Martine Aubry, le PS, la gauche et les girouettes

On le sait tous, la seule direction qu’une girouette indique avec certitude est la direction du vent. Martine Aubry ce matin sur France-Inter en a donné une triste illustration. Elle, qui fut l’un des principaux ministres d’un gouvernement qui détient le record de la privatisation des services publics, a essayé de nous démontrer que si le PSE était demain majoritaire au Parlement Européen nous aurions une “directive sur les services publics” digne de ce nom. Elle, qui appela en son temps (elle était ministre, quelle coïncidence…) à ratifier le traité de Maastricht et le traité constitutionnel européen – ceux-là mêmes qui affirment la primauté d’un “marché libre et non faussé” sur toute considération de service public – se présente maintenant comme le rempart de la défense du service public à la française et contre le libéralisme. Ceux-là mêmes qui ont construit l’Europe libérale (1) nous affirment qu’ils veulent la changer. On ne sait s’il faut rire ou pleurer…

Le problème des socialistes, c’est que ce sont des girouettes. Depuis 1981 ils ont tourné sans relâche, défendant aujourd’hui la laïcité pour demain bénir les accords Lang-Cloupet; proclamant dans l’opposition la sacralité du service public pour ensuite – une fois au pouvoir – le privatiser; tantôt partisans des baisses d’impôts, tantôt critiques d’une politique fiscale qui laisse l’Etat sans moyens d’intervention; défendant un jour une politique industrielle ambitieuse pour s’incliner le jour suivant devant le veau d’or des marchés. En somme, si l’on laisse de côté quelques personnalités tout à fait respectables (et qui souvent ont fini par quitter le PS pour ne pas avoir à couvrir des politiques qui leur semblaient aberrantes), le PS a, depuis trente ans, défendu tour a tour toutes les politiques imaginables, depuis le libéralisme le plus débridé jusqu’à un étatisme qui aurait fait pâlir Colbert. Comment alors croire à leurs promesses, ou même à leurs professions de foi ? Comment croire que ces gens aient un autre moteur dans la conduite des affaires publiques que leur intérêt et leur ambition personnelle ?

C’est pourquoi le PS n’a plus aucune crédibilité à l’heure de proposer des directions à suivre. Même les militants socialistes sont conscients que leurs dirigeants sont prêts à dire à peu-près n’importe quoi pourvu que cela rapporte des voix. L’attachement quasi-sectaire à la Madonne des Sondages pendant la dernière campagne présidentielle est peut-être le symptôme le plus révélateur de cette dérive: on ne vote plus pour une idéologie cohérente, on vote pour une Personnalité avec laquelle on est en communion mystique. Chévenement restera certainement le dernier – et l’un des rares – socialistes à avoir quitté un gouvernement sur la base d’un désaccord politique et idéologique, tout simplement parce que c’est l’un des derniers qui ait pris la peine de se construire un cadre idéologie cohérent. Pour les autres, l’idéologie a laissé place à un discours, qu’on modifie selon la direction du vent. Peut-on parler d’idéologie dans le cas d’un Khouchner, d’un Besson, d’un Bockel (2) ? Ont-ils pensé à autre chose qu’à leur carrière lorsqu’ils ont accepté le maroquin dans un gouvernement de droite ?

Et le pire, c’est que le phénomène ne se cantonne pas au seul Parti Socialiste. Ce n’est guère mieux au PG ou au PCF. Ni d’ailleurs au NPA, ou l’essentiel du travail idéologique semble consister à se faire plaisir en disant n’importe quoi du moment que cela plaît à la base. Le populisme, ça existe aussi à l’extrême gauche.

La gauche est aujourd’hui un champ de ruines surréaliste  ou des girouettes prétendent se faire passer pour des panneaux indicateurs et nous dire vers où il faut aller. Aussi longtemps que ces girouettes ne feront pas un effort de retour en arrière pour expliquer le pourquoi des errements du passé, elles ne seront pas crédibles pour nous indiquer un avenir.

Descartes

(1) Il n’est pas inutile de rappeller que le Traité de Maastricht, qui est la consécration de l’encadrement libéral de l’Europe, a été porté en France par un certain François Mitterrand, à une époque ou l’Europe comptait une majorité de gouvernement socialistes ou social-démocrates. Le président de la Commission était un certain Jacques Delors, socialiste de son état… et le père d’une certaine Martine Aubry.

(2) Sans compter ceux qui ont offert leurs services sans succès… comme l’ineffable Jack Lang.

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8 réponses à Martine Aubry, le PS, la gauche et les girouettes

  1. Glarrious dit :

    [ Depuis 1981 ils ont tourné sans relâche, défendant aujourd’hui la laïcité pour demain bénir les accords Lang-Cloupet; proclamant dans l’opposition la sacralité du service public pour ensuite – une fois au pouvoir – le privatiser; tantôt partisans des baisses d’impôts, tantôt critiques d’une politique fiscale qui laisse l’Etat sans moyens d’intervention; défendant un jour une politique industrielle ambitieuse pour s’incliner le jour suivant devant le veau d’or des marchés.]

    Pourquoi dites-vous à partir de 1981 et non pas 1983 qui marque le tournant de la rigueur, c’étais évident pour vous qu’en 1981 les socialistes étaient des girouettes ?

    • Descartes dit :

      @ Glarrious

      [Pourquoi dites-vous à partir de 1981 et non pas 1983 qui marque le tournant de la rigueur, c’étais évident pour vous qu’en 1981 les socialistes étaient des girouettes ?]

      Quiconque avait les yeux grands ouverts en 1981 aurait pris la peine de s’intéresser au passé des principaux acteurs du drame. Mitterrand, d’abord, cet opportuniste qui fut de toutes les combinazione de la quatrième République, homme de droite devenu “anticapitaliste” par pur opportunisme. Mais aussi ceux que Mitterrand avait choisi pour piloter l’économie. Qui pouvait douter une seconde que Delors allait profiter de la première occasion pour laisser tomber les promesses du Programme Commun pour revenir aux vieilles lunes qu’il avait défendu lorsqu’il avait été conseiller de Chaban-Delmas ?

      Il faut arrêter d’alimenter – comme le fait Mélenchon – le mythe d’un PS sincèrement anticapitaliste en 1981, qui aurait changé à son corps défendant sous la pression de la crise économique en 1983. La SFIO de 1969 était déjà un parti de collaboration de classe, violemment anticommuniste et pas mal réactionnaire. L’anticapitalisme supposé du PS, c’était déjà un tour de girouette destiné à récupérer les soixante-huitards déçus en 1972. En 1983, la girouette s’est remise à tourner, c’est tout.

      • CVT dit :

        @Descartes,
        [Quiconque avait les yeux grands ouverts en 1981 aurait pris la peine de s’intéresser au passé des principaux acteurs du drame.]
        Et bien, si dès 1981, vous aviez vu clair sur le fait que les socialistes allaient trahir, c’est que vous étiez extra-lucide… Prenez garde, tout de même, à ce que votre fibre communiste ne vous égare trop dans la détestation de feu “Tonton”😬 et ne vous fasse pas voir rétroactivement plus de choses que vous n’auriez pu prévoir à l’époque…

        Parce que n’oubliez non plus, qu’à l’époque, les socialauds sortaient d’une cure d’opposition de…23 ans, autant dire une éternité, et donc un temps largement suffisant pour les Français d’oublier leurs turpitudes commises sous le régime honni de la IVè République.

        Et honnêtement, si j’en crois les récits de JP Chevènement évoqués dans son livre « La France est-elle finie », l’arrivée des socialistes s’accompagnait d’une volonté sincère de l’aile “jacobine” du PS de “changer la vie”, et il faut avouer qu’ils firent les choses en grand: nationalisation des banques françaises et de certaines industries stratégiques, arrivée de ministres communistes dans le gouvernement, trois dévaluations du franc… Entre entre mai 81 et mars 83, je trouve que Mitterrand et son premier ministre Mauroy avaient pris des mesures symboliques certes, mais fortes. Donc a posteriori, c’était difficile de ne pas se laisser prendre si on avait le coeur à gauche version jacobine (je passe sur la décentralisation, concession majeure faite à la fameuse deuxième gauche Delors/Rocard/Mauroy…).

        Maintenant, durant les deux premières années du premier septennat mitterrandien, il y a eu de sacré loupés qui, selon moi, sont le reflet d’un manque de volonté d’aller au bout de la logique mise en place, et qui trahissait déjà un future retournement de veste que l’on connaît : la désindexation des salaires, sous couvert des lois Auroux, a été selon moi la première grande trahison des socialistes, et le refus du contrôle des changes malgré le chantage que les marchés financiers faisaient peser sur l’économie française, qui fut victime d’une fuite des capitaux sans précédent depuis le Front Populaire en 1936. D’ailleurs, toujours d’après l’ouvrage cité plus, Chevènement compris que les jeux étaient faits et que ses ennemis intimes du PS, alias “deuxième gauche”, attendaient la “catastrophe l’arme au pied” pour prendre les rênes du pouvoir. Catastrophe qui se produisit lors de la dernière dévaluation du franc début 1983, qui allait justifier le désormais fameux “tournant de la rigueur” de mars de la même année.

        J’étais encore un gamin à l’époque, mais je me souviens bien de l’ambiance qui régna quand les socialistes avaient renié leurs promesses : un vrai désenchantement, bizarrement peu suivi d’une colère des travailleurs (sans doute la présence de ministres communistes y étaient pour quelque chose…); tout juste une véritable dérouillée de la gauche et particulièrement du PCF aux municipales de 1983. Il faut mettre cela en parallèle avec le retournement de veste de Chirac en 1995, qui avait provoqué un blocage du pays durant en décembre de cette année…

        • Descartes dit :

          @ CVT

          [Et bien, si dès 1981, vous aviez vu clair sur le fait que les socialistes allaient trahir, c’est que vous étiez extra-lucide… Prenez garde, tout de même, à ce que votre fibre communiste ne vous égare trop dans la détestation de feu “Tonton” et ne vous fasse pas voir rétroactivement plus de choses que vous n’auriez pu prévoir à l’époque…]

          Je prends garde, croyez-moi. Mais je peux vous assurer : j’avais bien vu que les socialistes allaient trahir. Et je n’étais pas le seul : au PCF, tous les « vieux communistes » – c’est-à-dire, ceux qui étaient là avant la vague d’adhésions qui a suivi mai 1968 et la signature du programme commun en 1974 – en étaient convaincus. Quant à mon père, paix à son âme, il aura répété toute sa vie que le meilleur socialiste était le socialiste mort, et que la trahison était dans leur nature. Je n’avais donc pas beaucoup de mérite à être lucide dans cet environnement.

          Maintenant, si vous me demandez si ma conviction était le résultat de l’analyse de la situation concrète, ou bien le résultat d’une induction… je ne saurais pas vous dire. J’étais très jeune à l’époque, mais déjà passionné d’histoire. Je me souviens qu’en 1981 je lisais avec passion l’histoire de la quatrième République… et c’est une histoire qui ne predispose pas à faire confiance aux socialistes en général et à Mitterrand en particulier. Par ailleurs, n’oubliez pas que la « trahison » de 1983 avait un précédent dans la trahison de 1978…

          [Parce que n’oubliez non plus, qu’à l’époque, les socialauds sortaient d’une cure d’opposition de…23 ans, autant dire une éternité, et donc un temps largement suffisant pour les Français d’oublier leurs turpitudes commises sous le régime honni de la IVè République.]

          Peut-être le fait que je me sois passionné pour l’histoire de la IVème République à l’époque a joué un rôle dans ma « lucidité » ? En tout cas, j’avais très présente les turpitudes et trahisons de la période 1940-58… Mais je pense que la raison essentielle de l’aveuglement de la gauche à l’époque ne se trouve pas dans le temps qui passe, mais dans la volonté de croire. Je me souviens qu’à l’époque, lorsque je rappelais dans des discussions politiques à la JC l’épisode de la francisque ou celui de l’Observatoire, personne ne voulait écouter. On avait tellement envie de croire qu’après 20 ans de gouvernements de droite le « grand soir » était enfin arrivé…

          [Et honnêtement, si j’en crois les récits de JP Chevènement évoqués dans son livre « La France est-elle finie », l’arrivée des socialistes s’accompagnait d’une volonté sincère de l’aile “jacobine” du PS de “changer la vie”, et il faut avouer qu’ils firent les choses en grand: nationalisation des banques françaises et de certaines industries stratégiques, arrivée de ministres communistes dans le gouvernement, trois dévaluations du franc…]

          Je ne conteste pas la sincérité de certains. Le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions. Mais après la rupture de 1978, l’aile « jacobine » du PS aurait dû se dire qu’il y avait quelque chose de pourri dans le royaume de Solférino. Ils ne l’ont pas fait parce que, eux aussi, voulaient y croire. Pour moi, mai 1981 c’est un épisode d’autosuggestion collective. Toute une génération « de gauche » s’est autoconvaincue, malgré l’évidence, que Mitterrand allait changer la vie.

          [Entre entre mai 81 et mars 83, je trouve que Mitterrand et son premier ministre Mauroy avaient pris des mesures symboliques certes, mais fortes. Donc a posteriori, c’était difficile de ne pas se laisser prendre si on avait le cœur à gauche version jacobine (je passe sur la décentralisation, concession majeure faite à la fameuse deuxième gauche Delors/Rocard/Mauroy…).]

          Des mesures « fortes » susceptibles de séduire la « gauche version jacobine ? Vous pensez à quoi, exactement ? La seule mesure « forte » qui aurait pu attirer « la gauche version jacobine » étaient les nationalisations, et encore : cela s’est fait non pas dans le cadre d’un projet industriel, mais plutôt dans une logique de politique de l’emploi. En 1981-83 il y eut beaucoup de discours, mais finalement assez peu de mesures vraiment séduisantes. Et il y eut par contre des franchement néfastes : la concurrence sur la radiotélévision, la décentralisation…

          [Maintenant, durant les deux premières années du premier septennat mitterrandien, il y a eu de sacré loupés qui, selon moi, sont le reflet d’un manque de volonté d’aller au bout de la logique mise en place, et qui trahissait déjà un future retournement de veste que l’on connaît : la désindexation des salaires, sous couvert des lois Auroux, a été selon moi la première grande trahison des socialistes, et le refus du contrôle des changes malgré le chantage que les marchés financiers faisaient peser sur l’économie française, qui fut victime d’une fuite des capitaux sans précédent depuis le Front Populaire en 1936.]

          Sur ces points, je ne suis pas d’accord avec vous. La désindexation était inévitable dans le contexte de l’époque, sauf à courir le risque de l’hyperinflation. Quant au contrôle des changes, je vous rappelle qu’il fut instauré par le gouvernement Mauroy le 21 mai 1981. On peut critiquer le choix d’instaurer le contrôle des changes plutôt que la dévaluation, mais on ne peut pas dire qu’il n’a pas été instauré.

          [D’ailleurs, toujours d’après l’ouvrage cité plus, Chevènement compris que les jeux étaient faits et que ses ennemis intimes du PS, alias “deuxième gauche”, attendaient la “catastrophe l’arme au pied” pour prendre les rênes du pouvoir. Catastrophe qui se produisit lors de la dernière dévaluation du franc début 1983, qui allait justifier le désormais fameux “tournant de la rigueur” de mars de la même année.]

          Et bien, pour une fois, je peux me targuer d’avoir été plus clairvoyant que Chevènement : moi, j’ai compris que les jeux étaient faits AVANT la victoire de Mitterrand.

          [J’étais encore un gamin à l’époque, mais je me souviens bien de l’ambiance qui régna quand les socialistes avaient renié leurs promesses : un vrai désenchantement, bizarrement peu suivi d’une colère des travailleurs (sans doute la présence de ministres communistes y étaient pour quelque chose…); tout juste une véritable dérouillée de la gauche et particulièrement du PCF aux municipales de 1983.]

          Là encore, il faut chercher l’explication dans la volonté de croire. Les gens avaient tellement désiré la victoire de la gauche, tellement accusé la droite gaullienne de tous les maux, tellement rêvé que la gauche allait les conduire vers le pays du lait et du miel, qu’ils ont refusé pendant des longues années d’accepter qu’ils s’étaient laissés berner. On pouvait encore en 1988 trouver des imbéciles du genre Renaud pour appeler Mitterrand à « ne pas laisser béton » comme si 1983 n’avait jamais eu lieu.

          Lorsque j’aurai plus de temps, j’ai envie d’écrire un bouquin sur l’histoire de l’illusion collective de la Gauche dans la période 1978-1993. J’ai même choisi le titre: “Mitterrand l’enchanteur”.

          • Pietia dit :

            >Lorsque j’aurai plus de temps, j’ai envie d’écrire un bouquin sur l’histoire de >l’illusion collective de la Gauche dans la période 1978-1993. J’ai même choisi >le titre: “Mitterrand l’enchanteur”.

            Le Mitterrand enchanteur est apparu avec l’élection présidentielle de 1965, où il était au second tour contre De Gaulle (auparavant ce n’était depuis 58 qu’un politicien marginal), et c’est la PCF qui lui a permis de figurer au second tour en appelant à voter pour lui au premier tour. La politique d’union de la gauche au PCF est bien plus ancienne que les années 70 et le programme commun.

            • Descartes dit :

              @ Pietia

              [Le Mitterrand enchanteur est apparu avec l’élection présidentielle de 1965, où il était au second tour contre De Gaulle (auparavant ce n’était depuis 58 qu’un politicien marginal), et c’est la PCF qui lui a permis de figurer au second tour en appelant à voter pour lui au premier tour. La politique d’union de la gauche au PCF est bien plus ancienne que les années 70 et le programme commun.]

              Pas tout à fait. L’accord politique de 1965 n’était pas un accord programmatique. En 1965, Mitterrand est le dirigeant d’un petit groupuscule (la Convention des Institutions Républicaines), allié au sein de la “Fedération de la gauche démocrate et socialiste” avec les radicaux mendésistes, les restes de la SFIO, et différents “clubs” socialistes. C’est l’absence du PCF – qui se refuse par principe à participer à l’élection “plebiscitaire” du président au suffrage universel – le parti dominant à l’époque dans la gauche française, qui permet à la gauche socialiste de relever la tête lors de l’élection de 1965. Ca ne dure pas, d’ailleurs: en 1969 cette même gauche se fera ratatiner alors que le PCF, qui présente cette fois un candidat, fait un excellent résultat. D’ailleurs, personne n’imaginait que la gauche ait pu gagner l’élection de 1965.

              En 1974, la situation était totalement différente: il s’agissait d’un accord programmatique en vue d’exercer effectivement le pouvoir. Il ne faut pas oublier que l’élection de 1974 a été perdue de très peu: 50,8% pour Giscard contre 49,2% pour Mitterrand.

              C’est pourquoi on ne peut parler de “union de la gauche” en 1965, tout au plus de soutien à un candidat commun. Le processus d’union – c’est à dire de négociation politique en vue d’un exercice commun du pouvoir – était impensable aussi longtemps que la gauche non-communiste était dominée par la SFIO, dont l’anticommunisme viscéral était connu. Ce n’est qu’après l’élection de 1969 et surtout après le congrès d’Epinay de 1972 qui voit le naufrage définitif de la SFIO que la politique d’union s’est imposée.

          • Gugus69 dit :

            ___Je prends garde, croyez-moi. Mais je peux vous assurer : j’avais bien vu que les socialistes allaient trahir. Et je n’étais pas le seul : au PCF, tous les « vieux communistes » – c’est-à-dire, ceux qui étaient là avant la vague d’adhésions qui a suivi mai 1968 et la signature du programme commun en 1974 – en étaient convaincus.___

            J’en témoigne ! Entre les deux tours de l’élection présidentielle de 1981, notre comité de section du PCF avait réuni les adhérents pour connaître notre avis sur la position du parti au second tour. J’étais alors un jeune secrétaire de cellule. La salle était pleine. Et je revois les anciens groupés dans un coin de la pièce. Ils étaient fous de colère.
            Ils étaient presque tous debout. Mon père appuyé sur une table, à côté de ses camarades, anciens de l’usine voisine. Ils vociféraient : “LES SOCIALOS ONT TOUJOURS TRAHI ! ILS TRAHIRONT TOUJOURS ! C’EST LEUR RAISON D’ÊTRE !!! Et mon père – n’oublions pas que je suis lyonnais – assénait un argument politico-gastronomique de poids : “Un soce, c’est bon pendu et bien sec !”
            J’ai suivi les consignes de vote du parti : j’ai voté pour François Mitterrand. Je le regrette encore aujourd’hui…

            • Descartes dit :

              @ Gugus69

              [J’en témoigne !]

              Merci de votre témoignage, il coïncide parfaitement avec mes souvenirs. Chez les “vieux communistes”, il y a eu même des appels à voter pour Giscard – ce que beaucoup de “nouveaux communistes” leur ont reproché plus tard. J’étais trop jeune pour militer au PCF, à peine assez vieux pour militer dans la JC, ou les “vieux communistes” étaient beaucoup plus rares. Mais à la JC chacun amenait au débat ce qu’il entendait à la maison… et le discours des enfants des vieux militants ouvriers n’était pas du tout le même que celui des enfants des “classes moyennes” qui avaient adhéré après 1968.

              [J’ai suivi les consignes de vote du parti : j’ai voté pour François Mitterrand. Je le regrette encore aujourd’hui…]

              Je n’ai JAMAIS voté pour Mitterrand, et j’en suis très fier!

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