La nomination de François Bayrou comme Haut-commissaire au Plan rappelle la célèbre formule de mongénéral en parlant d’Albert Lebrun : « Au fond, comme chef de l’Etat, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût un chef ; qu’il y eût un Etat.». Dans le cas qui nous occupe, le problème est le même : François Bayrou n’a rien d’un Haut-commissaire, poste qui suppose une compétence technique plus que politique ; et tant que l’Europe de Maastricht est là, il n’y a pas de plan possible.
Commençons par la première question. Que Emmanuel Macron éprouve, à dix-huit mois de l’échéance présidentielle et alors que le bateau tangue de tous les côtés, le besoin de s’attacher – ou de compromettre – un personnage remuant et imprévisible ayant un pouvoir de nuisance considérable, c’est la logique de la politique. Que pour cela il lui accorde une fonction fantomatique qui lui permette d’avoir la tribune que les électeurs lui ont refusé lors des législatives, soit. Après tout, il ne serait ni le premier ni le dernier à créer une fonction bidon pour faire plaisir. Mais en faire un Haut-commissaire au Plan ? Personne ayant dépassé le quotient intellectuel d’une huître peut prendre cette nomination au sérieux. Personne ne peut imaginer un instant que François Bayrou a quelque chose à apporter à l’heure « d’animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l’Etat et d’éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels », comme l’indique le décret du 1er septembre 2020 instituant la fonction.
Qu’est ce qu’il y connaît, François Bayrou, aux « enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels » de notre pays ? Bien peu de chose, si l’on juge à son parcours. Mais surtout, qu’est ce qu’il y connaît à la coordination de travaux de cette nature ? A-t-il, au cours de sa vie, été l’auteur d’un quelconque rapport, livre, article, conférence qui laisse deviner la moindre capacité à réfléchir ou à organiser une réflexion prospective autour de sujets complexes ? A-t-il une seule fois dans sa vie dirigé une équipe engagée dans une telle réflexion ? Non. Lui connaît-on une seule prise de position intellectuelle sur ces sujets ? Pas davantage. S’il a écrit de nombreux ouvrages (souvent avec des journalistes ou en collaboration) son œuvre se limite à des tracts politiques, et ne contient aucun ouvrage de réflexion. De son passage au gouvernement, on ne retiendra comme mesure forte que la tentative de permettre aux collectivités locales de financer sans limitations l’enseignement confessionnel que lui avait soufflée le lobby de l’enseignement dit « libre » et qui n’était en rien la manifestation d’un engagement personnel, comme on a pu le constater lorsque le projet a avorté.
François Bayrou est peut-être crédible en éleveur de pur-sang qui parle à l’oreille des chevaux. Il n’est guère crédible dans le rôle de l’homme de réflexion qui parle à l’oreille des princes, du coordonnateur des travaux de la haute fonction publique – qu’il exècre et qui le lui rend bien – censés éclairer les choix du gouvernement. C’est un peu comme si on nommait Marine Le Pen chef d’orchestre ou Mélenchon patron d’une entreprise pétrolière. Et ce manque de crédibilité ne peut que se refléter dans le prestige de l’institution qu’il est appelé à diriger. Après tout, pairez-vous cent euros pour écouter Mozart joué sous la direction de Marine Le Pen, achèteriez-vous des actions dans une société pétrolière dirigée par Mélenchon ?
La mascarade apparaît d’ailleurs en toutes lettres dans les textes publiés au Journal Officiel. D’abord il y a le décret du 1er septembre qui institue la fonction de Haut-commissaire au Plan. Un haut-commissaire sans commissariat, puisqu’il est écrit qu’il « dispose du concours de France Stratégie », qui est le service de prospective du gouvernement. Pour ceux qui ne connaissent pas les subtilités du langage administratif, il peut être difficile de comprendre la différence entre « dispose du concours » et « a autorité sur ». Dans le premier cas, cela veut dire que le haut-commissaire peut demander à France Stratégie des travaux sans les rémunérer, mais qu’il n’a aucune autorité sur ses agents, aucun pouvoir d’organisation. Autrement dit, il peut sous-traiter des travaux à France Stratégie, mais il n’en est pas le chef. A ce titre, il est intéressant de comparer ce décret avec celui du 3 janvier 1946 (1) qui instituait un « commissariat au plan » avec ses missions à titre principal, et un « commissaire général » pour le diriger seulement en passant. En 1946, l’institution était l’essentiel, l’homme qui la dirigeait secondaire. En 2020, c’est l’inverse : on institue l’homme qui est censé diriger, sans que l’institution qu’il est censé diriger apparaisse.
Et la mascarade se poursuit dans le décret de nomination du 3 septembre 2020. On peut y lire que « M. François BAYROU est nommé haut-commissaire au plan. Il exerce ses fonctions à titre gratuit ». Si, comme dit le célèbre adage, « tout travail mérite salaire », l’inexistence du salaire peut faire douter de la réalité du travail. D’autant plus que M. Bayrou, nous dit-on, cumulera ses nouvelles fonctions avec celles de président du Modem et maire de Pau. Deux fonctions qui sont loin d’être purement honorifiques, du moins on peut l’imaginer. Ce qui laisse penser que dans la tête de ceux qui ont investi François Bayrou, la tâche « d’animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l’Etat et d’éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturel », loin d’être une fonction qui exige de son titulaire un engagement total et à plein temps, est de celles qu’on peut convenablement exécuter dans le temps libre que lui laissent ses autres et éminentes responsabilités. Autant dire une sinécure.
Mais ce qui rend cette nomination plus absurde encore, c’est que la logique même de « planification » est incompatible avec le contexte des traités européens depuis Maastricht, traités dont notre nouveau Haut-commissaire a été et reste un fervent partisan. En effet, la logique sous-jacente à l’ensemble de la construction européenne est d’en finir avec la régulation volontariste de l’économie par les Etats – et donc par les politiques soumis au bon vouloir des électeurs – pour lui substituer la régulation par le mécanisme aveugle du marché. Dans cette logique, c’est la confrontation dans un marché « libre et non faussé » du consommateur et du producteur qui doit décider de ce qui est produit, dans quelle quantité, où et à quel prix. Il n’y a donc plus de place pour une décision volontariste des gouvernants élus.
Si les plans qui rythmaient l’économie française depuis 1945 ont disparu avec la fin du dixième plan en 1992 (le onzième a été élaboré mais ne sera jamais promulgué), c’est parce que la planification avait perdu son sens. A quoi bon planifier alors que l’Etat n’a plus les leviers qui permettent d’orienter les choix de production ou d’équipement ? Dès lors qu’il est interdit aux Etats de faire des politiques qui portent atteinte à la concurrence et que les services publics qu’ils contrôlent doivent s’inscrire dans une logique de marché, le plan est mort. Il ne peut ressusciter que par une remise en cause de la logique européenne. Et cela rend encore la nomination de François Bayrou encore plus incongrue. Qui peut imaginer un instant que ce fervent partisan du fédéralisme européen fondé sur la concurrence libre et non faussée va devenir un devenu un planiste forcené ? Qu’il pourrait « éclairer les choix des pouvoirs publics » autrement que dans le sens d’une soumission à la logique européenne, qui est la logique des marchés et non celle de la planification ?
Cette nomination est donc une insulte. Une insulte aux hauts-fonctionnaires dont la réflexion prospective est le boulot, et dont on dévalorise le métier en imaginant qu’il peut finalement être bien mieux « coordonné » par un politicard éleveur de chevaux pendant ses heures perdues. C’est une insulte à notre histoire, dans laquelle le volontarisme public et la planification à long terme qui va avec a joué un rôle fondamental, de Colbert à De Gaulle. Et plus grave, c’est une insulte à l’intelligence des français, à qui on s’imagine pouvoir faire croire qu’avec cette nomination on ressuscite l’Etat stratège que beaucoup appellent de leurs vœux alors qu’il ne s’agit de rien d’autre que de donner une tribune à un politicard vieillissant en mal d’expression et de le neutraliser. A la place de Macron, je me méfierais : souvenez-vous de la formule pleine de réalisme qu’on doit à Louis XIV : « toutes les fois que je donne une place vacante, je fais cent mécontents et un ingrat ».
Descartes
(1) A lire avec délectation. A l’époque, on savait dire l’essentiel en neuf articles.
https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/decret_3_janvier_1946.pdf
@Descartes,
corrigez-moi si je me trompe, mais le premier commissaire en chef du Plan que De Gaulle avait nommé en 46 était un certain…Jean Monnet, anti-gaulliste enragé, “père fondateur” de l’UE actuel et fédéraste devant l’Eternel, donc profondément anti-français: vous voyez bien qu’avec Bayrou à la tête d’un “revival” du Plan, les choses ne changeront pas vraiment 😬😈…
@ CVT
[corrigez-moi si je me trompe, mais le premier commissaire en chef du Plan que De Gaulle avait nommé en 46 était un certain…Jean Monnet, anti-gaulliste enragé, “père fondateur” de l’UE actuel et fédéraste devant l’Eternel, donc profondément anti-français:]
Tout à fait. Mais cette nomination s’explique aisément: en 1946, la tâche essentielle du Commissaire au plan était d’organiser la reconstruction en captant autant que faire se peu les crédits du plan Marshall. De Gaulle avait bien compris qu’il fallait à ce poste un homme en qui rassure les Américains, d’autant plus que le ministre de la production industrielle et celui de l’économie nationale, qui jouaient les premiers rôles dans la reconstruction, était un communiste. Le rôle du Commissaire au plan était d’ailleurs assez encadré: dans le décret du 3 janvier 1946, le commissaire général est encadré par un “conseil du plan” ou siègent les différents ministères. En fait, le CGP a finalement assez peu d’influence sous la IVème République et ne devient véritablement puissant avec la nomination de Pierre Masse lors du retour de De Gaulle au pouvoir en 1958.
Contrairement à Descartes, je trouve choquant et condamnable qu on donne a quelqu un un poste juste car il pourrait gener une future campagne electorale. Et le fait que Bayrou ne soit pas payé n est pas une excuse, pas plus le fait que d autres on fait pareil ou pire avant.
Meme si Bayrou ne touche rien, on lui fournira bureau, voiture, personnel et remboursement de note de frais. Si on se base sur le precedent de Segolène Royal (aussi nommé pour assurer la tranquilité de l elysee), le personnel mis a sa disposition avait pour tache principale la promotion de Segolène, pas ses fonctions polaires …
En ce qui concerne le plan, est ce vraiment utile d avoir une plannification etatique ?
Deja il faut s entendre sur ce qu on entend par plannification. Entre le plan quinquenal de feu l URSS et le plan de la IV republique (de l aveu meme de l auteur “le CGP a finalement assez peu d’influence sous la IVème République”) il y a un monde
Je ne discute pas l interet pour un etat d avoir une activite prospective sur ce qui se passera dans 20 ans (j ai aucune idee de ce que fait exactement france strategie). Par exemple evaluer les consequences du vieillissement ou du réchauffement climatique. A partir de là, on peut émettre des idees, préparer les gens (ex construire au bord de la mer est pas une bonne idée) ou faire des lois
Par contre faire un plan quinquennal 2020-2025 qui va demander de faire X km de digues pour contrer la montée des eaux est une autre histoire
Pour voir l echec de ce type de logique, il n est pas necessaire de se reporter a l URSS, on a un exemple en France actuel : l education nationale
Un ministre a decrété un jour qu il fallait 80 % d une classe d age ayant le bac (à l epoque on devait etre a 30 % si mes souvenirs sont bon). On a maintenant 90 % de bachelier. L objectif est il remplit ?
Sur le papier oui. En fait non, car on a juste baissé le niveau de telle façon que quasiment tous les candidats y arrivent
Si vous avez un jour une plannification francaise vous aurez exactement le meme probleme.
Soumis a une exigence d en haut, les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple pour eux d etre conforme sur le papier (ici 80 % de bacheliers) meme si ca n a aucun interet global voire c est contre productif (ici le niveau de la population baisse car on a dû baisser les exigences pour que tous y arrivent).
La seule solution est ce qu a developpé Staline : une dictature où tout est controlé et vous pouvez etre accusé d etre un saboteur et gagner des vacances en Siberie ou une balle dans la nuque.
Outre la fait que j ai aucune envie de vivre dans une societe totalitaire, je dois signaler que maintenir un appareil coercitif tel que le NKVD a un certain cout et que la tentation de cacher les problèmes/truquer les chiffres devait etre telle que vous avez une economie sur le papier et qui n’a rien à voir avec la réelle
@ cdg
[Contrairement à Descartes, je trouve choquant et condamnable qu’on donne à quelqu’un un poste juste car il pourrait gêner une future campagne électorale.]
Je n’ai pas dit que c’était bien, j’ai dit que c’était compréhensible. Et que cela fait partie de l’arsenal politique depuis au moins la Grèce antique. On peut imaginer un monde idéal gouverné par la Raison et ou de telles méthodes seraient oubliées. Mais dans le monde réel, ce n’est pas le cas. Même les plus grands, les Richelieu, les Napoléon, les Colbert, les De Gaulle, ont eu besoin d’y recourir. C’est le tribut à la part d’ombre qui est dans chacun de nous.
[Et le fait que Bayrou ne soit pas payé n’est pas une excuse, pas plus le fait que d’autres on fait pareil ou pire avant.]
Je ne cherche à rien excuser. Ma position est pragmatique.
[En ce qui concerne le plan, est-ce vraiment utile d’avoir une planification étatique ?]
Bonne question. Mais vous noterez que si la réponse est négative, on n’a pas non plus besoin d’un « Haut commissaire au plan ».
Pour répondre sur le fond : oui, on a besoin d’une planification étatique. On sait qu’il y a des domaines où le mécanisme de marché n’aboutit pas à une utilisation optimale des facteurs de production, pas plus qu’il n’aboutit à la satisfaction des besoins sociaux. Ces domaines ont donc besoin d’une régulation volontariste, d’une autorité qui fixe la répartition des facteurs de production dans le sens de la satisfaction des besoins sociaux. Cette régulation implique de se fixer des objectifs, de lister des moyens, de vérifier qu’ils sont atteints. Qu’est-ce que ce mécanisme, sinon un « plan » ?
Bien entendu, il n’est pas utile d’avoir un système de planification qui couvre l’ensemble des secteurs économiques. Il y a des domaines ou la régulation par le mécanisme de marché fonctionne très correctement, et ce mécanisme reste plus économique qu’une régulation administrative.
[Déjà il faut s’entendre sur ce qu’on entend par planification. Entre le plan quinquennal de feu l’URSS et le plan de la IV république (de l’aveu même de l’auteur “le CGP a finalement assez peu d’influence sous la IVème République”) il y a un monde]
La différence est plus une question d’extension que de fondement. Le plan français ne couvrait que quelques secteurs considérés stratégiques, et n’était impératif que pour l’Etat, ses établissements et ses entreprises alors qu’il était indicatif pour les entreprises privées. Bien entendu, dans la mesure où l’Etat contrôlait le crédit, il avait un instrument puissant de pression… Mais dans les deux cas, l’objectif était le même : concentrer les moyens de la nation pour assurer l’atteinte de certains objectifs dans des domaines considérés comme stratégiques et dans lesquels on ne pouvait compter sur la régulation du marché.
[Je ne discute pas l’intérêt pour un état d’avoir une activité prospective sur ce qui se passera dans 20 ans (je n’ai aucune idée de ce que fait exactement France Stratégie). Par exemple évaluer les conséquences du vieillissement ou du réchauffement climatique.]
Faire de la prospective c’est toujours utile pour éclairer les décisions publiques. La question à se poser est de savoir ce qu’on en fait. Si l’on pense que l’Etat doit se fixer des objectifs et concentrer ses moyens pour les atteindre, on est dans une logique planiste. Si l’on pense que la fonction de l’Etat est seulement de prévoir les changements et de s’y adapter, on est dans une autre logique. Au fond, c’est un choix fondamental : soit on se place dans une logique volontariste, ou l’on se donne collectivement les moyens de décider de notre avenir, ou bien on se place dans une logique suiviste ou la collectivité se contente d’adapter ses règles à des transformations qu’elle ne prétend nullement contrôler.
[A partir de là, on peut émettre des idées, préparer les gens (ex construire au bord de la mer est pas une bonne idée) ou faire des lois. Par contre faire un plan quinquennal 2020-2025 qui va demander de faire X km de digues pour contrer la montée des eaux est une autre histoire]
Mais qui les fera, ces digues ? Si on ne fixe pas des objectifs, si on ne concentre pas des moyens, comment arrivera-t-on à avoir en 2025 les X km de digues qui nous sont nécessaires ? Votre exemple est excellent, en ce qu’il oppose l’alternative « suiviste » (« construire a côté de la mer n’est pas une bonne idée ») et l’alternative volontariste (« construire X km de digues »). Dans le premier cas on se résigne à une adaptation, dans l’autre on aménage notre environnement pour rendre possible ce qui est souhaitable… au fonds, c’est un choix de société ce que vous posez là.
[Pour voir l’échec de ce type de logique, il n’est pas nécessaire de se reporter à l’URSS, on a un exemple en France actuel : l’éducation nationale. Un ministre a décrété un jour qu’il fallait 80 % d’une classe d’âge ayant le bac (…). L’objectif est-il rempli ? Sur le papier oui. En fait non, car on a juste baissé le niveau de telle façon que quasiment tous les candidats y arrivent.
Là, vous mélangez tout. D’abord, aucun ministre à ma connaissance n’a fixé pour objectif « qu’il fallait 80% d’une classe d’âge ayant le bac ». Jean-Pierre Chevènement, puisque vous vous référez à lui je pense, avait formulé un objectif tout à fait différent : « 80% d’une classe d’âge ayant LE NIVEAU du bac » (sous-entendu, le niveau du bac à l’époque). Ce qui est tout de même très différent, puisque l’objectif ne consiste à donner un certificat, mais à atteindre un certain niveau scolaire. Objectif qui, comme vous le signalez, n’est guère atteint.
Mais à supposer même qu’un tel objectif ait été fixé, cela ne constitue nullement un « échec de la logique » planiste. Le fait qu’on fixe un objectif absurde ne remet pas en cause le fait que la planification puisse être la bonne méthode pour l’atteindre.
[Si vous avez un jour une planification française vous aurez exactement le même problème. Soumis à une exigence d’en haut, les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple pour eux d’être conforme sur le papier (ici 80 % de bacheliers) même si ça n’a aucun intérêt global voire c’est contreproductif (…)]
Curieusement, vous ne faites pas le même raisonnement pour les agents privés. Après tout, si « soumis à une exigence d’en haut les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple d’être en conformité sur le papier », pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement aux exigences de rentabilité dans le secteur privé ? Et pourtant, le privé semble arriver pas mal à concentrer tous ses moyens sur son objectif stratégique, si l’on juge par les dividendes payés par les sociétés du CAC40.
Non, la « planification française » a existé, et elle a très bien marché. Quand les objectifs sont bien formulés (et c’est cela le vrai boulot d’un commissaire au plan) et qu’on se donne les moyens pour éviter que les ressources nécessaires soient détournées, les choses se font. Pensez au programme électronucléaire…
[La seule solution est ce qu’a développé Staline : une dictature où tout est contrôlé et vous pouvez être accusé d’être un saboteur et gagner des vacances en Sibérie ou une balle dans la nuque.]
Vous voulez dire que c’est ainsi que les entreprises privées arrivent à faire exécuter leurs « plans » en interne ? Parce qu’il ne faudrait pas oublier que si la logique « planiste » a été abandonnée par l’Etat, elle reste très présente dans l’ensemble des grandes entreprises privées… avec une efficacité redoutable. Pourquoi ce qui est bon pour les grandes organisations privées devient rédhibitoire lorsque c’est pratiqué dans la sphère publique ?
Avouez que c’est drôle: alors que les libéraux passent leur temps à dire que l’Etat devrait adopter les méthodes du privé, dès qu’on parle de planification ils agitent le croquemitaine stalinien. Pourtant, que fait-on dans le privé sinon fixer des objectifs, concentrer des moyens pour les atteindre, et sanctionner ceux qui ne les atteignent pas ?
[. Même les plus grands, les Richelieu, les Napoléon, les Colbert, les De Gaulle, ont eu besoin d’y recourir. C’est le tribut à la part d’ombre qui est dans chacun de nous. ]
Napoleon a fait executer un rival potentiel (le duc d Enghien). Richelieu s est largement payé sur la bete et est mort richissime. C était toléré voire normal a leur époque (la confusion etat/caisse personnelle sous Louis XIII) mais plus aujourd hui. On peut viser l amelioration des pratiques et pas justifier des choses pas tres ragoutantes juste parce que d autres faisait pareil
[Pour répondre sur le fond : oui, on a besoin d’une planification étatique. On sait qu’il y a des domaines où le mécanisme de marché n’aboutit pas à une utilisation optimale des facteurs de production, pas plus qu’il n’aboutit à la satisfaction des besoins sociaux. Ces domaines ont donc besoin d’une régulation volontariste, d’une autorité qui fixe la répartition des facteurs de production dans le sens de la satisfaction des besoins sociaux. Cette régulation implique de se fixer des objectifs, de lister des moyens, de vérifier qu’ils sont atteints. ]
Autant je suis d accord sur la premiere partie (le marché n aboutit pas toujours a un optimal (encore qu on puisse discuter de ce qu est un optimal)), autant je ne crois pas que la solution soit une autorité qui fixe la répartition des facteurs de production
Une autre alternative est par exemple de mettre des regles/lois (ex on pousse a la voiture electrique en abaissant les rejets autorisés pas en ordonnant a renault de produire 10 000 Zoe par mois). Autre possibilite est de lancer un projet qui va stimuler une branche (ex classique envoyer des gens sur la lune )
[Mais qui les fera, ces digues ? Si on ne fixe pas des objectifs, si on ne concentre pas des moyens, comment arrivera-t-on à avoir en 2025 les X km de digues qui nous sont nécessaires ? Votre exemple est excellent, en ce qu’il oppose l’alternative « suiviste » (« construire a côté de la mer n’est pas une bonne idée ») et l’alternative volontariste (« construire X km de digues »). Dans le premier cas on se résigne à une adaptation, dans l’autre on aménage notre environnement pour rendre possible ce qui est souhaitable… au fonds, c’est un choix de société ce que vous posez là.]
Exact, c est un choix de societe. Dans mon cas, on indique qu il y a un risque et les gens ont le choix entre ne pas contruire au bord de la mer ou faire une digue payé par leur propre argent (par ex si vous etes proprietaire d un terrain au bord de la mer, c est rentable de contruire une digue et de le vendre). C est ainsi que la Hollande (ou Monaco) gagnent sur la mer. Dans votre cas, l etat central va dire qu il faut contruire X km de digues. Mais rien ne prouve que les digues seront construites là où elles sont le plus necessaires ni que la qualité des digues soit a la hauteur. Regardez ce qui c est passé avec le canal de la mer blanche (https://fr.wikipedia.org/wiki/Canal_de_la_mer_Blanche). On a construit un canal (objectif atteint) mais il ne sert a rien car pas assez profond.
[Curieusement, vous ne faites pas le même raisonnement pour les agents privés. Après tout, si « soumis à une exigence d’en haut les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple d’être en conformité sur le papier », pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement aux exigences de rentabilité dans le secteur privé ? ]
Il y a une différence de taille. Total, qui est la plus grosse capitalisation du CAC40 emploie 107 000 personnes. La France c est 67 millions d habitants. Si vous etes suffisament petit, vous pouvez considerer que le reste du monde ne change pas en fonction de vos actions (pas de retroaction). Dans le cas d un etat, c est evidement pas possible. Si vous agissez vous allez avoir un effet qui va forcement induire une retroaction, ce qui rend la planification tres compliquee voire impossible .
Autre difference, dans une entreprise il y a un lien de subordination. Le PDG d une societe peut vous donner un ordre et vous devez l executer (ou demissioner). Dans une democratie, le president ne peut pas disposer des citoyens de la meme facon. C est pour ca qu une plannification va soit echouer soit deriver vers une societe totalitaire.
Sinon il y a aussi des fraudes dans le privé pour atteindre les objectifs (ex recent : VW vendant des voitures diesels truquees, Wirecard ou en France mais plus lointain Vivendi de Messier)
[Non, la « planification française » a existé, et elle a très bien marché. Quand les objectifs sont bien formulés (et c’est cela le vrai boulot d’un commissaire au plan) et qu’on se donne les moyens pour éviter que les ressources nécessaires soient détournées, les choses se font. Pensez au programme électronucléaire…]
Ou au plan calcul 😉
[Avouez que c’est drôle: alors que les libéraux passent leur temps à dire que l’Etat devrait adopter les méthodes du privé, dès qu’on parle de planification ils agitent le croquemitaine stalinien. Pourtant, que fait-on dans le privé sinon fixer des objectifs, concentrer des moyens pour les atteindre, et sanctionner ceux qui ne les atteignent pas ?]
Déjà, comme je l ai ecris au dessus, les memes methodes donnent les memes resultats : si VW a vendu des voitures avec des moteurs truqués c est pour atteindre l objectif et eviter la sanction (qui certes n était pas une balle dans la nuque)
Apres autant il est utile d avoir une direction qui donne une strategie generale autant je suis pas sur qu on ait dans une seule societe privee un equivalent du plan sovietique qui était quand meme extremenent detaillé. C est plus du micromanagement
Et surtout il y a la force de rappel du marché. Si une entreprise decidait de faire des produits de qualité trop mediocre elle risque le depot de bilan. En URSS c était quasiment la norme « Son approche de l’industrialisation était très inefficace et des ressources extrêmes ont été consacrées à la construction qui, dans de nombreux cas, n’a jamais été achevée. Ces ressources ont également été investies dans des équipements qui n’ont jamais été utilisés, ou dont on n’avait même pas besoin au départ4. De nombreux biens de consommation produits pendant cette période étaient de si mauvaise qualité qu’ils ne pouvaient jamais être utilisés et étaient gaspillés « (extrait de https://fr.wikipedia.org/wiki/Planification_en_URSS)
@ cdg
[« Même les plus grands, les Richelieu, les Napoléon, les Colbert, les De Gaulle, ont eu besoin d’y recourir. C’est le tribut à la part d’ombre qui est dans chacun de nous. » Napoleon a fait executer un rival potentiel (le duc d Enghien). Richelieu s est largement payé sur la bete et est mort richissime.]
Mon point n’était pas de lister les turpitudes des uns et des autres. Je me concentrait sur les armes du combat politique. Acheter un adversaire ou le compromettre est une technique aussi vielle que la politique. Quel rapport avec le meurtre du duc d’Enghien ?
[C’était toléré voire normal a leur époque (la confusion etat/caisse personnelle sous Louis XIII) mais plus aujourd’hui. On peut viser l’amélioration des pratiques et pas justifier des choses pas très ragoutantes juste parce que d’autres faisait pareil]
L’exemple de Richelieu est mal choisi : l’argent n’avait pas à son époque la même signification qu’il a aujourd’hui, et la fortune du Cardinal servait surtout à proclamer devant ses ennemis ou ses concurrents qu’il bénéficiait de la faveur royale. Par ailleurs, je vous rappelle qu’à l’époque de Louis XIII les ministres étaient censés payer les frais de fonctionnement de leurs ministères de leurs propres deniers. Les pensions et autres douceurs que les rois accordaient à leurs ministres étaient en pratique l’équivalent des lignes budgétaires que el Parlement accorde aux ministres pour faire fonctionner leurs ministères.
Plus profondément : si le fait de corrompre un adversaire – ou pire – permet à un homme d’Etat de se maintenir au pouvoir pour le plus grand bien de son pays, doit-on le condamner pour cela ? Si Darlan ou Giraud avaient vécu, l’histoire de France aurait pu être très différente, et probablement plus soumise aux intérêts américains. Tous deux sont morts dans des circonstances qu’on peut raisonnablement qualifier de « troublantes ».
[Autant je suis d’accord sur la première partie (le marché n’aboutit pas toujours à un optimal (encore qu on puisse discuter de ce qu’est un optimal)), autant je ne crois pas que la solution soit une autorité qui fixe la répartition des facteurs de production. Une autre alternative est par exemple de mettre des règles/lois (ex on pousse à la voiture électrique en abaissant les rejets autorisés pas en ordonnant à Renault de produire 10 000 Zoe par mois). Autre possibilité est de lancer un projet qui va stimuler une branche (ex classique envoyer des gens sur la lune)]
Votre « solution » a les mêmes défauts que la planification, pour un prix beaucoup plus élevé. Lorsque j’ordonne à Renault de fabriquer 10.000 zoé, j’aurai des zoé au prix de fabrication. Lorsque j’abaisse les rejets, je crée la rareté sur le marché, donc le prix des voitures électriques monte, et la différence va dans la poche des constructeurs. Bien sûr, si le marché est « pur et parfait » le prix finira par descendre au fur et à mesure que d’autres entrent sur le marché. Mais d’une part cela prend du temps, et d’autre part le marché n’étant pas « pur et parfait », les barrières à l’entrée maintiendront les prix plus hauts que ce qu’ils seraient dans une logique administrative.
Dans un monde où les marchés sont purs et parfaits, il y a certainement des alternatives meilleures que la planification. Mais justement, mon point est que la planification est nécessaire dans des domaines ou le marché est très loin d’un fonctionnement « pur et parfait ».
[Exact, c’est un choix de société. Dans mon cas, on indique qu’il y a un risque et les gens ont le choix entre ne pas construire au bord de la mer ou faire une digue payé par leur propre argent (par ex si vous êtes propriétaire d’un terrain au bord de la mer, c’est rentable de construire une digue et de le vendre).]
Eh non. Si je construis un morceau de digue devant mon terrain mais que le voisin ne fait pas de même, mon investissement ne sert à rien. Pour que ça marche, il faudrait que tous les voisins se mettent ensemble et construisent ensemble la digue en question… et que si UN propriétaire refuse de construire, on puisse l’obliger dès lors que la grande majorité des propriétaires est d’accord pour le faire. Et bien, si vous projetez ce mécanisme à plus haut niveau, l’union des voisins c’est l’Etat, qui dispose de la loi pour faire exécuter un projet jugé d’intérêt général et le faire payer par tous même si une minorité est en désaccord.
Votre raisonnement est logique lorsqu’il s’agit de projets dont les retombées sont purement individuelles. Si je préfère une cuisinière à gaz plutôt qu’une cuisinière électrique, c’est moi qui choisis puisque c’est moi qui paye les factures, et que cela n’a aucune conséquence pour mes voisins. Mais dès lors que mes choix sont interdépendants de ceux des autres, le choix de société que vous proposez est irrationnel.
[C’est ainsi que la Hollande (ou Monaco) gagnent sur la mer.]
Monaco, peut-être. La Hollande, certainement pas. Ce ne sont pas des propriétaires individuels qui construisent les barrages qui protègent le pays, c’est une politique d’Etat.
[Dans votre cas, l’état central va dire qu’il faut construire X km de digues. Mais rien ne prouve que les digues seront construites là où elles sont le plus nécessaires ni que la qualité des digues soit à la hauteur.]
Certes. Mais qu’est ce qui vous fait penser qu’une digue construite par l’initiative privée sera construite là où elle est le plus nécessaire, ou que sa qualité sera à la hauteur ? Je trouve toujours fascinante cette croyance que l’Etat a plus de chances de se tromper qu’un acteur privé. En pratique, ce serait plutôt le contraire : l’Etat peut s’offrir une ingéniérie de bien meilleure qualité que la plupart des acteurs privés.
[« Curieusement, vous ne faites pas le même raisonnement pour les agents privés. Après tout, si « soumis à une exigence d’en haut les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple d’être en conformité sur le papier », pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement aux exigences de rentabilité dans le secteur privé ? » Il y a une différence de taille. Total, qui est la plus grosse capitalisation du CAC40 emploie 107 000 personnes. La France c’est 67 millions d’habitants. Si vous êtes suffisamment petit, vous pouvez considérer que le reste du monde ne change pas en fonction de vos actions (pas de rétroaction).]
D’abord, je vois mal la logique de comparer le nombre d’EMPLOYES de Total avec le nombre d’HABITANTS de la France. Soit vous comparez le nombre d’employés (1,5 millions pour l’Etat contre 107.000 pour Total, ce qui fait un rapport raisonnable), soit vous comparez le nombre de clients de l’autre (et dans ce cas, vous avez 67 millions pour l’Etat, et pas trop loin pour Total…).
Ensuite, vous oubliez qu’une entreprise agit dans un domaine étroit, ce qui n’est pas le cas de l’Etat. Les actions de Total ne changent peut-être pas le monde dans sa globalité, mais changent le monde du pétrole. Prétendre que c’est un acteur « sans rétroaction » me semble donc osé.
[Dans le cas d’un état, c’est évidement pas possible. Si vous agissez vous allez avoir un effet qui va forcément induire une rétroaction, ce qui rend la planification très compliquée voire impossible.]
J’ai du mal à suivre votre raisonnement. La rétroaction est présente dans toute planification, quelque soit la taille de l’acteur. Si j’ai une boulangerie, et j’augmente le prix de la baguette, il est évident que j’en vendrai moins.
[Autre différence, dans une entreprise il y a un lien de subordination. Le PDG d’une société peut vous donner un ordre et vous devez l’exécuter (ou démissionner). Dans une démocratie, le président ne peut pas disposer des citoyens de la même façon.]
Encore une fois, vous comparez les employés du privé avec les citoyens dans le public. Mais cette comparaison n’a pas de sens. Les employés du public sont les fonctionnaires, et ils sont soumis à une discipline bien plus sévère que celle des employés du privé. Les citoyens, eux, sont à la fois les actionnaires de l’Etat et ses clients. Et le PDG d’une entreprise a autant de contrôle sur ses clients et ses actionnaires que le président a sur les citoyens.
J’ajoute que vous vous faites beaucoup d’illusions si vous imaginez qu’un employé n’a que le choix d’exécuter un ordre ou démissionner…
[« Non, la « planification française » a existé, et elle a très bien marché. Quand les objectifs sont bien formulés (et c’est cela le vrai boulot d’un commissaire au plan) et qu’on se donne les moyens pour éviter que les ressources nécessaires soient détournées, les choses se font. Pensez au programme électronucléaire… » Ou au plan calcul 😉]
On peut rire du plan calcul, mais il ne faudrait pas oublier quel était son objectif principal : fournir à la France les calculateurs nécessaires à la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire. Et de ce point de vue, on peut dire que c’est un succès. Le problème est qu’on a voulu ensuite faire du plan calcul la racine d’une industrie informatique « européenne »…
[Déjà, comme je l’ai écrit au-dessus, les mêmes méthodes donnent les mêmes résultats : si VW a vendu des voitures avec des moteurs truqués c’est pour atteindre l’objectif et éviter la sanction]
Pardon, pardon. « L’objectif » de VW a été largement atteint. Pendant des années, grâce à ces trucages, l’entreprise a distribué à ses actionnaires des juteux dividendes. Vous confondez dans votre raisonnement deux choses différentes : le trucage des chiffres pour faire croire au planificateur que l’objectif est atteint (comme cela s’est fait dans l’URSS) et le trucage pour tromper l’autorité de contrôle et pouvoir ainsi vendre un produit sur le marché. Les ingénieurs qui ont truqué les logiciels de VW n’ont pas trompé leur direction.
[Apres autant il est utile d’avoir une direction qui donne une stratégie générale autant je suis pas sur qu’on ait dans une seule société privée un équivalent du plan soviétique qui était quand même extrêmement détaillé. C’est plus du micro management]
Vous rigolez ? J’ai vu des plans d’entreprise hyper détaillés, fixant des objectifs de vente à chaque concessionnaire et pour chaque produit.
[Et surtout il y a la force de rappel du marché. Si une entreprise décidait de faire des produits de qualité trop médiocre elle risque le dépôt de bilan.]
Vraiment ? On voit que vous ne fréquentez pas le service client des FAI. La « qualité médiocre » ne conduit au dépôt de bilan que si le client a une alternative. Et au risque de me répéter, je défend la planification dans les secteurs ou précisément le marché n’est pas « pur et parfait »…
[En URSS c était quasiment la norme « Son approche de l’industrialisation était très inefficace et des ressources extrêmes ont été consacrées à la construction qui, dans de nombreux cas, n’a jamais été achevée. Ces ressources ont également été investies dans des équipements qui n’ont jamais été utilisés, ou dont on n’avait même pas besoin au départ. De nombreux biens de consommation produits pendant cette période étaient de si mauvaise qualité qu’ils ne pouvaient jamais être utilisés et étaient gaspillés « (extrait de https://fr.wikipedia.org/wiki/Planification_en_URSS)]
Méfiez-vous des discours idéologiques. Moi je ne peux que constater une chose : alors qu’il n’y avait pas de secteur privé en URSS, le secteur public a permis un pays arriéré de devenir une super-puissance après avoir gagné une guerre mondiale. Si la planification avait été si inefficace, on voit mal comment ces résultats auraient pu être atteints.
Bien sûr, certains projets n’ont pas été achevés, des investissements n’ont pas été utilisés, des biens produits ont été gâchés. Vous noterez que c’est aussi le cas en occident : pensez à l’énorme gâchis que fut la crise de 1929, par exemple, avec des milliers d’usines abandonnées, des biens gâchés parce qu’ils ne trouvaient pas preneur. Pensez, plus près de nous, à ces récoltes détruites, ce lait déversé dans les égouts pour maintenir les prix. Curieusement, les libéraux considèrent cette destruction normale… alors qu’elles tiennent au même problème: des biens sont produits qui ne correspondent pas à la demande.
[Si Darlan ou Giraud avaient vécu, l’histoire de France aurait pu être très différente, et probablement plus soumise aux intérêts américains. Tous deux sont morts dans des circonstances qu’on peut raisonnablement qualifier de « troublantes »].
Euh, OK pour Darlan qui a été assassiné, mais Giraud est mort en 1949 à l’hôpital, je ne vois pas ce qu’il y a de troublant à ce sujet. En revanche, il a fait l’objet d’une tentative d’assassinat en 44 en Algérie.
@ Alexandre
[Euh, OK pour Darlan qui a été assassiné, mais Giraud est mort en 1949 à l’hôpital, je ne vois pas ce qu’il y a de troublant à ce sujet. En revanche, il a fait l’objet d’une tentative d’assassinat en 44 en Algérie.]
Vous avez tout à fait raison, ma rédaction laissait penser que Giraud a été assassiné, alors que la tentative d’assassinat a échoué. Il n’empêche que cette tentative d’assassinat, dont les mobiles n’ont jamais été éclaircis, ajoutée à l’assassinat de Darlan laisse penser qu’on n’hésitait pas dans le camp gaulliste à écarter par tous les moyens, y compris les plus radicaux, les personnalités qui pouvaient offrir des alternatives aux américains. Il n’y a pas que chez Lénine que l’adage “qui veut la fin veut les moyens” s’applique…
[[C’est ainsi que la Hollande (ou Monaco) gagnent sur la mer.]
Monaco, peut-être. La Hollande, certainement pas. Ce ne sont pas des propriétaires individuels qui construisent les barrages qui protègent le pays, c’est une politique d’Etat.]
Je peux vous assurer que les projets d’extension en mer de Monaco sont portés directement par la Principauté, qui lance des appels d’offres à des groupements pour la construction de ces projets, dans un périmètre relativement bien défini.
[ Vous confondez dans votre raisonnement deux choses différentes : le trucage des chiffres pour faire croire au planificateur que l’objectif est atteint (comme cela s’est fait dans l’URSS) et le trucage pour tromper l’autorité de contrôle et pouvoir ainsi vendre un produit sur le marché.]
L’URSS truquait ses chiffres ? vous avez des exemples ou des références ?
Et puis je voulais savoir quels sont les domaines “stratégiques” où vous considérez que le marché ne permet pas d’exercer “une concurrence libre et non faussée” ?
@ Glarrious
[L’URSS truquait ses chiffres ? vous avez des exemples ou des références ?]
Tous les états truquent les informations lorsque leurs intérêts sont en jeu. Cela peut prendre des formes grossières, comme la manipulation directe des chiffres, ou des formes plus subtiles comme le changement des règles comptables qui permet de faire baisser un chiffre gênant ou au contraire de le faire croitre. Ainsi, par exemple, changer la limite de pauvreté à 50% du revenu moyen au lieu de 60% a permis à un certain nombre de pays de montrer des baisses de la pauvreté impressionnantes… ce n’est pas pour rien que la formule « il y a les mensonges, les mensonges éhontés, et pire que tout, les statistiques » est devenue un adage de la politique britannique !
Mais pour revenir à notre débat, je n’ai jamais dit que l’URSS « truquait ses chiffres ». J’ai dit – et les exemples sont légion – que les dirigeants économiques de l’URSS à tous les niveaux étaient soumis à une telle pression pour tenir le « plan » que beaucoup succombaient à la tentation de maquiller leurs chiffres pour faire croire au niveau supérieur que les objectifs avaient été atteints. Le résultat, lorsque les chiffres sont agrégés, est de fabriquer des chiffres totaux faux sans qu’il y ait une décision unique au niveau de l’Etat de « truquer les chiffres ».
Vous noterez par ailleurs que cela n’a rien de spécifique à l’URSS. Vous trouvez exactement le même type de comportement dans n’importe quelle entreprise privée. Un ami qui travaille dans la vente m’avait expliqué que dans son entreprise les augmentations de salaire sont négociées par chaque vendeur une année sur deux. Les vendeurs font donc en sorte de déplacer leurs ventes de l’année « creuse » vers l’année « pleine » (par exemple, en enregistrant une commande passée au mois de décembre au mois de janvier suivant, ou en poussant les clients à renouveler leurs équipements une année sur deux) de manière à pouvoir présenter une amélioration significative les années « pleines »…
[Et puis je voulais savoir quels sont les domaines “stratégiques” où vous considérez que le marché ne permet pas d’exercer “une concurrence libre et non faussée” ?]
Je ne suis pas sûr de comprendre votre question. J’imagine que par « concurrence libre et non faussée » vous entendez un marché dont le fonctionnement s’approche de la concurrence « pure et parfaite », condition sine qua non pour que la régulation du marché conduise à un optimum économique.
Pour que la concurrence sur un marché soit « pure et parfaite », il doit réunir certaines conditions :
– Il doit être « atomique », c’est-à-dire, confronter des acheteurs et vendeurs en nombre suffisamment important et chacun étant suffisamment petit pour qu’aucun acteur ne puisse à lui seul agir sur les prix. Cela exclut donc les secteurs ou l’efficacité de la production croit avec la taille, et qui ont donc une tendance à se concentrer et aboutissent donc à un oligopole voire un monopole : c’est le cas des réseaux (transport de l’électricité, réseau ferré), la production d’électricité, l’extraction pétrolière, la sidérurgie…
– Les produits doivent être « homogènes » : ainsi, par exemple, lorsque l’acheteur veut de la farine, il peut comparer les prix des différentes farines en référence à une qualité unique. Mais l’acheteur d’un smartphone qui hésite entre un Samsung et un Apple ne peut pas comparer les prix, puisque les deux produits ne sont pas homogènes. Apple est en fait en position de monopole, puisque aucun produit « homogène » au sien n’est sur le marché. Pour cette raison, la concurrence ne peut être « pure et parfaite » dans des domaines ou l’investissement technologique et la protection par le brevet est importante : pharmacie, électronique…
– Il ne faut pas qu’il y ait des barrières à l’entrée, autrement dit, le coût pour entrer ou sortir du marché doit être faible. Autrement, les acteurs installés sur le marché peuvent augmenter leurs prix sans craindre l’entrée de nouveaux acteurs attirés par les profits croissants. Pas de concurrence « pure et parfaite » dans les domaines où il faut des investissements très importants et de longs développements avant de voir des retours…
– Il faut une libre circulation des marchandises et des facteurs de production. Au plan national, cette liberté de circulation est relativement acquise pour tous les secteurs, même si la mobilité du travail est relativement plus faible que celle du capital. Mais au plan international, ce n’est évidement pas le cas : même sans parler de barrières protectionnistes, la diversité des langues, des coutumes, des pratiques et l’ancrage social des travailleurs rend la mobilité du travail faible.
– Enfin, il faut une totale transparence de l’information : vendeurs et acheteurs doivent partager la totalité de l’information sur le produit mais aussi sur les conditions d’achat et de vente pratiqués par les autres. Cette condition n’est pratiquement jamais remplie dès lors que le produit est complexe : combien de vendeurs peuvent vous dire qu’elle est la durée de vie moyenne de la machine à laver qu’ils essayent de vous vendre ?
Comme vous le voyez, les domaines ou la concurrence est « pure et parfaite » sont très, très limités. Ils sont d’autant plus limités que les industriels bataillent de tout leur poids pour rendre la concurrence aussi imparfaite que possible. La raison est simple : si la théorie économique classique démontre que la concurrence pure et parfaite aboutit à un optimum dans l’usage des facteurs de production, elle démontre aussi que dans un marché pur et parfait les prix tendent vers le coût de production. En d’autres termes, que le profit tend vers zéro. En effet, considérons un marché donné ou le prix P est supérieur au coût de production C. Dans ces conditions, un acteur extérieur au marché a tout intérêt à rentrer, et il en a la possibilité : il a l’information complète qui lui permet de concurrencer les producteurs existants, et il n’y a pas de barrière à l’entrée. On verra donc entrer des nouveaux producteurs, ce qui fera baisser le prix P. Et le processus peut continuer aussi longtemps que P est supérieur à C.
Autrement dit, ce sont les IMPERFECTIONS du marché qui permettent aux entreprises de faire du profit. Difficile dans ces conditions d’imaginer qu’elles fassent des efforts pour aller vers un marché « pur et parfait »…
J’ajoute que même un marché « pur et parfait » présente des problèmes liés à une imperfection intrinsèque, la « myopie des marchés », autrement dit, leur incapacité d’avoir une vision à long terme.
Maintenant, pour répondre à votre question, ce n’est pas parce qu’un secteur de l’économie est régi par un marché imparfait qu’il est pour autant « stratégique ». Le marché du luxe est par essence imparfait (produits différentiés, barrières à l’entrée considérables) et pourtant on ne voit pas très bien l’intérêt pour l’Etat de réguler la production des carrés Hermès ou des sacs Vuitton. Pour moi, il y a deux conditions CUMULATIVES qui rendent l’intervention de l’Etat légitime : d’une part, une régulation par le marché défaillante, et d’autre part, un caractère stratégique pour la vie de la nation, pour sa souveraineté, pour son avenir. C’est le cas de secteurs comme l’électricité, la machine-outil, les infrastructures de transport ou l’éducation.
@Descartes
[Je suis toujours fasciné par votre croyance aveugle dans le privé, qui vous amène à attribuer au secteur public des problèmes qui en fait existent dans toute grande organisation.]
Et moi je suis toujours fasciné par votre patience. Répondre pour la énième fois à ce genre de propos comme vous le faites sur votre blog, sans vous énerver ni jeter l’éponge par dépit, c’est de l’abnégation…
@ BJ
[Et moi je suis toujours fasciné par votre patience. Répondre pour la énième fois à ce genre de propos comme vous le faites sur votre blog, sans vous énerver ni jeter l’éponge par dépit, c’est de l’abnégation…]
Je vous remercie, mais je dois décliner le compliment. Relire les mêmes arguments et chercher à chaque fois à y répondre est un exercice utile, parce qu’il vous oblige à réinterroger périodiquement vos convictions à la lumière de ce que vous avez pu lire ou apprendre depuis la dernière fois. Quand bien même vous n’auriez pas changé d’avis, cela vous conduit à préciser, à enrichir, à nuancer les arguments. Tout débat implique un certain niveau de répétition, mais c’est dans cette répétition que les positions des participants changent lentement mais sûrement. Vous n’imaginez tout de même pas que vous arriverez à convaincre votre interlocuteur du premier coup !
[Vous n’imaginez tout de même pas que vous arriverez à convaincre votre interlocuteur du premier coup !]
Sauf que cdg est un croyant. Son dieu, le Marché, son diable l’État. Avez-vous déjà réussi à convaincre un croyant ?
@ BJ
[Sauf que cdg est un croyant. Son dieu, le Marché, son diable l’État. Avez-vous déjà réussi à convaincre un croyant ?]
Bien sûr… c’est avec les croyants les plus passionnés qu’on a fait les plus grands hérétiques.
[Acheter un adversaire ou le compromettre est une technique aussi vielle que la politique. Quel rapport avec le meurtre du duc d’Enghien ?]
Au lieu de s’embêter à compromettre ou acheter son adversaire, on l élimine physiquement. Apres tout une fois mort on est tranquille (bon on peut en faire un martyr. Apres tout si Bonaparte ne l avait pas fait exécuter, qui se rappellerait de lui …)
[Lorsque j’ordonne à Renault de fabriquer 10.000 zoé, j’aurai des zoé au prix de fabrication. Lorsque j’abaisse les rejets, je crée la rareté sur le marché, donc le prix des voitures électriques monte, et la différence va dans la poche des constructeurs. Bien sûr, si le marché est « pur et parfait » le prix finira par descendre au fur et à mesure que d’autres entrent sur le marché. Mais d’une part cela prend du temps, et d’autre part le marché n’étant pas « pur et parfait », les barrières à l’entrée maintiendront les prix plus hauts que ce qu’ils seraient dans une logique administrative. ]
Allez au bout de votre logique. Si vous voulez avoir des zoes au prix de fabrication, l entreprise ne fait pas de bénéfice et a donc aucun intérêt à les produire. Elle va le faire soit par la contrainte soit par ce qu’elle est nationalisée. Si elle appartient à l’état, pourquoi donc avoir plusieurs constructeurs (surtout si l’un entre eux peut vendre ses voitures à prix coutant, les autres vont avoir du mal à vendre leurs voitures). En plus pour une planification c’est bien plus simple d’avoir un seul producteur que plusieurs et c’est plus efficace sur le papier car vous avez besoin que d’un seul bureau d’étude, de moins d’usine, d’un seul concessionnaire par ville …
Autrement dit vous avez construit un monopole qui va avoir tendance à utiliser sa position monopolistique pour en tirer des avantages indus. Si vous voulez une voiture et vous avez le choix entre Renault et Renault, pourquoi Renault va se fatiguer a faire des véhicules qui correspondent a la demande des clients alors qu’ils sont sûr de les vendre (en France du moins)
Si au contraire vous mettez une norme d’émission, vous allez avoir plusieurs constructeurs qui vont essayer des solutions différentes (par ex on a l’hybride, l’électrique et peut être un jour l’hydrogène). La compétition/émulation va pousser à innover car un constructeur qui s’endort sur ses lauriers risque de se retrouver dépassé (Tesla risque de mettre au rancart VW ou PSA)
L’état n’a pas à décider d’une technique, n’est pas prisonnier d’une filière (supposons que le plan ait tout misé sur les batteries de type Zoe et qu’au final c est l’hydrogène qui ait été la solution. Que faire ? difficile de dire qu’ on a claqué des milliards, que des milliers de personnes vont se retrouver au chômage … L’état va être donc fortement incité à persister dans une techno dépassé)
[Eh non. Si je construis un morceau de digue devant mon terrain mais que le voisin ne fait pas de même, mon investissement ne sert à rien. Pour que ça marche, il faudrait que tous les voisins se mettent ensemble et construisent ensemble la digue en question… et que si UN propriétaire refuse de construire, on puisse l’obliger dès lors que la grande majorité des propriétaires est d’accord pour le faire. Et bien, si vous projetez ce mécanisme à plus haut niveau, l’union des voisins c’est l’Etat, qui dispose de la loi pour faire exécuter un projet jugé d’intérêt général et le faire payer par tous même si une minorité est en désaccord.]
Votre argument est assez amusant car si vous remplacez état par UE, ça marche aussi. Pour un souverainiste, c’est assez contradictoire non ?
Si on reprend mon exemple d’une digue, il est quand même assez peu probable qu’un des voisins préfère voir son bien inondé et perdre tout valeur. Donc il est assez probable qu’il paie. Et sinon les voisins ont toujours la solution soit de lui racheter son lopin soit de faire une digue qui le contourne ou de passer outre et de payer sa part
Si l’état décide de payer, les propriétaires des terrains au bord de la mer ne paieraient quasiment rien pour la digue alors que ceux non impacté devraient payer. Pire comme la digue serait payée au final par personne (c est gratuit, c’est l’état qui paie comme disait Hollande) rien ne prouve qu’elle soit construite où il faut, ni dans les règles de l’art (quand il s’agit de vos deniers vous êtes en général plus attentif)
Et si on élargit la réflexion, en cas de montée des eaux il est impossible de diguer toute la France (d après Wikipédia on a 19 193 km de côtes). Il y aura des choix à faire. Si l’état choisit, il y aura une pression maximale pour faire des digues, même pour proteger une masure (apres tout c est gratuit et c est tout benefice). On va donc avoir des digues à des endroits où les gens ont les bonnes relations ou où c est mediatique. Par contre proteger les usines ca risque de pas etre tres porteur …
[Certes. Mais qu’est ce qui vous fait penser qu’une digue construite par l’initiative privée sera construite là où elle est le plus nécessaire, ou que sa qualité sera à la hauteur ? Je trouve toujours fascinante cette croyance que l’Etat a plus de chances de se tromper qu’un acteur privé. En pratique, ce serait plutôt le contraire : l’Etat peut s’offrir une ingéniérie de bien meilleure qualité que la plupart des acteurs privés.]
Je suis pas sur que l etat puisse avoir une ingenierie de meilleure qualité, mais admettons. Le probleme n est pas sur la technique mais au niveau superieur. Par ex comme ici : https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/trace-de-tgv-detourne-un-ex-conseiller-de-lagarde-mis-en-examen_1408395.html (la personne ici n a pas eut de chance, le maire du village a laissé des traces ecrites). Vous me direz que ce type d action peut aussi avoir lieu dans le privé. Mais a partir du moment où c est le contribuable (autrement personne directement) qui paie, c est bien plus facile
[D’abord, je vois mal la logique de comparer le nombre d’EMPLOYES de Total avec le nombre d’HABITANTS de la France.]
Le PDG de total peut decider et contraindre ses employés de faire quelque chose (si vous etes salarie il y a un lien de subordination). L etat peut contraindre non seulement ses employes mais tous les citoyens. Par ex le PDG de total ne peut pas décider de consigner les gens chez eux et de les autoriser a sortir seulement muni d un papier comme s ils etaient encore a l ecole et qu ils avaient un mot d excuse. Et le PDG de total ne dispose pas du monopole de la force afin de contraindre les recalcitrant a lui obeir.
Si vous voulez une planification qui fonctionne, vous devez forcement aller vers un système totalitaire où vos « citoyens » doivent obeir a de nombreuses consignes de l etat. Consignes evidement faites pour leur bien meme malgré eux😉
[J’ai du mal à suivre votre raisonnement. La rétroaction est présente dans toute planification, quelque soit la taille de l’acteur. Si j’ai une boulangerie, et j’augmente le prix de la baguette, il est évident que j’en vendrai moins. ]
Déjà il n est pas sur que vous vendez moins de baguettes si vous etes le seul boulanger a 10 km a la ronde.
Mais comment voulez vous qu un plan arrive a maitriser tous les parametres ? c est rapidement trop compliqué et je parle pas des imponderables. Prenons l exemple des digues precedent (je suis pas un expert en BTP, il y a peut etre des erreurs mais c est pour illustrer l impossibilite de tout prevoir).
Vous planifiez de faire X km de digues et donc d avoir besoin de Y tonnes de beton, Z tonnes de ferrailles et P planches de coffrages. Supposez que cette annee soit en plein boom et donc vous allez manquer de beton a acheter au prix plannifie (je suppose qu on est ici dans un plan « a la francaise » ou il n y a pas d imperatif de production pour les entreprises non strategiques). Si vous etes dans un plan de type URSS, vous allez devoir prevoir jusqu au nombre de clous et leur longueur qu il faudra pour les planches de coffrages. Et il vous faudra prevoir s il fait trop sec et que vous manquez d eau pour faire le beton …
Je vous recommande la lecture de https://www.catallaxia.org/wiki/Friedrich_A._Hayek:Hayek_ou_la_planification_impossible
[Et le PDG d’une entreprise a autant de contrôle sur ses clients et ses actionnaires que le président a sur les citoyens.]
Absolument pas. Un PDG a un contrôle limité sur ses clients. Je peux faire le plein chez total aujourd hui et demain chez Shell. Ca ne pose aucun probleme.. Et quant aux actionnaires, c est plutôt l inverse : l actionnaire (enfin les gros) a un contrôle sur le PDG (qu il peut revoquer). Le PDG de total ne peut rien imposer à un actionnaire de total, au contraire l actionnaire peut imposer ses vues au PDG
Au contraire, un citoyen ne peut etre aujourd hui francais et demain canadien. Notre president peut passer des lois qui s imposent a tous les citoyens et a les moyens de les faire respecter via la police. En theorie les citoyens peuvent revoquer le president mais c est la un peu comme avec les actionnaires et le PDG, c est pas si simple en pratique
[J’ajoute que vous vous faites beaucoup d’illusions si vous imaginez qu’un employé n’a que le choix d’exécuter un ordre ou démissionner…]
J ai evidement simplifié. Un employé peut trainer des pieds, faire preuve de mauvaise foi voire carrement saboter le travail
[On peut rire du plan calcul, mais il ne faudrait pas oublier quel était son objectif principal : fournir à la France les calculateurs nécessaires à la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire. ]
IL semble que ca soit une légende (https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_Calcul ). Les USA et IBM fournissant le CEA
[ « L’objectif » de VW a été largement atteint. Pendant des années, grâce à ces trucages, l’entreprise a distribué à ses actionnaires des juteux dividendes.]
Je doute que c était l objectif. Déjà le marche du diesel aux USA est ultra reduit, donc VW n y a pas gagné grand chose. Et en plus le risque était enorme et l amende payée va effacer le benefice pour des ventes de diesels truques pour des dizaines d annees
[ Vous confondez dans votre raisonnement deux choses différentes : le trucage des chiffres pour faire croire au planificateur que l’objectif est atteint (comme cela s’est fait dans l’URSS) et le trucage pour tromper l’autorité de contrôle et pouvoir ainsi vendre un produit sur le marché. ]
Le logiciel était la pour duper l autorite de contrôle et ainsi pouvoir remplir les objectifs de vente. Que cet objectif de vente ait été fixé par un planificateur etatique ou par l etat major de VW n a aucune importance. Soumis a une contrainte, l organisation (ici VW) a choisit le chemin le plus facile : truander
[Les ingénieurs qui ont truqué les logiciels de VW n’ont pas trompé leur direction.]
Je doute que ce soit des ingénieurs qui ait pris cette decision. D ailleurs le logiciel truqueur a été fournit pas Bosch et ceux-ci se doutaient de son usage. Ils ont clairement specifié par ecrit que cette version était destiné a des tests et ne devaient pas etre mise sur des voitures de serie (comme ca ils etaient couvert)
[J’ai vu des plans d’entreprise hyper détaillés, fixant des objectifs de vente à chaque concessionnaire et pour chaque produit.]
Je ne dit pas que ca n existe pas. C est juste contre productif. Par exemple forcer les concessionnaire a un objectif de vente donne des occasion à 0 km (le concessionnaire achete la voiture et la revend comme occasion)
[Moi je ne peux que constater une chose : alors qu’il n’y avait pas de secteur privé en URSS, le secteur public a permis un pays arriéré de devenir une super-puissance après avoir gagné une guerre mondiale. Si la planification avait été si inefficace, on voit mal comment ces résultats auraient pu être atteints.]
Il y avait quand meme des industries en russie avant 1917 meme si le pays était encore arrieré. La France a d ailleurs fortement contribué au decolage russe (grace a l or des emprunts russes)
Savez vous que l empire russe en 1913 était la troisieme economie mondiale ? (https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_de_la_Russie#L'%C3%A9conomie_russe_%C3%A0_la_fin_de_l'%C3%A9poque_imp%C3%A9riale)
L URSS a permit une industrialisation et un developpement du pays mais le cout humain a été enorme : famine en ukraine, système concentrationnaire … J aurai pas aimé vivre dans ce pays à cette epoque (ou alors reincarné en Beria ou Staline 😉 )
[ Pensez, plus près de nous, à ces récoltes détruites, ce lait déversé dans les égouts pour maintenir les prix. Curieusement, les libéraux considèrent cette destruction normale… alors qu’elles tiennent au même problème: des biens sont produits qui ne correspondent pas à la demande.]
Dans le cas du lait dans les egouts, on est pas dans un marché libre vu que c est la PAC
Il est clair qu on ne peut prevoir exactement les produits et volumes. Mais la difference entre le marché et la plannification, c est que le marché va eliminer une société qui se trompe trop souvent de produit (mais vous pouvez faire des erreurs : apple porte au pinacle maintenant était au bord de la faillite dans les annees 90). Dans le cas de la plannification, soit vous etes dans un système dictatorial ou remonter les problemes va vous envoyer au goulag soit (cas francais) comme ce n est pas votre argent et que les poches de l etat sont profondes, il n y aura pas vraiment de sanctions (voire on va continuer pour ne pas faire perdre la face ex Hadopi qui a coute 82 M€ pour un resultat quasi nul)
@ cdg
[« Acheter un adversaire ou le compromettre est une technique aussi vielle que la politique. Quel rapport avec le meurtre du duc d’Enghien ? » Au lieu de s’embêter à compromettre ou acheter son adversaire, on l élimine physiquement. Après tout une fois mort on est tranquille]
« Le tyran meurt et son règne s’achève, le martyr meurt et son règne commence » écrivait Kierkegaard. Tuer un adversaire, c’est prendre le risque d’en faire un martyr et de creuser avec ses partisans un fossé qu’il sera très difficile de combler ensuite (c’est d’ailleurs ce qui est arrivé avec le duc d’Enghien, dont le meurtre aliéna durablement au premier Consul le parti royaliste, ce qui fit dire à certains « pire qu’un crime, une faute »). Compromettre un adversaire ou l’acheter vous permet de l’éliminer du rang de vos opposants sans pour autant rompre avec ses soutiens, au contraire !
[Allez au bout de votre logique. Si vous voulez avoir des zoes au prix de fabrication, l’entreprise ne fait pas de bénéfice et a donc aucun intérêt à les produire.]
Vous voulez dire que la motivation des entrepreneurs pour produire et développer leur entreprise n’est pas de créer des emplois ou de satisfaire les besoins de leurs clients, mais gagner de l’argent ? Et moi qui croyais que les entrepreneurs étaient désintéressés… 😉
Trêve de plaisanterie : Le « prix de fabrication » inclut la rémunération du capital investi. Vendre au prix de fabrication vous permet donc de rémunérer les capitalistes, qui ont donc toujours intérêt à investir et donc à faire produire pour rentabiliser leur investissement.
[Si elle appartient à l’état, pourquoi donc avoir plusieurs constructeurs (surtout si l’un entre eux peut vendre ses voitures à prix coutant, les autres vont avoir du mal à vendre leurs voitures). En plus pour une planification c’est bien plus simple d’avoir un seul producteur que plusieurs et c’est plus efficace sur le papier car vous avez besoin que d’un seul bureau d’étude, de moins d’usine, d’un seul concessionnaire par ville …]
Mais d’un autre côté, on sait l’effet positif de ce qu’on a appelé à une époque « l’émulation », c’est-à-dire, la concurrence entre institutions publiques. Ce n’est pas à vous que je vais expliquer les effets positifs de la concurrence.
[Si au contraire vous mettez une norme d’émission, vous allez avoir plusieurs constructeurs qui vont essayer des solutions différentes (par ex on a l’hybride, l’électrique et peut être un jour l’hydrogène).]
Mais pourquoi voulez-vous qu’il y en ai plusieurs ? Ces constructeurs ont au contraire intérêt à fusionner jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un : non seulement ils gagneront ainsi en productivité (un seul bureau d’études, moins d’usines, un seul concessionnaire par ville) mais en plus ils pourront tirer les fruits de leur monopole dès lors que le consommateur n’aura pas d’autre alternative. En fait, si vous relisez vos arguments décrivant la constitution d’un monopole public, vous noterez qu’ils s’appliquent tout aussi exactement à la constitution d’un monopole privé !
Vous noterez d’ailleurs que la solution mixte (un constructeur public vendant à prix coutant, des constructeur privés vendant à prix libre) a très bien fonctionné dans notre pays pendant des décennies, et que cette concurrence a poussé le public comme le privé à produire des voitures que le public a plébiscité, de la DS à la 4L ou la R5.
[La compétition/émulation va pousser à innover car un constructeur qui s’endort sur ses lauriers risque de se retrouver dépassé (Tesla risque de mettre au rancart VW ou PSA)]
Certes. Mais qu’est ce qui vous fait penser que la concurrence n’est possible que dans le secteur privé ?
[L’état n’a pas à décider d’une technique, n’est pas prisonnier d’une filière (supposons que le plan ait tout misé sur les batteries de type Zoe et qu’au final c est l’hydrogène qui ait été la solution. Que faire ? difficile de dire qu’ on a claqué des milliards, que des milliers de personnes vont se retrouver au chômage … L’état va être donc fortement incité à persister dans une techno dépassé)]
Mais qu’est ce qui vous fait penser que c’est différent pour le secteur privé ? Imaginons que GM ou VW aient tout misé sur les batteries et que finalement ce soit l’hydrogène la solution. Qu’est ce qui vous fait penser que le PDG de VW ou de GM aura plus de facilité à expliquer à ses actionnaires qu’il a claqué leur argent en pure perte qu’un président de la République ?
[« Eh non. Si je construis un morceau de digue devant mon terrain mais que le voisin ne fait pas de même, mon investissement ne sert à rien. Pour que ça marche, il faudrait que tous les voisins se mettent ensemble et construisent ensemble la digue en question… et que si UN propriétaire refuse de construire, on puisse l’obliger dès lors que la grande majorité des propriétaires est d’accord pour le faire. Et bien, si vous projetez ce mécanisme à plus haut niveau, l’union des voisins c’est l’Etat, qui dispose de la loi pour faire exécuter un projet jugé d’intérêt général et le faire payer par tous même si une minorité est en désaccord. » Votre argument est assez amusant car si vous remplacez état par UE, ça marche aussi. Pour un souverainiste, c’est assez contradictoire non ?]
Absolument pas. Que je sache, l’UE n’a aucune légitimité et aucun moyen pour faire payer par tous la digue même si une minorité est en désaccord. Seuls les états-nations ont le monopole de la force légitime, et seuls les états nations ont le privilège de pouvoir lever l’impôt. Si je suis « souverainiste », c’est bien parce que je comprends cette différence fondamentale entre un organisme dont la légitimité est originale, et un organisme dont la légitimité est déléguée.
[Si on reprend mon exemple d’une digue, il est quand même assez peu probable qu’un des voisins préfère voir son bien inondé et perdre tout valeur. Donc il est assez probable qu’il paie. Et sinon les voisins ont toujours la solution soit de lui racheter son lopin soit de faire une digue qui le contourne ou de passer outre et de payer sa part]
En d’autres termes, si un propriétaire refuse de vendre ou de payer la digue, vous avez deux options : la première est de renoncer à la digue, la seconde est de contourner son terrain, ce qui vous coutera beaucoup plus cher que de la construire suivant la ligne la plus courte et de protéger son terrain. La solution rationnelle du point de vue économique est donc… de payer entre tous la portion de digue qu’il refuse de payer. En d’autres termes, le passager clandestin joue sur du velours parce que le débarquer coûte plus cher que de le garder à bord. Il aura donc sa digue gratuitement. Le problème, c’est que ce fait encouragera les autres à faire de même… et il arrive un moment où il ne reste plus personne pour payer la digue !
Si les hommes ont créé des structures capables d’imposer le payement de sa part des protections communes à chacun, ce n’est pas par hasard : c’est parce que le modèle de paiement volontaire ne marche pas dès lors que celui qui refuse obtient le même service que celui qui paye. L’exemple classique est le service militaire. Vous avez tout intérêt à refuser d’aller défendre votre pays, puisque ceux qui iront dans les tranchées défendront votre bien en même temps que le leur.
[Si l’état décide de payer, les propriétaires des terrains au bord de la mer ne paieraient quasiment rien pour la digue alors que ceux non impacté devraient payer.]
Tout à fait. Et de la même manière les gens sans enfants paient l’école, les gens qui ne conduisent pas paient pour les routes, et ainsi de suite. Et lorsqu’on fait une moyenne, on découvre que finalement nous tirons tous quelque chose de ce que nous payons…
[Pire comme la digue serait payée au final par personne (c est gratuit, c’est l’état qui paie comme disait Hollande) rien ne prouve qu’elle soit construite où il faut, ni dans les règles de l’art (quand il s’agit de vos deniers vous êtes en général plus attentif)]
Vous oubliez un peu vite que tout le monde n’est pas d’accord avec Hollande, que les gens sont conscients que les ouvrages publics sont payés par leurs impôts, et qu’ils se sont donné des institutions dont la fonction est de contrôler qu’on construise les ouvrages au bon endroit et dans les règles de l’art. On a construit en France 58 réacteurs nucléaires avec de l’argent public, et ça semble s’être plutôt bien passé. Les gens qui les ont construits semblent avoir été très attentifs à ce qu’ils faisaient… même s’ils étaient « payés par personne ».
[Et si on élargit la réflexion, en cas de montée des eaux il est impossible de diguer toute la France (d après Wikipédia on a 19 193 km de côtes). Il y aura des choix à faire. Si l’état choisit, il y aura une pression maximale pour faire des digues, même pour protéger une masure (après tout c’est gratuit et c’est tout bénéfice).]
Si on suivait votre raisonnement, il y aurait des digues partout. Est-ce le cas ? Non, bien sur que non. On en conclut qu’il y a un mécanisme qui empêche des choix aussi irrationnels. Et ce mécanisme est simple : les moyens de l’Etat ne sont pas infinis. Il y a donc des choix à faire, et ceux qui ont la responsabilité de gouverner l’Etat font ces choix en fonction des équilibres entre les intérêts des différents groupes sociaux. Et ça ne se passe pas si mal que ça, finalement. La plupart des lignes de train vont à des endroits où il y a des voyageurs, la plupart des centrales électriques produisent de l’électricité.
[On va donc avoir des digues à des endroits où les gens ont les bonnes relations ou où c’est mediatique.]
Admettons. Mais si le financement des digues était privé, elles seraient construites là ou les gens ont de l’argent. Est-ce mieux ?
[Par contre protéger les usines ça risque de ne pas être très porteur …]
Je vous rassure, les gens qui possèdent les usines ont souvent d’excellentes relations…
[« Certes. Mais qu’est ce qui vous fait penser qu’une digue construite par l’initiative privée sera construite là où elle est le plus nécessaire, ou que sa qualité sera à la hauteur ? Je trouve toujours fascinante cette croyance que l’Etat a plus de chances de se tromper qu’un acteur privé. En pratique, ce serait plutôt le contraire : l’Etat peut s’offrir une ingénierie de bien meilleure qualité que la plupart des acteurs privés. » Je ne suis pas sûr que l’etat puisse avoir une ingénierie de meilleure qualité, mais admettons.]
Pour commencer, l’Etat peut s’offrir des ingénieurs qui ne craignent pas d’être virés dans le cas ou leur avis technique ne coïncide pas avec les intérêts de leur chef. C’est déjà pas mal…
Le problème n’est pas sur la technique mais au niveau supérieur. Par ex comme ici : (…)]
J’attire votre attention sur le fait que l’article est écrit au conditionnel. Aucun fait n’est donc établi, et je trouve hautement invraisemblable qu’à RFF on ait modifié un tracé simplement pour faire plaisir à un conseiller de cabinet.
[Vous me direz que ce type d’action peut aussi avoir lieu dans le privé. Mais à partir du moment où c’est le contribuable (autrement personne directement) qui paie, c’est bien plus facile.]
Je pense que vous fantasmez. C’est au contraire beaucoup plus facile dans le privé, tout simplement parce que c’est légal. Un agent privé peut consentir un « geste commercial » pour faire plaisir à un client sans avoir à se justifier et sans que personne ne lui demande des comptes. Mais lorsqu’il s’agit d’argent public, faire de même est un délit. Une entreprise privée peut choisir ses fournisseurs et prendre le plus cher (ou celui qui est dirigé par le fils du PDG) s’il en a envie. Une administration est tenue de faire un appel d’offres transparent, avec l’épée de Damoclès du délit de favoritisme si on ne peut justifier le choix autre que le moins disant… Contrairement à ce que vous croyez, c’est précisément parce que « c’est le contribuable qui paye » que le contribuable/électeur a exigé des contrôles approfondis et tâtillons. Montrez-moi une seule entreprise ou les commissaires aux comptes aient les pouvoirs de la Cour des Comptes.
[Le PDG de total peut décider et contraindre ses employés de faire quelque chose (si vous êtes salarie il y a un lien de subordination). L’Etat peut contraindre non seulement ses employés mais tous les citoyens.]
Non. L’Etat peut contraindre les fonctionnaires à obéir à ses instructions, mais ne peut « contraindre » les citoyens qu’à obéir aux lois. Et seuls les citoyens – par l’intermédiaire de leurs représentants – peuvent faire les lois. C’est pourquoi si vous voulez comparer les pouvoirs d’un PDG sur ses employés, vous devez prendre le pouvoir de l’Etat sur les fonctionnaires. Parce que le pouvoir que l’Etat exerce sur les citoyens est d’une nature complètement différente.
[Par ex le PDG de total ne peut pas décider de consigner les gens chez eux et de les autoriser a sortir seulement muni d un papier comme s ils etaient encore a l ecole et qu ils avaient un mot d excuse.]
L’Etat non plus. Pour pouvoir confiner les gens chez eux, il a fallu que les représentants des citoyens votent une loi. L’Etat est là pour faire appliquer les lois, mais il ne les fait pas.
[Et le PDG de total ne dispose pas du monopole de la force afin de contraindre les récalcitrant a lui obéir.]
Mais à obéir à quoi, justement ?
[Si vous voulez une planification qui fonctionne, vous devez forcement aller vers un système totalitaire où vos « citoyens » doivent obéir a de nombreuses consignes de l’Etat.]
Absolument pas. Je peux avoir une planification qui fonctionne avec un système ou les citoyens doivent appliquer les décisions prises par eux-mêmes soit directement par la voie du référendum, soit indirectement par leurs représentants. Je suis toujours fasciné par la vision que vous avez de l’Etat comme un corps extérieur à la société qui aurait non seulement le monopole de la violence légitime pour faire appliquer les lois, mais aussi le pouvoir de faire les lois sans référence à la société.
[« J’ai du mal à suivre votre raisonnement. La rétroaction est présente dans toute planification, quelle que soit la taille de l’acteur. Si j’ai une boulangerie, et j’augmente le prix de la baguette, il est évident que j’en vendrai moins. » Déjà il n est pas sur que vous vendez moins de baguettes si vous etes le seul boulanger a 10 km a la ronde.]
Même si je suis le seul boulanger de l’univers, si j’augmente le prix de la baguette il y aura des gens qui se diront « à ce prix, je prefère manger des biscottes », ou « à ce prix, je préfère faire mon propre pain ». Si je m’en tiens à la théorie économique, quand le prix augmente les quantités achetées diminuent. Le tout est de savoir en quelle proportion. Les biens dont la quantité vendue augmente avec le prix sont l’exception.
[Mais comment voulez-vous qu’un plan arrive à maitriser tous les paramètres ? c’est rapidement trop compliqué et je ne parle pas des impondérables.]
Mais qui vous dit que je « veux » qu’un plan maitrise tous les paramètres ? Je n’ai jamais dit que le plan soit un moyen de régulation parfait. Mon point est que l’a planification, pour un certain nombre de domaines économiques ou le marché ne marche pas, est le moins mauvais, le moins imparfait des modes de régulation. Ce n’est pas la même chose.
Vous me rappelez ceux qui disent qu’il ne faut pas faire confiance aux scientifiques parce que les scientifiques se trompent. C’est vrai, la science peut se tromper. Mais elle se trompe bien moins souvent que ses alternatives. L’attitude qui consiste à faire confiance à la science plutôt qu’à l’astrologie est donc profondément rationnelle, quand bien même elle ne garantit pas d’être dans le vrai.
La planification en tant que moyen de régulation, c’est comme la démocratie : le pire système à l’exception de tous les autres.
[Prenons l’exemple des digues précèdent (je suis pas un expert en BTP, il y a peut etre des erreurs mais c’est pour illustrer l’impossibilité de tout prévoir).]
Vous n’avez pas à illustrer cette affirmation, c’est une évidence que même les planistes les plus enragés reconnaissent. Mais doit-on rejeter un mécanisme au prétexte qu’il n’est pas parfait ? Si on est capable de prévoir 80%, ce n’est déjà pas si mal, non ?
[« Et le PDG d’une entreprise a autant de contrôle sur ses clients et ses actionnaires que le président a sur les citoyens ». Absolument pas. Un PDG a un contrôle limité sur ses clients. Je peux faire le plein chez total aujourd’hui et demain chez Shell. Ca ne pose aucun probleme..]
Et le président peut-il vous obliger d’aller chez Shelle ou chez Total ? Non plus. C’était bien mon point…
[Notre président peut passer des lois qui s’imposent à tous les citoyens et a les moyens de les faire respecter via la police.]
De grâce, relisez la Constitution. Le président ne peut « passer des lois », seul le Parlement peut le faire. Il ne peut même pas faire des décrets réglementaires (seul le Premier ministre peut les faire, et seulement dans les limites fixées par la loi et la Constitution). Et le président n’a aucune autorité sur la police.
[En theorie les citoyens peuvent revoquer le president mais c est la un peu comme avec les actionnaires et le PDG, c est pas si simple en pratique]
C’était bien mon point !
[« On peut rire du plan calcul, mais il ne faudrait pas oublier quel était son objectif principal : fournir à la France les calculateurs nécessaires à la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire. » IL semble que ça soit une légende (https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_Calcul ). Les USA et IBM fournissant le CEA.]
Pour avoir beaucoup connu les gens qui ont vécu cette époque, je peux vous affirmer que Wikipédia dans ce cas a tout faux. Si IBM vendait des ordinateurs au CEA, c’était avec toute une série de conditions et en particulier qu’ils ne soient pas utilisés pour des applications militaires (réglementation dite « des biens à double usage »). De plus, le monopole d’IBM permettait aux Américains d’exercer une pression sur le programme nucléaire français, puisque sur un simple geste on pouvait laisser la France sans moyens de calcul.
[Et en plus le risque était énorme et l’amende payée va effacer le bénéfice pour des ventes de diesels truques pour des dizaines d’années]
Vous voulez dire que les présidents de VW et leurs conseillers ne savent pas faire un calcul de risque ? Et après vous allez m’expliquer que dans le privé on ne se trompe jamais… 😉
Franchement, je n’ai pas réussi à trouver un calcul sérieux de ce que la fraude à rapporté à VW comparé à ce qu’elle lui a coûté. Auriez-vous une référence ?
[Que cet objectif de vente ait été fixé par un planificateur étatique ou par l’état-major de VW n’a aucune importance. Soumis à une contrainte, l’organisation (ici VW) a choisi le chemin le plus facile : truander]
Nous sommes donc d’accord que la planification privée et la planification publique sont équivalentes ?
[« Moi je ne peux que constater une chose : alors qu’il n’y avait pas de secteur privé en URSS, le secteur public a permis un pays arriéré de devenir une super-puissance après avoir gagné une guerre mondiale. Si la planification avait été si inefficace, on voit mal comment ces résultats auraient pu être atteints. » Il y avait quand même des industries en Russie avant 1917 même si le pays était encore arriéré.]
Certes. Mais après la guerre civile et les interventions étrangères qui se sont prolongées jusqu’au début des années 1920, il n’en restait pas grande chose. Je pense qu’il est difficile de contester le succès éclatant des deux premiers plans quinquennaux.
[Savez-vous que l’empire russe en 1913 était la troisième économie mondiale ? (…)]
Non, et je n’y crois pas. Vous noterez que dans l’article Wikipédia que vous citez cette affirmation n’est soutenue par aucune référence, ce qui la rend invérifiable. J’ajoute que selon un autre article (https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_historique_des_r%C3%A9gions_et_pays_par_PIB#1913) en 1913 l’économie de l’empire Russe était la 6ème économie du monde, derrière les Etats-Unis, l’empire britannique, la Chine, l’Empire allemand et l’Empire français.
[L’URSS a permis une industrialisation et un développement du pays mais le cout humain a été enorme : famine en Ukraine, système concentrationnaire…]
Je ne vois pas le rapport avec le succès des plans quinquennaux. On ne peut compter la famine en Ukraine ou le système concentrationnaire comme « coût » de la modernisation que si on estime qu’ils étaient une condition nécessaire à la réussite de celle-ci. Or, c’est exactement le contraire : ni la famine, ni les camps de concentration contribuent à augmenter la productivité du travail.
[« Pensez, plus près de nous, à ces récoltes détruites, ce lait déversé dans les égouts pour maintenir les prix. Curieusement, les libéraux considèrent cette destruction normale… alors qu’elles tiennent au même problème : des biens sont produits qui ne correspondent pas à la demande. » Dans le cas du lait dans les egouts, on est pas dans un marché libre vu que c est la PAC]
Absolument pas. On a commencé à détruire des denrées et des biens pour maintenir les prix bien avant que la PAC n’existe.
[Il est clair qu’on ne peut prévoir exactement les produits et volumes. Mais la différence entre le marché et la planification, c’est que le marché va éliminer une société qui se trompe trop souvent de produit]
Et cette « élimination » implique une destruction de valeur : destruction des stocks invendus, des machines inutiles, des travailleurs envoyés au chômage. Quelle différence avec la perte de valeur résultant d’une erreur de planification ?
[(mais vous pouvez faire des erreurs : Apple porte au pinacle maintenant était au bord de la faillite dans les années 90). Dans le cas de la planification, soit vous êtes dans un système dictatorial ou remonter les problèmes va vous envoyer au goulag soit (cas francais) comme ce n’est pas votre argent et que les poches de l’état sont profondes, il n y aura pas vraiment de sanctions (…)]
Excusez-moi, mais quelles ont été les « sanctions » appliquées à ceux qui ont fait les mauvais choix qui ont conduit Apple au bord de la faillite ? Les poches de l’Etat ne sont pas plus profondes que celles des investisseurs privés, et les PDG qui ont conduit des entreprises à la faillite n’en souffrent pas vraiment. Vous croyez vraiment que Jean-Marie Messier pointe à l’ANPE ?
Je suis toujours fasciné par votre croyance aveugle dans le privé, qui vous amène à attribuer au secteur public des problèmes qui en fait existent dans toute grande organisation.
[Vous voulez dire que la motivation des entrepreneurs pour produire et développer leur entreprise n’est pas de créer des emplois ou de satisfaire les besoins de leurs clients, mais gagner de l’argent ? Et moi qui croyais que les entrepreneurs étaient désintéressés… ]
Même si la création d’entreprise obéit à plusieurs motifs (par ex le désir d’être son propre chef et pas de subir les ordres de quelqu’un d’autres), il faut bien reconnaitre que l’une des principales motivations est pécuniaire.
[Trêve de plaisanterie : Le « prix de fabrication » inclut la rémunération du capital investi. Vendre au prix de fabrication vous permet donc de rémunérer les capitalistes, qui ont donc toujours intérêt à investir et donc à faire produire pour rentabiliser leur investissement.]
Là je demande à voir. Vous imaginez le scandale dans certains cercles si on rémunère le capital (et en plus il faudrait déterminer à quel taux.)
[En fait, si vous relisez vos arguments décrivant la constitution d’un monopole public, vous noterez qu’ils s’appliquent tout aussi exactement à la constitution d’un monopole privé ! ]
Tout à fait, c’est pour ça que chaque pays a des lois contre les monopoles qui peuvent interdire les fusions ou forcer à des cessions
[Mais qu’est ce qui vous fait penser que la concurrence n’est possible que dans le secteur privé ?]
Parce que 2 sociétés publiques auront plus tendance a s accorder qu’a se faire concurrence. Surtout si au final elles sont le même patron (le ministre de l’industrie par ex). Imaginez qu on ait un second EDF public, la tentation aurait été forte de faire un yalta electrique (a toi le nord de la France, a moi le sud)
Je ne vous cache pas que ce type de comportement existe aussi dans le privé (des cartels sont regulierement mis a jour) mais ils sont sanctionnés d autant plus facilement qu ils n implique pas l etat. Imaginez l embarras d un juge qui va devoir faire une descente au ministere de l industrie voire convoquer le ministre dans mon cas de 2 EDF
[Imaginons que GM ou VW aient tout misé sur les batteries et que finalement ce soit l’hydrogène la solution. Qu’est ce qui vous fait penser que le PDG de VW ou de GM aura plus de facilité à expliquer à ses actionnaires qu’il a claqué leur argent en pure perte qu’un président de la République ?]
Si GM ou VW misent sur le mauvais cheval, il leur arrivera la même chose qu’ a Panhard ou Simca : faire faillite ou être racheté (ou éventuellement faire appel a l’état pour se faire renflouer avec l’argent du contribuable suivant le principe du « too big to fail » . c est pour ca que je suis contre l intervention de l etat telle que l a fait sarkozy a l epoque. A la limite, si on pense que la societe est viable et traverse juste une mauvaise passe, on fait une augmentation du capital dilutive et l etat souscrit et devient actionnaire. Situation qui devrait vous rejouir 😉)
[Que je sache, l’UE n’a aucune légitimité et aucun moyen pour faire payer par tous la digue même si une minorité est en désaccord. Seuls les états-nations ont le monopole de la force légitime, et seuls les états nations ont le privilège de pouvoir lever l’impôt.]
Sur la légitimité, c’est une question de point de vue. Apres tout un « patriote » corse vous dira que l’état français n’est pas légitime à taxer un corse (ils ont un statut fiscal spécifique d’ailleurs)
Si l’UE ne construit pas de digue elle a un budget et le dépense même si une minorité n est pas d’accord (pensez à la PAC, la GB était notoirement opposé). De même le fameux plan de relance post covid a été adopte malgré l’opposition des états « frugaux » (Autriche, hollande …)
[Si je suis « souverainiste », c’est bien parce que je comprends cette différence fondamentale entre un organisme dont la légitimité est originale, et un organisme dont la légitimité est déléguée. ]
Qui sait, dans 150 ans l’UE apparaitra peut-être comme légitime aux yeux de quasiment tout le monde. Après tout la RFA, la belgique ou l’Italie n’existaient pas il y a 150 ans
[Si les hommes ont créé des structures capables d’imposer le payement de sa part des protections communes à chacun, ce n’est pas par hasard : c’est parce que le modèle de paiement volontaire ne marche pas dès lors que celui qui refuse obtient le même service que celui qui paye. L’exemple classique est le service militaire. Vous avez tout intérêt à refuser d’aller défendre votre pays, puisque ceux qui iront dans les tranchées défendront votre bien en même temps que le leur.]
Avez-vous fait votre service militaire ? Vous aviez quand même d énorme inégalités :
– Ceux qui se faisaient reformer pour des raisons plus ou moins bidons
– Ceux qui étaient pistonnés (exemple connu Balkany a fait son service militaire a l’Elysée)
– Ceux qui arrivaient a avoir un poste de scientifique du contingent/coopération (c est en parti au mérite mais pas que. J ai un cousin qui a eut la chance de faire son service à l’ambassade de France aux USA… Papa connaissait Michel Barnier)
– J ai un oncle qui a été envoyé en Algerie. Un de ses copains (qui l’origine devait rester en métropole) aussi afin de remplacer un pistonné (je ne connais pas les détails). Le tragique de l’histoire c’est que le copain est mort en Algérie
[Tout à fait. Et de la même manière les gens sans enfants paient l’école, les gens qui ne conduisent pas paient pour les routes, et ainsi de suite. Et lorsqu’on fait une moyenne, on découvre que finalement nous tirons tous quelque chose de ce que nous payons…]
La question ici est où mettons la limite entre ce qui est payé par la collectivité et ce qui est payé par la personne. Payer l’éducation des enfants semble sain. Payer pour qu’un cancéreux se fasse soigner aussi. Payer pour une cure ou une opération de chirurgie esthétique (si si dans certains cas c est remboursé) me semble être n’importe quoi. A un moment vous allez aussi developper une mentalité de passager clandestin ici aussi : je ne contribue a rien mais je touche les aides (c était en gros la position du père de la fameuse Leonarda).
Sans compter que les intérêts particuliers vont pousser à continuer à subventionner même si la collectivité n y trouve pas son compte (les cures sont le parfait exemple d’un dilapidage d argent public, mais c est pas le seul. Actuellement il semble avoir une campagne des promoteurs pour qu on continue a les subventioner via un dispositif defiscalisant comme le Pinel, j ai lu plusieurs articles où nos promoteurs avec des tremolos parlent des difficultes de logement )
[Vous oubliez un peu vite que tout le monde n’est pas d’accord avec Hollande, que les gens sont conscients que les ouvrages publics sont payés par leurs impôts, et qu’ils se sont donné des institutions dont la fonction est de contrôler qu’on construise les ouvrages au bon endroit et dans les règles de l’art.]
Vous-même disiez qu’il y avait des appels pour sauver les thés éléphant avec de l’argent public. IL y a évidemment des gens qui sont conscient du cout mais sont-ils majoritaire ? et comment reagir quand on vous dit que ca permet d eviter a X familles de se retrouver au chomage ?
C’est quand même assez rare de voir en France les gens refuser quelque chose car c’est trop cher et ça fera augmenter les impôts. On est plutôt dans le système inverse, à charger toujours plus la mule
[On a construit en France 58 réacteurs nucléaires avec de l’argent public, et ça semble s’être plutôt bien passé. Les gens qui les ont construits semblent avoir été très attentifs à ce qu’ils faisaient… même s’ils étaient « payés par personne ».]
Ça c’était il y a longtemps. Actuellement c’est plutôt Flammanville
[J’attire votre attention sur le fait que l’article est écrit au conditionnel. Aucun fait n’est donc établi, et je trouve hautement invraisemblable qu’à RFF on ait modifié un tracé simplement pour faire plaisir à un conseiller de cabinet.]
La personne n’ayant pas été condamne, le conditionnel est de rigueur pour éviter de perdre un procès pour diffamation. Quand au fond de l’affaire, il y a déjà eut une ligne de TGV changée suite a l’intervention de Mitterrand (https://fr.wikipedia.org/wiki/LGV_Méditerranée). Là il s agit juste d un conseiller mais les faits son là : le tracé a été changé et il est intervenu pour ca. Est-ce que son intervention a été la seule cause du changement, c est au tribunal de juger
[C’est au contraire beaucoup plus facile dans le privé, tout simplement parce que c’est légal. Un agent privé peut consentir un « geste commercial » pour faire plaisir à un client sans avoir à se justifier et sans que personne ne lui demande des comptes.]
On parle pas ici d une petite remise sur la facture. C’est évidemment possible dans le privé. Mais si c’est un employé qui s’amuse à ça, il risque la porte. Si c est le patron, c est dans certains cas legal vu que c est son argent mais ca peut etre requalifie en abus de bien sociaux
[Montrez-moi une seule entreprise ou les commissaires aux comptes aient les pouvoirs de la Cour des Comptes.]
La cour des comptes peut constater des déficiences mais ça s’arrête souvent là. D ou le marronnier des intermittents du spectacle ou d autres themes qui reviennent regulierement (https://www.ccomptes.fr/system/files/2019-11/20191203-refere-S2019-2270-temps-de-travail-BIATSS.pdf : la cour constate quelque chose, demande d y mettre fin et 5 ans apres elle constate que rien n a été fait …)
[L’Etat non plus. Pour pouvoir confiner les gens chez eux, il a fallu que les représentants des citoyens votent une loi. L’Etat est là pour faire appliquer les lois, mais il ne les fait pas.]
IL me semble pas que l AN ai voté une loi pour le confinement (vu la vitesse à laquelle ca été decidé c était d ailleurs impossible)
[[Et le PDG de total ne dispose pas du monopole de la force afin de contraindre les récalcitrant a lui obéir.]
Mais à obéir à quoi, justement ?]
Aux ordres de l etat. Si je ne suis pas les consignes de M Veran (Olivier Véran annonce des mesures à Lyon et Nice et de nouvelles consignes pour les écoles https://www.lemonde.fr/planete/live/2020/09/17/covid-19-suivez-en-direct-la-conference-de-presse-d-olivier-veran_6052606_3244.html) la police peut me sanctionner pour absence de masque par ex.
Si le PDG de total decide je ne sais quoi, personne ne peut me contraindre a obeir si je ne suis pas employé de total ou sur une raffinerie total
[Et le président peut-il vous obliger d’aller chez Shelle ou chez Total ? Non plus. C’était bien mon point…]
Non mais le president peut m imposer de porter un masque en plein air, de ne pas pouvoir payer en liquide (si superieur a 1000 € ?), de devoir crypter mon wifi (hadopi) … Et vous avez toutes les professions reglementees : on ne m impose pas d aller chez le notaire X ou le pharmacien Y mais l etat s assure qu il est le seul dans un rayon de X km …
[De grâce, relisez la Constitution. Le président ne peut « passer des lois », seul le Parlement peut le faire. Il ne peut même pas faire des décrets réglementaires (seul le Premier ministre peut les faire, et seulement dans les limites fixées par la loi et la Constitution). Et le président n’a aucune autorité sur la police.]
Reconnaissez que dans la pratique, l’exécutif domine largement le législatif (combien de lois sont promulguées contre l’avis de notre président. Même quand le parlement est rétif (cf. les frondeurs sous Hollande) le président réussi à passer les lois qu’il souhaite. Même si formellement vous avez raison, c’est le parlement qui fait les lois
Pour la police, j’ai un doute. C’est bien le ministre de l’intérieur qui est leur chef non ?
[Vous voulez dire que les présidents de VW et leurs conseillers ne savent pas faire un calcul de risque ? ]
J’ignore la motivation du PDG de l’époque pour prendre un tel risque face à un gain aussi faible. La certitude de ne pas être pris ? l’orgueil ? Winterkorn (le PDG) était connu pour être autoritaire (https://www.theguardian.com/business/2015/oct/10/volkswagen-executives-martin-winterkorn-company-culture) peut être que personne n’a osé une objection.
Mais ce n’est pas le seul à faire des bourdes qui leur coutent cher au final. C Goshn s’est fait filmé à Versailles a jouer le roi soleil au frais de Renault et met la vidéo sur you tube … (si vous voyez le film, c est clair que ca a été fait par un pro et que Carlos était au courant)
[Et après vous allez m’expliquer que dans le privé on ne se trompe jamais… ]
Je n’ai jamais dit que le privé ne se trompe jamais. Simplement que les effets sont normalement moins graves car ils n’ont pas autant de pouvoir. Et en cas de problème, la sanction tombe plus facilement (une entreprise peut faire faillite et disparaitre, un état non) et impacte moins de monde (regardez les effets de la mauvaise gestion en argentine par ex)
[Nous sommes donc d’accord que la planification privée et la planification publique sont équivalentes ?]
Oui, dans les 2 cas, une organisation soumise à une pression extérieure va tenter de remplir ses objectifs de la façon qui offre le meilleur rapport simplicité/risque. Et truander est souvent la solution la plus simple, voire la seule si l’objectif est inatteignable. VW met un logiciel truqueur ou un responsable d’usine soviétique oublie de dire que son acier a trop de carbone et est impropre a tout usage
[Vous noterez que dans l’article Wikipédia que vous citez cette affirmation n’est soutenue par aucune référence, ce qui la rend invérifiable. J’ajoute que selon un autre article (https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_historique_des_r%C3%A9gions_et_pays_par_PIB#1913) en 1913 l’économie de l’empire Russe était la 6ème économie du monde, derrière les Etats-Unis, l’empire britannique, la Chine, l’Empire allemand et l’Empire français.]
Vous reconnaissez vous-même que la Russie en 1913 n’était pas si arriéré que ça. Ils etaient en phase de rattrapage
[Je ne vois pas le rapport avec le succès des plans quinquennaux. On ne peut compter la famine en Ukraine ou le système concentrationnaire comme « coût » de la modernisation que si on estime qu’ils étaient une condition nécessaire à la réussite de celle-ci. Or, c’est exactement le contraire : ni la famine, ni les camps de concentration contribuent à augmenter la productivité du travail.]
Les goulags participaient au succes du plan. Ils avaient des quotas et des objectifs de production
La famine en Ukraine a plusieurs causes. La priorité pour l’industrie lourde, les quotas que les campagnes devaient livrer aux villes (personne n’osait dire qu’on ne respectait pas le plan et qu’au lieu de 100 tonnes on avait produit 50. Du coup quand il fallait livrer 50 tonnes il ne restait plus rien pour manger). Vous remarquerez que le grand bon en avant a eu les mêmes conséquences en chine (avec encore plus de mort, l’estimation est de 40 millions)
[Excusez-moi, mais quelles ont été les « sanctions » appliquées à ceux qui ont fait les mauvais choix qui ont conduit Apple au bord de la faillite ?]
Le patron de l’époque a pris la porte et les actionnaires de l’époque ont perdu beaucoup d’argent (s ils ont conservé leur titres ils se sont refait mais toutes les entreprises n’arrivent pas à redresser la barre). Si vous avez acheté des actions de WeWork ou d Hertz vous y avez laissé des plumes
[Les poches de l’Etat ne sont pas plus profondes que celles des investisseurs privés, et les PDG qui ont conduit des entreprises à la faillite n’en souffrent pas vraiment.]
La différence c’est que le contribuable ne doit pas payer pour la faillite d Hertz ou de n’importe quelle société mal gérée.
[Vous croyez vraiment que Jean-Marie Messier pointe à l’ANPE ?]
Certes non. Et je trouve scandaleux que certains partent avec un gros cheque alors qu ils ont planté leur société (ex le PDG de Boeing ou d alcatel). Mais dans le cas de Messier, vous remarquerez qu il n a plus rien eut de majeur à diriger apres Vivendi. Je connais pas la personne mais je suppose que son ego a du en prendre un coup
[Je suis toujours fasciné par votre croyance aveugle dans le privé, qui vous amène à attribuer au secteur public des problèmes qui en fait existent dans toute grande organisation.]
Je suis conscient des faiblesses des sociétés privées (j’ai travaillé dans plusieurs grandes sociétés). L’homme étant ce qu’il est, une organisation privée ou publique est soumise aux mêmes tentations et aux mêmes dérives. Par contre, ce qui fait la différence c’est la taille et les contrepouvoirs (et pas que sur le papier. Si une société peut faire faillite en théorie mais que l état la sauvera en pratique c’est pas mieux qu’une société nationalisée.) .
Un état aillant bien plus de pouvoir qu’ une entreprise, les dérives vont bien plus de dégâts et je suis persuadé (mais ça c’est de la croyance je vous l’accorde) que l état n’est pas le meilleur juge pour décider ce qui doit être produit ou non ou même pour diriger une société (qui croit sincèrement que Ségolène royal pouvait être numéro 2 d une banque ?).
De plus un état puissant rend forcement irrésistible le copinage comme celui de notre ex premier ministre à Atos. Il n’a aucune compétence en informatique, il est là pour son carnet d’adresse, pour remerciement du poste de l’ex PDG Atos comme commissaire européen et pour préparer éventuellement l’avenir (s’il redevient ministre ou mieux)
@ cdg
[« Trêve de plaisanterie : Le « prix de fabrication » inclut la rémunération du capital investi. Vendre au prix de fabrication vous permet donc de rémunérer les capitalistes, qui ont donc toujours intérêt à investir et donc à faire produire pour rentabiliser leur investissement. » Là je demande à voir. Vous imaginez le scandale dans certains cercles si on rémunère le capital (et en plus il faudrait déterminer à quel taux.)]
Je ne sais pas de quels « cercles » vous parlez. Pas ceux auxquels j’ai appartenu ou j’appartiens, en tout cas : vous noterez par exemple qu’en URSS les livrets d’épargne étaient rémunérés.
[Tout à fait, c’est pour ça que chaque pays a des lois contre les monopoles qui peuvent interdire les fusions ou forcer à des cessions.]
Oui, mais vous voyez bien que ces lois constituent un sérieux problème théorique pour les libéraux, puisqu’elles constituent une intervention de l’Etat pour contrer le mécanisme de marché. On ne peut pas en même temps dire que la régulation doit se faire par confrontation des intérêts du vendeur et de l’acheteur, et refuser cette règle lorsque l’entreprise A essaye de racheter l’entreprise B.
En fait, vous touchez là du doigt le fait que le libéralisme ne fonctionne pas dans les secteurs où les rendements sont croissants avec la taille, puisque dans ces domaines le « libre marché » aboutit au monopole (ce qu’on appelle le « monopole naturel »). Si vous voulez garder un marché, l’Etat est obligé en permanence pour empêcher les entreprises de fusionner ou de racheter leur concurrent…
[« Mais qu’est-ce qui vous fait penser que la concurrence n’est possible que dans le secteur privé ? » Parce que 2 sociétés publiques auront plus tendance à s’accorder qu’à se faire concurrence.]
Sans vouloir vous offenser, avez-vous entendu parler des « cartels » ? Deux entreprises privées ont au contraire tout intérêt à s’entendre pour contrôler les prix et empêcher les nouveaux entrants de venir sur le marché.
[Surtout si au final elles sont le même patron (le ministre de l’industrie par ex). Imaginez qu on ait un second EDF public, la tentation aurait été forte de faire un yalta electrique (a toi le nord de la France, a moi le sud)]
Votre exemple est très mal choisi : on ne peut décider de quel côté vont les électrons, et donc où l’électricité que vous produisez sera consommée. Mais encore une fois, pourquoi pensez-vous que ce type de Yalta est plus difficile entre entreprises privées qu’entre entreprises publiques ?
[Je ne vous cache pas que ce type de comportement existe aussi dans le privé (des cartels sont régulièrement mis à jour) mais ils sont sanctionnés d’autant plus facilement qu’ils n’impliquent pas l’etat. Imaginez l’embarras d’un juge qui va devoir faire une descente au ministère de l’industrie voire convoquer le ministre dans mon cas de 2 EDF]
Je ne vois pas la difficulté. Les entreprises publiques sont déjà en concurrence avec des entreprises privées (c’est le cas d’EDF) et les juges n’hésitent pas à juger contre l’Etat en ces matières. J’ajoute que l’Etat a déjà géré des entreprises en concurrence les unes avec les autres : pensez par exemple à ELF et Gaz de France…
[« Imaginons que GM ou VW aient tout misé sur les batteries et que finalement ce soit l’hydrogène la solution. Qu’est ce qui vous fait penser que le PDG de VW ou de GM aura plus de facilité à expliquer à ses actionnaires qu’il a claqué leur argent en pure perte qu’un président de la République ? » Si GM ou VW misent sur le mauvais cheval, il leur arrivera la même chose qu’ a Panhard ou Simca : (…)]
Vous ne répondez pas à ma question…
[« Que je sache, l’UE n’a aucune légitimité et aucun moyen pour faire payer par tous la digue même si une minorité est en désaccord. Seuls les états-nations ont le monopole de la force légitime, et seuls les états nations ont le privilège de pouvoir lever l’impôt. » Sur la légitimité, c’est une question de point de vue. Apres tout un « patriote » corse vous dira que l’état français n’est pas légitime à taxer un corse (ils ont un statut fiscal spécifique d’ailleurs)]
Un Corse peut dire tout ce qu’il veut. Mais vous admettrez que l’immense majorité des Corses, mais aussi des citoyens français et des états de ce monde partagent cette reconnaissance. La légitimité reconnue à l’Etat français en cette matière n’est pas une pure question de débat intellectuel, c’est un fait politique. Et c’est ce fait qui constitue la nation. Et de la même manière, personne ne reconnaît à l’UE une telle compétence.
[Si l’UE ne construit pas de digue elle a un budget et le dépense même si une minorité n’est pas d’accord (pensez à la PAC, la GB était notoirement opposé). De même le fameux plan de relance post covid a été adopte malgré l’opposition des états « frugaux » (Autriche, hollande …)]
Seulement aussi longtemps que les états opposés acceptent de payer. S’ils refusent et quittent l’Union, l’UE n’a aucun moyen de leur faire payer. Encore une fois, il faut distinguer la différence entre un club et une nation. Dans un club, vous n’êtes obligé à respecter le règlement que dans la mesure où vous voulez rester membre. Si vous décidez de partir, vous n’y êtes plus soumis. Dans une nation, vous êtes soumis aux règles que vous le vouliez ou pas.
[« Si je suis « souverainiste », c’est bien parce que je comprends cette différence fondamentale entre un organisme dont la légitimité est originale, et un organisme dont la légitimité est déléguée. » Qui sait, dans 150 ans l’UE apparaitra peut-être comme légitime aux yeux de quasiment tout le monde.]
Peut-être. Et peut-être pas. Rien n’est aussi difficile à prédire que l’avenir. Mais hic et nunc, l’UE n’a pas la légitimité en question, et pour des raisons que j’ai développé ici de nombreuses fois, il y a peu de chances qu’elle l’ait dans un avenir prévisible.
[Après tout la RFA, la belgique ou l’Italie n’existaient pas il y a 150 ans]
Certes. Et l’Empire Russe, l’Empire Français et l’Empire Britannique, qui existaient il y a 150 ans, n’existent plus.
[« Si les hommes ont créé des structures capables d’imposer le payement de sa part des protections communes à chacun, ce n’est pas par hasard : c’est parce que le modèle de paiement volontaire ne marche pas dès lors que celui qui refuse obtient le même service que celui qui paye. L’exemple classique est le service militaire. Vous avez tout intérêt à refuser d’aller défendre votre pays, puisque ceux qui iront dans les tranchées défendront votre bien en même temps que le leur. » Avez-vous fait votre service militaire ? Vous aviez quand même d énorme inégalités : (…)]
Quel rapport ? L’impôt n’est pas égalitaire, et il reste quand même obligatoire. Comme souvent, vous ne répondez pas à la question posée. La question ici était de savoir si l’on peut construire un ouvrage qui profite à tous sur la base d’un engagement volontaire, et non si cet engagement devait être le même pour tout le monde.
[La question ici est où mettons la limite entre ce qui est payé par la collectivité et ce qui est payé par la personne.]
Vous écrivez comme si j’étais un partisan de TOUT collectiviser. Ce n’est pas du tout le cas. Comme je l’ai dit, il y a des domaines ou le marché est le meilleur régulateur, ce qui suppose que dans ce domaine il y ait des acheteurs qui payent avec leur argent. J’aurais tendance à dire qu’il faut mutualiser les dépenses là où il y a « consommation obligatoire ». Ainsi, pour reprendre l’exemple de la digue, celle-ci créera une sécurité qui sera « consommée » par tous les habitants. A ce moment-là, il faut que la collectivité paye, sans quoi on aura toujours des passagers clandestins. Même chose pour le cancer : lorsque vous êtes malade, vous n’avez pas le choix, il vous faut un traitement sur lequel vous n’êtes pas prescripteur. Par contre, qu’on vous fasse payer un peu plus si vous voulez une chambre individuelle dans l’hôpital n’a rien de scandaleux.
[« Vous oubliez un peu vite que tout le monde n’est pas d’accord avec Hollande, que les gens sont conscients que les ouvrages publics sont payés par leurs impôts, et qu’ils se sont donné des institutions dont la fonction est de contrôler qu’on construise les ouvrages au bon endroit et dans les règles de l’art. » Vous-même disiez qu’il y avait des appels pour sauver les thés éléphant avec de l’argent public.]
Eh bien, qu’il y ait des appels n’implique pas que cela se fasse. Il faut croire que les institutions de contrôle ont été efficaces…
[« On a construit en France 58 réacteurs nucléaires avec de l’argent public, et ça semble s’être plutôt bien passé. Les gens qui les ont construits semblent avoir été très attentifs à ce qu’ils faisaient… même s’ils étaient « payés par personne ». » Ça c’était il y a longtemps.]
Et donc, c’est possible. CQFD
[« J’attire votre attention sur le fait que l’article est écrit au conditionnel. Aucun fait n’est donc établi, et je trouve hautement invraisemblable qu’à RFF on ait modifié un tracé simplement pour faire plaisir à un conseiller de cabinet ». La personne n’ayant pas été condamne, le conditionnel est de rigueur pour éviter de perdre un procès pour diffamation.]
Pas seulement : il est indispensable parce qu’il faut garder en tête que tant que la condamnation n’est pas définitive, les faits ne peuvent pas être considérés comme établis… ce que vous faites allègrement.
[Quand au fond de l’affaire, il y a déjà eut une ligne de TGV changée suite a l’intervention de Mitterrand]
Certes, mais ce fut pour réduire le dommage au vignoble des Côtes du Rhône, ce qui ne me paraît pas scandaleux.
[C’est évidemment possible dans le privé. Mais si c’est un employé qui s’amuse à ça, il risque la porte.]
Un fonctionnaire ou un politique qui s’amusent à ça s’exposent à la prison.
[« Montrez-moi une seule entreprise ou les commissaires aux comptes aient les pouvoirs de la Cour des Comptes. » La cour des comptes peut constater des déficiences mais ça s’arrête souvent là.]
Documentez-vous. La Cour des Comptes ne se contente pas de « constater les déficiences ». Elle les rend publiques (ce qu’aucun commissaire aux comptes ne peut faire) et est tenue de communiquer au Procureur de la République les dossiers où elle aurait constaté un fait délictuel. Et pour ce qui concerne les fonctionnaires, la cour dispose d’une instance disciplinaire (la cour de discipline budgétaire et financière) qui peut mettre un fonctionnaire en « débet » (obligation de rembourser sur ses propres deniers l’argent mal utilisé).
[D’où le marronnier des intermittents du spectacle ou d’autres thèmes qui reviennent régulièrement]
Là, vous confondez tout. On parlait du contrôle comptable qu’exerce la Cour comparé à celui qu’exercent les commissaires aux comptes, et non pas du contrôle de l’utilisation des deniers publics qu’effectue la cour et qui n’a pas d’équivalent dans le secteur privé. Les commissaires aux comptes se contentent en effet de vérifier la régularité des comptes, mais ne regardent pas si la dépense était efficace ou pas. Ce contrôle indépendant n’existe que dans le secteur public… et c’est à ce contrôle que se rattachent les affaires dont vous parlez. Au risque de me répéter, votre conviction selon laquelle il y aurait moins de contrôle dans le public que dans le privé est un fantasme : c’est le contraire qui est vrai.
[« L’Etat non plus. Pour pouvoir confiner les gens chez eux, il a fallu que les représentants des citoyens votent une loi. L’Etat est là pour faire appliquer les lois, mais il ne les fait pas. » Il ne me semble pas que l’AN ai voté une loi pour le confinement (vu la vitesse à laquelle ca été décidé c’était d’ailleurs impossible)]
Bien sur que si. Le confinement se fonde sur l’article L.3131-1 du Code de la Santé Publique, qui comme son numéro l’indique est un article LEGISLATIF, issu d’un texte voté par l’Assemblée Nationale (loi du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur). Le fait qu’il ait été voté en prévision d’une pandémie et non après le début de celle-ci ne change rien au fait que ce n’est pas l’Etat qui « décide », il ne fait que mettre en application un texte voté par les citoyens par l’intermédiaire de leurs représentants.
[Si le PDG de total décide je ne sais quoi, personne ne peut me contraindre a obeir si je ne suis pas employé de total ou sur une raffinerie total]
Vous voulez dire que si le PDG de total décide d’augmenter le prix de l’essence, je peux continuer à payer l’ancien prix ? Chouette, alors…
[Non mais le président peut m’imposer de porter un masque en plein air, de ne pas pouvoir payer en liquide (si superieur a 1000 € ?), de devoir crypter mon wifi (hadopi) … Et vous avez toutes les professions reglementees : on ne m impose pas d aller chez le notaire X ou le pharmacien Y mais l etat s assure qu il est le seul dans un rayon de X km …]
Je vous le répète, le président ne peut rien faire de tel. Pour pouvoir vous obliger à porter un masque, pour mettre des limites à ce que vous pouvez payer en liquide, pour vous obliger à crypter votre wifi ou pour réglementer une profession il faut une LOI, c’est-à-dire un vote des représentants du peuple. C’est un principe général : TOUTE atteinte à une liberté nécessite une base législative, et le Premier ministre règlemente dans le cadre fixé par la loi. Le Président, lui, ne peut faire AUCUN acte réglementaire (en dehors, bien entendu, de l’application de l’article 16 de la Constitution, ce qui reste, vous me l’accorderez, très exceptionnel).
[Reconnaissez que dans la pratique, l’exécutif domine largement le législatif]
Peut-être, mais l’exécutif, ce n’est pas le président, c’est le Premier ministre.
[(combien de lois sont promulguées contre l’avis de notre président. Même quand le parlement est rétif (cf. les frondeurs sous Hollande) le président réussi à passer les lois qu’il souhaite. Même si formellement vous avez raison, c’est le parlement qui fait les lois]
Même si en apparence le président « passe les lois qu’il souhaite », en pratique c’est plus compliqué que ça. Parce que le président s’arrange pour ne « souhaiter » que ce qu’il pense pouvoir faire voter par le Parlement – et quelquefois il est obligé d’avaler quelques couleuvres parce que sa majorité modifie le texte. Ce que les contempteurs de la Vème République ne comprennent pas, c’est que le Parlement a un poids très important qui n’apparaît pas tout simplement parce que le président s’abstient de lui proposer des lois dont il sait qu’elles n’ont pas de chance de passer.
Il y a même des cas où le président fait passer son texte grâce aux voix de l’opposition : pensez à la loi Veil…
[Pour la police, j’ai un doute. C’est bien le ministre de l’intérieur qui est leur chef non ?]
Oui, mais un « chef » qui ne peut ordonner que dans les limites de la loi. Je vous rappelle qu’un fonctionnaire est tenu de désobéir « un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre l’ordre public ».
[« Vous voulez dire que les présidents de VW et leurs conseillers ne savent pas faire un calcul de risque ? » J’ignore la motivation du PDG de l’époque pour prendre un tel risque face à un gain aussi faible.]
« Aussi faible » ? C’est de l’ironie, je suppose… les gains que VW a tiré de la falsification des tests sont énormes.
[« Et après vous allez m’expliquer que dans le privé on ne se trompe jamais… » Je n’ai jamais dit que le privé ne se trompe jamais. Simplement que les effets sont normalement moins graves car ils n’ont pas autant de pouvoir.]
Là encore, votre candeur me fascine. Vous croyez vraiment que les PDG d’Apple, Microsoft ou Amazon ont peu de pouvoir ?
[Et en cas de problème, la sanction tombe plus facilement (une entreprise peut faire faillite et disparaitre, un état non) et impacte moins de monde (regardez les effets de la mauvaise gestion en argentine par ex)]
Mais une « sanction » envers qui ? S’il s’agit de celui qui a commis l’erreur, la sanction est la même dans le public que dans le privé : la porte. Et encore : ceux qui prennent la porte dans le privé le font nantis de magnifiques parachutes dorés et autres stock-options. Demandez à Fernando de la Rua, le président argentin viré lors de la crise de 2001, ce qu’il a emporté dans son escarcelle. Rares sont les patrons qui, ayant échoué, ont été assassinés par leurs actionnaires. Chez les présidents, c’est beaucoup plus courant…
[Vous reconnaissez vous-même que la Russie en 1913 n’était pas si arriéré que ça. Ils etaient en phase de rattrapage]
Absolument pas. Le fait d’être la 6ème économie du monde n’implique nullement qu’on soit avancé. C’est simplement une question de taille. En 1913, l’Empire Russe est – de loin – le pays le plus étendu du monde et un des plus peuplés. Dans un monde où l’agriculture représentait encore une part très importante du PIB, cela suffit à lui donner une place parmi les plus grosses économies. Mais si vous voulez estimer le « dégré d’avancement », c’est plutôt le PIB par habitant qu’il faudrait regarder. Et encore, dans notre monde présent vous trouvez en tête des pays comme l’Arabie Saoudite, qui n’est pas particulièrement « avancée ».
[Les goulags participaient au succès du plan. Ils avaient des quotas et des objectifs de production.]
Ils participaient peut-être aux résultats, mais difficilement au succès. Il est bien connu que la main d’œuvre concentrationnaire a une très faible productivité. Je veux bien qu’on cherche tous les arguments possibles et imaginables pour descendre la planification soviétique, mais vouloir y mêler le goulag est une absurdité.
[La famine en Ukraine a plusieurs causes. La priorité pour l’industrie lourde, les quotas que les campagnes devaient livrer aux villes (personne n’osait dire qu’on ne respectait pas le plan et qu’au lieu de 100 tonnes on avait produit 50. Du coup quand il fallait livrer 50 tonnes il ne restait plus rien pour manger).]
J’ai toujours aussi mal à voir en quoi cela a pu contribuer au succès des plans quinquennaux. Vous noterez aussi que le deuxième plan quinquennal a lui aussi été un succès, alors que la famine n’était plus qu’un souvenir.
[« Excusez-moi, mais quelles ont été les « sanctions » appliquées à ceux qui ont fait les mauvais choix qui ont conduit Apple au bord de la faillite ? » Le patron de l’époque a pris la porte]
Dans quelles conditions ? A-t-il été s’inscrire à l’ANPE ? A-t-il été réduit à vivre dans un HLM ? Vous savez comme moi que quand les grands patrons « prennent la porte », ils le font dans des conditions financières somptueuses, d’ailleurs fort peu corrélées à la santé des entreprises qu’ils ont dirigé. Vous voulez quelques exemples ?
[et les actionnaires de l’époque ont perdu beaucoup d’argent (s ils ont conservé leur titres ils se sont refait mais toutes les entreprises n’arrivent pas à redresser la barre). Si vous avez acheté des actions de WeWork ou d Hertz vous y avez laissé des plumes]
En d’autres termes, ce sont les actionnaires qui ont payé, exactement comme dans le public ou ce sont les citoyens-actionnaires qui payent. Finalement, les « sanctions » sont donc à peu près les mêmes…
[Certes non. Et je trouve scandaleux que certains partent avec un gros cheque alors qu ils ont planté leur société (ex le PDG de Boeing ou d alcatel). Mais dans le cas de Messier, vous remarquerez qu il n a plus rien eut de majeur à diriger apres Vivendi. Je connais pas la personne mais je suppose que son ego a du en prendre un coup]
Si c’est ça la sanction, vous pouvez dire que Giscard a été lourdement sanctionné : lui non plus n’a rien eu de majeur à diriger…
[Un état aillant bien plus de pouvoir qu’ une entreprise, les dérives vont bien plus de dégâts et je suis persuadé (mais ça c’est de la croyance je vous l’accorde) que l’état n’est pas le meilleur juge pour décider ce qui doit être produit ou non ou même pour diriger une société (qui croit sincèrement que Ségolène royal pouvait être numéro 2 d une banque ?).]
Aurait-elle fait moins bien que Kenneth Lay, par exemple ? Je ne le pense pas.
De même le fameux plan de relance post covid a été adopte malgré l’opposition des états « frugaux » (Autriche, hollande …)
Lesquels “états frugaux” ont quand même obtenu que leur participation au budget de l’UE soit abaissée, au point que cela compense leur quote-part sur le financement du plan de relance. Le montant des subventions directes aux états est d’ailleurs ridicule à 360 milliards (le reste -400 milliards- est constitué d’emprunts des états eux-mêmes).
De fait, la France devrait percevoir 40 milliards d’Euros… et payer 72 milliards (20%) ! Les Britanniques doivent bien rigoler.
Les contribuables français et allemands vont financer l’économie italienne et l’économie espagnole. Merci Macron !
@ Gugus69
[Lesquels “états frugaux” ont quand même obtenu que leur participation au budget de l’UE soit abaissée, au point que cela compense leur quote-part sur le financement du plan de relance.]
Vous insinuez que tout ça c’est de la poudre aux yeux ? Shocking!
Bien sur, l’UE est un immense théâtre ou tout le monde fait semblant d’être un “bon européen” alors qu’en coulisses c’est chacun pour soi. Et c’est logique: dans un contexte ou la solidarité inconditionnelle et impersonnelle entre citoyens européens n’existe pas, pourquoi un dirigeant élu par les citoyens néerlandais irait porter atteinte à leurs intérêts pour faire plaisir aux grecs ou aux italiens ?
[Le montant des subventions directes aux états est d’ailleurs ridicule à 360 milliards (le reste -400 milliards- est constitué d’emprunts des états eux-mêmes).]
Ridicule… comme vous y allez. C’est tout de même la moitié du plan en question!
[De fait, la France devrait percevoir 40 milliards d’Euros… et payer 72 milliards (20%) !]
C’est le prix à payer pour être des “bons européens”… et de toute façon, ce sera à payer plus tard, quand les princes qui nous gouvernent aujourd’hui ne seront plus…
[Les contribuables français et allemands vont financer l’économie italienne et l’économie espagnole. Merci Macron !]
Eh oui… il ne faut pas oublier que l’effondrement des économies italienne ou espagnole, ce serait une perte considérable pour nos bourgeois qui ont beaucoup investi dans ces pays. Macron sait très bien ce qu’il fait…
—Ridicule… comme vous y allez. C’est tout de même la moitié du plan en question!—
Souvenez-vous qu’au départ, il était question de 1000 milliards de subventions directes de l’UE : on en est bien loin. Les “États frugaux” ont bien fait de traîner les pieds.
Par ailleurs, 360 milliards d’euros partagés entre 27 pays membres… Qui devront les financer collectivement eux-mêmes par la participation de chacun des états !
Même les mieux lotis (Italie, Espagne…) ne percevront net que quelques dizaines de milliards. On est bien loin des besoins…
Quant à nous Français, nous perdons plusieurs dizaines de milliards dans l’affaire, on l’a vu.
Si ce plan avait pour objectif de relever l’économie “européenne” mise à mal par la crise du coronavirus, oui, je maintiens qu’il est ridicule.
Mais ce n’était pas l’objectif.
Dès le début de la crise, l’UE est apparue à la ramasse, au point que la question de l’italexit s’est posée de façon très crue.
Rappelez-vous les avions-cargos russes et chinois chargés de matériel médical, se posant sur les aéroports italiens.
Le plan qu’on nous vend n’a pas d’autre but que de sauver l’Union européenne.
Alors évidemment, les “rédactions” nous claironnent que la France va percevoir 40 milliards… sans dire qu’ils sortent de nos poches, avec un p’tit supplément pour Rome et Madrid.
@ Gugus69
[Souvenez-vous qu’au départ, il était question de 1000 milliards de subventions directes de l’UE : on en est bien loin. Les “États frugaux” ont bien fait de traîner les pieds.]
On en est grosso modo à la moitié. Ce n’est pas « ridicule ». Ce qui rend ce programme « ridicule » c’est moins son montant que les délais dans lesquels il sera mis en œuvre. La méfiance des uns envers les autres implique des contrôles bureaucratiques exigés par les états frugaux que la machine bruxelloise se fera un plaisir de compliquer à l’infini. Il y a fort à parier que les procédures pour mobiliser effectivement les fonds seront longues. Or, dans une crise, l’essentiel c’est d’agir vite. Donner de l’argent une fois que les entreprises auront fermé et les emplois auront été supprimés risque d’avoir un effet très limité.
[Quant à nous Français, nous perdons plusieurs dizaines de milliards dans l’affaire, on l’a vu.
Si ce plan avait pour objectif de relever l’économie “européenne” mise à mal par la crise du coronavirus, oui, je maintiens qu’il est ridicule.]
Oui, mais moins à cause des montants qu’à cause de la manière dont il fonctionera.
[Mais ce n’était pas l’objectif. Dès le début de la crise, l’UE est apparue à la ramasse, au point que la question de l’italexit s’est posée de façon très crue.]
Bien entendu. La fonction de ce plan est avant tout publicitaire : faire croire au bon peuple que l’UE veille à notre sécurité et à notre bonheur et vient à notre secours. C’est pourquoi tout le monde recevra de l’argent (sonnez hautbois, résonnez trompettes) et ensuite devra payer (et là, on sera beaucoup plus discret et puis ce sera dans longtemps).
De ce point de vue il faut souligner les tirs de barrage sur le mode « on ne peut rien reprocher à l’UE, elle n’est pas compétente en matière de santé ». Certes, elle n’est pas compétente sur l’organisation des soins – et c’est pourquoi le système ne marche pas si mal – mais elle est tout à fait compétente en matière de concurrence. Et si les masques sont fabriqués en Chine et pas chez nous, ce n’est pas une question de politique sanitaire, mais une question de politique de concurrence…
[De ce point de vue il faut souligner les tirs de barrage sur le mode « on ne peut rien reprocher à l’UE, elle n’est pas compétente en matière de santé ». Certes, elle n’est pas compétente sur l’organisation des soins – et c’est pourquoi le système ne marche pas si mal – mais elle est tout à fait compétente en matière de concurrence. Et si les masques sont fabriqués en Chine et pas chez nous, ce n’est pas une question de politique sanitaire, mais une question de politique de concurrence…]
Il faut d’ailleurs rappeler que selon un eurodéputé, la Commission Européenne a demandé 63 fois à ses Etats membres entre 2011 et 2018 de réduire les dépenses de santé et de mettre en concurrence la production des soins. C’est toujours facile ensuite de dire que ce sont les Etats membres qui décident souverainement lorsqu’ils sont soumis à cette pression permanente (et qu’ils acceptent globalement par ailleurs, mais c’est un autre sujet).
@ Patriote Albert
[Il faut d’ailleurs rappeler que selon un eurodéputé, la Commission Européenne a demandé 63 fois à ses Etats membres entre 2011 et 2018 de réduire les dépenses de santé et de mettre en concurrence la production des soins.]
Exactement. Par le biais de la politique de concurrence et le contrôle des budgets, les décisions des institutions européennes pèsent sur tous les domaines de l’action publique. Invoquer comme excuse le fait « qu’on n’est pas compétent dans tel ou tel domaine » est donc un mensonge éhonté. La Commission n’a pas de pouvoir pour imposer un protocole de soins, mais a le pouvoir d’empêcher son application en poussant à la baisse des dépenses de santé.
@cdg
[Un ministre a decrété un jour qu il fallait 80 % d une classe d age ayant le bac (à l epoque on devait etre a 30 % si mes souvenirs sont bon). On a maintenant 90 % de bachelier. L objectif est il remplit ?
Sur le papier oui. En fait non, car on a juste baissé le niveau de telle façon que quasiment tous les candidats y arrivent
Si vous avez un jour une plannification francaise vous aurez exactement le meme probleme.
Soumis a une exigence d en haut, les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple pour eux d etre conforme sur le papier (ici 80 % de bacheliers) meme si ca n a aucun interet global voire c est contre productif (ici le niveau de la population baisse car on a dû baisser les exigences pour que tous y arrivent).]
Sans vouloir vous offenser ou vous critiquer, il me semble que vous mélangez dans ce paragraphe précis pas mal de choses :
– Le fait d’utiliser un indicateur comme objectif à atteindre est stupide. Dans tous les cas, qu’il s’agisse de fixer à la police des objectifs de nombre d’affaires (qui viennent engorger les tribunaux avec des petites affaires, en abandonnant les grosses enquêtes), de fixer comme objectif à des salariés d’avoir un “0 accident du travail sur leur chantier” (ça les incite à ne pas déclarer leurs petits accidents), de fixer à des profs d’avoir x% de leur classe qui a le bac (ils feront du bachotage pur et dur au détriment de la qualité de l’enseignement), ou dans le privé de fixer des indicateurs de nombre de réunions techniques, nombre de revue de projet, etc. (les réunions se feront, même si elles n’apportent rien).
Et ça fonctionne aussi avec les enfants. Si vous fixez comme objectif à votre enfant d’avoir une bonne note, il se débrouillera pour bachoter, tricher, modifier les feuilles de notes, etc. et tout faire pour atteindre l’objectif sans avoir à travailler. Et les notes ne signifieront plus grand chose quant à son niveau.
Pour le formuler autrement, un indicateur cesse d’en être un dès qu’il devient un objectif.
– Le rôle du Commissariat n’a jamais été de définir des indicateurs (peut être que ça l’a un peu été en URSS à l’époque Stalinienne ; ceci a été pas mal caricaturé dans l’occident, et je ne sais pas si c’est authentique). Son rôle est de déterminer les axes de développement. Par exemple :
– dire que, face au choc pétrolier, il faut développer des centrales nucléaires,
– qu’il faut développer des TGV pour éviter de trop reposer sur l’avion,
– qu’il faut (dans les années 1970) miser sur l’électronique et l’informatique, ainsi que les capacités de calcul numérique, car c’est un pilier pour l’avenir de l’industrie.
Sur cette base, le ministère de l’industrie pouvait faire ses choix.
En matière d’aménagement du territoire, il y a eu, outre les TGV, aussi les autoroutes, les travaux d’électrification, etc.
Si aujourd’hui, l’Etat décidait que les choix stratégiques pour le pays, devraient être, au pif :
– créer un réseau de transport et de distribution de chaleur, associé à des réacteurs nucléaires de cogénération,
– créer de nouvelles lignes de transport voyageur entre les agglomérations, pour les transports province-province, afin d’accélérer les transports et de rentre le train plus concurrentiel, tout en libérant des créneaux sur le ferroviaire actuel pour faciliter le fret ferroviaire,
– Développer la filière hydrogène / électrique / autre pour permettre de remplacer le pétrole pour les voitures,
– Développer dans le numérique les métiers de l’intelligence artificielle / la filière logiciel open source, etc.
Il faudrait des gens pour mettre ça en musique plus précisément. Et derrière, il faudrait que ça se traduise en investissements publics dans le développement de ces filières. Et cela ne peut pas se traduire par de simples effets d’affichage, si le plan est suffisamment concret.
Et c’est là que ça pêche, puisque c’est interdit par l’UE de faire de tels investissements publics. Donc même s’il y avait un vrai travail de Plan réalisé, celui ne pourrait rester que du papier. Et on peut en déduire que le “Plan” ne sera qu’un travail de communication et/ou de fixation d’objectif comme ceux que vous évoquez.
Mais ce n’est pas pour autant que ça ne pourrait pas avoir de sens.
@ cdg
[Si vous avez un jour une planification française vous aurez exactement le même problème.
Soumis à une exigence d’en haut, les gens/organisations vont trouver le moyen le plus simple pour eux d’être conforme sur le papier (ici 80 % de bacheliers) même si ça n’a aucun intérêt global voire c’est contreproductif (ici le niveau de la population baisse car on a dû baisser les exigences pour que tous y arrivent).]
Le raisonnement que vous développez condamne non seulement la planification, mais toute tentative de pilotage d’une organisation par les objectifs, puisque vous postulez que dès lors qu’on lui fixe un objectif, l’organisation réagira en recherchant à le contourner par une « conformité sur le papier » même si « cela n’a aucun intérêt, voire c’est contre-productif ». Et pourtant, on voit bien que des organisations très efficaces fonctionnent sur la base d’objectifs, à commencer par l’ensemble du secteur privé. Comment expliquer cette contradiction ?
Pour ma part, je pense que vous faites deux erreurs. La première, c’est qu’il est possible de contenir le phénomène que vous décrivez en formulant les objectifs correctement et en définissant des indicateurs qui reflètent la globalité de l’action de l’organisation, au lieu de se concentrer sur un aspect particulier en négligeant les autres.
Mais la seconde erreur, et je pense la plus sérieuse, est que vous négligez le fait que l’être humain n’est pas simplement « l’homo economicus » des libéraux, qu’il est capable de faire des choses qui dépassent très largement son petit intérêt individuel. Des motivations telles que l’honneur, le regard des pairs, le sentiment du travail bien fait ou le patriotisme son souvent des incitations bien plus puissant que la simple « conformité ». Lorsque les objectifs de l’organisation sont internalisés par ses membres, le mécanisme de contournement que vous décrivez devient marginal. Le cas des plans quinquennaux soviétiques est de ce point de vue éclairant : les premiers plans quinquennaux, lancés à un moment ou le pays était en grande difficulté, entouré d’ennemis prêts à lui faire la peau et où il y avait une conscience claire de la nécessité d’une reconstruction rapide ont été d’incontestables succès. C’est d’ailleurs ce succès qui a alimenté les mouvements « planistes » partout dans le monde, que ce soit dans la France des années 1930 ou dans la République chinoise de Sun-Yat-Sen.
Le projet de conduire 80% d’une classe d’âge au niveau du bac a été contourné parce qu’il a été proposé à une société et un corps enseignant qui n’a pas fait sien – c’est peu que de le dire – cet objectif. Mais lorsqu’un siècle plus tôt l’Instruction publique s’est fixé comme objectif qu’il y ait une école dans chaque village et un lycée dans chaque préfecture, ça a marché, parce que la société en général et le métier enseignant en particulier ont internalisé cet objectif.
[– Le fait d’utiliser un indicateur comme objectif à atteindre est stupide. Dans tous les cas, qu’il s’agisse de fixer à la police des objectifs de nombre d’affaires (qui viennent engorger les tribunaux avec des petites affaires, en abandonnant les grosses enquêtes), de fixer comme objectif à des salariés d’avoir un “0 accident du travail sur leur chantier” (ça les incite à ne pas déclarer leurs petits accidents), de fixer à des profs d’avoir x% de leur classe qui a le bac (ils feront du bachotage pur et dur au détriment de la qualité de l’enseignement), ou dans le privé de fixer des indicateurs de nombre de réunions techniques, nombre de revue de projet, etc. (les réunions se feront, même si elles n’apportent rien).]
Ce qui est « stupide » n’est pas de fixer un indicateur comme objectif, mais de choisir des indicateurs qui ne reflètent qu’un aspect secondaire de l’activité, ce qui pousse les acteurs à se concentrer sur cet aspect en négligeant tous les autres. Le problème souvent est qu’on prétend réduire la complexité du réel à des indicateurs simples.
[Et ça fonctionne aussi avec les enfants. Si vous fixez comme objectif à votre enfant d’avoir une bonne note, il se débrouillera pour bachoter, tricher, modifier les feuilles de notes, etc. et tout faire pour atteindre l’objectif sans avoir à travailler. Et les notes ne signifieront plus grand chose quant à son niveau.]
Fixer des objectifs à quelqu’un conduirait selon vous nécessairement au désastre, puisque les individus auraient recours aux pires méthodes pour contourner l’évaluation, et celle-ci n’aurait donc pas grand sens. Mais si l’on suit ce raisonnement, TOUT pilotage par les objectifs devient impossible. A quoi cela sert de fixer des objectifs à un écolier, un étudiant, un fonctionnaire, un salarié du privé s’il est impossible de savoir si l’objectif a été ou non atteint sur le fond ? Et pourtant, au risque de me répéter, le pilotage par objectifs est vieux comme le monde, et des organisations extraordinairement efficaces ont utilisé au cours de l’histoire ce fonctionnement. Comment expliquez-vous cette contradiction ?
[– Le rôle du Commissariat n’a jamais été de définir des indicateurs (peut être que ça l’a un peu été en URSS à l’époque Stalinienne ; ceci a été pas mal caricaturé dans l’occident, et je ne sais pas si c’est authentique). Son rôle est de déterminer les axes de développement. Par exemple : (…) Sur cette base, le ministère de l’industrie pouvait faire ses choix.]
Non. Du temps ou les plans existaient, ils étaient bien plus prescriptifs que cela, avec des objectifs chiffrés pour les différents secteurs. Prenez par exemple le Ier plan (dit « plan Monnet ») : on peut lire par exemple que « l’exécution du programme des Houillères portera l’extraction nationale à 55,5 MT en 1947 et à 65 en 1950 » (page 70) et que pour l’électricité la réalisation du programme « portera la production nationale à 26 milliards de kWh en 1947 et à 37 en 1950 ». Bien entendu, ce n’est pas le commissaire au plan qui prenait la décision, son rôle était de préparer une proposition soumise à la décision du gouvernement.
[Si aujourd’hui, l’Etat décidait que les choix stratégiques pour le pays, devraient être, au pif : (…) Il faudrait des gens pour mettre ça en musique plus précisément. Et derrière, il faudrait que ça se traduise en investissements publics dans le développement de ces filières. Et cela ne peut pas se traduire par de simples effets d’affichage, si le plan est suffisamment concret.]
Tant qu’il n’y aura pas des objectifs chiffrés dont les citoyens pourront ou non constater l’atteinte, on sera dans l’incantation. Souvenez-vous de la promesse « d’inversion de la courbe du chômage à la fin de mon mandat ». C’était un objectif précis, clair, constatable et c’est pour cela qu’il a fait tellement mal à Hollande. Par contre, dire « il faut développer les énergies renouvelables » est sans risque, parce qu’il n’y a pas de test quantitatif derrière, et « 50% de nucléaire en 2025 (ou 2035, ou 2145) » est sans risque, puisque celui qui énonce l’objectif ne risque pas d’être là pour constater qu’il n’est pas atteint.
Descartes avait raison : il n’y a pas de science sans mesure…
[Le raisonnement que vous développez condamne non seulement la planification, mais toute tentative de pilotage d’une organisation par les objectifs, puisque vous postulez que dès lors qu’on lui fixe un objectif, l’organisation réagira en recherchant à le contourner par une « conformité sur le papier » même si « cela n’a aucun intérêt, voire c’est contre-productif ». Et pourtant, on voit bien que des organisations très efficaces fonctionnent sur la base d’objectifs, à commencer par l’ensemble du secteur privé. Comment expliquer cette contradiction ?]
Il faut simplement que l’objectif [chiffré] soit quelque chose qui corresponde précisément à l’objectif [social] que l’on cherche à atteindre. Et qu’il n’y ait pas de possibilité de louvoyer autour.
Ainsi, dans le secteur privé, le chiffre d’affaires et la marge bénéficiaire sont exactement les objectifs fournis par l’actionnaire. Et ils ne peuvent pas être contournés. Cela fonctionne.
Fixer des objectifs chiffrés à des enseignants ou des policiers me semble nettement plus difficile. Pour autant, il existe des indicateurs qui permettent de se rendre compte de la qualité et de l’efficacité du travail. Mais les indicateurs sont une facette de l’objectif qui est un objectif social plus abstrait, ne se limitant pas à l’indicateur.
[Mais la seconde erreur, et je pense la plus sérieuse, est que vous négligez le fait que l’être humain n’est pas simplement « l’homo economicus » des libéraux, qu’il est capable de faire des choses qui dépassent très largement son petit intérêt individuel. Des motivations telles que l’honneur, le regard des pairs, le sentiment du travail bien fait ou le patriotisme son souvent des incitations bien plus puissant que la simple « conformité ».]
Mais je suis totalement d’accord ! Je souhaitais par mon propos justement montrer que la confiance à accorder aux employés / fonctionnaires est souvent bien plus productive qu’un objectif (chiffré) qui ne pourrait à lui seul résumer complètement l’objectif social de l’emploi.
Mais même quand l’objectif (social) est bien internalisé, le fait d’y ajouter un objectif (chiffré) peut amener à modifier les comportements dans un sens défavorable à l’objectif (social).
[Ce qui est « stupide » n’est pas de fixer un indicateur comme objectif, mais de choisir des indicateurs qui ne reflètent qu’un aspect secondaire de l’activité, ce qui pousse les acteurs à se concentrer sur cet aspect en négligeant tous les autres. Le problème souvent est qu’on prétend réduire la complexité du réel à des indicateurs simples.]
Les indicateurs qui ne reflètent qu’un aspect secondaire de l’activité peuvent être très utiles pour comprendre ce qui se passe dans une société. Mais naturellement, les transformer en objectifs n’est pas sain. Je souscris totalement à votre dernière phrase.
[Fixer des objectifs à quelqu’un conduirait selon vous nécessairement au désastre, puisque les individus auraient recours aux pires méthodes pour contourner l’évaluation, et celle-ci n’aurait donc pas grand sens. Mais si l’on suit ce raisonnement, TOUT pilotage par les objectifs devient impossible.]
Effectivement, j’ai tendance à penser qu’une évaluation subjective par les supérieurs (qui se basent sur leurs ressenti, sur des faisceaux d’indicateurs, etc.) et une confiance dans les salariés / fonctionnaire pour faire ce qui leur semble être le plus approprié est bien souvent plus efficace et intelligent qu’un pilotage par des objectifs chiffrés.
Si les parents considèrent que le bulletin de note sert à leur pointer les domaines dans lesquels il faut s’intéresser à ce que fait leur enfant, c’est une utilisation intelligente du bulletin…
@ Vincent
[Il faut simplement que l’objectif [chiffré] soit quelque chose qui corresponde précisément à l’objectif [social] que l’on cherche à atteindre. Et qu’il n’y ait pas de possibilité de louvoyer autour.]
Vous me tenez d’abord un raisonnement selon lequel la planification est condamnée puisqu’elle conduit nécessairement à contourner les objectifs par une conformité « sur le papier », et maintenant vous me dites qu’il est parfaitement possible de formuler les objectifs de telle manière qu’ils ne puissent être contournés ? Faudrait vous décider…
[Ainsi, dans le secteur privé, le chiffre d’affaires et la marge bénéficiaire sont exactement les objectifs fournis par l’actionnaire. Et ils ne peuvent pas être contournés. Cela fonctionne.]
Vous trouvez ? Il paraît qu’Enron « sur le papier » réalisait parfaitement ces objectifs. Et puis, on a découvert un jour qu’avec des montages plus ou moins compliqués on arrivait à assurer une conformité sur le papier… jusqu’au jour ou l’on a découvert le pot aux roses. Plus banalement, je peux vous assurer qu’on truande beaucoup les chiffres dans le privé, par exemple avec la complicité de clients qui passent des « options » qui sont comptées comme des commandes dans les comptes de l’année N mais qui seront annulées au cours de l’année N+1… En fait, c’est dans la fonction publique ou l’on truande le moins : la garantie de l’emploi et l’avancement à l’ancienneté n’encouragent pas vraiment à embellir les chiffres.
[Fixer des objectifs chiffrés à des enseignants ou des policiers me semble nettement plus difficile.]
Pourquoi ? Les taux de réussite à un examen national ou ceux de la criminalité sont aussi difficilement – ou aussi facilement – contournables qu’un objectif de chiffre d’affaires ou de marge bénéficiaire.
[« Mais la seconde erreur, et je pense la plus sérieuse, est que vous négligez le fait que l’être humain n’est pas simplement « l’homo economicus » des libéraux, qu’il est capable de faire des choses qui dépassent très largement son petit intérêt individuel. Des motivations telles que l’honneur, le regard des pairs, le sentiment du travail bien fait ou le patriotisme son souvent des incitations bien plus puissant que la simple « conformité ». » Mais je suis totalement d’accord ! Je souhaitais par mon propos justement montrer que la confiance à accorder aux employés / fonctionnaires est souvent bien plus productive qu’un objectif (chiffré) qui ne pourrait à lui seul résumer complètement l’objectif social de l’emploi.]
Comme toujours, il faut se méfier des extrêmes. Avoir des objectifs chiffrés permet de donner aux agents une information sur les priorités de l’organisation et, s’ils sont formulés comme un défi, peuvent être un facteur de mobilisation. Faire des objectifs une obsession de l’organisation et l’alpha et l’oméga de l’évaluation des agents a l’effet inverse : les agents finissent par se concentrer sur l’atteinte formelle des objectifs et oublient le but de leur travail. Il y a donc un juste milieu à trouver : il ne faut pas oublier que l’évaluation par objectifs regarde les RESULTATS de l’agent, mais ne mesure pas ses EFFORTS.
[Les indicateurs qui ne reflètent qu’un aspect secondaire de l’activité peuvent être très utiles pour comprendre ce qui se passe dans une société. Mais naturellement, les transformer en objectifs n’est pas sain. Je souscris totalement à votre dernière phrase.]
Tout à fait : il ne faut pas confondre les instruments d’évaluation des processus et les instruments d’évaluation des gens. C’est cette confusion qui rend souvent les indicateurs détestables aux gens.
[Effectivement, j’ai tendance à penser qu’une évaluation subjective par les supérieurs (qui se basent sur leurs ressenti, sur des faisceaux d’indicateurs, etc.) et une confiance dans les salariés / fonctionnaire pour faire ce qui leur semble être le plus approprié est bien souvent plus efficace et intelligent qu’un pilotage par des objectifs chiffrés.]
Oui et non. L’évaluation « subjective » butte sur le fait qu’elle suppose que l’agent puisse lire dans les pensées de son évaluateur pour connaître ses attentes. Formuler des objectifs mesurables est donc une nécessité si l’on veut échapper à l’arbitraire dans l’évaluation.
[Si les parents considèrent que le bulletin de note sert à leur pointer les domaines dans lesquels il faut s’intéresser à ce que fait leur enfant, c’est une utilisation intelligente du bulletin…]
Sauf que dans le cas du bulletin, les objectifs sont clairs dès le départ !
Il y a un autre problème concernant la mise en place d’un CGP, il faut aussi des hommes qui sont acquis aux idées de politiques de planifications. Tant bien même nous serions en dehors de l’Union Européenne, nous aurons toujours des hommes politiques qui ne voient que le court terme (le fait que nous soyons passés d’un septennat à un quinquennat a aussi aggravé les missions du commissariat au plan). Ajoutez cela aux lois de décentralisations qui ont affaibli l’Etat. Par ailleurs pour les hauts-fonctionnaires on peut se demander si ils sont encore des planistes ?
@ Glarrious
[Il y a un autre problème concernant la mise en place d’un CGP, il faut aussi des hommes qui sont acquis aux idées de politiques de planifications. Tant bien même nous serions en dehors de l’Union Européenne, nous aurons toujours des hommes politiques qui ne voient que le court terme]
J’ai tendance à penser que la fonction crée l’organe. Dès lors que l’Etat a perdu ses leviers d’action, vous trouverez peu de politiciens pour réfléchir à ce qu’on pourrait en faire si on les avait encore. La concentration sur le court terme tient aussi à cela : dès lors qu’on a confié la régulation de la société au marché, quelle est l’avantage qu’un homme politique pourrait retirer d’une réflexion à long terme ?
Si demain nous récupérions notre monnaie, nos hommes politiques seraient dans l’obligation de définir une politique monétaire, sous peine de passer pour des incompétents. Si demain l’Etat reprenait le monopole des télécoms, il faudrait définir une politique d’accès à Internet ou répondre devant le peuple des dysfonctionnements. Si demain l’Etat reprenait le contrôle du crédit, serait nécessaire de définir une politique d’investissements et prendre la responsabilité. Mais puisque c’est le privé ou les instances européennes qui s’en occupent, à quoi bon investir du temps et de l’effort qui ne vous rapporteront rien ?
[Par ailleurs pour les hauts-fonctionnaires on peut se demander s’ils sont encore des planistes ?]
Il y a toujours dans notre haute fonction publique pas mal de planistes. Contrairement aux politiques, les hauts fonctionnaires ont conscience d’être là pour longtemps et le jugement de leurs pairs peut être très sévère pour celui qui laisse derrière lui des bombes à retardement. Cela étant dit, trente ans de sélection ou l’on a promu les plus dociles et les moins réfractaires aux logiques néolibérales a laissé des traces…
[Contrairement aux politiques, les hauts fonctionnaires ont conscience d’être là pour longtemps et le jugement de leurs pairs peut être très sévère pour celui qui laisse derrière lui des bombes à retardement.]
Je n’en ferais pas de généralités, mais j’ai remarqué dans plusieurs institutions publiques, avec essentiellement des fonctionnaires d’Etat, les attitudes suivantes, malheureusement :
– Pousser les projets à la réalisation, en fermant plus ou moins les yeux sur des difficultés qui pourraient survenir. Et qui retomberont sur leur successeurs (exemple : quand on lance un chantier en assumant de faire l’hypothèse qu’il n’y a pas de sols pollués, alors qu’on sait pertinemment qu’il y en a partout autour…). Dans quelle mesure est-ce un moyen assumé d’afficher un coût initial plus faible pour faciliter la décision, sachant que, quand le vin est tiré, il faut le boire. Dans quelle mesure peut on considérer qu’il s’agit d’une bombe laissée derrière soi ?
– Dans une institution où les gens restaient longtemps en place, refuser de prendre des décisions en s’abritant derrière tous les parapluies possibles, quitte à faire naitre des contentieux qui coûteront finalement plus cher qu’un accord négocié honnêtement.
@ Vincent
[– Pousser les projets à la réalisation, en fermant plus ou moins les yeux sur des difficultés qui pourraient survenir. Et qui retomberont sur leur successeurs (exemple : quand on lance un chantier en assumant de faire l’hypothèse qu’il n’y a pas de sols pollués, alors qu’on sait pertinemment qu’il y en a partout autour…). Dans quelle mesure est-ce un moyen assumé d’afficher un coût initial plus faible pour faciliter la décision, sachant que, quand le vin est tiré, il faut le boire. Dans quelle mesure peut on considérer qu’il s’agit d’une bombe laissée derrière soi ?]
C’est tout le contraire : c’est une technique qui permet de réaliser des projets auxquels les politiques n’auraient jamais consenti s’ils avaient connu dès le départ les véritables difficultés. Mais le haut fonctionnaire qui lance le projet ne laisse pas à son successeur une « bombe à retardement », au contraire, il lui laisse un levier qui lui permettra de finir le projet – et d’emporter les lauriers. A tout prendre, que préfériez-vous ? Prendre la suite d’un dirigeant qui a amorcé le projet de telle façon qu’il ne puisse plus être arrêté – même s’il laisse des difficultés à résoudre derrière lui, ou prendre la suite d’un dirigeant dont le projet a été rejeté ?
[– Dans une institution où les gens restaient longtemps en place, refuser de prendre des décisions en s’abritant derrière tous les parapluies possibles, quitte à faire naitre des contentieux qui coûteront finalement plus cher qu’un accord négocié honnêtement.]
Ce genre de comportements sont plus observables chez des ministres (qui ne restent jamais très longtemps en place et dont les non-décisions seront payées par leurs successeurs) que chez des hauts fonctionnaires qui seront toujours là lorsque les bombes à retardement explosent, et qui seront pointés du doigt par leurs pairs…
Bonsoir,
Merci beaucoup pour votre billet.
La création de ce poste de “Haut commissaire” et de facto la nomination de cette personnalité politique, étaient lourds d’équivoques. Comme vous l’avez expliqué, il est évident que la Planification de 1946, est aujourd’hui impossible à mettre en œuvre.
Et vous le précisez d’ailleurs = Il n’y a pas besoin d’aller très loin en analyse juridique (ou en analyse tout court) = le droit du marché intérieur proscrit purement et simplement les restrictions quantitatives aux échanges et les mesures d’effet équivalent. Sauf exception limitativement exhaustives (désolé pour le truisme !). Toute personne pourrait ainsi invoquer les dispositions / textes communautaires devant n’importe quel juge de droit commun pour “casser” un acte de l’administration mettant en œuvre une planification type 1946.
A moins que la jurisprudence de la CJUE devienne tout-à-coup pro-Etat-nation et pro-interventionniste….Nouvelles compétences implicites ou nouveau raisonnement téléologique ? Ce serait une gageure si intéressante à observer.
Du coup, il ne reste pour ce “Haut commissariat” que le motif invocatoire et la (mauvaise) raison politicienne. Vous le précisez très bien dans votre billet. C’est aussi intéressant d’observer encore une fois à quel point LEREM brandit les “habits” de la souveraineté nationale, du CNR et du Gaullisme; invocations si éloignées de leur “ADN” politique. Vous appeliez cela dans un anciens billet par une sorte de “syncrétisme” dans la sphère politique. Par exemple un libéral marxien; ou encore une personnalité de gauche appelant à la libre entreprise ou de “l’extrème-centre” citant De Gaulle dans le texte. Un peu tristounet quand même.
Merci et bonne soirée.
@ Capitaine Félix
[A moins que la jurisprudence de la CJUE devienne tout-à-coup pro-Etat-nation et pro-interventionniste… Nouvelles compétences implicites ou nouveau raisonnement téléologique ? Ce serait une gageure si intéressante à observer.]
Je doute que la jurisprudence de la CJUE évolue dans ce sens. D’une part, parce que la Cour est d’abord là pour appliquer les traités, et qu’il est assez difficile d’interpréter les traités dans ce sens-là. Dans les secteurs livrés à la concurrence communautaire, toute logique de planification est interdite. Et les secteurs ou cette concurrence ne se manifeste pas sont réduites pratiquement au régalien… On voit donc des « plans » dans le domaine de la police ou celui de la justice, dans celui de la fiscalité ou de la réduction du nombre de fonctionnaires. Mais difficilement dans le domaine économique.
[Du coup, il ne reste pour ce “Haut commissariat” que le motif invocatoire et la (mauvaise) raison politicienne.]
Pour ce « haut-commissaire », vous voulez dire. Parce que, justement, on institue un « haut-commissaire » et non un « haut-commissariat ». A mon sens, ce glissement est en lui-même révélateur. En 1946, on faisait des textes pour créer un « commissaire général au plan », un « commissariat à l’énergie atomique » ou un « commissariat au ravitaillement ». Ces textes créaient une INSTITUTION, et ils évoquaient à titre secondaire un « haut-commissaire » ou un « commissaire général » censé les diriger. En 2020, c’est l’inverse : on crée le « haut-commissaire » sans lui donner un « haut-commissariat ».
[Vous le précisez très bien dans votre billet. C’est aussi intéressant d’observer encore une fois à quel point LEREM brandit les “habits” de la souveraineté nationale, du CNR et du Gaullisme; invocations si éloignées de leur “ADN” politique.]
Oui. Il est surtout révélateur que 70 ans plus tard, la France n’ait rien produit de nouveau comme institutions qui puissent les remplacer comme références. Le programme commun de gouvernement de 1974 ne cède en rien comme effort intellectuel au programme du CNR, et pourtant personne, même à gauche, ne le mentionne. Quand Michel Onfray crée une revue, elle s’appelle « Front Populaire » et non pas « union de la gauche ». Regardez le nom des fondations des partis politiques : c’est Jean Jaurès pour le PS, Gabriel Péri pour le PCF, De Gaulle pour LR… même les eurolâtres fanatiques n’ont pour symboles que Monnet ou Schumann.
On dirait que ces quarante ou cinquante dernières années n’ont rien produit en termes d’institutions, de personnalités, de symboles. Au point qu’il faut revenir aux années 1930 ou 1940 pour trouver des références.
[Vous appeliez cela dans un ancien billet par une sorte de “syncrétisme” dans la sphère politique.]
Tout à fait. Un peu comme les barbares du haut moyen-âge construisaient sur les ruines des édifices romains, la logique de l’égo-politique est incapable de construire des symboles et des références propres, et en est réduite à reprendre des morceaux d’anciennes constructions.
[[A moins que la jurisprudence de la CJUE devienne tout-à-coup pro-Etat-nation et pro-interventionniste… Nouvelles compétences implicites ou nouveau raisonnement téléologique ? Ce serait une gageure si intéressante à observer.]
Je doute que la jurisprudence de la CJUE évolue dans ce sens. D’une part, parce que la Cour est d’abord là pour appliquer les traités, et qu’il est assez difficile d’interpréter les traités dans ce sens-là. Dans les secteurs livrés à la concurrence communautaire, toute logique de planification est interdite.]
1°) Vous avez mentionné un “d’une part” sans qu’il soit suivi par un “d’autre part”. Peut être avez vous omis une partie de vos arguments ?
2°) La CJUE applique les traités quand ça l’arrange. Mais elle n’a eu de cesse de s’autoattribuer des compétences qui ne lui étaient pas données par les traités ; et, en parallèle (comme l’a fait remarquer la cour de Karlsruhe récemment), il lui arrive de prendre des jugements qui sont strictement contraires aux traités européens.
En résumé, la CJUE juge davantage en fonction des intérêts d’une intégration toujours plus grande de l’UE, plus qu’en fonction des traités.
Sur le sujets dont on parlait (ouverture à la concurrence), il n’y a pas de contradiction : il est dans l’intérêt de l’intégration européenne d’interdire les politiques nationales, qui sont par ailleurs explicitement interdites par les traités. Donc l’application stricte des traités (sans avoir besoin d’étendre leur interprétation) va dans le même sens que l’idéologie portée par la CJUE.
[On dirait que ces quarante ou cinquante dernières années n’ont rien produit en termes d’institutions, de personnalités, de symboles. Au point qu’il faut revenir aux années 1930 ou 1940 pour trouver des références.]
J’en vois pourtant 2 :
– Jacques Delors, dont le nom a été repris par des fondations européistes,
– J.P. Chevènement, dont je ne doute pas que le nom sera repris et réutilisé dès qu’il aura trépassé…
@ Vincent
[« Je doute que la jurisprudence de la CJUE évolue dans ce sens. D’une part, parce que la Cour est d’abord là pour appliquer les traités, et qu’il est assez difficile d’interpréter les traités dans ce sens-là. Dans les secteurs livrés à la concurrence communautaire, toute logique de planification est interdite. » 1°) Vous avez mentionné un “d’une part” sans qu’il soit suivi par un “d’autre part”. Peut être avez vous omis une partie de vos arguments ?]
Oui. Le deuxième argument est que la CJUE, comme tout corps constitué, tend à chercher à accroître son pouvoir est ses compétences. Ce qui implique une interprétation des traités de plus en plus restrictive vis-à-vis des pouvoirs des états. A cela s’ajoute le verrouillage des nominations, qui font une large part à la cooptation.
[2°) La CJUE applique les traités quand ça l’arrange. Mais elle n’a eu de cesse de s’autoattribuer des compétences qui ne lui étaient pas données par les traités ; et, en parallèle (comme l’a fait remarquer la cour de Karlsruhe récemment), il lui arrive de prendre des jugements qui sont strictement contraires aux traités européens.]
Les jugements de la CJUE ne peuvent pas être « contraires aux traités » par définition, puisque c’est la CJUE qui est chargée d’interpréter les traités. C’est le problème des cours constitutionnelles : leurs décisions ne peuvent – au moins du point de vue juridique – être contraires à la Constitution, puisque ce sont elles qui disent ce qui est constitutionnel. La CJUE ne peut par définition s’attribuer des compétences qui ne sont pas données par les traités, puisqu’il lui suffit d’affirmer que le traité lui donne telle ou telle compétence pour que cela devienne la vérité juridique…
[En résumé, la CJUE juge davantage en fonction des intérêts d’une intégration toujours plus grande de l’UE, plus qu’en fonction des traités.]
Bien entendu. Mais l’interprétation des traités est l’instrument de cette opération politique. Pour les pays qui sacralisent le droit, comme l’Allemagne, c’est l’arme suprême puisque le juge fait la loi. C’est moins évident dans des pays comme la France, qui donnent au juge un rôle subordonné.
[Sur le sujets dont on parlait (ouverture à la concurrence), il n’y a pas de contradiction : il est dans l’intérêt de l’intégration européenne d’interdire les politiques nationales, qui sont par ailleurs explicitement interdites par les traités. Donc l’application stricte des traités (sans avoir besoin d’étendre leur interprétation) va dans le même sens que l’idéologie portée par la CJUE.]
Pas tout à fait. Les traités ont été « vendus » justement en affirmant de nombreuses exceptions à l’interdiction des politiques nationales. Ainsi, par exemple, on avait expliqué au bon peuple que l’inclusion des « services d’intérêt général » dans le traité de Lisbonne ouvrait des possibilités aux états qui le souhaiteraient pour maintenir le contrôle public sur les services publics. Une fois le traité voté, la jurisprudence de la CJUE a réduit ces possibilités à néant.
[« On dirait que ces quarante ou cinquante dernières années n’ont rien produit en termes d’institutions, de personnalités, de symboles. Au point qu’il faut revenir aux années 1930 ou 1940 pour trouver des références. » J’en vois pourtant 2 : Jacques Delors, dont le nom a été repris par des fondations européistes, J.P. Chevènement, dont je ne doute pas que le nom sera repris et réutilisé dès qu’il aura trépassé…]
J’en doute. Bien sûr, il se trouvera des groupes qui feront de Delors ou de Chevènement une référence. Mais il y a dans chaque ville, dans chaque village une rue Jean Jaurès, une place Charles de Gaulle, une école Jean Monnet… pensez-vous que demain il y en aura dans chaque village une rue Delors ? Je n’y crois pas un instant.
À quoi peut servir un Commissariat au Plan dans un pays enlisé jusqu’au cou dans l’UE?
À placer un ami ou plusieurs amis politiques peut-être?
À faire croire aux braves gens un peu naïfs et mal informés que notre pays est toujours souverain?
Il est temps de dénoncer cette arnaque en explicitant pour nos concitoyens, les textes “européens” qui régissent les droits et les devoirs des états membres.
@ Jean Paul B.
[À quoi peut servir un Commissariat au Plan dans un pays enlisé jusqu’au cou dans l’UE?]
A peu de chose, en effet. Parler de “planification” n’a de sens que si l’on a un minimum de contrôle sur les leviers qui permettent d’atteindre les objectifs qu’on s’est fixés. Or, ces leviers ont été pour la plupart cassés: dans l’ensemble de ce qu’on nomme le “champ concurrentiel” (qui couvre aujourd’hui l’essentiel de l’économie et une grande partie des services publics), l’intervention de l’Etat est rigidement encadrée et tout acte qui pourrait fausser la concurrence doit être autorisé par l’UE. Or, la planification implique nécessairement de fausser la concurrence: après tout, quel intérêt à “planifier” des objectif que les acteurs viseront spontanément sans qu’on ait à les forcer ?
La planification dans un cadre européen n’a donc de sens que dans les domaines régaliens. On peut planifier l’équipement de la police ou des armées, et jusqu’à un certain point les systèmes de santé ou d’éducation. Pour le reste, ça n’a guère de sens.
[À faire croire aux braves gens un peu naïfs et mal informés que notre pays est toujours souverain?]
Notre pays EST toujours souverain. La souveraineté réside “essentiellement” dans la nation. Et en tant qu’essence, elle est inséparable de la nation, et indivisible. Tant qu’il y a nation, il y a souveraineté. Une nation peut être soumise par la force et la contrainte, de la même manière qu’elle est soumise aux aléas climatiques ou aux catastrophes naturelles. La France n’est pas moins “souveraine” parce qu’elle ne peut arrêter les marées.
Nous n’avons pas délégué à l’UE notre “souveraineté”, nous n’avons délégué que des pouvoirs et des compétences. Demain, si nous le voulions, nous pourrions les reprendre comme l’ont fait les britanniques.
[On dirait que ces quarante ou cinquante dernières années n’ont rien produit en termes d’institutions, de personnalités, de symboles. Au point qu’il faut revenir aux années 1930 ou 1940 pour trouver des références.]
Mais si, mais si :
– Institution : la Hadopi
– Personnalité : François Hollande
– Symbole : l’Euro (certes, ce n’est pas qu’un symbole)
Je plaisante bien sûr, mais c’est pour ne pas pleurer. Car c’est vrai, moi qui suis né dans les années 60 et qui suis donc devenu politiquement adulte dans les années 80, je n’ai jamais vu que des références au passé et toujours les mêmes depuis 40 ans.
@ Alexandre
[Je plaisante bien sûr, mais c’est pour ne pas pleurer. Car c’est vrai, moi qui suis né dans les années 60 et qui suis donc devenu politiquement adulte dans les années 80, je n’ai jamais vu que des références au passé et toujours les mêmes depuis 40 ans.]
Je n’ai rien contre les références au passé (après tout, ou voulez-vous trouver des références ? Dans la mythologie ?), ce qui me paraît remarquable est combien les trente ou quarante dernières années ont produit peu de références. Même dans le langage: on parle du “Grenelle de ceci” ou du “Grenelle de cela” en référence à la grande négociation en mai 1968 au siège du ministère du travail, rue de Grenelle. Dans les cinquante années qui se sont écoulées depuis, n’a-t-on pas une grande négociation qui puisse servir de référence ? Faut-il croire que non, puisqu’on en revient toujours à la même référence.
Nous vivons une époque de destruction: on abolit des institutions, on renverse des statues. Mais on est incapable semble-t-il d’en ériger de nouvelles. C’est cela qui m’attriste le plus.
Sur le fond vous cher Descartes et vos intervenants dans cet excellent débat ,habituel ,ça vous honore,de votre blog me semblent convaincants.
Mais politiquement au sens tactique du terme , Macron se renforce en rescussitant politiquement Bayrou chef d’un parti désuet le MODEM qui a attiré une dizaine de eprsonalités issues de LREM ,non?
Il renforce son camp des Sarkozystes comme Darmanin,aux socialistes comme Ferrand , aux petites frappes comme Castaner , il met en avant son Baurou à qui il doit les 2% qui l’ont qualifié pour le secon tour en 2017,n’est ce pas?
Mélenchon a été pénalisé,donc tué pour le 2ième tour ,par la candidature Hamon,alors que Macron lui a été sauvé par le désistement toni-truand et la fidélité indéflectible de Bayrou ou je me trompe ?
Macron ne vise t il pas 2022 où à tous ces courants susmentionnés s’ajouteront les illuminés StraussKahniens et les régiment Hollandistes ,pourra t il alors être éliminés du second tour,contre Marine,gage d’un second mandat assuré ?
Depuis que Macron a décicé de lutter contre le séparatisme islamique même moi jem’apprète à voter pour lui au second tour , pas vous?
@ luc
[Mais politiquement au sens tactique du terme, Macron se renforce en ressuscitant politiquement Bayrou chef d’un parti désuet le MODEM qui a attiré une dizaine de personnalités issues de LREM, non ?]
Je ne crois pas à la résurrection, et encore moins à la résurrection de Bayrou. Le personnage me rappelle la formule attribuée au président Peron : « de partout on revient, sauf du ridicule ». Vous noterez d’ailleurs que Macron n’a pas mis trop de moyens dans cette résurrection : il n’en a pas fait un ministre, juste un « machin » de plus qui sera vite oublié. Plus qu’une « résurrection », je pense qu’il faut parler de « compromission ». Bayrou aura beaucoup plus de mal à étriller Macron ayant accepté une nomination de lui. Une fois qu’on s’est compromis avec le régime, on a beaucoup plus de mal à le critiquer. C’est une tactique dans laquelle excellait François Mitterrand et son âme damnée Jack Lang : combien de figures de la culture médiatique ont été achetées de cette manière…
[Il renforce son camp des Sarkozystes comme Darmanin, aux socialistes comme Ferrand , aux petites frappes comme Castaner, il met en avant son Bayrou à qui il doit les 2% qui l’ont qualifié pour le second tour en 2017, n’est-ce pas ?
Non, je ne crois pas. La désignation de Darmanin à l’Intérieur traduit la nécessité de remettre de l’ordre dans la Grande Maison, après les consulats désastreux de Collomb et de Castaner. Nommer un homme de droite – qui plus est, un sarkozyste – à ce poste ne peut que rassurer, d’abord les fonctionnaires du ministère, mais aussi les Français à un moment ou la question de la sécurité commence à devenir une sérieuse préoccupation. Mais imaginer que les électeurs sarkozystes vont voter pour Macron parce que Darmanin est à l’Intérieur me paraît un calcul pour le moins aléatoire.
De même, ni Ferrand ni Castaner n’ont la moindre chance d’attirer les électeurs socialistes derrière une candidature Macron. Leur position tient moins à une opération électorale qu’au fait qu’ils constituent le dernier carré des fidèles, les seuls en qui Macron peut avoir une totale confiance. Quant à Bayrou, j’imagine mal ses électeurs votant quelque chose d’autre que Macron en 2022 quelque soit le traitement que Macron puisse lui infliger. Je pense que sa nomination tient moins à sa capacité d’amener des voix qu’à son pouvoir de nuisance.
[Mélenchon a été pénalisé, donc tué pour le 2ième tour, par la candidature Hamon,]
Non. Mélenchon a été pénalisé surtout par son propre aveuglement. Le vote utile à gauche était clairement de son côté, puisque tous les sondages montraient qu’il était le seul à gauche à pouvoir être présent au deuxième tour. Si Hamon a fait un si mauvais résultat, c’est justement parce que tous les électeurs de gauche qui jugeaient possible de voter pour Mélenchon l’ont fait. Les électeurs socialistes qui ont voté pour Hamon n’auraient pas voté Mélenchon même si Hamon avait quitté la course. Si Hamon s’était désisté, il est probable que la plupart de ceux qui ont voté pour lui se seraient reportés sur Macron, ou bien se seraient abstenus.
Mélenchon aurait pu être au deuxième tour s’il avait été moins cassant, s’il avait traité les autres partis de la gauche en partenaires, et non en vassaux. Humilier les communistes, faire peur aux modérés n’était pas une stratégie gagnante.
[alors que Macron lui a été sauvé par le désistement toni-truand et la fidélité indéfectible de Bayrou ou je me trompe ?]
Je pense que vous vous trompez. Pour les centristes, Macron était le « vote utile », avec ou sans Bayrou.
[Macron ne vise-t-il pas 2022 où à tous ces courants susmentionnés s’ajouteront les illuminés Strauss-kahniens et les régiment Hollandistes, pourra-t-il alors être éliminés du second tour, contre Marine, gage d’un second mandat assuré ?]
Pour être franc, je préfère pour analyser les situations électorales revenir à la sociologie des électorats plutôt qu’aux accords d’appareil. Macron représente les intérêts des classes intermédiaires et de la bourgeoisie. Il aura donc le bloc dominant derrière lui – et cela quoi que puissent faire les Bayrou ou les Darmanin – sauf si le bloc dominant décide qu’un autre candidat pourrait défendre plus efficacement ses intérêts. Car Macron n’a pas été très efficace, il faut le dire, jusqu’à maintenant. Peut-être le bloc dominant jugera-t-il qu’un ectoplasme comme Hollande est plus à même de vendre au pays les capitulations que le bloc dominant veut que le « disruptif » Macron qui s’est mis tout le monde à dos ?
Dans la mesure où il a le soutien du bloc dominant, et qu’aucune voie préparant un protagonisme des couches populaires ne se présente à l’horizon, Macron a la réélection assurée. Le risque pour lui aujourd’hui, c’est l’apparition d’un leader qui pourrait représenter les intérêts du bloc dominant mieux qu’il ne le fait.
[Depuis que Macron a décidé de lutter contre le séparatisme islamique même moi je m’apprête à voter pour lui au second tour, pas vous ?]
Non, pas moi. Parce que je pense que la lutte de Macron contre le « séparatisme » – un mot que j’ai utilisé dans ce blog bien avant qu’il devienne usuel dans le discours politique, dois-je conclure que quelqu’un à l’Elysée lit mes écrits ? – est comme souvent chez lui une posture. La lutte contre le séparatisme a un nom : assimilation. Et je doute fort que Macron soit prêt à s’engager vraiment dans cette voie.
Une contribution concise et un peu ironique de Bertrand Renouvin:
@ GEO
[Une contribution concise et un peu ironique de Bertrand Renouvin:]
On peut dire beaucoup de choses de Renouvin, mais on ne peut lui contester une énorme culture historique. En lisant son article, je me reproche un peu de ne pas avoir évoqué dans mon papier un point qu’il souligne très justement dans son article: au delà des MOYENS accordés au Plan, il y a les OBJECTIFS qui lui étaient assignés. Et ces objectifs n’étaient pas de nature purement économique. Il ne s’agissait pas seulement d’augmenter le PIB, mais aussi de créer un modèle de société, fondée sur des choix démocratiquement assumés et non sur l’optimisation aveugle du marché. Pour les fonctionnaires du Plan comme Massé, le plein emploi et la redistribution sociale étaient aussi importantes que la croissance.
—La nomination de François Bayrou comme Haut-commissaire au Plan rappelle la célèbre formule de mongénéral en parlant d’Albert Lebrun : « Au fond, comme chef de l’État, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût un chef ; qu’il y eût un État. ». Dans le cas qui nous occupe, le problème est le même : François Bayrou n’a rien d’un Haut-commissaire, poste qui suppose une compétence technique plus que politique —
Cher ami et camarade, je retourne votre introduction dans ma tête depuis sa parution ; et elle m’inspire toujours un certain malaise. Sans que vous l’écriviez en aucune façon, on a l’impression d’un certain mépris pour Albert Lebrun.
Or, De Gaulle avait du respect pour le président Lebrun. Cet homme d’État de droite était de ceux qui souhaitaient la poursuite du combat en juin 1940, en évacuant les autorités vers l’Afrique du Nord.
Mais il n’était « que » le président de la République. Et on sait combien ses pouvoirs sous la IIIe République étaient limités. Il lui était encore moins possible qu’à Paul Raynaud de résister aux militaires capitulards Weygand et Pétain.
Il ne s’est jamais par la suite fourvoyé dans la collaboration.
Alors si « comme chef de l’État, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût un chef ; qu’il y eût un État », c’est parce que le président sous la IIIe République n’était pas un chef d’État selon la conception qu’en avait Charles De Gaulle. Ce n’était pas un « chef » !
Par ailleurs, toujours selon le général, en juin et juillet 1940, il n’y a plus en France d’« État ».
Il n’y a que « des gouvernants de rencontre »…
Mais Albert Lebrun, major de l’École polytechnique et major de l’École des mines, était un homme brillant. La formule de De Gaulle signifie bien au contraire qu’il aurait pu être un vrai chef d’État, mais sous d’autres institutions et dans d’autres circonstances historiques. Même si, évidemment, la personnalité de Lebrun paraît bien fade en comparaison de la figure du général.
Si De Gaulle, au-delà de sa formule tranchante, avait de l’estime pour le président Lebrun, on n’a pas le sentiment que vous en ayez beaucoup pour François Bayrou. De là sans doute la gêne que suscite chez moi votre phrase…
@ Gugus69
[Cher ami et camarade, je retourne votre introduction dans ma tête depuis sa parution ; et elle m’inspire toujours un certain malaise. Sans que vous l’écriviez en aucune façon, on a l’impression d’un certain mépris pour Albert Lebrun.]
Je ne sais pas si on peut parler de « mépris ». Mais la formule de De Gaulle est sans équivoque : quelque fut le respect qu’il pouvait avoir pour Lebrun, il ne lui reconnaissait pas les qualités d’un « chef ». Est-ce « méprisant » que de dire qu’un cuisinier, un écrivain, un juge ou un peintre en bâtiment n’ont pas les qualités qui font un « chef » ? Je ne le crois pas. Le dire n’est méprisant que si la personne prétend exercer une fonction qui exige des qualités de « chef ».
C’est là que la formule de De Gaulle est ambiguë : Le poste de président de la République sous la IIIème était-il de ceux qui exigeaient des qualités de « chef » ? On peut répondre par la négative : après l’expérience du « prince-président » et du coup d’Etat de 1852 qui avait mis fin à la IIème République, les républicains de la fin du XIXème ne souhaitaient surtout pas que le président devienne un homme fort, jouissant d’une quelconque autorité. On lui demandait au contraire d’être une figure consensuelle. Il était donc difficile de « mépriser » Lebrun d’avoir ajusté son action à ce que l’esprit de la IIIème demandait de lui.
Il n’empêche que si Lebrun avait eu des qualités de « chef », l’histoire aurait pu être très différente.
[Or, De Gaulle avait du respect pour le président Lebrun. Cet homme d’État de droite était de ceux qui souhaitaient la poursuite du combat en juin 1940, en évacuant les autorités vers l’Afrique du Nord.]
Vous noterez tout de même que son souhait n’est pas allé jusqu’à prendre des mesures concrètes pour rendre la poursuite du combat possible, et qu’après le vote des pleins pouvoirs, loin de rejoindre la France Libre à Londres ou la Résistance en France, s’est retiré dans ses terres et n’aura aucune activité pendant la guerre.
[Mais il n’était « que » le président de la République. Et on sait combien ses pouvoirs sous la IIIe République étaient limités. Il lui était encore moins possible qu’à Paul Raynaud de résister aux militaires capitulards Weygand et Pétain.]
Pardon : il avait un pouvoir important, celui de désigner le président du Conseil.
[Il ne s’est jamais par la suite fourvoyé dans la collaboration.]
Pas plus qu’il ne s’est fourvoyé dans la résistance. Il n’a rien fait. Pour un politique de son niveau, c’est quand même peu.
[Mais Albert Lebrun, major de l’École polytechnique et major de l’École des mines, était un homme brillant. La formule de De Gaulle signifie bien au contraire qu’il aurait pu être un vrai chef d’État, mais sous d’autres institutions et dans d’autres circonstances historiques. Même si, évidemment, la personnalité de Lebrun paraît bien fade en comparaison de la figure du général.]
Lebrun était un brillant ingénieur – je crois qu’il a écrit des choses remarquables sur les techniques sidérurgiques – fourvoyé en politique. De ce point de vue, il est le symétrique de Bayrou : un brillant politique qui se fourvoie en jouant au technicien.
[Si De Gaulle, au-delà de sa formule tranchante, avait de l’estime pour le président Lebrun, on n’a pas le sentiment que vous en ayez beaucoup pour François Bayrou. De là sans doute la gêne que suscite chez moi votre phrase…]
Là aussi, il faut revenir au contexte : De Gaulle prononça écrivit sa phrase après un entretien avec Lebrun au cours de laquelle ce dernier loua son action et l’assura de son total soutien. Si demain j’étais à Matignon et que Bayrou venait dans mon bureau pour louer mon action et m’affirmer son soutien, je pense que j’aurais beaucoup plus d’estime pour lui… vous savez, en politique on pardonne beaucoup à ceux qui vous soutiennent.
—Vous savez, en politique on pardonne beaucoup à ceux qui vous soutiennent.–
Oui, je sais… Et on a souvent raison.
Je vous voulais savoir ce que vous pensez du billet de Jacques Sapir sur la planification:
https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-la-covid-19-et-la-planification-dans-les-economies-capitalistes-par-jacques-sapir/
[ C’est cette expérience, parfois connue avec l’histoire des économies de guerre constituées autour du premier conflit mondial dont on a commémoré il y a peu le centenaire, et parfois oubliée, comme les diverses expériences des années 1930, qui nous fournit un important contrepoint à l’expérience soviétique. Cette planification en pays capitaliste s’est aussi épanouie comme dans le cas de la « planification française » de l’après-guerre, mais aussi comme dans le cas du Japon dans les années 1950 et 1960. Elle permet, alors que la crise sanitaire de la Covid-19 et ses conséquences économiques semblent avoir redonné un certain lustre à l’idée de planification, de chercher à retracer la généalogie de cette idée en dehors de toute référence à l’URSS et à ses satellites.]
Cette idée de planification de l’économie de guerre on peut aussi le remonter à l’époque de Colbert quand il planifie la construction de navire de guerre pour la Marine Royal à travers un vaste plan de réaménagement des forêts royales ?
@ Glarrious
[Je vous voulais savoir ce que vous pensez du billet de Jacques Sapir sur la planification: (…)]
Excellent, comme souvent les papiers de Sapir. Sérieux, bien documenté, avec une perspective historique… avec Guaino, c’est l’un des économistes hétérodoxes les plus intéressants à lire.
Quant au fond de l’article, je partage son analyse : le fonctionnement des marchés repose sur la capacité d’anticipation des acteurs. Lorsqu’une situation empêche les acteurs d’anticiper, les marchés deviennent défaillants et l’intervention de l’Etat pour organiser l’économie s’impose assez naturellement. Je pousserai le raisonnement plus loin : dans certains domaines comme l’énergie, ou la prévision est structurellement impossible, le marché sera toujours défaillant et l’intervention de l’Etat devrait s’imposer à titre permanent.
[Cette idée de planification de l’économie de guerre on peut aussi le remonter à l’époque de Colbert quand il planifie la construction de navire de guerre pour la Marine Royal à travers un vaste plan de réaménagement des forêts royales ?]
Oui, mais avec prudence. On ne peut pas dire que l’économie de la France au XVIIème siècle fut une véritable économie de marché.