Devoirs de vacances: qui est le cacique aigri ?

L’avantage des vacances, c’est qu’on a le temps de lire. Même des choses pour lesquelles on a un peu perdu l’intérêt. J’ai donc fait ce que je n’avais fait depuis longtemps: faire un tour sur le blog de Jean-Luc Mélenchon. Et le moins que je puisse dire, c’est que la lecture de son dernier billet (disponible ici) m’a laissé pantois.

Ce n’est pas tant la première partie, consacrée à sa visite au Vénézuela et à ses impressions lors d’un meeting chaviste. On sait bien que les “socialismes exotiques” ont toujours exercé un puissant attrait sur les intellectuels français, toujours attirés par cette “plasticité” apparente des sociétés latino-américaines et leur enthousiasme communicatif. Bien entendu, ils voient moins la face sombre de ces caractéristiques: un enthousiasme qui se transforme facilement en culte religieux pour des “caudillos”, et une plasticité qui est la contrepartie de la faiblesse des institutions, toujours à la merci des hommes providentiels. On sait aussi que Jean-Luc Mélenchon a une tendance au lyrisme qui le pousse quelquefois à l’excès. Et son texte illustre ces deux caractéristiques. Voici un petit extrait pour illustrer ce point:

Ce que j’ai vécu sur place, à Barquisimeto, m’a confirmé cette intuition de la dialectique du rationnel et du sensible dans la production du message politique. Ce qui nous attendait à l’arrivée, la télé le nommait « l’ouragan Bolivarien ! » pour intituler les images qu’elle donnait à voir. Un ouragan en effet ! Sur les trois kilomètres du trajet une foule compacte hurla sans discontinuer à mesure que les camions sur lesquels nous étions installés avançaient. Le rassemblement commença aux portes mêmes de l’aéroport, ce qui n’était pas prévu. Les véhicules du cortège ont donc fendu la foule au pas, entourés d’un impressionnant double cordon de militants qui protégeait autant le passage que les gens qui se précipitaient sur les voitures. Suffoqués par l’effort, ruisselants sous le soleil des Caraïbes, ils tinrent bon leur part de tâche ! Je voyais sur leurs jeunes visages la lumière que j’ai vue sur celui de mes camarades, filles et garçons qui ont fait cet exercice à Strasbourg, à Paris, et à combien d’autres endroits encore ! Puis on descendit des voitures et on monta sur le toit des bus qui avaient été postés face à un podium d’accueil, à cet instant totalement submergé. Commença alors le parcours. Ce fut comme un ailleurs de tout ce que j’ai connu. Jamais je n’ai vu telle ferveur politique se concentrer de telle façon dans les corps et les visages. A mi-chemin je m’aperçus que j’avais le visage en larmes. A côté de moi, Max Arvelaiz et Ignacio Ramonet montraient un visage inconnu. Le saisissement, l’effroi sacré qui nous habitait est un moment qui n’a pas ses mots pour le décrire raisonnablement. La force de la passion politique qui s’exprimait à cet instant sculptait et remodelait tout ce qui passait entre ses mailles fines. (…) Et voici ce qu’il faut retenir : c’était les nôtres, sans aucun doute possible.

Il y a dans cette description un élément effrayant. On croirait lire la description de ces grands festivals religieux indiens, ou les gens se piétinent pour pouvoir toucher de près les habits de telle ou telle déesse, ou pour pouvoir se baigner aux meilleurs endroits dans un fleuve sacré. Ce qui est un peu curieux, c’est la comparaison avec “mes camarades” de Strasbourg ou de Paris… mais bon, passons. C’est surtout la conclusion qui frappe: toujours cette division entre “les nôtres” et “les autres”. Et cela continue:

Les nôtres ! Vous vous souvenez peut-être quand j’interpellais notre rassemblement à la Bastille. Je disais : « Où était-on passés ? On s’était perdus ! On se manquait, on s’est retrouvés ! » Vous saviez tous de qui et de quoi je parlais, sans qu’il y ait besoin d’en dire davantage. Ici c’est de cela encore dont je parle. Vous savez instantanément de qui il s’agit : les nôtres. Cela se voyait. D’abord par la couleur de peau : partout dominait en profondeur ce superbe marron que montrent les plus beaux êtres humains.

Vous le savez maintenant, travailleurs français “blancs”. Vous êtes moches. Et vous n’êtes donc pas des “nôtres”, et cela “se voit, d’abord par la couleur de la peau”… on reste baba devant une telle formulation sous la plume de Mélenchon. Une formulation qui aurait certainement provoqué des cris d’orfraie du personnage si elle avait été formulée par un dirigeant du FN. Ainsi donc le fait d’être “des nôtres” est d’abord une question de couleur de peau. On a du mal à garder son calme.

Mais après cet hymne au chavisme, on descend plus près des problèmes français et notamment sur PSA. Et c’est là que le nouveau ton de Mélenchon surprend. On commence avec la traditionnelle critique des journalistes, mais c’est la fin du paragraphe qui surprend::

Lisez l’éditorial ahurissant de Joffrin à propos de PSA pour comprendre à quel point ce système peut durcir ses méthodes d’intoxication mentale. Deux grammes de protestation avant trois couplets d’appel à la soumission aux normes dominantes et de dénonciation de l’idéologie anti-mondialisation. (…) Et ce n’est pas l’opium de Joffrin qui leur permettra de les nourrir ou de leur assurer un vécu décent ! Le mur de béton que construisent de tels médias hallucinogènes explique pourquoi tant de gens des classes moyennes et moyennes supérieures se tournent vers nous comme vers une alternative intellectuelle.

C’est évidement moi qui souligne. Si l’on comprend bien, les classes moyennes et moyennes supérieures (!) ont compris que ce n’est pas Joffrin et la soumission aux “normes dominantes” qui permettra de leur assurer un “vécu décent”, alors que de toute évidence le Parti de Gauche, lui, en est capable d’assurer à ces “classes moyennes et moyennes supérieures” un “vécu” tout à fait conforme à leurs attentes… Mais il y a encore plus curieux. Le Petit Timonier se sent obliger de flinguer les siens:

Mais mercredi, ma journée en décalage horaire de six heures et demie avec vous en France avait très bien commencé. C’était un message de Laurence Sauvage. Laurence j’en ai déjà parlé ici. C’est la secrétaire nationale du Parti de Gauche en charge des luttes sociales. Elle a succédé en catastrophe à un camarade qui était fort habile à faire des textes et des recommandations pontifiantes mais absolument inapte à quelque activité concrète que ce soit. Beaucoup ne donnaient pas cher de cette jeune femme sans passé politique catapultée à la place d’un cacique aigri dans un univers dominé par les hommes.

Et bien, chers lecteurs, j’ai besoin de votre aide. Qui était le “camarade fort habile à faire des textes et des recommandations pontifiantes” auquel Laurence Sauvage a du “succéder en catastrophe” ? Toutes mes recherches ont été vaines pour retrouver qui était  “secrétaire national en charge des luttes sociales” avant Laurence Sauvage. Mais j’ai bien trouvé un “secrétaire national en charge du mouvement social” qui a “quitté en catastrophe” son poste en 2011: il s’agit de Claude Debons, qui a quitté le Parti de Gauche en 2011 en dénonçant l’opacité du fonctionnement et la ligne “gauchiste” de la direction. Qu’il ait été remplacé par – de l’aveu même de Mélenchon – par une “jeune femme sans passé politique” – n’est pas neutre: il est évident qu’une jeune femme sans passé politique est bien plus facile à contrôler et moins susceptible de s’opposer au Chef qu’un syndicaliste qui a vu du pays et qui a suffisamment d’expérience pour savoir comment une réunion ou un congrès se “cuisinent”. Dans ce contexte, être un “cacique aigri” veut dire avoir une opinion personnelle qui ne coïncide pas avec celle du patron. Mieux vaut le remplacer par une jeunette qui doit tout au Chef et qui fera – par admiration ou par intérêt – ses quatre volontés.

Mais le plus intéressant reste les termes violents dans lesquels Mélenchon décrit son ancien camarade – et si mon hypothèse est exacte, un homme qui a joué un grand rôle dans la fondation de son parti. Plusieurs dirigeants du PG ont démissionné ces derniers temps en formulant des critiques convergentes sur l’opacité des procédures de décision, la centralisation du pouvoir et le “gauchisme” de la ligne. Outre le syndicaliste Debons, on peut citer l’économiste Christophe Ramaux. A ma connaissance, Mélenchon a toujours ignoré ces départs et n’a jamais commenté – ni répondu – aux points soulevés par démissionnaires. C’est à ma connaissance la première fois que Mélenchon se permet dans un texte de sa main de les attaquer, et qui plus est, par une injure ad hominem d’une telle violence.

Lyrisme chaviste, drague des classes moyennes, flingage des anciens camarades devenus adversaires… on remarque une sorte de “peu me chaut” dans ce texte qui pose pas mal de questions. Certaines digues auraient-elles sauté ?

Descartes

Ce contenu a été publié dans Uncategorized. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

27 réponses à Devoirs de vacances: qui est le cacique aigri ?

  1. Marencau dit :

    Je suis estomaqué par le billet de Jean-Luc Mélenchon. Je suis allé le lire et ce n’a m’a effectivement pas laissé de marbre… je l’avais déjà lu faisant quelques crises de “gauchisme aigu”,
    mais là ce n’est pas triste. C’est alors que j’ai lu les commentaires et je me suis demandé si je n’étais pas sur le site de la scientologie. C’est complètement délirant.

     

    Allez, tu as fais une rechute mon cher Descartes. Tu n’as pas pu t’empêcher de regarder si Mélenchon avait appris de son erreur des législatives/présidentielles, pas vrai ? Il est vrai qu’il
    avait l’air sonné et que peut-être une remise en question allait suivre ? La réponse est clairement non. Si le gauchisme ne marche pas c’est qu’il ne faut pas moins de gauchisme mais plus de
    gauchisme ! Non, là je crois qu’on peut définitivement mettre une croix sur le PG et Mélenchon…

     

    Comment peut-on faire des procès en diablerie et anti-républicanisme à Marine Le Pen pour sortir ensuite des bêtises sur “les nôtres”, la larme coulant sur la joue en participant à l’exaltation
    du chef ? Si j’étais vraiment méchant je dirais que c’est à mettre dans le même sac. C’est juste qu’au lieu d’avoir une “opposition racialiste” on a les riches vs les gentils. Et encore, faut
    qu’ils aient la peau marron… Chouette.

    • Descartes dit :

      Allez, tu as fais une rechute mon cher Descartes. Tu n’as pas pu t’empêcher de regarder si Mélenchon avait appris de son erreur des législatives/présidentielles, pas vrai ?

      J’avoue, oui. En fait, j’aimerais comprendre comment le résultat moyen des présidentielles et l’échec des législatives sont vécus à l’intérieur du PG, et si cela annonce des remises en cause
      politiques ou stratégiques. Et comme le PG ne publie ni compte rendu des réunions de ses instances, ni résumés des débats, ni textes d’orientation… il faut aller chercher l’information dans les
      divagations de ses dirigeants. 

  2. Alain Briens dit :

    Festivaux ? Voici un pluriel qui sort de la banalitude !

    • Descartes dit :

      je présente à mes lecteurs mes plus plates excuses ! l’erreur a été corrigée et le responsable est condamné à passer une semaine au festival d’Avignon.

  3. Jard dit :

    On dirait une dérive sectaire, n’est-ce pas? On a depuis longtemps le refus de la Nation, on voit poindre quasi ouvertement la haine des classes populaires françaises. Ce sont de classiques
    girondins, une des multiples versions possibles.

    Je ne comprends pas comment les militants de gauche de l’espace jacobin se laissent dominer idéologiquement aussi facilement.

  4. Nicolas 70 dit :

    Cela va finir comme le temple du peuple de Jim Jones.

    Il est vrai que la grande question est de savoir ce qui se passe, ce qui se trame au PG. Peut-être en saurons-nous plus lors des Prestivales (vive la novlangue ! Prestival sur google, c’est
    des volets roulants).

    En Haute-Saône, le PG est inexistant. Idem, dans le Territoire de Belfort. Dans le Doubs, il est implanté sur Besançon. Il est vrai que cette ville sied bien à l’orientation actuelle : ville
    universiatire, administrative, l’histoire des LIP où l’extrême-gauche a toujours été forte. Au contraire, le PG ne s’est pas implanté dans le nord du département industriel (notamment du fait que
    la représentation politique des ex-PCF est fagocitée par le sénateur Martial BOURQUIN).

     

    • Descartes dit :

      Cela va finir comme le temple du peuple de Jim Jones.

      Vous voulez dire sur le plan symbolique, j’espère… mais non, je ne le pense pas. Ce genre de fonctionnement sectaire est assez classique dans l’extrême gauche française. Le plusprobable est que
      cela finisse par marginaliser politiquement l’organisation. Ce qui est une sorte de suicide collectif politique, si l’on veut…

      Il est vrai que la grande question est de savoir ce qui se passe, ce qui se trame au PG. Peut-être en saurons-nous plus lors des Prestivales (vive la novlangue ! Prestival sur google,
      c’est des volets roulants).

      J’en doute. Pour ce qui concerne les “prestivales”, elles sont ouvertes exclusivement aux militants du Parti de Gauche, et jusqu’ici le secret de ce qui se dit dans ces réunions a été mieux gardé
      que celui des loges maçonniques. Quand aux “estivales du Front de Gauche”, qui elles sont ouvertes à tous, aucun programme ne semble disponible. Les différents sites – par exemple ici – indiquent que “une première version du programme sera disponible dans quelques
      jours”, ce qui à un mois de la manifestation dit beaucoup sur le niveau de préparation. 

  5. Koko dit :

    Encore un de ces billets habituels de Descartes où il expose ses idées réactionnaires anti-femmes, anti-homos et anti-bronzés. Descartes doit être un individu profondément aigri pour détester
    tant de pans de la population française au point de leur dénier le droit à l’égalité avec l’homme blanc hétéro (qui serait un pauvre malheureux persécuté dans la société d’aujourd’hui, si on suit
    bien la logique de ses propos).

    Descartes fait mine de ne pas comprendre la remarque de Mélenchon sur les gens à la peau sombre, en ne la remettant pas dans le contexte vénézuelien. Au Vénézuela comme dans toute l’Amérique
    Latine, les positions dominantes de la société sont occupées par des blancs qui détiennent la plupart des richesses. A l’inverse, il est mal vu d’avoir des origines indiennes ou “nègres”. Par son
    propos, Mélenchon ne fait donc que dire (certes de façon un brin provocatrice) que les gens basanés n’ont pas à avoir honte de leur peau sombre, dans des sociétés racistes dans lesquelles on leur
    inculque depuis leur plus jeune age la honte de leurs origines (indiennes ou “nègres”).

    • Descartes dit :

      Encore un de ces billets habituels de Descartes où il expose ses idées réactionnaires anti-femmes, anti-homos et anti-bronzés. Descartes doit être un individu profondément aigri pour détester
      tant de pans de la population française au point de leur dénier le droit à l’égalité avec l’homme blanc hétéro (qui serait un pauvre malheureux persécuté dans la société d’aujourd’hui, si on suit
      bien la logique de ses propos).

      Je constate en tout cas que vous ne fournissez un seul argument, vous contentant d’un pur attaque ad hominem. Croyez-moi, c’est le plus bel hommage que vous puissiez me faire. En tirant sur le
      messager plutôt que sur le message, vous reconnaissez implicitement que vous n’avez pas d’arguments à opposeraux miens.

      Par ailleurs, ayant vu les exploits de ceux qui aujourd’hui se proclament à tout bout de champ “révolutionnaires”, “féministes”, “pro-homos” et “pro-bronzes”, je peux vous assurér qu’être traité
      de “réactionnaire”, “anti-femmes”, “anti-homos” et “anti-bronzés” par leurs partisans est mieux qu’une satisfaction, c’est un honneur. “Etre traité d’idiot par un imbécile est un plaisir de fin
      gourmet”.

      Descartes fait mine de ne pas comprendre la remarque de Mélenchon sur les gens à la peau sombre, en ne la remettant pas dans le contexte vénézuelien.

      Mélenchon écrit dans un blog en français et pour des français. Je n’ai donc rien à remettre “dans un contexte vénézuelien”. Par ailleurs, je me demande comment l’expression “ce marron que
      montrent les plus beaux êtres humains” pourrait-il être “réplacé dans le contexte vénézuelien”. Voulez-vous dire que pour Mélenchon les “plus beaux êtres humains” sont marrons au Vénézuela mais
      pas ailleurs ? Y aurait-il une esthétique purement vénézuelienne ?

      Au Vénézuela comme dans toute l’Amérique Latine, les positions dominantes de la société sont occupées par des blancs qui détiennent la plupart des richesses. A l’inverse, il est mal vu
      d’avoir des origines indiennes ou “nègres”. Par son propos, Mélenchon ne fait donc que dire (certes de façon un brin provocatrice) que les gens basanés n’ont pas à avoir honte de leur peau
      sombre, dans des sociétés racistes dans lesquelles on leur inculque depuis leur plus jeune age la honte de leurs origines (indiennes ou “nègres”).

      Je suis toujours surpris du niveau d’invention dont les fanatiques sont capables de faire preuve pour démontrer que le blanc est noir quand leur idole dit une bêtise. Il faut beaucoup
      d’imagination et une bonne dose de mauvaise foi pour faire dire au paragraphe rédigé par Mélenchon ce que vous prétendez y voir (1). Mélenchon dans sa formule ne parle ni de pouvoir, ni de
      richesse, ni de ce qui est “mal vu” ou “bien vu”, ni de ce qui doit faire honte ou pas. Il fait un jugement esthétique, parlant du “marron que montrent les plus beaux êtres humains”. Dire que les
      noirs sont “plus beaux” que les blancs est aussi raciste que dire le contraire.

      Que cela vous plaise ou pas, dans son texte Mélenchon non seulement fait un jugement esthétique sur les “marrons”, mais en fait un critère de reconnaissance “des notres”. Ce qui va encore plus
      loin sur le terrain miné du “racisme inversé”. Qui est non seulement un racisme comme les autres, mais une erreur politique. Sortez un peu de votre fanatisme et essayez de lire ce texte avec les
      yeux de “l’autre”: que pensez-vous que peut ressentir un honnête ouvrier français “blanc” qui lirait ce paragraphe ?

      (1) Pour ceux intéressés par ce phénomène, il y en a quelques exemples magnifiques dans les “commentaires” au papier de Jean-Luc Mélenchon sur son blog (faut lire vite parce que certains sont
      vite “modérés”). Je ne résiste pas à la tentation d’en citer quelques uns:

      Et puis, beaucoup ici n’ont lu le texte que trop vite, sans faire attention à quel substantif se rapportait quel adjectif. Ce n’est pas à “marron” que se rapporte le superlatif “les plus
      beaux”… et qualifier ce marron de superbe n’a rien de choquant. Quant au superlatif, est-il choquant ? Je doute. “ce superbe marron que montrent les plus beaux êtres humains” ne doit pas être
      traduit pas “ce superbe blanc que montrent les plus beaux êtres humains” mais par “cette superbe absence de signes extérieurs de richesse que montrent les plus beaux êtres humains”. Je ne sais
      pas si vous comprenez. Ceux qui prennent le train tous les jours entre Paris gare du Nord et Creil comprennent peut-être. Dès la montée à Paris, on sait qui va descendre à Chantilly. Ils se
      distinguent de tous les autres, par tout un tas de petits signes, ce que Bourdieu appelait l’habitus. Ce n’est pas toujours la Roleix, pas toujours le bronzage, pas toujours le carré Hermès, mais
      il y a toujours un ensemble de petits trucs.

      N’est-ce pas magnifique ? Allez, un dernier pour la route:

      Le blanc, le noir, le marron, le jaune, sont des expressions de nos différences, entendre en sous entendu l’expression du racisme est que l’on est contaminé par le bien pensant, ou le
      politiquement correct, ou que l’on réfrène un racisme que l’on se refuse a admettre. En employant justement ces mots interdits, Jean-Luc libère.

      Ingénieux, n’est ce pas ?

  6. Gugus69 dit :

    Qu’est-ce que ça veut dire “peu me choit”, ami Descartes ?

    Pour le reste, je vous approuve en tous points. Il y a beau temps que je me suis fait une opinion sur le PG en général et son leader en particulier. Le lecture de son blog et surtout celle des
    commentaires est effarante, en effet. Une secte ! Un gourou !  Heureusement pour moi, j’y suis depuis longtemps interdit de forum…

    • Descartes dit :

      Qu’est-ce que ça veut dire “peu me choit”, ami Descartes ?

      C’est une façon élégante de dire “rien à foutre”…

      Pour le reste, je vous approuve en tous points. Il y a beau temps que je me suis fait une opinion sur le PG en général et son leader en particulier. Le lecture de son blog et surtout celle
      des commentaires est effarante, en effet. Une secte ! Un gourou ! 

      J’avoue que je ne lis pas trop ses papiers ces derniers temps, parce qu’il se répète. Mais la section “commentaires” est une mine d’or pour qui s’intéresse à la sociologie des militants de la
      “gauche radicale”.

  7. Trubli dit :

     

     Mélenchon dans sa formule ne parle ni de pouvoir, ni de richesse, ni de ce
    qui est “mal vu” ou “bien vu”, ni de ce qui doit faire honte ou pas. Il fait un jugement esthétique, parlant du “marron que montrent les plus beaux êtres humains”

    Ne connaissant pas la vie privée de Mélenchon, peut-être avoue-t-il par là un penchant pour les femmes
    marrons ? Ou les hommes bronzés ? Surtout que le Vénézuela produit des miss univers ou miss monde à la pelle. Comment rester insensible à leur charme ?

  8. dsk dit :

    “Dire que les noirs sont “plus beaux” que les blancs est aussi raciste que dire le contraire.”

     

    Attention, M. Descartes. Il s’agit à probablement d’une provocation, tout-à-fait consciente de la part de Mélenchon. En effet, il rétorquera sans doute au réactionnaire malveillant, vendu au
    patronat et au Figaro que vous êtes, qu’il faisait allusion au métissage, d’où l’emploi du terme “marron”, et non de “noir”.

    • Descartes dit :

      Attention, M. Descartes. Il s’agit à probablement d’une provocation, tout-à-fait consciente de la part de Mélenchon.

      Je ne le crois pas. Mélenchon ne fait que reprendre un discours qui est devenu ces dernières années un leitmotiv de la gauche bienpensante. Cette gauche bienpensante qui a tourné le dos à
      l’universalisme pour se vautrer dans le communautarisme – au sens le plus général du terme – le plus ehonté.

      Le discours en question se présente sous la forme “les noirs/maghrébins/musulmans/homosexuels/femmes/etc. ont beaucoup à apporter à la France” ou bien “la France n’a pas d’avenir sans les
      noirs/maghrébins/musulmans/homosexuels/femmes/etc.”. Là où l’universaliste dirait que la France a besoin de tous ses enfants, enfants qui à titre accessoire peuvent avoir tel ou tel couleur de
      peau, telle ou telle préférence sexuelle, tel ou tel sexe, telle ou telle réligion, le communautariste considère que l’apport en question n’a de la valeur que parce qu’il est issu de tel ou tel
      groupe. Comme si l’apport à l’humanité d’un scientifique noir était l’apport d’abord celui d’un noir, et seulement accessoirement celui d’un physicien.

      A cette vision appartient cette idée absurde qu’une assemblée comptant plus de “femmes” ou plus de “minorités” prendrait de plus sages décisions, comme si une “sagesse” particulière était
      rattachée à telle ou telle communauté. On remarquera d’ailleurs que pour être sage, une communauté doit impérativement être minoritaire ou “opprimée”. Celui qui insinuerait qu’il faudrait dans
      telle ou telle institution plus d’hommes blancs hétérosexuels serait certainement accusé de racisme, de sexisme et d’homophobie. En pratique, lorsque les femmes ont exercé le pouvoir, elles n’ont
      fait ni mieux ni moins bien que les hommes. Margaret Thatcher est un excellent exemple.

      Ce que je critique chez Mélenchon ce n’est pas son jugement esthétique sur les “marrons”. Le jugement esthétique fait partie du domaine privé. Je me suis suffisamment battu contre les
      pseudo-antiracistes qui prétendent priver les gens du droit inaliénable d’aimer ou de ne pas aimer sans avoir à rendre compte à  personne. Dire “je n’aime pas les noirs” n’est pas du
      racisme. Le racisme commence lorsqu’on prétend faire d’une préférence privée une question de la sphère publique, par exemple en refusant aux gens “qu’on n’aime pas” leurs droits. En disant sa
      préférence esthétique pour les “marrons”, Mélenchon n’est pas raciste. Par contre, lorsqu’il tire de cette préférence un critère pour décider que ces gens-là sont “les notres” en termes
      politiques, là il devient raciste. Pourquoi un auvergnat blond aux yeux bleux serait-il moins “des nôtres” qu’un “marron” ? On est “des nôtres” en fonction de critères objectifs de choix
      politiques et éthiques, et non du fait de la couleur de peau. Il y a certainement des “marrons” réactionnaires et putchistes – tous ceux qui ont fait le putch contre Chavez n’étaient pas d’un
      blanc immaculé, si ma mémoire ne me trompe pas – et il y a des “blancs” aux impéccables états de service “révolutionnaires”.

      En effet, il rétorquera sans doute au réactionnaire malveillant, vendu au patronat et au Figaro que vous êtes, qu’il faisait allusion au métissage, d’où l’emploi du terme “marron”, et non de
      “noir”.

      Je n’en doute pas… mais cela n’a ni queue ni tête. Faire du “métissage” une catégorie politique est aussi absurde que de parler des “races pures”…

  9. Baruch dit :

    Petite rectification grammaticale.

    C’est “peu me chaut” qu’il aurait fallu écrire, du verbe” chaloir”. Verbe oublié qui signifiait “importer” entre autres.” Peu m’importe, je m’en fiche”

    C’est un verbe dont le participe présent a donné chaland le client, achalandé avoir une belle et nombreuse clientelle.

    Ce site ne fait pas le plein de chalands car il ne vend rien,mais il chaut à la réflexion politique et chacun sait que le négoce n’est pas propice au savoir !

    Ce sont studium et otium qui sont copains, la nonchalance (de même racine) prédispose à l’étude !

     

     

  10. Trubli dit :

    Bonjour Descartes.

    Flamby a encore frappé fort. Cet homme n’a rien à proposer. Aucune idée brillante. Il fait dans le sociétal pour combler le vide. Cependant sa dernière sortie sur la rafle du Vel d’hiv m’a
    décontenancé. Outre le fait qu’une partie de la population commence à en avoir assez de la repentance, je trouve discutable d’affirmer que Vichy constitue une continuation de l’état
    français. 

    Contestable à plusieurs égard :

    tout d’abord parce qu’il ne parle pas de l’organisateur de la rafle, Bousquet, grand ami de son mentor Mitterand, mais prend soin de faire porter le fardeau de ce crime à toute la nation
    française

    ensuite parce que selon moi, mais je peux me tromper, Vichy était un régime croupion. La France état souverain n’existait plus. 

    Autre point crucial, pourquoi cette focalisation sur le Vel d’hiv et pas la Saint Barthélémy ou l’abolition de l’esclavage. 

    Je ne suis pas un “fan” de De Gaulle – en raison de sa politique africaine avec Jacques Foccard – mais il faut dire qu’avec l’élection de Hollande les pétainistes assassinent le gaullisme et tout
    ce qu’il avait de positif une deuxième fois. 

    • Descartes dit :

      Je partage votre sentiment, et je prépare un papier pour ce blog sur cette affaire. Le problème, c’est qu’on n’arrête pas de mélanger les choses. De Vichy, on peut avoir une approche politique,
      ou bien une approche historique, mais pas les deux. L’approche politique est celle qu’avait eu De Gaulle, et que tous ses successeurs jusqu’à Chirac ont maintenu: la France a besoin politiquement
      d’une fiction résistante. La France, c’est Londres, c’est la Résistance. Vichy, c’est l’anti-France. Et il est donc ridicule de s’excuser au nom de la France de ce que la France n’a pas fait,
      comme il était absurde de “proclamer la République”, puisque la République, dans la vraie France, n’avait jamais été abolie.

      L’approche historique est très différente. On se trouve dans un contexte qui est celui d’un pays occupé, avec un état croupion qui fonctionne dans un système de contraintes, et ses dirigeants se
      voient poser quotidiennement des dilemmes de vie ou de mort. Beaucoup d’entre eux essayent, de bonne foi, de sauver ce qui peut l’être, en trouvant des équilibres bancaux avec les allemands.
      Qu’aurions nous fait si, hauts fonctionnaires d’un régime que nous désapprouvons, on nous avait mis en main le marché suivant: vous coopérez avec la déportation des juifs étrangers, ou nous
      traitons la France comme la Pologne (c’est à dire, la déportation de tous les juifs) ? Je ne sais pas. J’espère que je ne serai jamais devant un tel choix. Et c’est pourquoi, avec une casquette
      d’historien, je serais très prudent avant de juger ceux qui ont du assumer un tel choix.

      La politique et l’histoire n’ont pas les mêmes responsabilités. La politique fonctionne sur des mythes, l’histoire sur des faits. Si l’homme politique pense qu’un mythe est nécessaire, il doit le
      créer, même si cela revient à inventer des faits inexistants. C’est ce que fit De Gaulle avec la Résistance. Si le film “Le chagrin et la pitié” fut privé de diffusion à la télévision, ce n’est
      pas parce qu’il disait des choses fausses, mais parce qu’il disait des choses dangereuses. Son interdition est un acte politique au sens le plus noble du terme, qu’on partage ou non sa
      justification.

      La question à se poser est: pourquoi Hollande, qui est un politique et non un historien, est en train de créer la fiction contraire à celle de De Gaulle, celle d’une France criminelle ? A cette
      question… j’ai quelques réponses.

  11. Trubli dit :

    J’ai moi aussi quelques idées. Mais comme vous prévoyez d’écrire sur le sujet, je patienterai avant de les exposer. 

  12. Prep44 dit :

    Bonjour Descartes,

     

    Vous avez la plume alerte et le regard incisif, nécessaires à tout bon commentateur. Mais malheureusement, je ne suis pas d’accord
    avec vous sur beaucoup de points.

     

    Vous écrivez que le texte de Mélenchon montre l’enthousiasme des sociétés latino-américaines qui seraient facilement enclines à se
    mettre à la merci d’un caudillo, dans une sorte de « culte religieux » de l’homme providentiel. Vous extrapolez complètement. D’abord, il faut rappeler que la campagne pour les
    législatives a commencé au Venezuela et que de tels rassemblements n’ont pas lieu en dehors de ces périodes électorales. Ensuite, cet enthousiasme de circonstance n’est pas propre aux sociétés
    d’Amérique latine. Il suffit de regarder le meeting de Sarkozy à Villepinte pour retrouver cet enthousiasme débordant pour un homme (je viens de regarder à nouveau la vidéo et les photos). Quand
    le leader de l’UMP a fendu la foule, tous voulaient le toucher. On voit même quelques jeunes filles pleurer. Des dizaines de milliers de personnes – 80 000 selon le site de l’UMP – crient en
    cœur « Nicolas, Nicolas ». J’ai relu les articles de journaux où l’on recense les réactions des Français présents dans la salle : certains le trouvent alors
    « surpuissant », d’autres comme « une bête de scène » avec une « force de taureau »,  d’autres encore disent qu’ils ont
    « besoin d’un papa politique » et qu’ils l’ont trouvé en Sarkozy. Et Jean-François Copé de dire : « Il est le seul à pouvoir conduire les destinées politiques de notre
    pays ». On pourrait dire la même chose d’un meeting de Hollande ou de Le Pen. Je pense donc qu’il n’y a pas de spécificité latino-américaine lorsqu’il s’agit de soutenir un homme politique.
    La ferveur politique est universelle et les épanchements des populations sont tout à fait normaux en périodes électorales. Par ailleurs, les exemples de caudillo ne sont pas uniquement
    latino-américains : Franco a souvent été qualifié ainsi. « Le grand festival religieux indien où les gens se piétinent pour pouvoir toucher de près les habits de telle ou telle
    déesse », on le retrouve donc aussi bien à Barquisemeto qu’à Villepinte ou au Bourget et je trouve normal que Mélenchon se soit laissé griser par la ferveur du moment.

     

    Vous écrivez « Vous le savez maintenant, travailleurs français « blancs ». Vous êtes moches », en contrepoint de
    la phrase de Mélenchon « partout dominait en profondeur ce superbe marron que montrent les plus beaux êtres humains ». Une précédente réaction le notait bien : il faut bien mettre
    cette phrase dans le contexte vénézuélien. Mélenchon le précise deux lignes avant « ICI c’est de cela dont je parle », c’est-à-dire ICI à Barquisemeto. Vous ne croyez tout de même pas
    sérieusement qu’il n’y avait que des Noirs à la Bastille et/ou que Mélenchon s’adressait uniquement à eux lorsqu’il a dit « On s’est retrouvés » ! Enfin, il serait bien que vous
    vous renseigniez sur ce qu’est le marronnage en Amérique latine. Vous le savez, Mélenchon est un homme qui aime beaucoup l’histoire. Il a souvent été invité dans les universités pour faire des
    conférences et ses discours sont truffés de références historiques. Ici, il fallait déceler la référence au marronnage. Quand il entrait sur la scène de ses meetings, les militants de Mélenchon
    ne criaient pas son nom mais « Résistance, résistance ! ». Or, la figure du marron en Amérique latine incarne aujourd’hui la résistance. Richard Burton l’a très bien montré dans
    son étude littéraire Le Roman Marron. Par ailleurs, le marronnage a déclenché de très nombreuses révolutions en Amérique latine comme celle d’Haïti
    par exemple. Enfin, le marron, c’est aussi un métissé, issu des esclaves noirs venus d’Afrique et des Indiens d’Amérique. Cela est à mettre en relation avec l’ode au métissage de Mélenchon lors
    du discours sur la plage marseillaise du Prado. Quand Mélenchon dit que le marron est la plus belle couleur, il ne porte pas un jugement esthétique (d’ailleurs, un peu de philo : parler de
    la beauté, ce n’est pas forcément parler de l’esthétique !) mais il pense à tout ce que ça implique historiquement et politiquement en Amérique latine. Oui, le métissage en Amérique latine
    fut et est un thème central des discours politiques et s’il ne faut pas voir dans les métissés une catégorie politique, il y a bien une reconnaissance et une conscience politique de cette
    catégorie de la population. Si cela peut paraître étrange en France, c’est bien le cas en Amérique latine. Quand Mélenchon dit que ces marrons sont les « nôtres », il faut se mettre à
    sa place, avec son imaginaire de gauche et comprendre qu’il veut dire, comme il l’explicitait très bien dans son discours de la Bastille, « le peuple des révolutions et des
    rébellions ». Les « nôtres », pour Mélenchon, c’est tout autant le révolutionnaire français de 1789 que le marron esclave qui s’est révolté et a permis l’établissement d’un nouvel
    Etat.

     

    Enfin, vous écrivez dans une de vos réponses : «  Mélenchon écrit dans un blog en français et pour des français. Je n’ai
    donc rien à remettre « dans un contexte vénézuelien ». Je pense que vous ne vous êtes pas relu pour écrire une énormité pareille ! On peut très bien écrire dans un blog en français
    et s’adresser à des francophones canadiens, béninois, haïtiens, etc. Mélenchon n’écrit pas forcément que pour les Français comme en témoigne les nombreuses réactions des étrangers (Grecs, Danois,
    etc) dans les commentaires de son blog.

     

    Néanmoins, vos articles sont intéressants sur beaucoup de points. On reconnait la qualité d’un blog au nombre de réactions et de
    lectures qu’il suscite. C’est le

    • Descartes dit :

      Vous avez la plume alerte et le regard incisif, nécessaires à tout bon commentateur. Mais malheureusement, je ne suis pas d’accord avec vous sur beaucoup de points.

      Pourquoi “malheureusement” ? C’est le désaccord qui fait l’intérêt de l’échange.    

      Vous écrivez que le texte de Mélenchon montre l’enthousiasme des sociétés latino-américaines qui seraient facilement enclines à se mettre à la merci d’un caudillo, dans une sorte de « culte
      religieux » de l’homme providentiel. Vous extrapolez complètement.

      Pas tout à fait: d’abord, l’histoire latinoaméricaine est parsemée de ces “caudillos” qui font l’objet d’un culte quasi religieux quand ce n’est pas d’une canonisation de fait. L’exemple le plus
      extravagant étant celui d’Eva Peron, dont le corps momifié après sa mort a pratiquement eu un statut de relique.

      Ensuite, venons au meeting. Relisez la description que fait Mélenchon de son meeting, et vous verrez qu’il décrit une expérience mystique. Son propre “visage en larmes”, les visages d’Arvélaiz et
      de Ramonet qui “se transforment”, “le saisissement, l’effroi sacré qui nous habitait est un moment qui n’a pas ses mots pour le décrire raisonnablement”, à quoi cela vous fait penser ?

      D’abord, il faut rappeler que la campagne pour les législatives a commencé au Venezuela et que de tels rassemblements n’ont pas lieu en dehors de ces périodes électorales.

      Ce n’est pas vrai. De tels rassemblements ont souvent lieu pendant les déplacements de Chavez dans les provinces.

      Ensuite, cet enthousiasme de circonstance n’est pas propre aux sociétés d’Amérique latine. Il suffit de regarder le meeting de Sarkozy à Villepinte pour retrouver cet enthousiasme débordant
      pour un homme (je viens de regarder à nouveau la vidéo et les photos).

      Ayant vécu quelques années en Amérique Latine, je peux vous assurer que cela n’a absolument rien à voir. Avez-vous vu, au meeting de Villepinte, les militants se précipiter sur le podium pour
      essayer de toucher leur idole ? Imaginez-vous un militant avoir “le visage en larmes” écoutant Sarkozy ? Bien sur que non. Les gens peuvent crier, chanter, agiter les drapeaux… mais ils restent
      sagement devant leur siège et écoutent le discours sagement assis. Et surtout, ils ne se trompent jamais sur la nature de l’acte auquel ils sont en train de participer. A leurs yeux, Sarkozy est
      un leader, pas un surhomme.

      Quand le leader de l’UMP a fendu la foule, tous voulaient le toucher.

      Ce n’est pas vrai. Si “tous” s’étaient précipités pour le toucher, il aurait fallu des cordons bien plus solides que ceux qu’on a vu pour retenir les militants. Lorsque Sarkozy passe, ceux qui
      sont proches de lui essayent de lui serrer la main, pas de le “toucher” comme on touche une relique.

      On voit même quelques jeunes filles pleurer.

      J’ai mes doutes. Mais en tout cas,  pas les vieux de l’âge de Mélenchon.

      Des dizaines de milliers de personnes – 80 000 selon le site de l’UMP – crient en cœur « Nicolas, Nicolas ». J’ai relu les articles de journaux où l’on recense les réactions des Français
      présents dans la salle : certains le trouvent alors « surpuissant », d’autres comme « une bête de scène » avec une « force de taureau »,  d’autres encore disent qu’ils ont « besoin d’un papa
      politique » et qu’ils l’ont trouvé en Sarkozy.

      Ce sont des diagnostics assez rationnels. Dire que Sarkozy est une “bête de scène” ou le comparer à un “taureau” dans ce contexte n’a rien d’absurde. Le problème avec Chavez, ce n’est pas qu’on
      dise de lui que c’est une bête de scène, mais qu’il a le pouvoir par sa seule pensée de guérir des maladies ou de changer les lois de l’économie et de la physique. Et à ma connaissance, personne
      – en dehors d’un aliéné mental – n’écrirait à Sarkozy pour lui demander de guérir son enfant.

      Et Jean-François Copé de dire : « Il est le seul à pouvoir conduire les destinées politiques de notre pays ». On pourrait dire la même chose d’un meeting de Hollande ou de Le Pen.

      Et alors ? Lisez bien: “… les destinées politiques…”

      Je pense donc qu’il n’y a pas de spécificité latino-américaine lorsqu’il s’agit de soutenir un homme politique. La ferveur politique est universelle et les épanchements des populations sont
      tout à fait normaux en périodes électorales.

      Non. Je vais vous donner un exemple: après le renoncement d’Eva Peron – je vous rappelle qu’on était “en période électorale” – des bustes de son auguste personne avaient été installés dans le
      hall des grands hopitaux. Il était habituel de voir des hommes et des femmes priant à genoux devant le buste pour la guérison de leurs proches. A votre avis, quel est le politicien français qui,
      vivant ou mort, aura fait l’objet d’un tel culte ?

      La situation de Chavez n’est pas très différente, et on trouve souvent chez les vénézueliens des petits “autels domestiques” ou, à côté de petits portraits de saints, on trouve un portrait du
      “présidente” avec un petit cierge allumé devant. Pensez-vous qu’il y ait en France beaucoup d’autels domestiques avec des photos de Sarkozy ou d’Hollande ?

      Par ailleurs, les exemples de caudillo ne sont pas uniquement latino-américains : Franco a souvent été qualifié ainsi.

      C’est exacte, et je n’ai jamais dit le contraire. Mais je trouverais triste qu’un homme politique français me propose de prendre exemple sur le “caudillo” à l’espagnole…

      Vous écrivez « Vous le savez maintenant, travailleurs français « blancs ». Vous êtes moches », en contrepoint de la phrase de Mélenchon « partout dominait en profondeur ce superbe marron que
      montrent les plus beaux êtres humains ». Une précédente réaction le notait bien : il faut bien mettre cette phrase dans le contexte vénézuélien.

      On peut toujours essayer. L’ennui, c’est que Mélenchon, dans la formule citée, exprime un jugement esthétique. Et qu’on voit mal en quoi le jugement esthétique pourrait avoir un rapport avec le
      “contexte vénézuelien”. A part se dire que les blancs vénézueliens ou que les “marrons” éuropéens soient particulièrement moches je n’arrive pas à voir pourquoi le jugement esthétique de
      Mélenchon n’aurait pas une portée universelle. L’argument du “contexte” a bon dos…

      Mélenchon le précise deux lignes avant « ICI c’est de cela dont je parle », c’est-à-dire ICI à Barquisemeto. Vous ne croyez tout de même pas sérieusement qu’il n’y avait que des Noirs à la
      Bastille et/ou que Mélenchon s’adressait uniquement à eux lorsqu’il a dit « On s’est retrouvés » !

      Des noirs peut-être pas… mais des “marrons” ? Je me le demande… du moins si l’on met ce terme dans le “contexte français”.

      Enfin, il serait bien que vous vous renseigniez sur ce qu’est le marronnage en Amérique latine.

      Il serait bien que vous n’essayiez pas de me prendre pour un imbécile. Le “marronage” en Amérique Latine n’a absolument aucun rapport avec la choucroute. La formule de Mélenchon (“ce superbe
      marron que montrent les plus beaux êtres humains”) ne laisse aucune ambiguïté sur le fait qu’il parle de la couleur de la peau.

      Vous le savez, Mélenchon est un homme qui aime beaucoup l’histoire. Il a souvent été invité dans les universités pour faire des conférences et ses discours sont truffés de références
      historiques.

      Si Mélenchon aime tant l’histoire, pourquoi la maltraite-t-il à ce point ? Plusieurs fois on l’a pris en flagrant délit d’invention ou de réécriture de l’histoire pour la faire correspondre à ses
      besoins politiques. Le cas d’Emilienne Mopty – que j’ai traité en détail dans ce blog – est un bon exemple.

      Ici, il fallait déceler la référence au marronnage.

      Je ne vois pas pourquoi. Si Mélenchon dit “le soleil est jaune”, faut-il déduire qu’il fait référence à la Chine ? C’est vraiment n’importe quoi. J’ai quand même envie de vous poser une question.
      Supposons que la phrase en question fit référence au “marronage”. Quel serait alors son sens ? Que les “marrons” sont les plus beaux êtres humains ? J’aimerais bien que vous m’expliquiez
      exactement et en termes simples ce que votre idole a voulu dire avec cette allusion…

      Quand il entrait sur la scène de ses meetings, les militants de Mélenchon ne criaient pas son nom mais « Résistance, résistance ! ». Or, la figure du marron en Amérique latine incarne
      aujourd’hui la résistance.

      Mon dieu, c’est un vrai roman à clés, les discours de Mélenchon. Je crains que, dans votre empressement a sauver votre idole vous alliez un peu trop loin dans l’association d’idées. Non, la
      “figure du marron” n’incarne nullement en Amérique Latine “la resistance”. D’abord, parce que le “marron” n’existe pas partout en Amérique Latine: c’est une figure très présente dans les pays qui
      ont eu des économies de plantation et donc un grand nombre d’esclaves noirs (le Brésil, les Antilles, l’Amérique centrale). Par contre, l’institution est inconnue en Argentine, Uruguay, Chili,
      Bolivie, Perou, Equateur, où l’économie de plantation est inconnue.

      Mais à supposer que votre affirmation fut vraie, quel rapport ? Croyez vous vraiment que Mélenchon, en parlant du “marron qu’exhibent les plus beaux êtres humains” parlait du marron comme symbole
      de résistance ?

      Par ailleurs, le marronnage a déclenché de très nombreuses révolutions en Amérique latine comme celle d’Haïti par exemple. Enfin, le marron, c’est aussi un métissé, issu des esclaves noirs
      venus d’Afrique et des Indiens d’Amérique. Cela est à mettre en relation avec l’ode au métissage de Mélenchon lors du discours sur la plage marseillaise du Prado.

      Ici on atteint le summum. Le “marron” est un esclave évadé, vivant souvent en pleine nature. Il n’est pas nécessairement “un métissé”: pour ne prendre que l’exemple que vous proposez vous-même,
      on voit mal avec quels “indiens d’Amérique” les “marrons” haïtiens auraient pu se “métisser”. Si Mélenchon avait voulu faire de sa phrase sur les “marrons”  une ode au métissage, alors le
      moins qu’on peut dire c’est qu’il parle d’un “marron” mythique comme l’aiment les européens: à la fois résistant, métissé…

      Désolé, mais je suis un grand partisan du rasoir d’Occam. La formule de Mélenchon fait de toute évidence référence à la couleur de peau. Toute cette théorie sur le métissage, le “marronage” et je
      ne sais quoi d’autre me rappelle les méthodes exégétiques des docteurs de l’église catholique qui permettent de faire dire à la bible tout et son contraire.

      Quand Mélenchon dit que le marron est la plus belle couleur, il ne porte pas un jugement esthétique

      D’abord, établir une hiérarchie dans la beauté, c’est porter un jugement esthétique, et cela par définition. De plus, Mélenchon ne dit pas que le marron est la plus belle couleur, il parle du
      marron “que montrent les plus beaux êtres humains”.

      (d’ailleurs, un peu de philo : parler de la beauté, ce n’est pas forcément parler de l’esthétique !)

      C’est vrai: par exemple, dire que “beauté” est un nom masculin, c’est parler de grammaire…

      mais il pense à tout ce que ça implique historiquement et politiquement en Amérique latine.

      J’admire votre capacité à lire dans les pensées de votre idole. Moi, qui n’ai pas ce privilège, je me contente d’analyser ce qu’il écrit.

      Oui, le métissage en Amérique latine fut et est un thème central des discours politiques et s’il ne faut pas voir dans les métissés une catégorie politique, il y a bien une reconnaissance et
      une conscience politique de cette catégorie de la population.

      Je vois mal comment, s’ils ont une “conscience politique” propre, je pourrrais ne pas en faire une “catégorie politique”. Faut choisir, camarade: on ne peut rejeter le communautarisme en France
      et l’applaudir ailleurs. On ne peut pas d’un côte réfuser l’ethnicisation de la politique et d’un autre côté faire l’éloge du “métissage”. Ou bien l’appartenance ethnique est un caractère
      politique, ou bien elle ne l’est pas.

      Si cela peut paraître étrange en France,

      Cela n’a rien “d’étrange”: après tout, on voit partout des communautaristes qui essaient de nous attirer dans cet engrenage. Ce qui est “étrange”, c’est qu’un leader politique qui en condamne le
      communautarisme lorsqu’il est en France se laisse émouvoir par une manifestation vénézuelienne au point d’en faire l’éloge…

      Quand Mélenchon dit que ces marrons sont les « nôtres », il faut se mettre à sa place, avec son imaginaire de gauche

      C’était précisement mon point. C’est cet “imaginaire de gauche” séduit par les “socialismes exotiques” au point de leur pardonner tout et n’importe quoi. Ce faisant, la gauche tourne le dos à
      l’héritage universaliste pour se vautrer dans le relativisme.

      Enfin, vous écrivez dans une de vos réponses : «  Mélenchon écrit dans un blog en français et pour des français. Je n’ai donc rien à remettre « dans un contexte vénézuelien ». Je pense
      que vous ne vous êtes pas relu pour écrire une énormité pareille ! On peut très bien écrire dans un blog en français et s’adresser à des francophones canadiens, béninois, haïtiens, etc.

      On peut très bien, mais ce n’est pas le cas. Dans son blog, Mélenchon traite les problèmes d’un point de vue purement français. Il ne prend jamais la peine d’expliquer des notions – par exemple,
      le fonctionnement de nos institutions – ou des références qui sont incompréhensibles pour un francophone non français (sauf peut-être pour un belge). Non: Mélenchon écrit bien en français et pour
      les français.

      Mélenchon n’écrit pas forcément que pour les Français comme en témoigne les nombreuses réactions des étrangers (Grecs, Danois, etc) dans les commentaires de son blog.

      Vous ne semblez pas voir la différence entre “écrire pour quelqu’un” et “être lu par quelqu’un”. La bible est lue en France, et pourtant je doute que le rédacteur ait pensé aux français en
      l’écrivant…

      Néanmoins, vos articles sont intéressants sur beaucoup de points. On reconnait la qualité d’un blog au nombre de réactions et de lectures qu’il suscite. C’est le

      Désolé, mais votre message m’est arrivé incomplet… évitez d’utiliser du texte formaté par un autre éditeur de texte, Over-blog semble avoir un problème avec ça.

      J’ajoute que la tournure de votre dernière phrase me fait penser que vous en étiez à la conclusion. J’aimerais connaître votre sentiment sur le commentaire de votre idole concernant le “cacique
      aigri”… mais là aussi, le mot “cacique”, c’est peut-être aussi une référence à la lutte des indiens américains ?

  13. morel dit :

    Décidemment, vous ne ratez pas Mélenchon. Je ne le défendrais pas sur ces propos indéfendables.

    Ce qui m’étonne toujours, c’est la glose développée avec acharnement par ceux qu’on est bien obligés d’appeler ses sectateurs.
    Ceci rappelle la glose religieuse au sens large lorsque la ferveur politique atteint cette dimension ce qui est plus habituel dans certains pays mais qui, sans être aussi généralisée, existe
    parfois chez nous (la croyance malgré tous les signes concrets au « paradis soviétique » par ex.).

    Mais si, pour revenir à votre sujet, il est permis de gloser irrationnellement autour des propos de leur idole politique,
    sont-ils conscients qu’ils accordent à d’autres le droit de le faire dans un sens qui ne leur conviendrait pas ?  Sont-ils conscients que toute discussion politique sérieuse et honnête
    serait alors impossible ?

    • Descartes dit :

      Décidemment, vous ne ratez pas Mélenchon.

      Qui bene amat, bene castigat…

      Ce qui m’étonne toujours, c’est la glose développée avec acharnement par ceux qu’on est bien obligés d’appeler ses sectateurs.

      J’avoue humblement qu’une des motivations secondaires pour écrire mes billets sur Mélenchon est de susciter ces réactions pour pouvoir les étudier. J’avoue que la question des “marrons” a donné
      lieu à des variations particulièrement savoureuses…

      Mais si, pour revenir à votre sujet, il est permis de gloser irrationnellement autour des propos de leur idole politique, sont-ils conscients qu’ils accordent à d’autres le droit de le faire
      dans un sens qui ne leur conviendrait pas ?  Sont-ils conscients que toute discussion politique sérieuse et honnête serait alors impossible ?

      Je ne le crois pas. Je pense qu’ils sont dans une logique asymmetrique: leur idole est le Bien, et il ne peut donc commettre de faute: tout ce qu’il dit doit être la vérité, même si c’est sous
      une forme oraculaire. Par contre, ceux qui l’attaquent sont le Mal, et ils n’ont donc pas droit à cette présomption d’infaillibilité…

      Je ne crois pas que le débat ou la discussion politique intéressent véritablement le Front de Gauche. Son fonctionnement jusqu’ici en tout cas a été un fonctionnement purement vertical, sauf
      peut-êtreau PCF où il reste encore quelque respect pour les formes dans la prise de décision. En tout cas, la discussion sur le fond a été soigneusement évacuée, et les “forums” auxquels j’ai
      assisté étaient plutôt des cérémonies de communion autour des mêmes préjugés que des véritables confrontations entre des gens qui pensent différement.

       

  14. alextpe dit :

    Très bon article. J’ai pourtant voté Mélenchon. Etant très cartésien, et détestant la mauvaise foi et la fuite, je ne peux contester ces arguments, d’autant plus que vous les précisez dans vos
    commentaires.

    Ca me désolé, car bien que je trouve que Mélenchon a de nombreux mauvais côtés, je retenais surtout celui de progressiste. Egalité homme-femme, la “règle verte”, etc. Des valeurs de progrès
    qui m’avaient énormément touché. Ses multiples colères ne m’avaient déjà pas laissé de marbre, mais cela restait de l’ordre du “trait de caractère”. Là, on n’est malheureusement plus dans le même
    registre… Ca me désolé et, surtout, m’étonne de lui. On verra…

    • Descartes dit :

      On verra, en effet… cela étant dit, c’est aussi la responsabilité des partisans de Mélenchon de faire leur boulot. S’ils applaudissent Mélenchon quand il dit ou fait des bêtises, il n’aura pas
      de raison pour changer. Si au contraire ceux qui – comme vous – ont voté pour lui font fonctionner leur sens critique et le font savoir, Mélenchon sera encouragé à faire autrement.

  15. daniel d dit :

    Mais qu’attendent SOS racisme, la LICRA, le MRAP, la LDH pour intenter un procès à Mélenchon ?

    Imaginez Marine Le Pen ayant sorti ce genre de phrase en évoquant l’homme blanc, tous les médias et les assos se seraient déchainées.

    Là, silence …

     

     

Répondre à Alain Briens Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *