L’Europe avant le sommet: les illusions perdues

“Le cynisme est la fumée qui s’elève lorsqu’on brûle ses illusions”

 

La valse des dirigeants européens avant le sommet de Bruxelles qui commence aujourd’hui ressemble de plus en plus au proverbial poulet sans tête qui continue à courir alors que toute fonction cérébrale a, et pour cause, cessé de l’animer. Comme le poulet décapité, les dirigeants européens agissent par réflexe, répétant des discours vides de sens auxquels plus grand monde ne croît plus. Chaque sommet est bien entendu “décisif”, l’engagement à “sauver à tout prix la construction européenne” ne fait pas de doute, l’Europe reste bien entendu “notre avenir”… mais au delà des discours plus ou moins creux, les solutions sont toujours les mêmes.

 

Tout ce cirque a au moins une conséquence positive: il a fait voler en éclats la fiction qui, pendant trente longues années, a présidé contre toute évidence à la construction européenne. Celle d’un “intérêt européen” que les institutions communautaires étaient censées servir, avec des “dirigeants européens” qui en étaient l’ultime garantie. Tout cela paraît aujourd’hui bien loin: les soi-disant “dirigeants européens” n’hésitent pas à montrer aujourd’hui toute honte bue qu’ils défendent des intérêts nationaux (1). Et nulle part ceci est plus évident qu’en Allemagne, avec une Angela Merkel qui explique devant le Bundestag sa stratégie européenne dans des termes qui ne laissent aucune ambiguïté sur les intérêts qu’elle défend: si cela doit coûter plus d’argent à l’Allemagne, alors l’Allemagne doit pouvoir imposer les politiques de son choix.

 

Faut-il lui en tenir rigueur ? Certainement pas. Après tout, Angela Merkel a été élue par ses concitoyens pour défendre leurs intérêts, et non un “intérêt européen” plus ou moins fumeux. Lorsqu’on lui demande d’engager l’argent des contribuables allemands, Angela Merkel exige garanties et contreparties. Si seulement nos dirigeants français étaient capables de faire de même… seulement, ils ne le sont pas. Dans la plus grande discrétion, les dirigeants français ont dejà engagé 40 milliards de fonds publics – c’est à dire, payés par les contribuables français – pour “sauver l’euro” sans que le public ne soit consulté ni même informé (2). On ne peut d’ailleurs qu’être émerveillé par l’ingénuité de nos dirigeants: on dirait que pour eux le fait d’aider la Grèce, l’Irlande, le Portugal ou l’Espagne est une pure question de principe, que cela va de soi, et peu importe si cette aide est efficace ou combien elle coûte. Nous n’avons même pas exigé, en échange de notre contribution, d’avoir un minimum de contrôle sur les “plans d’ajustement” qui auront été imposés aux pays en échange de notre argent.

 

Il est de bon ton de fustiger “l’égoïsme” ou “l’étroitesse d’esprit” des allemands. Mais cet “égoïsme” a au moins la vertu d’être rationnel.  Les allemands ne refusent pas de payer, mais ils entendent contrôler ce à quoi leur argent servira. Ce qui est parfaitement logique. Je le préfère infiniment cet “égoïsme” à l’ingénuité et l’inconséquence française. Nous français, nous sommes les deuxièmes contributeurs, après l’Allemagne, aux différents fonds d’aide. Nous avons donc aussi les instruments pour peser sur les politiques européennes qui se font avec cet argent. Pourquoi alors laissons-nous que ces politiques soient déterminées par l’Allemagne ? Alors que tout le monde joue en Europe la défense de ses intérêts et sait dire “non” quand il le faut, nos représentants continuent à se bercer des violons de “l’unité européenne” et du “fédéralisme”. De droite comme de gauche – y compris dans la gauche radicale – on se trouve des prétextes pour “sauver l’euro” à tout prix, sans se demander si le prix en vaut la peine. Comment s’étonner dans ces conditions que le FN, le seul parti à prendre clairement position contre cette vision bisounoursienne de la politique, recueille de plus en plus d’adhésion populaire ?

 

Comme on pouvait l’anticiper, cette explosion en vol de l’idéal européen ne pouvait laisser indifférente notre élite médiatique, qui de Maastricht au TCE a toujours défendu avec la foi du charbonnier l’édifice bancal qu’est l’euro. Et ces gens là ont un allié de taille: la mémoire courte des citoyens. Ainsi, ceux-là même qui balayaient d’un revers de manche l’argumentation des opposants au traité de Maastricht déclarent aujourd’hui avoir soulevé ces objectionsà l’époque… mais pour demander une intégration encore plus poussée et des abandons de souveraineté encore plus étendus. Ce discours falsifie les faits: il est exact qu’un certain nombre de commentateurs étaient conscients des objections. Mais loin de les soulever, ils les ont au contraire dissimulées. Et cela pour une raison simple: la priorité pour eux était de faire voter la ratification du traité de Maastricht, en étant persuadé que celui-ci rendrait inévitable cette “intégration poussée” qu’ils appelaient – en secret, pour ne pas effaroucher l’électeur – de leurs voeux.

 

Ceux-là même qui aujourd’hui nous expliquent – et prétendent avoir toujours su – qu’un “saut fédéral est impératif pour sauver l’euro” sont les mêmes qui, hier, expliquaient aux citoyens qu’ils pouvaient voter Maastricht sans crainte de mettre le doigt dans l’engrenage, qu’il n’y avait dans le traité aucun “engagement caché”. S’ils disent la vérité lorsqu’ils affirment avoir toujours su que des abandons de souveraineté supplémentaires seraient nécessaires, alors on doit conclure qu’ils nous ont menti. Faut-il alors leur faire confiance aujourd’hui ? Je ne le crois pas. Au delà des beaux discours, les europhiles ont failli. Chacun peut constater ce que sont devenues les belles promesses de “l’Europe qui protège”: le marché unique “libre et non faussé” – c’est à dire dérégulé – et l’euro ont accouché d’une zone de faible croissance, de chômage et de précarité massive, avec des déséquilibres croissants qu’aucun mécanisme de transfert ne vient compenser et qui à terme vont couler tout le monde (3). Que promet cette Europe à la jeunesse aujourd’hui ? Dix ans d’austérité, de chômage, de précarité ? C’est le sacrifice d’une génération qu’on est en train de nous proposer.  Et ceux-là même qui ont construit cette monstruosité prétendent aujourd’hui avoir la solution miracle: le “saut fédéral”. “Donnez nous plus de pouvoir -nous disent-ils – et nous résoudrons tous les problèmes”. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’au vu de leurs exploits passés, ce “saut fédéral” qu’on nous ressort périodiquement comme la panacée universelle à tous les maux de l’Union ressemble drôlement à un saut dans le vide.

 

Si la légitimité du politique dérive de l’assentiment populaire, la légitimité d’une technocratie derive de sa compétence. Si les institutions “fédérales” avaient montré leur capacité à prévenir la crise et à la gérer, elles auraient un boulevard devant elles pour demander le “saut fédéral”. Le problème est que loin de se montrer compétentes, les institutions européennes – que ce soit la Commission ou la BCE – ont montré au contraire une totale incompétence. Elles n’ont pas vu venir la crise: ni la formation des “bulles” immobilières en Espagne et en Irlande, ni la déconfiture grecque ou portugaise n’ont été prévues. Elles n’ont pas non plus pris des mesures prudentielles, soutenant au contraire une dérégulation totale de la finance et une politique monétaire qui ne pouvait qu’aboutir à ce résultat. Et une fois la crise à nos portes, elles se sont montrés incapables de toute originalité, proposant les éternelles recettes orthodoxes qui avaient dejà montré leur nocivité dans les années 1930. En d’autres termes, la “technocratie” européenne s’est montrée inefficace, incompétente, figée. Les citoyens, qui ne rejettent pas les technocraties à conditions qu’elles soient efficaces, ne l’oublieront pas de sitôt.

 

Il n’y aura pas de véritable “saut fédéral” tout simplement parce que la légitimité technocratique manque, et qu’il n’y a pas de “peuple européen” qui pourrait donner une légitimité politique à une telle “fédération”. Ce qu’on nous présente comme la création d’un véritable état fédéral européen n’est en fait que le transfert du pouvoir politique à une entité bureaucratique dont l’Allemagne exigera – Angela Merkel est très claire sur ce point – le contrôle. Car qui imagine que l’autorité budgétaire européenne, censée pouvoir modifier les budgets des états, pourrait exercer ce contrôle sur le budget allemand dans le sens de la relance, par exemple ? Bien sur que non: L’Allemagne – là encore, Merkel ne laisse la moindre ambiguïté – n’acceptera une telle autorité budgétaire que si celle-ci impose à tous les partenaires la politique budgétaire orthodoxe de l’Allemagne. Croire dans ces conditions que le “saut fédéral” est autre chose qu’une “germanisation” autoritaire de l’Europe, c’est se bercer d’illusions. Et les peuples n’ont pas, en ce moment, beaucoup de temps pour les illusions. Un tel schéma n’aurait aucune chance de passer le test d’un référendum.

 

 Descartes

 

(1) sauf peut-être les français, qui comme d’habitude n’ont encore rien compris au film.

 

(2) Il est d’ailleurs drôle de constater que dans notre société de “transparence”, on est obligé de faire un débat public qui national qui prend un an lorsqu’on veut construire un canal, une autoroute ou un réacteur nucléaire à 5 milliards, mais qu’on peut en engager 40 milliards pour “sauver l’Europe” sans demander son avis à personne.

 

(3) Y compris l’Allemagne, dont la richesse est soutenue par les exportations. Lorsque le reste de l’Europe sera ruiné, qui achètera les produits allemands ?

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32 réponses à L’Europe avant le sommet: les illusions perdues

  1. Serge dit :

    Il n’y aura pas de véritable “saut fédéral” tout simplement parce que la légitimité technocratique manque, et qu’il n’y a pas de “peuple européen” qui pourrait donner une légitimité politique
    à une telle “fédération”.

    Lire cette phrase me fait tout drôle. Parce que je relis en ce moment Le Prince de Machiavel, et je n’ai pas pu m’empêcher de faire un parallèle avec l’Europe (et avec d’autres choses de notre
    époque), et j’en étais arrivé à la même conclusion. Évidemment, c’est emprunt de subjectivité de ma part, et je lis ce que je veux bien lire dans ce bouquin (je me contenterai de la phrase de
    Rousseau, que je viens de lire à l’instant sur Wikipedia, qui résume ma pensée sur Machiavel : “En feignant de donner des leçons aux rois, il en a donné de grandes aux peuples.”) .

    Alors, certes, nous votons pour le parlement européen et nous (dans le sens, peuple français, j’étais bien trop jeune à l’époque) avons voter le traité de Maastricht. Mais à part cela, en quoi
    nous sentons-nous souverain dans l’Europe ?

    Par le Conseil Européen, avec notre président comme représentant ? Il me semble que nous l’avons élu en tant que Président de la France, et pas explicitement aussi comme représentant au Conseil
    Européen. J’imagine la future objection explicitant que le président peut endosser plusieurs rôles à la fois. Mais les décisions de l’UE sont bien trop importante aujourd’hui pour laisser ce rôle
    échoir de manière implicite. Je ne sais pas comment expliquer, mais un truc me gène dans la politique représentative de l’UE.

    Et de toute manière, comment puis-je me sentir proche de mes voisins allemands, espagnols, roumains, etc… au point d’avoir un État commun sans avoir réellement connaître ces peuples, ces
    cultures ? Personnellement, connaître le taux de croissance et le PIB d’un pays ne me suffit pas pour partager la souveraineté et la légitimité d’un gouvernement commun. L’immigration/les
    identités régionales posent problèmes au niveau d’un état, alors, au niveau d’un continent entier, qui serait amalgamé en une seule entité…

    Et à lire l’actualité, la fortuna présente a été préparé avec bien peu de virtù de la part de nos représentants direct et des technocrates européens. J’ai aussi un peu peur de
    la virtù actuelle de notre gouvernement, quand je lis la politique budgétaire qui fait uniquement dans l’austerité sans préparer notre pays à la fortuna de demain. Espérons que
    la virtù des futurs présidents seront grandes pour agir dans l’urgence des futurs problèmes de notre pays, avec les peu (enfin, les moindres par rapport à hier et aujourd’hui) d’outils
    étatique qui leurs seront laissées.

    (Et j’ai fais un effort, j’ai activé javascript. Pour éviter de pondre d’un immonde pavé comme lors de mon dernier commentaire. Je m’en excuse).

    • Descartes dit :

      Évidemment, c’est emprunt de subjectivité de ma part, et je lis ce que je veux bien lire dans ce bouquin (je me contenterai de la phrase de Rousseau, que je viens de lire à l’instant sur
      Wikipedia, qui résume ma pensée sur Machiavel : “En feignant de donner des leçons aux rois, il en a donné de grandes aux peuples.”) .

      Vous avez d’excellentes lectures. De l’esprit de la Renaissance à celui des Lumières, il n’y a qu’un pas…

      Par le Conseil Européen, avec notre président comme représentant ? Il me semble que nous l’avons élu en tant que Président de la France, et pas explicitement aussi comme représentant au
      Conseil Européen.

      Cela dépend justement de ce qu’on donne comme rôle au Conseil. Si c’est une assemblée de représentants dont chacun défend l’intérêt de l’état qu’il représente, alors notre président est tout à
      fait qualifié, puisque nous l’avons bien élu pour défendre les intérêts de la France. Mais si l’on conçoit le Conseil comme une assemblée défendant “l’intérêt européen”, alors il y a un problème,
      parce que nous, français, nous ne l’avons pas élu pour ça.

      La question suivante est: si l’on voulait élire une assemblée dont la mission serait de défendre l’intérêt européen, qui serait légitime pour l’élire ? Puisqu’il n’y a pas de “peuple européen”,
      la notion même de “intérêt européen” est incertaine…

      J’imagine la future objection explicitant que le président peut endosser plusieurs rôles à la fois. Mais les décisions de l’UE sont bien trop importante aujourd’hui pour laisser ce rôle
      échoir de manière implicite. Je ne sais pas comment expliquer, mais un truc me gène dans la politique représentative de l’UE.

      Comme j’ai tenté de l’expliquer plus haut, ce n’est pas tant le “rôle” qui pose problème. On conçoit très bien notre président représentant le pays dans n’importe quelle enceinte internationale.
      Mais à chaque fois, il ne peut défendre que les intérêts de ses mandants. C’est l’idée d’un président mandaté par le peuple français pour défendre les intérêts d’un “peuple européen”
      fantasmagorique qui pose problème.

      Dépasser l’Europe des nations – c’est à dire, une Europe ou les nations négocient sur la base que chacune défend son beefsteak – implique imaginer qu’il puisse exister une nation européenne, dans
      laquelle la souveraineté réside, ce qui nous ramene à l’idée d’un “peuple européen”. Or, ni la nation ni le peuple européen n’existent. Dans ces conditions, les institutions européennes, quelque
      soient les efforts de leurs partisans, ne peuvent être que des technocraties.

      Et de toute manière, comment puis-je me sentir proche de mes voisins allemands, espagnols, roumains, etc… au point d’avoir un État commun sans avoir réellement connaître ces peuples, ces
      cultures ?

      Exactement. Comment former une communauté politique avec des gens avec qui on ne peut pas échanger dans sa propre langue, avec qui on ne partage pas un cadre de références culturelles ? Lorsque
      la Révolution puis la IIIème République ont tout fait pour liquider les spécificités régionales et tuer les “patois” locaux, elles savaient ce qu’elles faisaient. La construction de la nation est
      à ce prix.

       

  2. Trubli dit :

    Dans la plus grande discrétion, les
    dirigeants français ont dejà engagé 40 milliards de fonds publics – c’est à dire, payés par les contribuables français – pour “sauver l’euro” sans que le public ne soit consulté ni même informé
    (2)

     

    Je ne suis pas d’accord. C’est la démocratie représentative française. Des personnes ont été élues et elles
    n’ont pas besoin ou obligation de venir consulter le peuple. Le gouvernement gouverne. Si les citoyens ne sont pas contents qu’ils aillent menacer leurs députés qui ne sont pas que les
    représentants de ceux qui ont voté pour eux. 🙂 

    • Descartes dit :

      Je ne suis pas d’accord. C’est la démocratie représentative française. Des personnes ont été élues et elles n’ont pas besoin ou obligation de venir consulter le peuple. Le gouvernement
      gouverne. Si les citoyens ne sont pas contents qu’ils aillent menacer leurs députés qui ne sont pas que les représentants de ceux qui ont voté pour eux. 🙂

      Vous avez une vision extrêmement restrictive de la démocratie représentative… le peuple ne s’exprime pas seulement par la voie du vote. Il s’exprime aussi par la voie du débat public. Et le
      débat public est une forme de “consultation”. Or, ces dernières années une longue suite de textes et de jurisprudences ont reconnu ce type de consultation comme obligatoire: dès qu’on veut
      construire une ligne haute tension, un gymnase, un canal, un pont, une centrale nucléaire, on est obligé de passer par tout un ensemble de “débat publics” et “d’enquêtes publiques” pour permettre
      au peuple – en général, au peuple des emmerdeurs – d’exprimer leurs avis et de les faire parvenir à ceux qui prendront la décision finale. A cette occasion, différents partis et organisations
      politiques utilisent de tous les moyens à leur disposition – tracts, manifestations, blocages de sites, destuction de matériel – pour se faire entendre.

      Sur les 40 milliards, rien. Ni la majorité de l’époque, ni l’opposition n’ont appelé à un débat sur la question. Personne n’a organisé de manifestation. Personne même n’a évoqué la question à la
      télévision ou dans la presse. La démocratie représentative implique que ce sont les représentants du peuple qui prennent la décision finale. Mais elle n’implique nullement que le peuple ne soit
      pas consulté. Elle laisse dans les mains des représentants le choix du moyen pour cette consultation, c’est tout.

  3. Jard dit :

    Oui, mais nulle part, on ne parle de référendum. Cela sera imposé, accompagné d’un discours de propagande. Les girondins, les vieux, les aisés et d’autres, ce qui fait beaucoup de monde,
    accepteront. La pauvreté explosera et, aux prochaines élections, nous aurons simplement quelques changements dans les scores des uns et des autres, avec un fort effet de vase communicant vers le
    parti le plus proche. Ne faudra-t-il pas 80% de gens dans la misère pour que, peut-être, cela change et pas forcément dans le bon sens?

    • Descartes dit :

      Oui, mais nulle part, on ne parle de référendum. Cela sera imposé, accompagné d’un discours de propagande. Les girondins, les vieux, les aisés et d’autres, ce qui fait beaucoup de monde,
      accepteront.

      Je ne crois pas qu’on pourra aujourd’hui se passer de référendum pour transférer à Bruxelles le pouvoir budgétaire. Le référendum sur le TCE a montré l’extrême sensibilité du sujet
      constitutionnel.

      La pauvreté explosera et, aux prochaines élections, nous aurons simplement quelques changements dans les scores des uns et des autres, avec un fort effet de vase communicant vers le parti le
      plus proche.

      La pauvreté explosera et, aux prochaines élections, nous aurons simplement quelques changements dans les scores des uns et des autres, avec un fort effet de vase communicant vers le parti le
      plus proche. Ne faudra-t-il pas 80% de gens dans la misère pour que, peut-être, cela change et pas forcément dans le bon sens?

      Je ne pense pas qu’on en arrivera là, mais si on devait arriver, le premier a en profiter sera le populisme d’extrême droite, qui a pris une très grosse longueur d’avance en se positionnant
      contre l’Euro et contre l’UE dès cette élection. Mais je ne suis pas aussi pessimiste que vous. Je pense que Todd n’a pas tout à fait tort, et qu’avoir aujourd’hui aux commandes un président qui
      n’a pas d’idées peut se réveler finalement utile…

  4. argeles39 dit :

     “Donnez nous plus de pouvoir -nous disent-ils – et nous résoudrons tous les problèmes”. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’au vu de leurs exploits
    passés, ce “saut fédéral” qu’on nous ressort périodiquement comme la panacée universelle à tous les maux de l’Union ressemble drôlement à un saut dans le vide.

    Saut dans le vide ou bien dans les eaux glacées du libéralisme ?

     

    En d’autres termes, la “technocratie”
    européenne s’est montrée inefficace, incompétente, figée. Les citoyens, qui ne rejettent pas les technocraties à conditions qu’elles soient efficaces, ne l’oublieront pas de
    sitôt.

    Les dirigeants politiques ont aussi été en dessous de tout, en France comme ailleurs.

    Ailleurs, les Papandreou, Zapatero et Cie ont eu le choix entre la guerre (au libéralisme) et le déshonneur, ils ont choisit le
    déshonneur sans éviter la guerre.

    En France, les Delors, Mitterrand et Cie se sont  vautrés  dans le libéralisme pur jus de Thatcher et Reagan, trop pressés  de saboter l’héritage du CNR, même le PCF (qui
    pourtant avait eu une bonne analyse au moment de Maastricht) a fini par capituler (à l’image de ce brave Gayssot qui a fait plus qu’accompagner les privatisations Jospin). Tiens au fait, dans un
    précédent billet où tu te demandais pourquoi le père Hubue écumait les meetings de Hollande, j’avais fait un post en disant « Réponse au moment de la distribution de prébendes »,
    d’après les médias le père Hubue n’est pas passé loin d’une carotte !

     

      Il n’y aura pas de véritable “saut fédéral” tout simplement parce que la légitimité technocratique
    manque, et qu’il n’y a pas de “peuple européen” qui pourrait donner une légitimité politique à une telle “fédération”.

    Si saut fédéral il y a, ce sera en harmonisant par le bas sous les fourches caudines du libéralisme et de la mondialisation
    bisounours, l’Europe n’est pas assez riche pour harmoniser par le haut, à fortiori dans une économie globalisée et libérale, et même si elle l’était ce n’est pas souhaitée par l’oligarchie (comme
    dirait Buffet, il y a bien une lutte des classes et c’est la sienne qui remporte les batailles…….).

     

    Croire dans ces conditions que le “saut
    fédéral” est autre chose qu’une “germanisation” autoritaire de l’Europe, c’est se bercer d’illusions.

    Evidemment, je vois mal l’Allemagne mettre la Grèce et l’Espagne sous perfusion permanente, comme la France le fait avec la Corse.
    Dit autrement, le fédéralisme avec péréquation et transferts de fonds entre zones riches et pauvres ne sera jamais à l’ordre du jour (et sans doute mathématiquement impossible compte tenu des
    écarts de richesses entre peuples n’ayant pas la même culture……)

     

    Et les peuples n’ont pas, en ce moment,
    beaucoup de temps pour les illusions. Un tel schéma n’aurait aucune chance de passer le test d’un référendum.

    On a vu que les référendums c’est de la « roupie de sansonnet » pour les oligarques et leurs valets (TCE 2005,
    Marche arrière de Papandréou ….), par ailleurs on vient d’avoir un référendum avec la victoire de Hollande (pendant la campagne il ne s’est pas exprimé sur l’Europe, mais ce silence en dit long
    sur sa capacité à endiguer les coup de boutoirs des marchés et de Merkel……… )

    • Descartes dit :

      Les dirigeants politiques ont aussi été en dessous de tout, en France comme ailleurs.

      Je ne serais pas trop sévère avec les “leaders politiques”. Après tout, ils n’ont fait que ce pourquoi ils avaient été élus. Quand la “bulle” immobilière était en phase croissante, et que cela
      donnait aux espagnols l’illusion d’une vie facile, je ne me souviens pas que les partis politiques ou les syndicats espagnols aient manifesté dans la rue exigeant du gouvernement un tour de vis.
      Idem en Grèce, en Irlande, au Portugal. Et si ces dirigeants politiques avaient à l’époque donné le tour de vis, je suis sur que ceux-là même qui leur reprochent d’avoir “été au dessous de tout”
      auraient été les premiers à leur sauter dessus en les accusant de tous les maux. Souvenez-vous du débat caricatural sur la “cagnotte” du temps de Jospin…

      Les leaders ont certainement fait des erreurs, et ils ont une responsabilité plus grande que celle du commun des mortels puisque c’est à eux aussi d’informer et d’éduquer les citoyens. Mais on ne
      peut pas non plus leur demander de se suicider.

      On a vu que les référendums c’est de la « roupie de sansonnet » pour les oligarques et leurs valets (TCE 2005, Marche arrière de Papandréou ….),

      C’est faux, et cent mille répétitions n’en fairont pas une vérité. Le rejet par référendum du TCE a rendu impossible de “constitutionnaliser” le droit européen. Et la “marche arrière de
      Papandréou” sous la pression des autres leaders européens montre exactement le contraire de ce que vous voulez lui faire dire. Si le référendum était pour les “oligarques” comme vous dites “de la
      roupie de sansonnet”, pourquoi ane pas laisser Papandréou faire son référendum quitte à passer au dessus si le résultat ne leur convenait pas ? Le fait qu’ils aient réagi aussi violemment
      montrent à quel point ils sont conscients qu’un référendum n’est pas si facile à contrer…

  5. Marencau dit :

    Salut Descartes,

    Déprimant au possible. Et les médias de “féliciter” Hollande d’avoir tenu bon sur la croissance…

    Je suis encore plus pessimiste que toi: je pense que les abandons de souveraineté vont effectivement se faire, car Hollande ne voudra pas être celui qui aura coulé la grande cause européenne.
    Quitte à abdiquer sur tous les points. Et sous l’effet de la peur, je ne suis pas sûr que les peuples dans les différents pays du continent refuseraient ce fédéralisme si on leur dit que c’est ça
    ou le désastre.

    Sous l’effet de l’urgence, beaucoup d’eurosceptiques qui se refusaient d’aller au FN risque de penser à réserver leur vote pour les mieux placés électoralement…

    En revanche, je suis surpris de ta réponse à des commentaires sur la démocratie représentative et le débat public. Ce que tu décris ressemble furieusement à un système ou qui gueule le plus fort
    gagne indépendament de son poids électoral…

    • Descartes dit :

      Je suis encore plus pessimiste que toi: je pense que les abandons de souveraineté vont effectivement se faire, car Hollande ne voudra pas être celui qui aura coulé la grande cause
      européenne.

      Je suis en effet bien plus optimiste. Entre autres choses, parce que ce n’est pas la position d’Hollande qui importe ici. Les “abandons de souveraineté” devront être acceptés par les allemands…
      et je ne crois pas que l’opinion publique allemande soit prête à y consentir.

      En revanche, je suis surpris de ta réponse à des commentaires sur la démocratie représentative et le débat public. Ce que tu décris ressemble furieusement à un système ou qui gueule le plus
      fort gagne indépendament de son poids électoral…

      Pourtant j’ai bien pris le soin d’insister: les élus doivent écouter “ceux qui gueulent le plus fort”, mais ne sont pas tenus de suivre leur avis. Comme disait je ne sais plus qui, “le droit de
      s’exprimer n’inclue pas le droit d’être pris au sérieux”. C’est bien là le rôle de médiation des élus: ils sont élus non pas pour décider à la place du peuple, mais pour décider après avoir
      entendu le peuple.

       

  6. morel dit :

     

    « Le rejet par référendum du TCE a rendu impossible de
    “constitutionnaliser” le droit européen.»

    Permettez-moi d’ajouter : « momentanément ». La logique
    propre à la construction européenne pousse à « l’intégration », entendez la disparition des Etats-Nations. Tant que subsistent des formes de démocratie, les eurocrates sont obligés d’en
    tenir compte mais peut-on songer que cela signifie renoncement de leur part ? Voyez le futur traité qui vise à emporter tout un pan de souveraineté.

    Le paradoxe est que chacun de ces pas nouveaux est préparé par accord des
    gouvernements régulièrement élus, généralement loin des citoyens. Idem pour les ratifications parlementaires.  

    • Descartes dit :

      « Le rejet par référendum du TCE a rendu impossible de
      “constitutionnaliser” le droit européen.» Permettez-moi d’ajouter : « momentanément ».

      Vous avez bien entendu raison. En politique, rien n’est définitivement
      acquis. Mais il ne faut pas pour autant croire que le rejet duTCE n’a eu aucun effet.

      La logique propre à la construction européenne pousse à
      « l’intégration », entendez la disparition des Etats-Nations.

      Vrai. Mais sans faire preuve d’optimisme excessif, lemoins qu’on puisse
      dire est que cette “logique” a perdu l’essentiel de sa dynamique.

  7. marc.malesherbes dit :

    le paradoxe des commentaires, c’est que si on est d’accord avec le contenu d’un billet, on ne le commente pas, et cela peut passer pour de l’indifférence.
    Donc très bon billet pour moi, et rien à dire …

    toutefois j’en profite pour exprimer un sentiment différent (un sentiment, donc non argumenté)
    d’accord avec votre position de sortir de l’euro même si cela exigera aussi de l’austérité (sous la forme d’inflation importée), mais cela demanderait surtout des politiques, un gouvernement, une
    administration compétente pour ne pas prendre des décisions absurdes, contre-productives.
    Or sur ce point, j’ai les plus grand doutes. Ancien de l’industrie, j’avais eu affaire à de la corruption marginale (ou plutôt de mini pot de vin, de “bonnes relations”), mais à une
    administration compétente dans son domaine. Or je découvre l’administration d’aujourd’hui “telle qu’elle est”, comme bénévole. Je suis atterré par son incompétence: des fonctionnaires qui font
    des décrets, circulaires, textes officiels bourrés de fautes d’orthographes et de français, et de plus incohérents (alors que ces textes sont signés jusque par 4 ministres ..). Alors, allez leur
    demander de prendre des décisions intelligentes…

    Parfois je me demande si l’administration européenne n’est quand même pas plus efficace. Et que l’austérité allemande, sous gauleiter UMP, puis maintenant PS, ce ne sera pas moins mal …

    • Descartes dit :

      Or je découvre l’administration d’aujourd’hui “telle qu’elle est”, comme bénévole. Je suis atterré par son incompétence: des fonctionnaires qui font des décrets, circulaires, textes officiels
      bourrés de fautes d’orthographes et de français, et de plus incohérents (alors que ces textes sont signés jusque par 4 ministres ..). Alors, allez leur demander de prendre des décisions
      intelligentes…

      Toutà fait. Certains secteurs de notre administration sont véritablement en déshérence après des années de coupes budgétaires et de d’abandon du politique. Les gens les plus brillants vont
      ailleurs, dans les secteurs que le politique considère prioritaires, les autres deviennent des dépotoirs où l’on envoie les gens qu’on n’a pas envie de voir ailleurs. C’est particulièrement vrai
      dans les services de ce qui était autrefois le ministère de l’Industrie, ministère qui depuis vingt ans n’intéresse plus personne, puisqu’il n’y a plus de politique industrielle. Redonner à
      l’Etat des capacités d’intervention, c’est aussi reconstruire une fonction publique motivée et de qualité.

      Parfois je me demande si l’administration européenne n’est quand même pas plus efficace.

      Je peux t’assurer que non. Non seulement elle est faite de gens bien moins compétents, mais en plus elle n’a aucun esprit de service public, et surtout elle est infiniment plus corrompue.

      Et que l’austérité allemande, sous gauleiter UMP, puis maintenant PS, ce ne sera pas moins mal …

      C’est ce que beaucoup de français ont pensé en 1940. Heureusement qu’il y avait une minorité d’irreductibles à croire que si la France avait perdu une bataille, la France n’avait pas perdu la
      guerre…

  8. Marencau dit :

    Les “abandons de souveraineté” devront être acceptés par les allemands… et je ne crois pas que l’opinion publique allemande soit prête à y consentir.

    Si c’est uniquement faire vérifier par un organe technocratique la conformité des budgets Allemand en échange de pouvoir surveiller tous les autres, je ne suis pas sûr qu’ils refusent.
    Surtout lorsque la politique monétaire, etc. leur est adaptée.

    Mais si on aborde le thème des transferts budgétaires, les Allemands ne vont rien lâcher. Paradoxalement, c’est la défense de leurs intérêts nationaux (avec peut-être à terme une sortie de
    l’euro) qui risque de nous sauver… 

    C’est bien là le rôle de médiation des élus: ils sont élus non pas pour décider à la place du peuple, mais pour décider après avoir entendu le peuple.

    Très intéressant. Cela dit, ça pose la question de l’organisation du débat et du rôle des médias. Histoire que les lobbies qui disposent du plus d’argent n’aient pas le plus de poids, etc.

    • Descartes dit :

      Si c’est uniquement faire vérifier par un organe technocratique la conformité des budgets Allemand en échange de pouvoir surveiller tous les autres, je ne suis pas sûr qu’ils
      refusent.

      “Contrôler la conformité du budget allemand” implique l’existence d’une norme de “conformité”. Or, les allemands savent très bien que donner à un “organe technocratique” le pouvoir de contrôler
      la conformité implique céder le pouvoir budgétaire à l’organie qui fixe cette norme… imagine-toi que la “norme” devienne demain un déficit obligatoire supérieur à 5% pour tout pays ayant un
      excédent de son commerce extérieur ?

      Paradoxalement, c’est la défense de leurs intérêts nationaux (avec peut-être à terme une sortie de l’euro) qui risque de nous sauver…

      Exactement. Pour une fois le nationalisme allemand aura servi à quelque chose.

      Histoire que les lobbies qui disposent du plus d’argent n’aient pas le plus de poids, etc.

      Un peu comme Greenpeace, tu veux dire ?

  9. Marencau dit :

    imagine-toi que la “norme” devienne demain un déficit obligatoire supérieur à 5% pour tout pays ayant un excédent de son commerce extérieur ?

     

    Je ne pense pas que les Allemands s’imaginent ne pas avoir une UE à leur sauce. Le jour où ils se font imposer ça, ils dénoncent les traités… et ce n’est pas demain la veille.

     

    Pour une fois le nationalisme allemand aura servi à quelque chose.

     

    Pour autant, il me fait peur ce nationalisme Allemand. En France, nous avons tranché la question sur ce qu’est une nation. Peut-être à cause de leur histoire récente, ils n’ont pas pu aller
    au-delà du “discours à la nation Allemande”.

     

    Problème: quand on gratte un peu, on tombe vite sur une vision racialiste qui mène très vite à un nationalisme étriqué…

     

    Un peu comme Greenpeace, tu veux dire ?

     

    Exactement… je pense que sans aucun cadre au débat, ce sont les fous furieux qui finissent par avoir le dessus, au détriment de la raison.

    • Descartes dit :

      Je ne pense pas que les Allemands s’imaginent ne pas avoir une UE à leur sauce. Le jour où ils se font imposer ça, ils dénoncent les traités…

      Je pense que les allemands sont au contraire bien plus réalistes que nous, et qu’ils ne signent pas des traités sans prévoir qu’ils peuvent ensuite être utilisés contre eux. Il n’y a qu’à voir
      les garanties qu’ils ont exigé et obtenu sur le statut de la BCE et des autres banques centrales avant d’accepter l’abandon du marc.

      Pour autant, il me fait peur ce nationalisme Allemand. En France, nous avons tranché la question sur ce qu’est une nation. Peut-être à cause de leur histoire récente, ils n’ont pas pu aller
      au-delà du “discours à la nation Allemande”.

      Chacun a son histoire. La France est un pays historique, ethnique et linguistiquement hétérogène dont l’idée nationale s’est construit à partir de la fin du moyen âge autour d’un Etat centralisé
      et fort. L’Allemagne st un pays historique, ethnique et linguistiquement homogène dont l’idée nationale se construit à partir du XIX siècle malgré un Etat toujours faible. C’est là qu’on trouve
      l’origine des deux visions nationales opposées, dont Renan se fit le porte-parole en France et Fichte en Allemagne. Il n’y a aucune raison que ces visions évoluent, puisque les réalités restent
      toujours les mêmes.

       

  10. Trubli dit :

    En essayant de penser à ce à quoi l’UE pourrait ressembler à terme quand les fédéralistes auront réussi leur tâche, j’ai trouvé le cas du Royaume-Uni.

    Ce qui est frappant pour un français quand on pense au Royaume-Uni c’est ce système d’une royauté reignant sur 4 nations : l’anglaise, la galloise, l’écossaise et la nord-irlandaise. 

    Lors des Jeux Olympiques ces nations concourrent sous un seul drapeau, l’Union Jack. Mais lors des compétitions de rugby ou de football chacune des ces nations -sauf Irlande du Nord – concourre
    indépendamment. Quelle bizarrerie ! 

    Qu’est-ce qui fait tenir cet ensemble ? Selon moi, il y a deux choses : la Couronne et la domination démographique, économique et linguistique de l’Angleterre.

    Le Royaume-Uni pourrait-il continuer d’exister demain si la royauté était abolie. Je ne le pense pas, et ce surtout depuis 1999 où il y a un Premier ministre pour chacune de ces nations. Le
    Royaume-Uni continuerait-il d’exister demain si le pays entrait dans l’Euro ? Non. Dans un régime de libre-échange intégral, les petites nations n’ont plus le problème de la masse critique de
    leur marché. Pays de Galle et Ecosse pourraient s’émanciper plus rapidement de la tutelle anglaise avec l’Euro. Je pense que les Anglais ont compris ce qui leur pendait au nez et notamment pour
    cette raison refusent d’entrer dans l’Euro. 

    Et l’Europe dans tout celà me direz-vous ? Je pense que les pays de l’Europe du Sud subiront un Acte d’Union à l’Ecossaise. Les pays du sud de l’Europe devenant une dépendance de l’Allemagne,
    l’Anglais devenant la langue de fait de l’Union, les parlements nationaux étant abolis au profit d’un parlement unique, des mouvements indépendantistes nostalgiques de la Francenaitront, mais
    entre temps des régions de France auront fait secession, par exemple la Corse, la Bretagne ou la Pays Basque. Cela reste encore au stade de politique fiction. Mais l’avenir pourrait ressembler à
    celà.

    Petit apparté. En cette période de désintégration de la Belgique, que pensez-vous de cette idée d’une réunion de la Wallonie à la France.Elle me semble périlleuse car la Wallonie serait difficile
    à intégrer. Notre organisation politique où l’Etat joue un rôle prépondérant est à l’inverse du leur centré sur les communes. Et puis peut-on accepter la Wallonie et renoncer à Bruxelles ?

    • Descartes dit :

      En essayant de penser à ce à quoi l’UE pourrait ressembler à terme quand les fédéralistes auront réussi leur tâche, j’ai trouvé le cas du Royaume-Uni. Ce qui est frappant pour un français
      quand on pense au Royaume-Uni c’est ce système d’une royauté reignant sur 4 nations : l’anglaise, la galloise, l’écossaise et la nord-irlandaise. 

      Je vous avoue que je trouve l’exemple un peu saugrenu. Les situations n’ont rien de comparable. D’abord, les quatre “nations” ont des poids démographiques très différents: l’Angleterre, avec 52
      millions d’habitants, représente 84% de la population du Royaume-Uni, alors que l’Ecosse n’en compte que 5 millions, le pays de Galles 3 millions et l’Irlande du Nord seulement 1,7 millions.
      Difficile de comparer avec l’UE, qui compte au moins six états dont la population dépasse les 40 millions, et trois de taille relativement proche autour des 70 millions.

      La deuxième remarque, qui dérive de la première, est que l’un de ces “royaumes” a dominé les trois autres économiquement, politiquement et militairement. Là encore, toutes les tentatives d’un
      état de l’UE de faire de même ont échoué: Napoléon au XIXème, Hitler au XXème siècles…

      Qu’est-ce qui fait tenir cet ensemble ? Selon moi, il y a deux choses : la Couronne et la domination démographique, économique et linguistique de l’Angleterre.

      Il n’y a pas que ça. Les liens d’interdépendance économique, politique et symbolique entre les quatre “royaumes” sont extraordinairement forts. Lorsqu’on habite longtemps dans ce pays – c’est mon
      cas – on finit par réaliser que les rapports entre gallois, écossais, anglais et irlandais sont ceux de ces vieux couples qui se chamaillent tout le temps, qui se menacent réciproquement de
      divorce, mais qui ne pourraient pas vivre séparés. C’est un peu comme nous avec la Corse ou la Bretagne. Ces gens qui passent leur temps à fourrer sous le nez des “estrangers” leurs hermines et
      leurs têtes de maure, mais qui ont poussé de hauts cris lorsqu’un politicien français a osé dire “s’ils veulent l’indépendence, qu’ils la prennent”…

      Le Royaume-Uni continuerait-il d’exister demain si le pays entrait dans l’Euro ? Non. Dans un régime de libre-échange intégral, les petites nations n’ont plus le problème de la masse critique
      de leur marché.

      Ce n’est pas aussi simple. Même si la taille du marché n’est pas critique, la question de la mutualisation des risques continue à se poser. Un jour, les champs de gaz et de pétrole de la Mer du
      Nord se tariront. Et ce jour-là, une Ecosse indépendante sera dans un merde noire, bien plus noire que si elle n’est qu’une province d’un Etat plus éténdu organisant la péréquation entre les
      activités en déclin et celles en expansion.

      Je pense qu’après l’âge d’or des “indépendentismes” dans la période 1970-90, on revient à la raison. Corses et Bretons ne parlent plus d’indépendence mais “d’autonomie” (i.e. les autorités
      locales décident de tout et l’Etat central paye les factures, un peu comme avec la décentralisation). On voit même les autorités locales – c’est le cas en Espagne – refuser certains transferts de
      compétences ou demander qu’elles soient “récentralisées”. Avec l’insécurité et la crise, les gens réalisent qu’il vaut mieux être la queue d’un lion que la tête d’une souris.

      Petit apparté. En cette période de désintégration de la Belgique, que pensez-vous de cette idée d’une réunion de la Wallonie à la France.Elle me semble périlleuse car la Wallonie serait
      difficile à intégrer. Notre organisation politique où l’Etat joue un rôle prépondérant est à l’inverse du leur centré sur les communes.

      Personnellement, j’y serais favorable mais à une condition: que la population de la Wallonie demande la réunion par un référendum dont la question contienne explicitement une formule indiquant
      sans ambiguïté que la réunion implique dans un délai qui ne dépassera pas dix ans l’extension à la Wallonie de l’ensemble de la législation française sans adaptation ni statut particulier. Il est
      hors de question d’accorder un “droit local” sous quelqu forme que ce soit. Et bien entendu, côté français la réunion doit être votée par référendum dans les mêmes termes.

       

  11. Marencau dit :

    Pardonnez tous les deux mon interruption dans la conversation, mais…

     

    “Avec l’insécurité et la crise, les gens réalisent qu’il vaut mieux être la queue d’un lion que la tête d’une souris.”

     

    Le problème, c’est que c’est exactement comme cela que les fédérastes justifient la nécessité de l’UE ! La France est trop petite, etc.

     

    Bon, la différence est de taille: la nation recouvre une réalité concrète, la nation Européenne reste un fantasme. Mais c’est là où il te disent que la nation se fabrique, que c’est artificiel.
    Et qu’on construira la nation Européenne comme on a fabriqué la Française…

     

    A mon avis, on ne peut aller contre la volonté du peuple qui n’ira pas dans le sens fédéral. Dans un futur plus ou moins lointain, peut-être ? Mais lentement… très lentement. Et effectivement,
    ça pourrait se transformer en force. Mais pour le moment, cette intégration fédérale ne peut être qu’antidémocratique et, finalement, échouer.

    • Descartes dit :

      Le problème, c’est que c’est exactement comme cela que les fédérastes justifient la nécessité de l’UE ! La France est trop petite, etc. Bon, la différence est de taille: la nation recouvre
      une réalité concrète, la nation Européenne reste un fantasme.

      Exactement. Je pense qu’il faut chercher à constituer la plus grande “communauté politique” possible. Le problème est justement que l’UE n’est pas, et ne peut pas être – du moins dans un avenir
      prévisible – une communauté politique: les “citoyens européens” ont trop peu en commun pour pouvoir voir en l’autre un autre soi-même à qui on doit une solidarité inconditionnelle. Les réactions
      allemandes à la crise grecque illustrent parfaitement ce point.

      Mais c’est là où il te disent que la nation se fabrique, que c’est artificiel. Et qu’on construira la nation Européenne comme on a fabriqué la Française…

      Il a fallu cinq siècles à un état fort et centralisateur pour fabriquer la nation française. Et même le plus idéaliste des eurolâtres n’imagine que l’UE pourrait demain devenir un état unitaire.
      A la rigueur, ils envisagent une “nation européenne” fédérale qui ressemble plutôt à l’Allemagne. Seulement, l’Allemagne s’est construite comme nation autour de l’homogénéité ethnique et
      linguistique, quelque chose qui semble un peu difficile d’invoquer pour l’UE…

       

  12. Qu’est-ce qui permet de dire que la France est “ethniquement et linguistiquement plus hétérogène” que l’Allemagne?

    • Descartes dit :

      C’est la simple constatation d’un fait. En 1870, la moitié des français n’avait pas le français pour langue d’échanges usuels. On parlait à l’époque en France des dialectes de racines totalement
      différentes: celtiques, germaniques, latines et proto-latines… et cela sans compter le basque, qui n’appartient à aucune de ces racines. En fait, le français s’est imposé d’abord comme langue
      d’échange entre des populations qui n’auraient pas pu se comprendre si chacune avait parlé sa langue. Ce n’est pas le cas en Allemagne: s’il y a une certaine diversité des dialectes, ils sont
      tous de même racine germanique et généralement compréhensibles les uns par les autres…

       

  13. La grande majorité des Français parlaient tout de même depuis le Moyen Âge soit une langue d’oïl, soit une langue d’oc, deux groupes linguistiques apparentés appartenant à la famille des langues
    romanes issues du latin. Il est même probable que les deux groupes se comprenaient mutuellement durant une partie du Moyen Âge. Les autres groupes ne concernaient qu’un nombre restreint de
    Français, à la périphérie du pays: le francique une petite partie de la Lorraine, le flamand quelques districts du nord, le basque moins d’un département si j’ai bonne mémoire. L’alsacien et le
    breton celtique formaient les deux seules langues non-latines vraiment conséquentes. On s’exagère, je pense, l’hétérogénéité linguistique de la France. Par ailleurs, le français n’a pas attendu
    l’école de la III° République pour se diffuser, lentement mais surement.

     

    Je crois aussi qu’on s’exagère peut-être un peu l’homogénéité linguistique allemande. Il existait bien un bas-allemand (plus proche du néerlandais m’avait dit un de mes professeurs d’allemand
    originaire de Basse-Saxe), un moyen-allemand et un haut-allemand, certes tous d’origine germanique. Mais les langues en France étaient très majoritairement d’origine latine. Par ailleurs, la
    situation était un peu plus complexe à l’est où des langues slaves restèrent longtemps pratiquées (les Sorabes de Lusace ont d’ailleurs encore un statut particulier si je ne me trompe). Il y
    avait du côté de la Prusse des groupes parlant des dialectes polonais ou même baltes. A l’est de l’Elbe se trouvait un monde beaucoup moins homogène. Je pense aussi aux Silésiens, souvent
    germanophones mais portant des noms à consonance slave. 

    • Descartes dit :

      La grande majorité des Français parlaient tout de même depuis le Moyen Âge soit une langue d’oïl, soit une langue d’oc,

      Mais des minorités importantes ne parlaient ni l’un ni l’autre: les Alsaciens-Lorrains, les Bretons, les Basques, les Flamands, les Corses, les Catalans… Mais même en supposant que les langues
      d’oïl et d’oc cela fait dejà deux (avec plus d’une dizaine de dialectes pour la première, et six pour la seconde…). C’est dejà bien plus qu’en Allemagne.

      Il est même probable que les deux groupes se comprenaient mutuellement durant une partie du Moyen Âge.

      Il semble que ce ne soit pas le cas. En tout cas, l’occitan n’est pas compréhensible pour un français moderne (qui descend d’un des dialectes de la langue d’oïl), et vice-versa.

      On s’exagère, je pense, l’hétérogénéité linguistique de la France.

      Je ne le crois pas. Et un éléments qui me conduit à cette conclusion est l’attitude de la République. Pourquoi a-t-elle combattu avec autant de hargne les “patois” s’ils n’étaient pas une menace
      pour l’homogénéité de la République ? Je pense au contraire que l’hétérogéneité était telle qu’il était impossible d’envisager une administration et une conscription commune sans une puissante
      politique d’homogénéisation.

      Par ailleurs, le français n’a pas attendu l’école de la III° République pour se diffuser, lentement mais surement.

      Il est devenu la langue administrative dès le XVIème siècle (edit de Villiers-Cotterêts) ce qui dejà obligeait les gens qui travaillaient pour l’administration à le connaître. Mais il est resté
      jusqu’au XIXème siècle la langue des villes et des lettrés.

      Je crois aussi qu’on s’exagère peut-être un peu l’homogénéité linguistique allemande.

      Elle n’était certainement pas parfaite, mais elle est bien plus forte qu’en France. Là encore, il y a des éléments politiques qui confirment cette hypothèse: comment l’Allemagne aurait-elle pu
      faire de la langue l’un des éléments de la nationalité si elle avait connu une diversité importante ?

       

  14. Voici un lien vers une carte de la répartition des langues et dialectes en France:

    http://histoiresdefamille.voila.net/im_dialectes_france.html

     

    On constate que les langues d’oïl couvraient plus de la moitié du pays (et la partie la plus peuplée de surcroît). Si on y ajoute les langues d’oc, plus des trois quarts du pays sont couverts. Je
    ne suis pas d’accord quand tu écris “des minorités importantes”. Je n’en compte que trois: Bretons (et encore, une petite moitié de la Bretagne est concernée), Corses (qui parlent une langue
    latine du groupe italien) et Alsaciens. Les autres dialectes ne concernent le plus souvent que quelques milliers ou dizaines de milliers de locuteurs, aux marges du pays.

     

    Je ne dis pas que l’hétérogénéité n’existait pas. Je dis qu’on a une nette tendance à l’exagérer. La diversité est à la mode. Même la République y avait intérêt après tout: n’était-ce pas, pour
    un régime né d’une défaite, se faire gloire que de parachever l’unité du pays? Le fait est que la très grande majorité des Français parlait des langues romanes, apparentées, et toutes issues du
    bas-latin. C’est pourquoi j’écrivais qu’elles étaient probablement intercompréhensibles durant une partie du Moyen Âge, mais elles ont cessé de l’être par la suite, nous sommes d’accord.

     

    Par ailleurs, vérification faite, le bas-allemand, comme le haut-allemand compte chacun une dizaine de dialectes, le moyen-allemand un peu moins. J’ajoute que invoquer la langue comme facteur
    d’unité ne préjuge pas nécessairement de la réalité de cette unité linguistique. Quand Mazzini au XIX° dit que “vingt-deux millions d’Italiens parlent la même langue”, il exagère… Il y a une
    différence entre le piémontais et le sicilien.

    • Descartes dit :

      On constate que les langues d’oïl couvraient plus de la moitié du pays (et la partie la plus peuplée de surcroît).

      Ta carte n’est pas datée. En regardant l’ensemble du site, on en tire la conclusion qu’il s’agit des aires d’influence actuelles des différentes langues et patois. Pour tirer une
      conclusion par rapport à notre discussion, il faudrait tirer la même carte… au XVIème siècle, c’est à dire, avant que commence la “grande homogénéisation” nationale…

      Je n’en compte que trois: Bretons (et encore, une petite moitié de la Bretagne est concernée), Corses (qui parlent une langue latine du groupe italien) et Alsaciens.

      Il faut rajouter le basque, l’artipan, le francique et le flamand, du moins si je me fonde sur la carte que tu proposes.

      Je ne dis pas que l’hétérogénéité n’existait pas. Je dis qu’on a une nette tendance à l’exagérer.

      Il est probable que certains “exagèrent”, mais je pense qu’il n’y a pas d’éxagération à dire que les populations qui ont constitué la France comme nation sont bien plus hétérogènes que celles qui
      ont constitué l’Allemagne. Le seul bémol que j’apporterais concerne le domaine du droit: le territoire français partage un élément commun, celui d’avoir été romanisé.

      La diversité est à la mode. Même la République y avait intérêt après tout: n’était-ce pas, pour un régime né d’une défaite, se faire gloire que de parachever l’unité du pays?

      Mais la IIIème République ne s’est pas seulement “fait gloire” de la chose. Elle a pris des mesures radicales, certes dans la continuité de ce que les républiques précédentes avaient voulu mais
      pas eu les moyens de faire, mais radicales quand même. L’exigence absolue de “francisation” à travers de l’ecole et de la conscription n’aurait pas été jugée si vitale si l’hétérogéneité n’avait
      pas été réelle.

       

  15. “Ta carte n’est pas datée”

    C’est exact. Les cartes de ce type sur internet le sont rarement, c’est regrettable. Toutefois, il s’agit de la répartition linguistique “classique” qui en réalité a peu varié depuis le Moyen
    Âge. Cette carte est la même que celle que propose “l’Atlas de l’Histoire de France IX°-XV° siècles” d’Olivier Guyotjeannin aux éditions Autrement, p.88. La carte s’intitule “Géographie des
    langues et des dialectes XII°-XIX° siècle”. En général, les frontières linguistiques ont varié au mieux de quelques kilomètres ou dizaines de kilomètres. On note une progression des langues d’oïl
    en Bretagne au détriment du celtique, mais cela commence avant le XVI° siècle. Le basque, le francique et le flamand ont aussi eu tendance à reculer légèrement, mais il n’y a pas eu de
    spectaculaires mouvements des limites linguistiques depuis la fin du Moyen Âge.

     

    “Mais la III° République a pris des mesures radicales”

    C’est vrai, et je ne dis pas le contraire. Mais toutes les nations du XIX° connaissent le problème: des patois, il y en avait aussi en Italie et en Allemagne. Il y a eu là aussi unification
    linguistique. L’Allemagne et l’Italie sans doute était un peu moins hétérogènes que la France. Je me souviens d’un de mes professeurs d’allemand (pas le même que précédemment) qui nous avait dit
    s’être retrouvé à tenir une conversation avec un Allemand du sud parlant un patois haut-allemand donc (hors c’est le haut-allemand qui est à l’origine de l’allemand moderne si je ne m’abuse). Il
    n’avait rien compris… La structure fédérale de l’Allemagne a peut-être freiné les brassages de population, plus qu’en France, où Bretons, Limousins et Auvergnats, par exemple, viennent nombreux
    s’installer à Paris. Du coup, l’Allemagne a (peut-être) moins ressenti le besoin de faire une politique d’unification autoritaire. A un moment pourtant, la décision d’enseigner partout un
    allemand “standard” a bien dû être prise… En 1914, un habitant de Montpellier devait être déjà plus français que languedocien, mais un habitant de Stuttgart était-il plus allemand que
    wurtembergeois?

    • Descartes dit :

      L’Allemagne et l’Italie sans doute était un peu moins hétérogènes que la France.

      Certainement. Au point que cette hétérogénéité n’a été ni dans un cas ni dans l’autre une menace pour l’unité nationale.

      Du coup, l’Allemagne a (peut-être) moins ressenti le besoin de faire une politique d’unification autoritaire.

      Je pense que tu prends l’effet pour la cause. Si l’Allemagne n’a pas ressenti le besoin de faire une politique d’uniformisation autoritaire, c’est parce que cette politique n’était pas nécessaire
      à la construction de l’unité allemande, alors qu’elle était de toute évidence indispensable pour construire l’unité française.

      A un moment pourtant, la décision d’enseigner partout un allemand “standard” a bien dû être prise…

      Certainement, mais comme simple langue d’échange. Je ne pense pas qu’on ait jamais interdit aux petits allemands de parler “patois” dans la cour de récréation.

      En 1914, un habitant de Montpellier devait être déjà plus français que languedocien, mais un habitant de Stuttgart était-il plus allemand que wurtembergeois?

      Cela dépend de ce qu’on appelle “être allemand” ou “être français”… par ailleurs, en 1914 un paysan languedocien se sentait certainement très français, et son dévouement dans les tranchées le
      montre sans ambiguïté. Mais en 1850 ? j’en suis moins sur…

       

       

  16. “Mais en 1850? J’en suis moins sur…”

    Eh bien, lorsqu’on regarde les levées de volontaires de 1792 (à ne pas confondre avec la levée en masse de 1793, plus “autoritaire”), on constate que le patriotisme ne fut pas l’apanage des
    régions parlant déjà le français, même si on note une forte mobilisation en Île-de-France.

    Certains départements du sud, de langue d’oc ou franco-provençal, ont consenti un effort considérable pour défendre une nation qui, tu seras d’accord, commençait tout juste à s’affirmer:
    Bouches-du-Rhône, Var, Drôme, Gard. Certes, ces régions étaient menacées, mais on ne note pas la même mobilisation dans les Hautes Alpes ou en Isère par exemple. L’Ardèche, la Corrèze ou la
    région lyonnaise se mobilisent aussi fortement, bien qu’on n’y parle pas la langue d’oil. Au contraire, la Vendée et la Haute-Bretagne de langue d’oil sont moins enthousiastes…

     

    Je ne suis pas convaincu que la force du sentiment national soit nécessairement liée à la pratique courante de la langue française. Malgré son hétérogénéité, la France a globalement fait front en
    1792, et le dévouement de nombreux Méridionaux ne le cède en rien à celui des “francophones” du Bassin Parisien. Bien sûr, les “volontaires” l’étaient plus ou moins, mais il serait malhonnête de
    nier le patriotisme de nombre d’entre eux. Preuve que le sentiment national n’a pas attendu l’unification linguistique pour se fortifier.

     

    Voici la source, si la question t’intéresse (et je crois qu’elle t’intéressera): 

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1988_num_272_1_1205

    Bertaud est un spécialiste reconnu de cette période.

    • Descartes dit :

      Eh bien, lorsqu’on regarde les levées de volontaires de 1792 (à ne pas confondre avec la levée en masse de 1793, plus “autoritaire”), on constate que le patriotisme ne fut pas l’apanage des
      régions parlant déjà le français, même si on note une forte mobilisation en Île-de-France.

      On note surtout – comme le signale l’article que tu cites – que la mobilisation fut beaucoup plus forte, qui tendaient à parler français, et plus faible dans les campagnes, ou le patois était
      nettement plus vivace… et qu’en dehors des départements frontaliers et donc menacés, c’est surtout l’Ile de France qui s’est mobilisée… cela tend à nuancer l’idée que le sentiment national
      est indépendant de l’unification linguistique.

       

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