, étant très intéressé par la chute de l’empire byzantin. Maintenant, si vous voulez me faire dire que certaines conquêtes musulmanes se sont passées sans bain de sang notable, que les envahisseurs arabes se sont parfois conduits de manière humaine et fort accommodante, je vous l’accorde volontiers: en Syrie ou en Egypte, les musulmans ont su s’entendre avec les chrétiens locaux (fâchés pour la plupart avec l’Eglise de Constantinople, ce qui aide). Saladin est un modèle de modération et de générosité, de l’aveu même de ses ennemis. Mais les Mamelouks, les Turcs, Seldjoukides et Ottomans, sont plus brutaux.
“Je comprends que vous en ayez marre des musulmans en France”
Il n’y a aucun rapport. Les conquêtes ottomanes des XIV°-XV° siècles n’ont rien à voir avec l’immigration musulmane en France au XX° siècle. Encore une fois, vous vous méprenez sur le sens de mon propos, et j’en suis désolé. Je ne tiens pas les musulmans d’aujourd’hui pour responsables des cruautés ottomanes.
“mais ce n’est pas une raison pour décerner à l’islam la médaille de la barbarie inhumaine pour les siècles des siècles…”
Ben… ce n’est pas ce que j’ai voulu faire. Vous avez évoqué, à juste titre, les combats internes au monde hindou. Je pense que les guerres de conquête chinoises ou mongoles, où les affrontements entre royaumes subsahariens n’ont rien à envier aux entreprises ottomanes en terme de violence. Même la cruauté des Aztèques est proverbiale (sinon on voit mal pourquoi Cortès aurait trouvé autant d’auxiliaires pour assiéger et détruire Ténochtitlan). Ma thèse est que tout le monde a du sang sur les mains, il n’existe nulle part sur Terre un “peuple de saints” et l’on peut passer des heures à égrener les crimes des uns et des autres. D’autres, comme v2s, pensent que les Occidentaux ont la palme de la malfaisance. Je me contentais de lui porter la contradiction, et je m’en veux de vous avoir contrarié.
>Mes remarques s’insèrent dans un débat avec notre ami v2s qui, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, dénonce régulièrement les méfaits impardonnables de l’ “hommes occidental”.<
Certes, et je vous suis sur ce point, mais le problème fondamental chez v2s est à mon avis d’imaginer un “homme occidental” abstrait, et que vous lui opposiez un “homme oriental/musulman” tout aussi abstrait.
>Ensuite, oui, je suis désolé de vous contredire, les chrétiens ont longtemps eu, sinon “des égards”, du moins une indifférence frisant parfois la bienveillance, pour les musulmans. Ainsi, arrêtez-moi si je me trompe, les Arabes ont assiégé Constantinople à deux reprises au VIII° siècle, envahi la Sicile, menacé Rome, pris pied en Provence, et une de leurs armées est arrivée non loin de Poitiers, en 732 je crois. Tout ça en réponse à quelle agression, s’il vous plaît?<
Aucune. Les subtilités diplomatiques en ces temps troublés faisaient qu’invoquer une mission divine consistant à s’accaparer le plus de terres possible était un casus belli suffisant. Et lorsque l’on voit la rapidité de l’expansion territoriale des musulmans dans les premiers siècles, on ne voit pas pourquoi ils en auraient douté. Mais les Arabes disposaient en fait d’une unité politique fragile, qui ne résistera pas à la “révolution abbasside” et à l’émergence de roitelets souvent d’origine turque. En somme, ils ont conquis du moment qu’ils en avaient les moyens militaires et surtout politiques ; l’explosion du califat omeyyade de Cordoue en différentes taïfas et les guerres de succession internes de ces dernières ont réduit à néant les possibilités d’expansion en Espagne, et ont même plus tard ouvert la voie aux premiers succès de la reconquista.
Je reste persuadé que plus encore que la volonté de conquête, c’est l’intérêt dans la conquête et les moyens de la mener à bien qui déterminent les évolutions territoriales.
>A contrario, au plus fort des “abominables” Croisades, les Occidentaux n’ont jamais véritablement tenté de subjuguer la totalité du monde islamique: ni Bagdad, ni la Mecque n’ont véritablement été menacées.<
Il ne faut pas oublier que la première croisade est une croisade de grands féodaux plutôt que de rois, et que ces féodaux ont engagé des sommes considérables dans une entreprise somme toute très risquée. L’intérêt financier d’un contrôle du proche-orient est de plus tout à fait discutable, et étant donné la difficulté qu’avaient le Pape à trouver des seigneurs prêts à se prêter à l’aventure et les Etats Croisés à trouver des hommes, je pense que la conquête de La Mecque ou de Bagdad aurait de toute façon été inenvisageable du point de vue des moyens, avant même se demander si elle fût souhaitable…
>Et lors de la progression des Ottomans, les Occidentaux ont quand même globalement laissé faire et, si l’on excepte deux expéditions (Nicopolis en 1396 et Varna en 1444), ils ont assisté à l’invasion des Balkans et de la Hongrie en spectateurs indifférents, préférant se lancer dans l’aventure ultramarine.<
Encore ces “occidentaux”… Je vous fais remarquer que ce sont les Ottomans, et non les “orientaux” ou “les musulmans”, qui se trouvaient en guerre contre différents Etats d’Europe centrale et du Sud. Je pense que l’autorité du Pape était, à partir du XVe siècle, largement diminuée, et qu’il n’était guère écouté que par ceux qui avaient intérêt à l’écouter. Je pense que les royaumes de France ou de Castille avaient tout simplement d’autres chats à fouetter que de s’occuper des Balkans. De même, lors des expéditions espagnoles et portugaises en Afrique du nord suivant la reconquista, ni les sultans Mamelouks ni les Ottomans n’ont bougé le petit doigt.
Les guerres étaient, déjà à l’époque, un rapport d’Etats à Etats ; “la chrétienté” était comme aujourd’hui “l’occident” (au sens politique s’entend) une construction intellectuelle qui n’était utilisée que par ceux qui voulaient bien y croire, ou surtout, y avaient un intérêt.
>Et dès François 1er, la France a noué de cordiales relations avec le Grand Turc, alliance à laquelle Louis XIV était loyal deux siècles plus tard. <
Les ennemis de mes ennemis… La realpolitik existait bien avant l’invention du terme.
>Parler d’ “égards” est peut-être excessif, mais le fait est que globalement les chrétiens ont été moins obnubilés par la “guerre sainte” que les musulmans.<
Je pense que toute “obnubilation” est à chercher dans les situations politiques plus que dans les textes ou les croyances même des musulmans. Regardez les catholiques : une religion qui tend la joue gauche qui finit par pratiquer la guerre sainte nous enseigne que l’on peu toujours trouver une interprétation au message religieux et en faire ce que l’on veut…
>Et je persiste à penser que l’islam est par nature plus expansionniste que le christianisme.<
J’ai renoncé à trouver une “nature” aux religions. C’était un professeur de droit afghan qui m’a dit un jour “un mollah, officiellement, est sensé éclairer la population sur les bonnes pratiques ; dans les faits, sa connaissance lui sert à justifier les pratiques que la population a déjà…”
>Lorsque les Européens se lancent vraiment à la conquête du monde à partir du XVI° siècle, la motivation proprement religieuse est secondaire.<
La religion était certainement une motivation. Après, que les populations que l’Espagne par exemple ait voulu soumettre aient correspondu parfaitement aux projets de la couronne relève certainement de la bénédiction divine.
>Par ailleurs, la densité dans la steppe russo-ukrainienne est moindre.<
Je ne pensais pas nécessairement aux cosaques ou à l’Ukraine, mais aux zones occupées par les tatars, certes des zones de moindre densité, mais qui pouvaient toutefois entretenir des villes importantes comme Astrakhan. Toutefois, une fois annexées, comme en Sibérie, ces zones ont subi une colonisation russo-ukrainienne largement encouragée par les Tsars. Après tout, quoi de plus normal pour des souverains que de s’assurer l’existence d’importantes communautés nécessairement plus loyale ? Ce qui m’étonne, c’est que vous reprochiez aux Ottomans d’avoir fait de même…
>Une tendance des peuples des Balkans?<
Oui, et d’Europe centrale en général d’ailleurs. Vous devriez lire ce que certains “historiens” hongrois écrivent sur Horthy ou croates à propos des oustachis… Ou comment les polonais “ommettent” très facilement certains aspects du régime de Pilsudski…
>A ceci près que les Slaves méridionaux ne sont pas allés exercer leurs cruautés jusqu’en Egypte ou au Turkestan. Cela fait une sacrée différence.<
Je ne vois pas en quoi. Vous-même plus haut écrivez “je n’ai aucun problème avec les massacres et les exactions commises par les Européens”. Il faut donc croire que vous avez par contre un problème avec les “massacres et les exactions” commises par d’autres, surtout lorsqu’ils sont musulmans. C’est précisément le reproche – amical, croyez-le – que je vous fais : à la “condamnation historique” sentimentaliste de v2s, vous répondez par une “condamnation historique” différente, plus habile, mais qui au final relève selon moi toujours de la “compétition victimaire”. Peut-être ne vous en rendez vous pas compte, mais je me permets de vous le signaler…
>De ce point de vue, je ne pense pas que l’invasion musulmane ait entraîné un “progrès” ou une baisse de la violence endémique. Au contraire.<
Il faut savoir de quoi on parle : les vagues d’invasion musulmanes en Inde ont été multiples, et ont souvent d’ailleurs consisté en des musulmans envahissant d’autres royaumes musulmans : c’est le cas du conquérant le plus connu du sous-continent, Babûr, qui a en fait envahi le sultanat de Delhi. D’ailleur, sa dynastie, les Moghols, seront à leur apogée d’une tolérance telle qu’ils tenteront l’instauration d’une foi syncrétique islamo-hindoue, le Din-e-illahi, et ont instauré en Inde une unité politique et une période de paix qui n’existait plus depuis la fin de l’empire Gupta. On ne peut caractériser d’une façon ou d’une autre “l’Inde musulmane”, tant les différences selon les époques et les endroits sont énormes.
>Encore une fois, vous vous méprenez sur le sens de mon propos, et j’en suis désolé.<
Peut-être. Mais j’essaye justement de vous montrer que si méprise il y a eu, vous êtes en moins un peu responsable… Et pas besoin de vous excuser, voyons, nous n’en sommes plus là.
> Je me contentais de lui porter la contradiction, et je m’en veux de vous avoir contrarié.<
Vous ne m’avez pas contrarié, au contraire, vous m’avez intéressé. J’aime intervenir ici pour avoir quelque chose à dire (quelqu’un est généralement plus rapide que moi) et vous m’en avez donné l’opportunité. Vous savez, j’ai subi le prosélytisme des témoins de Jéovah tous les matins au marché pendant longtemps, cela a contribué à faire de moi un individu assez calme et patient…
@ BolchoKek
[Je reste persuadé que plus encore que la volonté de conquête, c’est l’intérêt dans la conquête et les moyens de la mener à bien qui déterminent les évolutions territoriales.]
Je pense que c’est un point très important. Pendant la plus grande partie de l’histoire humaine, la puissance d’un Etat était intimement liée à son extension territoriale et démographique. Ce n’est que très récemment que ce mouvement s’est inversé : aujourd’hui, on voit au contraire des pays se débarrasser lorsqu’ils le peuvent de leurs régions pauvres, préférant concentrer la richesse au prix de sacrifices territoriaux et démographiques.
[Et dès François 1er, la France a noué de cordiales relations avec le Grand Turc, alliance à laquelle Louis XIV était loyal deux siècles plus tard.][Les ennemis de mes ennemis… La realpolitik existait bien avant l’invention du terme.]
Tout à fait. Mais vous donnez raison au point soulevé par Nationalistejacobin, à savoir, que les alliances dès la Renaissance sont plus liées à des intérêts politiques et économiques qu’aux questions religieuses. Des princes « occidentaux » n’hésitaient pas à s’allier à des « infidèles » pour contrer d’autres princes « occidentaux ». Je me demande si chez les princes musulmans de l’époque une telle conception – l’alliance avec les « infidèles » contre un autre prince musulman – était admissible. J’en doute. Encore aujourd’hui, en plein XXIème siècle, les opinions publiques arabes rejettent ce type de compromis.
[Lorsque les Européens se lancent vraiment à la conquête du monde à partir du XVI° siècle, la motivation proprement religieuse est secondaire.][La religion était certainement une motivation.]
Je pense que vous confondez « motivation » et « justification »…
@ Bolchokek,
“Aucune. Les subtilités diplomatiques en ces temps troublés faisaient qu’invoquer une mission divine consistant à s’accaparer le plus de terres possible était un casus belli suffisant.”
Les derniers empereurs romains devenus chrétiens pouvaient estimer être investis de la même mission. Pourtant, l’empire chrétien n’a pas connu d’expansionnisme particulier, bien au contraire.
“Je reste persuadé que plus encore que la volonté de conquête, c’est l’intérêt dans la conquête et les moyens de la mener à bien qui déterminent les évolutions territoriales.”
Je ne serais pas aussi catégorique. Pour Alexandre le Grand, on voit plutôt que la volonté, l’esprit d’aventure l’emportent. Et les moyens dont disposaient Alexandre paraissaient a priori bien faibles au regard de son entreprise. Vous sous-estimez la “volonté de conquête”, alors même que vous l’avez relevé pour quelqu’un comme Cortès.
“Il ne faut pas oublier que la première croisade est une croisade de grands féodaux plutôt que de rois, et que ces féodaux ont engagé des sommes considérables dans une entreprise somme toute très risquée.”
Et alors? Les conquêtes en Amérique au début du XVI° siècle ont été le fait d’aventuriers dont le “mandat” était plus que contestable. A l’époque féodale, les grands féodaux sont les véritables maîtres de l’Occident. D’ailleurs Raymond de Saint-Gilles est le maître d’un vaste territoire dans le Midi de la France, le duc de Normandie, frère du roi d’Angleterre, et égal d’un roi, se croise. A la fin du XI° siècle, le roi n’est encore qu’un “primus inter pares”.
“L’intérêt financier d’un contrôle du proche-orient est de plus tout à fait discutable”
La côte syro-palestinienne est un débouché des routes commerciales de l’Asie centrale. Les chrétiens se rendaient en pèlerinage à Jérusalem, et connaissaient fort bien la richesse de l’Orient. En Sicile, les Normands avaient pu avoir un aperçu de l’opulence du monde musulman (et byzantin, qu’on oublie un peu vite).
“étant donné la difficulté qu’avaient le Pape à trouver des seigneurs prêts à se prêter à l’aventure et les Etats Croisés à trouver des hommes”
Mais les chrétiens d’Occident ont montré une remarquable capacité d’adaptation pour gérer la pénurie d’hommes. Les ordres militaires comme les Templiers sont un bon exemple: l’exploitation de vastes domaines en Occident a permis de dégager des moyens pour défendre la Terre Sainte, grâce à un système de transfert de richesses inédit à l’époque. Pour se maintenir en Terre Sainte dans un contexte difficile, les Occidentaux ont innové, au niveau militaire, institutionnel, économique (y compris en copiant au besoin les musulmans et les Byzantins). De ce point de vue, les Croisades ont constitué une école remarquable pour l’Occident. Le décollage occidental date d’ailleurs de cette époque. Ensuite, on a rarement manqué de Croisés jusqu’au XIII° siècle, mais plutôt de colons.
“Encore ces “occidentaux”..”
Quel mot voulez-vous que j’emploie? Chrétiens d’Occident? Royaumes d’Occident? Choisissez, mais je pense que nous nous comprenons.
“Je vous fais remarquer que ce sont les Ottomans, et non les “orientaux” ou “les musulmans”, qui se trouvaient en guerre contre différents Etats d’Europe centrale et du Sud”
Les Ottomans, comme toutes les peuplades turques, sont originaires d’Asie centrale, et je ne vois pas pourquoi ils n’entreraient pas dans la catégorie “Orientaux”. Ensuite, soyons clairs: depuis la fin de l’époque omeyyade, le monde musulman est politiquement éclaté, mais cela n’empêche pas qu’il y a souvent une puissance musulmane dominante en Méditerranée orientale, et on peut considérer, d’une certaine manière, que cette puissance “incarne” l’islam à un moment donné de l’histoire: pour les premiers croisés, l’ “islam”, ce sont les Seldjoukides d’Anatolie et de Syrie-Mésopotamie; pour Richard Coeur de Lion, l’ “islam”, c’était l’empire syro-égyptien des Ayyoubides; pour Saint-Louis, l’empire mamelouk sur le même espace; dans la deuxième moitié du XIV° siècle, une nouvelle puissance musulmane, dynamique et expansionniste, apparaît, le sultanat ottoman, et donc, pour les Occidentaux du XV° siècle, l’ “islam”, ce sont les Ottomans, et dans une moindre mesure les Mamelouks, plus que les souverains de Perse ou le sultan de Delhi. De même qu’aujourd’hui, pour nous Européens, les “musulmans” ce sont avant tout les Arabes et les Turcs, parce que ce sont ceux que nous connaissons le mieux et qu’ils sont nos voisins. Bien sûr, les Ouzbeks, les Bangladeshis et les Indonésiens sont aussi musulmans, mais pour l’Europe, l’islam c’est d’abord les musulmans du pourtour méditerranéen. Par conséquent, je pense que ma terminologie se justifie.
“Les guerres étaient, déjà à l’époque, un rapport d’Etats à Etats ; “la chrétienté” était comme aujourd’hui “l’occident” (au sens politique s’entend) une construction intellectuelle qui n’était utilisée que par ceux qui voulaient bien y croire, ou surtout, y avaient un intérêt.”
Je ne suis absolument pas d’accord. D’abord, si l’Etat est déjà en construction avancée en France à la fin du Moyen Âge, ce n’est pas le cas partout: l’Allemagne reste très féodale, l’Espagne aussi, les états italiens sont déchirés par les querelles “claniques”. Par ailleurs, un ordre militaire comme celui des chevaliers hospitaliers de Saint-Jean (les actuels chevaliers de Malte) n’a jamais cessé de recruter dans tous les pays de la “chrétienté” et de posséder des biens dans tous ces pays pour alimenter l’effort de guerre de l’ordre contre les Ottomans. La simple existence de ces ordres militaires est une preuve (même modeste) qu’il existait bel et bien une idée de “chrétienté” au Moyen Âge. Je vous accorde que ce concept de “chrétienté” n’a jamais empêché de féroces guerres internes et qu’il tend à s’effacer à la fin du XV° siècle (et plus encore avec la Réforme au siècle suivant). Mais je trouve que vous le balayez un peu vite. Après tout, à Nicopolis en 1396, il y avait quand même des Français, des Bourguignons, des Allemands, des Hongrois, des Valaques, soutenus par une flotte vénitienne. Ce n’est pas si mal, si l’on songe que tous n’étaient pas là pour défendre leur Etat.
“Regardez les catholiques : une religion qui tend la joue gauche qui finit par pratiquer la guerre sainte nous enseigne que l’on peu toujours trouver une interprétation au message religieux et en faire ce que l’on veut…”
Cela nous enseigne aussi qu’une religion évolue en fonction de ses rapports aux autres. Il est par exemple intéressant de constater qu’il n’est pas question de “guerre sainte” en Occident avant la confrontation avec l’islam. Il faudrait faire des recherches poussées pour le prouver, mais j’ai tendance à penser que le catholicisme a emprunté le concept de “guerre sainte” à l’islam.
“J’ai renoncé à trouver une “nature” aux religions.”
Il n’empêche que chaque religion est profondément marquée par le contexte de son apparition et la personnalité de son fondateur. Mahomet est un guerrier et un conquérant, pas Jésus. Le modèle du musulman, c’est le croyant qui fait le djihad; le modèle du chrétien, au Moyen Âge, c’est le moine…
“La religion était certainement une motivation.”
Je ne le crois pas. La papauté n’a rien piloté du tout. Christophe Colomb et Hernan Cortès sont au service d’un pouvoir strictement laïc. En islam, la séparation entre politique et religieux est moins nette.
“Ce qui m’étonne, c’est que vous reprochiez aux Ottomans d’avoir fait de même…”
Je ne reproche RIEN aux Ottomans. Si j’avais été à leur place, j’aurais fait de même: ils ont profité de la peste et de l’affaiblissement des chrétiens des Balkans pour faire des conquêtes et devenir une très grande puissance. Je dis simplement que ces conquêtes se sont accompagnées de massacres et d’exactions, d’une véritable entreprise de colonisation et que, à ce moment, du XIV° au XVI° siècle, les Ottomans incarnent l’islam, un islam dynamique et expansionniste. Mais je ne condamne rien. Les Croisés au XII° siècle avaient profité des dissensions du monde musulman. C’est la règle du jeu.
“lors des expéditions espagnoles et portugaises en Afrique du nord suivant la reconquista, ni les sultans Mamelouks ni les Ottomans n’ont bougé le petit doigt.”
Vous allez un peu vite en besogne! Pourquoi les Ottomans (suzerains des Barbaresques du Maghreb) ont-ils noué une alliance avec la France? Pourquoi la flotte turque vient-elle hiverner en Corse avec l’appui d’Henri II? C’est bien parce que les Ottomans disputent la suprématie maritime à l’Espagne en Méditerranée. Et dans ce contexte, l’Afrique du Nord a son importance.
“Oui, et d’Europe centrale en général d’ailleurs. Vous devriez lire ce que certains “historiens” hongrois écrivent sur Horthy ou croates à propos des oustachis… Ou comment les polonais “ommettent” très facilement certains aspects du régime de Pilsudski..”
Et donc les historiens iraniens, turcs et algériens ne disent que la vérité, n’est-ce pas?
Je vous trouve extrêmement sévère, et pour tout dire injuste. Les pays d’Europe centrale et balkanique ne sont pas comme la France, l’Espagne ou le Royaume-Uni: ce sont souvent des états jeunes, pour la plupart nés au XIX° voire au XX° siècle. Ces pays ont encore besoin de se construire un “roman national” nécessaire pour justifier leur existence. L’heure de poser un regard dépassionné sur le passé n’est pas encore venu, d’autant que ces régions d’Europe n’ont pas connu les Lumières avec la même intensité que l’Europe de l’Ouest et du Nord, et sont restées un peu en marge de la révolution intellectuelle et scientifique du XVIII° siècle.
Lorsque j’étais en Bulgarie, j’ai visité le village-musée de Koprivchtitza, un village de Bulgares chrétiens de l’époque ottomane. Et bien que remarque-t-on? Que les maisons sont vastes et confortables, que l’agencement des pièces, le mobilier et les vêtements (sans parler de la cuisine) sont très fortement influencés par les Turcs. Mais surtout on comprend (bien que pas grand monde ne l’admette) que ces Bulgares chrétiens ne vivaient pas si mal du temps de la domination ottomane. Après les affres de la conquête, il y a eu la “paix ottomane” et les chrétiens des Balkans en ont profité durant les XVII° et XVIII° siècles, c’est vrai. Seulement voilà, au XIX° siècle, il y a eu le “renouveau national” (l’influence différée des Lumières et de la Révolution française en quelque sorte), en fait la naissance de la nation bulgare (car les empires bulgares médiévaux sont multiethniques et le dernier royaume bulgare ne prend un caractère “national” que durant le dernier demi-siècle de son existence, juste avant la conquête ottomane). Le jeune état bulgare (mais c’est vrai pour la Serbie et la Grèce) a dû en quelque sorte “diaboliser” l’occupation turque pour justifier son existence d’une part, et les sacrifices consentis pour sa renaissance d’autre part. Ce n’est peut-être pas “scientifique”, ni complètement “honnête”, mais cette histoire officielle “falsifiée” est une nécessité pour des pays jeunes, nés dans un espace où peuples, ethnies et religions s’enchevêtrent d’une manière inextricable.
Vous me parlez d’Horthy, mais si j’étais Hongrois, j’aurais certainement une bonne opinion de l’amiral: il a oeuvré au mieux des intérêts hongrois. La Hongrie fait partie des vaincus de 1918. Grâce à son alliance avec le III° Reich, il a permis à la Hongrie de recouvrir des territoires en Slovaquie, en Yougoslavie, en Roumanie. Je ne suis pas choqué que certains historiens hongrois voient en lui un grand homme de la Hongrie: il a agi en vue de redonner à son pays une puissance qu’il avait perdue. Les oustachis n’ont-ils pas créé la “Grande Croatie” qui les affranchissaient de la domination serbe? Pilsudski n’est-il pas le héros de la renaissance polonaise? Pourquoi n’aurait-il pas sa place parmi les grands hommes? Parce qu’il a massacré ses opposants? Mais Napoléon a tiré sur les royalistes, fait exécuter le duc d’Enghien, rétabli l’esclavage, rançonné l’Europe, jeté en prison ses opposants. L’empereur trouve pourtant des défenseurs, même parmi les historiens contemporains.
“Je ne vois pas en quoi.”
C’est simple: se déroulant sur leur territoire ou à proximité, les guerres des Slaves méridionaux sont le plus souvent défensives. Voyez les combats des années 90: les Croates défendent leur indépendance, les Serbes défendent leurs congénères de la Krajina ou du Kosovo, les Bosniaques se défendent des Serbes, etc… Les Ottomans ne mènent pas des guerres défensives dans les Balkans des XIV°-XV° siècles: ce sont des guerres de conquête et d’asservissement.
“D’ailleur, sa dynastie, les Moghols, seront à leur apogée d’une tolérance telle qu’ils tenteront l’instauration d’une foi syncrétique islamo-hindoue, le Din-e-illahi, et ont instauré en Inde une unité politique et une période de paix qui n’existait plus depuis la fin de l’empire Gupta.”
Oui. Et pourquoi à votre avis cette tentative de “foi syncrétique” portée par le pouvoir moghol (et non par des religieux épris de spiritualité)? Peut-être bien parce que la présence de l’islam en terre hindoue était un facteur de tensions et de divisions, peut-être bien parce que le Grand Moghol avait compris qu’islam et hindouisme étaient condamnés à s’affronter… Ce en quoi il n’avait pas tort. Demandez-vous aussi pourquoi ce syncrétisme a échoué… et pourquoi la paix moghole n’a duré qu’un temps.
“On ne peut caractériser d’une façon ou d’une autre “l’Inde musulmane”, tant les différences selon les époques et les endroits sont énormes.”
Je vous l’accorde.
“Mais j’essaye justement de vous montrer que si méprise il y a eu, vous êtes en moins un peu responsable…”
Parce que vous lisez mon intervention avec en tête mes fréquentes diatribes contre les immigrés musulmans. Mais l’immigration musulmane récente et l’histoire du monde musulman sont deux choses distinctes dans mon esprit, je vous l’assure.
“Vous savez, j’ai subi le prosélytisme des témoins de Jéovah tous les matins au marché pendant longtemps”
J’espère que vous ne me mettez pas dans le même sac que nos amis témoins de Jéhovah 🙂
@Descartes
« Faut-il conclure que toute personne qui quitte son pays pour fuir un mariage arrangé a le droit d’être accueilli en France ? Si tel est le cas, nous prenons le risque d’avoir la moitié de l’Inde à nos portes… »
La moitié de l’Inde, c’est 650 millions d’habitants. Difficile de croire qu’autant de personnes cherchent à fuir les mariages arrangés, ou qu’elles en aient la volonté ou les moyens financiers. Et même si c’était le cas, elles fuiraient de préférence vers les pays voisins et/ou ceux de la dispora indienne. Nous devrions donc pouvoir courir le « risque »…
J’imagine bien que votre exemple avait une visée rhétorique, mais le but m’échappe un peu.
« Si on décide d’ouvrir nos frontières, il faut estimer le coût de cette ouverture et le faire payer par les couches sociales qui en profitent le plus. »
Qu’appelez-vous le coût de cette ouverture ? Qu’est-ce que vous comptez mesurer ? L’accroissement des importations pétrolières pour faire rouler une population plus nombreuse ?
Et pour ce qui est de faire payer le coût de l’immigration (si tant est que ce soit mesurable), comment espérez-vous mesurer la « profitabilité » de l’immigration selon les couches sociales ? Et pourquoi qui que ce soit devrait payer (et par quels mécanismes ?) pour la présence ou la non-présence de quelqu’un d’autre ?
@ Johnathan R. Razorback
[J’imagine bien que votre exemple avait une visée rhétorique, mais le but m’échappe un peu.]
Bien entendu, il s’agissait d’un exemple rhétorique. Mais le but est simple : montrer qu’on ne peut fonder une politique migratoire sur un principe général sans se poser la question de savoir ce que cela implique en termes réels. Donner à chaque personne qui n’est pas satisfaite des règles et traditions de son pays le droit de résider régulièrement en France c’est s’exposer à un flux que nous ne pourrions pas gérer.
[« Si on décide d’ouvrir nos frontières, il faut estimer le coût de cette ouverture et le faire payer par les couches sociales qui en profitent le plus. »][Qu’appelez-vous le coût de cette ouverture ?]
Il y en a de plusieurs ordres. Certains sont des coûts vrais : logement social, scolarisation, allocations familiales, allocations chômage, ordre public, etc. D’autres sont plutôt des transferts au profit d’une couche sociale et au détriment d’une autre : pression à la baisse sur les salaires, compétition pour les postes de travail non qualifiés accrue…
[Qu’est-ce que vous comptez mesurer ? L’accroissement des importations pétrolières pour faire rouler une population plus nombreuse ?]
Le coût de cette ouverture est multiforme, et il ne s’agit donc pas de demander à chaque bourgeois ou membre des « classes moyennes » de faire un petit chèque qui représenterait sa « part ». Mais il serait logique que les secteurs qui profitent de l’immigration contribuent à couvrir ses coûts. Par exemple, on pourrait reloger les réfugiés dans les quartiers « bobos », aux frais de la municipalité et inscrire les enfants dans les écoles du quartier…
[Et pour ce qui est de faire payer le coût de l’immigration (si tant est que ce soit mesurable), comment espérez-vous mesurer la « profitabilité » de l’immigration selon les couches sociales ? Et pourquoi qui que ce soit devrait payer (et par quels mécanismes ?) pour la présence ou la non-présence de quelqu’un d’autre ?]
Vous voulez dire qu’il ne faudrait pas donner aux réfugiés ni logement, ni travail, ni allocations, ni rien du tout ? Qu’il faudrait les laisser crever dans la rue ? Cela me semble un petit peu extrême, non ? Dès lors que nous prenons la décision de les laisser rentrer, nous sommes obligés de leur accorder un minimum d’aide. Il me semble normal que le poids de cette aide repose sur ceux qui bénéficient de la présence de ces gens, et non sur ceux qui en supportent la gêne.
@Gérard Couvert
Intégrez vous dans votre réflexion,cet élèment non négligeable;la quasi centaine de millions de touristes qui traversent la France chaque année ?
Ce ne sont pas uniquement des Américains,Asiatiques ou Européens..
Bon nombre sont des francophones,pour la plupart Africain,qui viennent visiter leur famille ou des connaissances,
C’est le cas de certains de mes amis.
Ces personnes viennent avec leur boubous,burka,jellabah,costumes divers et langages variés,y compris arabes ou dialectes.
Pour habiter un quartier populaire où carnaval semble être là tous les jours,véritable babylone,ce qui profite au commerce natonal,je ne suis pas sur que votre ‘locus’ soit identique.C’est une question sans arrière pensée.La qualité de ce blog,de notre Cher Descartes, me tient trop coeur pour que je m’engage dans une polémique stérile.Merci pour votre attention.
@ leucace
Intégrez vous dans votre réflexion,cet élèment non négligeable;la quasi centaine de millions de touristes qui traversent la France chaque année ? (…) Ces personnes viennent avec leur boubous, burka, jellabah, costumes divers et langages variés,y compris arabes ou dialectes.]
Permettez-moi de vous poser une question : quand vous allez vous-même dans un pays qui n’est pas le votre, et ou les coutumes, les traditions, les interdits sont différents… vous comportez-vous en suivant les règles du pays ? Ou faites vous comme si vous étiez à la maison ? Si ma femme fait l’effort, lorsqu’elle va en Arabie Saudite, de porter un foulard sur ses cheveux par respect pour les coutumes locales, pourquoi les touristes qui viendraient chez nous ne devraient pas faire le même effort et enlever leurs bourkas par respect pour les nôtres ?
[Pour habiter un quartier populaire où carnaval semble être là tous les jours, véritable babylone,]
Je crois que vous confondez avec Babel.
@Leucace,
Et bien, puisque vous avez allumé la mèche, assumez-en les conséquences…
Désolé de devoir frustrer votre soif d’exotisme, mais la majorité des gens venus d’Afrique qui viennent sur notre sol ne s’habillent pas en boubou! Ces tenues ne correspondent pas vraiment à l’image des pays africains actuels: là-bas, sauf cérémonies, tout le monde s’habille à l’occidentale (ils ont la télé par satellite, d’où l’attrait de nos pays pour les Africains), et pour vous dire à quel point l’occidentalisation fait des ravages, certaines femmes se blanchissent la peaux!
Votre description de la tour de Babel dont vous rêvez n’est…qu’une image d’Epinal pour bobo bien-pensant!
En fait, le port des tenues traditionnelles en France est, selon moi, le signe des immigrés issus des ethnies les plus arriérées des pays d’origine, en brousse ou dans le bled et ce n’est pas un hasard: ce sont précisément le type d’immigré taillable et corvéable que le patronat français. Je ne vais pas singer notre hôte Descartes, mais c’est mon expérience personnelle qui m’incite à penser que les Français ont peur des immigrés africains éduqués, car là-bas, le système français à l’ancienne, avec tout ce qu’il recelait de sélection, est encore en vigueur: pas étonnant que dans les classes prépas françaises, les étudiants étrangers francophones fassent des ravages! Et c’est de cette concurrence-là que les élites françaises ont peur, médiocres comme elles sont à l’heure actuelles!
Du coup, pour se donner bonne conscience, elles préfèrent laisser entrer des clandestins dont on sait qu’ils sont les moins assimilables, et qui surtout, ne leur feront pas de mal…
Cher Descartes, ici ton grand-papy Épicure.
Bon, certes, tu démontres brillamment une fois de plus que le débat cache un manque de sens assez phénoménal, et que les discours creux de crétins aux vues étroites amènent notre chère république vers le désastre de la logique et de la Raison. Ce qui, avouons-le, est le cas à peu près à chaque grand débat national, que ce soit sur le mariage homosexuel, ou encore sur l’avortement, ou plus récemment sur Charlie Hebdo, bref, notre politique de consensus à court terme est une aberration en terme de raisonnement.
Mais.
Mais c’est ainsi que fonctionne une démocratie républicaine, par des petits pas en avants, des petits pas en arrière et des entrechats sur les côtés. L’idée même de démocratie implique que les crétins ont le droit d’expression autant que les autres, c’est écrit ligne deux ou trois de la Déclaration des Droits de l’Homme si on prend la peine de lire deux minutes. Le dialogue est la raison d’être d’une démocratie, son essence. Mais heureusement il ne s’agit que de paroles. Ce ne sont, au final, pas les commentaires twitter de brillants idiots ou les dérapages télé de nos chers politiques qui se retrouvent écrits dans nos textes de loi. Les paroles ne valent absolument pas les actes, et il se trouve que, chaque fois qu’il y a débat, une décision est néanmoins prise, peu importe le degré du débat. Concernant l’immigration, la décision a été prise de fermer les frontières, point.
Bien. Ensuite, pour apporter mon point de vue sur le sujet, c’est simple : la question n’est pas de fermer les frontières, cela n’a jamais servi à rien. En réalité, l’immigration clandestine ne se résume pas à des naufrages ou à des échecs. Nombreux sont ceux qui réussissent, au final, à rentrer dans le pays qu’il visent, et fermer davantage les frontières maritimes revient à rendre la vie impossible à ceux qui avaient déjà le plus de mal à réussir à passer. Les autres, par contre…
La véritable question est : Est-ce qu’il faut rendre illégale l’immigration clandestine ? Et la réponse est : Non. Car cela revient à laisser le passage d’immigrants aux mains d’organisations criminelles, et donc à laisser échapper complètement la situation de nos mains. Faisons un petit parallèle avec un autre trafic illégal d’êtres humains : la prostitution. Pénaliser la prostitution ne l’empêche absolument pas, en revanche elle fait courir encore plus de risques à celles qui pratiquent ce métier, car elles se retrouvent face à deux ennemis là où un était déjà tenace : le maquereau et l’état. Et au final, ces mesures bienpensantes enfoncent les travailleuses du sexe dans leur misère et dans la criminalité. Et, de plus, facilitent les violences faites à leur égard. Pour finir, il est aussi plus difficile de les localiser précisément et de connaître quoi que ce soit sur un réseau où l’on n’a plus les pieds.
Si le parallèle est choquant, excusez-m’en, mais il me semble pertinent puisqu’il s’agit des effets de la pénalisation d’un trafic souterrain d’êtres humains. En conclusion, donc, que l’on ferme ou non les frontières n’a pas d’importance, puisque le flux de migrants ne diminuera pas pour significativement mais deviendra impossible à surveiller. Essayons davantage de contrôler et de canaliser les migrants plutôt que de leur opposer un barrage aveugle, soyons pour une fois subtils et intelligents. Car si on contrôle un minimum le flux en ouvrant juste assez les frontières, on peut aussi faire le tri plus facilement.
Car, après tout, ils peuvent nous être bien utiles. Les cerveaux tout d’abord. Mais savais-tu que l’on manque cruellement de bras dans le secteur de la maçonnerie ? Si l’on fait tant appel à des plombiers polonais ou des maçons espagnols, c’est tout simplement parce qu’on n’en a pas assez à la maison. Par ailleurs, un migrant sera généralement plutôt jeune, et sera donc davantage bénéfique à l’état en une période où les vieux s’accumulent dans les maisons de retraite. Les migrants ont aussi tendance à fonder des foyers, or notre état-providence ne fonctionne correctement que si la démographie est dynamique. Bah oui, les poids économiques, dans notre société, c’est les vieux, qui coûtent mille fois plus cher que des migrants…
Bon, dernier paragraphe, promis. C’est à propos des bobos qui nous gouvernent, ces infâmes bourgeois qui mangent du soja encore vivant et qui passent leurs vacances en Thaïlande (sans doute pour manger du soja aussi). Heureusement qu’ils n’existent pas. Les bourgeois qui forment le dessus de notre ‘classe moyenne’ ne sont pas du tout les mêmes tocards que les technocrates qui forment le gouvernement. Ce sont des tocards d’un genre différent. Je ne fréquente ni les uns ni les autres, mais je suppose bien qu’ils ne forment pas la même élite. Élite politique mais pas forcément sociale (p.e. notre cher Macron, brillant bachelier et fils d’ouvrier) d’un côté ; élite sociale mais rarement politique (p.e. les sales gosses qui font des écoles privées).
Voilà, sinon, passe le bonjour à tonton Rabelais et tatie Pascal. J’espère que tu t’amuses bien aux Pays-Bas.
Bises,
Ton grand-père à toi, Épicure
@ Epicure
[Mais c’est ainsi que fonctionne une démocratie républicaine, par des petits pas en avants, des petits pas en arrière et des entrechats sur les côtés. L’idée même de démocratie implique que les crétins ont le droit d’expression autant que les autres, c’est écrit ligne deux ou trois de la Déclaration des Droits de l’Homme si on prend la peine de lire deux minutes.]
Tout a fait. Mais la démocratie républicaine fonctionne aussi sur un présupposé qui n’est pas écrit dans la Déclaration, tellement il était évident pour ceux qui l’ont écrite. C’est que le droit d’expression ne vaut pas obligation d’expression, et que les crétins, même s’ils ont le droit de parler, ont suffisamment de modestie pour la fermer. Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est que les crétins ont l’air de croire qu’ils sont tenus de faire connaître leur opinion…
[Les paroles ne valent absolument pas les actes, et il se trouve que, chaque fois qu’il y a débat, une décision est néanmoins prise, peu importe le degré du débat. Concernant l’immigration, la décision a été prise de fermer les frontières, point.]
Je pense que vous pêchez par excès d’optimisme. Les lois elles-mêmes sont devenues des « paroles ». On peut parfaitement prendre une loi rigoureuse pour faire plaisir à tel ou tel secteur de l’opinion, et ensuite ne pas l’appliquer. Ce qu’on peut constater, c’est que la décision de « fermer les frontières » n’est pas appliquée avec une grande rigueur, et que des immigrés clandestins arrivent non seulement à traverser les frontières, mais aussi à se maintenir sur le territoire et à se faire régulariser a posteriori. La France a adhéré au système de Schengen sachant pertinemment qu’il s’agissait d’une passoire.
[Bien. Ensuite, pour apporter mon point de vue sur le sujet, c’est simple : la question n’est pas de fermer les frontières, cela n’a jamais servi à rien.]
En d’autres termes, vous pensez que si on avait déclaré ouvertes nos frontières cela n’aurait absolument rien changé ? Pourriez-vous élaborer ce point, s’il vous plaît ?
[La véritable question est : Est-ce qu’il faut rendre illégale l’immigration clandestine ? Et la réponse est : Non. Car cela revient à laisser le passage d’immigrants aux mains d’organisations criminelles, et donc à laisser échapper complètement la situation de nos mains. Faisons un petit parallèle avec un autre trafic illégal d’êtres humains : la prostitution.]
Je vous propose un parallèle un peu différent : la vente d’armes. Il est vrai qu’interdire la vente d’armes de guerre laisse la chose dans les mains de trafiquants qui s’entendent très bien pour introduire des Kalachnikov dans certaines de nos cités. Dois-je comprendre que vous êtes favorable à la vente libre des armes de guerre ?
J’ajoute que le même raisonnement peut être fait avec la vente d’explosifs, des drogues, de la pornographie infantile, des organes…
[Si le parallèle est choquant, excusez-m’en, mais il me semble pertinent puisqu’il s’agit des effets de la pénalisation d’un trafic souterrain d’êtres humains. En conclusion, donc, que l’on ferme ou non les frontières n’a pas d’importance, puisque le flux de migrants ne diminuera pas pour significativement mais deviendra impossible à surveiller.]
Vous répétez ici votre affirmation selon laquelle la fermeture des frontières ne change pas significativement les flux d’immigrés. Le croyez-vous vraiment ? Pensez-vous que si demain la France proclamait sa volonté d’accueillir sur son sol tout migrant qui se présenterait à ses frontières cela ne changerait rien au nombre d’immigrants ? Et si oui, comment justifiez vous cette croyance ?
[Essayons davantage de contrôler et de canaliser les migrants plutôt que de leur opposer un barrage aveugle, soyons pour une fois subtils et intelligents. Car si on contrôle un minimum le flux en ouvrant juste assez les frontières, on peut aussi faire le tri plus facilement.]
Mais… le tri entre quoi et quoi ? L’idée même de « tri » implique que certains rentreront et d’autres pas. Qu’est ce qu’on fait de ceux qui n’enteront pas ?
[Car, après tout, ils peuvent nous être bien utiles. Les cerveaux tout d’abord. Mais savais-tu que l’on manque cruellement de bras dans le secteur de la maçonnerie ?]
Non. Ce que je savais, c’est qu’on manque cruellement de travailleurs acceptant de travailler pour des salaires de misère et en dehors de toute législation sociale dans le secteur de la maçonnerie. Ne vous laissez pas abuser par le langage patronal : si on ne trouve pas de maçons, ce n’est pas parce que notre armée de réserve de 3,5 millions de chômeurs n’arrive pas à en fournir, mais parce qu’on n’arrive pas à faire accepter aux chômeurs français de travailler au noir et pour des salaires de misère.
[Si l’on fait tant appel à des plombiers polonais ou des maçons espagnols, c’est tout simplement parce qu’on n’en a pas assez à la maison.]
Pas du tout. C’est parce qu’on n’en a pas assez à la maison… à ce prix. Nuance.
[Par ailleurs, un migrant sera généralement plutôt jeune, et sera donc davantage bénéfique à l’état en une période où les vieux s’accumulent dans les maisons de retraite.]
Je m’étonne toujours que ce raisonnement puisse encore convaincre quelqu’un. Si nous prenons des jeunes immigrés pour payer nos retraites, que fera-t-on pour payer les retraîtes des immigrés en question ? Encore plus d’immigrés ? Ce que vous suggérez, c’est ni plus ni moins qu’une pyramide de Ponzi.
Le problème que vous ne semblez pas voir est que les immigrés qui nous arrivent chercheront du travail dans les métiers les moins qualifiés. Et cela a deux effets, tous deux désastreux. Le premier, c’est que ces segments du marché du travail étant saturés, les nouveaux arrivants ne pourront trouver du travail qu’en substituant un travailleur français, ce qui a pour double effet de pousser les salaires vers le bas et d’alimenter le chômage. Le deuxième effet, c’est que dans une société avancée comme la nôtre on a fixé un niveau minimum de revenu pour assurer ce qu’on considère un niveau de vie « digne » à chaque travailleur. Conséquence : une partie des non-qualifiés bénéficient d’un niveau de vie supérieur à leur productivité grâce à des transferts venant des travailleurs les plus productifs. Mais un tel système ne marche qu’aussi longtemps que ces transferts restent raisonnables. Si les non-qualifiés sont trop nombreux, le système s’effondre.
@ Descartes
Concrètement, je ne propose pas d’ouvrir les frontières librement ou d’accueillir tous les migrants les yeux fermés. Les désavantages à cette mesure sont nombreux. Ni d’ouvrir d’ailleurs davantage les frontières, je ne me souviens pas l’avoir dit ? Tous les migrants n’ont pas les mêmes motivations et les mêmes méthodes pour rentrer dans l’espace Shengen, par conséquent on ne peut pas les traiter unilatéralement de la même façon. Commençons simplement par éclaircir un peu le terme de “migrant”.
Bon, pour commencer, la France est un pays ancien d’immigration. Sur les 7.5 millions de migrants en France (soit 11%, de la population) la très grande majorité est composée de migrants légaux, ce qui donne à notre pays une attractivité considérable à l’étranger. Les régions les plus concernées par l’immigration sont les grandes villes, où les migrants et leurs descendants directs atteignent 28.6 % de la population. C’est considérable.
Par ailleurs, contrairement à l’opinion générale, l’immigration n’est pas en hausse constante. Au contraire, la période 2002-2007 compte 1.1 millions de migrants entrants, là où la période 2007-2012 descend autour de 0.5 millions. Par contre, pour les quinze dernières années, l’immigration est effectivement beaucoup plus forte qu’entre 1967 et 1997, alors que le pic le plus élevé d’immigration en France reste juste après la guerre d’Algérie, avec 1.5 millions de migrants en cinq ans. Conclusion, si l’afflux de migrants reste élevé de nos jours (0.6 millions depuis 2012), ils ont déjà été plus nombreux à frapper à nos portes.
Voilà pour l’immigration légale. J’oubliais : je me base sur les chiffres du sénat.
Pour l’immigration illégale, maintenant. Là-dessus, je me base essentiellement sur Le Monde : http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/10/23/la-france-connait-elle-une-vague-d-immigration-clandestine_4511499_4355770.html. Un article d’ailleurs très intéressant et très clair. Je vais simplement reprendre leurs conclusions.
Il est vrai que le nombre de migrants clandestins tentant de rentrer dans l’UE est énorme et en explosion depuis la guerre civile syrienne. Oui, pour l’Union européenne, mais pas pour la France.
A contrario de l’immigration légale, la France n’est pas la destination privilégiée des migrants clandestins, derrière des pays comme l’Allemagne et la Suède. Le chiffre de demandeurs d’asile est même en baisse, certes de peu, mais en baisse tout de même. La France est d’ailleurs davantage un pays de transit vers des pays jugés plus favorables qu’un pays d’accueil… Il faut dire qu’on aligne déjà un taux de refus de demande d’asile bien supérieur à la moyenne européenne (83 % en France ; 66 % en Europe) et une politique de plus en plus dure. “Nos” migrants, très épars en terme de nationalité, viennent d’ailleurs davantage du Kosovo et d’Europe de l’Est que du Maghreb ou du Machreq.
En termes de coût maintenant. L’évaluation fournie par le Monde se repose sur l’AME (l’aide médicale accordée aux immigrants), qui, pour être honnête, n’est pas complète vu que tous les migrants ne se déclarent pas. C’est la meilleure indication possible, néanmoins. En concordance avec le reste de l’article, le coût de cette aide reste à peu près stable sur les dernières années, augmentant de moins de 5 %.
Pas de hausse du nombre d’immigrants clandestins en France.
Pas de hausse significative des coûts.
Et pourtant les médias en parlent de partout, tout le temps, comme si c’était une catastrophe.
Tous ces chiffres pointent donc une immigration clandestine plutôt stable en France, et, puisque cela mérite quand même des majuscules,
IL N’Y A PAS DE VAGUE MASSIVE D’IMMIGRATION CLANDESTINE EN FRANCE.
Ou pas plus que d’habitude ces quinze dernières années… ce dont tout le monde se foutait, si je me souviens bien (honnêtement : j’étais trop jeune pour m’en souvenir, donc je suppose que tout le monde s’en foutait) …
Bien. Maintenant que ces chiffres sont posés, calmons-nous et buvons un verre d’eau. Je n’ai toujours pas répondu à ta question : comment suis-je censé gérer notre immigration, si je ne préconise pas de fermer les frontières ?
Eh bien, c’est clair : laissons les frontières comme elles sont, avec la surveillance actuelle et le filtre actuel. Tu fustiges le coût de l’immigration, mais as-tu pensé au coût d’une augmentation du dispositif de surveillance ? On peut aussi bien investir l’argent ailleurs. Les seuls migrants que nous devons refuser sont ceux qui sont liés à des réseaux terroristes ou criminels. Quel intérêt aurait-on à refuser les autres ? La surveillance doit se faire sur le réseau social et professionnel du migrant qui entre, s’il est susceptible d’introduire drogue, prostituées ou armes, pas spécialement sur sa nationalité ou le moyen qu’il a utilisé pour rentrer. Si le migrant, comme c’est le cas pour ceux qui tentent la traversée de la Méditerranée par bateau, n’a pas de réseau social stable pour l’accueillir, évitons qu’il ne se tourne vers les réseaux criminels. Pour cela, il faut simplement créer une structure d’accueil gérée par l’État, qui donne les moyens au migrant de s’attacher de façon saine dans le territoire. Et pour cela, le travail est la seule solution, quand bien même moins bien payé ou plus dangereux.
Car l’argument du “ils-nous-volent-notre-travail” n’est plus valable puisque les chiffres démontrent que les migrants illégaux ne sont pas plus nombreux à venir qu’auparavant alors que le chômage augmente. Aucune relation de cause à effet. La raison du taux de chômage, c’est la crise et l’affaiblissement du rôle de l’état dans la gestion économique des entreprises, dans lequel les migrants n’ont rien à voir.
Voili voilou, j’espère t’avoir éclairci sur mon opinion.
Épicure (de moustique)
PS : je reposte ici, je crois que je l’avais foutu ailleurs par erreur
@ Epicure
[Concrètement, je ne propose pas d’ouvrir les frontières librement ou d’accueillir tous les migrants les yeux fermés. Les désavantages à cette mesure sont nombreux. Ni d’ouvrir d’ailleurs davantage les frontières, je ne me souviens pas l’avoir dit ?]
Si, si, vous l’avez dit. Enfin, vous ne l’avez pas tout à fait dit comme ça. Vous avez dit que le fait de fermer les frontières n’apportait rien, que cela n’avait aucun effet sur les flux migratoires et qu’en plus cela avait le désavantage d’engraisser des filières illégales. N’importe quelle personne rationnelle ne peut que déduire qu’il est inutile de conserver un dispositif coûteux, qui n’a aucun effet et qui fait les affaires de truands, n’est ce pas ?
Si vous me dites maintenant que vous ne vous proposez d’ouvrir les frontières librement, c’est que vous admettez que les tenir fermées a quelques avantages, non ? J’aimerais bien savoir lesquels…
[Bon, pour commencer, la France est un pays ancien d’immigration. Sur les 7.5 millions de migrants en France (soit 11%, de la population) la très grande majorité est composée de migrants légaux, ce qui donne à notre pays une attractivité considérable à l’étranger. Les régions les plus concernées par l’immigration sont les grandes villes, où les migrants et leurs descendants directs atteignent 28.6 % de la population. C’est considérable.]
La question en débat ici n’était pas l’immigration légale. Par ailleurs, je ne sais pas d’où vous sortez vos « 7,5 millions de migrants ». Je vous rappelle en particulier que la condition de migrant n’est pas héréditaire.
[Par ailleurs, contrairement à l’opinion générale, l’immigration n’est pas en hausse constante.]
On parle de migrants légaux ou illégaux ? Je vous le répète, l’immigration légale n’était pas le sujet de discussion ici.
[A contrario de l’immigration légale, la France n’est pas la destination privilégiée des migrants clandestins, derrière des pays comme l’Allemagne et la Suède.]
Et alors ? J’avoue que je ne comprends pas très bien cette argumentation, qu’on sort pourtant à toutes les sauces. Ce n’est pas parce que la France n’est pas la destination préférée des migrants que ceux-ci ne posent aucun problème en France. Quand bien même il y aurait un migrant sur dix seulement qui viendrait en France, il faudrait quand même s’en occuper, non ?
[En termes de coût maintenant. L’évaluation fournie par le Monde se repose sur l’AME (l’aide médicale accordée aux immigrants), qui, pour être honnête, n’est pas complète vu que tous les migrants ne se déclarent pas.]
Surtout cela ne prend en compte qu’une toute petite partie du « coût ». A mon sens, l’effet le plus puissant de l’immigration – et celui qui explique pourquoi les « classes moyennes » et la bourgeoisie sont « ouvertes » à celle-ci alors que les couches populaires sont « fermées » est l’effet d’éviction sur l’emploi et les mécanismes de redistribution, ainsi que la pression des salaires à la baisse. Et là, je ne vois aucune estimation… peut-être que cela n’intéresse pas les lecteurs du « Monde » ?
[Pas de hausse du nombre d’immigrants clandestins en France.]
Ce n’est pas ce que dit l’article. Je vous rappelle que, sauf à admettre que les immigrés retournent dans leur pays à la même vitesse qu’ils arrivent, une stabilité dans le nombre d’entrées se traduit par une augmentation du stock de clandestins en France…
[Pas de hausse significative des coûts.]
Cela dépend pour qui. Pour le maçon qui perd son boulot parce que son patron trouve facilement un clandestin qui travaille pour la moitié du salaire minimum, pour l’ouvrier qui ne trouve pas de logement social parce qu’il faut reloger les migrants, le « coût » n’est pas négligéable.
[IL N’Y A PAS DE VAGUE MASSIVE D’IMMIGRATION CLANDESTINE EN FRANCE.]
Parfait. Alors, pas la peine de changer quoi que ce soit. Si tout est comme d’habitude, pourquoi changer nos habitudes ? En fait, vous jouez avec les mots. S’il n’y a pas de « vague massive », les chiffres sont tout de même en légère augmentation pour les flux, et en augmentation importante pour le stock.
[Eh bien, c’est clair : laissons les frontières comme elles sont, avec la surveillance actuelle et le filtre actuel.]
En d’autres termes, on laisse les gens qui se noient en méditerranée continuer à se noyer au même rythme qu’aujourd’hui ?
[Tu fustiges le coût de l’immigration, mais as-tu pensé au coût d’une augmentation du dispositif de surveillance ?]
Je ne « fustige » rien. Je suis pour la vérité des prix, et je pense que les politiques publiques doivent être décidées rationnellement sur une évaluation coût/avantages. Ce qui nécessite une transparence non seulement sur les coûts totaux, mais sur qui paye quoi. Et j’arrive à la conclusion suivante : même si le dispositif de surveillance est coûteux, les gens sont prêts à le payer, alors qu’ils sont de moins en moins prêts à payer les coûts de l’immigration. En démocratie, c’est un facteur à prendre en considération.
[On peut aussi bien investir l’argent ailleurs. Les seuls migrants que nous devons refuser sont ceux qui sont liés à des réseaux terroristes ou criminels. Quel intérêt aurait-on à refuser les autres ?]
Ca dépend qui est « on ». « On » le patron de Bouygues, pour qui les immigrants sont une bénédiction en ce qu’ils poussent les salaires vers le bas, ou « on » le maçon français qui doit se résigner à accepter un salaire et des conditions de travail dégradées pour ne pas être remplacé ? « On » la famille de « classe moyenne » qui grâce à l’immigration trouve facilement une nounou ou une femme de ménage bon marché, ou « on » le père de famille ouvrière qui voit les logements sociaux lui passer sous le nez parce qu’il y a plus prioritaire que lui ? Comme vous voyez, certains ont intérêt à « refuser les autres », d’autres pas…
[Si le migrant, comme c’est le cas pour ceux qui tentent la traversée de la Méditerranée par bateau, n’a pas de réseau social stable pour l’accueillir, évitons qu’il ne se tourne vers les réseaux criminels. Pour cela, il faut simplement créer une structure d’accueil gérée par l’État, qui donne les moyens au migrant de s’attacher de façon saine dans le territoire. Et pour cela, le travail est la seule solution, quand bien même moins bien payé ou plus dangereux.]
« Un travail quand bien même moins bien payé ou plus dangereux » ? C’est les patrons qui vont être contents… pensez, une structure d’Etat qui leur assurera une main d’œuvre bon marché et acceptant les travaux risqués. On se demande dans ces conditions pourquoi ils persisteraient à embaucher des français, non ?
Votre souci de sauver le migrant de la criminalité est touchant. Mais que faites vous du non-migrant, ce pêlé, ce galeux de « souchien » ? Aura-t-il lui aussi accès à la « structure d’accueil gérée par l’Etat » qui lui permettra « de s’attacher de façon saine dans le territoire » et lui donnera un travail ?
[Car l’argument du “ils-nous-volent-notre-travail” n’est plus valable puisque les chiffres démontrent que les migrants illégaux ne sont pas plus nombreux à venir qu’auparavant alors que le chômage augmente.]
Vous faites encore la même erreur : ce n’est pas parce que vous ne touchez pas au robinet que la baignoire reste toujours au même niveau. Si le flux d’immigrants est constant, le stock doit croître, ce qui est parfaitement compatible avec l’augmentation du chômage.
@ Epicure,
Bonjour,
[Bah oui, les poids économiques, dans notre société, c’est les vieux, qui coûtent mille fois plus cher que des migrants…]
Alors vite, construisons des camps de concentration où l’on réunira tous les vieux qui auront consommé leur droit à 10 ans de retraite afin de les réduire en cendre, récupérable comme engrais, car il serait juste qu’ils remboursent sous cette forme le coût de leur crémation.
Petit rappel, cependant. La société pourrie, insupportable, chaotique et délétère dans laquelle nous vivons, construite à la sueur des vieux qui vous encombrent et vous pillent fait encore l’objet, malgré tous les dénigrements qu’elle occasionne, d’une capacité d’attraction qui dépasse largement le rêve migratoire des réfugiés et autres migrants économiques.
Lorsque notre civilisation aura réglé le problème des gens qui consomment et ne produisent plus, il faudra régler celui des personnes qui consomment plus qu’elles ne produisent, puis ensuite celles qui ne produisent pas assez pour satisfaire le délire consumériste de la jeunesse, etc, etc.
Bien avant ça, tous ceux qui construisent la richesse du pays qui permettra à leurs enfants de vivre mieux qu’eux (à effort égal s’entend), vont se poser la question de la pertinence de leur activité dans ces conditions-là. La devise nationale deviendra « Après moi le déluge » et chacun ira protéger les fruits de son travail sous des cieux plus accueillants. Qui sera gagnant à votre avis.
N’étant pas, personnellement très favorable à l’héritage – au-delà d’un plafond relativement modeste – je ne verrais que des avantages à ce que les biens acquis par un individu au cours de son existence soient largement utilisés à titre de caution par la collectivité pour leur assurer un train de vie convenable. Mais alors, beaucoup de leurs descendants devraient renoncer à l’idée que leurs propre vieillesse sera agrémentée par le fruit de l’héritage qu’ils escomptent. Au boulot, les lambins ! ! ! lâchez vos écrans ludiques et vos jouets d’adultes.
Mais je suppose que vous faites là de la provocation ludique !
Et enfin, à Epicure, je préfère Epictète, à mon avis plus philosophe au sens que nous donnons communément à ce qualificatif. Les tripes et la tête pourrais-je dire trivialement.
Bon. Avant d’attaquer le sujet :
@ Marcailloux : Si l’état est prêt à payer le lourd prix (parfaitement consenti par tous, y compris par moi, rassurez-vous) de la retraite des vieux, qui se solde, je le rappelle, par 75 milliards d’euro, serait-ce trop de donner un ‘petit’ demi-million à des gens également en besoin, bien que n’ayant effectivement pas cotisé (source du chiffre : le figaro) ? Au final, il s’agit de sauver des vies. Lisez ma réponse à Descartes, j’espère vous y démontrer qu’il est plus rentable sur le moyen terme de sécuriser par une aide ponctuelle des personnes socialement et économiquement fragiles que de ne pas les aider du tout, et payer pour le restant de leur vie l’argent qu’ils draineront par d’autres moyens, n’étant pas en état d’en produire suffisamment pour vivre décemment.
@ Descartes maintenant : Bon, ce n’est pas trop mon genre de décortiquer une phrase après l’autre le commentaire précédent, sinon on est partis pour un échange de romans qui s’éloignent de plus en plus du sujet sans y répondre.
Donc. Pour répondre rapidement à tes critiques. Tout d’abord, je vais faire un petit mea culpa pour ne pas avoir cité le nombre réellement utile pour rendre pour rendre mon analyse pertinente : il y a, selon les estimations de différents sites que j’ai parcourus (Le Monde, Le Figaro, le sénat), entre 200 000 et 400 000 migrants illégaux en France à l’heure actuelle.
C’est là tout l’intérêt de relativiser le nombre en le mettant en rapport à la population française (75 millions à peu près) et à la population migrante légale d’un autre (7.5 millions sur les 75). Certes, le chiffre de migrants illégaux est en augmentation, augmentation légèrement régulée par le durcissement des lois sur l’expulsion. Mais l’augmentation reste stable sur ces cinq dernières années, et c’est pour cela que j’ai écrit bien en majuscules qu’il n’y a pas de vague massive d’immigration en France, là où les média s’affolent du phénomène comme si c’était une teRRRRible catastrophe imminente, mon dieu, mais pourquoi maintenant, ah la la on l’avait pas vu venir, c’est dingue etc etc. Sauf que si, bande de bananes (je parle des média hein), ça ne change pas grand chose aux quinze dernières années !
Et si la critique de Descartes sur le stock en augmentation est valide, il n’en reste pas moins que ce n’est pas du tout ce que nos joyeux patrons de journaux et de programmes télé ont dit. Pour eux, la situation est très très simple, la France est en danger mortel face à une nouvelle plaie qui nous est probablement tombée du ciel, et c’est cela que nous critiquons tous les deux, à savoir l’aveuglement des média.
Mais, allez-vous me dire, pourquoi citer le chiffre d’immigrants légaux, quid, quel intérêt ? Eh bien pour trois raisons.
– La première, évoquée dans ma dernière réponse, est que le grand nombre de migrants en France donne une attractivité inégalée à notre pays à l’étranger, qu’on le veuille ou non. Et donc attire des candidats, légaux comme illégaux.
– La deuxième, que je n’avais pas évoquée car assez évidente, est que le nombre de migrants illégaux se transforment au fil du temps en migrants légaux et régularisés. Que ce soit par naturalisation, par mariage, notre cher Descartes lui-même affirme dans son article que les migrants illégaux ont tout le temps pour se faire régulariser d’une manière ou d’une autre.
@ les deux : Pour finir, je vais vous répondre à tous les deux, Marcailloux et Descartes, sur l’intérêt d’aider un immigrant à s’installer. Tout d’abord, la chasse aux immigrants les pousse à ne pas se déclarer, à vivre en marge de la société et à ne pas s’y intégrer. Repousser un immigrant illégal fraîchement arrivé peut avoir de l’intérêt, là où mettre dehors une fillette comme Leonarda qui est scolarisée, qui parle français et qui est intégrée est idiot, quand moralement ce n’est pas purement criminel. Pourquoi ? Car les gens comme Leonarda sont des exemples d’intégration réussie qui ne fait de mal à personne, et les chasser revient à enterrer l’espoir que des gens trouvent le courage de s’intégrer, par peur des contrôles. Les tolérer peut, en revanche, constituer une pierre d’appui pour d’autres qui chercheraient à bien vouloir jouer le jeu.
Financièrement, maintenant. L’économie n’est pas mon domaine, mais je peux cependant supposer qu’entre un immigrant en marge, non régularisé et rejeté par la société dans laquelle il vit, qui survit de petits boulots au black et de ce qu’il peut grappiller à l’état, et de l’autre côté un immigrant toléré à qui on laisse une chance de vivre au milieu de sa société, l’un est un gouffre financier, et l’autre est plus supportable.
Or criminaliser tous les clandestins sans exception, c’est n’offrir d’autre choix que de rejoindre le premier parti. C’est pour moi le pire choix.
Pour résumer en deux phrases : S’il n’est pas question d’ouvrir davantage nos frontières, il n’est pas non plus question de mener une chasse aux sorcières à l’intérieur de celles-ci. Expulsons les criminels et ceux qui pèsent à l’état, mais ne faisons pas plus de contrexemples comme celui de Leonarda.
Concernant la politique de surveillance des frontières (les frontières françaises, pas Lampedusa que je ne vise absolument pas) : il ne faut pas fermer complètement les frontières (qui actuellement, sont perméables de facto). C’est forcer des gens à emprunter des chemins de plus en plus dangereux et à se faire tuer en cours de route, c’est risquer d’autres tragédies. Honnêtement, si tu m’accuses de ne pas m’occuper des naufragés de la Méditerranée, réfléchis deux minutes et rends-toi compte que si autant de gens passent par une route aussi dangereuse et s’y font tuer, c’est précisément parce que les mesures à leur encontre se sont durcies. Et qu’ils estiment ne pas avoir le choix.
Je préfère donc mener une politique préventive dans les ports d’Afrique du Nord et de la côte ouest, par exemple, au lieu d’attendre que les bateaux coulent en mer. Ce qui devrait aussi être le choix des pays du Maghreb et du Sahel dans cet exemple précis, puisque les passeurs sont des criminels tout autant que des marchands d’armes ou des dealers. Donc, je préfère l’idée d’une coopération internationale plus que d’un chacun-pour-soi où tout le monde refile la patate chaude à son voisin.
Voilà, j’espère vous avoir convaincu.
* Je cite la troisième raison en post scriptum, pour que tu puisses lire mon raisonnement d’une traite, car mon troisième point est purement contestataire :
– La troisième est assez amère. C’est tout simplement que le discours de Descartes sur le ”ils prennent les places de travailleurs français”, même bien argumenté, quelle différence fait-il entre immigrant légal et illégal ? Les immigrants légaux constituent, on l’a vu, à peu près 95 % des migrants, selon l’estimation haute de 400 000 migrants illégaux (400 000 / 7 500 000 = 0.053333 et des charrettes, soit un pourcentage de 5.333 %).
Or, dans ton analyse, au fond, qu’est-ce qui différencie des migrants légaux de migrants illégaux ? Une bonne partie des migrants légaux vient aussi concurrencer les classes populaires françaises. Et les migrants légaux ont souvent des aides considérables de l’état, par exemple pour ton ouvrier français qui voit lui passer sous le nez un logement prioritaire au profit d’un migrant. Ce que tu reproches aux migrants illégaux s’applique à une bonne partie des légaux. Car si je ne me trompe pas, dans cet exemple, le Français a travaillé toute sa vie pour cotiser, le migrant pas encore… or les deux sont citoyens, donc ont les mêmes droits (car les migrants illégaux, outre qu’ils sont beaucoup moins nombreux, bénéficient rarement de logements prioritaires… dans 95 % des cas, ton exemple confrontera un Français et un immigrant légal). Où est le problème ?
@ Epicure
[@ Descartes maintenant : Bon, ce n’est pas trop mon genre de décortiquer une phrase après l’autre le commentaire précédent, sinon on est partis pour un échange de romans qui s’éloignent de plus en plus du sujet sans y répondre.]
Chacun choisit son style librement. Le problème de ne pas reprendre paragraphe par paragraphe est que la discussion devient difficile à suivre pour les lecteurs.
[Donc. Pour répondre rapidement à tes critiques. Tout d’abord, je vais faire un petit mea culpa pour ne pas avoir cité le nombre réellement utile pour rendre pour rendre mon analyse pertinente : il y a, selon les estimations de différents sites que j’ai parcourus (Le Monde, Le Figaro, le sénat), entre 200 000 et 400 000 migrants illégaux en France à l’heure actuelle.]
C’est en tout cas le chiffre canonique. Il n’y a aucune mesure fiable de ce chiffre. Ils pourraient être tout autant 600.000 ou 800.000. Le chiffre dépend d’ailleurs beaucoup de la définition qu’on donne d’un « immigrant illégal ». Est-ce celui qui est entré irrégulièrement sur notre territoire ? Est-ce celui qui étant entré régulièrement s’y maintient après expiration de son visa ou de son autorisation de séjour ? Et celui qui est demandeur d’asile en cours d’examen alors que son dossier ne tient de toute évidence pas la route ?
[C’est là tout l’intérêt de relativiser le nombre en le mettant en rapport à la population française (75 millions à peu près) et à la population migrante légale d’un autre (7.5 millions sur les 75).]
Je ne vois pas très bien ce que cette « relativisation » apporte. Il y a des groupes bien moins nombreux qui pourtant posent des problèmes sociaux importants. Et vous ne m’avez toujours pas dit d’où sort votre chiffre de « 7,5 millions d’immigrants legaux ».
[Certes, le chiffre de migrants illégaux est en augmentation, augmentation légèrement régulée par le durcissement des lois sur l’expulsion. Mais l’augmentation reste stable sur ces cinq dernières années, et c’est pour cela que j’ai écrit bien en majuscules qu’il n’y a pas de vague massive d’immigration en France,]
Vous répétez votre affirmation sans tenir compte de mon questionnement. Lorsque vous parlez de « augmentation du chiffre de migrants illégaux », parlez vous d’un FLUX ou d’un STOCK ? Parce qu’il est évident que même si le flux reste constant, ce n’est pas pour autant que le stock se stabilise.
[là où les média s’affolent du phénomène comme si c’était une teRRRRible catastrophe imminente, mon dieu, mais pourquoi maintenant, ah la la on l’avait pas vu venir, c’est dingue etc etc. Sauf que si, bande de bananes (je parle des média hein), ça ne change pas grand chose aux quinze dernières années !]
Je ne suis pas l’avocat des médias. Si vous voulez discuter avec eux, adressez-vous à leur service du courrier des lecteurs. Ce n’est pas parce que les médias font leur cinéma que je pose un certain nombre de questions. C’est parce qu’il me semble nécessaire de discuter ces questions sérieusement. L’attitude qui consiste à parler d’une « teRRRible catastrophe » me semble aussi nuisible que celle qui consiste à balayer la question d’un revers de manche sur le thème « il n’y a pas de problème, tout va bien ».
[- La première, évoquée dans ma dernière réponse, est que le grand nombre de migrants en France donne une attractivité inégalée à notre pays à l’étranger, qu’on le veuille ou non. Et donc attire des candidats, légaux comme illégaux.]
Je n’ai pas trop compris ce raisonnement. Vous voulez dire que grâce aux migrants il est connu de par le monde que notre pays donne de généreuses allocations, logement bon marché, scolarisation gratuite etc. sans rien demander en échange, et qu’il est donc intéressant de venir, légale ou illégalement ? Je veux bien le croire, mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose…
[@ les deux : Pour finir, je vais vous répondre à tous les deux, Marcailloux et Descartes, sur l’intérêt d’aider un immigrant à s’installer.]
L’intérêt pour qui, si je puis me permettre ? Pour l’ouvrier qui vit dans une cité de banlieue et recherche désespérément un HLM, ou pour le bourgeois du XVIème desespéré parce que les ouvriers de son usine demandent des meilleurs salaires ? Car voyez-vous, ils n’ont pas tout à fait le même intérêt dans la question.
[Tout d’abord, la chasse aux immigrants les pousse à ne pas se déclarer, à vivre en marge de la société et à ne pas s’y intégrer.]
C’est aussi vrai des trafiquants d’armes, de drogues, d’explosifs, d’êtres humains… légalisons ces doux commerces, de peur de pousser leurs auteurs « aux marges de la société »… Je vous avais déjà répondu sur ce point, vous n’avez toujours pas tenu compte, et vous contentez de répéter l’argument…
[Repousser un immigrant illégal fraîchement arrivé peut avoir de l’intérêt, là où mettre dehors une fillette comme Leonarda qui est scolarisée, qui parle français et qui est intégrée est idiot, quand moralement ce n’est pas purement criminel.]
Mais mettre à la porte le père et la mère de Leonarda, qui vit aux crochets de la société, ne parle pas français et n’est pas intégré ? Finalement, Hollande avait raison : il faut renvoyer les parents mais si la fille veut revenir, elle est la bienvenue ?
Je pense que vous méprisez un point fondamental, et c’est celui du principe de légalité. Dans une démocratie, le peuple fait des lois et les lois s’appliquent. Si la loi fixe certaines conditions pour l’accès sur notre territoire, alors ceux qui ne respectent pas ces conditions doivent être expulsés. Et cela même s’ils sont intégrés, s’ils sont sympathiques, s’ils ont des yeux de cocker malade ou s’ils parlent français. Ou alors, décrétons que tout enfant scolarisé et qui parle français a le droit de rester en France, ainsi que toute sa famille. Mais on ne peut pas fonctionner au cas par cas.
[Pourquoi ? Car les gens comme Leonarda sont des exemples d’intégration réussie]
Je ne vois pas très bien ce qui vous conduit à cette conclusion. Si le fait de parler français et d’être scolarisé suffisait pour caractériser une « intégration réussie », les choses seraient assez différentes de ce qu’elles sont. J’ajoute que les réactions filmées au Kossovo de Léonarda et de sa famille semblent suggérer que « l’intégration » n’était pas aussi « réussie » que vous ne le pensez.
[qui ne fait de mal à personne, et les chasser revient à enterrer l’espoir que des gens trouvent le courage de s’intégrer, par peur des contrôles.]
« Ne fait de mal à personne ? »… mais alors, pourquoi pensez-vous que les gens rejettent les gens comme Leonarda ? Par pure méchanceté ? Par idiotie ? Je suis toujours surpris par la facilité avec laquelle on refuse de se poser cette question. Non, le parasitisme des gens comme la famille de Leonarda « fait du mal » à beaucoup de monde. J’ai essayé dans un autre commentaire d’expliquer pourquoi : substitution dans les emplois peu qualifiés, compétition pour les maigres ressources des mécanismes de redistribution. Le rejet qui les affecte est peut-être moralement critiquable, mais n’a rien d’irrationnel.
[Les tolérer peut, en revanche, constituer une pierre d’appui pour d’autres qui chercheraient à bien vouloir jouer le jeu.]
Pourriez-vous expliquer le mécanisme ? J’avoue que j’ai du mal à voir comment le fait de « tolérer » que des familles utilisent de manière parasitaire nos mécanismes de protection sociale – c’était le cas des parents de Leonarda – pourrait « constituer une pierre d’appui » aux gens qui « jouent le jeu »…
[Financièrement, maintenant. L’économie n’est pas mon domaine, mais je peux cependant supposer qu’entre un immigrant en marge, non régularisé et rejeté par la société dans laquelle il vit, qui survit de petits boulots au black et de ce qu’il peut grappiller à l’état, et de l’autre côté un immigrant toléré à qui on laisse une chance de vivre au milieu de sa société, l’un est un gouffre financier, et l’autre est plus supportable.]
Je vous rappelle qu’on peut parfaitement être « régularisé » et travailler au black. Par ailleurs, si l’immigré « en marge » tend à payer moins d’impôts, il tire aussi moins sur les mécanismes de redistribution. Au fonds, le problème est toujours le même : s’il y avait du travail pour tout le monde, l’immigré ne poserait aucun problème : son travail financerait sa consommation. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de travail pour tout le monde dans les emplois faiblement qualifiés. Et comme notre société s’est imposée comme règle le fait de donner à chacun un niveau de consommation minimum, chaque personne qui rentre est une charge supplémentaire qui n’est pas compensée par son travail. Ce n’est pas une question morale, mais bêtement économique.
[Pour résumer en deux phrases : S’il n’est pas question d’ouvrir davantage nos frontières, il n’est pas non plus question de mener une chasse aux sorcières à l’intérieur de celles-ci.]
En d’autres termes, deux poids deux mesures. L’immigré « légaliste » qui se voit refuser le visa et reste dans son pays est puni, celui « illégal » qui vient quand même et arrive à franchir la frontière est récompensé. J’avoue qu’un système qui récompense ceux qui violent nos lois et puni ceux qui les respectent me choque profondément.
[Expulsons les criminels et ceux qui pèsent à l’état, mais ne faisons pas plus de contrexemples comme celui de Leonarda.]
En d’autres termes, on expulse la famille de Leonarda mais on garde la fille ? Expliquez-moi comment vous arrivez à organiser pratiquement cette politique…
[Concernant la politique de surveillance des frontières (les frontières françaises, pas Lampedusa que je ne vise absolument pas) : il ne faut pas fermer complètement les frontières (qui actuellement, sont perméables de facto). C’est forcer des gens à emprunter des chemins de plus en plus dangereux et à se faire tuer en cours de route, c’est risquer d’autres tragédies.]
Je regrette, mais ce discours de capitulation nous conduit tout droit au désastre, dans ce domaine comme dans les autres. Tiens, moi je trouve qu’on fait courir des risques terribles aux cambrioleurs, obligés de grimper à des fenêtres dangereuses, à casser des vitres, à faire face à des chiens méchants… c’est quand qu’on obligera les propriétaires de maisons à installer une boîte contenant les clés de la maison à l’entrée, comme ça les cambrioleurs pourront exercer leur métier sans « emprunter des chemins de plus en plus dangereux »…
[Honnêtement, si tu m’accuses de ne pas m’occuper des naufragés de la Méditerranée, réfléchis deux minutes et rends-toi compte que si autant de gens passent par une route aussi dangereuse et s’y font tuer, c’est précisément parce que les mesures à leur encontre se sont durcies. Et qu’ils estiment ne pas avoir le choix.]
Non. Si de plus en plus de gens passent par une route « aussi dangereuse », c’est parce que les passeurs ont réussi à les convaincre – et objectivement ils ont raison – qu’elle l’est de moins en moins, dans la mesure où les états européens se sentent obligés de prévoir un dispositif maritime pour repêcher tous ceux qui s’embarquent. Encore une fois, utilisez votre sens logique : les gens ne sont pas des lemmings, ils ne s’embarquent pas dans des aventures dont les chances de succès sont très faibles vis-à-vis des avantages espérés. Les médias nous parlent des morts et des noyés – et je suspecte qu’ils le font aussi pour dissuader ceux qui s’embarquent – mais il est impossible d’obtenir une statistique fiable du nombre de morts rapporté au nombre de ceux qui arrivent vivants.
Par ailleurs, j’attire votre attention sur le fait que vous semblez justifier le chantage au suicide. Si quelqu’un se présente à votre porte et menace de se suicider si vous ne lui donnez pas votre portefeuille, vos bijoux, votre maison, que feriez-vous ?
[Je préfère donc mener une politique préventive dans les ports d’Afrique du Nord et de la côte ouest, par exemple, au lieu d’attendre que les bateaux coulent en mer.]
Attendez-voir si j’ai bien compris votre raisonnement. Ces gens-là sont prêts à mourir en mer pour rejoindre l’Europe. On peut en déduire que les conditions chez eux sont si terribles qu’elles font du risque de mort en mer quelque chose de tout à fait acceptable. Et votre proposition, c’est une politique « préventive » qui s’assure que ces candidats à l’immigration continuent à vivre dans des conditions terribles, qui leur semblent pire que le risque de mort, au lieu d’embarquer ?
Finalement, la seule différence entre vous et moi, pour schématiser, c’est que moi je suis prêt à les laisser mourir en mer, et que vous préférez qu’ils meurent en Somalie, en Erythrée ou au Sudan. Loin des yeux, loin du cœur. Et puis, s’ils meurent chez eux ce n’est pas notre affaire, n’est ce pas ?
[Ce qui devrait aussi être le choix des pays du Maghreb et du Sahel dans cet exemple précis, puisque les passeurs sont des criminels tout autant que des marchands d’armes ou des dealers.]
Je ne comprends pas pourquoi vous les qualifiez de « criminels ». Après tout, ils ne font que rendre service à des populations en leur procurant les moyens de venir chez nous. Vous m’avez d’ailleurs démontré que cette venue ne nous apporte que des avantages, et qu’elle fait aussi le bonheur de ceux qui viennent. Si je suis votre cohérence, les passeurs sont plutôt des bienfaiteurs de l’humanité. Tout au plus on pourrait les assimiler à des usuriers… et l’usure n’est pas un « crime ».
[- La troisième est assez amère. C’est tout simplement que le discours de Descartes sur le ”ils prennent les places de travailleurs français”, même bien argumenté, quelle différence fait-il entre immigrant légal et illégal ?]
Que l’immigrant légal est là par décision du peuple français. Si je décide d’accueillir quelqu’un chez moi, je m’oblige à partager avec lui mon repas. Par contre, je n’aime pas les gens qui s’imposent chez moi, et je ne me considère pas obligé de les nourrir. Ni même de les accueillir poliment.
@ Descartes :
Bon, pour expliquer le nombre de migrants légaux : je tiens cela de deux sources, un diagramme du Sénat qui récapitule les entrées depuis 1962, et surtout les sources de l’article Wikipédia qui parle de l’immigration en France (que j’ai vérifiées une par une, le chiffre me paraissant élevé). Je tiens à préciser que c’est Wiki qui totalise les 7,5 millions en enlevant les morts et les départs hein.
Le diagramme du Sénat est de la même teneur, même si je n’y vois pas les morts et les départs. Mais il a l’avantage de résumer clairement les périodes intenses d’immigration.
En conclusion, la période la plus chargée reste les années 60, avec 1,5 millions de migrants en cinq an. Je mets ca sur le compte de la guerre d’Algérie qui a causé de nombreux rapatriements et des fuites d’Algériens mis en danger par la guerre, comme les harkis, mais aussi du besoin de main d’oeuvre qui a encouragé une forte immigration, temporairement. Pour une population qui, à l’époque, tournait autour de 50 millions d’âmes si je me souviens bien.
Ensuite, calme plat jusqu’en 2000, 2 millions environ en 35 ans, aux origines de plus en plus diverses, alors qu’auparavant la venue se faisait beaucoup d’Afrique du Nord.
Mais les chiffres se sont nettement emballés entre 2002 et 2007, presque 1,5 millions pour des raisons qui me sont obscures puisque la période de prospérité était finie depuis longtemps. Je suppose qu’une partie de l’afflux des Kosovars et des Slaves d’Europe centrale et des Balkans date de là, sans certitude.
Entre 2007 et 2012, un peu moins, on passe en dessous d’un million en cinq ans. Puis le nombre augmente de nouveau ces trois dernières années, pour arriver à près de 900 000 en trois ans.
Quand aux migrants illégaux actuellement sur notre territoire, la définition est claire : toute personne qui n’a aucun moyen de justifier sa présence sur notre territoire, que ce soit par faute de papiers d’identité, de passeport tamponné, de pass de travail… et le chiffre, sauf quand c’est Sarko qui le cite, ne dépasse jamais la barre des 400 000. Ma source principale n’est pas notre nain favori bien sûr, mais un rapport de commission d’enquête du Sénat (encore !), ici lisible : http://www.senat.fr/rap/r05-300-1/r05-300-111.html.
Le Sénat se pose la même question que toi, quid du flux et du stock ? Le flux d’entrées se situerait entre 30 000 et 40 000 par an, les entrées attention, le nombre de reconductions à la frontière étant de 20 000 par an les cinq dernières années selon Le Monde. Le flux entrant total serait entre 10 000 et 20 000 migrants.
Je te cite néanmoins la bataille des chiffres pour le stock :
[La direction des affaires juridiques et des libertés publiques du ministère explique que cette estimation des « flux » « résulte notamment du nombre de demandeurs d’asile, diminué du nombre de personnes ayant obtenu le statut de réfugié, du nombre de personnes ayant été régularisées et du nombre d’arrêtés de reconduite à la frontière pris et exécutés à l’encontre des demandeurs d’asile déboutés. » Quant à celle du « stock », « elle prend pour base minimale le nombre (150.000) d’étrangers en situation irrégulière qui bénéficient de l’aide médicale d’Etat. Sur cette base, et en y ajustant un pourcentage du flux annuel (pour tenir compte, d’une part, des régularisations « au fil de l’eau » et, d’autre part, des départs volontaires), on peut raisonnablement estimer ce stock à environ 400.000 personnes. »
La controverse, par auditions devant la commission d’enquête interposées, entre le ministre d’Etat et M. François Héran, directeur de l’Institut national des études démographiques, montre combien la question est sensible et complexe.
Le premier a reproché à l’INED d’avoir, en janvier 2004, sous-évalué le flux annuel d’immigration illégale, en l’estimant à 13.000 par an sur la base d’une analyse de la régularisation pratiquée en 1997-1998.
Le second a observé que ces déclarations reposaient sur plusieurs méprises : d’abord, la migration illégale nette évoquée valait pour la décennie 1989-1998 ; ensuite l’INED a proposé une évaluation des flux nets ou encore du solde migratoire, c’est-à-dire du nombre d’immigrants irréguliers qui demeurent sur notre sol une fois défalquées les sorties, alors que M. Nicolas Sarkozy a évoqué les seuls flux bruts d’entrées irrégulières.
Il a en outre jugé incompatibles les chiffres avancés par le ministre d’Etat : dans la mesure où les régularisations menées en France et en Europe montrent que la durée de séjour des immigrants illégaux s’étale sur au moins une dizaine d’années, l’arrivée de 90.000 immigrants irréguliers supplémentaires en moyenne par an devrait porter le « stock » d’immigrants illégaux présents sur notre territoire à environ 800.000 personnes ; si l’on considère en revanche que 300.000 immigrants irréguliers séjournent sur notre territoire, alors le flux annuel d’entrées se situe entre 30.000 et 40.000 personnes, évaluation tout à fait compatible avec celle de l’INED.]
Bon, entre 800 000 pour le camp Sarkozy et 300 000 pour les autres (l’INED, sur lequel se basent les média, à raison á mon avis vu la fiabilité de Sarko). Le chiffre de 300 000 date de 2005 si on regarde de plus près, en estimant à la moyenne (15 000 par an) les rajouts permanents, qui sont stables depuis dix ans, on obtient 450 000 immigrants illégaux aujourd’hui. C’est l’estimation la plus neutre qu’on puisse avoir, en choisissant pile entre les estimations hautes et basses. Si j’étais honnête néanmoins, je devrais tenir garde du fait que la surveillance vis-à-vis des immigrants s’est intensifiée ces dernières années, et que les chiffres les plus récents dont on dispose sont donc plus justes (cf. l’article de Le Monde que j’ai déjà mis en lien la dernière fois). Or ils revoient le chiffre de 450 000 à la baisse, et tablent sur du 300 000 / 400 000.
De toute facon, l’argument du “ils pourraient être aussi bien deux fois plus, on n’en sait rien” se résume à ca : ils pourraient aussi venir de l’espace et avoir pour unique but de nous transformer en crevettes, on n’en sait rien, et surtout on y a déjà réfléchi, merci. Les chiffres sur lesquels je me base doublent déjà les chiffres de recensements constatés (l’aide médicale et les rapports de police) pour compter aussi ceux que l’on n’a pas rencensés, ils ont pensé tous seuls à rajouter ceux qui passent entre les mailles du filet.
Ce sont tous les chiffres dont je dispose, à toi de me citer tes sources :).
Ca répond donc à ta question : le flux est stable, youpi, mais le stock augmente, tu as raison. Mais en fait.. non. Théoriquement :
– soit le stock de migrants augmente là où la population d’accueil reste stable ou diminue, comme c’est le cas de l’Allemagne ou l’Italie >> le coût par citoyen augmente beaucoup plus rapidement
– soit le stock de migrants augmente au même rythme que le population d’accueil, pas d’exemple en tête >> le coût par citoyen reste augmente de facon stable
– soit le stock de migrants augmente moins que la population d’accueil >> le coût par citoyen augmente de facon faible, voire n’augmente pas.
Il y a certes, probablement, 200 000, voire 300 000 en étant fous, immigrants illégaux en France de plus depuis les années 2000, où la population d’immigrants illégaux à commencé à augmenter.
Mais il y a 6 millions de Francais de plus sur qui répartir ce nouveau poids, grâce au recul de la mortalité et à notre natalité décidément positive pour un pays de l’UE. Et, bien sûr, grâce à l’immigration légale forte. Et, mea culpa bis, on est finalement que 66 300 000 aujourd’hui.
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C’était la partie chiffres !
Parlons de théorie maintenant. Je crois qu’on a deux notions divergentes du droit à vivre en France sans y avoir été invité: j’en suis la “présomption d’innocence” (a le droit tant qu’il n’est pas prouvé que le migrant illégal est inutile/nuisible), tu en es la “présomption de culpabilité” (n’a pas le droit puisque le migrant illégal est par définition inutile et/ou nuisible).
Ce sont deux notions qui s’affrontent sur tous les terrains et qui sont sans compromis l’une avec l’autre, donc inutile de continuer là-dessus, c’est question de valeurs je suppose, si tu en as, car moi j’estime que c’est un poids dangereux.
Le fait est que j’ai une double nationalité, que je parle ma langue maternelle couramment et que je me considère issu de l’un et de l’autre pays, bien qu’ayant toujours vécu en France. C’est, pour couper court au débat, un pays européen tout à fait intégré dans l’Union, je ne suis donc pas vraiment inquiété par les préjugés d’irrégularité ou quoi que ce soit. Mais je trouve assez crispant que certains crétins depuis la maternelle assimilent la double nationalité à une trahison (envers qui ?), ou à un droit qu’eux ont et qui ne me serait pas accordé (en faveur de quoi ?). Et, au sens large, c’est aussi un peu ce qui me pique dans ton raisonnement.
J’estime qu’en perdant la tolérance envers les étrangers qu’il y a actuellement, on engage bien davantage qu’un peu d’argent. Car, mine de rien, malgré toute la rationnalité du jugement que tu portes (oui, le stock augmente, et le coût avec, mais moins que tu ne le penses), transformer le statut d’étranger illégal en celui de sans-droits total est intolérable.
Pense à certaines personnes bas du front qui assimilent trop migrants légaux et illégaux, et il n’en faut pas plus pour qu’être étranger en France soit de moins en moins accepté. Littéralement, mes parents, et moi par extension, entrons dans la catégorie des mariages qui régularisent des étrangers qui n’ont pas demandé l’avis du peuple francais avant de s’installer. Suivant ton raisonnement, en tant qu’enfant d’immigré légalisé par mariage, je rentre automatiquement dans la catégorie des nuisibles qui concurrencent le peuple francais… ce qui n’est pas faux, puisque je bénéficie d’une bourse de mérite, j’ai pris une place de grande école pour un autre hypothétique francais à seulement dix-huit ans, j’ai privé des tas de francais de leur place de premier de la classe et un certain nombre de profs de langue francais de faire leur cours tranquillement (parents oblige).
Les migrants illégaux sont des êtres comme les Francais, la plupart crétins, bon nombre inertes, absurdes et passifs, mais ils ont aussi autant que les autres leur part de débrouillards, de types intelligents ou de gens tout à fait normaux qui peinent à avancer, mais qui échouent avec honnêteté sans laisser tomber. Si l’on voulait vraiment être rationnels, ne faudrait-il pas accorder la citoyenneté à ceux qui sont utiles et intelligents avant de les balancer par-dessus la frontière ? Je reconnais que ce n’est pas un cas applicable. Mais au moins, laissons tomber le préjugé qu’un migrant, même illégal, sera systématiquement parasite, et laissons les citoyens réclamer d’eux-même le départ de ceux qu’ils jugent nuisibles au lieu d’expulser systématiquement. Après tout, ceux que le peuple francais accepte, pourquoi les rejeter, quand bien même ils seraient illégaux ? Et inversement, pourquoi laisser une chance de se régulariser à ceux dont personne ne veut ? N’as-tu pas le moyen ultime de séparer le bon du mauvais sans avoir à statuer sur le mal ou le bien présumé que constitue un étranger irrégularisé ? Pour moi, la question de la valeur de tel ou tel individu ne peut être jugée par l’Etat seul sur la base de son origine ou de son parcours de vie.
@ Epicure
[Je tiens à préciser que c’est Wiki qui totalise les 7,5 millions en enlevant les morts et les départs hein.]
Vous auriez du remarquer que l’on obtient ce chiffre à partir de la définition utilisée par les Nations Unies, à savoir, « une personne née dans un autre pays que celui où elle réside ». Le problème de cette définition est qu’elle transforme les rapatriés d’Algérie, par exemple, en « immigrés ». Je ne pense pas qu’aux fins de notre discussion une telle définition soit opératoire. Les rapatriés d’Algérie ne posent pas les mêmes problèmes que les « véritables » immigrés. C’est pourquoi je préfère la définition de l’INSEE : « personne née étrangère à l’étranger et résidant en France ». Avec cette définition, on trouve en France 4,8 millions d’immigrés, soit un peu moins de 8% de la population.
[Parlons de théorie maintenant. Je crois qu’on a deux notions divergentes du droit à vivre en France sans y avoir été invité: j’en suis la “présomption d’innocence” (a le droit tant qu’il n’est pas prouvé que le migrant illégal est inutile/nuisible), tu en es la “présomption de culpabilité” (n’a pas le droit puisque le migrant illégal est par définition inutile et/ou nuisible).]
Pas du tout. Ne m’attribue pas des catégories qui ne sont pas les miennes. Je n’ai pas parlé de « inutile » ou de « nuisible ». Pour moi, il y a les nationaux et les étrangers. Les nationaux ont un droit inaliénable de vivre en France, les étrangers n’ont ce droit que dans la mesure où les nationaux font le choix de leur accorder. En d’autres termes, l’étranger qui remplit les conditions fixées par la loi a le droit, celui qui ne les remplit pas ne l’a pas. Et cela n’a rien à voir avec le fait qu’il soit « utile » ou « nuisible ».
[Le fait est que j’ai une double nationalité, que je parle ma langue maternelle couramment et que je me considère issu de l’un et de l’autre pays, bien qu’ayant toujours vécu en France.]
La question est moins d’où on est « issu », mais où va notre loyauté. J’ai moi aussi une double nationalité – non par choix, mais parce que mon pays de naissance n’admet pas la renonciation – et je parle aussi couramment ma langue maternelle. Mais si demain la France et ton pays entraient en conflit, lequel tu soutiendrais ? Moi, je n’hésiterai pas une seconde. Je sais que ce n’est pas une question facile. Mais il faut aussi se mettre dans la position d’un français : comment pourrait-il te traiter en parfaite égalité comme son concitoyen alors qu’il ne peut être sur de ta loyauté ?
[Mais je trouve assez crispant que certains crétins depuis la maternelle assimilent la double nationalité à une trahison (envers qui ?), ou à un droit qu’eux ont et qui ne me serait pas accordé (en faveur de quoi ?). Et, au sens large, c’est aussi un peu ce qui me pique dans ton raisonnement.]
Pose toi la question : Est-ce que le peuple français pourrait demain te confier une responsabilité publique, celle de président de la République, d’ambassadeur, de ministre, en ayant toute confiance qu’au moment du choix tes décisions seront guidées par l’intérêt de la France, même si cela doit aller contre l’intérêt de ton pays d’origine ? Si nous prétendons, toi et moi, être des français « comme les autres » avec les mêmes droits que nos concitoyens « de souche », alors il faut pouvoir répondre « oui » à cette question. Avoir une double nationalité jette un doute sur la réponse. Le moins que l’on puisse faire, c’est de faire la démarche de renoncer à la deuxième nationalité.
[J’estime qu’en perdant la tolérance envers les étrangers qu’il y a actuellement, on engage bien davantage qu’un peu d’argent. Car, mine de rien, malgré toute la rationnalité du jugement que tu portes (oui, le stock augmente, et le coût avec, mais moins que tu ne le penses), transformer le statut d’étranger illégal en celui de sans-droits total est intolérable.]
Je ne pense pas avoir proposé d’aller à une telle extrémité. Pour moi il est hors de question de retirer à l’étranger – qu’il soit légalement ou illégalement sur le territoire – les quatre droits inaliénables garantis par la Déclaration de 1789 : liberté, sûreté, propriété, résistance à l’oppression. Mais au delà, et en particulier lorsqu’il s’agit des mécanismes de redistribution supportés par l’ensemble de la collectivité, je me demande jusqu’à quel point leur bénéfice ne doit être réservé à ceux des étrangers qui respectent nos lois.
[Pense à certaines personnes bas du front qui assimilent trop migrants légaux et illégaux, et il n’en faut pas plus pour qu’être étranger en France soit de moins en moins accepté.]
Je ne sais pas si dans ces « personnes bas du front » vous incluez les différentes associations dites « d’aide aux migrants », qui elles aussi semblent avoir quelques difficultés à faire la distinction dont vous parlez. Or, je pense comme vous qu’il faut impérativement que cette distinction soit claire et appliquée par tous. Parce qu’à force de les traiter de la même manière on risque de provoquer une réaction de rejet générale. Ce que je ne comprends pas bien, c’est que dans un message précédent vous sembliez au contraire enterrer cette distinction, en proposant par exemple qu’on traite Léonarda et les siens comme s’ils étaient en situation régulière…
[Littéralement, mes parents, et moi par extension, entrons dans la catégorie des mariages qui régularisent des étrangers qui n’ont pas demandé l’avis du peuple français avant de s’installer. Suivant ton raisonnement, en tant qu’enfant d’immigré légalisé par mariage, je rentre automatiquement dans la catégorie des nuisibles qui concurrencent le peuple francais…]
Je vous le répète : je ne sépare pas les immigrés en « nuisibles » et « non-nuisibles ». Je vous l’ai déjà expliqué : tous les immigrés entrent en concurrence – dans un contexte de chômage de masse – avec les français. Certains le font avec leur accord, d’autres le font en violant la loi. Si je comprends bien, vous – ou vos parents – entrent dans la seconde catégorie. Ce n’est pas bien. C’est une faute.
Cela étant dit, rassurez-vous, je ne conclus pas pour autant que vous devriez être expulsé avec vos parents. Je dirais plutôt que vous avez une faute à réparer. Du fait de votre entrée irrégulière, vous avez peut-être une exigence encore plus grande de contribuer par votre effort, par votre travail, par votre action, à la grandeur de ce pays. Et je le dis d’autant plus facilement que je suis dans une situation semblable à la votre. J’ai toujours senti que, ayant venu en France sans y être invité et en violation des lois françaises, j’avais une obligation d’autant plus impérieuse à bien travailler à l’école, à servir mes concitoyens.
[ce qui n’est pas faux, puisque je bénéficie d’une bourse de mérite, j’ai pris une place de grande école pour un autre hypothétique francais à seulement dix-huit ans, j’ai privé des tas de francais de leur place de premier de la classe et un certain nombre de profs de langue francais de faire leur cours tranquillement (parents oblige).]
Tant que vous comprenez que cela vous donne aussi des devoirs particuliers, je ne vois pas le problème…
[Les migrants illégaux sont des êtres comme les Francais, la plupart crétins, bon nombre inertes, absurdes et passifs, mais ils ont aussi autant que les autres leur part de débrouillards, de types intelligents ou de gens tout à fait normaux qui peinent à avancer, mais qui échouent avec honnêteté sans laisser tomber. Si l’on voulait vraiment être rationnels, ne faudrait-il pas accorder la citoyenneté à ceux qui sont utiles et intelligents avant de les balancer par-dessus la frontière ? Je reconnais que ce n’est pas un cas applicable.]
Non, ce n’est pas applicable. Parce que la même logique conduirait à priver de leur nationalité et balancer par-dessus la frontière les français de naissance qui sont stupides et nuisibles. Je suis très attaché à l’idée de sélection méritocratique, mais l’idée d’une sélection de ce type pour accéder à la citoyenneté me paraît très dangereuse.
[mais au moins, laissons tomber le préjugé qu’un migrant, même illégal, sera systématiquement parasite, et laissons les citoyens réclamer d’eux-mêmes e départ de ceux qu’ils jugent nuisibles au lieu d’expulser systématiquement.]
Mais c’est ainsi que cela se passe. Les citoyens ont voté des lois, par l’intermédiaire de leurs représentants, qui disent quels étrangers sont autorisés à s’installer en France, et lesquels se voient invités à partir.
[Après tout, ceux que le peuple francais accepte, pourquoi les rejeter, quand bien même ils seraient illégaux ?]
Je ne comprends pas votre raisonnement. S’ils sont « illégaux », c’est que le peuple français a voté une loi qui les « rejette ». Comment le peuple français pourrait en même temps voter une telle loi et les « accepter » en même temps ?
[Pour moi, la question de la valeur de tel ou tel individu ne peut être jugée par l’Etat seul sur la base de son origine ou de son parcours de vie.]
Et quelle procédure suggéreriez vous ?
@ Epicure
Je sais que c’est très mal poli d’intervenir dans une conversation à laquelle on n’est pas convié, mais je lis des choses qui me font bondir, alors je me permets de l’ouvrir, désolé.
“Mais je trouve assez crispant que certains crétins depuis la maternelle assimilent la double nationalité à une trahison (envers qui ?), ou à un droit qu’eux ont et qui ne me serait pas accordé (en faveur de quoi ?).”
“Pense à certaines personnes bas du front qui assimilent trop migrants légaux et illégaux”
“Les migrants illégaux sont des êtres comme les Francais, la plupart crétins,”
Pardonnez mon outrecuidance de “crétin” (j’ai échoué pour ma part à un concours d’entrée à une grande école et, je le confesse, j’en garde une certaine amertume), mais je trouve vos propos très méprisants. Et je serais curieux de savoir comment vous arrivez à la conclusion que “la plupart” des gens (Français, immigrés légaux ou illégaux) sont des crétins. Vous avez des chiffres? Une étude sérieuse à citer? Ou bien est-ce que toute personne qui n’a pas votre cursus et qui ne partage pas vos préjugés est de facto classée dans la catégorie “crétin”?
“puisque je bénéficie d’une bourse de mérite”
Juste une question: vous êtes-vous déjà demandé qui payait votre “bourse au mérite”? Eh bien ce sont, pour une bonne part, les crétins de Français qui triment, et certainement pas les sans-papiers qui bossent au black, si “débrouillards” soient-ils.
@ Descartes,
“Et je le dis d’autant plus facilement que je suis dans une situation semblable à la votre. J’ai toujours senti que, ayant venu en France sans y être invité et en violation des lois françaises”
Dois-je comprendre que vous êtes venu en France illégalement?
@ nationalistejacobin
[« Et je le dis d’autant plus facilement que je suis dans une situation semblable à la votre. J’ai toujours senti que, ayant venu en France sans y être invité et en violation des lois françaises ». Dois-je comprendre que vous êtes venu en France illégalement?]
Pas tout à fait. Mes parents sont rentrés régulièrement en France avec des visas de cout séjour, et mon père à travaillé « au noir » pendant six mois avant d’obtenir sa « carte de travail » et de régulariser complètement sa situation. Techniquement, on peut dire que ma famille a été « clandestine » pendant six mois.
@nationalistejacobin (je répondrai à Descartes plus tard) :
Je vous en prie, prenez une lance et joignez-vous au tournoi :).
Mmmh, j’ai dit trois fois le mot crétin, et je risque de le redire de nombreuses fois dans ce post, keep calm and take a Valium. Soyez aimable, quand vous citez, prenez la phrase entière ou le paragraphe entier, et pas une proposition seule qui n’a pas de sens sans le reste, autrement l’argumentation basée dessus est logiquement invalide.
Concernant le premier “crétin” et le “bas du front”, ils sont adressés à, pour m’exprimer autrement, la part de gens, francais ou non, qui fait l’amalgame entre deux notions pourtant clairement distinctes – en tout cas qui devraient l’être. Et leur incompréhension, même quand on prend le temps patiemment de leur demander leur avis sur la question, m’autorise à mes yeux à les traiter de crétins. Ce qui n’a pas tant à voir avec l’intelligence que l’éducation d’ailleurs, les gens même très intelligents n’ayant pas systématiquement raison.
Ma critique ne vise donc pas les 50 pour cent de Francais qui ont un QI égal ou inférieur à la moyenne, mais ceux qui, par éducation et/ou aveuglement, ne font pas la différence entre origine ethnique et droit à la citoyenneté, alors que de droit il n’y a pas de citoyenneté exclusive aux Francais en tant qu’ethnie (ethnie qui d’ailleurs n’existe pas, vous voyez l’absurdité du raisonnement).
Quant au deuxième ‘crétin’, il est invalide puisque, si vous lisez le reste de la phrase, il sert à rehausser le mérite de certains immigrants non qualifiés, donc pas de préjugé social ou scolaire. Pour la bourse, c’est virtuellement toute la France, y compris ma famille qui paye ses impôts en fonction de ce que l’Etat veut bien comme il faut. Et qui donc paye pour les allocs, les assedic, la sécu, nous sommes tous égaux de ce point de vue !
Pourquoi la plupart des Francais est stupide ? Hmm, je pourrais en parler pendant des heures avec joie ! Mais faisons court.
Pour dire quelque chose de pertinent sur un sujet quelconque, il faut
1 – connaître le sujet, avoir des informations fiables et tenues le plus directement de la source
2 – comprendre les informations que l’on a et en tirer des conclusions qui tiennent la route
Or le nombre de bêtises dites et reprises à tous les vents n’a pas diminué avec le temps, au contraire. Autant, auparavant, quelqu’un d’intelligent pouvait encore sortir quelque chose de faux par manque d’informations fraîches, autant, de nos jours l’excuse n’est plus valable, il y a des bibliothèques dans tous les coins et en cherchant bien, on trouve des informations justes sur le net. La quantité de savoir à disposition a considérablement augmenté ces vingt dernières années, je bannis donc le manque d’infos de la cause de mauvais raisonnements – a fortiori quand on est spécialiste d’un sujet.
Donc, partant du constat que la quantité de raisonnements nuls d’un point de vue logique est toujours aussi haut alors que la quantité d’informations fiables et le niveau d’études moyen a augmenté, soit :
– la plupart des gens ont des informations justes et sont intelligents, mais tiennent quand même des raisonnements idiots
>> eeeeeeeeeeeeuh
– la plupart des gens ont des informations justes, mais ne les comprennent pas quand bien même ils sont spécialistes et leurs propos ne tiennent pas la route
>> ce sont des crétins, désolé
– la plupart des gens ont des informations justes, mais ne prennent pas la peine de les consulter, et, crétins ou intelligents, ils persistent dans leur erreur par certitude d’avoir raison // habitude // manque d’intérêt // leur chien a mangé la Livebox // ils ne savent pas lire
>> ce sont tous des crétins, si vous êtes certains d’avoir raison, pourquoi chercher à communiquer avec d’autres êtres humains, vous feriez mieux de vous suicider en vous jettant depuis votre ego sur votre intelligence, bonne chute // si c’est par habitude, vous devriez vous rendre compte de votre erreur, sinon c’est que vous êtes crétins // manque d’intérêt : pourquoi participer, faites-vous plaisir et rentrez plus tôt chez vous ce soir // votre chien a mangé votre Livebox : pas de bol // vous ne savez pas lire : coucou, j’espère que vous appréciez le bleu des bordures
Voili voilà, le sujet est intarissable, je suis ravi d’en parler.
@ Epicure,
“Soyez aimable, quand vous citez, prenez la phrase entière ou le paragraphe entier, et pas une proposition seule qui n’a pas de sens sans le reste, autrement l’argumentation basée dessus est logiquement invalide”
Vous avez raison.
“Et leur incompréhension, même quand on prend le temps patiemment de leur demander leur avis sur la question, m’autorise à mes yeux à les traiter de crétins. Ce qui n’a pas tant à voir avec l’intelligence que l’éducation d’ailleurs, les gens même très intelligents n’ayant pas systématiquement raison.”
Cette remarque m’amène à vous poser deux questions:
1) A combien de personnes avez-vous “patiemment” demandé leur avis sur la question que vous évoquez?
2) Êtes-vous sûr de votre côté d’avoir écouté leurs arguments, s’ils en ont énoncés?
“il n’y a pas de citoyenneté exclusive aux Francais en tant qu’ethnie (ethnie qui d’ailleurs n’existe pas, vous voyez l’absurdité du raisonnement”
C’est très contestable. On peut considérer qu’il y a une ethnie “métropolitaine”, distincte de l’ethnie antillaise ou polynésienne par exemple. Mais il est vrai qu’il n’y a pas de “citoyenneté exclusive” pour les membres de cette ethnie. Cela n’empêche pas qu’elle existe, même si on peut dire qu’elle est récente.
“Quant au deuxième ‘crétin’, il est invalide puisque, si vous lisez le reste de la phrase, il sert à rehausser le mérite de certains immigrants non qualifiés, donc pas de préjugé social ou scolaire.”
De “certains” immigrants? Une minorité si l’on vous lit.
Voici votre phrase, entière:
“Les migrants illégaux sont des êtres comme les Francais, la plupart crétins, bon nombre inertes, absurdes et passifs, mais ils ont aussi autant que les autres leur part de débrouillards, de types intelligents ou de gens tout à fait normaux qui peinent à avancer, mais qui échouent avec honnêteté sans laisser tomber.”
Donc la majorité des clandestins sont des crétins… Comme la majorité des Français. J’ajoute qu’il y a une contradiction dans votre énoncé: si les gens sont “la plupart crétins”, alors le crétinisme est la norme. Dans ce cas, on se demande bien qui sont les “gens tout à fait normaux” que vous évoquez ensuite.
“Pour la bourse, c’est virtuellement toute la France, y compris ma famille qui paye ses impôts en fonction de ce que l’Etat veut bien comme il faut.”
Oui, sauf que “toute la France”, c’est surtout des travailleurs français, parce que les immigrés ne représentent qu’une petite partie de la population active. Les travailleurs clandestins qui bossent au noir ne paient pas de cotisations, et les immigrés légaux au chômage, ça existe aussi.
“Or le nombre de bêtises dites et reprises à tous les vents n’a pas diminué avec le temps, au contraire.”
Vous croyez? Je vous conseille d’éplucher la presse d’il y a un siècle ou un demi-siècle. Vous serez surpris je pense du nombre d’aberrations qui circulaient alors… En 1900, des gens accusaient Dreyfus parce que les juifs passaient pour être des amis de l’Allemagne. Outre que c’était infondé, avouez que quand on connaît la suite, c’est croustillant. Dans les années 30, il faut voir le nombre d’articles élogieux qui paraissait sur le nazisme. Croire à des sottises, ça n’a rien de nouveau.
“il y a des bibliothèques dans tous les coins et en cherchant bien, on trouve des informations justes sur le net.”
Oui mais chercher prend du temps. Et parfois les gens manquent de temps, même lorsqu’ils sont intelligents…
“La quantité de savoir à disposition a considérablement augmenté ces vingt dernières années, je bannis donc le manque d’infos de la cause de mauvais raisonnements”
Vous négligez un point important, je pense. Vous disposez du bagage culturel suffisant pour comprendre et trier l’information, mais tout le monde ne dispose pas de ce bagage. Lire des statistiques, c’est loin d’être simple, par exemple. Trier le bon grain de l’ivraie paraît facile et naturel à “ceux qui savent”, ceux qui ont la compétence. Mais celui qui manque de culture (ou de temps) peut se tromper facilement… et de bonne foi. C’est pourquoi je vous trouve bien sévère. Par ailleurs, vous oubliez qu’il existe aussi des mensonges et des raisonnements faux qui peuvent passer pour crédibles, pour peu qu’ils soient présentés habilement par des gens intelligents.
“Donc, partant du constat que la quantité de raisonnements nuls d’un point de vue logique est toujours aussi haut”
Mais… sur quoi se fonde votre “constat”? Vous ne l’avez toujours pas expliqué… Avez-vous une étude? Une statistique?
“la plupart des gens ont des informations justes, mais ne les comprennent pas quand bien même ils sont spécialistes et leurs propos ne tiennent pas la route”
Ils ne les comprennent pas, ou ils ne les interprètent pas comme vous? Il y a deux choses: l’information brute (le fait, le chiffre, la statistique) et les conclusions qu’on en tire. Il est fort probable que certains ne tirent pas les mêmes enseignements que vous de telle ou telle information, mais cela ne fait pas d’eux des “crétins”. Sur les chiffres de l’immigration que vous avez commentés, je n’en tire pas les mêmes conclusions que vous, mais cela ne fait pas de vous un “crétin” à mes yeux.
Quant aux “propos qui ne tiennent pas la route”, c’est la même chose: c’est à vos yeux qu’ils ne tiennent pas la route, selon vos références propres (valeurs, culture, idéal), mais pouvez-vous garantir que leur raisonnement est dénué de toute logique?
“crétins ou intelligents, ils persistent dans leur erreur”
Dans leur erreur ou dans leur opinion? Je pense que vous oubliez un peu vite qu’il existe plusieurs grilles de lecture pour comprendre et expliquer la réalité. La “vérité”, surtout sur des questions qui font débat dans la sphère politique, est bien difficile à établir… Nous ne sommes pas des machines: les idées, les opinions, se construisent en fonction de l’éducation, de la sensibilité, du parcours de chacun.
“ce sont tous des crétins, si vous êtes certains d’avoir raison, pourquoi chercher à communiquer avec d’autres êtres humains”
Ben… Pour les convaincre que j’ai raison, et les rallier à ma position. Pas vous?
@ Epicure
« tu en es la “présomption de culpabilité” (n’a pas le droit puisque le migrant illégal est par définition inutile et/ou nuisible). »
Vous glissez d’une notion de droit à un jugement de valeur qu’ici personne n’a formulé (gauche morale ?).
« Mais je trouve assez crispant que certains crétins depuis la maternelle assimilent la double nationalité à une trahison (envers qui ?), ou à un droit qu’eux ont et qui ne me serait pas accordé (en faveur de quoi ?). »
Je peux, je vous l’assure comprendre, si vous la brandissiez comme un étendard. Sur un autre plan, j’ai connu un collègue qui était « mal vu » car ne cessait de parler de son ancien boulot comme un idéal, sont-ils des crétins ?
« Pense à certaines personnes bas du front qui assimilent trop migrants légaux et illégaux ».
Vous êtes-vous posé la question du pourquoi ? La « gauche » n’a plus rien à voir avec le mouvement ouvrier ou même les Lumières lorsqu’elle accepte le dénigrement du pays ou ses meilleures valeurs à travers « l’identitarisme » (d’ailleurs régional ou plus) , renvoyant, de fait, à des régimes dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils sont peu démocratiques et parfois à des revendications qui mettent en péril l’équilibre tel que résultant de la séparation des églises et de l’Etat.
Il faut combattre le Fn mais pour cela, être lucide.
Plus précisément, fréquentez-vous des immigrés ?
Manoel est portugais, un homme réellement très gentil, très sociable très agréable malgré son Français difficile. Il s’est installé maçon « à son compte ». Il avait besoin d’un permis de conduire. Il l’a acheté au Portugal. C’est un bosseur qui ne connait pas les samedis, parfois dimanche et jours fériés. Pour emporter « l’affaire », il n’hésite pas à casser les prix, quitte d’ailleurs à se casser le dos ou de travailler au noir mais il est encore jeune…
J’arrête là mais si vous le voulez je peux vous fournir d’autres exemples avec d’autres nationalités avec aussi des faits plus importants.
Sachez que dans mon syndicat, il y a Fouad qui boit l’apéro commun, Aïcha qui boit le jus d’orange (religion) mais on se rejoint tous sur les revendications.
« laissons les citoyens réclamer d’eux-mêmes le départ de ceux qu’ils jugent nuisibles au lieu d’expulser systématiquement »
Avez-vous bien réfléchi à cette proposition ? En sorte, il faudrait que les migrants jouent le rôle du « gendre idéal » ne serait-ce que le temps de se faire accepter ? Ne serait-ce pas une forme encore plus oppressante que la loi ?
Veuillez excuser les propos d’un crétin probable qui n’a jamais accédé à l’université ce dont il ne saurait se vanter, n’ayant aucune excuse pour son manque d’appétence en son temps, à l’ét
@ Descartes
[J’ai toujours senti que, étant venu en France sans y être invité et en violation des lois françaises (…) Mes parents sont rentrés régulièrement en France avec des visas de court séjour, et mon père à travaillé « au noir » pendant six mois avant d’obtenir sa « carte de travail » et de régulariser complètement sa situation. Techniquement, on peut dire que ma famille a été « clandestine » pendant six mois]
La fréquentation des pages de ce blog m’a souvent interpellé sur un point. Parmi vos lecteurs, les chauds partisans du renforcement de l’étanchéité des frontières sont souvent, comme vous-même, les descendants directs de réfugiés et d’immigrés récents.
Bizarrement, ce sont les derniers intégrés qui doutent le plus de la capacité de la France à continuer d’intégrer.
@ v2s
[La fréquentation des pages de ce blog m’a souvent interpellé sur un point. Parmi vos lecteurs, les chauds partisans du renforcement de l’étanchéité des frontières sont souvent, comme vous-même, les descendants directs de réfugiés et d’immigrés récents.]
Ce n’est pas si étonnant que cela. Les immigrés récents comme leurs descendants directs ont une expérience très directe de ce que c’est que de vivre en citoyen dans d’autres pays. Ils ont donc une conscience beaucoup plus aigüe de l’exceptionnalité mais aussi de la fragilité d’un certain nombre de choses que les français « de souche » considèrent comme allant de soi. Un Etat fort, protecteur, honnête, stable, prévisible. Un système de protection social fiable. Des services publics qui marchent. Une société faite de gentillesses et de politesses, ou les gens sont maîtres de leurs choix sans être soumis à la dictature de leur « communauté », de leur « clan » ou à l’arbitraire d’un satrape local.
Et parce qu’ils sont conscients de la fragilité de cette construction, ils tendent à être plus mobilisés pour la protéger. Lorsque Finkielkraut – fils d’immigrant, lui aussi – dans son livre « L’identité malheureuse » intitule un chapitre « une chose belle, précieuse, fragile et périssable », ce n’est pas par hasard. L’expérience de l’immigration ne fait que rehausser la valeur de choses, petites et grandes, que beaucoup de français « de souche » ne voient plus, mais qui pour nous, immigrés devenus français, sont des surprises chaque jour renouvelées.
C’est à mon avis cela qui faut que nous ressentons beaucoup plus profondément comme une blessure la bêtise d’autres gens comme nous qui non seulement refusent de reconnaître ce trésor, mais qui cherchent à l’amoindrir. Et ces gens incluent autant les étrangers qui prétendent vivre en France comme « au bled » que les français qui cèdent à la tentation de le leur permettre.
[Bizarrement, ce sont les derniers intégrés qui doutent le plus de la capacité de la France à continuer d’intégrer.]
Je ne crois m’être jamais exprimé sur la capacité de la France à « intégrer ». Dans la mesure où je trouve que « l’intégration » n’est pas un objectif, la question de savoir s’il peut ou non être atteint ne m’intéresse pas.
Ce qui m’intéresse, c’est la question de l’assimilation, qui reste pour moi la seule politique qui nous permette d’accueillir des étrangers tout en garantissant la cohésion sociale et la survivance d’une Nation. Et si vous regardez bien les échanges, vous noterez que c’est un français « de souche » – NJ, pour être précis – qui doute de la capacité de la France à assimiler – la question de savoir si la France – alors que c’est moi qui à chaque fois le reprend. Je suis totalement convaincu de la CAPACITE de la France à assimiler. Ce dont je ne suis pas convaincu, c’est de la VOLONTE des couches dominantes, bourgeoisie et « classes moyennes », à en payer le prix.
@Descartes
[Et parce qu’ils sont conscients de la fragilité de cette construction, ils tendent à être plus mobilisés pour la protéger. Lorsque Finkielkraut – fils d’immigrant, lui aussi – dans son livre « L’identité malheureuse » intitule un chapitre « une chose belle, précieuse, fragile et périssable », ce n’est pas par hasard. L’expérience de l’immigration ne fait que rehausser la valeur de choses, petites et grandes, que beaucoup de français « de souche » ne voient plus, mais qui pour nous, immigrés devenus français, sont des surprises chaque jour renouvelées.]
Au fond, tout le malentendu tient dans votre réponse.
Qu’est-ce qui vous laisse penser que ces millions d’immigrés qui choisissent de tenter l’installation en France, ne seraient pas conscients des avantages d’un [..État fort, protecteur, honnête, stable, prévisible. Un système de protection social fiable. Des services publics qui marchent. Une société faite de gentillesses et de politesses, ou les gens sont maîtres de leurs choix sans être soumis à la dictature de leur « communauté », de leur « clan » ou à l’arbitraire d’un satrape local.]
Sont-ils ignares bornés, stupides au point de ne pas voir ce que vous et vos parents, et toutes les vagues d’immigrés avant eux, ont su voir ?
Puisque vous nous faites l’amitié de nous donner quelques informations sur votre propre histoire familiale, essayez d’aller un tout petit peu plus loin : interrogez vos souvenirs.
Lorsque vous et vos parents êtes arrivés en France, n’avez-vous jamais croisé de « bons Français de souche » qui à l’école, dans la rue, au travail ou au café du commerce, vous ont fait sentir que vous n’étiez pas les bienvenus. Que vous ou vos parents parliez avec un fort accent étranger, que votre mère portait des jupes trop longues, que, si ça se trouve, vous n’étiez même pas baptisé, que vous profitiez des hôpitaux gratuits et peut être même des allocs, alors que vous veniez à peine d’arriver en France.
Et je ne parle pas des remarques antisémites si vous aviez un patronyme qui fleurait bon l’Europe centrale, surtout si quelqu’un croyait déceler dans votre faciès la confirmation de ses « soupçons ».
S’il est vrai que l’assimilation est ancienne comme l’est la France, il est non moins vrai que les immigrés fraîchement assimilés ont toujours été les plus hostiles à l’immigration.
Une sorte de tentation de se protéger en verrouillant la porte derrière soi ? Ou, inconsciemment le désir faire vivre aux nouveaux venus les mêmes épreuves que celles que l’on a subies ?
@ v2s
[Qu’est-ce qui vous laisse penser que ces millions d’immigrés qui choisissent de tenter l’installation en France, ne seraient pas conscients des avantages d’un « ..État fort, protecteur, honnête, stable, prévisible. Un système de protection social fiable. Des services publics qui marchent. Une société faite de gentillesses et de politesses, ou les gens sont maîtres de leurs choix sans être soumis à la dictature de leur « communauté », de leur « clan » ou à l’arbitraire d’un satrape local. »
Et bien… par exemple, leur refus d’enlever le voile. Parce que les « gentillesses et les politesses » incluent le fait de se montrer. S’ils sont conscients des avantages d’une société de « gentillesses et politesses », pourquoi persistent-ils à refuser de s’y plier ? S’ils apprécient un « Etat fort », pourquoi caillassent-ils les policiers lorsqu’ils font leurs rondes dans les cités, les pompiers quand ils font une intervention d’urgence ? Pensez-vous vraiment que les jeunes qui occupent les halls d’immeuble et dérangent ou terrorisent les habitants montrent un grand attachement aux « gentillesses et politesses » ?
Je sus sur que beaucoup d’immigrés sont parfaitement conscients des avantages que j’ai décrit plus haut. Ceux-là s’assimileront sans doute, parce qu’on ne peut pas être conscient des avantages que procure une telle société et ne pas vouloir en devenir membre. Mais beaucoup d’autres ne le sont pas.
[Sont-ils ignares bornés, stupides au point de ne pas voir ce que vous et vos parents, et toutes les vagues d’immigrés avant eux, ont su voir ?]
Je vous laisse juge des raisons pour lesquelles ils agissent ainsi. Mais le fait demeure : beaucoup d’immigrés n’ont plus le désir de faire partie de la société française, avec les devoirs et les droits qui s’y rattachent. Ils souhaitent vivre en France, bénéficier des avantages économiques que cela procure, et pas plus.
[Lorsque vous et vos parents êtes arrivés en France, n’avez-vous jamais croisé de « bons Français de souche » qui à l’école, dans la rue, au travail ou au café du commerce, vous ont fait sentir que vous n’étiez pas les bienvenus.]
Non, jamais. Au contraire. Puisque vous m’interrogez sur mes souvenirs, je peux même vous dire que dès les premiers jours de mon arrivée j’ai voulu être français, au point d’aller chercher à la Préfecture le petit dépliant qui indiquait la démarche pour demander la nationalité française. Je suis rentré au lycée quelques jours après mon arrivée, et je peux vous dire que mes camarades de classe on fait beaucoup d’efforts pour m’intégrer, tout comme les enseignants. Est-ce parce que j’ai tout de suite manifesté mon désir de devenir français ? Est-ce parce que j’ai fait l’effort de m’habiller comme eux, de parler comme eux, de manger ce qu’ils mangeaient et de boire ce qu’ils buvaient ? Probablement.
[Que vous ou vos parents parliez avec un fort accent étranger, que votre mère portait des jupes trop longues, que, si ça se trouve, vous n’étiez même pas baptisé, que vous profitiez des hôpitaux gratuits et peut être même des allocs, alors que vous veniez à peine d’arriver en France.]
Jamais. Encore aujourd’hui, ma mère parle avec un fort accent étranger, et elle n’a que des amies « françaises de souche ». Et elle s’est toujours fait un devoir de s’habiller comme les françaises.
[Et je ne parle pas des remarques antisémites si vous aviez un patronyme qui fleurait bon l’Europe centrale, surtout si quelqu’un croyait déceler dans votre faciès la confirmation de ses « soupçons ».]
Je porte un nom qui ne laisse aucun doute là-dessus. Je vous répète, je n’ai jamais ressenti la moindre hostilité. Finalement, j’ai essuyé bien plus de remarques antisémites dans mon pays d’origine que dans mon pays d’adoption…
[S’il est vrai que l’assimilation est ancienne comme l’est la France, il est non moins vrai que les immigrés fraîchement assimilés ont toujours été les plus hostiles à l’immigration.]
Je pense vous voir expliqué pourquoi.
[Une sorte de tentation de se protéger en verrouillant la porte derrière soi ? Ou, inconsciemment le désir faire vivre aux nouveaux venus les mêmes épreuves que celles que l’on a subies ?]
Ne faites pas de psychanalyse de comptoir… Non, je vous ai dit pourquoi. Bien entendu, je ne vois pas pourquoi les nouveaux arrivants seraient dispensés des « épreuves » que j’ai passées. Mais cela n’implique pas une « hostilité à l’immigration »…
@ nationalistejacobin : vu les interventions nombreuses, je vais aussi me mettre à citer pour qu’on s’y retrouve plus facilement. Par contre, je n’épargnerai pas Descartes d’une nouvelle thèse de quinze pages :).
[Cette remarque m’amène à vous poser deux questions:
1) A combien de personnes avez-vous “patiemment” demandé leur avis sur la question que vous évoquez?
2) Êtes-vous sûr de votre côté d’avoir écouté leurs arguments, s’ils en ont énoncés?]
1) Tout plein depuis la maternelle, le plus souvent indirectement en classe d’éducation civique en provoquant le débat puisqu’on abordait forcément le sujet à un moment ou un autre dans l’année. Poser la question directement, c’est se faire insulter pour des prunes, donc bon…
2) Euh, leurs arguments étaient généralement très divers, allant du “Mon papa il dit que c’est tous des salauds, surtout eux” à “Tu me traites de raciste là ?! Eh, il m’a traité de raciste !” en passant par “Eh tais-toi et rappelle-toi la deuxième guerre mondiale, alors file te cacher avant que j’appelle les nazis / les communistes / tout ce qui a pu tomber sur la tronche de mon pays d’origine” (bah la France s’est fait maraver aussi mon chou). Je t’avoue que j’ai pas dressé de liste de ce qu’ils me racontaient, mais c’était généralement pour insulter ma famille ou moi.
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[C’est très contestable. On peut considérer qu’il y a une ethnie “métropolitaine”, distincte de l’ethnie antillaise ou polynésienne par exemple. Mais il est vrai qu’il n’y a pas de “citoyenneté exclusive” pour les membres de cette ethnie. Cela n’empêche pas qu’elle existe, même si on peut dire qu’elle est récente.]
Si tel est le cas et qu’il existe une ethnie française, dans ce cas je ne suis pas vraiment Français, et Descartes non plus au passage. Alors que pourtant, tant qu’on ne rentre pas dans la maison de mes parents ou que je ne parle pas avec eux en présence de quelqu’un d’autre, personne ne saurait me distinguer du Français lambda. Je n’ai pas d’accent, je parle correctement, je m’habille comme tout le monde, et seulement en cours de langue je me distingue du reste.
Quelles sont les caractéristiques de l’ethnie cosmopolitaine (simple curiosité : tu joues à Europa Universalis IV ?) pour toi, qu’est-ce qui les distingue de leurs voisins ?
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[Donc la majorité des clandestins sont des crétins… Comme la majorité des Français. J’ajoute qu’il y a une contradiction dans votre énoncé: si les gens sont “la plupart crétins”, alors le crétinisme est la norme. Dans ce cas, on se demande bien qui sont les “gens tout à fait normaux” que vous évoquez ensuite.]
Les gens “tout à fait normaux” ne sont, par élimination, ni des artistes, ni des types très débrouillards, ni des crétins. Le reste quoi. J’ai choisi le mot parce qu’aucun autre ne me vient à l’esprit. Et, avant qu’on me dise que j’ai une vision du monde très étrange, j’ai choisi les mots “artiste” et “débrouillards” comme échantillons au pif et j’aurai pu en choisir d’autres ou en rajouter des tonnes. Après, oui oui, je pense que je crétinisme est la norme et qu’on l’est tous un peu (je me classe dans la catégorie des “contradicteurs pour la forme” que je viens d’inventer, et qui ont pour vilain défaut de prendre leur culture générale pour de la science infuse, et qui donc se permettent de couper la parole à tout le monde parce qu’une miette de leur savoir les autorise à avoir un avis différent du type qui a avalé quatre livres sur le sujet. En l’occurrence j’ai quand même bouffé quatre bouquins et je suis sans doute légitime dans mes avis.)
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[Oui, sauf que “toute la France”, c’est surtout des travailleurs français, parce que les immigrés ne représentent qu’une petite partie de la population active. Les travailleurs clandestins qui bossent au noir ne paient pas de cotisations, et les immigrés légaux au chômage, ça existe aussi.]
Les immigrés légaux constituent une part de plus en plus importante de la population active, les chiffres que j’ai cités avoisinent les 11 % de la population, et l’accélération est tangible sur les quinze dernières années. Paradoxalement, ceux qui supportent la démographie française, ce sont eux… sur les 6 millions de Français “gagnés” depuis 2000, la moitié vient de l’immigration légale, une bonne part du reste au recul de l’âge moyen de mort naturelle, et le tout petit reste de notre natalité au ras des pâquerettes (source Insee). Les migrants légaux sont en moyenne plus jeunes que les Français, et on ne rechigne pas à les employer lorsqu’ils peuvent être sous-payés. Ils forment, pour moi, une partie non négligeable de la population active, et d’ailleurs de la population française (11 % selon Wiki et le Sénat pour 7 millions au total, je sais pas d’où sort le 4 et quelques millions de Descartes). C’est loin d’être négligeable et leur nombre augmente rapidement. Mais effectivement, dans la majorité, c’est quand même les Français “de souche” (disons implantés depuis trois générations, l’expression me pose problème) – plus riches en moyenne car ayant accumulé un patrimoine – qui paient les impôts et les bourses.
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[Vous croyez? Je vous conseille d’éplucher la presse d’il y a un siècle ou un demi-siècle. Vous serez surpris je pense du nombre d’aberrations qui circulaient alors… En 1900, des gens accusaient Dreyfus parce que les juifs passaient pour être des amis de l’Allemagne. Outre que c’était infondé, avouez que quand on connaît la suite, c’est croustillant. Dans les années 30, il faut voir le nombre d’articles élogieux qui paraissait sur le nazisme. Croire à des sottises, ça n’a rien de nouveau.]
Dans ce cas, si tout le monde est plus intelligent, alors il ne devrait plus y avoir d’antisémites ou de nazis, surtout après l’immense désastre de la Deuxième GM et la leçon qu’on en a retiré. Or le nombre d’actes antisémites est en hausse et, si vous suivez un peu l’actualité de l’Allemagne, vous verrez les gros soucis qu’ils se traînent avec les néonazis qui profanent des tombes juives. Alors que les Allemands devraient avoir saisi le concept de censure idéologique appliquée aux cas extrêmes depuis le temps. Et je ne parle pas d’Aube dorée, le mouvement néonazi grec, ou des propos de Viktor Orbán, le président hongrois… Ah oui, et on vient y rajouter les actes antimusulmans maintenant. En France, écoute Le Pen senior, BHL ou Eric Zemmour, quelquefois j’ai envie de tout balancer sur un bûcher et de craquer une allumette en les entendant à la radio. Sincèrement, je ne crois pas que les gens soient devenus plus autonomes ou plus critiques vis-à-vis de ce qu’on leur raconte.
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[sur la question de “sont-ils crétins parce qu’ils pensent différemment de toi ?” sous-jacente dans les trois paragraphes qui suivent]
Je ne parlais pas de “vérité” unilatérale et lumineuse – je trouve comme vous que c’est subjectif -, mais de sens logique. Ils suffit de regarder de plus près le raisonnement logique de nombre d’hommes médiatiques aujourd’hui pour se rendre compte que quelle que soit la vérité qu’ils essayent de diffuser, ils usent et abusent de mécanismes logiques très très approximatifs, leur grand favori étant le sophisme (partir de deux propositions justes et en tirer quelque chose de faux).
Du genre “un musulman a commis un attentat” + “les musulmans se trouvent historiquement dans les pays arabes” >> “les Arabes commettent des attentats” – toupi toupi dou, jusqu’à mention du contraire les frères Kouachi sont nés en France et y ont toujours vécu, n’accusez pas trop vite les Arabes dans leur globalité comme s’ils avaient des gènes ou une culture qui les prédisposaient à l’attentat. Et aussi, le plus grand pays musulman au monde, c’est l’Indonésie.
Enfin, c’est un exemple parmi d’autres de raisonnements décevants. Tous les raisonnements sont subjectifs, mais tous ne sont pas nuls d’un point de vue logique. Et oui, vous avez raison, un mensonge bien emballé s’accepte tout à fait bien, surtout quand il est moins complexe que la vérité. Et effectivement j’argumente pour prouver que j’ai raison, ou en tout cas plus que mon voisin. Mais j’essaye quand même d’argumenter de façon valable, et pour une opposition d’opinions aussi marquée que celle de Descartes, de la mienne, de la votre et de tous ceux qui interviennent ici, je trouve qu’on reste polis et constructifs :).
>>> En prime et en exclu pour vous parce que c’est les soldes et que vous êtes mon 2000ème client, vous avez droit à ma petite théorie de “Pourquoi est-ce qu’on ne devient pas plus intelligents alors qu’on a tellement plus de documentation pour nourrir notre réflexion ?”
Tout simplement, je crois qu’on a atteint un seuil où notre capacité à assimiler des informations touche à sa limite. Chaque être humain ne peut assimiler correctement qu’une seule information à la fois. Faites l’expérience et essayez de lire un livre en écoutant la radio. Vous ne pouvez pas comprendre les deux à la fois, soit vous comprenez le livre mais pas la radio, soit vous saisissez la radio mais ne suivez plus le livre, soit vous avez des bribes des deux à la fois.
Et actuellement, nous sommes littéralement submergés de médias divers et variés qui nous balancent des informations nouvelles en permanence. Et soit en n’en retient que quelques unes de façon réfléchie, soit on ne retient que des miettes de chaque sujet traité. Impossible d’y échapper, sauf à passer son temps à être le plus attentif possible, ce qui est très très fatigant et baisse dangereusement la capacité de concentration pour autre chose. En conclusion, trop d’informations diluent la capacité d’assimilation.
C’est ce qui nous pousse à extérioriser notre mémoire, pour ne pas avoir à retenir “ce qui est écrit” mais “où c’est écrit” pour le retrouver plus tard. Au final, nous nous ébauchons un petit catalogue d’adresses, de sites internet ou de rayons de bibliothèques. ce qui est moins difficile à retenir que la masse d’informations contenues dans les adresses notées.
Alors, quelle est la différence entre “crétins” et autres, puisqu’on est tous dans le même bateau ? C’est la vitesse d’assimilation et le désir d’assimilation qui fait toute la différence pour moi. Certains intègrent très rapidement une information complexe et d’autres n’y arrivent pas avant des mois. C’est en réalité la faculté d’apprentissage et d’adaptation qui est en cause. Un bon exemple, parmi d’autres, concerne l’apprentissage des langues. Il faut être motivé pour apprendre quelque chose d’aussi complexe qu’une nouvelle langue, mais il faut surtout être capable d’intégrer un tas de règles très complexes en un temps record et des milliers de mots pour tenir une conversation.
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@ morel maintenant :
[Vous glissez d’une notion de droit à un jugement de valeur qu’ici personne n’a formulé (gauche morale ?)]
C’est quoi la gauche morale ?
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[Je peux, je vous l’assure comprendre, si vous la brandissiez comme un étendard. Sur un autre plan, j’ai connu un collègue qui était « mal vu » car ne cessait de parler de son ancien boulot comme un idéal, sont-ils des crétins ?]
Je ne saisis pas le lien, en fait. Figurez-vous que j’adore mes études et le boulot qui se trouve à la clé, c’est mon idéal de vie, et je n’hésite pas à clamer sur tous les toits que je reste à l’école après la fermeture des cours pour rattraper mon retard sur les autres, qui ont deux-trois ans de plus que moi, et qui sait, peut-être les dépasser et devenir vraiment bon dans mon domaine…
Je ne brandis pas ma double nationalité comme un étendard et je ne m’en vante pas non plus, c’est plutôt l’inverse. Ce sont davantage les autres qui le prennent comme un handicap et qui me rabaissent avec. Dès que quelque chose sort de la norme, il est facile de l’attaquer sous prétexte qu’on est plus nombreux, donc qu’on a raison.
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[Plus précisément, est-ce que vous fréquentez des immigrés ?]
Ma mère, pour commencer.
Et la moitié de la rue où je vis sinon. Et c’est en connaissance de cause que j’affirme qu’ils ont le droit autant que tout le monde de se faire une place en France, s’ils font l’effort de s’adapter. Et c’est aussi en connaissance de cause que je me permets de dire qu’ils ne sont pas plus, ni moins, intelligents que les Français. Et que si je traite tout le monde de crétin, alors pourquoi je les épargnerai ? Certains sont irremplaçables à mes yeux et c’est du gâchis de les traiter comme des envahisseurs, et d’autres méritent cette étiquette en revanche.
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[Avez-vous bien réfléchi à cette proposition ? En sorte, il faudrait que les migrants jouent le rôle du « gendre idéal » ne serait-ce que le temps de se faire accepter ? Ne serait-ce pas une forme encore plus oppressante que la loi ?]
Oui, vous avez raison, la pression sociale est un instrument mille fois plus efficace qu’une loi. Et c’est pourquoi je la recommande. Ne vous leurrez pas, mon argumentaire a pour but de montrer qu’il faut intégrer les immigrés pour les transformer en citoyens français à part entière, y compris en les habituant par pression sociale à imiter leurs hôtes. Il faut, au minimum, qu’ils apprennent à parler et écrire le français, qu’ils respectent le droit français en public et en privé, et que, s’ils ont des traditions qui vont à l’encontre de ce droit, qu’ils les abandonnent. Pour faire simple, quand il y a conflit entre une tradition et la loi, la loi l’emporte systématiquement. Un exemple. La religion n’est pas couverte par cette loi, puisque le droit français est laïc et tolérant envers la religion dans la vie privée, l’immigré peut donc conserver sans problème sa foi. Mais par contre, si elle s’accompagne de traditions qui vont à l’encontre du droit (sacrifices animaux, au pif), alors là, l’immigré devra se conformer à nos lois et arrêter sous peine d’encourir les sanctions prévues.
Ah, et je ne suis jamais allé non plus à l’université, vous savez. Mon père n’a pas son bac et ma mère a entamé un master à 42 ans, je ne suis pas issu de la haute, bien au contraire. Et quand bien même, qu’est-ce que ça changerait ?
En revanche, je suis assez sévère sur les erreurs logiques de tous, particulièrement des média, raison pour laquelle je les traite volontiers de crétins.
PS : Je devrais peut-être renouveler mon répertoire d’insultes. La prochaine fois, promis.
@ Descartes. En cadeau, un loooong post rien que pour toi.
Bon, je vais commencer par clarifier certains points avant de me lancer dans ma thèse habituelle. Citations !
Comme toi, ma famille est rentrée irrégulièrement en France. Mon père est français pourtant, mais l’avait quittée bien assez tôt de son propre gré et est revenu bien plus tard. Ma mère, par contre, ne parlait pas la langue et n’était jamais venue – elle parle toujours assez mal le français, quoique l’écrit très bien. Ils ont vécu sur les routes un certain temps et se sont achetés une ruine perdue en province avec leurs petites économies. Pour installer ma mère cependant – entre autres raisons – ils se sont mariés, ce qui légalement être considéré comme un mariage blanc. Ce qui m’avait fait bondir, c’était avant tout ça :
[Pourquoi ? Parce que entre l’instruction de la demande et les nombreux recours administratifs que notre droit prévoit, on peut faire durer la chose 18 mois au moins. Cela donne du temps pour conclure un mariage, blanc ou pas, de scolariser les enfants, de trouver un travail, de s’installer… éléments au nom de quoi on plaidera plus tard une demande de régularisation]
Je ne vois pas comment on peut interpréter ça autrement qu’avec cynisme si on est gentil, ou avec mépris si on se sent visé. Dans tous les cas, c’est soit mal dit, soit insultant. Car, si effectivement tu ne dis jamais “inutile” ou “nuisible”, tu le paraphrases plutôt éloquemment :
[Lorsqu’il entre sur le marché du travail, lorsqu’il faut se loger, lorsqu’il a accès aux dispositifs de solidarité, il concurrence les couches populaires.] >> inutile à la plupart des Français car pompe à fric, voire nuisible pour les classes populaires car il leur pique leur travail. Sauf que des fois, il s’adapte honnêtement et se met même à générer de la richesse, je prends l’exemple de mes parents. Et je ne cite que le post principal, tu as encore grossi le trait pour démontrer au fil des posts que l’immigré clandestin est indésiré car il est un poids à la France, un poids de plus en plus lourd en plus et qu’à ce titre il est par principe préférable de le mettre dehors. Donc, même si je ne l’avais pas cité et que je ne comptais pas dire dans un premier temps que je me sentais visé par la maladresse de la tournure, ou même que j’étais concerné, je te le signale maintenant. Mais ceci n’est pas l’objet du débat.
(au passage, j’espère t’avoir démontré que tu exagères très largement, et que le poids, pour ridicule qu’il est actuellement, n’augmente pas de manière significative puisque la France grandit en nombre et dilue cette augmentation. aucune urgence de ce côté. cela dit, ton raisonnement est très actuel en Allemagne ou en Suède où la population décroît)
Pour en revenir aux choses sérieuses. Tu m’avais posé la question d’où allait ma loyauté. Mais avant cela, je vais simplement parler de l’article du Monde paru hier (vendredi 26 donc). Marrant, la première chose que je vois en rentrant en France, c’est un dossier sur l’immigration.
Et finalement je n’ai même pas besoin de te répondre sur la question de “mais pourquoi la lutte préventive et coopérative en Afrique du Nord et de l’Ouest ?”, l’article le fait tout seul. Afin d’endiguer le flot de migrants en Méditerranée, les pays côté européen engagent une opération de démantèlement des réseaux de passeurs dans les ports du Maghreb, de concert avec les autorités locales.
C’est moins cher que de patrouiller en permanence dans la mer Méditerranée.
C’est plus efficace puisqu’on pêche plus en amont de la source et que les migrants ne se sont pas dispersés de partout.
Ça évite de repêcher des cadavres par palanquées.
Et puis surtout, on élimine des criminels. Car, quoique tu en penses, les passeurs sont des criminels. Crois-tu qu’ils se font arrêter avec leurs passagers, et dans ce cas comment feraient-ils pour refaire le trajet plusieurs fois par mois ? Non, tout simplement parce qu’ils se cassent dès que le danger pointe, et c’est extrêmement difficile de mettre la main dessus. Un marchand d’armes peut à la limite se justifier en disant qu’il n’appuie jamais sur la gachette, mais le passeur qui dépouille ses passagers, les intimide et les abandonne commet une jolie flopée de crimes. Le tout sans eau et sans nourriture. Ce n’est pas un simple “service rendu”. S’il te plaît, renseigne-toi sur le sujet avant de sortir des énormités pareilles. Et je pourrais dire tout simplement qu’il y a non-assistance à personne en danger dans chaque traversée de bateau puisqu’il les livre à elles-mêmes en haute mer, et que s’y rajoutent à peu près tout le temps des constats de coups, d’intimidation, de meurtres ou de viols. Constats de la marine italienne.
Bref, je trouve que la solution de mener des opérations préventives est la plus intelligente pour limiter le flot d’immigrés en masse et en tel danger. Et je rajouterais aussi qu’il est important de démystifier l’image de l’Europe, car tout repose sur un mythe et un mensonge. C’est en partie dû à l’immigration légale, j’ai enfin l’occasion de t’expliquer pourquoi l’immigration légale contribue à l’attrait d’un pays pour tous, légaux et clandestins. Tout simplement parce qu’un immigrant légal retourne souvent au pays ou envoie une partie de sa paie soutenir sa famille. Et, en revenant, il vante la vie de rêve qu’il vit là-bas et où les pavés sont fait en or. Mais d’où sors-tu ça, me diras-tu ? C’est un phénomène en tout cas fréquent chez la communauté subsaharienne en France. Une fois par an, ou une fois tous les deux-trois ans, l’immigré retourne au pays voir sa famille ou son milieu de départ. Et c’est l’occasion d’acheter de beaux habits, une montre classe et de montrer qu’il a réussi ce qu’il voulait, qu’il est devenu européen etc etc. Souvent même, c’est l’occasion de dépenser l’épargne qu’on a sauvegardée pendant l’année pour impressionner. Et mine de rien, cette image est tenace et participe au phénomène d’attraction de masse vers un pays. Par pure frime.
Maintenant, le cœur de la question. Envers qui suis-je loyal, en tant que binational ? Je dois aux deux pays mon passé, mais uniquement à la France mon présent et mon avenir. C’est l’État français qui paye les bourses, les allocs et l’école publique dont je bénéficie. Je suis donc redevable, et je m’en acquitterai en payant mes impôts à mon tour, tant que je saurai où ils vont être distribués. C’est simple à saisir et je ne vois rien à y redire. En revanche, je ne me sens pas attaché particulièrement aux “valeurs” ou à l’histoire de la France, ni d’ailleurs de ma terre maternelle. Je ne suis pas spécialement reconnaissant à Charles Martel d’avoir écrasé les Arabes à Poitiers (c’étaient des Sarrasins, et si le chef était omeyyade, le corps des troupes était berbère principalement, merci Michelet pour ton sens de la synthèse…), et je ne me reconnais pas dans le Franc moyen. Charlemagne est une icône ridicule à mes yeux, puisqu’il est bien plus allemand que français (sérieux, sa capitale Aix-la-Chapelle est en Allemagne, son nom, Karl, est germanique, la langue franque n’avait rien de roman à l’époque et il ne savait pas le latin, il ne savait ni lire ni écrire comme le chef germanique qu’il était, il est mort en Allemagne et ses reliques y étaient conservées…).
Je suis certes attaché aux lieux où je vis, mais pas à leur histoire, pour intéressante qu’elle soit, et il est malsain de vouloir la lier à des enjeux contemporains et encore plus à des principes démocratiques qui n’avaient pas de sens à l’époque (Charlemagne, père de l’école… ah là là ça donne envie de piétiner du Saxon ça !). Pour moi, le patriotisme, c’est une question d’éducation. Ça fait bien longtemps que l’école arrête de nous seriner le message patriarcal de devoir envers la nation, et je n’ai jamais ressenti cet appel, désolé. Néanmoins, je considère avoir une dette envers la France pour l’aide qu’elle m’a apportée et que j’ai, je pense, bien utilisée, et je dois à ce titre lui être loyale. Mais sans sentiments.
Par ailleurs, pour reprendre juste un point que tu avais soulevé, si la France voulait vraiment chasser les immigrants, ils ne seraient plus là et le Front National (le seul à ma connaissance qui soit aussi radical) serait au pouvoir… Ce n’est pas le cas, et je ne crois pas que les Français réclament une législation plus dure.
@ Epicure,
“Quelles sont les caractéristiques de l’ethnie cosmopolitaine (simple curiosité : tu joues à Europa Universalis IV ?) pour toi, qu’est-ce qui les distingue de leurs voisins ?”
J’ignore ce qu’est “Europa Universalis IV”. Et c’est ethnie “métropolitaine”. Ce qui les distingue de leurs voisins? Mais le fait que, précisément, leurs voisins les appellent “les Français” (si, si, c’est comme ça que les Arabes appellent les blancs, même quand ils ont eux-même la (double) nationalité), “les souchiens”, “les Gaulois”. Vous n’avez jamais entendu ces mots? Ils sont pourtant d’usage courant pour désigner le Français natif.
“Si tel est le cas et qu’il existe une ethnie française, dans ce cas je ne suis pas vraiment Français, et Descartes non plus au passage”
Pourquoi? J’ai dit qu’il existait une ethnie française, je n’ai pas dit que tous les citoyens français appartenaient nécessairement à cette ethnie. Il existe aussi un ethnie allemande, aux dernières nouvelles, et il y a des citoyens allemands d’origine turque ou serbe, non? Les Antillais constituent une ethnie distincte, et ils sont français depuis longtemps…
“Les immigrés légaux constituent une part de plus en plus importante de la population active, les chiffres que j’ai cités avoisinent les 11 % de la population, et l’accélération est tangible sur les quinze dernières années. Paradoxalement, ceux qui supportent la démographie française, ce sont eux… sur les 6 millions de Français “gagnés” depuis 2000, la moitié vient de l’immigration légale, une bonne part du reste au recul de l’âge moyen de mort naturelle, et le tout petit reste de notre natalité au ras des pâquerettes (source Insee).”
Je ne vois pas bien comment le “recul de l’âge moyen de mort naturel” peut augmenter la population puisqu’il s’agit de Français nés avant la période en question… Le fait de vivre plus vieux n’augmente pas en soi la population, il freine sa diminution, c’est tout. Par conséquent les 3 millions de nouveaux Français “gagnés” depuis 2000 hors immigration proviennent bien de la natalité, ce qui me paraît rejoindre les chiffres d’ailleurs: autour de 800 000 naissances par an, et entre 500 et 600 000 décès si j’ai bonne mémoire, soit un solde naturel de 200 à 300 000 individus par an. Par ailleurs, une partie non négligeable des immigrés légaux sont des étudiants ou des travailleurs temporaires qui retournent dans leur pays d’origine. Par conséquent, votre estimation de la part de l’immigration légale dans la croissance démographique française est probablement exagérée.
“Ils forment, pour moi, une partie non négligeable de la population active, et d’ailleurs de la population française (11 % selon Wiki et le Sénat pour 7 millions au total, je sais pas d’où sort le 4 et quelques millions de Descartes)”
Bien sûr mais… les chômeurs font partie de la population active. Or, les taux de chômage les plus importants se trouvent souvent dans des zones à forte concentration d’immigrés. Un immigré légal en âge de travailler fait partie de la population active, mais s’il est chômeur, il ne produit aucune richesse, et ne paie pas votre bourse. S’il est sous-payé, il ne finance pas grand-chose non plus, n’étant pas imposable. En revanche, il coûte à la société car il profite de certaines prestations sociales. Or beaucoup d’immigrés légaux sont au chômage. L’immigration économique ne représente qu’une petite partie de l’immigration légale. Le regroupement familial génère beaucoup plus d’immigration légale, grâce à l’habitude, assez répandue chez les Maghrébins (de nationalité française pour beaucoup) par exemple, d’aller chercher un conjoint au bled (ce qui fausse aussi les statistiques sur les fameux “mariages mixtes”: qu’un Français épouse une Marocaine n’empêche pas que ce sont souvent deux Arabes musulmans qui s’unissent en réalité). Cet immigré par regroupement familial se retrouve de facto sur le marché du travail, mais il ne trouve pas nécessairement un emploi, loin s’en faut. Vous avez l’air de croire que tous les immigrés sont des surdiplômés très qualifiés, or ce n’est pas le cas.
“Dans ce cas, si tout le monde est plus intelligent, alors il ne devrait plus y avoir d’antisémites ou de nazis”
Je n’ai pas dit qu’on était plus intelligent, j’ai juste fait observer qu’on n’était probablement pas plus con, nuance… En quoi le fait d’être “antisémite” ou “nazi” est assimilable à du crétinisme? On peut être intelligent et intolérant, non? Ou bien dois-je comprendre que l’intelligence, pour vous, se résume à aimer son prochain et à être tolérant? Cela me paraît une définition un peu réductrice de l’intelligence. Encore une fois, vous donnez furieusement l’impression de considérer comme “crétin” toute personne qui ne partage pas vos préjugés et vos opinions…
“En France, écoute Le Pen senior, BHL ou Eric Zemmour, quelquefois j’ai envie de tout balancer sur un bûcher et de craquer une allumette en les entendant à la radio.”
En quoi cette méthode se distinguerait-elle de celle prônée par les nazis que vous dénoncez? Au nom de quoi faut-il tolérer les immigrés et ne pas tolérer ceux qui sont contre l’immigration? Pourquoi tolérer les juifs et ne pas tolérer ceux qui n’aiment pas les juifs? Et de manière générale, pourquoi les arguments en faveur des immigrés, de la tolérance, de l’ouverture vaudraient-ils plus que ceux de la thèse opposée? Il y a des choses que vos chiffres ne disent pas: c’est l’aspect culturel, par exemple. L’immigration a un “coût” difficile à mesurer: celui de savoir si la société “riche de sa diversité” est plus agréable à vivre, plus solidaire, plus unie. Pour avoir discuté avec un certain nombre d’enseignants qui ont bossé dans les quartiers “cosmopolites” de Seine-Saint-Denis par exemple, je peux vous dire que pas grand-monde n’a envie d’y rester travailler. Les médecins, les infirmiers, les commerçants désertent certains quartiers. Les pompiers hésitent à y venir. Alors on peut dire, bien sûr, que les gens sont très cons, qu’ils se font des films, que tout cela relève du fantasme. On peut aussi se dire qu’il y a autre chose.
Un dernier point sur la double nationalité que vous évoquez: pour moi, la double nationalité n’est pas une “trahison” en soi, mais elle est le signe d’une allégeance douteuse, et la porte ouverte à une éventuelle trahison. Je ne sais pas si ça vous est arrivé, mais j’ai déjà vu des mariages où l’on brandit des drapeaux marocains, tunisiens ou turcs, où l’on lance les “youyous”, j’ai vu aussi des gens klaxonner à 1 heure du mat avec un drapeau algérien à la main suite à un match de foot heureux (et tout cramer après un match malheureux de la même équipe). Outre que ça me paraît déplacé (je n’ai pas brandi de drapeau tricolore le jour de mon mariage, ça ne me semblait pas le lieu), ne suis-je pas en droit de m’interroger sur la loyauté de ces gens? Ou bien suis-je trop con?
@ Epicure
[@ Descartes. En cadeau, un loooong post rien que pour toi.]
Pour les âmes bien nées, l’a valeur n’atteint pas le nombre de paragraphes…
[Comme toi, ma famille est rentrée irrégulièrement en France. Mon père est français pourtant, mais l’avait quittée bien assez tôt de son propre gré et est revenu bien plus tard. Ma mère, par contre, ne parlait pas la langue et n’était jamais venue – elle parle toujours assez mal le français, quoique l’écrit très bien. Ils ont vécu sur les routes un certain temps et se sont achetés une ruine perdue en province avec leurs petites économies. Pour installer ma mère cependant – entre autres raisons – ils se sont mariés, ce qui légalement être considéré comme un mariage blanc. Ce qui m’avait fait bondir, c’était avant tout ça :]
Soyons précis : votre père est français, et son mariage avec votre mère n’avait rien d’un « mariage blanc » puisqu’il y avait une véritable vie maritale derrière. Leur mariage doit « légalement » être regardée comme la régularisation administrative d’une situation de fait, et non comme un « mariage blanc ». Si je comprends bien, vous êtes donc français par la naissance puisque fils d’un français. Vous n’êtes donc pas, selon la définition de l’INSEE, un « immigré », puisque vous n’êtes pas « né étranger à l’étranger ».
[Pourquoi ? Parce que entre l’instruction de la demande et les nombreux recours administratifs que notre droit prévoit, on peut faire durer la chose 18 mois au moins. Cela donne du temps pour conclure un mariage, blanc ou pas, de scolariser les enfants, de trouver un travail, de s’installer… éléments au nom de quoi on plaidera plus tard une demande de régularisation][Je ne vois pas comment on peut interpréter ça autrement qu’avec cynisme si on est gentil, ou avec mépris si on se sent visé. Dans tous les cas, c’est soit mal dit, soit insultant.]
Avant « d’interpréter » et de prendre la mouche, posez-vous la question : est ce que les faits décrits sont exacts. Est-ce qu’il existe un contournement de nos lois concernant l’entrée et le séjour en France qui utilise la longueur des procédures et les nombreux recours juridiques disponibles pour transformer une situation illégale en fait accompli ? Et j’ajoute, si vous avez utilisé l’un de ces recours, cela n’a rien « d’insultant » que de le rappeler.
[Car, si effectivement tu ne dis jamais “inutile” ou “nuisible”, tu le paraphrases plutôt éloquemment :]
Non. Je décris un effet économique. Et tout effet économique « nuit » à quelques uns et bénéficie à quelques autres. Dire que la pression du capital tend à réduire les salaires revient pour vous à dire que les capitalistes sont « nuisibles » ? Dire que les ouvriers cherchent à faire augmenter les salaires et donc de réduire corrélativement les profits du patron revient à dire que les ouvriers sont « nuisibles » ? Dans ce cas, nous sommes tous « nuisibles » à quelqu’un.
Dire que les immigrés sont « nuisibles » en général reviendrait à considérer la société comme un tout homogène auquel les immigrés porteraient atteinte. Je me suis toujours refusé à ce genre de jugement.
[« Lorsqu’il entre sur le marché du travail, lorsqu’il faut se loger, lorsqu’il a accès aux dispositifs de solidarité, il concurrence les couches populaires. » >> inutile à la plupart des Français car pompe à fric, voire nuisible pour les classes populaires car il leur pique leur travail]
J’ignorais que « pomper du fric » était synonyme de « inutile ». Les impôts, la sécurité sociale nous pompent du fric, et pourtant elles sont très « utiles ». L’inutilité se déduirait à la rigueur en comparant le coût que l’immigré représente en termes d’accès aux dispositif de solidarité, et ce qu’il rapporte en termes de valeur produite. Quant au terme nuisible », je vous renvoie au paragraphe précédent. Mais surtout, j’ai envie de vous poser une question. Niez-vous que les immigration, parce qu’elle tend à pousser les salaires des non qualifiés vers le bas et parce qu’elle introduit une concurrence pour les – maigres – ressources consacrés aux mécanismes de solidarité porte préjudice aux intérêts des couches populaires ? Oui ou non ? Parce que si c’est le cas, je vois mal pourquoi il faudrait s’abstenir de le rappeler pour éviter « d’offenser » untel ou untel.
[Sauf que des fois, il s’adapte honnêtement et se met même à générer de la richesse, je prends l’exemple de mes parents.]
Des fois, oui. Mais on ne peut pas prendre un cas pour la généralité, notamment lorsque ce cas est manifestement minoritaire. Mais je vous le répète : si je suis partisan de l’assimilation, c’est parce que je pense que l’immigré assimilé est parfaitement capable de « générer de la richesse » et en dernière instance de contribuer à l’équilibre du système de protection sociale sans aucune différence avec un français « de souche ». Seulement, l’assimilation a un coût en investissement, et c’est pourquoi on ne peut assimiler qu’un flux d’immigration relativement faible.
[Et je ne cite que le post principal, tu as encore grossi le trait pour démontrer au fil des posts que l’immigré clandestin est indésiré car il est un poids à la France, un poids de plus en plus lourd en plus et qu’à ce titre il est par principe préférable de le mettre dehors.]
C’est une tautologie : s’il est « clandestin », c’est bien qu’il est « indésiré », puisque les français ont pris la peine de faire des lois pour lui interdire de venir. Et il faut se demander pourquoi les français ont fait ces lois. Si l’immigré n’est pas un « poids », si en venant il ne fait pas seulement son propre bonheur, mais aussi celui des français, pourquoi les français persistent-ils à ne pas vouloir de lui ?
[Donc, même si je ne l’avais pas cité et que je ne comptais pas dire dans un premier temps que je me sentais visé par la maladresse de la tournure, ou même que j’étais concerné, je te le signale maintenant. Mais ceci n’est pas l’objet du débat.]
Je suis désolé si cela vous a blessé, mais je ne retire rien. Je pense qu’il faut dire les choses comme elles sont. Autrement, on ne comprend pas pourquoi le rejet de l’immigration est différent selon les couches sociales. Car si les couches populaires rejettent l’immigration alors que les « classes moyennes » boboïsées les adorent, c’est que chacun agit en fonction de ses intérêts, et que les intérêts dans l’espèce ne sont pas les mêmes. L’immigration permet – et ce n’est pas nouveau, cela existe depuis le XIXème siècle – un transfert de richesse au profit des classes dominantes et au détriment des couches populaires. Pourquoi croyez-vous qu’on a amené des polonais pour travailler dans les mines du Nord-Pas de Calais ? Parce que la rareté de la main d’œuvre obligeait les patrons à augmenter les salaires pour pouvoir recruter. Amener des immigrés permettait de faire baisser les salaires. Il n’y a pas dans ce rappel historique aucun reproche. Les immigrés qui sont venus ne sont « coupables » de rien.
[(au passage, j’espère t’avoir démontré que tu exagères très largement, et que le poids, pour ridicule qu’il est actuellement, n’augmente pas de manière significative puisque la France grandit en nombre et dilue cette augmentation. aucune urgence de ce côté. cela dit, ton raisonnement est très actuel en Allemagne ou en Suède où la population décroît)]
Je suis un peu surpris. Dans une réponse à Nationalistejacobin, tu affirmes au contraire que la part des immigrés dans la population active croit toujours… alors faudrait savoir. Mais admettons que vous ayez raison, et que le poids des immigrés « n’augmente pas de manière significative ». Cela aurait tendance à confirmer que le dispositif de fermeture de frontières, le refus de régularisation massive et d’expulsion des clandestins donne des résultats. Pourquoi les modifier ?
[Pour en revenir aux choses sérieuses. Tu m’avais posé la question d’où allait ma loyauté. Mais avant cela, je vais simplement parler de l’article du Monde paru hier (vendredi 26 donc). Marrant, la première chose que je vois en rentrant en France, c’est un dossier sur l’immigration.]
Franchement, je ne vois pas en quoi l’article du monde répond à ma question. J’attire par ailleurs votre attention sur le fait que « Le Monde » n’est pas tout à fait neutre sur ces questions, et qu’il répond à un électorat largement acquis aux « classes moyennes ». C’est drôle, tous ces chercheurs ont modélisé, fait des scénarios pour prédire ce que serait l’immigration dans un monde aux frontières ouvertes, calculé les effets sur le PIB – fort positifs, comme il se doit – mais pas une ligne sur l’effet sur les salaires ou le financement des systèmes de protection sociale dans les différents pays. Un oubli, sans aucun doute…
[Et finalement je n’ai même pas besoin de te répondre sur la question de “mais pourquoi la lutte préventive et coopérative en Afrique du Nord et de l’Ouest ?”, l’article le fait tout seul. Afin d’endiguer le flot de migrants en Méditerranée, les pays côté européen engagent une opération de démantèlement des réseaux de passeurs dans les ports du Maghreb, de concert avec les autorités locales. C’est moins cher que de patrouiller en permanence dans la mer Méditerranée.]
Mais est-ce efficace ?
[Et puis surtout, on élimine des criminels. Car, quoique tu en penses, les passeurs sont des criminels.]
Encore une fois, j’attends que tu argumentes cette affirmation. Si tu milites pour une ouverture totale des frontières, je ne vois pas pourquoi tu qualifies de « criminels » ceux qui anticipent la réalisation de cette utopie. Où est leur « crime » ? A ma connaissance, ils n’obligent personne à tenter la traversée, une traversée dont les dangers sont connus de tous. Où est le « crime » ?
[Crois-tu qu’ils se font arrêter avec leurs passagers, et dans ce cas comment feraient-ils pour refaire le trajet plusieurs fois par mois ? Non, tout simplement parce qu’ils se cassent dès que le danger pointe, et c’est extrêmement difficile de mettre la main dessus.]
Ce n’est pas parce qu’on est intelligent qu’on est un « criminel ». Les passeurs ne font que satisfaire un marché, dans la plus pure logique libérale. Et ceux qui achètent le service en question ne sont pas trompés, puisqu’il est de notoriété publique que la traversée est dangereuse. Ils savent donc parfaitement ce qu’ils achètent. Si quelqu’un se présente à ta porte avec un révolver posé sur la tempe et te menace de se tuer si tu ne lui donnes pas ton portefeuille, et que devant ton refus il fait feu, on ne peut accuser celui qui lui a vendu l’arme d’être un « criminel ». Tout au plus d’une infraction à la législation sur les armes.
[Un marchand d’armes peut à la limite se justifier en disant qu’il n’appuie jamais sur la gachette, mais le passeur qui dépouille ses passagers, les intimide et les abandonne commet une jolie flopée de crimes.]
Faut arrêter. Les images et les récits de ces « passages » sont sur toutes les télévisions, sur les réseaux sociaux. Les migrants savent pertinemment que les passeurs ne vont pas gentiment rester à bord pour se faire arrêter. Ils savent aussi lorsqu’ils achètent leur place que ce n’est pas une croisière à bord d’un paquebot de luxe, ni même à bord d’une embarcation sûre. Ils ne sont pas plus idiots que toi et moi.
[S’il te plaît, renseigne-toi sur le sujet avant de sortir des énormités pareilles.]
Auprès de qui, s’il vous plaît ?
[Et je pourrais dire tout simplement qu’il y a non-assistance à personne en danger dans chaque traversée de bateau puisqu’il les livre à elles-mêmes en haute mer,]
Je vous rappelle qu’il n’y a pas « non assistance à personne en danger » lorsque la personne se met volontairement en danger. S’il vous plait, renseignez-vous sur le sujet avant de sortir des énormités.
[et que s’y rajoutent à peu près tout le temps des constats de coups, d’intimidation, de meurtres ou de viols. Constats de la marine italienne.]
Pourriez-vous s’il vous plaît citer vos sources ?
[Bref, je trouve que la solution de mener des opérations préventives est la plus intelligente pour limiter le flot d’immigrés en masse et en tel danger.]
Nous sommes donc d’accord que le but à atteindre est bien de « limiter le flot d’immigrés », dont acte. Une langue vipérine pourrait dire que vous êtes donc d’accord pour que l’Europe s’assurer qu’ils continuent à crever gentiment dans leur pays au lieu de venir crever chez nous…
[Et je rajouterais aussi qu’il est important de démystifier l’image de l’Europe, car tout repose sur un mythe et un mensonge. C’est en partie dû à l’immigration légale, j’ai enfin l’occasion de t’expliquer pourquoi l’immigration légale contribue à l’attrait d’un pays pour tous, légaux et clandestins. Tout simplement parce qu’un immigrant légal retourne souvent au pays ou envoie une partie de sa paie soutenir sa famille. Et, en revenant, il vante la vie de rêve qu’il vit là-bas et où les pavés sont fait en or. Mais d’où sors-tu ça, me diras-tu ?]
Non, je ne vous le dirai pas. C’est un phénomène bien connu. Mais s’il est exact que les immigrés – légaux ou illégaux d’ailleurs – ont une certaine tendance à exagérer leur réussite dans le pays d’accueil, et à minimiser les difficultés, l’effet est beaucoup moins fort qu’il ne l’était il y a un demi-siècle. Depuis, on a inventé les réseaux sociaux, les gens ont la télévision satellite. Ils peuvent donc voir en pagaille les reportages, les dramatiques qui montrent combien les étrangers sont pauvres et maltraités en France, ils peuvent suivre les forums où l’on dénonce les avanies, discriminations et insultes, et ils peuvent même lire en direct les jérémiades des déclinistes et autres « antiracistes ».
[Maintenant, le cœur de la question. Envers qui suis-je loyal, en tant que binational ? Je dois aux deux pays mon passé, mais uniquement à la France mon présent et mon avenir. C’est l’État français qui paye les bourses, les allocs et l’école publique dont je bénéficie. Je suis donc redevable, et je m’en acquitterai en payant mes impôts à mon tour, tant que je saurai où ils vont être distribués.]
Ce n’est pas la question. Payer ses impôts, c’est une obligation pour tout résident, français ou étranger. La question était non pas si vous étiez prêt à vous soumettre à la loi, mais vers qui allait votre loyauté. En d’autres termes, si demain vous deviez choisir entre votre intérêt personnel et l’intérêt du pays, lequel choisiriez-vous ? Pour donner un exemple concret : si demain l’indépendance, l’intégrité de la France était menacée, seriez-vous prêt à faire volontairement un sacrifice économique ou même plus ? Et la question que je pose n’a rien de théorique…
[C’est simple à saisir et je ne vois rien à y redire. En revanche, je ne me sens pas attaché particulièrement aux “valeurs” ou à l’histoire de la France,]
Je vous plains. Sincèrement…
Etre « attaché à l’histoire » de France – ou de n’importe quel autre pays – est se reconnaître dans une filiation symbolique qui nous fait dépasser la filiation réelle. L’attachement à l’histoire familiale est le fondement de la solidarité dans la famille. Pourquoi sinon me reconnaîtrais-je une dette envers mon frère ou mon cousin plutôt qu’un parfait étranger ? L’histoire de France fonde la solidarité entre les citoyens d’une même nation. Après tout, qu’est ce que j’ai de commun avec un marseillais, si ce n’est la même histoire – ou plutôt, mais la différence est importante, le même « roman national » ?
Charlemagne est peut-être pour vous une « icône ridicule ». Mais c’est parce que nous français nous reconnaissons comme les successeurs de cet empereur à la barbe fleurie et grand fondateur d’écoles que nous sommes solidaires. Si je suis prêt à ce que mes impôts servent à améliorer le niveau de vie d’un Marseillais, d’un Corse ou d’un Auvergnat que je ne connais pas, que je n’ai jamais vu, mais dont la seule chose que je sache est qu’il se reconnaît, lui aussi, dans l’histoire/mythe de Charlemagne. Si l’Allemand et le Grec avaient eux aussi un ancêtre symbolique commun, il ne serait pas aussi difficile d’obtenir du premier qu’il aide le second sans conditions.
[Je suis certes attaché aux lieux où je vis, mais pas à leur histoire, pour intéressante qu’elle soit,]
Si vous voulez pouvoir vous attacher à des « lieux » qui sont au-delà de votre horizon visuel, il vous faut avoir recours à l’Histoire. Je n’ai jamais mis les pieds à Issoire ou à Soissons. Je ne peux pas être « attaché » à ces deux villes, puisque je n’y ai jamais vécu. Et pourtant, je suis lié à ses habitants, au point que si une catastrophe venait à s’abattre sur eux, je serai prêt à ce que mon argent soit utilisé pour les aider à se reconstruire. Quelle est la nature de ce lien, à votre avis ?
[et il est malsain de vouloir la lier à des enjeux contemporains et encore plus à des principes démocratiques qui n’avaient pas de sens à l’époque (Charlemagne, père de l’école… ah là là ça donne envie de piétiner du Saxon ça !).]
La mythologie qui fait de Charlemagne le « père de l’école » est bien plus proche de l’histoire « vraie » que vous ne le croyez. Mais il faudrait savoir si vous parlez d’histoire ou de « roman national ». Le Charlemagne qu’enseigne l’école fait partie du « roman », et non de l’histoire.
[Pour moi, le patriotisme, c’est une question d’éducation. Ça fait bien longtemps que l’école arrête de nous seriner le message patriarcal de devoir envers la nation, et je n’ai jamais ressenti cet appel, désolé. Néanmoins, je considère avoir une dette envers la France (…)]
C’est moi qui suis désolé, sincèrement désolé, pour vous. En entendant votre discours, je pense à un personnage de roman – je n’arrive pas à me souvenir lequel – incapable de ressentir, ou même de comprendre, l’amour, et pour qui le rapport amoureux se réduit à une question contractuelle. Pour vous, le rapport avec votre pays se réduit à une « dette » à payer. Et une fois payée, rien de plus ne peut vous être demandé. Il n’existe pas de « devoir » intergénérationnel, juste un « prêt » à rembourser.
[Par ailleurs, pour reprendre juste un point que tu avais soulevé, si la France voulait vraiment chasser les immigrants, ils ne seraient plus là et le Front National (le seul à ma connaissance qui soit aussi radical) serait au pouvoir… Ce n’est pas le cas, et je ne crois pas que les Français réclament une législation plus dure.]
Vous aurez tout de même noté que le FN gagne du terrain à chaque élection. Je prendrai cela, suivant votre propre raisonnement, comme une demande de plus en plus répandue d’une « législation plus dure ». Mais même si ce n’était pas le cas, je vous retournerai le raisonnement : si la France voulait vraiment ouvrir ses frontières, la LCR serait au pouvoir…
@ Epicure
« C’est quoi la gauche morale ? »
Grosso modo, celle qui a tourné le dos à la transformation sociale pour y substituer les américaneries (une voyelle mériterait d’être changée) du politically correct mais vous ne répondez pas à la phrase qui précédait.
« Je ne saisis pas le lien, en fait »
Simple analogie : si tout est mieux ailleurs (autre pays, autre milieu de travail etc..) ça ne peut qu’irriter les gens.
« Je ne brandis pas ma double nationalité comme un étendard et je ne m’en vante pas non plus, c’est plutôt l’inverse. Ce sont davantage les autres qui le prennent comme un handicap et qui me rabaissent avec. Dès que quelque chose sort de la norme, il est facile de l’attaquer sous prétexte qu’on est plus nombreux, donc qu’on a raison. »
Puis-je vous dire que cela alors, me semble très curieux. Comment cette double nationalité a pu être révélée aux « autres » (« Alors que pourtant, tant qu’on ne rentre pas dans la maison de mes parents ou que je ne parle pas avec eux en présence de quelqu’un d’autre, personne ne saurait me distinguer du Français lambda » – réponse à nationalistejacobin) ? Pourquoi alors que somme toute, il s’agit d’un état civil qui n’est pas une rareté, on s’en prendrait à vous à ce sujet ?
« la pression sociale est un instrument mille fois plus efficace qu’une loi. »
Elle peut parfois jouer son rôle. Est-ce bien le cas aujourd’hui ? Les Français d’origine désertent les quartiers fréquentés par les immigrés qui cherchent parallèlement à se regrouper. Imaginez un migrant arrivant dans un quartier d’une ville du 93 où règne la pression du narco-trafic et/ou salafiste, dans quel sens s’exercerait « l’intégration » soumise à la pression locale ?
Au-delà, subordonner l’installation d’un migrant à son voisinage risque fort de mener à l’arbitraire le plus total voire à la tyrannie de proximité. On peut imaginer que Manoel, mon maçon portugais soit soumis à bien des chantages pour témoigner en faveur de son « adaptation » (ça tombe bien, j’aimerais construire une piscine ! – en fait, je vis en appartement 🙂
Il faut donc des règles de droit.
« Il faut, au minimum, qu’ils apprennent à parler et écrire le français »
Il y a actuellement des programmes pour cela, un effort demandé aux contribuables qui, de plus en plus s’interrogent sur quel retour de ce bel acquis pour les intéressés dont certains arrivent analphabètes.
« qu’ils respectent le droit français en public et en privé, et que, s’ils ont des traditions qui vont à l’encontre de ce droit, qu’ils les abandonnent. »
Vaste programme…Il y a des pays où tout se monnaie : permis de conduire, papiers d’identité, diplômes. Une refonte des équivalences serait nécessaire y compris pour des pays européens mais ne fâchons pas la commission européenne…
Au-delà, belles recommandations pas du tout évidentes à mettre en œuvre dans le contexte politique et social actuel.
Si vous me le permettez et avec mes excuses auprès de nationalistejacobin qui est plus habilité que moi pour vous répondre, je suis très étonné lorsque vous écrivez : « jusqu’à mention du contraire les frères Kouachi sont nés en France et y ont toujours vécu ». Vous me rappelez qu’après les assassinats commis par Merah, j’ai eu la curiosité de consulter la presse francophone algérienne en ligne. Dans un de ces journaux, l’éditorialiste retraçant la vie de Merah arrive à la conclusion que c’est une « affaire franco-française ». Si j’en avais eu la possibilité, je lui aurait demandé en quoi le terrorisme salafiste est une spécialité française ??
@ Descartes
[Conséquence : une partie des non-qualifiés bénéficient d’un niveau de vie supérieur à leur productivité grâce à des transferts venant des travailleurs les plus productifs.]
J’aime beaucoup ta “pédagogie” concernant l’économie, je veux parler de ces commentaires qui peuplent ton blog et qui permettent de mieux comprendre certaines notions comme la productivité, la plus-value, etc.
Mais ici, à nouveau dans un souci pédagogique, peux-tu préciser quelques exemples de travailleurs qui ont un niveau de vie supérieur à leur productivité et d’autres qui sont “les plus productifs” (ces derniers ont-ils un niveau de vie inférieur à leur productivité ?) ?
@ Anne Iversaire
[J’aime beaucoup ta “pédagogie” concernant l’économie, je veux parler de ces commentaires qui peuplent ton blog et qui permettent de mieux comprendre certaines notions comme la productivité, la plus-value, etc.]
Merci. J’essaye de continuer ce que je faisais quand j’enseignais dans les écoles du Parti…
[Mais ici, à nouveau dans un souci pédagogique, peux-tu préciser quelques exemples de travailleurs qui ont un niveau de vie supérieur à leur productivité et d’autres qui sont “les plus productifs” (ces derniers ont-ils un niveau de vie inférieur à leur productivité ?) ?]
Je vais essayer de faire comprendre la notion à partir d’un exemple, celui de l’exonération de charges sociales. Comme vous le savez, pour empêcher la disparition d’un certain nombre d’emplois peu qualifiés et leur remplacement par des machines, les gouvernements successifs ont décidé des exonérations de charges sociales. Mais le travailleur, lui, n’a rien perdu : il continue à bénéficier des mêmes prestations.
Qu’est ce que cette situation traduit ? Le fait que la productivité du travailleur peu qualifié n’est pas suffisante pour couvrir le niveau de vie de ce travailleur tout en fournissant de la plusvalue à son patron. Le remède ? Faire payer une partie du niveau de vie du travailleur – ici la protection sociale – par quelqu’un d’autre. Et qui exactement ? Ceux qui occupent des postes beaucoup plus productifs.
Les exonérations de cotisations sociales sont un exemple d’un mécanisme qui transfère de la valeur depuis les travailleurs les plus productifs vers les moins productifs. Grâce à ce transfert, les travailleurs moins productifs bénéficient d’un niveau de vie qu’ils ne pourraient pas s’offrir autrement. Quant aux travailleurs les plus productifs, ils acceptent de transférer une partie de leur production dans le cadre de la solidarité nationale.
@Epicure
“La véritable question est : Est-ce qu’il faut rendre illégale l’immigration clandestine ? “
C’est bien parce qu’ils n’ont pas le droit de venir chez nous, même au grand jour, que des gens le font clandestinement, non ?
“Essayons davantage de contrôler et de canaliser les migrants plutôt que de leur opposer un barrage aveugle, soyons pour une fois subtils et intelligents. Car si on contrôle un minimum le flux en ouvrant juste assez les frontières, on peut aussi faire le tri plus facilement.”
Si on ouvre “juste assez” les frontières, cela veut dire qu’on va repousser un certain nombre de gens, sinon on les ouvrirait “en grand”. Vous croyez vraiment que les “recalés” vont rester sagement chez eux ?
C’est très clair Descartes,
en résumé ;
« Prolétaires de tous les pays, unissez vous si ça vous chante, mais ne venez pas nous em…der chez nous ! »
@ v2s
[en résumé : « Prolétaires de tous les pays, unissez vous si ça vous chante, mais ne venez pas nous em…der chez nous ! »]
Vous avez tout compris. A ma connaissance, ni Marx ni aucun autre penseur du mouvement ouvrier n’a proposé l’émigration des travailleurs des pays pauvres vers les pays riches comme une solution aux problèmes du prolétariat. Au contraire : on sait depuis belle lurette que le capital a systématiquement utilisé le déplacement de la main d’œuvre pour faire pression à la baisse sur les salaires…
Bonsoir Descartes,
Billet très intéressant, comme d’habitude.
“d’une part, un livre dont je ne saurais pas donner maintenant le nom et l’auteur, et qui faisait une analyse très précise et documentée des flux économiques entre la France métropolitaine et ses colonies” : ne serait-ce pas Jacques Marseille ?
@ Mohican
[« d’une part, un livre dont je ne saurais pas donner maintenant le nom et l’auteur, et qui faisait une analyse très précise et documentée des flux économiques entre la France métropolitaine et ses colonies » : ne serait-ce pas Jacques Marseille ?]
Oui, vous avez tout à fait raison : il s’agit de son ouvrage : « Empire colonial et capitalisme français, histoire d’un divorce », Albin Michel, 1984. Ses réflexions sont reprises dans un excellent ouvrage de Daniel lefeuvre, très facile à lire : « Pour en finir avec la repentance coloniale »,Flammarion, 2006.
@Descartes (désolé de vous répondre ici, la fonction répondre semble ne pas fonctionner ce soir)
« Donner à chaque personne qui n’est pas satisfaite des règles et traditions de son pays le droit de résider régulièrement en France c’est s’exposer à un flux que nous ne pourrions pas gérer. »
Je doute que ce soit démontrable.
« Il serait logique que les secteurs qui profitent de l’immigration contribuent à couvrir ses coûts. »
En bonne logique, si l’arrivée de migrants augmente le revenu d’un individu quelconque, il finira par passer dans une tranche d’imposition plus élevée.
« On pourrait reloger les réfugiés dans les quartiers « bobos », aux frais de la municipalité et inscrire les enfants dans les écoles du quartier… »
Vous voulez dire réquisitionner de force des logements inoccupés ?
« Vous voulez dire qu’il ne faudrait pas donner aux réfugiés ni logement, ni travail, ni allocations, ni rien du tout ?
Les propriétaires donnent rarement leurs logements aux nécessiteux, et les entreprises ne visent pas à donner du travail, mais à produire en employant le personnel adéquat, dans le but de réaliser un profit. Je ne pense pas que qui que ce soit ait l’obligation morale de donner quoi que ce soit.
« Il faudrait les laisser crever dans la rue ? »
Je n’ai pas dit ça. Les choses ne sont pas si désespérées. Ceux qui veulent les aider de manière désintéressée peuvent le faire (et on verra alors si la bonne conscience de gauche dont vous parlez est capable d’une action concrète, et notamment de s’abaisser à des considérations bassement matérialistes impliquant de l’argent…).
Je pense aussi à ces villages français qui se dépeuplent. Il doit y avoir pas mal de propriétés achetables pour une bouchée de pain, de quoi reloger pas mal de monde. Au besoin par un système de prêts remboursables sur une durée raisonnable. Vous n’allez pas balayez l’idée d’un revers de main juste parce qu’elle vient de M. Jean-Pierre Raffarin ?
« Cela me semble un petit peu extrême, non ? »
Au final, pas tant que ça. C’est –me semble-t-il- moins extrême que d’être expulsé en Afrique du Nord et d’avoir à repasser la Méditerranée une seconde fois.
« Dès lors que nous prenons la décision de les laisser rentrer, nous sommes obligés de leur accorder un minimum d’aide. »
Pourquoi ? Sommes-nous les gardiens de nos frères ?
Par ailleurs, vous écrivez dans l’une de vos réponses à Épicure, je cite : « c’est que ces segments du marché du travail étant saturés, les nouveaux arrivants ne pourront trouver du travail qu’en substituant un travailleur français, ce qui a pour double effet de pousser les salaires vers le bas et d’alimenter le chômage. »
Mais je crois que vous êtes victime du sophisme de la masse de travail fixe (https://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme_d'une_masse_fixe_de_travail ). Si votre raisonnement était valide, les nouvelles générations seraient un danger, une concurrence pour leurs ainés, et en bonne logique vous devriez prôner le malthusianisme.
Par ailleurs je vous rappelle que du point de vue d’une entreprise, les salaires sont des coûts, et que si baisse des salaires il y a, elle devrait se répercuter par une baisse du niveau des prix.
@ Jonhathan R. Razorback
[« Donner à chaque personne qui n’est pas satisfaite des règles et traditions de son pays le droit de résider régulièrement en France c’est s’exposer à un flux que nous ne pourrions pas gérer. »][Je doute que ce soit démontrable.]
Au contraire, c’est très facilement « demontrable ». Le fait que donner un droit coûteux alors qu’un très grand nombre de personnes réunissent les conditions pour en bénéficier est de toute évidence un « risque », et il est facile de montrer par un calcul de coût que si ce risque se réalisait nous ne pourrions pas le gérer.
Si vous relisez bien mon paragraphe, vous verrez que mon affirmation porte seulement sur le risque. Je n’ouvre pas de jugement sur la probabilité que ce risque a de se réaliser. Mais n’est ce pas un domaine ou le principe de précaution a quelque vertu ?
[« Il serait logique que les secteurs qui profitent de l’immigration contribuent à couvrir ses coûts. »][En bonne logique, si l’arrivée de migrants augmente le revenu d’un individu quelconque, il finira par passer dans une tranche d’imposition plus élevée.]
Pas nécessairement. Et il n’est pas évident que le passage à une tranche supérieure soit suffisant pour compenser l’avantage qu’il en tire.
[« On pourrait reloger les réfugiés dans les quartiers « bobos », aux frais de la municipalité et inscrire les enfants dans les écoles du quartier… »][Vous voulez dire réquisitionner de force des logements inoccupés ?]
Pourquoi « réquisitionner » ? On peut louer les logements vacants, et charger ces loyers dans les impôts locaux…
[« Vous voulez dire qu’il ne faudrait pas donner aux réfugiés ni logement, ni travail, ni allocations, ni rien du tout ?][Les propriétaires donnent rarement leurs logements aux nécessiteux, et les entreprises ne visent pas à donner du travail, mais à produire en employant le personnel adéquat, dans le but de réaliser un profit. Je ne pense pas que qui que ce soit ait l’obligation morale de donner quoi que ce soit.]
En d’autres termes, vous trouveriez parfaitement normal de refuser aux clandestins la CMU, les HLM, la scolarisation de leurs enfants… puisqu’il n’y a aucune « obligation morale » à le faire, il n’y a aucune immoralité à ne pas le faire, non ?
[Je pense aussi à ces villages français qui se dépeuplent. Il doit y avoir pas mal de propriétés achetables pour une bouchée de pain, de quoi reloger pas mal de monde.]
Oui. Sauf que s’ils se dépeuplent, c’est bien parce qu’il n’y a pas de travail, pas de ressources, pas de services. Si vous croyez que les réfugiés du Soudan vont accepter de vivre dans le « désert français », vous vous trompez…
[Vous n’allez pas balayez l’idée d’un revers de main juste parce qu’elle vient de M. Jean-Pierre Raffarin ?]
Cela me paraît pourtant une raison plus que suffisante. L’expérience de trente ans montre qu’une idée de J-P Raffarin n’est jamais une bonne idée.
[« Dès lors que nous prenons la décision de les laisser rentrer, nous sommes obligés de leur accorder un minimum d’aide. »][Pourquoi ? Sommes-nous les gardiens de nos frères ?]
Non, mais si on ne leur donne rien, nos « frères » le prendront eux-mêmes.
[« c’est que ces segments du marché du travail étant saturés, les nouveaux arrivants ne pourront trouver du travail qu’en substituant un travailleur français, ce qui a pour double effet de pousser les salaires vers le bas et d’alimenter le chômage. »][Mais je crois que vous êtes victime du sophisme de la masse de travail fixe (…). Si votre raisonnement était valide, les nouvelles générations seraient un danger, une concurrence pour leurs ainés, et en bonne logique vous devriez prôner le malthusianisme.]
Pas du tout. D’abord, vous remarquerez que je ne parle pas de la « masse de travail » en général, mais de la « masse de travail non qualifié ». Je ne vois aucun « sophisme » dans l’idée que le nombre d’emplois non-qualifiés tend à se réduire du fait du progrès technologique. Que le rythme de cette réduction puisse varier en fonction d’autres paramètres, je veux bien l’admettre. Mais on ne voit pas à l’horizon une situation économique dans laquelle on se mettrait tout à coup à remplacer massivement les machines par des hommes. Ensuite, et même si ce premier argument n’était pas suffisant, vous noterez que je ne fais pas de la non-croissance des emplois non qualifiés une règle générale : je ne fais que constater une situation hic et nunc. Notre économie détruit chaque jour des emplois non-qualifiés. Peut-être que demain cela changera, et alors je serais le premier à reconnaître que nos capacités d’accueil de migrants s’améliorent. Mais aujourd’hui, ce n’est certainement pas le cas.
[Par ailleurs je vous rappelle que du point de vue d’une entreprise, les salaires sont des coûts, et que si baisse des salaires il y a, elle devrait se répercuter par une baisse du niveau des prix.]
Pas du tout. Une baisse des coûts se répercute d’abord sur les marges des entreprises. Et seulement plus tard – et de manière très atténuée – sur les prix. Et c’est d’autant plus vrai que l’inflation est faible, du fait du phénomène connu sous le nom de « rigidité des prix nominaux à la baisse ».
@Descartes
Sur la question de la civilisation supérieure.
Vous écrivez :
[C’est une question qui m’a toujours passionné. (…) Pourtant, neuf siècles plus tard, alors que les japonais et les arabes faisaient toujours la même chose, l’Europe invente le convertisseur et fabrique l’acier industriellement. (…) Pourquoi cette différence ? Je pense d’abord qu’il y a une singularité dans l’histoire des cultures, et c’est l’héritage greco-latin. (…). C’est la combinaison de ces deux cultures qui a donné à l’Occident cette particularité de ne jamais se répéter, de vouloir toujours aller de l’avant.]
C’est une grande constante chez ceux qui ont des convictions, que d’appeler l’histoire au secours de leurs convictions.
Voila donc résumées vos « observations » et vos « conclusions » :
Si notre civilisation est supérieure c’est parce qu’elle est l’héritage des deux civilisations grecque puis romaine.
Regardons un peu l’histoire de l’avènement de cette civilisation supérieure.
Vous dites que les arabes n’avaient au départ que leurs chameaux et leurs sabres. C’est exact, c’est un peu le propre des conquérants qui arrivent à leurs fins que d’avoir des armes et des armées supérieures à celles de leurs cibles.
Le « génie » d’un conquérant c’est de sentir ce qu’il va conserver de meilleur chez ceux qu’il a soumis. Les Romains, par exemple, avec leurs lances, leur organisation militaire et leurs bateaux de guerre, ont soumis les Grecs. Ensuite, libres ou esclaves, les Grecs sont devenus les artistes, les intellectuels de l’empire. Ils ont ainsi continué d’être les précepteurs des enfants des classes dirigeantes romaines pendant plusieurs siècles, bien après que les cités grecques aient été intégrées dans l’empire.
Pendant les deux premiers siècles de notre ère, dans un empire romain en paix, les érudits, les savants, les chercheurs, parmi lesquels des génies, sont venus de tout l’empire, de tous les peuples soumis, mais sont venus aussi des étrangers attirés par l’opulence de l’empire.
Toute cette élite intellectuelle a su assimiler puis approfondir les savoirs et les techniques à leur disposition : la philosophie grecque mais aussi l’astronomie égyptienne, la médecine perse, et même la charrue gauloise !
Le médecin chirurgien « Romain » Claude Galien, né au IIème siècle à Pergame (actuelle Turquie), se perfectionne et étudie à Alexandrie, revisite toutes les connaissances de ses grands prédécesseurs, que ce soient les écrits du Grec Hippocrate ou ceux des médecins de l’Égypte ancienne, ceux des médecins Hébreux et même ceux des voisins Perses.
De là, il s’installe dans d’autres villes de l’empire, et développe ses propres travaux, en soignant les blessures des gladiateurs et en disséquant les corps de ces hommes en bonne santé, morts au combat. Ses recherches et ses découvertes sont tellement impressionnantes que personne ne parviendra à le contredire jusqu’à la renaissance.
Les conquérants arabes ont également installé la paix à l’intérieure de leur empire et ont suivi le même schéma :
Pendant l’âge d’or islamique (Xème et XIème siècle), les musulmans créent 4 grandes écoles : L’école Perse, l’école du Caire, l’école Andalouse et l’école de Kairouan.
Là ils conservent traduisent et enrichissent les connaissances des Grecs et des Romains, connaissances conservées par l’empire romain d’orient de Constantinople qui venait de tomber sous [leurs sabres et leurs chameaux]. Ils conservent traduisent et enrichissent aussi des savoirs hébreux et perses et font de même avec ce qu’ils trouvent dans l’Andalousie chrétienne.
Dans un précédent débat sur l’école, sur ce blog, vous nous avez rappelé la métaphore des nains sur les épaules des géants. (Métaphore qui est d’ailleurs bien antérieure à Isaac Newton, mais ce n’est pas le propos)
Cette métaphore nous dit que les chercheurs, les penseurs, les génies d’une époque, et je reprends votre phrase de mémoire, « doivent d’abord assimiler les connaissances de leurs prédécesseurs avant de se hisser sur leurs épaules, pour voir plus loin ».
Et bien, selon ce même principe de la transmission et de l’amélioration continue des connaissances et des techniques, il y a peu de temps, les lumières puis la révolution industrielle ont propulsé l’Occident dans un gigantesque bon en avant, qui a effectivement laissé tous les autres à la traîne.
Mais qui peut croire que l’histoire va s’arrêter là.
Prenons par exemple un domaine qui vous est cher, l’énergie et un thème qui vous fait bondir, la transition énergétique.
Des chercheurs (occidentaux, Français et Allemands) réussissent aujourd’hui en laboratoire à faire que des panneaux photovoltaïques rendent sous forme d’électricité 50% de l’énergie lumineuse reçue du soleil. A ce jour les panneaux sur le marché ne dépassent pas 12 voire 15% de rendement.
Sachant que des centrales solaires de dimension significatives sont déjà installées dans le monde.
Sachant que les investissements dans le solaire, ramenés à la puissance installée (puissance installée / dollar investi) sont déjà quasi compétitifs avec le gaz, le charbon et le nucléaire.
Et sachant par ailleurs que les Chinois, très gourmands en énergie, puisqu’ils sont devenus désormais la zone industrielle du monde, font tout pour rester les leaders mondiaux dans la production de panneaux solaires,
Il y a fort à parier que, très prochainement, les Chinois fabriqueront à l’échelle industrielle ces panneaux de nouvelle génération, à fort rendement.
Et ils en équiperont le monde entier.
Alors, l’Asie et aussi le reste du monde disposeront d’une énergie abondante, peu chère et peu polluante qui leur ouvrira de nouvelles opportunités.
Tout se passe comme si le « nouvel empire romain », c’était le monde « globalisé ».
Dans cette histoire nous jouons le rôle du Grec qui sait et qui transmet, le reste du monde joue le rôle des Romains qui étudient nos connaissances acquises, se hissent sur nos épaules pour nous dépasser.
Et le tout, presque pacifiquement, puisque l’Occident va à la rencontre du reste du monde pour lui vendre ses savoirs et ses produits.
Tous les jours, de nouveaux « nains » se juchent sur les épaules des « géants » qui les ont précédés.
La métaphore continue d’être actuelle et elle se démultiplie avec la mondialisation et la libre circulation des savoirs, des idées, des produits … et des hommes.
Ce que vous dites être « la civilisation supérieure » est une transition vers une nouvelle civilisation qui est presque déjà là et, cette fois-ci, semble être ni occidentale ni autre chose, mais universelle.
@ v2s
[@Descartes Sur la question de la civilisation supérieure.]
Notez que c’est vous qui libellez ainsi la « question ». Je n’ai jamais parlé de « civilisation supérieure ». J’ai simplement expliqué que certaines civilisations se sont arrêtés à certains stades de leur développement pour répéter les mêmes schémas, alors que la civilisation occidentale est dans une logique de recherche et de changement permanent. Je vous laisse la responsabilité de croire que le mouvement serait « supérieur » à la stabilité.
[C’est une grande constante chez ceux qui ont des convictions, que d’appeler l’histoire au secours de leurs convictions.]
Vous dites ça par expérience personnelle ?
[Voila donc résumées vos « observations » et vos « conclusions » : Si notre civilisation est supérieure c’est parce qu’elle est l’héritage des deux civilisations grecque puis romaine.]
Au risque de me répéter : je n’ai jamais utilisé le mot « supérieur », ni toute autre expression qui s’y rapproche. Alors, ce ne sont pas mes conclusions que vous résumez, ce sont les vôtres. C’est vous, pas moi, qui jugez notre civilisation « supérieure », là ou je me contente de souligner une différence.
[Regardons un peu l’histoire de l’avènement de cette civilisation supérieure.]
Le mot « supérieur » semble vous obséder, dites donc…
[Vous dites que les arabes n’avaient au départ que leurs chameaux et leurs sabres.]
Non, moi je n’ai pas dit ça. Je viens de faire une simple vérification, et le mot « chameau » ne figure pas dans mes écrits. Vous devez confondre avec un commentaire de Gérard Couvert, qui fait bien référence « aux chameaux et aux sabres ».
[C’est exact, c’est un peu le propre des conquérants qui arrivent à leurs fins que d’avoir des armes et des armées supérieures à celles de leurs cibles.]
C’est une condition nécessaire, mais pas suffisante. Pour être un « conquérant », il faut un peu plus que ça. La conquête demande bien plus qu’une victoire militaire, elle demande la capacité de gouverner le territoire pris, de constituer des institutions, d’établir des normes. Rome a conquis la gaule. Les barbares n’ont pas conquis Rome.
[Le « génie » d’un conquérant c’est de sentir ce qu’il va conserver de meilleur chez ceux qu’il a soumis.]
Tout à fait. Mais cela suppose d’être conscient qu’il y a des choses « meilleures » chez les autres, qui méritent d’être conservées. Et cela suppose, comme le dit nationalistejacobin, une curiosité pour l’autre. Cette curiosité n’est pas l’apanage de toutes les civilisations : Marco Polo est le pur produit d’une Europe héritière de Grèce et de Rome. Mais ou est le Marco Polo chinois ? Pourquoi ne trouve-t-on pas un marchand chinois qui soit venu en Europe et qui, revenu chez lui, ait publié un livre racontant les étranges coutumes des terres qu’il avait visité ?
[Les conquérants arabes ont également installé la paix à l’intérieure de leur empire et ont suivi le même schéma : Pendant l’âge d’or islamique (Xème et XIème siècle), les musulmans créent 4 grandes écoles : L’école Perse, l’école du Caire, l’école Andalouse et l’école de Kairouan. Là ils conservent traduisent et enrichissent les connaissances des Grecs et des Romains, connaissances conservées par l’empire romain d’orient de Constantinople qui venait de tomber sous [leurs sabres et leurs chameaux]. Ils conservent traduisent et enrichissent aussi des savoirs hébreux et perses et font de même avec ce qu’ils trouvent dans l’Andalousie chrétienne.]
Beaucoup moins qu’on ne l’a dit, en fait. L’âge d’or islamique est ce qu’on appellerait aujourd’hui une période de rattrapage. Les arabes sont sortis de leurs déserts, avec leurs sabres et leurs chameaux, et on incorporé l’héritage gréco-latin, hébraïque, perse, égyptien et indien. Mais ça s’arrête là – et c’est d’ailleurs pourquoi l’age d’or auquel vous faites référence est si court. Les écoles islamiques incorporent les savoirs, mais n’en créent pas beaucoup. L’astronomie arabe codifie les cieux, mais elle n’invente ni la lunette, ni l’échappement pendulaire. Les mathématiques arabes compilent, mais n’inventent guère de nouveaux théorèmes, de nouvelles théories.
[Des chercheurs (occidentaux, Français et Allemands) réussissent aujourd’hui en laboratoire à faire que des panneaux photovoltaïques rendent sous forme d’électricité 50% de l’énergie lumineuse reçue du soleil. A ce jour les panneaux sur le marché ne dépassent pas 12 voire 15% de rendement.]
Franchement, je ne connais aucune équipe qui ait aujourd’hui annoncé un rendement de 50%. Un tel rendement me semble par ailleurs impossible sans violer le deuxième principe de la thermodynamique. Mais admettons le chiffre pour le besoin de la démonstration :
[Sachant que des centrales solaires de dimension significatives sont déjà installées dans le monde. Sachant que les investissements dans le solaire, ramenés à la puissance installée (puissance installée / dollar investi) sont déjà quasi compétitifs avec le gaz, le charbon et le nucléaire.]
Parler de « investissement ramené à la puissance installée » est d’ailleurs trompeur, puisque pour la même « puissance installée » un panneau solaire produit cinq fois moins qu’une centrale thermique. Encore une fois, je suis obligé de vous demander vos sources. Il faudra m’expliquer pourquoi, si les investissements dans le solaire « sont quasi compétitifs » avec le gaz, le charbon et le nucléaire, on est toujours obligé de subventionner lourdement le solaire – on rachète aujourd’hui le kwh solaire entre 250 et 500 € du MWh contre 42 € pour le nucléaire – pour que les projets se fassent.
[Et sachant par ailleurs que les Chinois, très gourmands en énergie, puisqu’ils sont devenus désormais la zone industrielle du monde, font tout pour rester les leaders mondiaux dans la production de panneaux solaires,]
Ils ne font rien du tout : les chinois fabriquent beaucoup de panneaux solaires, mais n’en installent guère chez eux. Et pour une raison très simple : le solaire n’est pas économiquement rentable. Alors pourquoi en fabriquent-ils ? Pour alimenter le marché des pays développés, qui est solvable grâce aux subventions massives. Dès que les pays européens ont commencé à fermer le robinet à subventions, l’industrie chinoise du panneau solaire s’est effondrée. S’il vous plaît, informez-vous mieux…
[Il y a fort à parier que, très prochainement, les Chinois fabriqueront à l’échelle industrielle ces panneaux de nouvelle génération, à fort rendement.]
Vous voulez parier combien ? Je veux bien vous parier qu’un panneau au rendement de 50% ne sera pas produit en Chine dans les deux ans qui viennent. D’accord ?
[Alors, l’Asie et aussi le reste du monde disposeront d’une énergie abondante, peu chère et peu polluante qui leur ouvrira de nouvelles opportunités.]
Surtout la nuit… ou par temps couvert…
[Tout se passe comme si le « nouvel empire romain », c’était le monde « globalisé ».]
Ah bon ? Pourriez-vous m’indiquer ou se trouve le Code Civil de ce « nouvel empire romain » ? Vous vous laissez emporter par votre enthousiasme, sans vous rendre compte que votre analogie n’a ni queue ni tête. L’empire romain ne s’est pas contenté d’incorporer l’héritage grec. Il le prolonge par une création technologique, mais aussi politique et institutionnelle sans parallèle dans l’histoire. C’est exactement le contraire dans le « monde globalisé », qui se contente de copier des techniques mais avec une créativité politique et institutionnelle d’une faiblesse à pleurer. Les grecs inventent la démocratie aristocratique, les romains la République puis l’Empire. Dites-moi, quelle est la forme politique qu’invente votre « nouvel empire romain » ?
[Dans cette histoire nous jouons le rôle du Grec qui sait et qui transmet, le reste du monde joue le rôle des Romains qui étudient nos connaissances acquises, se hissent sur nos épaules pour nous dépasser.]
Ne vous faites pas d’illusions, ils ne sont pas près de nous « dépasser ». Je vous l’ai déjà dit, mais je vais vous le répéter : il y a trente ans, c’était le Japon qui allait conquérir le monde, et le XXIème siècle allait être, promis juré, japonais. Tout le monde se pâmait devant le « toyotisme » et autres gadgets du même type. Aujourd’hui, c’est la Chine qui excite tous les fantasmes.
[Tous les jours, de nouveaux « nains » se juchent sur les épaules des « géants » qui les ont précédés.]
L’ennui c’est qu’ils ont une certaine tendance a regarder en arrière.
[La métaphore continue d’être actuelle et elle se démultiplie avec la mondialisation et la libre circulation des savoirs, des idées, des produits … et des hommes.]
Vous n’avez pas songé à faire une carrère de prêcheur ?
[Ce que vous dites être « la civilisation supérieure » (…)]
Encore une fois, c’est vous qui le dites, pas moi.
Descartes, vous dites :
[Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche !]
Si je dis que les pays émergents et en particulier la Chine ont accès, comme tout le monde, à toute la connaissance disponible, et que de ce fait ils étudient, améliorent et donc dépassent les avancées technologiques qui ont cours en occident, tout ce que vous trouvez à dire c’est :
[Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche !]
Ou bien:
[Vous n’avez pas songé à faire une carrière de prêcheur ?].
Objectivement, mon argumentation peut ne pas vous convenir, mais qu’est-ce que la fin du monde a à voir avec ça.
Vous m’avez déjà traité à plusieurs reprises de millénariste.
Ce genre de réponses, faites pour humilier, déconsidérer un interlocuteur qui a l’outrecuidance de ne pas vous idolâtrer aveuglément, sont tout simplement des attaques « ad hominem » que vous dites pourtant bannir sur votre blog.
Puisque vous modérez le site, je ne peux même pas vous répondre que vous n’êtes qu’un orgueilleux, à l’ego démesuré, imbu de sa personne, qui ne recherche que l’approbation et l’admiration d’une poignée convertis.
S’il vous venait à l’idée de vous excuser, n’hésitez pas à le faire.
@ v2s
[(…), tout ce que vous trouvez à dire c’est : « Repentez vous ! Repentez-vous, la fin du monde est proche ! » ou bien « Vous n’avez pas songé à faire une carrière de prêcheur ? ». Objectivement, mon argumentation peut ne pas vous convenir, mais qu’est-ce que la fin du monde a à voir avec ça.]
Quand j’aurais vu votre argumentation, je pourrais vous dire si elle me convient ou pas. Mais pour le moment, je n’ai pas vu l’ombre d’un argument. Vous vous contentez de répéter sur le ton de la prophétie des vaticinations du genre « une nouvelle ère s’est déjà ouverte » ou « la civilisation occidentale aura servi de base, de marchepied, à une nouvelle civilisation, universelle ». Si vous récitez un prêche, ne vous étonnez pas qu’on vous prenne pour un prêcheur…
[Ce genre de réponses, faites pour humilier, déconsidérer un interlocuteur qui a l’outrecuidance de ne pas vous idolâtrer aveuglément,]
Caliméro, c’est bien toi ?
[sont tout simplement des attaques « ad hominem » que vous dites pourtant bannir sur votre blog.]
Absolument pas. C’est votre discours que je critique, pas votre personne. Je vous le répète : si vous jouez les prophètes, ne soyez pas étonné si vos prophéties sont accueillies avec une certaine ironie.
[Puisque vous modérez le site, je ne peux même pas vous répondre que vous n’êtes qu’un orgueilleux, à l’ego démesuré, imbu de sa personne, qui ne recherche que l’approbation et l’admiration d’une poignée convertis.]
Pourquoi ne le pourriez-vous pas ? Ne pensez pas que je vais vous sauver du ridicule en censurant ce message. Et j’ajoute que vous m’insultez en prétendant que je pourrais « modérer » votre message parce qu’il dirait des choses désagréables. Je tiens ce blog depuis des années, et pas une seule fois je n’ai utilisé mon pouvoir de modérateur pour faire taire une critique, même lorsqu’elles étaient plus fortes et surtout plus fondées que celle qui précède.
[S’il vous venait à l’idée de vous excuser, n’hésitez pas à le faire.]
M’excuser de quoi ? Si quelqu’un doit des excuses ici, ce n’est pas moi. Mais je note en tout cas la violence de votre réaction. Il semble assez clair que vous ne supportez pas qu’on puisse douter de vos évidences prophétiques. C’est bon à savoir.
Je lis assez régulièrement tes écrits. Le plus souvent, j’apprécie le style et le fond. Mais, là, je suis “étonné”.
“Si nous sommes riches et libres, c’est par le travail, l’effort, le sacrifice des générations qui nous ont précédé”. Oups !
Peut-être que la colonisation – et maintenant la néo colonisation – sont aussi une bonne source de cette richesse, non ?
De grandes fortunes ne se sont elles pas construites à partir de l’esclavage avant d’implanter des industries en France ?
D’autres l’ont été ou le sont encore par une immigration provoquée.Qui a fait venir des travailleurs d’autres pays d’Europe ou d’Afrique pour construire les immeubles ou les routes il y a 50 ans ? Aujourd’hui, qui fait le ménage dans les bureaux ? Qui fait la plonge dans les restaurants ?
Bien sur, il serait stupide de croire que la France et plus largement l’Europe peut accueillir tous les malheurs de la terre.
Mais plutôt que d’envoyer des militaires et des armes (qui parfois, comme celle livrées en Libye se retournent contre ces militaires), une vraie coopération ne serait elle pas préférable ?
Et puis, inversons un instant les rôles. Si une guerre civile faisait rage dans mon pays ou, si les ressources alimentaires étaient devenues si rares que je vois des enfants mourir chaque jour, ou encore si le climat était tant déréglé que la saison des pluies n’arrivait plus que tous les 5 ans, quelle option aurais je ?
Enfin, sommes nous tous riches en France ou près de 8 millions d’individus vivent sous le seuil de pauvreté ?
Je soumets ces quelques questions à ta sagacité.
Fraternellement
Patrice
@ Patrice
[« Si nous sommes riches et libres, c’est par le travail, l’effort, le sacrifice des générations qui nous ont précédé ». Oups ! Peut-être que la colonisation – et maintenant la néo colonisation – sont aussi une bonne source de cette richesse, non ?]
Beh… en fait pas tant que ça. J’ai cité dans un autre commentaire le livre de Jacques Marseille et celui de Daniel Lefeuvre qui montrent chiffres à l’appui que les colonies n’ont pas enrichi la métropole tant que ça, particulièrement vers la fin du XIXème siècle. D’ailleurs, la période la plus faste de l’économie française au cours du siècle dernier s’ouvre précisément… avec la fin de l’empire colonial !
Un autre argument en faveur de cette thèse est le fait que plusieurs pays européens parmi les plus riches (l’Allemagne et la Suède, par exemple) ont disparu de la scène coloniale depuis belle lurette, et cela ne les a pas empêché de s’enrichir. Les empires coloniaux donnent certainement des avantages stratégiques et géopolitiques, mais en termes économiques ils semblent avoir couté autant qu’ils n’ont rapporté, surtout sur la dernière période.
[De grandes fortunes ne se sont elles pas construites à partir de l’esclavage avant d’implanter des industries en France ?]
Pas que je sache. Vous pensez à qui, concrètement ?
[D’autres l’ont été ou le sont encore par une immigration provoquée. Qui a fait venir des travailleurs d’autres pays d’Europe ou d’Afrique pour construire les immeubles ou les routes il y a 50 ans ? Aujourd’hui, qui fait le ménage dans les bureaux ? Qui fait la plonge dans les restaurants ?]
Je ne saisis pas bien le rapport. D’abord, ces « travailleurs d’autres pays », personne ne les a forcés. Je crois savoir même qu’ils étaient ravis de venir chez nous et de partager un peu de la richesse produite en France. Car eux aussi ont bénéficié grâce à la croissance française de conditions de vie qu’ils n’auraient pas eu dans leur pays d’origine. Sans quoi, ils ne seraient pas venus.
Ensuite, je vois mal en quoi les ouvriers français ont gagné avec le fait qu’on ait « fait venir » des travailleurs d’autres pays. Ces travailleurs, on les a fait venir pour faire pression à la baisse sur les salaires, qui avaient une certaine tendance à s’emballer avec la demande massive de main d’œuvre pendant les « trente glorieuses ». Difficile donc de dire que cette main d’œuvre a « enrichi » les français. Elle a par contre « enrichi » un certain nombre de capitalistes français, mais ça c’est une autre histoire.
[Mais plutôt que d’envoyer des militaires et des armes (qui parfois, comme celle livrées en Libye se retournent contre ces militaires), une vraie coopération ne serait elle pas préférable ?]
C’est quoi pour vous une « vraie » coopération ? Le problème que vous posez est intéressant. Mais si vous essayez de définir cette « coopération » vous allez très vite vous apercevoir qu’elle implique une certaine mesure de « recolonisation ». Parce que ce qui manque à ces pays, ce n’est pas seulement du capital, des usines, des techniciens, ni même des instituteurs. Ce qui manque, c’est ce « capital immatériel » de discipline social, de traditions, de règles, de savoirs qui fait qu’un pays comme l’Allemagne, virtuellement rasé après 1945, est redevenu une puissance économique vingt ans après, alors que des pays africains dix fois plus riches en matières premières, avec un climat plus accueillant et une population plus jeunes n’arrive pas à décoller.
[Et puis, inversons un instant les rôles. Si une guerre civile faisait rage dans mon pays ou, si les ressources alimentaires étaient devenues si rares que je vois des enfants mourir chaque jour, ou encore si le climat était tant déréglé que la saison des pluies n’arrivait plus que tous les 5 ans, quelle option aurais je ?]
La même qu’eux, probablement. C’est pourquoi je m’interdis tout jugement moral sur les choix des migrants. La question n’est pas de savoir qui a raison et qui a tort, qui est dans le vrai et qui ne l’est pas. C’est en ce sens que je dis que la politique est par essence tragique : elle ne consiste pas à faire ce qui est « bon », mais à choisir parmi les possibles la moins mauvaise solution. Même lorsqu’elle est terrible, injuste, immorale.
Croyez-vous que je n’aurais pas envie, moi aussi, d’accueillir tous les malheureux de la terre ? Bien sur que oui. Mais j’essaye de me placer non pas du point de vue du militant de RESF, mais de celui de l’homme d’Etat qui doit faire un choix politique.
[Enfin, sommes nous tous riches en France ou près de 8 millions d’individus vivent sous le seuil de pauvreté ?]
Oui, nous sommes « raisonnablement riches ». N’oubliez pas que le « seuil de pauvreté » est un seul relatif. Il correspond à une fraction du revenu médian. En d’autres termes, il y a des somalis qui vivent dans la rue et ne mangent pas à leur faim et sont pourtant au dessus du seuil de pauvreté, alors qu’un français peut être sous le seuil de pauvreté tout en bénéficiant d’une maison en dur et des calories indispensables.
Le nombre de personnes sous le seuil de pauvreté mesure en fait la forme de la pyramide de revenus. Plus elle est large à la base, plus vous aurez de gens sous le seuil de pauvreté.
[Fraternellement]
Egalement… 😉
Bonjour Descartes,
Une dernière remarque : à déconnecter les questions les unes des autres, on arrive à démontrer tout … et son contraire. Peut-être pourriez vous (puisque VOUS semblez y tenir) vous inspirer de l’infiniment grand et l’infiniment petit.
Un peu comme si mon médecin traitait indépendamment mes douleurs au genou, celles de ma hanche, mes crises de sciatique, … perdant de vue la maladie dont je souffre, l’arthrose.
Il n’est pas nécessaire que vous preniez la peine de répondre à ce dernier message.
Je ne sais plus si je peux vous dire fraternellement … 🙁
@ Patrice
[Une dernière remarque : à déconnecter les questions les unes des autres, on arrive à démontrer tout … et son contraire. Peut-être pourriez vous (puisque VOUS semblez y tenir) vous inspirer de l’infiniment grand et l’infiniment petit.]
J’avoue que je n’ai rien compris à votre message. Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement…
[Je ne sais plus si je peux vous dire fraternellement … :-(]
??????????????
Contrairement à toi, je ne pense pas qu’une thèse révisionniste laissant à penser que les colons étaient des touristes soit crédible.
La famille Grou de Nantes, par exemple, ne dira pas le contraire (voir http://1libertaire.free.fr/Esclavage02.html).
Je ne parle même pas du baron Seillieres et du groupe WENDEL (voir http://the-dissident.eu/6604/esclavage-peut-on-reparer-le-passe/)
Pour ce qui est de l’Allemagne, il est aisé d’être un “pays riche” avec des travailleurs pauvres.Même le Figaro qui est loin d’être un journal révolutionnaire titre le 19 février dernier “Allemagne: la pauvreté à son plus haut niveau”
Il faudra par exemple demander aux immigrés indochinois si ils sont venus de leur plein gré.
Et quand ce n’est pas la force, c’est par la paupérisation des populations dans les colonies que les Sociétés peuvent, avec l’aide de l’armée, vérifier que la dentition de leur futurs salariés est suffisamment saine pour leur garantir une main d’œuvre robuste et corvéable à merci !!!
Seul le capital en a tiré profit. Surement. C’est probablement ça qu’il faudrait abolir, le revenu de l’argent.
Mais à quoi peut on mesurer la richesse d’un pays ? Le PIB par habitant ? C’est le Luxembourg qui arrive en tête en Europe et cet “état” ne produit rien si ce n’est des présidents de commission européenne.
Fraternellement. :-((
@ Patrice
[Contrairement à toi, je ne pense pas qu’une thèse révisionniste laissant à penser que les colons étaient des touristes soit crédible.]
Moi non plus. Mais la question n’était pas de savoir si la colonisation a enrichi les colons, mais si la colonisation a enrichi la métropole. Ce qui n’est pas du tout la même chose. L’étude des flux économiques montre que la population métropolitaine a tiré un avantage relativement maigre de la colonisation. Ce qui n’empêche pas que certains colons se sont, eux, beaucoup enrichi.
[La famille Grou de Nantes, par exemple, ne dira pas le contraire (voir http://1libertaire.free.fr/Esclavage02.html). Je ne parle même pas du baron Seillieres et du groupe WENDEL (voir http://the-dissident.eu/6604/esclavage-peut-on-reparer-le-passe/)]
Je ne vois pas le rapport. De quoi on parle ? De la colonisation ou de la traite négrière ?
[Pour ce qui est de l’Allemagne, il est aisé d’être un “pays riche” avec des travailleurs pauvres. Même le Figaro qui est loin d’être un journal révolutionnaire titre le 19 février dernier “Allemagne: la pauvreté à son plus haut niveau”]
Encore une fois, je ne vois pas le rapport. La pauvreté est une notion relative, et on vit mieux en tant que « travailleur pauvre » en Allemagne qu’en tant que « travailleur moyen » au Bangladesh. La question ici était que la richesse de l’Allemagne s’est faite essentiellement par la valeur produite en Allemagne, et non par un quelconque « pillage » des ressources d’autres pays. Il n’y a donc pas de « dette » qui obligerait l’Allemagne à recevoir sur son sol des immigrants des pays qu’elle aurait soi-disant « pillé ».
[Il faudra par exemple demander aux immigrés indochinois si ils sont venus de leur plein gré.]
Vous leur avez demandé ? Qu’est ce qu’ils vous ont répondu ?
[Et quand ce n’est pas la force, c’est par la paupérisation des populations dans les colonies que les Sociétés peuvent, avec l’aide de l’armée, vérifier que la dentition de leur futurs salariés est suffisamment saine pour leur garantir une main d’œuvre robuste et corvéable à merci !!!]
Attendez : vous me dites d’abord que les « immigrés indochinois » ont été obligés de venir en France, et ensuite que certains, qui auraient voulu venir, n’ont pas été admis parce qu’ils n’auraient pas eu la dentition adéquate. Alors, étaient-ils volontaires, oui ou non ?
La référence à la « paupérisation » est une construction intellectuelle. Les populations en question n’ont pas attendu la venue du colonisateur pour être pauvres. L’idée d’une Algérie ou d’une Indochine riche et prospère avant la colonisation qui aurait été on ne sait comment « paupérisée » par la venue du colonisateur n’a ni queue ni tête. Les gens crevaient la faim dans les Aurès et dans les plaines du Mékong bien avant l’arrivée des français. Et la présence de ceux-ci a donné l’opportunité – du moins à ceux qui avaient la bonne dentition – de ne plus crever de faim en allant travailler chez le colon. Qui lui aussi a profité de l’occasion pour faire beaucoup d’argent.
[Seul le capital en a tiré profit.]
Ca se discute. Quand le colonisateur est parti, il y avait bien plus d’écoles, d’hôpitaux, de chemins de fer et de centrales électriques que lorsqu’il est arrivé. Beaucoup plus aussi d’hommes et de femmes qui savaient lire et écrire. Je pense que votre vision est légèrement schématique. Relisez le « Manifeste du Parti Communiste » si vous ne me croyez pas… vous verrez que déjà au temps de Marx on était conscient que la construction capitaliste
[C’est probablement ça qu’il faudrait abolir, le revenu de l’argent.]
C’est un petit peu rapide. Mettez-vous à la place du prêteur. Pourquoi prêterait-il si cela ne lui rapportait rien ? Pour le dire autrement, imaginez-vous que je possède un appartement. Je suis prêt à le mettre à la disposition d’un locataire contre rémunération – rémunération qui n’est que le « revenu de l’argent » que vaut l’appartement. Mais si le loyer était nul, pourquoi irais-je le louer, plutôt que de le laisser vide ?
Lorsque je prête de l’argent ou je loue un bien, je renonce en fait à les utiliser moi-même. Ce renoncement a un prix.
Bonjour,
Je lisais un article sur le sujet dans le nouvel obs où deux “intellectuels” plaident pour ouvrir grand les frontières :
http://bibliobs.nouvelobs.com/idees/20150626.OBS1607/soyons-realistes-10-raisons-d-ouvrir-les-frontieres.html
Rien que le premier argument “qu’on ouvre les frontières ou pas ça changera pas le flux de migrants” parait assez ahurissant. En gros, qu’un migrant ai à risquer sa vie, à filer toutes ces économies à des passeurs, dans l’espoir de vivre en Europe au ban de la société, ou qu’il ai juste à prendre un billet d’avion pour être accueilli les bras grands ouverts et profiter de toutes les prestations sociales, ça changera en rien son choix de partir ou non.
Pensez-vous qu’ils croient vraiment ce qu’ils écrivent ? Pourtant ces gens-là semblent passer une bonne partie de leur journée à réfléchir sur le sujet, comment qu’ils font pour pondre ce genre de raisonnement ?
@ Timo
[Je lisais un article sur le sujet dans le nouvel obs où deux “intellectuels” plaident pour ouvrir grand les frontières : http://bibliobs.nouvelobs.com/idees/20150626.OBS1607/soyons-realistes-10-raisons-d-ouvrir-les-frontieres.html%5D
L’avantage des articles comme celui est qu’il vous permet de comprendre pourquoi la voix des « intellectuels » français est devenue inaudible. Dans cette argumentation, seuls les migrants existent. La politique migratoire ne doit être construite qu’en pensant à eux. La société d’accueil, elle, n’existe pas. Les problèmes que l’immigration pose aux habitants déjà installés – qu’ils soient nationaux ou étrangers d’ailleurs – ne méritent même pas une virgule. Bien sûr, on peut toujours se faire l’avocat de l’ouverture des frontières quand on a un emploi supérieur et qu’on habite dans un joli quartier de Paris…
[Pensez-vous qu’ils croient vraiment ce qu’ils écrivent ? Pourtant ces gens-là semblent passer une bonne partie de leur journée à réfléchir sur le sujet, comment qu’ils font pour pondre ce genre de raisonnement ?]
Vous sous-estimez la capacité de l’être humain de croire n’importe quoi lorsque ce n’importe quoi va dans le sens de ses intérêts et celui de leur classe. Il ne faut pas non plus négliger le fait qu’en proposant une politique dégoulinante de bonnes intentions et qui n’a aucune chance d’être mise en œuvre, ils se donnent bonne conscience pour pas cher…
@Descartes,
bon, je vais y aller de ma citation, et celle-là aussi est éculée…
Je suis loin d’être un adepte de JJRousseau, mais sur ce coup-là, dans “l’Emile”, il avait vu juste:
“Défiez vous de ces cosmopolites qui vont chercher loin dans leurs livres des devoirs qu’ils dédaignent d’accomplir chez eux. Tel philosophe aimera les Tartares pour se dispenser d’avoir à aimer ses semblables”.
Quand j’ai lu cette citation, il y a une dizaine d’années, j’en ai pas cru mes yeux, tellement elle me paraissait décrire la quasi-totalité de la gauche actuelle…Gauche qui se réclame sans cesse de Rousseau!
J’avais cru à un “fake” comme ceux qu’on trouve dans le web, tellement elle était éclairante. Voilà pourquoi la gauche est, comme votre fille, muette…
@NJ, Descartes, BolchoKek
Sur la [haine de soi] , [la concurrence victimaire] [la violence et la brutalité qui a accompagné (les) conquête(s)] ainsi que sur le perdant devenu [saint laïque, dont la supériorité morale est incontestable]
Tout d’abord, et j’espère qu’on me pardonnera cette initiative, étant un peu lassé de dérouler à l’envers une soixantaine de réactions, je prends la liberté de remonter en tète des réactions, ce débat qui s’allonge (s’il s’allonge c’est qu’il est intéressant).
Alors il me semble que nous pouvons être d’accord pour dire que, parmi les peuples qui constituent l’espèce humaine, d’hier comme d’aujourd’hui, il est bien difficile d’avoir une vision manichéenne, de chercher à discerner les bons des méchants. Et, bien sûr, les perdants ne sont pas des saints.
Je voudrais quand même faire remarquer à Descartes et à NJ que ce n’est pas non plus de la « haine de soi » que de faire le constat que de nombreux peuples qui ne demandaient rien à l’occident, se sont vu décimés, dépossédés de leur terre, de leur langue de leur culture quand ils n’étaient pas tout simplement rayés de l’espèce humaine.
Ce qui est gênant dans votre recherche des causes qui ont poussé les occidentaux [à aller toujours de l’avant], (à savoir, selon Descartes notre héritage greco-romain) c’est qu’à aucun moment vous ne semblez avoir le moindre doute sur le bilan positif de « notre » conquête idéologique, militaire, économique du reste du monde.
Vous dites NJ, que nous aurions, nous et pas les autres, une immense curiosité qui nous pousse à aller à la découverte des autres.
J’ai une lecture un peu différente :
Selon les connaissances actuelles de la science, et ainsi qu’on l’enseigne au collège, il n’y a qu’une seule humanité.
Homo sapiens, est un mutant génial.
Lorsque notre espèce a quitté son Afrique d’origine, elle était animée de quelques motivations fortes, l’instinct de survie d’abord, mais aussi de toutes sortes d’autres qualités, d’autres moteurs, d’autres pulsions :
La curiosité, la soif de comprendre, de connaître, et aussi la cupidité, la soif de pouvoir, de domination.
Les ancêtres de tous les peuples primitifs d’Amérique ont mis les pieds sur leur continent il y 25 à 30000 ans seulement. Le peuplement de l’Océanie puis des îles du Pacifique s’est fait également progressivement sur plusieurs dizaines de milliers d’année. Ce qui prouve la curiosité et la soif de conquêtes de ces peuples.
La colonisation du monde, comme les progrès culturels qui l’ont accompagnée, ont toujours été un mélange d’amélioration continue, de trouvailles, de découvertes, d’explorations téméraires, de conquêtes sanguinaires, de peuples vainqueurs et de peuples soumis.
Pour le meilleur comme pour le pire, l’homme, ce mutant génial, sait accumuler et transmette ses connaissances et ses compétences, de sorte que ses progrès ont toujours été exponentiels.
Il y a quelques siècles, autant dire hier, à l’échelle de la présence de l’homme sur terre, les habitants d’un territoire correspondant à l’Europe ont pris sur le reste du monde un avantage technologique, économique militaire qui, compte tenu du caractère exponentiel de la courbe du progrès, n’a laissé aucune chance au reste du monde. La suite on la connaît : colonisation, christianisation, prosélytisme, politisation, acculturation puis décolonisation et pour finir mondialisation.
Les autres, tous les autres, ont eu le choix suivant : luter et disparaître à petit feu face au rouleau compresseur occidental, c’est le cas des aborigènes d’Amérique, d’Australie, de tous les peuples dits « primitifs » ou alors se fondre dans la masse de la société occidentale mondialisée, avec des soubresauts et des affrontements et c’est le cas de la Chine, des pays émergeants, du monde arabe et de l’Afrique.
Aucune haine de soi, ce que nous avons fait, les autres nous l’auraient sans doute fait s’ils avaient eu la chance de faire ce bon technologique avant nous.
Reste maintenant à assumer le passé et à gérer le coup suivant.
@ v2s
[Je voudrais quand même faire remarquer à Descartes et à NJ que ce n’est pas non plus de la « haine de soi » que de faire le constat que de nombreux peuples qui ne demandaient rien à l’occident, se sont vu décimés, dépossédés de leur terre, de leur langue de leur culture quand ils n’étaient pas tout simplement rayés de l’espèce humaine.]
Certes. Il n’est pas non plus de la « haine de l’autre » que de rappeler que des peuples occidentaux qui ne demandaient rien à l’orient se sont vu décimés, dépossédés de leur terre, de leur langue et de leur culture quand ils n’étaient pas simplement rayés de l’espèce humaine par des envahisseurs venus d’autres parties du monde. Comme NJ vous l’a rappelé, les arabes qui sont arrivé jusqu’à Poitiers ou les ottomans qui sont allés jusqu’à Vienne n’étaient guère différents des conquérants occidentaux auxquels vous faites référence. Là où vous faites preuve de « haine de soi », c’est lorsque vous listez avec délectation tous les crimes réels et imaginaires de l’occident, et que vous oubliez de balancer votre propos en listant ceux des autres…
[Ce qui est gênant dans votre recherche des causes qui ont poussé les occidentaux [à aller toujours de l’avant], (à savoir, selon Descartes notre héritage greco-romain) c’est qu’à aucun moment vous ne semblez avoir le moindre doute sur le bilan positif de « notre » conquête idéologique, militaire, économique du reste du monde.]
Oui. Mais il faut dire que nous avons quelques raisons de le faire. Aujourd’hui, la colonisation est finie. Les peuples ont fait usage de leur droit à l’autodétermination et sont libres de choisir leur destin. Et qu’observons-nous ? Que certains ont rejeté l’héritage occidental hérité de la colonisation, alors que d’autres ont au contraire cherché à le conserver et à se rapprocher de l’occident. A votre avis, lesquels des deux ont réussi à créer les sociétés plus prospères, plus égalitaires, plus sûres ?
Si l’occident a réussi à les coloniser, si des tout petits pays comme la France ou l’Angleterre ont réussi à dominer la moitié du monde, c’est bien parce qu’ils étaient en avance par rapport aux autres. Et pas seulement sur le plan militaire, mais aussi politique, scientifique, institutionnel. Ce sont ces avances que la colonisation a apportées. Cela ne revient nullement à contester les immenses souffrances qui ont accompagné la colonisation, tout comme la révolution industrielle a entraîné d’immenses souffrances pour les paysans arrachés à leur terre et parqués dans les usines. Et pourtant, avec une vision historique, nul ne contestera que la révolution industrielle fut un progrès…
[Vous dites NJ, que nous aurions, nous et pas les autres, une immense curiosité qui nous pousse à aller à la découverte des autres. J’ai une lecture un peu différente : Selon les connaissances actuelles de la science, et ainsi qu’on l’enseigne au collège, il n’y a qu’une seule humanité.]
Si du point de vue biologique il n’y a qu’une seule humanité, vous me semblez négliger l’aspect culturel inhérent à l’être humain. Si « la curiosité, la soif de comprendre » sont inscrites dans nos mécanismes mentaux, il reste qu’il y a des cultures qui les favorisent plus que d’autres. Lorsqu’on étudie les grandes civilisations qui se sont « arrêtées » à un moment de leur évolution, on remarque qu’elles ont tourné cette « curiosité », cette « soif de comprendre » dans un but bien précis, celui de la perfection. Le but n’étant plus d’explorer de nouveaux champs, mais d’atteindre la perfection dans les champs déjà explorés.
[Pour le meilleur comme pour le pire, l’homme, ce mutant génial, sait accumuler et transmette ses connaissances et ses compétences, de sorte que ses progrès ont toujours été exponentiels.]
Non. Il y a des civilisations qui à un moment de leur histoire se sont arrêtées, se contentant de répéter avec un soin et une « perfection » de plus en plus grande les créations du passé. La Chine est l’exemple le plus achevé : l’empire du milieu était déjà une civilisation rafinée et complexe alors que nos ancêtres faisaient paître des chèvres habillés de peaux. Comment aurions-nous pu les distancer, si leur progrès avaient été « exponentiels » ?
[Il y a quelques siècles, autant dire hier, à l’échelle de la présence de l’homme sur terre, les habitants d’un territoire correspondant à l’Europe ont pris sur le reste du monde un avantage technologique, économique militaire qui, compte tenu du caractère exponentiel de la courbe du progrès, n’a laissé aucune chance au reste du monde. La suite on la connaît : colonisation, christianisation, prosélytisme, politisation, acculturation puis décolonisation et pour finir mondialisation.]
Oui. Mais pourquoi, à votre avis, ce petit territoire a pu prendre une telle avance alors que mille ans avant notre ère il était notoirement en retard par rapport à des territoires comme l’Inde, la Chine, l’Egypte ? Pourquoi les autres se sont arrêtés et se sont contentés de répéter, alors que la civilisation occidentale a continué à avancer ? Pourquoi ce petit bout du monde, au climat peu accueillant, aux ressources limités, aux terres moyennement fertiles, à réussi un tel exploit ? Est-ce une simple coïncidence ?
@ Descartes
Je ne sais si c’est cet article du « Monde » qui est évoqué dans votre échange avec Epicure :
http://www.lemonde.fr/festival/article/2015/06/25/et-si-on-ouvrait-les-frontieres_4661969_4415198.html
article qui, sans surprise, milite pour l’ouverture totale des frontières mais la « conclusion » a particulièrement attiré mon attention :
« En politique, il faut toujours prendre en compte la pression de l’opinion. C’est la raison pour laquelle une ouverture totale des frontières conduirait inévitablement à réserver les allocations familiales, la couverture publique minimale de santé et l’école publique gratuite à la population française. ».
Ce qui, pour moi, signifierait le début de la fin de notre modèle social.
Qu’en pensez-vous ?
@ morel
[Je ne sais si c’est cet article du « Monde » qui est évoqué dans votre échange avec Epicure : http://www.lemonde.fr/festival/article/2015/06/25/et-si-on-ouvrait-les-frontieres_4661969_4415198.html%5D
Oui, c’est bien celui-là.
[article qui, sans surprise, milite pour l’ouverture totale des frontières mais la « conclusion » a particulièrement attiré mon attention : « En politique, il faut toujours prendre en compte la pression de l’opinion. C’est la raison pour laquelle une ouverture totale des frontières conduirait inévitablement à réserver les allocations familiales, la couverture publique minimale de santé et l’école publique gratuite à la population française. ». Ce qui, pour moi, signifierait le début de la fin de notre modèle social. Qu’en pensez-vous ?]
Je pense que cet article est très révélateur. Il est intéressant de constater que les exemples de pays « accueillants » pour les immigrés qu’on trouve dans l’article sont… les pays du Golfe Persique ! En d’autres termes, des sociétés à deux vitesses avec des « nationaux » qui vivent dans l’opulence grâce à une main d’œuvre certes « accueillie », mais taillable et corvéable à merci. En fait, on retrouve ce type de modèle partout dans l’article : on le trouve dans la conclusion que vous citez, on le trouve aussi dans l’évocation d’une « citoyenneté à deux vitesses » qui est décrit comme le corollaire de l’ouverture des frontières.
Cet article est typique de la vision des « classes moyennes » sur la question. Rien n’y manque. L’invocation du principe TINA et l’inutilité de s’opposer à un phénomène « inéluctable », l’effacement de la Nation, l’invocation des avantages économiques que « l’économie mondiale » pourrait tirer de l’ouverture des frontières, mais avec un prudent silence sur la manière dont ces avantages seraient repartis entre les différentes couches sociales…
Comme le grand Kurosawa a été évoqué, je me rappelle qu’il a fait une excellente adaptation de… Macbeth dans un contexte 100 % japonais (le Château de l’Araignée). C’était possible car le génie de Shakespeare est universel, que ses personnages s’appellent Hamlet, Othello, Shylock, Troïlus ou Cressida, il n’y avait pas besoin d’être maure, juif ou danois pour savoir mettre en scène des passions humaines…
@ Bannette
[Comme le grand Kurosawa a été évoqué, je me rappelle qu’il a fait une excellente adaptation de… Macbeth dans un contexte 100 % japonais (le Château de l’Araignée). C’était possible car le génie de Shakespeare est universel, que ses personnages s’appellent Hamlet, Othello, Shylock, Troïlus ou Cressida, il n’y avait pas besoin d’être maure, juif ou danois pour savoir mettre en scène des passions humaines…]
Mais… ne trouvez-vous pas que c’est une extraordinaire coïncidence ? Tous les « universels » – Shakespeare, Cervantès, Dante, Racine, Sophocle… – sont nés et ont vécu et écrit dans un tout petit morceau de la planète. Ou sont le Dante chinois, le Cervantès aztèque, le Shakespeare de l’Afrique noire ? Qu’est ce qui fait que cette culture – qu’on appelle « occidentale » à défaut de lui trouver un meilleur nom – issue de la tradition gréco-latine produit des « universels » alors qu’ailleurs on n’en produit pas. Il faut admettre qu’il y a quelque part dans cette culture une recherche de l’universalité qu’on ne trouve pas ailleurs.
uujourd’hui,le texte est personnel.Dans mon entourage,dans les années 50-60-70,j’entendais souvent les phrases internationalistes suivantes:’lespeuples qui entament un lutte de libération,le font non seulement pour eux mais pour l’ensemble de l’humanité;’En forgeant dans leur propre pays les élément de leur propre libération,les peuples permettent qu’un jour un seul gouvernement en Europe ou dans le monde.
Evidemment,ces phrases étaient énoncées à gauche,hors sfio,dans une sphère influencée par le pcf qui était une des Matrices de ce discours.
A partir du début des années 1980 et 1990,aprés une considérable et trés longues seconde guerre froide,doublé d’un second MacCarthysme et de bouleversements économiques néolibéraux,parachevé par la chute du système lié à l’URSS,Maastricht et le TCE,il semble que grâce à Tsipras,une ère nouvelle peut s’ouvrir.
Qu’aurait pensé Proudhon de ces perspectives?
Car, le peuple de gauche actuel n’est il pas très attaché à la propriété privée,comme Proudhon?
Si l’envie de répondre vous vient, vous ,que pensez vous des pensées supposées de Proudhon,face à l’UE actuelle?
La question sous jacente,est: faut il réformer l’UE de l’intérieur ou pas?Vous ,Descartes,pensez ,comme vous l’expiquez souvent,qu’une réforme radicale n’est pas possible mais quid de Tsipras?
Votre avis m’importe s’il est différent de ce que vous avez déjà exprimé sur ce sujet,mais toujours vos textes sont toujours de grande qualité.
A moins que vous pensiez que le mouvement ménera la Grèce à une sortie de l’Euro qui n’est pas une sortie de l’UE.Votre paragraphe sur la réemergence de la souvereineté gr^ce à la Geste de Tsipras,recueille mon accord enthousiaste
J’ai tendance à penser que Proudhon,avec son bon sens paysan aurait agi comme Tsipras.
Rappelons que la GB,Suède et Danemark sont dans l’UE sans être dans l’Euro,de façon trés pasible,même si à juste raison Descartes a déjà démontré que l’amalgame avec la Grèce n’est pas possible…
@ leucace
[Dans mon entourage, dans les années 50-60-70,j’entendais souvent les phrases internationalistes suivantes: ‘les peuples qui entament un lutte de libération, le font non seulement pour eux mais pour l’ensemble de l’humanité; ‘En forgeant dans leur propre pays les élément de leur propre libération, les peuples permettent qu’un jour un seul gouvernement en Europe ou dans le monde. Evidemment, ces phrases étaient énoncées à gauche, hors sfio, dans une sphère influencée par le pcf qui était une des Matrices de ce discours.]
Oui… la « gauche radicale » en ce temps-là était d’une grande naïveté quand aux intérêts en jeu dans les « luttes de libération ». Mais je pense que vous faites erreur en attribuant ce discours à la « sphère influencée par le PCF ». C’était plutôt le discours des soixante-huitards alimentés chez Franz Fanon et Ivan Illich. Le PCF a l’époque n’était pas du tout sur une ligne « gouvernement mondial ».
[Qu’aurait pensé Proudhon de ces perspectives? Car, le peuple de gauche actuel n’est il pas très attaché à la propriété privée, comme Proudhon?]
Drôle de question… Pourquoi êtes vous aussi intéressé par la vision de Proudhon ?
[Si l’envie de répondre vous vient, vous, que pensez vous des pensées supposées de Proudhon, face à l’UE actuelle?]
Je n’en pense rien. Je ne connais pas les « pensées supposées de Proudhon sur l’UE actuelle ». D’ailleurs, je peux difficilement être considéré comme un « proudhonien ». Dans la querelle Proudhon-Marx, je prends décidément parti pour ce dernier.
[La question sous jacente, est: faut il réformer l’UE de l’intérieur ou pas?]
Cette question n’a pas de sens. Avant de se demander « s’il faut », il faut se demander si c’est possible. Or, je suis convaincu que l’UE – en tant que construction fédérale – ne peut être différente de ce qu’elle est. Il n’y a pas de « autre Europe » possible sans sortir de ce cadre. Il ne s’agit donc pas de « réformer l’UE », mais d’en finir avec l’UE et de faire autre chose.
[Vous, Descartes, pensez ,comme vous l’expliquez souvent, qu’une réforme radicale n’est pas possible mais quid de Tsipras?]
Je ne dis pas « qu’une réforme radicale n’est pas possible ». Ce que je dis, c’est qu’une « réforme radicale » ne peut transformer une institution en son contraire. On ne peut pas transformer une institution créée pour affaiblir les Etats et les nations, pour substituer le consommateur au citoyen, pour imposer à la place de la souveraineté populaire la « concurrence libre et non faussée » en instance de coopération entre les nations par la simple magie d’une « réforme ». Il s’agit de détruire et de construire autre chose.
Touché !
Une fois de +,votre sagacité parallèle à la qualité de votre blog,’titille’ ma réflexion.
Je ne sais pas comment vous avez abordé la polémique Marx/Proudhon,moi c’est par l’intermédiaire du livre ‘Bakounine et Marx'(1970) de Jacques Duclos.
A l’époque il était en pafase avec les sytèmes à 100% de colelctivisme comme la Chine,les pays du pacte de Varsovie etc..Le fon de l’air était Rouge,les statues de Marx,aux allures viriles de Super Héro à la Marvel,se comptaient par dizaine de milliers dans le vaste Monde…
Aujourd’hui,je réalise ‘lexceptionnalité’ de la période.C’est la seule période,la seule!,où une majorité d’êtres humains a tenté de mettre en oeuvre une économie 100% collectivisée,dans la ligne grosso modo(le coté grosso y est trés accentué!) de Marx.
Or Proudhon,était farouchement opposé à une collectivisation à 100%.
IL considérait que le trvailleur,au contraire devait être propriétaire puisqu’il considérait à juste titre qye la fin du servage(esclavage),la possibilité d’être soi même,propriétaire était la véritable émancipation,,alors que les gueux sous l’ancien régime,étaient la propriété des seigneurs.Aucun droit de propriété ne leur était’octroyé’ par les seigneurs de droit divin.
A ce titre le livre’les Rouges’ de Pascale Fautrier est édifiant.
Le PCUS,le PCC ont abandonné le système 100% collectiviste,tout en laissant à l’état un rôle important.
Effectivement,même si mon attavisme générationnel,me pousse vers Jacques Duclos,l’examen du déroulé du 20 ième siècle me permet de renouer à la fois avec Pascale Fautrier et à la fois avec le PCF,et lePCC.
Aprés tout je suis du 21ième siècle maintenant…
@ leucace
[Je ne sais pas comment vous avez abordé la polémique Marx/Proudhon,moi c’est par l’intermédiaire du livre ‘Bakounine et Marx’ (1970) de Jacques Duclos.]
Moi, ce fut plutôt à travers de la lecture parallèle de la « Philosophie de la Misère » de Proudhon et de la « Misère de la philosophie » de Marx…
[A l’époque il était en phase avec les systèmes à 100% de collectivisme comme la Chine,les pays du pacte de Varsovie etc..]
Ce qui est drôle – si l’on peut dire – aujourd’hui, c’est de voir combien en fait sur ces questions on avait fait de nécessité vertu. La collectivisation générale fut une réponse de crise à une situation concrète, celle qui dans les années 1920 vit la défaillance générale des marchés d’approvisionnement et la nécessité pour l’Etat de remettre l’ensemble de la production sous contrôle centralisé pour empêcher les spéculateurs d’affamer la population. Cette solution, parfaitement justifiée dans une conjoncture particulière, est devenue un principe idéologique sacralisé après la mort de Lénine, pour le plus grand malheur de tous. Si une analyse rationnelle de l’économie s’était imposée à l’époque plutôt que ce dogme idéologique, l’URSS existerait peut-être aujourd’hui.
[Aujourd’hui,je réalise ‘l’exceptionnalité’ de la période. C’est la seule période,la seule!,où une majorité d’êtres humains a tenté de mettre en oeuvre une économie 100% collectivisée,dans la ligne grosso modo(le coté grosso y est trés accentué!) de Marx.]
Je ne vois pas ce que Marx vient faire là dedans. A ma connaissance, il n’a jamais explicité une telle « ligne ». Marx parle de « socialisation » des moyens de production, mais reste très prudent sur la manière dont cette socialisation doit être gérée…
[Or Proudhon,était farouchement opposé à une collectivisation à 100%.]
Proudhon était une girouette. D’un côté il affirmait que « la propriété c’est le vol », de l’autre il voulait une société de petits propriétaires. Son raisonnement était un peu de dire « puisque la seule classe libre est la bourgeoisie, devenons tous des bourgeois ». Seulement, cette vision d’une société de petits propriétaires n’est pas adaptée à une production industrielle, qui nécessite l’accumulation de grandes masses de capital et leur investissement dans la production.
Ah ces humanitaires professionnels donneurs de leçons à chaque fois qu’il s’agit d’immigration, la version 2.0 des dames patronnesses du XIXème siècle.
Ont été évoqués les méchants passeurs, et j’aimerais faire part des témoignages que j’ai reçu de mon expérience associative.
Il est vrai que ces morts en Méditerranée sont dramatiques, mais quitte à paraître atrocement cynique, pour une centaine de morts, il y en a des milliers qui arrivent à bon port, leur intégrité physique garantie, si j’ose dire. Suivent après les péripéties de la clandestinité de 10 ans ou du mariage avec quelqu’un qui fera les papiers.
J’ai discuté longuement avec des immigrés clandestins (essentiellement magrébins et subsahariens) et une fois la confiance établie, j’ai appris des choses que je n’avais pas soupçonnées quand j’étais ado. Il existe des passeurs qui font bien leur “boulot” si j’ose dire, c’est-à-dire des réseaux bien organisés qui garantissent la traversée clandestine d’un village en Afrique jusqu’en région parisienne. Ils procèdent eux même à une sélection en amont des aspirants à l’immigration clandestine, et n’acceptent de prendre que des gens qui peuvent les payer et dont ils ont la conviction qu’ils ne se feront pas remarquer pour ne pas se faire prendre. Quand j’ai demandé les budgets, les prix étaient très variables suivant les régions et les personnes, cela allait de 2 000 à 10 000 euros, il doit bien sûr y avoir une part de surévaluation ou le contraire de sous-évaluation, mais c’était à chaque fois des milliers d’euros, et converti en monnaies locales, c’est énorme.
Comment des gens décrits par nos dames patronnesses médiatiques comme des personnages dickensiens arrivent à sortir de telles sommes (que moi-même je ne pourrais pas sortir) ? Bien sûr il s’agit d’argent essentiellement “fiduciaire”, de la mise en hypothèque de la maison, de la petite exploitation agricole, telle mère qui met en gage sa propre dot pour faire passer son fils, des solidarités familiales ou claniques, etc, mais la conclusion de tout ça, c’est qu’il existe quand même des capitaux dans ces pays, en faible quantité certes, mais ils existent. Quand certains responsables politiques gauchistes décrivent ces pays de misère totale telle qu’elle pousse ces enfants à s’arracher de sa famille pour immigrer, ils plaquent juste leurs propres préjugés.
J’ai demandé à ces immigrés mais pourquoi ne pas créer une petite activité avec ces capitaux pour pouvoir vivre de son travail dignement dans son pays plutôt que risquer la clandestinité, dans un pays qui ne les accueillera pas forcément les bras ouverts.
Certains m’ont répondu que ça ne marcherait pas car soit, il n’y a pas de débouché (ce qui est sans doute vrai) ou soit qu’ils (ou des proches) ont essayé et que ça a fait faillite. Et c’est là que je me rends compte à quel point le capital immatériel (à savoir discipline sociale, institutions fortes, éducation) est important et que c’est ce qui leur manque le plus, alors que l’argent existe (en faible quantité certes) en théorie.
Et aussi, ils font un pari “pascalien” qui peut sembler fou, mais qui est très rationnel : le pourcentage de “réussite” par l’immigration clandestine est très largement supérieur aux tentatives de créations d’activités chez soi. En dépit des drames médiatisés sur ces morts en Méditerranée, des reconduites à la frontière de ceux qui se sont fait prendre, il y en a beaucoup plus pour qui tout se passe à peu près bien, si j’ose dire. Ils le savent par les expériences d’autres proches.
C’est pourquoi, je dis qu’il y a des passeurs “sérieux”, et que la caricature du méchant mafieux qui fait passer en encaissant des sous et met exprès des pauvres immigrés affamés dans des embarcations de fortune dont ils savent qu’elles vont couler en faisant niark, niark, niark avec son cigare au bec, est assez éloignée de la réalité : pour qu’ils continuent à s’en mettre plein les poches, il faut qu’ils garantissent le passage et que les immigrés puissent témoigner au village qu’ils ont réussi, afin d’avoir d’autres clients, c’est logique.
Et ne sous-estimons pas l’attractivité de notre pays pour les candidats à l’immigration clandestine : la régularisation est certes un parcours, mais pas inatteignable (le mariage est toujours une option) ; moi le caractère attractif qui m’énerve le plus c’est que beaucoup de clandestins (même quasi analphabètes) savent qu’on peut vivre en France comme au bled. Merci au communautarisme et aux politiques anti-républicaines engagées depuis 30 ans.
Si je dis tout cela, ce n’est pas pour leur porter un jugement mais pour sortir des logiques émotionnelles.
A côté de cette immigration clandestine non spectaculaire, il y a ceux qui en effet fuient des situations politiques dramatiques dues à la déstabilisation régionale (syriens, irakiens, libyens, somaliens, etc). Si je suis réfractaire à régularisation facilitée des immigrants que je mentionne plus haut (du fait qu’ils ont pour effet de renforcer le lumpenprolétariat en France), je ne le suis pas pour les personnes qui rentreraient dans le cadre du droit d’asile ou des réfugiés, car leur situation est en théorie temporaire. Néanmoins, sans une vraie doctrine française en matière de politique étrangère, ils connaîtront le même sort que les réfugiés palestiniens post-1948, c’est à dire de temporaires dans les pays voisins, pour devenir permanents avec aujourd’hui la 3ème génération.
Là encore, on ne peut que pester devant la politique étrangère française faite d’improvisation, de court-termisme, d’hystérie bienpensante, d’alignement systématique à la politique étrangère US. C’est un effet de l’illusion de la politique étrangère européenne, impossible à déterminer du fait des intérêts divergents de 28 pays, ce qui les amènent à s’aligner sur les USA.
Par conséquent, l’accueil de ces populations fragilisées ne pourrait se faire que s’il y avait une politique étrangère cohérente, qui viserait à la stabilité de ces régions en feu. Au vu des exploits de Daesh et autres groupes de mercenaires illuminés, on en est loin… Cria cuervos, y te sacaran los ojos.
@ Bannette
[(…) la version 2.0 des dames patronnesses du XIXème siècle.]
C’est une belle image ! Je la garde !
[J’ai discuté longuement avec des immigrés clandestins (essentiellement magrébins et subsahariens) et une fois la confiance établie, j’ai appris des choses que je n’avais pas soupçonnées quand j’étais ado. Il existe des passeurs qui font bien leur “boulot” si j’ose dire, c’est-à-dire des réseaux bien organisés qui garantissent la traversée clandestine d’un village en Afrique jusqu’en région parisienne.]
Mais bien entendu. Je m’étonne toujours de la naïveté des gens. La demande créée le marché. Dès lors qu’il y a une demande pour un service, des acteurs économiques se précipiteront pour l’offrir, sur la base d’un calcul risque/avantage. S’il y a des gens prêts à payer pour « passer d’un village en Afrique jusqu’en région parisienne », il y aura des gens pour leur offrir ces services. Et la logique économique sera exactement la même que celle des tour-operators : il y aura des passeurs « cinq étoiles » pour offrir la qualité – voyage sans risque, accueil à l’arrivée, faux papiers de qualité – et des opérateurs « trois cafards » qui mettront en danger la vie ou la santé de leurs clients et qui les laisseront livrés à eux-mêmes à l’arrivée. Le passeur a autant intérêt à maltraiter son client que n’importe quelle agence de voyages. Un client satisfait, c’est un client qui vous amène d’autres clients. Un client mécontent – ou pire, mort – c’est une mauvaise publicité. Plus votre service est connu pour être impeccable, plus vous pouvez demander de l’argent.
La seule chose que les états puissent faire, c’est modifier le bilan risque/avantage de l’opération. Si la répression est efficace, si les passeurs sont identifiés et punis, si – soyons cyniques – une partie importante des candidats à l’immigration se noie en méditerrannée, alors les prix s’envoleront et seuls survivront les « passeurs » les plus efficients. Mais il ne faut pas se faire d’illusions sur la nature humaine. La puissance des mécanismes de marché tient à cette simple réalité : dès lors que le rapport risque/avantage vous est favorable, vous trouverez toujours quelqu’un pour fournir.
[Ils procèdent eux même à une sélection en amont des aspirants à l’immigration clandestine, et n’acceptent de prendre que des gens qui peuvent les payer et dont ils ont la conviction qu’ils ne se feront pas remarquer pour ne pas se faire prendre.]
Bien sur. Et l’inverse est vraie : il existe un véritable « marché » des passeurs, et les candidats au voyage savent très bien lesquels sont « fiables » – et donc plus chers – et lesquels ne le sont pas.
[Quand j’ai demandé les budgets, les prix étaient très variables suivant les régions et les personnes, cela allait de 2 000 à 10 000 euros, il doit bien sûr y avoir une part de surévaluation ou le contraire de sous-évaluation, mais c’était à chaque fois des milliers d’euros, et converti en monnaies locales, c’est énorme.]
Oui et non. Le « passage » est un investissement, et la valeur d’un investissement doit être estimée à l’aune des gains espérés. Disons que l’immigré qui paye 10.000 € pour le service « première classe » arrive à Paris et se trouve un emploi au SMIC. En un an, son revenu aura couvert l’investissement. Vous connaissez beaucoup d’investissements qui soient amortis dans un temps aussi court ?
[Comment des gens décrits par nos dames patronnesses médiatiques comme des personnages dickensiens arrivent à sortir de telles sommes (que moi-même je ne pourrais pas sortir) ? Bien sûr il s’agit d’argent essentiellement “fiduciaire”, de la mise en hypothèque de la maison, de la petite exploitation agricole, telle mère qui met en gage sa propre dot pour faire passer son fils, des solidarités familiales ou claniques, etc, mais la conclusion de tout ça, c’est qu’il existe quand même des capitaux dans ces pays, en faible quantité certes, mais ils existent.]
Comme tout investissement, il est gage sur le revenu futur. Vous pouvez comparer le candidat à l’immigration à l’entrepreneur qui prend un crédit pour acheter une machine : c’est le revenu de la production qui permettra le remboursement. Le problème est celui de l’avance, et pour cela il existe, comme vous le signalez, des systèmes de crédit. Mais cela n’implique pas qu’il existe du capital dans ces pays-là. Il se peut que le capital vienne des pays développés. Le cas le plus typique est celui des passeurs chinois, qui sont installés à Paris et qui proposent eux-mêmes de prendre en charge le voyage, que le candidat remboursera en nature avec son travail.
[Quand certains responsables politiques gauchistes décrivent ces pays de misère totale telle qu’elle pousse ces enfants à s’arracher de sa famille pour immigrer, ils plaquent juste leurs propres préjugés.]
C’est en partie vrai, mais pas tout à fait. La misère est quelquefois « totale » parce que la productivité est très faible. Le « banquier » qui vous prêtera de l’argent pour payer le « passeur » sachant qu’à Paris vous allez gagner un SMIC en toute sécurité ne vous prêtera pas la même somme pour installer une PMI à Mogadiscio, ou la productivité est très faible, les risques grands et les gains aléatoires.
[J’ai demandé à ces immigrés mais pourquoi ne pas créer une petite activité avec ces capitaux pour pouvoir vivre de son travail dignement dans son pays plutôt que risquer la clandestinité, dans un pays qui ne les accueillera pas forcément les bras ouverts. Certains m’ont répondu que ça ne marcherait pas car soit, il n’y a pas de débouché (ce qui est sans doute vrai) ou soit qu’ils (ou des proches) ont essayé et que ça a fait faillite.]
C’est bien le point que j’ai évoqué plus haut : il est difficile de trouver du capital quand la productivité est faible… et il est difficile d’augmenter la productivité sans capital. La plupart des pays sous-développés est piégée dans ce cercle vicieux.
[Et c’est là que je me rends compte à quel point le capital immatériel (à savoir discipline sociale, institutions fortes, éducation) est important et que c’est ce qui leur manque le plus, alors que l’argent existe (en faible quantité certes) en théorie.]
Tout à fait d’accord. Le problème de ces pays, c’est l’accumulation de capital matériel mais aussi immatériel. On néglige souvent l’importance de ce dernier élément, et pourtant il est la condition sine-qua-non de l’accumulation de capital matériel. Qui investira dans un pays ou les institutions sont si faibles qu’elles ne peuvent pas maintenir l’ordre public, ou la discipline de travail est inexistante ? On le voit bien, d’ailleurs : là où la discipline sociale existe, le capital afflue. Pensez à l’Allemagne en 1945, ou à la Corée du Sud dans les années 1960.
[Et aussi, ils font un pari “pascalien” qui peut sembler fou, mais qui est très rationnel : le pourcentage de “réussite” par l’immigration clandestine est très largement supérieur aux tentatives de créations d’activités chez soi. En dépit des drames médiatisés sur ces morts en Méditerranée, des reconduites à la frontière de ceux qui se sont fait prendre, il y en a beaucoup plus pour qui tout se passe à peu près bien, si j’ose dire. Ils le savent par les expériences d’autres proches.]
Bien entendu. Plus qu’un pari « pascalien », en dernière instance, il y a toujours un calcul économique. De la même manière que le capitaliste investit son capital là où la productivité du capital est la plus élevée, le travailleur a intérêt à investir son travail là où il est le plus productif et donc le mieux rémunéré. Et si l’avantage est suffisamment grand pour couvrir le risque de mourir en mer…
[C’est pourquoi, je dis qu’il y a des passeurs “sérieux”, et que la caricature du méchant mafieux qui fait passer en encaissant des sous et met exprès des pauvres immigrés affamés dans des embarcations de fortune dont ils savent qu’elles vont couler en faisant niark, niark, niark avec son cigare au bec, est assez éloignée de la réalité : pour qu’ils continuent à s’en mettre plein les poches, il faut qu’ils garantissent le passage et que les immigrés puissent témoigner au village qu’ils ont réussi, afin d’avoir d’autres clients, c’est logique.]
Bien sur. Mais vous savez que la figure du capitaliste ventru avec cigare et haut-de-forme qui fait « gniark, gniark » en regardant le prolétaire souffrir est un leitmotiv chez les gauchistes. Le méchant passeur n’est qu’un avatar de cet archétype. Je suis d’accord avec vous sur le fait que cette vision est une pure construction. L’intérêt d’un commerçant, qu’il soit vendeur de pommes ou de drogue, organisateur de voyages ou « passeur », c’est avant tout la satisfaction du client. Ils seraient idiots de tuer celui qui les fait vivre.
[Si je dis tout cela, ce n’est pas pour leur porter un jugement mais pour sortir des logiques émotionnelles.]
Je partage ce souci. Il faut arrêter de faire de l’immigration une question sentimentale, et en faire une analyse économique.
[Par conséquent, l’accueil de ces populations fragilisées ne pourrait se faire que s’il y avait une politique étrangère cohérente, qui viserait à la stabilité de ces régions en feu. Au vu des exploits de Daesh et autres groupes de mercenaires illuminés, on en est loin… Cria cuervos, y te sacaran los ojos.]
Oui. Mais cela suppose sortir du moralisme et revenir à la realpolitik. Un dictateur, ce n’est pas forcément joli. Mais cela vaut mieux que le chaos. Et il y a des sociétés qui ne sont tout simplement pas assez mures – on pourrait dire « qui n’ont pas le capital immatériel » – pour gérer des rapports démocratiques. Notre intérêt à long terme est de renforcer les Etats – y compris dans les pays qui n’ont pas une tradition démocratique. Un Etat fort peut nous emmerder, mais au moins il fournit un interlocuteur avec qui discuter, capable de signer des accords et de s’y tenir. Un Etat faible – le rêve des américains – est plus facile à contrôler, mais in fine le coût social, économique et politique du chaos qu’un état faible n’arrive pas à contrôler est trop important. Après avoir multiplié les « états faillis » depuis les années 1980, il serait temps de conclure que cette stratégie ne marche pas.