Sur la mixité: lettre ouverte à Safia, Fatima, Haïcha et Khadeja

Mesdames,

J’ai fait connaissance de vos prénoms en lisant dans le numéro de Libération daté du 4 juin 2015 un reportage concernant votre combat pour la mixité scolaire dans votre quartier, celui du Petit Bard à Montpellier. Si je crois l’auteur du reportage – chose j’en conviens fort imprudente, s’agissant de Libération – vous dénoncez le fait que vos enfants partagent leur scolarité avec des petits camarades qui sont exclusivement issus de l’immigration marocaine, et vous exprimez le souhait de voir « plus de petits blonds avec nos enfants ». Ce souhait de mixité, ce désir de voir vos enfants « se sentir français » et votre conviction que ce résultat ne peut être atteint que si l’on évite qu’ils « grandissent exclusivement entre eux » vous honore. C’est en effet en organisant le brassage des populations que la France républicaine a construit son unité.

Mais – car il y a toujours un « mais » – je n’ai pas pu m’empêcher de noter, et le fait est souligné par la journaliste, que vous portez vous-même le voile. Et je ne parle pas d’un simple foulard sur les cheveux, mais d’un voile doublé strict, accompagné d’un vêtement noir qui couvre vos bras jusqu’aux poignets. C’est bien entendu votre droit de vous habiller comme bon vous semble. Mais permettez-moi de vous faire remarquer que ce choix vestimentaire est incompatible avec votre discours de mixité. Et cela pour deux raisons :

La première, évidente, est qu’on ne peut d’un côté affirmer vouloir « que ses enfants, citoyens français, soient (…) éduqués comme les autres » et d’un autre porter fièrement les signes distinctifs qui vous rattachent à une communauté et qui sont justement destinés à bien marquer que vous n’êtes pas des parents « comme les autres ». Il faut savoir ce qu’on veut : on ne peut en même temps revendiquer hautement sa différence et exiger qu’on vous traite « comme tout le monde ». Entre les deux, il faut choisir. Ce n’est pas votre droit de porter le voile qui est en question. Si vous voulez sortir avec un entonnoir sur la tête, vous avez le droit. Mais vous ne pouvez pas ensuite vous plaindre qu’on vous prenne pour fou. Si vous avez le droit de porter des signes, c’est bien pour que les autres les interprètent.

Ce qui nous ramène à la deuxième raison, de loin la plus intéressante. Un vieux dicton paysan nous dit qu’on peut toujours amener l’âne à la fontaine, mais qu’on ne peut pas l’obliger à boire. Et de la même manière, on peut créer une carte scolaire, mais si votre quartier devient ethniquement homogène, la carte scolaire ne peut que traduire cette homogénéité à l’école. J’entends que vous voudriez voir « des petits blonds avec vos enfants ». Mais comment faire ? Aller chercher des « petits blonds » dans les quartiers où ils sont nombreux et les inscrire manu militari dans le collège du quartier du Petit Bard ? Pensez-vous que ce soit la solution ?

Si l’on exclut les solutions autoritaires, votre problème n’a plus qu’un seul remède : il faut donner envie aux parents des « petits blonds » de vivre à côté de vous et d’envoyer leurs enfants étudier à côté des vôtres. D’ailleurs, l’une de vous le dit elle-même : « avant c’était mieux. Il y avait une église, un boulanger, un tabac-presse… des Asiatiques, des Africains, des Français, d’autres gens habitaient ici. Des instituteurs habitaient le quartier. Et puis ces gens-là ont déménagé : on n’a pas fait attention mais, peu à peu, il n’y avait plus que des Marocains ». Vous êtes-vous demandé pourquoi ? Qu’est ce qui a fait que les instituteurs ne veulent plus vivre dans le quartier, que l’église, le boulanger, le tabac ont fermé ? Ne pensez-vous pas qu’une partie de la réponse se trouve dans le fait que ces « français » n’avaient pas envie de vivre dans un cadre où une communauté imposait les habitudes « du pays » dans l’espace public ?

Si je vous pose la question, c’est parce que c’est là l’histoire de ma vie. Moi aussi j’ai quitté la cité ou j’ai grandi, et ou j’avais beaucoup d’amis, parce que je ne supportais plus de me voir imposer la musique arabe à fond la caisse jusqu’à une heure du matin en été, de croiser chaque fois que je sortais de mon immeuble des chapiteaux ambulants, de ne plus pouvoir boire une bière assis dans un banc en bas de chez moi pendant le Ramadan sans avoir droit à des remarques ou des crachats, de voir mes enfants marginalisés dans la cour de récréation parce qu’il ne parle pas arabe. Et d’être victime de vols et de dégradations qui, par une étrange coïncidence, ne touchent jamais les membres de la « communauté » mais seulement les « boloss ».

Je ne vous cite pas là d’un quelconque tract FN, mais de mon expérience personnelle. J’ai été très heureux dans ce quartier lorsque j’étais enfant, du temps où tout le monde était « différent » mais personne ne portait sa « différence » en bandoulière ou en faisait un motif de fierté. Et j’y ai été très malheureux quand des habitants de plus en plus nombreux ont commencé à bâtir autour de leur communauté des barrières et à marquer leur « différence » en refusant la langue et la politesse communes. Que voulez voulez-vous, à force de côtoyer chaque jour des gens dont l’habillement, la langue, le comportement ne fait que déclarer « je ne suis pas et je ne veux pas être comme vous », lorsqu’on se fait cracher dessus ou voler parce qu’on n’est pas membre de la « communauté », on finit par avoir envie d’aller vivre entre des gens qui vous ressemblent. Et c’est pourquoi, avec une grande tristesse croyez-le, je suis parti.

On ne peut pas créer la « mixité » artificiellement. Si les gens sont malheureux dans un environnement, s’ils se sentent méprisés, exclus, menacés ou harcelés, ils s’en iront dès qu’ils auront les moyens ou l’opportunité. Et c’est pire dans le domaine de l’éducation : l’expérience a montré que les gens sont prêts à utiliser tous les moyens, même les plus chers et les moins légaux, pour s’assurer que leurs enfants sont éduqués en accord avec leurs conceptions. Si vous voulez que vos enfants aient des petits camarades « blonds », il n’y a qu’un moyen : il faut donner envie aux parents de ces « blonds » de revenir dans le quartier et à leurs enfants d’étudier à côté de vos enfants. En un mot, il faut les convaincre que vous n’êtes pas pour eux ni une nuisance, ni un danger. Pensez-vous qu’en portant le voile vous y contribuez ? Je peux vous assurer que ce n’est pas le cas.

Pour être entendues, vous gagneriez à vous mettre quelquefois à la place de l’autre. Vous êtes-vous demandé ce que ressent un enfant « blond » entouré d’enfants qui, à la récréation, parlent une langue qu’il ne comprend pas, et qui de ce fait se trouve exclu des échanges, des jeux, de la vie sociale de ses camarades ? Pensez-vous que cela lui donnera envie de poursuivre sa scolarité dans ces conditions ? Etes vous prête à soutenir – y compris en punissant votre enfant – un instituteur qui interdirait de parler autre chose que français dans la cour de récréation ? Si la réponse est négative, alors vous condamnez par avance toute possibilité de « mixité ». Aucun parent « blond » n’acceptera de transformer son enfant en paria social pour vous faire plaisir. Et si la réponse est positive, alors commencez par enlever ce voile, pour montrer à votre enfant que vous aussi êtes prête à payer le prix de la « mixité ».

La meilleure manière de vous assurer que vos enfants seront éduqués avec et comme les enfants des autres, c’est de devenir vous-mêmes des mères « comme les autres ». C’est l’assimilation qui, en effaçant les différences, crée les conditions d’une véritable mixité. C’est l’assimilation qui est la seule réponse à votre problème. Là où les différences sont revendiquées haut et fort, les gens en finissent toujours par se regrouper avec ceux qui leur ressemblent. Si vous bâtissez autour de vous et de votre « communauté » un mur, il ne faut pas s’étonner que les autres s’en aillent vivre de l’autre côté. Et qu’ils bâtissent eux-mêmes un mur pour se protéger.

Etes-vous prête à parier sur l’assimilation ? Etes vous prête à enlever votre voile ? Etes vous prête à expliquer à votre enfant qu’en dehors de la maison on ne parle que français ? Si oui, vous trouverez chez moi un allié. Mais si vous n’êtes pas prête à payer ce prix, ne demandez pas aux « blonds » de le payer à votre place.

Avec mes cordiales salutations

Descartes

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187 réponses à Sur la mixité: lettre ouverte à Safia, Fatima, Haïcha et Khadeja

  1. Marcailloux dit :

    Bonjour,
    Première réaction “à chaud” sur ce billet: un cas ou quelques cas particuliers font-ils généralité? Je n’ai pas d’éléments de réponse, et j’aimerais toutefois connaitre précisément, c’est à dire scientifiquement la réalité en France sur les comportements liés à l’islamisme. Malheureusement, ,l’hypocrisie généralisée l’interdit, ce qui laisse le champ libre à tous les populismes racistes.
    Néanmoins, sur l’exemple décrit dans l’article, je souscris entièrement à votre position, et serai même plus rigoureux dans la restriction opposée aux comportements communautaires. Mais là encore, combien en pourcentage de musulmans, pratiquants ou non se comportent ainsi ?
    D’autre part, je suis tout de même intrigué sur ce que je constate à Fès, au Maroc, ville d’un million d’habitants, où je vis épisodiquement depuis 8 ans, capitale culturelle et religieuse de ce pays, où je n’observe pas un taux très élevé de femmes voilées, hormis le simple foulard que portent beaucoup de femmes d’un age mûr. Cela me semble être la même chose dans les autres villes de ce pays.
    Alors pourquoi, en France, tant de femmes expriment – ou exprimeraient – le besoin de se distinguer du reste de la population?
    Est-ce une réaction offensive ou défensive?
    En quoi le débat national à ce sujet, jamais tranché et conservant de multiples ambiguïtés,suscite des vocations provocatrices et entretient le malaise aussi bien chez les Français de souche que chez les Français issus de l’immigration maghrébine?
    Cette immigration maghrébine est elle le nœud gordien de notre société?
    Qui peut, ou veut le trancher?

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Première réaction “à chaud” sur ce billet: un cas ou quelques cas particuliers font-ils généralité?]

      Non, bien sur. Mais l’exemple de ces trois femmes n’a pas été choisi au hasard. Il a fait une double page dans un quotidien national, et pas n’importe lequel, le quotidien préféré de la gauche bienpensante. Il n’est donc pas inutile de regarder un peu a quoi correspond ce choix. Si après avoir expliqué que ces femmes exigent la « mixité » la journaliste de « Libération » choisit de souligner que ces femmes sont voilées, ce n’est pas une coïncidence. C’est parce que le message qu’on veut transmettre est que la demande de mixité et le port du voile sont compatibles. Qu’on peut imaginer une société « mixte » et communautaire à la fois.

      Or, il faut bien comprendre qu’on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, sans parler du sourire de la crémière. Il y a là un choix à faire. Il faut faire comprendre aux immigrés qui veulent devenir vraiment français – et je suis persuadé qu’ils sont majoritaires – que cela implique l’assimilation, et l’assimilation a un prix.

      [D’autre part, je suis tout de même intrigué sur ce que je constate à Fès, au Maroc, ville d’un million d’habitants, où je vis épisodiquement depuis 8 ans, capitale culturelle et religieuse de ce pays, où je n’observe pas un taux très élevé de femmes voilées, hormis le simple foulard que portent beaucoup de femmes d’un age mûr. Cela me semble être la même chose dans les autres villes de ce pays. Alors pourquoi, en France, tant de femmes expriment – ou exprimeraient – le besoin de se distinguer du reste de la population?]

      Nous avons un problème d’identité qui est général dans les sociétés développées. A force de taper sur l’histoire, sur les institutions, sur les romans nationaux, on n’a plus rien à offrir aux gens, et notamment aux jeunes, en termes de références qui les transcendent. D’où la tendance à se chercher des « racines » et des solidarités ailleurs que dans la collectivité nationale. On peut les trouver dans une « culture régionale », dans une secte ou une religion, dans des pratiques alimentaires ou médicinales élevées au rang de « spiritualité », dans le « charity business ». Et on manifeste ses « racines » en obéissant à des règles et des traditions, d’autant plus valorisantes qu’elles sont strictes.

      Porter le voile au Maroc ne vous valorise pas, au contraire, vous rattache aux institutions anciennes du pays. Le porter en France, c’est un geste de résistance contre les institutions, qui vous « distingue » et vous donne votre quart d’heure de gloire.

      [En quoi le débat national à ce sujet, jamais tranché et conservant de multiples ambiguïtés, suscite des vocations provocatrices et entretient le malaise aussi bien chez les Français de souche que chez les Français issus de l’immigration maghrébine?]

      Mais vous avez ça dans beaucoup de domaines… la « provocation » vous la trouverez chez les « antifas » et chez les « zadistes ». Nous vivons dans une idéologie dans laquelle il n’y a pas de pire péché que d’être comme tout le monde. L’affaiblissement des institutions qui font la Nation réveille toutes sortes de monstres…

      [Cette immigration maghrébine est elle le nœud gordien de notre société?]

      Non. Le « nœud gordien » de notre société est sa capacité à conserver son unité. Dans ce combat, la capacité à assimiler les immigrés est un élément important, mais pas le seul.

    • yann dit :

      Honnêtement je pense que l’islam est un faux problème. On aurait exactement les mêmes difficultés d’intégration avec des Chinois. On aurait, des chinois-town en lieu et place, c’est tout. Ce serait peut-être même pire parce que la Chine est une puissance montante.

      Sinon mon cher Descartes, vous soulignez ici le besoin de mélange des populations. Mais comme je vous l’avais fait remarqué dans un de vos textes précédents, un tel mélange n’est possible que s’il y a des populations à mélanger. Les jeunes têtes blondes manquent à l’appel pour faire le mélange au plus jeune âge. Et c’est un problème qui va aller en croissant puisque l’écart entre la fécondité des nouveaux Français et des anciens reste élevé. J’ai envie de dire que la faible fécondité des Français historiques est l’un des facteurs majeurs qui va nuire à l’intégration des nouveaux venue dans les décennies qui viennent. On ne peut plus faire l’impasse sur cette réalité en faisant mine de croire que le discours républicain à l’école suffira à intégrer les jeunes d’origine étrangère.

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes

      [L’affaiblissement des institutions qui font la Nation réveille toutes sortes de monstres…]
      Sans doute, mais à l’opposé du spectre politique, un nationalisme exacerbé avec des institutions tyranniques accouchent de monstres encore plus apocalyptiques.
      Les institutions – du moins celles dont je présume vous voulez parler – ne sont que le reflet de la population qu’elles sont censées servir (au sens de service public). Et comme vous l’évoquez fort justement, cette population, c’est à dire nous tous, ne sommes pas prêts à payer le prix pour des institutions qui nous mettent à l’abri de toutes ces turpitudes. Ce qui est valable pour les immigrés maghrébins, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, vaut aussi pour nous tous.
      Nos “politiques” n’ont pas encore trouvé le fil d’Ariane qui nous mènera d’une société de consommation jouisseuse et individualiste à une société de modération confortable, solidaire et éthique.
      Avez vous actuellement le profil en vue d’une ou plusieurs personnalités émergente ou confirmée et dans quelle organisation, qui se pose la question en ces termes?
      Les Français seraient-ils disposés à écouter un tel discours? Petit espoir tout de même, ils ne veulent plus de l’infernal binôme suicidaire de F.H.pépère et N.S.gangster. C’est déjà un grand pas.

    • Descartes dit :

      @ yann

      [Honnêtement je pense que l’islam est un faux problème. On aurait exactement les mêmes difficultés d’intégration avec des Chinois.]

      L’expérience montre que ce n’est pas le cas. Prenez l’indicateur que vous voulez : échec scolaire, population carcérale, actes de violence… la diaspora chinoise en France – et dans l’ensemble des pays développés – est bien plus pacifique, plus respectueuse des lois locales et bien mieux intégré que la diaspora islamique. Et ce n’est pas une question « ethique », mais une question culturelle. La culture chinoise fait une place très importante à l’Etat et à la séparation entre la loi civile et la loi religieuse. Vous aurez du mal à trouver des parents chinois qui refusent d’obéir au règlement de l’école sous prétexte d’une obligation religieuse qui lui serait supérieure. Ce n’est pas le cas de l’Islam.

      [Sinon mon cher Descartes, vous soulignez ici le besoin de mélange des populations. Mais comme je vous l’avais fait remarqué dans un de vos textes précédents, un tel mélange n’est possible que s’il y a des populations à mélanger. Les jeunes têtes blondes manquent à l’appel pour faire le mélange au plus jeune âge.]

      Faudrait tout de même pas exagérer. S’il est vrai qu’il y a un écart de fécondité entre les immigrations récentes et les populations « de souche », cet écart tend se réduit très rapidement. Et puis, arrêtons de fantasmer : les immigrés ne sont pas aussi nombreux que cela. Par ailleurs, et je l’ai dit dans mon papier, il s’agit non seulement de brasser les populations d’enfants, mais aussi les populations d’adultes.

      [Et c’est un problème qui va aller en croissant puisque l’écart entre la fécondité des nouveaux Français et des anciens reste élevé. J’ai envie de dire que la faible fécondité des Français historiques est l’un des facteurs majeurs qui va nuire à l’intégration des nouveaux venue dans les décennies qui viennent.]

      Je peux vous rassurer : les écarts se comblent en fait assez vite. Les immigrés de seconde génération ont un taux de fécondité équivalent aux français « de souche ».

      [On ne peut plus faire l’impasse sur cette réalité en faisant mine de croire que le discours républicain à l’école suffira à intégrer les jeunes d’origine étrangère.]

      Je pense que le risque est en fait l’inverse : qu’a force de s’auto-convaincre que le discours républicain à l’école est impuissant, on se sente autorisé à le remplacer par un discours « communautariste »…

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [L’affaiblissement des institutions qui font la Nation réveille toutes sortes de monstres…][Sans doute, mais à l’opposé du spectre politique, un nationalisme exacerbé avec des institutions tyranniques accouchent de monstres encore plus apocalyptiques.]

      On le dit… mais franchement, les exemples disponibles ne m’ont jamais convaincu. Pour prendre l’exemple classique, le nazisme doit tout à la faiblesse des institutions de la République de Weimar. Je suis d’accord avec Adlai Stevenson : si le pouvoir corrompt, l’impuissance corrompt absolument.

      [Les institutions – du moins celles dont je présume vous voulez parler – ne sont que le reflet de la population qu’elles sont censées servir (au sens de service public).]

      J’ai l’impression que vous avez une vision des institutions qui les confond avec des services publics. Le mariage est une institution. Qui est-elle censée « servir », à votre avis ?

      [Et comme vous l’évoquez fort justement, cette population, c’est à dire nous tous, ne sommes pas prêts à payer le prix pour des institutions qui nous mettent à l’abri de toutes ces turpitudes. Ce qui est valable pour les immigrés maghrébins, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, vaut aussi pour nous tous.]

      Ce n’est pas aussi simple : nous ne vivons pas dans une société homogène, mais dans une société de classe. Et dans beaucoup de cas, ce sont les classes les plus riches et les plus puissantes qui « ne sont pas prêtes à payer » pour des institutions qui « servent » l’ensemble des citoyens. Je ne vois pas pourquoi les couches populaires devraient se sentir responsables du fait que la bourgeoisie et les « classes moyennes » aient sacrifié l’école.

      [Nos “politiques” n’ont pas encore trouvé le fil d’Ariane qui nous mènera d’une société de consommation jouisseuse et individualiste à une société de modération confortable, solidaire et éthique.]

      Mais… qu’est ce qui vous fait penser que « nos politiques » – et les couches sociales auxquelles ils répondent – aient envie d’aller vers une « société de modération confortable, solidaire et éthique » ? La « solidarité » coûte de l’argent, et les « classes moyennes » n’ont pas envie de payer.

      [Avez vous actuellement le profil en vue d’une ou plusieurs personnalités émergente ou confirmée et dans quelle organisation, qui se pose la question en ces termes?]

      Bien sur que si. Des « modérés », ce n’est pas ça qui manque…

      [Les Français seraient-ils disposés à écouter un tel discours?]

      Non, et ils ont bien raison. Se contenter d’une société « confortablement modérée », c’est manquer d’ambition.

      [Petit espoir tout de même, ils ne veulent plus de l’infernal binôme suicidaire de F.H.pépère et N.S.gangster. C’est déjà un grand pas.]

      Vous pêchez par excès d’optimisme.

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes,
      Bonsoir,
      [Nos “politiques” n’ont pas encore trouvé le fil d’Ariane qui nous mènera d’une société de consommation jouisseuse et individualiste à une société de modération confortable, solidaire et éthique.]
      [Se contenter d’une société « confortablement modérée », c’est manquer d’ambition.]
      Voilà une des raisons qui font que je suis “addicte” à votre blog : votre rhétorique est croustillante. Vous avez un art consommé de manipuler les formulations rédigées dans un commentaire. Comme le disait Cocteau, si ma mémoire m’est fidèle, vous chantez fort bien sur votre propre arbre généalogique (culturellement s’entend).
      Quelques éclaircissements libres de tout dogme sont nécessaires. Notre société matérialiste ne semble pas satisfaire la grande majorité des citoyens français, pour des tas de raisons et avec de multiples solutions à l’emporte-pièce pour en sortir. J’entends souvent dire, autour de moi comme à la télé ou à la radio que les générations de l’après baby-boom sont sacrifiées. C’est-à-dire celles qui sont en activité aujourd’hui.
      Je constate que sur le plan matériel, elles sont infiniment mieux équipées que ne l’étaient leurs homologues en 1960, en pleine période des trente glorieuses. Tout d’abord, pour la plupart, c’était au minimum 48h de travail par semaine, et souvent près de 60h. S’y ajoutaient pour beaucoup des temps de trajet de 14h par semaine, pas de voiture pour tout le monde et bien sûr pas deux véhicules par ménage, en général une télé, un téléphone fixe, et quoi de plus sinon quelques accessoires pour faciliter la tâche ingrate des femmes au foyer ? L’essentiel de notre « bonheur » résidait dans notre capacité à construire notre présent et notre avenir par l’ ACTIVITE, sous quelque forme que ce soit, certaines apportant de la promotion sociale, d’autre un épanouissement culturel, d’autres encore une intégration dans des initiatives sociales ou politiques. Actuellement, j’ai le sentiment que la plupart d’entre nous – je ne parle pas des lecteurs et commentateurs de ce blog qui tendent à se détacher de la masse – sont inféodés à l’avoir de tout et n’importe quoi. Ils sont prisonniers de ce besoin de posséder toujours un peu plus demain qu’aujourd’hui, plus que leur voisin, comme la vedette qu’ils admirent à la télé ou sur le net. Les occidentaux et les Français en particulier clament leur insatisfaction tout en ayant subrepticement conscience qu’ils ne voudraient pour rien au monde, changer de pays. Nous sommes riches, bien protégés, encore assez bien éduqués – si nos enfants consentent, les chers petits, à ne pas passer plus de 6h par jour sur leur smartphone ou autre babiole chronophage et abrutissante, cause principale du déclin décrié – bien rémunérés, même avec des iniquités criantes dans la répartition, bien « servicepubliqués », bien considérés des étrangers qui s’étonnent tout de même de notre blues endémique.
      Alors, pour moi, passer d’une société de consommation jouisseuse et individualiste à une société de modération confortable, solidaire et éthique, ce n’est pas péjorativement et au travers d’une rhétorique déformante se contenter d’une société « confortablement modérée », et manquer d’ambition. C’est instaurer une société qui refuse le dictat matérialiste, le toujours plus quantitatif, la course aveugle à la progression maximale du PIB, la compétition et la reconnaissance générale fondées sur l’avoir matériel. Et ne venez pas me dire que je suis partisan de la décroissance car à mes yeux cela ne veut rien dire, car en général, on ne sait pas de quoi on parle. Je vais donner trois exemples triviaux, mais tellement répandus :
      – multipliez par 10 les accidents de la route avec leur lot de handicapés de la route et vous allez immédiatement faire un bond dans le PIB
      – construisez des logements de 200m2 mal isolés pour chaque famille et votre PIB s’envole en même temps que vos calories.
      – faites la promotion du tabac dans les écoles et les maladies que cela engendre sont très efficace pour la progression du PIB.
      Des exemples semblables, sans même parler du problème du déficit de la balance des paiements, montrent à quel point les indicateurs que nous révérons perturbent notre jugement et influencent notre opinion.
      Car de quoi s’agit-il puisque l’on parle de politique ? n’est-ce pas de procurer au plus grand nombre possible d’une population donnée le sentiment de bien-être ?
      Il existe sans aucun doute, un modèle de société qui diverge de la voie dans laquelle nous sommes engagés. Mais cela réclame du courage, de la vision, et surtout du désintéressement de sa propre carrière politique au bénéfice du bien commun. Et ça, c’est de l’utopie. Mais après tout, la réussite du socialisme ou du communisme en sont pour beaucoup aussi.
      Et pour conclure, si je ne suis pa , par principe opposé à toute coopération européenne, sous des formes à élaborer, je suis par contre convaincu qu’un bouleversement radical du système de valeurs auquel j’aspire, ne peut se développer qu’à l’échelle d’une nation. Et là réside un type de projet fort et fédérateur pour sa population.

    • Descartes dit :

      @ marcailloux

      [Se contenter d’une société « confortablement modérée », c’est manquer d’ambition.][Voilà une des raisons qui font que je suis “addicte” à votre blog : votre rhétorique est croustillante. Vous avez un art consommé de manipuler les formulations rédigées dans un commentaire. Comme le disait Cocteau, si ma mémoire m’est fidèle, vous chantez fort bien sur votre propre arbre généalogique (culturellement s’entend).]

      C’est le plus beau compliment qu’on m’ait fait ces derniers temps…

      [J’entends souvent dire, autour de moi comme à la télé ou à la radio que les générations de l’après baby-boom sont sacrifiées. C’est-à-dire celles qui sont en activité aujourd’hui. Je constate que sur le plan matériel, elles sont infiniment mieux équipées que ne l’étaient leurs homologues en 1960, en pleine période des trente glorieuses.(…)]

      Je suis tout à fait d’accord avec vous. Même si en termes relatifs certaines couches sociales ont perdu du niveau de vie, en termes absolus pratiquement tout le monde y a gagné. Le discours pleurnichard selon lequel les enfants vivront – matérialement – moins bien que leurs parents doit être sérieusement relativisé. En termes absolus, c’est presque toujours faux. Faudrait pas oublier qu’en 1960, en plein milieu des « trente glorieuses », la voiture était encore un objet de luxe et les toilettes étaient encore pour beaucoup de parisiens sur le palier. Et ne parlons même pas du risque très réel d’aller à la guerre : les derniers appelés à la faire sont revenus en 1962.

      [L’essentiel de notre « bonheur » résidait dans notre capacité à construire notre présent et notre avenir par l’ ACTIVITE, sous quelque forme que ce soit, certaines apportant de la promotion sociale, d’autre un épanouissement culturel, d’autres encore une intégration dans des initiatives sociales ou politiques. Actuellement, j’ai le sentiment que la plupart d’entre nous – je ne parle pas des lecteurs et commentateurs de ce blog qui tendent à se détacher de la masse – sont inféodés à l’avoir de tout et n’importe quoi. Ils sont prisonniers de ce besoin de posséder toujours un peu plus demain qu’aujourd’hui, plus que leur voisin, comme la vedette qu’ils admirent à la télé ou sur le net.]

      Je ne le formulerais pas tout à fait comme ça. Oui, on est probablement plus « inféodés à l’avoir » que nos parents. Mais je me demande depuis longtemps si c’était là une cause ou une conséquence. En d’autres termes, je me demande si la possession d’objets, le plaisir de la « marque » n’est pas un substitut, une forme de combler ce besoin de « construire notre présent et notre avenir » auquel notre société ne donne pas d’exutoire. L’homme ne vit pas de pain seulement. Et c’est pourquoi j’ai réagi à votre remarque sur cette société de « modération confortable »…

      [Les occidentaux et les Français en particulier clament leur insatisfaction tout en ayant subrepticement conscience qu’ils ne voudraient pour rien au monde, changer de pays. Nous sommes riches, bien protégés, encore assez bien éduqués – si nos enfants consentent, les chers petits, à ne pas passer plus de 6h par jour sur leur smartphone ou autre babiole chronophage et abrutissante, cause principale du déclin décrié – bien rémunérés, même avec des iniquités criantes dans la répartition, bien « servicepubliqués », bien considérés des étrangers qui s’étonnent tout de même de notre blues endémique.]

      Peut-être sommes nous ainsi parce que – et c’est là notre grandeur et notre misère – nous venons d’une culture qui ne se satisfait pas, qui ne s’est jamais satisfaite du « bonheur bourgeois ». Nous ne sommes pas encore totalement américanisés, en ce que nous ne sommes pas capables de vivre dans une « bulle » de l’espace-temps qui ne va pas plus loin que notre nez. Nous avons une « certaine idée » de notre pays, nous avons besoin d’un peu de « grandeur » dans nos vies, ne serait-ce que par procuration.

      [Alors, pour moi, passer d’une société de consommation jouisseuse et individualiste à une société de modération confortable, solidaire et éthique, ce n’est pas péjorativement et au travers d’une rhétorique déformante se contenter d’une société « confortablement modérée », et manquer d’ambition. C’est instaurer une société qui refuse le dictat matérialiste, le toujours plus quantitatif, la course aveugle à la progression maximale du PIB, la compétition et la reconnaissance générale fondées sur l’avoir matériel.]

      Je m’excuse si je vous ai mal compris. A ma décharge, je dois dire que vous n’avez pas été très explicite. Oui, pourquoi pas une société de « modération confortable » sur le plan matériel – j’aurais presque envie de substituer à cette formule l’idée même de « frugalité confortable » – à condition qu’elle s’accompagne d’une grande ambition collective.

      [Je vais donner trois exemples triviaux, mais tellement répandus : (…)]

      Pitié, vous n’allez pas me répéter ces vieilles sornettes ! Il n’y a que deux manières d’augmenter le PIB : l’une est d’augmenter le nombre d’heures travaillées, l’autre est d’augmenter la productivité du travail. Il s’ensuit, avec une impeccable logique, qu’aucune des mesures que vous suggérez n’a le moindre effet sur le PIB. Elles ne font que déplacer le PIB d’une branche à une autre. Ainsi, par exemple, en faisant la promotion du tabac dans les écoles vous obtiendrez un gain pour l’industrie du tabac, mais l’argent qui servira aux écoliers a acheter des cigarettes ne servira plus à acheter des Carambar, et vous perdrez d’un côté ce que vous avez gagné de l’autre.

      [Car de quoi s’agit-il puisque l’on parle de politique ? n’est-ce pas de procurer au plus grand nombre possible d’une population donnée le sentiment de bien-être ?]

      C’est une grande discussion. Personnellement, je ne le pense pas. La politique n’a pas pour but de faire le bonheur des gens – cela supposerait que le politique sache ce qui rend heureux les gens, ce qui me semble impraticable. L’objectif de la politique, c’est de donner aux gens des choix. A eux de choisir ce qui les rend heureux. Une politique est bonne lorsqu’elle élargit la panoplie des choix possibles.

  2. Mohamed dit :

    Hollande a programmé le changement de constitution: pour enlever la phrase’le français est la langue de la république’ afin de reconnaitre les langues régionales et l’Arabe et le Chinois par des régies publiques chargée de faire la promotion des langues régionales et de l’Arabe et le du Chinois .
    Il était un pays qu’on appelait la France….

  3. CVT dit :

    @Descartes,
    c’est un vrai cri du coeur, et en plus, je vous trouve bien poli! Moi, je n’éprouve que de la rancoeur et de la colère pour ses femmes, alors que je rêve de les mépriser!
    Mes parents viennent d’Afrique, eux aussi! Mais contrairement à ces “gentilles” dames, ils n’ont JAMAIS voulu imposer leurs usages aux autochtones (en l’occurence aux Français), et ils nous punissaient, quand avec mes frères et soeurs, nous nous comportions mal à l’école! Même avec une perspective de retour “au pays”, comme ils disaient, nous devions nous comporter en “petits Français”!
    Mais ça, c’est avant SOS-RACISME et compagnie, qui ont mis en bière l’assimilation et porter au pinacle ce foutu (et je suis calme) “droit à la différence” en 1984. Et assez rapidement, nous en avons vu les effets (j’ai bien failli écrire “méfaits”): la forfaiture de L.Jospin et de ses camarades socialistes, lors de l’affaire du voile de Creil en 89, a marqué selon moi, le top-départ de l’islamisation des banlieues.
    Plus de 25 ans après, nous constatons les dégâts: Mehra, Nemmouche, qui me touche particulièrement car il a commis son attentat à Bruxelles près d’une rue où j’ai longtemps habité, et ces petits salopards de Kouachi-Coulibaly (je sais que je viens de passer la ligne jaune, mais là, je me retiens à grand peine: Coulibaly habitait à Fontenay-aux-Roses, où j’ai passé les dix-huit premières années de ma vie!), sans parler des zones de non-droits où islam et trafics de drogue régulent la vie des habitants!
    Et vous savez pourquoi je suis en colère? C’est parce que, jamais dans l’histoire récente de notre pays, une génération d’immigrés n’a été à ce point ASSISTEE! Et ces femmes, comme les énergumènes que j’ai cités plus haut, ont été arrosés de subventions anti-banlieues chaudes, et tout ça, en guise de remerciement, pour cracher à la gueule des Français! Et comme cela ne suffisait pas, ces femmes nous narguent, elles veulent nous humilier: elles veulent se sentir…FRANÇAISES!
    Assez! Ca suffit de ce genre de revendications, de droits sans obligations ni devoirs, car c’est sans fin: ces femmes, aujourd’hui, réclament vivre à la française, alors que pendant une génération, elles n’ont fait qu’exercer leur droit à la différence! Quelle indécence!
    Enfin, je voudrais tenter d’être juste: c’est parce que nous avons renoncé à être nous-mêmes, à savoir des FRANÇAIS fiers de leur héritage historique qui fait de notre pays ce qu’il est, que nous en sommes arrivés là! Si nous avions été plus fermes dans notre discours sur nos usages, jamais un texte aussi provocateur et outrageant n’aurait vu le jour…

    • Descartes dit :

      @ CVT

      [Moi, je n’éprouve que de la rancoeur et de la colère pour ses femmes, alors que je rêve de les mépriser!]

      Je n’ai pas un tempérament coléreux, et j’ai du mal à ressentir de la « rancœur » devant des gens qui font le mal non pas par volonté mais par inconscience. Et qui accessoirement scient la branche sur laquelle ils sont assis. « Pardonnez-les, seigneur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». J’aurais plus tendance à sentir de la colère et de la rancœur pour les journalistes de « Libération », qui n’ont pas la circonstance atténuante de l’ignorance.

      [Mes parents viennent d’Afrique, eux aussi! Mais contrairement à ces “gentilles” dames, ils n’ont JAMAIS voulu imposer leurs usages aux autochtones (en l’occurence aux Français), et ils nous punissaient, quand avec mes frères et soeurs, nous nous comportions mal à l’école! Même avec une perspective de retour “au pays”, comme ils disaient, nous devions nous comporter en “petits Français”!]

      Mes parents sont aussi des immigrés. Et ils avaient la même attitude. Et je peux témoigner que l’assimilation a marché, et que j’ai pu accéder aux mêmes études, aux mêmes emplois qu’un petit français « de souche ». Mais ça, c’était avant…

      [Et vous savez pourquoi je suis en colère? C’est parce que, jamais dans l’histoire récente de notre pays, une génération d’immigrés n’a été à ce point ASSISTEE! Et ces femmes, comme les énergumènes que j’ai cités plus haut, ont été arrosés de subventions anti-banlieues chaudes, et tout ça, en guise de remerciement, pour cracher à la gueule des Français! Et comme cela ne suffisait pas, ces femmes nous narguent, elles veulent nous humilier: elles veulent se sentir…FRANÇAISES!]

      C’est là la tragédie : ces femmes veulent se sentir « françaises ». Il suffirait que la France réponde à ce désir par une véritable politique d’assimilation pour que le miracle s’accomplisse. Mais plutôt que mettre de l’argent dans une telle politique, nos « classes moyennes » préfèrent subventionner des associations communautaristes et acheter les « grands frères » pour avoir la paix. Pourquoi ? Parce qu’une politique d’assimilation transformerait les petits d’origine immigrée en concurrents pour leurs propres enfants. Mieux vaut les parquer dans leur ghetto et leurs donner quelques sucettes pour qu’ils ne fassent pas chier.

      [Enfin, je voudrais tenter d’être juste: c’est parce que nous avons renoncé à être nous-mêmes, à savoir des FRANÇAIS fiers de leur héritage historique qui fait de notre pays ce qu’il est, que nous en sommes arrivés là! Si nous avions été plus fermes dans notre discours sur nos usages, jamais un texte aussi provocateur et outrageant n’aurait vu le jour…]

      Il n’est pas trop tard pour changer de politique…

    • CVT dit :

      @Descartes,
      [Je n’ai pas un tempérament coléreux, et j’ai du mal à ressentir de la « rancœur » devant des gens qui font le mal non pas par volonté mais par inconscience. Et qui accessoirement scient la branche sur laquelle ils sont assis. « Pardonnez-les, seigneur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». J’aurais plus tendance à sentir de la colère et de la rancœur pour les journalistes de « Libération », qui n’ont pas la circonstance atténuante de l’ignorance.]

      Moi non plus, je ne suis pas foncièrement porté à m’énerver, mais reconnaissez tout de même que ce “papier” est une vraie provocation! Concernant “Libération”, je serais presque d’accord avec vous, mais qui vous dit que les journalistes, qui ont fait paraître cette tribune, ne pèchent pas eux aussi par ignorance?
      C’est peut-être bien le noeud du problème: ces derniers ne connaissent rien des couches populaires au nom desquelles ils prétendent parler, et pire encore, ils ignorent eux-mêmes (ou méprisent, ce qui serait plus exact) ce qui fait de nous des Français, à commencer par notre culture! Ces journalistes sont eux-mêmes acculturés et acquis à la mentalité anglo-saxonne (“Américains à passeport français”, comme disait jadis Eric “Ganelon” Besson, à propos de Nicolas Sarkozy, avant de le rejoindre dans son gouvernement…)
      Ils refusent de voir que leur idéologie communautariste est mortifère car fauteur de guerre civile. Bref, une vraie bande d’illuminés irresponsables!
      C’est un sacré problème auquel nous avons à faire: une élite (et “Libération” en est l’un des porte-voix) qui ne se sent jamais comptable ni responsable des conséquences et des résultats de décisions prises il y a une génération doit être renversée…

    • Descartes dit :

      @ CVT

      [Moi non plus, je ne suis pas foncièrement porté à m’énerver, mais reconnaissez tout de même que ce “papier” est une vraie provocation!]

      Oui, mais l’auteur de cette « provocation » est le journaliste qui a écrit l’article, et non pas les femmes qui en sont le sujet…

      [Concernant “Libération”, je serais presque d’accord avec vous, mais qui vous dit que les journalistes, qui ont fait paraître cette tribune, ne pèchent pas eux aussi par ignorance?]

      Ils pêchent certainement par ignorance, mais l’ignorance chez un journaliste n’est pas une circonstance atténuante, plutôt le contraire.

      [C’est peut-être bien le noeud du problème: ces derniers ne connaissent rien des couches populaires au nom desquelles ils prétendent parler,]

      En fait, cela ne les intéresse pas. Souvent, dans ce genre d’article l’invocation des couches populaires n’est qu’un prétexte pour vendre une idéologie préprogrammée. Vous remarquerez d’ailleurs qu’on ne trouve que rarement des articles de ce type qui contredisent la « vulgate »…

  4. morel dit :

    J’avoue que cette histoire de « petits blonds » me laisse pantois et ma raison me commande de chercher plus avant.

    Dans l’article en question :
    « C’est un simple courrier qui a fait flamber leur colère. Reçu fin 2014, il les informe que tous les élèves de CM2 du Petit Bard doivent s’inscrire à la prochaine rentrée au collège Las Cazes, un établissement souffrant d’une image peu flatteuse. «Auparavant, une partie des enfants du quartier pouvait rejoindre le collège Rabelais, où la mixité est plus importante. Mais à Las Cazes, il n’y a aucune mixité, dénonce Fatima. Du coup, nous avons réalisé que les enfants du Petit Bard allaient tous se suivre de la maternelle à la fin du collège, sans découvrir la culture de l’autre et le vivre ensemble, sans mélange, sans ouverture…»

    Je ne connais pas Montpellier mais je note que les écoles des réclamantes se situent en ZEP ainsi que très certainement le collège Las Cazes (même si ce n’est pas le cas formellement).
    Comme de nombreuses mères, ces personnes souhaitent le mieux pour l’avenir de leurs enfants, ce qui est naturel.

    Il aurait fallu un vrai travail de journalisme pour mettre en évidence le non-dit, les contradictions, ce que vous faites très bien en soulignant le « prix à payer ».

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Comme de nombreuses mères, ces personnes souhaitent le mieux pour l’avenir de leurs enfants, ce qui est naturel.]

      Ce n’est pas moi qui leur reprocherait, au contraire. Et je trouve plutôt rafraîchissant que les immigrés se mettent à réclamer ce « brassage » qui était le fondement de notre politique d’assimilation avant que les « classes moyennes » cassent tout. Ce qui me gêne, c’est l’idéologie que diffuse « Libération » : on peut en même temps avoir la « mixité » et les mères voilées. C’est toujours pareil : s’il y a un problème, c’est bien évidemment la faute des institutions, jamais des gens.

      [Il aurait fallu un vrai travail de journalisme pour mettre en évidence le non-dit, les contradictions,]

      Un vrai travail de journalisme à « Libération » ? Vous rêvez…

    • marc.malesherbes dit :

      @ morel

      savoureux ces noms de collège; pour le collège sans doute le plus ancien, on a choisi un nom traditionnel d’un grand écrivain ayant participé à l’usage et la définition des débuts de la langue française. Pour le deuxième, sans doute plus récent, installé sans doute au milieu de HLM (hypothèses à confirmer), on a choisi le nom de Las Cazes, militaire certes connu pour avoir recueilli les mémoires de l’empereur à Saint Hélène, mais sans aucune épaisseur quelconque; c’est bien suffisant pour des habitants de deuxième zone.

    • Descartes dit :

      @marc.malesherbes

      Je vous trouve bien dur… il est vrai que les qualités littéraires du Comte de Las Cases ne sont certainement pas extraordinaires… mais on peut lui reconnaître au moins une qualité: la loyauté. Alors que tous laissaient tomber l’empereur déchu, qu’il n’y avait plus rien à attendre de lui, ni honneurs, ni postes, il est parti en exil avec lui… ça mérite bien un collège!

    • morel dit :

      @ marc.malesherbes

      Pour les noms des établissements publics d’enseignement, je crois que cela tient beaucoup plus à la médiocrité de nos représentants.
      Nombre d’écoles « historiques » portent le nom d’un promoteur de l’enseignement public : Jules Ferry, Paul Bert, Ferdinand Buisson…lycées et collèges se voyaient dotés des grands noms de la République ou de littérateurs ou philosophes majeurs.
      Le changement de « climat politique » et la décentralisation briseront cette tradition.
      Je vous laisse juge d’un bel exemple :

      http://www.maire-info.com/education-jeunesse/education/le-collge-de-rougemont-le-chateau-territoire-de-belfort-prend-le-nom-de-coluche-mais-le-maire-condamne-ce-choix-article-7486

      Somme toute, Las Cases pas si indigne…

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Pour les noms des établissements publics d’enseignement, je crois que cela tient beaucoup plus à la médiocrité de nos représentants.]

      Pas seulement. On ne peut vraiment reprocher aux « représentants » de faire la volonté de leurs administrés. Nos représentants ne font que faire écho à une médiocrité généralisée, celle de la « société du spectacle ». Nos grands parents n’étaient pas plus cultivés ou plus savants que nous. Souvent, ils l’étaient moins. Mais ils adhéraient à une hiérarchie de valeurs : Victor Hugo n’appartenait pas au même ordre que Maurice Chevalier, Jules Ferry ne jouait pas dans la même catégorie que Mistinguett. Et c’est pourquoi ils auraient parfaitement admis qu’on donne le nom de Chevalier à un théâtre, mais pas à un Lycée. Un scientifique, un écrivain, un homme d’Etat n’étaient pas les égaux d’un comique. A la télévision, les comiques allaient à des émissions comiques, les ministres à des émissions politiques, les philosophes à des émissions de philosophie, les écrivains à des émissions littéraires. Ce n’est que très récemment qu’on a pu voir dans le même plateau un acteur et un ministre, un comique et un philosophe. Et si on les voit dans les mêmes émissions, s’ils parlent des mêmes sujets, pourquoi ne pourrait-on donner leurs noms aux mêmes institutions ?

      [Nombre d’écoles « historiques » portent le nom d’un promoteur de l’enseignement public : Jules Ferry, Paul Bert, Ferdinand Buisson…lycées et collèges se voyaient dotés des grands noms de la République ou de littérateurs ou philosophes majeurs.]

      Et pas seulement « de la République ». De la France. Après tout, on a donné à des lycées et des collèges le nom de Charlemagne, de Richelieu, de Louis XIV (« Louis le Grand »), d’Henri IV. Nos lycées et nos collèges égrenaient le nom des « grands hommes » qui avaient fait la France et qu’on donnait en exemple à la jeunesse. Et si quelquefois on donnait au lycée le nom d’un grand homme « local », on essayait de trouver quelqu’un ayant eu une résonance nationale ou universelle : Faidherbe à Lille, Champollion à Grenoble, Bonaparte à Ajaccio…

      [Le changement de « climat politique » et la décentralisation briseront cette tradition.]

      Et surtout la démagogie attachée à la « société du spectacle ».

      [Je vous laisse juge d’un bel exemple : (…)]

      Merci, je connaissais cet exemple… et il n’est pas le seul, malheureusement.

    • BolchoKek dit :

      @Descartes

      >Ce n’est que très récemment qu’on a pu voir dans le même plateau un acteur et un ministre, un comique et un philosophe. Et si on les voit dans les mêmes émissions, s’ils parlent des mêmes sujets, pourquoi ne pourrait-on donner leurs noms aux mêmes institutions ?< Je te trouve un peu dur. A ma connaissance, personne n’a jamais considéré BHL comme l’égal d’un philosophe…

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [Je te trouve un peu dur. A ma connaissance, personne n’a jamais considéré BHL comme l’égal d’un philosophe…]

      Vous êtes trop jeune pour vous en souvenir, mais il fut un temps, à la fin des années 1970, ou André Glucksman et Bernard-Henri Lévy étaient non seulement considérés comme des philosophes, mais même comme les fondateurs d’une école philosophique, celle de la « nouvelle philosophie ». Le fait que cette « nouvelle philosophie » était violemment antisoviétique et anticommuniste leur ouvrit beaucoup de portes dans le monde universitaire et bien entendu dans les ondes de la radio et de la télévision nationale…

      Ce n’est qu’un peu plus tard, lorsque la « nouvelle philosophie » cessa d’être politiquement utile qu’elle fut oubliée et que Bernard-Henri Lévy se reconvertit en BHL…

    • morel dit :

      Veuillez m’excuser pour le retard dans la réponse.
      Je n’ai pas vraiment l’impression d’une demande de « brassage » stricto sensu. Le problème me semble se poser à elles uniquement à partir des espoirs mis dans l’avenir de leurs enfants, ce qui en soit, quitte à me répéter n’est pas anormal, mais ne remet nullement en cause leur façon « d’être » (elles n’en ont pas le monopole, tant la conception « libertarienne » a gagné du terrain ; en phase avec l’évolution de l’idéologie dominante, elle-même en rapport avec la phase actuelle du système économique). Ce ne serait pas un crime en soi s’il était source concrète d’évolutions mais j’en doute fort dans le contexte actuel.
      Il y a 30 ans, un de mes amis a connu une petite « beurette » (je n’aime pas ce terme mais l’utilise pour « situer ») qui avait décidée d’être autonome à l’égard de sa famille, pas simple du tout. Ils se sont mariés. Lorsque l’enfant est paru, un rapprochement s’est opéré avec sa famille via sa sœur.
      Je me souviens parfaitement des « mises au point » de cette amie : « ils veulent bien le garder car il s’agit d’un garçon mais j’ai interdit à ma mère de le faire circoncire, c’est la condition. ».
      Ils sont maintenant divorcés. Je vois toujours l’un et l’autre et n’ai jamais vraiment su comment rendre un juste hommage à sa force de caractère.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Je n’ai pas vraiment l’impression d’une demande de « brassage » stricto sensu. Le problème me semble se poser à elles uniquement à partir des espoirs mis dans l’avenir de leurs enfants, ce qui en soit, quitte à me répéter n’est pas anormal, mais ne remet nullement en cause leur façon « d’être » (elles n’en ont pas le monopole, tant la conception « libertarienne » a gagné du terrain ; en phase avec l’évolution de l’idéologie dominante, elle-même en rapport avec la phase actuelle du système économique).]

      Vous avez peut-être raison sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une demande de « brassage » per se. Mais ces dames ont l’air d’avoir compris les dangers du « développement séparé », et semblent conscientes du fait que l’avenir de leurs enfants passe nécessairement par le « brassage ». Je pense même qu’elles vont plus loin, lorsqu’elles disent regretter que leurs enfants ne bénéficient pas de l’expérience de la « mixité » dans leur quartier, expérience dont elles ont-elles mêmes bénéficié dans leur enfance.

      Je partage par contre totalement votre conclusion. Oui, l’idéologie « libérale-libertaire » qui est aujourd’hui la pensée dominante empêche les gens de comprendre que cette « mixité » qu’ils appellent de leurs vœux est incompatible avec la liberté absolue de choisir sa « façon d’être ». La loi peut m’obliger a accepter que des gens se promènent voilées dans la rue, mais elle ne peut m’obliger à leur adresser la parole. La mixité implique de se faire accepter par l’autre, et cette acceptation implique des concessions.

      [Ils sont maintenant divorcés. Je vois toujours l’un et l’autre et n’ai jamais vraiment su comment rendre un juste hommage à sa force de caractère.]

      L’assimilation n’est jamais indolore. C’est d’ailleurs pourquoi on ne peut pas la laisser au choix de l’individu. Lui laisser le choix implique de faire peser sur les épaules de l’individu le choix de dire « non » à ses ancêtres, à sa famille, à sa communauté. C’est un poids trop lourd. Le fait que la société d’accueil dise « c’est comme ça et pas autrement » libère les individus de ce poids.

    • BolchoKek dit :

      @Descartes (désolé pour la réponse tardive)

      >Vous êtes trop jeune pour vous en souvenir, mais il fut un temps, à la fin des années 1970, ou André Glucksman et Bernard-Henri Lévy étaient non seulement considérés comme des philosophes, mais même comme les fondateurs d’une école philosophique, celle de la « nouvelle philosophie ».< C’est vrai que quinze ans avant moi-même, j’étais jeune… mais je m’en “souviens” parfaitement 😉
      J’ai bien entendu connaissance de ce qu’était la “nouvelle philosophie”, le battage médiatique autour de ce “courant de pensée” que l’on présentait comme avant-gardiste, de BHL et Glucksmann chez Pivot dénonçant la “barbarie à visage humain” soviétique et l’idéologie “intrinsèquement criminelle” qu’était le marxisme… Mais je te fais remarquer que déjà à l’époque, bien des intellectuels ayant un minimum de sérieux lui contestaient sa qualité de philosophe, et même de penseur. Le personnage a cela de fascinant qu’il semble insubmersible : les seuls à dire du bien de lui sont ses “protégés” et les gens qui dépendent directement ou indirectement de lui et de son réseau d’influence, tout le monde s’accorde sur le fait que ses livres, ses films, en plus d’être des échecs commerciaux, sont atrocement mauvais, mais il est toujours là, gonflé de suffisance.
      Bernard-Henri Lévy me fait penser à une sorte de Cassandre à l’envers : il dit systématiquement n’importe quoi, mais tout le monde est obligé de l’écouter. La rencontre entre l’anticommunisme et l’essor du système médiatique moderne a décidément produit d’étranges spécimens…

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      J’aime beaucoup votre comparaison de BHL à une “Cassandre à l’envers”…

  5. marc.malesherbes dit :

    votre texte fait réfléchir.

    Comme beaucoup j’imagine, je serai partisan de poursuivre notre politique d’autrefois qui était “assimilationniste”. Vous soulignez qu’elle demande des efforts de la part de ceux qui arrivent. Il me semble (fantasme ?) que ces efforts étaient autrefois consentis par beaucoup d’arrivants parce qu’ils avaient une bonne image de la culture française, et qu’ils en comprenaient l’intérêt pour leurs enfants (1).

    Aujourd’hui nous faisons tout pour dévaloriser cet image de notre culture. Il reste l’intérêt de leurs enfants. Apparemment ce n’est plus leur souci (majoritairement). En cela ils ne diffèrent guère de nos concitoyens “ordinaires”. La suppression de l’école du samedi matin a été accueilli dans l’indifférence, voire le soulagement, par la grande majorité des parents. Dans l’immigration, comme chez nous, l’égoïsme des parents “moi d’abord” semble être devenu la règle. Certes je généralise un peu, et si l’on regarde les attitudes par origine cela diffère sensiblement. De multiples anecdotes me montrent que dans les milieux d’origine asiatique, l’éducation des enfants à l’école est généralement considéré comme importante (2).

    Ceci dit, la politique, c’est l’art du possible. Le modèle USA est clairement “notre” avenir. Il l’a été depuis 1945, et je ne vois rien qui démente cette tendance. Tout nos partis politiques sont “multiculturalistes” de fait. C’est particulièrement vrai pour toute la gauche, vrai de fait pour l’UMP (rappelons nous du préfet “musulman”, l’inauguration des ministres “mannequins” issus de l’immigration, à double nationalité). Certes on peut prêter une attitude différente (3) à “Debout la France” et au FN. Mais ils sont dans l’opposition. Au pouvoir ce serait peut-être une autre musique.

    Est-il possible et réaliste d’être aujourd’hui “assimilationniste” ? J’ai des doutes, car le multiculturalisme est le modèle dominant pour de bonnes raisons. Il permet, sans le dire, de recréer des “quartiers réservés” (4) comme le montre votre article. Et l’avantage, c’est qu’on peut les “gérer” au moindre coût. Services publics minimum, chômage de masse accepté car “habituel” … De plus cela permet à ceux qui veulent vraiment s’assimiler d’en sortir si ils le veulent (enfants dans les écoles privés ou déplacement hors de ces quartiers). C’est d’ailleurs la thèse que j’ai vu soutenir par des sociologues ayant pignon sur rue (à France Culture). Certes cela a aussi quelques inconvénients, mais bien moindre qu’un véritable traitement “égalitaire” des immigrés et des premières générations françaises. Et comme nous avons de moins en moins d’argent (5), c’est une économie bienvenue, permettant de ne pas trop restreindre ceux se situant dans des endroits encore majoritairement autochtones. Ce sera un peu fini de notre objectif d’égalité, car le multiculturalisme implique un différentialisme de fait (6), comme le montre les USA. Mais on ne le dira pas.

    mon interrogation porte sur ce qu’est la politique: est-il raisonnable de se battre contre un courant très majoritaire, sans verser dans la secte ? C’est difficile à trancher. Dans les années 50, au Moyen Orient, c’était la grande heure du “nationalisme arabe”. Les mouvements islamistes paraissaient des résidus de l’histoire. Aujourd’hui ils n’ont pas gagné définitivement, mais ils ont de beaux succès, dont le Hamas, le Hezbollah, l’Etat islamique, Al nostra, l’Arabie Saoudite, le Qatar … Idem pour les juifs orthodoxes, qui n’ont pas encore marqués de points décisifs, hors l’assassinat de Rabbin, mais qui semblent prendre la voie d’une hégémonie sur le monde juif.

    (1) j’ai lu beaucoup de témoignages de ceux dont les parents s’obligeaient à parler français à la maison.
    (2) je me rappelle notamment de ce professeur de Belleville qui disait ne plus oser faire des remarques sur ses élèves d’origine asiatique (quand cela aurait été nécessaire), car les punitions familiales étaient terribles.
    (3) je n’ai pas fouillé leurs programmes, mais c’est la tonalité de leurs interventions dans les grands médias;
    (4) je n’ose écrire ghetto, car avec la solution finale du 3ème Reich, ce mot a pris une connotation très négative. Mais pendant tout le XIX ème et le début du XXème, cela a simplement été des quartiers ou se regroupaient les juifs qui ne voulaient pas s’assimiler.
    (5) je sais que ce manque d’argent est en grande partie lié à notre politique économique, et européenne. Mais je ne vois ni le PS, ni l’UMP en changer. Une devinette: combien à coûté et va coûter la Grèce par contribuable français ?
    (6) je n’ose pas écrire “apartheid de fait” car cela serait jugé polémique.

    • Descartes dit :

      @ marc.malesherbes

      [Il me semble (fantasme ?) que ces efforts étaient autrefois consentis par beaucoup d’arrivants parce qu’ils avaient une bonne image de la culture française, et qu’ils en comprenaient l’intérêt pour leurs enfants.]

      Tout à fait. Mais pour que les parents immigrés aient « une bonne image de la culture française », il faut que les français eux-mêmes – et les institutions publiques – aient elles aussi une « bonne image » de leur culture. Si l’on passe la moitié du temps à cracher sur la culture française – culture eurocentrique, sexiste, raciste, etc. – et l’autre moitié à affirmer que seul le « métissage » et ce qui vient d’ailleurs vaut quelque chose, il va être difficile pour des parents immigrés d’accepter que cela vaut la peine d’incorporer cette culture.

      [Il reste l’intérêt de leurs enfants. Apparemment ce n’est plus leur souci (majoritairement). En cela ils ne diffèrent guère de nos concitoyens “ordinaires”. La suppression de l’école du samedi matin a été accueilli dans l’indifférence, voire le soulagement, par la grande majorité des parents.]

      Il a là un paradoxe intéressant. Autant les parents croient dans la magie du diplôme, autant ils sont assez insensibles à la qualité des apprentissages en eux-mêmes. Pourvu que leur enfant décroche son diplôme, les parents se foutent du contenu réel du diplôme en question. On peut raboter les programmes, les heures de cours, et tout le monde s’en fout. Mais si vous touchez au diplôme, par exemple, en « durcissant » le Bac pour qu’il soit vraiment sélectif – et du coup prive les enfants des classes moyennes d’une place à l’université – vous aurez tout le monde sur le dos.

      [Ceci dit, la politique, c’est l’art du possible.]

      Je reste plutôt attaché à la vision « réaliste » qui fut celle de Richelieu : « l’art de la politique, c’est de rendre possible ce qui est nécessaire ».

      [Le modèle USA est clairement “notre” avenir. Il l’a été depuis 1945, et je ne vois rien qui démente cette tendance. Tout nos partis politiques sont “multiculturalistes” de fait.]

      Je ne le crois pas. Notre « multiculturalisme » est très différent du « multiculturalisme » américain, tout simplement parce que nos « classes moyennes » sont différentes des « classes moyennes » américaines. Aux Etats-Unis, le « multiculturalisme » répond à une problématique très américaine, qui est celle de la ségrégation raciale. Nous n’avons pas du tout les mêmes problématiques, et c’est d’ailleurs pourquoi les tentatives d’importer le « multiculturalisme » à l’américaine (« affirmative action » sous toutes ses formes, promotion des « cultures minoritaires » dans l’enseignement) ont très largement échoué.

      Mais vous avez raison de dire que s’opposer au « multiculturalisme », ce n’est pas aujourd’hui aller dans le sens de l’histoire. Mais il y a des combats qu’il faut mener, même si on sait que la victoire n’est pas pour demain, parce qu’en combattant on sème les graines qui permettront demain de changer le cour de l’histoire. La domination des « classes moyennes » et leur alliance avec la bourgeoisie ne sont pas la fin de l’histoire.

      [C’est particulièrement vrai pour toute la gauche, vrai de fait pour l’UMP (rappelons nous du préfet “musulman”, l’inauguration des ministres “mannequins” issus de l’immigration, à double nationalité). Certes on peut prêter une attitude différente (3) à “Debout la France” et au FN. Mais ils sont dans l’opposition. Au pouvoir ce serait peut-être une autre musique.]

      C’est beaucoup plus nuancé que cela. L’opération « préfet musulman » a ridiculisé ses initiateurs, et la meilleure preuve est que personne ne s’en vante. Si le « multiculturalisme » est l’idéologie des « classes moyennes », elle est moins dominante qu’on ne pourrait le craindre et en ce moment elle est plutôt sur le recul.

      [Est-il possible et réaliste d’être aujourd’hui “assimilationniste” ? (…)]

      Autant que d’être antinazi dans l’Allemagne de 1938… comme je vous l’ai dit plus haut, il y a des combats qu’il faut mener même si c’est sans espoir à court terme.

      [De plus cela permet à ceux qui veulent vraiment s’assimiler d’en sortir si ils le veulent (enfants dans les écoles privés ou déplacement hors de ces quartiers). C’est d’ailleurs la thèse que j’ai vu soutenir par des sociologues ayant pignon sur rue (à France Culture).]

      Cette idée selon laquelle l’assimilation reste toujours possible « pour ceux qui le veulent » est l’un des meilleurs alibis des idéologues multiculturalistes. Il y a quelques années, l’assimilation c’était l’horreur. Aujourd’hui, devant l’échec patent des politiques alternatives, on nous expliquera que finalement l’assimilation ce n’est pas si mal que ça, à condition que ce soit « volontaire ». En fait, l’assimilation ne peut être « volontaire » que dans des cas exceptionnels, chez certains courants migratoires qui viennent de cultures fortement « assimilationnistes » – comme ce fut le cas hier pour les juifs ashkénazes ou les migrants d’extrême-orient – et qui sont intellectuellement proches de la culture d’accueil. Pour les immigrants d’Afrique du nord ou subsaharienne, l’assimilation volontaire est une vue de l’esprit. Sans une véritable pression de la société d’accueil, impossible de briser les obstacles.

      [mon interrogation porte sur ce qu’est la politique: est-il raisonnable de se battre contre un courant très majoritaire, sans verser dans la secte ? C’est difficile à trancher.]

      Je ne vois pas la « difficulté ». Certains combats ont été très minoritaires pendant longtemps, avant de devenir majoritaires. Bien entendu, il ne faut pas tomber dans la « secte ». Pour éviter de le faire, il faut rester à l’écoute et chercher à comprendre pourquoi les idéologies « diversitaires » fonctionnent…

      [(4) je n’ose écrire ghetto, car avec la solution finale du 3ème Reich, ce mot a pris une connotation très négative. Mais pendant tout le XIX ème et le début du XXème, cela a simplement été des quartiers ou se regroupaient les juifs qui ne voulaient pas s’assimiler.]

      C’est inexact. Le ghetto ne regroupe pas « les juifs qui ne voulaient pas s’assimiler ». Le ghetto n’a existé que dans les pays et les époques ou les juifs n’étaient pas des sujets ou des citoyens comme les autres, soumis aux mêmes lois et jouissant des mêmes droits. Le fait de vivre dans des quartiers réservés permettait aux juifs de continuer de jouir d’un « statut personnel » en minimisant les conflits avec les populations soumises à un autre droit. Là où les juifs ont obtenu la citoyenneté, le ghetto a très rapidement disparu. Ce qui prouve que le problème n’était pas le refus de s’assimiler, mais la possibilité de le faire.

  6. Antoine dit :

    Bonjour,
    J’ai posté un lien vers votre article dans les réponses au texte suivant – longue interview de Philippe Marlière, assez fine et érudite :
    http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-marliere/050615/republicanisme-et-laicite-deux-notions-pas-exclusivement-associees-la-gauche
    (je ne sais si vous pouvez le lire, si vous n’êtes pas abonné…)

    Je me permets de rebondir sur la réponse que vous faites à Marcailloux, où vous dites que revendiquer une “société de modération confortable, solidaire et éthique” serait manquer d’ambition. De quelles ambitions faudrait-il être animé selon vous ?

    • Descartes dit :

      @ Antoine

      [J’ai posté un lien vers votre article dans les réponses au texte suivant – longue interview de Philippe Marlière, assez fine et érudite :]

      Oui… enfin Marlière, vous savez, moi… bof. Ses articles sont un concentré de la vulgate « libérale-libertaire » venue tout droit d’outre-atlantique. Je trouve particulièrement déplaisante sa manière de s’annexer la loi de 1905 en affirmant que tous ceux qui ne partagent sa vision « s’écartent » de la « vraie » laïcité telle que voulue par la loi. Je vous invite aussi à vous interroger sur la théorie de la « non-domination » qui est le point de départ des on développement. Voici le résumé qu’en fait Marlière : « La non-domination implique que l’État ne peut imposer aux individus une conception positive de ce que devrait être leur autonomie morale. Pour le dire de façon moins philosophique : l’État, au nom de l’idée qu’il se fait du Bien ou de la Liberté, ne peut pas contraindre les individus à se comporter ou vivre d’une manière particulière ». Admettons. Cela implique par exemple que l’Etat ne saurait interdire un individu de vendre son sang ou son rein, de pratiquer la polygamie ou l’inceste. Ou pourquoi pas l’excision ?

      La vision de Marlière est caractéristique du mode de pensée « libérale-libertaire » parce qu’elle fait de l’Etat un être autonome, ayant des « idées » et dont la société devrait être protégée. Comme si la poussée pour interdire l’inceste, le commerce d’organes ou le foulard islamique ne venait pas de la société, mais de « l’Etat » considéré comme un être autonome.

      [Je me permets de rebondir sur la réponse que vous faites à Marcailloux, où vous dites que revendiquer une “société de modération confortable, solidaire et éthique” serait manquer d’ambition. De quelles ambitions faudrait-il être animé selon vous ?]

      D’aller plus loin, plus haut, plus fort et cela dans tous les domaines. D’explorer des territoires inconnus et d’essayer de nouvelles idées… même si pour cela il faut quitter son petit confort bourgeois… franchement, votre idée de la France c’est une sorte d’immense « ça m’suffit » ?

    • Antoine dit :

      [D’aller plus loin, plus haut, plus fort et cela dans tous les domaines. D’explorer des territoires inconnus et d’essayer de nouvelles idées… même si pour cela il faut quitter son petit confort bourgeois… franchement, votre idée de la France c’est une sorte d’immense « ça m’suffit » ?]

      Non, mais j’ai peine à imaginer quel genre d’ambitions collectives dépassant le “ça me suffit” pourrait rassembler la majorité de la population actuelle… Il faudrait pour cela un appareil politique (au sens large) qui n’existe pas en France, et n’est en germe nulle part dans les pays “développés”, il me semble. Même les “révolutions latino-américaines” chères à Mélenchon ne semblent pas inventer beaucoup de formes nouvelles.

    • Ruben dit :

      Le manque d’ambition en politique est assez bien illustré par la désertion de l’idée de grandeur et par la notion bétaillère (Pierre Legendre) de “vivre-ensemble”.
      Sinon, il me semble que vous êtes pour l’interdiction du voile mais que vous reconnaissez qu’il est avant tout un signe distinctif : supprimez le voile vous aurez un autre symbole le remplaçant, d’où la nécessité de soigner le mal à la racine (assimilation, roman national,…) La burqa avait par conséquent était justement interdite mais ce qui ne saurait être simplement justifié par l’abolition d’un signe communautariste (sans quoi on retombe sur le problème évoqué ci-dessus et il aurait alors aussi fallu interdire le voile) l’est alors par la défense d’une certaine idée française (galante,…) du sexe. (Finkielkraut en parle dans L’identité malheureuse, il me semble aussi l’avoir lu chez Legendre)
      Quant à ces dames, leurs prénoms sont aussi signifiants que leurs voiles. Il serait intéressant de connaître ceux de leurs enfants.

    • Descartes dit :

      @ antoine

      [Non, mais j’ai peine à imaginer quel genre d’ambitions collectives dépassant le “ça me suffit” pourrait rassembler la majorité de la population actuelle…]

      Bien sur qu’on a « peine à imaginer ». On a toujours « peine à imaginer » que les choses puissent être différentes de ce qu’elles sont. Mais il faut commencer par le vouloir. En fait, je suis moins pessimiste que vous. Beaucoup de gens souffrent d’un déficit de sens, et sont prêts à s’embarquer dans des « ambitions collectives ». C’est d’ailleurs ce besoin qu’exploitent les manipulateurs du djihad ou ceux des ZAD…

    • Descartes dit :

      @ Ruben

      [Le manque d’ambition en politique est assez bien illustré par la désertion de l’idée de grandeur et par la notion bétaillère (Pierre Legendre) de “vivre-ensemble”.]

      Tout à fait. Tout le discours du « vivre-ensemble » est le remplacement « du souvenir des grandes choses faites ensemble, et le désir d’en accomplir de nouvelles » par un minimum syndical qui consiste à ne pas se foutre sur la gueule.

      [Sinon, il me semble que vous êtes pour l’interdiction du voile mais que vous reconnaissez qu’il est avant tout un signe distinctif : supprimez le voile vous aurez un autre symbole le remplaçant, d’où la nécessité de soigner le mal à la racine (assimilation, roman national,…)]

      Cela dépend. J’ai sur la question du voile une position plutôt « abolitionniste », mais pour des raisons très différentes à celles des abolitionnistes médiatiques. La plupart d’entre eux considèrent qu’il faut interdire le voile soit pour des raisons de « défense des droits de la femme », soit au nom de la « laïcité ». Je pense que ces deux arguments sont erronés. Le premier, parce qu’on ne fait pas le bonheur des gens malgré eux, et que si une femme choisit en toute conscience de porter le voile, je vois mal comment au nom des « droits de la femme » on pourrait lui interdire. Le second, parce que la laïcité implique la neutralité de l’Etat et de ses agents, mais pas celle des citoyens.

      Non : pour moi le voile doit être interdit chaque fois qu’il constitue une atteinte à l’ordre public. C’est donc le contexte qui commande : si une femme porte le voile dans un contexte ou ce port constitue clairement une provocation – par exemple, dans une école – alors il doit être interdit, sur le fondement que « la liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas à autrui ».

      En dernière instance, c’est la pression sociale qui est l’instrument de lutte le plus puissant contre ce genre de provocations. Si les curés ne portent aujourd’hui pratiquement plus la soutane, c’est parce que des anticléricaux se sont fait un point d’honneur de croasser sur leur passage. Si la provocation du voile marche, c’est parce que le discours de la culpabilité et de la « tolérance » fait que les gens ne réagissent pas spontanément comme ils l’auraient fait il y a trente ans.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [“La vision de Marlière est caractéristique du mode de pensée « libérale-libertaire » parce qu’elle fait de l’État un être autonome, ayant des « idées » et dont la société devrait être protégée.”]

      C’est là un “angle mort” constant de l’idéologie libérale, et cela ne date pas d’hier. On le trouve déjà, ainsi que je vous l’avais récemment fait remarquer, dans la Déclaration de 1789. Ce que les libéraux refusent en effet de voir, c’est que leur “individu souverain” n’est possible que dans le cadre de l’État nation, en ce qu’il vient se substituer aux anciennes formes d’organisation collective. On en arrive alors naturellement à ce résultat paradoxal qu’un libéral-libertaire comme ce Marlière en arrive à défendre ce qui est le contraire même de la liberté individuelle, à savoir l’obligation religieuse et communautaire de porter le voile, et ce au nom de la liberté individuelle elle-même… Fondamentalement, je crois que c’est d’ailleurs tout le problème que soulève votre article : comment faire en sorte que des immigrés fonctionnant sur un mode communautariste pré-étatique s’assimilent à notre modèle national de l’individu souverain, sans porter atteinte, justement, à leur souveraineté individuelle ? Soit on les y force, soit on les convainc. Mais dans les deux cas, il me semble que nous devrons sérieusement remettre en question notre propre modèle…

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [C’est là un “angle mort” constant de l’idéologie libérale, et cela ne date pas d’hier. On le trouve déjà, ainsi que je vous l’avais récemment fait remarquer, dans la Déclaration de 1789. Ce que les libéraux refusent en effet de voir, c’est que leur “individu souverain” n’est possible que dans le cadre de l’État nation, en ce qu’il vient se substituer aux anciennes formes d’organisation collective.]

      Je ne partage pas votre lecture de la Déclaration de 1789. Celle-ci contient au contraire une vision de l’individu fortement encadré par la collectivité et donc par l’Etat. Déjà, la liberté est définie comme la possibilité « de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui », ce qui implique l’existence d’un « autrui ». Et cette idée est partout : Tous les droits que la déclaration énonce sont relatifs, soumis au cadre fixé par la loi. Et la souveraineté ne réside nullement dans les individus, mais dans la Nation. L’idée même d’un droit « inaliénable » – très présente dans la Déclaration – implique un rejet de « l’individu souverain », puisque l’individu n’a pas la liberté d’aliéner ses droits…

      [On en arrive alors naturellement à ce résultat paradoxal qu’un libéral-libertaire comme ce Marlière en arrive à défendre ce qui est le contraire même de la liberté individuelle, à savoir l’obligation religieuse et communautaire de porter le voile, et ce au nom de la liberté individuelle elle-même…]

      Eh oui, c’est le paradoxe de la liberté de s’aliéner. On aurait envie de demander à Marlière s’il ne faut pas rétablir l’esclavage, au nom du droit de chaque individu a disposer de lui-même comme il l’entend, et donc de se vendre lui-même…

      [Fondamentalement, je crois que c’est d’ailleurs tout le problème que soulève votre article : comment faire en sorte que des immigrés fonctionnant sur un mode communautariste pré-étatique s’assimilent à notre modèle national de l’individu souverain, sans porter atteinte, justement, à leur souveraineté individuelle ?]

      C’est en effet la question, sauf que notre modèle national n’est pas celui d’un « individu souverain », mais au contraire, celle d’une souveraineté individuelle dans la sphère privée et collective dans la sphère publique.

      [Soit on les y force, soit on les convainc. Mais dans les deux cas, il me semble que nous devrons sérieusement remettre en question notre propre modèle…]

      Cela dépend de ce que vous appelez « notre modèle ». S’il s’agit du modèle traditionnel hérité de la Révolution et magnifié par les différentes républiques, je ne vois rien à « remettre en question ». Il nous faut « forcer » – avec bienveillance mais avec fermeté, comme nous l’avons fait pendant presque deux siècles – les immigrés à incorporer l’idée de séparation des sphères publique et privée. Par contre, si vous appelez « notre modèle » la vision « libérale-libertaire » devenue dominante depuis les années 1980, je suis d’accord avec vous, la révision s’impose.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [“Je ne partage pas votre lecture de la Déclaration de 1789. Celle-ci contient au contraire une vision de l’individu fortement encadré par la collectivité et donc par l’Etat. Déjà, la liberté est définie comme la possibilité « de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui », ce qui implique l’existence d’un « autrui ».”]

      Vous oubliez la suite : “ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits.”. La Loi ne peut donc mettre des “bornes” que là où la liberté de l’individu, précisément, est menacée. Et si l’individu est “encadré”, ce n’est qu’en tant qu’il représenterait un obstacle à la liberté d’autrui. On fait plus violent comme “encadrement”…

      [“Et cette idée est partout : Tous les droits que la déclaration énonce sont relatifs, soumis au cadre fixé par la loi.”]

      … qui elle-même, surtout, est soumise au cadre fixé par les “droits naturels”…

      [“Et la souveraineté ne réside nullement dans les individus, mais dans la Nation.”]

      Bien entendu. Mais cela signifie seulement qu’aucun individu ne saurait s’arroger ladite souveraineté, sauf à rompre l’égalité. C’est pourquoi elle appartient à la Nation, qui n’est elle-même qu’une libre association entre individus souverains.

      [“L’idée même d’un droit « inaliénable » – très présente dans la Déclaration – implique un rejet de « l’individu souverain », puisque l’individu n’a pas la liberté d’aliéner ses droits…”]

      Bien sûr, puisque ces droits sont ce qui forme justement sa souveraineté. C’est donc la souveraineté de l’individu qui est inaliénable.

      [“Par contre, si vous appelez « notre modèle » la vision « libérale-libertaire » devenue dominante depuis les années 1980, je suis d’accord avec vous, la révision s’impose.”]

      Je ne suis pas de cet avis. Pour moi, le “libéralisme libertaire” est déjà tout entier contenu dans la Déclaration de 1789. Malheureusement, je crois bien que je n’aurai pas le temps, cette fois, d’aller plus loin dans cet échange, qui pourtant, me paraît aborder un point absolument fondamental à mes yeux. J’espère pouvoir y revenir ultérieurement. En attendant, je me permets de vous communiquer ce lien vers le sublime “Quatuor américain” de Dvorak, par le quatuor Prazak :

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Vous oubliez la suite : “ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits.”.] La Loi ne peut donc mettre des “bornes” que là où la liberté de l’individu, précisément, est menacée.]

      Tout à fait. Mais qui décide si une norme est nécessaire pour « assurer aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits » ? Je trouve qu’il est intéressant de faire ici le parallèle avec la conception anglo-saxonne. Dans cette tradition, c’est essentiellement au juge, et non au législateur, qu’il appartient de faire les normes. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit non pas de créer des normes, mais de révéler un droit préexistant, déjà inscrit dans la « nature » telle que voulue par dieu. Le fonctionnement de la Cour Suprême des Etats-Unis est de ce point de vue caractéristique : la Constitution – texte sacré – est censée avoir réponse à tout, y compris aux problèmes qui ne se posaient pas au temps où elle a été rédigée.

      Malgré les proclamations de la Déclaration de 1789 quant aux « droits naturels », en faisant le législateur et non le juge le créateur des normes ses rédacteurs mettent sérieusement en cause la « naturalité » des droits en question. La formule que vous indiquez ne fait en pratique qu’installer le principe de motivation des actes des pouvoirs publics : la société n’a pas le droit d’interdire par caprice, elle doit montrer que l’interdiction sert un but d’intérêt public. C’est d’ailleurs comme cela que ce principe a toujours été interprété par le Conseil d’Etat et par le Conseil Constitutionnel.

      [“Et cette idée est partout : Tous les droits que la déclaration énonce sont relatifs, soumis au cadre fixé par la loi.”][… qui elle-même, surtout, est soumise au cadre fixé par les “droits naturels”…]

      Oui, mais comme le législateur est seul juge de ce qui porte atteinte aux « droits naturels » – à condition de ne pas installer « l’oppression », s’entend – le résultat est un système très équilibré : La collectivité a le droit dans certaines limites de restreindre les « droits naturels », le citoyen a le droit de se révolter si ces restrictions deviennent trop pesantes. Ce n’est donc pas un « individu souverain », mais un individu en interaction permanente avec la société.

      [Bien entendu. Mais cela signifie seulement qu’aucun individu ne saurait s’arroger ladite souveraineté, sauf à rompre l’égalité. C’est pourquoi elle appartient à la Nation, qui n’est elle-même qu’une libre association entre individus souverains.]

      Entre individus libres et égaux. Mais pas entre « individus souverains ». Dans la logique de la Déclaration, nul ne peut être « souverain » sauf la Nation. Là encore, pour voir la différence il faut comparer avec d’autres systèmes. Dans le droit anglosaxon, les droits « naturels » sont absolus. Ils ne peuvent être limités même pour des motifs d’intérêt public. Ainsi, par exemple, la Cour Suprême des Etats-Unis considère que la liberté d’expression ne peut être limitée même lorsqu’elle sert à défendre la haine raciale, la violence ou le meurtre. Ce n’est pas le cas en France, ou l’on estime parfaitement normal de restreindre un droit pour des motifs d’intérêt public.

      Et merci de l’intermède musical…

  7. bovard dit :

    Mes voisines enburkanées s’appellent Marie-chantal,Sophie,Manon.Les converties se comptent par milliers.Dans mon quartier populaire où,j’habite,nous les croisons par centaines depuis presque dix ans.
    Elles sont sensibles à la pression sociale,car sinon elles subiraient les lazzis des garçons …

  8. bovard dit :

    Aprés avoir hésité,je vous donne certaines conjectures qui complète
    les réflexions précedentes.
    En effet,je continue à vivre dans le type de quartier que Descartes décrit.
    Comment l’emburkanement,illégal de nos concitoyennes ,souvent françaises de souche s’explique t il?
    N’est ce oas une réaction à l’hyper sexualisme don notre environnement est l’objet?
    POitrines généreuses,beautés dénudées,Soutien gorge et culotte géants sur les panneaux publicitaires,spot,film,TV avec constemment des images sexuelles où les femmes semblent être des objets sexuels.
    Délires pornographiques sur internet,pour lesquels les jeunes ou bien des gens ne savent pas faire la différence,entre les fantasmes,les simulations et le réel.Cela fait 45 ans que nos villes,nos écrans sont envahis dimages nues,comme nulle part ailleurs dans le monde occidental.Toutes ces excitations crées un mauvais climat chez les personnes frustrées.
    En conséquences,s’enburkaaner c’est comme se bunkiriser,se protéger contre les pressions de l’environnement proche mais aussi contre les détraqués,importuns, et dérangeants en tout genre,non?

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [Comment l’emburkanement,illégal de nos concitoyennes ,souvent françaises de souche s’explique t il? N’est ce oas une réaction à l’hyper sexualisme don notre environnement est l’objet?]

      Réfléchissez: S’il s’agissait d’une “réaction de nos conctioyennes à l’hypersexualisme”, alors on devrait noter le même phénomène indépendamment de toute conviction religieuse. On devrait voir les femmes chrétiennes, juives ou les agnostiques chercher elles aussi à se couvrir. Après tout, il n’est pas nécessaire d’être musulman pour porter un foulard sur la tête et des habits longs qui couvrent le corps.

    • Lelien dit :

      [S’il s’agissait d’une “réaction de nos conctioyennes à l’hypersexualisme”, alors on devrait noter le même phénomène indépendamment de toute conviction religieuse. On devrait voir les femmes chrétiennes, juives ou les agnostiques chercher elles aussi à se couvrir]
      Outre que c’est le cas pour les chrétiennes, du moins celles que l’on voit à Versailles, ce n’est pas forcément vrai. La réaction à “l’hyper sexualisme” de notre société est possible seulement si l’on s’en rend compte et que l’on souhaite la combattre. Or pour s’en rendre compte et vouloir le combattre, un environnement religieux peut très bien être un prérequis. Il faut au moins un milieu qui mette une distance, une barrière, entre la culture standard (faute d’autre expression) et l’individu.

      Comme la religion est plus vivante chez les musulmans et les catholiques versaillais que dans les autres milieux, il est normal selon cette hypothèse de voir cette réaction principalement chez les musulmans et certaines versaillaises.

    • Descartes dit :

      @ lelien

      [S’il s’agissait d’une “réaction de nos conctioyennes à l’hypersexualisme”, alors on devrait noter le même phénomène indépendamment de toute conviction religieuse. On devrait voir les femmes chrétiennes, juives ou les agnostiques chercher elles aussi à se couvrir][Outre que c’est le cas pour les chrétiennes, du moins celles que l’on voit à Versailles,]

      Faudrait pas exagérer. Je veux bien qu’on s’habille plus « couvert » chez les catho de Versailles, mais on ne voit pas les versaillaises se promener en été couvertes des pieds à la tête, avec manches longues et gants noirs, y compris lorsqu’elles vont à la plage. Même celles qui sont les premières à dénoncer dans une conversation « l’hypersexualisme » de notre société.

    • Lelien dit :

      [Faudrait pas exagérer. Je veux bien qu’on s’habille plus « couvert » chez les catho de Versailles, mais on ne voit pas les versaillaises se promener en été couvertes des pieds à la tête, avec manches longues et gants noirs, y compris lorsqu’elles vont à la plage. Même celles qui sont les premières à dénoncer dans une conversation « l’hypersexualisme » de notre société.]
      Je ne crois pourtant pas avoir dit cela il me semble. Mon but était seulement de montrer que la réaction de certaines musulmanes vis à vis de notre société n’est ni exclusif ni uniquement lié à l’essence de cette religion. La forme que prend cette réaction est liée à la culture de rattachement : jupe longue et natte (voire un châle) à Versailles, voile intégrale pour les musulmanes.

      Je ne portais pas de jugement de valeur dans ma remarque. Car personnellement, en tant qu’agnostique athée, je trouve la forme de ces réactions puériles, et je ne cache pas que j’y vois aussi une provocation de la part des musulmanes. Un peu comme si pour rejeter la culture “Loft Story” elles devaient rejeter toute la culture française.
      Malgré tout je suis quand même rassuré de voir que certains et certaines s’opposent à la dérive “hypersexualisante” de notre société, quelque soit la forme de cette opposition, et tant que celle ci reste dans les limites de la loi.

    • Descartes dit :

      @ Lelien

      [Je ne crois pourtant pas avoir dit cela il me semble. Mon but était seulement de montrer que la réaction de certaines musulmanes vis à vis de notre société n’est ni exclusif ni uniquement lié à l’essence de cette religion. La forme que prend cette réaction est liée à la culture de rattachement : jupe longue et natte (voire un châle) à Versailles, voile intégrale pour les musulmanes.]

      Je ne sais pas ce que c’est « l’essence » d’une religion. Les trois grands monothéismes sont issus de « textes sacrés » écrits à des époques bien précises, souvent transmis au départ par voie orale et dont le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils sont ambigus, vagues et même contradictoire. En dégager un sens implique un travail d’interprétation, et ces interprétations varient très largement et ont varié tout au long de l’histoire. Nous ne savons donc pas quelle était « l’essence » de leur religion pour Moïse, Jésus ou Mahomet. Nous ne pouvons que faire des suppositions.

      Voltaire avait raison : « si dieu a fait l’homme à son image, il faut dire que l’homme le lui a bien rendu ». Si une partie des musulmans couvrent leurs femmes et jeûnent pendant le Ramadan, ce n’est pas parce que l’Islam leur dit de le faire, mais parce qu’ils en ressentent le besoin pour des raisons sociales, économiques, politiques. La religion n’est jamais qu’un prétexte. Et vous noterez que quand le besoin disparaît, on modifie l’interprétation des textes pour permettre aujourd’hui ce qu’on interdisait hier.

      Les musulmans français ont un problème : avec la fin de l’assimilation, ils sont restés coincés dans un no man’s land. Ils ne sont plus tout à fait citoyens du pays d’origine de leurs parents, et ils n’arrivent pas à devenir totalement français. L’intégrisme est une manière de se fabriquer une identité. Et c’est le cas aussi des intégristes catholiques de Versailles. Ca n’a rien à voir avec « l’essence » – existe-t-elle ? – des religions.

    • Lelien dit :

      Alors nous sommes d’accord, et ma remarque était due à une mauvaise interprétation de ma part.

      Je pensais justement à tord que vous essentialisiez la religion musulmanne. Mon expression était aussi une allusion à Feuerbach dans “l’essence des religions”, qui justement donne des religions la définition que vous en faites. Ce n’est pas un hasard j’imagine car ce livre qui a inspiré les critiques religieuses de Marx et Engels.

  9. Françoise dit :

    Le Petit Bard est à Montpellier et non pas à Toulouse, mais cela ne m’étonne pas de la part d’un parigot qui parle comme si son monde “s’arrêtait aux portes de sa ville”.
    Critiquer l’action de ces femmes sous prétexte qu’elles portent légalement et culturellement un voile qui ne couvre pas leur visage est vraiment une méprise de nos valeurs républicaines qui ne se limitent pas à un bout de tissu. Si telle est votre logique, pourquoi ne pas haranguer les femmes intégristes de Saint Nicolas du Chardonnet qui se voilent la tête sur le parvis? Puisque vous aimez le charme de l’excellence d’Auteuil, allez dire aux femmes voilées qui se retrouvent à l’église espagnole qu’elles sont une insulte à la mixité culturelle!
    Vous utilisez votre expérience personnelle pour en faire une généralité (à propos, “bolos” ne prend qu’un S), mais qui vous dit que ces femmes n’incitent pas leur enfant à parler français? Cet argument n’est pas dans l’article il me semble… ces femmes ne veulent que pouvoir continuer à contourner la carte scolaire, comme elles avaient “le droit” de faire auparavant.
    Dites-leur plutôt que, pour contourner la carte scolaire et croiser des “blonds”, il leur faudra soit demander une langue étrangère qui n’est pas proposée dans leur collège, soit frapper à la porte de l’école privée du coin qui les accueille volontiers, même avec leur voile (oops, j’avais oublié que c’était votre dernier refuge, pas de risque que vous le leur proposiez)

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [Le Petit Bard est à Montpellier et non pas à Toulouse,]

      Merci beaucoup de cette correction, qui a été portée dans le texte. Je m’excuse auprès de mes fidèles lecteurs. Comme vous pouvez le constater, je n’ai aucun problème pour admettre mes erreurs…

      [mais cela ne m’étonne pas de la part d’un parigot qui parle comme si son monde “s’arrêtait aux portes de sa ville”.]

      Par contre, cette grossièreté est parfaitement superflue. D’autant plus que vous avez tort : je ne suis pas « parigot ». C’est drôle de voir combien vous êtes gouvernée par vos préjugés. Je me demande si vous corrigerez votre erreur aussi vite que j’ai corrigé le mien…

      [Critiquer l’action de ces femmes sous prétexte qu’elles portent légalement et culturellement un voile qui ne couvre pas leur visage est vraiment une méprise de nos valeurs républicaines qui ne se limitent pas à un bout de tissu.]

      Comment fait on pour porter un voile « culturellement » ? Arrêtez votre char. Ces femmes on le droit de porter « légalement » leur voile – ce que par ailleurs je n’ai jamais contesté – et j’ai le droit, tout aussi « légalement » de les critiquer. A vous lire, les « valeurs républicaines » interdiraient toute critique…

      [Si telle est votre logique, pourquoi ne pas haranguer les femmes intégristes de Saint Nicolas du Chardonnet qui se voilent la tête sur le parvis?]

      Figurez-vous que je n’ai pas attendu vos conseils pour manifester contre les catholiques intégristes. Mais je vous fais remarquer que je n’ai jamais lu dans un quelconque journal l’une des intégristes de St Nicolas du Chardonnet exiger par voie de presse que ses enfants soient « mélangés » avec des petits musulmans. Et si je l’avais lu, cela aurait suscité chez moi la même réaction : on ne peut exiger d’un côté la « mixité » et de l’autre s’enfermer dans une prison de toile.

      [ous utilisez votre expérience personnelle pour en faire une généralité]

      Ou ça ?

      [à propos, “bolos” ne prend qu’un S),]

      Vous avez tort : « Boloss » est la transcription phonétique d’un terme du langage oral, dont l’étymologie est inconnue, et étant entré récemment dans les dictionnaires il n’a pas d’orthographe stabilisée. Ainsi, par exemple, le Grand Robert 2013 indique « boloss » comme orthographe, tout en admettant qu’on puisse aussi écrire « bolos ». Le Larousse 2015, lui, ne donne que l’orthographe « bolos ». On trouve les deux orthographes dans de très nombreux textes. On va voir si vous êtes aussi rapide à reconnaître vos erreurs que je le suis pour reconnaître les miennes…

      [mais qui vous dit que ces femmes n’incitent pas leur enfant à parler français?]

      Décidément, vous n’avez toujours pas appris à lire. Pouvez-vous m’indiquer ou j’aurais dit pareille chose ? La seule chose que j’ai écrit sur la question est une phrase interrogative qui s’adressait aux femmes en question : « Etes vous prête à soutenir – y compris en punissant votre enfant – un instituteur qui interdirait de parler autre chose que français dans la cour de récréation ? ». La suite du paragraphe précisait explicitement que les deux réponses, négative ou positive, étaient possibles.

      Ce qui est drôle dans votre commentaire, c’est qu’alors même que mon article laissait la possibilité que ces femmes répondent « oui » à cette question, c’est vous qui m’accusez de répondre « non » à leur place…

      [ces femmes ne veulent que pouvoir continuer à contourner la carte scolaire, comme elles avaient “le droit” de faire auparavant.]

      Si elles demandent le droit de contourner la carte scolaire, pourquoi se plaignent-elles que les « blonds » fassent de même ?

    • Françoise dit :

      Voyez-vous, je n’affirme jamais sans connaître (il se trouvait dans la liste du championnat de France du Scrabble Jeunes en avril 2015); bien que ce mot ne soit pas des plus heureux, il a été admis en 2015, dont acte:
      http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1370349-selfie-bolos-les-nouveaux-mots-du-dico-creent-l-inegalite-une-insulte-aux-jeunes.html
      Quant au mot “parigot”, votre méprise était du “parisianisme aigü”, je me fiche de votre bled et je ne suis pas comme vous à publier des messages où je vous dis où j’habite.
      Pour la carte scolaire, je pense que votre article et celui de Libé était clair, pas besoin pour vos “blonds” de contourner la carte scolaire puisqu’ils n’habitent plus dans le Petit Bard; Ces femmes veulent, pour leurs propres enfants, contourner la carte scolaire pour rechercher la mixité qu’elles n’ont plus dans leur quartier.

    • Gérard Couvert dit :

      Françoise, mais comment peut-on être à ce point ridicule ? ou bornée ! Votre discours est en retard ‘au moins 20 ans, et encore il y a 20 ans nous étions déjà quelques uns à énoncer et annoncer la situation inextricable où vos marottes idéologiques et votre petit confort intello nous ont mené. Il y a quelques siècles La Boétie avait bien indiqué les conditions de la servitude volontaire, mais il est vrai qu’après avoir chercher à tuer Camus, puis oublié Voltaire, votre camps -du bien ! – veut aussi détruire le lien de notre nation avec les Lumières, lesquelles du reste ne vous ont jamais atteint. Puisque vous semblez connaitre Toulouse je vous suggère d’aller vivre à Bagatelle ou Empalot … si vous en revenez vivante, vous nous raconterez.

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [Voyez-vous, je n’affirme jamais sans connaître (il se trouvait dans la liste du championnat de France du Scrabble Jeunes en avril 2015); bien que ce mot ne soit pas des plus heureux, il a été admis en 2015, dont acte:]

      Non, franchement, je ne vois pas. Ce que je vois, c’est que non seulement vous parlez sans savoir, mais qu’en plus vous vous permettez de corriger les autres sur le fondement de cette même ignorance. Et qu’en plus, vous êtes incapable de reconnaître vos erreurs. Ne serait-ce pas plus simple, au lieu de toutes ces contorsions, d’admettre que c’est à tort que vous avez rejeté l’orthographe « boloss » comme incorrecte ?

      [Quant au mot “parigot”, votre méprise était du “parisianisme aigü”,]

      Ah bon ? Parce qu’à Lyon, à Marseille ou à Lille on ne fait jamais de confusion entre Toulouse et Montpellier ? Encore une fois, je suis à chaque fois surpris de voir le genre de contorsion dont vous êtes capable pour ne pas admettre vos erreurs. Quand j’imagine qu’on confie à quelqu’un d’aussi borné l’éducation de jeunes enfants, je vous assure que j’ai froid dans le dos.

      [je me fiche de votre bled et je ne suis pas comme vous à publier des messages où je vous dis où j’habite.]

      Tiens, tiens… n’étais-ce vous qui aviez expliqué vivre en Allemagne ? Non ?

      [Pour la carte scolaire, je pense que votre article et celui de Libé était clair,]

      Ne serait-ce plutôt « étaiENt clairS » ? Tiens, je me demande quelle va être la contorsion cette fois-ci…

      [pas besoin pour vos “blonds” de contourner la carte scolaire puisqu’ils n’habitent plus dans le Petit Bard;]

      Qu’est ce que vous en savez ? La seule chose que nous sachions, la seule chose que ces femmes nous disent, c’est qu’ils n’envoient pas leurs enfants au collège du quartier. Peut-être qu’ils y habitent toujours et qu’ils contournent la carte scolaire…

      [Ces femmes veulent, pour leurs propres enfants, contourner la carte scolaire pour rechercher la mixité qu’elles n’ont plus dans leur quartier.]

      Possible. Mais il leur faudrait se demander pourquoi ils ne l’ont plus dans leur quartier. Parce que si les gens sont partis pour ne plus avoir à les fréquenter, la tentative de contourner la carte scolaire risque d’être inefficace : en voyant les enfants marocains arriver, les parents « blonds » enlèveront leurs enfants pour les mettre ailleurs, dans un autre collège public ou, en désespoir de cause, dans le privé.

      Si vous relisez mon texte avec attention et avec le souci de comprendre plutôt que de jouer l’offensée – oui, je sais, cela vous est très difficile, mais vous devriez essayer quand même – vous verrez que c’est là précisément mon point. Pour qu’il y ait « mixité », il faut qu’il y ait un effort de la part des uns pour se faire accepter par les autres. Sinon, les autres partiront.

    • Françoise dit :

      pour la faute d’accord vous avez raison, c’est impardonnable!

      mais on s’en tape de cet horrible mot “bolos”!
      en revanche, comment voulez-vous que je m’excuse quand l’Académie Française en fixe l’orthographe cette année? je ne vous accusais pas de faire une faute d’ailleurs, juste une information.
      http://blogs.mediapart.fr/blog/robert-chaudenson/250515/les-mots-nouveaux-de-l-annee-langue-francaise-et-mercantilisme-2
      pour l’Allemagne, oui, vous avez publié le commentaire où je disais habiter dans une des 4 villes que vous aviez minablement critiquées, alors que je vous demandais de ne pas publier; j’ai trouvé cela très incorrect de votre part.

      pour le Petit Bard, je ne vous suis plus:
      la ghettoisation, c’est dans l’article de Libé : “Ces quatre écoles réunissent environ 600 enfants, tous d’origine marocaine, à l’image de la population du Petit Bard, presque exclusivement originaire du Maroc (…)”
      la dérogation, c’est dans l’article de Libé: “Elles ont obtenu le gel temporaire de la carte scolaire, autrement dit la possibilité de ne pas envoyer leurs enfants à Las Cazes. Certaines familles ont déjà déposé des demandes de dérogation”

      “Etes-vous prête à parier sur l’assimilation ? Etes vous prête à enlever votre voile ? Etes vous prête à expliquer à votre enfant qu’en dehors de la maison on ne parle que français ? “
      la seule chose que vous rajoutez, c’est leur demander de parler français pour leurs enfants et enlever leur voile pour elles.
      et si la mixité n’était pas synonyme d’assimilation mais de respect d’autrui? la seule chose qu’on puisse exiger d’elles est le respect des valeurs républicaines et il ne semble pas, à la lecture de l’article, qu’elles ont failli.
      Moi je trouve ces femmes courageuses, ne vous en déplaise.

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [mais on s’en tape de cet horrible mot “bolos”!]

      Apparemment vous ne vous « en tapez » pas tant que ça, puisque vous avez considéré indispensable de corriger son orthographe. Mais bien entendu, comme vous vous êtes gourée tout à coup cela n’a plus aucune importance…

      [en revanche, comment voulez-vous que je m’excuse quand l’Académie Française en fixe l’orthographe cette année? je ne vous accusais pas de faire une faute d’ailleurs, juste une information.
      http://blogs.mediapart.fr/blog/robert-chaudenson/250515/les-mots-nouveaux-de-l-annee-langue-francaise-et-mercantilisme-2%5D

      Vous n’avez toujours pas appris à lire. Relisez attentivement le texte que vous citez, et vous pourrez constater que nulle part il n’est dit que « l’Académie Française » ait fixé l’orthographe du terme « bolos ». C’est Alain Rey qui cite cette orthographe, et simplement pour donner l’exemple d’un mot qui bénéficie de très nombreuses références dans google. Si vous aviez lu avec attention l’artcile qeu vous citez, vous auriez d’ailleurs remarqué que la dernière édition du tome du dictionnaire de l’Académie contenant la lettre « B » est paru en 1992… difficile donc pour elle de « fixer l’orthographe cette année »…

      [pour l’Allemagne, oui, vous avez publié le commentaire où je disais habiter dans une des 4 villes que vous aviez minablement critiquées, alors que je vous demandais de ne pas publier; j’ai trouvé cela très incorrect de votre part.]

      D’abord, vous ne m’aviez pas demandé de ne pas publier. Vous aviez écrit « ce n’est pas la peine de publier », ce qui est une forme de me laisser le choix. Par ailleurs, quelque soient mes manquements à la correction, vous aviez écrit hier « je ne suis pas comme vous à publier des messages où je vous dis où j’habite » alors que vous admettez aujourd’hui m’avoir envoyé un message indiquant ou vous habitez. Encore une erreur… que comme d’habitude, vous ne reconnaîtrez pas.

      [la ghettoisation, c’est dans l’article de Libé : “Ces quatre écoles réunissent environ 600 enfants, tous d’origine marocaine, à l’image de la population du Petit Bard, presque exclusivement originaire du Maroc (…)”]

      Relisez bien : notez le mot « presque ».

      [« Etes-vous prête à parier sur l’assimilation ? Etes vous prête à enlever votre voile ? Etes vous prête à expliquer à votre enfant qu’en dehors de la maison on ne parle que français ? » la seule chose que vous rajoutez, c’est leur demander de parler français pour leurs enfants et enlever leur voile pour elles.]

      Alléluia ! Pour une fois vous avez lu jusqu’à la fin et vous avez tout compris. Oui, je ne leur demande que ces deux petites choses… je suis pas difficile.

      [et si la mixité n’était pas synonyme d’assimilation mais de respect d’autrui?]

      Je ne me sens pas « respecté » par une femme qui se déguise en chapiteau de cirque sous prétexte que je ne suis qu’un porc lubrique et que sans cette protection elle pourrait être en danger.

      [la seule chose qu’on puisse exiger d’elles est le respect des valeurs républicaines et il ne semble pas, à la lecture de l’article, qu’elles ont failli.]

      Non. Mais pourquoi ne pas appliquer la même règle aux « blonds » qui ont quitté le quartier ? Eux aussi, il me semble, respectent la loi et les valeurs républicaines, non ? A ma connaissance, aucune loi n’interdit de quitter un quartier si on n’aime pas y vivre. Vous n’avez toujours pas compris mon point. Je n’ai jamais demandé qu’on enlève le voile à ces femmes. Je me contente de signaler la contradiction qui existe entre le fait de demander la « mixité » et le choix de garder des coutumes qui l’empêchent.

      [Moi je trouve ces femmes courageuses, ne vous en déplaise.]

      Le « courage » consiste à faire quelque chose malgré le danger. Je ne vois pas très bien où est le « danger » dans le cas présent. Quel est le risque qu’elles courent en affichant une banderole sur les grilles du collège, en se réunissant dans les locaux de celui-ci, en « bloquant » son entrée, le tout avec le soutien à peine dissimulé de l’équipe pédagogique ? Elles ne risquent absolument rien. Alors, parler de courage…

    • Françoise dit :

      désolée de vous mettre un lien “La Croix”, l’article du Monde est payant.
      Certaines idées sont intéressantes et devraient intéresser ces dames de Montpellier
      http://www.la-croix.com/Actualite/France/Des-pistes-pour-en-finir-avec-les-ghettos-scolaires-2015-06-15-1323701

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [Certaines idées sont intéressantes et devraient intéresser ces dames de Montpellier]

      Je n’ai pas compris quelles sont les « idées » que vous trouvez « intéressantes ». Pourriez-vous être plus précise ?

    • Françoise dit :

      1- Le bonus à l’orientation: mauvaise idée car l’accès ne serait plus au mérite scolaire, juste au mérite d’avoir supporté un mauvais collège pendant x années.
      2- regrouper les lycées: bonne idée si certaines matières (langues, HG…) sont enseignées à des groupes mélangés, si c’est juste pour partager la cour de récré, c’est sans intérêt.
      3- construire la carte scolaire en fonction des lignes de transport: excellente idée! finis les ghettos cités/centre ville.
      4- outils statistiques: bof, cela encouragerait la discrimination positive
      5- lier les ressources octroyées en fonction de la population d’élèves accueillis: excellente idée, c’est le principe des ZEP qui serait étendu à tout le territoire, donc plus besoin d’être stigmatisé “zep”.
      6- réseau d’établissements complémentaires en milieu rural: bonne idée
      NB: L’enseignement catholique sous contrat n’est pas lié par la carte scolaire alors que les régions, départements, et communes doivent donner un forfait par enfant; ceci aussi pourrait changer? (je ne l’ai pas vu dans le doc mais ils sont d’accord avec le point 5)

  10. Gérard Couvert dit :

    Ha, si j’aimais le lait, j’en boirais une louche de “petit”.
    Descartes je pense qu’il y deux ans nous n’auriez pas écrit ce texte, pas avec sa dimension inquiète et identitaire, critique de la gauche sociétale.
    Le Petit Bard il y a 50 ans c’était un morceau d’Oranie, pied-noirs et quelques harkis encore hébétés, parlant au soleil, ce soleil chaud mais qui n’était pas le même que la-bas, c’est là que mes grands-parents sont morts, sans avoir compris.
    Des Français de France il y en avait quelques uns, et puis la carte scolaire n’existait pas encore, on moquait l’accent et il se perdait, vite ; il fallait vivre : rapidement, par le travail le niveau de vie dépassa la moyenne et les enfants quittèrent le Petit Bard, les réseaux sociaux (les vrais !) s’étendirent vite au-delà des associations.
    Adaptation et amour de la France, malgré tout.
    Les suivants en ce lieu ont-ils eu seulement l’idée que cela pouvait se passer ainsi ? que dire des émigrés Italiens chez qui il était interdit de parler français et où les enfants donnait des cours le soir à leur parent italophones.
    Hollande à d’ailleurs trouvé un nouveau clivage à venir : la charte des langues régionales, l’arabe pour le Languedoc ?
    Mais ces dames, pourraient-elles nous dire comment elles ont su qu’il y avait un déficit de bonds, en fichant les élèves au moyen de leur prénom ? Pourquoi ce camp dogmatique -libé- bien heureux de trouver sa chair à canon ne relève-t-il pas le qualificatif de “français” utilisé par ces femmes enfermées, montrant clairement la distinction qu’elles établissent.
    Le voile est indiscutablement musulman en l’espèce, quand irez-vous exercer votre intelligence à l’origine de ces faits de divorce culturel relatés sans cesses partout en Europe : le coran.

    • Descartes dit :

      @ Gerard Couvert

      [Descartes je pense qu’il y deux ans nous n’auriez pas écrit ce texte, pas avec sa dimension inquiète et identitaire, critique de la gauche sociétale.]

      Pourquoi dites-vous ça ? Relisez ce que j’écrivais sur ce même blog il y a deux ans, et vous verrez que chez moi la critique de la « gauche sociétale » n’est pas un fait nouveau, pas plus que mon intérêt pour la question « identitaire ».

      [Les suivants en ce lieu ont-ils eu seulement l’idée que cela pouvait se passer ainsi ? que dire des émigrés Italiens chez qui il était interdit de parler français et où les enfants donnaient des cours le soir à leur parent italophones.]

      J’avais la même chose dans mon quartier : des parents immigrés qui refaisaient eux-mêmes à la maison les exercices de grammaire et de calcul que la maîtresse donnait à leurs enfants à l’école…

      [Hollande à d’ailleurs trouvé un nouveau clivage à venir : la charte des langues régionales, l’arabe pour le Languedoc ?]

      Dans le cas d’espèce, l’arabe et l’occitan c’est du pareil au même. Avec la ratification de la Charte, on ferait un pas de plus vers une société « communautarisée » en mettant une barrière supplémentaire aux brassages de populations. Chaque fois que dans un pays on bloque la mobilité intérieure des citoyens, on sème les graines de la guerre civile. Or, si demain la Charte était ratifiée, notre fonction publique se trouverait « régionalisée ». Comment le juge qui doit pouvoir juger en occitan à Montpellier pourrait-il être muté à Lille, ou il devrait être en mesure de juger en Ch’ti ?

      [Mais ces dames, pourraient-elles nous dire comment elles ont su qu’il y avait un déficit de blonds, en fichant les élèves au moyen de leur prénom ?]

      Cette question avait été soulevée par un certain nombre de langues vipérines. En effet : si compter les petits « noirs » c’est « mal », compter les petits « blonds » c’est parfaitement kacher.

      [Le voile est indiscutablement musulman en l’espèce, quand irez-vous exercer votre intelligence à l’origine de ces faits de divorce culturel relatés sans cesses partout en Europe : le coran.]

      Je n’ai pas compris cette remarque. Pourriez-vous être plus clair ?

  11. Bruno dit :

    Bonsoir,

    Je souhaiterais contribuer à cet article en apportant un témoignage personnel, qui n’a pas pour prétention de s’ériger un principe, tout au plus de constituer un autre aperçu en parallèle avec celui de Descartes. De fait, je n’écris pas dans Libéracon, l’Immonde ou consorts et n’ai pas prétention à imposer une vérité générale par l’exemple . J’habite cependant près de Paris et espère que cela ne me vaudra aucun reproche.

    Je possède, comme une minorité importante de français (oui il existe des français de “souche” mais là n’est pas le sujet) des origines étrangères. Ma grand-mère maternelle, ou plutôt ses parents, sont originaires d’un pays d’Europe de l’est avec lequel nous avons depuis longtemps des liens étroits et amicaux : la Pologne.

    Arrivés en France au début des années 1910, mes arrières grands-parents s’installèrent dans le sud de la France. L’assimilation de ce couple Polonais s’opéra par deux biais :
    -le travail, ils ouvrirent une pharmacie et purent continuer d’exercer leur profession dans un petite ville du Var où la demande était pressante. Je précise par ailleurs, sans aucun jugement de valeur, qu’ils venaient pour travailler avant tout et non pas pour jouir d’avantages sociaux qui n’existaient pas à l’époque. Le travail était une valeur cardinale de leur existence, tout comme de celles de la majorité des gens en ces temps.
    -la guerre, l’arrière grand-père s’engagea comme volontaire étranger dans l’armée française et combattit près de quatre années pour la France. Il fut naturalisé peu après l’Armistice, ce qui facilita les choses, tout comme les amitiés qu’il noua pour toute une vie au front, avec des français.

    Petit, ma grand-mère me chantait des berceuses en polonais, mais elle était néanmoins incapable de parler cette langue, chose dont elle se ne se souciait guère. Cela étant, une fois au lycée, et surtout, à l’université, je suis entré en contact avec des français d’origines diverses, s’exprimant parfois entre eux en arabe ou dans un idiome africain qui m’était inconnu. Bien entendu, comme c’est souvent le cas désormais, la majorité de ses jeunes possédaient des noms à consonance étrangère et avait une culture sensiblement différente.

    J’ai donc questionné ma grand-mère, lui demandant pourquoi, elle et son frère, tous deux nés dans une famille d’immigrés, avaient reçu des prénoms français et ne parlaient pas polonais. Ma grand-mère me rétorqua que ses parents voulaient que leurs enfants soient de “bons” français comme les autres et qu’ils devaient se “fondre” (elle pensait à l’assimilation) dans la masse, car leur futur, c’était la France et qu’ici, on s’appelait Pierre et pas Piotr. Pour ce qui était du polonais, c’était un peu la même idée. Les parents, certes s’exprimaient parfois en polonais à la maison, mais jamais dans la rue et ils interdisaient à leurs enfants de répéter leur langue. Ce n’est pas qu’ils avaient “peur” de mécontenter les français en parlant polonais, selon ma grand-mère, mais qu’ils avaient fait un choix en venant en France et qu’ils voulaient l’embrasser complètement.

    Il faut dire que pour les parents de ma grand-mère, la France, c’était quelque chose de merveilleux. Quand j’en parlais avec elle, je trouvais toujours ça un peu bizarre et ne comprenais pas bien, mais en deux mots, ils se sentaient redevables et aimaient profondément notre pays, leur pays. Ma grand-mère et son frère ont épousé des français de “souche” et avec le temps, cette particularité s’est évanouie et ne se perçoit plus que dans le bleu des yeux.
    Il y a bien eu assimilation, sans violence, ni volonté d’humilier qui que ce soit.

    Ce qui me frappe le plus dans cette histoire c’est que la volonté d’assimilation venait avant tout des arrivants, et pas tant de l’État, bien qu’à l’époque on évitait d’enseigner les langues d’origine des nouveaux venus à l’école…

    Qu’est-ce qui a changé? Je m’interroge.

    Certes, il est plus facile d’intégrer des polonais chrétiens éduqués que des africains issus de civilisation totalement différentes. Néanmoins je ne crois pas que ce soit tout le nœud du problème, loin s’en faut.
    Mes bisaïeuls aimaient la France, celle-ci véhiculait en ce temps un roman national et possédait un prestige moral tel, qu’elle ne pouvait être qu’admirée, tant par les Français que les immigrés.
    On n’apprenait pas la France raciste, esclavagiste et coloniale (je fais court mais vous voyez l’idée) et on ne distillait pas l’idée que la France c’était le différentialisme, en clair, une sorte de supermarché où chacun pouvait être ce qu’il souhaitait, au mépris des traditions et des us et coutumes du pays.
    Aujourd’hui, dans notre pays du vivre-ensemble (expression géniale qui apparait évidemment dès l’instant où cela ne va plus de soi), on pourrait s’appeler Karim, François ou Mamadou sans que cela n’implique aucune conséquence. Et pourtant, il y en a bien une derrière ces prénoms, de culture et de civilisation.

    Je suis persuadé que l’on peut faire cohabiter des êtres humains aux origines diverses dans un même pays. Cependant pour que cela puisse être, il est nécessaire que ce tout ne fasse qu’un seul peuple, autrement, il y aura sur un même territoire qu’une juxtaposition de communautés, regroupées entre-elles, en somme, la fin de la Nation une et indivisible. Je tiens à cette fiction. (J’aimerais bien avoir votre avis sur la Charte des langues… que Pépère veut ratifier)

    Les dames interrogées dans l’article se plaignent que “leurs” enfants restent entre eux. Mais comme vous le dites, elles ne font aucun effort, elles leur donnent des noms étrangers, leur apprennent certainement la langue de leurs ancêtres et portent ostensiblement “leur” différence en bandoulière. Ce n’est pas ainsi que l’on fait un peuple.

    Où va-t-on Descartes??

    • Descartes dit :

      @ Bruno

      [Il y a bien eu assimilation, sans violence, ni volonté d’humilier qui que ce soit. Ce qui me frappe le plus dans cette histoire c’est que la volonté d’assimilation venait avant tout des arrivants, et pas tant de l’État, bien qu’à l’époque on évitait d’enseigner les langues d’origine des nouveaux venus à l’école…]

      L’histoire de vos grands parents, que vous avez si bien raconté, est émouvante. Je ne sais pas si elle est générale, mais elle ressemble beaucoup à celle de mes grands parents et de mes parents (oui, dans ma famille on a émigré deux fois en deux générations). Et sans nécessairement généraliser, je pense qu’elle est aussi celle de beaucoup de nos concitoyens.

      « Qu’est-ce qui a changé? » dites vous. Je pense que la réponse est infiniment complexe. Mais en dernière instance, elle tient dans une transformation simple : nous sommes devenus du moins mentalement des individus-îles. Nos grands parents étaient très conscients des rapports de nécessité réciproque qui les unissaient aux autres. Si l’on divorçait moins, c’est parce que le mariage était d’abord un rapport de nécessité : l’importance de l’économie domestique faisait qu’un homme ne pouvait pas vivre sans femme, la dureté du travail manuel faisait qu’une femme ne pouvait pas vivre sans un mari. Souvenez vous du dialogue de « Tevie le Laitier » de Scholem Aleikhem, qui décrit un juif pauvre d’un village juif de Russie qui un jour demande à sa femme « tu m’aimes » ? Et sa femme lui répond : « je lave ton linge, je fais la cuisine, j’ai eu tes quatre filles, ça veut dire quoi ce genre de question ? ».

      Et parce que nos grands parents avaient besoin des autres, ils avaient de la reconnaissance. Ils étaient reconnaissants envers leur compagnon ou leur compagne d’avoir fait un bout de chemin ensemble, ils étaient reconnaissants envers leur instituteur de les avoir instruit, ils étaient reconnaissants envers leur pays de les avoir éduqués, nourris, protégés. Combien d’étrangers installés en France se sont engagés comme votre grand-père pour aller sur les champs de bataille défendre « leur » pays par simple reconnaissance. Combien d’entre eux voyaient comme un devoir sacré de rendre à la collectivité nationale ce que celle-ci leur avait donné ?

      Pour moi, le plus frappant est la disparition de ce sentiment qu’est la reconnaissance. Chacun croit fermement qu’il s’est fait lui-même, sans l’aide des autres. Pire, que c’est la faute des autres si nous ne sommes pas ce que nous voudrions être. Et donc que non seulement nous ne devons rien à personne, mais qu’en plus ils nous doivent réparation. Vos grands-parents comme mes parents aimaient la France parce qu’elle leur avait tendu la main lorsqu’ils étaient dans la plus grande des difficultés, qu’elle leur avait donné des opportunités, qu’elle les avait traité comme à ses propres enfants. Aujourd’hui, les jeunes maghrébins qui arrivent en France sont logés dans des HLM, éduqués dans des écoles, soignés dans des hôpitaux payés par nos impôts. Bien sur, nos HLM, nos écoles, nos hôpitaux ne sont peut-être pas merveilleux, mais ils sont largement mieux que ce que leur proposait leur pays d’origine. Et est-ce qu’ils expriment une reconnaissance ? Non, la seule chose qu’ils expriment est une longue litanie de plaintes et de récriminations. Et la faute ne leur incombe pas en totalité, parce qu’ils ne font là que suivre le discours dominant parmi les français eux-mêmes. Pensez à Camus dédiant son prix Nobel à son instituteur… combien d’écrivains de moins de 40 ans feraient aujourd’hui de même ?

      [Mes bisaïeuls aimaient la France, celle-ci véhiculait en ce temps un roman national et possédait un prestige moral tel, qu’elle ne pouvait être qu’admirée, tant par les Français que les immigrés.]

      Vos bisaïeuls faisaient plus qu’aimer la France : ils lui étaient reconnaissants. Je crois que c’est autour de cette notion qu’il faut réfléchir pour comprendre pourquoi l’attitude des immigrants – et aussi des français « de souche » – d’hier est aussi différente de celle d’aujourd’hui.

      [(J’aimerais bien avoir votre avis sur la Charte des langues… que Pépère veut ratifier)]

      J’avais écrit il y a longtemps déjà un papier sur cette question. Je peux vous dire pour faire court que pour moi tout ce qui contribue à dresser des barrières pour empêcher la mobilité, le brassage, l’échange entre les citoyens d’une nation est à bannir. Dès lors que chaque « communauté » aura le droit d’utiliser « sa » langue pour tous les actes de la vie civile – et c’est cela le principe de la fameuse « Charte », chacun sera soumis à une pression énorme pour vivre, travailler, se marier dans sa « communauté ».

  12. Jacques Payen dit :

    Comment dire mieux ?
    Vous larguez le compassionnel. .
    Avec vous le fraternel s’esquisse, devient possible.
    Et sort de la construction mentale, morale.
    Belle invite.
    Ce serait beau “qu’elles” soient foule à y répondre.

  13. Anne Iversaire dit :

    C’est sûr que ce billet… décoiffe.
    Mais que dirais-tu à celles et ceux qui affirment que ces femmes sont plus ou moins OBLIGÉES de se voiler à cause de la pression sociale, des lazzi des hommes, etc. (comme l’a dit Bovard dans un commentaire) ?

    • Descartes dit :

      @ Anne Iversaire

      [Mais que dirais-tu à celles et ceux qui affirment que ces femmes sont plus ou moins OBLIGÉES de se voiler à cause de la pression sociale, des lazzi des hommes, etc.]

      Je leur dirai que la liberté a un prix. Et que celles qui ne sont pas prêtes à le payer ne peuvent pas nous demander de le faire à leur place. Nous pouvons faire des choses pour les aider : interdire le voile à l’école ou l’occultation du visage est une manière de le faire. Mais on ne peut faire le bonheur des gens à leur place.

  14. Pierre B dit :

    Puis-je m’autoriser à faire une petite publicité pour une table ronde qui se tiendra la mercredi 17 juin 2015 aux Archives départementales de la Seine-Saint-Denis, à Bobigny ? Son intitulé : “Crise du Parti, parti en crise. Sources, approches, interprétations”. Autour de deux ouvrages récents de Roger Martelli et Julian Mischi sur le Parti communiste français. Informations et invitation au lien suivant : http://archives.seine-saint-denis.fr/Crises-du-Parti-parti-en-crise.html

    Sur le livre de Mischi, voir l’article du Monde diplomatique : http://www.monde-diplomatique.fr/2015/01/MISCHI/51938

    • Descartes dit :

      @Pierre B

      Le sujet est intéressant. Dommage qu’ils aient invité Roger Martelli. Par contre, l’article de Mischi est excellent. A le lire, on dirait qu’il consulte ce blog…

  15. bovard dit :

    Ce dernier jour avec certaines de mes élèves qui se voilent dès qu’elles ont quitté l’établissement,j’ai évité le piège qui m’était tendu.
    Les adolescentes qui se pâmaient d’avance d’aller ‘au bled’,pendant les vacances(ah!l’Agérie et ces inégalables zéphurs),cherchaient à me faire réagir,en approuvant la bunkerisation par l’enburkinage.Impossible pour moi,c’est physique,je n’admets pas que moi,le progressiste je puisse justifier ça!
    C’est pas facile avec 20 ados,chauffées à blanc,’contre les charlis’ que je suis censé être,en plus de leur récriminations contre l’école,.Je m’en suis sorti en évoquant ‘le scandale et les dégats des applications comme Gussip..
    En plus,habitant toujours ce quartier où les enburkanées/bunkerisées se pavanent,je les croise sans savoir.
    Cela ne me prèoccupe plus;On s’habitue à tout,même si c’est interdit,je suis pas flic pour aller appréhender ces contre venantes.
    Au final,quand je lis dans le journal ,qu’en pleine campagne de souchiens,un prof de maths s’est reçus 2 gifles d’un de ses élèves ‘jambon’ de 3ième,je me dis que mon sort n’est pas si triste.Ce prof en repoussant une souris morte,que les élèves déchainés,lui avaient mis sur le bureau,avait éffleuré un des élèves qui l’encerclaient autour de son bureau.Pan,pan! avant il y avait les enfants battus,maintenant,les profs battus!Rassurez vous,Safia ,fatima and co,c’est pas si grave de ne pas avoir de têtes blondes,à coté de vos enfants.Je le regrette mias ,ce gifleur,blond,passer de diplome du brevet et l’EN continuera à laisser ses enseignants sans soutien.Il n’existe pas de lobby parents d’ enseignants.
    Ceux ci,dont la seule reconnaissance sociale est le salaire,refuse même de faire grève pour protester car il faut le reconnaitre le niveau de cohésion nécessaire pour faire changer l’EN,est inatteignable!

    • Descartes dit :

      @ bovard

      [Ce dernier jour avec certaines de mes élèves qui se voilent dès qu’elles ont quitté l’établissement, j’ai évité le piège qui m’était tendu. Les adolescentes qui se pâmaient d’avance d’aller ‘au bled’, pendant les vacances (ah!l’Algérie et ces inégalables zéphurs), cherchaient à me faire réagir, en approuvant la bunkerisation par l’enburkinage. Impossible pour moi, c’est physique, je n’admets pas que moi, le progressiste je puisse justifier ça!]

      Je ne comprends pas très bien ce commentaire. Dans quel contexte s’est déroulé cet échange ? A quel titre évoquez-vous la question de la « burka » avec vos élèves ?

      [Au final,quand je lis dans le journal, qu’en pleine campagne de souchiens, un prof de maths s’est reçus 2 gifles d’un de ses élèves ‘jambon’ de 3ième, je me dis que mon sort n’est pas si triste. Ce prof en repoussant une souris morte, que les élèves déchainés, lui avaient mis sur le bureau, avait éffleuré un des élèves qui l’encerclaient autour de son bureau. Pan,pan! avant il y avait les enfants battus, maintenant, les profs battus!]

      Est-ce que ce professeur a pris – ou exigé qu’on prenne – une sanction exemplaire contre cet élève ? Si la réponse est négative, alors il n’a eu que ce qu’il mérite.

      [(…) l’EN continuera à laisser ses enseignants sans soutien. Il n’existe pas de lobby parents d’enseignants.]

      Attendez, attendez… n’est ce pas les enseignants qui les premiers ont craché sur l’institution éducative ? N’est-ce pas eux qui les premiers ont qualifié les écoles de « casernes » et qui ont imposé l’image du « prof-copain » solidaire de ses élèves contre l’institution ? Le « lobby des parents d’enseignants », ça a existé. Ca s’appelait « l’Etat ». Mais on ne peut pas cracher sur ses parents et ensuite demander qu’ils viennent à l’école vous défendre.

      Je vous le répète : les enseignants ont scié la branche qui les portait lorsqu’au nom des idées « libérales-libertaires » ils se sont joints à la vague anti-institutionnelle. Ils ont cru, les naïfs, que les élèves seraient reconnaissants de toute cette « liberté », et pour les plus cyniques, qu’en se joignant à la foire plutôt qu’en cherchant à la combattre ils seraient épargnés. Les faits ont montré qu’ils avaient tort. Ce qui montre, accessoirement, combien les enseignants ont une idée fausse de ce qui fonde leur légimité.

      C’est pourquoi les pleurnicheries du genre « l’EN laisse les enseignants sans soutien » me laissent un peu sceptique.

    • Françoise dit :

      @Descartes
      Vos litanies généralisatrices et réductrices sur la responsabilité des profs me laissent encore plus sceptique.
      L’élève gifleur a été exclu du collège “Jean Jaurès” (on attend l’analyse de marc malesherbe!)

      @Bovard
      Votre soi-disant piège tendu sur “la bunkerisation par l’enburkinage”, ce ne serait pas un peu de la paranoïa?

    • Descartes dit :

      @Françoise

      [L’élève gifleur a été exclu du collège “Jean Jaurès” (on attend l’analyse de marc malesherbe!)]

      Je me souviens qu’en juin 2014 à Lens, pour des faits semblables – le collège s’appellait là aussi Jean Jaurès – l’élève avait écopé de 2 jours de suspension. Et encore, il avait fallu une véritable mobilisation pour obtenir un conseil de discipline.

      Alors, si en 2015 la peine est immédiate et plus sévère, on peut se réjouir qu’il y ait une prise de conscience. Malheureusement, la sanction est à peine plus lourde : une exclusion « jusqu’à la fin de l’année scolaire » avec l’autorisation de présenter l’examen du brevet. La sanction ayant été prononcée le 5 juin et l’examen du brevet commençant le 25 juin, cela équivaut à une suspension de deux semaines. Je suis sûr que l’élève doit être extrêmement traumatisé par tant de sévérité…

    • Françoise dit :

      Le conseil de discipline a déjà outrepassé ses prérogatives avec cette sanction car les exclusions temporaires ne doivent pas excéder 8 jours; et si c’est une exclusion définitive, l’élève doit pouvoir terminer son année, surtout s’il a un examen en juin.
      Vous auriez peut-être préféré les coups de fouet, le pilori, l’amputation…?

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [Le conseil de discipline a déjà outrepassé ses prérogatives avec cette sanction car les exclusions temporaires ne doivent pas excéder 8 jours; et si c’est une exclusion définitive, l’élève doit pouvoir terminer son année, surtout s’il a un examen en juin.]

      En d’autres termes, le pire que risque un élève qui gifle un enseignant, si les « prérogatives » du conseil de discipline et la loi étaient respectées, serait une exclusion de 8 jours ? Je comprends mieux maintenant pourquoi ce genre d’incident se multiplie.

      [Vous auriez peut-être préféré les coups de fouet, le pilori, l’amputation…?]

      Certainement. Je trouve le pilori particulièrement attractif, mais le fouet n’est pas mal lui non plus. Et pas besoin d’utiliser un vrai pilori, un vrai fouet. Il existe des piloris et des fouets symboliques qui font merveille. Encore faut-il que les enseignants et l’institution soient disposés à les utiliser. Quant à l’amputation… seulement pour les récidivistes.

  16. jacques dit :

    Cette lettre aurait du être destinée aux pères plus qu’aux mères car qui dirigent la famille dans cette communauté?

    • Descartes dit :

      @ jacques

      [Cette lettre aurait du être destinée aux pères plus qu’aux mères car qui dirigent la famille dans cette communauté?]

      Dans la mesure où cette lettre ouverte répond à l’expression publique de ces mères, j’aurai du mal à l’adresser aux pères qui, eux, ne se sont pas exprimés. Par ailleurs, je ne suis pas persuadé que « dans cette communauté » ce soient les pères qui « dirigent la famille ». Les cultures méditerranéennes sont souvent patriarcales dans la sphère publique et matriarcales dans la sphère privée.

  17. Aubert Sikirdji dit :

    Monsieur,
    Je suis préoccupé de constater un problème sur le site internet du journal « Regards » : du fait que des copiés-collés réguliers sont opérés depuis votre blog, qui ne donnent pas leur source, en dérogation de ce que vous avez pris le soin de demander en en-tête : ce qui est pour le moins dommage pour la précision et la salubrité des quelques discussions qui s’y mènent, ainsi que pour la correction envers vous.
    J’y ai pris l’initiative de révéler ce problème à la personne qui s’y surnomme le plus souvent « Maurice », et « bovard » sur votre blog. Voir ici : http://www.regards.fr/web/article/2005-2015-qu-avons-nous-fait-de , sous l’article « 2005-2015 : qu’avons-nous fait de ces dix ans ? » de Catherine Tricot, après que le « Maurice » en question (– que l’on reconnaît , pour d’autres posts, sous l’autre surnom d’ « adeline » -) , …s’y soit livré, le 10 juin à 17h09, 17h14 et 17h16, à une récupération, découpée en trois parties, pour son usage personnel, de votre réponse-échange avec Alain Brachet, le 10/06/2015 à 12h17, sous l’article suivant : “Quand François Hollande nous parle des années 1970”. « Maurice » revendique lui-même la chose, plus loin : « Evidemment, que je ne peux produire tous les textes que je présente ici. Mon objectif est de faire émerger des notions sous-jacentes ou à préciser. En effet je suis conscient qu’Ensemble, ce blog sont une chance pour croiser les idées. » (Le 12 juin à 9h27). Puis : « Au sujet de la nécessaire confrontation courtoise des idées (hors de toute insulte anti-PCFà la pédégé), Alain Brachet s’y livre avec bio (– sans doute a-t-il voulu écrire « avec brio » -) sur le blog Descartes… (…) J’ai d’ailleurs eu une excellente idées de présenter en croisé, les textes des deux sites. La liberté de penser existe, celle d’exprimer des idées , les siennes ou celle des autres, aussi dans notre république, surtout si nous souhaitons être ’Ensemble’, car je n’ai évidemment pas la prétention de créer ex-nihilo, une pensée politique propre. »
    Votre article lui-même s’est d’ailleurs retrouvé « proprement » repris intégralement (à part le paragraphe de présentation, par un surnommé « Miss Térieux », qui a de grandes chances d’être le même, le 13 juin à 15h32, sous l’article de Clémentine Autain, « Le Front national a ravalé sa façade, pas ses idées » (coir ici : http://www.regards.fr/je-vois-rouge-par-clementine/article/le-front-national-un-ennemi-de#forum18842 )
    Moi-même, j’ai eu des écrits, ainsi que ceux d’un autre contributeur, récupérés par « bovard », qui se sont retrouvés soumis par lui à votre sagacité, ce qui m’a fait lui écrire, le 10 juin à 22h28, ceci : « Autre souci : j’ai retrouvé, sur un blog s’étant intitulé de “Descartes”, où vous semblez avoir trouvé une tutelle intellectuelle, des utilisations que vous avez faites d’un de mes posts sur ce site, ainsi que, en bloc, d’une suite de posts de ma part et celui de Dominique Filippi, sous cet autre pseudo de “bovard” !… A savoir ici : http://descartes.over-blog.fr/2015/… (article « Pourquoi les idées se meurent… » bovard01/05/2015 20:16 (où il est question du passage d’une conférence de Pierre Juquin sur Jaurès que j’avais retranscrit), et : bovard21/04/2015 05:28. Je crois qu’une mise en ordre s’impose. »
    Que « Maurice » et « bovard » se copie l’un l’autre n’est pas un problème (un seul exemple parmi d’autres : bovard31/05/2015 05:54, sous http://descartes.over-blog.fr/2015/05/le-jour-ou-nous-avons-defie-les-dieux-et-les-dieux-n-ont-rien-pu-faire.html , et Maurice Le 31 mai à 06:32, sous http://www.regards.fr/web/article/50-nuances-de-rouge … ). De nombreux autres exemples pourraient en être produits.
    Autre chose est cette décalcomanie revendiquée, et déshonnête, usant des textes des autres.
    Car, de plus, les textes repris se retrouvent éventuellement « arrangés » au gré de l’emprunteur : exemple, un passage de votre article http://descartes.over-blog.fr/2015/05/le-jour-ou-nous-avons-defie-les-dieux-et-les-dieux-n-ont-rien-pu-faire.html devient ceci : « Sur le plan politique, le bilan est moins ragoûtant. On aurait pu un instant imaginer que le combat commun pour le « non » pouvait permettre aux jacobins de gauche et de droite de reconstruire l’équivalent du « gaullo-communisme » et de constituer un courant trans-partisan traversant la frontière gauche/droite. Malheureusement, la tranchée mentale qui sépare la droite de la gauche (remplacé par : qui sépare les trotskystes comme Mélenchon, de la gauche communiste ou ensembliste (c’est pareil)) s’est révélée trop difficile à franchir, d’autant plus qu’il n’y a pas dans le paysage une figure charismatique capable de fédérer autour d’elle. (ajouté ici : Quand au FN, il a récupéré le ‘non de droite ‘.) Le « non de gauche » et le « non de droite » n’ont pas réussi à se parler, et c’est regrettable… » Voir Maurice Le 9 juin à 07:02, sous http://www.regards.fr/web/article/2005-2015-qu-avons-nous-fait-de
    Bien. Je m’en tiens là, pour les exemples. Je souhaiterais que vous régliez de votre côté ce problème « oiseux », n’ayant aucun moyen personnel d’y remédier, outre les signalements (limités) que j’ai pu faire, sur le site de « Regards ». Je ne dispose même pas de l’adresse mail de ce « camarade »…
    Cordialement,
    Aubert Sikirdji

    • Descartes dit :

      @ Aubert Sikirdji

      J’ai vérifié vos références, et en effet les “emprunts” – pour ne pas utiliser un autre terme, bien plus désagréables – ne laissent aucune ambiguïté. Je ne suis habituellement pas très jaloux de mes créations, mais je trouve qu’emprunter ainsi mon travail sans même le mentionner à titre de remerciement est un manque de respect pour le travail d’autrui. Et lorsqu’en plus le texte est modifié en changeant le sens, une trahison.

      Les principes de la justice exigent d’entendre l’accusé avant de le juger, et j’attends donc les explications de Bovard. Mais ce soir je me sens trahi dans ma confiance. Je n’ai pas plus que vous de moyen pour le sanctionner, sinon le bannir de mon blog, une première en cinq ans d’existence. Et je le ferai s’il ne fournit pas dans un délai raisonnable une explication convaincante.

      Merci en tout cas de votre vigilance.

  18. bovard dit :

    @descartes@Aubert Sikirdji
    A l’évidence ce procédé intempestif relève d’un dérapage lié à une sorte de ‘blog-addiction’.
    Votre position est légitime.En effet,qui ne dit mot,consent

    • Descartes dit :

      @ bovard

      J’avoue que cette explication me laisse sur ma faim.

    • Aubert Sikirdji dit :

      @bovard
      La part d’addiction que chacun de nous pouvons avoir ne peut constituer un prétexte. Ce serait comme de dire « -j’étais inconscient, je ne l’ai pas fait exprès. » Vos derniers posts sur le site de Regards montrent d’ailleurs que cette « inconscience » perdure. Il ne s’agit maintenant plus d’un « dérapage » ayant consisté en copiés-collés intempestifs, mais d’un « collage » de plusieurs interlocuteurs, englobés dans votre esprit en un seul, que vous avez pour ainsi dire ficelés au même poteau, sous l’effet d’une conviction délirante très préoccupante !… Allo, quoi !… Qui vous aidera à revenir à la raison ? D’autre part, qu’est-ce à dire que « qui ne dit mot consent » ?… Que vous reconnaissez vos pratiques, mais dans le silence ? Vous êtes un éducateur, et vous savez très bien qu’une reconnaissance seulement implicite n’a jamais suffi pour dépasser un problème. Je suis vraiment désolé de devoir intervenir de cette manière, vu que nous sommes entrés en échanges depuis l’été dernier, en étant conscient que, puisque nous ne nous connaissons pas « réellement », vu votre état actuel, cela ne peut pas résoudre grand’chose. Je vous souhaite néanmoins de trouver l’adresse d’une écoute réelle et de confiance, en dehors de la toile.
      Amicalement,
      Aubert Sikirdji .

  19. v2s dit :

    Descartes vous dites :
    « Je ne vois pas pourquoi les couches populaires devraient se sentir responsables du fait que la bourgeoisie et les « classes moyennes » aient sacrifié l’école. »
    Revoilà donc ces classes moyennes, cette fois ci responsables et coupables, selon vous, d’avoir sacrifié l’école !
    Alors il faut que ces classes moyennes, leurs élus, leurs porte-paroles que constituent ces médias bien-pensants que vous brocardez régulièrement, il faut que tout ce monde soit particulièrement idiot, borné et aveugle pour sacrifier ainsi ce qui lui coûte si cher, ce qui le ruine, ce qui concentre la plus grande partie des efforts budgétaires dont ils sont les principaux contributeurs.
    Parce qu’enfin, et vous nous le rappeliez récemment, ce sont bien les classes moyennes qui supportent l’essentielle de la charge fiscale :
    « La charge fiscale est aujourd’hui portée essentiellement par les classes moyennes à travers l’impôt sur le revenu et les impositions indirectes ».
    Descartes dans son blog le 23/05/2015 17H13

    Dans ces conditions il faudra nous expliquer pourquoi ces classes moyennes qui contribuent massivement à alimenter les recettes fiscales, non seulement acceptent mais, selon vous, sont à l’origine du sabotage de l’école ?
    L’école coûte 134 milliards à la nation, budget de l’EN et des professeurs auquel s’ajoute la contribution des régions, des collectivités locales pour les bâtiments, les transports, etc… Des dépenses loin devant la défense, la santé et devant tout le reste.

    A l’école, réforme après réforme, un immense malentendu dure et s’aggrave depuis 50 ans.
    Le collège unique, le socle commun que l’on nous « vend » depuis 50 ans, depuis les années 60, relève en réalité du bon sens.
    C’est un projet que l’on peut résumer comme ça :
    Après 10 ans d’études gratuites et obligatoires, de la grande section, à l’âge de 5 ans, jusqu’au Brevet des Collèges à 15 ans, tout jeune Français, toute une tranche d’âge, doit maîtriser le français à l’oral et à l’écrit, doit maîtriser l’arithmétique, le calcul et les bases de la géométrie, doit apprendre une langue étrangère et doit connaître les grands repaires en histoire et en géographie, ainsi que les bases de l’instruction civiques.
    Le principe est si simple, si naturel que, sur le fond, personne ne peut être contre ?
    D’autant que plusieurs de ces objectifs devraient être déjà atteints à l’entrée au collège, après les 6 années d’école primaire obligatoires.
    Il s’agissait bien, au départ, d’un objectif minimum et rien n’interdisait, en principe, d’aller plus loin avec ceux qui le pouvaient et qui le voulaient.
    Là ou ça pose problème, c’est quand, faute d’atteindre cet objectif minimum avec 100% d’une tranche d’âge, l’école tire une conclusion absurde :

    « Puisque nous n’arrivons pas à amener tout le monde à ce niveau minimum, au nom de l’égalité des chances, assurons-nous au moins que personne ne le dépasse ».

    La vraie question, c’est que 10 ans d’études ininterrompues, gratuites (mais très coûteuses pour la nation) et obligatoires, 10 ans, dont six ans de primaire et 4 ans de collège, c’est beaucoup, c’est même beaucoup trop, pour ne parvenir à atteindre « QUE » ce socle commun. Si on n’y parvient pas, c’est que les fameuses inégalités ne sont pas réduites dès le départ, dès le primaire.

    Si on veut, comme on le dit, rétablir l’égalité des chances, alors renforçons massivement l’école primaire, remettons à niveau les retardataires en français, en langage dès le CP / CE1, préparons 100% des CM2 à être capables de suivre en 6ème et donc à atteindre ensuite, tous, plus facilement, ce socle commun.
    Ensuite, au collège, au lieu de les fermer, n’ayons pas peur de créer et de multiplier les sections d’excellence, vraiment ouvertes à tous ceux qui peuvent les suivre, en sélectionnant sur les résultats.

    Le progrès c’est de rétablir l’égalité des chances au départ, de résorber les gaspillages pour consacrer l’argent à l’enseignement et pas à l’administration, de viser plus haut et de responsabiliser tous les acteurs.

    Les actions pour lesquelles je milite :

    1/ Renforcer massivement l’école primaire, effectifs réduits, cours de soutien, dès le CP / CE1 en français, parlé et écrit, et en calcul.

    2/ Trouver l’argent en supprimant la moitié des 200 000 personnels non enseignants, sur un total de 1 million de salariés à l’Education Nationale, (20% d’improductifs ! quelle industrie y survivrait ?). Je parle là principalement des administratifs, ainsi que des profs « détachés » à des taches non enseignantes, des profs non affectés à une classe, … y compris ceux qui gonflent les effectifs « archi pléthoriques » du CNED, refuge pour les profs qui en ont raz le bol d’enseigner, y compris aussi les profs surpayés par l’EN dans les lycées français à l’étranger, lycées privés et hors de prix, dépendant du ministère des affaires étrangères mais imputés au budget de l’EN … tous ces gaspillages énormes des 134 milliards que la France consacre à son école sont d’ailleurs détaillés dans une étude de la cour des comptes.

    3/ Rétablir l’examen d’entrée en sixième pour s’assurer que tous les inscrits au collège peuvent suivre les 4 années suivantes sans entraver les progrès du reste de la classe.

    4/ Pour les collèges, sélectionner, former et payer de véritables chefs d’établissement, responsables des équipes enseignantes, responsables des résultats de leur collège, responsables de la dotation budgétaire qui serait allouée à chaque établissement au prorata du nombre d’élèves inscrits après l’examen d’entrée en sixième, et au prorata du taux de réussite de l’établissement à l’examen final.

    Vous voyez Descartes, on peut être membre assumé de la classe moyenne, comme moi, et vouloir vraiment réformer l’école pour une véritable égalité des chances et des réussites.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Revoilà donc ces classes moyennes, cette fois ci responsables et coupables, selon vous, d’avoir sacrifié l’école !]

      Comme dirait mon oncle commissaire, il faut toujours regarder à qui profite le crime…

      [Alors il faut que ces classes moyennes, leurs élus, leurs porte-paroles que constituent ces médias bien-pensants que vous brocardez régulièrement, il faut que tout ce monde soit particulièrement idiot, borné et aveugle pour sacrifier ainsi ce qui lui coûte si cher, ce qui le ruine, ce qui concentre la plus grande partie des efforts budgétaires dont ils sont les principaux contributeurs.]

      Et accessoirement, les principaux bénéficiaires. Non seulement parce que la destruction de l’école assure à leurs enfants l’accès sans concurrence aux meilleures institutions, mais surtout parce qu’une partie des classes moyennes sont payées par l’Education nationale.

      [Dans ces conditions il faudra nous expliquer pourquoi ces classes moyennes qui contribuent massivement à alimenter les recettes fiscales, non seulement acceptent mais, selon vous, sont à l’origine du sabotage de l’école ?]

      Je pense avoir répondu à la question plus haut : parce que les dépenses de l’EN sont les recettes de quelqu’un, et ce quelqu’un, c’est en grande partie les « classes moyennes ». Pourquoi croyez-vous que les classes moyennes, qui voient baisser régulièrement le budget de la Défense sans que cela suscite chez elles le moindre problème, hurlent à la mort dès qu’on touche aux crédits de l’Education Nationale ?

      L’école idéale des « classes moyennes » est une école qui paye beaucoup d’enseignants (car il faut bien que les classes moyennes vivent, n’est ce pas ?), qui éduque correctement leurs propres enfants, mais qui évite soigneusement de donner aux enfants des couches populaires les instruments qui pourraient en faire des concurrents pour leurs propres enfants. Tiens, ça ne vous rappelle rien ?

      [Le collège unique, le socle commun que l’on nous « vend » depuis 50 ans, depuis les années 60, relève en réalité du bon sens. C’est un projet que l’on peut résumer comme ça : Après 10 ans d’études gratuites et obligatoires, de la grande section, à l’âge de 5 ans, jusqu’au Brevet des Collèges à 15 ans, tout jeune Français, toute une tranche d’âge, doit maîtriser le français à l’oral et à l’écrit, doit maîtriser l’arithmétique, le calcul et les bases de la géométrie, doit apprendre une langue étrangère et doit connaître les grands repaires en histoire et en géographie, ainsi que les bases de l’instruction civiques. Le principe est si simple, si naturel que, sur le fond, personne ne peut être contre ?]

      Moi, par exemple. Le problème du collège unique, c’est qu’il a transformé ce qui devrait être un plancher en plafond. De l’idée que l’école doit fournir à « tout jeune Français » un socle minimum, on est passé à l’idée que l’école peut se contenter de fournir ce socle, sans pousser les élèves à aller au delà. Le système scolaire n’est pas là seulement pour « tirer » les plus faibles, il est là aussi pour « pousser » les plus forts.

      Or, c’est précisément ce que les « classes moyennes » ne veulent pas. Que l’enfant de l’ouvrier sache moyennement écrire, lire et compter, c’est nécessaire pour qu’il puisse travailler pour nous. Mais si l’école le pousse au delà, il pourrait se faire des idées… par exemple celle de disputer leur place réservée à nos propres enfants. L’école du minimum est issue de ce réflexe de défense. C’est pourquoi quand vous dites :

      [Là ou ça pose problème, c’est quand, faute d’atteindre cet objectif minimum avec 100% d’une tranche d’âge, l’école tire une conclusion absurde : « Puisque nous n’arrivons pas à amener tout le monde à ce niveau minimum, au nom de l’égalité des chances, assurons-nous au moins que personne ne le dépasse ».

      Je ne peux que rejeter le mot « absurde ». La conclusion en question n’a rien « d’absurde » : elle est au contraire fort logique, lorsqu’on l’examine du point de vue de la défense des « classes moyennes ».

      [Si on veut, comme on le dit, rétablir l’égalité des chances, alors renforçons massivement l’école primaire, remettons à niveau les retardataires en français, en langage dès le CP / CE1, préparons 100% des CM2 à être capables de suivre en 6ème et donc à atteindre ensuite, tous, plus facilement, ce socle commun.]

      Oui, tout à fait. Mais surtout, faisons en sorte que ceux qui peuvent aller plus loin que le socle commun y arrivent, et cela QUELQUE SOIT LEUR ORIGINE SOCIALE. L’école du minimum fait le jeu des couches sociales qui ont un « capital immatériel » à transmettre, et qui fourniront dans le contexte familial le « plus » nécessaire pour accéder aux emplois et aux fonctions intéressants. Mais ceux qui n’ont pas cette chance ne peuvent trouver ce complément qu’à l’école. Si celle-ci refuse de leur fournir, ils sont cuits.

      [Ensuite, au collège, au lieu de les fermer, n’ayons pas peur de créer et de multiplier les sections d’excellence, vraiment ouvertes à tous ceux qui peuvent les suivre, en sélectionnant sur les résultats.]

      Tout à fait d’accord.

      [2/ Trouver l’argent en supprimant la moitié des 200 000 personnels non enseignants, sur un total de 1 million de salariés à l’Education Nationale, (20% d’improductifs ! quelle industrie y survivrait ?).]

      Toutes, en fait. Si vous regardez le poids des services administratifs dans les entreprises, vous tombez sur des chiffres semblables, voire plus hauts en fait. Comparez les effectifs de production de Renault avec ceux du développement, de la comptabilité, du marketing, des ventes… et vous verrez que l’EN n’est en fait pas si loin du monde de l’entreprise.

      [3/ Rétablir l’examen d’entrée en sixième pour s’assurer que tous les inscrits au collège peuvent suivre les 4 années suivantes sans entraver les progrès du reste de la classe.]

      Encore une proposition fort louable. Qu’est ce qu’on fait de ceux qui le ratent ?

      [4/ Pour les collèges, sélectionner, former et payer de véritables chefs d’établissement, responsables des équipes enseignantes, responsables des résultats de leur collège, responsables de la dotation budgétaire qui serait allouée à chaque établissement au prorata du nombre d’élèves inscrits après l’examen d’entrée en sixième, et au prorata du taux de réussite de l’établissement à l’examen final.]

      Je suis d’accord sur la première partie de la proposition, mais pas de la deuxième. Il est vrai que chef d’établissement, c’est un vrai métier. Y mettre le professeur le plus vieux dans le grade le plus élevé (ou celui qui n’a plus envie d’enseigner face à une classe) n’est pas une garantie de qualité. Par contre, l’idée d’une dotation budgétaire « au prorata (…) du taux de réussite » aurait tendance à renforcer la dotation des institutions qui accueillent des étudiants issus des classes supérieures, et pénaliser celle de celles qui accueillent des étudiants issus des couches populaires. Indexer la paye du chef d’établissement sur les résultats – encore faudrait-il trouver les bons indicateurs – pourquoi pas. Si on récompense au mérite les enfants, pourquoi ne pas faire la même chose avec les enseignants ? Par contre, la dotation budgétaire doit être calculée en fonction des besoins, et non des résultats.

      [Vous voyez Descartes, on peut être membre assumé de la classe moyenne, comme moi, et vouloir vraiment réformer l’école pour une véritable égalité des chances et des réussites.]

      Certainement. Il y eut des patrons communistes et des ouvriers nazis. L’appartenance de classe ne vaut pas prédestination idéologique ou politique, et Marx lui-même s’était élevé contre le raisonnement mécaniste dans ce domaine. L’intérêt de classe se manifeste globalement, pas individuellement.

    • Françoise dit :

      @ v2s

      “détaché” veut dire qu’ils n’ont pas de classe en charge mais conservent leur avancement; ce sont:
      – les directeurs d’établissements (18000)
      – les profs de cours pour adultes (dans l’enseignement supérieur, dans les prisons ou autres)
      – les délégués syndicaux qui demandent parfois une décharge de 30% pour leur activité syndicale (4000)
      pour ces derniers, c’est peut-être discutable (quoique?), mais vous pouvez difficilement die que les premiers sont inutiles et improductifs.

    • v2s dit :

      @ Françoise,
      Vous dites :
      [ (…) mais vous pouvez difficilement dire que les premiers sont inutiles et improductifs]
      Oui oui .. Françoise, bien sur qu’il faut des profs détachés dans les prisons.
      Mais le problème est ailleurs et je vais essayer de mieux m’expliquer.
      Puisque vous semblez appartenir à la grande famille de l’EN, il vous est certainement arrivé de rendre visite aux services du rectorat.
      Si c’est le cas, vous ne pouvez pas avoir été insensible à l’ambiance surréaliste qui règne dans les bureaux. Ça rappelle un peu les services administratifs dans les vieux films des années 60.
      Pour eux, le monde semble s’être arrêté au siècle dernier ! De vieux ordinateurs, du vieux mobilier, des piles de dossiers, de papiers, d’archives …
      Le contraste est saisissant si on compare avec la forte automatisation, la belle organisation, des services de l’administration des impôts.
      Tout ça prêterait à sourire si l’EN n’était pas le premier budget de l’état, budget auquel s’ajoute les sommes considérables consacrées à l’enseignent par les régions, les départements et les communes (bâtiments, transports …).
      Essayez de savoir combien coûte un élève dans le primaire, au collège, au lycée … impossible.
      Faute de mieux on en est réduit à diviser les coûts globaux par le nombre d’élèves, mais même ça ce n’est pas exact car la part des collectivités locales est impossible à imputer précisément à un établissement. Chaque ville, chaque département, chaque région a sa présentation, aucune consolidation des chiffres n’existe, c’est inexploitable.
      Les chiffres les plus fantaisistes et les plus contradictoires circulent. Les chefs d’établissement ne connaissent même pas la masse salariale de leur propre établissement. Pas plus qu’ils ne connaissent les sommes consacrées par les collectivités locales à l’amortissement de leurs locaux ou au transport de leurs élèves.
      Ils ne voient même pas en quoi ça peut bien les concerner de connaitre ces chiffres.
      Et pourtant, l’ensemble coûte 134 milliards d’euros par an. Même si, malheureusement, dans certaines écoles rurales les murs décrépis et les gouttières du toit tombent lentement sur les élèves et sur leurs maîtres.
      Évoquer le mot « gestion » avec un membre de l’EN, c’est un peu comme prononcer une grossièreté, ça ne se fait pas ! L’éducation ça n’a pas de prix !
      Mais malheureusement ça a un coût et il est exorbitant. Ce coût par élève est l’un des plus élevé de l’OCDE sans que personne ne soit capable d’avancer la moindre explication.
      Pour savoir pourquoi ce coût est si élevé il faudrait pouvoir disposer de comptabilités détaillées, de budgets par niveau, par région, par établissement.
      Mais non, rien de tout cela n’existe, c’est l’opacité, tout est mélangé, on ne peut rien comparer, rien analyser.
      Poser la question de l’efficacité c’est s’entendre répondre : « mais monsieur, l’école n’est pas une entreprise, et ne le sera jamais ! »
      Les hôpitaux, par exemple, tendent vers une plus grande efficacité, et pourtant « la santé non plus ça n’a pas de prix » alors pourquoi l’école échapperait-elle a toute tentative de rationalisation ?
      En plus des disparités en nombre d’élèves par classe, d’importantes disparités de salaire existent chez les professeurs entre certifiés et agrégés, auxquelles s’ajoutent des disparités en nombre d’heures de cours.
      Concrètement, un élève qui suit un cours, disons de math ou de français pendant une heure, coûtera jusqu’à deux fois plus chère à la collectivité selon que son prof sera certifié ou agrégé et que l’effectif de sa classe sera de 25 ou de 30 élèves.
      Mais qui va oser s’attaquer un jour au temps de travail ridiculement réduit des agrégés qui est régit par un statut qui date de 1950 ?
      Vous évoquez le cas des professeurs détachés, mais aucune comptabilité ne récence et ne détaille ces cas. Si on veut connaître et améliorer les coûts, il faudrait rendre à chacun ce qui lui appartient, imputer les profs qui opèrent dans les prisons aux prisons, ceux qui travaillent dans la formation pour adultes à la formation pour adultes, ceux qui travaillent dans les musées au ministère de la culture, etc …
      Plus grave, si vous êtes prof vous entendez certainement parler de ceux de vos collègues qui après un trimestre, voire deux n’ont toujours pas d’affectation. Qui connaît le nombre exact de ces fonctionnaires payés et sans travail ?
      Mais surtout, il ne faut pas ébruiter ce genre de gaspillage, ce serait mettre en difficulté les syndicats qui font office, dans l’EN, de Direction des Ressources Humaines et qui, dans les faits, gèrent les affectations.
      L’administration communique des chiffres globaux mais ne mesure rien ! Impossible de tenter de reconstituer les coûts de chaque niveau, de chaque cycle, de chaque établissement.
      Et pourtant il en va de l’enseignement comme de n’importe quelle autre activité organisée, on n’améliore les coûts à condition de pouvoir d’abord les mesurer et à l’EN, on ne mesure rien.
      C’est pourquoi il va bien falloir un jour se décider à découper en tranche cet énorme organisation, et donner aux chefs d’établissements la gestion de leur budget, que ce soit pour les bâtiments, pour la gestion des personnels enseignants et administratifs, pour la masse salariale et les frais de fonctionnement.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Pas plus qu’ils ne connaissent les sommes consacrées par les collectivités locales à l’amortissement de leurs locaux ou au transport de leurs élèves. Ils ne voient même pas en quoi ça peut bien les concerner de connaitre ces chiffres.]

      J’avoue que moi non plus. En quoi cela aiderait le travail du Chef d’établissement de connaître les sommes consacrées par les collectivités au transport de leurs élèves ? Connaissez-vous beaucoup d’activités ou les chefs d’entreprise connaissent les sommes consacrées au transport de leurs clients ?

      [Et pourtant, l’ensemble coûte 134 milliards d’euros par an.]

      L’ensemble de quoi ? Je ne sais pas d’où vous sortez ce chiffre. Dans le budget 2014, la mission « enseignement scolaire » fait 65 Md€.

      [Mais malheureusement ça a un coût et il est exorbitant. Ce coût par élève est l’un des plus élevé de l’OCDE sans que personne ne soit capable d’avancer la moindre explication.]

      J’aimerais savoir d’où vous sortez les chiffres. En tout cas, si l’on croit les chiffres officiels, la dépense par élève en France était dans la moyenne de l’OCDE en 2011. Elle est de 30% inférieure dans le primaire, et de 27% supérieure dans le secondaire, ce qui s’explique très simplement par le fait que la scolarité primaire en France est plus courte que dans la moyenne des pays de l’OCDE (5 ans contre 6) et que le cycle secondaire est plus long (7 ans contre 6). Vous pouvez retrouver les chiffres sur http://www.education.gouv.fr/pid25496-cid58241/la-depense-pour-parcours-eleve-etudiant-france-dans-ocde-2011.html

      [Poser la question de l’efficacité c’est s’entendre répondre : « mais monsieur, l’école n’est pas une entreprise, et ne le sera jamais ! »]

      Ca dépend dans quels termes elle est posée. Curieusement, dans n’importe quelle organisation on n’obtient pas la même réponse lorsque l’on dit aux gens « l’objectif est de fournir une meilleur service avec le même budget » que lorsqu’on déclare « l’objectif est de réduire le budget ». Or, la grande majorité des « réformes » dans notre pays prennent plutôt la deuxième forme…

      [Concrètement, un élève qui suit un cours, disons de math ou de français pendant une heure, coûtera jusqu’à deux fois plus chère à la collectivité selon que son prof sera certifié ou agrégé et que l’effectif de sa classe sera de 25 ou de 30 élèves.]

      Et quelle est la conclusion ? Un patient ne coûtera pas la même chose selon que son opération est faite par un interne de chirurgie frais émoulu ou par un grand chirurgien de renom international. Et alors ? Que suggérez vous ? Que l’hôpital paye également les jeunes internes et les grands chirurgiens ?

      [Mais qui va oser s’attaquer un jour au temps de travail ridiculement réduit des agrégés qui est régit par un statut qui date de 1950 ?]

      Là encore, vous utilisez un argument qui n’a aucun rapport avec l’affaire. Si au lieu de dater de 1950 le statut datait de 2010, est-ce que cela changerait quelque chose ? Il y a des textes anciens qui sont excellents, et des textes nouveaux qui sont nuls. Et alors ? Quant au temps de travail « ridiculement réduit » des agrégés, on pourrait en discuter, tout comme on pourrait en discuter leur salaire. Après tout, nous sommes dans une société de marché, et si le rapport « temps/salaire » était si favorable, il y aurait pléthore de candidats de grande qualité qui présenteraient le concours de l’agrégation. On m’a dit pourtant que ce n’est pas le cas, et que les meilleurs étudiants en sciences par exemple préfèrent la banque plutôt que l’enseignement. Si vous changez le « statut de 1950 » et que vous rallongez le temps de service, vous serez obligé d’augmenter aussi les salaires, autrement vous risquez d’avoir un petit problème de recrutement…

      [Plus grave, si vous êtes prof vous entendez certainement parler de ceux de vos collègues qui après un trimestre, voire deux n’ont toujours pas d’affectation. Qui connaît le nombre exact de ces fonctionnaires payés et sans travail ?]

      Sans vouloir vous offenser, cela existe dans toute organisation, y compris dans les entreprises privées. J’ai l’impression que vous idéalisez beaucoup le monde de l’entreprise…

      [C’est pourquoi il va bien falloir un jour se décider à découper en tranche cet énorme organisation, et donner aux chefs d’établissements la gestion de leur budget, que ce soit pour les bâtiments, pour la gestion des personnels enseignants et administratifs, pour la masse salariale et les frais de fonctionnement.]

      Qu’est ce que vous appelez « donner la gestion de leur budget » ? Cela veut dire que les chefs d’établissement pourraient déterminer librement le nombre de postes dans leur établissement et le salaire des enseignants, par exemple ?

    • morel dit :

      @ Descartes et v2s

      Veuillez m’excuser d’intervenir dans votre dialogue sans y avoir été invité.
      J’ai l’impression toute personnelle que votre échange, très intéressant sur un autre plan, est éloigné des pratiques professionnelles.
      J’ai pu vérifier qu’actuellement au collège 3 parfois 4 heures hebdomadaires sont consacrées à l’histoire-géographie-instruction civique. Les programmes me semblent fournis. Aussi, quel détails, quel approfondissement peuvent y prendre place ?
      De loin, il me semble que le professeur ne peut qu’énoncer les grands faits.
      Au-delà mis à part la possibilité de quelques cas aberrants (présents dans tous les métiers), il me semble que la « sensibilité » des uns succède à la « sensibilité » des autres, j’en ai fait l’expérience, n’en suis pas « mort » et c’est ce que j’ai constamment souligné auprès de certains parents d’élèves chagrins.
      Mais l’enseignement n’est pas mon domaine, l’avis de professionnels avisés me semble nécessaire sur ce point.

      Plus importants à mes yeux, les programmes retenus. En matière d’histoire, trop de choix me semblent liés aux circonstances politiques du moment. En thèmes obligatoires :
      6è : Les débuts du judaïsme, Les débuts du christianisme
      5è : L’Islam : débuts, expansion, sociétés et cultures (noter qu’on ne se contente pas ici des débuts)
      4è : Un monde dominé par l’Europe : empires coloniaux, échanges commerciaux et traites négrières
      : La Première Guerre mondiale et les violences de guerre (inclus le génocide des Arméniens)
      3è : La Seconde Guerre mondiale ; génocide des Juifs et des Tziganes ; déportations et univers
      concentrationnaires.
      In : http://www.education.gouv.fr/cid87938/projets-de-programmes-pour-l-ecole-elementaire-et-le-college.html

      Je me demande, au-delà de la légitimité en soi de chacun de ces thèmes historiques (l’honnêteté doit souligner qu’il y en a d’autres que je n’ai pas cités), si l’on ne cherche pas à « séduire » différentes clientèles.

      Pour essayer d’être honnête jusqu’au bout, je me dois de souligner que le « roman » post 39-45 occultait soigneusement la destruction des juifs d’Europe à l’Est comme à l’Ouest.

      Signe des temps sans doute, je note que l’histoire du mouvement ouvrier est tout aussi soigneusement occultée.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Veuillez m’excuser d’intervenir dans votre dialogue sans y avoir été invité.]

      Mais… vous – et tous les lecteurs de ce forum – avez une invitation permanente à intervenir dans les dialogues. C’est bien mon but : que ces « dialogues » que j’entretien avec chacun de vous deviennent de véritables débats à plusieurs.

      [De loin, il me semble que le professeur ne peut qu’énoncer les grands faits.]

      Tout a fait. Mais le choix de ces « grands faits » et la manière comme on les énonce ne sont pas neutres. Je ne suis pas partisan du mensonge à l’école. Il ne faut pas raconter aux enfants des choses fausses. La construction du « roman national » doit se faire à partir d’une sélection de faits exacts exposés de telle manière à leur donner un « sens », celui « des grandes choses faites ensemble, et du désir d’accomplir de nouvelles ».

      D’ailleurs, ne vous faites pas d’illusions : les beaux esprits qui professent résister au « roman national » au nom de la vérité historique n’aspirent en fait qu’à faire passer sous l’étiquette de « vérité historique » leur propre « roman ». Là où les partisans du « roman national » ne retiennent que les meilleures pages de la colonisation, eux ne retiennent que les pires. Mais le processus est exactement le même.

      [Au-delà mis à part la possibilité de quelques cas aberrants (présents dans tous les métiers), il me semble que la « sensibilité » des uns succède à la « sensibilité » des autres, j’en ai fait l’expérience, n’en suis pas « mort » et c’est ce que j’ai constamment souligné auprès de certains parents d’élèves chagrins.]

      J’ignore votre âge, mais à votre écriture je devine qu’on est à peu près de la même génération. Nous avons eu la chance de profiter d’une génération de professeurs qui, au délà de leurs « sensibilités », étaient formés dans la transmission « roman national ». J’ai eu des professeurs communistes, et des professeurs gaullistes, mais aucun d’eux n’aurait osé critiquer les institutions ou propager la haine de soi. Ce n’est pas le cas de la génération qui vient.

      [Plus importants à mes yeux, les programmes retenus. En matière d’histoire, trop de choix me semblent liés aux circonstances politiques du moment.]

      Et c’est un euphémisme. Certaines mentions (comme celle du génocide arménien en 4ème) ont un caractère démago-électoraliste tellement évident qu’on se demande comment les membres de la Commission des Programmes ont pu publier pareille chose. A leur place, je serais mort de honte.

      [Je me demande, au-delà de la légitimité en soi de chacun de ces thèmes historiques (l’honnêteté doit souligner qu’il y en a d’autres que je n’ai pas cités), si l’on ne cherche pas à « séduire » différentes clientèles.]

      Se poser la question, c’est y répondre. Qu’on enseigne un génocide, pourquoi pas. Dans ce cas, la Shoah paraît le choix évident, d’une part par son caractère emblématique (pour les raisons que j’ai expliqué dans un autre commentaire) et d’autre part parce que c’est celui qui touche l’histoire de France de plus près. Mais rentrer dans une logique ou il faut satisfaire chaque « communauté » en parlant de « son » génocide… franchement, ce n’est pas le rôle de l’école.

      [Pour essayer d’être honnête jusqu’au bout, je me dois de souligner que le « roman » post 39-45 occultait soigneusement la destruction des juifs d’Europe à l’Est comme à l’Ouest.]

      Elle « n’occultait soigneusement » rien du tout. Elle n’en parlait pas, c’est tout. Il faut arrêter de croire que parce qu’on choisit de ne pas évoquer un sujet on « l’occulte ». Les professeurs étaient parfaitement libres d’en parler s’ils le jugeaient nécessaire, les bibliothèques scolaires – qui ne s’appelaient pas encore « centres de documentation » – pouvaient acheter des livres sur la question, et si un élève posait une question on ne refusait pas de lui répondre. Mais l’institution avait considéré que ce n’était pas un sujet qui faisait partie du « socle commun » que tout bon petit français doit connaître. J’ajoute que les juifs français ont été les premiers à souhaiter ce silence. Ils n’avaient en effet aucune envie d’être « singularisés » de quelque façon que ce soit.

      [Signe des temps sans doute, je note que l’histoire du mouvement ouvrier est tout aussi soigneusement occultée.]

      Là encore, je ne dirais pas « occultée », mais tue…en tout cas elle ne l’était pas de mon époque: je me souviens avoir eu un cours sur la loi Le Chapelier et la naissance des syndicats… mais c’était peut être une initiative de mon professeur de l’époque, à qui d’ailleurs je voudrais rendre hommage ici. C’est lui qui m’a fait aimer l’histoire de France…

    • Françoise dit :

      @v2s
      “Évoquer le mot « gestion » avec un membre de l’EN, c’est un peu comme prononcer une grossièreté, ça ne se fait pas ! L’éducation ça n’a pas de prix !”
      bien sûr! et ce que vous reprochez avec ironie est notre fierté!
      Nous gérons des personnes, pas des portefeuilles; nous servons notre pays, sans rechercher de profit financier.

      Vous reprochez aux collectivités locales de ne pas connaître les sommes qu’elles dépensent, mais le “forfait communal” qui permet, selon le principe de parité, à chaque école primaire privée de recevoir de la mairie le montant qu’elle aurait dépensé si l’enfant avait été à l’école publique, n’est pas calculé sur du vent (idem pour le “forfait d’externat” collèges/départements lycées/régions ).
      Les dépenses de fonctionnement sont donc bien calculées, non pas par les “membres de l’EN” dont ce n’est pas le boulot, mais par les collectivités territoriales.

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [« Évoquer le mot « gestion » avec un membre de l’EN, c’est un peu comme prononcer une grossièreté, ça ne se fait pas ! L’éducation ça n’a pas de prix ! »][bien sûr! et ce que vous reprochez avec ironie est notre fierté!]

      Une fierté particulièrement bête, à mon avis. Je suis souvent en désaccord avec V2S mais pour une fois je ne peux que lui donner raison. Dès lors qu’on gère des moyens, la question de savoir si ces moyens sont bien utilisés, et si l’on ne pourrait pas les utiliser encore mieux pour améliorer le service rendu aux citoyens devrait être posée. J’ai du mal à comprendre comment on peut être « fier » de ne pas se poser cette question.

      Je vous ferais d’ailleurs remarquer que vous donnez sans le vouloir raison à V2S : si vous êtes « fière » de ne pas parler de « gestion », on peut supposer que vous – et par ce « vous » j’entend l’ensemble des enseignants, puisque vous semblez parler en leur nom en utilisant le « nous » – ne vous êtes jamais posé la question de l’optimisation des moyens. Il y a donc fort à parier que l’utilisation qui en est faite est loin d’être optimale…

      [Nous gérons des personnes, pas des portefeuilles; nous servons notre pays, sans rechercher de profit financier.]

      Il ne s’agit pas de « profit financier ». Il s’agit de tirer le plus possible de « jus » des moyens qui vous sont donnés par la collectivité nationale. Là encore, vous donnez sans le vouloir raison àV2S. Vous ne semblez même pas avoir conscience du fait que vous ne gérez pas que des personnes, que vous gérez aussi des moyens.

    • Françoise dit :

      Ce qui serait “bête” serait de présupposer que l’EN “gère des moyens”.
      v2s parlait du salaire du personnel, des dépenses de fonctionnement soi-disant inchiffrables, j’y ai répondu; vous parlez de “moyens”, lesquels?

      L’EN enseigne, c’est un trésor intellectuel pour l’avenir, le seul service qu’elle rende aux citoyens. Si pour vous les “membres de l’EN” sont des “moyens à optimiser”, voyez comme v2s comment fonder votre école ultra privée où les profs auront une obligation de résultat et, pour parvenir à leurs fins hypothétiques, où les chefs d’établissements mettront toutes les chances de leur côté en triant leur matière premère (des enfants au QI+120, blonds si possible…)

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [Ce qui serait “bête” serait de présupposer que l’EN “gère des moyens”.]

      Bien sur qu’elle gère des moyens. Vous-même vous gérez des moyens. Lorsque vous décidez de consacrer une journée à une visite plutôt qu’à un cours, vous êtes en train de gérer votre temps d’enseignement. Et le temps, c’est un « moyen », puisqu’il est payé par la collectivité.

      [L’EN enseigne, c’est un trésor intellectuel pour l’avenir, le seul service qu’elle rende aux citoyens.]

      Oui, et ce service a un coût. Bien gérer consiste à donner le meilleur service possible pour un coût donné. Cela paraît tellement évident que je me demande comment vous pouvez ne pas le comprendre.

      [Si pour vous les “membres de l’EN” sont des “moyens à optimiser”,]

      Non. Pour moi les « membres de l’EN » sont les acteurs de l’optimisation : c’est à eux d’optimiser les moyens qui sont mis à leur disposition par la collectivité.

      [voyez comme v2s comment fonder votre école ultra privée où les profs auront une obligation de résultat et, pour parvenir à leurs fins hypothétiques, où les chefs d’établissements mettront toutes les chances de leur côté en triant leur matière première (des enfants au QI+120, blonds si possible…)]

      Si votre but était de donner un exemple de la défense la plus bêtement corporative, vous avez réussi 20 sur 20. D’abord, il n’y a aucune raison pour ne pas donner aux enseignants des « obligations de résultat ». Après tout, quand vous achetez le pain chez le boulanger et que vous le trouve immangeable en arrivant chez vous, vous vous estimez en droit de demander qu’on vous rembourse. Si le plombier vient réparer votre douche et qu’il n’arrive pas à en tirer une goutte d’eau, vous ne payez pas la facture. Pourquoi serait-ce différent pour le cas de l’enseignant ? Il y a peut-être des bons arguments pour soutenir le contraire, mais en tout cas, cela n’a rien d’une évidence.

      Ensuite, même dans l’hypothèse ou l’on donnerait aux enseignants une « obligation de résultat », il n’est nullement évident que les enseignants auraient intérêt à « trier la matière première ». Tout dépend de l’indicateur de résultat qu’on sélectionne. Imaginons qu’on prenne pour indicateur une amélioration de 5% des résultats. Dans ce cas, l’objectif est d’autant plus facile de réussir qu’on part de plus bas…

      Et finalement, pourriez-vous m’expliquer la différence entre une « école ultra-privée » et une « école privée » ?

    • v2s dit :

      @Françoise.
      [Et ce que vous reprochez avec ironie est notre fierté!]

      Vous ne devriez pas confondre votre fierté légitime de travailler au service des enfants, de la nation, de la collectivité, ce dont les citoyens ne vous seront jamais assez reconnaissants*, avec la nécessité impérieuse pour l’EN, depuis les profs, jusqu’à l’administration et l’encadrement de maîtriser les sommes engagées par le premier budget de l’état.
      *Ni flagornerie, ni ironie dans cette phrase qui est à prendre au premier degré.

      Descartes demandait d’où sortait le chiffre de 134 milliards, d’ici :
      http://cache.media.education.gouv.fr/file/2012/37/8/DEPP-RERS-2012-budgets-couts-financements_223378.pdfectivités
      Le document se rapporte à 2010, mais je crains fort que le chiffre n’ait pas diminué (au contraire si on sait comment les budgets des collectivités ne cessent de déraper).
      C’est un chiffre qui consolide les 85Mds de l’EN et 49Mds des collectivités locales.

      Pourquoi serait-ce utile de confier régionalement la gestion entière des établissements à une seule entité (qui pourrait être une sorte de « super rectorat », dépendant de l’EN ?
      Pour prendre les bonnes décisions.
      Par exemple :
      « Vaut-il mieux conserver sur un territoire donné 3 établissements de 2 à 300 élèves ou n’en conserver qu’un seul de 800 élèves ? »
      Impossible de répondre à cette question sans prendre en compte un grand nombre de paramètres qui sont aujourd’hui gérés par des entités différentes (régions, état, département …) : les coûts actuels et prévisionnels des établissements bien sur, mais aussi le coût prévisionnel des transports en cas de regroupement, mais aussi la vétusté ou au contraire la construction récente de l’un ou l’autre des établissements, ou des trois, les temps de transport, la bonne desserte ou au contraire l’enclavement des établissements etc …
      Aujourd’hui, chaque entité paye, mais qui décide vraiment dans l’intérêt du citoyen. Du citoyen payeur d’impôts et dans l’intérêt de l’élève, le futur citoyen ?
      Autre exemple :
      En 2014, le Conseil Général du Jura vote pour chaque élève entrant en 6eme, l’attribution d’un Ipad APPLE. (9,7 millions d’euros sur 5 ans devenus rapidement 14 millions à cause d’une mauvaise évaluation du contrat de maintenance). Opération interrompue depuis, pour la prochaine rentrée, par la nouvelle assemblée départementale.
      Le corps enseignant était il réellement demandeur d’une telle attribution ? Apparemment non. Cet Ipad est-il un apport indispensable pour les élèves ? Les élus du Conseil Général qui l’ont votée n’ont-ils pas cédé à la tentation du cadeau électoral, pour « faire joli » auprès des parents ?
      Pour l’anecdote, le journal LE PROGRES d’hier mentionne une manifestation des collégiens à qui on va retirer l’objet mirifique, manif au prétexte que les tablettes contiennent leur photos et films personnels. C’est dire l’immense intérêt pédagogique de l’outil et donc des 14 Millions sur 5 ans.
      Si une grande autonomie de gestion était déléguée à des « super rectorats » régionaux, avec en main les budgets de toutes les composantes de la dépense des 134 milliards d’euros, les cadres locaux de l’EN, en concertation avec les équipes locales, dépenseraient l’enveloppe au mieux de l’objectif pédagogique.

      A un moment ou les euros vont manquer, l’efficacité de l’institution dépendra encore plus de la qualité des décisions de gestion.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Descartes demandait d’où sortait le chiffre de 134 milliards, d’ici :]

      J’attire votre attention sur le fait que selon le document cité le chiffre inclut l’enseignement supérieur et la formation permanente. Il n’est donc pas exact de dire que le système scolaire coûte 134 Md€

      [Pourquoi serait-ce utile de confier régionalement la gestion entière des établissements à une seule entité (qui pourrait être une sorte de « super rectorat », dépendant de l’EN ?]

      Vous voulez dire re-centraliser les compétences maintenant distribués entre l’Etat (paiement des enseignants, cartes scolaire), les Régions (bâtiments et personnel non enseignant des lycées), les Départements (bâtiments et personnel non enseignant des collèges, transports scoaliares) et les communes (bâtiments et personnels non enseignant des écoles primaires) ? Je suis pour… mais cela irait contre le « sens de l’histoire » venu de Bruxelles…

    • Françoise dit :

      @ Descartes

      une école “ultra privée” est une école hors contrat qui ne reçoit rien de l’Etat et paie ses locaux, ses profs et ses dépenses de fonctionnement. Elle peut se permettre de trier ses élèves et de “choisir” ses programmes.
      une école que les gens disent communément (et à mauvais escient) “privée” ou “libre” est une école sous contrat qui paie juste ses locaux et son personnel OGEC (non enseignant) et reçoit des forfaits des collectivités territoriales pour son fonctionnement, calculés selon ce que coûte un élève dans une école publique voisine, sachant que les profs sont payés par l’Etat. C’est le principe de l’enseignement catholique sous contrat qui n’est pas libre de ses programmes depuis 1959 et participe à la mission d’enseignement de l’Etat; ainsi il doit, en principe (?…), accueillir tout le monde sans discrimination religieuse.
      L’EN ne gère comme “moyens” que des postes de fonctionnaires enseignants avec des ouvertures/fermetures de classes selon les besoins, ainsi qu’un programme commun d’enseignement. A cela vous pouvez ajouter les classements en zone d’éducation prioritaire qui bénéficient de profs mieux payés, ayant une décharge horaire (si c’est cela qui vous gêne?)

      Régions, départements et communes gèrent locaux, personnel non enseignant, cantine, transports, fournitures (dont les tablettes dans certains départements mais ça, je suis d’accord, c’est une décision politique d’affectation de budget, cela n’a rien à voir avec l’EN qui ne demande pas son usage dans les programmes qu’elle a élaborés), ainsi que les subventions pour les classes à besoins spécifiques, CLIS, ULIS, SEGPA…

      @v2s

      “Pourquoi serait-ce utile de confier régionalement la gestion entière des établissements à une seule entité (qui pourrait être une sorte de « super rectorat », dépendant de l’EN ?

      Pour prendre les bonnes décisions.”

      Vous voulez rassembler dans un super entité “régionale” ce qui est déjà géré localement au niveau des régions (lycées), départements (collèges) et communes (écoles),
      alors qu’il y a qques jours vous vouliez ceci:
      “C’est pourquoi il va bien falloir un jour se décider à découper en tranche cet énorme organisation, et donner aux chefs d’établissements la gestion de leur budget, que ce soit pour les bâtiments, pour la gestion des personnels enseignants et administratifs, pour la masse salariale et les frais de fonctionnement.”
      dites nous clairement ce que vous proposez!

      D’autre part, le rectorat dans mon académie travaille vite et bien, je n’ai pas à m’en plaindre!
      quant à mes collègues qui n’ont pas de poste en sortant de leur formation, ils travaillent tous sur des postes de remplacement longue durée où ils sont prioritaires, en étant payés comme titulaires (ce qui me parait normal), personne dans mon entourage peut se targuer de dire qu’il est payé et ne travaille pas. Mais peut-être avez-vous un cas concret?

      Enfin, vous parliez du coût exorbitant de notre école en France par rapport aux autres pays de l’OCDE, je n’ai pas beaucoup d’élements de comparaison mais ici, en Allemagne où mes enfants vont à l’école, collège et lycée, on ne s’embête pas avec la cantine (y’en a pas!), pas avec la surveillance hors classe (ni pions, ni portail!), pas avec le nettoyage (pas de personnel de ménage, les parents cotisent en début d’année pour un passage hebdomadaire dans les toilettes…)
      c’est sûr que ça coûte moins cher…

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [L’EN ne gère comme “moyens” que des postes de fonctionnaires enseignants avec des ouvertures/fermetures de classes selon les besoins, ainsi qu’un programme commun d’enseignement. A cela vous pouvez ajouter les classements en zone d’éducation prioritaire qui bénéficient de profs mieux payés, ayant une décharge horaire (si c’est cela qui vous gêne?)]

      L’EN a la main sur les programmes, les horaires, et contrôle une dotation de millions d’heures de cours. Ne pensez-vous pas que tout ça doit être « géré » ? J’ai l’impression que vous confondez « gérer » et « administrer ».

    • v2s dit :

      @Françoise
      [dites nous clairement ce que vous proposez!]

      Je pense avoir montré ce que je propose.
      Conserver l’EN centralisée pour les concours de recrutement, ainsi que les programmes nationaux, mais
      Décentraliser, tout en restant dans l’EN, au niveau de bassin de population de taille « raisonnable » (deux ou trois départements, ou une grande métropole) non pas une partie des moyens (transports, bâtiments) comme aujourd’hui, mais tous les moyens disponibles, y compris la masse salariale des profs, les choix de regroupement d’établissement, les bâtiments et les transports pour permettre à des équipes de terrain de l’EN, avec les chefs d’établissement, de prendre les décisions au plus près des besoins réels et donc avec des dépenses ajustées au besoin réel.

      Je pense avoir été clair également dans ma critique de la gestion d’une partie du budget par des élus locaux, telle qu’elle ressort de la décentralisation. Voir les cas des cadeaux électoraux aux parents d’élèves électeurs que j’évoque pour le Jura par exemple. Ou, à contrario, voir le cas de certaines écoles primaires de communes rurales pauvres ou mal gérées, dont les bâtiments vétustes frôlent l’insalubrité (cas de certaines communes d’Ardèche par exemple).

      Pour que les citoyens puissent exercer leur droit de regard sur la bonne gestion des budgets de l’école, l’état doit mettre à leur disposition des chiffres clairs. A ce jour ce n’est pas le cas.
      La confusion profite à la fois à certains élus soucieux soit de leur réélection, soit soucieux de laisser leur empreinte par une mesure phare, par la construction d’un collège ou d’un lycée prestigieux.
      Profite également à l’administration qui ne tient pas à exposer au grands jour ses dysfonctionnements.
      Mais ne profite pas à l’amélioration des niveaux scolaires.

    • Françoise dit :

      @v2s
      Comment croyez vous que l’EN recrute et gère sa masse salariale?
      Le territoire est découpé en 30 académies (exactement comme vous dites “deux ou trois départements, ou une grande métropole”) qui ouvre son concours de recrutement en fonction des postes à pourvoir et gère son personnel.
      Ce que vous proposez existe déjà depuis belle lurette.
      Vous n’avez pas compris que l’EN ne gère que du personnel et des programmes, les collectivités territoriales s’occupent du reste.

      @Descartes
      non effectivement, je ne connais pas la différence entre administrer et gérer;
      si on me demandait d’y chercher la petite bête, je dirais qu’administrer est appliquer les règles du jeu et gérer est adapter ces règles à des situations plus compliquées. En gros, on administre sans se poser de questions, mais on gère les problèmes.
      Je ne crois cependant pas qu’on puisse dire que l’EN administre quand les régions/départements/communes gèrent. Chaque entité a les deux fonctions, à supposer qu’il y ait une différence réelle entre administrer et gérer.
      Vous barrerez ma copie en rouge, j’en suis sûre!

    • Descartes dit :

      @ Françoise

      [non effectivement, je ne connais pas la différence entre administrer et gérer;]

      C’est fort dommage. La gestion implique des décisions sur l’allocation de moyens, alors que l’administration ne fait qu’assurer l’exécution de ces décisions. Ainsi, l’acte de décider qu’il faut réparer tel bâtiment plutôt que tel autre est un acte de gestion, alors que l’appel d’offres pour choisir l’entrepreneur, le contrôle des travaux, le paiement des factures sont des actes d’administration.

      [Je ne crois cependant pas qu’on puisse dire que l’EN administre quand les régions/départements/communes gèrent.]

      Bien sur que non. Mais lorsque vous décidez de consacrer tant de temps à un point donné du programme plutôt qu’à un autre, vous faites un acte de gestion d’un « moyen », à savoir, le temps que l’Education nationale vous paye.

    • v2s dit :

      @Françoise
      [Vous n’avez pas compris que l’EN ne gère que du personnel et des programmes, les collectivités territoriales s’occupent du reste.]
      Non seulement je l’ai compris, mais c’est bien ce qui me chagrine.
      Je trouve que pour un but unique, à savoir éduquer les enfants, il devrait y avoir un seul budget.
      Au final le but ce n’est pas d’avoir peu ou beaucoup de jolis bâtiments, ni peu ou beaucoup de jolis transports scolaires, le seul but c’est, d’éduquer les enfants en y consacrant les besoins réels, ni plus ni moins.
      Je vous ai donné plusieurs exemples qui montrent qu’aujourd’hui ces différents budgets ne sont pas gérés au mieux des intérêts des citoyens.
      De plus, le détail des dépenses devrait être accessible aux citoyens à travers des documents disponibles et clairs.
      Chaque foyer fiscal contribue à travers l’IR et à travers la TVA à ce qui constitue la principale dépense de l’état et des collectivités. Il n’y a aucune raison pour accepter l’opacité actuelle.

  20. marc.malesherbes dit :

    une question hors sujet (encore que …) sur l’enseignement de l’histoire.

    Sur le blog de JP Chevénement on trouve un billet sur le sujet
    http://www.chevenement.fr/Les-nouveaux-programmes-d-Histoire%C2%A0-le-rejet-de-la-Nation_a1713.html

    j’ai bien du mal à comprendre la question. Comment peut-on enseigner un “récit national” ?
    je le cite:
    “que la France, depuis toujours, s’était faite d’ajouts successifs, mais que ceux-ci s’étaient faits de telle manière que ne fût pas atteinte sa « personnalité structurée ». Cette « personnalité structurée », c’est l’identité républicaine de la France dont le récit national doit permettre de comprendre la formation”

    L’histoire est aveugle, n’a nulle “intention”, et bien des “intentions” se sont transformées en conséquences opposées. L’histoire, c’est avant tout celle des structures dominantes …

    Comment faire de tout cela un “récit national” ?

    Une chose est de faire le récit de “nos” grandes actions, de “nos” grands hommes, mais faut-il oublier ceux d’ailleurs ? Et faut-il oublier nos errements, erreurs, crimes … et ceux des autres ?

    L’histoire n’est pas un cours de morale, ou doit-elle le devenir ?

    La seule voie que je puisse imaginer est d’enseigner l’histoire comme matrice de ce que nous sommes aujourd’hui, compréhension de notre monde (sans prétendre à une compréhension totale, simplement à des rappels de contextes).

    • Descartes dit :

      @ marc.malesherbes

      [j’ai bien du mal à comprendre la question. Comment peut-on enseigner un “récit national” ?
      L’histoire est aveugle, n’a nulle “intention”, et bien des “intentions” se sont transformées en conséquences opposées.]

      Vous avez tout à fait raison. Je pense en fait que Chevènement n’arrive pas dans ce texte à résoudre une contradiction : d’un côté, il a du mal à accepter l’idée qu’on puisse enseigner en cours d’histoire le « roman national », qui est une construction qui doit autant à la science historique qu’à la volonté de constituer un récit édifiant ; d’un autre côté, il se rend bien compte que sans cet enseignement il est difficile de bâtir une mémoire partagée qui nous permette de nous reconnaître comme les membres d’une même collectivité partageant un destin commun. C’est pourquoi il invente cette idée hybride de « récit national », qui se veut en même temps « histoire » et « roman national ».

      C’est là l’une des grandes contradictions du projet éducatif républicain : celui de former en même temps un citoyen et un individu libre n’obéissant qu’à sa Raison. Pour former le premier, il faut lui transmettre un récit commun, pour former le second, il faut lui transmettre une histoire scientifique. Que fait-on lorsque le récit et les faits entrent en contradiction ?

      Personnellement, j’aime l’analogie de la famille. Au jeune enfant, on raconte une vision idéalisée de ses ancêtres. On ne lui raconte pas que l’arrière-grand-père Gaston était pétainiste et que la tante Edwige était alcoolique. Et puis, au fur et à mesure que l’enfant grandit, que sa personnalité se forme, que sa place en tant que membre de la succession des générations dévient incontestable, il apprend petit à petit ce qu’on appelle les « secrets de famille ». Je trouve que c’est la meilleure manière de gérer la contradiction.

      [Une chose est de faire le récit de “nos” grandes actions, de “nos” grands hommes, mais faut-il oublier ceux d’ailleurs ? Et faut-il oublier nos errements, erreurs, crimes … et ceux des autres ?]

      Faut-il oublier que l’arrière-grand-père a été pétainiste et la tante est alcoolique ? Il y a une marge entre « oublier » et « ne pas en parler ». Oui, il y a des errements, des erreurs, des crimes dont il vaut mieux ne pas en parler aux enfants. C’est en particulier le cas des « errements, erreurs et crimes » qui le sont aux yeux d’une fraction de la population, et pas d’une autre. Quant aux « grands hommes », notre « roman national » a toujours inclus des personnalités « d’ailleurs ». Jules César n’est pas d’ici, que je sache…

      [L’histoire n’est pas un cours de morale, ou doit-elle le devenir ?]

      Par certains côtés, l’histoire à l’école est inévitablement un cours de morale. Il faut bien comprendre que le débat entre adversaires et partisans d’un « roman national » n’oppose pas les partisans d’une « histoire romancée » et ceux d’une « histoire scientifique ». En fait, les adversaires du « roman national » sont partisans d’un autre roman, qu’on pourrait qualifier de « roman anti-national ». Lorsque ces gens proposent d’introduire au forceps l’étude des horreurs de la colonisation ou de l’esclavage, pensez-vous vraiment que leur objectif soit purement historique ? Que le professeur puisse parler de ces phénomènes sans la moindre connotation morale ? A votre avis, quelle serait la réaction des auteurs du programme si un enseignant choisissait de parler des esclaves en pais d’Islam – bien plus nombreux que ceux exportés vers les Amériques – plutôt que de la traite négrière « occidentale » ?

      Il est très difficile, même pour les adultes, de faire une séparation entre histoire et morale. Alors pour des enfants… car contrairement à la physique ou la chimie, l’histoire n’est pas une discipline purement scientifique. Le passé est toujours interprété comme le miroir du présent. Les hommes du passé sont des sujets d’identification ou bien des repoussoirs, et en faire l’un ou l’autre dépend d’un choix moral.

    • v2s dit :

      @ marc.malesherbes et @Descartes
      Intéressant ce glissement sémantique du « roman national » vers le « récit national ».
      Personnellement cette notion de récit national me convient bien.
      Puisqu’il s’agit d’enseigner la chronologie des faits réels qui ont marqué la construction de la nation, sans les travestir ni les édulcorer.
      Pour avoir écouté sur France Inter l’interview du président du conseil des programmes scolaires, je suis d’ailleurs étonné que JP Chevènement se dise être en désaccord avec lui sur ce point, puisque, si je l’ai bien entendu, M. Lussault défend, lui aussi, ce nouveau concept de « récit national ».
      On s’en doute, et il nous l’a confirmé dans sa réponse, ce glissement sémantique, dont JP Chevènement semble se satisfaire, ne convient pas à Descartes.
      Descartes, lui, tient au « roman ».
      Descartes tient beaucoup à l’histoire enjolivée, à la fiction, celle qui va, soi-disant, nous faire aimer la nation.
      Celle ou on voudrait nous faire croire que presque tous les français étaient résistants en 39/45, que les françaises qui ont couché avec de jeunes soldats occupants ont bien été tondues à la libération et non pas violées par des groupes de FFI en armes. Ce beau roman qui veut nous faire oublier que les paras ont tué et violé les filles algériennes, dans les villages, pour les faire avouer la cachette de leurs pères et de leurs frères.

      On a entendu souvent vos arguments Descartes, mais à l’époque de l’Internet, à l’époque de ses rumeurs, de ses bobards, de ses manipulations en tout genre, à une époque ou n’importe quel ignorant mal intentionné ou dérangé mentalement peut trouver une audience attentive auprès de la masse des internautes, il me semble plus urgent que jamais de se « contenter » de transmettre le récit national, le plus proche possible de la vérité connue.
      Faute de quoi, la nation s’expose à des réactions de rejet plus ou moins violentes, plus ou moins définitives, quand les jeunes, devenus adolescents apprennent la vérité.

      Quant à M. Lussault, le président des programmes, c’est à mon sens un dangereux personnage.
      Il tient un discours débordant de bon sens, tout en érudition en charme et en efficacité : On lui donnerait le bon dieu sans confession tant son discours est consensuel.
      Mais il faut juger les gens aux actes, pas aux paroles.
      Prenons un exemple le programme de 5ème des collèges, en géographie :

      Le titre :
      HUMANITÉ ET DEVELOPPEMENT DURABLE
      C’est le cas de le dire, « tout un programme ! »

      I – LA QUESTION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE / 25% du temps consacré à la géographie
      II – DES SOCIÉTÉS INÉGALEMENT DÉVELOPPÉES / 35% du temps consacré à la géographie
      III- DES HOMMES ET DES RESSOURCES / 35% du temps consacré à la géographie
      IV – UNE QUESTION AU CHOIX / 5% du temps consacré à la géographie

      Le compte est bon ! Ça fait bien 100%

      Alors peu importe que les enfants placent le Japon dans l’hémisphère sud (comme une certaine ministre Duflot l’a fait), ou place La Réunion dans l’océan Pacifique (Comme Manuel Valls l’a fait).
      Peu importe de savoir si l’Ukraine est bien en Afrique ou si l’Océan Indien est bien peuplé de peaux-rouges, ça n’a aucune importance.
      L’important c’est que nos jeunes géographes en herbe se mettent bien en tête que le développement doit être durable, que les richesses sont inégalement réparties, de même que les ressources qui en plus d’être inégalement réparties sont de surcroît disponibles en quantité limitées.
      En somme, pourquoi se ruiner à payer des professeurs, se ruiner à construire des écoles quand, quelques très bons documentaires de la BBC ou d’ARTE, bien réalisés feraient largement l’affaire.
      Économisons l’enseignement et rendons gratuit, publique et obligatoire le visionnement à domicile d’un documentaire par jour, c’est largement suffisant pour atteindre ces objectifs qui ne relèvent pas du savoir mais d’une vague prise de conscience.

      Heureusement, dans leur grand bon sens, les profs savent ne pas perdre de vue l’essentiel et n’hésitent pas s’éloigner des programmes pour transmettre aussi les fondamentaux.

      J’ai signé la pétition initiée par Chevènement, Bayrou et Luc Ferry, anciens ministres de l’éducation nationale, avec trois intellectuels.
      https://www.change.org/p/m-le-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9publique-pour-un-college-de-l-exigence

      Un extrait :
      « …Il ne peut y avoir d’interdisciplinarité féconde que sur la base de savoirs maîtrisés.
      Nous n’acceptons pas que les disciplines soient affaiblies comme elles le sont dans la réforme prévue, au profit d’une interdisciplinarité obligatoire, sans réelle consistance, ni contenu défini … Les thèmes retenus pour les « Enseignements pratiques interdisciplinaires » prévus, l’ont été manifestement en fonction des modes et de l’air du temps. ».

      Il me semble pour le coup ce n’est pas une question droite/gauche, même si la ministre actuelle semble très animée par une idéologie égalitariste.
      Ce serait plutôt la goûte d’eau « pédagogiste » qui fait déborder le vase du bon sens des profs et des citoyens (parents, ex et futurs parents) réunis.
      L’éducation nationale semble être une administration qui échappe au contrôle démocratique. Les cadres de l’administration, ayant fait cause commune avec les « pédagogues progressistes », soutenus (pour une fois) par leur ministre, se sentent pousser des ailes et poussent le bouchon le plus loin possible.
      Je forme un vœu, c’est que cette erreur de trop accélère la vraie, la grande réforme, celle qui fera exploser ce monstre ingouvernable.
      Exploser ce monstre pour recréer, dans le cadre d’objectifs et de programmes nationaux, des écoles autonomes, responsables de leurs résultats, des chefs d’établissements responsables de leur gestion, du recrutement et de la masse salariale de leurs équipes. Des écoles dotées d’une enveloppe budgétaire annuelle dépendant du nombre d’élèves.
      Dans une période ou l’argent va manquer, arrêtons de croire que dépenser toujours plus est synonyme de progrès.
      Et si, après 130 ans d’école publique, gratuite et obligatoire. 130 ans de monté ininterrompue des budgets pour atteindre aujourd’hui 134 milliards d’euros, si on en arrivait enfin à réduire au stricte minimum les « non productifs » c’est-à-dire les « non professeurs en face de leurs élèves » pour consacrer l’argent aux établissements, responsables de leurs résultats et de leurs budgets.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Intéressant ce glissement sémantique du « roman national » vers le « récit national ». Personnellement cette notion de récit national me convient bien. Puisqu’il s’agit d’enseigner la chronologie des faits réels qui ont marqué la construction de la nation, sans les travestir ni les édulcorer.]

      Vous y croyez vraiment ? Réflechissez : pensez vous qu’on puisse enseigner disons la période de l’occupation et raconter la déportation des juifs simplement comme une « chronologie de faits réels » sans prendre parti ? Sans transmettre un message « moral » sur le fait qu’il est « mal » d’assassiner des gens ? Ou bien, si vous préférez un autre exemple : lorsqu’on enseignera l’histoire de l’esclavage, aura-t-on le droit de mettre l’accent sur le commerce des esclaves noirs organisé par les arabes plutôt que sur la traite négrière « triangulaire » (ce qui du point de vue de la « chronologie des faits » est rigoureusement exact) ?

      Il ne faut pas se faire des illusions. A l’université, parce qu’on s’adresse à des adultes, on peut se contenter de poser les faits et laisser chacun libre de ses jugements. Mais à l’école, on a encore des enfants qui n’ont pas des références éthiques et morales constituées, et il faut encore que l’enseignant qu’il leur dise ce qui se fait et ce qui ne se fait pas. Dire que les 6 millions de juifs tués pendant la guerre ne représente que 10% du total, alors que les chrétiens représentent plus de 85% des morts est énoncer une vérité historique. Est-ce pour autant un « détail » ?

      [On s’en doute, et il nous l’a confirmé dans sa réponse, ce glissement sémantique, dont JP Chevènement semble se satisfaire, ne convient pas à Descartes. Descartes, lui, tient au « roman ». Descartes tient beaucoup à l’histoire enjolivée, à la fiction, celle qui va, soi-disant, nous faire aimer la nation.]

      Je n’y tiens pas, mais je suis lucide : si nous n’avons pas une « fiction » qui nous fasse aimer la nation, nous laissons de la place à une autre « fiction » qui nous conduira à la détester. Je ne vois pas comment on pourrait enseigner à l’école une histoire qui ne serait pas « enjolivée », ne serait-ce par le choix de ce qu’on dit et ce qu’on ne dit pas, puisque tout le monde est d’accord qu’on ne peut pas TOUT dire. Ainsi, par exemple, on a décidé d’enseigner l’histoire du judaïsme, du christianisme et de l’Islam. Mais pas celle du bouddhisme, du Taôisme, de la mythologie gréco-latine… ni même de l’athéisme. Est-ce que ce choix ne construit pas une « fiction », celle de la place particulière du monothéisme ?

      Partant de là, et puisqu’il est inévitable d’enseigner un « roman », je préfère que ce soit un « roman national ». Je n’ai rien contre un « récit » à la Chevènement, mais je ne vois pas comment on fait en termes pratiques.

      [Celle ou on voudrait nous faire croire que presque tous les français étaient résistants en 39/45, que les françaises qui ont couché avec de jeunes soldats occupants ont bien été tondues à la libération et non pas violées par des groupes de FFI en armes. Ce beau roman qui veut nous faire oublier que les paras ont tué et violé les filles algériennes, dans les villages, pour les faire avouer la cachette de leurs pères et de leurs frères.]

      Ah… mais parlera-t-on aussi des insurgés algériens qui assassinaient des français et mutilaient leurs cadavres pour créer un climat de terreur ? Ca va être drôle, de transformer les cours d’histoire en une sorte de défilé d’atrocités – car croyez-moi, dans ce rayon, il y a de quoi remplir des tomes et des deux côtés. Et attention, ces atrocités, il faut les raconter TOUTES, car oublier une seule serait « enjoliver l’histoire »…

      Si le « roman national » enjolive l’histoire, c’est généralement par omission. On n’a jamais dit que tous les français étaient résistants. On a simplement omis de raconter le contraire. Imaginez-vous qu’on puisse enseigner sans rien omettre ?

      [On a entendu souvent vos arguments Descartes, mais à l’époque de l’Internet, à l’époque de ses rumeurs, de ses bobards, de ses manipulations en tout genre, à une époque ou n’importe quel ignorant mal intentionné ou dérangé mentalement peut trouver une audience attentive auprès de la masse des internautes, il me semble plus urgent que jamais de se « contenter » de transmettre le récit national, le plus proche possible de la vérité connue.]

      Franchement, je ne vois pas ce que Internet vient faire là dedans.

      [Faute de quoi, la nation s’expose à des réactions de rejet plus ou moins violentes, plus ou moins définitives, quand les jeunes, devenus adolescents apprennent la vérité.]

      Et pourquoi ça ? Je suis sur qu’en devenant adulte vous avez appris pas mal de secrets de famille qui ne sont pas très reluisants. Avez-vous renié vous parents pour autant ? Leur avez-vous jamais reproché de vous avoir laissé croire – pire, de vous avoir transmis la croyance – au Père Noël ou en la fée Carabosse ? De vous avoir promis un soir de cauchemar qu’ils seraient toujours là pour vous protéger alors qu’ils savaient pertinemment que ce ne serait pas le cas ? Non, bien sur que non. Cela fait partie des « fictions nécessaires », dont nous avons besoin à certaines périodes de la vie et qui disparaissent lorsqu’elles cessent de l’être.

      Le « roman national » est une fiction nécessaire. Il est indispensable pour nous construire en tant que membres d’une collectivité nationale. Et lorsque nous nous sommes construits et que nous devenons adultes, cette fiction se dissout et nous pouvons accéder à la « véritable » histoire de la même manière que nous accédons aux secrets de famille.

      [L’important c’est que nos jeunes géographes en herbe se mettent bien en tête que le développement doit être durable, que les richesses sont inégalement réparties, de même que les ressources qui en plus d’être inégalement réparties sont de surcroît disponibles en quantité limitées.]

      Je vous l’ai dit : vous ne pouvez pas vous opposer au « roman ». Tout au plus, vous pouvez choisir le type de roman. Si vous ne voulez pas avoir le « roman national », vous allez devoir choisir entre le « roman écolo-bobo », le « roman victimiste », le « roman européen »…

      [J’ai signé la pétition initiée par Chevènement, Bayrou et Luc Ferry, anciens ministres de l’éducation nationale, avec trois intellectuels.]

      Vous remontez dans mon estime…

      [Je forme un vœu, c’est que cette erreur de trop accélère la vraie, la grande réforme, celle qui fera exploser ce monstre ingouvernable.]

      Personnellement, je réflechirais deux fois avant de « faire exploser » quoi que ce soit. Le système éducatif que nous avons est loin d’être optimal, mais au moins il est institutionnalisé. Or, nous avons ces temps-ci une énorme difficulté à créer de nouvelles institutions, tout simplement parce que la pensée institutionnelle elle-même est faible, et que l’idéologie « libérale-libertaire » qui est devenue notre pensée unique est foncièrement anti-institutionnelle. Si aujourd’hui on fait « exploser » l’institution, il n’est pas évident qu’on arriverait à mettre quelque chose à sa place.

      [Dans une période ou l’argent va manquer, arrêtons de croire que dépenser toujours plus est synonyme de progrès.]

      Vous voyez bien, nous pouvons être d’accord sur quelque chose…

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes
      Bonjour,
      [Dire que les 6 millions de juifs tués pendant la guerre ne représente que 10% du total, alors que les chrétiens représentent plus de 85% des morts est énoncer une vérité historique.]
      Une telle assertion est par trop réductrice. Il est difficilement imaginable qu’un enseignant puisse se donner la liberté de présenter, par cette « vérité » la réalité d’une manière aussi tendancieuse. Le réel est l’ensemble de tout ce qui est.
      Ou alors l’EN fait mal son boulot, soit en l’engageant soit en le maintenant à son poste.
      Une guerre mondiale – la seconde tout particulièrement – est un désastre qui fait l’objet d’un ensemble hétéroclite d’opérations. Elles vont de la bataille militaire classique au génocide ou à l’épuration de masse et les morts consécutifs ne sont pas tous, du point de vue de l’humanisme, comparables. La barbarie qui a effacé de la communauté humaine 10, 20% ou plus des morts pendant la guerre affecte durablement l’ontologie humaine et c’est ce qui la distingue de la boucherie de 14/18.
      C’est un événement dans l’événement et sans engager des développements abscons que ne pourraient assimiler des collégiens, le rôle et le devoir de l’enseignant est de bien démarquer, avec des mots simples, les différentes facettes de cette tragédie mondiale. Parce que « la bête immonde est encore féconde » on ne peut décemment ne présenter que des faits chiffrés.
      L’occasion est donnée à l’enseignant – si la liberté de digresser lui est accordée – d’évoquer ce que tout totalitarisme est susceptible d’engendrer. Quelques minutes me paraissent suffisantes pour aborder ce sujet essentiel du XXème siècle.

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Dire que les 6 millions de juifs tués pendant la guerre ne représente que 10% du total, alors que les chrétiens représentent plus de 85% des morts est énoncer une vérité historique.][Une telle assertion est par trop réductrice. Il est difficilement imaginable qu’un enseignant puisse se donner la liberté de présenter, par cette « vérité » la réalité d’une manière aussi tendancieuse. Le réel est l’ensemble de tout ce qui est.]

      Dans ce cas, il faut admettre que l’école est un espace trop réduit pour exposer « tout ce qui est », et qu’il vaut donc mieux renoncer dès le départ à exposer « la réalité ». Nous sommes obligés de faire des choix, de décider ce qu’on dit et ce qu’on tait. Et à partir de là, pourquoi le choix de dire ce qui peut conduire les élèves à se sentir membres d’une même communauté et de taire le reste serait il moins légitime qu’un autre ?

      [Ou alors l’EN fait mal son boulot, soit en l’engageant soit en le maintenant à son poste.]

      Pourtant, un tel enseignant n’aura fait qu’exposer les faits, nus et sans interprétation. Peut-on blâmer un enseignant pour cela ?

      [La barbarie qui a effacé de la communauté humaine 10, 20% ou plus des morts pendant la guerre affecte durablement l’ontologie humaine et c’est ce qui la distingue de la boucherie de 14/18.]

      Ce n’est ni le premier, ni le dernier génocide de l’histoire. Et je ne pense pas que pour les penseurs Chinois ou Indiens la Shoah ait « changé l’ontologie ». C’est un événement qui nous choque nous, occidentaux, parce qu’il remet en cause un certain nombre de suppositions et de principes qui sont attachés à notre histoire. Mais au dehors de l’Europe – par exemple dans le monde arabe – la vision qu’on a de l’évènement n’est pas tout à fait la même. Mais votre exemple est intéressant parce qu’il montre combien la vision canonique de la Shoah est devenue pour vous si naturelle que vous ne vous rendez même plus compte qu’il s’agit d’une construction au même titre que le « roman national ».

      [C’est un événement dans l’événement et sans engager des développements abscons que ne pourraient assimiler des collégiens, le rôle et le devoir de l’enseignant est de bien démarquer, avec des mots simples, les différentes facettes de cette tragédie mondiale. Parce que « la bête immonde est encore féconde » on ne peut décemment ne présenter que des faits chiffrés.]

      Attendez, attendez… le simple fait de parler de « la bête immonde » implique un choix moral. L’historien ne peut qualifier le nazisme de « immonde », seul le moraliste peut le faire. Nous sommes donc d’accord que l’école n’enseigne pas l’histoire « scientifique », mais un « roman » historique contenant des enseignements moraux ? Et si c’est le cas, pourquoi le « roman national » serait moins légitime qu’un autre ?

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes

      [. . . . il vaut donc mieux renoncer dès le départ à exposer « la réalité ». Nous sommes obligés de faire des choix, de décider ce qu’on dit et ce qu’on tait]
      Le réel est en effet inépuisable, et l’art de l’enseignant réside dans sa capacité d’en extraire l’essentiel, avec un discours tenant compte du contexte éducatif dans lequel il opère.
      [Nous sommes donc d’accord que l’école n’enseigne pas l’histoire « scientifique », mais un « roman » historique contenant des enseignements moraux ?]
      « La vérité c’est ce que l’on croit » dit le poète. Et l’idée de roman implique forcément une torsion de la réalité à la croyance communément adoptée ce qui n’est pas forcément antinomique de la crudité des faits. Là encore, une qualité première de l’enseignant est l’intégrité, c’est-à-dire la volonté de tendre vers une objectivité compatible avec le binôme réel prouvé et éthique collective.
      A ce sujet, comment fait l’enseignant pour se positionner lorsqu’il se réfère à des auteurs qualifiés dont les thèses sont quelquefois en quasi opposition ?

    • @ Descartes et alii,

      “Dire que les 6 millions de juifs tués pendant la guerre ne représente que 10% du total, alors que les chrétiens représentent plus de 85% des morts est énoncer une vérité historique”
      Je dois avouer, à titre personnel, que je suis assez choqué des intitulés des programmes sur la Seconde Guerre Mondiale qui mettent beaucoup trop l’accent sur le génocide des juifs (et, secondairement, des Tziganes). La Shoah n’est pas un détail, et a toute sa place dans une étude du conflit et de la mise en coupe réglée de l’Europe occupée par le III° Reich. Je pense néanmoins que la Shoah devrait être relativisée. Lorsque j’enseigne ce génocide (ou, depuis une époque plus récente, celui des Arméniens), j’ai toujours la désagréable sensation que la vie de certains hommes vaut moins que celle d’autres hommes. Je rappelle que les Allemands ont massacré des millions de Slaves (Polonais, Tchèques, Russes, Biélorusses, Ukrainiens), et pas seulement sur les champs de bataille: les massacres et les déportations de civils ont été monnaie courante dans les régions d’URSS tombées aux mains de la Wehrmacht, sans oublier les prisonniers maltraités, morts d’épuisements, au mépris des conventions. Pardon de le dire abruptement mais la vie d’un juif vaut-elle plus que la vie d’un Polonais catholique ou celle d’un communiste russe? Pourquoi verser de chaudes larmes sur Samuel, tailleur juif de Varsovie, et oublier Andreï, paysan biélorusse pendu par les vert-de-gris?

      Je dois dire que cela me rappelle une “Une” aperçue à Paris il y a quelques années: c’était un magazine juif sur la couverture duquel se tenait bien droit les bras croisés notre cher BHL avec en grosses lettres cette citation de lui: “Tuer un Juif n’est pas un crime ordinaire”. Cette phrase me hante depuis des années. Poussons la logique jusqu’au bout: si tuer un juif n’est pas un crime ordinaire, c’est sans doute qu’un juif n’est pas une personne ordinaire. Et si un juif n’est pas une personne ordinaire, c’est donc qu’il s’agit d’une personne extraordinaire. Que reproche-t-on aux nazis? D’avoir éliminé la véritable “race supérieure”? J’ai toujours pensé que du “peuple élu” à la “race supérieure”, il n’ y avait qu’un pas. Après tout, les théories racistes nazies ne font que reprendre et détourner le concept de “peuple élu” pour l’appliquer aux Aryens… destinés à gouverner le monde au nom de la race. Comme l’appartenance à la race supérieure, l’appartenance au peuple juif est héréditaire, ethnique, quasi-racial. Il y a là un aspect un peu déroutant, et qui m’interpelle: peut-on vraiment se réclamer du judaïsme et se proclamer héritier des Lumières?

      Ces paroles de BHL font également écho à celles, plus récentes de Cukierman à Créteil: “si la République ne protège pas les juifs, alors ces derniers partiront et la France sera livrée à la charia ou au FN”, autrement dit, sans les juifs, les Français sont juste bons à être des musulmans intégristes ou des fachos avinés. Heureusement que les juifs sont là pour nous élever intellectuellement… Quel mépris! Apparemment, pour certains juifs, l’égalité entre les hommes n’est pas une chose acquise. Je ne pense pas que la civilisation française, la démocratie, la République, la liberté doivent tout aux juifs, même si je ne méprise pas l’apport que certains d’entre eux ont apporté à l’édifice national.

      Mais je dois dire qu’enseigner la Shoah quand on voit qui sont les escrocs (BHL) et les communautaristes (Cukierman) qui l’exploitent à des fins peu reluisantes, qui l’utilisent pour pratiquer le terrorisme intellectuel et décider qui a le droit de parler et qui doit se taire, ça ne fait pas très envie. Franchement, c’est une insulte pour les victimes du III° Reich (et je ne parlerai pas d’Israël, pour rester poli).

      J’espère que la disparition des survivants et témoins permettra dans quelques années de porter un regard plus mesuré sur la Shoah. Mais il serait bon, de manière générale, que les massacres commis sur les civils sans défense durant les deux guerres mondiales ne fassent pas oublier le sacrifice, souvent héroïque, des soldats tombés en défendant leur pays, poilus de 14 ou soldats de l’Armée rouge en 41. Il est vrai que de nos jours on s’identifie plus facilement aux “victimes” qu’à des hommes qui font le choix de combattre, ou plutôt le choix d’obéir à ceux qui leur demandent de combattre. Les résistants, eux, sont admirés parce que leur combat s’accompagne d’une forme de désobéissance et on voit bien que cela plaît aux “rebelles” qui nous dirigent. Mais le courage est-il moins grand lorsque c’est l’abnégation et le sens du devoir qui poussent à combattre? Je ne le crois pas.

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Le réel est en effet inépuisable, et l’art de l’enseignant réside dans sa capacité d’en extraire l’essentiel, avec un discours tenant compte du contexte éducatif dans lequel il opère.]

      Certes. Mais il est illusoire de croire qu’on peut faire cette « extraction » sur des bases purement scientifiques, en excluant tout choix idéologique. Ceux qui vomissent le « roman national » en prétendant enseigner une histoire « scientifique » qui n’a rien de « romanesque » font à mon avis l’erreur de croire que « leur » vérité est « la » vérité. On ne peut pas faire abstraction de l’idéologie. A partir de là, je préfère une école qui fait un choix clair et l’assume – et qui par conséquent soumet ce choix au débat de la société – qu’une école qui diffuse une idéologie sous couvert de neutralité « scientifique ».

      C’est par ce tour de passe-passe que les adversaires du « roman national » ont imposé à l’école un « roman anti-national » qui ne dit pas son nom, mais qui n’est pas moins « roman » que l’autre.

      [« La vérité c’est ce que l’on croit » dit le poète. Et l’idée de roman implique forcément une torsion de la réalité à la croyance communément adoptée ce qui n’est pas forcément antinomique de la crudité des faits.]

      Non. L’idée de roman implique une « torsion de la réalité ». Mais pas nécessairement dans le sens de « la croyance communément adoptée ». Lorsque l’école française devient « sans Dieu », on peut difficilement dire qu’elle fait allégeance à la « croyance commune ». Le « roman national » a été un instrument de combat avant de devenir un consensus.

      [Là encore, une qualité première de l’enseignant est l’intégrité, c’est-à-dire la volonté de tendre vers une objectivité compatible avec le binôme réel prouvé et éthique collective.]

      Mais le « réel prouvé » et « l’éthique collective » ne sont pas toujours compatibles.

      [A ce sujet, comment fait l’enseignant pour se positionner lorsqu’il se réfère à des auteurs qualifiés dont les thèses sont quelquefois en quasi opposition ?]

      D’abord en expliquant que dans un système démocratique on n’est pas obligé d’être d’accord sur tout, ensuite en cherchant à expliquer pourquoi et comment ces deux auteurs sont arrivés à des conclusions différentes. Le problème n’est pas tant d’expliquer la contradiction entre auteurs, mais d’expliquer les contradictions entre un auteur et les valeurs que la société considère former partie de la base commune nécessaire à la vie en société. Faut-il lire aux enfants des œuvres qui font l’apologie ou tout simplement font référence d’une manière neutre au viol, de l’alcool, de la drogue ou de toute autre conduite jugée « socialement déviante » ? Et si on n’accepte pas cette « neutralité » en matière morale dans l’enseignement de la littérature, pourquoi faudrait-il l’accepter dans l’enseignement de l’histoire ?

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [« Dire que les 6 millions de juifs tués pendant la guerre ne représente que 10% du total, alors que les chrétiens représentent plus de 85% des morts est énoncer une vérité historique ». Je dois avouer, à titre personnel, que je suis assez choqué des intitulés des programmes sur la Seconde Guerre Mondiale qui mettent beaucoup trop l’accent sur le génocide des juifs (et, secondairement, des Tziganes).]

      La rédaction de ceux sur la première guerre mondiale ne sont pas mal non plus. Si l’on regarde le projet de programme pour la 4ème, on tombe sur cet étrange libellé : « La Première Guerre mondiale et les violences de guerre (inclus le génocide des Arméniens) ». Ainsi, il y aurait des génocides qui sont dans le programme, et d’autres qui sont « hors programme ». On aimerait savoir quel est le critère de sélection des génocides qui préside à cette classification.

      [La Shoah n’est pas un détail, et a toute sa place dans une étude du conflit et de la mise en coupe réglée de l’Europe occupée par le III° Reich. Je pense néanmoins que la Shoah devrait être relativisée. Lorsque j’enseigne ce génocide (ou, depuis une époque plus récente, celui des Arméniens), j’ai toujours la désagréable sensation que la vie de certains hommes vaut moins que celle d’autres hommes.]

      Et ce n’est pas une « sensation ». C’est une réalité. Le problème de l’histoire « scientifique », c’est que c’est un récit « plein de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien » (elle est aussi souvent racontée par un idiot, mais je me suis abstenu de l’écrire pour ne pas me mettre à dos le corps professoral). Pour lui donner un « sens », il faut aller au-delà de l’histoire. Traiter la Shoah d’un point purement historique la viderait de son contenu exemplaire, en ferait un génocide parmi bien d’autres. Le fait même qu’on singularise la Shoah vous montre qu’on est en train d’enseigner un « roman » et non une histoire « objective ».

      [Je dois dire que cela me rappelle une “Une” aperçue à Paris il y a quelques années: c’était un magazine juif sur la couverture duquel se tenait bien droit les bras croisés notre cher BHL avec en grosses lettres cette citation de lui: “Tuer un Juif n’est pas un crime ordinaire”. Cette phrase me hante depuis des années. Poussons la logique jusqu’au bout: si tuer un juif n’est pas un crime ordinaire, c’est sans doute qu’un juif n’est pas une personne ordinaire. Et si un juif n’est pas une personne ordinaire, c’est donc qu’il s’agit d’une personne extraordinaire. Que reproche-t-on aux nazis? D’avoir éliminé la véritable “race supérieure”?]

      Il est indéniable que la Shoah a été très largement instrumentalisée au bénéfice d’un projet politique, le sionisme. Le dire n’implique nul négationnisme : la Shoah mérite d’être étudiée et enseignée en tant que fait historique. Il a aussi pour notre civilisation une résonance particulière, parce que c’est à ce jour le seul « génocide de l’âge moderne », commis d’une manière industrielle. C’est cela qui fait sa singularité.

      [J’ai toujours pensé que du “peuple élu” à la “race supérieure”, il n’ y avait qu’un pas.]

      Je ne crois pas. Dans la théologie juive, le statut de « peuple élu » implique seulement que Yahvé l’a élu, parmi tous les autres peuples, pour être « son » peuple. Election dont Yahvé n’a pas cru nécessaire d’expliciter les raisons, mais qui, si l’on croit l’épisode Abrahamique, n’est du qu’au simple fait que Abraham aimait Yahvé au point d’être prêt à lui sacrifier son fils. Etre le « peuple élu » n’implique donc aucune « supériorité » physique, intellectuelle ou morale par rapport aux autres peuples. On est simplement l’ami du patron, et rien d’autre.

      [Après tout, les théories racistes nazies ne font que reprendre et détourner le concept de “peuple élu” pour l’appliquer aux Aryens… destinés à gouverner le monde au nom de la race.]

      Non. Les nazis ont théorisé une supériorité physique, intellectuelle, morale des « vrais aryens ». Ils leur ont associé des qualités de loyauté, d’intelligence, de créativité, de dévouement, que les « races inférieures » n’avaient pas. Dans l’idée juive du « peuple élu », rien de tout cela.

      [Ces paroles de BHL font également écho à celles, plus récentes de Cukierman à Créteil: “si la République ne protège pas les juifs, alors ces derniers partiront et la France sera livrée à la charia ou au FN”, autrement dit, sans les juifs, les Français sont juste bons à être des musulmans intégristes ou des fachos avinés. Heureusement que les juifs sont là pour nous élever intellectuellement… Quel mépris!]

      Cukierman et le CRIF en général représentent en France les intérêts israéliens. Et pour servir ces intérêts, ils instrumentalisent depuis des années la peur de la persécution ancestrale des juifs pour des raisons évidentes. Faire peur à la communauté juive française, la convaincre qu’elle est toujours en danger et qu’Israël est sa seule planche de salut fait partie de sa stratégie de légitimation du projet sioniste. Plus la paranoïa est grande, et moins les voix critiques de la politique israélienne au sein de la collectivité juive arriveront à se faire entendre. La création d’une mentalité de « forteresse assiégée » est dans la logique de tous les « communautarismes ». Quel meilleur moyen d’assurer la cohésion communautaire ?

      Je ne pense pas qu’il faille voir dans les mots de Cukierman autre chose que la manifestation de cette tactique.

      [J’espère que la disparition des survivants et témoins permettra dans quelques années de porter un regard plus mesuré sur la Shoah.]

      Je ne crois pas que le problème vienne des « témoins et survivants ». La difficulté vient surtout de l’instrumentalisation qui est faite de cette affaire – et ce n’est pas la seule – pour des raisons communautaires ou politiques.

      [Mais le courage est-il moins grand lorsque c’est l’abnégation et le sens du devoir qui poussent à combattre? Je ne le crois pas.]

      Moi non plus. Mais malheureusement, l’air du temps pointe dans cette direction. Les deux seules figures qui méritent hommage aujourd’hui sont celles de la « victime » et du « rebelle ». Au point qu’on transforme les soldats de 1914-18 en « victimes » pour pouvoir leur rendre hommage. Ce n’est que très récemment – par exemple dans l’hommage rendu aux policiers qui assuraient la sécurité à « Charlie Hebdo » – que l’opinion est redevenue sensible à l’idée qu’il puisse y avoir de l’héroïsme à « faire son devoir ».

    • v2s dit :

      @Descartes
      [Vous y croyez vraiment ? Réfléchissez : pensez vous qu’on puisse enseigner disons la période de l’occupation et raconter la déportation des juifs simplement comme une « chronologie de faits réels » sans prendre parti ? Sans transmettre un message « moral » sur le fait qu’il est « mal » d’assassiner des gens ? Ou bien, si vous préférez un autre exemple : lorsqu’on enseignera l’histoire de l’esclavage, aura-t-on le droit de mettre l’accent sur le commerce des esclaves noirs organisé par les arabes plutôt que sur la traite négrière « triangulaire » (ce qui du point de vue de la « chronologie des faits » est rigoureusement exact) ?

      Je ne suis convaincu ni par votre premier exemple ni par le second.
      Dans les deux cas il me semble possible de dire le plus simplement possible la vérité, sans, comme vous le dites prendre parti.
      Ce n’est pas prendre parti de dire qu’étant en position de pays occupé par son vainqueur, les Français, sans trop se faire prier, se sont pliés aux demandes des Allemands et les ont même parfois anticipées. Je n’appellerais pas cela prendre parti pour ou contre les juifs, ni pour l’Allemagne nazie ni même contre la France. Je dirais simplement que c’est prendre le parti de dire les faits au plus proche de la vérité connue à ce jour.
      Le professeur pourra en profiter pour expliquer que très souvent, dans l’histoire, le peuple vaincu se range à la raison du vainqueur, même si cela lui semble immoral, tout simplement parce qu’il tient à sa peau.
      Dans le second exemple, à savoir l’esclavage, le commerce triangulaire et la part prise par les arabes, je ne vois là non plus aucune objection. Il me semble d’ailleurs que lorsque les professeurs abordent le sujet, ils disent que les esclaves noirs étaient achetés soit à des tribus qui opéraient des razzias, soit à des intermédiaires arabes qui en faisaient le commerce.
      Un adolescent est capable de comprendre que les négriers Nantais ou Bordelais ne se chargeaient pas eux même de chasser les esclaves dans la savane mais qu’ils les achetaient à des intermédiaires qui en faisaient le commerce.
      J’ajouterais que si, par mégarde ou intentionnellement, le professeur « camouflait » la vérité, les gamins, abreuvés par la télé de documentaires, de fictions historiques, de débats en tout genre, ne manqueraient pas de lui rappeler qu’il a oublié un épisode.
      Et puis ce doit être précisément le moment pour l’enseignant d’insister sur ce qu’est un contexte historique, sur l’évolution des meurs et des idées. Le moment d’expliquer qu’on doit analyser les faits historiques en les replaçant dans leur époque, dans leur contexte, en essayant de se mettre à la place des contemporains de l’événement.

      Dans votre argumentation en faveur du roman national, vous évoquez souvent la comparaison avec ce que l’on dit et ce que l’on cache à un enfant dans sa famille. Mais souvenez vous que l’on parle là de préadolescents et d’adolescents âgés, au collège, de 11 à 15 ans. Ils ont largement dépassé l’âge de raison, l’âge de croire au père Noël ou à la fée Carabosse, et ils ont largement atteints l’âge de partager les secrets de famille, même les plus sordides.
      Mentir, même par omission à des gamins de l’âge du collège est une fausse bonne idée.
      Le roman national en primaire, au CP / CE1, jusqu’à 8/9 ans peut être, mais certainement pas avec des ados au collège.

    • Descartes dit :

      @v2s

      [Je ne suis convaincu ni par votre premier exemple ni par le second. Dans les deux cas il me semble possible de dire le plus simplement possible la vérité, sans, comme vous le dites prendre parti.]

      J’aimerais bien que vous indiquiez en un petit paragraphe sur chacun de ces exemples une formulation exempte de toute « prise de parti ».

      [Ce n’est pas prendre parti de dire qu’étant en position de pays occupé par son vainqueur, les Français, sans trop se faire prier, se sont pliés aux demandes des Allemands et les ont même parfois anticipées.]

      Vous donnez sans le vouloir un excellent exemple de la difficulté de parler d’un sujet historique sans « prise de parti ». Vous dites « les Français ». Cela nie donc l’existence de ceux qui, comme De Gaulle, ont dès le départ refusé de se plier à quelque « demande » des allemands que ce soit. Il aurait fallu dire « certains français ». Mais alors, cela ne veut plus rien dire : on trouvera toujours « certains français » pour faire n’importe quoi. Il faudrait donc dire COMBIEN de français « se sont pliés aux demandes des Allemands » et COMBIEN ont fait le choix inverse. Seulement, il est impossible d’avoir des données objectives sur la question, puisque le « sans trop se faire prier » est une appréciation subjective sur le niveau de pression qui justifierait qu’on se « plie aux demandes » de l’occupant.

      Votre phrase contient donc deux « prises de parti » : l’une, lorsque vous dites « les Français » plutôt que « certains français », l’autre lorsque vous utilisez l’expression « sans trop se faire prier », qui est un jugement personnel de valeur…

      [Je dirais simplement que c’est prendre le parti de dire les faits au plus proche de la vérité connue à ce jour.]

      Non. C’est adhérer au « roman » en vigueur aujourd’hui (« tous collabos ») plutôt qu’au « roman » en vigueur la veille (« tous résistants »). Mais il faut comprendre qu’il s’agit de deux « romans ». La « vérité » n’a rien à voir là dedans. Pour l’approcher, il faudrait un niveau de nuance et de connaissance historique qu’on ne peut demander d’un enfant de treize ans.

      [Le professeur pourra en profiter pour expliquer que très souvent, dans l’histoire, le peuple vaincu se range à la raison du vainqueur, même si cela lui semble immoral, tout simplement parce qu’il tient à sa peau.]

      Comment cela se concilie-t-il avec l’idée que les français se soient « pliés aux demandes des Allemands SANS TROP SE FAIRE PRIER » ? Pensez-vous qu’une situation ou votre « peau » est en danger ne doive être considérée comme une « prière » assez puissante ? Vous voyez bien que vous ne pouvez pas vous abstenir de « prendre parti ». L’expression « sans trop se faire prier » semblait indiquer que les français ont fait un choix, l’expression « parce qu’ils tiennent à leur peau » semble indiquer qu’il n’y avait au contraire pas de choix. Et lorsque l’élève vous demandera : « mais en 1940, les français avaient-ils, oui ou non, le choix ? », que leur répondrez vous « sans prendre parti » ?

      [Dans le second exemple, à savoir l’esclavage, le commerce triangulaire et la part prise par les arabes, je ne vois là non plus aucune objection. Il me semble d’ailleurs que lorsque les professeurs abordent le sujet, ils disent que les esclaves noirs étaient achetés soit à des tribus qui opéraient des razzias, soit à des intermédiaires arabes qui en faisaient le commerce.]

      Je ne vous parle pas de l’intermédiation arabe. Je vous parle des esclaves que les arabes faisaient travailler pour leur propre compte. Et qui sont largement plus nombreux que ceux qui furent exportés vers les Amériques, comme l’a pointé Petré-Grenouilleau dans un ouvrage universitaire qui provoqua la fureur médiatique des tenants de la « diversité »…
      [J’ajouterais que si, par mégarde ou intentionnellement, le professeur « camouflait » la vérité, les gamins, abreuvés par la télé de documentaires, de fictions historiques, de débats en tout genre, ne manqueraient pas de lui rappeler qu’il a oublié un épisode.]

      Connaissez vous beaucoup de documentaires, de fictions historiques ou de débats en tout genre on l’on ait indiqué que la traite arabe couvre une période bien plus longue et un nombre d’esclaves bien plus grand que la traite occidentale ? Les médias, eux aussi, racontent un « roman ». Et imaginer que le « roman » scolaire pourrait se trouver menacé par les « romans » médiatiques montre à quel point l’école a renoncé à son rôle institutionnel. Le « roman » de l’école « d’avant » ne s’imposait pas parce qu’il était « vrai », mais parce qu’il était soutenu par une institution respectable et respectée.

      [Et puis ce doit être précisément le moment pour l’enseignant d’insister sur ce qu’est un contexte historique, sur l’évolution des meurs et des idées. Le moment d’expliquer qu’on doit analyser les faits historiques en les replaçant dans leur époque, dans leur contexte, en essayant de se mettre à la place des contemporains de l’événement.]

      L’école ne peut pas poser un défi impossible. Les enfants de 13 ans ne peuvent pas « se mettre à la place des contemporains ». Il faut une culture historique énorme pour se « mettre à la place » d’un contemporain de Richelieu, et même pour un historien il est pratiquement impossible de se « mettre à la place » d’un contemporain de Charlemagne, tout simplement parce que nous n’avons pas suffisamment d’information sur sa manière de penser. Mais surtout, un enfant de 13 ans n’est pas un adulte en miniature. Ses processus mentaux sont différents. Il est encore à l’âge de la toute-puissance et du manichéisme. Comment lui faire comprendre les infinies nuances d’un monde où il n’y a pas de « bien » ou de « mal » ?

      [Dans votre argumentation en faveur du roman national, vous évoquez souvent la comparaison avec ce que l’on dit et ce que l’on cache à un enfant dans sa famille. Mais souvenez vous que l’on parle là de préadolescents et d’adolescents âgés, au collège, de 11 à 15 ans. Ils ont largement dépassé l’âge de raison, l’âge de croire au père Noël ou à la fée Carabosse, et ils ont largement atteints l’âge de partager les secrets de famille, même les plus sordides.]

      Je ne sais pas comment on éduquait les enfants dans votre famille, mais dans la mienne, on gardait soigneusement le « secrets les plus sordides » hors de la portée des enfants au moins jusqu’à la majorité, et il y a certaines choses que je n’ai appris sur le lit de mort de mon père. Et franchement, je ne leur en veux absolument pas. J’ai pu grandir dans un environnement rassurant, j’ai pu faire une confiance aux adultes que je n’aurais peut-être pas pu avoir si j’avais su certaines choses. Et quand je vois les traumatismes que peuvent provoquer certains secrets révélés à un âge où l’on ne peut pas comprendre – et surtout pardonner – certaines choses, je dois dire que je ne peux que me féliciter de la pudeur de mes parents.

      [Mentir, même par omission à des gamins de l’âge du collège est une fausse bonne idée.]

      Il ne s’agit pas de « mentir ». Il y aurait « mensonge » si le professeur prétendait sciemment que ce qu’il enseigne est une « vérité ». Mais dans mon idée, ce n’est pas du tout ce qu’il faut faire. En histoire, l’enseignant n’enseigne pas « la » vérité. Il enseigne « une » vérité, celle de l’institution scolaire – qui au delà est celle de l’Etat.

      [Le roman national en primaire, au CP / CE1, jusqu’à 8/9 ans peut être, mais certainement pas avec des ados au collège.]

      Quand je vois le niveau d’immaturité des jeunes aujourd’hui, je me dis qu’il faudrait peut-être le prolonger jusqu’à l’université. J’aurais tendance à dire qu’aussi longtemps que le jeune n’est pas sorti de la logique de la toute-puissance et du manichéisme, aussi longtemps qu’il n’est pas capable de pardonner, l’histoire, la vraie, ne peut être enseignée.

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes
      Bonjour,
      [Il est indéniable que la Shoah a été très largement instrumentalisée au bénéfice d’un projet politique, le sionisme. Le dire n’implique nul négationnisme : la Shoah mérite d’être étudiée et enseignée en tant que fait historique. Il a aussi pour notre civilisation une résonance particulière, parce que c’est à ce jour le seul « génocide de l’âge moderne », commis d’une manière industrielle. C’est cela qui fait sa singularité.]
      A moins d’être historien ou passionné d’histoire, nous sommes tous – ou presque – immergés dans une macération de Shoah. Comme beaucoup probablement, je trouve que la communauté juive, par le relai des média où elle est très bien représentée, maintient une pression depuis des décennies sur cette tragédie, quelquefois à la limite de l’overdose.
      Cependant, je note avec soulagement que vous soulignez la résonance particulière qu’elle revêt. Ce qui à mes yeux la rend singulière est moins l’identité des victimes que celle des bourreaux. Qu’un peuple aussi cultivé, aussi civilisé, aussi brillant, héritier des Lumières puisse, au xxème siècle se conduire de la sorte, reste pour moi un effarement permanent.
      En employant le terme de « bête immonde » dans un précédent commentaire, je souhaitais évoquer la pièce de Brecht : « La résistible ascension d’Arturo Ui » avec en toile de fond cette incapacité des peuples évolués à freiner et interrompre une conquête totalitaire du pouvoir politique.
      Le discours ostracisant devient chaque jour un peu plus la norme et me semble adopter un profil que nos anciens ont vécu au cours des années 30. D’autre part, Hannah Arendt le décrit fort bien, cette capacité de notre espèce, homo sapiens, et particulièrement les plus évolués d’entre eux, à banaliser le mal dès que les circonstances le déchargent de toute obligation morale.

    • @ Descartes,

      “On aimerait savoir quel est le critère de sélection des génocides qui préside à cette classification.”
      Mais vous le savez aussi bien que moi: les communautés juive et arménienne ont leurs lobbys en France, et elles constituent, dans certains espaces limités, une clientèle électorale qu’il faut se concilier. Il ne vous aura pas échappé que les Hereros et les Tutsis n’ont pas la même influence…

      “c’est que c’est un récit « plein de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien » (elle est aussi souvent racontée par un idiot, mais je me suis abstenu de l’écrire pour ne pas me mettre à dos le corps professoral)”
      J’espère que ce n’est pas en lisant mes quelques articles d’histoire sur mon blog que vous en êtes arrivé à cette conclusion peu flatteuse…

      “le statut de « peuple élu » implique seulement que Yahvé l’a élu, parmi tous les autres peuples, pour être « son » peuple. Election dont Yahvé n’a pas cru nécessaire d’expliciter les raisons, mais qui, si l’on croit l’épisode Abrahamique, n’est du qu’au simple fait que Abraham aimait Yahvé au point d’être prêt à lui sacrifier son fils. Etre le « peuple élu » n’implique donc aucune « supériorité » physique, intellectuelle ou morale par rapport aux autres peuples. On est simplement l’ami du patron, et rien d’autre.”
      Mouais, mouais, mouais. Je suis un peu sceptique, je vous l’avoue. A quoi bon être “l’ami du patron” si ce n’est pour en tirer de substantiels avantages? Ces avantages ne constituent-ils pas une forme de supériorité? Par ailleurs, n’est-ce pas une forme de supériorité que d’avoir le “bon” dieu, le vrai dieu, et d’avoir été choisi par lui? J’entendais dans un documentaire un rabbin déclarer: “le peuple juif, en tant que peuple élu, a simplement plus de contraintes, donc plus de responsabilités que les autres peuples. Il doit être un exemple pour les autres peuples”. A partir du moment où on érige un modèle, on admet une hiérarchie qui place le modèle à suivre au sommet, faut pas se raconter d’histoire.

      “Non. Les nazis ont théorisé une supériorité physique, intellectuelle, morale des « vrais aryens ».”
      Mais les juifs théorisent une forme de supériorité spirituelle et religieuse, et surtout un droit supérieur à occuper une terre, la Terre promise. Droit supérieur qui justifie, si j’en crois ce que je lis dans l’Ancien Testament, le meurtre voire l’extermination des Cananéens. Je suis d’accord sur le fait que la “supériorité” des juifs ne se situe pas sur le même plan que celle définie par les nazis, mais je constate que les Hébreux, pour conquérir leur “espace vital” recourent à des méthodes qui, toute proportion gardée, sont aussi d’une grande brutalité, avec éradication des autochtones. On pourrait arguer que cette méthode était répandue à l’époque. Eh bien c’est fort discutable: les Egyptiens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses et les Grecs ont occupé à un moment ou un autre la Palestine. Malgré les exactions et les violences inhérentes à toute conquête, et même les déportations d’une partie de la population, il n’y a pas eu d’éradication définitive des Hébreux dans la région.

      “Ils leur ont associé des qualités de loyauté, d’intelligence, de créativité, de dévouement, que les « races inférieures » n’avaient pas. Dans l’idée juive du « peuple élu », rien de tout cela.”
      Ah bon? Mais pourquoi les juifs ne se mélangent pas avec les non-juifs? Pourquoi les Samaritains, Hébreux mêlés d’Assyriens, étaient considérés comme des moins que rien par les juifs de bonne race? Si l’autre est mon égal, je peux lui donner ma fille en mariage ou prendre la sienne comme épouse, non? Si je refuse de le faire, c’est bien que l’autre n’est pas digne d’entrer dans ma famille… Dieu fait alliance avec les juifs, mais les non-juifs ne peuvent pas devenir juifs et profiter de cette alliance.

      Cela étant, je dois dire que les juifs sont exemplaires sur un point: leur survie étonnante et millénaire, au milieu des haines et des persécutions. C’est admirable. Les peuples qui survivent sont apparemment ceux qui rejettent le métissage, le mélange, et qui sacralisent leur culture et leur langue. Les peuples ouverts à la diversité, qui acceptent le mélange, l’évolution, ont davantage tendance à se dissoudre.

      “Je ne pense pas qu’il faille voir dans les mots de Cukierman autre chose que la manifestation de cette tactique”
      Vous avez sans doute raison. Il n’empêche que ces paroles ont été prononcées, publiquement, et elles sont très offensantes. Cukierman, s’il avait deux sous de jugeote, devrait comprendre que ce type de propos ne favorise pas le philosémitisme… Déclarer que “les juifs sont des parias de la République”, ça frise l’indécence.

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [« On aimerait savoir quel est le critère de sélection des génocides qui préside à cette classification. » Mais vous le savez aussi bien que moi: les communautés juive et arménienne ont leurs lobbys en France, et elles constituent, dans certains espaces limités, une clientèle électorale qu’il faut se concilier.]

      Ma question était ironique. Bien entendu, je partage votre analyse.

      [« c’est que c’est un récit « plein de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien » (elle est aussi souvent racontée par un idiot, mais je me suis abstenu de l’écrire pour ne pas me mettre à dos le corps professoral) »][J’espère que ce n’est pas en lisant mes quelques articles d’histoire sur mon blog que vous en êtes arrivé à cette conclusion peu flatteuse…]

      Certainement pas, puisque vous aussi vous adhérez à l’idée d’un « roman national » qui justement donne un « sens » à l’histoire. Mais j’imagine que vous aviez reconnu la citation…

      [Mouais, mouais, mouais. Je suis un peu sceptique, je vous l’avoue. A quoi bon être “l’ami du patron” si ce n’est pour en tirer de substantiels avantages?]

      Dans le cas de Yahvé, ces « avantages » sont assez ambigus. Yahvé a beau être le dieu des armées, qui donne la victoire au peuple qu’il a « élu »… du moins aussi longtemps que celui-ci fait plaisir à Yahvé. Dans le cas contraire, c’est pluie de souffre et esclavage pour tout le monde. Avec Yahvé, c’est l’amour vache. Le grand écrivain juif Scholem Aleikhem fait dire à l’un de ses personnages « Yahvé, toi qui as choisi le peuple juif… tu n’aurais pas pu en élire un autre, des fois ? »

      [J’entendais dans un documentaire un rabbin déclarer: “le peuple juif, en tant que peuple élu, a simplement plus de contraintes, donc plus de responsabilités que les autres peuples. Il doit être un exemple pour les autres peuples”. A partir du moment où on érige un modèle, on admet une hiérarchie qui place le modèle à suivre au sommet, faut pas se raconter d’histoire.]

      Vous avez mal lu. Le rabbin en question n’érige pas le peuple juif en exemple. Il dit que le peuple juif à le DEVOIR de se comporter de manière à constituer un exemple. Ce n’est pas du tout la même chose. Ce discours d’ailleurs ressemble beaucoup à l’idée du « destin singulier » de la France…

      [Mais les juifs théorisent une forme de supériorité spirituelle et religieuse, et surtout un droit supérieur à occuper une terre, la Terre promise.]

      Vous confondez « juif » et « sioniste ». Le mouvement sioniste a instrumentalisé l’histoire religieuse pour inventer un « droit supérieur à occuper la terre d’Israel ». Mais les sionistes ne sont qu’une partie du peuple juif, et pas la plus nombreuse. D’ailleurs, le sionisme s’est affronté durement sur cette question avec les religieux orthodoxes, puisque l’interprétation « canonique » est que les juifs n’auront la domination sur la terre d’Israel qu’avec le retour du messie. Ces orthodoxes refusent de reconnaître l’Etat d’Israel, et continuent à payer leurs impôts au roi de Jordanie, considéré comme le successeur de l’empire babilonien.

      [Droit supérieur qui justifie, si j’en crois ce que je lis dans l’Ancien Testament, le meurtre voire l’extermination des Cananéens. Je suis d’accord sur le fait que la “supériorité” des juifs ne se situe pas sur le même plan que celle définie par les nazis, mais je constate que les Hébreux, pour conquérir leur “espace vital” recourent à des méthodes qui, toute proportion gardée, sont aussi d’une grande brutalité, avec éradication des autochtones.]

      Certainement. A l’époque ou la Torah a été écrite le génocide était une pratique militaire considérée comme parfaitement honorable, et les rédacteurs du texte n’avaient donc aucune raison de la taire. Ce n’est d’ailleurs pas le seul massacre ou le seul génocide évoqué dans l’Ancien Testament.

      [On pourrait arguer que cette méthode était répandue à l’époque. Eh bien c’est fort discutable: les Egyptiens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses et les Grecs ont occupé à un moment ou un autre la Palestine. Malgré les exactions et les violences inhérentes à toute conquête, et même les déportations d’une partie de la population, il n’y a pas eu d’éradication définitive des Hébreux dans la région.]

      Les Hébreux sont passés à travers, mais d’autres peuples ont eu moins de chance. Hérodote évoque plusieurs génocides antiques, et si ma mémoire ne me trompe pas c’est aussi le cas d’Homère.

      [Ah bon? Mais pourquoi les juifs ne se mélangent pas avec les non-juifs? Pourquoi les Samaritains, Hébreux mêlés d’Assyriens, étaient considérés comme des moins que rien par les juifs de bonne race? Si l’autre est mon égal, je peux lui donner ma fille en mariage ou prendre la sienne comme épouse, non? Si je refuse de le faire, c’est bien que l’autre n’est pas digne d’entrer dans ma famille…]

      Non. Vous confondez deux sens du mot « égal ». La tradition juive considère les juifs comme « différents » des non-juifs. Ni supérieurs, ni inférieurs, mais différents. Ayant vécu pendant deux mille ans comme population minoritaire en immersion dans une population qui avait une autre religion mais aussi et surtout des coutumes et un droit différent, la culture juive est marquée par la peur de la dilution. Le mariage mixte est mal vu parce qu’il ne garantit pas que les enfants seront éduqués dans la tradition juive, qu’ils perpétueront cette « alliance » avec dieu qui sépare le juif du non juif. Par contre, rien dans la culture juive n’interdit de se « mélanger » avec les non juifs, et chaque fois que la société d’accueil le permettait les juifs sont sortis du ghetto, se sont intégrés et ont occupé des fonctions sociales et politiques.

      [Dieu fait alliance avec les juifs, mais les non-juifs ne peuvent pas devenir juifs et profiter de cette alliance.]

      Quant on voit les ennuis que l’alliance en question a apporté, on peut difficilement se dire qu’il ait eu beaucoup de profit à tirer. D’ailleurs, de tout temps la conversion est allée plutôt dans le sens des juifs vers les non-juifs plutôt que l’inverse.

      [Cela étant, je dois dire que les juifs sont exemplaires sur un point: leur survie étonnante et millénaire, au milieu des haines et des persécutions. C’est admirable. Les peuples qui survivent sont apparemment ceux qui rejettent le métissage, le mélange, et qui sacralisent leur culture et leur langue. Les peuples ouverts à la diversité, qui acceptent le mélange, l’évolution, ont davantage tendance à se dissoudre.]

      Je pense que vous devriez regarder la question plus finement. D’abord, les juifs n’ont pas « sacralisé leur langue » et encore moins « refusé le mélange ». La plupart des intellectuels juifs ont écrit dans la langue de leur pays d’accueil, et chaque fois que la possibilité leur a été donnée, les juifs ont participé activement à la vie sociale, économique et politique de celui-ci. Prenez le cas français : si l’on trouve des ghettos dans certaines villes au moyen-âge, déjà au temps de la Révolution les juifs vivaient dispersés dans les mêmes quartiers que les non-juifs. Seule une infime partie des juifs parisiens vivent dans des « quartiers juifs ».

      Etant juif moi-même, je me suis beaucoup intéressé à cette particularité qui fait que les juifs restent juifs alors même qu’ils sont parfaitement assimilés. Prenez Blum ou Mendes France, sans aller plus loin. Il y a dans leur pensée une influence indéniable de la tradition juive, mais en même temps ils sont parfaitement français. Je pense que cela tient à l’importance de la transmission dans l’organisation familiale juive, même chez les juifs non croyants, comme c’était le cas de mes parents.

      [Vous avez sans doute raison. Il n’empêche que ces paroles ont été prononcées, publiquement, et elles sont très offensantes.]

      J’en convient.

      [Cukierman, s’il avait deux sous de jugeote, devrait comprendre que ce type de propos ne favorise pas le philosémitisme… Déclarer que “les juifs sont des parias de la République”, ça frise l’indécence.]

      Mais le but de Cukierman n’est pas de « favoriser le philosémitisme ». Au contraire, c’est de maintenir un sain antisémitisme qui soude la communauté juive autour d’Israel. Plus la collectivité juive a peur, plus elle est manipulable. Et Cukierman et ses employeurs le savent parfaitement.

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [A moins d’être historien ou passionné d’histoire, nous sommes tous – ou presque – immergés dans une macération de Shoah. Comme beaucoup probablement, je trouve que la communauté juive, par le relai des média où elle est très bien représentée, maintient une pression depuis des décennies sur cette tragédie, quelquefois à la limite de l’overdose.]

      Il faut s’entende sur ce que c’est exactement la « communauté juive ». Si par cela tu entend les organes « communautaires » genre CRIF – qui sont en fait des officines israéliennes, il faut le savoir – je suis d’accord. Si tu fais référence aux « communautés » locales, qui entretiennent une vie « communautaire » autour de leur synagogue, de leur école, d’une association, quelquefois d’un club sportif ou autre, c’est déjà moins évident. Ces « communautés » vivent en général en circuit fermé, communiquent peu et ne demandent qu’une chose, qu’on les laisse en paix. Et puis, il faut se souvenir que seule une minorité des juifs français a une vie « communautaire ». C’est particulièrement vrai dans le cas des juifs ashkénazes, qui se sont assimilés en France depuis belle lurette.

      [Cependant, je note avec soulagement que vous soulignez la résonance particulière qu’elle revêt. Ce qui à mes yeux la rend singulière est moins l’identité des victimes que celle des bourreaux. Qu’un peuple aussi cultivé, aussi civilisé, aussi brillant, héritier des Lumières puisse, au xxème siècle se conduire de la sorte, reste pour moi un effarement permanent.]

      Exactement. Nous savons qu’il y eut des nombreux génocides dans l’histoire. Ce que la Shoah nous rappelle, c’est que la modernité de nos sociétés ne nous prémunit pas contre le retour des pratiques barbares. Finalement, la leçon de la Shoah est une leçon de fragilité. Les institutions, les habitudes, les politesses qui nous rassurent sur le fait que personne ne nous sautera à la gorge demain peuvent paraître solides, mais en fait sont incroyablement fragiles. Il faut donc les soigner, les protéger, les transmettre. Il ne faut pas grande chose pour que le civilisé redevienne barbare. Raison de plus pour être vigilant.

      Mais cela n’a rien à voir avec l’identité des victimes ou celle des bourreaux. On peut tirer la même leçon à partir des horreurs de la guerre civile qui suivit la révolution de 1917, celles de la guerre civile afghane des années 1980 ou la situation d’Irak aujourd’hui. Si la Shoah est emblématique, c’est parce qu’elle pousse la démonstration à l’extrême : un peuple parmi les plus avancés descendant dans la plus grande barbarie, et utilisant pour cela toutes les ressources de la modernité.

      [En employant le terme de « bête immonde » dans un précédent commentaire, je souhaitais évoquer la pièce de Brecht : « La résistible ascension d’Arturo Ui » avec en toile de fond cette incapacité des peuples évolués à freiner et interrompre une conquête totalitaire du pouvoir politique.]

      J’avais bien compris. Mais le choix même de la formule constitue un choix moral. Ma position est qu’il est difficile d’enseigner une histoire purement « scientifique » a des enfants ou des adolescents tout simplement parce que à ces âges on recherche un « sens » au monde, et qu’une histoire purement « scientifique » arrive forcément à la conclusion que ce « sens » n’existe pas. L’histoire peut nous montrer que les sociétés évoluent et dans quelle direction. Mais elle ne peut pas nous dire si elles évoluent en « mieux » ou en « pire », pas plus que la physique ne peut nous dire si un proton est plus beau ou plus laid qu’un électron.

      [Le discours ostracisant devient chaque jour un peu plus la norme et me semble adopter un profil que nos anciens ont vécu au cours des années 30.]

      Je ne sais pas dans quel pays vous vivez. Mais dans le mien, le « discours ostracisant » n’est certainement pas la norme. Au contraire : à la télévision, à la radio, dans les journaux on fait la course à qui sera le plus « ouvert à la diversité », le plus « accueillant envers les minorités » et ainsi de suite. A l’école, on explique aux enfants que chacun doit être « fier de ses origines » et que « la diversité est une richesse ». Les entreprises et les universités nomment des « chargés de diversité » dont la mission est faire la chasse à toute pratique qui pourrait apparaître « discriminante ». Ou voyez-vous que le « discours ostracisant » devienne « la norme » ?

      Vous faites une très sérieuse erreur d’analyse. Dans les années 1930, le « discours ostracisant » était bien la « norme » parce qu’il était partagé autant par les milieux populaires que par les élites. Krupp ou Thyssen étaient aussi antisémites que l’était l’ouvrier de base. En France, des hommes comme Alexis Carrel faisaient partie de l’élite universitaire, et Charles Maurras était un penseur respecté. Aujourd’hui, le « discours ostracisant » n’est la norme que dans les couches populaires, marginalisées dans l’arène politique, médiatique, intellectuelle. Les intellectuels qui adhèrent à ce discours sont rarissimes, et sont tenus à prudente distance par l’establishment politico-médiatique, qui se déchaîne chaque fois qu’ils osent s’exprimer.

      [D’autre part, Hannah Arendt le décrit fort bien, cette capacité de notre espèce, homo sapiens, et particulièrement les plus évolués d’entre eux, à banaliser le mal dès que les circonstances le déchargent de toute obligation morale.]

      Elle était bien placée pour le savoir, elle qui continua à fréquenter et à défendre Martin Heidegger, antisémite convaincu et nazi opportuniste.

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes
      [Elle était bien placée pour le savoir, elle qui continua à fréquenter et à défendre Martin Heidegger, antisémite convaincu et nazi opportuniste].
      “L’amour a des raisons que la raison ignore”

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes,
      Petit rajout à ma réponse concernant Hannah Harendt, je ne vois pas de contradiction fondamentale à soutenir une sommité intellectuelle telle que Martin Heidegger, si cela repose sur les théories dont il est l’auteur et qui ont influencés de nombreux philosophes contemporains et actuels. L’oeuvre philosophique, dans ce cas prévaut très largement sur la faiblesse de l’être humain qui n’en est que le simple vecteur.Combien de nazis pur jus ont été recyclés pour le plus grand bien des vainqueurs?

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [Petit rajout à ma réponse concernant Hannah Harendt, je ne vois pas de contradiction fondamentale à soutenir une sommité intellectuelle telle que Martin Heidegger,]

      Personnellement, le statut de « sommité intellectuelle » attribué à Heidegger ne me paraît absolument pas être une évidence. Ensuite, il n’y a aucune « contradiction », au contraire : Hannah Arendt a parlé de la « banalité du mal », et s’est empressée de « banaliser » le « mal » chez Heidegger.

      [si cela repose sur les théories dont il est l’auteur et qui ont influencés de nombreux philosophes contemporains et actuels.]

      Il n’est pas inutile de se demander le pourquoi de cette « influence ». Comment un philosophe qui éprouva une tendresse certaine pour l’idéologie nazie – et la publication récente des « cahiers noirs » ne laisse là-dessus aucun doute – a pu exercer une telle influence sur de « nombreux philosophes contemporains » ? Pourquoi ces philosophes ont occulté – allant jusqu’à falsifier ou « corriger » discrètement certains textes – ou excusé les errements du « maître » ?

      [L’oeuvre philosophique, dans ce cas prévaut très largement sur la faiblesse de l’être humain qui n’en est que le simple vecteur.]

      C’est un peu trop facile. Je veux bien qu’on puisse séparer l’œuvre d’un physicien ou d’un chimiste de ses engagements politiques. Mais c’est un peu plus difficile pour un philosophe ou un historien. On peut difficilement imaginer que Heidegger ait porté dans son œuvre une idéologie progressiste tout en chassant avec enthousiasme les juifs de l’université dont il était le recteur.

      [Combien de nazis pur jus ont été recyclés pour le plus grand bien des vainqueurs?]

      En philosophie ? Très peu. A ma connaissance, Heidegger est le seul.

    • @ Descartes,

      “Avec Yahvé, c’est l’amour vache.”
      Il est vrai que Yahvé est un patron malcommode, exigeant et… un brin colérique. C’est d’ailleurs un autre élément qui m’interpelle: rarement dans une religion, la divinité se montre aussi dure avec ses adorateurs. Bien sûr, chez les Romains, les Grecs, les Egyptiens, il arrive que Jupiter, Poséidon ou Râ se fâchent tout rouge, mais globalement, ils sont les garants de la prospérité et de la pérennité de leurs adorateurs. La relation est contractuelle (“do ut des” disaient les Romains, “je donne pour que tu donnes”) et le païen qui n’est pas exaucé peut s’estimer lésé, voire dénoncer l’attitude du dieu ingrat (on connaît des exemples). Il est vrai que le polythéiste peut reporter sa dévotion vers une autre divinité plus attentive, ce que le monothéiste ne peut pas. Toutefois, quand on lit l’Ancien Testament, on a vraiment l’impression qu’hormis quelques parenthèses heureuses, Yahvé ne fait que tourmenter son peuple, et les malheurs, les défaites, les épidémies l’emportent sur les rares périodes de prospérité. Le judaïsme est une religion très négative. Les juifs craignent Yahvé, mais peuvent-ils vraiment l’aimer?

      “Il dit que le peuple juif à le DEVOIR de se comporter de manière à constituer un exemple. Ce n’est pas du tout la même chose.”
      Vous avez raison. Mon interprétation était quelque peu hâtive.

      “Ces orthodoxes refusent de reconnaître l’Etat d’Israel, et continuent à payer leurs impôts au roi de Jordanie, considéré comme le successeur de l’empire babilonien”
      Mais comment font-ils? L’administration fiscale israélienne accorde-t-elle une dérogation? Par ailleurs, j’avais cru comprendre que pas mal d’orthodoxes s’étaient ralliés à l’état d’Israël. On entend souvent parler des “colons très religieux” et surtout des progrès de la “droite ultra-religieuse” aux élections israéliennes. Êtes-vous sûrs qu’une bonne partie des orthodoxes ne s’est pas “convertie” au sionisme?

      “A l’époque ou la Torah a été écrite le génocide était une pratique militaire considérée comme parfaitement honorable, et les rédacteurs du texte n’avaient donc aucune raison de la taire”
      Je vous avoue que l’usage du mot “génocide” pour l’Antiquité me pose problème. Les armées antiques ne disposaient pas de la logistique et des effectifs des armées modernes. Un génocide demande une planification, une organisation, qui n’existait guère à l’époque. Les massacres étaient monnaie courante mais, à y regarder de plus près, la réduction en esclavage ou la déportation étaient bien plus répandues. De même que les alliances et les traités de paix sanctionnés par des mariages entre élites des peuples antagonistes.

      “Les Hébreux sont passés à travers, mais d’autres peuples ont eu moins de chance. Hérodote évoque plusieurs génocides antiques, et si ma mémoire ne me trompe pas c’est aussi le cas d’Homère”
      Homère est un poète qui n’a jamais raconté de faits historiques à ma connaissance. Quant à Hérodote, quels exemples donnent-ils? Il faut lire les auteurs et les textes antiques avec circonspection. Ainsi, quand on lit les chroniques des rois assyriens, on peut relever que dans telle région, le roi se vante d’avoir fait campagne, d’avoir tout détruit, tout massacré et déporté ceux qui restent. Et, ô surprise, on finit par s’apercevoir que le même roi refait campagne dans la même région trois ou quatre ans plus tard. Tout le monde ne devait pas être mort… Les Anciens avaient une propension à exagérer, y compris leurs exactions (dont ils s’honoraient comme vous le rappelez). Et puis, n’oublions pas que le vaincu représente une main-d’oeuvre utile… Les peuples anciens préfèrent rendre leurs voisins tributaires que les exterminer. Les Hébreux, eux, si l’on en croit la Bible, ne veulent pas faire des Cananéens (qui sont sans doute leurs cousins) leurs vassaux, ni les dominer ou fusionner avec eux en contractant mariage. Ils veulent purement et simplement les éliminer pour garder la Terre promise pour eux seuls. Il y a là un rapport de possession au territoire qu’on rencontre rarement ailleurs.

      “D’abord, les juifs n’ont pas « sacralisé leur langue »”
      Les juifs lisent la Torah en hébreu me semble-t-il. C’est la langue d’un petit peuple au rôle fort modeste dans l’Orient ancien. Je vous signale que le babylonien, l’assyrien, le phénicien ou le hittite, qui furent bien davantage parlés que l’hébreu n’ont même pas survécu comme langue liturgique. L’hébreu, si. Comme l’araméen et le copte qui ont permis à des communautés chrétiennes minoritaires de perdurer dans un monde devenu massivement musulman. La langue de culte est un très puissant marqueur identitaire.

      “Je pense que cela tient à l’importance de la transmission dans l’organisation familiale juive”
      Est-ce à dire que les autres s’en fichent? Les jésuites et les oratoriens ne se sont-ils pas intéressés à cette problématique de la transmission? Est-ce que, autrefois, disons aux XVII° et XVIII° siècles, parmi les Ashkénazes d’Europe centrale (vos ancêtres si j’ai bien compris), la totalité des hommes savaient lire et écrire par exemple? Tous les jeunes juifs allaient-ils à l’école?

      “Mais le but de Cukierman n’est pas de « favoriser le philosémitisme ». Au contraire, c’est de maintenir un sain antisémitisme qui soude la communauté juive autour d’Israel. Plus la collectivité juive a peur, plus elle est manipulable”
      Oui, mais là il y a quelque chose qui m’échappe. J’essaie de me mettre à la place d’un juif français. Quel plaisir y a-t-il à vivre dans la peur permanente, le soupçon, la défiance? Je comprends ce que vous m’expliquez sur la peur qui permet la manipulation, mais je trouve que le prix à payer est très lourd. Vivre dans la crainte des autres, quand on est minoritaire dans une société, est une souffrance. Et le résultat d’une telle logique ne peut être que de pousser les juifs à fuir la peur en émigrant. Si c’est là l’objectif réel du Crif, alors ses dirigeants devraient être les premiers à aller s’installer en Israël. Pourquoi Cukierman et cie restent-ils ici puisqu’ils se disent victimes d’un épouvantable antisémitisme? Tel Aviv les attend…

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [« Avec Yahvé, c’est l’amour vache. »][Il est vrai que Yahvé est un patron malcommode, exigeant et… un brin colérique. C’est d’ailleurs un autre élément qui m’interpelle: rarement dans une religion, la divinité se montre aussi dure avec ses adorateurs.]

      Yahvé est un dieu antique, et comme tous les dieux antiques il est accessible aux sentiments humains : la haine, l’amour, le doute… il faut se souvenir de la formule biblique juive : « tu ne te feras pas d’autres dieux devant moi, car je suis un dieu jaloux ». On peut discuter avec Yahvé, et même négocier avec lui, comme dans l’épisode de la destruction de Sodome et Gomorrhe. Rien à voir avec « Dieu le père » chrétien ou l’Allah musulman.

      [Bien sûr, chez les Romains, les Grecs, les Egyptiens, il arrive que Jupiter, Poséidon ou Râ se fâchent tout rouge, mais globalement, ils sont les garants de la prospérité et de la pérennité de leurs adorateurs. La relation est contractuelle (“do ut des” disaient les Romains, “je donne pour que tu donnes”) et le païen qui n’est pas exaucé peut s’estimer lésé, voire dénoncer l’attitude du dieu ingrat (on connaît des exemples).]

      Yahvé est à la charnière entre les polythéismes – ou les dieux sont soumis aux forces du marché, si l’on peut dire – et les monothéismes fondés sur la logique pêché/pardon, le christianisme et l’Islam.

      [Toutefois, quand on lit l’Ancien Testament, on a vraiment l’impression qu’hormis quelques parenthèses heureuses, Yahvé ne fait que tourmenter son peuple, et les malheurs, les défaites, les épidémies l’emportent sur les rares périodes de prospérité. Le judaïsme est une religion très négative. Les juifs craignent Yahvé, mais peuvent-ils vraiment l’aimer?]

      La théologie juive ne pousse guère à « aimer » son dieu. Yahvé est comme une belle-mère acariâtre et très riche. On peut ne pas l’aimer, mais elle fait partie de la famille et on espère qu’elle vous lâche quelques sous.

      [« Ces orthodoxes refusent de reconnaître l’Etat d’Israel, et continuent à payer leurs impôts au roi de Jordanie, considéré comme le successeur de l’empire babilonien »][Mais comment font-ils? L’administration fiscale israélienne accorde-t-elle une dérogation?]

      Oui. C’est l’une des nombreuses bizarreries de l’Etat d’Israel. Même si les leaders sionistes parlaient en 1947 d’un « peuple d’Israel » comme s’il s’agissait d’une entité unique, en fait les juifs forment un ensemble extraordinairement divers. Pour s’assurer le plus de soutiens possibles, les fondateurs d’Israel ont été obligés de composer avec les uns et avec les autres. Il faut se souvenir qu’aux débuts de l’Etat d’Israel, Ben Gourion avait essayé d’écrire une constitution et pour cela il avait besoin d’une définition juridique précise de ce qu’est un juif. Pour cela, il a demandé à une vingtaine de personnalités juives d’écrire chacune un rapport sur la question. Après les avoir lu, Ben Gourion a décidé de laisser tomber… du coup l’Etat d’Israel n’a pas de constitution écrite, et on ne sait toujours pas ce qu’est exactement un juif…

      [Par ailleurs, j’avais cru comprendre que pas mal d’orthodoxes s’étaient ralliés à l’état d’Israël.]

      Le ultra-orthodoxes concentrés dans le quartier de Mea Sharim, à Jérusalem, ne reconnaissent toujours pas l’Etat d’Israel et continuent à payer leurs impôts au roi de Jordanie. Je ne sais pas si d’autres communautés bénéficient de la même dérogation.

      [On entend souvent parler des “colons très religieux” et surtout des progrès de la “droite ultra-religieuse” aux élections israéliennes. Êtes-vous sûrs qu’une bonne partie des orthodoxes ne s’est pas “convertie” au sionisme?]

      Ne confondez pas les « colons très réligieux » (ce qui est le code pour « très pratiquants ») et les « ultra-orthodoxes », qui non seulement sont très pratiquants sinon qu’ils adhèrent aussi à une interprétation très particulière de la Torah.

      [Je vous avoue que l’usage du mot “génocide” pour l’Antiquité me pose problème. Les armées antiques ne disposaient pas de la logistique et des effectifs des armées modernes. Un génocide demande une planification, une organisation, qui n’existait guère à l’époque.]

      Pas du tout. Effectivement, les moyens de tuer n’étaient pas les mêmes. Mais les « genos » étaient eux aussi beaucoup plus petits. L’histoire antique est pleine de villes dont la population était « passée au fil de l’épée » après leur prise. On peut considérer de tels actes comme un « génocide ».

      [Homère est un poète qui n’a jamais raconté de faits historiques à ma connaissance.]

      Les fouilles de Schliemann ont montré que les récits homériques ont des bases historiques – même s’ils sont évidements très romancés.

      [Quant à Hérodote, quels exemples donnent-ils? Il faut lire les auteurs et les textes antiques avec circonspection. Ainsi, quand on lit les chroniques des rois assyriens, on peut relever que dans telle région, le roi se vante d’avoir fait campagne, d’avoir tout détruit, tout massacré et déporté ceux qui restent. Et, ô surprise, on finit par s’apercevoir que le même roi refait campagne dans la même région trois ou quatre ans plus tard.]

      Je vous accorde qu’il faut traiter les textes avec prudence. Mais la remarque s’applique aussi à la Torah. On peut par exemple supposer que le génocide des philistins ou des cananéens n’a pas été aussi total que le texte biblique ne le prétend…

      [« D’abord, les juifs n’ont pas « sacralisé leur langue »][Les juifs lisent la Torah en hébreu me semble-t-il. C’est la langue d’un petit peuple au rôle fort modeste dans l’Orient ancien.]

      Selon les hypothèses aujourd’hui admises, l’hébreu biblique n’est pas la langue que les juifs parlaient dans la vie quotidienne. C’est une langue exclusivement réservée au culte.

      [Je vous signale que le babylonien, l’assyrien, le phénicien ou le hittite, qui furent bien davantage parlés que l’hébreu n’ont même pas survécu comme langue liturgique. L’hébreu, si.]

      Cela tient probablement au fait que Yahvé – ou ceux qui ont écrit en son nom – interdit dans le texte biblique « de changer une seule lettre à la Torah », ce qui a été interprété non seulement comme un commandement de copier le texte exactement, mais aussi comme une interdiction de le traduire. Encore aujourd’hui, l’immense majorité des juifs pratiquants célèbrent leur liturgie en hébreu ancien, alors que les chrétiens ont dès le départ célébré leur liturgie en plusieurs langues (araméen, latin, grec).

      [La langue de culte est un très puissant marqueur identitaire.]

      Certainement. Mais ma remarque avait pour but de vous faire remarquer que les juifs n’ont pas sacralisé leur langue – au sens de la langue colloquiale – mais qu’ils ont au contraire séparé la langue colloquiale et la langue du culte. Dans chaque pays où ils se sont installés, les juifs ont utilisé dans leur vie quotidienne la langue locale – ou un dérivé de la langue locale – et non la langue du culte.

      [Je pense que cela tient à l’importance de la transmission dans l’organisation familiale juive.][Est-ce à dire que les autres s’en fichent?]

      Je ne dirai pas « qu’ils s’en fichent », mais le mode de transmission me semble assez différent. Les juifs ont conservé, à côte du culte public pratiqué dans la synagogue, un culte privé célébré dans le cadre familial. Les cérémonies entourant le sabbat (bénédiction des bougies pratiqué par la mère, rupture du pain et bénédiction du vin pratiquée par le père, etc.), seider de peisaj… ces culte privé n’a aucun équivalent chrétien.

      [Les jésuites et les oratoriens ne se sont-ils pas intéressés à cette problématique de la transmission?]

      Certainement. Mais chez les chrétiens – et cela se comprend, dans la mesure où c’était la religion du pouvoir – ce n’est pas la famille qui est le lieu essentiel de la transmission.

      [Est-ce que, autrefois, disons aux XVII° et XVIII° siècles, parmi les Ashkénazes d’Europe centrale (vos ancêtres si j’ai bien compris), la totalité des hommes savaient lire et écrire par exemple? Tous les jeunes juifs allaient-ils à l’école?]

      En principe, tous. La religion juive fait obligation à chaque juif de savoir lire la Torah. Lors de la cérémonie du Bar Mitzvah – qui marque l’entrée d’un jeune juif dans l’âge adulte – le jeune est prié de monter sur l’almimbar et doit lire à haute voix une page de la Torah.

      [Oui, mais là il y a quelque chose qui m’échappe. J’essaie de me mettre à la place d’un juif français. Quel plaisir y a-t-il à vivre dans la peur permanente, le soupçon, la défiance? Je comprends ce que vous m’expliquez sur la peur qui permet la manipulation, mais je trouve que le prix à payer est très lourd. Vivre dans la crainte des autres, quand on est minoritaire dans une société, est une souffrance.]

      Bien entendu. Ce n’est pas par « plaisir » que certains juifs français font cela. Mais beaucoup de juifs français ont des parents qui sont morts dans la Shoah. La peur de voir ce traumatisme se répéter peut être manipulée très facilement. Je peux vous dire que chez mon père, pourtant juif parfaitement assimilé, cette peur était toujours quelque part présente. Lorsque j’ai choisi mon métier, mon père avait réagi avec crainte en me disant que c’était un milieu « ou les juifs ne sont pas les bienvenus ». Chose qui, je peux vous l’assurer, je n’ai jamais expérimenté.

      [Et le résultat d’une telle logique ne peut être que de pousser les juifs à fuir la peur en émigrant. Si c’est là l’objectif réel du Crif, alors ses dirigeants devraient être les premiers à aller s’installer en Israël. Pourquoi Cukierman et cie restent-ils ici puisqu’ils se disent victimes d’un épouvantable antisémitisme? Tel Aviv les attend…]

      Mais… je peux vous assurer que la grande majorité des juifs français – y compris certains qui se disent sionistes – n’ont aucune envie de vivre en Israel. Pour y être allé plusieurs fois pour visiter la famille, je peux vous dire que c’est le dernier endroit au monde ou j’irais vivre. C’est un pays de fous. Quant à Cukierman lui même, je vous l’ai dit, c’est un agent israélien. Quand il aura fini sa mission, il ira peut-être habiter là bas.

    • v2s dit :

      @Descartes

      Vous dites :
      les juifs n’ont pas [« refusé le mélange »].

      Mais si les juifs ne refusent pas le mélange, comment font-ils pour résister à la [tendance à se dissoudre.] ?

      Plus loin vous dites :

      [(…) même chez les juifs non croyants, comme c’était le cas de mes parents.]
      La religion juive compte donc dans ses rangs des non croyants. Existe-il aussi des chrétiens non croyants, des musulmans non croyants ?
      Comment dois-je m’y prendre pour distinguer un chrétien non croyant d’un juif non croyant ?

    • @ Descartes,

      “Yahvé est comme une belle-mère acariâtre et très riche. On peut ne pas l’aimer, mais elle fait partie de la famille et on espère qu’elle vous lâche quelques sous.”
      Votre formule m’a bien fait rire. Ce qui n’empêche pas qu’elle soit juste.

      “Ne confondez pas les « colons très réligieux » (ce qui est le code pour « très pratiquants ») et les « ultra-orthodoxes », qui non seulement sont très pratiquants sinon qu’ils adhèrent aussi à une interprétation très particulière de la Torah”
      J’ignorais qu’on pouvait être “très pratiquant” sans être classé comme “orthodoxe”. J’avoue que je ne connais pas bien les courants religieux du judaïsme contemporain.

      “l’hébreu biblique n’est pas la langue que les juifs parlaient dans la vie quotidienne. C’est une langue exclusivement réservée au culte.”
      D’accord, mais les deux doivent bien avoir un lien, tout de même.

      “Encore aujourd’hui, l’immense majorité des juifs pratiquants célèbrent leur liturgie en hébreu ancien”
      L’immense majorité? Y aurait-il des exceptions? Je croyais que la Torah ne se lisait qu’en hébreu.

      “Les juifs ont conservé, à côte du culte public pratiqué dans la synagogue, un culte privé célébré dans le cadre familial. Les cérémonies entourant le sabbat (bénédiction des bougies pratiqué par la mère, rupture du pain et bénédiction du vin pratiquée par le père, etc.), seider de peisaj… ces culte privé n’a aucun équivalent chrétien.”
      Je l’ignorais. Je n’ai jamais eu l’occasion de fréquenter des juifs, et c’est un peu dommage. J’aurais bien aimé en connaître un ou deux pour discuter du judaïsme et de l’identité juive, car je dois dire que ces questions m’intéressent.

      “La peur de voir ce traumatisme se répéter peut être manipulée très facilement. Je peux vous dire que chez mon père, pourtant juif parfaitement assimilé, cette peur était toujours quelque part présente.”
      Je comprends. Cela étant, bien que la France ait connu un fort antisémitisme (Drumont, Maurras), les Français ne se sont jamais laissés aller aux pogroms si courants dans la Russie tsariste, et naturellement la France n’est pas responsable de la Shoah. La France a accueilli des juifs de l’est. Je comprends l’inquiétude mais, hormis la parenthèse de l’Etat français, notre pays a toujours résisté à l’antisémitisme d’Etat, et les juifs devraient en être conscients.

      “Pour y être allé plusieurs fois pour visiter la famille, je peux vous dire que c’est le dernier endroit au monde ou j’irais vivre. C’est un pays de fous.”
      Israël est un pays sur lequel courent beaucoup de rumeurs et de fantasmes. Pardonnez ma curiosité mais, puisque vous avez eu l’occasion de vous y rendre, qu’y avez-vous vu, qu’y avez-vous entendu qui justifie le jugement plutôt sévère que vous portez sur cet état?

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [les juifs n’ont pas [« refusé le mélange »]. Mais si les juifs ne refusent pas le mélange, comment font-ils pour résister à la [tendance à se dissoudre.] ?]

      D’abord, il faut se souvenir que pendant des siècles ce sont les autres qui ont « refusé le mélange ». Jusqu’au milieu du XXème siècle, les juifs sont singularisés dans la plupart des pays européens : dans certains pays, des métiers leur sont interdits, dans d’autres, ils ne peuvent détenir de propriété foncière. Dans tous, ils sont regardés avec méfiance par certaines couches de la population. Cette singularisation a contribué à empêcher la « dissolution » des juifs dans les sociétés d’accueil.

      Au delà, je pense que la culture juive institue un type de structure et de transmission familiale qui permet à cette culture de se maintenir même dans le contexte des mariages mixtes. Cela tient aussi au fait que la culture juive est extrêmement bien adaptée à la survie…

      [(…) même chez les juifs non croyants, comme c’était le cas de mes parents.][La religion juive compte donc dans ses rangs des non croyants. Existe-il aussi des chrétiens non croyants, des musulmans non croyants ?]

      Le terme « juif » ne caractérise pas seulement une religion, il caractérise aussi une filiation culturelle – et pour certains, ethnique. C’est pourquoi il existe des « juifs non croyants », alors qu’il n’y a pas de « chrétiens non croyants ».

      [Comment dois-je m’y prendre pour distinguer un chrétien non croyant d’un juif non croyant ?]

      Regarder le type de rapport qu’il entretien avec ses parents est un bon début…

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [J’ignorais qu’on pouvait être “très pratiquant” sans être classé comme “orthodoxe”. J’avoue que je ne connais pas bien les courants religieux du judaïsme contemporain.]

      Le paysage est en effet assez complexe. Les termes « orthodoxe » ou « ultra-orthodoxe » ne se réfèrent pas au niveau de pratique, mais au type d’interprétation qui est faite de la Torah et de la Halacha. Plus on est orthodoxe, plus l’interprétation est littérale. A l’opposé des « orthodoxes » se trouvent les « libéraux », pour qui la Torah et la Halacha ne sont que des guides et laissent une large marge d’interprétation. Comme le judaïsme n’a pas de prêtrise – le rabbin n’est qu’un sage, élu par la communauté, il n’a aucune investiture divine et aucun monopole sur les sacrements – on voit coexister des synagogues « orthodoxes » et des synagogues « libérales » sans qu’il y ait d’autorité capable de trancher entre elles.

      Le niveau de pratique n’a rien à voir avec cette classification. Il y a des « libéraux » qui sont aussi pratiquants que les orthodoxes. Et les niveaux de pratique sont très différents : le « top » est d’observer le Sabbat et l’ensemble des fêtes du calendrier liturgique – il y en a grosso modo une toutes les deux semaines, et chacune demande un rituel particulier. Le plus fréquent est la simple observation du Sabbat et des trois « grandes fêtes » : Pesaj (pâques), Rosh Hashanah (le nouvel an) et Iom Kippur (le jour du pardon). En deça, on est considéré un agnostique. Mon arrière grand-mère, par exemple, n’observait que le Kippur, et c’était largement parce que cela lui permettait de voir une fois par an d’autres agnostiques comme elle pour papoter un moment. Mes grands-parents se sont mariés religieusement et ont circoncis leurs enfants, mais n’observaient déjà aucune fête et ont demandé à être incinérés à leur mort. Mes parents se sont mariés civilement et n’ont pas circoncis leurs enfants… et pourtant nous nous considérons tous comme juifs.

      [« l’hébreu biblique n’est pas la langue que les juifs parlaient dans la vie quotidienne. C’est une langue exclusivement réservée au culte. »][D’accord, mais les deux doivent bien avoir un lien, tout de même.]

      Probablement. Mais on ne sait pas lequel. Les juifs ont été plusieurs fois déportés et ont vécu chez d’autres peuples. Lorsqu’ils étaient en Egypte ou en Babylone, parlaient-ils quotidiennement une langue à eux, ou bien parlaient-ils la langue du pays, et ne conservaient-ils l’hébreu que pour le culte ? Je me souviens d’avoir lu une étude philologique montrant que l’hébreu biblique a un vocabulaire trop pauvre pour pouvoir servir de langue colloquiale…

      [« Encore aujourd’hui, l’immense majorité des juifs pratiquants célèbrent leur liturgie en hébreu ancien »][L’immense majorité? Y aurait-il des exceptions? Je croyais que la Torah ne se lisait qu’en hébreu.]

      Oui, il y a quelques synagogues « libérales » aux USA qui célèbrent la liturgie en anglais pour attirer les jeunes. Cela reste tout de même très rare, et je ne connais aucun cas en dehors des Etats-Unis.

      [« Les juifs ont conservé, à côte du culte public pratiqué dans la synagogue, un culte privé célébré dans le cadre familial. Les cérémonies entourant le sabbat (bénédiction des bougies pratiqué par la mère, rupture du pain et bénédiction du vin pratiquée par le père, etc.), seider de peisaj… ces culte privé n’a aucun équivalent chrétien. »][Je l’ignorais. Je n’ai jamais eu l’occasion de fréquenter des juifs, et c’est un peu dommage. J’aurais bien aimé en connaître un ou deux pour discuter du judaïsme et de l’identité juive, car je dois dire que ces questions m’intéressent.]

      Je dois dire que c’est un sujet passionnant. C’est le seul cas que je connaisse d’un peuple urbain qui ait toujours accepté l’assimilation culturelle tout en refusant catégoriquement l’assimilation spirituelle.

      [Je comprends. Cela étant, bien que la France ait connu un fort antisémitisme (Drumont, Maurras), les Français ne se sont jamais laissés aller aux pogroms si courants dans la Russie tsariste, et naturellement la France n’est pas responsable de la Shoah. La France a accueilli des juifs de l’est. Je comprends l’inquiétude mais, hormis la parenthèse de l’Etat français, notre pays a toujours résisté à l’antisémitisme d’Etat, et les juifs devraient en être conscients.]

      L’immense majorité l’est. C’est d’ailleurs pourquoi alors que la France est le pays européen qui, en proportion de sa population juive, connaît la plus faible immigration vers Israel.

      [Israël est un pays sur lequel courent beaucoup de rumeurs et de fantasmes. Pardonnez ma curiosité mais, puisque vous avez eu l’occasion de vous y rendre, qu’y avez-vous vu, qu’y avez-vous entendu qui justifie le jugement plutôt sévère que vous portez sur cet état?]

      C’est un étrange mélange d’enthousiasme messianique, de cynisme et de paranoïa. Israël est une construction très contradictoire : c’est l’Etat des juifs, mais construit contre ce qui a fait la culture juive depuis deux mille ans, c’est-à-dire, la Diaspora. Une Diaspora que chaque communauté à vécu différemment, car l’histoire des Ashkénazes n’est pas celle des Sépharades, et celle-ci n’est pas la même que celle des juifs Grecs ou Iraniens, ou des Sabras d’Israel.

      Comme tout « roman national » est impossible – comment construire un tel roman tout en affichant un mépris total pour la Diaspora – l’unité de l’Etat est fondée sur trois mythes. D’un côté, le mythe biblique enseigné comme s’il s’agissait d’une vérité historique, de l’autre une Shoah mythifiée jusqu’à la nausée. Et enfin, le mythe de la « terre vide » qui dénie aux palestiniens tout droit sur leur terre. La mentalité qui sort du croisement de ces trois mythes est on ne peut plus baroque.

    • v2s dit :

      @Descartes
      [Comment dois-je m’y prendre pour distinguer un chrétien non croyant d’un juif non croyant ?]
      Votre réponse, Descartes :
      [Regarder le type de rapport qu’il entretien avec ses parents est un bon début…]

      Ah bon, chacun peut donc identifier un juif en regardant le type de rapport qu’il entretient avec ses parents ?
      Il faudrait expliquer en quoi les rapports que les juifs, « non croyants » ou pas, entretiennent avec leurs parents, sont réellement « particuliers », tellement différents des relations parents enfants que l’on retrouve dans les autres cultures traditionnelles au proche orient ?

      Il me semble que le judaïsme est bien une religion et si des juifs se revendiquent « juifs non croyants » c’est qu’ils estiment appartenir à la communauté juive.
      Mais votre aversion connue pour de toute forme de communautarisme exclut que vous puissiez vous revendiquer comme membre de la communauté juive.
      De confession juive, (ou chrétienne, ou hindouiste ou musulmane pourquoi pas), ou alors juif non pratiquant, ça, c’est possible, mais juif non croyant, (ou juif athée ou juif agnostique) c’est comme musulman athée, ça n’existe pas.

    • BolchoKek dit :

      @Descartes et NJ

      >je peux vous assurer que la grande majorité des juifs français – y compris certains qui se disent sionistes – n’ont aucune envie de vivre en Israel. Pour y être allé plusieurs fois pour visiter la famille, je peux vous dire que c’est le dernier endroit au monde ou j’irais vivre. C’est un pays de fous.<
      C’est assez drôle, mais des juifs iraniens m’ont dit pratiquement la même chose. J’en avais rencontré deux, assez âgés, très sympathiques, qui essayaient de me vendre de l’opium un soir. Nous avions un peu discuté et ils m’avaient dit que la majeure partie de leur famille vivait en Israël. Je leur avais demandé s’ils ne voudraient pas les rejoindre, ils ont pris un air horrifié et m’ont dit “mais pas du tout ! Ici nous sommes orfèvres, artisans à notre compte, nous avons nos députés réservés, les flics sont obligés d’avoir des égards avec nous, nous pouvons vendre un peu de drogue les veilles des jours chômés… nos cousins vivent dans de petits appartements à Tel Aviv, ils font des boulots affreux, ils se demandent pourquoi leurs parents ont quitté l’Iran”
      Il est vrai que le sort des juifs “orientaux” n’a en grande majorité guère été enviable, mais je m’étonnais de les voir aussi catégoriques. Peut-être que la shoah n’a pas laissé une marque aussi forte (si même marque il y a) sur les orientaux… Je n’ai jamais été un antisioniste primaire ; c’est véritablement en étudiant l’histoire d’Israël dans la région et même dans ses propres frontières qu’il a du mal à définir que je le suis un peu devenu, quoique modéré. Au final, j’en retiens une ironie : Voltaire disait que “Certains Etats se dotent d’une armée ; l’armée Prussienne s’est dotée d’un pays”, cela pourait presque se dire d’Israël aujourd’hui, au regard des relations avec ses voisins.

      > Les juifs ont été plusieurs fois déportés et ont vécu chez d’autres peuples. Lorsqu’ils étaient en Egypte ou en Babylone, parlaient-ils quotidiennement une langue à eux, ou bien parlaient-ils la langue du pays, et ne conservaient-ils l’hébreu que pour le culte ?<
      Jésus de Nazareth lui-même parlait l’araméen, langue sémitique véhiculaire. Il se peut en effet que d’autres langues aient été communes à tous les peuples de la région même aux temps les plus reculés…
      Il faut de surcroît considérer la possibilité d’une “diglossie” qui serait très ancienne. C’est à dire une situation dans laquelle la langue courante – bien que écrite, répandue – cède la place en certaines occasions à une langue différente. Que cela soit un stade ancien, volontairement littéraire de la langue parlée, voire carrément une langue complètement différente. Nous avons un peu du mal à nous représenter cela en français, mais c’est pourtant plus la règle que l’exeption lorsque l’on considère l’ensemble des civilisations humaines. Et pensons au rapport que nous avons longtemps entretenu avec le Latin…

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Regarder le type de rapport qu’il entretien avec ses parents est un bon début…][Ah bon, chacun peut donc identifier un juif en regardant le type de rapport qu’il entretient avec ses parents ?]

      Exactement. Et tout particulièrement avec sa mère. Vous savez, la « mère juive » n’est en rien un mythe. Et je suis très bien placé pour le savoir !

      [Il faudrait expliquer en quoi les rapports que les juifs, « non croyants » ou pas, entretiennent avec leurs parents, sont réellement « particuliers », tellement différents des relations parents enfants que l’on retrouve dans les autres cultures traditionnelles au proche orient ?]

      La structure familiale juive est assez différente des autres « cultures traditionnelles » du moyen orient. D’abord, la plupart des cultures moyen-orientales est fermement patrilinéaire. Le mariage fait rentrer la femme dans le clan de son mari, auquel appartiennent les enfants. Souvent, la femme moyen-orientale se trouve de fait sous l’autorité de sa belle-mère. La culture juive est matrilinéaire : le mari entre dans le clan de sa femme, auquel appartiennent les enfants, et le mari se trouve souvent sous l’autorité du père de sa femme. Ensuite, et peut-être en réaction a une histoire tourmentée au cours de laquelle les juifs n’avaient pas d’autre protection, la famille juive exerce un contrôle et une protection des enfants beaucoup plus forte que n’importe quelle famille traditionnelle. Le devoir d’éducation est aussi traditionnellement beaucoup plus fort.

      [Il me semble que le judaïsme est bien une religion et si des juifs se revendiquent « juifs non croyants » c’est qu’ils estiment appartenir à la communauté juive.]

      Et bien vous vous trompez. On peut être juif par filiation culturelle – comme on peut être gascon, breton ou basque – sans pour autant appartenir à une « communauté » et encore moins pratiquer une religion.

      [Mais votre aversion connue pour de toute forme de communautarisme exclut que vous puissiez vous revendiquer comme membre de la communauté juive.]

      C’est pas une question de « aversion », mais de réalité. Je ne fréquente aucune organisation, club, association, édifice qui ne soit ouvert qu’aux juifs. Je ne choisis pas ma résidence de manière à avoir exclusivement des voisins juifs. Je ne parle pas une langue différente de celle de mes concitoyens pour pouvoir restreindre mon dialogue aux gens qui auraient les mêmes origines que moi. Dans ces conditions, cela veut dire quoi « être membre de la communauté juive ». Un musulman qui habite dans le 7ème arrondissement de P aris, qui va au bistrot et mange des cochonnailles, qui est membre du club sportif et social de son entreprise et ne va jamais à la mosquée peut-être considéré « membre de la communauté musulmane » ?

      [De confession juive, (ou chrétienne, ou hindouiste ou musulmane pourquoi pas), ou alors juif non pratiquant, ça, c’est possible, mais juif non croyant, (ou juif athée ou juif agnostique) c’est comme musulman athée, ça n’existe pas.]

      Et bien si, ça existe. Au point que l’Etat d’Israel reconnaît comme juifs – et donc ayant droit à faire leur Aliyah – des descendants de juifs qui se déclarent athées. Même les rabbins les reconnaissent, puisque l’Halacha dit que « est juif le fils d’une juive ». Sans aucune autre restriction.

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [Il est vrai que le sort des juifs “orientaux” n’a en grande majorité guère été enviable, mais je m’étonnais de les voir aussi catégoriques.]

      Ce n’est pas tout à fait exact. Si l’on s’arrête au début des années 1930, les juifs « orientaux » avaient un sort comparable – et souvent bien meilleur – que les juifs « occidentaux ». Dans l’empire ottoman, ils bénéficiaient d’un « statut personnel » : les conflits entre juifs, ainsi que les questions civiles, se réglaient conformément à l’Halacha, appliquée par des tribunaux juifs. Dans certaines parties de l’empire – c’était le cas à Tunis – les juifs avaient accès à certaines charges et emplois publics. Et les pogroms étaient très rares. Il était bien plus « enviable » d’être juif à Tunis qu’à Wilno… quant aux juifs iraniens, ils ont été tellement bien traités qu’ils constituent l’une des très rares communautés juives « originaires », qui n’ait jamais ressenti le besoin de se déplacer.

    • v2s dit :

      [De confession juive, (ou chrétienne, ou hindouiste ou musulmane pourquoi pas), ou alors juif non pratiquant, ça, c’est possible, mais juif non croyant, (ou juif athée ou juif agnostique) c’est comme musulman athée, ça n’existe pas.]

      [Et bien si, ça existe.] Dites-vous.

      Alors,
      Un chrétien non croyant, c’est un ancien chrétien.
      Un musulman non croyant, c’est un ancien musulman
      Un animiste non croyant, c’est un ancien animiste

      Mais, selon vous, un juif reste un juif.
      Heureusement que vous prenez soin d’affirmer que vous êtes vous-même juif, parce que ce genre d’affirmation est généralement l’apanage des antisémites.

      A moins que vous ne soyez convaincu d’appartenir à un peuple à part, un peuple élu peut-être ?

      [l’Etat d’Israel reconnaît comme juifs – et donc ayant droit à faire leur Aliyah – des descendants de juifs qui se déclarent athées]

      Mais bien sur qu’Israël fait ce que vous dites, puisque Israël ne se cache pas d’être un état fondé sur des critères raciaux.
      Mais ce qui me choque c’est que vous, Descartes, vous puissiez adhérer à cette idée.
      Parce que je me souviens qu’au sujet d’Israël, c’est vous qui nous disiez un jour que, précisément, la fondation de l’état d’Israël sur des bases raciales ne vous convenait pas.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Un chrétien non croyant, c’est un ancien chrétien. Un musulman non croyant, c’est un ancien musulman. Un animiste non croyant, c’est un ancien animiste… Mais, selon vous, un juif reste un juif.]

      Je ne comprends pas votre raisonnement. Vous semblez penser qu’un « non croyant » est forcément un ancien croyant qui a cessé de croire. Ce n’est pas le cas : beaucoup de juifs non-croyants sont non-croyants de naissance, et même de plusieurs générations.

      S’il existe une vision du monde, une pratique familiale, bref une culture qu’on puisse rattacher au « christianisme » en dehors de toute référence théologique, alors oui, on pourrait dire qu’il y a des « chrétiens non-croyants » ou des « musulmans non-croyants ». Le problème, c’est qu’à la différence du judaïsme, les chrétiens et les musulmans ont eu accès au pouvoir d’Etat. Là ou ce pouvoir s’est exercé, la « culture » chrétienne s’est confondue avec la « culture » nationale.

      On peut parler à la rigueur de « protestants non croyants » dans les Cévennes, ou de « chrétiens non croyants » en Egypte, parce que le caractère minoritaire de ces groupes fait qu’on peut rattacher une spécificité culturelle en parallèle avec leur spécificité religieuse.

      [Heureusement que vous prenez soin d’affirmer que vous êtes vous-même juif, parce que ce genre d’affirmation est généralement l’apanage des antisémites.]

      Ce qui est « l’apanage des antisémites », c’est les conclusions qu’on tire de ce fait, et non le fait lui-même. Qu’il existe une spécificité que les juifs gardent alors même qu’ils ont cessé de croire, c’est une évidence sociale. Et ils ne sont pas les seuls, d’ailleurs. D’autres groupes ont perdu leurs croyances d’origine sans pour autant abandonner leur spécificité culturelle. C’est le cas des manouches, par exemple.

      [A moins que vous ne soyez convaincu d’appartenir à un peuple à part, un peuple élu peut-être ?]

      « Elu » par qui ? Dans la mesure ou je ne crois pas à aucun dieu, la question de « l’élection » ne se pose plus. Et je vous rassure, je ne pense pas appartenir à un « peuple » à part. Je ne pense pas que les juifs constituent un « peuple ». Tout au plus, un groupe culturel.

      [Mais bien sur qu’Israël fait ce que vous dites, puisque Israël ne se cache pas d’être un état fondé sur des critères raciaux. Mais ce qui me choque c’est que vous, Descartes, vous puissiez adhérer à cette idée.]

      Je n’adhère pas à cette idée. D’où tirez-vous ça ? Je l’ai dit mille fois, mais de toute évidence le message ne passe pas : pour moi, les juifs sont d’abord un groupe CULTUREL. D’abord, à supposer qu’ils l’aient été un jour, les juifs ne sont pas aujourd’hui « ethniquement » homogènes, s’étant mélangés au cours de la Diaspora avec les populations des pays d’accueil. Dans ma famille, on est plutôt blond aux yeux clairs ce qui est courant chez les juifs ashkénazes, mais rare chez les juifs séfarades. Ensuite, l’Etat d’Israel est bien plus ambigu sur cette question que vous ne le pensez. Ainsi, par exemple, il reconnait les non-juifs convertis au judaïsme comme de véritables juifs, ce qui semble contredire une vision « ethnique » de l’Etat.

      La question de savoir ce qui fait un « juif » est une question horriblement compliquée, que même les fondateurs de l’Etat d’Israël ont renoncé à trancher. David Ben Gurion, après avoir demandé à une vingtaine de sages de plancher sur la question, a compris combien l’affaire était explosive et l’a enterrée, tout comme il a renoncé à établir une constitution écrite qui aurait posé le même problème.

    • BolchoKek dit :

      >Ce n’est pas tout à fait exact. Si l’on s’arrête au début des années 1930, les juifs « orientaux » avaient un sort comparable – et souvent bien meilleur – que les juifs « occidentaux ».< Je me rends compte que ma phrase n’était pas très claire. Je parlais en fait du sort de la plupart des juifs “orientaux” qui ont émigré en Israël. L’hostilité dont font preuve la plupart des peuples musulmans de nos jours est en effet assez récente.

    • @ Descartes,

      “Dans ma famille, on est plutôt blond aux yeux clairs ce qui est courant chez les juifs ashkénazes, mais rare chez les juifs séfarades.”
      Alors là, je ne comprends plus. Vous m’aviez expliqué il y a quelques temps que la plupart de vos grands-parents étaient de type plutôt méditerranéen (brun) et que les juifs peuvent se reconnaître assez aisément… Maintenant, vous expliquez que les blonds aux yeux bleus sont courants parmi les Ashkénazes. Il y a quelque chose qui m’échappe…

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Alors là, je ne comprends plus. Vous m’aviez expliqué il y a quelques temps que la plupart de vos grands-parents étaient de type plutôt méditerranéen (brun) et que les juifs peuvent se reconnaître assez aisément…]

      En toute honnêteté, je ne me souviens pas d’avoir dit pareille chose. Et si je l’ai dit, c’était une erreur. Du côté de mon père ils sont tous bruns, mais pas vraiment du type méditerranéen. Du côté de ma mère ils ont le type russe : blonds aux yeux gris. Les juifs séfarades tendent à être plus homogènes et ont le type méditerranéen. Mais les ashkénazes sont très mélangés.

    • @ Descartes,

      Je me permets de vous citer:

      “TOUS les juifs n’ont pas des caractères sémites. Sur mes quatre grands parents – tous juifs d’Europe centrale – trois sont « sémites » (bruns, yeux noirs, etc.) mais le quatrième est blond aux yeux gris, une apparence tout à fait russe.”

      Commentaire du 15/12/2014, article “De la ZAD au Djihad”

      Or il me semble que “sémite” renvoie à un type méditerranéen… non?

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [« TOUS les juifs n’ont pas des caractères sémites. Sur mes quatre grands parents – tous juifs d’Europe centrale – trois sont « sémites » (bruns, yeux noirs, etc.) mais le quatrième est blond aux yeux gris, une apparence tout à fait russe. » Or il me semble que “sémite” renvoie à un type méditerranéen… non?]

      Vous avez parfaitement raison. C’est moi qui ai fait l’erreur, j’aurais du écrire « deux sont sémites » au lieu de trois. Je pense que cet erreur vient du fait que je n’ai pas connu l’une des mes grandes-mères, qui était déjà décédée à ma naissance. Je lui ai donc attribué un peu vite des cheveux bruns et des yeux noirs… mais en vérifiant sur une vieille photo je ne peux que me rendre à l’évidence : elle avait les yeux clairs.

      J’ajoute que le commentaire que vous citez va dans le même sens que mes écrits d’aujourd’hui : les juifs ne forment pas un ensemble aux caractères homogènes, et ne peuvent donc pas se « reconnaître » physiquement.

  21. v2s dit :

    Ces femmes sont françaises et musulmanes ce qui ne veut pas dire, comme vous semblez le suggérer, qu’elles sont en faveur du communautarisme.
    Vous semblez penser, une fois encore, que la France, comme République laïque, devrait interdire aux citoyens de montrer leur foi et donc interdire tout signe d’appartenance religieuse.
    La laïcité, en droit, c’est la liberté de conscience, c’est le respect de toutes les options spirituelles et religieuses.
    Certes, au siècle dernier, la laïcité s’est peu à peu imposée comme une prépondérance de l’athéisme, de l’agnosticisme, et même comme le combat contre toutes les religions.
    Mais ceci était une dérive, rendue possible par la sécularisation des sociétés occidentales.
    Si, aujourd’hui, certaines composantes de la société française souhaitent afficher ostensiblement leurs croyances, en portant par exemple le voile, votre choix comme citoyen c’est soit de l’accepter, soit de militer pour un changement de la loi et pour l’interdiction de tout signe d’appartenance religieuse.
    Bien sur chacun peut bien militer pour un changement de la loi, mais pour l’instant la loi s’applique et il n’est pas certain que beaucoup de français, même athées, souhaitent remettre en cause la loi actuelle.
    Leur religion ne doit pas empêcher ces femmes de s’opposer à la ghettoïsation, telle que la décrit et la dénonce, par exemple, le maire de Sarcelles.

    Au sujet de la langue, je ne partage pas vos constats :
    Vous dites :
    [Moi aussi j’ai quitté la cité ou j’ai grandi, et ou j’avais beaucoup d’amis, parce que je ne supportais plus (…) de voir mes enfants marginalisés dans la cour de récréation parce qu’il(s) ne parle(nt) pas arabe.]

    Or, les émigrés du Maghreb, de la première génération, parlent toutes sortes de dialectes différents ou se mélangent les langues berbères, le français, et quelques mots d’arabe. Des dialectes qu’ils ont généralement perdus dès la seconde génération, mais non, ils ne parlent pas arabe. Les émigrés d’Afrique subsaharienne ne parlent pas non plus arabe. Seule une infime minorité d’émigrés parlent l’arabe.
    C’est tellement vrai que les fidèles dans les mosquées réclament des imams francophones pour pouvoir comprendre le prêche du vendredi.
    La seule langue commune, qui permet à tous de se comprendre dans la cour de récré c’est, aujourd’hui comme hier, le français.

    • Descartes dit :

      @ v2s

      [Ces femmes sont françaises et musulmanes ce qui ne veut pas dire, comme vous semblez le suggérer, qu’elles sont en faveur du communautarisme.]

      Tout à fait d’accord.

      Par contre, ces femmes portent le voile, ce qui veut dire qu’elles sont en faveur du communautarisme. Il faut assumer le poids des symboles qu’on porte. Si je me balade dans la rue avec un brassard à croix gammée, j’aurais du mal à expliquer que je ne suis pas un admirateur du IIIème Reich, mais que je le porte simplement parce que j’aime le motif. En Arabie Saudite, le voile est une obligation imposée à toutes les femmes, et on ne peut donc pas déduire du fait qu’elles le portent qu’elles sont pour ou contre quoi que ce soit. C’est une obligation, point à la ligne. Mais en France, le voile n’est pas obligatoire. C’est un signe distinctif que certaines communautés utilisent pour marquer leur différence. Le porter implique donc une adhésion au communautarisme.

      [Vous semblez penser, une fois encore, que la France, comme République laïque, devrait interdire aux citoyens de montrer leur foi et donc interdire tout signe d’appartenance religieuse.]

      Absolument pas. Je pense au contraire que la République laïque, en dehors des cas où l’interdiction est nécessaire pour garantir la neutralité d’une institution publique ou l’ordre public, n’a pas à « interdire » quelque expression que ce soit. Mais si la République donne aux femmes le droit de porter le voile, elle doit me donner le droit de tirer les conclusions qui s’imposent. Une personne qui porte le voile – ou la kippa, ou l’habit de moine – tient à marquer son appartenance à une communauté. Quand cette même personne, tout en portant des signes qui interdisent le mélange, exige à cor et a cri la « mixité », je trouve qu’il y a une sérieuse contradiction.

      [La laïcité, en droit, c’est la liberté de conscience, c’est le respect de toutes les options spirituelles et religieuses.]

      Non, non, non et non. La laïcité, en droit, c’est l’INDIFFERENCE de l’Etat envers toutes les options spirituelles et religieuses. La laïcité n’oblige personne à « respecter » quoi que ce soit. La garantie de la liberté de culte et de la liberté de pensée n’ont rien à voir avec la laïcité – et sont en fait bien antérieures.

      [Si, aujourd’hui, certaines composantes de la société française souhaitent afficher ostensiblement leurs croyances, en portant par exemple le voile, votre choix comme citoyen c’est soit de l’accepter, soit de militer pour un changement de la loi et pour l’interdiction de tout signe d’appartenance religieuse.]

      Mais moi j’accepte tout à fait leur droit de « afficher ostensiblement leurs croyances ». Mais en retour, elles doivent accepter mon droit d’afficher ostensiblement les miennes, à savoir, que le port du voile est un signe d’adhésion au communautarisme, et qu’exiger la mixité tout en portant le voile est une contradiction.

      [Leur religion ne doit pas empêcher ces femmes de s’opposer à la ghettoïsation, telle que la décrit et la dénonce, par exemple, le maire de Sarcelles.]

      Leur religion ne leur empêche nullement de « s’opposer à la ghettoïsation ». Par contre, leur religion – ou plutôt la manière qu’elles ont choisies de la pratiquer – empêche leur combat de réussir. Tout simplement parce qu’il ne sert à rien de dénoncer les effets dont on chérit les causes. Vouloir combattre la ghettoïsation en portant le voile, c’est comme vouloir combattre l’obésité en mangeant chez McDonalds.

      [Moi aussi j’ai quitté la cité ou j’ai grandi, et ou j’avais beaucoup d’amis, parce que je ne supportais plus (…) de voir mes enfants marginalisés dans la cour de récréation parce qu’il(s) ne parle(nt) pas arabe.][Or, les émigrés du Maghreb, de la première génération, parlent toutes sortes de dialectes différents ou se mélangent les langues berbères, le français, et quelques mots d’arabe.]

      Ca dépend d’où ils viennent. Il ne faut pas exagérer la diversité des dialectes, et encore moins l’incapacité de se comprendre les uns les autres. Et si peu d’immigrés parlaient un arabe littéraire correct, ceux qui venaient des mêmes pays étaient en général capables de se comprendre entre eux. Mais plus spécifiquement, ce que je vous raconte plus haut est une expérience personnelle.

      [La seule langue commune, qui permet à tous de se comprendre dans la cour de récré c’est, aujourd’hui comme hier, le français.]

      Sans doute. Mais contrairement à hier, tous les enfants n’ont pas envie – et leurs parents non plus – d’être « compris par tous ». Il leur suffit d’être compris par ceux de leur « communauté ».

    • morel dit :

      @v2s

      « Certes, au siècle dernier, la laïcité s’est peu à peu imposée comme une prépondérance de l’athéisme, de l’agnosticisme, et même comme le combat contre toutes les religions »

      Vous semblez ignorer la prétention de toutes ces religions, de leur hiérarchie de desservants qui y trouve souvent son intérêt bien matériel, à vouloir mettre sous leur loi jugée d’essence divine donc non-négociable l’humanité.
      La séparation des églises et de l’Etat est une avancée démocratique permettant le libre choix et la liberté de conscience (voyez ce qu’il en est pour les pays de non-séparation).
      Et c’est parce que ce bien est précieux et fragile qu’il nous faut le défendre en permanence contre cette tendance totalitaire en germe dans toute religion ; loi « divine » ou loi des hommes ?
      N’aurions-nous pas le droit de ricaner d’un rire voltairien lorsqu’on prétend que les femmes doivent cacher leurs cheveux ? Et, derrière, mille autres mises en sujétion de l’humanité.
      Convention du CFCM juin 2014 :
      « Le voile est une prescription qui recommande au Prophète de « dire à ses femmes, à ses filles et aux femmes des croyants » (Coran 33-59), de l’arborer pour la réserve qu’il leur impose. »
      In : http://www.lecfcm.fr/wp-content/uploads/2014/06/cfcm_texte_convention__version_finalisee2.pdf

  22. Bannette dit :

    @Bruno : merci beaucoup de ton témoignage dans lequel je me reconnais totalement. Comme tu le dis à propos de Piotr/Pierre, j’ai moi aussi reçu la version française de mon prénom par mes parents, qui trouvaient cela totalement normal.
    Ce que tu dis et que développe Descartes à propos de la reconnaissance des immigrés par le pays d’accueil est essentiel, et notre hôte me le permet, j’aimerai faire une digression à propos d’un film français que j’admire : “La Grande Illusion” de Jean Renoir datant en 1937.

    Dans ce film, qui narre les péripéties de 3 soldats français d’origine diverse faits prisonniers par les allemands, il y a une scène que j’ai trouvée extraordinaire et qui illustre bien cette idée de reconnaissance. Les 3 personnages sont un ouvrier titi parisien joué par Gabin, un aristocrate joué par Fresnay et un juif Rosenthal joué par Marcel Dialo. Renoir a filmé une scène où tous les prisonniers sont regroupés et arrive une discussion sur leur motivation et leur engagement au combat, et là le juif raconte son histoire : sa famille est immigrée d’Europe de l’Est et il explique qu’en une seule génération, il a pu s’élever dans l’échelle sociale (il est banquier), ce que ses ancêtres juifs n’avaient jamais eu la chance de faire (miracle de la France républicaine). Il fait l’étalage de ses possessions matérielles et il termine enthousiaste par cette réplique magnifique : « Ah ce pays, tu penses bien que je vais me battre pour lui ! ».
    Ce qu’il y a de remarquable, c’est la façon géniale qu’a Renoir de retourner un cliché antisémite (le juif riche et forcément usurier) pour parler des possessions de Rosenthal, là où la conversation tourne habilement autour d’une possession commune : la Patrie. Plus tard on voit d’ailleurs le personnage, qui est visiblement le plus riche du lot quand il était civil, partager les vivres que sa famille lui envoie avec ses camarades d’infortune.

    Ce film parle très subtilement de la Nation, et la conception française de la Nation, avec le personnage de l’aristocrate Fresnay opposé à celui de l’Allemand, joué par le légendaire Erich Von Stroheim. Il y a un débat philosophe entre eux, car les 2 hommes se respectent beaucoup même s’ils sont adversaires (et par leur statut social sont sans doute très proches). On voit incarnés par les 2 acteurs l’opposition entre Fichte et Renan. L’officier allemand ne comprend pas comment un homme de qualité comme Fresnay peut considérer Gabin et Rosenthal comme d’autres que lui-même, lui qui insiste pour qu’ils mangent avec lui. Il le met sur le compte de sa grandeur d’âme, or même si effectivement le personnage de Fresnay est caractérisé par sa grandeur, il le fait parce qu’il est profondément français ce que l’allemand ne saisit pas, lui qui n’a pas du tout ce rapport avec ses hommes. Le sacrifice de Fresnay est celui d’un homme qui a compris que son temps (c’est un aristocrate) est venu, et que l’avenir de la France est incarné par les Gabin et les Rosenthal.

    Une autre grande scène est celle où les prisonniers français entendent à la radio la nouvelle d’une défaite de l’armée française. Gabin par provocation commence à entonner la Marseillaise devant ses geôliers allemands, progressivement repris et suivi par tous ses camarades (le plan large que fait Renoir montre des figurants de tous types dont quelques noirs). Les allemands pour le punir l’isolent.

    Tout l’humanisme de Renoir est illustré dans ce classique, même si on a pu s’interroger sur le pourquoi du titre du film : à quelle illusion fait-il référence ? L’illusion de l’amitié franco-allemande ? De la paix (comme le faisait la pièce “La Guerre de Troie n’aura pas lieu” de Giraudoux qui est sortie à la même époque) ? Où est-ce que Renoir cherchait à nous dire que la fraternité française est un bien oh combien précieux mais fragile ?

    Je ne remercierai jamais assez un de mes anciens profs de français de nous avoir fait découvrir ce film à l’école, et surtout de nous l’avoir expliqué.

    Aujourd’hui qui oserait produire un film où on aurait un immigré magrébin ou noir qui lâcherait un merveilleux « Ah ce pays, tu penses bien que je vais me battre pour lui ! » comme le faisait le juif Rosenthal (qui était un membre d’une minorité dans le contexte) dans le film de Renoir ?

    Aujourd’hui on a le droit à des atroces “Indigènes” de Bouchareb ou des complètements à côté de la plaque “L’Armée du Crime” de Guédiguian, œuvres en général acclamées par la critique bobo bienpensante.

    “Indigènes” est tout ce que je déteste dans le cinéma soit disant engagé (ou plutôt engagé dans les conneries) : en plus des inexactitudes historiques que quelques historiens ont bien fait de pointer, de l’interprétation médiocre (nan mais Djamel et Sami Nacéri, au secours !) il prétend faire croire que ce sont les soldats musulmans de la Légion étrangère qui sont vaincu l’armée allemande, et distille une mentalité revancharde assez détestable. Ce film est totalement imprégné des conceptions américanistes et hollywoodiennes de l’œuvre engagée, sans parler du débarquement du pauvre façon “Il faut sauver le Soldat Ryan” (quand on n’est pas Spielberg et qu’on a pas ses moyens, on devrait éviter d’avoir les yeux plus gros que le ventre). Quant à la polémique sur les pensions non versées à des soldats magrébins qui s’étaient engagés, j’avais écouté le son de cloche des ex-responsables militaires à la retraite et été sensible à l’argument selon lequel à l’indépendance et l’émergence des Etats-Nations suite à la décolonisation, l’Etat français n’était plus responsable de ces soldats, le plus beau cadeau à leur faire était leur… liberté et la souveraineté de leur pays, biens oh combien précieux et inquantifiables financièrement parlant.

    Le film de Guédiguian est moins médiocre (déjà parce qu’il ne se prend pas pour Spielberg et qu’il est mieux joué), mais a le mauvais goût de transformer le groupe Manouchian en martyrs chrétiens luttant contre le Mal aka le Nazisme (la Passion en fond sonore, on va pas me dire que c’est le hasard). Passons également sur l’occultation totale du fait que Manouchian et ses hommes étaient des stals purs et durs (faut pas effrayer le public !).

    Que ce soit les Indigènes ou le groupe Manouchian, ces réalisateurs avaient des sujets magnifiques sur le papier, avec lesquels ils pouvaient parler de ce que signifie être français pour ces personnages d’étrangers qui se sont battus pour la France, pour une haute idée qui les a grandis. Combien une scène aussi intelligente que celle du juif Rosenthal criant son amour pour la France chez Renoir aurait pu avoir leurs équivalents chez Bouchareb et Guédiguian.
    Mais eux n’arrivent jamais à s’élever du conformisme de la pensée et de la tentation de réduire leurs personnages à des gentils VS des méchants. C’est bien Renoir qui est le plus moderne et le plus progressiste du lot !

    • Descartes dit :

      @ Bannette

      [Ce que tu dis et que développe Descartes à propos de la reconnaissance des immigrés par le pays d’accueil est essentiel, et notre hôte me le permet, j’aimerai faire une digression à propos d’un film français que j’admire : “La Grande Illusion” de Jean Renoir datant en 1937.]

      Par une drôle de coïncidence – pas si coïncidence que ça, en fait – c’est l’un de mes films préférés. L’un des plus beaux films du cinéma français, tant par l’esthétique de l’image que le jeu des acteurs. Renoir avait cette immense qualité de savoir émouvoir sans sensiblerie. Et alors qu’il n’était pas un homme engagé, il a fait très naturellement des films engagés.

      [Ce qu’il y a de remarquable, c’est la façon géniale qu’a Renoir de retourner un cliché antisémite (le juif riche et forcément usurier) pour parler des possessions de Rosenthal, là où la conversation tourne habilement autour d’une possession commune : la Patrie. Plus tard on voit d’ailleurs le personnage, qui est visiblement le plus riche du lot quand il était civil, partager les vivres que sa famille lui envoie avec ses camarades d’infortune.]

      C’est d’ailleurs l’une des premières peintures cinématographiques du juif qui ne soient pas caricaturales. Mais la chambrée des prisonniers que peint Renoir va bien plus loin, réunissant un instituteur et un ouvrier, un aristocrate et un immigré juif enrichi, un sénégalais et un ingénieur au cadastre…

      [Ce film parle très subtilement de la Nation, et la conception française de la Nation, avec le personnage de l’aristocrate Fresnay opposé à celui de l’Allemand, joué par le légendaire Erich Von Stroheim. Il y a un débat philosophe entre eux, car les 2 hommes se respectent beaucoup même s’ils sont adversaires (et par leur statut social sont sans doute très proches). On voit incarnés par les 2 acteurs l’opposition entre Fichte et Renan. L’officier allemand ne comprend pas comment un homme de qualité comme Fresnay peut considérer Gabin et Rosenthal comme d’autres que lui-même, lui qui insiste pour qu’ils mangent avec lui.]

      Effectivement, le contraste est magnifiquement exposé entre l’aristocrate allemand, dont l’aristocratie est la nation avant l’Allemagne, et l’aristocrate français pris dans le conflit entre ces deux « nations », et qui finalement choisit la France plutôt que la fidélité à sa classe.

      [Tout l’humanisme de Renoir est illustré dans ce classique, même si on a pu s’interroger sur le pourquoi du titre du film : à quelle illusion fait-il référence ?]

      Renoir, qui n’aimait pas s’engager, n’a jamais voulu donner une explication au choix du nom, disant même qu’il l’avait choisi parce qu’il ne signifiait pas grande chose. Mais on peut supposer que « la grande illusion » est bien celle d’un effacement des frontières de classe. Lorsque le film sort, deux décennies se sont écoulées depuis la première guerre mondiale. A l’unité nationale et sociale de la période de guerre a suivi un quasi-retour à la stratification sociale de l’avant-guerre, et les séquelles de la crise de 1929 n’ont rien fait pour arranger les choses, d’autant plus que le gouvernement de l’époque choisit la voie de la déflation. Lorsque Renoir fait son film, il raconte un monde déjà disparu, et qui revivra quelques années plus tard dans les combats de la Résistance.

      [Je ne remercierai jamais assez un de mes anciens profs de français de nous avoir fait découvrir ce film à l’école, et surtout de nous l’avoir expliqué.]

      Vous avez eu beaucoup de chance !

      [Que ce soit les Indigènes ou le groupe Manouchian, ces réalisateurs avaient des sujets magnifiques sur le papier, avec lesquels ils pouvaient parler de ce que signifie être français pour ces personnages d’étrangers qui se sont battus pour la France, pour une haute idée qui les a grandis. Combien une scène aussi intelligente que celle du juif Rosenthal criant son amour pour la France chez Renoir aurait pu avoir leurs équivalents chez Bouchareb et Guédiguian.]

      Ah… mais n’est pas Renoir qui veut. D’abord, Renoir a travaillé avec les meilleurs : Spaak pour les dialogues, Kosma pour la musique… et puis la finesse de la caméra de Renoir est extraordinaire. Pense à la scène de la mort de Boeldieu. A chaque fois, à la fin de la scène, je « vois » Erich von Stroheim coupant la fleur et la posant sur la poitrine de Boeldieu. Et à chaque fois je me sens « volé » lorsque la scène s’arrête au moment où il coupe la fleur. Mais la puissance d’évocation de la scène est telle qu’on reconstruit la suite avec la même précision que si on l’avait vraiment vue…

      Ce qui est extraordinaire chez Renoir, c’est que chez lui le progressisme était en quelque sorte « naturel ». Personnellement, il n’aimait pas s’engager et sa seule passion était « de faire de bons films ». C’est très naturellement et sans calcul aucun que son humanisme apparaît pourtant dans chacun de ses films.

  23. Aubert Sikirdji dit :

    Mon but n’est pas que « votre » bovard, ou « notre » Maurice soit « sanctionné » : mais nettement recadré.

  24. Anne Iversaire dit :

    @ Descartes

    Je ne sais pas si ça a un rapport avec ce billet, mais je viens de terminer l’ouvrage de D. Thomson, « les Français jihadistes » (Les Arènes, 2014). Ouvrage que j’ai trouvé très intéressant peut-être à cause de l’absence de jugement, d’affects, etc. de la part de l’auteur, ce qui permet sans doute d’avoir une vue plus « juste » du phénomène et de réfuter quelque idées reçues (« ils » se radicalisent en prison ; « ils » se radicalisent dans les mosquées ; ce sont des paumé-e-s ; « ils » ont eu une enfance malheureuse ; ce sont des chômeurs ; ce sont des cas sociaux…).
    Je suis sortie de ce livre à la fois rassurée et inquiète : inquiète parce qu’il y aura vraisemblablement d’autres attentats « de type Charlie » (commis par quelques individus déterminés, mais isolés – et donc, paradoxalement, plus difficiles à contrer qu’une « organisation ») et rassurée parce que la phénomène restera très probablement marginal.
    Ce sont d’ailleurs des constats que tu as exposés ici à plusieurs reprises, mais c’est intéressant de les voir confirmés par une sorte de petite « enquête » sociologique.
    Mais si j’écris ces quelques lignes, c’est plutôt pour pointer un curieux parallèle : il semble qu’une bonne partie des jihadistes se radicalise via Internet, par exemple lorsqu’ils tombent sur des sites, des réseaux sociaux, des vidéos, … dont le contenu leur parle, leur semble prometteur, comble en eux un vide, etc. au point qu’ils ne peuvent plus s’en passer, au point de s’y scotcher littéralement plusieurs heures par jours, avides de la prochaine vidéo de décapitation, du prochain prêche serein ou enflammé, du nouveau billet, etc. … un peu comme je le fais moi-même sur ton blog. Bien sûr, le contenu n’est heureusement pas le même, mais l’attitude est proche.
    C’est grave Docteur ?

    • Descartes dit :

      @ Anne Iversaire

      [C’est grave Docteur ?]

      Très grave. Je me demande si on ne va pas m’obliger à mettre une annonce santé du style « attention, ce blog peut générer une addiction dangereuse »… En tout cas, merci du parallèle. Je n’aurais jamais cru que mes écrits puissent provoquer un syndrôme de manque… j’aurais dit plutôt le contraire ! 😉

  25. marc malesherbes dit :

    @ banette
    “j’ai moi aussi reçu la version française de mon prénom par mes parents, qui trouvaient cela totalement normal”
    C’est très méritoire de la part de vos parents, mais il faut reconnaître que c’est beaucoup plus difficile de la part de migrants venant du sud de la Méditerranée, ou du Proche Orient. Ils ont pour la plupart des prénoms de tradition musulmane, et ils n’ont donc pas la possibilité de les franciser, sauf à complétement les abandonner.
    C’est un peu comme la couleur de la peau, le nom de famille: on y peut rien, mais c’est un marqueur d’hétérogénéité indéniable,qui va s’effacer progressivement dans le temps. Ainsi personne ne tique sur un “Sarkozy”, mais s’étonne (ou s’enthousiasme) pour une Rachida Dati, une Najat Vallaud Belkassem.

    • @ marc malesherbes,

      “mais c’est un marqueur d’hétérogénéité indéniable,qui va s’effacer progressivement dans le temps.”
      Pardon mais cela fait quatre siècles qu’en Amérique noirs, blancs et Amérindiens cohabitent, on ne peut pas dire que l’hétérogénéité “s’efface progressivement”… Chacun a veillé à conserver une identité propre. Quand on fait le choix de la diversité, c’est pour longtemps, très longtemps.

      “Ainsi personne ne tique sur un “Sarkozy””
      Je pense plutôt que personne ne tique sur “Nicolas”, mais si Sarkozy s’appelait “Hasan” ou “Muhammad”, croyez-moi, les gens ne le regarderaient pas de la même façon. Et puis Dati et Vallaud-Belkacem ne sont pas des leaders, mais des personnalités de second rang.

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [Pardon mais cela fait quatre siècles qu’en Amérique noirs, blancs et Amérindiens cohabitent, on ne peut pas dire que l’hétérogénéité “s’efface progressivement”… Chacun a veillé à conserver une identité propre. Quand on fait le choix de la diversité, c’est pour longtemps, très longtemps.]

      Je suis tout à fait d’accord. La théorie de la « dilution graduelle » ne marche de toute évidence pas. Si la société d’accueil n’exprime pas une exigence d’assimilation – et le mot « exigence » n’est pas trop fort – les spécificités communautaires peuvent se conserver pratiquement indéfiniment.

      [« Ainsi personne ne tique sur un “Sarkozy” ». Je pense plutôt que personne ne tique sur “Nicolas”, mais si Sarkozy s’appelait “Hasan” ou “Muhammad”, croyez-moi, les gens ne le regarderaient pas de la même façon.]

      Et c’est très bien qu’il en soit ainsi. Si les gens ni tiquaient pas sur Hasan ou Muhammad, qu’est ce qui pousserait les nouveaux arrivants à adopter des prénoms français ? Si l’on veut que les gens s’assimilent, il faut « tiquer » sur ceux qui ne s’assimilent pas. Autrement, l’assimilation ne peut pas fonctionner.

      [Et puis Dati et Vallaud-Belkacem ne sont pas des leaders, mais des personnalités de second rang.]

      Je pense que c’est bien pire que ça. Dans la logique « diversitaire » qui est celle de notre caste politico-médiatique aujourd’hui. Rachida et Najat deviennent non pas des handicaps, mais des atouts. Peut-être pas pour devenir président de la République, mais certainement pour devenir ministre. Si Rachida s’appelait Raymond, s’il avait les yeux bleus, la peau blanche et un père picard, il aurait eu bien moins de chance d’être ministre.

    • BolchoKek dit :

      @ Descartes et NJ

      >cela fait quatre siècles qu’en Amérique noirs, blancs et Amérindiens cohabitent, on ne peut pas dire que l’hétérogénéité “s’efface progressivement”…<
      Ce qui est frappant quand on lit des textes de juristes américains – encore plus que chez les britanniques – est à quel point la notion sous-jacente de corps social ou de société est absente. Tout au plus la “société” est considérée comme l’addition de diverses individualités.
      Dans ces conditions, il est assez déplorable que nous importions le modèle “multiculturel” américain… Peut-être marche-t-il là bas plus ou moins, mais il est profondément incompatible avec les fondements philosophiques mêmes de la société française.

      >Ainsi personne ne tique sur un “Sarkozy” ». Je pense plutôt que personne ne tique sur “Nicolas”, mais si Sarkozy s’appelait “Hasan” ou “Muhammad”, croyez-moi, les gens ne le regarderaient pas de la même façonAinsi personne ne tique sur un “Sarkozy” ». Je pense plutôt que personne ne tique sur “Nicolas”, mais si Sarkozy s’appelait “Hasan” ou “Muhammad”, croyez-moi, les gens ne le regarderaient pas de la même façon< Avouons que le choix de “Muhammad” ou de “Hasan” ne sont pas anodins… mais imaginons que Sarkozy naisse maintenant, de nos jours de parents influencés par le discours “multiculturel” qui veulent “transmettre leur héritage hongrois”, on aurait eu un “Sarkozy Miklós” ; au lieu d’un Nicolas… Je ne suis pas sûr qu’il eut été plus éligible qu’un Hasan !

    • CVT dit :

      @Descartes,
      [Si Rachida s’appelait Raymond, s’il avait les yeux bleus, la peau blanche et un père picard, il aurait eu bien moins de chance d’être ministre.]
      La vérité sort de la bouche des enfants, ou plus souvent, des imbéciles: Ségolène Royal avait déclaré, un jour, à propos de Najat Vallaud-Belkacem, qu’elle n’aurait jamais été ministre si elle s’était appelé Claudine Dupont!
      Et bien, nous y sommes! Et c’est pareille pour la prédiction de Françoise Giroud: “nous aurons atteint l’égalité entre l’homme et la femme quand celle-ci ne sera plus renvoyée pour incompétence”…
      Grâce à la diversité, ce prodige est désormais possible :-)!

    • CVT dit :

      @Marx Malesherbes,
      désolé, mais sur ce coup-là, je comprends les “Français de souche”: mes parents sont également Africains, et pourtant, j’ai un prénom FRANÇAIS, tout comme mes soeurs.
      A l’époque où je suis né, il n’y avais pas de possibilité de choisir des prénoms exotiques et/ou régionaux (les Yohenn bretons s’appelaient Joël, et les Peyo basques devaient s’appeler Pierre). Pour moi, ce n’est pas un problème, car le calendrier comportaient plus de 300 noms autorisés!
      Bref, la mode actuelle des prénoms exotiques doit plus à l’individualisme de notre époque qu’à une vraie volonté de faire partie d’une société. Et c’est d’autant plus vrai quand il s’agit des communautaristes…
      Sinon, concernant les prénoms “musulmans”, je peux comprendre, en tant que Français, au bout de trois générations, s’appeler Mohammed ait quelque chose de profondément agaçant: c’est un vrai refus d’assimilation et d’allégeance à notre pays! C’est bien beau de se dire français, encore faut-il le montrer par des gestes concrets: il y en assez de ceux qui revendiquent le droit à être Français sans se soumettre à un quelconque devoir, fusse-t-il moral! Donner un prénom français à ses enfants est une forme d’allégeance et de reconnaissance, et c’est surtout préparer leur avenir!
      Je remercie mes parents de nous avoir donné des prénoms français, et tout autre manière de faire est perçue comme suspecte, et selon moi, c’est légitime: j’ai du mal à croire que gens qui s’appellent Mamadou, Aziz ou Brandon soient français, car leur prénom les mets en porte-à-faux par rapport à la culture française…

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [Ce qui est frappant quand on lit des textes de juristes américains – encore plus que chez les britanniques – est à quel point la notion sous-jacente de corps social ou de société est absente. Tout au plus la “société” est considérée comme l’addition de diverses individualités.]

      Et surtout des communautés. Et cela vient de très loin : pensez à la Magna Carta de 1215, dont on fête ces jours-ci le neuvième centenaire. Qu’on considère comme « fondateur » des libertés un document qui marque le triomphe des « barons » locaux contre le pouvoir central n’est pas neutre. Dans le monde anglosaxon, les libertés résident dans la « communauté » locale, celle dont les membres se connaissent entre eux et se ressemblent, et la menace vient d’un Etat central lointain et arbitraire. En France, au contraire, l’Etat central s’est imposé comme la protection naturelle contre l’arbitraire et la rapacité des « barons » locaux. C’est pourquoi nos documents « fondateurs » marquent en général la victoire du pouvoir central sur les particularismes locaux, et non l’inverse.

      Ce modèle va très loin. Lorsqu’un américain a une difficulté, il cherchera appui d’abord chez les gens qui lui ressemblent par les origines, la religion, la couleur de peau. C’est pourquoi les gens tendent à se regrouper par « communautés », à vivre, travailler, se soigner et éduquer leurs enfants avec des gens qui leur ressemblent. Ce n’est pas du tout le cas en France : lorsqu’un lillois s’installe à Marseille, il ne demande pas aux autres lillois à quelle école ils envoient leurs enfants, de manière à les envoyer à la même.

      [Dans ces conditions, il est assez déplorable que nous importions le modèle “multiculturel” américain… Peut-être marche-t-il là bas plus ou moins, mais il est profondément incompatible avec les fondements philosophiques mêmes de la société française.]

      Et non seulement avec les fondements « philosophiques ». Elle est contraire aux fondements HISTORIQUES, ce qui est beaucoup plus sérieux. C’est d’ailleurs pourquoi cette « importation » atteint assez vite ses limites.

    • Descartes dit :

      @ CVT

      [désolé, mais sur ce coup-là, je comprends les “Français de souche”: mes parents sont également Africains, et pourtant, j’ai un prénom FRANÇAIS, tout comme mes soeurs.]

      Je pense que vous appartenez, comme moi, à la génération ou la machine à assimiler fonctionnait encore. Et l’assimilation implique une pression, amicale mais ferme, pour induire certains gestes, les uns symboliques, les autres pas. Comme par exemple la francisation des prénoms. On n’obligeait personne… mais les gens comprenaient le message, ce même message que les marocaines de Montpellier n’ont pas compris : si vous voulez que vos enfants aient un destin dans ce pays, il faut qu’ils soient comme les autres.

      [A l’époque où je suis né, il n’y avais pas de possibilité de choisir des prénoms exotiques et/ou régionaux (les Yohenn bretons s’appelaient Joël, et les Peyo basques devaient s’appeler Pierre). Pour moi, ce n’est pas un problème, car le calendrier comportaient plus de 300 noms autorisés!]

      La loi du 11 germinal an XI dispose que « (…) les noms en usage dans les différents calendriers, et ceux des personnages connus dans l’histoire ancienne pourront seuls être reçus, comme prénoms, sur les registres destinés à constater la naissance des enfants ; et il est interdit aux officiers publics d’en admettre aucun autre dans leurs actes. ». Cette disposition a été reprise dans le Code Civil, et est resté en vigueur jusqu’à 1966, résistant à cinq Républiques, autant de monarchies et même à l’Etat français. C’est dire si elle contentait tout le monde. En 1966 une circulaire enjoint de faire une lecture plus libérale de la loi du 11 germinal, en permettant l’intégration de certains prénoms étrangers, mythologiques ou locaux. Mais les juges continuent à appliquer assez strictement la loi jusqu’à l’arrêt de la Cour de Cassation de 1981 qui constate que dans l’absence d’une liste officielle des « calendriers » admissibles, il est difficile de refuser un prénom sauf lorsqu’il serait « ridicule ». Mais ce n’est en 1993 que toute restriction disparaît, permettant aux parents un choix souverain.

      [Bref, la mode actuelle des prénoms exotiques doit plus à l’individualisme de notre époque qu’à une vraie volonté de faire partie d’une société. Et c’est d’autant plus vrai quand il s’agit des communautaristes…]

      C’est une observation très intéressante. Pendant des siècles, le prénom – et le nom – qu’on donnait à un enfant était un moyen de l’inscrire dans une lignée. Beaucoup d’immigrés donnaient à leurs enfants les prénoms « France » ou « François » pour marquer leur allégeance au pays d’accueil, et dans les familles « de souche » on tendait à perpétuer certains prénoms en les répétant de génération en génération. Mais vint l’idéologie « libérale-libertaire », et la logique s’est inversée : il fallait que l’individu se fasse de lui-même, et cela suppose au contraire la rupture de toute filiation. C’est le cas aujourd’hui pour le prénom, mais aussi pour le nom – puisqu’on peut choisir celui du père, de la mère ou les accoler. Et au delà, on le voit aussi dans les réformes de l’institution familiale, qui à travers de la GPA, de l’adoption par les couples homosexuels, de la PMA est en train de liquider toute logique de filiation.

      [Sinon, concernant les prénoms “musulmans”, je peux comprendre, en tant que Français, au bout de trois générations, s’appeler Mohammed ait quelque chose de profondément agaçant: c’est un vrai refus d’assimilation et d’allégeance à notre pays!]

      Mais l’allégeance a-t-elle toujours un sens ? En quoi s’appeler « Kevin » est-il moins « agaçant » que de s’appeler « Mohammed » ? Exiger dans le cadre de l’assimilation que les immigrés appellent leurs enfants de prénoms « français » avait un sens du temps ou les français eux-mêmes donnaient à leurs enfants des prénoms français. Mais dès lors que les français eux-mêmes appellent leurs enfants « Kevin » – quand ils ne les appellent pas « Clafoutis » – pourquoi exiger des nouveaux venus quelque chose que les « souchiens » ne font plus ?

      Je ne crois pas que le fait d’appeler « Mohammed » son fils soit un signe de refus d’assimilation. Je pense plutôt que c’est une réaction à l’anomie du pays d’accueil. Les immigrés sont, et c’est normal, bien plus conservateurs que les français. Ils tiennent à inscrire leurs enfants dans une filiation. Or, le pays d’accueil ne leur offre plus, comme il le faisait il y a trente ou quarante ans, la possibilité d’adhérer à une filiation symbolique. On ne leur fait plus dire « nos ancêtres les gaulois ». Il est donc normal qu’ils prolongent la filiation traditionnelle, puisqu’on ne leur propose rien d’autre.

      [C’est bien beau de se dire français, encore faut-il le montrer par des gestes concrets: il y en assez de ceux qui revendiquent le droit à être Français sans se soumettre à un quelconque devoir, fusse-t-il moral! Donner un prénom français à ses enfants est une forme d’allégeance et de reconnaissance, et c’est surtout préparer leur avenir!]

      Il faudrait peut-être le dire aux français « de souche » qui appellent leurs enfants « Kevin »…

    • BolchoKek dit :

      >Mais ce n’est en 1993 que toute restriction disparaît, permettant aux parents un choix souverain.<
      Ce qui est complètement irresponsable, puisque cela revient à laisser les enfants à la merci de la stupidité, de l’illetrisme ou des goûts affreux des parents. Franchement, vous imaginez dans vingt ans une “Jouly Annn” soutenir une thèse ? Un “Matthyyyss” être professeur agrégé ? Je porte moi-même un prénom ridicule, je sais de quoi je parle.
      Enfin, j’alterne entre l’exaspération et l’amusement concernant ces prénoms “originaux”… Un blog pour se faire une idée :
      http://liguedesofficiersdetatcivil.tumblr.com
      Personnellement, je trouve qu’il aurait été criminel de se priver d’un “Aboubacar-Jacky”

    • @ Bolchokek,

      “Avouons que le choix de “Muhammad” ou de “Hasan” ne sont pas anodins…”
      J’avais choisi “Hasan” et “Muhammad” en écho à Rama Yade et Rachida Dati qui portent plutôt des prénoms issus de la culture islamique. Mais je pense qu’il en irait de même avec “Slobodan” ou “Bikramjit”.

      @ Descartes,

      “Il faudrait peut-être le dire aux français « de souche » qui appellent leurs enfants « Kevin »…”
      Tout à fait. Et je serais assez favorable, à titre personnel, pour qu’on rétablisse un référentiel de prénoms autorisés, avec une orthographe codifiée. Et notamment qu’on impose aux parents de toujours adopter la forme française d’un prénom quant elle existe.

    • morel dit :

      Les prénoms donnés par les parents sont des « marqueurs d’identité ». Dans la tradition, ils s’inscrivaient en filiation, ex : prénoms de grands-parents redonnés aux petits enfants.
      Le poids de la tradition s’affaiblissant (et celle-ci française ou étrangère peut être aussi tyrannique que la mode), le « choix » s’est élargi.

      Parallèlement, les effets de la renaissance patriotique suite à la dernière guerre mondiale se sont estompés. De grands esprits désintéressés nous ont fait comprendre combien nous étions « moisis » avec nos idées datant de l’époque des Lumières (ça tombait bien, c’était l’époque du bing bang « néolibéral » qui avait besoin d’imposer la loi du renard dans le poulailler sous la forme plus policée de « concurrence libre et non faussée »). Il fallait donc s’ouvrir au vaste monde comme si, aveugles et sourds, nous vivions auparavant en totale autarcie, hors de tous échanges économiques ou plus.
      Ceux qui formulaient des objections, étaient quasi suspects de racisme ou de passéisme.
      Les nations étaient bien entendu dépassées, discours assez curieux et contradictoire avec la réalité qui voyait se multiplier le nombre d’états jusques et y compris des états inviables ou injustifiés comme le Kosovo pourtant reconnus par les mêmes. Et s’il ne s’agit pas de cette dernière catégorie, réfléchissez, par exemple, à l’émergence de l’état algérien surgi en peu de temps et s’adossant à quelle réalité dans l’histoire ? Je précise : l’indépendance algérienne est légitime, la question n’est pas là et le nationalisme algérien est vivace ; il n’est pas le seul, voyez les Turcs etc…

      L’on peut être partisan de la Nation sans être nationaliste (trop maurassien) parce que tenir à un style de vie, à un patrimoine, à des acquis de l’humanité en matière sociale, laïque, démocratique et aussi vouloir aller plus loin dans cette direction.

      Dans certaines conditions, l’habit fait le moine. Le cœur rouge surmonté d’une croix du chouan signifiait la volonté de retour à la soumission de l’ancien régime. Conscient ou non, la « tenue islamique » ne peut qu’envoyer ce type de message, surtout en relation avec l’actualité mondiale, ne le comprennent-elles pas ?

      Les prénoms peuvent être symptomatiques mais pas le plus important.
      Une amie instit s’amusait des prénoms « redoutés » lors de répartition d’effectifs de classe notamment les Dylan, Bryan, Ryan (orthographiés dilane, brayane, rayane) dans des quartiers populaires donnés y compris par des descendants d’immigrés.

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [Ce qui est complètement irresponsable, puisque cela revient à laisser les enfants à la merci de la stupidité, de l’illetrisme ou des goûts affreux des parents. Franchement, vous imaginez dans vingt ans une “Jouly Annn” soutenir une thèse ? Un “Matthyyyss” être professeur agrégé ? Je porte moi-même un prénom ridicule, je sais de quoi je parle.]

      Et s’il n’y avait que le prénom… Que voulez-vous, on demande un permis pour conduire une voiture, mais avoir des enfants est l’une des rares choses qu’on puisse faire sans avoir à démontrer la moindre compétence. Je vois mal comment on pourrait faire autrement. Entre parenthèses, la loi française permet de changer de prénom lorsque celui-ci est ridicule.

    • Descartes dit :

      @ morel

      [Le poids de la tradition s’affaiblissant (et celle-ci française ou étrangère peut être aussi tyrannique que la mode), le « choix » s’est élargi.]

      Je ne suis pas sûr que ce soit seulement une question de poids de la tradition. On est passé d’une civilisation ou l’individu se considérait comme un produit historique, ayant des responsabilités vis-à-vis des générations passées comme des générations à venir, à une civilisation ou l’individu se produit de lui-même, et n’a à être reconnaissant envers personne. Le choix de prénoms qui non seulement sont « nouveaux » dans la famille mais qui sont tout simplement inventés – et donc uniques – vient de ça.

  26. leucace dit :

    Ne peut on pas imaginer un conflit entre notre récit national,de souchiens et le récit national,de ces Samia,Fatima,Haifa,Khadija,venues d’une algérie indépendante,il y a une,deux ou trois générations?
    De façon paranoäque,ne peut on pas imaginer chez elle,une volonté de ne pas s’intégrer ou s’assimiler voire d’imposer leur culture?
    Un petit peu comme la colonisation (pour laquelle leur attitude actuelle pourrait être considérée comme une revanche),un règlement de compte?
    Car aprés tout,elles savent parfaitement que leur attitude fait sur-réagir.
    Pourtant,elles ne changent pas.
    Peut être par une gageure ,une sorte de revanche colonisatrice,à l’envers!
    Histoire de faire encore plus mal à ceux qui redoutent le ‘grand remplacement’.
    Auqels cas ces paranoïaques doivent être particulièrement irrités par ce type d’attitude.
    Tant pis,personne ne peut plaire à tout le monde?
    Ainsi Sarkozy ,depuis le terrifiant fiasco Lybien,est honnis des gouvernements Algériens et Tunisiens.
    Hollande est lui,tellement apprécié que ,heureusement,les relations entre services secrets français et algériens sont au beau fixe.
    Certains commentateurs pensent que Hollande essaie de conserver son avantage dans l’électorat ‘maghrébin’ pour 2017,puisqu’en 2012,75% des ‘algériens’ avaient voté pour lui.
    Les récents sondages,confirment,l’avantage écrasant de Hollande dans cet électorat.
    Tant mieux car je trouve la position de Hollande plus équilibrée que celle des indécrottables algérie française qui pullulent au FN et chez LR.
    Peut être qu’en favorisant les apaisements,Samia,Fatima,Haifa,Khadija,changeront d’attitude,et s’intégreront plus ?

    • Descartes dit :

      @ leucace

      [Ne peut on pas imaginer un conflit entre notre récit national, de souchiens et le récit national, de ces Samia,Fatima, Haifa, Khadija, venues d’une algérie indépendante, il y a une, deux ou trois générations?]

      D’abord, Samia, Fatima, Haifa et Khadija viennent du Maroc, et non de l’Algérie. Ensuite, si ces femmes adhéraient au « récit national » marocain, on se demande bien pourquoi elles veulent que leurs enfants soient « des français comme les autres ». Non, justement le problème de ces populations c’est qu’ils n’ont pas de « récit national » auquel adhérer. Elles ont rompu avec leur « nation » d’origine, mais n’arrivent pas à s’assimiler à la « nation » d’accueil. D’où une crise identitaire qui les pousse à aller se chercher des « racines » idéalisées dans l’intégrisme religieux et communautaire.

      [De façon paranoïaque, ne peut on pas imaginer chez elle, une volonté de ne pas s’intégrer ou s’assimiler voire d’imposer leur culture?]

      De façon paranoïaque, on peut tout imaginer. Mais je ne suis pas trop sensible à ce genre de discours de « guerre des civilisations ». Je ne pense pas qu’il y ait chez ces femmes une « volonté » de refuser l’assimilation, et encore moins d’imposer leur culture. Simplement, l’assimilation n’est jamais volontaire. Elle nécessite un grand effort, et pour que cet effort se fasse il faut une pression de la société d’accueil. Ces femmes ne s’assimilent pas parce que personne ne leur demande de s’assimiler.

      [Peut être qu’en favorisant les apaisements, Samia, Fatima, Haifa, Khadija, changeront d’attitude,et s’intégreront plus ?]

      L’expérience des trente dernières années montre que « favoriser l’apaisement » ne fait que renforcer le communautarisme. L’assimilation doit être une obligation, et non un choix.

  27. J’ai très honnêtement envie de répondre à ces femmes voilées: je n’ai pas envie d’être votre voisin et je n’ai aucune envie que mes enfants fréquentent les vôtres. J’irai même beaucoup plus loin: je ne souhaite pas vous compter parmi mes compatriotes, ni parmi les habitants de ce pays. Enseignant depuis quelques années maintenant, j’ai eu le loisir d’observer le comportement détestable de beaucoup de jeunes “de culture musulmane”. Pas tous, mais beaucoup. Leur identité islamique (souvent concomitante à une ignorance crasse de l’islam et de sa civilisation, mais passons), ils la portent en bandoulière. Et tout le monde s’écrase, faut pas braquer les familles, faut vivre avec son temps, l’époque est à la diversité.

    Porter le voile ne viole pas la loi, et il me paraît difficile de l’interdire sans porter atteinte aux libertés fondamentales. Les gens ont le droit d’afficher leur religion dans l’espace public. Disons que l’évolution des mentalités a fait que la bienséance incite la plupart des gens à se montrer discrets dans la rue. Beaucoup de Français, dont je suis, n’ont tout simplement pas envie d’emmerder les autres avec leurs croyances, parce que cela relève de la sphère privée d’une part, et d’autre part on est en droit de se dire que Dieu sonde plutôt les coeurs que la longueur des voiles et des barbes. Mais Safia, Fatima et cie, elles, comme beaucoup de musulman-e-s (on va faire comme dans les textes du fdg) ont décidé de nous emmerder avec leur religion et, à travers leurs choix vestimentaires et leurs interdits alimentaires, ce sont elles qui créent la ségrégation dont elles se plaignent. Et quand des gens vous emmerdent, vous n’avez pas envie de les fréquenter, vous les évitez, vous partez comme l’a rappelé Descartes.

    La question que pose l’islam tel qu’il est pratiqué de nos jours dépasse de très loin les questions de laïcité et de “vivre-ensemble”. La question est d’abord interne à l’islam: qu’est-ce que l’islam aujourd’hui? Ce n’est pas l’islam de l’âge d’or médiéval, ce n’est plus l’islam des écrivains, des poètes, des bâtisseurs du dôme du rocher ou des merveilles de Cordoue, de Grenade & de Damas. Ce n’est plus cet islam exotique, fascinant, sujet des peintres orientalistes, religion d’un Orient mystérieux, raffiné, non dénué d’érotisme, un Orient où il fait bon vivre. Il y a un siècle encore, les wahhabites étaient considérés comme une secte à la limite de l’hérésie. Leur islam passait pour barbare, et juste bon pour des bédouins mal dégrossis, incultes, tout droit sortis de la fournaise du Nejd. Aujourd’hui, le wahhabisme et son rejeton, le salafisme, tendent à devenir les références de l’islam contemporain. Cela ne veut pas dire que tous les musulmans sont devenus wahhabites ou salafistes, mais ces derniers, bien que minoritaires, ont acquis une influence considérable sur l’ensemble des musulmans, et les “modérés”, même lorsqu’ils se défendent de tout extrémisme, tendent de plus en plus à adopter les codes des intégristes.

    Derrière le voile de ces femmes qui réclament, hypocritement à mon avis (car le voile enferme, il n’est pas un signe d’ouverture, arrêtons de nous raconter des histoires, de nous voiler la face si j’ose dire), la mixité, il y a un choix de société. Et, pour moi, l’islam est synonyme de tristesse. J’habite à deux pas d’un quartier où les musulmans sont nombreux. Je peux vous dire (et je pense que beaucoup peuvent témoigner de la même évolution) que nous sommes bien loin du banal foulard des années 80. Aujourd’hui, je vois de plus en plus de femmes avec des voiles noirs, doublés, vêtues de longues robes noires ou grises. Ce que nous prépare cet islam, au-delà des questions de violence, d’égalité des sexes, de laïcité, c’est une société terriblement terne, terriblement triste et déprimante. Une société dans laquelle l’élégance féminine, la beauté des femmes n’a plus sa place dans les rues. Une société où tout sera gris ou noir. Une société où l’apéro est un sacrilège, où la consommation de charcuterie est une offense à Dieu. Une société sans humour, sans théâtre, sans opéra. Je n’ai nulle envie de vivre dans cette société, et je refuse que ce type de société fasse souche sur le sol de ma patrie. Je serais désolé que mes ancêtres se soient battus, aient versé tant de sang et de sueur pour que la France devienne une terre austère, où le rire est interdit, où l’on tue les caricaturistes. La France n’est pas faite pour le puritanisme, contrairement aux pays anglo-saxons par exemple.

    Bien sûr ces femmes sont libres de porter le voile. Mais, moi aussi, je suis libre. Libre de vouloir continuer à contempler les cheveux des femmes soulevés par le vent, libre d’admirer la beauté des femmes dans nos rues, à la terrasse de nos cafés. Et je ne suis pas un pervers, ni un violeur. Quand je parle de contempler la beauté des femmes, je ne pense pas à mal, je ne suis pas un porc lubrique. Je respecte les femmes, autant sinon plus que les tartuffes qui veulent les voir voilées. Mais je trouve que les femmes méritent mieux que les vêtements vulgaires ou la tenue islamique. La décence n’exclut pas l’élégance, la sensualité, un certain érotisme subtilement distillé. L’idée que demain 10 % et dans quelques décennies peut-être un quart ou un tiers des femmes de France s’habilleront comme des Saoudiennes m’est insupportable. Non, je n’ai pas envie que mes enfants vivent dans un monde où la beauté des femmes est cachée. Ce serait les priver d’un spectacle trop merveilleux, qui inspire peintres, sculpteurs, poètes, cinéastes, depuis des siècles.

    C’est pourquoi je ne suis pas d’accord avec Manuel Valls quand il dit que “l’islam est en France pour y rester”. Eh bien! Vu ce qu’est devenu l’islam à notre époque, je pense que la France va respirer le bonheur et la joie de vivre dans quelques décennies. Non, l’islam tel qu’il est ne doit pas s’implanter sur notre sol. A Safia, Fatima, etc, je dis ceci: le monde est vaste, les pays musulmans ou communautaristes, ce n’est pas ce qui manque sur Terre. Partez d’ici. Vous voulez vivre en musulmanes assumées? C’est votre droit, mais allez vivre en terre d’islam dans ce cas. La France n’a pas besoin de l’islam ni des musulmans.

    J’invite tous les Français qui veulent préserver un pays où il fait bon vivre à ne pas se résigner à la présence des musulmans sur notre sol. Il n’y a aucune fatalité. Des raisons précises ont amené des populations musulmanes à s’installer en France. Demain, des raisons différentes peuvent les amener à faire leurs bagages et à partir. Il faut en finir avec le discours: “ah ben, les migrations, ça fait partie de la mondialisation, on n’y peut rien, faut s’accommoder de ces gens-là”. Si on ne peut rien faire, autant se convertir tout de suite…

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [J’ai très honnêtement envie de répondre à ces femmes voilées: je n’ai pas envie d’être votre voisin et je n’ai aucune envie que mes enfants fréquentent les vôtres.]

      Moi je réponds quelque chose de différent : je leur dis « donnez moi envie d’être votre voisin, donnez moi envie que mes enfants fréquentent les vôtres ». Et j’ajouterais : « si vous n’êtes pas capable de le faire, mieux vaut partir dans un pays ou vous pourrez vivre conformément à votre tradition ». Dire autre chose, c’est trahir la vocation assimilationniste de la France, si importante dans la construction de notre histoire.

      [J’irai même beaucoup plus loin: je ne souhaite pas vous compter parmi mes compatriotes, ni parmi les habitants de ce pays. Enseignant depuis quelques années maintenant, j’ai eu le loisir d’observer le comportement détestable de beaucoup de jeunes “de culture musulmane”. Pas tous, mais beaucoup. Leur identité islamique (souvent concomitante à une ignorance crasse de l’islam et de sa civilisation, mais passons), ils la portent en bandoulière. Et tout le monde s’écrase, faut pas braquer les familles, faut vivre avec son temps, l’époque est à la diversité.]

      Ne rejetons pas sur les rejetons de l’immigration les fautes des autres, et d’abord de nos chères « classes moyennes ». Ce sont elles qui ont cassé la machine à assimiler, cette machine qui a transformé tant de gens « de culture étrangère » en bons français au cours de notre histoire.

      [Ce n’est pas l’islam de l’âge d’or médiéval, ce n’est plus l’islam des écrivains, des poètes, des bâtisseurs du dôme du rocher ou des merveilles de Cordoue, de Grenade & de Damas. Ce n’est plus cet islam exotique, fascinant, sujet des peintres orientalistes, religion d’un Orient mystérieux, raffiné, non dénué d’érotisme, un Orient où il fait bon vivre. (…) Aujourd’hui, le wahhabisme et son rejeton, le salafisme, tendent à devenir les références de l’islam contemporain.]

      Tout à fait. Parce que les héritiers de cet Islam cultivé et raffiné se sont sécularisés à l’image d’un Salman Rushdie. C’est un peu la même chose que le catholicisme : les catholiques modérés se sont sécularisés, et il n’y a que dans les régions les plus fermées, les plus arriérées qu’on trouve un catholicisme intégriste vraiment vivace…

      [Derrière le voile de ces femmes qui réclament, hypocritement à mon avis (car le voile enferme, il n’est pas un signe d’ouverture, arrêtons de nous raconter des histoires, de nous voiler la face si j’ose dire), la mixité, il y a un choix de société.]

      Il est vrai que l’un des dogmes gauchistes est que les colonisés sont par définition ouverts, tolérants, fraternels alors que les colonisateurs sont au contraire fermés et intolérants… et du coup on trouve des gauchistes qui font l’apologie du voile, qui devient une sorte de symbole de la liberté de choix. C’est bien entendu, ridicule.

      [Et, pour moi, l’islam est synonyme de tristesse. J’habite à deux pas d’un quartier où les musulmans sont nombreux. Je peux vous dire (et je pense que beaucoup peuvent témoigner de la même évolution) que nous sommes bien loin du banal foulard des années 80. Aujourd’hui, je vois de plus en plus de femmes avec des voiles noirs, doublés, vêtues de longues robes noires ou grises.]

      Vous avez tout à fait raison. A fur et à mesure que la pression assimilatrice s’est relâchée, une population s’est trouvée coincée dans une espèce de vide, ni tout à fait dans le pays d’origine, ni tout à fait dans le pais d’accueil. Il a fallu se trouver une identité, et on l’a trouvé dans la tradition la plus rigoriste et la plus rétrograde. Mais la faute n’incombe pas tout à fait à ces populations, mais plutôt à une France qui a cessé d’assimiler.

      [Ce que nous prépare cet islam, au-delà des questions de violence, d’égalité des sexes, de laïcité, c’est une société terriblement terne, terriblement triste et déprimante. Une société dans laquelle l’élégance féminine, la beauté des femmes n’a plus sa place dans les rues. Une société où tout sera gris ou noir. Une société où l’apéro est un sacrilège, où la consommation de charcuterie est une offense à Dieu. Une société sans humour, sans théâtre, sans opéra.]

      Je trouve votre analyse très juste. J’ajouterais qu’en fermant la porte de l’assimilation, nous avons coupé ces populations de toutes ces conquêtes, ces inventions, ces créations qui rendent la vie plus agréable. Et ces populations ont fait de nécessité vertu, en proclamant qu’il n’y a pas de plus haut privilège que de vivre dans cette tristesse.

      [Je n’ai nulle envie de vivre dans cette société, et je refuse que ce type de société fasse souche sur le sol de ma patrie. Je serais désolé que mes ancêtres se soient battus, aient versé tant de sang et de sueur pour que la France devienne une terre austère, où le rire est interdit, où l’on tue les caricaturistes. La France n’est pas faite pour le puritanisme, contrairement aux pays anglo-saxons par exemple.]

      Là encore, je vous rejoins. Et je trouve d’ailleurs que votre formulation permet d’éviter toute accusation de racisme. Ce n’est pas « christianisme vs. Islam », c’est le droit de rire, de plaire, de séduire, d’aimer, qu’on défend.

      [J’invite tous les Français qui veulent préserver un pays où il fait bon vivre à ne pas se résigner à la présence des musulmans sur notre sol. Il n’y a aucune fatalité. Des raisons précises ont amené des populations musulmanes à s’installer en France. Demain, des raisons différentes peuvent les amener à faire leurs bagages et à partir. Il faut en finir avec le discours: “ah ben, les migrations, ça fait partie de la mondialisation, on n’y peut rien, faut s’accommoder de ces gens-là”. Si on ne peut rien faire, autant se convertir tout de suite…]

      Mais si, on peut faire : on peut a-si-mi-ler. Sans faire partir ces populations, on peut les changer, comme on a changé d’autres dans le passé.

    • @ Descartes,

      “je leur dis « donnez moi envie d’être votre voisin, donnez moi envie que mes enfants fréquentent les vôtres ».”
      Que mettez-vous exactement derrière cette injonction? Concrètement, demandez-vous à ces femmes de retirer leurs voiles, de ne plus manger hallal, de consommer du cochon? Que devraient-elles faire précisément pour vous “donner envie” d’être leur voisin?

      “Ne rejetons pas sur les rejetons de l’immigration les fautes des autres, et d’abord de nos chères « classes moyennes ».”
      Les torts sont largement partagés. Les attentats de janvier auraient pu entraîner une prise de conscience pour les musulmans. Ils auraient pu se rendre compte qu’en affichant ostensiblement leur religion, ils creusaient eux-mêmes le fossé qui les sépare des autres Français. Las! L’islam s’affiche toujours aussi provoquant. Des élèves ont fait des demandes de tiers temps aux examens du brevet et du baccalauréat “pour cause de ramadan”, ce dernier étant aussi prétexte à sécher les cours d’éducation physique et sportive. Alors je veux bien que la France, les classes moyennes et tutti quanti aient leur part de responsabilité, mais je vous signale que votre démonstration, par certains aspects, ravale aussi ces populations au rang de victimes. Mais, au lieu d’être victimes de racisme et de discrimination, elles deviennent pour vous victimes du renoncement de la France et de l’idéologie des classes moyennes.

      “Dire autre chose, c’est trahir la vocation assimilationniste de la France, si importante dans la construction de notre histoire.”
      Pour moi, la France n’a pas de “vocation assimilationniste” particulière. L’assimilation correspond à un moment de l’histoire de France, celle d’une France impériale, grosso modo la France qui va de la Révolution et de Napoléon 1er à celle de l’expansion coloniale sous la III° République. Or le bilan de cette France impériale est plus contrasté que vous l’affirmez: l’empire napoléonien s’est effondré, l’Europe n’est pas devenu française, les colonies ont choisi l’indépendance. La France a assimilé des juifs d’Algérie, des Italiens, des Espagnols, des Polonais (et pas tous, il faut le rappeler, de nombreux Italiens sont repartis dans les années 30 par exemple) mais elle n’a pas assimilé les Maghrébins, les Indochinois et les Subsahariens. Aujourd’hui, la page de l’empire est tournée. Pour relancer l’assimilation, il faudrait déjà que la France retrouve une ambition géopolitique, une volonté de puissance, un projet de grandeur. Il faudrait également une situation économique bien meilleure. On en est loin. Pour assimiler, il faut être sûr de sa propre identité. Or plus grand monde ne sait ce que signifie “être Français”.

      “cette machine qui a transformé tant de gens « de culture étrangère » en bons français au cours de notre histoire.”
      Oui, enfin l’immigration n’est devenue un phénomène de masse qu’au cours du XIX° siècle, et plutôt vers la fin. La “machine” a marché un siècle, plutôt bien en métropole, assez mal dans les colonies, il faut le rappeler. Et durant des périodes d’expansion militaire et/ou économique. Or nous sommes confrontés à des difficultés économiques durables et il n’y a plus de territoire à conquérir.

      “Mais la faute n’incombe pas tout à fait à ces populations, mais plutôt à une France qui a cessé d’assimiler.”
      Encore une fois la France n’assimile pas parce qu’elle n’a plus ni projet collectif ni perspectives économiques intéressantes à offrir, y compris à certains natifs… De surcroît, je suis très réticent à l’idée d’assimiler les enfants et les petits-enfants de ceux qui ont opté pour l’indépendance vis-à-vis de la France il y a près d’un demi-siècle. Un divorce est un divorce, et je n’aime guère le rabibochage. Accueillir aujourd’hui des Maghrébins et des Subsahariens, c’est un peu comme revenir sur la loi de séparation des Eglises et de l’Etat. On ne refait pas l’histoire, vous le savez. Au nom de quoi devrions-nous accorder une seconde chance aux descendants de colonisés?

      “Ce n’est pas « christianisme vs. Islam »”
      Absolument. Je ne dénonce pas, et n’ai jamais dénoncé l’islam au nom du christianisme, mais au nom de la civilisation française, qui allie à une tradition chrétienne (d’ailleurs multiple) d’autres traditions (athée, juive, agnostique, anticlérical…). Si par ailleurs il m’arrive de défendre le christianisme, et tout particulièrement le catholicisme, c’est dans un autre cadre que le débat sur l’unité nationale. Je ne suis pas un croisé.

      “on peut a-si-mi-ler. Sans faire partir ces populations, on peut les changer, comme on a changé d’autres dans le passé”
      Pour assimiler, il faudrait que la France retrouve un rayonnement qu’elle a progressivement laissé s’étioler depuis plus d’une trentaine d’années. Cela ne se fera pas d’un claquement de doigt et pendant que nous parlons, les immigrés continuent à venir et le communautarisme se structure avec, le cas échéant, le soutien de pays étrangers. Et, encore une fois, nous parlons de populations que nous n’avons pas su assimiler du temps de notre grandeur. Par quel miracle réussir cette assimilation à présent que nous ne sommes plus qu’une “puissance moyenne”?

    • Descartes dit :

      @ nationalistejacobin

      [« je leur dis « donnez moi envie d’être votre voisin, donnez moi envie que mes enfants fréquentent les vôtres ».][Que mettez-vous exactement derrière cette injonction? Concrètement, demandez-vous à ces femmes de retirer leurs voiles, de ne plus manger hallal, de consommer du cochon? Que devraient-elles faire précisément pour vous “donner envie” d’être leur voisin?]

      Cette injonction recouvre d’abord un principe général : l’acceptation, l’estime, le respect ne sont pas un dû. La loi donne à une femme – ou à un homme d’ailleurs – le droit de marcher voilée dans la rue. Je suis donc tenu de m’abstenir de lui arracher son voile. Mais la loi ne peut m’obliger à lui adresser la parole, à la laisser rentrer chez moi, ni même à avoir du respect pour elle. Si ces femmes veulent plus que le droit de porter le voile, si elles veulent que je sois leur voisin, que j’envoie mes enfants à la même école que les leurs, il leur faut faire un effort. Rien que cette prise de conscience serait déjà un grand pas. Je me rappelle d’une réponse que j’avais trouvé extraordinaire d’un participant à l’un de ces débats sur la « diversité » : en réponse à une intervention qui se finissait par la traditionnelle injonction de « s’ouvrir à l’autre », il avait noté que pour la femme voilée, « l’autre », c’est nous.

      Après, en quoi peut consister « l’effort » en question ? Cela peut beaucoup varier selon le lieu et le contexte. Enlever leur voile – ou le remplacer par un simple foulard coloré ou interdire à ses enfants de parler arabe en cours de récréation me paraît de bons débuts. Par contre, je n’insisterais pas sur le fait de ne pas manger Halal ou consommer du cochon. Ce sont là des choix privés et je suis attaché à la liberté de chacun dans la sphère privée. Par contre, exiger de la nourriture Halal dans la cantine scolaire…

      [Les torts sont largement partagés. Les attentats de janvier auraient pu entraîner une prise de conscience pour les musulmans. Ils auraient pu se rendre compte qu’en affichant ostensiblement leur religion, ils creusaient eux-mêmes le fossé qui les sépare des autres Français. Las! L’islam s’affiche toujours aussi provoquant.]

      Je ne suis pas d’accord avec vous. On peut estimer insuffisante la prise de conscience qui a suivi les attentats, mais elle me semble pourtant indéniable. Les discours victimistes dénonçant la soi-disant « islamophobie » se sont beaucoup calmés, et je remarque autour de moi qu’un certain nombre de revendications communautaires se font plus discrètes.

      [Des élèves ont fait des demandes de tiers temps aux examens du brevet et du baccalauréat “pour cause de ramadan”, ce dernier étant aussi prétexte à sécher les cours d’éducation physique et sportive.]

      Et quelle a été la réponse de l’Education nationale ?
      Je pense qu’il ne faut pas faire de confusion : d’un côte on trouve de véritables revendications « communautaristes » ; d’un autre il y a des adolescents qui « testent » les limites de l’institution, voire se cherchent des prétextes pour sécher les cours. On ne traite pas les deux problèmes de la même manière. Aux adolescents, il faut savoir dire « non », et l’institution doit marquer son autorité et les lignes rouges à ne pas franchir.

      [Alors je veux bien que la France, les classes moyennes et tutti quanti aient leur part de responsabilité, mais je vous signale que votre démonstration, par certains aspects, ravale aussi ces populations au rang de victimes. Mais, au lieu d’être victimes de racisme et de discrimination, elles deviennent pour vous victimes du renoncement de la France et de l’idéologie des classes moyennes.]

      Oui, tout a fait. Si je rejette l’idéologie « victimiste » qui veut que toute la faute incombe à la société, je rejette tout autant l’excès inverse, qui ferait de l’individu le seul responsable de ses difficultés. Bien sûr, ces populations pourraient faire plus d’efforts, et il faut les exiger d’eux. Mais sans une véritable pression assimilatrice, c’est illusoire.

      [Pour moi, la France n’a pas de “vocation assimilationniste” particulière. L’assimilation correspond à un moment de l’histoire de France, celle d’une France impériale, grosso modo la France qui va de la Révolution et de Napoléon 1er à celle de l’expansion coloniale sous la III° République.]

      Nous sommes en désaccord sur ce point. Je pense au contraire que l’assimilation est une constante de notre histoire. Elle se manifeste d’abord sous la forme d’une « assimilation intérieure », lorsque les rois de France ne se contentent pas d’incorporer des territoires à leur royaume, mais cherchent à en uniformiser la langue, le droit et l’administration. En Grande Bretagne, le pays de Galles ou l’Ecosse sont incorporés à la couronne d’Angleterre tout en restant des Etats séparés. Vous ne trouverez pas d’équivalent de l’édit de Villers-cotterêts en Grande Bretagne, dans l’Empire Germanique, en Espagne.

      [Or le bilan de cette France impériale est plus contrasté que vous l’affirmez: l’empire napoléonien s’est effondré, l’Europe n’est pas devenu française, les colonies ont choisi l’indépendance.]

      Oui, mais vous savez bien que l’histoire ne revient pas en arrière. L’empire napoléonien a eu beau s’effondrer, il a laissé derrière lui des traces puissantes. Pourquoi croyez-vous que le personnage fascine autant encore aujourd’hui ? Pour en donner qu’un exemple, regardez quels sont les pays qui ont aujourd’hui un Code Civil…

      [La France a assimilé des juifs d’Algérie, des Italiens, des Espagnols, des Polonais (et pas tous, il faut le rappeler, de nombreux Italiens sont repartis dans les années 30 par exemple) mais elle n’a pas assimilé les Maghrébins, les Indochinois et les Subsahariens.]

      C’est très discutable. Les indochinois qui sont venus en métropole sont aujourd’hui parfaitement assimilés. C’est le cas aussi de beaucoup de maghrébins mais aussi de pas mal de subsahariens.

      [Aujourd’hui, la page de l’empire est tournée. Pour relancer l’assimilation, il faudrait déjà que la France retrouve une ambition géopolitique, une volonté de puissance, un projet de grandeur. Il faudrait également une situation économique bien meilleure. On en est loin. Pour assimiler, il faut être sûr de sa propre identité. Or plus grand monde ne sait ce que signifie “être Français”.]

      Nous sommes d’accord. On ne peut assimiler si on ne s’aime pas soi même – et s’aimer implique de savoir ce que l’on est, et en quoi on est différent des autres, et qu’est ce qu’on a envie de faire de tout cela. Et on revient à la problématique des classes moyennes, parce que ce sont les couches les plus réfractaires à la « grandeur » et les plus enclines à se réfugier dans leur « ça m’suffit ».

      [Oui, enfin l’immigration n’est devenue un phénomène de masse qu’au cours du XIX° siècle, et plutôt vers la fin.]

      Ne négligez pas l’assimilation intérieure. En 1850, la distance en termes de niveau de vie et de mentalité entre le paysan du Finisterre et le titi parisien était aussi grande que l’est aujourd’hui celle qui sépare l’immigré du français moyen…

      [La “machine” a marché un siècle, plutôt bien en métropole, assez mal dans les colonies, il faut le rappeler. Et durant des périodes d’expansion militaire et/ou économique. Or nous sommes confrontés à des difficultés économiques durables et il n’y a plus de territoire à conquérir.]

      Il y a toujours des « territoires à conquérir ». La difficulté est qu’une politique de grandeur coûte cher, et que les classes moyennes ne sont pas prêtes à lâcher un sou pour financer des investissements de croissance.

      [« Mais la faute n’incombe pas tout à fait à ces populations, mais plutôt à une France qui a cessé d’assimiler. »][Encore une fois la France n’assimile pas parce qu’elle n’a plus ni projet collectif ni perspectives économiques intéressantes à offrir, y compris à certains natifs… De surcroît, je suis très réticent à l’idée d’assimiler les enfants et les petits-enfants de ceux qui ont opté pour l’indépendance vis-à-vis de la France il y a près d’un demi-siècle.]

      Je partage. Pour moi l’assimilation doit s’adresser aux enfants issus de l’immigration passée. Comme vous le savez, je suis partisan d’une politique d’immigration très restrictive.

  28. leucace dit :

    Ah,l’éducation nationale !!
    Non seulement,elle est source de toutes les propagandes,illusions et manipulations,mais elle est aussi un lieu de grandes souffrances au travail.
    Qui y souffre?
    Les élèves?
    pas plus que dans un centre aéré,qu’ils soient blonds,roux,bruns,athées ou pas,ils y passent des moments sans gènes!
    L’administration ?
    peut être les subordonnés,mais l’équipe de direction ‘manage’ selon les techiques modernes du stress,à gogo.
    Les profs ? eh,oui!c’est un secret de polichinelle,(visitez le site souffranceprofs,pour vous faire une idée),eux,les profs, en bavent.
    Coincés entre les élèves,les parents omniprésents,intrusifs,les inspecteurs,les collègues,l’administration,ils souffrent en silence.
    Un cas apparait aujourd’hui,où à Falk,cinq professeurs sont enn grève de la faim.
    Depuis Boby Sands,ce genre d’actions définit les cas désespérés.
    Aujourd’hui,en France,être prof en collège,c’est être désepéré?
    Depuis plusieurs mois,les profs dénoncent,les méthodes de leur Principale,sorte de Thatcher anti-prof..
    Ce mercredi soir, 300 personnes se sont rassemblées devant le collège de Falck à l’invitation du collectif des enseignants en conflit avec la principale, du Snes/FSU et de la FCPE.
    Parents, élèves, anciens collègues sont venus apporter leur soutien aux grévistes de la faim. Le mouvement se poursuit. Ce vendredi, le CHSCT (Comité d’hygiène, sécurité, conditions de travail) entendra les différentes parties. L’objectif étant de trouver une issue favorable à ce conflit qui dure depuis plusieurs mois.
    Au moins ,les enfants de ce collège auront vécu une lutte sociale d’envergure !
    Rassemblés ensemble,vers un objectif commun,têtes blondes,brunes , emburkanées ou pas,c’est une façon de dépasser le communautarisme fermé.
    Mais combien d’emburkanées viendront défendre ces professeurs souvent qualifiés de laïcards?
    Car dans le fond,le contentieux est grand,entre Samia,Fatima,Haïfa et Khadija, et L’EN.
    Le plafond de verre ne concerne pas que la carte scolaire,qui est une procédure à conservermais à gérer intelligemment.
    Car ce que Samia,Fatima,Haïfa et Khadija,,doivent cmprendre ,c’est cei.
    La laîcité à la française est bien plus vielle que leur caprice d’enburkinage qui n’est qu’une bunkérisation illusoire.
    Cete mode communautariste passera,la laïcité restera,car c’est un système qui a fait ces preuves.
    Ne soyons pas démagogique,c’est à,Samia,Fatima,Haïfa et Khadija,de s’adapter comme leur religion l’a fait depuis 17 siècle sauf ces dernières déennies:pétro dollars obligent .Ces péro-dollars permettent aux porteuses de burka de recevoir entre 100 ou 200 euros par mois grâce à des associations caritatives religieuses de mon quartier si elles portent la burka,pourquoi?

    • Descartes dit :

      @ leucace

      [Non seulement,elle est source de toutes les propagandes,illusions et manipulations,mais elle est aussi un lieu de grandes souffrances au travail.]

      Je sens que nous allons vite nous retrouver devant une nouvelle catégorie de victimes…

      [Qui y souffre?]

      Tout le monde. Les élèves, les parents d’élèves, le personnel non enseignant… remarquez, faut bien que les psychologues et autres experts en gestion de stress vivent…

      [(…) Les profs ? eh,oui! c’est un secret de polichinelle,(visitez le site souffranceprofs, pour vous faire une idée), eux, les profs, en bavent.]

      Oui, enfin, faudrait pas exagérer. Il reste beaucoup de métiers bien plus pénibles que celui de prof. D’ailleurs, si les profs « souffrent » tant, ils n’ont qu’à démissionner et à faire un petit tour dans le privé, pour voir comment les choses se passent. Il faut arrêter cette espèce d’introspection victimaire permanente.

      [Coincés entre les élèves, les parents omniprésents, intrusifs, les inspecteurs,les collègues, l’administration, ils souffrent en silence.]

      « les collègues » ? Ils sont si horribles que ça, les « collègues » ? Mais ces « collègues », ce sont aussi des profs, non ?

      [Un cas apparait aujourd’hui,où à Falk,cinq professeurs sont en grève de la faim. Depuis Boby Sands, ce genre d’actions définit les cas désespérés.]

      Pas forcément. Ca ne définit les cas « désespérés » que lorsqu’ils se laissent mourir de faim. Nous allons voir combien de temps les professeurs de Falk tiendront.

      [Aujourd’hui, en France, être prof en collège, c’est être désepéré? Depuis plusieurs mois,les profs dénoncent,les méthodes de leur Principale,sorte de Thatcher anti-prof… Ce mercredi soir, 300 personnes se sont rassemblées devant le collège de Falck à l’invitation du collectif des enseignants en conflit avec la principale, du Snes/FSU et de la FCPE.]

      En d’autres termes, ces profs jouent les parents d’élèves et l’opinion publique contre l’institution dont ils sont les agents. L’exemple poussé jusqu’à l’absurde de ce que j’ai dénoncé mille fois ici : en tirant contre l’institution, les profs scient sur la branche sur laquelle ils sont assis. Comment l’institution pourrait demain les légitimer ? Si les profs ont un problème avec leur principale, la logique voudrait qu’ils règlent le problème à l’intérieur de l’institution. Et les canaux existent : syndicats, CHSCT, appel au recteur, tribunaux administratifs… mais il ne faut jamais, JAMAIS prendre à témoin des conflits internes à l’institution les parents d’élèves.

      Les professeurs feraient bien de faire attention. Parce que demain, un principal pourrait avoir la même idée, et faire manifester les parents d’élèves contre un prof dont il voudrait se débarrasser. Lorsque les bornes sont franchies, il n’y a plus de limites.

      [Au moins ,les enfants de ce collège auront vécu une lutte sociale d’envergure !]

      Ah bon ? C’est ça une « lutte sociale » ? Eh beh…

      [Rassemblés ensemble, vers un objectif commun, têtes blondes, brunes, emburkanées ou pas,c’est une façon de dépasser le communautarisme fermé.]

      C’est ça. « Tous unis contre l’institution ». Belle leçon de civisme.

      [Mais combien d’emburkanées viendront défendre ces professeurs souvent qualifiés de laïcards?]

      Mais pourquoi viendraient-elles les défendre ? Si aujourd’hui elles manifestent contre le principal, demain ils pourraient manifester contre le prof laïque qui leur demande d’enlever leur voile. Et que dira le professeur alors ? Que l’institution ne peut fonctionner sous la pression de la rue ? Cette affaire c’est du grand n’importe quoi. Ces profs sont irresponsables, et dans leur envie de « se faire » leur principale, ils ne se rendent pas compte qu’ils sont en train de se suicider professionnellement. Quand demain ils auront besoin du soutien institutionnel pour sanctionner un élève, à qui iront-ils le demander ? A la principale ?

    • Jean-François dit :

      [Oui, enfin, faudrait pas exagérer. Il reste beaucoup de métiers bien plus pénibles que celui de prof. D’ailleurs, si les profs « souffrent » tant, ils n’ont qu’à démissionner et à faire un petit tour dans le privé, pour voir comment les choses se passent. Il faut arrêter cette espèce d’introspection victimaire permanente.]

      Je pense que ce n’est peut-être pas si simple que ça. Il y a plusieurs cas de suicide de profs au sein d’établissements scolaires. Je suppose que la possibilité de changer de métier peut être pire que la mort pour certains enseignants, et qu’il faut qu’ils souffrent beaucoup pour en venir au suicide.

    • Descartes dit :

      @ Jean-François

      [Je pense que ce n’est peut-être pas si simple que ça. Il y a plusieurs cas de suicide de profs au sein d’établissements scolaires. Je suppose que la possibilité de changer de métier peut être pire que la mort pour certains enseignants, et qu’il faut qu’ils souffrent beaucoup pour en venir au suicide.]

      Le suicide n’est pas un indicateur très fiable des conditions de travail. On se suicide plus en Suède qu’en Afghanistan, et pourtant difficile d’imaginer que les conditions de vie ou de travail soient pires… et même si l’on prenait le taux de suicide comme indicateur, je ne suis pas convaincu qu’il soit supérieur pour les enseignants que pour les policiers, les éboueurs ou les mineurs de fond…

      L’enseignement n’est pas, dans la très grande majorité des cas, un travail très pénible. La très grande majorité des enfants n’agressent pas leurs professeurs. Et la probabilité d’être physiquement agressé n’est pas plus grande pour un enseignant que pour un contrôleur de la SNCF, un inspecteur du travail ou de la direction des fraudes. L’enseignement, c’est vrai, nécessite une grande attention, mais c’est le cas aussi des chirurgiens ou des acteurs de théâtre, par exemple. Faut-il les classer aussi en métier pénible ?

      La pleurnicherie permanente des enseignants finit par devenir lassante. Leur vie est peut-être dure, mais elle n’est pas plus dure que celle de millions d’autres travailleurs qui, en plus, n’ont pas la sécurité de l’emploi.

    • BolchoKek dit :

      >La pleurnicherie permanente des enseignants finit par devenir lassante. Leur vie est peut-être dure, mais elle n’est pas plus dure que celle de millions d’autres travailleurs qui, en plus, n’ont pas la sécurité de l’emploi.<
      Ils finiraient presque par nous rappeler les patrons – pardon, les “entreprises”…
      De nos jours il n’y a pas de tel lieu commun que de décrir le “chef d’entreprise” comme un être désintéressé mais victime d’un Etat vampire, dont l’échec n’est ni du à la concurrence ou à ses propres échecs mais uniquement à des circonstances indépendantes de sa volonté – employés branleurs, Etat sangsue, prud’hommes staliniens…
      A ce propos, je suis tombé sur “Le mythe de l’entreprise” de Jean-Pierre Le Goff dans ma librairie, je l’ai un peu feuilleté, je considère l’acheter mais il est un peu cher, l’as-tu lu ?

    • Descartes dit :

      @ BolchoKek

      [« La pleurnicherie permanente des enseignants finit par devenir lassante. Leur vie est peut-être dure, mais elle n’est pas plus dure que celle de millions d’autres travailleurs qui, en plus, n’ont pas la sécurité de l’emploi. »][Ils finiraient presque par nous rappeler les patrons – pardon, les “entreprises”…]

      C’est une tactique qui vient du fond des âges. Il ne faut jamais montrer sa richesse, ça pourrait donner des idées aux autres. Au contraire, il faut toujours se vêtir de haillons et avoir la mine défaite si l’on veut obtenir des subventions.

      [A ce propos, je suis tombé sur “Le mythe de l’entreprise” de Jean-Pierre Le Goff dans ma librairie, je l’ai un peu feuilleté, je considère l’acheter mais il est un peu cher, l’as-tu lu ?]

      Non. J’ai lu d’autres choses de Le Goff, et en général je les ai trouvé bien faites. Mais je ne connais pas ce livre en particulier.

  29. Bruno dit :

    Bonjour Descartes,

    Je souhaiterais rebondir sur un propos que vous avez tenu dans un des commentaires de cet article, un propos que vous tenez assez souvent au demeurant. Il s’agit de l’école républicaine. Vous affirmez qu’elle a été “détruite” par les classes moyennes, notamment pour éviter que les enfants des classes populaires puissent concurrencer leur marmaille. Je ne nie pas que l’école ait été effectivement “cassée”. Cela étant, j’aimerais bien que vous expliquiez comment ont procédé les classes moyennes pour y parvenir. En effet, quand j’évoque le sujet de l’école avec mes amis, très “classes moyennes”, ils sont favorables à la méritocratie et jamais je n’entendrai l’un d’eux dire qu’il faut pourrir l’école pour cloisonner les enfants des pauvres. Est-ce inconsciemment? Et comment ont-ils procédé? Par des réformes stupides de l’éducation nationale? Merci!

    • Descartes dit :

      @ Bruno

      [Il s’agit de l’école républicaine. Vous affirmez qu’elle a été “détruite” par les classes moyennes, notamment pour éviter que les enfants des classes populaires puissent concurrencer leur marmaille. Je ne nie pas que l’école ait été effectivement “cassée”. Cela étant, j’aimerais bien que vous expliquiez comment ont procédé les classes moyennes pour y parvenir. En effet, quand j’évoque le sujet de l’école avec mes amis, très “classes moyennes”, ils sont favorables à la méritocratie et jamais je n’entendrai l’un d’eux dire qu’il faut pourrir l’école pour cloisonner les enfants des pauvres.]

      C’est un phénomène bien connu, et déjà décrit par Marx. Lorsque une classe défend ses intérêts, elle fabrique une idéologie qui justifie cette défense en termes de l’intérêt général. Lorsque les patrons essayent de supprimer le SMIC, ils n’expliquent pas que cela leur permettrait de gagner plus d’argent en appauvrissant les travailleurs. Non, ils expliquent au contraire que le SMIC constitue un frein à l’embauche, et que sa suppression profiterait autant au patronat qu’aux travailleurs. Et ce processus n’est pas « machiavélique », en d’autres termes, lorsque les patrons tiennent ce discours ils ne sont pas pour la plupart cyniques. Non, ils sont convaincus, sincèrement convaincus, que la suppression du SMIC est dans l’intérêt de tout le monde. L’élaboration de cette idéologie qui guide ensuite les actions des membres d’une classe n’est pas un acte concerté. Il n’existe pas de Grand Conseil des Classes Moyennes qui planifie des actions. Cela fait partie du métabolisme même d’une classe. Le fait de partager le même intérêt fait qu’on adopte sans avoir besoin de se concerter la même idéologie, dans la mesure où celle-ci justifie et légitime la défense ce cet intérêt.

      La destruction de l’école s’est donc faite au nom des objectifs les plus louables. Il s’agissait de « libérer » l’élève de l’école-caserne, de laisser sa « créativité » s’exprimer, de le sauver de « l’ennui », et même – ironiquement – de rendre l’institution scolaire plus « égalitaire ». Et au nom de ces objectifs on s’est attaqué à l’idée même de discipline, qui est l’idée fondatrice de l’école. Non seulement à la discipline externe, celle que l’institution impose pour organiser son fonctionnement, mais plus essentiellement à la discipline interne, celle que l’institution transmet pour permettre à l’élève d’organiser sa pensée. Concrètement cela s’est traduit par un affaiblissement des enseignements « disciplinaires » au profit de toutes sortes de « distractions » censées permettre à l’élève de « s’exprimer », « élargir ses horizons », « acquérir des compétences » et autres balivernes. Cela s’est traduit au plan institutionnel par la consécration de l’élève-roi, que l’institution est censée servir et qui entretien avec elle un rapport juridique. Mais j’insiste, ces réformes ne se sont pas faits de manière « machiavélique ». Ceux qui les ont faites étaient convaincus de bien faire, de servir l’intérêt de tous, y compris les élèves issus des couches populaires.

      Mais l’idéologie a bien fait les choses. Lorsqu’on possède soi même une discipline et qu’on peut la transmettre à ses enfants dans le cadre de la famille, tirer sur la discipline à l’école revient à se la réserver pour soi. Expliquer aux enfants qu’il faut être « fier de ce qu’on est » revient à faire en sorte que chacun reste à sa place. Si on est « fier de ce qu’on est », pourquoi vouloir changer ?

    • Bruno dit :

      Merci pour votre réponse Descartes.
      Pour ce qui est de Marx, j’ai effectivement retrouvé cette idée dans une citation bien connue de lui : “chaque nouvelle classe qui prend la place de celle qui domine avant elle est obligée ne fusse que pour parvenir à ses fins, de représenter son intérêt comme l’intérêt commun de tous les membres de la société. Cette classe est obligée de donner à ses pensées la forme de l’universalité, de les représenter comme étant les seules raisonnables, les seules universellement valables”.
      À ceux qui voudraient découvrir un philosophe qui n’est plus trop à la “mode” aujourd’hui je recommande les vidéos réalisées par “Les films de l’an 2”, et particulièrement celles de Jean Salem, très pédagogue et instructif. (https://vimeo.com/108239727)

    • Marcailloux dit :

      @ Descartes,
      Bonjour,
      [Le fait de partager le même intérêt fait qu’on adopte sans avoir besoin de se concerter la même idéologie, dans la mesure où celle-ci justifie et légitime la défense ce cet intérêt.]
      L’épine dorsale de votre blog est constituée par la déploration des méfaits de la « classe moyenne », enfin de la classe moyenne particulière à votre conception. Je souscris au moins partiellement à cette thèse, avatar de l’idéologie marxiste. Cependant, il me semble que le phénomène est plus à rapprocher de l’évolution des espèces selon Darwin ainsi que Wallace et alii (sic) et que la répartition en classes que vous construisez relève plus d’une recherche de légitimation de votre approche que d’une vérité scientifique qui serait difficile à démontrer. Ce que vous décrivez comme un comportement de classe n’est somme toute que l’expression d’un réflexe de conservation qui se rencontre chez tous les individus, à des degrés divers, variable selon leur mentalité et non selon leur situation sociale.
      Safia, Fatima, Haïcha et Khadeja n’ont rien d’autre qu’un comportement de classe moyenne – selon vos critères – en recherchant, pour leurs enfants, l’intégration , autrement que par le simple mérite, dans une école où la mixité leur parait plus profitable que celle que leur enfant fréquente.
      L’ouvrier ou l’employé qui se syndique ne fait rien d’autre que chercher à au moins conforter, sinon renforcer sa situation par rapport à son employeur, et si cela doit mener ce dernier à la faillite, il n’est pas certain que cela le préoccupe, sauf s’il est convaincu qu’il sera aussi victime de la situation.
      On peut ensuite chercher à regrouper les individus en catégories, classes ou castes, mais à moins de définir des critères matériels, vérifiables et mesurables, la miscibilité des situations qui est perpétuellement instable, rend la tâche pour le moins impossible, voire même illusoire. La distinction, si elle apparait, ce sera probablement bien plus tard, lorsque l’objet observé sera « immobilisé » par la distance temporelle.
      D’ailleurs, vous reconnaissez vous-même qu’il n’y a pas de « grand conseil des classes moyennes » alors qu’il existe des équivalents pour tout ce qui peut exister de manière repérable, le Médef, les chrétiens, les noirs, les philatélistes, les arabes, les gays, les motards en colère et alii (re sic). Le même type de problème se présentera si la question du droit du sol et du droit du sang se pose. Les zones de flou sont énormes et diverses et l’énoncé d’un principe se heurtera à la capacité de contrôle dont nous disposons.
      (Petite incursion sur le point Godwin, même Hitler, parait-il, avait des ascendances juives !)

    • Descartes dit :

      @ Marcailloux

      [L’épine dorsale de votre blog est constituée par la déploration des méfaits de la « classe moyenne », enfin de la classe moyenne particulière à votre conception.]

      Je ne le crois pas. Nulle « déploration » ici. Mais je pense que pour comprendre l’évolution de notre société il faut se doter des bons instruments. Et il est difficile de comprendre un certain nombre de choses si l’on ne prend pas en compte le rôle de ces couches sociales que j’ai appelé « classes moyennes ». La simple analyse des rapports entre bourgeoisie et prolétariat était peut-être suffisante en 1880, pas en 1980.

      [Ce que vous décrivez comme un comportement de classe n’est somme toute que l’expression d’un réflexe de conservation qui se rencontre chez tous les individus, à des degrés divers, variable selon leur mentalité et non selon leur situation sociale.]

      Pas tout à fait. Le réflexe de conservation est une affaire individuelle. Mais l’intérêt de classe et son corollaire, l’idéologie de classe, fait que des secteurs importants d’une classe peuvent avoir un comportement qui va contre leurs intérêts individuels mais qui vont dans le sens de leur intérêt de classe. Prenez les patrons de PMI, qui dans leur grande majorité ont soutenu une construction européenne qui est en train de les liquider. Ou bien les enseignants, qui ont dévalorisé leur propre métier… L’apport de l’analyse de classe telle que proposée par Marx est justement de pouvoir expliquer ce genre de comportement.

      [Safia, Fatima, Haïcha et Khadeja n’ont rien d’autre qu’un comportement de classe moyenne – selon vos critères – en recherchant, pour leurs enfants, l’intégration , autrement que par le simple mérite, dans une école où la mixité leur parait plus profitable que celle que leur enfant fréquente.]

      Pas du tout. J’ai du mal me faire comprendre. Je n’ai jamais dit que Safia, Fatima etc. avaient un « comportement de classe moyenne ». Elles ont un comportement parfaitement logique de défense d’un intérêt individuel : elles ont compris que leurs enfants auraient plus de chances dans une école « mixte » que dans une école « homogène ». Aucune question de « classe » là dedans.

      [L’ouvrier ou l’employé qui se syndique ne fait rien d’autre que chercher à au moins conforter, sinon renforcer sa situation par rapport à son employeur, et si cela doit mener ce dernier à la faillite, il n’est pas certain que cela le préoccupe, sauf s’il est convaincu qu’il sera aussi victime de la situation.]

      Oui, mais justement vous ne pouvez pas expliquer l’attitude de l’ouvrier gréviste par une simple question d’intérêt individuel. En effet, la grève ne peut être une décision rationnelle. Réflechissez : si vous faites grève et la grève échoue, vous perdez votre salaire. Si elle est un succès, vous partagerez les fruits avec les non-grévistes. Un non-gréviste, par contre, touchera les bénéfices si la grève est un succès, et ne perd rien si elle échoue. Considéré d’un point de vue individuel, on a toujours intérêt à être non-gréviste.

      Pourtant, les gens se mettent en grève. C’est la preuve qu’il existe au dessus de l’intérêt individuel un intérêt collectif qui peut pousser les individus à aller contre leur intérêt individuel…

      [On peut ensuite chercher à regrouper les individus en catégories, classes ou castes, mais à moins de définir des critères matériels, vérifiables et mesurables, la miscibilité des situations qui est perpétuellement instable, rend la tâche pour le moins impossible, voire même illusoire.]

      Je pense avoir proposé des critères matériels. Mais ils n’ont pas besoin d’être « mesurables ». Pour définir le prolétariat, il suffit de savoir qu’il produit de la plus-value. Pas besoin de savoir combien.

      [D’ailleurs, vous reconnaissez vous-même qu’il n’y a pas de « grand conseil des classes moyennes » alors qu’il existe des équivalents pour tout ce qui peut exister de manière repérable, le Médef, les chrétiens, les noirs, les philatélistes, les arabes, les gays, les motards en colère et alii (re sic).]

      Non. Il existe un MEDEF, mais il n’existe pas de « Grand Conseil de la Bourgeoisie ». Il n’existe pas non plus de Grand Conseil du Prolétariat. Vous semblez considérer que les classes sociales ne sont finalement qu’une catégorie parmi d’autres, à l’égal des philatelistes, des arabes ou des gays. Ce n’est pas le cas : les classes sont des catégories liées à ce qui est central dans l’organisation d’une société : le mode de production.

      [(Petite incursion sur le point Godwin, même Hitler, parait-il, avait des ascendances juives !)]

      C’est un faux historique. Cette théorie n’a aucune base dans les faits, et ne s’appuie que sur le fait qu’un ancêtre de Hitler aurait changé de nom, d’où certains tirent la conclusion – sans la moindre base factuelle, je répète – qu’il l’aurait fait pour cacher ses origines juives. J’ajoute par ailleurs que même si on découvrait que Hitler avait quatre grands-parents juifs, cela ne changerait absolument rien.

  30. Benjamin dit :

    Bonjour Descartes,

    puisque Jean-Pierre Chevènement est mentionné dans ce fil je me permets de vous demander ce que vous inspire son départ du MRC. Si son ambition affichée de favoriser un dialogue de Mélenchon à Dupont-Aignan a d’ores et déjà fait long feu au vu de la réponse du premier (qui curieusement se distingue en cela de Syriza), pensez-vous qu’à défaut d’incarner l’avenir de la politique française le vieux lion ait encore un rôle à jouer ? L’influence chevénementiste dans le débat public et la vie politique française n’était déjà pas évidente ces dernières années, croyez-vous qu’il puisse peser d’une manière ou d’une autre maintenant qu’il a “repris sa liberté”, et si tel est son but pourquoi se tourner vers NDA et pas vers Philippot ?..

    • Descartes dit :

      @ Benjamin

      [puisque Jean-Pierre Chevènement est mentionné dans ce fil je me permets de vous demander ce que vous inspire son départ du MRC. Si son ambition affichée de favoriser un dialogue de Mélenchon à Dupont-Aignan a d’ores et déjà fait long feu au vu de la réponse du premier (qui curieusement se distingue en cela de Syriza), pensez-vous qu’à défaut d’incarner l’avenir de la politique française le vieux lion ait encore un rôle à jouer ?]

      Je ne suis pas particulièrement bien informé sur cette affaire, et je n’en connais que ce que j’ai lu dans la presse ou ce que m’ont raconté des amis bien informés. Mais connaissant un peu le parcours de Chevènement, je pense qu’il ne faut pas prendre la formule « dialogue de Mélenchon à Dupont-Aignan » au pied de la lettre. Plus que de se faire parler les leaders entre eux – ce qui est impossible sans un reniement public étant données les positions prises depuis des années par les uns et les autres – Chevènement voudrait que des contacts s’établissent entre les militants de l’un et de l’autre camp, de faire tomber cette frontière gauche/droite qui ne veut aujourd’hui plus rien dire.

      « Le vieux lion » – j’aime beaucoup votre formule, cela me fait penser au lion de Belfort et à la chanson de Reggiani « les loups »… – sait qu’il ne lui reste pas beaucoup de temps. Il sait parfaitement qu’en France s’attaquer à la division « droite/gauche » est en général un suicide politique, et que tous ceux qui s’y sont essayé se sont cassé les dents. En même temps, il sait que cette division est aujourd’hui très affaiblie, depuis que la gauche fait une politique économique de droite et la droite a incorporé une bonne partie des positions « sociétales » de la gauche. Et puis, il n’a plus rien à perdre, n’ayant plus un siège à défendre. Mais pour défendre une telle position, il lui faut quitter le MRC, pour ne pas nuire à ceux de ses amis qui en ont encore un. Je pense aussi que sa solitude le rend encore plus audible, puisqu’elle lui permet d’échapper aux yeux de l’opinion à toute considération de tactique électorale.

      Je ne sais pas si « le vieux lion » peut encore jouer un rôle actif. Dans un contexte de crise, De Gaulle est revenu au pouvoir à 70 ans passés, mais il avait derrière lui un passé de « sauveur de la Patrie » que Chevènement n’a pas, sans compter un grand nombre de partisans un peu partout qui militaient activement pour son retour. Je ne vois pas une telle situation se reproduire dans un avenir proche. Il lui reste le rôle de « vieux sage », celui du taon qui tient réveillé le cheval, pour reprendre l’image socratique.

      [L’influence chevénementiste dans le débat public et la vie politique française n’était déjà pas évidente ces dernières années, croyez-vous qu’il puisse peser d’une manière ou d’une autre maintenant qu’il a “repris sa liberté”, et si tel est son but pourquoi se tourner vers NDA et pas vers Philippot ?…]

      Il y a plusieurs niveaux de débat. La visibilité des chevènementistes est, il est vrai, très réduite dans l’univers médiatique. Mais dans le milieu des décideurs, des hauts fonctionnaires, des élites administratives sa parole reste étonnamment influente. Vous seriez étonné de savoir ce que certains hauts fonctionnaires, qui affichent une conformité parfaite avec le langage eurolâtre et décentralisateur en public, disent en privé lorsqu’ils sont en confiance. Il ne faut pas négliger cette influence. Tout changement de politique dans un Etat aussi complexe que le notre nécessitera de bons techniciens. Avoir les techniciens de son côté, c’est déjà un bon début.

      Maintenant, pourquoi ne pas se tourner vers Philippot ? Je pense que le fossé « gauche/droite » est déjà suffisamment formidable pour s’attaquer dans un même mouvement au fossé « gauche/extrême droite ». Un pas à la fois. Par ailleurs, je ne pense pas que ce genre de discussion soit aujourd’hui utile : le but aujourd’hui est de créer un pôle souverainiste « respectable » qui puisse négocier une entrée dans un gouvernement. Il faudrait de la part du FN une évolution très importante pour qu’il puisse entrer dans un tel pôle.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [“le but aujourd’hui est de créer un pôle souverainiste « respectable » qui puisse négocier une entrée dans un gouvernement.”]

      Bien sûr. Après avoir joué durant des années le rôle de “pôle souverainiste respectable” au sein du PS, avec les résultats ébouriffants que l’on connaît, Chevènement tient compte désormais de la nouvelle bipolarisation de la vie politique. C’est pourquoi il cherche à reformer son nouveau “pôle souverainiste respectable” au sein du futur gouvernement RPS.

      [“Il faudrait de la part du FN une évolution très importante pour qu’il puisse entrer dans un tel pôle.”]

      Tout à fait. Il faudrait que les dirigeants du FN acceptent enfin de se comporter comme ces petits bourgeois “respectables” et inoffensifs que sont Chevènement, NDA et Mélenchon : rebelles en paroles, mais en paroles seulement.

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Bien sûr. Après avoir joué durant des années le rôle de “pôle souverainiste respectable” au sein du PS, avec les résultats ébouriffants que l’on connaît, Chevènement tient compte désormais de la nouvelle bipolarisation de la vie politique. C’est pourquoi il cherche à reformer son nouveau “pôle souverainiste respectable” au sein du futur gouvernement RPS.]

      Dites-donc… vous avez été mordu par un chien enragé ? Ou c’est votre relaxe dans l’affaire du Carlton qui vous met de cette humeur ?

      On peut certainement critiquer le choix tactique de Chevènement de rester à l’intérieur du système plutôt que d’en sortir. Mais ce choix ne s’est pas révélé aussi vain que vous semblez le croire. Les Jupiter tonnants façon Mélenchon, Asselineau, Dupont-Aignan ou même Le Pen n’ont pour le moment pas obtenu grande chose à l’heure d’infléchir les grandes politiques publiques. Par contre, les souverainistes qui sont restés dans le système, comme Séguin, Pasqua, Guaino ou Chevènement ont eu plusieurs fois un pouvoir d’influence. C’est un peu grâce à eux si la Charte des langues régionales et minoritaires n’a pas été ratifiée par la France du temps de Jospin, ou si le Traité de Lisbonne façon Sarkozy a renoncé à sacraliser la « concurrence libre et non faussée ». Ce n’est pas grande chose me direz-vous, mais c’est toujours mieux que rien.

      [Tout à fait. Il faudrait que les dirigeants du FN acceptent enfin de se comporter comme ces petits bourgeois “respectables” et inoffensifs que sont Chevènement, NDA et Mélenchon : rebelles en paroles, mais en paroles seulement.]

      Beh oui. Cela vous a échappé peut-être, mais nous sommes entourés de petits bourgeois. La révolution ne fait plus recette, même chez les « damnés de la terre ». Les gens demandent à leurs dirigeants politiques de les rassurer, de les protéger. Pas de les embarquer vers des terres inconnues dans des coquilles de noix.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [Dites-donc… vous avez été mordu par un chien enragé ? Ou c’est votre relaxe dans l’affaire du Carlton qui vous met de cette humeur ?]

      On peut même dire que j’ai été mordu par toute une meute de chiens enragés, comme vous le savez. Mais cela va beaucoup mieux, je vous remercie, depuis qu’on m’a détendu pour mes petites fautes morales du Carlton. Non, c’est juste que ce sacré Jean-Pierre a réussi une fois de plus à m’énerver, voilà tout.

      [On peut certainement critiquer le choix tactique de Chevènement de rester à l’intérieur du système plutôt que d’en sortir.]

      Je ne critique pas le « choix » de Chevènement, pour la bonne raison que je crois qu’en réalité, il n’en avait aucun. Je pense, en effet, qu’il lui était impossible de rompre plus qu’il ne l’a fait avec le « système », ayant construit dès le départ toute sa carrière politique au PS. Ce que je lui reproche, en revanche – mais peut-être est-ce là l’effet de son âge ? – c’est de ne pas avoir la lucidité de s’apercevoir que s’il avait l’âge de Philippot aujourd’hui, il ferait exactement comme lui.

      [Mais ce choix ne s’est pas révélé aussi vain que vous semblez le croire.]

      Je dirais que sa parole, en tout cas, n’a pas été vaine. Elle a notamment été entendue par le jeune Philippot, qui en a tiré toutes les conséquences en rejoignant le FN. Et si cette parole a pu être entendue, c’est sans doute grâce au fait que Chevènement avait gardé un pied dans le « système ».

      [Les Jupiter tonnants façon Mélenchon, Asselineau, Dupont-Aignan ou même Le Pen n’ont pour le moment pas obtenu grande chose à l’heure d’infléchir les grandes politiques publiques.]

      S’agissant des trois premiers, je suis de moins en moins persuadé qu’ils cherchent sérieusement à «infléchir les grandes politiques publiques»…

      [Par contre, les souverainistes qui sont restés dans le système, comme Séguin, Pasqua, Guaino ou Chevènement ont eu plusieurs fois un pouvoir d’influence. C’est un peu grâce à eux si la Charte des langues régionales et minoritaires n’a pas été ratifiée par la France du temps de Jospin]

      Super.

      [ou si le Traité de Lisbonne façon Sarkozy a renoncé à sacraliser la « concurrence libre et non faussée ».]

      Extra. Le jour où les « neuf sages » décideront de se réveiller de leur sieste, je sens que ça va faire mal.

      [Ce n’est pas grande chose me direz-vous, mais c’est toujours mieux que rien.]

      Non. C’est un échec pur et simple. D’ailleurs, tous les « souverainistes » ont fini par être éjectés du système, sauf Guaino, qui n’est encore là que parce qu’il est une bonne plume au service du Prince.

      [Beh oui. Cela vous a échappé peut-être, mais nous sommes entourés de petits bourgeois. La révolution ne fait plus recette, même chez les « damnés de la terre ». Les gens demandent à leurs dirigeants politiques de les rassurer, de les protéger. Pas de les embarquer vers des terres inconnues dans des coquilles de noix.]

      Je ne sais pas. Les petits bourgeois, ces temps-ci, me paraissent avoir pris un certain goût à l’aventure. Il semblerait qu’ils désirent tous, désormais, s’embarquer joyeusement dans le maelstrom de la « mondialisation », et se lancer à l’assaut des pays émergents dans leur petite « coquille de noix » made in China, tout en se baptisant « citoyens du monde ». Quant à l’Euro, c’est tout de même une sacrée « terre inconnue », non ? Face à cela, ce que les « souverainistes » proposent, c’est plutôt, justement, un retour en arrière rassurant et protecteur, des frontières, une sécurité, une maison commune, un État, des repères etc.

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Je ne critique pas le « choix » de Chevènement, pour la bonne raison que je crois qu’en réalité, il n’en avait aucun. Je pense, en effet, qu’il lui était impossible de rompre plus qu’il ne l’a fait avec le « système », ayant construit dès le départ toute sa carrière politique au PS.]

      Pourquoi pensez-vous cela ? D’autres ont quitté le PS pour aller vers des horizons très différents….

      [Ce que je lui reproche, en revanche – mais peut-être est-ce là l’effet de son âge ? – c’est de ne pas avoir la lucidité de s’apercevoir que s’il avait l’âge de Philippot aujourd’hui, il ferait exactement comme lui.]

      Je ne suis pas persuadé que Chevènement n’ait pas cette « lucidité ». Vous remarquerez d’ailleurs que Chevènement est, parmi les dirigeants traditionnellement placés « à gauche », l’un des plus modérés dans sa critique du FN.

      [Non. C’est un échec pur et simple. D’ailleurs, tous les « souverainistes » ont fini par être éjectés du système, sauf Guaino, qui n’est encore là que parce qu’il est une bonne plume au service du Prince.]

      Je ne cherche pas à minimiser l’étendue de l’échec. Tout simplement à rappeler que le peu qu’on peut sauver de cet échec on le doit aux souverainistes qui sont restés dans le système, et non à ceux qui ont choisi de monter dans la tour d’ivoire pour avoir les mains pures.

      [Quant à l’Euro, c’est tout de même une sacrée « terre inconnue », non ?]

      C’était, vous voulez dire ? Je ne suis même pas sûr que les nains que nous avons aujourd’hui seraient capables de se lancer à construire une monnaie unique… Mais l’Euro, contrairement à ce que vous pensez, n’était pas vraiment une « aventure ». D’une part, parce qu’il disposait de l’appui de tous les « pouvoirs ».Avec de tels amis, il n’y a rien à craindre.

      [Face à cela, ce que les « souverainistes » proposent, c’est plutôt, justement, un retour en arrière rassurant et protecteur, des frontières, une sécurité, une maison commune, un État, des repères etc.]

      Pas tout à fait. Tout le monde sait que le passé ne reviendra pas. Ce que les souverainistes proposent, c’est de quitter le cuirassé européen qui fait eau de toutes parts, pour s’embarquer sur une chaloupe qui sera plus petite mais qui au moins n’aura pas vingt-huit mains sur le gouvernail. Pour aller ou ? Certainement pas en arrière…

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [Ce que je lui reproche, en revanche – mais peut-être est-ce là l’effet de son âge ? – c’est de ne pas avoir la lucidité de s’apercevoir que s’il avait l’âge de Philippot aujourd’hui, il ferait exactement comme lui.] [Je ne suis pas persuadé que Chevènement n’ait pas cette « lucidité ». Vous remarquerez d’ailleurs que Chevènement est, parmi les dirigeants traditionnellement placés « à gauche », l’un des plus modérés dans sa critique du FN.]

      Sans doute. Mais je ne puis que douter de sa lucidité lorsque je lis cet extrait de sa récente interview :

      [“J’ai défini deux marqueurs parmi ceux qui, me semble-t-il, pensent comme moi que la nation doit être centrale pour le redressement de l’Europe : Jean-Luc Mélenchon, bien qu’il confonde encore trop souvent la nation et le nationalisme, et Nicolas Dupont-Aignan. J’aurais pu en citer beaucoup d’autres : tous ceux qui sont restés gaullistes à droite et ceux qui sont authentiquement républicains à gauche sont concernés !

      Pas Marine Le Pen ?

      Je ne fais pas de procès d’intention. Je constate : Marine Le Pen hérite d’un passé très chargé. Ses idées sont simplistes quand elles ne sont pas dangereuses. Le FN ne dispose pas d’un personnel à la hauteur pour gouverner. Sa venue au pouvoir serait une catastrophe pour l’image de la France dans le monde. Ça fait beaucoup !

      Et Florian Philippot, qu’on dit « ancien chevènementiste » ?

      Personnellement, je ne connais pas Florian Philippot. Il se réclame de moi, mais moi je ne me réclame pas de lui. Il y a beaucoup de gens qui se réclament du chevènementisme mais je suis encore capable de reconnaître les miens !”]

      Il est vrai que MLP hérite d’un “passé très chargé”, à savoir un parti dont le socle électoral représentait trois fois le score de JPC à la présidentielle de 2002, ce qui ne semble pas vraiment interpeler cet ex “candidat des bac + 5”, qui ne comprendra décidément jamais que dans cette “République” qu’il chérit tant, il faut tout de même être capable de présenter ses idées de façon un peu “simpliste” si l’on veut vraiment espérer un jour pouvoir les mettre en application. Et puis j’aimerais bien qu’il m’explique, les yeux dans les yeux, en quoi les idées de NDA seraient moins “simplistes” que celles de MLP, sachant que ce sont exactement les mêmes… Et je ne parle même pas de celles de Mélenchon. Quant au “personnel à la hauteur pour gouverner”, pourrait-il m’en donner des exemples précis, parmi les cadres de DLF et du PG ? Enfin, je ne vois pas du tout ce qui lui permet d’affirmer que la venue au pouvoir de MLP serait “une catastrophe pour l’image de la France dans le monde”. Qu’en sait-il ? Pense-t-il que notre classe politique actuelle donne “une bonne image de la France dans le monde” ? Quant à Philippot, qu’il ne reconnaît pas comme “sien”, sans qu’il nous explique d’ailleurs pourquoi, vous voyez bien que cela confirme très exactement mes propos. A moins que les “siens”, finalement, cela ne signifie que “petit bourgeois mythomane souverainiste se complaisant dans la posture”…

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Sans doute. Mais je ne puis que douter de sa lucidité lorsque je lis cet extrait de sa récente interview : (…) Je ne fais pas de procès d’intention. Je constate : Marine Le Pen hérite d’un passé très chargé. Ses idées sont simplistes quand elles ne sont pas dangereuses. Le FN ne dispose pas d’un personnel à la hauteur pour gouverner. Sa venue au pouvoir serait une catastrophe pour l’image de la France dans le monde. Ça fait beaucoup ! »]

      Vous noterez tout de même que Chevènement n’exclut pas à priori Marine Le Pen – et à travers elle le FN – du camp « national » ou il se place. Il constate un certain nombre de faits que pratiquement personne ne conteste au fond. Qui conteste que le passé du FN est « chargé », qu’il ne dispose pas d’un personnel à la hauteur pour gouverner, que son arrivée au pouvoir poserait un problème d’image ? Qui conteste qu’il reste encore dans le discours du FN pas mal de résidus d’idées « simplistes » ou « dangereuses » ?

      A partir de là, le discours de Chevènement me paraît très nuancé. Il semble suggérer que si le FN améliore la qualité de son personnel politique, s’il rompt avec son « passé chargé », s’il abandonne certaines « simplifications », sa position pourrait être différente. Ne trouvez-vous pas cela intéressant ?

      [(…) ce qui ne semble pas vraiment interpeler cet ex “candidat des bac + 5”, qui ne comprendra décidément jamais que dans cette “République” qu’il chérit tant, il faut tout de même être capable de présenter ses idées de façon un peu “simpliste” si l’on veut vraiment espérer un jour pouvoir les mettre en application.]

      Je ne crois pas qu’il faille confondre « simple » et « simpliste ». Entre l’homme politique qui vous dit « le problème est complexe, mais je vais essayer de vous l’expliquer en simplifiant », et celui qui vous dit « le problème est simple, un enfant pourrait le comprendre », il y a une différence fondamentale. Et je pense que les cadres du FN ont le tort de tomber dans la deuxième catégorie, par ignorance ou par démagogie.

      [Et puis j’aimerais bien qu’il m’explique, les yeux dans les yeux, en quoi les idées de NDA seraient moins “simplistes” que celles de MLP, sachant que ce sont exactement les mêmes… Et je ne parle même pas de celles de Mélenchon.]

      Je ne crois pas que Chevènement ait dit le contraire.

      [Quant au “personnel à la hauteur pour gouverner”, pourrait-il m’en donner des exemples précis, parmi les cadres de DLF et du PG ?]

      Le problème est différent. Si Dupont-Aignan ou Mélenchon étaient demain élus président de la République, ils n’auraient pas de difficulté – encore faudrait-il qu’ils le veuillent, mais cela est un autre problème – pour attirer à eux des personnalités d’un certain niveau et raisonnablement proches de leurs idées. Le FN aurait, lui, beaucoup plus de difficultés.

      [Enfin, je ne vois pas du tout ce qui lui permet d’affirmer que la venue au pouvoir de MLP serait “une catastrophe pour l’image de la France dans le monde”. Qu’en sait-il ? Pense-t-il que notre classe politique actuelle donne “une bonne image de la France dans le monde” ?]

      Je pense que là vous pinaillez. Le FN a une très mauvaise image dans les couches sociales qui font l’opinion, ici et à l’étranger.

      [Quant à Philippot, qu’il ne reconnaît pas comme “sien”, sans qu’il nous explique d’ailleurs pourquoi, vous voyez bien que cela confirme très exactement mes propos. A moins que les “siens”, finalement, cela ne signifie que “petit bourgeois mythomane souverainiste se complaisant dans la posture”…]

      Tout maître à penser se trouve devant la même difficulté, celle du rapport qu’il peut entretenir avec des gens qui se réclament de lui. Chevènement a parfaitement le droit de penser que Philippot n’a pas compris ses positions, ou qu’il les a trahies. Il serait d’ailleurs très intéressant de voir un débat Philippot-Chevènement pour mieux comprendre ce que le premier a retiré des enseignements du second.

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [“Qui conteste qu’il reste encore dans le discours du FN pas mal de résidus d’idées « simplistes » ou « dangereuses » ?”]

      Pas plus que dans les autres partis.

      [“A partir de là, le discours de Chevènement me paraît très nuancé. Il semble suggérer que si le FN améliore la qualité de son personnel politique, s’il rompt avec son « passé chargé », s’il abandonne certaines « simplifications », sa position pourrait être différente. Ne trouvez-vous pas cela intéressant ?”]

      Non. Car le jour où le FN remplira toutes ces conditions d’une façon que Chevènement estimera suffisante, son soutien ne présentera alors plus aucun intérêt pour le FN.

      [“Je ne crois pas qu’il faille confondre « simple » et « simpliste ». Entre l’homme politique qui vous dit « le problème est complexe, mais je vais essayer de vous l’expliquer en simplifiant », et celui qui vous dit « le problème est simple, un enfant pourrait le comprendre », il y a une différence fondamentale.”]

      Je pense que vos fameuses “classes moyennes” adorent la “complexité” car elle leur permet de théoriser leur impuissance. Elles savent très bien critiquer la bourgeoisie, mais à l’heure d’agir contre elle, elles expliquent généralement aux prolétaires que tout cela est très “complexe”, qu’il va donc falloir organiser des “forums”, des “débats”, et autres réunions fumeuses entre distingués intellectuels qui s’arrangeront pour affirmer systématiquement une chose et son contraire et se contredire, si bien que – comme par hasard – il n’en sortira jamais rien de concret.

      [“Et je pense que les cadres du FN ont le tort de tomber dans la deuxième catégorie, par ignorance ou par démagogie.”]

      Vous voulez dire par une “ignorance” des intérêts de vos “classes moyennes” et par une “démagogie” favorable aux classes populaires ?

      [Et puis j’aimerais bien qu’il m’explique, les yeux dans les yeux, en quoi les idées de NDA seraient moins “simplistes” que celles de MLP, sachant que ce sont exactement les mêmes… Et je ne parle même pas de celles de Mélenchon.]
      [Je ne crois pas que Chevènement ait dit le contraire.]

      C’est implicite. S’il refuse de s’ouvrir au FN sous prétexte que ses idées seraient “simplistes”, c’est donc que celles de NDA et de Mélenchon ne le seraient pas. A moins que finalement, cela ne révèle une autre considération implicite : si les idées “simplistes” de NDA et Mélenchon ne le dérangent pas, c’est qu’il sait bien qu’elles n’ont aucune chance d’arriver au pouvoir.

      [Je pense que là vous pinaillez. Le FN a une très mauvaise image dans les couches sociales qui font l’opinion, ici et à l’étranger.]

      Souvenez-vous de la principale leçon du référendum de 2005 : l’influence de ces “couches sociales qui font l’opinion” n’est pas infaillible.

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [“Qui conteste qu’il reste encore dans le discours du FN pas mal de résidus d’idées « simplistes » ou « dangereuses » ?”][Pas plus que dans les autres partis.]

      Un peu plus quand même. Le FN « ancien mode » a laissé quand même un lourd héritage, qui n’est pas tout à fait purgé. Sur l’immigration, sur la question des PME-PMI, il y a encore pas mal d’idées « simplistes » et « dangereuses » qui traînent. Le FN, il ne faut pas l’oublier, n’a pas eu jusqu’à une période récente à exercer le pouvoir. Et l’exercice du pouvoir est un excellent filtre pour se débarrasser des idées « simplistes et dangereuses ».

      [“A partir de là, le discours de Chevènement me paraît très nuancé. Il semble suggérer que si le FN améliore la qualité de son personnel politique, s’il rompt avec son « passé chargé », s’il abandonne certaines « simplifications », sa position pourrait être différente. Ne trouvez-vous pas cela intéressant ?”][Non. Car le jour où le FN remplira toutes ces conditions d’une façon que Chevènement estimera suffisante, son soutien ne présentera alors plus aucun intérêt pour le FN.]

      Je n’ai pas compris de quel « soutien » vous parlez.

      [Je pense que vos fameuses “classes moyennes” adorent la “complexité” car elle leur permet de théoriser leur impuissance.]

      Les « classes moyennes » utilisent souvent le prétexte de la complexité, non pas pour « théoriser leur impuissance » mais pour exercer leur puissance. En effet, elles contrôlent le savoir, et donc la complexité. Elles ont donc tout intérêt à prétendre que les problèmes sont complexes et qu’elles sont donc les seules à pouvoir les comprendre et donc les résoudre.

      Mais il arrive même aux « classes moyennes » de dire vrai, et on ne combattra pas leur pouvoir en prétendant artificiellement que le complexe est simple. Les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont effectivement très complexes. Et le rôle d’un parti progressiste n’est pas de nier cette complexité, mais de constituer une expertise qui permette de les traiter sans être soumise aux intérêts des « classes moyennes ».

      [“Et je pense que les cadres du FN ont le tort de tomber dans la deuxième catégorie, par ignorance ou par démagogie.”][Vous voulez dire par une “ignorance” des intérêts de vos “classes moyennes” et par une “démagogie” favorable aux classes populaires ?]

      Non. Je veux dire de la bonne vieille ignorance qui consiste à méconnaître les faits présents ou passés, et la bonne vieille démagogie qui consiste à dire ce que l’électeur veut entendre.

      [C’est implicite. S’il refuse de s’ouvrir au FN sous prétexte que ses idées seraient “simplistes”, c’est donc que celles de NDA et de Mélenchon ne le seraient pas.]

      Mais Chevènement ne refuse pas de s’ouvrir au FN « sous prétextes que ses idées seraient « simplistes » ». Il justifie son refus par une accumulation d’éléments, dont l’adition est « lourde », et non par l’un d’eux en particulier.

      [A moins que finalement, cela ne révèle une autre considération implicite : si les idées “simplistes” de NDA et Mélenchon ne le dérangent pas, c’est qu’il sait bien qu’elles n’ont aucune chance d’arriver au pouvoir.]

      Aussi…

    • dsk dit :

      @ Descartes

      [Non. Car le jour où le FN remplira toutes ces conditions d’une façon que Chevènement estimera suffisante, son soutien ne présentera alors plus aucun intérêt pour le FN.][Je n’ai pas compris de quel « soutien » vous parlez.}]

      Eh bien, un “soutien” en bonne et due forme : Chevènement appelant à voter FN, voire même adhérant au FN. Cela étant dit, je serais d’accord avec vous, finalement, pour dire que ses propos, dans cette interview, sont “intéressants”. La faiblesse même de ses arguments, le fait qu’il dise “ça fait beaucoup!”, suggérant par là que certains d’entre eux, au moins, ne seraient pas rédhibitoires, l’absence de toute référence à un quelconque “anti-républicanisme”, la précaution oratoire du début : “Je ne fais pas de procès d’intention”, tout cela peut laisser augurer d’un éventuel futur “soutien”. Peut-être estime-t-il que c’est encore trop tôt, ce en quoi il n’aurait sans doute pas tort, car cela n’aurait pour effet que de le “diaboliser” à son tour, sans vraiment “dédiaboliser” de façon décisive le FN. Wait and see…

    • Descartes dit :

      @ dsk

      [Eh bien, un “soutien” en bonne et due forme : Chevènement appelant à voter FN, voire même adhérant au FN.]

      Je ne crois pas que le problème se pose dans ces termes. Les souverainistes sont trop différents pour imaginer qu’ils puissent « appeler à voter » ou même adhérer à un même parti. Que la galaxie souverainiste arrête de se lancer des noms d’oiseau, c’est déjà un progrès. Qu’elle arrive à se parler, peut-être à soutenir de manière discrètement concertée certaines actions, ce serait déjà pas si mal.

      [Cela étant dit, je serais d’accord avec vous, finalement, pour dire que ses propos, dans cette interview, sont “intéressants”. La faiblesse même de ses arguments, le fait qu’il dise “ça fait beaucoup!”, suggérant par là que certains d’entre eux, au moins, ne seraient pas rédhibitoires, l’absence de toute référence à un quelconque “anti-républicanisme”, la précaution oratoire du début : “Je ne fais pas de procès d’intention”, tout cela peut laisser augurer d’un éventuel futur “soutien”.]

      C’est bien mon avis, même si je ne pense pas que ce « soutien » puisse prendre la forme que vous envisagez.

      [Peut-être estime-t-il que c’est encore trop tôt, ce en quoi il n’aurait sans doute pas tort, car cela n’aurait pour effet que de le “diaboliser” à son tour, sans vraiment “dédiaboliser” de façon décisive le FN. Wait and see…]

      Il y a ça aussi, je pense. Déjà, l’extension aux « gaullistes » est difficile à expliquer.

  31. leucace dit :

    Pourquoi ne pas parler simplement?
    Est il si important que les comportements ,les paroles soient uniformisés?
    A parti du moment ou la loi est respectée, laissons s’exprimer les opinions différentes,celles des journalistes de Libation,ou de l’immonde,celles de Samia,Fatima,Haïfa et Khadija,ou celle plus jubilo-libératoire de Descartes.Arrétons le ‘Misérabilisme’ réducteur.
    Car notre société,la République ,française est au Top.
    La laïcité est solide en France.
    Elle est à parfaire(en Alsace -Moselle et Mayotte).
    La laïcité restera,car c’est un système qui a fait ces preuves,bien aprés que cette mode musulmane soit passée.
    Oui,Wait and See et surtout ne pas tomber dans les pièges idéologiques identitaires qui ne mènent à rien.
    Notre système laîc est suffisant .Pas besoin de verser dans l’hystérie identico-nationaliste,au contraire il faut l’éviter.
    La vraie urgence actuelle est le carcan de l’UE.Déjà depuis janvier ,Dragui a mis une politique Mélenchonienne comme l’a remarqué le journaliste A.Minc.
    Mais si cela ne suffit pas,que l’on arrête de faire peur,nous pourrions sortir de l’euro,sans tout casser comme la Suède et le Danemark,l’ont fait.
    Qui l’avait remarqué?

    • Descartes dit :

      @ leucace

      [Pourquoi ne pas parler simplement?]

      Parce que le monde est complexe. Et qu’il faut prendre en compte cette complexité.

      [Car notre société, la République, française est au Top. La laïcité est solide en France.]

      Je ne suis pas aussi persuadé que vous. Je pense que le traumatisme des attentats du début de l’année a montré au contraire que l’idée même de laïcité est mal comprise, particulièrement par ceux qui ont la charge de la transmettre. Beaucoup d’enseignants se sont trouvés démunis – c’est eux même qui le disent – et en plein désarroi à l’heure d’expliquer à leurs élèves ce qu’est la laïcité et quels sont ses limites.

      Combien d’enseignants, de journalistes, d’hommes politiques ont expliqué que la laïcité c’est « la tolérance de toutes les religions » ou « la liberté de pratiquer la religion de son choix »… et pourtant, la laïcité n’a rien à voir avec ça. La laïcité, c’est l’INDIFFERENCE aux religions dans la sphère publique. L’Etat n’a pas à « respecter » les religions, elles lui sont indifférentes.

      [La laïcité restera,car c’est un système qui a fait ces preuves,bien aprés que cette mode musulmane soit passée.]

      Je ne partage pas votre confiance dans la fin de l’histoire. Les choses ne s’imposent pas simplement parce qu’elles « ont fait leurs preuves ». Il y a fort peu d’Etats laïques sur cette terre, et ce n’est pas une coïncidence : la religion est un moyen puissant de maintenir la cohésion sociale. Un pays est bien plus uni lorsque ses citoyens croient tous les mêmes choses. En France, nous avons pu instaurer l’Etat laïque parce que le « roman national » a remplacé la croyance religieuse. Et aussitôt que le « roman national » s’affaiblit, le besoin de croyance commune trouve satisfaction dans un retour à la religion.

      [Mais si cela ne suffit pas, que l’on arrête de faire peur,nous pourrions sortir de l’euro, sans tout casser comme la Suède et le Danemark, l’ont fait.]

      Non. La Suède et le Danemark ne sont pas « sorties » de l’Euro, elles n’y sont jamais rentrées. Cela fait une grosse différence.

  32. Sam dit :

    Porter une jupe est il cité dans la constitution , je ne crois pas . Porter une jupe est obligatoire dans la constitution française, non !
    Je crois que la constitution francaise a garanti le droit de tout un chacun de donner la possibilité de revendiquer sa différence.
    Le problème de fond ce n’est pas le voile mais le ce qu’il représente. Quand une femme sort à moitié dénudé dehors cela ne gène personne en parle d’avancée sociale ( une culotte ça relève de l’intimité donc plutôt du privé ) Si une femme a envie de privatiser son corps à vous lire ce n’est pas possible je vois plutôt une perte de droit avec vous et un retour à la dictature. Par contre le fond du problème reste l’Islam et comme vous avez des religions de merdes en héritage alors la seule religion qui tient la route vous fais chier et c’est ca votre problème que vous cachez par des moyens détournés une pseudo-analyse de merde.

    • Descartes dit :

      @ Sam

      [Porter une jupe est il cité dans la constitution, je ne crois pas. Porter une jupe est obligatoire dans la constitution française, non !]

      Je ne comprends pas très bien le sens de cette remarque. Qu’est ce que la jupe et la constitution viennent faire dans ce débat ?

      [Je crois que la constitution française a garanti le droit de tout un chacun de donner la possibilité de revendiquer sa différence.]

      J’aimerais bien que vous me signaliez l’article de notre constitution garantissant le droit de « revendiquer sa différence ». Un tel droit n’existe tout simplement pas. La Constitution – ou plutôt la Déclaration de 1789, qui fait partie du bloc de constitutionnalité – garantit de manière générale la liberté – de parole, de circulation, etc. – en précisant fort sagement que « la liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas à autrui », que « « l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits », et finalement que « ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ». On en déduit que la « revendication de sa différence » peut parfaitement être limitée dès lors qu’elle nuirait à autrui.

      [Le problème de fond ce n’est pas le voile mais le ce qu’il représente. Quand une femme sort à moitié dénudée dehors cela ne gène personne en parle d’avancée sociale (une culotte ça relève de l’intimité donc plutôt du privé)]

      Oui, mais si elle sort complètement dénudée, elle ira en prison pour attentat à la pudeur. Chaque société définit ses normes, et le fait de s’écarter de ces normes transmet un message. Vous avez raison en ce sens : le voile ne pose pas de problème per se. On voit des femmes porter des chapeaux, des turbans et toutes sortes de couvre-chefs fantaisistes. Mais derrière leur choix, il n’y a pas l’intention de proclamer leur séparation par rapport à la société où elles vivent et de s’identifier comme membre d’une communauté exclusive.

      [Si une femme a envie de privatiser son corps à vous lire ce n’est pas possible je vois plutôt une perte de droit avec vous et un retour à la dictature.]

      Non, ce n’est pas possible. Notre corps ne nous « appartient » pas. Nous ne pouvons pas nous vendre en esclavage, pas plus que nous ne pouvons vendre nos organes. Il n’y a rien de « dictatorial » là dedans. Tout au contraire : il s’agit de protéger les individus de mécanismes sociaux qui les broieraient si la société n’y mettait pas des limites.

      On pourrait parler de « dictature » – ou pour être plus précis, de totalitarisme – si on prétendait imposer aux gens des comportements qui relèvent de la sphère privée. Mais ce n’est pas le cas. Personne ne remet en question votre droit absolu de porter une burqua ou même deux chez vous si ça vous chante. Si vous voulez vivre reclus, c’est votre droit le plus absolu dès lors que cela ne nuit à personne. Mais dans la sphère publique, nous ne sommes jamais totalement libres. Par définition.

      [Par contre le fond du problème reste l’Islam et comme vous avez des religions de merdes en héritage alors la seule religion qui tient la route vous fais chier et c’est ca votre problème que vous cachez par des moyens détournés une pseudo-analyse de merde.]

      Ainsi, il y aurait des « religions de merdes » et « une seule religion qui tient la route » ? Vous savez, elles disent toutes la même chose. J’aimerais bien savoir quels sont les critères qui vous permettent de décider quelle est la « vraie religion »…

      Je crains que vous ne soyez resté coincé au moyen-âge. Aucune religion ne « tient la route ». Depuis la plus haute antiquité, les hommes se sont donné des dieux pour satisfaire différents besoins : expliquer ce qui leur semblait inexplicable, créer une identité communautaire, légitimer le pouvoir du monarque, se consoler de ce mystère ultime qui est celui de la mort. Elles se sont étendues, maintenues ou rétrécies en fonction de leur capacité à satisfaire ces besoins. Mais en six mille ans d’histoire aucune n’a été en mesure de prouver qu’elle « tient la route »…

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