Savez-vous qui est Jef Duval ? Son cas a fait pourtant couler beaucoup d’encre ces derniers mois. Il s’agit de ce jeune technicien d’ERDF menacé de sanction par son employeur pour avoir omis de procéder à des coupures – ou pour être plus précis à des réglages des limites de puissance permettant une consommation minimale – de gaz et d’électricité chez des clients en situation de précarité (1).
Cette affaire a donné lieu à la traditionnelle vague d’interventions larmoyantes dans divers médias. Une bonne partie de la gauche bienpensante a fait circuler articles et pétitions demandant que toute sanction contre Jef Duval soit abandonnée. Les argument sont archiconnus: qui peut être insensible au dénouement, à la misère quelquefois des familles qui ne sont pas en mesure d’honorer leurs factures d’énergie ? On peut parfaitement comprendre le geste de Jef Duval. Mais faut-il pour autant l’excuser, voir pour certains le glorifier, en faisant de lui une sorte de “bon samaritain” du XXIème siècle, qu’il faudrait plutôt imiter que blâmer ?
Dans notre culture judéo-chrétienne, il ne manque pas de références symboliques à ce genre de situation. Prenons la parabole du bon samaritain:
“Jésus reprit : “Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba au milieu de brigands qui, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à demi mort. Un prêtre vint à descendre par ce chemin-là ; il le vit et passa outre. Pareillement un lévite, survenant en ce lieu, le vit et passa outre. Mais un samaritain, qui était en voyage, arriva près de lui, le vit et fut pris de pitié. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile et du vin, puis le chargea sur sa propre monture, le mena à l’hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux deniers et les donna à l’hôtelier, en disant : “Prends soin de lui, et ce que tu auras dépensé en plus, je te le rembourserai, moi, à mon retour.” Lequel de ces trois, à ton avis, s’est montré le prochain de l’homme tombé aux mains des brigands ?” Il dit : “Celui-là qui a exercé la miséricorde envers lui.” Et Jésus lui dit : “Va, et toi aussi, fais de même”” (Luc 10, 29-37)
On peut aussi citer l’exemple de Saint Martin, officier romain qui, après avoir distribué généreusement sa solde entre les pauvres, aurait découpé en deux son propre manteau pour le partager avec un déshérité transi de froid. Mais il y a entre le cas de Fred Duval et ceux de Saint Martin ou du bon samaritain une différence fondamentale qui n’aura pas, je suis sur, échappé au lecteur. Laquelle ? Et bien, quand le bon samaritain prend soin de l’homme tombé aux mains des brigands, il le fait sur ses propres deniers. Lorsque Saint Martin partage le manteau, c’est de son manteau qu’il s’agit. Mais qu’en est-il de Jef Duval ? A-t-il proposé de régler les factures impayées de ses propres deniers ? Non. Et c’est là où réside le problème.
Il y a une grande différence entre faire la charité avec ses propres deniers, et la faire avec les biens d’autrui. Contrairement à Saint Martin, qui partagea son manteau, Jef Duval a partagé le manteau de son voisin – ou pour être précis, celui de la collectivité toute entière. Et sans lui demander son avis. Peut-on admettre que les agents publics, auxquels la collectivité confie une parcelle – fut elle petite – de ses biens en disposent à leur guise, sans demander l’avis de personne ? C’est là la question fondamentale que pose l’affaire Duval.
Il y a dans la “gauche radicale” une certaine indifférence à la question de la propriété publique. Si l’on me permet une anecdote personnelle, je me souviens d’avoir vu dans une ville de province il y a quelques années une affichette invitant à une manifestation dans la ville voisine, et indiquant un rendez-vous à la gare SNCF avec la mention “transport SNCF gratuit”. J’avais alors demandé au responsable comment ils avaient réussi à organiser un tel transport, et il m’a répondu “c’est simple: on monte tous ensemble dans le train, et quand le contrôleur se présente on refuse de payer”. Ce responsable – si l’on me permet cet abus de langage – avait le plus grand mal du monde à comprendre que le transport “gratuit” qu’il promettait à ses troupes était en fait payé par un prélèvement sur l’ensemble des usagers du train. Un prélèvement forcé, puisque personne n’avait pris la peine de demander aux usagers leur avis. L’idée qu’on impose par la force du nombre un tel prélèvement ne semblait inquiéter personne. Et quand je vois refleurir le même genre de réflexions dans un certain nombre de blogs concernant le déplacement à la manifestation du Front de Gauche organisée le 18 mars, je me dis qu’on n’a guère progressé dans cette réflexion.
En maintenant les abonnements au gaz et à l’électricité de gens qui ne pouvaient pas payer, Jef Duval a distribué une partie du bien de tous. La question n’est pas de savoir s’il fallait ou pas le faire, mais si Jef Duval avait, seul dans son coin, le droit de disposer souverainement du bien commun. La réponse est pour moi évidente: c’est non. C’est aux représentants du peuple de faire les règles, et aux citoyens de se battre pour que les règles soient bonnes. Le législateur a bien prévu un système de tarifs sociaux et autres aides pour garantir un accès universel à l’énergie. On a le droit de penser que ce système est incomplet ou insuffisant et de se battre pour l’améliorer. Mais on n’a pas le droit – surtout lorsqu’on est un agent public – de faire justice soi-même aux frais du contribuable.
Il est toujours facile de faire la charité lorsque cela ne nous coûte rien. Paradoxalement, si la sanction n’existait pas le geste de Jef Duval n’aurait la moindre signification, le moindre héroïsme. Il n’y a rien de particulièrement noble à distribuer gracieusement l’argent des autres lorsqu’on ne risque rien. C’est le risque qui accompagne la désobéissance à la règle qui crée le dilemme. Et c’est pourquoi Jef Duval doit être sanctionné. Une sanction bien entendu proportionnée, qui tienne compte autant de la gravité des faits que de la noblesse des motivations. Mais il faut une sanction. C’est une question de pédagogie sociale.
Pourquoi parler de pédagogie ? Parce que derrière cette affaire on trouve une idéologie qu’il faut combattre avec les armes de la raison. Celle qui fait de la “désobéissance” non seulement une valeur en soi, mais un “devoir”. Pour illustrer le propos, voici un extrait d’un article publié par le PG le 9 mars dernier sous le titre fort révélateur “ERDF: désobéir est un devoir” (2).
Alors désobéir ? Oui ! Parce qu’aujourd’hui, face à ceux et celles qui aveuglément appliquent les plans sociaux ordonnés par les actionnaires sacrifiant des milliers de familles, face à ceux qui ordonnent des coupures de gaz et d’électricité alors qu’ils savent qu’ils feront descendre ces même familles de la dernière marche de chez eux à la rue , face à cette politique du bouc émissaire qui veut rafler les enfant pour mieux expulser les parents, face cette injustice sociale érigée en dogme, face à tout cela : désobéir et résister sont devenus un devoir.
Est-il nécessaire de rappeler les dangers d’une telle idéologie ? La désobéissance implique nécessairement un choix. Sauf à tomber dans le nihilisme absolu – qui est une aliénation absolue – de désobéir par principe à toute règle, il faut bien choisir quelles sont les règles auxquelles il est légitime de désobéir, et quelles sont celles qu’il est impératif de respecter. Seulement voilà: qui fait ce choix ? Qui est légitime pour “filtrer” ainsi les lois qui chez nous sont votées par la représentation nationale ? Aucun corps constitué ne peut revendiquer une telle légitimité. C’est donc à l’individu que cette idéologie réserve ce choix. Chacun de nous a le devoir individuel de désobéir – comme ce fut le cas de Jef Duval – et donc le droit de décider à quelles règles désobéir. Les partisans de la théorie de la désobéissance aiment à citer le texte de l’article 35 la constitution montagnarde de 1793: “« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ». Seulement, ce principe fort louable en principe pose en pratique une question complexe: qui est en droit de juger que “le gouvernement viole les droits du peuple” ? Comment éviter qu’une “portion du peuple” n’utilise ce principe pour faire triompher ses intérêts particulier en qualifiant toute mesure qui porterait atteinte à ceux-ci comme une “atteinte aux droits du peuple” ?
L’ennui, voyez-vous, c’est qu’il n’existe pas de morale “naturelle”, extérieure aux hommes. Différents individus feront inévitablement des choix différents en fonction de leurs idéologies et surtout de leurs intérêts. Certains trouveront que c’est leur “devoir” de désobéir lorsqu’on leur ordonne de couper le courant à une famille. D’autres estimeront que c’est leur “devoir” de désobéir lorsqu’on exige d’eux de payer le même salaire pour le même travail aux hommes et aux femmes ou d’accorder le même service aux blancs et aux noirs. Il est très dangereux d’imaginer qu’on puisse transformer des choix individuels en règle générale et universelle. L’idéologie de la “désobéissance”, sous les dehors les plus nobles, conduit donc à la fragmentation du politique et à la logique de l’individu-roi. L’Etat de droit est fondé sur un pacte fondamental: chacun s’engage à obéir aux lois – et accepte d’être sanctionné en cas de manquement – dès lors que celles-ci sont élaborées en respectant un certain nombre de procédures en respectant un certain nombre de principes (3). Si l’on met en cause ce pacte fondamental, et c’est ce que fait la théorie de la “désobéissance”, on ouvre la porte au chaos.
Descartes
(1) L’affaire est un peu plus compliqué. Selon ERDF, ce qui lui est reproché n’est pas tant d’avoir refusé les coupures, mais d’avoir menti et renseigné le système d’information de l’entreprise comme si les coupures avaient été réalisées. Cette situation crée un risque de sécurité évident, puisque l’entreprise peut, sur la base des informations dont elle dispose, autoriser en toute bonne foi des travaux alors que les réseaux ne sont pas coupés. Mais ce n’est pas cette question-là qui m’intéresse ici: c’est l’acte “charitable” en lui même.
(2) Je prends cet exemple mais je pourrais en prendre bien d’autres. Ainsi par exemple, dans un style très différent: “Nous ne pouvons que nous réjouir, partout où ils surgissent, de l’emportement et du désordre. (…) Qu’elles deviennent méthodiques, qu’elles se systématisent, et les incivilités confluent dans une guérilla diffuse, efficace, qui nous rend à notre ingouvernabilité, à notre indiscipline primordiales. Il est troublant qu’au nombre des vertus militaires reconnues au partisan figure justement l’indiscipline. En fait, on n’aurait jamais dû délier rage et politique” (extrait de “l’insurrection qui vient”)
(3) Et c’est pourquoi la société admet qu’il est du devoir d’un agent public de désobéir aux ordres, même provenant d’une autorité légitime, dès lors qu’elles sont “manifestement illégales et contraires à l’ordre public”, selon l’expression consacrée.
Je te trouve un peu dur…
D’une certaine façon, cet agent a pris des (gros) risques relativement a sa carriere et ses futurs revenus.
Indirectement oui, il paie de sa personne, et il ne soutient pas si mal que cela tes comparaisons avec le nouveau testament.
Et plus generalement quant a la desobeissance civile, je veux bien admettre qu’elle est innaceptable dans un Etat de droit… A condition qu’on m’accorde qu’elle soit valide quand ce n’est pas le
cas!
Or, sommes nous encore dans un Etat de droit où la loi est l’expression de la souveraineté populaire? Depuis 2005, les soupcons du contraire se multiplient…
D’une certaine façon, cet agent a pris des (gros) risques relativement a sa carriere et ses futurs revenus.
Le seul risque qu’il a pris, c’est celui d’une sanction. Si comme le souhaitent certains ce genre de comportements échappent à toute sanction, alors il n’y a plus de risque.
Indirectement oui, il paie de sa personne, et il ne soutient pas si mal que cela tes comparaisons avec le nouveau testament.
Seulement s’il est sanctionné. Sinon, il n’aura fait que distribuer aux pauvres des biens qui ne lui appartenaient pas. Je ne connais pas d’exemple dans le nouveau testament – ni dans l’ancien,
d’ailleurs – de quelqu’un qui ait gagné le paradis en distribuant le bien d’autrui. Tant qu’iln’y a pas de sanction, l’agent en question n’aura rien “payé” et son geste ne lui aura rien coûté.
Et plus generalement quant a la desobeissance civile, je veux bien admettre qu’elle est innaceptable dans un Etat de droit… A condition qu’on m’accorde qu’elle soit valide quand ce n’est
pas le cas!
Admettons. Qui est en droit de décider si c’est le cas ou pas ?
Or, sommes nous encore dans un Etat de droit où la loi est l’expression de la souveraineté populaire? Depuis 2005, les soupcons du contraire se multiplient…
Je ne vois pas sur quoi tu fondes tes “soupçons”. Mais supposons que ce soit le cas. Si l’on n’est plus dans un “état de droit”, alors c’est l’ensemble des lois qui devient illégitime, et pas
seulement celles qui ne nous arrangent pas. En d’autres termes, le code du travail est aussi suspect de ne pas représenter la “souveraineté populaire” que les règles concernant les coupures de
courant. Si tu déclares la mort de l’état de droit, alors du reconnais à n’importe quel patron à violer le code du travail… on ne peut pas se donner à soi même le droit de désobéir et ne pas le
reconnaître aux autres!
ta proposition A: “Seulement, ce principe fort louable en principe pose en pratique une question complexe: qui est en droit de juger que “le gouvernement
viole les droits du peuple” ?”
ta proposition B: ” L’Etat de droit est fondé sur un pacte fondamental: chacun s’engage à obéir aux lois – et accepte d’être sanctionné en cas de manquement – dès lors que celles-ci sont élaborées en respectant …un certain nombre de principes”
Si c’est pas de la langue de bois, cà ? On dirait du Sarko pur jus, le super avocat qui en bon professionnel est capable de plaider brillamment une cause puis son contraire dans la minute qui
suit . Ah ça oui, il est inégalable pour ça !
Ces 2 propositions A et B me paraissent totalement contradictoires car si “qui” n’ est pas en droit de juger quelque chose négativement, je ne vois pas comment “qui ” est en droit de
juger qu’un certain nombre de principes sont respectables !
Ah, si, j’oubliais, dans une chambrée d’un asile d’aliénés, 8 cinglés sur 10 peuvent décider démocratiquement qu’un principe de félés est leur loi et doit être respecté !
Donc il ne faut jamais désobéir, De Gaulle et les résistants auraient dû etres fusillés pour s’être opposés au gouvernement légal de Vichy !
La désobéissance, c’est mal, c’est d’ailleurs ce qu’ont plaidé à Nuremberg certains bourreaux nazis qui ont répondu qu’ils n’avaient fait qu”éxécuter les ordres de leur supérieur qui lui même
n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son supérieur qui lui même n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son supérieur … qui lui même n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son
gouvernement légal de fait puisque de toute façon c’est la gagnant qui fait la loi et écrit l’histoire, au moins le temps que dure sa dictature ! C’est vrai qu’après ça a changé de rapport
de forces, mais alors qui est en droit de juger que …
Qu’on l’écartèle donc publiquement en place de grêve (au titre de dommage collatéral avec tolérance par ex de 7% de pertes cumulées d’employés et de nécessiteux – ben oui puisque article
2.2 de la convention européenne on peut faire feu sur les émeutiers-) ce salaud d’employé insoumis, pendant ce temps de spectacle, on ne s’intéressera pas aux super-riches qui multiplient
leurs richesses par 4 en spéculant grace à le “crise” !
“Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, la classe des riches qui mène cette
guerre, et nous sommes en train de la gagner.” (Warren Buffet, milliardaire américain,
1ère fortune des Etats-Unis)
Eh oui, c’est ça la réalité qu’on occulte, lisez donc les profits sur les sites de placements de fonds !
Si c’est pas de la langue de bois, cà ? On dirait du Sarko pur jus (…)
Franchement, vous n’avez pas marre de cette “reductio ad Sarkozium” ? Moi si. Marre de cette manie de ramener Sarkozy à tort et à travers comme moyen de dévaluer le discours de l’autre. Marre du
croquemitaine de confort. Dans six semaines, il est probable que Sarkozy quitte nos vies. Comment ferez vous alors ? Ou trouverez-vous un nouveau croquemitaine de confort ?
Ceci étant dit, voyons le fond de votre commentaire: vous m’accusez de “plaider une chose et son contraire”, alors qu’en fait il n’y a aucune contradiction entre les deux éléments. Le contrôle de
la conformité des procédures et du respect des principes en ce qui concerne les normes juridiques n’est pas laissé dans note société aux “parties du peuple”. Il est confié à une série
d’institutions (Tribunaux administratifs, Cours administratives d’appel, Conseil d’Etat, Conseil constitutionnel…). Le fait d’accepter les décisions de ces institutions fait évidemment partie
du “pacte fondamental” qui fonde l’Etat de droit. La constitution de 1793, en restant muette sur les institutions qui seraient en mesure de décider que les droits du peuple sont violés, semble
indiquer que c’est le peuple lui même ou – et c’est là qu’est le problème – “une partie du peuple” qui peut en juger.
Ces 2 propositions A et B me paraissent totalement contradictoires car si “qui” n’ est pas en droit de juger quelque chose négativement, je ne vois pas comment “qui ” est en droit de
juger qu’un certain nombre de principes sont respectables !
La question n’est pas de savoir quels principes sont “respectables”, mais quels principes doivent être respectés. Ce n’est pas une qualification morale, c’est une qualification juridique. Le
dégagement de ces principes résulte non pas de la décision de telle ou telle institution ou personne, mais d’un long travail historique qui construit un consensus autour de certaines valeurs. Ce
sont ces consensus qui ensuite sont “institutionnalisés” dans des textes ou dans des institutions elles mêmes.
Ah, si, j’oubliais, dans une chambrée d’un asile d’aliénés, 8 cinglés sur 10 peuvent décider démocratiquement qu’un principe de félés est leur loi et doit être respecté !
Si vous admettez comme “principe” que la majorité est toute puissante, oui. Mais vous pouvez constater qu’aucun état de droit n’est fondé sur un tel principe. En France, pour ne prendre qu’un
exemple, certaines règles échappent à la décision majoritaire simple. Il ne suffit pas que 8 français sur 10 votent un texte pour qu’il devienne loi.
Donc il ne faut jamais désobéir, De Gaulle et les résistants auraient dû etres fusillés pour s’être opposés au gouvernement légal de Vichy !
Je n’ai jamais dit ça. Entre “il ne faut pas désobéir à la norme légitime” et “ne jamais désobéir”, il y a une petite différence. Comme je vous l’ai indiqué, la loi elle même prévoit des
situations dans lesquelles la désobéissance est non seulement permise mais obligatoire: un fonctionnaire est tenu de désobéir un ordre “manifestement illégal et contraire à l’intérêt public”.
Cela me semble couvrir une bonne partie des “désobéissances” au gouvernement de Vichy (que vous proclamez “légal” un peu vite).
La désobéissance, c’est mal, c’est d’ailleurs ce qu’ont plaidé à Nuremberg certains bourreaux nazis qui ont répondu qu’ils n’avaient fait qu”éxécuter les ordres de leur supérieur qui lui même
n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son supérieur qui lui même n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son supérieur … qui lui même n’avait fait qu”éxécuter les ordres de son
gouvernement légal de fait puisque de toute façon c’est la gagnant qui fait la loi et écrit l’histoire, au moins le temps que dure sa dictature !
J’avoue avoir du mal à voir le rapport avec la choucroute de cette “reductio ad Hitlerum” déguisée (si ce n’est pas Sarkozy, c’est Hitler). Les accusés au procès de Nuremberg ont “obéi” au régime
hitlérien non pas parce qu’ils pensaient que “désobéir c’est mal”, mais parce qu’ils adheraient à ses buts et sa politique. A Nuremberg on n’a pas jugé d’ailleurs ceux qui obéissaient de ordres,
mais ceux qui les donnaient. La question de savoir s’il auraient du ou non désobéir ne se pose donc pas dans le cas d’espèce.
Maintenant, sur la question de savoir si l’obéissance à un ordre transfère la responsabilité de l’exécutant à l’ordonnateur, la réponse est essentiellement pragmatique: d’un côté, on voit mal
comment la société pourrait fonctionner si les agents étaient en permanence soumis à l’obligation de juger les ordres qu’ils recoivent. D’un autre côté, il faut bien admettre que dans des
circonstances exceptionnelles un agent puisse refuser d’exécuter un ordre lorsque celui-ci est “manifestement” contraire à l’intérêt public. C’est entre ces deux contraintes qu’on a construit le
système actuel.
Qu’on l’écartèle donc publiquement en place de grêve (au titre de dommage collatéral avec tolérance par ex de 7% de pertes cumulées d’employés et de nécessiteux – ben oui puisque
article 2.2 de la convention européenne on peut faire feu sur les émeutiers-) ce salaud d’employé insoumis, pendant ce temps de spectacle, on ne s’intéressera pas aux super-riches qui
multiplient leurs richesses par 4 en spéculant grace à le “crise” !
Je ne comprends pas trop ce délire. Je vous ai déjà montré qu’aucune “convention européenne” n’autorise a “faire feu sur les émeutiers” (la convention dit seulement qu’on ne peut assimiler un tel
acte à une exécution). Quant aux “riches”, je commence aussi à en avoir marre à cette référence perpetuelle aux “riches” qui sert de justification à peu près à n’importe quoi. Si les “riches”
vous embêtent tant, dites vous bien que si vous proclamez un “droit à la désobéissance”, les riches seront les premiers à l’utiliser. “Entre le faible et le fort, c’est la liberté qui asservit et
la Loi qui libère”. Porter atteinte à l’obéissance à la Loi, ce n’est pas protéger les pauvres, c’est faire le jeu des “riches”.
Re-bonjour, ci joint PS à mon précédent post:
“(1) L’affaire est un peu plus compliqué. Selon ERDF, ce qui lui est reproché n’est pas tant d’avoir refusé les coupures, mais d’avoir menti et renseigné le système d’information de
l’entreprise comme si les coupures avaient été réalisées. Cette situation crée un risque de sécurité évident, puisque l’entreprise peut, sur la base des informations dont elle dispose, autoriser
en toute bonne foi des travaux alors que les réseaux ne sont pas coupés.
1)- Attendu que Jef Duval n’est pas un homme public (ni sauf erreur encore moins un homme politique)
2)- Cet homme, tu viens de le juger et de le condamner sur un site accessible à tous
3)- ce jugement et cette condamnation, tu l’as faite sans lui accorder un droit légitime de présenter sa défense As-tu cherché à le joindre pour recueillir son point de vue, les circonstances
exactes, ses motivations? Je te rappelle que même un employeur a pour obligation d’avoir un entretien préalable.
4)- à propos d’employeur, par contre, tu fais référence à l’argumentation de ERDF, ton procès n’est donc pas équitable et relève plus de l’inquisition que d’autre chose
5)- “Mais ce n’est pas cette question-là qui m’intéresse ici: c’est l’acte “charitable” en lui même.”
Tu fais étalage d’états d’ame pour “peanuts” qui ne mettent pas l’économie de la France en péril, alors que d’autres trahissent la nation et la mettent réellement en péril, auquel cas là
tu te retranches alors derrière une technocratie soi-disant incontournable.
Tu reproches aux “gauchistes” de faire en sorte d’anésthésier toute possibilité d’évolution réelle,mais que fais tu depuis des mois au travers de ce blog sinon le même chose.
Il y a des moments dans l’histoire où il faut se décider à se bouger même si tout n’est pas à l’équerre. Je sais déja ce que tu vas me répondre, “qu’est-ce qui te fais affirmer que c’est le
moment” ? Ben le jour où tu auras ta réponse personnelle, il sera trop tard, je prends date avec toi! Si les pompiers et les médecins urgentistes faisaient comme toi, le nombre de morts
augmenterait singulièrement.
Je suis très déçu par ton comportement qui me fait comprendre que de même que la guerre est trop sérieuse pour qu’on en confie les initiatives aux militaires, la gouvernance d’un pays est
bien trop sérieuse pour qu’on la confie à des technocrates !
Si tu ne sais pas pour qui voter, vote donc “Lapin Duracell” pour que rien ne change, d’ailleurs il y a au moins une chose pour laquelle je le remercie, c’est d’avoir supprimé les pub à la TV
après 20 H, tu vois, je suis impartial !
2)- Cet homme, tu viens de le juger et de le condamner sur un site accessible à tous
Vous dites n’importe quoi. Quand bien même je le voudrais, je n’ai le pouvoir ni de “juger”, ni de “condamner” qui que ce soit. Je n’ai fait qu’exprimer mon avis sur les actes de Jef Duval,
sans jamais lui manquer le respect qu’on doit aux personnes. Ce faisant, je n’ai fait qu’exercer mon droit de citoyen.
3)- ce jugement et cette condamnation, tu l’as faite sans lui accorder un droit légitime de présenter sa défense. As-tu cherché à le joindre pour recueillir son point de vue, les
circonstances exactes, ses motivations?
Je vous le répète: moi je ne “juge” ni ne “condamne” personne. Le jugement et la condamnation, c’est l’affaire du conseil de discipline et éventuellement des tribunaux en appel. Jef Duval aura
alors toute la latitude de présenter sa défense.
Vous confondez le travail du chroniqueur et celui du juge. Tiens, juste une petite curiosité: vous même, avant de commenter les frasques d’un personnage qui ne serait pas un homme public,
prenez-vous le soin de “le joindre pour recueillir son point de vue” ? Bien sur que non. Le débat public ne fonctionne pas comme cela: Jef Duval a tout comme moi l’opportunité de
s’exprimer publiquement s’il estime mes observations inexactes. Et s’il estime que j’ai dépassé les limites du débat public, il peut toujours me poursuivre pour diffamation.
Je te rappelle que même un employeur a pour obligation d’avoir un entretien préalable.
Et alors ?
4)- à propos d’employeur, par contre, tu fais référence à l’argumentation de ERDF, ton procès n’est donc pas équitable et relève plus de l’inquisition que d’autre chose
De quel “procès” parlez vous ? Moi je ne fais aucun “procès”. D’ailleurs, je me demande pourquoi vous n’avez pas envers ceux qui innocentent Jef Duval les mêmes exigeances que vous avez envers
moi. Après tout, eux aussi font un “procès”… même si la décision du jury est l’inverse de la mienne…
Tu fais étalage d’états d’ame pour “peanuts” qui ne mettent pas l’économie de la France en péril, alors que d’autres trahissent la nation et la mettent réellement en péril, auquel cas là tu
te retranches alors derrière une technocratie soi-disant incontournable.
Le reproche pourrait t’être retourné: après tout, tu as consacré du temps à répondre à un papier sur le cas de Jef Duval, cas qui “ne met pas l’économie dela France en péril”, au lieu de
consacrer ce temps à ceux qui “trahissent la nation”. On est donc deux à l’heure de “faire étalage d’états d’âme pour des peanuts”.
Il y a des moments dans l’histoire où il faut se décider à se bouger même si tout n’est pas à l’équerre. Je sais déja ce que tu vas me répondre, “qu’est-ce qui te fais affirmer que c’est le
moment” ?
Aussi. Mais je te dirai surtout que la chanson “il faut arrêter de réflechir et se concentrer sur l’action” autant que celle “il faut se concentrer sur les vrais problèmes” doivent être compris
pour ce qu’ils sont: des outils pour empêcher les gens d’exercer leur sens critique et assurer leur soumission aux petits et grands timoniers. Ces chansons, je les ai trop entendues. La question
du statut de la Loi et de la discipline sociale ne sont pas des questions secondaires. Ce sont des questions fondamentales. Bien plus fondamentales que le fait de savoir s’il faut voter pour X ou
pour Y.
Si les pompiers et les médecins urgentistes faisaient comme toi, le nombre de morts augmenterait singulièrement.
Eh bien, la grande différence entre la politique et les services d’urgence, c’est que l’urgence pense dans le très court terme, et la politique pense – ou devrait penser – le long terme. Je me
refuse à considérer que la politique doive opérer sous le diktat de l’urgence.
Je suis très déçu par ton comportement qui me fait comprendre que de même que la guerre est trop sérieuse pour qu’on en confie les initiatives aux militaires, la gouvernance d’un pays est
bien trop sérieuse pour qu’on la confie à des technocrates !
J’en suis ravi. Je n’ai jamais pensé qu’il faille confier la “gouvernance d’un pays” aux technocrates.
Si tu ne sais pas pour qui voter, vote donc “Lapin Duracell” pour que rien ne change,
Je te remercie du conseil, j’en tiendrai compte au moment de prendre ma décision.
Bonjour,
je comprends que vous ayez prix l’exemple du bo, samaritain pour votre démonstration. Mais la figure qui me semble le plus coller à la situation ou en tout cas à la vision que la gauche radicale
se fait de cette affaire est celle de Robin des Bois. L’archétype du héros qui prend aux riches (EdF et ses profits) pour donner aux pauvres.
L’archétype du héros qui prend aux riches (EdF et ses profits) pour donner aux pauvres.
Sauf que le “riche”, ici, c’est nous tous. Parce qu’EDF est, jusqu’à nouvel ordre, une entreprise publique. Et que ses “profits” abondent le budget de l’Etat.
Tu n’as pas tort d’invoquer la figure de Robin des Bois, figure dont il n’est pas inutile de rappeler qu’elle fut l’une des préferées de Hollywood, a une époque où la morale hollywoodienne
n’était pas précisement progressiste. Pourquoi ? Parce que la figure hollyoodienne de Robin Hood est moins liée au vol des riches pour donner aux pauvres qu’à la révolte fiscale. Robin Hood
apparaît comme le héros de la résistance contre le Sheriff de Nottingham, qui écrase le pays d’impôts au nom d’un roi illégitime (Jean sans Terre) qui aurait usurpé la place du roi légitime
(Richard Coeur de Lion). Pas mal de ressemblances avec le discours gauchiste…
en ce qui me concerne, je ne vois pas les choses de la même manière.
pour moi, toute mise en cause de l’ordre établi actuel est une bonne chose, car elle montre ce qui ne peut plus durer.
On ne sait jamais d’avance quel type d’action aura un retentissement large et permettra de faire évoluer l’ordre établi.
si je prend comme exemple les émeutes de banlieue d”il y a quelques années, rien sur le plan du “droit” ne les justifiaient, mais elles ont eu comme effet positif de montrer à tous qu’il y avait
un problème des banlieues et l’action qui a suivi du gouvernement a été de réhabiliter de nombreux ensembles (j’ai entendu pour 40 milliards sur le quinquennat … à vérifier). On peut discuter
de la pertinence de l’action gouvernementale, mais il est certain que ces émeutes ont eu leurs effets, même pour un “dur” comme N Sarkozy.
Il est vrai que certaines actions peuvent entraîner plus d’effet négatifs que positifs. Un bon exemple est celui de la destruction des “twin towers” de New York (1). Il faut que la “légimité”
d’une action soit comprise pour que le pouvoir en place soit obligé d’en tenir compte de manière positive.
je concluerai en l’occurence: si Jef Duval est “amnistié” tant mieux, surtout si il fait des émules et suscite un débat national sur la répartition des richesses …
(1) on peut d’ailleurs en discuter, car les guerres d’Irak et d’Afghanistant ont coûtées très cher aux USA financièrement et en “image”. L’affaiblissement relatif de la puissance américaine sur
la période est peu contestable (je rappelle son endettement, son déficit commercial, son niveau de vie et son espérance de vie en baisse, mais il a encore de nombreux atouts à savoir ses
universités, son leadership technique et militaire)
pour moi, toute mise en cause de l’ordre établi actuel est une bonne chose, car elle montre ce qui ne peut plus durer.
Ah bon ? Prenons un exemple si tu le veux bien: les émeutiers – comme ce fut le cas en 2005 – mettent le feu à une école, à une bibliothèque, à un gymnase. Trouves-tu que ce soit “une bonne
chose” ? Prenons un autre exemple: un élève poignarde un professeur en plein cours. Dirais-tu que “c’est une bonne chose” ?
Ton commentaire est justement un exemple de cette idéologie gauchiste qu’il me fait à mon avis combattre. Non, toutes les “remises en cause” ne se valent pas, pour paraphraser un célèbre ministre
de l’intérieur. L’idée que la désobéissance serait par essence bonne indépendament de la nature de la règle à laquelle on désobéit est compréhensible dans un enfant de dix ans, mais devenir
adulte c’est précisement laisser de côté le principe de plaisir pour se plier au principe de réalité. Celui-là même qu’on semble tant mépriser au front de gauche…
On ne sait jamais d’avance quel type d’action aura un retentissement large et permettra de faire évoluer l’ordre établi.
Bien sur que si. On sait par exemple que les mouvements qui ont commencé par mettre le feu aux bibliothèques publiques n’onta jamais abouti à quelque chose de bon. Cette idée que puisqu’on ne
sait pas quel type d’action pourrait faire évoluer l’ordre établi il faut les essayer toutes au hasard a un petit côté Shadock. Qu’est-ce que tu attends pour t’immoler par le feu sur la place de
la Concorde ? Après tout, comment savoir si ce n’est pas cela qu’il faut pour démarrer la Révolution ? As-tu dit à ton fils de foutre le feu à son école ? Après tout, c’est peut-être là
l’étincelle qui fera flamber la prairie…
si je prend comme exemple les émeutes de banlieue d”il y a quelques années, rien sur le plan du “droit” ne les justifiaient, mais elles ont eu comme effet positif de montrer à tous qu’il y
avait un problème des banlieues et l’action qui a suivi du gouvernement a été de réhabiliter de nombreux ensembles (j’ai entendu pour 40 milliards sur le quinquennat … à vérifier).
Tu ferais bien de vérifier. Les émeutes de 2005 n’ont en rien changé à la politique de la Ville. On a simplement continué avec les programmes de réhabilitation urbaine à peu près au même rhytme
qu’avant. Les émeutes de 2005 sont plutot un contre-exemple de ta théorie. On a vu partir en fumée des centaines de millions en biens publics pour un effet nul.
Il est vrai que certaines actions peuvent entraîner plus d’effet négatifs que positifs. Un bon exemple est celui de la destruction des “twin towers” de New York
C’est pourtant toi qui écrivait “toute mise en cause de l’ordre établi est une bonne chose”…
je concluerai en l’occurence: si Jef Duval est “amnistié” tant mieux, surtout si il fait des émules et suscite un débat national sur la répartition des richesses …
Mais tu n’as aucune garantie que les “émules” en question iront dans le même sens. Après tout, un patron pourrait décider lui aussi de “mettre en cause l’ordre établi” et de ne plus respecter le
code du travail. Là aussi, ce serait une bonne chose ?
une remarque sur EdF
vous écrivez
“parce qu’EDF est, jusqu’à nouvel ordre, une entreprise publique. Et que ses “profits” abondent le budget de l’Etat”
EdF se comporte en tous points comme un entreprise privée. EdF fait d’ailleurs de nombreux investissements à l’étranger (investissements qui ont été particulièrement discutables en terme
d’opportunité et de retour sur investissement).
EdF est d’ailleurs une société anonyme, cotée en bourse. Sa seule carctéristique par rapport à d’autres société privées est d’avoir comme actionnaire très majoriatire l’Etat.
Il n’y a pour moi aucune raison de distinguer EdF d’une autre entreprise privée (1) L’état comme actionnaire touche plus sur EdF, mais il touche aussi sur toute entreprise privée via diverses
taxes.
(1) comme toute entreprise, EdF a son histoire, ses points forts et faibles …
EdF se comporte en tous points comme un entreprise privée.
Tu poses un problème intéressant: à ton avis, quels sont les éléments qui carectérisent le comportement d’une entreprise publique par opposition à une entreprise privée ?
EdF est d’ailleurs une société anonyme, cotée en bourse. Sa seule carctéristique par rapport à d’autres société privées est d’avoir comme actionnaire très majoriatire l’Etat.
En d’autres termes, voler EDF c’est donc bien voler l’Etat, donc nous tous. C’était précisement mon point.
Il n’y a pour moi aucune raison de distinguer EdF d’une autre entreprise privée (1) L’état comme actionnaire touche plus sur EdF, mais il touche aussi sur toute entreprise privée via diverses
taxes.
Avec quelques nuances, tout de même. D’une part, l’Etat est majoritaire au conseil d’administration d’EDF, et la politique de l’entreprise dépend des décisions de l’Etat. Le comportement que tu
critiques n’est donc pas le résultat des décisions prises par “les riches” mas des choix faits par les citoyens.
Bonjour à vous,
Dans “une autre vie”, cette affaire aurait fait partie du “divers”, un acte isolé avec une personne isolée.
Qu’il soit sanctionné, je laisse sa direction prendre ses responsabilités et je ne suis pas à l’intérieur de l’entreprise pour juger.
En tant qu’ancien syndicaliste, je pose la question de fond en langage “ouvrier”: est-ce une action de masse? Est-ce une méthode de lutte que la fédé CGT-énergie a démocratiquement débatue
dans ses instances? Et à partir de quelle analyse? Si j’ai bien compris la CGT-énergie soutient cette action après qu’elle était commise! Là, nous sommes dans un cycle purement gauchiste:
Provocation – Répression; Rien de bon…
En tant qu’ancien syndicaliste, je pose la question de fond en langage “ouvrier”: est-ce une action de masse? Est-ce une méthode de lutte que la fédé CGT-énergie a démocratiquement
débatue dans ses instances? Et à partir de quelle analyse?
Je ne crois pas qu’il faille donner à cette action un contenu “politique”. L’acte de Jef Duval est un acte individuel dont les motivations n’ont rin à voir avec une quelconque “méthode de lutte”.
Il a été ému par une situation humaine, et il a agi en conséquence. On peut toujours donner à son geste un sens politique post facto, mais ce n’est plus alors le geste en lui même qu’on analyse,
sinon la représentation que nous nous en faisons.
Si j’ai bien compris la CGT-énergie soutient cette action après qu’elle était commise!
Ca, c’est normal. Comme disait Me Vergès, “même le pire salaud mérite le meilleur avocat”. Le syndicat n’est pas là pour défendre la vérité et la justice, il est là pour soutenir se membres. Cela
fait partie du jeu.
Là, nous sommes dans un cycle purement gauchiste: Provocation – Répression; Rien de bon…
Pour désamorcer le cycle gauchiste, il faut que la répression soit intelligente et surtout pédagogique. Personnellement, et ayant siégé souvent dans des conseils de discipline, je pense qu’il y a
deux infractions à juger: la désobéissance (c’est à dire le fait que Duval n’ait pas exécuté l’opération qui lui était demandée) et la falsification du registre (le fait d’avoir consigné dans le
système informatique les opérations comme si elles avaient été réalisées).
La falsification du registre est une infraction qui n’a rien à voir avec les nobles motifs d’éviter la coupure à une famille nombreuse. Duval aurait pu refuser de faire la coupure sans pour
autant marquer une fausse information. Par contre, c’est une infraction qui met en danger les usagers et les agents d’ERDF, qui peuvent être amenés à intervenir dans des installations sur la foi
d’informations fausses. Il faut là appliquer à Duval la sanction prévue dans les textes pour ce genre de faute, sans tenir compte des motivations.
La désobéissance, par contre, est intimement liée à une motivation humaine. Pour cette infraction, la sanction doit tenir compte du contexte. J’aurais tendance à appliquer la plus faible sanction
prévue dans le statut: le blâme simple. C’est une manière d’indiquer que ce comportement est inacceptable tout en comprenant les motivations.
Pas d’accord ! D’abord Jeff Duval étant citoyen comme tout autre, c’estaussi son électricité qu’il a dispensée ainsi. Par ailleurs, autant je trouve que on raisonnememnt s’applique parfaitement
pour les faucheurs d’OGM : ils n’ont qu’à passer par des voies légales pour s’opposer aux OGM, autant il ne me semble pas adapté pour le sort d’une famille à qui l’on coupe l’électricité. Couper
du chauffage en hiver, ça peut s’avérer criminel. Ce n’est pas pour rien que l’on interrompt les expulsions l’hiver. Ce n’est pas non plus pour rien que la jurisprudence admet (certes
difficilement) que l’on relaxe quelqu’un qui a volé pour se nourrir (notion d’état de nécessité, http://felina.pagesperso-orange.fr/albert_levy/etat_de_necessite.htm).
Que cet agent, qui est en bas de l’échelle sociale, peut-être peu politisé, ait opposé un refus à une décision excessive est tout à son honneur. C’est le rôle du non décrit par camus, le
refus d’une situation absurde ou flirtant avec l’inhumain, exprimé de la façon la plus fruste qui soit, certes, mais au nom de principes qui n’en sont pas moins humains.
D’abord Jeff Duval étant citoyen comme tout autre, c’estaussi son électricité qu’il a dispensée ainsi.
“Son électricité” ? Je ne savais pas que chacun de nous, pour le fait d’être citoyen, avait droit à une “part” d’électricité gratuite, qui plus est permettant de couvrir la consommation de
plusieurs familles…
Faut pas déconner. Jef Duval n’a nullement dispensé “son” électricité. Il a permis à des gens de disposer de l’électricité gratuitement. Et comme l’électricité à un coût, et qu’EDF doit couvrir
ses coûts, cela revient à mettre son “don” à la charge de chacun d’entre nous (lui y compris).
Couper du chauffage en hiver, ça peut s’avérer criminel.
C’est ton opinion. Mais a ma connaissance, le législateur n’a pris aucun texte déclarant “criminel” le fait de couper le chauffage en hiver. Qu’on se batte pour obtenir du législateur qu’il
prenne une telle décision (en pratique c’est déjà fait, à travers les tarifs sociaux de l’électricité) est tout à fait juste. Mais qu’une personne, de sa propre décision dispose d’un bien public
sans demander l’avis des autres, je trouve ca détestable.
Tiens, prenons un exemple concret. Imaginons que toi tu vives dans une maison chauffée au fuel. Et que tu découvres un matin que ta cuve à fuel a été vidée, et que le voleur a distribué ce
combustible aux SDF d’un campement pour qu’ils puissent se chauffer. Quelle serait ta réaction ? Tu irais le féliciter ? Non, bien sur que non. Tu porterais plainte por vol. Parce que même si tu
n’est pas dans le besoin, tu n’est pas assez riche pour faire cadeau d’une cuve de fuel. Alors, pourquoi le raisonnement serait différent lorsqu’il s’agit du bien de tous ?
Ce n’est pas non plus pour rien que la jurisprudence admet (certes difficilement) que l’on relaxe quelqu’un qui a volé pour se nourrir (notion d’état de nécessité,
L’Etat de nécessité est une circonstance qui excuse le vol de celui qui se trouve dans un état de dénouement et vole un bien nécessaire à sa survie. Mais il n’excuse nullement le geste de celui
qui, sans être dans le dénouement, volerait pour autrui. Sinon, imagine les dégats: je pourrai rentrer dans ta maison et vider le frigo, et je serais totalement excusé si je distribuait le
produit de mon vol aux pauvres…
Que cet agent, qui est en bas de l’échelle sociale, peut-être peu politisé, ait opposé un refus à une décision excessive est tout à son honneur.
Là, tu réécris l’histoire. A ma connaissance, Jef Duval n’a jamais “opposé un refus” à une quelconque décision. Il a au contraire accepté la décision, et ensuite ne l’a pas mise en oeuvre et
falsifié le registre de manière à occulter ce fait. S’il avait “opposé un refus”, on serait devant un acte de nature politique. Ce n’est pas le cas.
Par ailleurs, même à supposer qu’il eut “opposé un refus”, j’attire ton attention sur l’idée que le fait qu’un tel acte fut “tout à son honneur” est une question subjective. De la même manière,
il y a des gens qui considèrent que l’acte de refuser un IVG à une femme enceinte ou un logement à un arabe est “tout à l’honneur” de celui qui le commet. La question de “l’honneur” dépend
beaucoup de celui qui juge. Il n’y a qu’un élément objectif, et c’est la loi. Si l’on commence à dire que c’est un “honneur” de violer les lois lorsqu’on n’est pas d’accord avec elles, on ne peut
pas ensuite se plaindre si d’autres font de même avec les lois qui nous tiennent à coeur.
C’est le rôle du non décrit par camus, le refus d’une situation absurde ou flirtant avec l’inhumain, exprimé de la façon la plus fruste qui soit, certes, mais au nom de principes qui n’en
sont pas moins humains.
Je ne dis pas le contraire. Mais l’une des tragédies de la condition humaine est que de tels “refus” doivent être sanctionnés.
je propose un blâme comme sanction. Jef duval fait probablement une moins bonne Antigone que tu ne fais le Créon…
Ton rappel est amusant: Antigone, dans la tragédie ancienne, représente la loi divine – celle des honneurs dus aux morts – alors que Créon représente lui la loi humaine, celle de la cité.
La métaphore n’est pas tout à fait exacte parce que dans le conflit entre Jef Duval et ERDF (moi, je ne suis que le coeur grec…) il y a conflit entre deux lois humaines. D’un côté, une règle
morale, de l’autre, la règle civile. D’où ma position: lorsqu’il y a conflit entre la loi morale et la loi civile, ma c’est toujours cette dernière qui doit être obéie. Parce que la loi civile
est le produit de la délibération collective, alors que la loi morale est strictement individuelle. Déclarer la primauté de la loi morale implique fragmenter la société, puisque chaque individu
est soumis à une loi personnelle qui, comble des combles, il peut modifier à sa convenance.
Ta comparaison avec Antigone laisse penser que pour toi il existe une sorte de “loi naturelle” (car je n’imagine pas que tu puisses croire en une loi divine) qui serait en même temps extérieure à
nous et universelle. A ton avis, elle vient d’où, cette loi ? Qui la délibère ?
pas sûr qu’il n’y ait pas quelques règles invariantes et en quelque sorte naturelles. par exemple que l’homme est plus heureux libre. qui se soucie de savoir dans quelles formes les droits de
l’homme de 1789 ont été proclamés ?…
pas sûr qu’il n’y ait pas quelques règles invariantes et en quelque sorte naturelles. par exemple que l’homme est plus heureux libre.
Ah bon ? Tu devrais lire Hobbes et sa description du “bonheur” dans l’etat de nature…
D’ailleurs, si c’est une “règle invariante et naturelle que l’homme est plus heureux libre”, pourquoi tant d’hommes entrent de manière tout à fait volontaire dans des couvents, des monastères ?
Pourquoi adhèrent-ils à des religions où leur liberté est restreinte par toutes sortes de règles ? Tu sais, le “bonheur” est une chose bien plus complexe que ce que tu sembles croire…
Je suis toujours surpris de trouver des gens qui croyent encore qu’il existe des “lois naturelles”. Si de telles règles existaient, elles seraient a-historiques. Or il est extraordinairement
difficile de trouver des règles qui aient existé de tout temps. Et si les règles sont historiques, alors il faut admettre qu’elles sont humaines.
qui se soucie de savoir dans quelles formes les droits de l’homme de 1789 ont été proclamés ?…
Je ne suis pas sur de comprendre la question… tu penses réellement que les droits de l’homme de 1789 sont “naturels” ? Le droit à la propriété serait il “naturel”, donc ?
Bonjour à tous,
@ à edgar:
Je vous suggère de méditer sur cette phrase de Voltaire: “La liberté consiste à ne dépendre que des lois” et, j’ajouterais, particulièrement si l’on a le pouvoir d’influence sur leur
rédaction et leur promulgation, ce qui caractérise les démocraties.
D’autre part, ne pas confondre la liberté, que très peu d’entre nous sont capables d’assumer entièrement, et le sentiment de liberté, condition nécessaire mais
non suffisante à l’état de bien être ( ou au bonheur si vous préférez ).
Cordialement.
Je vous suggère de méditer sur cette phrase de Voltaire: “La liberté consiste à ne dépendre que des lois”
Excellent rappel. En une formule, Voltaire résume en quoi consiste la séparation de la sphère publique et la sphère privée et combien cette séparation est indispensable à la
liberté…
@ Descartes,
“Je suis toujours surpris de trouver des gens qui croient encore qu’il existe des “lois naturelles”. Si de telles règles existaient,
elles seraient a-historiques. Or il est extraordinairement difficile de trouver des règles qui aient existé de tout temps.”
Il en existe peut être une, fondamentale, qui tient ses origines mêmes à l’apparition de la vie dans le phénomène de réplication des cellules
ADN d’eucaryotes, c’est celle du besoin impératif de reproduction ( pour l’immense majorité des êtres humains) et qui pourrait expliquer, voire justifier un grand nombre de nos instincts et
comportements pouvant se formuler en « loi naturelle ». Mais là, il s’agit d’un domaine hors sujet…….
Pour ce qui est de ce billet et de ses commentaires, je suis surpris de
constater la tendance « naturelle » au désir d’anarchie conjointement au besoin de protection exprimés dans les lignes qui précèdent. Votre rigueur de recherche de logique et
d’objectivité me semble là mise à mal. J’ai l’impression que l’ on confond fréquemment l’attitude libertaire et la revendication anarchiste. Il serait sans doute intéressant de préciser
(probablement de nouveau) ce que cela implique.
Bien à vous.
Pour ce qui est de ce billet et de ses commentaires, je suis surpris de
constater la tendance « naturelle » au désir d’anarchie conjointement au besoin de protection exprimés dans les lignes qui précèdent.
Je ne le crois pas. Un “désir d’anarchie” impliquerait reconnaître aux autres le
droit, eux aussi, de désobéir aux règles que vous même considérez comme sacrées. Or, ce n’est pas du tout le cas. En fait, si certains commentateurs revendiquent le droit de désobéir aux règles
qu’ils trouvent injustes, vous remarquerez qu’ils sont particulièrement peu tolérants lorsque d’autres invoquent le même droit à propos des règles qui leur tiennent à coeur. Plus qu’un “désir d’anarchie”, j’y vois plutôt un désir de généraliser
“ses” règles poru en faire des normes universelles “évidentes”. Marx avait dejà commenté la tendance qu’avait toute classe sociale à présenter ses intérêts comme l’intérêt général. On est ici
dans le même type de mécanisme.
“Je suis toujours surpris de trouver des gens qui croyent encore qu’il existe des “lois naturelles”. Si de telles règles existaient, elles seraient a-historiques. Or il est extraordinairement
difficile de trouver des règles qui aient existé de tout temps. Et si les règles sont historiques, alors il faut admettre qu’elles sont humaines.”
Que les règles du droit naturel n’aient pas été respectées de tout temps ne veut pas dire qu’elles n’existent pas. D’ailleurs, si le droit naturel n’existe pas, le droit civil doit être tout le
temps légitime. Ce qui veut dire quand dans un pays démocratique, le génocide d’une partie de la population ne poserait aucun problèmes. Si ça en pose, c’est bien que quelque chose au dessus du
droit civil existe.
Que les règles du droit naturel n’aient pas été respectées de tout temps ne veut pas dire qu’elles n’existent pas.
Bien entendu. Le fait d’ériger le “tu ne tueras point” comme règle n’a pas empêché qu’il y eut des assassins et des exécutions capitales. Mais lorsque j’ai écrit “il est extraordinairement
difficile de trouver des règles qui aient existé de tout temps” c’est bien à l’existence de la règle, et non à son respect, que je faisais référence. Il y a des peuples qui n’ont pas érigé le “tu
ne tueras point” en règle.
D’ailleurs, si le droit naturel n’existe pas, le droit civil doit être tout le temps légitime. Ce qui veut dire quand dans un pays démocratique, le génocide d’une partie de la population ne
poserait aucun problèmes. Si ça en pose, c’est bien que quelque chose au dessus du droit civil existe.
J’ai eu un peu de mal à comprendre ce paragraphe parce que vous utilisez le terme “droit civil” dans un sens qui n’est pas le sens habituel. C’est en fait du droit positif que vous voulez parler.
Le paradoxe que vous soulevez est bien connu en droit. Il a été posé en 1946 lors de la création du tribunal de Nurnberg, puisqu’il s’agissait de juger les crimes nazis en fonction d’une
loi faite rétroactivement, ce qui viole un principe fondamental du droit pénal. Pour s’en sortir, on a fait appel à la théorie du droit naturel. C’était cela ou rien, et dans le climat
pragmatique de la fin de la guerre les juristes ont consenti à cette résurrection du “droit naturel”.
Ce faisant, ils ont ouvert une boîte de Pandore: si le génocide nazi peut être condamné rétroactivement, on ne voit pas pourquoi les génocides antiques ou modernes y échaperaient. Que fait-on des
nombreux génocides glorifiés dans l’Ancien Testament, par exemple ? Faut il interdire le livre saint sous prétexte d’incitation au génocide ? Faut-il dans les livres d’histoire faire des pères de
l’indépendance américaine des “génocidaires” (ils étaient maîtres d’esclaves) ?
Ce débat met en évidence justement le fait que l’idée de génocide n’a rien de “naturel”, et que les hommes ont pendant des siècles considéré ce que nous jugeons un crime gravissime comme véniel.
L’idée du “droit naturel” est en fait une fiction permettant de “naturaliser” – et donc soustraire au débat politique – certaines incriminations.
Bonsoir.
J’entre dans le débat, puisque je vois là l’étonnant et intéressant point de rencontre entre mes cours de philosophie et la politique.
Si j’ai bien compris ton propos, Descartes, l’argument que tu développes pose en effet un réel problème. Tu ferais donc partie de ces positivistes juridiques défendant l’idée qu’il n’existerait
de droit que positif, et que le droit naturel n’est qu’une fiction ?
Mais ce droit naturel est nécessaire. Pourquoi le refus systématique d’un jugement, comme si le jugement était une mauvaise chose ? Je m’explique : Sans droit naturel, il n’existe aucun référent
absolu permettant de juger telle ou telle loi, de constituer une hiérarchie des lois. Vous en avez déjà parlé dans les commentaires, mais en effet, comment condamner les crimes nazis dans ce cas
? “Est juste ce que l’état aryen déclare juste”, déclarait Rosenberg.
Seulement, n’est-ce pas un scandale ? N’est-il pas normal qu’en tant qu’hommes, nous nous sentiez offensés ou choqués par l’exécution de la Shoah (ou de tout autre génocide de l’histoire, vous
avez raison sur ce point), par les mutilations sexuelles pratiquées dans les pays islamistes, par l’inexistence juridique de la femme dans lesdits pays ? Il est vrai que c’est une question de
culture. Doit-on pour autant s’interdire de juger ce qu’on juge crime contre l’humanité toute entière ?
La résistance pendant la WWII est l’expression de la limite du droit positif. Bien sûr que le droit positif est nécessaire, et qu’il est nécessaire de le respecter, mais à condition qu’il n’entre
pas en contradiction avec des valeurs fondamentales comme le respect de l’autre. Oui, je reconnais que c’est là l’héritage de la théorie rationaliste occidentale, mais quand bien même ? Il faut
un garde-fou au droit positif qui soit accordé avec les valeurs humanistes.
(Texte de Léo Strauss beaucoup plus précis et juste que mon commentaire, et avec lequel vous rentrez sans doute en contradiction : http://aidandiaye.over-blog.com/article-25667119.html )
J’entre dans le débat, puisque je vois là l’étonnant et intéressant point de rencontre entre mes cours de philosophie et la politique.
Bienvenu et approchez vous du feu…
Tu ferais donc partie de ces positivistes juridiques défendant l’idée qu’il n’existerait de droit que positif, et que le droit naturel n’est qu’une fiction ?
Exactement.
Mais ce droit naturel est nécessaire.
L’un n’empêche pas l’autre. Une fiction peut être nécessaire, sans cesser d’être une fiction. Cela me fait penser à une phrase voltairienne: “On prétend que Dieu a fait l’homme à
son image, mais l’homme le lui a bien rendu”. Dans la même logique, Robespierre avait institué le culte de l’Etre Suprême non pas parce qu’il y croyait, mais parce qu’il estimait
nécessaire que la société y croie. Et bien, le “droit naturel” joue un peu le rôle que jouait Dieu pour Voltaire ou l’Etre Suprême pour Robespierre: celui d’une fiction nécessaire.
Je m’explique : Sans droit naturel, il n’existe aucun référent absolu permettant de juger telle ou telle loi, de constituer une hiérarchie des lois.
Pas tout à fait. Il y a d’autres fondements à une hiérarchie des normes: l’utilitarisme, par exemple, proclame qu’une norme est légitime dès lors qu’elle est socialement utile. Le positivisme
juge qu’elle est légitime dès lors qu’elle respecte certaines règles formelles instituées par le souverain… et ainsi de suite.
comment condamner les crimes nazis dans ce cas ? “Est juste ce que l’état aryen déclare juste”, déclarait Rosenberg.
Mais justement, le fait qu’on ait condamné les crimes nazis en 1945 alors qu’on n’a pas condamné les génocides liés à l’esclavage au XVII siècle ou bien l’extermination des indiens d’Amérique au
XVIème montre combien le “droit naturel” a changé. Ce qui pose de sérieux doutes sur l’idée qu’un droit véritablement “naturel” existe. Pourquoi ce qui est “naturel” en 1945 ne l’est pas en 1645
? N’est ce pas parce que nous déguisons sous un manteau de “naturalité” ce qui en fait est purement historique ?
Doit-on pour autant s’interdire de juger ce qu’on juge crime contre l’humanité toute entière ?
Bien sur que non. Mais il faut être conscient au nom de quoi on le juge. Et comprendre que l’universalité des droits est une fiction. Une fiction nécessaire, je le repète, puisque utile. Mais une
fiction tout de même.
Vous l’aurez compris, je suis proche de l’école utilitariste: le droit est une fiction, dont la légitimité vient du fait qu’il est utile. Si les droits de l’homme sont utiles – c’est à dire,
s’ils permettent de créer une société plus riche, plus agréable à vivre que s’ils n’existaient pas – alors ils sont légitimes. Qu’ensuite cette légitimation passe par une fiction, cela ne me
dérange pas le moins du monde.
La résistance pendant la WWII est l’expression de la limite du droit positif.
Pas du tout. La résistance s’est elle même fondé sur une idée de droit positif.
Bien sûr que le droit positif est nécessaire, et qu’il est nécessaire de le respecter, mais à condition qu’il n’entre pas en contradiction avec des valeurs fondamentales comme le respect de
l’autre.
Et qui décide quels sont les “valeurs fondamentales” ? Au nom de quoi “le respect de l’autre” serait il une “valeur fondamentale” et pas la “protection de la race aryenne” ? En fait, la position
des “jusnaturalistes” (comme on appelle les partisans du droit naturel) n’est pas moins problématique que celle des positivistes: à moins d’énoncer une règle permettant de dégager le “droit
naturel”, on tombe dans un relativisme absolu.
Je suis d’accord avec Descartes pour dire que l’existence de lois naturelles du genre “l’homme est plus heureux libre” est très douteux. Mais ça ne me parait pas déraisonnable de penser que des
lois naturelles de très bas niveau (plus abstraites) puissent exister. Un peu comme avec le langage où on a une grammaire de bas niveau qui est universelle à toutes les langues qui n’empêche pas
d’avoir une grande diversité entre les différentes langues.
Dans On what matters, le philosophe Dereck Parfit tente d’unifier les grandes théories morales. L’impératif catégorif de Kant revisité par Parfit à la lumière de l’utilitarisme et du
contractualisme, ça nous donne :”Un acte est mauvais quand de tels actes sont interdits par les principes qui sont optimifiques, les seuls à pouvoir être universellement susceptibles d’être
voulus, et qu’on ne pourrait pas raisonnablement rejeter”. (http://www.nonfiction.fr/article-5507-p1-la_haut_sur_la_montagne.htm)
Assez abstrait comme machin, mais c’est compatible avec les principales théories morales (ou du moins certaines de leurs versions), ce qui fait que ce serait un bon candidat pour le poste de
“vérité morale”.
Mais ça ne me parait pas déraisonnable de penser que des lois naturelles de très bas niveau (plus abstraites) puissent exister. Un peu comme avec le langage où on a une grammaire de bas
niveau qui est universelle à toutes les langues qui n’empêche pas d’avoir une grande diversité entre les différentes langues.
Pourquoi pas. Mais ces règles “de très bas niveau” (genre “il vaut mieux être vivant que mort”) ont un caractère essentiellement utilitaire…
“Un acte est mauvais quand de tels actes sont interdits par les principes qui sont optimifiques, les seuls à pouvoir être universellement susceptibles d’être voulus, et qu’on ne pourrait pas
raisonnablement rejeter”
On retrouve, sous une forme un peu différente, la “théorie de la justice” de Rawls. Mais une telle approche exclut par définition l’idée d’un “droit naturel” – c’est à dire, inscrit dans la
nature elle même – pour lui substituer un principe d’optimisation qui par nature ne peut être que subjectif.
Je suis attérré par ce que je lis ici.
Je suis tombé sur un virtuose de la réthorique, privé de toute conscience humaniste, qui réagit sur le seul critère du fric, le flouze, le blé, les pépèttes, les brouzouffes… Couvez-les bien,
et qu’ils vous éttouffent !
Inutile de chercher à discuter donc.
Ne vous fatiguez pas à répondre, je suis déjà très loin…
Je suis attérré par ce que je lis ici.
Le contact avec le monde réel fait souvent cet effet…
Jef Duval est un exemple pour la jeunesse : il a droit à 2 pages dans la NVO… Numéro spécial jeunes.
Jef Duval est un exemple pour la jeunesse : il a droit à 2 pages dans la NVO… Numéro spécial jeunes.
Si le fait d’avoir deux pages dans la NVO vous transformait en “exemple pour la jeunesse”, cela se saurait… Mais la question dans mon article n’est pas de savoir si Jef Duval est ou non un
exemple à suivre, mais de savoir s’il doit ou non être sanctionné.