« Un problème bien posé est à moitié résolu » (H. Bergson)
Il fut un temps ou les polémiques de l’été touchaient des questions banales. C’était « topless or not topless ? » plutôt que « burkini or not burkini », et les affaires se réglaient rarement devant le Conseil d’Etat. Hélas, trois fois hélas, le temps de l’insouciance est bien derrière nous, et en cette fin d’août des gens qui auraient mieux fait de passer leurs jours les pieds en éventail jouissant du dolce farniente ont préféré passer par les prétoires pour défendre la liberté absolue de chacun d’entre nous de couvrir son corps de la tête aux pieds lors de la baignade.
Pourtant, cela fait de longues années que des arrêtés concernant les « tenues décentes » sont en vigueur dans de nombreuses cités balnéaires. Des arrêtés qui interdisent de se promener en maillot de bain en dehors de la plage, par exemple. A ma connaissance, aucun de ces arrêtés – qui portent une atteinte évidente au « droit d’aller et venir » dont le Conseil d’Etat se fait le gardien – n’a jamais été attaqué, tout simplement parce que tout le monde – y compris ceux qui aimeraient aller en maillot de bain au restaurant ou au concert – acceptent qu’il y a dans notre société des règles de coexistence, qui se manifestent par exemple dans le fait que certaines tenues sont adaptées à certaines circonstances et à certains contextes. Lorsque l’évêque décide de faire un petit plongeon dans la grande bleue, il laisse sa mitre et sa soutane à l’église, et met un maillot de bain comme tout le monde. Et il n’y a pas besoin d’arrêté municipal qui lui interdise de porter ses vêtements sacerdotaux à la plage : le regard de l’autre, la peur du ridicule est bien plus efficace que celle des gendarmes.
Mais pour que je ressente le regard de l’autre, encore faut-il que l’opinion de cet « autre » m’importe. Et c’est un peu cette contradiction que l’affaire du « burkini » met en évidence. D’un côté, une société qui avance à grand pas vers un état ou seul mon propre regard compte, et l’autre n’a qu’aller se faire cuire un œuf. En d’autres termes, une société où je suis le seul juge de moi-même, et où tous les autres – politiques, professeurs, opinion publique – sont priés de garder leur opinion pour eux. Mais d’un autre côté, cette insensibilité à l’opinion de l’autre en général s’accompagne d’une hypersensibilité à l’opinion des membres de ma tribu, de mes pairs, de mes « amis » façon facebook. Et surtout, des membres de ma communauté. Celle qui ose défier l’ensemble de la collectivité en portant le voile intégral n’ose pas l’enlever de peur de ce que dirait sa « communauté » ou sa famille.
On a tort de lier le phénomène communautaire à l’immigration. Il existe depuis bien longtemps des « communautés » parfaitement autochtones. Il y a « communauté » là où il y a une collectivité humaine dont les membres partagent des habitudes, des croyances, des règles, une sociabilité particulière, qui aboutissent à la création de solidarités exclusives. Les chasseurs, les skinheads, les militants de certains partis politiques constituent des « communautés ». Cependant, dans ce système les « communautés » issues de l’immigration ont un statut particulier. Cela tient au fait que personne ne naît chasseur ou skinhead, et que tout le monde peut le devenir. En d’autres termes, il s’agit de collectivités d’élection. Leur frontière avec l’ensemble de la collectivité sont perméables. Mais surtout, ces collectivités n’ont pas la prétention – ni les moyens – de proposer une alternative à la collectivité nationale. Elles offrent un complément de sociabilité à personnes déjà socialisées dans une collectivité plus vaste. Les « communautés » issues de l’immigration ont cela de particulier qu’elles constituent une projection d’une société fonctionnelle existant ailleurs, et pour cette raison elles offrent une alternative complète aux règles, aux habitudes, à la sociabilité de la collectivité d’accueil. C’est pour cela qu’elles entrent inévitablement en conflit avec celle-ci, qui a ses propres règles, sa propre sociabilité, ses propres habitudes et qui a les moyens de les imposer.
Il y a chez l’être humain un réflexe de conservation qui nous pousse à préserver les cadres dans lesquels nous avons été élevés et qui nous ont fait tels que nous sommes. C’est pourquoi les « communautés » immigrées craignent avant tout l’assimilation. Car l’assimilation marque la disparition de la « communauté » en tant qu’objet de la sphère publique en rangeant les origines dans le domaine du privé. Les « communautés » développent donc des mécanismes de défense pour empêcher l’assimilation de leurs membres. Et le mécanisme le plus évident est celui qu’on pourrait appeler le mécanisme de séparation. Il consiste en un ensemble de mesures, de règles, d’obligations qui font que les membres de la « communauté » vivent entre eux, séparés du reste de la collectivité d’accueil. Cette séparation peut être obtenue de différentes manières : par l’endogamie, par la concentration géographique suivie d’une occupation du terrain qui fait partir les non-membres de la « communauté » ; par le port de signes apparents destinés à marquer l’appartenance ; par l’observation pointilleuse de règles limitant le contact physique, la pratique de certaines activités sociales et sportives, la consommation de certains mets. Et le tout accompagné d’une attitude agressive refusant tout compromis, de nature à provoquer chez l’autre le rejet. Car il faut toujours garder en tête que le but de ces comportements n’est pas de se faire accepter, mais de se faire exclure, cette exclusion étant la plus sure manière de protéger la « communauté » des influences corruptrices de la société d’accueil. Rien ne protège mieux l’unité d’une communauté que la conviction d’être une forteresse assiégée.
Ce raisonnement explique pourquoi ces « communautés » observent souvent les préceptes sociaux et religieux de leur société d’origine bien plus strictement, plus rigoureusement, plus agressivement dans le pays d’accueil qu’ils ne le faisaient dans le pays d’origine, et que cet intégrisme soit plus présent chez les jeunes nés dans le pays d’accueil – et dont l’identité communautaire est plus faible – alors qu’il est absent chez les immigrants de la première génération, formés dans leur société d’origine et craignant moins la perte des « racines ».
Ces questions ont été particulièrement analysées par les philosophes juifs qui se sont penchés sur leur propre communauté. Car s’il est une « communauté » qui a de l’expérience dans la préservation d’une vie communautaire au sein d’une société d’accueil différente, c’est bien la communauté juive. La grande bataille au sein des juifs français est depuis longtemps celle qui oppose – très violemment quelquefois – les « assimilationnistes » aux « traditionnalistes », les seconds reprochant aux premiers de mettre en danger l’existence même d’une culture juive qui ne peut subsister pour eux sans une séparation stricte – qui implique paradoxalement un certain antisémitisme comme l’avait fort justement analysé Sartre. L’agressivité des expressions du CRIF n’est en rien le fruit du hasard. Elle a la même fonction que la « burkini » ou les prières de rue islamiques : provoquer un rejet qui à son tour isole la « communauté » pour la protéger de l’assimilation. C’est pourquoi les organismes comme le CRIF alimentent l’antisémitisme autant qu’ils le combattent.
Il y a dans l’affaire de la burkini – que ce soit chez les partisans ou chez les adversaires de l’interdiction – une incompréhension fondamentale qui obscurcit tout le débat. La burkini – comme le voile – n’ont rien à voir avec la laïcité ou la condition de la femme. L’objectif de ces symboles est tout autre : c’est de séparer ceux qui sont dans la « communauté » de ceux qui sont en dehors, et d’empêcher les règles de la sociabilité française de supplanter celles héritées de la tradition des pays d’origine. Le burkini, le voile – mais aussi le Ramadan et toute la batterie d’interdits alimentaires, sociaux et sexuels – sont une sorte de « mur de Berlin » dressé autour de la « communauté » pour empêcher les estrangers d’y rentrer et les membres d’en sortir. Combien de collègues hésitent à inviter un musulman ou un juif à leur table, ne sachant pas ce qu’on peut ou non leur servir, ce qu’ils peuvent ou non faire à telle ou telle date ?
Est-ce grave, docteur ? Après tout, diront certains, quel est le problème si les gens veulent vivre séparés les uns des autres ? Pourquoi obliger tout le monde à dialoguer, pourquoi socialiser les gens de force si certains veulent s’isoler et vivre exclusivement avec des gens qui leur ressemblent ? Dans la réponse à cette question, il y a implicite un choix de société. Dans notre pays, nous avons mis en place toutes sortes de mécanismes de solidarité et de redistribution : nous avons fait en sorte que le prix de l’électricité ou celui du timbre soit le même partout – ce qui revient à faire payer plus certains, les clients « rentables », pour que d’autres, les « non-rentables », aient la même qualité de service. Chez nous, les citoyens des régions riches continuent à payer pour que les citoyens des régions plus pauvres aient un niveau de vie raisonnable, et c’est la solidarité nationale qui prend en charge les habitants lorsqu’une région est sinistrée, que ce soit par un évènement accidentel ou par une mutation économique. Or, il faut bien comprendre que ces mécanismes n’existent pas ailleurs. En Grande-Bretagne, aux Etats-Unis le mot « péréquation » n’existe pas, et lorsqu’on leur explique en quoi ça consiste, ils sont toujours surpris que les gens acceptent de payer des impôts pour les autres. Car dans ces pays, la solidarité passe essentiellement par la charité. Et c’est là toute la différence : dans la charité, celui qui la fait peut choisir ses pauvres.
Si l’on accepte chez nous ce mode de solidarité inconditionnel et impersonnel, cela tient beaucoup à ce « monisme jacobin » qu’on critique tant. Les citoyens de l’Ile de France acceptent de payer pour ceux de la Corse, les consommateurs urbains d’électricité acceptent de payer pour les campagnes parce qu’ils se sentent membres d’une collectivité nationale, avant d’être membres de telle ou telle « communauté ». Et s’ils se sentent ainsi, c’est parce qu’ils partagent des règles, des institutions, une langue, une sociabilité raisonnablement uniformes et acceptées par tous. Aller vers une société « communautaire », c’est renoncer à cette logique pour adopter celle d’une société fragmentée ou la seule solidarité qui vaille est celle qui s’exprime à l’intérieur de votre « communauté », et ou le débat politique consiste essentiellement à un arbitrage permanent entre les revendications contradictoires des structures communautaires.
Personnellement, ce n’est pas le genre de société que je voudrais ni pour moi, ni pour mes enfants. Je préfère la solidarité nationale, qui par définition est inconditionnelle et impersonnelle, à la solidarité des « communautés » qui, parce qu’elle est conditionnelle et personnelle, donne à la « communauté » un énorme pouvoir sur l’individu. On est citoyen dans la nation, on n’est jamais que « sujet » dans sa « communauté ». Je préfère la politique qui se fait dans un débat entre citoyens à la politique paranoïaque qui résulte de l’affrontement permanent de « communautés » toujours promptes à se poser en victimes pour mieux ressouder leur unité. Je préfère la société ou je peux serrer la main de l’autre ou l’inviter à ma table sans avoir à me demander si ces gestes ne l’offenseront pas.
Les arrêtés anti-burkini ne sont pas une solution. Mais ils ont le mérite de poser le problème. Sommes-nous prêts à accepter une société fractionnée en « communautés », chacune dressant autour d’elle des murs – fussent-ils en tissu – pour s’isoler de l’extérieur ? Et bien, s’il n’y a pas une véritable pression pour l’assimilation, si on laisse se développer les tentatives séparatistes, c’est exactement ce qui nous arrivera. Et plus la société sera fragmentée, moins les mécanismes de solidarité liés à la collectivité nationale seront légitimes et plus ceux qui veulent les démanteler eux trouveront un terreau favorable. C’est cela qui explique pourquoi nos chères « classes moyennes », qui se pourlèchent déjà les babines à l’idée qu’elles n’auraient plus à payer pour les écoles, les hôpitaux, l’électricité des pauvres, se sont si facilement converties à la vision « séparatiste » de la société.
Déjà en 1667, dans son « Essai sur la tolérance », Locke pose le débat : « Il est dangereux qu’un grand nombre d’hommes manifestent ainsi leur singularité quelle que soit par ailleurs leur opinion. Il en irait de même pour toute mode vestimentaire par laquelle on tenterait de se distinguer du magistrat et de ceux qui le soutiennent ; lorsqu’elle se répand et devient un signe de ralliement pour un grand nombre de gens (…) le magistrat ne pourrait-il pas en prendre ombrage, et ne pourrait-il pas user de punitions pour interdire cette mode, non parce qu’elle serait illégitime, mais à raison des dangers dont elle pourrait être la cause?». Je ne sais si les membres du Conseil d’Etat on relu Locke avant de prendre leur décision sur le « burkini », mais toute la problématique est là. Et Locke, dans une Angleterre qui sortait d’une guerre civile entre factions « séparatistes » savait de quel danger il parlait. Le problème est que la France de 2016 est juridiquement très mal outillée pour combattre ces tendances, parce que nous n’avons pas une expérience récente de ce type de phénomène. Pendant les deux derniers siècles, les membres des « communautés » se sont plutôt battus pour être reconnus français « comme les autres » – l’expression elle-même est révélatrice – en effaçant lorsque c’était possible les signes de reconnaissance qui pouvaient les identifier. Et les tentatives de séparatisme culturel ont été ponctuelles et relevaient plus du folklore qu’autre chose. Il nous faut remonter plus de deux siècles en arrière pour trouver une véritable volonté de séparation communautaire. Notre droit moderne, très libéral, a été construit en conséquence : il ne se pose jamais la question de la préservation des liens qui constituent la collectivité nationale, qui sont tenus comme allant de soi. Son seul but est la protection des droits individuels face à l’Etat, sans qu’il existe des sauvegardes lorsque l’action individuelle se met au service d’une aspiration communautaire.
Oui, le problème n’est pas simple. On aimerait que nos juristes, au lieu de se faire les défenseurs de principes immuables et sacrés, fassent au contraire preuve de créativité pour adapter le droit à la réalité, et non l’inverse. Il ne s’agit pas bien entendu de mettre en cause les libertés individuelles, mais de comprendre que la cohésion de la société est la condition nécessaire de leur exercice, et que cette cohésion est un sujet de protection juridique au même titre que les libertés de chacun. Sans sociabilité, il n’y a plus de société, et donc plus de droit. Quant à la LDH, elle ferait bien de réfléchir un peu à ses combats. Car qui est le véritable défenseur des droits de l’homme ? Celui qui défend le droit inaliénable de chacun d’entre nous de s’enfermer dans sa prison communautaire, de se condamner à une servitude fut-elle volontaire ? Ou celui qui au contraire veut sortir les gens des prisons, fussent-elles dorées, fussent-elles choisies ?
La question, vous le voyez, est complexe. Personnellement, je n’hésite pas un instant. Dans notre République, nul n’a le droit de se vendre lui-même comme esclave, nul n’a le droit de se mutiler, nul n’a le droit de choisir lui-même l’ignorance. C’est pour cela que nous avons aboli l’esclavage, que nous avons proclamé l’intangibilité du corps, et fondé l’école obligatoire. Et si la LDH veut défendre au nom de la liberté le droit inaliénable de l’individu de s’enfermer lui même dans une prison, ce sera sans moi.
Descartes
Et si la droite réac prend des arrétés rien que pour lancer la campagne de Sarkozy, ce sera sans moi. Il manque plein de niveaux dans votre analyse. Cordialement, Le Concierge
@ Le Concierge
[Et si la droite réac prend des arrétés rien que pour lancer la campagne de Sarkozy, ce sera sans moi.]
Vous voulez dire que si la gauche prenait les mêmes arrêtes, vous les soutiendriez ? Merci beaucoup de ce commentaire si révélateur : finalement, ce qui vous gêne n’est pas le contenu de l’arrêté, c’est l’intention prêtée à ses auteurs. Comme disait l’autre, quand la droite vend une entreprise publique ça s’appelle « privatisation », quand la gauche fait la même chose ce n’est qu’une « ouverture du capital à des nouveaux partenaires ».
[Il manque plein de niveaux dans votre analyse.]
Certainement. J’écris un papier de blog, pas une thèse de doctorat sur le sujet. Mais votre critique est le genre qu’on peut faire à toute analyse sans avoir à la lire. Je ne trouve pas qu’elle apporte grande chose au débat. Peut-être que si au lieu de signaler les trous dans mon analyse vous apportiez la votre…
[Cordialement, Le Concierge]
Le nom est Ramirez, Adolfo Ramirez…
Quel exploit : ce long texte, qui “tourne bien” comme disent les musiciens, sans jamais écrire le mot “islam” !
Alors qu’il ne s’agit que de cela ; comme vous n’être pas de cette coterie social-démocrate mondialiste à qui le mot arrache la G., serait-ce un hommage à Butor ?
Vous évoquez une servitude volontaire, vous eussiez pu citer La Boétie, et mieux, de mon point de vue, Celses et sa charge contre le singularisme chrétien.
Comme l’écrit Dominique Jamet sur le site de DLF, essayez de vous promener en uniforme de Waffen SS ou affublé d’une chasuble et d’un bonnet pointu du KKK, ou encore empêtré dans une toge curule (je l’ai expérimenté !) et vous verrez s’il n’y a pas de contraintes portant sur le vêtement dans l’espace public.
Le burkini découle de l’islam (voir les positions alambiquées ou de mauvaise foi – sans jeu de mots – des imams), qu’il ne figure pas dans le coran est aggravant, cela établi que ce manuel de totalitarisme est assez tordu pour que l’en puisse s’en servir pour démontrer l’illégalité religieuse d’un acte inconnu des bédouins et de leur gourou caractériel (il en est de même pour la conduite automobile).
Comme le voile, comme l’usage -désormais systématique- de l’arabe (ou d’une autre langue que le français) dans l’espace public, comme le kamis, la barbe, les drapeaux autres que le notre, il s’agit comme vous le dites de marquer l’espace et la séparation de celui-ci entre nous et eux, il faut être aussi con ou salaud que Mélenchon pour ne pas comprendre que bientôt ce sera en eux et nous !
Il y a 40 ans le Liban était une petite suisse prospère et calme, plus de 60% de chrétiens et le reste de musulmans (divers) aujourd’hui c’est l’inverse ! Il y a juste 60 ans le FLN à adopté une vision ethnico-religieuse (Soummam), qu’est devenue l’Algérie ?
Pour notre survie nous n’avons pas d’autre choix que de reproduire la révocation de l’Édit de Nantes, à force de circonvolutions je crains que nous ne fassions pas l’économie de la Saint Barthélémy.
@ Gérard Couvert
[Quel exploit : ce long texte, qui “tourne bien” comme disent les musiciens, sans jamais écrire le mot “islam” !]
Parce que, j’insiste, je ne crois pas que l’Islam soit le centre du problème. Il y a des séparatismes qui n’ont aucun rapport avec l’Islam : celui des « gens du voyage », qui sont pour la plupart chrétiens ; mais aussi celui des immigrés chinois qui sont beaucoup plus discrets. Et ne parlons même pas de la « communauté homosexuelle » qu’on peut voir se concentrer au Marais et porter, là aussi, des signes distinctifs. Pour des raisons historiques – et notamment liés à la colonisation et aux conflits moyen-orientaux – le séparatisme des communautés musulmanes est plus visible, plus violent, et polarise le débat. Mais il ne faudrait pas que l’arbre cache une foret bien plus discrète mais non moins dangereuse à terme.
[Alors qu’il ne s’agit que de cela ; comme vous n’être pas de cette coterie social-démocrate mondialiste à qui le mot arrache la G., serait-ce un hommage à Butor ?]
Pour vous, « il ne s’agir que de cela ». Pas pour moi. Nous ne partageons pas les mêmes obsessions…
[Comme l’écrit Dominique Jamet sur le site de DLF, essayez de vous promener en uniforme de Waffen SS ou affublé d’une chasuble et d’un bonnet pointu du KKK, ou encore empêtré dans une toge curule (je l’ai expérimenté !) et vous verrez s’il n’y a pas de contraintes portant sur le vêtement dans l’espace public.]
Ce n’est pas la peine de me le dire, je suis le premier à m’étonner qu’on parle des interdictions des « tenues islamiques » comme si c’était la seule interdiction dans le domaine vestimentaire.
[Le burkini découle de l’islam (voir les positions alambiquées ou de mauvaise foi – sans jeu de mots – des imams),]
Non. Les bédouins du désert n’allaient jamais à la plage, et le Coran ne contient aucune évocation des bains de mer. Allah ne semble pas avoir ressenti le besoin de réglementer les baignades. Le burkini est une affaire montée par quelques marchands de vêtements pour profiter de l’envie des femmes musulmanes d’aller à la plage sans violer les préceptes de leur communauté.
[Comme le voile, comme l’usage -désormais systématique- de l’arabe (ou d’une autre langue que le français) dans l’espace public, comme le kamis, la barbe, les drapeaux autres que le notre, il s’agit comme vous le dites de marquer l’espace et la séparation de celui-ci entre nous et eux,]
Oui. Mais comme je vous l’ai dit plus haut, le séparatisme n’est pas une conduite réservée aux musulmans, et d’autres « communautés » s’y mettent à leur tour.
[il faut être aussi con ou salaud que Mélenchon pour ne pas comprendre que bientôt ce sera en eux et nous !]
Je vous en prie, évitons les noms d’oiseau…
[Il y a 40 ans le Liban était une petite suisse prospère et calme, plus de 60% de chrétiens et le reste de musulmans (divers) aujourd’hui c’est l’inverse !]
Enfin, il ne faudrait tout de même pas oublier que ce sont les chrétiens dans cette « suisse prospère » qui ont massacré leurs voisins musulmans, et non l’inverse…
@ Descartes,
“Enfin, il ne faudrait tout de même pas oublier que ce sont les chrétiens dans cette « suisse prospère » qui ont massacré leurs voisins musulmans, et non l’inverse…”
Pas leurs voisins, pardon, leurs immigrés palestiniens, majoritairement musulmans. Immigrés armés et dangereux, qui refusaient de rendre leurs armes, malgré les tentatives de l’Etat et de l’armée libanaise. Immigrés qui ont profité d’un Etat plus libéral pour déstabiliser un pays prospère mais fragile. Je vous conseille de regarder comment la Jordanie a “réglé” le problème palestinien lors du “Septembre noir”. Et pourtant, la Jordanie est très majoritairement musulmane…
Les chrétiens ont peut-être massacré leurs “voisins” musulmans, mais les Palestiniens l’avaient un peu cherché quand même, en créant un Etat dans l’Etat (avec extraterritorialité reconnue de leurs camps). A méditer.
@decartes
Pour la guerre du liban, la responsabilite est quand meme partagee (“Ce jour-là, des fedayins palestiniens organisent un défilé en armes au camp de Sabra pour commémorer l’attaque d’un kibboutz israélien un an plus tôt ; le même jour à Aïn el-Remmané dans la banlieue est de Beyrouth, Pierre Gemayel préside à l’inauguration d’une église ; une automobile passant dans la rue ouvre le feu sur le groupe et tue le garde du corps de Pierre Gemayel. Dans l’après-midi, les miliciens des phalanges libanaises (Kataëb) attaquent un autobus de Palestiniens revenant du camp de Sabra par la même rue et tuent 27 d’entre eux ” cf https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Liban#Contexte_imm.C3.A9diat:_la_mont.C3.A9e_des_p.C3.A9rils_.281966-1975.29).
Et c etait pas le premier incident
A partir du moment ou les libanais ont accepté que les palestiniens forment un etat dans l etat (contrairement aux jordaniens par ex qui ont extermine sans etat d ames les palestiniens qui ne se soumettaient pas) je pense que l issue tragique etait programmee. Surtout si on considere que le liban etait un etat confessionnel et que les chretiens devenaint minoritaire -> pourquoi devraient ils conserver la direction du pays ?
Helas, je craisn qu en france on prenne une direction similaire avec 2 parties de plus en plus antagonistes (et je suis pas sur que ca soit la majorite “gauloise” qui gagne en cas d affrontement. Bien que plus nombreuse, elle est bien plus agee, plus pleutre (sauf en corse), et moins bien dotee en armes)
Sinon article remarquable. Les soutiens au modele communautariste oublient en general de citer le pendant a celui ci: aux USA vous n avez pas de perequation et les transfert sont reduits a minimum. Je suis d ailleurs pas sur que ce systeme soit plus favorable a nos immigres revendiquant le burkini (le 93 sans les transfert de l etat francais deviendrait un pays du tiers monde)
@ nationaliste-ethniciste
[« Enfin, il ne faudrait tout de même pas oublier que ce sont les chrétiens dans cette « suisse prospère » qui ont massacré leurs voisins musulmans, et non l’inverse… » Pas leurs voisins, pardon, leurs immigrés palestiniens, majoritairement musulmans.]
Pas seulement, pas seulement. Ils ont aussi massacré les Druzes et les chiites libanais, eux aussi « libanais de souche »… Je veux bien admettre beaucoup de choses. Mais si vous voulez me convaincre que les phalangistes libanais étaient des doux agneaux ne désirant autre chose que la paix et la concorde, vous êtes mal barrés…
[Immigrés armés et dangereux, qui refusaient de rendre leurs armes, malgré les tentatives de l’Etat et de l’armée libanaise.]
Je pense que vous oubliez quelques petits faits au passage. Les palestiniens n’étaient ni les seuls ni les premiers à refuser de rendre leurs armes. Les phalanges chrétiennes disposaient d’une milice armée depuis 1936, les Kataëb, bien avant que les premiers réfugiés palestiniens n’arrivent. Cette milice n’a jamais été désarmée, et les faits ont démontré qu’elle représentait une menace mortelle pour les civils palestiniens. On ne peut donc pas reprocher aux milices palestiniens d’avoir refusé un désarmement qui les aurait laissé à la merci des Phalanges…
[Immigrés qui ont profité d’un Etat plus libéral pour déstabiliser un pays prospère mais fragile.]
Là encore, vous tordez un petit peu l’histoire. Les palestiniens n’étaient pas des « immigrés » mais des « réfugiés ». Ils n’ont pas quitté leur terre pour chercher des meilleures conditions économiques, mais en ont été expulsés par la terreur. Franchement, je trouve le parallèle entre le Liban et la France, entre les palestiniens et nos immigrés légèrement osé…
[Les chrétiens ont peut-être massacré leurs “voisins” musulmans, mais les Palestiniens l’avaient un peu cherché quand même,]
Je ne connais pas de cas où les palestiniens aient massacré en masse des civils libanais. Peut-être pourriez-vous m’illustrer ?
@ cdg
[Pour la guerre du Liban, la responsabilité est quand même partagée]
La « responsabilité » de quoi ? Je peux admettre que les actes de violence entre miliciens chrétiens et miliciens palestiniens suivent une logique de représailles et contre-représailles dont il est difficile de déterminer l’origine. Mais le massacre de masse des civils palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila n’ont pas d’équivalent de l’autre côté. Difficile dans ces conditions d’en attribuer aux palestiniens une quelconque part de responsabilité.
[A partir du moment ou les libanais ont accepté que les palestiniens forment un état dans l’état (contrairement aux jordaniens par ex qui ont extermine sans états d’âme les palestiniens qui ne se soumettaient pas) je pense que l’issue tragique était programmée. Surtout si on considère que le Liban était un état confessionnel et que les chrétiens devenaient minoritaires -> pourquoi devraient ils conserver la direction du pays ?]
En d’autres termes, les chrétiens ont massacré les musulmans pour conserver le pouvoir. C’était bien ma position. Mais je vous rappelle que la position de Gérard Couvert était que c’étaient les musulmans qui avait transformé le Liban en un champ de bataille…
[Hélas, je crains qu’en France on prenne une direction similaire avec 2 parties de plus en plus antagonistes (et je suis pas sur que ca soit la majorité “gauloise” qui gagne en cas d’affrontement. Bien que plus nombreuse, elle est bien plus agee, plus pleutre (sauf en corse), et moins bien dotee en armes)]
Il y a en France autour de 4 millions de musulmans. Les projections démographiques donnent autour de 8 millions de musulmans en 2050 ! Et encore, parmi eux une majorité n’est guère pratiquante. Il faut arrêter d’imaginer une guerre civile ou un « remplacement » qui n’existe que dans l’imagination de certains.
@ Descartes,
“Pas seulement, pas seulement. Ils ont aussi massacré les Druzes et les chiites libanais, eux aussi « libanais de souche »…”
Druzes et chiites libanais coupables de bienveillance à l’égard des Palestiniens. Si Joumblatt et ses coreligionnaires étaient des tendres, ça se saurait. Les attaques palestiniennes en territoire israélien provoquaient des représailles israéliennes sur le territoire libanais. On peut comprendre dès lors que la droite chrétienne n’ait guère apprécié les Palestiniens et leurs soutiens.
“Mais si vous voulez me convaincre que les phalangistes libanais étaient des doux agneaux ne désirant autre chose que la paix et la concorde, vous êtes mal barrés…”
J’ai beau cherché, je ne vois pas où j’ai écrit que les phalangistes étaient de “doux agneaux”… Non, ils étaient extrêmement violents et, le cas échéant, très cruels. Mais ils ont essayé de faire ce que le très musulman roi hachémite de Jordanie a fait. Ils ont échoué. S’ils avaient réussi, on leur aurait tressé des lauriers pour avoir sauvé l’Etat libanais…
“Les phalanges chrétiennes disposaient d’une milice armée depuis 1936, les Kataëb, bien avant que les premiers réfugiés palestiniens n’arrivent.”
Peut-être en souvenir des massacres de Maronites perpétrés vers 1860 par les Druzes? Là où il y a des musulmans, le chrétien a intérêt à être armé.
“Les palestiniens n’étaient pas des « immigrés » mais des « réfugiés »”
Techniquement, un réfugié est un immigré. Immigré ne veut pas forcément dire “immigré économique” ou “immigré volontaire”. On peut être forcé à émigrer. Ce fut le cas des Palestiniens. Mais, d’un point de vue libanais, les Palestiniens étaient bien des étrangers installés sur le sol national, donc des immigrés.
“Franchement, je trouve le parallèle entre le Liban et la France, entre les palestiniens et nos immigrés légèrement osé…”
Moi aussi. Je n’ai pas dit que nos musulmans constituaient un Etat dans l’Etat. J’ai écrit “à méditer” dans le sens où la logique communautariste peut nous conduire vers cela. Mais nous n’en sommes pas là, je vous l’accorde.
“Je ne connais pas de cas où les palestiniens aient massacré en masse des civils libanais.”
La différence entre un civil et un milicien, vous savez, n’est pas si nette que cela… Surtout dans un contexte de guerre civile.
“Il y a en France autour de 4 millions de musulmans. Les projections démographiques donnent autour de 8 millions de musulmans en 2050 ! Et encore, parmi eux une majorité n’est guère pratiquante. Il faut arrêter d’imaginer une guerre civile ou un « remplacement » qui n’existe que dans l’imagination de certains”
Autrement dit le nombre de musulmans va doubler d’ici une génération (sans compter les conversions), pendant que la population française dans son ensemble va augmenter de, allez, disons 10 ou 15 %. Tout va bien. Mais le problème, c’est moins le nombre que la concentration qui crée des sortes d’enclaves communautaires, des corps étrangers à la nation française sur notre sol.
Je précise aussi que la plupart des collègues musulmans que j’ai côtoyés (ils ne sont pas très nombreux), et qui étaient des honnêtes gens convenablement éduqués, étaient pratiquants: respect du ramadan, pas d’alcool. La pratique religieuse est plus répandue que vous le pensez. Sinon, pouvez-vous m’expliquer pourquoi tant de mosquées sortent de terre? Soit le nombre de musulmans augmente, soit la pratique religieuse se développe…
@ nationaliste-ethniciste
[« Pas seulement, pas seulement. Ils ont aussi massacré les Druzes et les chiites libanais, eux aussi « libanais de souche »… » Druzes et chiites libanais coupables de bienveillance à l’égard des Palestiniens. Si Joumblatt et ses coreligionnaires étaient des tendres, ça se saurait.]
Je vous parle de faits qui se sont déroulés dans les années 30 et 40… les exactions des milices chrétiennes contre les autres minorités sont bien antérieures à la fondation de l’Etat d’Israel et à l’expulsion des palestiniens. Le reproche de « bienveillance à l’égard des Palestiniens » a d’ailleurs été couramment utilisé pour justifier des massacres dont la motivation était plutôt liée aux équilibres politiques du Liban.
[Non, ils étaient extrêmement violents et, le cas échéant, très cruels. Mais ils ont essayé de faire ce que le très musulman roi hachémite de Jordanie a fait. Ils ont échoué. S’ils avaient réussi, on leur aurait tressé des lauriers pour avoir sauvé l’Etat libanais…]
L’analogie ne me parait pas très sérieuse. En septembre 1970, le roi de Jordanie faisait face à des dirigeants palestiniens qui ne reconnaissent pas l’autorité des lois jordaniennes et du gouvernement jordanien. Les dirigeants de l’OLP appellent ouvertement au renversement du régime hachémite. Rien de tel dans le Liban, secoué par une guerre civile ou les différents groupes étaient appuyés par des « parrains » extérieurs, et ou les palestiniens ne jouaient qu’un rôle mineur. Le massacre des camps de Sabra et de Chatila ont été d’ailleurs rendus possibles par l’intervention israélienne.
[Peut-être en souvenir des massacres de Maronites perpétrés vers 1860 par les Druzes? Là où il y a des musulmans, le chrétien a intérêt à être armé.]
Et vice-versa. Pourquoi alors reprocher aux uns ce qu’on tolère aux autres ?
[« Les palestiniens n’étaient pas des « immigrés » mais des « réfugiés » » Techniquement, un réfugié est un immigré.]
Je ne vois pas ce que vient faire la « technique » là dedans. « Techniquement », les immigrés n’existent pas, ils n’y a aucun texte juridique qui définisse cette notion. Il n’y a jamais eu de « carte d’immigré », de « statut de l’immigré ». D’ailleurs, tout « immigré » est par définition un « émigré », alors pourquoi utilise-t-on deux mots différents ? Parlé d’immigré c’est considérer la personne sous l’angle des rapports avec le pays où il vient, parler d’émigré le considérer sous l’angle du pays qu’il quitte. Un réfugié est d’abord motivé par ce qui se passe dans le pays qu’il quitte plutôt que par le pays d’accueil…
[La différence entre un civil et un milicien, vous savez, n’est pas si nette que cela… Surtout dans un contexte de guerre civile.]
Lorsqu’il s’agit d’enfants en bas âge, aucun doute n’est permis.
[Autrement dit le nombre de musulmans va doubler d’ici une génération]
2050, c’est dans 35 ans. Cela fait une génération et demie.
[pendant que la population française dans son ensemble va augmenter de, allez, disons 10 ou 15 %. Tout va bien.]
Je ne sais pas si tout va bien, mais vous m’accorderez que 8 millions de musulmans dans un ensemble de 80 millions de français, cela reste un problème gérable.
[Mais le problème, c’est moins le nombre que la concentration qui crée des sortes d’enclaves communautaires, des corps étrangers à la nation française sur notre sol.]
Je n’ai pas dit qu’il n’y avait aucun problème. Ce que j’ai dit, c’est qu’il faut mettre les choses en perspective. Il y a des « enclaves communautaires » où les populations musulmanes sont dominantes. Mais c’est très loin d’être le cas globalement. Lorsqu’on pense des solutions, il faut tenir compte de ce fait.
[Je précise aussi que la plupart des collègues musulmans que j’ai côtoyés (ils ne sont pas très nombreux), et qui étaient des honnêtes gens convenablement éduqués, étaient pratiquants: respect du ramadan, pas d’alcool. La pratique religieuse est plus répandue que vous le pensez.]
Cela doit dépendre des milieux. Dans ma pratique professionnelle, la très grande majorité des musulmans que je connais sont très largement assimilés, et leur pratique religieuse est de même nature que celle de leurs collègues catholiques : observation de certaines grandes fêtes (Ramadan, Aïd), de certains interdits alimentaires et encore, lorsque cela est possible sans trop d’efforts… c’est d’ailleurs ce que confirment les enquêtes, qui montrent que les musulmans nés en France ont une pratique religieuse dont l’assiduité ne diffère pas considérablement en moyenne de celle des français « de souche ». Il y a bien entendu des enclaves ou la pratique religieuse est plus importante, mais cela existe aussi pour les catholiques… et si vous ne me croyez pas, faites vous inviter dans une famille versaillaise…
[Sinon, pouvez-vous m’expliquer pourquoi tant de mosquées sortent de terre? Soit le nombre de musulmans augmente, soit la pratique religieuse se développe…]
Soit la pratique religieuse, longtemps confinée aux caves et aux salles louées pour l’occasion, se dote maintenant de véritables édifices religieux…
Est-ce que vous ne croyez pas que le fait de taper sur l’islam comme on le fait de façon insistante, dans les classes moyennes, depuis quelques années, est justement ce qui pousse certains musulmans à s’accrocher à leurs racines, à leur religion, dans ce repli communautaire ?
Jusqu’à la fin du 20ème siècle, me semble-t-il, l’assimilation des Maghrébins s’est faite de façon remarquablement rapide en France. Le taux de mariages mixtes a augmenté de façon régulière jusqu’à un niveau assez élevé.
@ Nana85
[Est-ce que vous ne croyez pas que le fait de taper sur l’islam comme on le fait de façon insistante, dans les classes moyennes, depuis quelques années, est justement ce qui pousse certains musulmans à s’accrocher à leurs racines, à leur religion, dans ce repli communautaire ?]
Non, je ne le crois pas. D’abord, parce que je ne vois pas très bien ou les « classes moyennes » tapent sur l’Islam. Au contraire : ce sont les porte-voix des « classes moyennes » comme Libération ou l’Obs qui ont toujours montré la plus grande bienveillance envers l’Islam et plus généralement le discours communautariste. Et cela vient de très loin : déjà en 1968 les « classes moyennes » emportées par leur fièvre révolutionnaire idéalisaient le « travailleur immigré »… il est vrai qu’il était plus facile de confisquer la parole de ce dernier que celle du travailleur français, organisé syndicalement et représenté politiquement par le PCF…
Mais surtout, parce que les faits contredisent votre raisonnement : l’assimilation des maghrebins s’est bien faite jusqu’aux années 1970… c’est-à-dire aux périodes ou les français étaient le moins tolérants envers l’Islam, et ou l’expression raciste était autrement plus banale qu’aujourd’hui. Il faut croire qu’à l’époque ce racisme, cette intolérance n’ont pas poussé les immigrés à « s’accrocher à leurs racines, à leur religion ». Au contraire, cela les a plutôt poussés à confiner racines et réligion dans le domaine privé. C’est paradoxalement au moment ou la société française devient gentille et tolérante, au moment ou l’école enjoint chacun d’être « fier de ses racines », que l’assimilation cesse de fonctionner… étonnant, n’est ce pas ?
[Jusqu’à la fin du 20ème siècle, me semble-t-il, l’assimilation des Maghrébins s’est faite de façon remarquablement rapide en France.]
Jusqu’à la fin des années 1970, oui.
[Le taux de mariages mixtes a augmenté de façon régulière jusqu’à un niveau assez élevé.]
Et puis est venu le regroupement familial…
@Descartes
Le regroupement familial est clairement un problème, je suis content que vous le souligniez. Non seulement il permet une immigration permanente de flux humain sans cesse croissant, mais par la même occasion il permet à des communautés de pratiquer une endogamie impossible sans lui. Je préciserais d’ailleurs qu’à mon sens le problème vient surtout des garçons maghrébins élevés en France et dont l’échec est patent. On peut le mesurer par exemple dans l’accession aux diplômes. L’écart entre les filles maghrébines et les garçons est juste énorme. Ce qui au passage invalide l’idée que l’échec est uniquement lié à la société d’accueil, si tel était le cas les filles devraient autant échouer que les garçons. Cet état de fait doit nourrir du ressentiment, voir du revanchisme de la part des garçons vis-à-vis de leurs sœurs en plus de leur haine de la société d’accueil qui serait responsable de tous leurs maux. On voit en quoi ici l’idéologie islamique victimaire, et caricaturalement patriarcale, peut séduire cette tranche de la population. Ne pouvant avoir les filles maghrébines plus éduquées et cherchant un conjoint au même niveau social (je ne parle même pas des Françaises historiques) , ils partent au Maghreb pour chercher la bonne musulmane bien docile et correspondant aux paramètres islamocompatibles. Le regroupement familial facilitant grandement cette pratique. Au lieu de remettre en cause leur comportement, les facilités données par l’idéologie immigrationniste leur permettent de s’enfermer tous seuls dans leurs cadres. On oublie que parfois pour avancer dans la vie une personne a besoin d’un bon coup de pied au cul comme on dit. Les encourager à ne pas faire d’effort pour changer et s’adapter à la société dans laquelle ils sont censés vivre, voilà bien la meilleure méthode pour nourrir le communautarisme et la guerre civile. Au passage quelque chose me dit que le taux de célibat des jeunes femmes maghrébines doit être nettement plus élevé que celle des garçons. Car en plus d’être plus éduquées que leur frère elles sont aussi empêtrées dans l’interdiction qui leur est faite de se marier à un non musulman.
Je me permettrai de suggérer qu’il faut rester vigilant pour ne pas tourner à la “bien-pensance de la non-bien-pensance”…
Les commentateurs et vous-même qui vous mettez à plat ventre devant nationaliste-ethniciste, qui tient sur son blog des discours à la Renaud Camus sur le “grand remplacement”, me laissent songeuse… Qu’on accepte de discuter avec cet identitaire, qu’on reste courtois, d’accord, mais pourquoi tous ces salamalecs ?
On assiste depuis quelques temps à un discours laïciste hystérique en France qui est absurde et qui fait de nous la risée de monde. Il pouvait exister dans ce pays à la fin du siècle dernier une certaine “arabophobie” mais aujourd’hui c’est bien d’islamophobie qu’il s’agit.
Je ne compte plus les “intellectuels” et autres essayistes pour qui le mot “réactionnaire” est un compliment, et qui maudissent “l’islamo-gauchiste”…
Par ailleurs, une remarque en passant : vous n’avez pas de mots assez durs envers mai 68. Je pense qu’il ne faut pas oublier à quel point mai 68 était devenu indispensable à ce moment-là, ni quel bien cela a fait… aux femmes ! N’en déplaise à Houellebecq (un excellent écrivain, mais ce n’est pas la question).
@ yann
[Je préciserais d’ailleurs qu’à mon sens le problème vient surtout des garçons maghrébins élevés en France et dont l’échec est patent. On peut le mesurer par exemple dans l’accession aux diplômes. L’écart entre les filles maghrébines et les garçons est juste énorme.]
L’écart existe aussi chez les « gaulois » de la plus vieille souche. La question de l’égalité des sexes face à l’éducation est une question complexe, qui va bien au-delà des personnes issues de l’immigration.
[Ne pouvant avoir les filles maghrébines plus éduquées et cherchant un conjoint au même niveau social (je ne parle même pas des Françaises historiques) , ils partent au Maghreb pour chercher la bonne musulmane bien docile et correspondant aux paramètres islamocompatibles. Le regroupement familial facilitant grandement cette pratique.]
Oui et non. Les garçons en question ont souvent la nationalité française, et leurs épouses ne viennent pas dans le cadre du regroupement familial, mais dans celui de l’autorisation donnée au conjoint d’un français de rejoindre leur époux.
@ Nana85
[Je me permettrai de suggérer qu’il faut rester vigilant pour ne pas tourner à la “bien-pensance de la non-bien-pensance”…]
Un tel « tour » me paraît très difficile. La bienpensance passe par le contrôle des canaux de diffusion institutionnels – l’école, les médias, l’édition. Or, je ne vois pas pointer des chaînes de télévision ou des ministres d’éducation adeptes de la « non-bienpensance »…
[Les commentateurs et vous-même qui vous mettez à plat ventre devant nationaliste-ethniciste (…). Qu’on accepte de discuter avec cet identitaire, qu’on reste courtois, d’accord, mais pourquoi tous ces salamalecs ?]
J’avoue que je ne vois pas beaucoup de gens « à plat ventre » sur ce blog. Le fait est que j’ai eu des échanges que des diplomates qualifieraient de « francs » avec Nationaliste-ethniciste. Qu’il sait que je ne partage un certain nombre de ses idées, et je sais qu’il ne partage pas les miennes. Mais justement pour cette raison, il apporte beaucoup à ce forum : des arguments, des idées, des références qu’il tire d’une grande culture historique. C’est pourquoi on gagne à échanger avec lui. Et lorsqu’on échange avec quelqu’un avec qui vous avez de gros désaccords, il faut justement entourer l’échange d’une formalité, d’une courtoisie bien plus appuyée que d’ordinaire. Ce que vous appelez « des salamalecs ». Parce que entre gens qui sont en désaccord, un malentendu est si vite arrivé…
Bien sur, nous avons chacun nos idées. Des idées qui nous semblent si limpides, si évidentes, qu’on a du mal à comprendre comment il peut exister des gens – et même des gens intelligents, éduqués, cultivés – qui n’y adhérent pas. Et pourtant, il y en a. Moi, j’ai envie de comprendre pourquoi ce qui est évident pour moi n’est pas évident pour les autres. Et c’est en discutant avec des gens comme Nationaliste-ethniciste qu’on peut y arriver.
[On assiste depuis quelques temps à un discours laïciste hystérique en France qui est absurde]
Ce que je trouve amusant, c’est que les gens qui trouvaient l’hystérie « diversitaire » tout à fait acceptable deviennent tous rouges devant l’hystérie « laïciste ».
[(…) et qui fait de nous la risée de monde.]
« Malheur à celui qui se soucie du que-dira-t-on »… franchement, l’opinion du « monde », je m’en fous. D’autant plus que je ne suis pas persuadé que ce qu’on trouve dans « Le Monde » soit ce que pense vraiment « le monde »…
[Il pouvait exister dans ce pays à la fin du siècle dernier une certaine “arabophobie” mais aujourd’hui c’est bien d’islamophobie qu’il s’agit.]
Pourriez-vous donner des exemples précis ? Et puisqu’on y est, pourriez-vous définir ce que vous appelez « islamophobie » ?
[Je ne compte plus les “intellectuels” et autres essayistes pour qui le mot “réactionnaire” est un compliment, et qui maudissent “l’islamo-gauchiste”…]
Si le mot « réactionnaire » devient un compliment, c’est en grande partie du fait du comportement de ceux qui s’auto-désignent comme « progressistes ». Si penser que Finkielkraut est plus près de la vérité que Vallaud-Belkacem est être « réactionnaire », alors j’assume le mot comme un compliment.
[Par ailleurs, une remarque en passant : vous n’avez pas de mots assez durs envers mai 68. Je pense qu’il ne faut pas oublier à quel point mai 68 était devenu indispensable à ce moment-là,]
« Indispensable » à quel titre ?
[ni quel bien cela a fait… aux femmes !]
Ah bon ? Qu’est ce que ça a fait, « aux femmes » ?
Pour comprendre ce que la fin des années 60 et le début des années 70 a changé pour les femmes, je vous recommande vivement la lecture d’Annie Ernaux (je la recommande de toutes façons).
Jetez un coup d’œil à la dernière une de Charlie hebdo, si cher aux classes moyennes urbaines… visiblement, taper sur l’islam les amuse toujours autant…
@Descartes
J’ai mis du temps à trouver les chiffres, mais vous pouvez regarder ce texte qui parle justement de l’inégalité éducative entre garçon et fille. Certes cela touche aussi les autochtones, mais les chiffres des jeunes magrébins sont vraiment plus catastrophiques. On a ainsi 28% de sans diplôme chez les garçons magrébins contre 9% chez les filles de cette “communauté”. Et 9% de sans diplôme chez les jeunes autochtones contre 5% chez les filles du même groupe. Donc les inégalités entre les deux sexes existent bien partout, mais elle est nettement plus forte chez les immigrés de cette origine. Il n’y a pas les chiffres chez les autres communautés d’immigrés pour comparer par contre. Il y a bien une spécificité de la population d’origine maghrébine élevée en France sur cette question.
http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/leleve/Pages/2012/129_3.aspx
J’avais lu un texte de Brighelli sur la question et il allait dans ce sens à partir des observations de terrain.
http://www.lepoint.fr/invites-du-point/jean-paul-brighelli/brighelli-echec-scolaire-la-vengeance-des-fils-d-immigres-05-03-2015-1910108_1886.php
@Descartes,
je viens de tomber sur un sondage qui me fait aimer les Angliches de plus en plus: plus de la moitié des Anglais sont favorables à l’interdiction de la burka ET du burkini!!!
Ca ne m’étonne pas vraiment, vu ce qu’il s’est passé en juin dernier lors du Brexit, et ça confirme un peu plus le divorce entre les peuples et leurs représentants! Il n’y a pas qu’en France que les gens s’offusquent du manque de volonté de sociabilité des musulmans intégristes et bigots…
Quant à Nana85, le chiffre 85 doit probablement correspondre à son année de naissance, et me rappelle à peu de chose près celle de SOS-Racisme. Pour le gamin que j’étais à l’époque, fils d’Africains, j’avais du mal à m’imaginer que l’anti-racisme serait NOTRE MALEDICTION, car à cette époque, j’ai le souvenir que les Maghrébins voulaient être des Français comme les autres, et c’est bien ce mouvement qui a mis un coup d’arrêt à l’assimilation, en conjonction avec l’émergence du FN… Inutile de dire que personne ne portait de voile chez les filles de mon âge, en ce temps-là; c’est arrivé seulement lors de la rentrée 1989, dans un collège de Creil: depuis, nous n’en sommes jamais sortis…
@ Nana85
[Pour comprendre ce que la fin des années 60 et le début des années 70 a changé pour les femmes, je vous recommande vivement la lecture d’Annie Ernaux (je la recommande de toutes façons).]
D’abord, la question ici n’était pas « ce que la fin des années 60 et le début des années 70 a fait pour les femmes », mais « quel bien mai 68 a fait aux femmes ». Ce qui est assez différent. Ensuite, et sans vouloir vous offenser, quand bien même Annie Ernaux serait une romancière géniale, elle reste une romancière, et non une historienne. De ses ouvrages on peut tirer ce que mai 68 a changé pour ELLE, à la rigueur ce que cela a changé pour les femmes qu’elle a connue, mais certainement pas ce que cela a changé « pour les femmes » en général.
La triste réalité est que mai 68 a fort peu changé les choses pour les femmes. Le processus qui a changé le statut de la femme a commencé bien avant et il est la conséquence du passage d’une économie de main d’œuvre à une économie industrielle moderne. Pour aboutir à cette transformation, le capital a eu besoin de main d’œuvre, ce qui a conduit à faire entrer massivement les femmes dans le marché du travail. Mais pour cela, il a fallu les former, les libérer de la contrainte de la maternité, d’en faire des acteurs économiques à part entière. C’est de là que viennent les différentes réformes comme la pleine capacité civile, la contraception, l’avortement… toutes faites – quelle coïncidence – par des gouvernements de droite, et sans que le patronat n’ait jamais protesté.
Après, on peut toujours croire si l’on veut que ce sont les féministes des « classes moyennes » qui en jetant leurs soutien-gorge ont changé le monde. Les « anticapitalistes » de tout poil font même le contresens de penser que la « libération de la femme » dans la deuxième moitié du XXème siècle est une conquête sur le capitalisme. C’est tout l’inverse : les « chaînes du patriarcat » ont été brisées – comme avant elles les chaînes du rapport féodal – pour accompagner le développement du capitalisme en libérant la main d’œuvre. Il fallait que la femme ne soit plus soumise au contrôle de son mari pour pouvoir se donner entièrement à son patron…
[Jetez un coup d’œil à la dernière une de Charlie hebdo, si cher aux classes moyennes urbaines… visiblement, taper sur l’islam les amuse toujours autant…]
J’ignorais que Plenel et Duflot étaient musulmans… (pour ceux qui n’auraient pas vu la « une » en question, elle dépeint Duflot, Plenel et Vallaud-Belkacem à la plage en burkini, sous le titre « le sac à patates qui unit la gauche). Franchement, je ne vois pas en quoi cette « une » taperait sur l’Islam. Le burkini n’est pas, que je sache, un vêtement « islamique ». Et si quelqu’un est visé par cette couverture, c’est une certaine gauche multiculturaliste, et non l’Islam.
Votre réaction est cependant très intéressante, parce qu’elle montre combien vous avez tendance à voir des « islamophobes » partout…
@ yann
[J’ai mis du temps à trouver les chiffres, mais vous pouvez regarder ce texte qui parle justement de l’inégalité éducative entre garçon et fille. Certes cela touche aussi les autochtones, mais les chiffres des jeunes magrébins sont vraiment plus catastrophiques. On a ainsi 28% de sans diplôme chez les garçons magrébins contre 9% chez les filles de cette “communauté”. Et 9% de sans diplôme chez les jeunes autochtones contre 5% chez les filles du même groupe.]
En d’autres termes, pour les maghrébins la différence va de un à trois, alors que chez les autochtones c’est un sur deux. C’est significatif, mais ce n’est pas énorme surtout si l’on tient compte du fait que chez les garçons la sortie du système scolaire pour rentrer dans le monde du travail est souvent plus rapide.
Il est d’ailleurs intéressant à observer, dans l’article dont vous donnez la référence, que les filles d’origine maghrébine… ont pratiquement les mêmes taux pour le baccalauréat que les filles « de souche »… ce qui montre bien que si discrimination il y a, elle se trouve plus dans la communauté d’origine et dans la famille que dans le système scolaire.
Je retrouve par ailleurs dans l’analyse de Jean-Louis Auduc ce que j’avais écrit ici sur l’importance de la question des « rites de passage »…
[J’avais lu un texte de Brighelli sur la question et il allait dans ce sens à partir des observations de terrain.]
Le texte de Brighelli fait intervenir un paramètre supplémentaire : celui d’une éducation qui fait de l’enfant un « petit roi », élément qui serait renforcé chez les garçons par la disparition de l’image du père. Là aussi, je pense que c’est une piste intéressante…
Votre interprétation est que seuls les facteurs économiques jouent. Ce n’est que votre avis. Je pense qu’il existe d’autres dynamiques qui ont fait évoluer les choses. Les idées, l’éducation. “Le Deuxième sexe” de Simone de Beauvoir n’a rien à voir avec le passage à une économie industrielle moderne. Et cela a été un ouvrage important.
Les femmes nées au 20ème siècle et ayant fait des études supérieures (voire secondaires et même primaires) ne pouvaient supporter le caractère étouffant et abrutissant d’une vie passée dans leur cuisine ou à faire le ménage. C’est aussi les conclusions que je tire de l’observation de mon entourage, des personnes de la génération de ma mère (nées dans les années 40). Et déjà, les femmes de la génération de ma grand-mère étaient rendues malheureuses par la vie qui leur échoyait. Cela ne pouvait continuer ainsi.
Concernant l’islam, j’observe que les gens se lâchent de plus en plus, c’est tout. Ce qui à terme n’est pas une bonne nouvelle pour les Juifs car un antisémitisme alarmant progresse dans les banlieues (où les jeunes issus de l’immigration et se sentant exclus, retournent leur ressentiment envers eux). Je pense comme vous que l’assimilation des immigrés est souhaitable, mais qu’une certaine bienveillance de la société d’accueil si cette assimilation nécessite un certain temps, l’est également.
@ CVT
[je viens de tomber sur un sondage qui me fait aimer les Angliches de plus en plus: plus de la moitié des Anglais sont favorables à l’interdiction de la burka ET du burkini!!!]
Parce que la société britannique est allée beaucoup plus loin dans le sens du communautarisme, le retour de balancier risque d’être bien plus violent que chez nous.
[Ca ne m’étonne pas vraiment, vu ce qu’il s’est passé en juin dernier lors du Brexit, et ça confirme un peu plus le divorce entre les peuples et leurs représentants!]
Ou pour être plus précis, le gouffre devenu béant entre la vision du monde des élites et celle des peuples que personne n’écoute et sont abandonnés à leur sort.
@ Nana85
[Votre interprétation est que seuls les facteurs économiques jouent.]
Non. Mon interprétation est que les facteurs économiques sont déterminants, et que les idéologies sont produites dialectiquement par eux.
[Ce n’est que votre avis.]
Cela va sans dire. Tout ce que j’écris ici n’est que mon avis, et tout ce que vous écrivez ici n’est que votre avis.
[Je pense qu’il existe d’autres dynamiques qui ont fait évoluer les choses. Les idées, l’éducation. “Le Deuxième sexe” de Simone de Beauvoir n’a rien à voir avec le passage à une économie industrielle moderne. Et cela a été un ouvrage important.]
Mais si vous le lisez avec attention, vous découvrirez qu’elle n’a rien inventé. Tout ce qu’elle a écrit, d’autres l’avaient dit bien avant elle. Alors, pourquoi les autres n’ont pas été entendues alors que « Le deuxième sexe » a été un ouvrage important ? Tout simplement parce que les conditions économiques faisaient que cette idéologie était « utile » socialement à un moment donné.
[Les femmes nées au 20ème siècle et ayant fait des études supérieures (voire secondaires et même primaires) ne pouvaient supporter le caractère étouffant et abrutissant d’une vie passée dans leur cuisine ou à faire le ménage.]
Ce que les gens peuvent ou non « supporter » n’a guère d’importance. Les hommes ont supporté pendant trois siècles une vie « étouffante et abrutissante » de seize heures de travail quotidien dans les usines ou dans les mines, et personne ne leur a demandé s’ils « supportaient » ou pas. C’était ça ou crever la dalle. Si les femmes du 20ème siècle ont pu sortir de la cuisine et du ménage et faire des études puis travailler, c’est parce qu’il y avait un contexte économique qui donnait cette possibilité. Il a fallu que la production domestique perde sa place du fait de l’augmentation de la productivité industrielle, puis que le développement de l’industrie – aidé par les deux guerres mondiales – créé un appel massif de main d’œuvre.
[C’est aussi les conclusions que je tire de l’observation de mon entourage, des personnes de la génération de ma mère (nées dans les années 40). Et déjà, les femmes de la génération de ma grand-mère étaient rendues malheureuses par la vie qui leur échoyait. Cela ne pouvait continuer ainsi.]
Et votre grand-père, était-il heureux de la vie qui lui échoyait ?
[Concernant l’islam, j’observe que les gens se lâchent de plus en plus, c’est tout. Ce qui à terme n’est pas une bonne nouvelle pour les Juifs car un antisémitisme alarmant progresse dans les banlieues (où les jeunes issus de l’immigration et se sentant exclus, retournent leur ressentiment envers eux).]
Je trouve très révélatrice la manière comme vous justifiez l’antisémitisme des jeunes issus des banlieues, qui ne font en fait que « retourner le ressentiment » de « se sentir exclu ». Diriez-vous que l’islamophobie est le fait d’une population « gauloise » qui, se sentant exclue, retourne son ressentiment contre les musulmans ?
Oui, les gens se lâchent. Et ils se lâchent pour une excellente raison : ils ont compris après des années de retenue – car dieu sait si les français ont été patients – que celle-ci ne serait jamais récompensée. Que dans le monde réel, qui n’est pas celui des bisounours, tendre l’autre joue est la meilleure manière de se prendre une deuxième baffe. Car qu’est ce que le discours « politiquement correct » à a offrir comme solution ?
[Je pense comme vous que l’assimilation des immigrés est souhaitable, mais qu’une certaine bienveillance de la société d’accueil si cette assimilation nécessite un certain temps, l’est également.]
Vous ne pouvez avoir le beurre et l’argent du beurre. Plus vous mettez de la « bienveillance », et plus l’assimilation est difficile. Croire qu’il suffit d’attendre est une erreur.
[Tout ce qu’elle a écrit, d’autres l’avaient dit bien avant elle]
Je ne dis pas que c’est faux, mais pourriez-vous me dire à qui vous pensez quand vous dites “d’autres” ?
[Si les femmes du 20ème siècle ont pu sortir de la cuisine et du ménage et faire des études puis travailler, c’est parce qu’il y avait un contexte économique qui donnait cette possibilité. Il a fallu que la production domestique perde sa place du fait de l’augmentation de la productivité industrielle, puis que le développement de l’industrie – aidé par les deux guerres mondiales – créé un appel massif de main d’œuvre.]
Il y a quelque chose qui ne me convainc pas dans votre raisonnement. Pourquoi les femmes auraient-elles dû faire des études si c’était pour devenir ouvrières ? Des ouvrières, il en existait depuis longtemps.
[Et votre grand-père, était-il heureux de la vie qui lui échoyait ?]
Je pense que bien qu’étant ouvrier, il a eu une vie un peu moins merdique, oui.
[Diriez-vous que l’islamophobie est le fait d’une population « gauloise » qui, se sentant exclue, retourne son ressentiment contre les musulmans ?]
Eh bien, c’est vrai pour l’électorat traditionnel du FN. Le FN a repris ce que le PCF a laissé. Du temps du PCF, les classes populaires regardaient vers le haut pour chercher les responsables de l’injustice qu’elles subissaient. Maintenant, avec l’expansion de la population ayant un niveau d’études supérieures, elles regardent vers le bas pour chercher les coupables : les derniers arrivés, ceux qui s’en sortent encore moins bien qu’elles.
[Que dans le monde réel, qui n’est pas celui des bisounours, tendre l’autre joue est la meilleure manière de se prendre une deuxième baffe. Car qu’est ce que le discours « politiquement correct » à a offrir comme solution ? ]
Vos accusations de bisounoursitude et de correction politique ne constituent pas un argument.
Et votre discours, qu’est-ce qu’il offre comme solutions ?
@Nana85,
[Concernant l’islam, j’observe que les gens se lâchent de plus en plus, c’est tout. Ce qui à terme n’est pas une bonne nouvelle pour les Juifs car un antisémitisme alarmant progresse dans les banlieues (où les jeunes issus de l’immigration et se sentant exclus, retournent leur ressentiment envers eux). Je pense comme vous que l’assimilation des immigrés est souhaitable, mais qu’une certaine bienveillance de la société d’accueil si cette assimilation nécessite un certain temps, l’est également.]
un petit rappel historique, pour vous qui n’étiez pas née à cette époque: SOS Racisme, association née fin 1984, suite à une récupération de la “Marche des Beurs”, était une opération téléguidée en direct de l’Elysée par les conseillers du président Mitterrand, dont un certain Jacques Attali. Il est de notoriété publique, et je m’en souviens très bien, que ce dernier avait cornaqué Julien Dray et Harlem Désir, tous deux ex-trotskystes et membres de l’UNEF-ID, syndicat étudiant lié à l’époque au PS.
Mais surtout, SOS Racisme a été porté dans les fonds baptismaux par l’Union des Etudiants Juifs de France, qui défendaient une position férocement accusatrice à l’égard de l’attitude des Français à l’égard des juifs durant l’Occupation…
En clair, une partie des associations juives, pour cause de discours victimaire, ont milité pour la fin de l’assimilation, le droit à la différence et l’immigration incontrôlée afin de faire expier les Français, coupables selon eux, d’avoir persécuté les juifs durant l’Occupation…
En gros, en voulant extirper un antisémitisme quasi-résiduel (cf le tollé suscité par Raymond Barre lors de l’attentat de la Rue des Rosiers), on a réveillé l’antisémitisme islamique: jolie politique de Gribouille!
Donc je suis totalement en porte-à-faux par rapport à vos propos sur l’antisémitisme des banlieues: ce sont bien les associations et autres courant portés par BHL, Attali et cie, qui par francophobie et présomption d’antisémitisme leurs propres compatriotes, qui nous ont mis dans cette panade…
Pour le reste, SOS Racisme arrivait dans un contexte où la “gauche” avait adopté le fameux tournant de la rigueur de mars 1983, celui qui lui permet de faire IMPUNEMENT une politique de droite ; ajoutons à cela l’émergence du FN, qui fut pour les socialistes LA véritable martingale qui assure jusqu’à aujourd’hui leur survie politique… C’est bien cette “association de malfaiteurs” FN-SOS Racisme (ou anti-racisme) qui permis à la “gauche” de durer si longtemps au pouvoir, alors qu’elle est généralement très impopulaire…
J’applaudis à votre paragraphe reliant besoins économiques et mutation du statut de la femme.
On oublie trop souvent Marx dans le manifeste du parti communiste : « La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les moyens de production et donc les rapports de production, c’est-à-dire l’ensemble des rapports sociaux ….Tous les rapports sociaux stables et figés, avec leur cortège de conceptions et d’idées traditionnelles et vénérables, se dissolvent ; les rapports nouvellement établis vieillissent avant d’avoir pu s’ossifier ».
Pour réponse à Nana85, la même époque de libération a vu le développement des eros center en Allemagne, fleurir l’industrie du porno, marchandisation du corps de la femme. Que voulez-vous la dynamique propre au capital pousse à s’affranchir de tous les obstacles à l’accumulation du capital, à rechercher sans tabou les marchés rentables.
@ Nana85
[« Tout ce qu’elle a écrit, d’autres l’avaient dit bien avant elle » Je ne dis pas que c’est faux, mais pourriez-vous me dire à qui vous pensez quand vous dites “d’autres” ?]
Je pense à d’autres militantes féministes, depuis Olympe de Gouges jusqu’aux « suffragettes ».
[Il y a quelque chose qui ne me convainc pas dans votre raisonnement. Pourquoi les femmes auraient-elles dû faire des études si c’était pour devenir ouvrières ? Des ouvrières, il en existait depuis longtemps.]
L’industrie ne fait pas travailler que des ouvriers : elle fait aussi travailler des ingénieurs, des chercheurs, des comptables, des avocats, des médecins, des instituteurs. Car si vous voulez des ouvriers en bonne santé et qui sachent lire et écrire, il faudra bien recruter des gens pour les soigner et leur enseigner. La révolution industrielle n’a pas fourni que des emplois d’ouvriers : le développement de la production industrielle a multiplié massivement l’ensemble des emplois.
[« Et votre grand-père, était-il heureux de la vie qui lui échoyait ? » Je pense que bien qu’étant ouvrier, il a eu une vie un peu moins merdique, oui.]
Vous ne répondez pas à la question. Ce n’est pas VOTRE opinion qui compte, mais la SIENNE.
[« Diriez-vous que l’islamophobie est le fait d’une population « gauloise » qui, se sentant exclue, retourne son ressentiment contre les musulmans ? » Eh bien, c’est vrai pour l’électorat traditionnel du FN.]
Encore une fois, ce n’est pas la question. Je ne vous ai pas demandé si c’est vrai, je me suis demandé pourquoi vous ne le dites pas, alors que vous vous précipitez à excuser l’antisémitisme des musulmans au nom de leur victimisation.
[« Que dans le monde réel, qui n’est pas celui des bisounours, tendre l’autre joue est la meilleure manière de se prendre une deuxième baffe. Car qu’est ce que le discours « politiquement correct » à a offrir comme solution ? » Vos accusations de bisounoursitude et de correction politique ne constituent pas un argument.]
Ce n’est pas une accusation, c’est une constatation. Pendant trente ans on a expliqué qu’il fallait donner du temps au temps, que ces gens-là allaient devenir comme nous pour peu qu’on ait un peu de patience et qu’on soit gentils avec eux. On peut aujourd’hui constater que ce discours n’a aucun rapport avec la réalité. La « bienveillance » a abouti à constituer des ghettos, à empêcher l’assimilation, à créer une population qui se complait dans le statut de « victime ». Le moins qu’on puisse dire, ce que ce n’est pas un succès.
[Et votre discours, qu’est-ce qu’il offre comme solutions ?]
L’assimilation.
@ morel
[J’applaudis à votre paragraphe reliant besoins économiques et mutation du statut de la femme.]
Vos applaudissements sont – en partie – immérités. Je ne fais qu’exposer une analyse que j’ai lu chez un autre auteur sans pouvoir mettre le doigt sur la source exacte. Je crois qu’il s’agit de « l’âge des extrêmes » d’Eric Hobsbawm, mais je n’en suis pas sûr…
[On oublie trop souvent Marx dans le manifeste du parti communiste : « La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les moyens de production et donc les rapports de production, c’est-à-dire l’ensemble des rapports sociaux ….Tous les rapports sociaux stables et figés, avec leur cortège de conceptions et d’idées traditionnelles et vénérables, se dissolvent ; les rapports nouvellement établis vieillissent avant d’avoir pu s’ossifier ».]
Tout à fait. Ce qui m’a toujours étonné chez les antimatérialistes, c’est qu’ils ne se posent jamais la question de savoir pourquoi les phénomènes historiques se produisent à un moment donné et pas à un autre. Comment se fait-il que le vote des femmes ou la légalisation de l’avortement ait eu lieu sur une période de temps très courte – une trentaine d’années, autant dire rien à l’échelle historique – dans tous les pays capitalistes avancés ? Et pourquoi cette transformation ne s’est pas produit dans les pays restés sur des modes de production féodaux ?
le premier accroc, peut-être irréparable, a été commis dans les années 80 avec l’apparition du “droit à la différence”, de sinistre mémoire. Il présupposait en effet qu’une “différence”, réelle ou supposée, pouvait emporter des droits différents et dérogatoires du droit commun. C’est exactement l’étymologie du mot “privilège” (“loi privée”)
@ fernand naudin
[le premier accroc, peut-être irréparable, a été commis dans les années 80 (…)]
Il était peut-être irréparable, mais il n’était pas le premier. Le “droit à la différence” n’apparaît pas dans les années 1980 – même si c’est à cette époque qu’il devient idéologie officielle – mais bien avant, vers la fin des années 1960. Il se manifeste avec l’apparition de mouvements régionalistes et indépendantistes, avec déjà l’idéalisation du “travailleur immigré”…
“Communauté” signifie souvent la même chose que “minorité”. Ce qui veut dire “on ne touche pas!”. Alors, la communauté vole au secours de ses membres “persécutés” en bloquant les routes, ou en sciant les arbres. Et tous ses membres reconnaissent ainsi que la communauté les protège bien et qu’il vaut mieux ne pas en sortir.
Vous voyez à quoi je fais allusion. Du reste, il me semble que vous en avez parlé. Mon but n’est pas de “stigmatiser” une communauté, mais de prendre un exemple. Néanmoins, si vous trouvez que je m’aventure en terrain glissant, n’hésitez pas à supprimer mon intervention.
Pour en revenir à la communauté en question, elle a droit, comme tout le monde, à l’école publique. Mais cela ne suffit manifestement pas. Et il en est ainsi depuis “toujours”, ces gens étant français de longue date. Alors, je suis pessimiste sur la possibilité d’assimiler des communautés plus récemment installées dans notre pays.
A propos du “burkini”, juste une remarque, ma réflexion étant largement inaboutie: les femmes concernées ont le choix entre le porter, ou rester sur le sable habillées comme à leur habitude, ou se baigner habillées (certaines s’habillent pour cela de façon plus légère). Le burkini leur donne donc plus de liberté (du même niveau de liberté que, jadis, la mini jupe). Je suis donc enclin à donner raison aux associations qui ont combattu les arrêtés anti-burkini, tout en espérant que ce n’était que pour parer à l’urgence, pour que les femmes puissent profiter de la saison, et que ces associations tentent de faire en sorte que cet accoutrement disparaisse.
@ xc
[“Communauté” signifie souvent la même chose que “minorité”.]
Souvent, mais pas toujours. Certaines féministes raisonnent en termes de « communauté » alors que les femmes représentent la moitié de la population. Les « identitaires » eux aussi représentent les « blancs » en termes de « communauté ».
[Ce qui veut dire “on ne touche pas!”. Alors, la communauté vole au secours de ses membres “persécutés” en bloquant les routes, ou en sciant les arbres. Et tous ses membres reconnaissent ainsi que la communauté les protège bien et qu’il vaut mieux ne pas en sortir.]
Bien entendu. C’est la logique qui préside à la constitution des communautés. Et une fois constituée, ses dirigeants et ses notables ont tout intérêt à ce que les gens continuent à croire qu’ils seront mieux protégés en tant que membres d’une « communauté » qu’en tant que citoyens de la collectivité nationale. C’est pourquoi l’assimilation implique nécessairement une imposition, seule manière de « casser » le pouvoir des notables communautaires.
[Pour en revenir à la communauté en question, elle a droit, comme tout le monde, à l’école publique.]
Non. Dans notre République, les « communautés » n’ont aucun droit. Seuls les individus en ont. Et c’est là une distinction absolument fondamentale.
[Mais cela ne suffit manifestement pas. Et il en est ainsi depuis “toujours”, ces gens étant français de longue date. Alors, je suis pessimiste sur la possibilité d’assimiler des communautés plus récemment installées dans notre pays.]
C’est essentiellement une question des moyens – économiques mais aussi symboliques – qu’on est prêt à y mettre.
[A propos du “burkini”, juste une remarque, ma réflexion étant largement inaboutie: les femmes concernées ont le choix entre le porter, ou rester sur le sable habillées comme à leur habitude, ou se baigner habillées (certaines s’habillent pour cela de façon plus légère). Le burkini leur donne donc plus de liberté (du même niveau de liberté que, jadis, la mini jupe).]
Pardon. Pourquoi dites-vous que « les femmes concernées ont le choix entre porter le burkini ou rester sur le sable habillées comme d’habitude, ou se baigner habillées » ? Elles ont aussi le choix de mettre un maillot de bain – et Allah sait qu’il y a une diversité de modèles – comme tout le monde. Qui les en empêche ? Et jusqu’a nouvel ordre, le bikini donne beaucoup plus de « liberté » que le burkini…
Je rêve que dans le débat public les intervenants cessent d’utiliser le mot de communautarisme pour le remplacer par celui d’endogamie.
La dispersion est telle dans le pays qu’on est tous le communautariste de quelqu’un (les musulmans dénoncent le communautarisme juif et vice-versa ,les homos celui des hétéros blanc de + 50 ans etc).
J’en rêve avec le secret espoir que les anthropologues reprennent la main sur les sociologues à la gomme et les représentants associatifs bidons , afin que la population
et les journalistes/dirigeants comprennent mieux les enjeux .
Le processus en cours doit être décortiqué et ajouté en complément aux analyses socio-économiques ,pas toujours inintéressantes (comme celle de Piketty sur la ségrégation scolaire sur son blog) mais profondément partielles ,car elles n’intègrent pas les phénomènes d’auto-exclusion évoquées ici.
Obliger les établissements privés à accueillir 16% d’élèves issus de milieux populo et immigrés pourquoi pas, mais si c’est pour se retrouver avec des cantines non mixtes car la nourriture est halal le mélange ne sera qu’apparent…après on peut toujours compter sur la force du nombre (16% contre 84) pour que le mécanisme assimilationniste s’enclenche,
mais j’y crois pas du tout…Une fois rentrés chez eux les gamins retourneront à leurs habitudes.
PIketty ,Todd et d’autres misent beaucoup trop sur l’école ,le lieu ou le faire-France se fait reste avant tout le quartier.
Au sujet de l’auto exclusion , la tournure que prend les 2 derniers événements confirme votre lecture.
Nice serait une paparazzade et les 2 filles voilées de Tremblay sont très proches des milieux frèristes et salafistes,qui depuis qqs temps donnent des cours d’auto-défense contre l’islamophobie,avec cours de rhétorique et mises en situation.
Sur les réseaux sociaux les militants communautaires insistaient beaucoup sur l’apathie de la clientèle , laissant entendre à leurs followers que les français partageaient les mêmes vues que le patron…
Si seulement les pro birkini des centre-villes comprenaient le petit manège.
D’habitude les bobos évitent de tomber dans le piège quand ces traquenards sont tendus par l’extrême droite (faux antisémites,fausses agressions commises par des immigrés) quand ce sont des islamistes ,ils sautent à pieds joints, avec enclumes et cailloux dans les poches.
Leur cécité me travaille depuis janviers 2015 ,si je partage votre réflexion sur la religion de la liberté individuelle qui semble les habiter et les rendre fous voire débiles,je pense pas qu’il existe un désir inavoué de leur part de voir ce mouvement se poursuivre pour qu’il abatte définitivement l’Etat-providence.
Je pense qu’ils y tiennent malgré tout,combien se sont élevés contre le prélèvement à la source ?Beaucoup étaient engagés contre la Loi Travail.
Ne confondons pas les éditorialistes anti services publics et les bienveillants aficionados de la liberté individuelle à la Caroline de Haas ,capables de défendre à la fois le burkini et le bikini.
Ces derniers pensent réellement que ces 2 systèmes peuvent cohabiter.
@ Pierre Feuille Ciseaux
[Je rêve que dans le débat public les intervenants cessent d’utiliser le mot de communautarisme pour le remplacer par celui d’endogamie.]
Ce serait bien malheureux, parce que ce n’est pas du tout la même chose.
[La dispersion est telle dans le pays qu’on est tous le communautariste de quelqu’un (les musulmans dénoncent le communautarisme juif et vice-versa ,les homos celui des hétéros blanc de + 50 ans etc).]
Il ne faut pas tout mélanger. Le communautarisme implique l’idée de la communauté comme siège d’une sphère publique propre, séparée de la sphère publique nationale. On peut parler de communautarisme juif ou musulman, de communautarisme homosexuel… mais quelle est l’instance communautaire des « hétéros blanc de +50 ans » ? Tout groupe social n’est pas nécessairement une communauté…
Pour les noms d’oiseaux avouez qu’il exagère !
Il me semble que vous répondez avec de légères différences à “Nana85” et à moi, sans doute que mon obsession est dérangeant ; de faite elle l’est, pour moi comme pour vous, mais vous vous cramponnez encore à l’idée d’un islam dont la diversité serait faiblesse, et l’échec patent la condamnation à terme ; un peu l’esprit de 38 non ?
Le nombre de mariages mixtes n’était pas très élevé, et le fait le plus souvent de progressistes, l’athéisme était davantage au bout de la démarche que la mosquée. La situation à changé avec les grandes manipulations de Mitterand, celles qui ont durablement déstabilisé et gauchie la société française.
Qu’il y ait une communauté gay -dans ce cas préférable à homosexuelle – et un groupe de pression poitico-social sous-jacent est hélas vrai et cela produit des tensions et déchirements tant individuels que collectifs ; mais il n’y a aucune règle figée, aucune prétention à rendre tous les individus adeptes … mais l’on peu malgré tout trouver des correspondances : irruption dans l’espace public, entraide-économique, régression du débat, ghettoïsation, rétorsion à l’encontre des apostats ; mais n’allons pas trop loin.
Rien n’est plus dangereux que l’islam ; citez moi une seule culture, une seule civilisation qui ait résisté au côtoiement majoritaire (au moins en violence) d’avec des musulmans. Tiens pour vous donnez quelques pistes, en 1830 l’Algérie compte trois fois moins d’habitants qu’a la fin de la présence Byzantine, idem en Andalousie (région demeurée riche sous les wisigoths) où l’effondrement démographique est considérable, en Sicile l’osmose arabo-normande est une fable, et les régions les moins longtemps occupées sont aujourd’hui encore les plus riches.
L’islam est un échec, en tout, pour tout, pour tous et partout. A quoi bon le défendre et quel intérêt aurions-nous à l’importer durablement chez nous ? qu’apporte-t-il ?
Préféreriez-vous vivre en Inde ou au Pakistan, pourtant en 1948 les choses y étaient semblables … à l’exception de la religion majoritaire.
“Non. Les bédouins du désert n’allaient jamais à la plage,…” votre réponse ne tient pas compte de la seconde partie de mon paragraphe, comme si vous étiez emporté, trop occupé à défendre le point de vue lénifiant, différentialiste et exhonérateur ; passons.
“, et d’autres « communautés » s’y mettent à leur tour.” votre phrase sonne comme un aveu, ce sont donc bien les musulmans qui ont initié le mouvement, et qui aujourd’hui passent au stade supérieur ; bientôt nous connaitrons les assassinats ciblés, des musulmans les plus ouverts, puis de nos politiques ou artistes les écoutants. Quels sont les raisons d’être des attentats en Europe ? D’abord ce sont des messages destinés surtout aux musulmans : voyez nous pouvons les frapper, voyez ils ne font rien contre vous, donc n’allez pas vers eux (sourate 4, 89 – 91). Ensuite c’est un moyen de distiller les ferments de la peur dans la population non-musulmane. Enfin seulement c’est un moyen de pression contre les États.
Au Liban les chrétiens ont tenté une guerre préventive, la suite a montré qu’ils avaient raison de craindre le pire, puisqu’il est en marche.
Le communautarisme est consubstantiel de l’islam lorsqu’il n’est pas majoritaire (vous avez un contre-exemple ?) parce que le musulman est avant tout un membre du meilleur des peuples (volé par les autres). Essayez de voir cela et vous le trouverez même chez la pseudo-moderne Najat Belkacem.
@ Gérard Couvert
[Pour les noms d’oiseaux avouez qu’il exagère !]
Oui, il exagère. Mais ce n’est pas une raison pour en faire de même…
[Il me semble que vous répondez avec de légères différences à “Nana85” et à moi, sans doute que mon obsession est dérangeant ; de faite elle l’est, pour moi comme pour vous, mais vous vous cramponnez encore à l’idée d’un islam dont la diversité serait faiblesse, et l’échec patent la condamnation à terme ; un peu l’esprit de 38 non ?]
Je n’ai pas très bien compris ce paragraphe. Je vais essayer de clarifier : je n’ai jamais rien écrit sur la « diversité » de l’Islam. Ce n’est d’ailleurs pas mon sujet. Je reste persuadé – et vous m’accorderez que c’est la moindre des choses pour un matérialiste – que le centre du problème ne se situe dans l’Islam, mais la question communautaire. La République, conduite par l’alliance entre la bourgeoisie et les « classes moyennes », a laissé les couches populaires à l’abandon. Et cet abandon pose des problèmes compliqués aux populations issues de l’immigration, qui ne se sentent pas chez eux dans leur pays d’origine, et pas davantage en France. Ces gens trouvent dans leur communauté et dans la religion ce que notre pays ne leur offre plus : une protection, une identité, une normative.
[Rien n’est plus dangereux que l’islam ; citez moi une seule culture, une seule civilisation qui ait résisté au côtoiement majoritaire (au moins en violence) d’avec des musulmans.]
Citez-moi une seule culture, une seule civilisation qui ait résisté au côtoiement majoritaire (au moins en violence) avec les chrétiens ? Avec votre mode de raisonnement, le christianisme est beaucoup plus dangereux que l’Islam…
[L’islam est un échec, en tout, pour tout, pour tous et partout. A quoi bon le défendre et quel intérêt aurions-nous à l’importer durablement chez nous ? qu’apporte-t-il ?]
Autant je ne me fais pas le procureur contre l’Islam, autant je ne suis pas son avocat. On n’a certainement aucun intérêt à « importer » quelque religion que ce soit. Cela étant dit, la réalité est qu’il y a un certain nombre de français qui pratique cette religion, et ce fait doit être pris en compte.
[“Non. Les bédouins du désert n’allaient jamais à la plage,…” votre réponse ne tient pas compte de la seconde partie de mon paragraphe, comme si vous étiez emporté, trop occupé à défendre le point de vue lénifiant, différentialiste et exhonérateur ; passons.]
Vous êtes injuste. J’ai très bien lu la deuxième partie de votre paragraphe, et elle est incompréhensible. Jugez vous-même : « qu’il (le burkini) ne figure pas dans le coran est aggravant, cela établi que ce manuel de totalitarisme est assez tordu pour que l’en puisse s’en servir pour démontrer l’illégalité religieuse d’un acte inconnu des bédouins et de leur gourou caractériel (il en est de même pour la conduite automobile) ». Si vous arrivez à traduire ce galimatias en français, je me ferai un plaisir de le commenter. Si quelqu’un s’est laissé « emporter » par son point de vue, c’est vous, pas moi.
[et d’autres « communautés » s’y mettent à leur tour.” votre phrase sonne comme un aveu, ce sont donc bien les musulmans qui ont initié le mouvement, et qui aujourd’hui passent au stade supérieur ;]
Non. Dire que « d’autres communautés s’y mettent à leur tour » n’implique nullement que les musulmans aient été les premiers ou les seuls à « s’y mettre » jusqu’à aujourd’hui. C’est toute la différence entre « d’autres » et « les autres ».
[Quels sont les raisons d’être des attentats en Europe ? D’abord ce sont des messages destinés surtout aux musulmans : voyez nous pouvons les frapper, voyez ils ne font rien contre vous, donc n’allez pas vers eux (sourate 4, 89 – 91).]
Vous vous laissez emporter par votre point de vue. Comment savez vous quelles sont les « raisons d’être des attentats en Europe » ? Avez-vous discuté avec leurs organisateurs ? Vous ont-ils expliqué quelles étaient leurs motivations ? Non, bien sur que non. A partir d’une sourate du Coran, vous reconstruisez un raisonnement ad hoc. Vous voyez bien l’absurdité du procédé. Prenez l’auteur du massacre de Nice : il n’avait commencé à s’intéresser au Coran que quelques semaines avant son passage à l’acte. Comment savez-vous qu’il avait lu et compris la sourate en question ?
[Au Liban les chrétiens ont tenté une guerre préventive, la suite a montré qu’ils avaient raison de craindre le pire, puisqu’il est en marche.]
Vous admettez donc qu’il s’agissait d’une « guerre préventive » – autrement dit, qu’elle anticipait un acte d’agression qui n’avait pas encore eu lieu. Dont acte.
[Le communautarisme est consubstantiel de l’islam lorsqu’il n’est pas majoritaire (vous avez un contre-exemple ?)]
Le communautarisme est consubstantiel à toutes les religions – mais aussi à tous les groupes d’immigration – lorsqu’ils ne sont pas majoritaires. Vous avez un contre-exemple ?
« Car il faut toujours garder en tête que le but de ces comportements n’est pas de se faire accepter, mais de se faire exclure, cette exclusion étant la plus sure manière de protéger la « communauté » des influences corruptrices de la société d’accueil. Rien ne protège mieux l’unité d’une communauté que la conviction d’être une forteresse assiégée. »
A ce moment, j’ai cru que vous évoquiez certains supporters de JLM…
« Oui, le problème n’est pas simple. On aimerait que nos juristes, au lieu de se faire les défenseurs de principes immuables et sacrés, fassent au contraire preuve de créativité pour adapter le droit à la réalité, et non l’inverse. »
Et pourtant…lisez la décision du Conseil Constitutionnel à propos de la burka :
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2010/2010-613-dc/decision-n-2010-613-dc-du-7-octobre-2010.49711.html
« 4. Considérant que les articles 1er et 2 de la loi déférée ont pour objet de répondre à l’apparition de pratiques, jusqu’alors exceptionnelles, consistant à dissimuler son visage dans l’espace public ; que le législateur a estimé que de telles pratiques peuvent constituer un danger pour la sécurité publique et méconnaissent les exigences minimales de la vie en société ; qu’il a également estimé que les femmes dissimulant leur visage, volontairement ou non, se trouvent placées dans une situation d’exclusion et d’infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d’égalité ; qu’en adoptant les dispositions déférées, le législateur a ainsi complété et généralisé des règles jusque là réservées à des situations ponctuelles à des fins de protection de l’ordre public ;
5. Considérant qu’eu égard aux objectifs qu’il s’est assignés et compte tenu de la nature de la peine instituée en cas de méconnaissance de la règle fixée par lui, le législateur a adopté des dispositions qui assurent, entre la sauvegarde de l’ordre public et la garantie des droits constitutionnellement protégés, une conciliation qui n’est pas manifestement disproportionnée ; que, toutefois, l’interdiction de dissimuler son visage dans l’espace public ne saurait, sans porter une atteinte excessive à l’article 10 de la Déclaration de 1789, restreindre l’exercice de la liberté religieuse dans les lieux de culte ouverts au public ; que, sous cette réserve, les articles 1er à 3 de la loi déférée ne sont pas contraires à la Constitution ; »
La position du Conseil d’Etat ne relève-t-elle pas du retour en arrière ?
@ morel
[« Car il faut toujours garder en tête que le but de ces comportements n’est pas de se faire accepter, mais de se faire exclure, cette exclusion étant la plus sure manière de protéger la « communauté » des influences corruptrices de la société d’accueil. Rien ne protège mieux l’unité d’une communauté que la conviction d’être une forteresse assiégée. » A ce moment, j’ai cru que vous évoquiez certains supporters de JLM…]
Non, je n’évoquais pas les supporteurs de JLM, mais vous avez raison : si les « communautés » utilisent cette technique pour se défendre de l’extérieur, elles ne sont pas les seules. Les sectes – et certains mouvements politiques se comportent comme telles – utilisent elles aussi ces techniques d’isolation…
[« Oui, le problème n’est pas simple. On aimerait que nos juristes, au lieu de se faire les défenseurs de principes immuables et sacrés, fassent au contraire preuve de créativité pour adapter le droit à la réalité, et non l’inverse. » Et pourtant…lisez la décision du Conseil Constitutionnel à propos de la burka :]
La décision que vous citez est extrêmement intéressante, en effet, puisqu’elle fait apparaître « les exigences minimales de la vie en société » – ce que j’appelle la « sociabilité » – comme étant un élément de l’ordre public. Je me demande à sa lecture si les maires n’auraient pas mieux fait de motiver leurs arrêtés au nom des « exigences minimales de vie en société » et non au nom de la « laïcité »… le Conseil d’Etat aurait alors peut-être jugé différemment.
Nous nous sommes bien compris. Un petit « bémol », l’attitude incriminée ne me semble être le fait que de certains laudateurs de JLM.
J’ai un peu l’impression qu’en cette matière de laisser le champ libre au communautarisme, on assiste à la même chose que pour l’UE (il serait utile de rechercher tout ce qu’elle a promu dans ce domaine : la charte européenne des langues régionales ou minoritaires en est un exemple non exclusif) : des « élites » plus que favorables et des peuples marquant de plus en plus leur opposition.
A ce sujet, peu me chaut que les mêmes « élites » s’en prennent à notre pays dans ces affaires de communautarisme ; plus intéressante est la position des populations :
http://www.lepoint.fr/monde/burka-et-burkini-les-britanniques-favorables-a-une-interdiction-01-09-2016-2065200_24.php
http://www.lesechos.fr/monde/europe/0211215238963-allemagne-vers-une-interdiction-partielle-de-la-burka-2021665.php
Phrase de fin de l’article :
Qu’une loi vienne ou pas, la population allemande est, elle, à 62% favorable à l’interdiction du voile intégral, selon un récent sondage de l’institut YouGov.
@ morel
[Nous nous sommes bien compris. Un petit « bémol », l’attitude incriminée ne me semble être le fait que de certains laudateurs de JLM.]
Oui, enfin… le discours de JLM contre les « médiacrates » qui ne font que l’embêter fonctionne aussi sur le principe de la « forteresse assiégée »…
[J’ai un peu l’impression qu’en cette matière de laisser le champ libre au communautarisme, on assiste à la même chose que pour l’UE (il serait utile de rechercher tout ce qu’elle a promu dans ce domaine : la charte européenne des langues régionales ou minoritaires en est un exemple non exclusif) : des « élites » plus que favorables et des peuples marquant de plus en plus leur opposition.]
Et c’est logique. Si la vision « communautariste » – oui, je sais, chez nous on l’appelle « diversité », mais c’est la même chose – et la vision « européiste » se sont imposées en même temps, c’est parce que ce sont les idéologies qui vont dans le sens des mêmes couches sociales, la bourgeoisie et les « classes moyennes ». Les partisans de la construction européenne ont embrassé le communautarisme parce qu’ils y voyaient une manière d’affaiblir les Etats.
[Qu’une loi vienne ou pas, la population allemande est, elle, à 62% favorable à l’interdiction du voile intégral, selon un récent sondage de l’institut YouGov.]
Cela fait bien longtemps que nos chères « classes moyennes » ont cessé de se soucier de ce que pensent les populations. Elles n’hésitent plus à dissoudre le peuple et en élire un autre quand celui qu’elles ont ne leur donne pas satisfaction.
Bonjour Descartes,
Votre article est excellent, posé, documenté. Merci !
Je ne sais pas si vous avez lu l’interview de Chevènement au Figaro. Le passage suivant m’a frappé :
« La République n’est pas la société des individus. La République est celle des droits de l’homme ET du citoyen. Vous remarquerez que la mention «et du citoyen» a partout disparu. «La Ligue des droits de l’homme» elle-même qui a porté plainte dans l’affaire du burkini ne s’appelle plus «la Ligue des droits de l’homme et du citoyen». C’est donc un combat d’idées entre deux conceptions du monde, le multiculturalisme ou communautarisme, c’est-à-dire le fait que l’on délègue à des communautés le soin, à la limite, de dire le droit en dernier ressort, et par ailleurs le modèle républicain qui pose le primat de la loi pour des citoyens qui sont tous égaux devant elle. »
source : http://www.chevenement.fr/Jean-Pierre-Chevenement-mon-plan-pour-construire-l-islam-de-France_a1855.html
@ Antoine
[Je ne sais pas si vous avez lu l’interview de Chevènement au Figaro.]
Oui, je l’ai lu. Et je trouve très courageux de la part de Chevènement de monter dans cette galère, où il n’y a guère de gloire à gagner et beaucoup de coups à prendre. Après, cet entretien ne devrait surprendre personne : la position de Chevènement – et son franc parler – est connue depuis très longtemps et n’a guère varié depuis le temps où il officiait au ministère de l’Education et celui de l’Intérieur. Je ne lui ferai qu’un reproche : celui de ne pas conduire son raisonnement à sa conséquence logique en parlant « d »intégration » là où il faudrait parler « d’assimilation ». Mais bon, l’idée y est, et le mot est devenu tabou à gauche depuis qu’il est employé par la droite…
il me semble que vous effectuez une disgression dans votre propos entre la volonté d’une communauté celle issue de l’immigration notamment d’afficher sa différence, ses pratiques, ses croyances pour mieux se reconnaître, exister et la volonté de s’exclure de la société dans laquelle elle vit pour prendre la place de force. Vous oubliez il me semble un autre mécanisme lié à la nature humaine qui est l’instinct de survie, peu importe où migre un être humain il emmène avec lui ce qu’il connaît, ce qu’il a appris ce qui le rassure et ce qui lui permettra de pérenniser ses acquisitions innées et intégrées; on est loin du coup de cette volonté de fracture sociale dont vous parlez qui serait volontaire et programmée par une communauté, votre point de vue est assez clair et juste au début jusqu’à “Combien de collègues hésitent à inviter…” ensuite je ne comprends pas pourquoi vous partez de l’idée d’une tentative de totalitarisme de ces communautés, dans la réalité de terrain que je côtoie au quotidien ces communautés souhaitent partager, enrichir et s’enrichir en nous côtoyant, ceux ne sont pas que des mots, ceux sont des actes posés dans les quartiers, des actes d’ouverture. Faire société c’est accepter ces divergences de point de vue et de pratiques car être côte à côte c’est mieux se comprendre, mieux s’accepter pour mieux se respecter et ensuite construire un nouveau visage de la société de demain qui indéniablement change, si on accompagne ce changement avec tout le monde, communautés comprises alors on co-construit une société à notre image. Personne ne peut savoir quelle sera cette société de demain mais plus on rassemblera, en offrant à tous des lieux pour leurs pratiques cultuelles, mystiques ect… plus on prendra en considération la différence affichée et plus on ira vers une société d’intégration. Une société qui n’est pas contenante est une société où règne la peur et donc le repli, plus il y a de différence entre nous moins elles sont visibles dans le temps, elles sont lissées et s’atténuent, moins on stigmatise moins il y en a. c’est un vœu pieux, que fait-on de nos personnes handicapées, de nos “fous” ?? chacun joue un rôle de régulation, on ne le sait plus???
@ sabbou
[il me semble que vous effectuez une disgression dans votre propos entre la volonté d’une communauté celle issue de l’immigration notamment d’afficher sa différence, ses pratiques, ses croyances pour mieux se reconnaître, exister et la volonté de s’exclure de la société dans laquelle elle vit pour prendre la place de force.]
Je ne crois pas, contrairement à certains commentateurs sur ce blog, qu’il y ait une volonté de « prendre la place de force ». Les projets de faire de la France une « terre d’Islam » sont le fait d’une poignée d’illuminés. La position « communautariste » n’est pas d’appliquer la Charia ou la sociabilité du pays d’origine à tout le monde, mais de délimiter un espace social dans laquelle la Charia aurait prééminence sur les lois de la République et la sociabilité serait celle des sociétés musulmanes homogènes – tout en profitant bien entendu des bénéfices d’une société développée comme la notre.
Ce que les communautaristes ne comprennent pas est que ces bénéfices n’existent que parce que nous sommes dans une société où ceux qui sont favorisés par le sort acceptent de payer pour les autres, et que cette acceptation tient précisément au caractère « moniste » d’une collectivité de citoyens partageant un destin commun. Si on commence à fractionner la société en espaces séparés, alors les solidarités seront vite confinés à ces espaces…
[Vous oubliez il me semble un autre mécanisme lié à la nature humaine qui est l’instinct de survie, peu importe où migre un être humain il emmène avec lui ce qu’il connaît, ce qu’il a appris ce qui le rassure et ce qui lui permettra de pérenniser ses acquisitions innées et intégrées; on est loin du coup de cette volonté de fracture sociale dont vous parlez qui serait volontaire et programmée par une communauté,]
Je n’ai nulle part dit que ce soit « volontaire et programmé ». En matière de rapports sociaux, je ne crois pas au machiavélisme. Cette « volonté de fracture » ne résulte pas d’un plan organisé par on ne sait quel Directoire, mais – comme vous le signalez d’ailleurs – par des mécanismes qui font que l’action soit cohérente sans qu’elle soit concertée. Elle est d’autant plus difficile à combattre, puisqu’il ne suffit pas d’arrêter les meneurs et de les mettre dans quelque cul de basse fosse pour que l’action s’arrête.
[votre point de vue est assez clair et juste au début jusqu’à “Combien de collègues hésitent à inviter…” ensuite je ne comprends pas pourquoi vous partez de l’idée d’une tentative de totalitarisme de ces communautés, dans la réalité de terrain que je côtoie au quotidien ces communautés souhaitent partager, enrichir et s’enrichir en nous côtoyant, ceux ne sont pas que des mots, ceux sont des actes posés dans les quartiers, des actes d’ouverture.]
Pourriez-vous donner quelques exemples précis. Personnellement, je ne trouve pas que le fait de porter un vêtement qui vous couvre totalement et de refuser de l’enlever alors que de toute évidence il gêne et provoque vos interlocuteurs soit le signe d’une volonté de « partager, enrichir et s’enrichir en nous côtoyant ». Je vous prie de considérer attentivement ce fait : les musulmans de France savent pertinemment quels sont les comportements qui sont bien acceptés – et dieu sait si les français sont tolérants pour ce qui concerne la sphère privée – et ceux qui sont vécus par les autres comme provocateurs. Pourquoi à votre avis n’adaptent-t-ils pas leur comportement ? Pourquoi fonctionnent-ils comme si c’était aux autres de faire toutes les concessions ? Pourquoi ne se disent-ils « tiens, on va respecter la manière de vivre de l’autre », alors qu’ils exigent en permanence qu’on « respecte » la leur ?
Je crains que vous ne projetiez sur ces « communautés » votre propre version idéalisée.
[Faire société c’est accepter ces divergences de point de vue et de pratiques car être côte à côte c’est mieux se comprendre, mieux s’accepter pour mieux se respecter et ensuite construire un nouveau visage de la société de demain qui indéniablement change, si on accompagne ce changement avec tout le monde, communautés comprises alors on co-construit une société à notre image.]
Et bien, expliquez moi ce que les membres de ces communautés sont prêts à « comprendre » et à « accepter » pour faire société, et on en reparlera. Sont-ils prêts à manger du saucisson ? A enlever le voile ? A s’abstenir de faire des prières de rue ? Non ? Alors, pourquoi ce serait à nous de faire tout le chemin ?
Je regrette si mes mots vous paraissent durs, mais « faire société », ce n’est pas « accepter ces divergences de point de vue et de pratiques ». Faire société, au contraire, c’est avoir un cadre de référence commun – j’insiste : COMMUN – qui permette de voir l’autre comme un autre soi-même, et par là de se sentir lié par des devoirs envers lui. Ce n’est que par là qu’on construit une conscience de destin commun et qu’on « fait société ». C’est ce cadre de référence commun – j’insiste : COMMUN – qui en fournissant les éléments d’une sociabilité permet l’échange.
Votre idée bisounoursienne de ce qui « fait société » devrait nous conduire à « accepter des divergences de point de vue et de pratiques » sur des sujets comme l’excision, par exemple ? Car si nous érigeons cette « acceptation des divergences de pratiques » en principe, qui aura la légitimité pour les hiérarchiser, pour décider que telle pratique doit être « acceptée » et telle autre interdite ? Vous voyez bien que votre « acceptation » conduit à la restauration de l’idée de « statut personnel » – autrement dit, ce qui vous est permis ou interdit dépend de la « communauté » dont vous êtes membre. Pensez-vous qu’on puisse faire coexister des mécanismes de solidarité inconditionnels et impersonnels – qui supposent une collectivité de citoyens – avec ce type de fragmentation ?
[Personne ne peut savoir quelle sera cette société de demain mais plus on rassemblera, en offrant à tous des lieux pour leurs pratiques cultuelles, mystiques ect… plus on prendra en considération la différence affichée et plus on ira vers une société d’intégration.]
Relisez ce paragraphe. Pensez-vous vraiment qu’en « prenant en considération la différence affichée » on favorise « une société d’intégration » ? Vous savez, ceux qui sont allés le plus loin dans cette voie sont les ségrégationnistes américains et les partisans de l’apartheid en Afrique du Sud. Ce sont eux qui ont poussé le raisonnement jusqu’au bout : ils ont « pris en considération les différences affichées » et ont même créé des statuts différents selon ces « différences », avec des droits et devoirs différents. Pensez-vous que cela ait beaucoup aidé à créer une « société d’intégration » ?
J’aimerais que vous m’expliquiez ce qu’est pour vous une « société d’intégration ». Est-ce une société ou tout le monde fait des grands sourires devant une femme voilée ou une prière de rue, mais où ensuite chacun réserve sa solidarité envers les seuls membres de sa « communauté » ? Parce que dites-vous bien qu’on ne sait construire des solidarités inconditionnelles et impersonnelles qu’au bénéfice de gens qui nous ressemblent – physique ou symboliquement. En mettant fin à cette ressemblance, en « prenant en considération la différence affichée », vous détruisez la possibilité de ce type de solidarité. Et les exemples des pays ayant choisi des modèles multiculturels sont là pour vous le montrer. La fragmentation n’aboutit pas à la concorde universelle, comme vous semblez le croire, mais à des communautés qui passent leur temps à regarder ce qu’il y a dans l’assiette du voisin pour pouvoir crier à la discrimination.
[Une société qui n’est pas contenante est une société où règne la peur et donc le repli, plus il y a de différence entre nous moins elles sont visibles dans le temps, elles sont lissées et s’atténuent, moins on stigmatise moins il y en a.]
Pourriez-vous s’il vous plait donner des exemples concrets qui justifient cette vision ? Pensez-vous que les sociétés « multiculturelles » soient des sociétés apaisées, ou les différences sont « moins visibles dans le temps » ? Allez aux Etats-Unis ou en Angleterre, dans les banlieues des grandes villes, pour voir si les « différences » se sont « lissées »…
[c’est un vœu pieux, que fait-on de nos personnes handicapées, de nos “fous” ?? chacun joue un rôle de régulation, on ne le sait plus???]
Désolé, mais vous m’avez perdu là. Quel rapport avec les handicapés ou les « fous » (ce sont vos guillemets, pas les miens) ?
@Descartes
“Ce serait bien malheureux, parce que ce n’est pas du tout la même chose. “
Qu’entendez vous par là, le communautarisme est le prolongement politique du système endogame ainsi que son application : “on veut rester entre nous avec nos codes ,us et coutumes , à l’Etat de reconnaître cette volonté/liberté légalement en cessant de l’entraver”.
Si le premier relève du culturel et le second du politique les 2 modèles procédent bien de la même volonté.
Pour revenir sur le sens initial de ma remarque ,je trouve que le mot communautarisme a perdu de sa précision.
Exemple avec Boutin qui dénoncait le mariage homo comme une loi communautariste alors que sa vocation était précisément de faire entrer les couples homos dans la communauté nationale en donnant un statut légal à leur union.
Elle a pu faire ce contre-sens car le mot est plus polysémique qu’auparavant , elle n’aurait pas pu dénoncer le caractère endogamique de cette loi…
@ Pierre Feuille Ciseaux
[« Ce serait bien malheureux, parce que ce n’est pas du tout la même chose. » Qu’entendez vous par là, le communautarisme est le prolongement politique du système endogame ainsi que son application : “on veut rester entre nous avec nos codes ,us et coutumes , à l’Etat de reconnaître cette volonté/liberté légalement en cessant de l’entraver”.]
L’endogamie est un instrument qu’utilisent beaucoup de « communautés » pour se perpétuer en tant que telles, surtout lorsqu’elles ont à vivre au sein d’une collectivité plus vaste. Mais toute communauté n’est pas endogame. Certaines communautés qui vivent isolées sont imposent au contraire une obligation d’exogamie à leurs membres pour éviter une trop grande consanguinité. Et toute endogamie n’est pas nécessairement communautaire. Il ne faut pas confondre les deux concepts.
[Pour revenir sur le sens initial de ma remarque ,je trouve que le mot communautarisme a perdu de sa précision.]
Je partage votre commentaire. Mais pas pour les raisons que vous indiquez ci-dessous…
[Exemple avec Boutin qui dénoncait le mariage homo comme une loi communautariste alors que sa vocation était précisément de faire entrer les couples homos dans la communauté nationale en donnant un statut légal à leur union.]
Bonté divine… ainsi les « couples » rentreraient dans la « communauté nationale » ? Faut quand même avoir les idées claires. D’abord, il n’existe pas de « communauté nationale ». La nation, du moins dans la tradition française, est une « collectivité », au sens qu’elle est composée par des individus réunis, mais pas une « communauté » dans la mesure où il n’est imposé à ces individus aucune condition de ressemblance pour se réunir.
Ensuite, la collectivité nationale n’a pour membres que des personnes. Imaginer qu’un couple pourrait entrer dans la collectivité nationale reviendrait à transformer le coupe en personne, sujet de droits.
Enfin, il n’était pas besoin de la loi sur le mariage homosexuel pour donner à « l’union » de deux personnes du même sexe un « statut légal ». Le concubinage est un statut légal. Le PACS aussi.
Boutin a parfaitement raison lorsqu’elle a dit que la loi sur le « mariage pour tous » était une loi « communautariste ». C’est une loi qui a créé une institution, le mariage entre personnes du même sexe, qui n’a aucune utilité sociale autre que de satisfaire l’envie de reconnaissance d’une « communauté » – qui se qualifie elle-même comme telle. D’ailleurs, si je suis la logique que vous énonciez au début de votre commentaire, le caractère « communautariste » de la loi en question est évident, puisqu’il s’agit d’une loi permettant de fonder une véritable endogamie dans la “communauté” homosexuelle…
@Descartes
Franchement je saisi mal pourquoi nous nous lançons dans une bataille de mots car je vois peu de différences entre le modèle culturel endogame et sa traduction politique qu’est le communautarisme.
je trouve simplement le terme d’endogamie plus précis pour cibler et décrire les problèmes de société qui traversent le pays en particulier avec la communauté musulmane.
Sur le mariage homo vous savez bien que sa revendication portait avant tout sur le symbolique (je laisse de coté la question de l’adoption et de la procréation) , les homos voulaient avoir le même droit que les couples hétéros,le même droit que leurs parents et grands parents qui n’étaient pas simplement PACSés ,il y avait un désir mimétique de reproduction sociale à l’égard de la norme qui semble tellement éloignée de la pulsion tribale qui existe chez certaines communautés , que qualifier cette revendication de communautariste me semble totalement infondée.
@ Pierre Feuille Ciseau
[Franchement je saisi mal pourquoi nous nous lançons dans une bataille de mots car je vois peu de différences entre le modèle culturel endogame et sa traduction politique qu’est le communautarisme.]
Vous affirmez que le communautarisme est « la traduction politique » d’un modèle culturel endogame. Je conteste cette affirmation. Ce n’est pas une bataille de mots, mais de concepts. Je vous ai donné des exemples de communautés qui ne sont pas endogames, et de groupes endogames qui ne sont pas des communautés.
[Sur le mariage homo vous savez bien que sa revendication portait avant tout sur le symbolique (je laisse de coté la question de l’adoption et de la procréation), les homos voulaient avoir le même droit que les couples hétéros, le même droit que leurs parents et grands parents qui n’étaient pas simplement PACSés,]
Les institutions ne sont pas là pour faire plaisir aux gens. Le mariage n’a pas été créé pour faire plaisir aux époux ou leur donner une satisfaction symbolique, mais pour protéger le processus qui assure la reproduction de la société et pour garantir la filiation. Le mariage homosexuel – une fois privé de la question de l’adoption et la procréation – a autant de sens qu’une loi accordant à un homme le droit à des allocations grossesse. Ca me rappelle le dialogue des Monthy Python dans la Vie de Brian, ou un personnage masculin exige le droit d’avoir des bébés comme signe de sa lutte contre l’oppression.
[il y avait un désir mimétique de reproduction sociale à l’égard de la norme qui semble tellement éloignée de la pulsion tribale qui existe chez certaines communautés , que qualifier cette revendication de communautariste me semble totalement infondée.]
Je trouve que vous faites un peu vite l’impasse sur la question de l’adoption et de la procréation…je ne suis pas persuadé que tout ça se réduise à un pur “désir mimétique”.
[Ca me rappelle le dialogue des Monthy Python dans la Vie de Brian, ou un personnage masculin exige le droit d’avoir des bébés comme signe de sa lutte contre l’oppression.]
Plus le temps passe, et plus ce dialogue qui était une parodie me semble être devenu une description. Pour ce passage spécifique par exemple, le Time considère que cette oppression arrive à sa fin : http://time.com/4475634/trans-man-pregnancy-evan/
Bonjour,
comme toujours votre billet est excellent et absolument cohérent.
Mais en ce qui me concerne je suis devenu partisan d’aller vers un communautarisme « light » à la française.
Il faut commencer par dire qu’à titre personnel vos propositions me conviendraient beaucoup mieux. Malheureusement je ne crois pas qu’elles soient réalistes, et donc il me paraît préférable, plus efficace pour notre pays, d’aller intelligement vers un communautarisme « à la française » plutôt qu’à reculons comme nous le faisons actuellement.
Pourquoi vos propositions sont irréalistes ?
En raison de l’immigration de masse passée et présente, nous avons environ 10 % de la population qui sont des allogènes de culture musulmane. J’ai entendu le président du CFCM estimer à 7 millions le nombre de musulmans (dans ce nombre il y a un petit nombre de convertis, dont je ne connais pas pas précisement le nombre).
L’intégration, l’assimilation de cette population non seulement se fait mal, mais il semble qu’en plus elle soit sur le recul malgré tous nos efforts (école publique, aide sociale etc …). Constat que l’on peut facilement faire en regardant autour de soi le nombre de femmes voilées en croissance constante. Et même maintenant les femmes toutes habillées avec voile sur les plages.
Pourtant nous avons fait beaucoup pour lutter contre ce phénomène en interdisant le voile à l’école, dans la fonction publique, ainsi que la burka.
Toute le droit européen (auquel nous sommes soumis), toute l’idéologie anglo-saxonne pousse au respect de la « différence », au communautarisme.
Les USA, la GB pratiquent le communautarisme car ils ont une immigration importante depuis plus longtemps que nous, et ils ont compris que c’était la seule manière d’accueillir et de vivre avec une immigration importante. « chacun chez soi », dans le même pays.
D’autre part les pays du golfe soutiennent cet islamisme rigoriste contraire à nos valeurs républicaines. Ce sont nos fournisseurs de pétrole, nos acheteurs d’armes, et il paraît très difficile de se fâcher avec eux.
Soumis à ces diverses pressions internationales, incapables d’intégrer, d’assimiler, nous pratiquons de manière honteuse un communautarisme « soft », laissant de fait certains quartiers gérés par l ‘islamisme radical (voir par exemple les reportages sur Avignon).
Nous avons donc les inconvénients du communautarisme, sans ses avantages, à savoir la satisfaction des musulmans de vivre à leur manière, d’être reconnus comme tels, ce qui faciliterait grandement leur adhésion au destin national. Ils ne se compareraient plus aux français autochtones, mais à leurs frères de leur communauté !
Et, comme vous le dites, on paierait moins, en les laissant se débrouiller entre eux à leur manière. Plus de péréquation égalitaire ! Cela ferait des travailleurs à très bas coût pour l’industrie. Ils auraient du travail, et « nous » des industries, donc un commerce extérieur mieux équilibré !
@ marc.malesherbes
[Mais en ce qui me concerne je suis devenu partisan d’aller vers un communautarisme « light » à la française.]
La lecture du reste de votre commentaire me fait penser que plutôt que « devenu partisan d’aller », vous vous êtes « résigné au fait qu’on aille »…
[Malheureusement je ne crois pas qu’elles soient réalistes, et donc il me paraît préférable, plus efficace pour notre pays, d’aller intelligement vers un communautarisme « à la française » plutôt qu’à reculons comme nous le faisons actuellement.]
Et comment définiriez-vous ce « communautarisme à la française » ? Je crains que cette expression soit un oxymore : la culture et la civilisation française se sont construites depuis quatre cents ans dans la lutte contre le communautarisme. Comment imaginer une continuité avec les valeurs qui ont fait la France après une telle rupture ?
[L’intégration, l’assimilation de cette population non seulement se fait mal, mais il semble qu’en plus elle soit sur le recul malgré tous nos efforts (école publique, aide sociale etc …). Pourtant nous avons fait beaucoup pour lutter contre ce phénomène en interdisant le voile à l’école, dans la fonction publique, ainsi que la burka.]
Nous avons fait beaucoup pour lutter contre ce phénomène, mais nous avons fait encore plus pour le susciter. Depuis les années 1980, l’idéologie dominante est résolument hostile à toute politique d’assimilation. On fait dans l’éloge de la différence, la promotion de la diversité, la fierté des origines – à condition qu’elles ne soient pas françaises, bien entendu – et autres théories du même acabit. Je me mets dans la peau d’un immigré : comment faire la part des choses entre une école qui me déclare qu’il faut que je sois fier d’être marocain, et une loi qui m’interdit de porter la tenue qui est traditionnelle au Maroc ?
[Toute le droit européen (auquel nous sommes soumis), toute l’idéologie anglo-saxonne pousse au respect de la « différence », au communautarisme.]
Nous ne sommes « soumis » au droit européen que pour autant que nous le voulons. Quant à l’idéologie anglo-saxonne, rien ne nous oblige à l’adopter.
[Les USA, la GB pratiquent le communautarisme car ils ont une immigration importante depuis plus longtemps que nous, et ils ont compris que c’était la seule manière d’accueillir et de vivre avec une immigration importante. « chacun chez soi », dans le même pays.]
Vos considérations s’appliquent bien aux USA, mais très mal à la Grande Bretagne. L’immigration n’y est importante que depuis les années 1960, alors que la France avait connu des vagues d’immigration massive bien avant – polonais, italiens, juif d’Europe centrale, espagnols, mais aussi maghrébins. Par ailleurs, la tradition communautariste dans le monde anglo-saxon date au moins du XVIIème siècle. Ils ont adopté cette approche parce qu’elle est pour eux totalement naturelle, et non « parce qu’ils ont compris que c’était la seule manière d’accueillir une immigration importante ».
[D’autre part les pays du golfe soutiennent cet islamisme rigoriste contraire à nos valeurs républicaines. Ce sont nos fournisseurs de pétrole, nos acheteurs d’armes, et il paraît très difficile de se fâcher avec eux.]
Je ne crois pas qu’ils se « fâcheraient » si nous pratiquions une politique d’assimilation. Vous savez, ces pays sont peut-être très religieux, mais « business is business ».
[incapables d’intégrer, d’assimiler,]
D’abord, il ne faut pas confondre « intégrer » et « assimiler ». Nous intégrons très bien, et la preuve en est que les musulmans radicaux utilisent à la perfection toutes les ressources de notre droit. Quant à l’assimilation, nous sommes parfaitement « capables » et nous l’avons largement montré. A condition d’y mettre les moyens.
[Nous avons donc les inconvénients du communautarisme, sans ses avantages, à savoir la satisfaction des musulmans de vivre à leur manière, d’être reconnus comme tels, ce qui faciliterait grandement leur adhésion au destin national. Ils ne se compareraient plus aux français autochtones, mais à leurs frères de leur communauté !]
Avez-vous l’impression que dans les sociétés franchement « communautaristes » les musulmans – et les autres – soient plus « satisfaits » que chez nous ? A lire ce qu’écrivent les représentants de la communauté noire américaine ou les radicaux islamistes britanniques, cela ne paraît pas évident, loin de là. Je dirais le contraire : dans les sociétés « communautaristes », chacun vit comme dans une forteresse assiégée, partagé entre la crainte d’être agressé par les autres communautés et l’envie devant le sort jugé meilleur de la communauté d’à côté. C’est la compétition permanente pour la place de la communauté la plus victimisée. C’est ça que vous appelez « satisfaction » ?
[Et, comme vous le dites, on paierait moins, en les laissant se débrouiller entre eux à leur manière. Plus de péréquation égalitaire !]
Les classes moyennes, reconnaissantes…
@Descartes,
> Par ailleurs, la tradition communautariste dans le monde anglo-saxon date au moins du XVIIème siècle. Ils ont adopté cette approche parce qu’elle est pour eux totalement naturelle, et non « parce qu’ils ont compris que c’était la seule manière d’accueillir une immigration importante ».
Concernant le Royaume-Uni, je ne sais pas si c’était l’approche “naturelle” au XVIIè siècle, mais concernant les Etats-Unis, il me semble que c’était simplement nécessaire : dans un pays immense, très peu peuplé (la population américaine n’a dépassé la population française qu’aux alentours de 1870, sur un territoire 20 fois plus grand…), avec une puissance publique faible voire embryonnaire et des moyens de transports rudimentaires, je ne vois pas comment il aurait été possible de mener une politique d’assimilation. Pas avant, disons, le début du XXè siècle voire plus tard (développement massif du chemin de fer, de l’automobile et de l’avion) ; mais la nécessité historique s’était probablement figée en trait culturel alors.
@ Antoine
[Concernant le Royaume-Uni, je ne sais pas si c’était l’approche “naturelle” au XVIIè siècle, mais concernant les Etats-Unis, il me semble que c’était simplement nécessaire : dans un pays immense, très peu peuplé (…)]
Bien entendu. Chaque nation a construit les rapports entre l’individu, la communauté, les corps intermédiaires et l’Etat en fonction de son environnement géographique et économique autant que de son histoire. Aux Etats-Unis, se conjugue la contrainte géographique avec la nature des premiers immigrants, qui ont quitté l’Angleterre précisément pour échapper au contrôle de l’Etat central et pour pouvoir vivre sous la loi communautaire.
[avec une puissance publique faible voire embryonnaire et des moyens de transports rudimentaires, je ne vois pas comment il aurait été possible de mener une politique d’assimilation.]
Et surtout, il n’y avait pas véritablement une référence à laquelle assimiler. L’assimilation suppose un modèle. Or, ce modèle n’apparaît véritablement qu’à la fin du XIXème, lorsque les moyens de communication permettent de donner au pays une certaine cohérence et créer une vision de ce qu’est « l’américanité ». Et comme vous le signalez, lorsque ce modèle de ce qu’est un « américain » s’est construit, il a repris les traits qui étaient adaptées aux besoins de l’époque : l’américain est indépendant. L’américain aime sa famille, sa « communauté », son pays – dans cet ordre. L’américain croit en dieu – sans spécifier lequel. L’américain aime la liberté – surtout la sienne. L’américain a le droit de prendre la loi entre ses mains, et c’est pourquoi il va armé… Ce sont ces traits qu’une politique scolaire particulièrement assimilatrice a inculqué ensuite chez tous les petits immigrés devenus américains…
Je lisais un article sur la bataille UE/Apple concernant les arrièrés d’impôts, en pestant contre l’attitude de passager clandestin de l’Irlande tout en me disant en bon souverainiste (un peu chamboulé par cette affaire) qu’après tout c’était leur droit le plus strict d’appliquer le taux qu’il souhaite ,et que s’ils veulent jouer les administrateurs de province serviles (6000 emplois dans la balance) grand bien leur fasse …et j’ai pensé à ce billet et ses échanges.
Le rejet des français du communautarisme ,comparé aux anglo-saxons ,ne vient-il pas du rejet pour l’attitude de passager clandestin qui existe parfois chez certaines communautés ?
Malgré une politique d’accueuil incluant le logement , des aides multiples ,des emplois ,une scolarisation des enfants ,des cours de langue pour la femme ou le mari et j’en passe,les français n’ont-ils pas le sentiment que ce qui est donné par le pays aux immigrés et leur descendance n’est pas entièrement rendu ?
Je trouve le discours de Nana85 très semblable à celui du gouvernement irlandais qui attire Apple , son bienfaiteur , par une politique avantageuse du taux d’imposition (“on revoit nos prétentions à la baisse pour que vous vous sentiez chez vous”) , puis se met ardemment à couvrir la firme quand le ras le bol commence à gagner les esprits (“c’est pas grave ces milliards de perdu ,on gagne 6000 emplois à la clé après tout…et puis qui êtes vous pour nous imposer vos vues ?”) .
A mon sens c’est ce qui explique pourquoi les communautarismes chinois ou portugais voire turc sont plus acceptés que le communautarisme venant du Maghreb,alors qu’ils sont aussi prononcés (combien de chinois dans la fonction public ou défendant la laïcité comme les Sorel,Bougrab,Boutih & co).
Je n’ exclue pas l’histoire de l’équation (colonisation) mais ce contexte est si lointain qu’il n’explique pas cette focalisation que certains journaux et militants qualifient d’islamophobe ,comme d’autres parlaient de réaction germanophobe à l’égard de ceux qui critiquaient le mercantilisme allemand.
@ Pierre Feuille Ciseau
[Je lisais un article sur la bataille UE/Apple concernant les arrièrés d’impôts, en pestant contre l’attitude de passager clandestin de l’Irlande tout en me disant en bon souverainiste (un peu chamboulé par cette affaire) qu’après tout c’était leur droit le plus strict d’appliquer le taux qu’il souhaite, et que s’ils veulent jouer les administrateurs de province serviles (6000 emplois dans la balance) grand bien leur fasse …et j’ai pensé à ce billet et ses échanges.]
« En bon souverainiste », moi je n’ai rien contre le fait que l’Irlande fixe sa fiscalité comme elle l’entend… à condition qu’on ne m’impose pas en retour la libre circulation des marchandises et des capitaux. Parce qu’il est trop facile de produire là où la main d’œuvre est la moins chère, vendre là où le pouvoir d’achat est le plus haut, puis payer les impôts là où la fiscalité est la plus faible. Si la France a le droit d’imposer des taxes de douane sur les produits Apple fabriqués ailleurs, alors cela ne me dérange pas le moins du monde que l’Irlande impose Apple comme elle l’entend…
[Le rejet des français du communautarisme, comparé aux anglo-saxons, ne vient-il pas du rejet pour l’attitude de passager clandestin qui existe parfois chez certaines communautés ?]
En partie. Le communautarisme anglo-saxon est fondé sur des solidarités intra-communautaires fortes et des solidarités inter-communautaires très faibles. Le système est donc cohérent et il n’y a pas de « passager clandestin » : vous devez à votre « communauté » et celle-ci vous doit en retour, vous ne devez rien à l’ensemble de la collectivité et elle ne vous doit rien. En France, la solidarité est organisée au niveau de la collectivité nationale : c’est à elle qu’on doit, et elle nous doit en retour. Les « communautés », lorsqu’elles s’affranchissent de cette dette tout en continuant à toucher les fruits de la solidarité nationale, fonctionnent en « passager clandestin ».
[Malgré une politique d’accueil incluant le logement, des aides multiples, des emplois, ne scolarisation des enfants, es cours de langue pour la femme ou le mari et j’en passe, les français n’ont-ils pas le sentiment que ce qui est donné par le pays aux immigrés et leur descendance n’est pas entièrement rendu ?]
Oui. Mais vous noterez que ce phénomène ne touche pas que les immigrés. Lorsque des français tout à fait « de souche » sortent d’un système scolaire et universitaire gratuit pour ensuite aller vendre leurs talents aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne sans le moindre état d’âme, on est en présence du même type de phénomène. On a un problème massif : l’individualisme des « libéraux-libertaires » a détruit le lien de reconnaissance. L’individu ne doit plus rien à personne : ni au maître qui l’a formé, ni au pays qui l’a protégé et payé son éducation. Chacun s’est « fait tout seul ». Cette idéologie légitime le comportement de « passager clandestin », et de ce point de vue les immigrés ne sont pas très différents des « français de souche » des classes moyennes…
@ Descartes,
“Je vous parle de faits qui se sont déroulés dans les années 30 et 40”
Excusez-moi, je n’avais pas compris, je pensais que nous parlions uniquement de la guerre civile des années 70 et 80. Mes études sur le Moyen Orient contemporain (j’en profite pour signaler à une commentatrice que je suis peut-être un “identitaire”, mais j’ai certainement plus de connaissances sur l’islam et l’histoire du monde musulman que bien des islamophiles qui prétendent nous donner des leçons sur la question) datant de quelques années, pouvez-vous préciser ce à quoi vous faisiez référence?
“Le reproche de « bienveillance à l’égard des Palestiniens » a d’ailleurs été couramment utilisé pour justifier des massacres dont la motivation était plutôt liée aux équilibres politiques du Liban.”
J’avais lu que la question des réfugiés palestiniens était une des causes de la guerre civile, notamment du fait qu’elle avait en quelque sorte fait apparaître au grand jour les fragilités du Liban. Si je comprends bien ce que vous dites, les Palestiniens n’auraient été qu’un prétexte pour des factions libanaises déjà prêtes à en découdre?
“En septembre 1970, le roi de Jordanie faisait face à des dirigeants palestiniens qui ne reconnaissent pas l’autorité des lois jordaniennes et du gouvernement jordanien.”
Mais… l’extraterritorialité des camps palestiniens et les actions menées par les Palestiniens contre Israël depuis le Liban n’équivalent-elles pas à un rejet des lois et de l’autorité du gouvernement libanais? La souveraineté de l’Etat libanais n’était-elle pas foulée aux pieds? Je veux bien admettre que les phalangistes étaient d’épouvantables massacreurs, mais le bilan d’un massacre comme celui de Sabra et Chatila est quand même faible en comparaison de la répression jordanienne…
“Pourquoi alors reprocher aux uns ce qu’on tolère aux autres ?”
Je ne reproche rien à personne. Les musulmans, là où ils sont majoritaires, ont sans doute de bonnes raisons de vouloir se débarrasser de leurs minorités chrétiennes. Mais la réciproque est vraie lorsque les musulmans sont minoritaires… C’est triste, mais en général, les groupes humains qui survivent sont ceux qui sont prêts à se défendre, voire à éliminer les groupes concurrents.
“Parlé d’immigré c’est considérer la personne sous l’angle des rapports avec le pays où il vient, parler d’émigré le considérer sous l’angle du pays qu’il quitte. Un réfugié est d’abord motivé par ce qui se passe dans le pays qu’il quitte plutôt que par le pays d’accueil…”
Et alors? Pour les Libanais, les Palestiniens étaient bien des immigrés, comme de nos jours les réfugiés syriens en Turquie ou en Allemagne.
“Je ne sais pas si tout va bien, mais vous m’accorderez que 8 millions de musulmans dans un ensemble de 80 millions de français, cela reste un problème gérable.”
Quand on voit les dégâts à seulement 4 millions, ce n’est pas très rassurant pour l’avenir… Par ailleurs, les projections donnent, “techniquement”, plutôt entre 74 et 75 millions d’habitants (je n’ose écrire “de Français”) en 2050. Pour ma part, j’ai l’impression que le problème est déjà difficile à gérer, mais je me trompe peut-être.
“Ce que j’ai dit, c’est qu’il faut mettre les choses en perspective.”
Et pourquoi borner ces perspectives à 2050? Qu’en sera-t-il en 2080? En 2100?
“Lorsqu’on pense des solutions, il faut tenir compte de ce fait.”
Je n’ai pas de réelles solutions à proposer. D’ailleurs, au point où nous en sommes, existe-t-il une “bonne” solution, qui pourrait s’appliquer paisiblement dans le respect de l’état de droit et sans violence? Je me permets d’émettre des doutes. Le plus probable est que la société va continuer à se fragmenter et se disloquer. Vous me direz: nous devons lutter contre cela. Comment? Se battre chacun au quotidien, dans son coin, ne suffit pas et est désespérant. Il faudrait une organisation structurée, puissante, qui donne de la cohérence aux actions individuelles éparses. Et au nom de quoi faut-il lutter? Au nom du bonheur et du plaisir d’assimiler les immigrés dont les enfants viendront concurrencer les nôtres? Au nom de l’amour de la France? Vous aurez du mal à me convaincre, même si vous ne ménagerez pas vos efforts j’en suis sûr, car la France que j’aime, au fond, c’est celle de la fin du XIX° au milieu du XX°, et je sais qu’on ne reviendra pas en arrière. Le problème de l’assimilation, c’est que le processus, bien que très inégal, n’est pas complètement à sens unique. Assimiler les musulmans, c’est accepter que l’islam entre pour une petite part dans la culture nationale. C’est accepter en effet que les grandes villes aient leurs grandes mosquées, comme elles ont leurs cathédrales et parfois leurs grandes synagogues. C’est accepter l’islam dans le paysage français. Bien des gens sont prêts à faire ces concessions, mais moi je ne pourrai jamais. La France reste pour moi une terre chrétienne. Vous allez me dire qu’après tout il y a aussi des juifs et des bouddhistes en France. L’islam a une spécificité, je ne saurais vous dire pourquoi. Peut-être est-ce à cause de Charles Martel et des Croisades. Peut-être est-ce à cause de la colonisation du Maghreb qui s’est mal terminée en Algérie du moins. Peut-être est-ce à cause du spectacle désolant près de chez moi. Peut-être est-ce mon incapacité à comprendre les musulmans et à leur témoigner de la bienveillance. Peut-être est-ce un peu tout ça à la fois. J’essaie, au cours de nos échanges, de mettre en ordre mes idées, et c’est difficile. Il y a des choses qu’on ressent mais qu’on a grand peine à exprimer.
“observation de certaines grandes fêtes (Ramadan, Aïd), de certains interdits alimentaires et encore, lorsque cela est possible sans trop d’efforts…”
Un musulman qui fait le ramadan et qui respecte certains interdits alimentaires n’est pas assimilé à mes yeux: s’il refuse de partager l’apéro et ma nourriture, la sociabilité demeure compliquée… Qu’est-ce qu’un musulman “assimilé” pour vous? Diriez-vous qu’un juif qui fait shabbat et respecte les interdits alimentaires est “assimilé”?
“c’est d’ailleurs ce que confirment les enquêtes, qui montrent que les musulmans nés en France ont une pratique religieuse dont l’assiduité ne diffère pas considérablement en moyenne de celle des français « de souche ».”
Je ne sais pas. Les enquêtes paraissent contradictoires. Tantôt, elles arrivent aux conclusions que vous citez, tantôt elles concluent à une “réislamisation” des enfants d’immigrés et soulignent les progrès inquiétants du salafisme. Depuis une vingtaine d’années, ce que j’observe moi-même au quotidien ne me convainc guère d’une “sécularisation” en marche des musulmans.
“Soit la pratique religieuse, longtemps confinée aux caves et aux salles louées pour l’occasion, se dote maintenant de véritables édifices religieux…”
Et pensez-vous qu’une plus grande visibilité du culte musulman va favoriser l’assimilation?
@ nationaliste-ethniciste
[« Je vous parle de faits qui se sont déroulés dans les années 30 et 40 » pouvez-vous préciser ce à quoi vous faisiez référence?]
Je pense aux affrontements intercommunautaires qui ont suivi la proclamation de « l’Etat du Grand Liban » en 1920 par les autorités françaises, et notamment la révolte druze de 1925, écrasée par les troupes françaises soutenues par les maronites, qui finiront par provoquer une instabilité telle qu’en 1932 les autorités mandataires françaises sont conduites à suspendre les institutions. L’expérience conduira à ce que la constitution libanaise de 1945 partage les postes sur des bases communautaires.
J’ajoute que les conflits intercommunautaires recommencent en 1956-58, lorsque les kataëb maronites écraseront la guérilla des sunnites et des druzes…
[J’avais lu que la question des réfugiés palestiniens était une des causes de la guerre civile, notamment du fait qu’elle avait en quelque sorte fait apparaître au grand jour les fragilités du Liban. Si je comprends bien ce que vous dites, les Palestiniens n’auraient été qu’un prétexte pour des factions libanaises déjà prêtes à en découdre?]
Oui. Et qui avaient déjà « décousu » par le passé…
[« En septembre 1970, le roi de Jordanie faisait face à des dirigeants palestiniens qui ne reconnaissent pas l’autorité des lois jordaniennes et du gouvernement jordanien. » Mais… l’extraterritorialité des camps palestiniens et les actions menées par les Palestiniens contre Israël depuis le Liban n’équivalent-elles pas à un rejet des lois et de l’autorité du gouvernement libanais?]
Non. L’extraterritorialité des camps palestiniens a été accordée par le gouvernement libanais, bien content de ne pas avoir à assurer aux palestiniens l’ensemble des droits – notamment économiques – prévus par la constitution libanaise. Par ailleurs, je ne connais pas des appels de l’OLP au renversement des institutions libanaises.
[« Parlé d’immigré c’est considérer la personne sous l’angle des rapports avec le pays où il vient, parler d’émigré le considérer sous l’angle du pays qu’il quitte. Un réfugié est d’abord motivé par ce qui se passe dans le pays qu’il quitte plutôt que par le pays d’accueil… » Et alors? Pour les Libanais, les Palestiniens étaient bien des immigrés, comme de nos jours les réfugiés syriens en Turquie ou en Allemagne.]
Mais vous voyez bien que les réfugiés ne sont pas considérés aujourd’hui par l’Allemagne ou la Turquie comme des « immigrés ». On utilise d’ailleurs un terme différent, celui de « migrants »…
[Pour ma part, j’ai l’impression que le problème est déjà difficile à gérer, mais je me trompe peut-être.]
Oui, il est difficile à gérer, mais pas pour des raisons démographiques. Il est difficile à gérer parce que la seule véritable solution – l’assimilation – est rejetée par les « classes moyennes » qui ne sont pas prêtes à en payer le coût. On peut d’ailleurs se demander si ce refus des « classes moyennes » de payer pour les autres qui se traduit pour les immigrés par un arrêt des processus d’assimilation ne se traduit aussi par une des-assimilation de larges segments des couches populaires, reléguées en marge de la société et sans représentation politique.
[Et pourquoi borner ces perspectives à 2050? Qu’en sera-t-il en 2080? En 2100?]
Parce que ces horizons sont trop lointains pour qu’on puisse dire quelque chose de valable. Les adultes de 2050 sont déjà nés. Ceux de 2080, pas encore.
[Je n’ai pas de réelles solutions à proposer. D’ailleurs, au point où nous en sommes, existe-t-il une “bonne” solution, qui pourrait s’appliquer paisiblement dans le respect de l’état de droit et sans violence? Je me permets d’émettre des doutes.]
Cela dépend ce que vous appelez « violence ». Personnellement, j’ai toujours défendu l’idée que l’assimilation implique une contrainte. L’assimilation implique un effort, dont la récompense n’arrive que bien plus tard. Comme tout processus d’apprentissage, il faut un degré de contrainte pour amorcer le processus. Et toute contrainte implique une forme de violence. Quant à l’Etat de droit, il n’y a pas de raison qu’il soit un obstacle à condition que nos nos juristes et de nos politiques fassent preuve d’intelligence pour créer un droit adapté au problème.
[Le plus probable est que la société va continuer à se fragmenter et se disloquer.]
Le pire n’est jamais sûr et l’histoire a montré que toute époque est éminemment myope quant aux possibilités qu’offre l’avenir. Combien voyaient en 1940 la France rétablie dans sa souveraineté ?
[Vous me direz: nous devons lutter contre cela. Comment? Se battre chacun au quotidien, dans son coin, ne suffit pas et est désespérant. Il faudrait une organisation structurée, puissante, qui donne de la cohérence aux actions individuelles éparses.]
Bien sur, ce serait mieux s’il y avait cette organisation. Mais en même temps, il y a des luttes souterraines et non concertées qui peuvent changer beaucoup de choses. Pensez aux Lumières… un mouvement faiblement concerté qui a vu des personnalités en apparence isolées fabriquer le combustible qui plus tard alimentera la Révolution française. Pour donner une autre image, il faut que nous fassions comme les « couvertures des livres » dans Farenheit 451. A une époque sombre, nous sommes les gardiens de la mémoire. Nous pouvons expliquer aux jeunes que les choses n’ont pas été toujours comme ça, qu’un autre façon de faire est possible.
[Et au nom de quoi faut-il lutter? Au nom du bonheur et du plaisir d’assimiler les immigrés dont les enfants viendront concurrencer les nôtres? Au nom de l’amour de la France? Vous aurez du mal à me convaincre, même si vous ne ménagerez pas vos efforts j’en suis sûr, car la France que j’aime, au fond, c’est celle de la fin du XIX° au milieu du XX°, et je sais qu’on ne reviendra pas en arrière.]
La France que j’aime n’est ni celle du XIXème, ni celle du XXème. C’est une France à la fois éternelle et contemporaine. Et pour moi, la France est un mode de sociabilité, un rapport à la connaissance, à la croyance, au monde qui nous entoure. J’aime comme vous la France du XIXème et celle du début du XXème, mais aussi celle du XVIIème et du XVIIIème, parce qu’elles sont toutes contenues dans la France que j’aime. Et quand j’aime quelque chose, je veux la protéger et la partager.
[Le problème de l’assimilation, c’est que le processus, bien que très inégal, n’est pas complètement à sens unique. Assimiler les musulmans, c’est accepter que l’islam entre pour une petite part dans la culture nationale.]
Oui, mais une toute petite partie. Et une partie – c’est là l’essentiel – que nous choisirons, et qui a donc toutes les chances d’être la meilleure. Quel est le problème ? C’est son intérêt pour les autres cultures et sa capacité à choisir chez elles des éléments pour les intégrer – souvent en les modifiant – qui a fait le dynamisme et la puissance des cultures d’Europe occidentale en général et de la France en particulier. Pour moi, la France n’est pas une entité figée dans le temps, et je n’ai pas peur de la voir évoluer, à condition qu’elle évolue sur des pistes qu’elle s’est choisie et non sur celles qui lui sont imposées – ou qu’elle suit par choix du moindre effort.
[C’est accepter en effet que les grandes villes aient leurs grandes mosquées, comme elles ont leurs cathédrales et parfois leurs grandes synagogues.]
Mais quel est le problème ? Si les musulmans de France sont capables de construire des édifices dont l’architecture soit aussi inspirée que celle des grandes cathédrales ou des grandes synagogues, un tel patrimoine nous enrichira. Et si ce n’est pas le cas, et bien ces édifices seront balayés par le temps comme l’ont été tant d’églises au fur et à mesure que la sécularisation les a rendues inutiles. Paris a sa grande mosquée depuis les années 1920, et cela ne dérange personne.
[C’est accepter l’islam dans le paysage français. Bien des gens sont prêts à faire ces concessions, mais moi je ne pourrai jamais. La France reste pour moi une terre chrétienne. Vous allez me dire qu’après tout il y a aussi des juifs et des bouddhistes en France. L’islam a une spécificité, je ne saurais vous dire pourquoi. Peut-être est-ce à cause de Charles Martel et des Croisades. Peut-être est-ce à cause de la colonisation du Maghreb qui s’est mal terminée en Algérie du moins. Peut-être est-ce à cause du spectacle désolant près de chez moi. Peut-être est-ce mon incapacité à comprendre les musulmans et à leur témoigner de la bienveillance. Peut-être est-ce un peu tout ça à la fois. J’essaie, au cours de nos échanges, de mettre en ordre mes idées, et c’est difficile. Il y a des choses qu’on ressent mais qu’on a grand peine à exprimer.]
J’avoue que j’ai du mal à comprendre pourquoi vous réagissez ainsi. Le séparatisme juif est à mon sens aussi terrifiant que le séparatisme musulman. Quoi qu’il en soit, pour moi les options sont claires : soit nous sommes capables de faire aimer la France à tous – et lorsque je dis la France, j’entends cette entité qui s’est bâtie au cours des siècles, et non une France purement contemporaine qui s’adapterait aux goûts de chacun pour lui faire plaisir ; soit nous allons vers une société fractionné où cette France ne sera le patrimoine que d’une « communauté » parmi d’autres.
[« observation de certaines grandes fêtes (Ramadan, Aïd), de certains interdits alimentaires et encore, lorsque cela est possible sans trop d’efforts… » Un musulman qui fait le ramadan et qui respecte certains interdits alimentaires n’est pas assimilé à mes yeux: s’il refuse de partager l’apéro et ma nourriture, la sociabilité demeure compliquée… Qu’est-ce qu’un musulman “assimilé” pour vous?]
Un musulman pour qui se pratiques traditionnelles relèvent de la sphère privée. C’est pourquoi je parlais de gens qui observent les fêtes ou l’interdit alimentaire « lorsque cela est possible sans trop d’efforts ». Quelqu’un a donné l’exemple du livre de Birnbaum où il est raconté comment certains juifs mangeaient kacher à la maison et du porc à la cantine scolaire. C’est à cela que je faisais allusion.
[Diriez-vous qu’un juif qui fait shabbat et respecte les interdits alimentaires est “assimilé”?]
Cela dépend. S’il refuse de se présenter à un examen parce qu’il a lieu un samedi, je dirais « non ». S’il considère le shabbat comme une obligation privée, je dirais oui.
[Je ne sais pas. Les enquêtes paraissent contradictoires. Tantôt, elles arrivent aux conclusions que vous citez, tantôt elles concluent à une “réislamisation” des enfants d’immigrés et soulignent les progrès inquiétants du salafisme. Depuis une vingtaine d’années, ce que j’observe moi-même au quotidien ne me convainc guère d’une “sécularisation” en marche des musulmans.]
Il faut se méfier des observations personnelles. Si l’on regarde les statistiques, on observe une sécularisation en moyenne, et une radicalisation d’un secteur minoritaire. Mais nous sommes victimes d’une illusion d’optique : ceux qui s’assimilent deviennent par définition invisibles, alors que ceux qui se radicalisent deviennent au contraire beaucoup plus visibles. Ce qui donne l’impression d’une « réislamisation » qui est pour moi beaucoup moins évidente que beaucoup veulent le croire.
[« Soit la pratique religieuse, longtemps confinée aux caves et aux salles louées pour l’occasion, se dote maintenant de véritables édifices religieux… » Et pensez-vous qu’une plus grande visibilité du culte musulman va favoriser l’assimilation?]
Non.
@ Descartes
je vous remercie de votre commentaire argumenté à ma résignation à aller vers le communautarisme en France . Vous ne m’avez pas agressé, alors que cette position doit vous hérisser. Vos arguments sont bons, et montrent donc la faiblesse des miens.
Le point principal pour moi est le réalisme de votre proposition de pouvoir assimiler la grande majorité des français musulmans, car c’est notre problème actuel. Les autres communautés que l’on peut repérer étant suffisament « sages » ou marginales pour ne pas poser de problème national.
On peut sans doute dire qu’une grande partie des français musulmans s’est correctement assimilée. Difficile d’en estimer la part. Je prendrai donc pour hypothèse environ 50 %. On peut toutefois se demander si cette assimilation résisterait à un choc violent entre la communauté musulmane et le reste du pays.
Maintenant, pouvons-nous espérer assimiler les 50 % restants ? Vos arguments reposent sur le fait que notre «idéologie dominante est résolument hostile à toute politique d’assimilation». Cette idéologie est de plus parfaitement en phase avec notre monde moderne, avec le développement actuel des forces productives. Celles-ci établissent par la technique et ont besoin avant tout d’un monde sans frontières, aussi uniformisé que possible sur le plan économique. Et quand on aboli les frontières, on affaibli les solidarités nationales, on favorise les migrations, et il ne reste plus que le soutien de sa famille, de son clan, de sa communauté.
Pouvons nous changer cette idéologie dominante ? En théorie oui, puisque toute idéologie dominante peut évoluer.
Mon pronostic n’est cependant pas optimiste. Toutes les élites de droite et de gauche communient dans cette idéologie, même le PCF. Il reste le FN, plutôt favorable de facto à l’assimilation. Mais il est dans l’opposition. Son implantation dans la société française est très superficielle, ses cadres très peu nombreux, et si il accédait au pouvoir, ce qui me paraît très peu probable, rien ne dit qu’il maintiendrait cette orientation.
De plus tout dans notre environnement international nous conforte dans l’idéologie dominante que vous dénoncez.
Ma conclusion serait donc paradoxale : soutenir toutes les mesures de communautarisation soft (à la canadienne), car cela permettrait au moins d’avoir les bénéfices d’une politique communautariste, alors que nous n’en avons que les inconvénients, car nous le faisons à reculons, dans les plus mauvaises conditions.
nb : il me semble que vous faites trop l’impasse sur les aspects positifs en terme de coexistence pacifiée d’une communautarisation intelligente (voir le Canada). Et aussi les avantages économiques, un peu sordides, mais pas négligeables si vous êtes du « bon coté ». Et ceux qui ne sont pas du « bon coté » font leur choix librement de ne pas s’assimiler. Il n’y a donc rien à se reprocher « moralement ».
@ marc.malesherbes
[Je vous remercie de votre commentaire argumenté à ma résignation à aller vers le communautarisme en France . Vous ne m’avez pas agressé, alors que cette position doit vous hérisser.]
Pourquoi vous aurais-je agressé ? Depuis le temps qu’on échange, vous devriez me connaître…
[Le point principal pour moi est le réalisme de votre proposition de pouvoir assimiler la grande majorité des français musulmans, car c’est notre problème actuel. Les autres communautés que l’on peut repérer étant suffisamment « sages » ou marginales pour ne pas poser de problème national.]
Disons que les autres communautés ne posent pas le problème de la même façon. Mais je ne suis pas convaincu que le séparatisme de certaines « communautés » non musulmanes ne pose pas des problèmes similaires. Quant au réalisme… j’insiste : chaque époque est particulièrement myope quand il s’agit de juger ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Qui en juin 1940 aurait parié deux sous sur De Gaulle et la France Libre ? Nous n’avons donc pas le choix : il faut faire ce qu’on estime juste, et espérer que cela sert à quelque chose.
[On peut sans doute dire qu’une grande partie des français musulmans s’est correctement assimilée. Difficile d’en estimer la part. Je prendrai donc pour hypothèse environ 50 %. On peut toutefois se demander si cette assimilation résisterait à un choc violent entre la communauté musulmane et le reste du pays.]
Je pense que le chiffre de 50% est sous-estimé mais peu importe. Je pense surtout que les musulmans assimilés sont peut-être les plus critiques envers le refus d’assimilation des autres. Et c’est normal : ce sont eux qui ont le plus à perdre. Ceux qui ont fait l’effort pour s’assimiler n’ont pas envie que les comportements des autres les ramènent au point de départ.
[Maintenant, pouvons-nous espérer assimiler les 50 % restants ? Vos arguments reposent sur le fait que notre «idéologie dominante est résolument hostile à toute politique d’assimilation». Cette idéologie est de plus parfaitement en phase avec notre monde moderne, avec le développement actuel des forces productives. Celles-ci établissent par la technique et ont besoin avant tout d’un monde sans frontières, aussi uniformisé que possible sur le plan économique. Et quand on aboli les frontières, on affaibli les solidarités nationales, on favorise les migrations, et il ne reste plus que le soutien de sa famille, de son clan, de sa communauté.]
Il y a dans votre raisonnement une erreur : Si le développement actuel des forces productives se fait dans le sens d’une plus grande uniformisation, à quoi bon abolir les frontières nationales si c’est pour se retrouver avec un nombre bien plus grand de frontières communautaires qui seront des freins tout aussi puissants sinon plus à l’uniformisation ? L’assimilation contribue au contraire à faire tomber toutes les barrières communautaires pour ne laisser subsister que celles de la nation. Pour le développement du capitalisme, c’est bien plus intéressant que l’inverse…
C’est pourquoi j’arrive à une conclusion différente de la votre. S’il est vrai que la logique économique de la mondialisation est en opposition frontale avec la logique nationale, elle l’est encore plus avec la logique communautaire, qui lève des barrières autrement plus solides et plus nombreuses au libre commerce…
[Mon pronostic n’est cependant pas optimiste. Toutes les élites de droite et de gauche communient dans cette idéologie, même le PCF.]
Parce que c’est l’idéologie qui va dans le sens des intérêts des « classes moyennes », qui sont l’essentiel du « bloc dominant » avec la bourgeoisie. Seulement voilà : à force d’affaiblir les frontières nationales et de jouer avec le feu communautariste, les « classes moyennes » sont en train de foutre le feu à la maison. Et je pense que certains commencent à s’en rendre compte.
[Il reste le FN, plutôt favorable de facto à l’assimilation.]
De facto et de jure. Il n’y a la moindre ambiguïté dans son discours.
[Mais il est dans l’opposition.]
Le PCF a exercé une énorme influence sur la politique française entre 1947 et 1981, tout en étant dans l’opposition.
[Ma conclusion serait donc paradoxale : soutenir toutes les mesures de communautarisation soft (à la canadienne), car cela permettrait au moins d’avoir les bénéfices d’une politique communautariste, alors que nous n’en avons que les inconvénients, car nous le faisons à reculons, dans les plus mauvaises conditions.]
Je n’ai toujours pas compris quels sont les « bénéfices » des politiques communautaristes.
[nb : il me semble que vous faites trop l’impasse sur les aspects positifs en terme de coexistence pacifiée d’une communautarisation intelligente (voir le Canada).]
Je ne vois pas à quoi vous faites référence. Pourriez-vous être plus explicite ?
[Et aussi les avantages économiques, un peu sordides, mais pas négligeables si vous êtes du « bon coté ».]
Au contraire : je suis pleinement conscient des avantages économiques que les « classes moyennes » tirent des politiques communautaristes…
[Et ceux qui ne sont pas du « bon coté » font leur choix librement de ne pas s’assimiler. Il n’y a donc rien à se reprocher « moralement ».]
Dans une société « communautariste », les gens n’ont pas le choix de s’assimiler… l’assimilation elle-même perd son sens. Si la société est divisée en communautés, à quoi voulez vous vous « assimiler » ?
Bonjour,
@marc.malesherbes
( . . . aller intelligement vers un communautarisme « à la française » . . . . )
Vous posez une question qui n’a pas, à mon avis, de réponse.
Ce communautarisme dont vous parlez est en grande partie pollué par des principes fondateurs et fondamentaux qui sont en stricte opposition avec nos principes républicains et démocratiques.
L’islam est mondialisé, il ne va pas changer ses principes pour un pays qui représente à peine 1% de la population du monde.
C’est ce qui fait qu‘au delà d’une petite minorité – chiffre maintenant très largement dépassé pour la population d’origine africaine -intégrable sous forme communautaire sans grand risque pour l’unité nationale, seule une assimilation généralisée ou une exclusion systématique humainement réalisée ne résoudra notre état de pétaudière actuel.
@ Descartes
( ..Les classes moyennes, reconnaissantes…)
Décidément, cela confine à l’obsession !
Etant dans l’attente, depuis des années, d’une quantification même approximative, de votre part de cette « classe moyenne » honnie, je suppose que vous même comme beaucoup de vos lecteurs ou commentateurs sont plus ou moins concernés par ce « classement ». Allons nous restituer d’une façon ou d’une autre ces avantages pressentis par marc.malesherbes et envoyer un chèque de compensation à ces « victimes » de notre rapacité ?
D’une manière plus générale, dans ces questions communautaires, je crains et déplore que l’accent soit plus mis sur ce que les gens concernés SONT plus que ce que ces gens FONT.
Et si cette déviance se produit régulièrement, n’est ce pas parce qu’il devient de plus en plus difficile à une population « autochtone » de reprocher à d’autres des comportements qu’elle adopte elle même continuellement alors que le fait de s’appeler Mohamed ou être noir de peau distingue irrémédiablement ces catégories auxquelles il est aisé de se comparer.
Pour des tas de raisons, notre société a, depuis des lustres, laissé se développer des comportements transgressifs, et maintenant que cela devient pénible à supporter, il nous faut des boucs émissaires, pas innocents certes, mais pas plus coupables dans leur majorité.
Parallèlement à ce que vous dénoncez être des politiques favorisant les classes moyennes, je dénoncerais volontiers un laxisme des politiques de tous bords vis à vis de ce que l’on nomme hypocritement « incivilités » et ne sont bien évidemment jamais traitées comme des infractions ou des délits. Ces pratiques, nous venant plus naturellement des pays chauds, européens y compris, se sont implantées en France où les citoyens originaires de ces pays ont plus ou moins consciemment retrouvé des modes de vie inscrits dans leurs « gènes ». D’acceptation en acceptation au nom de la tolérance, nous en sommes arrivés à l’insupportable.
De la même façon que « vos classes moyennes » s’engraissent sur le dos de la population laborieuse et exploitée, selon vous, le citoyen lambda se repais dans le laisser aller, l’irrespect, la duplicité.
C’est probablement la nature humaine qui veut cela et nos règles, nos lois, nos mœurs ont pour objectifs, s’ils sont appliqués avec rigueur – je n’écris pas vigueur – de nous conduire sur la voie du progrès sociétal.
Mais le voulons nous vraiment ?
@ Marcailloux
[L’islam est mondialisé, il ne va pas changer ses principes pour un pays qui représente à peine 1% de la population du monde.]
Vous parlez de « l’Islam » comme si c’était un corps unitaire. Mais ce n’est pas le cas : il existe de multiples « Islams », aux « principes » fort différents au point que certains « Islams » vont jusqu’à détruire les lieux de culte et massacrer les fidèles des autres. Et ces « Islams » se sont construits souvent par adaptation aux influences des territoires où les musulmans se sont installés, et qui représentaient souvent moins de ce « 1% » fatal auquel vous faites référence.
Il faut avoir une pensée dialectique. Oui, l’Islam de France changera – il change déjà – au contact de notre société. Je ne pense pas que ce changement sera suffisant pour permettre un rapport harmonieux entre les deux sans une véritable pression assimilatrice. C’est en ce sens que je pense que ceux qui proposent de « laisser agir le temps » sont suicidaires.
[«..Les classes moyennes, reconnaissantes… » Décidément, cela confine à l’obsession !]
Aucune « obsession ». Pour Marx, le rapport entre bourgeoisie et prolétariat était le moteur de l’histoire, et c’est pourquoi dans ses écrits vous trouvez en permanence des mentions à ces deux classes sociales, sans qu’on dise de lui qu’il en était « obsédé ». Et bien, pour moi, c’est pareil. Je pense qu’aujourd’hui ce n’est pas un rapport à deux classes mais à trois classes qu’il faut envisager…
[Etant dans l’attente, depuis des années, d’une quantification même approximative, de votre part de cette « classe moyenne » honnie,]
Nous en avons parlé. La difficulté d’une telle « quantification » est importante, et nécessite des travaux que je ne suis pas en mesure d’entreprendre. J’ajoute que pour me référer à mon grand ancêtre, Marx n’a jamais « quantifié » la bourgeoisie, le prolétariat où le lumpen-prolétariat. La raison est que cette « quantification » ne vaut pas le travail qu’elle coûte. Pour le raisonnement, le fait de savoir qu’un groupe se constitue en classe est largement suffisant, sans entrer dans les rapports numériques. Après tout, le pouvoir d’une classe ne tient pas à son poids statistique.
[je suppose que vous même comme beaucoup de vos lecteurs ou commentateurs sont plus ou moins concernés par ce « classement ». Allons nous restituer d’une façon ou d’une autre ces avantages pressentis par marc.malesherbes et envoyer un chèque de compensation à ces « victimes » de notre rapacité ?]
On pourrait certainement… mais sur ce genre de questions, je reste un marxiste de stricte obédience. Il n’existe pas de responsabilité PERSONNELLE de ce qu’une classe fait dans son ensemble pour défendre ses intérêts. On n’est PERSONNELLEMENT responsables que de ce que nous faisons individuellement. Le type de culpabilité que nous pouvons ressentir lorsque nous sommes du « bon côté » d’une inégalité est un problème personnel, et chacun le résout comme il peut : en envoyant un gros chèque aux œuvres, en militant dans un parti communiste, en inventant une idéologie qui justifie l’inégalité…
[D’une manière plus générale, dans ces questions communautaires, je crains et déplore que l’accent soit plus mis sur ce que les gens concernés SONT plus que ce que ces gens FONT.]
Sauf qu’il y a un rapport dialectique entre ce que les gens sont et ce qu’ils font. Ainsi, ceux qui « sont » bourgeois « font » exploiter ceux qui « sont » prolétaires, et on ne connaît guère d’exemples de l’inverse…
[Et si cette déviance se produit régulièrement, n’est ce pas parce qu’il devient de plus en plus difficile à une population « autochtone » de reprocher à d’autres des comportements qu’elle adopte elle même continuellement alors que le fait de s’appeler Mohamed ou être noir de peau distingue irrémédiablement ces catégories auxquelles il est aisé de se comparer.]
A cela, deux remarques. La première, c’est que votre exemple ne s’applique qu’à la première génération d’immigrés. Personne n’est obligé à ma connaissance à appeler ses enfants nés en France « Mohammed ». Et dans notre pays pendant des générations les immigrés ont donné à leurs enfants des prénoms « français », aidés en cela par une pression assimilatrice forte et un Code civil pointilleux qui ne les laissait pas livrés sans défense aux pressions de leur communauté. Car quand on est seul à décider, nommer son enfant « Maurice » plutôt que « Mohammed » passe pour une trahison aux yeux de la famille, des proches, de la « communauté », trahison difficile à porter. Alors que quand la société d’accueil l’impose, on est protégé par la règle.
La deuxième remarque est que la tendance humaine à regrouper les gens en catégories n’est pas un processus déconnecté du réel. C’est au contraire un processus gouverné par une logique d’économie. Nous regroupons les gens en fonction des comportements que nous pouvons prévoir. Ainsi, si nous voyons quelqu’un tituber dans la rue une canette à la main, nous nous en éloignons parce qu’une longue expérience nous enseigne que ces comportements sont généralement associés à d’autres bien plus dangereux. Si les employeurs évitent les CV portant le nom de « Mohammed » habitant aux Tartêrets, ce n’est pas parce qu’ils ont un préjugé irrationnel contre le prénom et le domicile, mais parce qu’une longue expérience a montré que les employés portant certains prénoms et venant de certains lieux posent souvent plus de problèmes que les autres. Pourquoi aller chercher des ennuis inutilement ?
Ce type de raisonnement probabiliste est permanent chez l’être humain. C’est d’ailleurs pourquoi pendant des siècles la « réputation » était ce que l’homme avait de plus précieux. Cette « réputation » contenait en fait l’information sur tout ce que vous aviez fait dans le passé, ainsi que ce qu’avait fait votre famille et la « communauté » dont vous étiez issu. Et c’était elle qui permettait d’anticiper vos comportements futurs. Pas étonnant dans ces conditions que les « communautés » aient tenu à la « réputation » de leurs membres comme la prunelle de leurs yeux, sanctionnant durement celui qui s’écartait de la norme. Le contrat conclu « à la poignée de main » chez les Quaquers inspirait une confiance absolue parce que tout le monde savait ce quel a « communauté » faisait à celui qui ne le respectait pas.
Le problème du « communautarisme » est qu’il inscrit l’appartenance communautaire dans ce mécanisme d’anticipation. Si Mohammed m’explique qu’il est membre d’une communauté qui regroupe tous les Mohammed, j’aurai tendance à anticiper le comportement de tous les Mohammed en fonction du sien. C’est pourquoi le phénomène communautariste musulman est d’abord pénalisant pour les musulmans eux-mêmes.
[Pour des tas de raisons, notre société a, depuis des lustres, laissé se développer des comportements transgressifs, et maintenant que cela devient pénible à supporter, il nous faut des boucs émissaires, pas innocents certes, mais pas plus coupables dans leur majorité.]
Peut-être, mais en marquant à chaque instant leur différence, en exigeant des privilèges – au sens étymologique du terme – pour leur « communauté » qu’ils aideront à lutter contre ce phénomène.
[Parallèlement à ce que vous dénoncez être des politiques favorisant les classes moyennes, je dénoncerais volontiers un laxisme des politiques de tous bords vis à vis de ce que l’on nomme hypocritement « incivilités » et ne sont bien évidemment jamais traitées comme des infractions ou des délits.]
Elles n’ont pas à l’être. Les incivilités devraient être punies par la collectivité des citoyens elle-même, solidaire pour condamner ce type de comportements. Veut-on vraiment une société il faut deux gendarmes derrière chaque jeune pour l’obliger à céder le siège dans le bus ? Le « laxisme » que vous dénoncez n’est pas tant le fait des politiques que le fait de nous tous, et d’abord du monde adulte.
[C’est probablement la nature humaine qui veut cela et nos règles, nos lois, nos mœurs ont pour objectifs, s’ils sont appliqués avec rigueur – je n’écris pas vigueur – de nous conduire sur la voie du progrès sociétal. Mais le voulons nous vraiment ?]
Et surtout, sommes nous prêts à payer le prix ?
@ Descartes
Une remarque en passant, et qui n’est pas si éloignée du sujet de cet article.
Il m’arrive de temps en temps de consommer ce produit infâme qu’est le cassoulet William Saurin. (ne riez pas, c’est sûrement dû à la nostalgie de l’époque où j’étais étudiant, et où cette petite boite était un des rares plats chauds qu’on pouvait se confectionner discrètement dans sa chambre d’étudiant).
Depuis quelque mois une mention supplémentaire très visible est apparue sur ces boites : « Cassoulet 100%volaille ».
Manière de dire sans le dire qu’il n’y a plus de porc dans une boite de cassoulet William Saurin.
William Saurin étant une entreprise capitaliste comme une autre, l’ajout de cette mention est devenue obligatoire pour continuer à vendre ce « régal du palais ». Autrement dit la part de consommateurs potentiels de ce produit qui ne consomment pas de porc est devenue suffisamment importante pour contraindre William Saurin à modifier sa « recette » et préserver ses revenus.
J’ai beau sortir mon rasoir d’Ockham, je n’arrive pas à trancher (un comble pour un rasoir, mais ça ne me surprend pas, vous m’avez reproché – sûrement à raison – dans un post antérieur de ne pas savoir m’en servir).
Si William Saurin a été contraint d’ajouter cette mention, est-ce à cause :
– Du fait d’une augmentation significative dans la population française de consommateurs ne mangeant pas de porc ?
– Du fait du respect de plus en plus strict des préceptes religieux d’une population qui n’aurait pas significativement augmenté ?
– Des deux mon général
– Ma question est sans intérêt, et le rasoir d’Ockham n’a rien à faire là.
@ BJ
[Il m’arrive de temps en temps de consommer ce produit infâme qu’est le cassoulet William Saurin.]
Je n’attendais pas de vous un tel affront au bon goût. Oui, moi aussi j’ai mangé du cassoulet William Saurin et des raviolis Buitoni dans ma soupente d’étudiant et de jeune travailleur… mais je peux vous assurer que dès que j’ai eu un salaire, j’ai fait la solennelle promesse de ne jamais plus souiller mon estomac avec de telles matières. Et j’ai tenu parole.
J’ai beau sortir mon rasoir d’Ockham, je n’arrive pas à trancher (…). Si William Saurin a été contraint d’ajouter cette mention, est-ce à cause :- Du fait d’une augmentation significative dans la population française de consommateurs ne mangeant pas de porc ?]
Pour bien utiliser le rasoir d’Occam, il faut bien poser les alternatives. Si William Saurin modifie sa recette et ajoute cette mention, ce n’est pas en pensant à la « population française » en général, mais à cette partie de population française qui achète – où qui est susceptible d’acheter – son infâme cassoulet en boîte. Or, qui compose cette population ? Les gens trop pauvres pour s’acheter autre chose, et les handicapés du goût. Ceux qui achètent ce produit n’arrêteront donc pas de l’acheter parce qu’ils auront appris qu’il n’y a plus de porc dedans : les pauvres n’ont pas d’alternative, les handicapés du goût s’en foutent. Et au contraire le changement de recette ouvre un nouveau marché chez les pauvres et les handicappés du goût qui n’achetaient pas pour des raisons religieuses et traditionnelles. Donc, c’est tout bénéf pour William Saurin de changer sa recette, et cela INDEPENDAMENT du fait de savoir si la proportion de français ne mangeant pas de porc augmente, diminue ou reste stable…
Plutôt que d’y voir dans ce changement un signe que le marché des non-mangeurs de porc augmente, j’y verrais une prise de conscience chez les responsables marketing de l’existence d’un marché « ethnique » exploitable au moindre coût. Vous observerez que de plus en plus de supermarchés ont des rayons halal mais aussi kacher. Or, je peux vous assurer que parmi les juifs français l’observance de la kacherout est en chute libre !
Le communautarisme light n’était il pas en vigueur en URSS?
Trotsky n’a t il pas utilisé cette reconnaissance des nationalités,en URSS,pour démolir de façon excessive ,les institutions soviétiques,et crier à la trahison de l’internationalisme par Staline,par dépit?
Face aux névroses identitaires du monde musulman,un peu de reconnaissance républicaine,à la Chevènement,n’est il pas le chemin le plus court vers l’intégration,puis l’assimilation à la française?
@ luc
[Le communautarisme light n’était il pas en vigueur en URSS?]
Non. Ou alors très, très light. La politique des nationalités en URSS à partir des années 1930 était d’encourager la diversité culturelle et folklorique mais ans jamais lui donner un contenu politique. La « nationalité » locale du citoyen soviétique était écrite sur les documents, mais ne donnait aucun droit et aucun devoir particulier.
Le seul élément véritablement « communautariste » dans le régime soviétique a été la logique « essentialiste » qui a présidé au traitement de certaines nationalités. Des Allemands de la Volga, déplacés parce qu’étant de culture allemande on les suspectait d’être collectivement acquis à l’Allemagne, aux Tatars de Crimée punis collectivement pour l’accueil que certains d’entre eux firent aux troupes du IIIème Reich. Cette vision des « communautés » comme étant des sujets de droit, capables de mal agir et d’être punies, est typiquement russe et rompt profondément avec la vision des Lumières.
[Face aux névroses identitaires du monde musulman, un peu de reconnaissance républicaine, à la Chevènement, n’est il pas le chemin le plus court vers l’intégration, puis l’assimilation à la française?]
Il n’y a pas de « intégration, puis assimilation ». L’assimilation n’est pas un processus par étapes. Et l’intégration, loin de favoriser l’assimilation, l’empêche. Pourquoi les gens feraient-ils l’effort de s’assimiler si la société d’accueil les « intègre » sans qu’ils aient à changer en quoi que ce soit leur comportement ?
@ Descartes
merci de cette échange sur le communautarisme qui m’a permis, et va me permettre d’y rerefléchir.
Quelques commentaires sur cet article (comme s’il s’agissait d’un lecteur du blog) ?
http://www.liberation.fr/debats/2016/08/29/laicite-ou-identite_1475306
@ Anne Iversaire
[Quelques commentaires sur cet article (comme s’il s’agissait d’un lecteur du blog) ?]
Avec cet article, vous m’avez fait beaucoup de peine. J’ignorais que Balibar, que je lisais avec tant de plaisir dans ma jeunesse, était tombé si bas. C’est un texte de circonstance qui ne fait que répéter des poncifs sans se poser la moindre question quant à leur contenu.
Ainsi, dès le premier paragraphe on a droit à une formule choc : « L’exercice des libertés doit primer dans toute la mesure du possible sur les exigences de l’ordre public, qui par définition les restreignent ». Qu’est ce que cette phrase veut dire vraiment ? On peut comprendre la formule « l’exercice des libertés doit primer sur les exigences de l’ordre public ». C’est absurde, mais compréhensible. Mais ensuite, on rajoute là dedans que ce primat ne doit s’exercer que « dans la mesure du possible ». Mais qui – et surtout sur quels critères – décide ce qui est « possible » et ce qui ne l’est pas ? En fait, cette phrase ne veut absolument rien dire. Ou plutôt si : qu’il faut laisser les gens libres de faire ce qu’ils veulent sauf dans les cas où on ne peut pas les laisser libres de faire ce qu’ils veulent. Tautologie, quand tu nous tiens…
Après, on retrouve l’habituelle logique sectaire de l’extrême gauche, et notamment celle de l’étiquette qui tue. Alors on distribue les qualificatifs, genre « laïcisme identitaire », « laïcisme intégriste », « communautarisme d’Etat ». Et bien sur, « nationaliste », l’insulte suprême…
Mais le problème fondamental à mon sens dans le commentaire de Balibar est qu’il veut mettre au centre de l’affaire la question de la laïcité, alors qu’elle n’a rien à y faire. Le « burkini » n’est pas une tenue religieuse, mais un signe communautaire. Et ce qui excite le conflit, ce n’est pas une différence religieuse mais la volonté séparatiste. L’assimilation n’est pas une question de religion, mais de sociabilité et d’acceptation des normes communes. Et la religion ne pose problème que dans la mesure où elle fait obstacle à cette sociabilité, au respect de ces normes.
Bonjour,
Superbe billet avec son lot d’idées fraiches et bienvenues.
Puisqu’on ne commente que pour ratiociner, voilà mon bémol : ce n’est pas aux juristes de faire preuve de créativité pour “adapter le droit à la réalité” mais à nos représentant de faire évoluer ce dernier si cela leur semblent opportun. Eux seuls ont la légitimité pour ce faire.
Par ailleurs, citer Sartre en 2016, en l’ayant lu et en allant dans son sens…Monsieur permettez que je vous tire mon chapeau.
@ Tom Joad
[Puisqu’on ne commente que pour ratiociner, voilà mon bémol : ce n’est pas aux juristes de faire preuve de créativité pour “adapter le droit à la réalité” mais à nos représentant de faire évoluer ce dernier si cela leur semblent opportun. Eux seuls ont la légitimité pour ce faire.]
Oui et non. Il faut comprendre que si nos représentants votent les lois – et qu’ils sont les seuls légitimes pour le faire – ce n’est pas eux qui les font. Ou alors très exceptionnellement.
Nous sommes dans une société fondée sur la division du travail. Et cette division du travail touche aussi le politique. Le « représentant » doit écouter ses mandants, leur parler à travers les médias, participer aux délibérations, couper les rubans, visiter les blessés, préparer sa réélection… cela lui laisse peu de temps pour réfléchir. D’ailleurs, rien ne vous dit qu’il en soit capable : les critères sur lesquels ses mandants le sélectionnent n’incluent que rarement sa culture sur le fond des dossiers ou son hauteur de vues.
D’un autre côté, il y a un monde de gens qui réfléchissent aux questions de fond. Des juristes, des ingénieurs, des chercheurs, des médecins, des hauts fonctionnaires formés dans les meilleures écoles et recrutés à l’issue d’examens et de concours exigeants, et qui travaillent tous les jours en contact avec les réalités du terrain. Ce sont eux qui ont les idées, idées qu’ensuite ils essayent de faire partager aux représentants du peuple. Le bon « représentant » est celui qui est capable de s’entourer de gens qui pensent, de les écouter, de sélectionner chez eux les bonnes idées et de ne pas retenir les mauvaises. Ce n’est pas De Gaulle qui a « fait » la bombe atomique, ce n’est pas lui qui a « fait » la Constitution de la Vème. Il n’était pas un expert en droit constitutionnel, et encore moins en physique nucléaire. Mais il avait un Cassin et un Debré, un Goldschmidt et un Guillaumat qui, eux, s’y connaissaient. Et il savait leur donner des lignes directrices et les faire travailler.
S’il faut adapter notre droit à une nouvelle réalité, c’est d’abord aux juristes de trouver des solutions aux problèmes posés. Il nous faut un véritable débat, un véritable travail dans les universités, dans le Conseil d’Etat, dans les partis politiques. Et ce n’est qu’après que nos représentants pourront décider ce qu’ils en retiennent.
@ Tom Joad
Je me permets de vous faire un petit résumé de la pensée de Descartes, qui peut parfois paraître obscure aux non initiés. Dans notre système démocratique actuel, une masse d’ignorants, les électeurs, élit une autre bande d’ignorants comme représentants. Ces autres ignorants, une fois au pouvoir, sont happés par toutes sortes d’obligations qui les empêchent, de toute façon, de se cultiver, à supposer même qu’ils en aient l’envie et les capacités. Néanmoins, ce qui sauve ce système, et ce qui en fait l’incomparable beauté, c’est qu’il arrive parfois que, par miracle, ces ignorants décident de s’entourer de “gens qui pensent”. A ces moments là, c’est un peu, si vous voulez, comme ce qui se passait dans l’ancien système monarchique.
@ dsk
[Je me permets de vous faire un petit résumé de la pensée de Descartes, qui peut parfois paraître obscure aux non initiés.]
Descartes est grand, et dsk est son prophète… En tout cas, si Mahomet a rapporté la pensée d’Allah comme vous rapportez la mienne…
[Dans notre système démocratique actuel, une masse d’ignorants, les électeurs, élit une autre bande d’ignorants comme représentants.]
Non. Dans notre système démocratique actuel, une masse de gens dont aucun mécanisme ne garantit la moindre compétence technique – ni même le moindre désir de l’acquérir – ont le droit d’élire des gens pour les représenter sans que rien ne garantisse que ces représentants auront à leur tour la moindre compétence technique – ni le moindre désir de l’acquérir – sur les sujets qu’ils auront à traiter. C’est peut-être triste, mais c’est comme ça.
Le fait est que le député qui vote la réforme du code pénal est le même qui vote les lois sur le contrôle du médicament, sur la sûreté nucléaire, la loi de programmation militaire, les textes sur les droits des femmes et les réformes constitutionnels… même avec la meilleure bonne volonté, peut-on demander à un député une expertise – ou même une connaissance approfondie – de toutes ces matières ?
Fonder les institutions démocratiques sur l’idée que les citoyens – et les représentants – sont techniquement compétents sur l’ensemble des sujets qu’ils ont à traiter, c’est fonder le système sur une fiction. Et cette fiction empêche de se poser la véritable question : puisque les représentants ne sont pas des techniciens, et que ceux-ci sont extérieurs au système politique, comment gérer les rapports entre les uns et les autres pour éviter les deux risques qui sont d’un côté la technocratie, de l’autre le gouvernement des incapables ?
@ Descartes
[“Fonder les institutions démocratiques sur l’idée que les citoyens – et les représentants – sont techniquement compétents sur l’ensemble des sujets qu’ils ont à traiter, c’est fonder le système sur une fiction. Et cette fiction empêche de se poser la véritable question : puisque les représentants ne sont pas des techniciens, et que ceux-ci sont extérieurs au système politique, comment gérer les rapports entre les uns et les autres pour éviter les deux risques qui sont d’un côté la technocratie, de l’autre le gouvernement des incapables ?”]
Personnellement, je ne vois qu’une solution. Il faut aller au bout de la logique de marché qui sous-tend le système démocratique. Voyons franchement les électeurs comme de simples clients, qui se contentent de faire jouer la concurrence entre fournisseurs de solutions politiques. Tout comme des clients, ils n’ont bien sûr aucune idée de la manière dont ces solutions sont fabriquées. Ils ne voient que les résultats. A partir de là, pourquoi ne pas concevoir les programmes politiques comme de véritables contrats, dotés d’une force obligatoire ? Mettons que pour être élu, je promette de ramener le nombre de chômeurs à 2 millions. Très bien. Je ne serai dons rémunéré que si j’atteins ce chiffre. Et si je veux l’atteindre, j’aurai bien tout intérêt à m’entourer d’un maximum d’experts compétents, non ? Quant à la Constitution, elle jouerait alors un peu le rôle de l’ordre public pour les contrats. Elle viendrait prévenir les potentielles dérives des programmes électoraux.
@ dsk
[Personnellement, je ne vois qu’une solution. Il faut aller au bout de la logique de marché qui sous-tend le système démocratique. Voyons franchement les électeurs comme de simples clients, qui se contentent de faire jouer la concurrence entre fournisseurs de solutions politiques.]
Le point faible de l’analogie est que le « client » politique ne sort pas du supermarché avec le produit qu’il a choisi, mais avec le produit que la majorité des clients à plébiscité. Imaginez la scène : vous avez envie de vous acheter un camembert, mais comme la majorité des clients préfère le roquefort, vous n’aurez que du roquefort…
En fait, je me demande si vous ne reprenez une idée relativement ancienne, celle de l’école dite « du choix public » qui autour de Buchanan et Tullock a essayé dans les années 1960 d’utiliser les outils de la théorie économique néoclassique au pour analyser les choix politiques. Le problème est que cette théorie démontre que dans une démocratie organisée comme un marché, l’ignorance est un choix rationnel pour le citoyen : en effet, pour chaque citoyen l’effort pour s’informer et s’éduquer est important alors que cet effort ne lui fait gagner qu’une influence minime sur les décisions. Le rapport coût/avantage de l’activité intellectuelle du citoyen est donc très défavorable…
[Tout comme des clients, ils n’ont bien sûr aucune idée de la manière dont ces solutions sont fabriquées. Ils ne voient que les résultats.]
Non, justement. Ils ne voient que les résultats de celui qui est choisi. L’essai comparatif et le test en laboratoire sont de toute évidence impossibles. Imaginez-vous ce que serait un marché ou les produits vendus n’ont jamais été testés…
[A partir de là, pourquoi ne pas concevoir les programmes politiques comme de véritables contrats, dotés d’une force obligatoire ? Mettons que pour être élu, je promette de ramener le nombre de chômeurs à 2 millions. Très bien. Je ne serai dons rémunéré que si j’atteins ce chiffre. Et si je veux l’atteindre, j’aurai bien tout intérêt à m’entourer d’un maximum d’experts compétents, non ?]
Mais en pratique, c’est déjà le cas. Si Hollande avait réalisé toutes ses promesses, il aurait été récompensé très largement – par la réélection, pour commencer. Cela ne semble pas suffisant pour le motiver… Le problème, c’est que la promesse électorale relève de l’ordre de la séduction, et non du contrat. Celui qui ne promettrait que ce qu’il peut tenir ne serait jamais élu, de la même manière que l’amoureux qui ne promet à sa promise que ce qu’il est sûr de tenir n’ira jamais jusqu’à l’autel.
@ Descartes
[“Le point faible de l’analogie est que le « client » politique ne sort pas du supermarché avec le produit qu’il a choisi, mais avec le produit que la majorité des clients à plébiscité. Imaginez la scène : vous avez envie de vous acheter un camembert, mais comme la majorité des clients préfère le roquefort, vous n’aurez que du roquefort…”]
Quelle différence avec la situation actuelle ?
[“En fait, je me demande si vous ne reprenez une idée relativement ancienne, celle de l’école dite « du choix public » qui autour de Buchanan et Tullock a essayé dans les années 1960 d’utiliser les outils de la théorie économique néoclassique au pour analyser les choix politiques. Le problème est que cette théorie démontre que dans une démocratie organisée comme un marché, l’ignorance est un choix rationnel pour le citoyen : en effet, pour chaque citoyen l’effort pour s’informer et s’éduquer est important alors que cet effort ne lui fait gagner qu’une influence minime sur les décisions. Le rapport coût/avantage de l’activité intellectuelle du citoyen est donc très défavorable…”]
Au contraire. Dès lors que les promesses politiques deviendraient légalement contraignantes, les électeurs seraient complètement déchargés de cette “activité intellectuelle du citoyen”. On leur promet une réduction du chômage ? De l’insécurité ? Des inégalités ? Très bien. Il achètent, sur la base d’objectifs chiffrés. Et si ces objectifs ne sont pas atteints, eh bien ils ne paient pas, c’est tout. Plus aucun besoin pour eux de se soucier de la manière dont ces objectifs sont atteints.
[“Non, justement. Ils ne voient que les résultats de celui qui est choisi. L’essai comparatif et le test en laboratoire sont de toute évidence impossibles. Imaginez-vous ce que serait un marché ou les produits vendus n’ont jamais été testés…”]
De même que si j’achète une Renault, je ne verrais que les “résultats” de cette Renault. Et alors ?
[“Mais en pratique, c’est déjà le cas. Si Hollande avait réalisé toutes ses promesses, il aurait été récompensé très largement – par la réélection, pour commencer. Cela ne semble pas suffisant pour le motiver…”]
Je ne parle pas de “motivation”. Je parle d’obligation. Ce que vous dîtes, c’est un peu comme si l’on se rendait chez le concessionnaire et qu’on lui versait la moitié du prix d’une automobile, sans que cela, en soi, l’oblige à quoi que ce soit. On escompterait, simplement, que cela le “motive” à nous fournir l’automobile en question, afin de pouvoir obtenir l’autre moitié de la somme…
@ Descartes (suite)
[“Celui qui ne promettrait que ce qu’il peut tenir ne serait jamais élu, de la même manière que l’amoureux qui ne promet à sa promise que ce qu’il est sûr de tenir n’ira jamais jusqu’à l’autel.”]
Et celui qui promettrait ce qu’il ne peut pas tenir ne serait jamais payé. Justement, mettons fin à ce “romantisme” de la politique actuelle. Rendons là enfin professionnelle. C’est alors que les experts, j’ajouterais les bons, les vrais, ceux qui sont efficaces, auraient toute leur place.
@Descartes
> Le problème est que cette théorie démontre que dans une démocratie organisée comme un marché, l’ignorance est un choix rationnel pour le citoyen : en effet, pour chaque citoyen l’effort pour s’informer et s’éduquer est important alors que cet effort ne lui fait gagner qu’une influence minime sur les décisions. Le rapport coût/avantage de l’activité intellectuelle du citoyen est donc très défavorable…
Pourquoi est-ce un “problème” ? Cette conclusion de la théorie me paraît assez conforme à la réalité : la plupart des citoyens ne s’informent pas sur la politique au-delà de ce qu’ils entendent lors de quelques émissions de grande écoute (inclus le JT) à la télé ou à la radio. Pour la plupart des gens, il y a un rendement décroissant du temps passé à s’intéresser à la politique, d’où la délégation du travail à quelques spécialistes (journalistes, “experts” médiatiques, lobbyistes et associatifs de métier, etc.).
Certes, il y a des exceptions, comme les lecteurs de ce blog, qui font l’effort de s’informer beaucoup plus pour un retour concret très faible (en termes d’impact politique, non de satisfaction d’une curiosité personnelle), mais cela n’empêche pas le caractère statistiquement vrai de l’énoncé.
@ dsk
[« Le point faible de l’analogie est que le « client » politique ne sort pas du supermarché avec le produit qu’il a choisi, mais avec le produit que la majorité des clients à plébiscité. Imaginez la scène : vous avez envie de vous acheter un camembert, mais comme la majorité des clients préfère le roquefort, vous n’aurez que du roquefort… » Quelle différence avec la situation actuelle ?]
Je crois que vous m’avez mal compris. Vous proposez de considérer l’électeur comme un « client » dans le cadre d’un marché. Mais dans la logique du marché, le « client » choisit INDIVIDUELLEMENT le produit qu’il va emporter chez lui. Dans le système politique, c’est l’ensemble des clients qui choisit le produit, et ce produit est emporté par TOUS, qu’ils le veuillent ou non. C’est pourquoi l’analogie que vous faites avec le marché atteint très vite ses limites…
[Au contraire. Dès lors que les promesses politiques deviendraient légalement contraignantes, les électeurs seraient complètement déchargés de cette “activité intellectuelle du citoyen”. On leur promet une réduction du chômage ? De l’insécurité ? Des inégalités ? Très bien. Il achètent, sur la base d’objectifs chiffrés. Et si ces objectifs ne sont pas atteints, eh bien ils ne paient pas, c’est tout.]
Mais ça veut dire quoi « ils ne paient pas » ? Imaginons le cas extrême : l’homme politique promet la paix. Il ne tient pas promesse, et il y a la guerre et le pays est détruit. Vous voulez dire que vous réunirez les survivants pour décider qu’ils ne paieront pas son salaire à l’élu ? Ca leur fera une belle jambe, vous ne trouvez pas ?
Même dans les domaines où il y a contrat – et des tribunaux pour le faire respecter – il faut au client une certaine connaissance du domaine pour choisir son co-contractant dès lors que les conséquences d’un mauvais choix peuvent être désastreuses ou irréparables. Une fois que vous êtes mort, le fait de trainer en justice le médecin qui n’a pas su vous garder en vie n’est qu’une très maigre consolation.
[« Non, justement. Ils ne voient que les résultats de celui qui est choisi. L’essai comparatif et le test en laboratoire sont de toute évidence impossibles. Imaginez-vous ce que serait un marché ou les produits vendus n’ont jamais été testés… » De même que si j’achète une Renault, je ne verrais que les “résultats” de cette Renault. Et alors ?]
Non. Même avant d’acheter votre Renault, vous pourrez voir dans les revues spécialisées des essais comparatifs des différentes voitures. Et vous savez que toutes les voitures qui sont proposées à votre choix ont été essayées par leurs constructeurs sur circuit et sur route, et ensuite par les services de l’Etat pour vérifier leur conformité aux standards de sécurité, de pollution, etc. Les produits que vous achetez ont été toujours testés par d’autres avant de vous être proposés, et leur performance sur un certain nombre de points est prouvée. En politique, ce serait très difficile à faire. Il faudrait avoir une sorte de « maquette » de pays pour pouvoir tester les politiques proposées par les différents candidats avant une « autorisation de mise sur le marché » qui leur permettrait de les inscrire sur leur programme…
[Je ne parle pas de “motivation”. Je parle d’obligation. Ce que vous dîtes, c’est un peu comme si l’on se rendait chez le concessionnaire et qu’on lui versait la moitié du prix d’une automobile, sans que cela, en soi, l’oblige à quoi que ce soit. On escompterait, simplement, que cela le “motive” à nous fournir l’automobile en question, afin de pouvoir obtenir l’autre moitié de la somme…]
C’est exactement ce qui arrive chez le médecin. Aucun médecin ne s’engage à vous guérir, tout juste à faire de leur mieux. Et si vous ne guérissez pas, vous ne pouvez pas leur exiger de vous rembourser leurs honoraires. La politique, c’est une obligation de moyens, et non de résultats.
Mais imaginons un instant qu’on impose une obligation de résultats sur les politiques. Quelle serait la sanction au cas où l’obligation ne serait pas remplie ? Car sans sanction, une obligation contractuelle est vide de sens. Par exemple, disons qu’un Président s’engage à maintenir la paix, et qu’il ne tient pas promesse, moyennant quoi le pays est totalement vitrifié par des armes nucléaires. Quelle serait la sanction que vous proposeriez, et qui serait de nature à “l’obliger” à tenir ses promesses ?
@ dsk
[Et celui qui promettrait ce qu’il ne peut pas tenir ne serait jamais payé.]
En d’autres termes, il y a deux options : soit vous promettez ce que vous pouvez tenir, et vous n’êtes pas élu – et donc pas payé – soit vous promettez ce que vous ne pouvez pas tenir, et dans ce cas vous êtes élu, mais vous n’êtes pas payé. Quelque soit la branche de l’alternative, vous n’êtes pas payé. Où allez-vous trouver des candidats dans ces conditions ?
@ dsk,
Bonjour,
( . .Dans notre système démocratique actuel, une masse d’ignorants, les électeurs, élit une autre bande d’ignorants comme représentants. . . . .)
Vous semblez occulter un détail qui fait la différence avec un système non démocratique, présent ou à venir, c’est que l’électeur, dans la majorité qu’il constitue, est le payeur des conséquences de son choix. Avec conjointement la minorité qui a préalablement accepté la règle du jeu démocratique. Cela nous parait actuellement tellement naturel que c’en est probablement dévalué dans le subconscient de beaucoup.
D’accord, çà ne satisfait pas tout le monde, mais y a-t-il dans l’histoire de l’humanité un système qui offre plus d’avantages que celui ci ?
@ Descartes (Pardonnez-moi pour cette rafale désordonnée de commentaires)
[“Non. Même avant d’acheter votre Renault, vous pourrez voir dans les revues spécialisées des essais comparatifs des différentes voitures. Et vous savez que toutes les voitures qui sont proposées à votre choix ont été essayées par leurs constructeurs sur circuit et sur route, et ensuite par les services de l’Etat pour vérifier leur conformité aux standards de sécurité, de pollution, etc. Les produits que vous achetez ont été toujours testés par d’autres avant de vous être proposés, et leur performance sur un certain nombre de points est prouvée. En politique, ce serait très difficile à faire. Il faudrait avoir une sorte de « maquette » de pays pour pouvoir tester les politiques proposées par les différents candidats avant une « autorisation de mise sur le marché » qui leur permettrait de les inscrire sur leur programme…”]
Attendez… Ce que vous êtes en train de me dire, c’est que toute politique serait nécessairement incertaine dans ses résultats, puisqu’il n’y aurait pas moyen de la tester au préalable ? Dans ce cas, dans mon système, au moins les choses seraient claires. L’ignorance des hommes politiques apparaîtrait au grand jour, dès lors qu’aucun ne s’aventurerait à promettre le moindre résultat chiffré. Au bout du compte, nous aurions fait alors un grand pas vers la rationalité du débat politique. J’ajouterais que paradoxalement, un système destiné à nous décharger de notre “activité intellectuelle du citoyen” nous conduirait ainsi, au contraire, à devenir des citoyens plus adultes.
@ Antoine
[Pourquoi est-ce un “problème” ?]
En effet, ma formulation était un peu générale. C’est un problème pour ceux qui veulent fonder la République sur la délibération des citoyens. Il est évident que cette conclusion ne devrait en rien gêner les partisans de régimes oligarchiques ou aristocratiques…
[Cette conclusion de la théorie me paraît assez conforme à la réalité : la plupart des citoyens ne s’informent pas sur la politique au-delà de ce qu’ils entendent lors de quelques émissions de grande écoute (inclus le JT) à la télé ou à la radio.]
Ce n’est pas tout à fait vrai. Les français sont nettement plus politisés que certains de nos voisins européens, et font un véritable effort d’information avant les échéances électorales. Ce n’est pas un hasard si l’on voit avant les élections se multiplier les émissions politiques dans les médias, par exemple… En fait, les français sont très attachés au modèle représentatif : ils dépensent un effort bien plus important pour s’informer avant de choisir leur représentant que pour suivre les dossiers.
De ce point de vue, on peut dire que le système politique américain est bien plus proche d’une logique de marché que le système français.
@ dsk
[Pourquoi ? Il existe une quantité de situations dans lesquelles ce sont des collectivités qui procèdent à des achats.]
Lorsque ce cas se présente, le « client » en termes économiques n’est pas le consommateur final du bien, mais la collectivité qui le sélectionne. Or, dans votre proposition d’un « marché politique », le « client » n’est pas la collectivité, mais l’électeur individuel…
[La différence ? Eh bien, je vais vous le dire, car je trouve cette question très intéressante, c’est pourquoi j’y réponds moi-même sans attendre la réponse de Descartes.]
Puisque vous faites les questions et les réponses, je n’ai rien à ajouter…
[« Mais ça veut dire quoi « ils ne paient pas » ? Imaginons le cas extrême : l’homme politique promet la paix. Il ne tient pas promesse, et il y a la guerre et le pays est détruit. Vous voulez dire que vous réunirez les survivants pour décider qu’ils ne paieront pas son salaire à l’élu ? Ca leur fera une belle jambe, vous ne trouvez pas ? » Là encore, quelle différence avec la situation actuelle ?]
Aucune. Votre proposition ne changerait donc rien. Nous sommes d’accord.
[Peut-être. Mais si le médecin sait qu’il ne sera – grassement – payé que s’il me garde en vie, je pense être assuré qu’il aura fait en tout cas son maximum.]
Pas vraiment. Si le médecin n’est payé – grassement – que s’il garde son patient en vie, il aura tendance à sélectionner les patients les plus faciles à garder en vie. Dans un tel système, mieux vaut prendre un patient souffrant d’un ongle incarné qu’un patient diabétique. Si vous avez une pathologie qui pourrait vous conduire à la tombe, vous risquez de ne trouver que les plus mauvais médecins pour vous soigner…
[« Mais imaginons un instant qu’on impose une obligation de résultats sur les politiques. Quelle serait la sanction au cas où l’obligation ne serait pas remplie ? Car sans sanction, une obligation contractuelle est vide de sens. Par exemple, disons qu’un Président s’engage à maintenir la paix, et qu’il ne tient pas promesse, moyennant quoi le pays est totalement vitrifié par des armes nucléaires. Quelle serait la sanction que vous proposeriez, et qui serait de nature à “l’obliger” à tenir ses promesses ? » Déjà, il ne serait, j’insiste, pas rémunéré.]
Et qu’est ce que cela changerait, dans l’exemple proposé ? Vous savez, la vitrification éteint généralement l’avarice la plus trempée…
[Zéro, nada, rien. Et aucun membre de son équipe non plus. Ensuite, s’il y a non respect frauduleux, intentionnel etc. du “contrat”, on peut tout simplement imaginer d’autres sanctions. Je laisse votre imagination libre sur ce point.]
Franchement, mon imagination ne me signale aucune sanction qui puisse affecter une personne vitrifiée…
[« En d’autres termes, il y a deux options : soit vous promettez ce que vous pouvez tenir, et vous n’êtes pas élu – et donc pas payé – soit vous promettez ce que vous ne pouvez pas tenir, et dans ce cas vous êtes élu, mais vous n’êtes pas payé. Quelque soit la branche de l’alternative, vous n’êtes pas payé. Où allez-vous trouver des candidats dans ces conditions ? » Eh bien en rendant la pure “séduction” impossible, tout simplement. Celui qui ferait des promesses intenables finirait ruiné.]
Pas plus que celui qui ferait des promesses tenables, puisqu’il ne sera pas élu.
[J’attire votre attention sur le fait que c’est le principe même de l’économie de marché. On y est obligé de respecter ses engagements contractuels.]
Bien sur que non. Si tel était le cas, il n’y aurait pas de procédure de faillite.
[@ Descartes (Pardonnez-moi pour cette rafale désordonnée de commentaires)]
Je les ai regroupé dans ma réponse pour une plus grande lisibilité.
[Attendez… Ce que vous êtes en train de me dire, c’est que toute politique serait nécessairement incertaine dans ses résultats, puisqu’il n’y aurait pas moyen de la tester au préalable ? Dans ce cas, dans mon système, au moins les choses seraient claires. L’ignorance des hommes politiques apparaîtrait au grand jour, dès lors qu’aucun ne s’aventurerait à promettre le moindre résultat chiffré.]
Ce n’est pas une question « d’ignorance ». C’est le simple fait que l’histoire n’étant pas une science expérimentale, chaque fois qu’on met en œuvre une politique on le fait pour la première fois. Si vous ne payez qu’aux résultats, alors vous aurez des hommes politiques qui chercheront par tous les moyens à minimiser les risques…
[Au bout du compte, nous aurions fait alors un grand pas vers la rationalité du débat politique. J’ajouterais que paradoxalement, un système destiné à nous décharger de notre “activité intellectuelle du citoyen” nous conduirait ainsi, au contraire, à devenir des citoyens plus adultes.]
Je ne comprends pas très bien cette conclusion.
Bonjour Descartes,
> En effet, ma formulation était un peu générale. C’est un problème pour ceux qui veulent fonder la République sur la délibération des citoyens.
Oui, c’est ce que j’avais compris. Ce que je voulais dire, c’est qu’on ne peut raisonnablement disqualifier une théorie simplement parce que ses conclusions ne sont pas favorables à un idéal politique.
Après, j’admets que je ne connais pas cette théorie, je ne répondais qu’à la conclusion que vous en présentiez.
> En fait, les français sont très attachés au modèle représentatif : ils dépensent un effort bien plus important pour s’informer avant de choisir leur représentant que pour suivre les dossiers.
Je suis d’accord. Mais justement, le modèle représentatif est basé sur une division du travail, celui-ci étant délégué en large partie à des spécialistes. La notion de rendements décroissants semble adaptée pour décrire le comportement des citoyens : il veulent bien s’investir jusqu’à un certain point au-delà duquel le coût de l’investissement politique devient supérieur au retour attendu, et où il devient préférable de laisser la décision à une minorité de professionnels.
Les citoyens américains ont ici une évaluation différente (plus faible) du retour de l’investissement politique, ils sont donc plus “passifs” ou plus délégateurs.
@ Descartes
@ Descartes
[“Je ne comprends pas très bien cette conclusion.”]
Dommage. Je n’ai malheureusement pas le temps de poursuivre cette conversation très intéressante, en tout cas pour moi. Une prochaine fois j’espère.
@ Antoine
[Oui, c’est ce que j’avais compris. Ce que je voulais dire, c’est qu’on ne peut raisonnablement disqualifier une théorie simplement parce que ses conclusions ne sont pas favorables à un idéal politique.]
Ce n’est pas la théorie que je cherchais à disqualifier. Cette théorie explique en effet parfaitement le fonctionnement d’un système politique organisé comme un marché, et à ce titre elle est extrêmement intéressante par beaucoup de côtés. Mais rien ne nous oblige à organiser le système politique de cette manière !
[Je suis d’accord. Mais justement, le modèle représentatif est basé sur une division du travail, celui-ci étant délégué en large partie à des spécialistes.]
Tout à fait. Si vous suivez mon blog, vous aurez observé que je défend justement la place des « experts » dans le système démocratique. Toute réflexion institutionnelle doit aborder la question du rapport entre les « technocrates » et les représentants du peuple. Parce que l’idée d’une démocratie sans « experts » est une chimère.
[La notion de rendements décroissants semble adaptée pour décrire le comportement des citoyens : il veulent bien s’investir jusqu’à un certain point au-delà duquel le coût de l’investissement politique devient supérieur au retour attendu, et où il devient préférable de laisser la décision à une minorité de professionnels.]
Tout à fait. Mais il y a une activité qu’on ne peut pas laisser aux « professionnels » : c’est le choix des représentants. On peut tout déléguer… sauf l’acte de délégation lui-même !
@Marcailloux
Pour les classes moyennes, on peut la définir via les catégories de l’INSEE (données 2010-2015).
On enlève :
– les retraités et les inactifs
– les chefs d’entreprise de + de 10 salariés (0,1% de la population active), qui avec les très hauts fonctionnaire, les cadres dirigeants d’entreprises, les très riches rentiers, ne font pas une classe supérieure de plus de 1% de la population,
– les classes populaires, constituées essentiellement des ouvriers et des employés, auxquels on ajoute les artisans et petits commerçants (5,5% des actifs) et les agriculteurs (1,5%), ce qui fait 57% de la population active pour les classes populaires au sens large.
Il reste 42% de la population active de classes moyennes, se décomposant en 17% de classes moyennes supérieures (cadres et professions intellectuelles supérieures) et 25% de classes moyennes inférieures (professions intermédiaires). Par exemple, un professeur, un ingénieur font partie des classes moyennes supérieures ; un instituteur, un technicien font partie des classes moyennes inférieures.
NB : la population de + de 15 ans comprend également 32% de retraités et 8% d’élèves ou d’étudiants.
@morel
Je n’ai rien particulièrement contre le porno, qui est un marchandisation du corps de l’homme autant que de celui de la femme. Il paraît que les hommes sont beaucoup plus maltraités sur les tournages des films porno que les femmes (qui en tout cas dans les années quatre-vingt étaient traitées avec beaucoup d’égards, elles étaient des divas, de véritables stars)
@CVT
Je ne connais pas bien l’histoire d’SOS racisme (vous avez vu juste concernant mon année de naissance), ce que vous dites est peut-être vrai (bien que ce soit aussi ce que dit Zemmour qui dit aussi beaucoup de bêtises) mais cela n’implique pas qu’il faut pratiquer la discrimination…
@Descartes
Je ne sais pas vous, mais moi, “Le Deuxième sexe”, je l’ai lu attentivement : il s’agit d’un ouvrage très riche (notamment par ses références historiques, sociologiques, littéraires). Olympe de Gouges morte lors de la Révolution n’a pu dire exactement la même chose, ni les suffragettes du tout début du 20ème.
Quant à votre question sur ce que pensait mon grand-père : on ne pourra jamais le savoir, tout ça c’est du roman familial sans aucun intérêt (chacun peut s’inventer le sien si ça l’amuse). Ce que je constate, notamment en observant des personnes immigrées d’une région reculée d’un pays d’Europe du Sud, que je connais bien, et qui ont l’âge de mes parents, c’est que la vie d’une femme passée dans sa cuisine, c’est une vie de merde, bien plus que la vie de son mari ouvrier. Même si la femme en question, résignée, d’une courageuse bonne humeur, ne s’en rend pas compte, parce qu’elle est tellement isolée, enfermée, qu’elle ne sait pas ce qu’elle rate en fait…
Je trouve comme vous ridicule la valorisation actuelle du “statut de victime” (qu’est-ce qu’on entend pas comme conneries… je me souviens avoir entendu à la radio quelqu’un qui passait devant le Bataclan lors du massacre, qui n’avait nullement été blessé mais “traumatisé psychologiquement” et n’arrivant pas à prouver qu’il était là, dire “j’aurais préféré prendre une balle pour pouvoir faire reconnaître mon statut de victime”… si c’est pas malheureux d’entendre ça, les bras m’en tombaient… et les journalistes pleins de respect…). Mais ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas reconnaître que les musulmans constituent plutôt, globalement, un groupe faible et dominé en France.
@nationaliste-ethniciste
Je vous cite : “L’islam a une spécificité, je ne saurais vous dire pourquoi. […] Peut-être est-ce mon incapacité à comprendre les musulmans et à leur témoigner de la bienveillance. […] J’essaie, au cours de nos échanges, de mettre en ordre mes idées, et c’est difficile. Il y a des choses qu’on ressent mais qu’on a grand peine à exprimer.”
Vous êtes d’une grande franchise ; ce que vous décrivez, est-ce que ce n’est pas cela, l’islamophobie ?
@ Nana85
[Pour les classes moyennes, on peut la définir via les catégories de l’INSEE (données 2010-2015).]
On peut en donner une infinité de définitions. On peut retenir par exemple ceux dont le revenu est entre telle et telle valeur. C’est ce que font souvent les économistes. Où alors on peut la définir en fonction des indices de consommation de certains biens, objets ou services (culturels, par exemple), comme le font souvent les sociologues. Où encore en fonction du niveau de formation… mais le défaut de chacune de ces définitions est que le groupe ainsi défini n’a pas les caractéristiques d’une classe, au sens marxiste du terme. En d’autres termes, les gens ainsi regroupés n’ont aucune raison d’avoir des intérêts communs, et donc d’agir de la même manière lors des choix sociaux ou politiques.
C’est pourquoi j’avais proposé une définition fondée sur leur position dans le processus de production et de répartition de la valeur produite. Sachant que d’un côté il y a ceux qui possèdent le capital et qui font travailler d’autres en leur retournant seulement une fraction de la valeur qu’ils produisent, et que de l’autre on trouve ceux qui n’ayant aucun capital n’ont d’autre ressource pour vivre que de vendre leur force de travail a une fraction de la valeur qu’elle produit, il doit y avoir une couche moyenne qui possède suffisamment de capital pour pouvoir récupérer l’ensemble de la valeur que son travail produit, mais pas assez pour extraire de la valeur des autres. Les membres du groupe social ainsi défini ont une même position dans le mode de production, ils forment donc une classe sociale au sens marxiste et partagent un intérêt de classe. On peut donc pour analyser leur comportement tous les instruments développés par Marx pour l’analyse des deux autres classes sociales…
La difficulté est de quantifier ce concept qualitatif. Et ce n’est pas simple parce que les outils statistiques fournis par l’INSEE et autres ne prennent que très marginalement en compte les questions telles que la valeur produite par le travail de chacun.
[Je ne sais pas vous, mais moi, “Le Deuxième sexe”, je l’ai lu attentivement : il s’agit d’un ouvrage très riche (notamment par ses références historiques, sociologiques, littéraires). Olympe de Gouges morte lors de la Révolution n’a pu dire exactement la même chose, ni les suffragettes du tout début du 20ème.]
Avez-vous lu attentivement les écrits d’Olympe de Gouges et ceux des suffragettes ? Si vous ne l’avez pas fait, ne trouvez-vous pas un peu osé d’affirmer qu’elles « n’ont pas pu dire exactement la même chose » ?
[Quant à votre question sur ce que pensait mon grand-père : on ne pourra jamais le savoir,]
Pourtant, vous avez parlé de ce que pensait votre grand-mère, lorsque vous avez écrit que « les femmes de la génération de ma grand-mère étaient rendues malheureuses par la vie qui leur échoyait ». Ainsi, vous êtes capable de dire si votre grand-mère était malheureuse, mais pas si votre grand-père l’était ? Curieux, n’est ce pas ?
[tout ça c’est du roman familial sans aucun intérêt (chacun peut s’inventer le sien si ça l’amuse).]
C’est vous qui avez utilisé votre « roman familial sans aucun intérêt » en exemple. Faudrait savoir : s’il n’a aucun intérêt, pourquoi en parler ?
[Ce que je constate, notamment en observant des personnes immigrées d’une région reculée d’un pays d’Europe du Sud, que je connais bien, et qui ont l’âge de mes parents, c’est que la vie d’une femme passée dans sa cuisine, c’est une vie de merde, bien plus que la vie de son mari ouvrier.]
C’est votre opinion, et à ce titre très respectable. Ce qui l’est moins, c’est de prétendre que les intéressées avaient sur ce point la même opinion que vous. Personnellement, je ne vois pas ce qui vous permet de dire qu’une vie passée dans la cuisine était « bien plus » une vie de merde qu’une vie passée au fond de la mine ou à la chaîne.
[Même si la femme en question, résignée, d’une courageuse bonne humeur, ne s’en rend pas compte, parce qu’elle est tellement isolée, enfermée, qu’elle ne sait pas ce qu’elle rate en fait…]
Un peu plus, et vous reprocherez à nos grands-mères d’avoir été heureuses alors qu’elles auraient du – selon vos critères, du moins – être horriblement malheureuses…
[Mais ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas reconnaître que les musulmans constituent plutôt, globalement, un groupe faible et dominé en France.]
Pour le « reconnaître », encore faudrait-il que ce soit vrai…
[Vous (nationaliste-ethniciste) êtes d’une grande franchise ; ce que vous décrivez, est-ce que ce n’est pas cela, l’islamophobie ?]
Je ne sais pas : cela fait un certain temps que je vous demande de définir ce que vous appelez « islamophobie », sans succès…
@Nana85
il faudrait revoir vos sources (Wikipédia?) car le corps des instituteurs n’existe plus, ce sont des professeurs des écoles… donc ils sautent à la classe moyenne supérieure.
@ Nana85,
Bonsoir,
( . . . Pour les classes moyennes, on peut la définir via les catégories de l’INSEE (données 2010-2015). . . . )
Il s’agit en effet de l’acception générale de la notion de classe moyenne.
Cependant, et quelques commentateurs du blog de notre hôte sont confrontés depuis plusieurs années à des questionnements multiples sur la question, il s’agit de la notion selon Marx de la classe moyenne et cette approche, enrichie par la réflexion de Descartes, suscite sinon une controverse, en tout cas une recherche de clarification. Personnellement, je ressens d’une manière intuitive la pertinence de l’approche sans pour cela être vraiment convaincu de son caractère déterminant. Il me semble que notre société, comme elle a éclaté du point de vue des relations familiales, a tendance à s’atomiser sur le plan des activités professionnelles, ce qui fait que beaucoup de « ressortissants » de cette classe moyenne “marxisée” se trouvent à un moment ou un autre, voire en permanence et de manière non négligeable, revêtir soit des habits de prolétaires, soit des habits d’exploiteurs. L’approche de Marx était sans doute justifiée à la fin du XIXème siècle, elle me paraît moins nette actuellement car la seule valeur matérielle ou monétaire qui sous tendait les rapports sociaux à l’époque s’est muée en une multitude de « monnaies d’échange » dans nos rapports sociaux actuels.
Cela conduit probablement à une volatilité bien plus importante des comportements et des options électorales, avec une corrélation fluctuante des votes vis à vis des milieux d’origine.
C’est mon opinion et je n’ai aucun moyen scientifique pour faire la démonstration de sa véracité.
Néanmoins, le débat avec notre hôte sur ce sujet n’est sans doute pas prêt de se tarir. (sans rapport avec la place Tharir, forum de la société égyptienne . . . lol . . .)
@ Nana85,
“Vous êtes d’une grande franchise ; ce que vous décrivez, est-ce que ce n’est pas cela, l’islamophobie ?”
Si, c’est ça. Dans un sens générique, “islamophobie” renvoie à un rejet de l’islam, comme “xénophobie” à un rejet de l’étranger. Mais cela ne m’a jamais empêché de m’intéresser à l’histoire de la civilisation musulmane médiévale, ainsi qu’à l’histoire du Moyen-Orient au XX° siècle (j’ai passé un an comme étudiant à potasser cette question). Il faut connaître même ses ennemis…
L’hostilité chez moi n’empêche d’ailleurs pas une certaine admiration pour l’Orient musulman et, je vais peut-être vous étonner, mais je suis triste quand je vois la situation du monde arabe, car cette civilisation a produit des choses remarquables dans le passé. Mais l’Orient doit rester où il est, et il ne doit pas s’importer en Occident. Surtout quand on voit l’impasse dans laquelle se trouve la plupart des pays arabo-musulmans…
@Nana85,
décidément, vous avez un sacré mépris pour les opinions qui ne sont pas identiques aux vôtres: Que vient faire Zemmour dans cette galère? Il a écrit plusieurs bouquins argumentés, et considérer ses propos comme une bêtise est un sommet d’arrogance et d’intolérance…
Toutefois, je n’ai pas besoin du célèbre polémiste pour me faire une opinion sur un mouvement qui a prétendu me représenter pendant des années! Au cas où vous ne l’auriez pas compris dans ma réponse, je suis un NOIR qui déteste les anti-racistes, et ce pour une raison bien simple: comme vous, et comme les colons de jadis, ils infantilisent les non-blancs!
D’ailleurs, il y avait bien des gens à l’époque qui critiquaient les visées idéologiques de SOS-Racisme: à commencer par l’immense humoriste Pierre Desproges (oui, je sais, vous n’étiez pas née…), qui affirmait qu’il n’adhérerait à ce mouvement le jour où il y aurait un S à la fin de Racisme: il ne voyait pas vraiment pourquoi le racisme anti-blanc aurait été moins grave que le racisme anti-bougnoule…
Et surtout, je pense à un aphorisme de Jean Baudrillard, qui disait que si SOS-Baleine consistait à sauver les baleines, il ne comprenait pas trop qui SOS-Racisme devait sauver: les victimes du racisme ou le racisme lui-même? Pour ma part, je connais la réponse depuis bien longtemps: l’anti-racisme étant lui-même un racisme, c’est surtout la francophobie ce mouvement a fait prospérer, parce que pour un anti-raciste, le Français est ontologiquement raciste…
Enfin, concernant la discrimination, elle fait partie de la vie, car CHOISIR, C’EST DISCRIMINER! Dans le cas d’une société ou d’une nation, le refus de choisir, c’est l’irresponsabilité et l’inconséquence: en effet, comment déterminer des limites si n’est pas capable de savoir qui fait partie de l’ensemble ou non?
Donc TOUTE discrimination n’est pas condamnable, loin de là…
« Je n’ai rien particulièrement contre le porno, qui est un marchandisation du corps de l’homme autant que de celui de la femme. Il paraît que les hommes sont beaucoup plus maltraités sur les tournages des films porno que les femmes (qui en tout cas dans les années quatre-vingt étaient traitées avec beaucoup d’égards, elles étaient des divas, de véritables stars) »
Alors que vous accordiez une importance démesurée aux « idées » dans l’amélioration du statut de la femme, Descartes vous a rappelé la matérialité des faits, ce que j’ai approuvé en ajoutant une objection tout aussi matérielle (rappelons que l’idée d’atome existe depuis Démocrite): développement des eros center dont vous ne parlez guère et industrie du porno. Peut-on sérieusement parler d’émancipation à ce sujet ? Hommes et femmes compris.
Le commerce de son corps quel qu’en soit la forme – y compris les « il paraît » que vous utilisez – est-il signe d’un progrès humain ? Là est la question.
Sur « l’islamophobie », deux mots : islam et phobie. Le second fait référence à un symptôme relevant de la…psychiatrie (rien que cela) ! Le premier trouve sa traduction en « soumission ». A réfléchir…
A ce propos, une citation d’un écrivain Algérien sous le coup d’une fatwa d’un imam de son pays :
« Sournoise manipulation du sens et outil de torture de la nouvelle inquisition, l’accusation d’islamophobie a créé une peur d’être taxé d’islamophobe et, partant, elle a étendu l’espace de ce qui est interdit à la critique et à la réflexion et la contestation. Elle menace et donc paralyse puis s’érige en police des idées et tabou.» (Kamel Daoud, août 2013).
@Descartes
?
“« En bon souverainiste », moi je n’ai rien contre le fait que l’Irlande fixe sa fiscalité comme elle l’entend… à condition qu’on ne m’impose pas en retour la libre circulation des marchandises et des capitaux.»»
Le plus tordu dans l’histoire reste l’attitude de l’UE , c’est elle qui avait contraint l’Irlande à organiser un deuxième référendum qui a rendu possible les choses qui sont maintenant reprochées aux irlandais…
Le comportement d’Apple est très parlant aussi : «continuez de nous embêter et on retourne chez maman !»
Sans le savoir et pour des raisons différentes les 3 partis militent pour le retour du cadre national…
?”Oui. Mais vous noterez que ce phénomène ne touche pas que les immigrés. Lorsque des français tout à fait « de souche » sortent d’un système scolaire et universitaire gratuit pour ensuite aller vendre leurs talents aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne sans le moindre état d’âme»
Et les médias ne font rien pour contrecarrer cette mentalité (cf les publi-reportages sur les opportunités de carrière et la bonne vie à Sidney, Montreal,Londres,Dubaï)
Le mécanisme d’auto-défense employé par certains expatriés est significatif je trouve , quand ils se défendent d’être des traîtres ,ils s’inventent un reproche qui est rarement formulé en France ,puisque c’est le type de procès qui est fait dans le système endogame qui est moyennement développé ici.
@ Pierre Feuille Ciseaux
[Le plus tordu dans l’histoire reste l’attitude de l’UE, c’est elle qui avait contraint l’Irlande à organiser un deuxième référendum qui a rendu possible les choses qui sont maintenant reprochées aux irlandais…]
L’UE a pendant trente ans mis en place les conditions de la concurrence fiscale. Et maintenant que le cheval s’est échappé, elle veut nous faire croire qu’elle fait un grand œuvre en fermant l’écurie. L’affaire irlandaise est ridicule : pendant vingt ans, l’Irlande a attiré avec sa faible imposition les sièges sociaux de grandes multinationales. Ce faisant, elle a gagné beaucoup d’argent et provoqué un préjudice considérable aux systèmes fiscaux des autres pays. Maintenant, grâce à la commission, Apple va devoir payer – si tant est que la sanction soit confirmée, parce qu’il y a bien loin de la coupe aux lèvres – treize milliards d’euros… à qui au fait ? Et bien, au trésor irlandais. En d’autre termes, celui qui a soustrait une partie de la contribution du aux autres par sa politique de bas taux se trouve récompensé ! Et les états lésés par la politique irlandaise ne toucheront pas un centime. S’il fallait encore une preuve de l’inanité du système européen…
@Descartes
” Et les états lésés par la politique irlandaise ne toucheront pas un centime”
faux: les Etats qui s’estiment lésés peuvent demander réparation à l’Irlande.
@ Françoise
[« Et les états lésés par la politique irlandaise ne toucheront pas un centime ». faux: les Etats qui s’estiment lésés peuvent demander réparation à l’Irlande.]
Vous n’avez toujours pas appris à lire avant de répondre. Je n’ai pas dit que les Etats qui s’estimaient lésés ne pouvaient pas demander réparation. Demander, on peut toujours. Seulement, entre demander et toucher, il y a une différence qui n’aurait pas du vous échapper.
Je constate en tout cas que la propagande de la Commission est efficace. Je retrouve dans votre expression mot à mot ce qui a été dit par le vice-président de la Commission ce matin à France Inter. Cela étant dit, j’ai recherché dans l’abondante jurisprudence européenne, et je n’ai trouvé un seul exemple où une telle « réparation » ait été versée. Une coïncidence, certainement.
@pseudo Descartes
vous me flattez en me disant que je reprends mot pour mot les propos du vice-prés’ de la Commission, j’ai juste changé votre “politique irlandaise” en Irlande…
N’importe qui s’estimant lésé peut saisir la Cour de Justice européenne, il suffit d’un bon avocat fiscaliste et de pouvoir supporter la charge de la preuve.
Quant à vos propos, comment pouvez-vous affirmer que les Etats lésés ne toucheront rien? Avez-vous une jurisprudence à nous présenter ou juste une impression d’opposant politique (ou opposant tout court)?
@pseudo Françoise
[vous me flattez en me disant que je reprends mot pour mot les propos du vice-prés’ de la Commission,]
Si la carrière de perroquet vous tente…
[N’importe qui s’estimant lésé peut saisir la Cour de Justice européenne, il suffit d’un bon avocat fiscaliste et de pouvoir supporter la charge de la preuve.]
Bien entendu. Tout le monde sait que la CJUE ne prend jamais, mais alors jamais en compte des critères politiques dans ses décisions… Je trouve votre foi dans les institutions européennes touchante. Faut-il que je vous rappelle que dans une célèbre décision la CJUE a affirmé la primauté de la législation européenne sur les législations nationales alors que cette primauté ne figure dans aucun texte normatif ?
[Quant à vos propos, comment pouvez-vous affirmer que les Etats lésés ne toucheront rien?]
Parce que jamais un Etat n’a jamais rien touché par le passé. Bien entendu, la CJUE pourrait changer sa jurisprudence, mais ce genre de revirement est rare.
[Avez-vous une jurisprudence à nous présenter ou juste une impression d’opposant politique (ou opposant tout court)?]
C’est vous qui avez affirmé en premier que les états pourraient se faire indemniser s’ils avaient subi un préjudice. C’est donc à vous de présenter en premier votre jurisprudence. Quand vous l’aurez fait, vous pourrez me demander la mienne…
Saisir la CJUE pour récupérer des sommes “indûment détournées” par des Etats tiers serait d’une violence…
Imaginez la réaction de la population en apprenant que tel pays membre demande à son gouvernement de payer X milliards d’arriérés,ce serait politiquement suicidaire déjà que l’UE est moyennement populaire.
L’ACCIS (assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés ) doit offrir une solution plus diplomatique au problème mais visiblement certains pays trainent des pieds (un jour les fédéralistes devront se demander pourquoi nos dirigeants ont fait entrer la Lituanie dans l’UE)
@Descartes
Maintenant c’est au tour de la Commission de se sentir lésée avec les négociations bilatérales de la GB !
Quel bal de cocus !
@ Pierre Feuille Ciseaux
[Saisir la CJUE pour récupérer des sommes “indûment détournées” par des Etats tiers serait d’une violence… Imaginez la réaction de la population en apprenant que tel pays membre demande à son gouvernement de payer X milliards d’arriérés, ce serait politiquement suicidaire déjà que l’UE est moyennement populaire.]
Mais ce serait une absurdité dans la logique même des rapports entre les Etats. Pratiquement toute décision de politique économique a un effet sur les pays voisins. Prenons par exemple les différentes « plans de compétitivité » du gouvernement français. Si ces plans rendaient nos entreprises plus « compétitives », cela se ferait nécessairement au détriment de leurs « compétiteurs ». Les Etats dont ces « compétiteurs » sont ressortissants seraient donc fondés à demander une réparation de ce dommage ? Avouez que ce serait drôle… on pourrait exiger à l’Allemagne de nous verser des compensations pour le fait de ne pas avoir mis en place les 35 heures ou le salaire minimum, rendant ainsi leurs entreprises plus compétitives que les nôtres. Avouez que ce serait cocasse…
L’Irlande n’a fait qu’utiliser l’instrument fiscal pour être plus « compétitive ». De ce point de vue, il n’y a aucune différence de principe entre baisser la fiscalité sur les sociétés ou baisser les cotisations comme le font nos gouvernements depuis belle lurette. Dans les deux cas, on aide les entreprises à être plus « compétitives ». Si la CJUE commence à compenser les Etats pour chaque décision de politique économique, on n’est pas sortis de l’auberge.
[L’ACCIS (assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés ) doit offrir une solution plus diplomatique au problème mais visiblement certains pays trainent des pieds (un jour les fédéralistes devront se demander pourquoi nos dirigeants ont fait entrer la Lituanie dans l’UE)]
Comme toutes les solutions européennes, c’est « confiture hier, confiture demain, mais jamais confiture aujourd’hui ».
Que pensez vous des commentaires élogieux mais aussi du silence gêné de beaucoup commentateurs autour des manifestations “asiatiques” (en réalité surtout chinoises) ?
Si la communauté chinoise est effectivement très intégrée socialement peut-on parler d’assimilation ?
Je remarque qu’il y a très peu de franco-chinois dans l’administration ou en politique (Pellerin et Placé sont nés en Corée du Sud et ont été adoptés).
Les assoc’ anti racistes historiques sans parler des nouvelles ,ultra religieuses, ont été très en retrait…
@ Pierre Feuille Ciseaux
[Que pensez vous des commentaires élogieux mais aussi du silence gêné de beaucoup commentateurs autour des manifestations “asiatiques” (en réalité surtout chinoises) ?]
La gêne est compréhensible. Dans les affaires du voile ou de la « burkini », on pouvait évacuer le phénomène communautariste en expliquant que tout ça était lié à l’islamophobie et la colonisation pour les uns, aux vices intrinsèques de l’Islam pour les autres, à la situation internationale pour tout le monde. Et voici que tout à coup une « communauté » manifeste en tant que telle, en se posant en interlocuteur des pouvoirs publics, alors qu’on ne peut arguer en ce cas ni colonisation, ni religion…
Il faut dire que la communauté asiatique y a mis les formes : la manifestation était parsemée de drapeaux tricolores, les banderoles étaient en grande majorité en français. Mais il ne reste pas moins que c’était une manifestation exclusivement composée d’asiatiques, sans aucune participation de partis politiques, de syndicats, ou d’autres institutions extra-communautaires. S’il fallait une démonstration des dégâts du discours « diversitaire » bien au-delà de la question de l’Islam, en voilà une.
[Si la communauté chinoise est effectivement très intégrée socialement peut-on parler d’assimilation ?]
Oui, on peut parler d’assimilation. D’abord par l’école, car les asiatiques d’extrême orient partagent l’idée de promotion méritocratique par le savoir. Après tout, ce sont les chinois qui les premiers ont l’idée de recruter leurs fonctionnaires par concours de mérite, et non par des critères de noblesse de sang… N’importe quel enseignant vous le dira : les enfants asiatiques sont énormément poussés par leurs parents à réussir, et pour cela à se conformer strictement aux règles et aux usages scolaires. Mais l’assimilation est aussi facilitée par le fait que les chinois ont un système de séparation entre la loi civile et la loi religieuse compatible avec le notre.
[Je remarque qu’il y a très peu de franco-chinois dans l’administration ou en politique (Pellerin et Placé sont nés en Corée du Sud et ont été adoptés).]
Ce n’est que partiellement vrai. Il y a beaucoup de franco-chinois (en pratique ce sont en général des franco-vietnamiens) dans la haute administration, par exemple. Regardez les listes des promotions des grandes écoles, et vous les trouverez bien représentés. La politique, c’est un peu différent : les orientaux ont un peu le même réflexe que les juifs naguère, celle qui était prête à donner de l’argent à Léon Blum pour qu’il renonce à être président du Conseil. Faire de la politique, pour un groupe minoritaire, c’est provoquer la communauté d’accueil en prétendant la représenter.
@ Descartes,
Bonsoir,
( . . . . S’il fallait une démonstration des dégâts du discours « diversitaire » bien au-delà de la question de l’Islam, en voilà une. . . . ° )
Je vous trouve un peu excessif en parlant de dégâts. Il me semble que ces asiatiques d’origine ressentent à juste titre une porosité dans la rigueur que l’on peut attendre des autorités vis à vis de leurs agresseurs et qu’ils manifestent leur inquiétude avec des formes prouvant leur attachement à la nation, comme vous le soulignez justement. Si leur communauté n’est pas constituée en lobbies, comment peuvent-ils se faire entendre ?
Au sujet des communautés, me permettez vous une blague, – un peu beauf – ce qui constituerait me semble-t-il une première sur votre blog ? A vous de voir et de censurer.
A leur incorporation pour leur service civil ( pour faire actuel) 300 jeunes recrues sont rassemblées dans la cours de la caserne. L’adjudant qui les accueille leur demande de se regrouper :
Les Bretons, ici, . . .les Alsaciens là, . . . les Corses là bas, les Provençaux derrière moi, etc . . .
Dans la poussière soulevée par ce remue ménage, chacun regagne sa place et quand la poussière retombe, il reste une centaine de maghrébins d’asiatiques et de noirs au milieu de la place d’arme.
A ce moment, plusieurs d’entre eux questionnent en cœur : et nous les Français, on se met où ?
@ Pierre Feuille Ciseaux & Descartes,
“La gêne est compréhensible. Dans les affaires du voile ou de la « burkini », on pouvait évacuer le phénomène communautariste en expliquant que tout ça était lié à l’islamophobie et la colonisation pour les uns, aux vices intrinsèques de l’Islam pour les autres, à la situation internationale pour tout le monde. Et voici que tout à coup une « communauté » manifeste en tant que telle, en se posant en interlocuteur des pouvoirs publics, alors qu’on ne peut arguer en ce cas ni colonisation, ni religion…”
Oui la gêne est compréhensible, mais peut-être aussi pour une autre raison. Car qui sont les auteurs des agressions contre les Asiatiques? Ou plutôt de quelle communauté sont-ils issus? Je parie que si les Asiatiques étaient victimes de crânes rasés tatoués de croix gammées, les partis et les assoc’ seraient moins frileux, l’indignation s’étalerait dans tous les média. Voyons, un couturier chinois a été tué à Aubervilliers, c’est bien cela? Quelle communauté sympathique est très présente à Aubervilliers? Ah, je n’arrive pas à me souvenir…
“N’importe quel enseignant vous le dira : les enfants asiatiques sont énormément poussés par leurs parents à réussir, et pour cela à se conformer strictement aux règles et aux usages scolaires”
Désolé de vous contredire, mais c’est de moins en moins vrai. Cela m’a étonné lorsque je suis arrivé dans mon dernier établissement (auparavant je n’avais guère d’élèves asiatiques) où l’on compte quelques élèves d’origine asiatique (viêtnamiens et chinois surtout). Franchement, ils sont dans la moyenne et encore… Je me suis rendu compte que le cliché de l’élève asiatique sérieux et travailleur avait pris du plomb dans l’aile.
”Ce n’est que partiellement vrai. Il y a beaucoup de franco-chinois (en pratique ce sont en général des franco-vietnamiens) dans la haute administration, par exemple. Regardez les listes des promotions des grandes écoles, et vous les trouverez bien représentés.»
Je vous crois sur parole ne fréquentant ces cénacles là,mais je parle bien des franco-chinois («la communauté asiatique» existe t-elle réellement comme la prétendue «communauté noire»?) car effectivement j’ai le souvenir d’un ami qui était volontaire pendant un an et qui avait pour haut gradé un franco-vietnamien , la communauté chinoise me semble plus «autiste» que les autres venues d’Asie et je m’explique pas pourquoi.
J’ignorais que Blum avait été retenu par des membres de la communauté juive , l’endogamie entre les 2 communautés me semble très similaire d’ailleurs.
« Oui, on peut parler d’assimilation. D’abord par l’école, car les asiatiques d’extrême orient partagent l’idée de promotion méritocratique par le savoir»
Intéréssant , vous définissez l’assimilation comme un processus d’aculturation (généralement on oppose les 2), et d’adaptation d’un modèle par rapport à un autre , pour peu qu’ils soient compatibles…Cette définition me plait bien.
C’est assez éloigné de la définition qu’en donne un Zemmour ,qui ressemble plus à la conversion religieuse qu’autre chose (changement de prénom etc).
Sur la gêne est assoc’ , Dominique Soppo vient de répondre : pour le président d’SOS une manifestation qui demande de la securité n’entre pas dans le cadre de la lutte antiraciste (il a oublié le leitmotiv qui a conduit à la mort du pauvre homme visiblement)…
Sa réponse est très éclairante en même temps ,si les juifs ont été quasiment abandonnés par les héraults de la lutte antiraciste ça doit être aussi pour ça.
@ Pierre Feuille Ciseaux, @ Descartes
[ Les assoc’ anti racistes historiques sans parler des nouvelles ,ultra religieuses, ont été très en retrait…]
Une communauté qui s’habille comme tout le monde, ne fout pas la merde, ne remplit pas les prisons, ne vient pas chialer tous les matins en tant que pauvres petites victimes des gros méchants racistes qui ont fait plein de mal dans l’histoire, travaille dur, n’a pas de membre connu à ce jour dont les “ressorts psychiques” le font tuer des Français et dont une bonne partie donne des prénoms français à ses enfants ?
Si toutes les communautés se comportaient ainsi, les assoc’ qui font leur lucratif business grâce à un prétendu racisme n’auraient plus qu’à mettre la clef sous la porte.
Donc autant ne pas en parler parce que la thèse du “c’est parce qu’ils ont les yeux bridés qu’ils ne voient pas le racimsme de ces gros fachos de français moisis, rien à voir avec les cultures africaines et moyen-orientales, c’est le hasard si ces régions sont pauvres et pour partie en guerre”… Même à eux ça doit sembler gros.
@ Marcailloux
[Je vous trouve un peu excessif en parlant de dégâts. Il me semble que ces asiatiques d’origine ressentent à juste titre une porosité dans la rigueur que l’on peut attendre des autorités vis à vis de leurs agresseurs]
Mais… pourquoi manifester uniquement pour la sécurité des « asiatiques », et non pour la sécurité de tous ? Est-ce à dire que si au lieu de s’attaquer aux « asiatiques » les voyous s’attaquaient aux juifs ou aux noirs les « asiatiques » resteraient chez eux ? Pourquoi défiler derrière une banderole en caractères chinois, que seule la « communauté » peut lire ? Le séparatisme pacifique n’est pas moins un séparatisme…
[Si leur communauté n’est pas constituée en lobbies, comment peuvent-ils se faire entendre ?]
Par la participation citoyenne, peut-être ? Vous avez ici touché au cœur du problème : dans la société « communautariste », l’individu n’a d’autre manière de se faire entendre que par l’intermédiaire de sa « communauté » constituée en lobby. C’est exactement à cela que je faisais allusion quand je parlais des dégâts du discours « diversitaire ».
@ nationaliste-ethniciste
[Oui la gêne est compréhensible, mais peut-être aussi pour une autre raison. Car qui sont les auteurs des agressions contre les Asiatiques? Ou plutôt de quelle communauté sont-ils issus?]
Je ne sais pas. Vous le savez, vous ? S’agit-il de « gaulois » ? de Roms ? de ressortissants de l’Afrique subsaharienne ? de Maghrébins ? Vous savez, en matière de voleurs, il y a un vaste choix, vous savez… Autant je peux vous suivre lorsque vous faites des constatations factuelles, autant ici vous forgez votre commentaire sur un simple préjugé.
[Désolé de vous contredire, mais c’est de moins en moins vrai. Cela m’a étonné lorsque je suis arrivé dans mon dernier établissement (auparavant je n’avais guère d’élèves asiatiques) où l’on compte quelques élèves d’origine asiatique (viêtnamiens et chinois surtout). Franchement, ils sont dans la moyenne et encore… Je me suis rendu compte que le cliché de l’élève asiatique sérieux et travailleur avait pris du plomb dans l’aile.]
Ce n’est pas tout à fait ce que j’ai dit. Mon commentaire concernait la pression que pouvaient mettre les parents, et non le comportement des enfants. Par ailleurs, je veux bien vous croire: il n’y a pas de raison que la détérioration de l’image de l’école comme moyen de promotion sociale ne finisse par pénétrer la communauté asiatique comme elle a pénétré les autres…
@ Pierre Feuille Ciseaux
[mais je parle bien des franco-chinois («la communauté asiatique» existe t-elle réellement comme la prétendue «communauté noire»?) car effectivement j’ai le souvenir d’un ami qui était volontaire pendant un an et qui avait pour haut gradé un franco-vietnamien , la communauté chinoise me semble plus «autiste» que les autres venues d’Asie et je m’explique pas pourquoi.]
D’abord, parce que son installation est plus récente. Les vietnamiens – et entre eux beaucoup de sino-vietnamiens, communauté chinoise installée d’abord au Vietnam, puis émigrée en France – sont présents en France depuis longtemps, et ont connu les périodes où la pression assimilatrice était forte. La « communauté » chinoise arrive aujourd’hui dans un pays où la pression assimilatrice est très faible, et il arrive ce qui doit arriver : elle ne s’assimile pas. Elle reste dans une logique « communautaire » même si pour des raisons traditionnelles elle évite le conflit avec la société d’accueil.
[J’ignorais que Blum avait été retenu par des membres de la communauté juive, l’endogamie entre les 2 communautés me semble très similaire d’ailleurs.]
Pas tout à fait. Si une partie de la collectivité juive a cherché à retenir Blum et à l’empêcher d’être premier ministre, ce n’est pas par refus de l’assimilation, mais par peur de l’antisémitisme. Briguer une place aussi symbolique semblait un risque de provoquer la collectivité d’accueil. Blum le comprenait d’ailleurs très bien. Poussé par certains de ses amis à briguer la présidence de la République après la guerre, il avait eu ce mot terrible : « quand on est juif, il y a des places qu’on ne demande pas ». La logique de Blum pourrait être qualifiée d’ultra-assimilationniste : non seulement il ne faut pas se différentier, mais aussi longtemps qu’une différentiation subsiste il faut s’abstenir de tout ce qui pourrait la mettre en évidence.
[Intéréssant , vous définissez l’assimilation comme un processus d’aculturation (généralement on oppose les 2), et d’adaptation d’un modèle par rapport à un autre , pour peu qu’ils soient compatibles…Cette définition me plait bien.]
Pas tout à fait. Il y a dans l’assimilation un élément d’acculturation. Non parce qu’on oublie la culture d’origine, mais parce qu’on la range dans une « case » différente. De pratique vivante elle passe au statut de souvenir, de mémoire, de folklore. Et elle laisse la place à une culture d’adoption. Bien entendu, cette transformation est beaucoup plus facile lorsque la culture de départ et celle d’adoption partagent des éléments communs.
[C’est assez éloigné de la définition qu’en donne un Zemmour , qui ressemble plus à la conversion religieuse qu’autre chose (changement de prénom etc).]
Ces deux conceptions ne sont pas si éloignées que cela. Il ne faut pas confondre la substance et le symbole. Le changement de prénom est de l’ordre du symbolique. Il marque une volonté d’adopter une nouvelle culture, et une disponibilité de ranger l’ancienne dans la case précitée.
[Sur la gêne est assoc’ , Dominique Soppo vient de répondre : pour le président d’SOS une manifestation qui demande de la securité n’entre pas dans le cadre de la lutte antiraciste (il a oublié le leitmotiv qui a conduit à la mort du pauvre homme visiblement)…]
Soppo a une très mauvaise mémoire… il est mur pour devenir député socialiste.
@ Descartes,
“Je ne sais pas. Vous le savez, vous ?”
Ce que je sais, et je pense que vous le savez aussi bien que moi, c’est que si les agresseurs avaient été conformes au stéréotype du raciste (blanc, crâne rasé, d’extrême droite), les associations antiracistes n’auraient pas manqué de le souligner. On aurait exhumé un lien quelconque avec tel ou tel obscur groupuscule et Valls serait en train de déclarer, le menton en avant, le ton grave et le verbe martial, qu’il faut dissoudre tel ou tel groupuscule pour raison de sécurité. Je vous rappelle que l’homme assassiné à Aubervilliers n’était pas seul au moment de l’agression, un ami était présent qui, lui, a survécu. Je trouve très étonnant que les journalistes n’aient pas tout mis en oeuvre pour qu’on nous révèle le profil de ces fameux agresseurs…
Dans l’affaire Clément Méric, on nous a tout dit sur Esteban Morillo, pour ne pas dire qu’on l’a condamné avant même enquête et procès: son appartenance à la mouvance skinhead, son affiliation aux Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (JNR), bref on nous en a tracé le portrait du parfait facho. Là, nous avons un crime “raciste” (je cite le premier édile d’Aubervilliers) et personne ne sait rien sur les agresseurs? Alllons, allons, Descartes, ne soyez pas naïf: il y a des silences qui en disent long. L’expérience montre que chaque fois que la mouvance antiraciste peut exploiter un fait divers, elle le fait. Alors, pourquoi cette discrétion?
J’ajoute que j’ai lu plusieurs articles récents dans lesquels la communauté chinoise francilienne se plaignait explicitement d’être la cible de Maghrébins dans différents quartiers de Paris ou de banlieue. Difficile de ne pas faire le rapprochement…
@ nationaliste-ethniciste
[Ce que je sais, et je pense que vous le savez aussi bien que moi, c’est que si les agresseurs avaient été conformes au stéréotype du raciste (blanc, crâne rasé, d’extrême droite), les associations antiracistes n’auraient pas manqué de le souligner.]
Vous avez raison de souligner que la réaction d’un certain nombre d’associations et de groupes politiques n’aurait pas été la même selon les origines des agresseurs, et qu’il s’est imposé dans ce genre d’affaires une très regrettable « culture de l’excuse » qui classe la gravité des actes en fonction de l’origine de l’agresseur et de la victime. Mais ce raisonnement général ne trouve pas à s’appliquer dans le cas d’espèce, les agresseurs n’étant pas identifiés.
[Dans l’affaire Clément Méric, on nous a tout dit sur Esteban Morillo, pour ne pas dire qu’on l’a condamné avant même enquête et procès: son appartenance à la mouvance skinhead, son affiliation aux Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (JNR), bref on nous en a tracé le portrait du parfait facho.]
Vous avez raison, et je l’avais dénoncé à l’époque. Mais il s’agissait d’un crime « politique », et non d’un fait de droit commun. Il n’était pas absurde de retracer le parcours politique de l’un et de l’autre – même si les médias ont insisté sur le parcours violent de l’un et ont été notablement discrets sur le parcours tout aussi violent de l’autre.
[J’ajoute que j’ai lu plusieurs articles récents dans lesquels la communauté chinoise francilienne se plaignait explicitement d’être la cible de Maghrébins dans différents quartiers de Paris ou de banlieue. Difficile de ne pas faire le rapprochement…]
Ce qui m’inquiète dans cette affaire, c’est qu’il montre combien notre société à tendance à ethniciser tout évènement, un peu dans la logique américaine. Penser que les juifs ont tous de l’argent ou que les asiatiques se promènent avec du liquide sur eux est certainement un stéréotype. Mais ce n’est pas pour autant que le fait d’attaquer un juif ou un asiatique pour lui voler son argent – même si l’attaque est fondée sur l’idée qu’ils en ont – devient un « crime raciste ». En fait, l’immense majorité des vols est fondé sur un stéréotype : il est rare que les voleurs demandent à leurs victimes potentiels un état de leurs finances avant de choisir leur cible. Ils ne peuvent choisir leur victime que sur des stéréotypes fondés sur l’apparence. Si les enfants roms dévalisent les gens qui ont des valises et des appareils photo autour du cou dans le métro et ne s’attaquent pas aux costards cravates qui vont au boulot, c’est parce que les porteurs de valises et de caméras sont réputés être des touristes, et que ceux-ci sont réputés être des proies plus faciles. Doit on parler d’un « racisme anti-appareil photo » ?
Voler un asiatique ou un juif parce qu’on pense qu’il a de l’argent n’est en rien « raciste ». Pas plus que le fait de contrôler préférentiellement dans le métro les jeunes appartenant aux minorités visibles. Dans les deux cas, c’est une pure question de statistique : les voleurs savent par expérience quelles sont les proies les plus intéressantes, et les policiers savent eux aussi quels sont les groupes plus enclins à commettre des infractions.
Bonjour Descartes,
lors d’une discussion avec un ami à qui j’expliquais vos positions, je dois dire que j’ai été une peu à court d’arguments lorsqu’il m’a demandé comment reconnaître qu’un communautarisme pouvait être acceptable ou pas (il voulait plutôt dire une communauté acceptable ou pas, visiblement).
En gros, sa position était : « doit-on par exemple interdire les punks à chien et les costard-cravate, deux engeances cherchant clairement a afficher leur différence avec la majorité ? Ceux qui s’affichent végétarien à la cantine ou en avion sont-ils plus éligibles à des menus de substitution ? Si le monokini (re)devenait majoritaire, devrait-il s’imposer tant aux biki/bur-kinistes qu’aux nudistes ? Que dire d’ailleurs de plages réservées aux naturistes ? Et de ceux qui osent ne pas aimer le rap contre ceux qui ont horreur du classique ? »
Ça fait un moment que je voulais vous poser les mêmes questions : c’est l’occasion !
@ Anne Iversaire
[comment reconnaître qu’un communautarisme pouvait être acceptable ou pas (il voulait plutôt dire une communauté acceptable ou pas, visiblement).]
Il faut ici faire très attention aux termes qu’on utilise. Il y a « communauté », et il y a « communautarisme ». Une « communauté » est un ensemble de personnes qui ont quelque chose en commun – une origine, une langue, un goût particulier, un hobby, une pratique sportive – et qui se reconnaissent dans cette particularité. Le « communautarisme » est l’idéologie qui considère qu’une communauté peut être sujet de droits et de devoirs, et que l’appartenance à une communauté devrait conférer des droits ou des devoirs particuliers.
Personne ne nie l’importance sociale des « communautés ». Elles ont toujours existé, et elles existeront toujours. Et elles sont toutes « acceptables » dès lors que leur activité est licite. Ce qui n’est pas « acceptable » chez une communauté – et cela quelque soit la « communauté » concernée – est la volonté de faire reconnaître à ses membres des droits et des devoirs particuliers du simple fait d’appartenance, voire à se faire reconnaître comme des sujets de droit.
[En gros, sa position était : « doit-on par exemple interdire les punks à chien et les costard-cravate, deux engeances cherchant clairement a afficher leur différence avec la majorité ?]
On ne doit interdire ni l’un, ni l’autre. Ni les « costard cravate » ni les « punks à chien » ne font de leur tenue un étendard de lutte pour des droits spécifiques et réservés à leur communauté. Dès lors, aucun problème de « communautarisme » ne se pose. Mais si demain ces tenues devenaient un symbole d’une volonté séparatiste, eh bien, on devrait alors réexaminer la question…
[Ceux qui s’affichent végétarien à la cantine ou en avion sont-ils plus éligibles à des menus de substitution ? Si le monokini (re)devenait majoritaire, devrait-il s’imposer tant aux biki/bur-kinistes qu’aux nudistes ? Que dire d’ailleurs de plages réservées aux naturistes ? Et de ceux qui osent ne pas aimer le rap contre ceux qui ont horreur du classique ? »]
La réponse est toujours la même. Ma vision est libérale et tolérante : ceux qui demandent des menus végétariens parce qu’ils adhèrent à cette pratique alimentaire à la cantine devraient pouvoir les obtenir sous réserve que cela ne représente pas un coût supplémentaire pour la collectivité. Mais si la revendication végétarienne a pour but ou pour effet de séparer les végétariens des non-végétariens, si elle sert symboliquement pour dresser un mur étanche entre une « communauté » et son environnement, alors ils devraient être refusés.
Dans cette affaire, on oublie que l’homme est un animal symbolique. Et que les objets et les pratiques ont une fonction réelle, mais aussi une fonction symbolique. Dire que le voile est un morceau de tissu qu’on se met sur la tête, c’est faire une constatation objective. Mais le voile a aussi un sens subjectif, qui dépend du contexte. Ici et maintenant, il est le symbole de la volonté séparatiste d’une communauté. Ailleurs et en d’autres temps, il aura un sens différent.
Manger végétarien, c’est une question sanitaire : certaines théories – qu’on a le droit de croire ou pas – soutiennent qu’en mangeant végétarien on est en meilleure santé. Refuser le porc n’a aujourd’hui aucun sens autre que symbolique. Il est possible et même probable que les peuples moyen-orientaux des temps bibliques aient interdit le porc pour des questions sanitaires – la trichinose et autres maladies étaient courantes et transmissibles à l’homme. Mais aujourd’hui, elles ont disparu. Le porc n’est en rien moins sain que le mouton ou le bœuf. Alors pourquoi certains refusent de le consommer ? Parce qu’ils veulent transmettre un message. C’est donc le contenu de ce message qui doit conditionner notre réponse.
@ Descartes
[Je n’attendais pas de vous un tel affront au bon goût.]
Que voulez-vous, la nostalgie a ses raisons que la raison ignore… Nostalgie d’une époque, pas de WS, bien sûr !
[j’y verrais une prise de conscience chez les responsables marketing de l’existence d’un marché « ethnique » exploitable au moindre coût.]
Donc selon vous, c’est un hasard si cette prise de conscience intervient en même temps que la montée en puissance du communautarisme. Bon. Le hasard fait bien les choses, en somme (ton dubitatif) …
Sinon, puissiez-vous continuer ce blog encore longtemps, c’est un de mes stimulateurs de neurones !
@ BJ
[« J’y verrais une prise de conscience chez les responsables marketing de l’existence d’un marché « ethnique » exploitable au moindre coût ». Donc selon vous, c’est un hasard si cette prise de conscience intervient en même temps que la montée en puissance du communautarisme. Bon. Le hasard fait bien les choses, en somme (ton dubitatif) …]
Pas tout à fait. Les responsables marketing sont sensibles à l’air du temps. Et lorsque l’air du temps est communautariste, cela ne peut que leur donner des idées. Mais je ne crois pas que cela aille plus loin. Après tout, les musulmans représentent selon les estimations entre quatre et sept millions, et seule une petite partie d’entre eux mange du cassoulet…
[Sinon, puissiez-vous continuer ce blog encore longtemps, c’est un de mes stimulateurs de neurones !]
Aussi longtemps qu’il y aura des lecteurs comme vous pour m’encourager ! 😉
@Descartes
C’est vous qui m’avez affirmé qu’Olympe de Gouges dit la même chose que Simone de Beauvoir, c’est donc à vous de le prouver, et non pas à moi de prouver que ce n’est pas le cas… Mais pour vous répondre quand même, une grande partie des références historiques et littéraires de Simone de Beauvoir dans “Le Deuxième sexe” sont postérieures à Olympe de Gouges et aux suffragettes, voilà pourquoi elles n’ont pas pu dire la même chose.
Et non, concernant le “roman familial”, j’avais seulement évoqué les femmes de la génération de ma grand-mère, c’est vous qui m’avez interpelée en disant “Et votre grand-père”, etc.
@ Nana85
[C’est vous qui m’avez affirmé qu’Olympe de Gouges dit la même chose que Simone de Beauvoir,]
Non. Encore une fois, lisez moi avec attention. Voici mon commentaire : « Tout ce qu’elle a écrit, d’autres l’avaient dit bien avant elle ». Cela n’implique pas qu’il existe une personne qui ait dit tout ce Simone de Beauvoir avait dit avant elle, mais que pour chaque idée exprimée par de Beauvoir on peut trouver au moins une personne qui l’ai dit avant elle. Olympe de Gouges a dit certaines choses que Beauvoir a reprises. Mais pas tout.
[Et non, concernant le “roman familial”, j’avais seulement évoqué les femmes de la génération de ma grand-mère, c’est vous qui m’avez interpelée en disant “Et votre grand-père”, etc.]
Combien de femmes de la génération de votre grand-mère connaissez vous intimement – suffisamment pour dire qu’elles ont été « rendues malheureuses » – en dehors de votre famille ?
J’oubliais : l’islamophobie, comme son nom l’indique c’est la peur de l’islam. Dans le cas de nationaliste-ethniciste, il serait en fait plus juste de parler de haine de l’islam. Qu’en pensez-vous, nationaliste-ethniciste ?
@ Nana85
[J’oubliais : l’islamophobie, comme son nom l’indique c’est la peur de l’islam.]
En d’autres termes, le fait de vouloir fermer toutes les mosquées de France et expulser les musulmans de notre territoire ne seraient pas, pour vous, un signe de « islamophobie ». On peut après tout haïr les musulmans sans haïr l’islam, et sans en avoir peur…
Vous savez, l’étymologie n’est pas nécessairement une bonne source pour trouver des définitions…
[Dans le cas de nationaliste-ethniciste, il serait en fait plus juste de parler de haine de l’islam.]
Donc, pour vous, nationaliste-ethniciste ne serait pas « islamophobe ». Je pense qu’il sera très soulagé…
@ Nana85,
Pas haine de l’islam. L’islam ne m’a rien fait, l’islam est une idée. Mon problème, ce n’est pas l’islam. Mon problème, ce sont les musulmans, plus précisément une partie des musulmans (que je crois beaucoup moins minoritaires que ce que dit Descartes) vivant en France. Les musulmans vivant en terre d’islam ne me posent aucun problème, ils font ce qu’ils veulent, ils voilent leurs femmes si ça les amuse, ils appliquent la charia si ça leur convient, tant qu’ils ne font pas d’ingérence. Mais s’ils envoient des prédicateurs salafistes dans mon pays, s’ils cherchent à favoriser le communautarisme (je songe au discours d’un Erdogan qui avait eu le culot de venir dire aux Turcs d’Allemagne qu’ils ne devaient pas s’assimiler), s’ils poussent à commettre des attentats sur le sol de ma patrie, là, ça devient mon problème.
Et, je le dis comme je le pense, beaucoup de musulmans de France ne sont pas clairs sur les questions d’intégrisme, de violence, sur la tolérance envers l’apostasie. Dès qu’il y a un attentat, leur seule crainte, c’est d’être montrés du doigt, stigmatisés, d’avoir une mauvaise image. Mais le travail de fond sur l’instrumentalisation de l’islam, la réflexion sur une pratique adaptée à une société sécularisée comme la nôtre, la critique du salafisme et de ses dérives djihadistes, ce travail est-il effectué? Par quelques intellectuels éclairés, sans doute (Bidar, Ben Jelloun, Chebel), par quelques rares imams peut-être, mais souvent ces gens sont inaudibles pour la masse.
D’ailleurs, une question me taraude: si demain quatre millions de Scandinaves débarquaient au Maroc, bâtissaient un peu partout des églises luthériennes, ouvraient à tous les coins de rue des débits de boisson et des charcuteries, est-ce quelqu’un aurait la bonté de me dire comment les Marocains “de souche” réagiraient très probablement? Je ne vois pas pourquoi nous devrions tolérer ce que bien peu de pays musulmans accepteraient… Si la diversité c’est bien pour nous, pourquoi les autres la refusent-ils?
Quels sont les pays musulmans où les minorités chrétiennes (et autres) ne sont pas inquiétées? Pour l’essentiel les pays d’Asie centrale. Et pourquoi? Parce que les musulmans dans ces pays sont plus tolérants? Non, parce que les chrétiens de ces pays sont pour l’essentiel des orthodoxes venus de la Russie voisine (qui elle-même abrite une importante communauté musulmane). Et les Kazakhs, Ouzbeks, Turkmènes savent très bien que s’ils s’avisaient de commencer à massacrer leurs chrétiens, la Russie interviendrait rapidement et le leur ferait payer, sous les applaudissements de la communauté internationale. Je conçois que ce soit difficile à entendre, mais, à l’heure actuelle du moins, les musulmans ne comprennent guère que la force. Si vous leur faites peur, ils vous fouteront la paix. S’ils vous sentent faibles (et aujourd’hui la France est faible face à ses musulmans, à cause du discours repentant et multiculturaliste), ils vous étrilleront. En Russie, les musulmans pratiquent leur culte en toute liberté, Poutine entretient des relations cordiales avec les autorités musulmanes, mais les musulmans savent parfaitement qu’il y a des limites à ne pas franchir.
@ nationaliste-ethniciste
[Et, je le dis comme je le pense, beaucoup de musulmans de France ne sont pas clairs sur les questions d’intégrisme, de violence, sur la tolérance envers l’apostasie. Dès qu’il y a un attentat, leur seule crainte, c’est d’être montrés du doigt, stigmatisés, d’avoir une mauvaise image. Mais le travail de fond sur l’instrumentalisation de l’islam, la réflexion sur une pratique adaptée à une société sécularisée comme la nôtre, la critique du salafisme et de ses dérives djihadistes, ce travail est-il effectué?]
Non, et il n’y a aucune raison qu’il le soit. L’immense majorité des musulmans de France – comme des catholiques ou des juifs d’ailleurs – sont des gens modestes, pas des intellectuels. Est-ce que les paysans catholiques bretons ont eu une réflexion sur une pratique religieuse adaptée à une société sécularisée ? Bien sur que non. Comme les musulmans, eux aussi ont changé leurs pratiques sous l’effet de la pression sociale, de la réflexion des élites auxquelles ils faisaient confiance, et la peur d’être « montrés du doigt » et de passer pour des rétrogrades.
Le « travail de fond » dont vous parlez doit être effectué par des intellectuels – et ils ne manquent pas – et ensuite imposé par une véritable pression sociale pour l’assimilation. Imaginer que les gens – quelque soit leur religion – sont capables du niveau d’introspection dont vous parlez me semble relever d’une illusion.
[Quels sont les pays musulmans où les minorités chrétiennes (et autres) ne sont pas inquiétées? Pour l’essentiel les pays d’Asie centrale. Et pourquoi? Parce que les musulmans dans ces pays sont plus tolérants? Non, parce que les chrétiens de ces pays sont pour l’essentiel des orthodoxes venus de la Russie voisine (qui elle-même abrite une importante communauté musulmane). Et les Kazakhs, Ouzbeks, Turkmènes savent très bien que s’ils s’avisaient de commencer à massacrer leurs chrétiens, la Russie interviendrait rapidement et le leur ferait payer, sous les applaudissements de la communauté internationale.]
Je pense que vous exagérez, et surtout que vous refusez de retenir les exemples qui ne cadrent pas avec votre théorie. Les pays a majorité musulmane ou des régimes laïques se sont implantés – Syrie, Iraq, Egypte, Iran – ont vu des minorités chrétiennes ou juives vivre en bonne intelligence avec la majorité musulmane pendant des siècles. Ce n’est que depuis une trentaine d’années qu’on a vu s’imposer la chimère de l’homogénéité ethnique ou religieuse des états, qui a conduit à l’atomisation en Europe et aux guerres civiles dans différentes parties du monde… J’ajoute que les musulmans ne traitent pas les chrétiens ou les juifs pire qu’ils ne se traitent entre eux…
[Je conçois que ce soit difficile à entendre, mais, à l’heure actuelle du moins, les musulmans ne comprennent guère que la force.]
Ni plus ni moins que les autres. Je pense que vous idéalisez un peu trop les autres croyances. Quand on voit ce que les chrétiens ont fait au cours de l’histoire, quant on voit ce que les juifs – que leur histoire aurait du pourtant instruire – on fait d’Israel, je ne vois aucune raison de singulariser l’Islam. Vous n’avez pas tort en ramenant la question à un rapport de forces, mais la question du rapport de forces est universelle, elle ne se limite pas seulement à l’Islam.
@ Descartes,
“Les pays a majorité musulmane ou des régimes laïques se sont implantés – Syrie, Iraq, Egypte, Iran – ont vu des minorités chrétiennes ou juives vivre en bonne intelligence avec la majorité musulmane pendant des siècles.”
Je pense que vous cédez à la “légende dorée” de la civilisation musulmane. Les musulmans ont été plus pragmatiques que tolérants: au VII° siècle, lorsque la Syrie et l’Egypte sont conquises, la majorité de la population de ces régions est chrétienne. Pour que l’impôt rentre et que la conquête se consolide, il fallait se montrer souple. Mais une pression fiscale habile et une politique de discrimination systématique ont rapidement poussé beaucoup de chrétiens à se convertir. Les musulmans ont, à leur manière, assimilé la plupart des chrétiens du Levant, et les communautés chrétiennes qui subsistent en Orient sont les vestiges des populations majoritairement (et anciennement) chrétiennes de ces pays. Les autres sont passés à l’islam, pour payer moins d’impôt ou pour faire carrière dans l’armée ou l’administration. Un peu ce que décrit Houellebecq pour le personnage principal de son roman “Soumission” finalement… Dès le Moyen Âge, les phases de persécution alternent avec les périodes de relative tolérance, y compris en al-Andalous et en Sicile musulmane qu’on nous a longtemps présentées comme des paradis multiculturels. On peut citer des révoltes coptes en Egypte.
Quant aux régimes laïcs arabes, ils vaudront toujours mieux que les monarchies intégristes ou les dictatures islamistes, je vous l’accorde. Mais n’exagérons pas l’intégration des chrétiens: les ministres, hauts fonctionnaires, hauts gradés de l’armée d’origine chrétienne se comptent sur les doigts de la main en Egypte, Syrie, Irak, même au temps du baasisme et du nassérisme triomphants. Les Coptes (10 % de la population égyptienne) sont des autochtones, et ils ont moins de ministres que les Français d’origine maghrébine…
“Ce n’est que depuis une trentaine d’années qu’on a vu s’imposer la chimère de l’homogénéité ethnique ou religieuse des états, qui a conduit à l’atomisation en Europe et aux guerres civiles dans différentes parties du monde…”
Non, je ne suis pas d’accord. Le principe d’homogénéité ethnique a présidé à un certain nombre d’échanges de population en Europe de l’est au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale… Les Polonais ne vivaient pas tous dans les limites de la Pologne actuelle, par exemple (et il y avait des Allemands dans certaines régions). Et ne parlons pas des Sudètes. La création d’états ethniquement homogènes en Europe de l’est a mis fin pour une part à la lancinante question des minorités. Là où elle n’a pas été réglée (Yougoslavie, Roumanie), elle resurgit.
Par ailleurs, on peut regretter le monde musulman d’il y a trente ans ou trois cents ans, mais il faut faire avec les musulmans de notre temps. Plus intégristes, plus violents, plus intolérants. C’est triste, mais c’est ainsi.
“J’ajoute que les musulmans ne traitent pas les chrétiens ou les juifs pire qu’ils ne se traitent entre eux…”
Ce sens de l’équité est digne d’éloge…
“Ni plus ni moins que les autres.”
C’est tout à fait exact. Simplement je constate le développement d’un mouvement d’intégrisme islamique qui a gagné beaucoup de terrain dans de nombreux pays de tradition musulmane, et qui a des répercussions jusqu’à 200 mètres de chez moi. C’est tout. Citez-moi une population musulmane menacée de la sorte par la montée d’un christianisme intégriste de nos jours.
“Je pense que vous idéalisez un peu trop les autres croyances.”
Pas du tout. Simplement, le pape n’appelle plus à la guerre sainte, pas plus que l’archevêque de Cantorbery ou le patriarche de Moscou. Chez nous, les Eglises ont largement perdu leur pouvoir politique et leur influence sociale s’érode avec les progrès de l’athéisme et de la sécularisation. Autrefois, elles tenaient le même discours que bien des musulmans. Simplement, les Eglises chrétiennes, dans leur majorité, ont une structure et une hiérarchie: si l’on veut parler aux catholiques, on s’adresse au pape ou à la conférence des évêques; si l’on veut parler aux orthodoxes, on s’adresse aux patriarches de Moscou, de Constantinople, de Belgrade, de Sofia, etc. Il y a des instances qui produisent un discours officiel.
Pour parler aux musulmans à qui devons-nous nous adresser? Aux théologiens d’Al-Azhar? Au grand mufti d’Arabie? Au roi du Maroc, “commandeur des croyants”? Là réside la dangerosité de l’islam, surtout sunnite: pas de clergé constitué, pas de réelle hiérarchie. N’importe qui se proclame imam, n’importe qui se proclame détenteur du véritable islam, à la limite n’importe qui se proclame calife. L’islam est une religion du désordre, incapable de définir une orthodoxie (le wahhabisme était considéré quasiment comme une hérésie il y a un siècle) et de construire des institutions religieuses. C’est une hydre qu’on ne peut dompter. Le dialogue accepté par les uns est aussitôt rejeté par les autres. Le christianisme a pu se montrer très violent dans le passé, mais la différence est qu’il a généré (ou recyclé) des institutions fortes et centralisées. Et je préfère une religion avec des institutions qu’une religion sans.
“Vous n’avez pas tort en ramenant la question à un rapport de forces, mais la question du rapport de forces est universelle, elle ne se limite pas seulement à l’Islam.”
Bien sûr! Mais nous parlions des rapports avec les musulmans. C’est la même chose dans les rapports avec d’autres communautés et avec des pays étrangers. Simplement, la question du rapport de force avec la communauté musulmane en France et avec certaines populations musulmanes de par le monde se pose de manière aiguë en ce moment, à mon avis.
@ nationaliste-ethniciste
[Je pense que vous cédez à la “légende dorée” de la civilisation musulmane. Les musulmans ont été plus pragmatiques que tolérants: au VII° siècle, lorsque la Syrie et l’Egypte sont conquises, la majorité de la population de ces régions est chrétienne. Pour que l’impôt rentre et que la conquête se consolide, il fallait se montrer souple. Mais une pression fiscale habile et une politique de discrimination systématique ont rapidement poussé beaucoup de chrétiens à se convertir.]
Quelque soient les motifs, il reste que les populations ont pu vivre en bonne intelligence. Quant à la question des conversions, si nous appelons notre société à exercer une véritable pression pour obtenir l’assimilation, on ne peut contester aux autres civilisations d’exercer le même type de pression.
[Les autres sont passés à l’islam, pour payer moins d’impôt ou pour faire carrière dans l’armée ou l’administration.]
Exactement ce qui est arrivé aux juifs de l’espace germanique… Karl Marx ou Felix Mendelssohn sont de bons exemples de familles converties pour des motifs opportunistes. Encore une fois, je ne tombe pas dans une « légende dorée » en ce qui concerne les sociétés islamiques. Ce que je conteste, c’est votre idée que leur logique serait fondamentalement différente des sociétés chrétiennes. Chez nous aussi la « tolérance » a été en général le résultat de besoins économiques, et chez nous aussi on a exercé une pression à l’assimilation religieuse aussi longtemps que la religion était le fondement de la société.
[Dès le Moyen Âge, les phases de persécution alternent avec les périodes de relative tolérance, y compris en al-Andalous et en Sicile musulmane qu’on nous a longtemps présentées comme des paradis multiculturels. On peut citer des révoltes coptes en Egypte.]
Exactement comme en Europe chrétienne vis-à-vis des juifs… encore une fois, la gestion des minorités religieuses en terre d’Islam n’a été ni plus ni moins tolérante que celle des chrétiens. Il ne faut pas idéaliser les uns, diaboliser les autres. Cela étant dit, il est vrai qu’alors que l’Islam en est resté à une civilisation ou le religieux détermine l’espace civil, notre civilisation est passé depuis longtemps à un autre stade, ou le domaine civil est indépendant du religieux. C’est ce phénomène qui nous a conduit à concevoir une tolérance indépendante de tout « statut personnel », qui n’existent pas en terre d’Islam.
[Quant aux régimes laïcs arabes, ils vaudront toujours mieux que les monarchies intégristes ou les dictatures islamistes, je vous l’accorde. Mais n’exagérons pas l’intégration des chrétiens: les ministres, hauts fonctionnaires, hauts gradés de l’armée d’origine chrétienne se comptent sur les doigts de la main en Egypte, Syrie, Irak, même au temps du baasisme et du nassérisme triomphants.]
Ce n’est pas tout à fait vrai. Des hauts fonctionnaires, des chefs d’entreprise chrétiens ou juifs, il y en avait à la pelle. Les juifs, notamment, étaient tellement sur-représentés que cela a excité des campagnes antisémites. Des ministres… un peu moins, mais cela n’indique pas nécessairement une discrimination. Dans une société « communautariste », il est difficile pour un membre d’une minorité de représenter effectivement l’ensemble de la population. Le fait que la République française n’ait jamais eu de président juif ne me choque pas outre mesure.
[Les Coptes (10 % de la population égyptienne) sont des autochtones, et ils ont moins de ministres que les Français d’origine maghrébine…]
Aujourd’hui peut-être. Mais du temps de Nasser ?
[Non, je ne suis pas d’accord. Le principe d’homogénéité ethnique a présidé à un certain nombre d’échanges de population en Europe de l’est au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale… Les Polonais ne vivaient pas tous dans les limites de la Pologne actuelle, par exemple (et il y avait des Allemands dans certaines régions). Et ne parlons pas des Sudètes.]
En dehors des déplacements de populations allemandes – et le fondement du déplacement était culturel, et non ethnique – je ne connais pas d’autres. Ces déplacements étaient plus liés à l’attitude de ces populations pendant la guerre qu’à l’objectif de créer des états homogènes. D’ailleurs, le découpage de l’Europe après la deuxième guerre mondiale préserve tous les états multi-ethniques créés après la première : La Yougoslavie, la Tchécoslovaquie, l’URSS. Et l’éclatement de ces états il y a maintenant une vingtaine d’années s’inscrit dans le réveil des séparatismes en Europe et ailleurs, séparatismes tendant à créer des états ethniquement homogènes…
[Par ailleurs, on peut regretter le monde musulman d’il y a trente ans ou trois cents ans, mais il faut faire avec les musulmans de notre temps. Plus intégristes, plus violents, plus intolérants. C’est triste, mais c’est ainsi.]
Bien entendu. Il faut aussi se demander le pourquoi de l’échec des régimes modernistes et laïcs. Echec dans lequel les puissances occidentales ont une large part de responsabilité : expédition de Suez, renversement de Mossadegh, sabotage du régime Taraki en Afghanistan et par voie de conséquence soutien aux régimes théocratiques et réactionnaires en Arabie Saoudite, au Pakistan, etc…
[C’est tout à fait exact. Simplement je constate le développement d’un mouvement d’intégrisme islamique qui a gagné beaucoup de terrain dans de nombreux pays de tradition musulmane, et qui a des répercussions jusqu’à 200 mètres de chez moi. C’est tout. Citez-moi une population musulmane menacée de la sorte par la montée d’un christianisme intégriste de nos jours.]
Faudrait demander aux irakiens ce qu’ils pensent de la croisade montée au nom de la religion néoconservatrice par George Bush…
[Pas du tout. Simplement, le pape n’appelle plus à la guerre sainte, pas plus que l’archevêque de Cantorbery ou le patriarche de Moscou.]
Oui, mais pour obtenir ce « plus », il a fallu de très longs et très durs combats.
[Chez nous, les Eglises ont largement perdu leur pouvoir politique et leur influence sociale s’érode avec les progrès de l’athéisme et de la sécularisation. Autrefois, elles tenaient le même discours que bien des musulmans.]
Tout à fait. Ce qui à contrario me fait dire que demain les musulmans pourraient tenir le même discours que les églises chrétiennes aujourd’hui, pour peu qu’elles subissent le même processus. Je ne conteste pas l’idée qu’aujourd’hui l’Islam soit en retard d’une sécularisation. Ce que je dis, et c’est là notre désaccord, c’est qu’il n’y a pas de défaut inhérent à l’essence de l’Islam.
[Simplement, les Eglises chrétiennes, dans leur majorité, ont une structure et une hiérarchie: si l’on veut parler aux catholiques, on s’adresse au pape ou à la conférence des évêques; si l’on veut parler aux orthodoxes, on s’adresse aux patriarches de Moscou, de Constantinople, de Belgrade, de Sofia, etc. Il y a des instances qui produisent un discours officiel.]
Et si on veut parler aux protestants ? Aux juifs ? En fait, il n’y a que l’église catholique – et jusqu’à un certain point les orthodoxes – qui aient une structure hiérarchique. Dans les autres églises, chaque pasteur est indépendant. Et pourtant cela ne pose pas de problèmes.
[Pour parler aux musulmans à qui devons-nous nous adresser?]
Mais pourquoi voulez vous parler « aux musulmans » ? L’Etat ne parle pas aux fidèles de telle ou telle religion. Elle ne parle qu’à des citoyens.
[Aux théologiens d’Al-Azhar? Au grand mufti d’Arabie? Au roi du Maroc, “commandeur des croyants”? Là réside la dangerosité de l’islam, surtout sunnite: pas de clergé constitué, pas de réelle hiérarchie. N’importe qui se proclame imam, n’importe qui se proclame détenteur du véritable islam, à la limite n’importe qui se proclame calife.]
C’est la même chose chez les juifs. N’importe qui se proclame rabbi ou gaon. Même chose chez les protestants. Vous prenez ce qui n’est qu’une spécificité catholique pour la généralité.
@Descartes
Je ne comprends pas ce que vous cherchez à démontrer, là vous m’avez perdue. Et je ne saisis pas le sens de votre dernière phrase ironique.
Je n’y peux rien si le mot “islamophobie” est critiquable. C’est le terme d’usage, c’est pourquoi je l’emploie. Le mot “antisémitisme” est encore plus absurde, mais c’est le mot d’usage donc c’est le mot qu’on emploie pour désigner l’aversion à l’égard des Juifs.
Donc nous sommes d’accord que vous ne soutenez pas que quelqu’un avant Simone de Beauvoir avait déjà écrit une somme comme “Le Deuxième sexe”. Ce que je disais sur le rôle de ce livre dans l’amélioration de la condition des femmes n’est donc pas réfuté par votre affirmation que chacune des idées de Simone de Beauvoir avait déjà été exprimée auparavant, isolément (chose que par ailleurs vous auriez du mal à prouver).
Personne ne connaît “intimement” ses grands-parents. Ce que je dis sur la malheur des femmes qui passent leur vie dans leur cuisine, c’est mon avis (comme tout ce qu’exprime chacun ici, n’est-ce pas, c’est vous qui l’avez rappelé). Vous me direz : elles sont peut-être très heureuses. Oui, un tétraplégique est peut-être aussi très heureux, on ne peut rien affirmer…
@ Nana85
[Je ne comprends pas ce que vous cherchez à démontrer, là vous m’avez perdue. Et je ne saisis pas le sens de votre dernière phrase ironique.]
[Je n’y peux rien si le mot “islamophobie” est critiquable.]
Bien sur que vous pouvez faire quelque chose : ne pas l’employer. Le mot « islamophobie » ne désigne aucun concept précis. C’est un mot dont use et abuse la galaxie communautariste dans le cadre des campagnes victimistes qui lui permettent d’occuper le haut du pavé médiatique. Car tout peut devenir « islamophobe ». La simple représentation de l’image du Prophète a été qualifiée telle par le MRAP devant les tribunaux, c’est dire…
[Le mot “antisémitisme” est encore plus absurde, mais c’est le mot d’usage donc c’est le mot qu’on emploie pour désigner l’aversion à l’égard des Juifs.]
Le mot « antisémitisme » n’a rien d’absurde. C’est un mot qui désigne un concept très précis : l’aversion à l’égard des juifs en tant que construction ethnique. Mais faire enlever la kippa ou représenter l’image de Yahvé n’ont jamais été jugés comme manifestations de « antisémitisme ».
[Donc nous sommes d’accord que vous ne soutenez pas que quelqu’un avant Simone de Beauvoir avait déjà écrit une somme comme “Le Deuxième sexe”.]
Bien entendu. Mais je soutiens en parallèle que tous les éléments de cette « somme » ont été déjà exprimés auparavant et séparément par d’autres.
[Ce que je disais sur le rôle de ce livre dans l’amélioration de la condition des femmes n’est donc pas réfuté par votre affirmation]
Je n’ai pas à « réfuter » une affirmation qui n’a pas été prouvée. Quand vous aurez la bonté de proposer des arguments ou des preuves à l’appui de votre affirmation, je vous proposerai une réfutation.
[Personne ne connaît “intimement” ses grands-parents. Ce que je dis sur la malheur des femmes qui passent leur vie dans leur cuisine, c’est mon avis (comme tout ce qu’exprime chacun ici, n’est-ce pas, c’est vous qui l’avez rappelé).]
Certes. Mais il y a des avis qui sont soutenus par une observation de terrain, par un raisonnement, par des données, par des références. Et il y a des avis qui sont soutenus par des « je crois que… » et c’est tout. Vous aviez parlé du « malheur des femmes de la génération de ma grand-mère ». Si vous me dites maintenant que vous ne connaissez pas suffisamment intimement votre grand-mère pour savoir si elle a été malheureuse ou pas, sur quoi s’appuie votre affirmation ?
[Vous me direz : elles sont peut-être très heureuses. Oui, un tétraplégique est peut-être aussi très heureux, on ne peut rien affirmer…]
Ben alors, n’affirmez pas !
Oui, le bonheur ou le malheur est une question très subjective. Personne ne peut juger du bonheur ou du malheur d’un autre à sa place. Si vous pensez qu’un tétraplégique est par définition malheureux, pourquoi le garder en vie ? Pourquoi ne pas mettre fin à son « malheur » puisqu’on sait que celui-ci est sans remède possible ? Dire « les femmes de la génération de nos grands-mères ont été malheureuses » est un non sens. Elles ne se sont pas suicidées en masse, que je sache. Cela implique qu’elles estimaient que la vie valait quand même la peine d’être vécue, malgré les sujétions et les contraintes de leur condition.
Je ne vous demande pas de réfuter que l’évolution des idées joue un rôle dans l’évolution de la condition des femmes dans une société. Si vous ne voulez pas le réfuter, tant mieux.
D’ailleurs, si vous pensez que les idées ne jouent aucun rôle, pourquoi vous fatiguez-vous à tenir ce blog ?
Selon vous, tant que les gens ne se suicident pas, c’est qu’ils sont bien assez heureux, c’est ça ? Je ne comprend pas où vous voulez en venir. Trouvez-vous la “soumission à son mari” préférable à la “soumission à son patron” ?
Votre définition des classes moyennes est intéressante, mais un peu abstraite pour moi. Pourriez-vous donner des exemples ?
@ Nana85
[D’ailleurs, si vous pensez que les idées ne jouent aucun rôle, pourquoi vous fatiguez-vous à tenir ce blog ?]
Parce que cela m’amuse. N’est ce pas une raison suffisante ?
Je ne me souviens pas avoir dit que « les idées ne jouent aucun rôle ». Elles jouent un rôle, mais pas aussi étendu que vous semblez le croire. Un livre n’a jamais changé le monde. Quelquefois, il peut servir de catalyseur à une transformation lorsque les conditions économiques et sociales sont remplies. Et un catalyseur ne provoque pas une réaction, il ne fait que l’accélérer.
[Selon vous, tant que les gens ne se suicident pas, c’est qu’ils sont bien assez heureux, c’est ça ?]
Bien assez heureux pour juger que la vie vaut la peine d’être vécue, oui. Pourquoi, vous n’êtes pas d’accord ? Vous pensez qu’il y a beaucoup de gens qui jugent que la vie ne vaut pas la peine d’être vécue, et qui continuent à vivre quand même ? Juste par paresse ?
[Je ne comprends pas où vous voulez en venir. Trouvez-vous la “soumission à son mari” préférable à la “soumission à son patron” ?]
Je ne la trouve ni préférable ni non préférable. C’est une question de choix personnel. Certaines femmes ont vécu le fait de sortir de la maison et d’aller à l’usine comme une libération, d’autres comme une perte de liberté. Aujourd’hui, certaines femmes – et de plus en plus d’hommes, me dit-on – préfèrent rester à la maison pour s’occuper de leur intérieur et de leurs enfants et laisser à leur conjoint le soin de gagner la croûte familiale. Ce qui prouve que, lorsqu’on donne aux gens le choix, certains choisissent l’une des options et les autres non. Difficile dans ces conditions de savoir laquelle est « préférable » en général.
Ce que j’essaye de vous faire comprendre, c’est que le statut de l’homme comme celui de la femme ne sont pas déterminés par une question de conscience, mais par un rapport économique. Lorsque l’économie domestique était importante et que les enfants étaient nombreux, il fallait une spécialisation des sexes, pour s’assurer au sein de chaque famille que l’un des conjoints irait à l’extérieur gagner la subsistance, et que l’autre ferait tourner cette économie domestique. A l’époque – et ce n’est pas si loin, trois générations en arrière – un homme ne pouvait pas vivre sans une épouse, et une femme ne pouvait pas vivre sans un mari. Le mariage n’était pas une question d’amour, mais un contrat économique conclu en général par les familles. Bien sur, si les époux s’aimaient, c’était tant mieux. Et s’ils ne s’aimaient pas, ils veillaient à ne pas trop se gêner et à se voir le moins possible. Parce que les époux étaient interdépendants, chacun avait un énorme pouvoir sur l’autre. Et c’est pourquoi cette vision des femmes « soumises à leur mari » est en grande partie une construction a posteriori. Si la loi faisant du mari le chef de la famille – ce qui en pratique voulait dire qu’il était l’interlocuteur de l’administration – la femme avait une infinité de manières de lui rendre la vie impossible.
Si les femmes se sont senties « opprimées » à un moment donné et dans certaines classes sociales – car vous remarquerez qu’il y eut très peu de « suffragettes » chez les paysannes de la renaissance ou des Lumières – c’est parce que les transformations économiques ont déstabilisé ce modèle. Avec l’augmentation de la productivité, l’économie domestique a perdu une grande partie de son importance. Plutôt que de faire des confitures à la maison, il était plus économique de travailler à l’usine et acheter les confitures avec le salaire ainsi gagné. Et du coup, cette interdépendance qui rendait la condition de la femme supportable s’est progressivement effacée. Tout à coup, l’homme pouvait vivre sans femme, et la femme sans homme – le congélateur et le microondes ont achevé cette transition. Et dès lors, la division du travail imposée par les sociétés pré-industrielles sont devenues insoutenables.
[Votre définition des classes moyennes est intéressante, mais un peu abstraite pour moi. Pourriez-vous donner des exemples ?]
Le cas le plus « pur » est celui de l’ingénieur hautement diplômé. D’un côté, son salaire ne peut représenter plus que la valeur qu’il produit – autrement, son employeur n’aurait pas intérêt à l’embaucher. D’un autre côté, vendant sa force de travail dans un marché ou la demande dépasse très largement l’offre et qui est assez proche d’un marché « pur et parfait », la théorie économique montre que la différence entre cette limite et ce qui est effectivement payé doit tendre vers zéro.
Une remarque sur le travail des femmes et l’économie domestique.
A partir des conversations et des discussions entendues dans ma famille, à partir aussi de recherches dans les archives de nombreux départements, je me suis rendue compte que c’est depuis les années 1830 que toutes les femmes dans ma famille dont ont pouvait dire” qu’elles ne travaillaient pas”, ont travaillé en plus ou à côté, ou pendant des périodes données “en dehors de l’économie domestique “proprement dite.
Si je vois les paysannes, tantes, cousines, grands mères, certes elles faisaient les confitures et torchaient les mômes mais elles gardaient aussi les vaches (mes Auvergnates), retournaient, salaient et surtout vendaient les fourmes et les tomes au marché, l’économie domestique de la paysannerie ayant des taches “domestiques” et dans l’économie générale, indépendamment des questions de sexe, c’était toujours la femme qui gavait les oies et les canards chez mes grands-parents landais et les hommes qui soutiraient le vin, aucune des deux tâches n’étaient méprisable, ni sur-valorisée, ni plus aisée, l’une était plus masculine que l’autre, mais cette différence n’était pas une hiérarchie ou une domination.
Quant à celles qui sont montées à Paris vers 1850 ( elles ont eu toutes eu des métiers en même temps qu’elles étaient “femmes au foyer”) des métiers qui supposaient habileté, apprentissage et en rien des métiers de potiches : culottières pour la Samaritaine,( livrant en bateau mouche depuis l’Atelier d’ Ivry,les lourds pantalons en velours côtelé), polisseuse d’orfèvrerie, brunisseuse, modiste, travaillant dans les ateliers de broderie où (il y avait autant d’hommes que de femmes), ouvrières chez des tailleurs, tenancière de café place de l’Hôtel de ville en 1871 pendant la Commune, voyant les Versaillais entrer et fusiller l’époux,femme de bagnard anarchiste exilée à Londres tout en étant brocanteuse, marchande de quatre saisons avec la charrette à bras par tous les temps, domestique pendant la jeunesse, puis cuisinière pour les fêtes et banquets dans les maisons bourgeoise de 11 à 75 ans, toutes ces femmes ont travaillé, gagné leur vie, élevé les enfants avec les maris tout aussi exploités qu’elles et fatigués.
Moi, vu de mon petit canton de l’univers, je suis toujours étonnée et quand on dit que l’exploitation des femmes est redoublée par rapport à celle des hommes et que celle-ci auraient été soumises à leur mari ou leur patron, elles ont aussi lutté, milité et n’ont pas attendu Simone de Beauvoir pour élever leurs enfants et asseoir leurs droits.
J’ai beaucoup de mal avec les discours sur “les idées”, je suis trop “hautement matérialiste” pour cela, je sais que les idées proviennent de la réalité vécue, sous des modes de production divers dans lesquels les femmes et les hommes sont impliqués, mais que l’émancipation passe d’abord par le collectif et pas par le petit nombrilisme de la défense égotiste de “mes” idées et de “mon” sexe, fut-il déclaré faible.
@ Baruch
[A partir des conversations et des discussions entendues dans ma famille, à partir aussi de recherches dans les archives de nombreux départements, je me suis rendue compte que c’est depuis les années 1830 que toutes les femmes dans ma famille dont ont pouvait dire” qu’elles ne travaillaient pas”, ont travaillé en plus ou à côté, ou pendant des périodes données “en dehors de l’économie domestique “proprement dite.]
Il y a là un problème de délimitation. Si la frontière entre l’économie domestique et la production extérieure est évidente pour la classe ouvrière, elle est plus difficile à établir dans le monde paysan. Ainsi par exemple les femmes s’occupaient traditionnellement du poulailler, dont le produit était pour partie consommé dans le cadre domestique, pour une autre vendu dans le circuit économique.
[Si je vois les paysannes, tantes, cousines, grands mères, certes elles faisaient les confitures et torchaient les mômes mais elles gardaient aussi les vaches (mes Auvergnates), retournaient, salaient et surtout vendaient les fourmes et les tomes au marché, l’économie domestique de la paysannerie ayant des taches “domestiques” et dans l’économie générale, indépendamment des questions de sexe, c’était toujours la femme qui gavait les oies et les canards chez mes grands-parents landais et les hommes qui soutiraient le vin, aucune des deux tâches n’étaient méprisable, ni sur-valorisée, ni plus aisée, l’une était plus masculine que l’autre, mais cette différence n’était pas une hiérarchie ou une domination.]
C’est un peu la thèse que je défends, contre les féministes « victimistes ». Les rapports entre l’homme et la femme ne sont pas des rapports hiérarchiques ou de domination, mais une logique de division du travail. Une division du travail déterminé d’abord, dans un très lointain passé, par des différences objectives tenant à la physiologie : les travaux de force, ceux qui nécessitaient un éloignement du foyer incompatible avec la maternité étant réservés aux hommes, les travaux compatibles avec les soins du foyer étant réservés aux femmes. Et cette division, en rendant les gens interdépendants – car aucun ne pouvait survivre seul – donnaient à chacun un pouvoir sur l’autre. Il faut sortir de la vision mécaniste « homme oppresseur/femme opprimée » pour examiner ce qui est un rapport dialectique.
La révolution industrielle perturbe cette division du travail sanctionnée par la coutume. Dans une première phase, la productivité de l’industrie réduit inexorablement le poids de l’économie domestique, et donc celui des femmes. Avec la production de masse et l’urbanisation l’homme peut vivre raisonnablement bien sans femme, en achetant avec son salaire sur le marché les services qu’il retirait de l’économie domestique. Ceci libère une force de travail féminine considérable qui ira grossir les rangs du prolétariat industriel, sortant elle aussi de l’orbite domestique. Il était normal que les cadres traditionnels, construits pour l’ancienne division du travail, soient bousculés puis détruits par ces transformations. Et dans ce domaine, l’inertie est très grande. Alors que les femmes entrent de plein pied dans la production dans les années 1920, ce n’est qu’une génération plus tard qu’elles commencent à accéder aux postes de direction.
Cela étant dit, je pense qu’une nouvelle division du travail reste à construire. La logique de l’indifférenciation, qui semble prévaloir aujourd’hui, me semble profondément destructrice. La psyché humaine se construit à partir de la dualité entre la figure paternelle et la figure maternelle, et ces figures ne peuvent exister que dans une logique d’interdépendance et de détermination sociale des rôles.
[Moi, vu de mon petit canton de l’univers, je suis toujours étonnée et quand on dit que l’exploitation des femmes est redoublée par rapport à celle des hommes et que celle-ci auraient été soumises à leur mari ou leur patron, elles ont aussi lutté, milité et n’ont pas attendu Simone de Beauvoir pour élever leurs enfants et asseoir leurs droits.]
Bien entendu. Ce raisonnement vient d’une vision mécaniste de la société, alors qu’il faut au contraire en avoir une vision dialectique. Les féministes confondent souvent la logique du droit et celle de la société. Si en droit l’homme était au début du XXème siècle le chef de famille et avait seul la capacité civile, cette logique était compensée par toute une série de règles et protections coutumières ou de droit.
Eh bien, convenez-vous que la disparition de la “spécialisation des sexes” est une bonne chose ?
(Remarque : les paysannes de la Renaissance ou des Lumières se sentaient peut-être opprimées : nous n’avons pas de témoignage…)
Oui, je connais votre opinion sur la vie qui est merveilleuse et qui vaut forcément la peine d’être vécue. Je ne suis pas d’accord avec vous là-dessus, mais inutile de discuter de cela, c’est une question indécidable. Même en admettant ce que vous dites, cela ne change rien au fait qu’il est nécessaire de faire tout ce qui est possible pour améliorer la vie des hommes.
@ Nana85
[Eh bien, convenez-vous que la disparition de la “spécialisation des sexes” est une bonne chose ?]
D’où tirez-vous que la « spécialisation des sexes » a disparu ? Pour le moment, aucun homme à ma connaissance n’a réussi à porter un enfant. Le jour où cela arrivera, on pourra parler de « disparition ». Pas avant. Aujourd’hui, on peut tout au plus parler d’atténuation de cette spécialisation. Atténuation qui est tout à fait relative, parce que les stéréotypes ont la vie dure, malgré l’action constante de toutes sortes de dragons de vertu qui expliquent qu’il faut forcer les petits garçons a jouer à la poupée et les petites filles à jouer à la voiture.
Maintenant, si vous me demandez si je trouve que cette atténuation est une « bonne chose »… j’aurais tendance à vous demander « bonne pour qui ? ». Pour les patrons, c’est certainement une très bonne chose, puisqu’elle leur permet de disposer d’une main d’œuvre plus abondante et indifférenciée. Est-ce une bonne chose pour les femmes et les hommes en général ? Je n’en suis pas totalement persuadé. J’avoue que mon idée du progrès est plutôt un changement dans les spécialisations que la disparition de la spécialisation elle-même.
[Oui, je connais votre opinion sur la vie qui est merveilleuse et qui vaut forcément la peine d’être vécue. Je ne suis pas d’accord avec vous là-dessus, mais inutile de discuter de cela, c’est une question indécidable. Même en admettant ce que vous dites, cela ne change rien au fait qu’il est nécessaire de faire tout ce qui est possible pour améliorer la vie des hommes.]
Oui, mais il y a une différence entre le fait de dire « on vit bien, mais on veut vivre mieux » et la logique misérabiliste du « tout va mal, il faut vivre mieux ».
@Nana85
L’islamophobie,non violente est du ressort de la liberté de pensée comme la judéophobie,la Nietschéophobie ou la célinophobie.
Ce qui est illégal,c’est la violence contre les religions ou tout individu.
L’anti-islamisme,comme l’anti athéisme ou tout acte violent est intolérable et puni par la loi.
Mais les phobies,non violentes,quelles quelles soient ,relèvent de la liberté de pensée .
Chacun a le droit d’avoir du dégoût devant telle ou telle pratique.
Merci de la qualité de vos articles que je découvre à l’occasion d’une réunion de service un peu ennuyeuse (sérendipité !)
A mon sens, ce qui se passe avec le burkini, c’est la prise de conscience par la communauté maghrébine (Algérie surtout, Maroc un peu) de son poids dans la société française et de sa capacité à jouer un rôle en tant que communauté.
F. Hollande est un peu responsable de cela, via sa stratégie électorale inspirée d’Obama visant à segmenter l’électorat en groupes homogènes et à leur accorder des mesures propres.
Cette communauté s’intègre mal (étude de l’INED publié par le Monde), en particulier les garçons, alors que les filles sont elles au dessus de la moyenne. Ceux qui sont intégrés se marient avec des “nationaux”, ceux qui ne sont pas intégrés vont se chercher une épouse au bled, et par conséquent on repart avec une génération d’enfants qui aura des difficultés. Cette communauté manque de rôle model au sens anglo saxon : peu de réussites médiatisées, en revanche des absences qui ont fait grand bruit (à l’Euro de foot, peu de personnes de l’immigration maghrébine au JO dans l’Équipe française…)
Un discours victimaire nourri par le PS durant des années (clientélisme) qui repose sur des faits réels, mais nie la part culturelle des difficultés rencontrées (cf. travaux de Hughes Lagrange).
Donc on arrive à une situation où cette communauté se stigmatise elle même via le port par exemple du burkini, ce qui a le double avantage de soustraire leurs filles à l’envie de faire des mariages mixtes (alors même que l’intégration se fait par “la table et le lit”), et d’autre part d’accentuer leur mise à l’écart (quel responsable d’entreprise prendra le risque d’embaucher une voilée ?).
La suite est très simple : cette communauté va demander des quotas, en insistant sur sa stigmatisation, et comme les communautés seront regroupées, ces quotas se feront sur une base ethnique (ex aux USA avec l’Université de Georgetown). Ce qui leur permettra d’accéder à des écoles prestigieuses via non par le concours mais les quotas (ex : Sc Po)
A mon sens, il faut prendre du recul : l’individualisme moderne nous montre que la Société ne reconnait que les mérites de l’individu, via toute une série d’épreuves complexes (écoles, prépa…), et nous renvoie immédiatement une image claire de notre valeur (succès, échec…) dont nous nous accommodons plus ou moins. La où dans le monde arabe, le coran donne aux arabes le premier rang.
Or les populations maghrébines depuis 30 ans ont du mal avec ce modèle pour des raisons diverses, et voudraient “avoir leur part du gâteau”. L’islam n’est qu’un faux nez de populations mal intégrées, qui veulent accéder à des postes de pouvoir avec la carte dont elle dispose : le nombre, et une certaine capacité à faire le coup de poing quand elle l’estime nécessaire.
Sur cette affaire de burkini/voile/burka, il me semble comme le dit très bien le blog que céder, c’est aller vers le communautarisme et le white flight. Qui acceptera que sa fille soit dans une classe dont l’intégralité des mamans est voilée ? personne.
Admettre le burkini, c’est aussi admettre (Toulon) que le short doit être interdit, car il “choque les croyants”.
La religion n’est qu’un faux nez, la réalité est celle d’une partie de la population non intégrée qui prend ce prétexte pour enfin réussir à émerger dans notre monde occidental.
Notre Droit n’est pas fait pour lutter contre ce type de revendications. Si la laïcité n’est pas le bon instrument, créons un autre concept (comme par exemple la sécurité en période d’attentat, qui permettra d’interdire un couvre chef ou des vêtements amples).
@ LR92
[Merci de la qualité de vos articles que je découvre à l’occasion d’une réunion de service un peu ennuyeuse (sérendipité !)]
Eh beh… au moins les réunions de service servent à quelque chose…
[A mon sens, ce qui se passe avec le burkini, c’est la prise de conscience par la communauté maghrébine (Algérie surtout, Maroc un peu) de son poids dans la société française et de sa capacité à jouer un rôle en tant que communauté.]
Je ne le crois pas. Si une telle « prise de conscience » avait lieu, elle se manifesterait d’abord sur le plan politique, avec l’apparition de partis « communautaires » capables de porter les revendications des communautés. Or, ce n’est manifestement pas le cas. Ceux qui ont essayé de créer de tels partis et de présenter des candidats aux élections se sont ramassés. Je pense au contraire – et je l’ai écrit dans mon papier – que loin de chercher à exercer une influence sur la société dans son ensemble, ces « communautés » – très faiblement organisées – cherchent plutôt la séparation, qui leur permettrait de vivre « comme au pays » en marge du reste de la collectivité nationale.
[F. Hollande est un peu responsable de cela, via sa stratégie électorale inspirée d’Obama visant à segmenter l’électorat en groupes homogènes et à leur accorder des mesures propres.]
Hollande a fait assez de bêtises en propre pour qu’on lui attribue les bêtises des autres. C’est plutôt dans l’extrême gauche qu’on trouve les expressions « communautaristes » les plus fortes – voir par exemple la candidature d’une femme voilée chez le NPA ou le poids des partis « régionalistes ». Sur ce point, Hollande est resté fort modéré, et n’a pas véritablement cédé aux sirènes de la « discrimination positive » et autres inventions « diversitaires ».
[Cette communauté manque de rôle model au sens anglo saxon : peu de réussites médiatisées, en revanche des absences qui ont fait grand bruit (à l’Euro de foot, peu de personnes de l’immigration maghrébine au JO dans l’Équipe française…)]
Faut arrêter ces bêtises. L’idée même de « rôle model » est une aberration qui doit être dénoncée avec la plus grande fermeté. Pourquoi Albert Einstein ne pourrait être un « rôle model » pour un enfant maghrebin ? Pourquoi Atatürk ne pourrait-il être un « rôle model » pour un enfant noir ? Pourquoi Mandela ne pourrait être un « rôle model » pour un enfant blanc ? Si c’est une question ethnique, alors ce vieux sémite d’Albert Einstein est plus proche d’un enfant maghrébin que d’un « gaulois »…
L’idée que nous devons ressembler aux gens qui nous ressemblent, que nous devons prendre nos « modèles » chez ceux qui sont comme nous est une prison. C’est une idéologie qui assure la parfaite reproduction de chaque communauté. Si on suit ce principe, les noirs auront pour modèles des sportifs – et deviendront donc des sportifs – mais jamais des physiciens. Parce que l’histoire de la physique manque malheureusement cruellement de noirs.
[Donc on arrive à une situation où cette communauté se stigmatise elle même via le port par exemple du burkini, ce qui a le double avantage de soustraire leurs filles à l’envie de faire des mariages mixtes (alors même que l’intégration se fait par “la table et le lit”), et d’autre part d’accentuer leur mise à l’écart (quel responsable d’entreprise prendra le risque d’embaucher une voilée ?).]
C’est là tout le paradoxe du discours de certains musulmans qui dénoncent une volonté de la société d’accueil « de leur faire porter une étoile jaune », mais qui par ailleurs s’imposent eux-mêmes le port de signes de reconnaissance. Cette « stigmatisation » que d’un côté on dénonce mais que d’un autre côté on fait tout pour perpétuer a une fonction : celle de séparer la « communauté » du reste de la collectivité, pour préserver des spécificités que l’assimilation aurait tôt fait d’effacer.
Et sur ce point, j’attire votre attention sur l’usage que vous faites du terme « intégration », qui ne veut pas dire la même chose que « assimilation ». Les étrangers en France sont très bien « intégrés » : ils sont soignés dans les hôpitaux, leurs enfants sont scolarisés, et ils ont accès à l’ensemble de l’espace public. Le problème n’est pas là.
[La suite est très simple : cette communauté va demander des quotas, en insistant sur sa stigmatisation, et comme les communautés seront regroupées, ces quotas se feront sur une base ethnique (ex aux USA avec l’Université de Georgetown). Ce qui leur permettra d’accéder à des écoles prestigieuses via non par le concours mais les quotas (ex : Sc Po)]
Il y a certainement une pression dans ce sens. Pression d’autant plus forte que les « classes moyennes » elles aussi s’attaquent au système du concours, qui met l’avenir de ses rejetons à la merci d’une concurrence au mérite. Mais d’un autre côté, beaucoup de gens sont conscients qu’affaiblir le recrutement par concours met en danger la légitimité même du système. Car si l’on sait que certains étudiants sont admis par concours et d’autres par quota, la valeur du diplôme en sortie ne sera plus la même pour les uns et pour les autres…
[La où dans le monde arabe, le coran donne aux arabes le premier rang. Or les populations maghrébines depuis 30 ans ont du mal avec ce modèle pour des raisons diverses, et voudraient “avoir leur part du gâteau”. L’islam n’est qu’un faux nez de populations mal intégrées, qui veulent accéder à des postes de pouvoir avec la carte dont elle dispose : le nombre, et une certaine capacité à faire le coup de poing quand elle l’estime nécessaire.]
Mais vous pouvez le constater vous-même : la « communauté » maghrébine ne semble pas particulièrement intéressée d’accéder aux « postes de pouvoir ». Au contraire : elle se réfugie dans une logique qui rend la conquête de ces postes de plus en plus difficile, voire impossible. Croyez-vous vraiment que porter le voile au travail ou de s’absenter cinq fois par jour pour faire sa prière soit la meilleure voie pour être nommé aux hauts postes de direction ? Non, la position des « communautés » maghrébines n’est nullement une position conquérante. C’est plutôt une position séparatiste.
Les élites d’origine maghrébine ont depuis longtemps compris que la voie du pouvoir passe par l’assimilation, par l’effort scolaire et les études prestigieuses. Rachida Dati, Najat Vallaud-Belkacem ou Myriam El Khomri (notez que l’immense majorité des ministres issus de l’immigration sont des femmes…) sont des personnalités qui, quelque soient leurs origines, ont parfaitement intégré les codes et les pratiques de la société d’accueil. Et si ces élites utilisent quelquefois cyniquement leurs origines pour exploiter la « culpabilité coloniale » et améliorer leurs chances d’accéder à des positions, elles ne peuvent guère être considérées comme l’avant-garde d’une conquête « communautaire ».
[Sur cette affaire de burkini/voile/burka, il me semble comme le dit très bien le blog que céder, c’est aller vers le communautarisme et le white flight. Qui acceptera que sa fille soit dans une classe dont l’intégralité des mamans est voilée ? personne.]
Mais il y a là un paradoxe : les mamans voilées marocaines à Toulouse font des manifestations pour se plaindre qu’à l’école de leurs enfants il n’y a plus d’enfants blonds dont les mamans ne sont pas voilées… on voit toute la panoplie des contradictions la tentation séparatiste et les avantages de l’assimilation…
[Notre Droit n’est pas fait pour lutter contre ce type de revendications. Si la laïcité n’est pas le bon instrument, créons un autre concept (comme par exemple la sécurité en période d’attentat, qui permettra d’interdire un couvre chef ou des vêtements amples).]
La notion d’ordre public me semble le concept adéquat, à condition de ne pas se limiter à l”ordre public dit “matériel”.
Il me semble vous avoir déjà dit que le Petit Bard est à Montpellier et non pas Toulouse mais vous persistez…
Pour vos inventions géniales de “concept”, l’Etat de droit garantit déjà l’ordre public, sans qu’il y ait de distinction “matériel” ou autre.
@ Françoise
[Il me semble vous avoir déjà dit que le Petit Bard est à Montpellier et non pas Toulouse]
Vous avez raison, c’est une erreur de ma part. Mais cela ne change en rien la valeur de l’exemple.
[Pour vos inventions géniales de “concept”, l’Etat de droit garantit déjà l’ordre public, sans qu’il y ait de distinction “matériel” ou autre.]
Et bien, il faut croire que des éminents juristes du Conseil d’Etat ne sont pas d’accord avec vous. Bernard Stirn, président de la prestigieuse section du contentieux, écrit: “Il y aussi un ordre public matériel, traditionnellement exprimé aux travers des pouvoirs de police du maire. Reprenant les dispositions venues de la loi municipale du 4 avril 1884, l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales prévoit que : « la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques »” (Colloque sur l’Ordre public, organisé par l’Association française de philosophie du droit les 17 et 18 septembre 2015). Vous noterez d’ailleurs que c’est exactement les termes que le juge des référés du Conseil a retenu pour annuler l’arrêté pris par le maire de Cannes interdisant le “burkini”. Il y a donc bien une distinction à faire entre “l’ordre public matériel”, dont le maire est le gardien, et “l’ordre public” en général, qui comprend – toujours selon Stirn: “Au sens le plus large, l’ordre public recouvre les valeurs essentielles du consensus social et du système juridique”.
Mais bon, à côté de votre opinion, que peut peser un misérable Bernard Stirn ?
“misérable Bernard Stirn”: je vous laisse la responsabilité d’un tel propos…
Il s’étale beaucoup d’opinions dans un colloque mais rien cela n’a aucune incidence sur notre Etat de droit.
En revanche, les décisions du Conseil d’Etat sont plus intéressantes; vous auriez pu lire votre source jusqu’au bout et voir que l’ordre public dépasse les notions traditionnelles de sécurité, tranquillité, salubrité, pour concerner la moralité (jurisprudence films Lutetia 1959) et le respect de la dignité humaine (jurisprudence des lancers de nains 1995)
@ Françoise
[Il s’étale beaucoup d’opinions dans un colloque mais rien cela n’a aucune incidence sur notre Etat de droit.]
Quand les opinions qui s’étalent sont celles du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat, cela a quelque incidence sur notre état de droit.
[En revanche, les décisions du Conseil d’Etat sont plus intéressantes; vous auriez pu lire votre source jusqu’au bout et voir que l’ordre public dépasse les notions traditionnelles de sécurité, tranquillité, salubrité, pour concerner la moralité (jurisprudence films Lutetia 1959) et le respect de la dignité humaine (jurisprudence des lancers de nains 1995)]
Si vous aviez lu avec attention mon commentaire, vous auriez compris qu’on dit la même chose. Bien sur que la notion d’ordre public dépasse les “notions traditionnelles de sécurité, tranquilité, salubrité” – ce qu’on appelle l’ordre public matériel – pour aborder d’autres sujets tels que la moralité ou la décence. Seulement voilà, dans sa décision concernant l’affaire de la “burkini”, le juge a justement retenu que les pouvoirs du maire ne s’étendent pas au delà de la notion d’ordre public matériel.
Mais bon, je sais que vous n’admettez jamais une erreur, alors je ne vois pas l’intérêt de continuer cet échange.
“dans sa décision concernant l’affaire de la “burkini”, le juge a justement retenu que les pouvoirs du maire ne s’étendent pas au delà de la notion d’ordre public matériel.” :où avez-vous lu cela?
vous n’avez pas bien lu la décision du Conseil d’Etat:
“le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs de police, édicter des dispositions qui interdisent l’accès à la plage et la baignade alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence. L’arrêté litigieux a ainsi porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle.”
En somme, le maire s’était planté de fondement juridique et s’il n’avait pas invoqué le principe de laïcité, complètement à côté de la plaque dans ce cas, il aurait très bien pu s’en sortir et faire appliquer son arrêté.
@ Françoise
[vous n’avez pas bien lu la décision du Conseil d’Etat:]
C’est vous qui n’avez pas bien lu la décision que vous citez. Lisez bien: “alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence”. Mais de quel “ordre public” parle ici le jugement ? S’il s’agissait de l’ordre public en général, il ne serait pas nécessaire d’ajouter “par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence” puisque ces deux notions sont incluses dans l’ordre public en général. Le Conseil d’Etat a donc retenu de l’ordre public une vision qui exclut la décence ou l’hygiène: il s’agit donc de l’ordre public matériel.
Voilà, je considère le sujet comme épuisé. Je ne me fais aucune illusion sur votre capacité à reconnaître vos erreurs, je vous laisse donc le dernier mot pour redire que je ne comprends rien et que je ne sais pas lire, et je passe à autre chose.
Bonjour et merci pour vos contributions qui ne manquent pas d’encourager les débats,
[Oui, le problème n’est pas simple. On aimerait que nos juristes, au lieu de se faire les défenseurs de principes immuables et sacrés, fassent au contraire preuve de créativité pour adapter le droit à la réalité, et non l’inverse.]
N’est-il pas vain d’essayer de lutter par voie législative contre la volonté d’une communauté de se singulariser dans l’espace public ? Une telle loi serait à mon avis soit trop restrictive et dans ce cas facilement contournable, soit trop évasive et dans ce cas conduirait à des abus car laissé à la libre appréciation du personnel chargé de l’appliquée. Par exemple, on a interdit le voile au sein des établissements scolaires, mais dorénavant on pointe les robes longues et les tuniques couvrantes et si on légifère contre ces nouvelles pratiques, les personnes souhaitant se démarquer trouveront d’autres moyens pour le faire (haut de telle couleur, bref cela sera sans fin).
Mais comme on l’a vu sur l’exemple du burkini, un cadre mal défini laisse trop de latitude aux agents en charge de l’appliquer et conduit à des abus qui entraînent ressentiment chez les personnes ciblées.
En outre, en plus d’être inefficaces de telles mesures pourraient également être contre-productives car une communauté se sentant ciblée aura plus tendance à se replier sur elle-même.
Je partage votre souhait ne pas afficher dans l’espace public les appartenances religieuses mais reste dubitatif sur les moyens d’y arriver de manière coercitive.
@ Tom-Tom
[N’est-il pas vain d’essayer de lutter par voie législative contre la volonté d’une communauté de se singulariser dans l’espace public ?]
Oui et non. La voie législative n’est pas la meilleure, et elle ne peut suppléer à une volonté sociale d’appliquer certaines règles de coexistence. Si les citoyens se mettaient à croasser chaque fois qu’une femme déguisé en tente passe devant eux, comme on l’a fait à une époque pour les curés en soutane, l’affaire serait vite réglée. Cependant, le droit peut utilement complémenter cette pression sociale en lui donnant une légitimité. En assumant le rôle de défenseur sourcilleux des libertés individuelles contre l’intérêt collectif, le juge a fait beaucoup de mal. L’affaire de la crèche Baby Loup est de ce point de vue emblématique.
[Une telle loi serait à mon avis soit trop restrictive et dans ce cas facilement contournable, soit trop évasive et dans ce cas conduirait à des abus car laissé à la libre appréciation du personnel chargé de l’appliquée. Par exemple, on a interdit le voile au sein des établissements scolaires, mais dorénavant on pointe les robes longues et les tuniques couvrantes et si on légifère contre ces nouvelles pratiques, les personnes souhaitant se démarquer trouveront d’autres moyens pour le faire (haut de telle couleur, bref cela sera sans fin).]
Parce que à chaque fois on légifère contre une « tenue » et non contre une intention. Il faudrait légiférer non pas pour condamner telle ou telle tenue, mais l’intention qui se trouve derrière elle. Mieux faudrait condamner « toute expression qui manifeste la volonté de séparer une communauté de la collectivité nationale », et ensuite laisser aux autorités dans chaque cas concret le soin d’apprécier. Bien sur, il y aura des interprétations contestables, comme il y a des interprétations contestables en matière de « décence », un concept pourtant bien intégré dans notre droit.
[Mais comme on l’a vu sur l’exemple du burkini, un cadre mal défini laisse trop de latitude aux agents en charge de l’appliquer et conduit à des abus qui entraînent ressentiment chez les personnes ciblées.]
« Abus » qu’il faut mettre en proportion. On n’arrête pas des gens, on ne les met en camp de concentration, on ne touche pas à leurs biens, leur liberté ou à leur considération. On leur demande tout au plus d’enlever un morceau de tissu ou de quitter les lieux. Même s’il s’agit d’un abus, le dommage causé est minime.
[En outre, en plus d’être inefficaces de telles mesures pourraient également être contre-productives car une communauté se sentant ciblée aura plus tendance à se replier sur elle-même.]
C’est ce qu’elle cherche. Le but des provocations est de provoquer le rejet. Malheureusement, il n’y a pas de solution. Si nous choisissons de tolérer ces manifestations, demain on aura d’autres plus extrêmes, plus violentes, et à un moment ou un autre il faudra mettre le holà. Autant le faire sur une manifestation relativement inoffensive…
[Je partage votre souhait ne pas afficher dans l’espace public les appartenances religieuses mais reste dubitatif sur les moyens d’y arriver de manière coercitive.]
Vous m’avez mal compris. Je n’ai rien contre la manifestation des « appartenances religieuses ». C’est l’utilisation qui en est faite comme instrument de séparation communautaire qui me gêne.
@Baruch
Tout ce que vous dites (vos exemples d’histoires de vies) est détaillé dans “Le Deuxième sexe”, qui est plus exhaustif, plus subtil et plus fouillé que ce que vous semblez croire.
Je ne comprends pas votre phrase “l’émancipation passe d’abord par le collectif et pas par le petit nombrilisme de la défense égotiste de “mes” idées et de “mon” sexe, fut-il déclaré faible” : que voulez-vous dire ? Qui est nombriliste et égotiste ?
@Descartes
Je ne sais ce que vous regroupez dans “les féministes”, il ne s’agit pas d’un groupe homogène, que je sache. Quant à “féministe victimiste”, Simone de Beauvoir ne l’est nullement, la lecture de ses écrits vous en convaincrait aisément.
Un enfant a besoin d’une figure maternelle et d’une figure paternelle : oui mais ce sont des rôles symboliques. Il a besoin de quelque chose de dur (l’autorité, symbole paternel) et de quelque chose de mou (la douceur, l’enveloppement, l’empathie, etc, symbole maternel), mais cela peut très bien être la mère qui joue le rôle paternel et le père qui joue le rôle maternel. Je crois même que c’est assez souvent le cas. Pas besoin d’une “logique d’interdépendance et de détermination sociale des rôles”. Je pense que ce genre de logique a tendance à rendre les gens malheureux.
Dernière question sur votre définition des classes moyennes : qu’appelez-vous un “ingénieur hautement diplômé” ? A partie de quel diplôme est-on considéré comme tel, pour vous ? Pour moi, un polytechnicien ne constitue pas vraiment LE type représentatif des classes moyennes…
@luc
Je n’ai jamais dit qu’il fallait mettre les islamophobes en prison. Je dis seulement que la montée de l’islamophobie est inquiétante.
@ Nana85
[Je ne sais ce que vous regroupez dans “les féministes”, il ne s’agit pas d’un groupe homogène, que je sache.]
C’est pourquoi je prends à chaque fois le soin de qualifier le terme « féministe » par un adjectif ou un complément : il y a un « féminisme égalitaire », un « féminisme de genre », un « féminisme victimiste », et ainsi de suite.
[Quant à “féministe victimiste”, Simone de Beauvoir ne l’est nullement, la lecture de ses écrits vous en convaincrait aisément.]
Je n’ai pas dit le contraire.
[Un enfant a besoin d’une figure maternelle et d’une figure paternelle : oui mais ce sont des rôles symboliques. Il a besoin de quelque chose de dur (l’autorité, symbole paternel) et de quelque chose de mou (la douceur, l’enveloppement, l’empathie, etc, symbole maternel), mais cela peut très bien être la mère qui joue le rôle paternel et le père qui joue le rôle maternel.]
Non. Même si les rôles sont « symboliques », il faut que l’enfant puisse clairement les identifier au premier coup d’œil, sans avoir à se poser de longues questions. Cela implique une stabilité des rôles dans le temps et dans l’espace qui ne peut résulter que d’une sanction sociale. Il est parfaitement possible d’imaginer une société où les femmes représenteraient l’autorité et la transcendance, et les femmes la transgression et l’immanence (ce serait difficile, parce que l’immanence est aussi liée au fait que la femme porte l’enfant neuf mois, mais bon, peut-être à l’avenir l’enfant sera porté par une machine, on peut toujours rêver…). Mais dans une telle société ces rôles seraient aussi rigidement distribués que dans la nôtre…
[Je crois même que c’est assez souvent le cas.]
Je ne sais pas ce qu’il en est dans l’ensemble de la société. Mais dans les gens que je fréquente, ce genre d’inversion est très rare. Je connais plusieurs cas ou le rôle du père est vacant, et où le rôle de la mère est partagé entre les deux conjoints. Mais je ne connais pas de couple ou la femme joue le rôle du père…
[Pas besoin d’une “logique d’interdépendance et de détermination sociale des rôles”. Je pense que ce genre de logique a tendance à rendre les gens malheureux.]
Et bien, je pense le contraire. La plus grande crainte de l’être humain, c’est l’incertitude. Les logiques de détermination sociale ont l’avantage de donner à chacun une place garantie, un territoire dont la possession vous est assurée par la société toute entière. Ma grand-mère ne pouvait peut-être pas faire un chèque ou contracter un emprunt. Mais dans sa maison, dans son jardin, dans sa cuisine, avec les enfants, dans la gestion du ménage elle était la reine, et mon grand-père filait doux et n’avait pas voix au chapitre. Et s’il n’était pas content, il allait au café ou au club de boules, et là, c’était lui le roi.
Contrairement à ce que vous pensez, la liberté ne rend pas heureux. Parce qu’avec la liberté vient la responsabilité et la culpabilité. L’individu autosuffisant et sans rôle déterminé est certainement plus libre, mais aussi moins protégé. Il peut faire ses choix, mais il doit en subir les conséquences. Est-il plus « heureux » ? Personnellement, j’en doute…
[Dernière question sur votre définition des classes moyennes : qu’appelez-vous un “ingénieur hautement diplômé” ? A partie de quel diplôme est-on considéré comme tel, pour vous ? Pour moi, un polytechnicien ne constitue pas vraiment LE type représentatif des classes moyennes…]
Le terme « ingénieur » est devenu très polysémique. C’est en même temps un grade dans plusieurs conventions collectives, une forme d’activité, un diplôme… J’ai voulu circonscrire pour vous donner un exemple. Je parlais des ingénieurs diplômés de grandes écoles, qui représentent un groupe assez homogène.
@ Descartes,
“Quelque soient les motifs, il reste que les populations ont pu vivre en bonne intelligence.”
Ponctuellement et toujours de manière transitoire. En attendant l’assimilation et/ou l’éradication…
“Ce que je conteste, c’est votre idée que leur logique serait fondamentalement différente des sociétés chrétiennes.”
Je ne vis pas dans une “société chrétienne”. Leur logique est fondamentalement différente de celle de la société française actuelle. L’islam a connu au Moyen Âge les prémisses d’un mouvement des Lumières (qui allait, chez certains intellectuels mutazilistes, jusqu’à une critique rationaliste des textes sacrés). Pour des raisons diverses, et on pourrait écrire une thèse là-dessus, ce mouvement a avorté. Si je suis votre pensée matérialiste, j’aurais tendance à dire que la structure économique et le mode de production du monde musulman à ce moment n’étaient pas favorables à un tel bouleversement. On voit d’ailleurs l’islam populaire témoigner son hostilité à ces groupes d’intellectuels, finalement coupés du peuple. Lorsque l’appui des califes leur a fait défaut, ils ont été balayés.
“Des hauts fonctionnaires, des chefs d’entreprise chrétiens ou juifs, il y en avait à la pelle.”
Des chefs d’entreprise, oui. Des hauts fonctionnaires et des ministres, beaucoup moins. Boutros Boutros-Ghali par exemple n’a jamais dépassé le rang de secrétaire d’Etat, malgré sa stature internationale, parce que copte.
“Les juifs, notamment, étaient tellement sur-représentés que cela a excité des campagnes antisémites”
Quand?
“Le fait que la République française n’ait jamais eu de président juif ne me choque pas outre mesure”
Elle a quand même eu un président du conseil juif, Blum, et à une époque où l’antisémitisme n’était pas quantité négligeable en France. Ce n’est pas si mal. Strauss-Kahn a été ministre sans que cela soulève un quelconque problème. Et il semblait bien parti pour être candidat à la présidentielle avec des chances raisonnables d’accéder à la magistrature suprême. Aujourd’hui, en Irak, Syrie, Egypte, quel chrétien peut rêver seulement d’être général ou préfet?
“expédition de Suez”
Je ne comprends pas ce que l’expédition de Suez a à voir avec cela. In fine, elle a plutôt conforté Nasser, non? Par ailleurs, Nasser soutenait le FLN algérien, il me semble.
“Faudrait demander aux irakiens ce qu’ils pensent de la croisade montée au nom de la religion néoconservatrice par George Bush…”
Je ne vois pas ce que la religion vient faire là-dedans. Bush n’a pas fait de “croisade”. Les Américains ont certainement cru que la déstabilisation de l’Irak servirait leurs intérêts et leur mainmise sur le pétrole. Je ne crois pas que les Américains aient l’intention de convertir les musulmans au christianisme… La politique américaine, au final, profite surtout aux islamistes.
“Ce qui à contrario me fait dire que demain les musulmans pourraient tenir le même discours que les églises chrétiennes aujourd’hui, pour peu qu’elles subissent le même processus.”
“Demain”, c’est quand? Dans 50 ans? Dans 200 ans? Nous parlons là d’un processus sur le long terme. Voulez-vous qu’on s’assoit tranquillement en attendant que l’islam fasse son aggiornamento? N’espérez même pas le favoriser: le mouvement doit venir de l’intérieur, du monde musulman lui-même. Tout soutien occidental aux musulmans éclairés leur vaut en général l’accusation d’être des traîtres à la solde de la civilisation rivale. Car il ne faut pas sous-estimer ce point: beaucoup de musulmans conçoivent la civilisation occidentale comme une rivale de la leur, et ce depuis très longtemps.
“C’est la même chose chez les juifs. N’importe qui se proclame rabbi ou gaon. Même chose chez les protestants. Vous prenez ce qui n’est qu’une spécificité catholique pour la généralité”
A part en Israël, les juifs sont partout ultra-minoritaires et plutôt sur le déclin, au moins en valeur relative. Les juifs n’ont pas de volonté prosélyte. Ma conviction est que les juifs séparatistes de France finiront tôt ou tard par émigrer en Israël ou dans un état communautariste. Pour moi, les juifs communautaristes ne sont pas un problème. Vu leur nombre, au pire, ils se regrouperont dans une poignée de ghettos, à l’écart du monde et de l’histoire. Les musulmans, plus nombreux, prosélytes, n’ont pas renoncé eux à l’idée d’acclimater la société d’accueil au mode de vie islamique.
En ce qui concerne les protestants, je suis d’accord avec vous pour ce qui est des Eglises “néo-protestantes” nord-américaines (mais qui se diffusent en Amérique latine, en Afrique et même en Europe), mais je pense que vous faites erreur pour les Eglises du protestantisme “classique” en Europe: les Eglises luthériennes d’Allemagne et de Scandinavie étaient structurées et hiérarchisées, car il s’agissait d’Eglises officielles et nationales. Par ailleurs, historiquement, les musulmans ont essentiellement été confrontés aux catholiques et aux orthodoxes, plutôt qu’aux protestants. Il y a un peu de tout dans le protestantisme, mais on y trouve aussi des Eglises structurées et hiérarchisées.
En fait au cours de nos échanges (et encore une fois, je vous exprime ma gratitude pour ce débat), je m’aperçois que je suis tiraillé entre deux logiques: d’un côté, je conserve un certain attachement pour la France, son héritage révolutionnaire, son message universel, la conception républicaine du citoyen, la laïcité; d’un autre côté, je suis aussi très préoccupé par la survie d’une communauté de Français de souche, blanche, catholique, qui a bâti ce pays selon moi, ses institutions, ses traditions, qui a fourni l’essentiel des soldats de la Révolution et de la Grande Guerre. Nos ancêtres méritent mieux que l’image qu’en donne un certain discours bienpensant. Je suis gêné d’entendre que, maintenant, c’est à d’autres paraît-il qu’il appartient d’écrire l’histoire de France, sous prétexte que les immigrés sont plus dynamiques, plus ouverts, plus entreprenants, ce qui est faux. C’est pourquoi j’oscille entre votre logique assimilationniste et une logique communautariste. Parfois je me dis, c’est vrai: après tout, choisissons l’apartheid, vivons entre nous et laissons les autres entre eux. Si la France préfère porter toute son attention sur les derniers arrivés, les choyer, les victimiser, s’accommoder de leurs coutumes, pourquoi devrais-je me soucier de l’avenir d’un pays qui me répète que c’est ma faute si les Arabes et les Noirs sont opprimés? Peut-être est-ce à force d’entendre depuis des années une apologie permanente du métissage et du mélange, peut-être est-ce mon surmoi racialiste, en tout cas je n’ai pas très envie que d’ici un demi-siècle la France ait une population aux origines mêlées, avec du sang arabe, subsaharien et européen dans les veines, une sorte de nation “brown”. Ma hantise est que la France devienne comme la Colombie ou le Venezuela, où la moitié des gens ont des origines africaines, amérindiennes et européennes. Cela peut vous paraître étrange, mais un tel modèle démographique ne me fait pas rêver. Et le fait que cette population de sang mêlé soit assimilée ou pas m’importe peu au fond, je ne pourrai pas me reconnaître dans ce magma métissé. Je préfère l’idée que chaque pays préserve ses spécificités ethniques, je l’avoue, quitte à laisser se constituer quelques communautés issues de diasporas étrangères, réduites en effectif et cantonnées dans quelques grandes villes.
@ nationaliste-ethniciste
[« Quelque soient les motifs, il reste que les populations ont pu vivre en bonne intelligence. » Ponctuellement et toujours de manière transitoire. En attendant l’assimilation et/ou l’éradication…]
Mais encore une fois, si je milite pour que notre société exerce une véritable pression pour l’assimilation, je ne peux pas reprocher à d’autres cultures de faire de même chez elles…
[Je ne vis pas dans une “société chrétienne”. Leur logique est fondamentalement différente de celle de la société française actuelle.]
Mais la société française actuelle est héritière d’une tradition judéo-chrétienne. Et en particulier, de cette particularité du christianisme qui vient de sa naissance dans le contexte de l’empire romain. Conçue d’abord comme religion minoritaire, le christianisme a été très tôt amené à reconnaître la séparation entre la loi civile et la loi religieuse. Et cette logique a préparé la sécularisation de la société. L’Islam, né six siècles plus tard, part pourtant de beaucoup plus loin. Ayant écrit dans un contexte très différent, Mahomet n’a pas eu besoin d’inclure la formule « donnez à Cesar ce qui est à César… » dans le Coran. S’il l’avait fait, l’histoire aurait pu être très différente !
[« Des hauts fonctionnaires, des chefs d’entreprise chrétiens ou juifs, il y en avait à la pelle. » Des chefs d’entreprise, oui. Des hauts fonctionnaires et des ministres, beaucoup moins. Boutros Boutros-Ghali par exemple n’a jamais dépassé le rang de secrétaire d’Etat, malgré sa stature internationale, parce que copte.]
Je crois que vous faites erreur. Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, Boutros Boutros-Ghali devient vice-premier ministre chargé des affaires étrangères à partir de 1991. En Irak, Tarek Aziz, tout chrétien qu’il était, était ministre et numéro deux du régime irakien de Saddam Hussein. Mais surtout, dans ces régimes la question de savoir l’origine des uns et des autres ne se posait que pour des postes symboliquement très importants. Pour les autres, le mérite – et la fidélité – étaient le premier critère.
[« Les juifs, notamment, étaient tellement sur-représentés que cela a excité des campagnes antisémites » Quand?]
Jusqu’à la fin de l’empire ottoman.
[« Le fait que la République française n’ait jamais eu de président juif ne me choque pas outre mesure » Elle a quand même eu un président du conseil juif, Blum, et à une époque où l’antisémitisme n’était pas quantité négligeable en France.]
Tout à fait. Mais le poste de président du Conseil, contrairement à celui de président de la République, n’a pas une forte charge symbolique. C’est d’ailleurs Blum lui-même qui a fait la différence.
[Aujourd’hui, en Irak, Syrie, Egypte, quel chrétien peut rêver seulement d’être général ou préfet?]
Aujourd’hui, aucun. Mais il ne vous aura pas échappé que les régimes laïcs ont disparu ou sont en grande difficulté. Par certains côtés, le monde musulman est revenu en arrière un demi siècle en une décennie.
[« expédition de Suez » Je ne comprends pas ce que l’expédition de Suez a à voir avec cela. In fine, elle a plutôt conforté Nasser, non?]
Ne confondez pas l’objectif et le résultat…
[Par ailleurs, Nasser soutenait le FLN algérien, il me semble.]
Bien entendu. Le FLN promettait un régime laïc et nationaliste qui serait pour l’Egypte un point d’appui, alors que la France lui avait montré son hostilité dans l’affaire de Suez. Nasser aurait eu tort de ne pas soutenir le FLN.
[« Faudrait demander aux irakiens ce qu’ils pensent de la croisade montée au nom de la religion néoconservatrice par George Bush… » Je ne vois pas ce que la religion vient faire là-dedans. Bush n’a pas fait de “croisade”. Les Américains ont certainement cru que la déstabilisation de l’Irak servirait leurs intérêts et leur mainmise sur le pétrole. Je ne crois pas que les Américains aient l’intention de convertir les musulmans au christianisme…]
Non, mais ils avaient certainement l’intention de les convertir à leur vision de la démocratie et du libéralisme économique. Il y avait certainement chez les américains des cyniques qui pensaient au pétrole et à leurs intérêts. Mais beaucoup – et Bush est de ceux-la – croient sincèrement à la mission messianique des Etats-Unis d’Amérique, pais désigné par Dieu lui-même pour porter la liberté et le droit. Le discours des néoconservateurs américains est un discours de nature religieuse, même s’il ne fait pas référence à un dieu particulier.
[« Ce qui à contrario me fait dire que demain les musulmans pourraient tenir le même discours que les églises chrétiennes aujourd’hui, pour peu qu’elles subissent le même processus. » “Demain”, c’est quand? Dans 50 ans? Dans 200 ans? Nous parlons là d’un processus sur le long terme. Voulez-vous qu’on s’assoit tranquillement en attendant que l’islam fasse son aggiornamento?]
Bien sur que non. Mais il vaut mieux toujours comprendre ce qui se passe. Et on ne comprend rien si on essentialise les difficultés avec l’Islam. Oui, l’Islam est très en retard dans le processus de sécularisation. Et notre politique intérieure et extérieure doit tenir compte de ce fait. Mais en même temps, nous avons intérêt à favoriser les mouvements qui à l’intérieur du monde islamique poussent dans cette direction. Par exemple, nous avons intérêt à soutenir le chiisme plutôt que le sunnisme.
[En fait au cours de nos échanges (et encore une fois, je vous exprime ma gratitude pour ce débat), je m’aperçois que je suis tiraillé entre deux logiques: d’un côté, je conserve un certain attachement pour la France, son héritage révolutionnaire, son message universel, la conception républicaine du citoyen, la laïcité; d’un autre côté, je suis aussi très préoccupé par la survie d’une communauté de Français de souche, blanche, catholique, qui a bâti ce pays selon moi, ses institutions, ses traditions, qui a fourni l’essentiel des soldats de la Révolution et de la Grande Guerre.]
Oui, j’avais remarqué. Mais je ne pense pas que les deux logiques soient contradictoires. Je les trouve au contraire complémentaires. C’est un peu la complémentarité entre la « petite patrie » et la « grande » dont on parlait ici même. Mais cela va plus loin, parce que plus on lit l’histoire, plus on s’aperçoit que la France du message universel, de la conception républicaine du citoyen et de laïcité s’est construite sur les épaules d’une autre, cette France blanche, provinciale et catholique à laquelle vous êtes attaché. Et même que j’ai fait mienne le jour de ma naturalisation, même si je n’en suis pas l’héritier direct.
Si je propose l’assimilation comme solution aux problèmes posés par l’immigration, c’est bien parce que mon expérience me dit que l’assimilation est la condition de préservation des deux Frances. C’est là toute la différence entre intégration et assimilation. L’assimilation implique non seulement d’assumer la France présente. C’est aussi de faire sien, de protéger et chérir un héritage qui va bien plus loin.
[Nos ancêtres méritent mieux que l’image qu’en donne un certain discours bienpensant. Je suis gêné d’entendre que, maintenant, c’est à d’autres paraît-il qu’il appartient d’écrire l’histoire de France, sous prétexte que les immigrés sont plus dynamiques, plus ouverts, plus entreprenants, ce qui est faux. C’est pourquoi j’oscille entre votre logique assimilationniste et une logique communautariste.]
Je comprends, mais je pense que vous avez tort. L’assimilation est au contraire la seule possibilité d’assurer la continuité de ces « ancêtres » auquel vous êtes attaché dans les français d’aujourd’hui. Mais cela passe par le fait de faire aimer cet héritage non seulement aux héritiers des « français d’autrefois », mais aussi aux immigrés.
[Peut-être est-ce à force d’entendre depuis des années une apologie permanente du métissage et du mélange, peut-être est-ce mon surmoi racialiste, en tout cas je n’ai pas très envie que d’ici un demi-siècle la France ait une population aux origines mêlées, avec du sang arabe, subsaharien et européen dans les veines, une sorte de nation “brown”. Ma hantise est que la France devienne comme la Colombie ou le Venezuela, où la moitié des gens ont des origines africaines, amérindiennes et européennes.]
C’est là que nous différons. Le fait que la France devienne « brown » ne me dérange pas pourvu que ces citoyens « browns » aiment et protègent un patrimoine, une vision, une histoire qu’ils auront assimilés et qui les aura assimilés. Ma crainte n’est pas la couleur des gens, mais la couleur des idées, et ma hantise est une France de « communautés », ou chaque citoyen n’aimerait que l’histoire des gens qui ont la même couleur que lui.
@Descartes
Je trouve le tableau “idyllique” que vous dépeignez du mode de vie de vos grands-parents parfaitement détestable. Je ne voudrais certainement pas pour moi-même d’une telle vie. Je connais des couples, des familles, qui vivent ainsi, et croyez-moi, ils ne sont pas enviables et pas heureux.
Il me semble que vous vous focalisez sur l’excès de dérégulation que représente l’anomie. Il existe un excès inverse, qui est l’excès de règles et de normes. Les quatre types de suicide dégagés par Durkheim comprennent un suicide anomique mais également un suicide fataliste, qui est causé par un contrôle social, des normes trop importantes.
Je crois aussi que vous négligez la bisexualité psychique de tout un chacun.
Il y a des mères qui n’ont pas tendance à câliner leurs enfants, qui sont plus sèches et plus dures, très autoritaires, et des pères qui sont tendres et câlins. Ce sont des choses très courantes.
Concernant les écoles d’ingénieur : les grandes écoles, pour vous, c’est lesquelles : uniquement l’X, Centrale Paris et les Mines de Paries, j’imagine ? Les ENSI, par exemple, n’en sont pas ? Je crois cependant que beaucoup de ceux qui sortent de l’X ou de Centrale Paris, rapidement, quittent les classes moyennes pour appartenir aux classes supérieures…
@ Nana85
[Je trouve le tableau “idyllique” que vous dépeignez du mode de vie de vos grands-parents parfaitement détestable.]
Peut-être. Cela ne les a pas empêché de vivre très heureux ensemble pendant cinquante ans. Quand mon grand-père est mort, ma grand-mère, au lieu de se réjouir de la fin d’un régime aussi « détestable », a pris le deuil et ne l’a pas quitté jusqu’au jour de son décès, plus de dix ans plus tard. Elle n’a jamais laissé personne s’asseoir à la place de mon grand-père à table. Je me demande comment elle aurait réagi si vous aviez été là pour lui expliquer que sa vie était « détestable ».
[Je ne voudrais certainement pas pour moi-même d’une telle vie.]
Peut-être. Mais ce n’est pas pour autant que ceux qui n’aiment pas la même chose que vous ont une vie « détestable »…
[Je connais des couples, des familles, qui vivent ainsi, et croyez-moi, ils ne sont pas enviables et pas heureux.]
Encore une fois, qu’est ce que vous en savez ? Comment mesurez vous le bonheur des gens pour décider qu’untel est « heureux », tel autre ne l’est pas ? A votre avis, s’ils sont si malheureux, pourquoi ne changent-ils de vie ?
[Il me semble que vous vous focalisez sur l’excès de dérégulation que représente l’anomie. Il existe un excès inverse, qui est l’excès de règles et de normes.]
Certainement. Mais je me focalise sur le danger qui me semble le plus proche. Je ne vois aucun risque d’hypernomie dans un futur proche…
[Je crois aussi que vous négligez la bisexualité psychique de tout un chacun.]
C’est plutôt le contraire : plus la « bisexualité psychique » est forte, plus il est nécessaire que la société fixe les rôles en dehors des individus…
[Il y a des mères qui n’ont pas tendance à câliner leurs enfants, qui sont plus sèches et plus dures, très autoritaires, et des pères qui sont tendres et câlins. Ce sont des choses très courantes.]
La différence du rôle entre père et la mère ne se réduit pas à être plus ou moins calin, plus ou moins tendre ou plus ou moins autoritaire. Le rôle tient au rapport aux sphères privée ou publique. La mère, c’est l’incarnation de la sphère privée, le père est l’intermédiaire avec la sphère publique. Et en pratique l’inversion est très rare. Il y a des cas ou le rôle du père disparaît, et l’enfant a en fait deux figures maternelles…
[Concernant les écoles d’ingénieur : les grandes écoles, pour vous, c’est lesquelles : uniquement l’X, Centrale Paris et les Mines de Paries, j’imagine ? Les ENSI, par exemple, n’en sont pas ?]
Si j’ai pris les ingénieurs diplomés d’une grande école c’est parce que la politique du numérus clausus que ces écoles pratiquent sont faites pour maintenir une tension sur le marché de l’emploi et donner aux anciens élèves un pouvoir de négociation. Vous pouvez inclure donc dans la liste toutes les écoles qui pratiquent un recrutement par concours sélectif.
[Je crois cependant que beaucoup de ceux qui sortent de l’X ou de Centrale Paris, rapidement, quittent les classes moyennes pour appartenir aux classes supérieures…]
Comment définissez-vous les « classes supérieures » ?
Je ne discute pas des « croyances ». L’immense majorité de ceux qui sortent de l’X ou de Centrale ne rentrent pas dans la bourgeoisie, puisqu’ils n’ont pas le capital qui leur permettrait de le faire. Ils restent donc des salariés, vendant leur force de travail. Seulement, leur pouvoir de négociation est tel qu’ils récupèrent la totalité de la valeur qu’ils produisent. Ils sont donc, selon la définition que je propose, dans les « classes moyennes ».
@Nana
Cest la montée de lislam,violent intolérant qui provoque la montée regrettable de l islamophobie,encore non-violent,allah merci…
@Descartes
« Ce que j’essaye de vous faire comprendre, c’est que le statut de l’homme comme celui de la femme ne sont pas déterminés par une question de conscience, mais par un rapport économique. »
“Dans la famille traditionnelle, la femme qui n’est pas soumise au travail productif, le fils qui fait des études restent sous la tutelle idéologique, économique, juridique du mari ou du père. Il y a une irresponsabilité de situation -objective- qui est le principe de l’infantilisation (et d’une infantilisation de la femme). Cette situation est d’ordre infrastructural. (Nous devons évidemment écarter, pour définir scientifiquement les statuts du jeune et de la femme, l’énorme discours qui ne se situe que dans les effets superstructuraux idéologiquement proposés comme causes d’eux-mêmes). Irresponsabilité objective, en ce sens que le jeune et la femme ne disposent pas des régulations et des normes de comportement qui sont immanentes au procès de production.” (Michel Clouscard, La Bête sauvage, 1983, p.211)
« L’individu autosuffisant et sans rôle déterminé est certainement plus libre, mais aussi moins protégé. Il peut faire ses choix, mais il doit en subir les conséquences. Est-il plus « heureux » ? Personnellement, j’en doute… »
“Le malaise de la société n’est autre que la maladie d’être libre, d’une liberté qui en effet n’a plus à se réinvestir en des conduites de devoir et d’obéissance. Libre pour rien.” (Clouscard, ibid, p.252)
@ Johnathan R. Razorback
Encore une fois vous me prenez en flagrant délit si je peux dire, non pas de plagiat, mais d’inspiration. Oui, j’ai beaucoup lu Clouscard dans ma jeunesse et j’ai toujours trouvé sa lecture de Marx bien plus stimulante que celle des freudo-marxistes comme Sève ou Althusser. Je confesse donc mon crime : je suis bien un clouscardien…
On peut d’ailleurs trouver chez Clouscard l’intuition de l’importance des classes moyennes dans les métamorphoses du capitalisme vers le « capitalisme libertaire », même s’il retient pour les classes moyennes une définition classique de sociologue et n’a pas cherché à en donner une définition économique en termes de classe.
Une autre dimension qui est à considérer dans cette affaire de communautarisme, c’est que nos bienpensants y compris ceux qui exercent dans le domaine juridique ne veulent considérer que l’expression « libre » d’individus faits du même métal.
Comme pour le voile à l’école, où les proviseurs sommés de « négocier » ont vu apparaître « les grands frères » accompagnés d’avocats d’organismes communautaristes, ce qui tend à relativiser le dit libre arbitre, le même schéma est en œuvre pour burqa, burkini…
Le dernier événement en date à Toulon où deux familles avec enfants se sont fait agresser me semble révélateur. Après un couac où il était question de short, on apprend qu’il s’agissait de leggings ce qui, au passage près d’un quartier « sensible » n’a pas empêché une de ces bandes de petits caïds de cité de qualifier de « putes » les dames incriminées.
Ceci en dit long sur l’ordre qu’ils entendent faire régner sur leur territoire dont ils s’érigent en gardiens. On peut légitimement douter que la jupe y ait droit de…cité et que pour être tranquille lorsqu’on appartient au beau sexe, il vaut mieux adopter la tenue adéquate.
A ce titre, le laisser faire, laisser aller a bien du mal à se draper de l’étendard de la liberté.
Mes excuses, hors sujet : la loi travail.
Au premier chef, elle consacre l’inversion de la hiérarchie des normes (dérogation par accord d’entreprise à l’accord de branche). Cela a déjà lieu en Espagne ou au Portugal avec pour résultat un effondrement des accords de branches et d’entreprises et du nombre de salariés couverts par une convention collective.
S’ajoutent :
– Une entreprise pourra mettre en place un plan social sans avoir de difficultés économiques.
– Le temps de travail pourra être modulé sur 3 ans.
– Par simple accord, l’entreprise pourra baisser les salaires et changer le temps de travail.
– Les heures supplémentaires et complémentaires seront moins payées.
La loi même votée reste une mauvaise loi. Il me semble nécessaire pour que la dénomination de « République sociale » inscrite dans la constitution soit plus qu’un vain mot de marquer notre opposition résolue à ce texte, en participant aux manifestations prévues le 15 septembre.
@ morel
[Une autre dimension qui est à considérer dans cette affaire de communautarisme, c’est que nos bienpensants y compris ceux qui exercent dans le domaine juridique ne veulent considérer que l’expression « libre » d’individus faits du même métal.]
C’est la logique même du communautarisme : l’individu n’établit des rapports avec les institutions qu’à travers le filtre de la communauté. Et réciproquement, il est tenu d’adhérer aux règles de celle-ci. C’est là toute la différence entre une société de citoyens et une société de communautés. Dans la société de citoyens, la personne n’est contrainte que par la loi : « Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas ». Et comme la Loi ne peut défendre « que les actions nuisibles à la société », chacun de nous reste souverain dans la sphère privée et libre dans la sphère publique sans autre limite que celui posé par la loi.
Dans la société communautaire, l’individu est soumis aux règles de la communauté. Or, pour la communauté, la sphère privée n’existe pas. Aucun aspect de la vie des individus n’échappe aux règles de la communauté. Celle-ci vous dit comment vous habiller, comment manger, comment avoir des rapports sexuels, comment élever vos enfants, comment et avec qui vous marier. Aucune décision n’est donc véritablement « libre », puisque toutes sont soumises à la contrainte communautaire et à la menace d’expulsion.
[Comme pour le voile à l’école, où les proviseurs sommés de « négocier » ont vu apparaître « les grands frères » accompagnés d’avocats d’organismes communautaristes, ce qui tend à relativiser le dit libre arbitre, le même schéma est en œuvre pour burqa, burkini…]
Bien entendu. Quand vous êtes membre d’une communauté qui peut vous couper les vivres à la moindre infraction au code communautaire, très peu de choix sont véritablement « libres ».
[Le dernier événement en date à Toulon où deux familles avec enfants se sont fait agresser me semble révélateur. Après un couac où il était question de short, on apprend qu’il s’agissait de leggings ce qui, au passage près d’un quartier « sensible » n’a pas empêché une de ces bandes de petits caïds de cité de qualifier de « putes » les dames incriminées.]
Cet incident fournit encore un exemple de la volonté séparatiste d’une communauté qui prétend délimiter un territoire ou seules ses règles s’appliquent. Cet incident est particulièrement grave : il conduit vers une situation où l’Etat ne peut pas interdire le burkini sur les plages mais où une communauté aura la possibilité d’interdire les shorts sur son territoire. Curieusement, l’incident n’a pas donné lieu à des commentaires de la LDH et autres officines de défense de droits de l’homme. Une coïncidence, certainement.
[Mes excuses, hors sujet : la loi travail. Au premier chef, elle consacre l’inversion de la hiérarchie des normes (dérogation par accord d’entreprise à l’accord de branche). Cela a déjà lieu en Espagne ou au Portugal avec pour résultat un effondrement des accords de branches et d’entreprises et du nombre de salariés couverts par une convention collective (…).]
Je ne comprends pas très bien le but de votre commentaire. Tout ça est bien connu de la plupart des lecteurs de ce blog.
[La loi même votée reste une mauvaise loi. Il me semble nécessaire pour que la dénomination de « République sociale » inscrite dans la constitution soit plus qu’un vain mot de marquer notre opposition résolue à ce texte, en participant aux manifestations prévues le 15 septembre.]
Oui. Cela étant dit, quel est le résultat attendu de ces manifestations ? Le mouvement ouvrier est prisonnier d’une logique droite/gauche qui n’a plus de sens mais qui reste symboliquement puissante. Pour le dire autrement, le syndicalisme reste attaché sentimentalement à une gauche dont il n’a plus rien à attendre. Et cela l’empêche de trouver pour ce mouvement un relais politique.
Pour gagner, il faut des alliés. Si on commence à décréter qu’on ne veut pas parler au FN, à « Les Républicains », et puis on n’aime pas non plus Bayrou, et puis Dupont-Aignan est réac… alors il ne vous reste in fine que le PS « social-libéral », et les groupuscules de al « gauche radicale ».
Bonjour Descartes,
un avis sur l’article de Piketty (et les “remèdes” proposés) ?
http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/09/06/thomas-piketty-la-segregation-sociale-dans-les-colleges-atteint-des-sommets-inacceptables_4993003_3232.html
@ Anne Iversaire
Que vous dire… Piketty constate un fait, mais ne s’interroge pas sur les causes de ce phénomène, et du coup le remède proposé n’a aucune chance de fonctionner.
Le fait est que nous vivons dans une société inégalitaire, dans laquelle une classe exploite, avec la complicité d’une autre, le travail d’une troisième. Et les deux classes – bourgeoisie et « classes moyennes » – qui occupent le haut de la hiérarchie sociale ont tout intérêt à ce que ce système se perpétue. Comment l’école, qui est une institution de reproduction de la société, pourrait échapper à cette contrainte ? Dans une société à la croissance faible, l’ascenseur social ne peut élever les uns sans en même temps descendre les autres. Or, la bourgeoisie et les « classes moyennes » veulent la garantie que leurs rejetons hériteront leur place dans la hiérarchie sociale. Ils ne peuvent donc pas accepter une école méritocratique et égalitaire. Pourquoi le feraient-ils ?
Qui est l’agent de la ségrégation sociale ? Ce sont d’abord les parents de la bourgeoisie et des « classes moyennes ». Ce sont eux qui votent pour des logiques de ségrégation scolaire. Et lorsque pour des raisons politiques ils n’obtiennent pas satisfaction, ce sont encore eux qui utilisent leur argent, leur connaissance du système et leurs relations pour contourner les dispositifs, et lorsque tout le reste vient à échouer mettent leurs enfants dans le privé, qui leur garantit que leurs enfants seront « entre eux ». Contrairement à ce que pense Piketty, la ségrégation scolaire n’est pas une question d’organisation bureaucratique, mais un véritable combat social. On a essayé un grand nombre de « solutions » reposant sur des procédures d’affectation plus ou moins diaboliques, avec des « points » dans tous les sens pour tenir compte de paramètres comme le revenu, la composition du foyer, l’origine et autres. Et aucun ne fonctionne parce que la pression sociale des parents des « classes moyennes » oblige à prévoir des dérogations dans tous les sens et des mécanismes de contournement sans quoi on ne fait qu’alimenter le privé.
L’école n’est pas un monde clos, séparé de la société. On ne peut faire coexister durablement une école de l’ascenseur social et de la réussite pour tous avec une société inégalitaire qui réserve la réussite à certains. L’école méritocratique dont nous avons la nostalgie a pu exister dans une société méritocratique, et cette société a pu exister sur le fondement d’une croissance forte et d’une répartition de ses fruits relativement égalitaire. Aujourd’hui, nous avons au contraire une société à la croissance faible, et à la redistribution de plus en plus rachitique. L’école ne fait que refléter cet état de fait. Pour changer vraiment l’école, il faut changer la société.
@Descartes
Vous faites souvent allusion au fait que vous êtes originaire d’un autre pays, mais sans jamais préciser lequel. Ce que vous décrivez de la vie de vos grands-parents me semble relever d’une culture méditerranéenne, est-ce que je me trompe ?
Vous me dites “s’ils sont si malheureux, pourquoi ne changent-ils de vie” : parce qu’ils ne peuvent pas justement, ils sont trop “interdépendants”, comme vous dites.
Je peux vous retourner la question : vous affirmez que vos grands-parents ont été très heureux pendant cinquante ans : qu’est-ce que vous en savez ? On a souvent tendance à idéaliser la vie de ses parents ou de ses grands-parents.
Vous dites “La mère, c’est l’incarnation de la sphère privée, le père est l’intermédiaire avec la sphère publique”. Et pourquoi, s’il vous plaît ? D’où cela sort-il ?
“C’est plutôt le contraire : plus la « bisexualité psychique » est forte, plus il est nécessaire que la société fixe les rôles en dehors des individus” : là encore, pourquoi ?? Pourriez-vous justifier cette affirmation ?
PS : vous écrivez souvent “quelque soient les origines” ; sauf votre respect, on écrit “quelles que soient”, je me permets de vous le dire car dans votre prose concise et élégante cela me blesse les yeux 🙂
@ Nana85
[Vous faites souvent allusion au fait que vous êtes originaire d’un autre pays, mais sans jamais préciser lequel. Ce que vous décrivez de la vie de vos grands-parents me semble relever d’une culture méditerranéenne, est-ce que je me trompe ?]
Vous vous trompez, et de très loin. Aucun de mes ancêtres n’a habité à moins de cinq cents kilomètres des rives de la méditerrané au cours des derniers cinq siècles. Les racines de ma famille sont plutôt à chercher dans la frontière russo-polonaise…
[Vous me dites “s’ils sont si malheureux, pourquoi ne changent-ils de vie” : parce qu’ils ne peuvent pas justement, ils sont trop “interdépendants”, comme vous dites.]
Mais si cette « interdépendance » les rend si malheureux, pourquoi ne pas la briser ? Pourquoi ne pas se donner les moyens de l’indépendance quitte à en payer le prix ? Dites-vous bien que si les gens ne changent pas leur situation pouvant le faire, c’est en général parce que le prix à payer est bien supérieur aux avantages qu’on en tire. Si les gens dans cette situation étaient aussi « malheureux » que vous le dites, ils seraient prêts à payer n’importe quel prix pour en sortir.
[Je peux vous retourner la question : vous affirmez que vos grands-parents ont été très heureux pendant cinquante ans : qu’est-ce que vous en savez ? On a souvent tendance à idéaliser la vie de ses parents ou de ses grands-parents.]
Je le sais parce qu’ils me l’ont dit. Je le sais parce qu’ils n’ont pas cherché à changer de vie, alors qu’ils en avaient l’opportunité. Je sais parce que lorsque mon grand père est mort ma grand-mère ne s’y est jamais vraiment remise, alors même que cette mort mettait fin à ce que vous voyez comme une source de « malheur ». Avouez que ce faisceau de présomptions est bien plus solide que votre raisonnement qui décrète que les gens sont « malheureux » simplement parce qu’ils ne vivent pas conformément à vos standards.
[Vous dites “La mère, c’est l’incarnation de la sphère privée, le père est l’intermédiaire avec la sphère publique”. Et pourquoi, s’il vous plaît ? D’où cela sort-il ?]
Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Freud. Le « pourquoi » de cette construction se perd dans la nuit des temps. Si dans l’immense majorité des civilisations connues le domaine domestique appartient aux femmes et le domaine civique appartient aux hommes, ce n’est pas par hasard. Si dans l’immense majorité des civilisations la femme est gardienne des rapports avec la nature immédiate et l’homme des rapports avec les dieux, ce n’est pas non plus un hasard. Connaissez-vous beaucoup de cultures ou les femmes vont en mer, à la chasse ou à la guerre pendant que les hommes restent garder la maison ? Non. Alors, quand Freud dit que « la femme est l’immanence et l’homme la transcendance », il ne fait que consigner une observation, pas une prescription.
[« C’est plutôt le contraire : plus la « bisexualité psychique » est forte, plus il est nécessaire que la société fixe les rôles en dehors des individus » : là encore, pourquoi ?? Pourriez-vous justifier cette affirmation ?]
Le raisonnement me paraissait évident : moins une distinction est évidente pour les individus eux-mêmes, plus elle doit être sanctionnée par la société. Ainsi, on a obligé pendant longtemps en Europe occidentale les juifs à porter des vêtements ou des signes distinctifs pour éviter qu’ils puissent être confondus avec les autres. Personne n’a songé à imposer la même obligation aux noirs. Moins la division sexuelle est nette – et c’est ça le sens de la « bisexualité psychique » – plus la distinction doit être socialement sanctionnée.
[PS : vous écrivez souvent “quelque soient les origines” ; sauf votre respect, on écrit “quelles que soient”, ]
Merci de la remarque, je m’efforcerai d’en tenir compte.
@Nana
Dans mon quartier,85% des personnes qui y vivent sont de cultures musulmanes plus ou moins laïcisées.
Si vous viviez dans mon quartier populaire,vous verriez les emburkanées déambulaient par dizaines.
Des grappes de jeunes qui raillent tout ce qui n’est pas ‘testorénés’.
Vous déambuleriez dans une rue où un salon de thé propose des horaires pour servir les hommes différent de ceux pour servir les femmes(qui viennent voilées,en groupe).D’autres lieux où le quincailler faisant office de point commercial d’Orange,affiche partout de luxueux slogans:versets du Coran.D’autres passages où tous les magasins sont hallals,les femmes vétues de bâches ou au mieux d’épaisses chemises de nuit.Des croisements où les jeunes sortent facilement les couteaux,en groupe,pour ‘pointer’ n’importe quel quidam, comme si c’était ça, l’initiation pour devenir adulte.Vous observeriez des ronds points où les vendeurs de H, caillassent leurs coreligionnaires jeunes mères de famille qui leur font de petites remarques.
J’imagine que si vous vous étiez fait traiter de Jambonne,de gaulois,si vous vous étiez fait cambriolée,raquettée,agressée,par d’autres que ‘les gaulois’,choses que j’ai vécues alors vous comprendriez pourquoi l’hyper sacralisation de ‘l’Islam’,me dégoûte.
Mais j’imagine que tout ça ne vous concerne pas !
Pourtant allez à Mantes la Jolie,au Mirail dans des centaines d’autres quartiers de France et vous constaterez que là bas,loin de vos beaux quartiers,le grand remplacement n’est pas qu’un fantasme.
Sauf que ce n’est pas l’Islam,archaïque et aliénant qui peut réellement remplacer la laïcité historiquement française depuis jean Bodin,il y a 500 ans.
Pourquoi,je reste dans ce quartier?
d’abord l’immense majorité des gens de mon quartier,issues de cultures islamiques,sont comme moi,islamophobes car ils subissent aussi ce que je viens de décrire.Leur désaroi est d’autant plus grand qu’en venant en France ,ils pensaient venir dans une société laïque,éloignée des ravages en terme de sociabilité de la névrose islamique.Pour ces immigrés là,il me semble important qu’ils voeint qu’il y a des français laïcs,non violents,qui résistent au tsunami islamique.
Et puis,j’ai beaucoup donné à la France,lors de mon service militaire en 1979 face aux SS 20du pacte de Varsovie.
Je n’évoquerai pas mon douloureux métier d’enseignant dans un collège difficile ni les sommes énormes versées en cotisations obligatoires pour la communauté nationale française ni mon engagement anti raciste toujours actuel.
Toute ma famille vient de France depuis ies siècles .J’y suis,j’y reste,je n’ai pas à me justifier.
Où voulez vous que j’aille?en israêl?au Québec?en Russie?
Parce que je suis un lutteur non violent au long cours ,petit fils de FTPF et rationaliste avant tout,je tiens ‘ma position’ face à l’obscurantisme délaïcisé déferlant dans les quartiers populaires,où j’ai toujours vécu mais que je ne reconnais plus.
C’est eux avec leur idéologie archaïque(=les islamistes) ou moi qui me nourrit aux lumières de la science.S’il n’en reste qu’un,je serai celui là.
Ce sera un trés trés long combat idéologique pacifique dans mon cas.
Savez vous ce qui s’est passé en Indonésie en 1965?
Renseignez vous sur Wikipédia et vous me comprendrez peut être…
@ luc,
Je dois dire que je suis ému en lisant votre témoignage. J’admire d’une certaine façon votre constance et votre esprit de résistance. Je n’aurais pas le courage pour ma part de vivre dans le quartier que vous décrivez. Toutefois, je suis un peu étonné de l’inertie de “l’immense majorité” de vos voisins. Comment ont-ils pu laisser les petites frappes et les salafistes prendre le pouvoir? Pourquoi ne s’organisent-ils pas en collectif pour obliger les autorités à faire respecter l’ordre public? Il règne parmi ces gens un étrange fatalisme…
@ Descartes,
“Mais encore une fois, si je milite pour que notre société exerce une véritable pression pour l’assimilation, je ne peux pas reprocher à d’autres cultures de faire de même chez elles…”
Sur le principe, je vous suis. Sauf que les chrétiens d’Orient ne sont pas une minorité allogène débarquée en terre d’islam il y a 50 ans. Et là se pose une question redoutable: que faire des cultures autochtones antérieures à l’établissement de la culture majoritaire lorsque cette dernière peine à les intégrer? Faut-il les effacer au nom de l’assimilation? Faut-il les préserver et les protéger comme un respectable vestige du passé (au risque de “muséifier” ces communautés dans des réserves)? La question se pose dans un certain nombre de pays latino-américains où, après une période assimilationniste, on voit resurgir un peu partout des mouvements identitaires indigènes. La question de savoir si l’assimilation est toujours efficace et si elle est forcément souhaitable, notamment vis-à-vis de cultures indigènes anciennes, se pose. Car l’autochtone n’est-il pas légitime à défendre sa culture? Ou bien lui faut-il admettre qu’il est le perdant et devenir à l’image de son conquérant?
En ce qui concerne les chrétiens d’Orient, il y a également un aspect symbolique. Pour un chrétien d’Occident comme moi, les chrétiens d’Orient incarnent en quelque sorte les racines orientales du christianisme. Ils vivent sur des territoires (Syrie, Egypte, Irak, Palestine, Liban) qui ont été les premiers à être christianisés. Leur disparition signifierait, à mes yeux, une regrettable rupture avec le berceau du christianisme. On ne peut que constater que même les régimes laïcs arabes n’ont pas vraiment réussi à faire accepter à la majorité musulmane que le christianisme oriental soit intégré à la trame nationale. Vous avez souligné les coups portés par l’Occident à ces régimes, et je suis d’accord avec vous. Mais ne sous-estimez pas les faiblesses intrinsèques de ces régimes: les baasistes syriens et irakiens ont aussi pratiqué une politique contradictoire, en alliant un discours national unitaire et une politique clientéliste jouant la carte communautaire. J’aurais même tendance à penser que leur échec est davantage lié à la structure de leurs propres sociétés qu’à l’intervention de l’Occident. Même un Saddam Hussein, respectueux des chrétiens, avait réislamisé son idéologie dans les années 90, après avoir tenu un discours beaucoup plus laïc dans les années 70-80. La question s’est d’ailleurs toujours posé, dès les premiers nationalistes arabes (dont certains étaient chrétiens): que faire de l’islam? Cette question n’a jamais été vraiment résolue, tant l’identité islamique et l’identité arabe sont indissolublement liées, alors que les nations occidentales, avec la Grèce et Rome, ont toujours pu puiser à des sources pré-chrétiennes. La langue et la culture arabes se sont répandues avec l’islam. C’est pourquoi le rapport entre arabité et islamité est d’une nature particulière.
“L’Islam, né six siècles plus tard, part pourtant de beaucoup plus loin. Ayant écrit dans un contexte très différent, Mahomet n’a pas eu besoin d’inclure la formule « donnez à Cesar ce qui est à César… »”
Pourquoi les musulmans changeraient-ils leur logique? Ils sont après tout en droit de considérer que l’identité entre la loi civile et la loi religieuse est une bonne chose. Pour beaucoup de pays musulmans, la loi islamique est la seule tradition juridique existante, là où l’Occident avait l’héritage du droit romain pour contrebalancer le droit canon. Je ne vois pas bien ce qui peut amener les pays musulmans à changer leur logique.
“Pour les autres, le mérite – et la fidélité – étaient le premier critère.”
Au contraire, l’appartenance communautaire a toujours joué un grand rôle. Regardez les cadres du régime baasiste irakien: la plupart étaient sunnites, peu de chiites (60 % de la population), quasiment pas de Kurdes. Regardez les cadres du régime syrien: les Alaouites sont surreprésentés alors qu’ils sont 10 à 15 % de la population. J’ai l’impression que vous confondez le discours officiel des régimes arabes laïcs, discours moderniste, et leur pratique politique au quotidien, très archaïque…
“Par exemple, nous avons intérêt à soutenir le chiisme plutôt que le sunnisme.”
J’aurais tendance à être d’accord avec vous, mais je sens que ce n’est pas pour les mêmes raisons. Pourriez-vous préciser votre pensée? Après tout, le chiisme a produit le régime iranien, intégriste et violemment anti-occidental.
“C’est là que nous différons. Le fait que la France devienne « brown » ne me dérange pas pourvu que ces citoyens « browns » aiment et protègent un patrimoine, une vision, une histoire qu’ils auront assimilés et qui les aura assimilés. Ma crainte n’est pas la couleur des gens, mais la couleur des idées, et ma hantise est une France de « communautés », ou chaque citoyen n’aimerait que l’histoire des gens qui ont la même couleur que lui.”
Effectivement, c’est notre différence fondamentale. Je ne crois pas qu’un peuple puisse changer de couleur en restant le même, et je ne connais aucun exemple historique. La transformation du substrat ethnique a nécessairement des conséquences sur l’identité nationale. Même si cette France “brown” assume une partie de l’héritage de la France éternelle, ce sera une France trop différente. Votre idée selon laquelle on peut s’identifier à des gens qui ne nous ressemblent pas ne peut s’appliquer à mon avis qu’à une petite minorité cultivée. La plupart des gens ont besoin de s’identifier à des ancêtres qui leur ressemblent, parce que c’est humain, et je ne crois pas, contrairement à vous, que ce soit un mal. Mais imaginer qu’une France “brown” dans laquelle les noms de famille seraient pour moitié à consonance arabe ou subsaharienne puisse se reconnaître dans Philippe Auguste, François 1er et Napoléon… Je vous le dis en toute amitié: je pense que votre optimisme méthodologique vous aveugle. Vous demandez aux hommes un effort qui surpasse les possibilités de la majorité. C’est pourquoi je pense qu’une conception trop abstraite de la nation entraînera la mort de la nation. La multiplicité des origines n’est pas un facteur d’unité.
Je voudrais, si vous le permettez, revenir sur la condition des femmes du temps de “nos grands-mères”. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt les contributions des commentateurs et les réponses que vous y avez apportées, Descartes. Je souhaiterais apporter quelques éléments. Dans ma famille, des femmes de la génération de mes grands-mères et de mes arrière-grands-mères ont connu le malheur conjugal (et ce n’est pas ce que je pense, c’est ce qu’elles m’ont dit) avec des époux violents, volages et alcooliques. Vous avez souligné, Descartes, le fait que pourtant ces femmes jugeaient la vie digne d’être vécue, et en effet elles ne se sont pas suicidées (mais certaines ont divorcé, à une époque où c’était assez mal vu). Je voudrais dire plusieurs choses: d’abord, le suicide est proscrit par le christianisme et la religion conservait en ce temps un certain poids; ensuite il y avait pendant longtemps une forme de fatalisme, de résignation, qu’on n’imagine pas forcément de nos jours. Et une de mes arrière-grands-mères de dire à ma grand-mère, qui venait d’apprendre une infidélité de mon grand-père: “Cela arrivera d’autres fois, il faut t’y faire”. Ma grand-mère ne voyait pas les choses ainsi et elle divorça, ce qui effectivement l’obligea à vivre dans une relative pauvreté pendant plusieurs années. Seulement, il ne faut pas généraliser. On ne peut pas dire “nos grands-mères étaient heureuses” ou “nos grands-mères étaient malheureuses”. D’abord, certains ont des grands-mères bourgeoises ou aristocrates qui n’ont pas tout à fait eu la même vie que ma grand-mère, paysanne dans sa jeunesse et ouvrière ensuite jusqu’à sa retraite (à 65 ans). Mon autre grand-mère, issue d’un milieu plus favorisé, n’a pas eu les mêmes problèmes. Ensuite, il a toujours existé des couples unis et heureux, même chez les gens modestes. Cessons de projeter sur nos ancêtres nos obsessions victimistes et misérabilistes. Il faudrait également que les féministes comprennent enfin que les relations entre hommes et femmes sont extrêmement complexes, subtiles, et la limite entre domination, séduction, dépendance, soumission n’est pas toujours aussi nette qu’on le pense parfois… Et surtout ce n’est pas à sens unique! Beaucoup d’hommes célèbres dans l’histoire se sont parfois laissés tourner la tête par une femme. Ne faisons pas des femmes des victimes éternelles du patriarcat oppresseur. Au-delà du statut juridique, le pouvoir de la femme peut être considérable, quel que soit le lieu ou l’époque.
@ nationaliste-ethniciste
[« Mais encore une fois, si je milite pour que notre société exerce une véritable pression pour l’assimilation, je ne peux pas reprocher à d’autres cultures de faire de même chez elles… » Sur le principe, je vous suis. Sauf que les chrétiens d’Orient ne sont pas une minorité allogène débarquée en terre d’islam il y a 50 ans. Et là se pose une question redoutable: que faire des cultures autochtones antérieures à l’établissement de la culture majoritaire lorsque cette dernière peine à les intégrer? Faut-il les effacer au nom de l’assimilation? Faut-il les préserver et les protéger comme un respectable vestige du passé (au risque de “muséifier” ces communautés dans des réserves)?]
On revient sur la question de « l’assimilation intérieure ». La construction de la nation passe par le fait que l’ensemble de la population partage un cadre de référence et un mode de sociabilité qui permette de construire cette « solidarité inconditionnelle » qui pour moi est le fondement du sentiment national. Faut-il pour cela « effacer » les cultures – qu’elles soient allogènes ou autochtones – différentes de la culture dominante ? Pas forcément, si ces cultures acceptent de ranger dans la sphère privée tout comportement qui irait contre cet objectif. Mais ce confinement de la culture d’origine à la sphère privée, si elle ne « muséifie » pas, implique par certains côtés une perte.
[La question se pose dans un certain nombre de pays latino-américains où, après une période assimilationniste, on voit resurgir un peu partout des mouvements identitaires indigènes. La question de savoir si l’assimilation est toujours efficace et si elle est forcément souhaitable, notamment vis-à-vis de cultures indigènes anciennes, se pose.]
Pour moi, la réponse est évidente : une culture ne peut survivre en dehors de son fondement matériel. Une culture construite pour des générations qui durent trente ans et pour faire face à la famine ne peut subsister quand l’espérance de vie atteint soixante ans et qu’il y a plein à manger. En d’autres termes, la seule manière de préserver les « cultures indigènes », c’est leur refuser les bénéfices de la médecine et de l’agriculture moderne. Avons-nous le droit de faire cela ? Et plus profondément : est-ce que c’est ce que les membres de ces cultures souhaitent ? Parce que le fait, incontestable, est que lorsqu’elles ont le choix de crever de faim – comme ils le font depuis des millénaires – dans leurs hauts plateaux ou descendre à la ville moderne, ils tendent à descendre à la ville.
Les « mouvements identitaires indigènes » ont exactement la même logique que les « mouvements identitaires des migrants ». Ils ne font que reprendre au vol le discours postmoderne qui veut que chacun soit « fier » de ce qu’il est, ce qui permet très commodément de le maintenir à sa place. Hier, les « classes moyennes » se sentaient coupables que les petits indiens n’aillent pas à la même école que les petits blancs. Maintenant, au contraire, on en est fier, puisque cela leur permet de « sauvegarder leur culture »…
[Car l’autochtone n’est-il pas légitime à défendre sa culture? Ou bien lui faut-il admettre qu’il est le perdant et devenir à l’image de son conquérant?]
Mais l’autochtone veut-il « défendre sa culture » ? Veut-il avoir recours au chaman plutôt qu’au médecin ? A la poudre de perlimpinpin plutôt qu’au vaccin ? A la torche plutôt qu’à l’électricité ? Parce que, encore une fois, une culture n’est pas séparable de sa base matérielle. Chez nous aussi la révolution industrielle a détruit la « culture » des paysans. Nous sommes-nous posés la question de savoir s’il fallait laisser nos paysans continuer à vivre comme au XVIIIème siècle par respect pour leur « culture » ? Non, bien sur que non. Nous avons essayé de préserver leur mode de vie dans les musées, pour l’édification des générations futures, et nous avons installé chez eux l’électricité, l’école, l’eau courante, la pharmacie et l’hôpital.
Aucune culture n’est figée, aucune ne peut être préservée pour en faire des conserves. Elles sont toutes engagées dans une dynamique d’évolution. A supposer même que les chrétiens d’orient restent chrétiens, ils ne seront pas chrétiens comme l’étaient leurs grands parents.
[On ne peut que constater que même les régimes laïcs arabes n’ont pas vraiment réussi à faire accepter à la majorité musulmane que le christianisme oriental soit intégré à la trame nationale.]
Je ne sais pas si les chrétiens ont fait l’effort d’assimilation…
[Vous avez souligné les coups portés par l’Occident à ces régimes, et je suis d’accord avec vous. Mais ne sous-estimez pas les faiblesses intrinsèques de ces régimes: les baasistes syriens et irakiens ont aussi pratiqué une politique contradictoire, en alliant un discours national unitaire et une politique clientéliste jouant la carte communautaire.]
On ne se défait pas de son passé en un jour. Mais l’effort fut énorme. Il faut aussi tenir compte du fait que ces régimes ont été assez rapidement agressés par l’occident mais aussi par leurs voisins arabes, et que lorsqu’une nation – même laïque – est menacée elle tend à faire appel aux sentiments religieux ou communautaires. L’exemple du statut de l’orthodoxie en URSS pendant la deuxième guerre mondiale est un bon exemple… mais aussi l’utilisation des reliques de Sainte Geneviève en aout 1940 !
[La question s’est d’ailleurs toujours posé, dès les premiers nationalistes arabes (dont certains étaient chrétiens): que faire de l’islam? Cette question n’a jamais été vraiment résolue, tant l’identité islamique et l’identité arabe sont indissolublement liées, alors que les nations occidentales, avec la Grèce et Rome, ont toujours pu puiser à des sources pré-chrétiennes. La langue et la culture arabes se sont répandues avec l’islam. C’est pourquoi le rapport entre arabité et islamité est d’une nature particulière.]
Je vous accorde ce point. Le fait que le christianisme soit né comme religion minoritaire dans le contexte greco-latin de séparation du civil et du religieux lui donne une place à part. Les nationalistes arabes se sont trouvés dans une situation impossible : le seul droit dans lequel ils pouvaient puiser était le droit islamique, puisqu’il n’existait aucune autre source de droit qui ne soit associée au colonisateur…
[Pourquoi les musulmans changeraient-ils leur logique? Ils sont après tout en droit de considérer que l’identité entre la loi civile et la loi religieuse est une bonne chose.]
Ils en ont le droit, mais la réalité est contre eux. L’identité entre la loi civile et la loi religieuse rend très difficile l’évolution du droit et son adaptation aux évolutions technologiques, sociales, économiques. C’est la pression économique qui force inexorablement le monde islamique à séparer le civil et le religieux. Et le raidissement que nous observons aujourd’hui peut être interprété comme une réaction désespérée, un combat d’arrière garde contre cette mutation inéluctable.
[« Par exemple, nous avons intérêt à soutenir le chiisme plutôt que le sunnisme. » J’aurais tendance à être d’accord avec vous, mais je sens que ce n’est pas pour les mêmes raisons. Pourriez-vous préciser votre pensée? Après tout, le chiisme a produit le régime iranien, intégriste et violemment anti-occidental.]
Mais en même temps, c’est l’un des rares pays musulmans où il existe une véritable société civile, des institutions fondées sur la volonté – même si ce n’est pas la souveraineté – du peuple. Le chiisme, parce qu’il a un clergé organisé et hiérarchisé, se place dans une logique bien plus proche de celle de l’église catholique que le sunnisme.
[Votre idée selon laquelle on peut s’identifier à des gens qui ne nous ressemblent pas ne peut s’appliquer à mon avis qu’à une petite minorité cultivée. La plupart des gens ont besoin de s’identifier à des ancêtres qui leur ressemblent, parce que c’est humain, et je ne crois pas, contrairement à vous, que ce soit un mal.]
Plus qu’un mal, je dirais que c’est un appauvrissement.
[Mais imaginer qu’une France “brown” dans laquelle les noms de famille seraient pour moitié à consonance arabe ou subsaharienne puisse se reconnaître dans Philippe Auguste, François 1er et Napoléon…]
Vous voulez dire Napoleone Buonaparte ? Pas très français, comme nom, tout ça… et pourtant les petits écoliers alsaciens ou bretons se reconnaissent en lui. Ou passe pour vous la limite « ethnique » à partir de laquelle on n’arrive plus à s’identifier ?
[Seulement, il ne faut pas généraliser. On ne peut pas dire “nos grands-mères étaient heureuses” ou “nos grands-mères étaient malheureuses”.]
Notez bien que ce n’est pas ce que j’ai dit. C’est Nana85 qui a postulé que nos grand-mères étaient toutes malheureuses du fait du statut de la femme à cette époque. Moi, je me borne à constater que ce statut n’a pas empêché MA grand-mère d’être heureuse. Et j’ai tendance à en déduire que le bonheur ou le malheur n’est pas tant une question de statut. Certaines femmes tombaient sur des maris volages, violents ou alcooliques, et certains hommes sur des mégères tout aussi violentes, volages et portées sur la bouteille. Les uns et les autres étaient malheureux. C’était vrai alors, et c’est vrai aujourd’hui.
@nationaliste-ethniciste,
> Cette question n’a jamais été vraiment résolue, tant l’identité islamique et l’identité arabe sont indissolublement liées, alors que les nations occidentales, avec la Grèce et Rome, ont toujours pu puiser à des sources pré-chrétiennes.
Je trouve intéressant que vous mentionniez ces sources pré-chrétiennes car, justement, les paganismes antiques ont été assimilés par le christianisme, et cela ne s’est pas forcément fait sans pression ni violence. Vous semblez reprocher à l’islam d’avoir fait aux chrétiens d’orient ce que le christianisme a fait aux païens d’occident.
@ nationaliste-ethniciste et Descartes
Bonsoir,
(Certaines femmes tombaient sur des maris volages, violents ou alcooliques, et certains hommes sur des mégères tout aussi violentes, volages et portées sur la bouteille. Les uns et les autres étaient malheureux. C’était vrai alors, et c’est vrai aujourd’hui.)
Quelle qualité d’échanges ! ! ! Merci à vous deux de nous faire partager ce qui fût en son temps des échanges épistolaires inaccessibles au commun des mortels. Internet est tout de même un plus considérable pour l’acquisition d’une culture nouvelle ou l’enrichissement de sa propre culture.
Petite plaisanterie pour détendre les zygomatiques – je tente d’assurer un service minimum du sourire – je dirais qu’entre Nana85 plus quelques autres “mégères” et vous, Descartes, ce sont des scènes de ménage et qu’entre vous et nationaliste-ethniciste, ce sont des scènes de méninges. Petite différence de genre. “Rien ne se perd, tout se transforme” .
@ Descartes et nationaliste-ethniciste
Je me permets d’intervenir dans votre conversation si vous me le permettez, je trouve ces sujets particulièrement passionnants.
[En d’autres termes, la seule manière de préserver les « cultures indigènes », c’est leur refuser les bénéfices de la médecine et de l’agriculture moderne. Avons-nous le droit de faire cela ?]
Je partage votre position Descartes. A ce titre j’ai toujours été très mal à l’aise avec le discours en vogue dans les milieux bobos sur les « peuples premiers » d’Amérique du sud ou d’ailleurs qu’il conviendrait de préserver de l’influence néfaste de la civilisation urbaine (bouh cette affreuse civilisation où on n’a pas froid l’hiver, où on vit 80 ans et où on peut aller au restaurant, au cinéma ou au musée quand on a fini son travail) afin de conserver leur mode de vie. Que dirions-nous si au milieu de la France métropolitaine on avait des peuplades – en forêt de Fontainebleau par exemple – qui vivaient selon un mode de vie traditionnel, avec 30 ans d’espérance de vie et sans savoir lire ni parler le français ? Pour ma part je trouverais urgent de les scolariser, de les soigner et de chercher à les intégrer à la collectivité, pas de s’assurer qu’ils restent au pré-néolithique juste pour qu’on puisse de temps en temps passer sur France 2 des reportages paternalistes qui flattent la fibre différentialiste des classes moyennes…
J’y retrouve d’ailleurs indirectement la question de la colonisation et de la légitimité de la « mission civilisatrice » dont je pense que j’aurais été à l’époque l’un des tenants. Nonobstant les injustices évidentes du système colonial, celui-ci me paraît avoir constitué malgré tout en Afrique subsaharienne française un progrès civilisationnel considérable par rapport à la chefferie traditionnelle. On dit beaucoup que la colonisation a « détruit les cultures locales » mais il faut imaginer la violence du choc qu’aurait constitué pour les sociétés africaines l’insertion dans la mondialisation s’il n’y avait même pas eu ce « sas » très imparfait mais qui a eu le mérite d’exister…
[Chez nous aussi la révolution industrielle a détruit la « culture » des paysans. Nous sommes-nous posés la question de savoir s’il fallait laisser nos paysans continuer à vivre comme au XVIIIème siècle par respect pour leur « culture » ?]
J’ai l’impression que notre époque a une vision muséale de la culture et est obsédée par les folklores et les « petites » identités. Dans l’Histoire ce type de culture n’a pas cessé de changer et de disparaître au fur et à mesure de l’évolution des sociétés et c’est dans l’ordre des choses. Ce qui compte c’est que l’humanité, et la Nation, conserve et transmette la partie intemporelle de sa culture, celle qui parle aux hommes de toutes les époques notamment parce que c’est d’abord cela qui fait des Français les héritiers de leurs ascendants du Grand Siècle, l’œuvre de Bossuet plus que les coutumes paysannes de l’époque qui ont naturellement disparu en devenant inadaptées à la société. Or l’effacement de notre héritage humaniste, via l’école, et la perte de contenu politique de l’identité de la France – avec la perte de substance de la souveraineté dans le cadre de l’UE – conduisent à survaloriser les folklores. Je n’ai pas d’hostilités particulière envers ceux-ci mais à mon avis il faut comprendre qu’ils servent aux adversaires de la République pour saper le lien national et nous ramener à des « petites patries » sans grandeur…et sans République.
[On ne se défait pas de son passé en un jour. Mais l’effort fut énorme. Il faut aussi tenir compte du fait que ces régimes ont été assez rapidement agressés par l’occident mais aussi par leurs voisins arabes, et que lorsqu’une nation – même laïque – est menacée elle tend à faire appel aux sentiments religieux ou communautaires.]
Sur ce plan je suis plutôt d’accord avec nationaliste-ethniciste, j’ai l’impression que vous idéalisez un peu les régimes laïques baasistes Descartes. Certes l’Occident ne les a pas beaucoup aidé – et encore cela dépend beaucoup des pays, l’Irak n’a pas été mal servi par la France – mais à mon sens ceux-ci ont d’abord été victimes de leurs propres tares, les quelques interventions occidentales n’ont pas joué un rôle majeur dans leur échec. D’ailleurs pour Suez il me semble que c’est dans l’autre sens que les choses se sont passées et que c’est notamment parce que Nasser soutenait le FLN avant l’expédition que la France a choisi d’y participer.
Le clientélisme communautaire, malgré les discours, a été au cœur des régimes arabes laïques. C’est particulièrement clair en Syrie ou les Al-Assad ont repris la bonne vieille technique de la puissance mandataire en se rendant indispensable aux communautés minoritaires (alaouites, druzes, chrétiens) au détriment de la majorité sunnite. C’est aussi le cas en Irak, si les chrétiens étaient bien représentés dans le régime de Saddam Hussein, les chiites étaient marginalisés, comme encore une fois avaient opérés à la fois les Ottomans et les Britanniques.
En Egypte enfin, outre l’incapacité totale de Nasser à mener sérieusement le projet de république arabe unie de façon à en faire donner une impression chez les Syriens que celle d’un impérialisme égyptien et son « Vietnam yémenite » c’est Sadate qui s’est très nettement rapprochés des islamistes dès la fin des années 1960 considérant que le projet laïque n’était pas suffisant pour servir de base à la nation égyptienne.
Et c’est l’Algérie qui a décidé toute seule d’arabiser à marche forcée son enseignement dans un but identitaire et qui pour se faire a eu massivement recours à des enseignants formés par les Frères musulmans qui ont répandu une vision rétrograde de l’Islam qui a eu sa part dans le déclenchement de la guerre civile des années 1990. Enfin je ne parle même pas des divisions au sein du mouvement baasiste et de l’hostilité – pour ne pas dire haine – entre baas syrien et baas irakien.
Je pense qu’il ne faut pas être « victimiste » là non plus, reconnaissons qu’ils ont tout raté comme des grands, même si cela peut se comprendre dans la mesure où la tâche était infiniment difficile, les pays arabes n’ayant plus de cadre politique institutionnel qui leur soit propre depuis des siècles.
[« Par exemple, nous avons intérêt à soutenir le chiisme plutôt que le sunnisme. »]
Je partage votre sympathie pour le peuple iranien qui sur beaucoup de points me semble bien plus proche de nous paradoxalement que la plupart des peuples arabes – et les échos de ceux de mes amis qui ont eu l’occasion de se rendre à la fois dans le monde arabe et en Iran vont dans ce sens. Cependant concernant la politique étrangère de la France je ne suis pas sûr ni qu’adopter une telle grille de lecture soit la bonne solution ni qu’en renversement de nos alliances en faveur d’un « axe chiite » soit dans notre intérêt. Déjà la division religieuse chiites/sunnites qui prend de plus en plus d’importance aujourd’hui n’a pas toujours eu autant de poids et elle pose désormais de gros problèmes pour la stabilité des pays concernés, ce qui ne sert pas nos intérêts : qui veut d’un redécoupage anarchique des frontières arabes suivant des frontières communautaires ?
Ensuite, en supposant que la fracture religieuse actuelle continue à s’élargir ce qui semble malheureusement très plausible, traditionnellement les « zones d’intérêt » de la France dans le monde musulman sont majoritairement sunnites. Si on veut renforcer notre influence dans cette région on ne peut donc pas réellement « soutenir le chiisme ».
[Vous voulez dire Napoleone Buonaparte ? Pas très français, comme nom, tout ça… et pourtant les petits écoliers alsaciens ou bretons se reconnaissent en lui.]
J’ai toujours trouvé ça magnifique que l’homme que la majorité des Français reconnaissent comme le plus grand de nos hommes illustres ait toujours parlé le français avec un accent à couper au couteau ET que personne ne le sache. Cela résume bien la force de l’idéal français à mon avis, et je pense que si on offre, concomitamment à la relance de l’effort d’assimilation, des modèles qui en vaillent la peine aux jeunes générations de Français ceux-ci seront tout à fait capables de s’y reconnaître quelles que soient leurs origines. Après tout admirer Guillaume de Nogaret par exemple c’est prendre pour référence quelqu’un qui est extrêmement éloigné de nous et de la société dans laquelle nous vivons, sa « différence culturelle » avec moi est bien plus grande que celle entre moi et un jeune français d’origine maghrébine par exemple.
Jacques Bainville décrit magnifiquement dans les premières pages de son Histoire de France comment la France est une construction artificielle – au sens positif du mot évidemment, construite de mains d’homme – qui aurait pu ne pas être. Il explique qu’on ne saurait lui trouver de liant ethnique ou essentiel et qu’elle est « l’œuvre de l’intelligence et de la volonté ». Et cela me rend assez optimiste sur notre capacité à transmettre l’attachement à notre histoire aux jeunes issus de l’immigration à condition que l’Etat s’y essaye vraiment. Après tout notre histoire est une épopée extraordinaire, bien plus romanesque que les meilleurs cycles de fantasy…
@ Descartes,
“Les « mouvements identitaires indigènes » ont exactement la même logique que les « mouvements identitaires des migrants ». Ils ne font que reprendre au vol le discours postmoderne qui veut que chacun soit « fier » de ce qu’il est, ce qui permet très commodément de le maintenir à sa place”
Je n’avais pas vu les choses sous cet angle, mais j’admets que votre argument tient la route. Votre logique matérialiste a, je vous le concède, un remarquable pouvoir explicatif.
“A supposer même que les chrétiens d’orient restent chrétiens, ils ne seront pas chrétiens comme l’étaient leurs grands parents.”
Bien sûr, mais on s’honore je crois à préserver un héritage, surtout quand il est millénaire. D’autant que le christianisme en Orient n’a jamais été un frein à la modernité, je vais y revenir.
“Je ne sais pas si les chrétiens ont fait l’effort d’assimilation…”
J’ai eu l’occasion dans mes études de travailler une année sur le Moyen Orient au XX° siècle, et je pense pouvoir vous apporter quelques éléments de réponse. D’abord, les chrétiens d’Orient ont été plutôt un vecteur de l’influence occidentale dans le monde arabe. Leurs élites, les premières, ont subi l’influence de la modernité occidentale. Ensuite, je ne crois pas qu’on puisse poser la question en terme d’ “assimilation” des chrétiens, car les Arabes chrétiens ont largement participé à l’élaboration du nationalisme arabe. Quelques exemples: l’un des grands penseurs et fondateurs du parti panarabe Baas est Michel Aflak, un chrétien orthodoxe (peut-être converti à l’islam à la fin de sa vie); le Parti social nationaliste syrien (partisan d’une “grande Syrie” couvrant l’ensemble du Croissant fertile) a pour fondateur Antoun Saadé, un autre grec-orthodoxe; Georges Habache, fondateur du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), est également un orthodoxe, qui a appartenu au Mouvement nationaliste arabe fondé par un autre Arabe orthodoxe, Constantin Zureik. Je vous cite les exemples les plus connus, on pourrait en trouver d’autres. Ce n’est pas un hasard je crois, que les chrétiens aient été relativement nombreux parmi les militants nationalistes arabes. Il ne faut pas être injuste avec les chrétiens d’Orient: loin de rester en marge des mouvements nationaux arabes au Moyen Orient (qu’ils soient panarabes ou plus locaux), les chrétiens ont largement participé à l’élaboration d’une pensée nationale dans le monde arabe. Bien sûr, on ne saurait généraliser à outrance: il y a, au fin fond de la Syrie ou de l’Irak, des villages chrétiens qui sans doute ont gardé la mentalité d’il y a un ou deux siècles. Mais il en est de même pour les musulmans. Les élites chrétiennes urbanisées ont plutôt joué la carte nationale. Il n’y a qu’au Liban que, vu le poids démographique des chrétiens, surtout maronites, s’est développé une forme de “nationalisme chrétien”.
Si j’osais une comparaison, je vous dirais même que les chrétiens d’Orient ont un peu joué le rôle des protestants en France, qui ont largement participé à l’élaboration de l’identité laïque et républicaine de la France, parce qu’ils y avaient intérêt et parce qu’ils étaient davantage aptes à penser une identité française détachée du catholicisme. De la même façon, les chrétiens d’Orient étaient davantage portés à penser une identité arabe détachée de l’islam, une identité arabe plus “laïque”. Les Arabes chrétiens nationalistes ont quand même buté sur cette question de l’islam, ne serait-ce que pour des raisons linguistiques: les textes sacrés musulmans ont fixé l’arabe classique, or la langue est l’un des fondements de l’unité nationale pour les nationalistes arabes, surtout les baasistes. Mais les chrétiens ont après tout tiré avantage de l’instauration des régimes à tendance laïque, qui les sortaient du statut peu enviable de dhimmis, et leur offraient (ou auraient dû leur offrir) de meilleures perspectives d’intégration politique et économique, tout comme en France juifs et protestants ont soutenu l’instauration de la République laïque.
J’attire d’ailleurs votre attention sur le fait que, globalement, Bachar el-Assad peut compter jusqu’à aujourd’hui sur la loyauté de la majorité de ses chrétiens… C’est je pense un signe. Je pousserai même la provocation jusqu’à inverser les données du problème: est-ce que ce ne sont pas les musulmans qui ont finalement eu le plus de mal à assimiler les identités nationales du monde arabe? Après tout les catholiques français, issus de la communauté religieuse majoritaire et historiquement dominante, ont été les plus rétifs à accepter la République et l’identité nationale qu’elle proposait… Mais la société française était plus profondément sécularisée (et connaissait déjà une poussée de l’athéisme), y compris dans certaines campagnes, que les sociétés arabes.
“mais aussi l’utilisation des reliques de Sainte Geneviève en aout 1940 !”
Je ne connaissais pas cet épisode, qui est en effet révélateur.
“Ou passe pour vous la limite « ethnique » à partir de laquelle on n’arrive plus à s’identifier ?”
La limite est géographique: dès lors qu’une terre est française, les autochtones qui y vivent ont des noms français. Les Corses ont des noms à consonance italienne, les Alsaciens à consonance germanique, mais la Corse et l’Alsace sont devenues des terres françaises et le sont restées malgré les vicissitudes de l’histoire. Donc les noms alsaciens et corses sont devenus des noms “à consonance française”. Il ne vous aura pas échappé je pense que le Maghreb et l’Afrique subsaharienne ne sont plus des terres françaises… Et la probabilité pour qu’ils le redeviennent dans un avenir proche paraît faible.
“Notez bien que ce n’est pas ce que j’ai dit.”
Je le sais. Mon message s’adressait à l’ensemble des commentateurs, ce n’était pas un reproche vous visant. Je ne doute pas que vos grands-parents ont été unis et heureux.
@ Marcailloux
[« Certaines femmes tombaient sur des maris volages, violents ou alcooliques, et certains hommes sur des mégères tout aussi violentes, volages et portées sur la bouteille. Les uns et les autres étaient malheureux. C’était vrai alors, et c’est vrai aujourd’hui ». Quelle qualité d’échanges ! ! ! Merci à vous deux de nous faire partager ce qui fût en son temps des échanges épistolaires inaccessibles au commun des mortels.]
Je me demande si vos paroles n’ont pas dépassé votre pensée. Si ce n’est pas le cas, je trouve ce commentaire particulièrement désagréable.
@ Antoine,
“Vous semblez reprocher à l’islam d’avoir fait aux chrétiens d’orient ce que le christianisme a fait aux païens d’occident.”
Oui, mais il y a quelques différences. L’Occident chrétien a toujours reconnu sa dette envers Rome, le latin est resté la langue de culture, Charlemagne et les rois de France plus tard se présentent comme des successeurs des empereurs romains. Les musulmans, à ma connaissance, ne considèrent pas vraiment le christianisme oriental comme une source de leur culture (ce qu’il est pourtant, Mahomet ayant été influencé par le judaïsme et le christianisme). L’araméen et le copte sont des langues mortes, dont l’usage ne persiste que dans des rites… chrétiens. En Occident, le christianisme s’est latinisé, romanisé, en Orient, l’islam a imposé la langue arabe et effacé les langues préexistantes.
Pour avoir beaucoup lu sur la question, je peux vous dire que les conversions forcées et les persécutions qui suivent les édits de Théodose à la fin du IV° siècle ne sont pas à l’honneur du christianisme. Mais cela se passait au V° siècle, il y a près de 1 600 ans. A votre avis, devons-nous trouver normal que les musulmans au XXI° siècle se livrent aux mêmes types de violence que les chrétiens d’il y a 1 500 ans? La réflexion humaine n’a-t-elle pas progressé depuis? Que les musulmans aient dans le passé adopté la même attitude intolérante que les chrétiens d’Occident, je ne leur en fais pas grief. Mais l’intolérance actuelle n’est pas acceptable, surtout qu’on exige en parallèle des Occidentaux qu’ils soient tolérants envers les musulmans et leurs provocations…
Pour que la paix règne autour de la Méditerranée et que les musulmans soient acceptés en Occident, il faut aussi que les chrétiens bénéficient de la liberté de culte et de la citoyenneté pleine et entière en terre d’islam. Pourquoi les efforts seraient-ils à sens unique?
@ Carnot
[Je me permets d’intervenir dans votre conversation si vous me le permettez, je trouve ces sujets particulièrement passionnants.]
Mais bien sur que je le permets !!! Ce lieu est là pour ça !
[Je partage votre position Descartes. A ce titre j’ai toujours été très mal à l’aise avec le discours en vogue dans les milieux bobos sur les « peuples premiers » d’Amérique du sud ou d’ailleurs qu’il conviendrait de préserver de l’influence néfaste de la civilisation urbaine (…)]
Je pense qu’on retrouve dans cette idéologie ce que j’appelle l’effet Peter Pan. Vous savez, le personnage du livre de J.M. Barrie (auquel cinéma n’a pas rendu justice) de l’enfant qui ne veut pas grandir. Pour des raisons que je ne suis pas sur de bien comprendre, le rêve des classes moyennes est un monde d’enfants, à la rigueur d’adolescents. C’est à vous dégouter d’être adulte. Tout ça repose sur une idéalisation des enfants, dont on fait des êtres purs, libres des vices comme le racisme, l’envie, l’avarice et autres. Il suffit bien sur de regarder une cour de récréation pour constater combien cette vision diffère de la réalité, mais il n’y a rien à faire. Et de la même manière qu’on est fasciné par l’enfance, on l’est par les « peuples premiers » parce que d’une certaine manière ils représentent une sorte d’enfance de l’espèce humaine, un monde innocent qui serait exempt de tous les vices qui viennent avec la civilisation. C’est le « bon sauvage » de Rousseau.
Le problème de cette idéologie, c’est qu’elle vise un monde statique. Elle veut oublier que l’enfance est un état temporaire et oh combien éphémère, pour en faire une essence. Combien de fois ais-je entendu cette injonction de « garder son âme d’enfant »… comme si on pouvait par on ne sait pas quelle magie rester un enfant dans le corps d’un adulte. De la même manière, l’état d’une culture à un moment donné est-il l’essence d’un peuple ou un état temporaire ? Devrions-nous revenir au mode de vie des Gaulois pour retrouver notre véritable « culture » ? Pourquoi célébrons nous la Révolution française, qui a englouti une manière de vivre pour laisser la place à une autre, et en même temps regrettons nous que le contact avec notre civilisation engloutisse le mode de vie des « peuples premiers » ?
Ce n’est pas par hasard si ceux qui veulent que les « peuples premiers » restent identiques à eux-mêmes pour les siècles de siècles, sans changer, sont ceux qui critiquent chez nous le progrès. Au fond, leur idéal est une société statique, ou rien ne change, ou chacun a sa place et y reste.
[On dit beaucoup que la colonisation a « détruit les cultures locales » mais il faut imaginer la violence du choc qu’aurait constitué pour les sociétés africaines l’insertion dans la mondialisation s’il n’y avait même pas eu ce « sas » très imparfait mais qui a eu le mérite d’exister…]
Même sans ça, il faut se demander ce qu’il y a derrière l’idée de « destruction d’une culture ». La Révolution française a-t-elle « détruit une culture » ? La France de 1820 était aussi différente de celle de 1780 que l’Algérie de 1820 pouvait l’être de celle de 1850. Une culture n’est pas une chose figée, elle se détruit et se reconstruit en permanence. Ce qui est intéressant dans cette idée de « destruction des cultures locales » est qu’elle classe en fait les cultures en deux groupes : d’un côté, des cultures « figées », celles qui sont dans une logique de répétition au point qu’elles sont devenues des essences, et celles qui seraient « dynamiques » (la notre, en fait) qui ont le pouvoir non seulement de reconstruire en permanence, mais aussi de modifier les autres…
[J’ai l’impression que notre époque a une vision muséale de la culture et est obsédée par les folklores et les « petites » identités.]
Mais curieusement, cette vision muséale ne s’applique qu’aux « petites » cultures. Personne ne considère important de préserver la « culture des trente glorieuses » ou « la culture de la belle époque ». Il n’y a que les cultures « figées » qui reçoivent ce type de traitement.
[Dans l’Histoire ce type de culture n’a pas cessé de changer et de disparaître au fur et à mesure de l’évolution des sociétés et c’est dans l’ordre des choses. Ce qui compte c’est que l’humanité, et la Nation, conserve et transmette la partie intemporelle de sa culture, celle qui parle aux hommes de toutes les époques notamment parce que c’est d’abord cela qui fait des Français les héritiers de leurs ascendants du Grand Siècle, l’œuvre de Bossuet plus que les coutumes paysannes de l’époque qui ont naturellement disparu en devenant inadaptées à la société. Or l’effacement de notre héritage humaniste, via l’école, et la perte de contenu politique de l’identité de la France – avec la perte de substance de la souveraineté dans le cadre de l’UE – conduisent à survaloriser les folklores. Je n’ai pas d’hostilités particulière envers ceux-ci mais à mon avis il faut comprendre qu’ils servent aux adversaires de la République pour saper le lien national et nous ramener à des « petites patries » sans grandeur…et sans République.]
Tout à fait d’accord. Une « culture » n’est jamais détruite, parce que la culture est un fait cumulatif. Picasso ne remplace pas Rembrandt, Einstein ne remplace pas Newton, Armstrong ne remplace pas Mozart. Ils en sont les continuateurs. C’est cette continuité, cette filiation qui constitue en fait la « culture », et non les pratiques ou les modes d’un instant donné.
[Sur ce plan je suis plutôt d’accord avec nationaliste-ethniciste, j’ai l’impression que vous idéalisez un peu les régimes laïques baasistes Descartes. Certes l’Occident ne les a pas beaucoup aidé – et encore cela dépend beaucoup des pays, l’Irak n’a pas été mal servi par la France – mais à mon sens ceux-ci ont d’abord été victimes de leurs propres tares, les quelques interventions occidentales n’ont pas joué un rôle majeur dans leur échec.]
Je ne suis pas aussi persuadé que vous. D’abord, vous vous concentrez sur les régimes laïques qui ont réussi à survivre – Syrie, Irak. Mais que me diriez-vous de Mossadegh, par exemple, qui ouvrait la voie à un régime laïque et moderniste en Iran ? Ou à Taraki, qui faisait la même chose en Afghanistan ? Le problème n’est pas que l’occident « ne les ai pas aidé » : l’occident les a vigoureusement combattus. Militairement quelquefois – directement ou à travers leur « gendarme » dans la région, Israel. En les isolant diplomatiquement et économiquement. En aidant massivement les régimes les plus rétrogrades et les plus réactionnaires de la région – c’est-à-dire, ceux qui avaient le plus grand intérêt à l’échec des régimes laïcs.
D’autre part, on m’a accusé de beaucoup de choses, mais rarement d’idéalisme. Les régimes laïcs, qu’ils soient baassistes ou non, sont les héritiers d’une histoire. Pas plus que chez nous, ils n’avaient pas le pouvoir de faire table rase du passé. Ma vision est que dans le faisceau de contraintes qui était le leur, ils n’ont pas si mal réussi que ça. Et que nous aurions pu faire beaucoup plus pour réduire ces contraintes. En réponse aux tentatives de modernisation et d’occidentalisation, l’Occident leur a montré son plus mauvais visage… Parmi les puissances occidentales, il n’y eut que la France gaullienne – et jusqu’à un certain point ses successeurs – est la seule qui ait essayé d’avoir une véritable politique arabe. La construction d’Osirak et le soutien au programme nucléaire Iranien sont des bons exemples.
[D’ailleurs pour Suez il me semble que c’est dans l’autre sens que les choses se sont passées et que c’est notamment parce que Nasser soutenait le FLN avant l’expédition que la France a choisi d’y participer.]
C’est bien possible. Mais c’était idiot quand même. Allez expliquer aux citoyens Egyptiens que la France s’oppose à la nationalisation du canal de Suez et prétend le reprendre en réponse au soutien au FLN…
[Le clientélisme communautaire, malgré les discours, a été au cœur des régimes arabes laïques. C’est particulièrement clair en Syrie ou les Al-Assad ont repris la bonne vieille technique de la puissance mandataire en se rendant indispensable aux communautés minoritaires (alaouites, druzes, chrétiens) au détriment de la majorité sunnite. C’est aussi le cas en Irak, si les chrétiens étaient bien représentés dans le régime de Saddam Hussein, les chiites étaient marginalisés, comme encore une fois avaient opérés à la fois les Ottomans et les Britanniques.]
La réalité a ses contraintes. L’empire ottoman fonctionnait sur une base communautaire et avec la logique du « statut personnel ». Pensez-vous vraiment qu’en 1945 on pouvait effacer d’un revers de manche un passé, un droit, une organisation sociale pluriséculaire ? Qu’un gouvernement qui se serait embarqué dans cette logique aurait pu tenir face aux menaces extérieures ? Combien de temps il a fallu à la France pour en finir avec les « statuts personnels » ? Ce fut un travail de cinq siècles.
Je pense qu’il faut être réaliste. Critiquer un régime parce qu’il ne fait pas ce qui provoquerait sa chute n’est pas très logique. Est-ce que les régimes laïcs pouvaient compter sur l’appui des majorités sunnites pour remplacer la Charia par le Code civil ? Non. A partir de là, soit on renonce au Code civil en attendant d’avoir convaincu la majorité de l’intérêt de cette séparation, soit on s’appuie sur les minorités et on s’efforce de les rendre agissantes. En France aussi on a eu ce problème : pourquoi croyez-vous que les femmes n’ont voté qu’en 1945 ? Croyez-vous que si elles avaient voté en 1900 on aurait eu la séparation des églises et de l’Etat ?
[Et c’est l’Algérie qui a décidé toute seule d’arabiser à marche forcée son enseignement dans un but identitaire (…)]
De l’arabiser, mais non de l’islamiser. Les erreurs de la République algérienne montrent les limites de la vision petite-bourgeoise de l’anticolonialisme qui sera ensuite reprise par les soixante-huitards. Pour les algériens, comme pour beaucoup d’autres anticolonialistes de ce temps, le combat contre le colonialisme impliquait d’effacer son œuvre, de revenir à une « essence nationale » dont la colonisation aurait interrompu la course. En Amérique Latine, cela passait par la glorification de l’indien, en Afrique par le retour à la « négritude ». Le plus drôle dans le cas des algériens, c’est qu’ils aient choisi contre le colonialisme français d’essentialiser un autre colonialisme, le colonialisme arabe. Car les arabes, eux aussi, sont arrivés en Algérie en colonisateurs…
[Je pense qu’il ne faut pas être « victimiste » là non plus, reconnaissons qu’ils ont tout raté comme des grands,]
Je ne crois pas qu’ils aient « tout » raté. L’histoire est aussi faite d’essais qui échouent en leur temps mais qui construisent des références pour l’avenir.
[Je partage votre sympathie pour le peuple iranien qui sur beaucoup de points me semble bien plus proche de nous paradoxalement que la plupart des peuples arabes – et les échos de ceux de mes amis qui ont eu l’occasion de se rendre à la fois dans le monde arabe et en Iran vont dans ce sens. Cependant concernant la politique étrangère de la France je ne suis pas sûr ni qu’adopter une telle grille de lecture soit la bonne solution ni qu’en renversement de nos alliances en faveur d’un « axe chiite » soit dans notre intérêt. Déjà la division religieuse chiites/sunnites qui prend de plus en plus d’importance aujourd’hui n’a pas toujours eu autant de poids et elle pose désormais de gros problèmes pour la stabilité des pays concernés, ce qui ne sert pas nos intérêts : qui veut d’un redécoupage anarchique des frontières arabes suivant des frontières communautaires ?]
La question n’est pas tant ce que nous « voulons » mais ce que nous pouvons avoir. La logique de partition des états nationaux sur des critères ethno-religieux pour donner des micro-états homogènes est un peu la logique du temps. Elle a été encouragée par l’ensemble du camp occidental à la notable exception de la France. Tout le monde ou presque a fêté la partition de l’URSS. Les allemands ont œuvré pour encourager la partition de la Yougoslavie et de la Tchecoslovaquie. Et ne parlons pas des aventures américaines en Irak, qui ont abouti à une partition de fait du pays. Et ne parlons même pas de la Syrie et la Libye.
Depuis quelques années, la politique étrangère de la France s’est alignée avec celle des américains, qui consiste à soutenir les régimes sunnites les plus rétrogrades pour s’en faire des « clients ». Je ne suis pas persuadé que ce positionnement soit le plus payant, ni pour nos intérêts, ni pour ceux des peuples de la région.
[Ensuite, en supposant que la fracture religieuse actuelle continue à s’élargir ce qui semble malheureusement très plausible, traditionnellement les « zones d’intérêt » de la France dans le monde musulman sont majoritairement sunnites. Si on veut renforcer notre influence dans cette région on ne peut donc pas réellement « soutenir le chiisme ».]
Vous voulez dire qu’il faut éviter de faire ami-ami avec des pays qui nous aiment bien de peur de perdre de l’influence dans les pays qui passent leur temps à nous cracher à la gueule au prétexte qu’ils seraient dans notre « zone d’intérêt » ?
[Jacques Bainville décrit magnifiquement dans les premières pages de son Histoire de France comment la France est une construction artificielle – au sens positif du mot évidemment, construite de mains d’homme – qui aurait pu ne pas être. Il explique qu’on ne saurait lui trouver de liant ethnique ou essentiel et qu’elle est « l’œuvre de l’intelligence et de la volonté ». Et cela me rend assez optimiste sur notre capacité à transmettre l’attachement à notre histoire aux jeunes issus de l’immigration à condition que l’Etat s’y essaye vraiment. Après tout notre histoire est une épopée extraordinaire, bien plus romanesque que les meilleurs cycles de fantasy…]
Tout à fait d’accord. C’est ce genre de raisonnement qui fondent mon optimisme, autant qu’une question méthodologique. Cela étant dit, ou trouver aujourd’hui « l’intelligence et la volonté » pour continuer cet œuvre ?
@ nationaliste-ethniciste
[Bien sûr, mais on s’honore je crois à préserver un héritage, surtout quand il est millénaire.]
Oui, mais il faut comprendre que c’est un héritage – i.e. que le véritable propriétaire est mort. Que penseriez-vous d’un égyptien qui se ferait construire une pyramide, et qui demanderait que son corps embaumé y soit déposé avec tous ses biens terrestres, au nom de la « préservation de son héritage » ?
Je comprends qu’on soit triste que le passage du temps modifie les choses qu’on a connues et aimées. Cela fait partie de la tragédie humaine. Mais en même temps, a-t-on le droit de congeler des gens dans le passé pour nous consoler ? Je ne le crois pas. Il faut être capable de préserver la mémoire et le souvenir du passé sans préserver le passé lui-même.
[Je vous cite les exemples les plus connus, on pourrait en trouver d’autres. Ce n’est pas un hasard je crois, que les chrétiens aient été relativement nombreux parmi les militants nationalistes arabes.]
Non, c’est tout à fait normal. L’idée de nation n’est pas une idée universelle. Elle apparaît dans l’Europe du XVIIIème siècle et devient une réalité au cours du XIXème. Que les chrétiens arabes, qui comme vous le dites justement ont joué un rôle de pont entre l’orient et l’occident, aient eu connaissance puis aient repris ces idées n’a rien de surprenant. Mais la vision nationale des figures que vous citez reste une vision très aristocratique. En ce sens, on peut se demander s’il y a eu de la part des chrétiens du moyen orient un effort « d’assimiler » à leur logique les autres populations.
[Si j’osais une comparaison, je vous dirais même que les chrétiens d’Orient ont un peu joué le rôle des protestants en France, qui ont largement participé à l’élaboration de l’identité laïque et républicaine de la France, parce qu’ils y avaient intérêt et parce qu’ils étaient davantage aptes à penser une identité française détachée du catholicisme.]
La comparaison est intéressante, parce qu’on retrouve la même question relative au « séparatisme ». Les protestants de France ont pensé une identité nationale, mais une identité nationale réservée aux protestants. Ils n’ont pas cherche à « assimiler » les catholiques à cette vision. Et réciproquement.
[J’attire d’ailleurs votre attention sur le fait que, globalement, Bachar el-Assad peut compter jusqu’à aujourd’hui sur la loyauté de la majorité de ses chrétiens… C’est je pense un signe.]
Tout à fait. Bachar el-Assad est l’incarnation du principe Hobbesien du Léviathan : aussi mauvais gouvernant soit-il, la « guerre de tous contre tous » est pire. Mieux vaut le monopole de la violence accordé à l’unique, que la violence à la disposition de tous…
[Je pousserai même la provocation jusqu’à inverser les données du problème: est-ce que ce ne sont pas les musulmans qui ont finalement eu le plus de mal à assimiler les identités nationales du monde arabe?]
La question est une fois encore très intéressante. Les chrétiens sont certainement bien mieux préparés à une logique nationale, d’une part parce qu’ils sont héritiers d’une vision de l’Etat qui vient de la romanité, de l’autre parce qu’ils sont plus ouverts aux influences occidentales, là où le concept de nation est né. La pensée islamique est encore régie par une vision tribale et clanique. Je ne crois pas qu’on trouve ailleurs qu’en terre d’Islam un pays dont le nom lui-même soit celui de sa famille régnante, et ou le degré de parenté régit l’accès aux hauts emplois publics.
[« mais aussi l’utilisation des reliques de Sainte Geneviève en aout 1940 ! » Je ne connaissais pas cet épisode, qui est en effet révélateur.]
Peu de gens le connaissent en effet…
[La limite est géographique: dès lors qu’une terre est française, les autochtones qui y vivent ont des noms français. Les Corses ont des noms à consonance italienne, les Alsaciens à consonance germanique, mais la Corse et l’Alsace sont devenues des terres françaises et le sont restées malgré les vicissitudes de l’histoire. Donc les noms alsaciens et corses sont devenus des noms “à consonance française”. Il ne vous aura pas échappé je pense que le Maghreb et l’Afrique subsaharienne ne sont plus des terres françaises… Et la probabilité pour qu’ils le redeviennent dans un avenir proche paraît faible.]
Non, mais Grigny l’est, et j’espère, le demeurera…
@ Descartes,
Bonsoir
(Je me demande si vos paroles n’ont pas dépassé votre pensée. Si ce n’est pas le cas, je trouve ce commentaire particulièrement désagréable.)
Mes paroles n’ont pas dépassé ma pensée pour la simple raison qu’il y a maldonne dont je suis amplement responsable.
Je souhaitai simplement dire le plaisir que j’avais à vous lire dans votre échange avec NE, et pour conclure sur une badinerie, j’ai utilisé la phrase qui comportait le mot “mégère” parce qu’elle me permettait – la phrase – de faire allusion à des comportements que l’on rencontre quelquefois de la part d’un certain genre sur votre blog et qui prêtent à sourire.
Nos relations de près de 6 ans ne vous ont pas accoutumé à une telle manifestation hostile. Et puis l’heure tardive du mot émis altère un peu la lucidité des ainés.
@ Descartes,
“Oui, mais il faut comprendre que c’est un héritage – i.e. que le véritable propriétaire est mort.”
Je ne suis pas d’accord. L’héritage, c’est ce qu’on reçoit de ses parents. On peut le laisser se déliter, mourir, on peut aussi le faire fructifier, l’enrichir, en un mot le faire vivre.
“Que penseriez-vous d’un égyptien qui se ferait construire une pyramide, et qui demanderait que son corps embaumé y soit déposé avec tous ses biens terrestres, au nom de la « préservation de son héritage » ?”
Je trouve votre exemple à la fois mal choisi et intéressant. Mal choisi parce que vous évoquez une coutume liée à une tradition religieuse qui a complètement disparu, qui n’a plus de sens aujourd’hui. Autrement dit, il y a eu rupture dans la tradition. Le christianisme oriental n’est pas tout à fait dans la même situation: certains monastères d’Egypte, du Liban, de Syrie existent depuis mille ou mille cinq cents ans. Les communautés chrétiennes sont autochtones. Intéressant, votre exemple l’est sur un point: il montre que quand une tradition meurt, c’est en général définitif. On ne peut plus la ressusciter sans risquer le ridicule. C’est pourquoi les mouvements qui essaient de refaire vivre le druidisme, le panthéon germanique ou que sais-je encore sont à mon sens voués à l’échec. Il y a des traditions qui son mortes et qu’on ne peut pas réanimer. Au XX° siècle en Iran, quelques nationalistes sont revenus au zoroastrisme, la “vraie” religion perse à leurs yeux. On voit bien que la masse des Iraniens, islamisée depuis belle lurette, est restée étrangère à ce “retour aux sources”.
Il n’en demeure pas moins qu’un peuple doit parfois puiser dans son passé pour préparer son renouveau. Et ce n’est pas nouveau. L’empereur Justinien au VI° siècle prétend restaurer l’empire romain alors qu’il prépare la naissance de la civilisation byzantine. Charlemagne prétend lui aussi restaurer un empire romain alors qu’il crée en fait un monde nouveau. La tradition, c’est qu’au fond toute nouveauté doit d’une certaine façon se présenter comme la restauration d’un état ancien. C’est vrai dans l’art: Palladio comme l’art classique français reprennent les ordres de l’architecture grecque antique. C’est vrai en politique: les révolutionnaires ont puisé aux sources romaines, les députés des Cinq-cents ont remis la toge au goût du jour. Avec mes élèves, j’aime beaucoup étudier le portrait de Napoléon en tenue de sacre par Ingres (1809). Napoléon n’a en rien innové: sa couronne de lauriers et la pourpre viennent des Césars, l’épée et la main de justice sont empruntées aux rois de France, comme le manteau doublé d’hermine, le sceptre est surmonté d’une “nikè” victoire ailée prise aux Grecs. Il est fascinant de voir comment Napoléon, fondateur d’un ordre nouveau par bien des aspects, a su puiser à une forme de tradition syncrétique mêlant Rome et la monarchie médiévale française. De Gaulle lui-même procède à une sorte de restauration, en renouant avec une forme de bonapartisme politique, d’interventionnisme économique et de modernisation du pays, qui n’est pas sans rappeler la politique de Napoléon III, lui-même renouant finalement avec une forme de colbertisme. Je vous avoue que depuis quelques temps, j’ai du mal à voir ce qui lie encore notre nation à cette trame cohérente de l’histoire nationale.
Mon impression est que la tradition catholique est en train de mourir en France. Pas forcément la foi catholique en tant que telle qui survit et probablement survivra chez une minorité de la population. Mais en tant que tradition nationale, le catholicisme “populaire” est en train de mourir. On baptise de moins en moins ses enfants, on se marie moins à l’église. Mes parents m’ont fait baptiser et m’ont envoyé au catéchisme, pas parce qu’ils y croyaient ou qu’ils pratiquaient, mais parce qu’eux-mêmes avaient été baptisés et avaient suivi le catéchisme. Ma communion fut comme un rite de passage, que mes parents avaient connu avant moi, et leurs parents avant eux, et ainsi de suite. Parce que dans la famille, c’était comme ça. Quand le catholicisme comme tradition populaire sera mort, une partie de ce qui fait l’identité de la France disparaîtra. En Italie, où la pratique religieuse a beaucoup baissé, où l’unité s’est faite contre le pape, chaque ville, chaque village continue à fêter le saint local, patron de la communauté. En Espagne, c’est aussi le cas. En Bulgarie, les habitants ne vont pas plus à la messe qu’en France, mais lors des grandes fêtes, on afflue dans les églises pour embrasser les icônes les plus saintes du pays, j’en ai été témoin. La Russie, malgré le communisme et une pratique religieuse très faible (6 à 7 % ai-je lu), se conçoit toujours comme une nation orthodoxe.
Et la France? J’entends parfois certains dire que la France est une “nation laïque”. Cela n’a pas de sens. L’Etat est laïque, la République est laïque, pas le peuple. La laïcité n’est pas une spiritualité, ni une croyance, ce n’est pas une culture. A la limite, un peuple peut être athée, mais pas laïc. Le déclin du catholicisme en France a laissé un vide que rien à mon sens n’est venu comblé… sauf peut-être l’islam dernièrement, pour certains, et je constate, dans mon métier, que les conversions augmentent parmi les Français de souche, même s’il ne faut pas exagérer leur nombre. Nous sommes un vieux pays, mais nous ne savons plus vraiment qui nous sommes, d’où nous venons. Nous n’avons plus vraiment de tradition commune à laquelle nous raccrocher. Je me souviens d’un collègue, en formation, déclarant qu’il faudrait des jours fériés pour les musulmans, qu’il n’est pas normal que seuls les catholiques en aient. Même un professeur d’histoire, en 2016, ne comprend pas la place particulière du catholicisme dans son pays…
“Je comprends qu’on soit triste que le passage du temps modifie les choses qu’on a connues et aimées.”
Il y a une différence entre “modifier” et “détruire”.
“Cela fait partie de la tragédie humaine. Mais en même temps, a-t-on le droit de congeler des gens dans le passé pour nous consoler ? Je ne le crois pas.”
Je suis d’accord. En même temps, ne nous appartient-il pas de décider ce qu’il faut conserver? N’ai-je pas le droit de me battre pour préserver les traditions françaises qui me paraissent belles et utiles? Je ne pense pas qu’on puisse se contenter de savoir que ça a existé. La “mémoire et le souvenir du passé” ne suffisent pas à faire une nation. Il y a des traditions qui disparaissent et c’est normal, vous l’avez rappelé. Il y en a d’autres qu’on doit préserver parce qu’elles font partie des fondements de l’identité nationale. On peut accepter la modernité sans se renier. Le Japon est un pays qui a adopté, de manière assez brutale, la modernité venue d’Occident. Mais les Japonais fêtent toujours la floraison des cerisiers et entretiennent leurs temples.
Par ailleurs, une autre question se pose concernant les chrétiens d’Orient: s’ils disparaissent, cela démontrera l’incapacité des sociétés musulmanes à accepter la présence de minorités religieuses sur leur sol. Or nous parlons de pays qui sont à nos portes. Dès lors, la question de la présence des musulmans dans les pays occidentaux de tradition chrétienne mériteraient d’être posées…
“Non, mais Grigny l’est, et j’espère, le demeurera “
Pour ma part, j’espère surtout que Grigny le redeviendra…
Pour conclure, je vous dirai que je n’aspire pas au monde “statique” que vous évoquez dans votre réponse à Carnot, mais le changement doit s’inscrire dans une continuité. Je trouve que l’on est allé trop loin dans le changement (pour ne pas dire le démantèlement) social, religieux, culturel, ethnique après de Gaulle. La France doit revenir à ses fondamentaux, non point en tentant vainement un illusoire “retour vers le passé”, mais en puisant dans sa tradition nationale les éléments qui lui donneront un second souffle tout en lui permettant de conserver son identité politique, religieuse et culturelle.
@ nationaliste-ethniciste
[« Vous semblez reprocher à l’islam d’avoir fait aux chrétiens d’orient ce que le christianisme a fait aux païens d’occident. » Oui, mais il y a quelques différences. L’Occident chrétien a toujours reconnu sa dette envers Rome, le latin est resté la langue de culture,]
J’ai l’impression qu’Antoine faisait plutôt référence au traitement que le christianisme romain a réservé aux cultes païens des Celtes, des Francs et autres peuples « barbares ». On ne peut pas dire que le christianisme ait été très bienveillant : destruction systématique des lieux de culte ancien, condamnation des pratiques anciennes…
[Pour que la paix règne autour de la Méditerranée et que les musulmans soient acceptés en Occident, il faut aussi que les chrétiens bénéficient de la liberté de culte et de la citoyenneté pleine et entière en terre d’islam. Pourquoi les efforts seraient-ils à sens unique?]
Je ne peux qu’être d’accord avec vous. Mais le monde musulman a encore un très long chemin à parcourir pour incorporer les acquis des Lumières…
@ Marcailloux
[« Je me demande si vos paroles n’ont pas dépassé votre pensée. Si ce n’est pas le cas, je trouve ce commentaire particulièrement désagréable ». Je souhaitai simplement dire le plaisir que j’avais à vous lire dans votre échange avec NE, (…)]
C’est ce que je pensais, mais je préfère que les choses soient claires. L’incident est clos.
@ nationaliste-jacobin
[« Oui, mais il faut comprendre que c’est un héritage – i.e. que le véritable propriétaire est mort. » Je ne suis pas d’accord. L’héritage, c’est ce qu’on reçoit de ses parents.]
Oui, mais en principe, après la mort de ceux-ci…
[On peut le laisser se déliter, mourir, on peut aussi le faire fructifier, l’enrichir, en un mot le faire vivre.]
Tout à fait. C’était précisément mon point : l’héritage, c’est ce qui vit en nous quand ceux qui l’ont créé ne sont plus. Plus je réfléchis avec vous, plus je pense qu’il faut distinguer deux sortes de cultures, les « statiques » et les « dynamiques ». Les cultures « statiques » ont une vision d’elles mêmes qui repose sur la continuité absolue, sur la répétition et la nostalgie d’un « avant » qui était toujours mieux que le « maintenant ». Les cultures « dynamiques » au contraire se conçoivent dans une logique permanente de progrès, d’un aujourd’hui qui est mieux qu’hier. Ces deux types de cultures ont des visions très différentes de l’histoire. Pour les cultures « statiques », le passé ne se distingue pas vraiment du présent, puisque le présent imite le passé. Pour les cultures « dynamiques », il y a une séparation nette entre présent et passé parce que le présent devient histoire et patrimoine en permanence. C’est pourquoi les cultures « dynamiques » construisent des musées et vénèrent les vestiges du passé. Les cultures statiques n’en ont pas besoin, puisque le musée se trouve dans la rue et que le passé se confond avec le présent.
Le monde arabo-musulman aujourd’hui dominé par une culture « statique », alors que le monde occidental – et j’entends par la celui qui hérite de la Grèce mais surtout de Rome l’est par une culture « dynamique » : en France, les femmes ne portent plus le hanap et les hommes bas de soi et jarretière dans la rue, et qui le ferait aurait l’air ridicule. Dans les pays du Golfe, les femmes et les hommes s’habillent encore comme on s’habillait au moyen-âge. En Occident, on considère normal de modifier les lois pour s’adapter aux changements qu’on sait permanents. Dans le monde musulman, on est encore régi par des lois établies au VIème siècle et qui sont par essence immuables.
Notre culture a cette idée d’héritage parce qu’elle fait une nette différence entre passé et présent. Le passé va au musée, où il est amoureusement préservé et sert de référence pour l’avenir. Mais on ne laisse pas les morts se mêler de dicter aux vivants ce qu’ils doivent faire.
[Je trouve votre exemple à la fois mal choisi et intéressant. Mal choisi parce que vous évoquez une coutume liée à une tradition religieuse qui a complètement disparu, qui n’a plus de sens aujourd’hui.]
Je vous l’accorde.
[Intéressant, votre exemple l’est sur un point: il montre que quand une tradition meurt, c’est en général définitif. On ne peut plus la ressusciter sans risquer le ridicule. C’est pourquoi les mouvements qui essaient de refaire vivre le druidisme, le panthéon germanique ou que sais-je encore sont à mon sens voués à l’échec.]
Il y a tout de même des contre-exemples. Pensez par exemple à la « reconstruction » du judaïsme par le sionisme. Beaucoup de « traditions » israéliennes – et présentées comme telles aux enfants des écoles, par exemple – sont en fait des inventions modernes qu’on a habillé vaguement en allant chercher un fondement dans la Torah qui, comme tout le monde le sait, fournit à peu près tout pourvu qu’on prenne la peine de l’interpréter. Je ne dirais pas qu’une tradition morte ne puisse pas être ressuscitée. Mais cette « résurrection » nécessite une base sociologique et politique extrêmement forte. On revient sur la question de « l’envie de croire ».
[La tradition, c’est qu’au fond toute nouveauté doit d’une certaine façon se présenter comme la restauration d’un état ancien.]
Je suis tout à fait d’accord avec vous. La tradition est un moyen d’inscrire le nouveau dans une filiation, de nous rassurer sur le fait que nous devenons « autres » tout en restant rattachés à ce que nous étions. Je crois qu’un certain nombre de penseurs « postmodernes » négligent l’importance de la filiation dans la psyché humaine lorsqu’ils nous proposent le détachement de toute chaine pour aboutir à un individu véritablement « libre ». Cette liberté est une illusion, l’illusion qu’on pourrait avoir un être humain qui ne soit pas un produit historique. Par certains côtés, cette pensée rappelle l’idée d’immaculée conception…
[Avec mes élèves, j’aime beaucoup étudier le portrait de Napoléon en tenue de sacre par Ingres (1809). Napoléon n’a en rien innové: sa couronne de lauriers et la pourpre viennent des Césars, l’épée et la main de justice sont empruntées aux rois de France, comme le manteau doublé d’hermine, le sceptre est surmonté d’une “nikè” victoire ailée prise aux Grecs. Il est fascinant de voir comment Napoléon, fondateur d’un ordre nouveau par bien des aspects, a su puiser à une forme de tradition syncrétique mêlant Rome et la monarchie médiévale française.]
Je regrette de ne pas vous avoir eu comme professeur… même si mon professeur d’Histoire au lycée – à qui je veux rendre un hommage ému – n’était pas très éloigné de votre façon de voir. Tous les grands rénovateurs ont pris un soin extrême d’inscrire leur « rénovation » dans une filiation. Et ceux qui ne l’ont pas fait on bâti sur du sable. L’opposition entre Staline et Trotsky tourne en grande partie autour de cette question : peut-on faire une révolution « internationale » détachée de toute référence dans l’histoire de chaque pays, ou faut-il au contraire l’ancrer dans une continuité historique ?
[De Gaulle lui-même procède à une sorte de restauration, en renouant avec une forme de bonapartisme politique, d’interventionnisme économique et de modernisation du pays, qui n’est pas sans rappeler la politique de Napoléon III, lui-même renouant finalement avec une forme de colbertisme. Je vous avoue que depuis quelques temps, j’ai du mal à voir ce qui lie encore notre nation à cette trame cohérente de l’histoire nationale.]
Je pense que c’est dans cette question qu’il faut chercher la mécanique de notre crise institutionnelle actuelle. La pensée « postmoderne » qui s’est insinuée profondément dans nos classes pensantes pousse, comme je l’ai dit plus haut, à croire que l’individu ne peut être libre que débarrassé des chaînes du passé. Autrement dit, en cessant d’être un produit historique. Et on voit ce processus à l’œuvre sur le plan symbolique : entre un président de la République qui décrète qu’un fonctionnaire ne gagne rien à avoir lu « La princesse de Clèves » et son successeur qui se décrète « normal » en rupture avec tout le protocole hérité de notre histoire, on a les prémisses de ce phénomène. De plus en plus, on voit les administrations déménager des bâtiments « historiques » vers des bureaux standardisés. Des institutions centenaires se trouvent du jour au lendemain renommées ou supprimées au nom de la « simplification ». Hier, le jeune ingénieur admis au corps des Ponts et Chaussées était initié dans une histoire commencée avec Louis XIV, celui admis aux Mines prenait rang avec ceux qui avaient travaillé avec Napoléon. Aujourd’hui, ces deux corps ont été supprimés. Quelqu’un le sait-il ?
Je pense que nous sommes d’accord sur l’importance qu’il y a pour tous les progressistes à défendre cette idée de filiation. Contrairement à ce que croient les postmodernes, la tradition n’est pas un obstacle au progrès, mais sa condition nécessaire.
[Mon impression est que la tradition catholique est en train de mourir en France. Pas forcément la foi catholique en tant que telle qui survit et probablement survivra chez une minorité de la population. Mais en tant que tradition nationale, le catholicisme “populaire” est en train de mourir. On baptise de moins en moins ses enfants, on se marie moins à l’église. Mes parents m’ont fait baptiser et m’ont envoyé au catéchisme, pas parce qu’ils y croyaient ou qu’ils pratiquaient, mais parce qu’eux-mêmes avaient été baptisés et avaient suivi le catéchisme. Ma communion fut comme un rite de passage, que mes parents avaient connu avant moi, et leurs parents avant eux, et ainsi de suite. Parce que dans la famille, c’était comme ça.]
Je nuancerai votre propos. Je ne crois pas que la « tradition catholique » au sens ou vous l’indiquez soit menacée, du moins en ce qui concerne les rituels sociaux. Mais elle se « communautarise » suivant en cela la pratique générale. Ces cérémonies qui étaient banales à votre époque car ultra-majoritaires deviennent un acte militant, une forme de se distinguer comme « communauté » de ceux qui ne le font pas. Et d’ailleurs on retrouve les pratiques « séparatistes » des autres « communautés » : quand j’étais jeune, on invitait souvent mes parents – qui étaient juifs – à des mariages religieux catholiques ou des premières communions sans imaginer que cela aurait pu les gêner : la chose était vécue plus comme une affaire sociale que comme une cérémonie religieuse. Aujourd’hui, que j’ai l’âge de mes parents à l’époque, les gens qui m’invitent sont souvent gênés pour moi et anticipent un refus de participer à une cérémonie religieuse qui ne correspond pas à mes croyances.
Par contre, il est clair qu’une certaine tradition de catholicisme populaire, celui de la pratique quotidienne, est mort ou en passe de mourir. Mais je ne pense pas que ce soit forcément une mauvaise chose…
[Et la France? J’entends parfois certains dire que la France est une “nation laïque”. Cela n’a pas de sens. L’Etat est laïque, la République est laïque, pas le peuple.]
Tout à fait d’accord. J’avoue que je trouve le débat sur les « racines chrétiennes » de la France assez surréaliste. Les racines chrétiennes de la France – tout comme ses racines gréco-latines est un fait historique. Et je trouve détestable cette idée postmoderne que toute vérité ne serait pas bonne à dire, et qu’il faudrait cacher un pan de notre histoire – et quel pan ! – ou pire, la réécrire ad usum delphini, pour faire plaisir à tel ou tel groupuscule, à telle ou telle « communauté ».
[Le déclin du catholicisme en France a laissé un vide que rien à mon sens n’est venu combler…]
C’est là où nous ne sommes pas d’accord. Le déclin du catholicisme à laissé place à d’autres « spiritualités » – je reprends votre mot, même s’il ne me satisfait pas – qui ont-elles aussi joué le rôle de « religio ». L’humanisme issu des Lumières, l’idéologie progressiste et républicaine, le marxisme… Croyez-moi, dans la « ceinture rouge » de Paris le rôle du « communisme municipal » avec ses rituels et ses grandes messes n’était pas très éloigné du catholicisme populaire que vous regrettez.
Je crois que vous voyez un déclin du catholicisme là où il y a en fait déclin en général du lien social, sous l’effet d’une idéologie qui substitue à l’individu produit historique un individu virtuel libéré de tout lien avec le passé, un homme qui se fait de lui-même. Lorsqu’un certain ministre d’éducation nommé Jospin a décrété que l’élève « construit lui-même ses savoirs », il a parfaitement résumé cette idéologie. J’ai été désolé de la disparition du « communisme populaire » autant que vous de voir disparaître le « catholicisme populaire ».
[Je suis d’accord. En même temps, ne nous appartient-il pas de décider ce qu’il faut conserver? N’ai-je pas le droit de me battre pour préserver les traditions françaises qui me paraissent belles et utiles?]
Bien entendu. Vous savez bien que c’est mon combat aussi. Ce qui dans mon cas est encore plus paradoxal, puisque je me bats pour préserver des traditions qui ne sont les miennes que par adoption…
[Je ne pense pas qu’on puisse se contenter de savoir que ça a existé. La “mémoire et le souvenir du passé” ne suffisent pas à faire une nation. Il y a des traditions qui disparaissent et c’est normal, vous l’avez rappelé. Il y en a d’autres qu’on doit préserver parce qu’elles font partie des fondements de l’identité nationale. On peut accepter la modernité sans se renier.]
Tout à fait. Mais on ne peut les préserver qu’en les intégrant en permanence dans une identité qui change. Comme dans l’exemple du portrait de Napoléon que vous avez cité plus haut, et que je trouve excellent.
[Par ailleurs, une autre question se pose concernant les chrétiens d’Orient: s’ils disparaissent, cela démontrera l’incapacité des sociétés musulmanes à accepter la présence de minorités religieuses sur leur sol. Or nous parlons de pays qui sont à nos portes. Dès lors, la question de la présence des musulmans dans les pays occidentaux de tradition chrétienne mériteraient d’être posées…]
Là-dessus, vous connaissez ma position : « my country, my rules ».
[La France doit revenir à ses fondamentaux, non point en tentant vainement un illusoire “retour vers le passé”, mais en puisant dans sa tradition nationale les éléments qui lui donneront un second souffle tout en lui permettant de conserver son identité politique, religieuse et culturelle.]
Identité politique et culturelle oui. Mais « religieuse » ? Non. Je vois comme vous un grand intérêt à ce que les gens conservent les traditions, les références issues de la pratique religieuse. Mais je ne vois aucun intérêt à ce qu’ils continuent de croire en Dieu « catholiquement » ou autrement. C’est là que votre discours me gêne, et qu’il me semble important de faire la différence entre la culture religieuse et la religion elle-même.
@ Descartes,
“Les cultures statiques n’en ont pas besoin, puisque le musée se trouve dans la rue et que le passé se confond avec le présent.”
Et j’irai même plus loin que vous: les cultures “statiques” peuvent être tentées de détruire les vestiges du passé qui ne correspondent pas à l’idée qu’elles s’en font. Le wahhabisme a détruit une grande partie du patrimoine musulman du Hedjaz, ses émules sahéliens ont saccagé certains monuments islamiques de Tombouctou. Le wahhabisme, dont est issu le salafisme, nie l’historicité de l’islam. Pour les tenants de cet islam, l’histoire s’est arrêté avec la révélation transmise à Mahomet…
“Pensez par exemple à la « reconstruction » du judaïsme par le sionisme. Beaucoup de « traditions » israéliennes – et présentées comme telles aux enfants des écoles, par exemple – sont en fait des inventions modernes qu’on a habillé vaguement en allant chercher un fondement dans la Torah qui, comme tout le monde le sait, fournit à peu près tout pourvu qu’on prenne la peine de l’interpréter.”
Oui, mais c’est une réinvention des traditions, non une reprise telle quelle, si je comprends bien. Par ailleurs, la tradition juive a survécu jusqu’à nos jours sans jamais disparaître. Cela étant dit, la survie du peuple juif et la nature exacte d’Israël restent pour moi des mystères absolus. Quand j’avais travaillé sur le Moyen Orient au XX°, j’avais pas mal lu sur le sionisme et la naissance d’Israël. Aujourd’hui encore, Israël est pour moi un ovni historique et politique: la naissance d’Israël ne ressemble à aucune autre; je ne sais toujours pas si Israël est un Etat-nation ou un Etat ethnico-religieux. Il y a des Israéliens arabes, musulmans ou chrétiens, mais ils n’ont pas les mêmes droits et les mêmes devoirs que les Israéliens juifs (pas de service militaire), sauf les Druzes. Je pense qu’Israël est un pays qui n’a jamais tranché la question de sa nature.
“Je regrette de ne pas vous avoir eu comme professeur…”
Vous me flattez, cher ami…
“Hier, le jeune ingénieur admis au corps des Ponts et Chaussées était initié dans une histoire commencée avec Louis XIV, celui admis aux Mines prenait rang avec ceux qui avaient travaillé avec Napoléon. Aujourd’hui, ces deux corps ont été supprimés. Quelqu’un le sait-il ?”
Je l’ignorais.
“Ces cérémonies qui étaient banales à votre époque car ultra-majoritaires deviennent un acte militant, une forme de se distinguer comme « communauté » de ceux qui ne le font pas.”
Ultra-majoritaires, non, car c’était dans les années 80-90, mais c’était courant, plus qu’aujourd’hui il me semble. Je me résigne difficilement à l’idée que les catholiques deviennent “une communauté comme les autres”. Mais c’est la tendance, et ce que vous dites rejoint ce que j’avais entendu dans la bouche d’un spécialiste des religions.
“Le déclin du catholicisme à laissé place à d’autres « spiritualités » – je reprends votre mot, même s’il ne me satisfait pas – qui ont-elles aussi joué le rôle de « religio ». L’humanisme issu des Lumières, l’idéologie progressiste et républicaine, le marxisme… Croyez-moi, dans la « ceinture rouge » de Paris le rôle du « communisme municipal » avec ses rituels et ses grandes messes n’était pas très éloigné du catholicisme populaire que vous regrettez.”
Mais l’un n’exclut pas nécessairement l’autre: je crois avoir lu sous votre plume, corrigez-moi si je me trompe, que bien des communistes faisaient baptiser leurs enfants voire les envoyaient à la communion. Le catholicisme n’empêche pas d’autres “spiritualités” ou formes de sociabilité si vous préférez. Mais je pense que l’humanisme, les Lumières, l’idéologie républicaine sont toujours restés pour une large part cantonnés dans une élite. Finalement, seul le communisme, à côté du catholicisme, a véritablement pénétré les couches populaires. Il n’en demeure pas moins que toutes ces traditions sont en déclin. Je dirai même que le communisme populaire se porte plus mal que le catholicisme, lequel conserve une épaisseur historique qui fait défaut à son concurrent.
“Ce qui dans mon cas est encore plus paradoxal, puisque je me bats pour préserver des traditions qui ne sont les miennes que par adoption…”
Oui, mais vous êtes issus de la communauté ashkénaze (si j’ai bien compris), une communauté dont certains membres ont développé une tradition d’assimilation. Votre famille est partie s’installer en Amérique du Sud et a fait sienne l’identité du pays d’accueil. Puis vous êtes venu en France avec vos parents, et vous avez assimilé l’identité française. Je pense même, dans votre cas personnel, et bien que vous soyez à mes yeux un modèle de rationalisme, que vous êtes tombé amoureux de la France. Par ailleurs, et je crois qu’il ne faut pas sous-estimer ce point, vous êtes arrivé dans un pays où il existe une tradition de judaïsme laïcisé et assimilé. Même si vous êtes venu de l’étranger, je pense que vous avez finalement suivi la voie que bien des juifs français, de souche ou venus eux directement d’Europe de l’est, avaient suivi avant vous. Ne croyez-vous pas que cela pèse dans la balance?
Je pense que pour d’autres communautés, l’assimilation reste beaucoup plus difficile. Peut-être pas impossible, mais beaucoup plus difficile. Les juifs se sont confrontés de longue date à cette question épineuse de l’assimilation. Tous ne sont pas d’accord, d’ailleurs. Les musulmans, qui sont le plus souvent originaires de pays ou de régions où ils sont majoritaires, ont plus de mal je pense à se penser comme une minorité, et ils ont une tradition qui fait d’eux les assimilateurs plutôt que les assimilés. Je pense aussi que certains d’entre eux se pensent comme une extension du monde musulman. Par ailleurs, si je vous suis, l’assimilation doit les pousser à sortir d’une société “statique” pour entrer dans une société “dynamique”. Pas sûr qu’il soit aisé de changer sa conception de la société… Surtout quand un certain nombre d’associations et de religieux vous soufflent le contraire.
“Mais je ne vois aucun intérêt à ce qu’ils continuent de croire en Dieu « catholiquement » ou autrement.”
Croire en Dieu est une question personnelle. Il y aura toujours des gens pour croire, d’autres qui seront sceptiques. Je voulais dire qu’il est important que la France conserve la conscience de ses racines chrétiennes, et particulièrement catholiques, parce qu’elles ont façonné notre pays et sa civilisation. Et il n’est pas inutile à mes yeux que le catholicisme garde une relative vitalité. Pour le reste, mon souhait se borne à ce que le catholicisme reste la première religion de France. Ce qui me gêne chez une certaine gauche, c’est qu’il faudrait presque s’excuser d’être catholique alors qu’il est bien vu d’être musulman (même si ça commence à changer) ou bouddhiste…
@ nationaliste-ethniciste
[Et j’irai même plus loin que vous: les cultures “statiques” peuvent être tentées de détruire les vestiges du passé qui ne correspondent pas à l’idée qu’elles s’en font. Le wahhabisme a détruit une grande partie du patrimoine musulman du Hedjaz, ses émules sahéliens ont saccagé certains monuments islamiques de Tombouctou. Le wahhabisme, dont est issu le salafisme, nie l’historicité de l’islam. Pour les tenants de cet islam, l’histoire s’est arrêtée avec la révélation transmise à Mahomet…]
Tout à fait. Pour les cultures statiques, ce qui est, ce qui a été et ce qui sera se confondent. L’histoire n’est pas conçue comme une évolution permanente, mais sous un aspect binaire marqué par la rupture de la Révélation. Il y a un « avant », qu’il faut oublier et dont rien ne mérite d’être conservé, et un « après » statique, ou rien ne doit évoluer sous peine de trahir la révélation. C’est l’idée même d’historicité qui est niée par ce type de culture. Pour nous, occidentaux, un objet devient vénérable du fait même de son âge, parce que notre idée de l’évolution historique nous fait en quelque chose descendants de cet objet, même si nos liens avec lui sont obscurs. Lorsque Bonaparte visite l’Egypte, il a une conscience aigüe du fait que nous sommes en quelque sorte les descendants de ces hommes qui ont fait les momies et construit les pyramides. Les islamistes peuvent détruire les Buddhas de Bamian ou les mausolées de Tombouctou parce qu’ils ne se considèrent héritiers que d’une seule chose, la Révélation.
Ce n’est pas par hasard si notre civilisation est la seule qui ait inventé le musée, la seule qui se soit passionnée non seulement pour sa propre culture, mais pour celle des autres. Cela tient au fait que nous avons hérité de Grèce et de Rome cette idée fondamentale d’historicité, qui rend possible l’idée de progrès.
[Oui, mais c’est une réinvention des traditions, non une reprise telle quelle, si je comprends bien.]
Quelquefois oui, dans d’autres cas c’est une reprise de traditions anciennes dont la pratique avait été discontinuée parce qu’elle était impossible pour des raisons juridiques ou économiques, et dans quelques cas il s’agit de traditions pratiquées par les communautés juives d’une région particulière (les ashkénazes, les séfarades, les falachas, ceux du Yichouv, vous savez, le « peuple juif » est très divers) et qui ont été étendues à tous…
[Par ailleurs, la tradition juive a survécu jusqu’à nos jours sans jamais disparaître. Cela étant dit, la survie du peuple juif et la nature exacte d’Israël restent pour moi des mystères absolus.]
C’est une question passionnante. Les juifs ont construit pendant deux mille ans une culture très particulière, qui est en même temps religieuse et laïque, assimilationniste et séparatiste. Il y a chez les juifs de la conquête romaine jusqu’à aujourd’hui à la fois une volonté d’être comme les autres et celle de conserver une différence. La nature d’Israel est encore plus complexe, parce qu’il n’existe pas de « peuple juif », mais il en existe plusieurs et ils ont des expériences historiques très différentes.
[Quand j’avais travaillé sur le Moyen Orient au XX°, j’avais pas mal lu sur le sionisme et la naissance d’Israël. Aujourd’hui encore, Israël est pour moi un ovni historique et politique: la naissance d’Israël ne ressemble à aucune autre; je ne sais toujours pas si Israël est un Etat-nation ou un Etat ethnico-religieux.]
Paradoxalement, la naissance d’Israel tend à « normaliser » les juifs, à détruire cette culture si particulière de la Diaspora, culture qui doit beaucoup au fait que les juifs ont toujours vécu comme minorité dans des Etats non juifs. Avec la création d’Israel, les juifs ont été sommés de choisir leur loyauté. Elle a contribué à rendre les « assimilationnistes » encore plus assimilés, et les « séparatistes » encore plus séparés.
[Il y a des Israéliens arabes, musulmans ou chrétiens, mais ils n’ont pas les mêmes droits et les mêmes devoirs que les Israéliens juifs (pas de service militaire), sauf les Druzes. Je pense qu’Israël est un pays qui n’a jamais tranché la question de sa nature.]
Lorsqu’il a essayé, à l’époque de Ben Gourion, ça a failli se terminer en guerre civile. Il ne faut pas sous-estimer les énormes tensions qui traversent la société israélienne, non seulement entre les différentes « statuts personnels », mais aussi à l’intérieur de la population juive elle-même. C’est pourquoi le camp de la paix est si faible en Israel : tout le monde sait que le jour ou la paix avec les palestiniens sera signée, le facteur essentiel qui permet de contrôler les conflits internes aura disparu. Comme les américains, les israéliens ont besoin d’un croquemitaine extérieur pour ne pas se sauter à la gorge les uns des autres…
[« Je regrette de ne pas vous avoir eu comme professeur… » Vous me flattez, cher ami…]
Pas du tout, je suis très sincère.
[« Hier, le jeune ingénieur admis au corps des Ponts et Chaussées était initié dans une histoire commencée avec Louis XIV, celui admis aux Mines prenait rang avec ceux qui avaient travaillé avec Napoléon. Aujourd’hui, ces deux corps ont été supprimés. Quelqu’un le sait-il ? ». Je l’ignorais.]
Le corps des ingénieurs des Ponts et Chaussés, créé en 1716 a été fusionné avec celui des Eaux et Forêts pour donner naissance aux « ingénieurs des Ponts, des Eaux et Forêts » (la cohérence de ce corps devrait vous sauter aux yeux) par le décret du 10 septembre 2009. De même le Conseil Général des Ponts et Chaussées, créé en 1747, a été supprimé en 2008 pour être remplacé par un « Conseil général de l’environnement et du développement durable »…
Quant au corps des Mines, créé en 1810, il est « fusionné » avec le corps des ingénieurs des Télécommunications en 2009 (là encore, la cohérence du nouveau corps saute aux yeux) et le Conseil général des Mines est supprimé pour être remplacé par un « Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies »…
[Mais l’un n’exclut pas nécessairement l’autre: je crois avoir lu sous votre plume, corrigez-moi si je me trompe, que bien des communistes faisaient baptiser leurs enfants voire les envoyaient à la communion. Le catholicisme n’empêche pas d’autres “spiritualités” ou formes de sociabilité si vous préférez.]
Vous avez raison, mais cela ne contredit pas mon point. L’espace laissé par l’affaiblissement de la « spiritualité » chrétienne a été occupé jusqu’aux années 1970 par d’autres « spiritualités » civiques, sans pour autant que les unes substituent totalement les autres. Et oui, les communistes savaient très bien concilier dans leur sociabilité des éléments puisés dans la tradition et d’autres introduits par la modernité. Le problème aujourd’hui n’est pas tant l’affaiblissement du catholicisme que l’affaiblissement simultané, depuis les années 1980, de l’ensemble des « spiritualités » collectives, remplacées par un individualisme d’un genre très particulier. L’homme a cessé d’être un fidèle, un militant, un citoyen pour devenir un client.
[Mais je pense que l’humanisme, les Lumières, l’idéologie républicaine sont toujours restés pour une large part cantonnés dans une élite. Finalement, seul le communisme, à côté du catholicisme, a véritablement pénétré les couches populaires.]
Je ne suis pas convaincu. Je me souviens de cérémonies « républicaines » dans certaines provinces françaises qui n’avaient rien à envier en termes de participation populaire aux cérémonies venues de la tradition religieuse : retraites aux flambeaux le soir du 14 juillet, plantation « d’arbres de la liberté », défilés devant le monument aux morts, distributions des « prix d’excellence »…
[Il n’en demeure pas moins que toutes ces traditions sont en déclin. Je dirai même que le communisme populaire se porte plus mal que le catholicisme, lequel conserve une épaisseur historique qui fait défaut à son concurrent.]
Tout à fait. La question n’est pas le déclin de telle ou telle tradition, mais le déclin de l’idée même que la tradition – quelle qu’elle soit – a encore quelque chose à nous apporter. Je pense que les gens souffrent de cette idéologie imposée par les « classes moyennes » pour des raisons bassement mercantiles, d’où une recherche qui pour moi explique pourquoi l’Islam rigoriste devient si attractif, y compris pour des « convertis » dont la famille n’a aucune tradition islamique. Après les aggiornamentos successifs de l’église catholique et des partis communistes, l’Islam reste l’un des rares pôles qui propose une vision traditionnaliste sans concessions.
[Oui, mais vous êtes issus de la communauté ashkénaze (si j’ai bien compris), une communauté dont certains membres ont développé une tradition d’assimilation. Votre famille est partie s’installer en Amérique du Sud et a fait sienne l’identité du pays d’accueil. Puis vous êtes venu en France avec vos parents, et vous avez assimilé l’identité française. Je pense même, dans votre cas personnel, et bien que vous soyez à mes yeux un modèle de rationalisme, que vous êtes tombé amoureux de la France.]
Je ne contesterai pas ce point. 😉
Ce sont en fait mes parents qui sont tombés amoureux de la France, lors de leur voyage de noces je crois. Lorsqu’il a fallu choisir un pays pour fuir des difficultés sur lesquelles je ne m’étendrai pas, ils n’ont pas choisi le pays qui leur offrait les meilleures conditions économiques, mais le pays où ils avaient toujours rêvé de vivre…
[Par ailleurs, et je crois qu’il ne faut pas sous-estimer ce point, vous êtes arrivé dans un pays où il existe une tradition de judaïsme laïcisé et assimilé. Même si vous êtes venu de l’étranger, je pense que vous avez finalement suivi la voie que bien des juifs français, de souche ou venus eux directement d’Europe de l’est, avaient suivi avant vous. Ne croyez-vous pas que cela pèse dans la balance?]
Certainement. Je me sens très proche d’un Finkielkraut, par exemple, qui a eu exactement le parcours que vous citez.
[Les musulmans, qui sont le plus souvent originaires de pays ou de régions où ils sont majoritaires, ont plus de mal je pense à se penser comme une minorité, et ils ont une tradition qui fait d’eux les assimilateurs plutôt que les assimilés. Je pense aussi que certains d’entre eux se pensent comme une extension du monde musulman.]
Tout à fait. D’où ma conviction que l’assimilation de ces populations n’est possible qu’avec une véritable politique qui exerce une forte pression dans ce sens et en faisant de l’assimilation une condition au long séjour et à l’acquisition de la nationalité française. Sans essentialiser l’Islam, il y a une spécificité culturelle qu’on ne peut pas nier, et les gens issus de certaines cultures trouvent dans celles-ci plus d’instruments d’assimilation que d’autres.
[Par ailleurs, si je vous suis, l’assimilation doit les pousser à sortir d’une société “statique” pour entrer dans une société “dynamique”. Pas sûr qu’il soit aisé de changer sa conception de la société… Surtout quand un certain nombre d’associations et de religieux vous soufflent le contraire.]
Je n’ai jamais dit que ce serait facile. De longs et pénibles efforts seront nécessaires de part et d’autre. Mais je ne crois pas qu’on ait une alternative, ou plutôt, toutes les alternatives me semblent bien pires. En tout cas, je pense qu’on ne pourra demander ces efforts aux français sans en exiger aussi de ceux qui veulent vivre chez eux. Il faut que cela soit clair et partagé par tous, et aucune concession n’est possible sur ce sujet.
[Croire en Dieu est une question personnelle. Il y aura toujours des gens pour croire, d’autres qui seront sceptiques. Je voulais dire qu’il est important que la France conserve la conscience de ses racines chrétiennes, et particulièrement catholiques, parce qu’elles ont façonné notre pays et sa civilisation.]
Pourquoi singulariser la composante chrétienne ? C’est cela qui me gêne dans votre formulation. Oui, il faut qu’on conserve une conscience de notre histoire. C’est un fait incontestable que cette histoire est marquée par le catholicisme. Mais pourquoi singulariser celui-ci par rapport à d’autres composantes, comme le droit romain par exemple ? Est-ce que la conscience de nos racines « racines gréco-latines » seraient moins importante que celle de nos « racines chrétiennes » ?
[Ce qui me gêne chez une certaine gauche, c’est qu’il faudrait presque s’excuser d’être catholique alors qu’il est bien vu d’être musulman (même si ça commence à changer) ou bouddhiste…]
Je partage. Il y a une ambiguïté dans la gauche entre religion et culture : on tend à ranger la culture dans la religion lorsqu’il s’agit de la religion minoritaire, alors qu’on fait l’opération inverse lorsqu’il s’agit des minoritaires. La crèche de Noël devient une manifestation religieuse et à ce titre exclue de nos mairies, alors que le Ramadan est qualifié d’acte culturel auquel nos élus municipaux peuvent donc participer.
@ Descartes,
“Est-ce que la conscience de nos racines « racines gréco-latines » seraient moins importante que celle de nos « racines chrétiennes » ?”
Non, je défends aussi nos racines gréco-latines. Mais je vous fais remarquer que l’Eglise catholique est apostolique et… romaine. Le catholicisme a intégré une part importante de l’héritage gréco-romain, jusqu’à devenir un aspect de la romanité. C’est aussi une des raisons de mon attachement au catholicisme. Les Pères de l’Eglise étaient le plus souvent issus de milieux cultivés, ils connaissaient leurs classiques et étaient parfois imprégnés de néoplatonisme. De vifs débats ont agité les premiers chrétiens, mais ils ont finalement récupéré la culture antique classique. Les racines chrétiennes et les racines gréco-latines de la France s’entremêlent. Quand Clovis choisit le catholicisme, il choisit Rome…
@ nationaliste-ethniciste
[« Est-ce que la conscience de nos racines « racines gréco-latines » seraient moins importante que celle de nos « racines chrétiennes » ? » Non, je défends aussi nos racines gréco-latines.]
Je sais. Mais alors, pourquoi singulariser dans le discours les « racines chrétiennes », alors que vous défendez en fait l’ensemble des « racines » qui ont fait la culture et l’histoire de la France ? Cette singularisation me paraît malheureuse parce qu’elle a l’air de donner un statut particulier à la question religieuse par rapport aux autres éléments culturels.
[Quand Clovis choisit le catholicisme, il choisit Rome…]
Oui, précisément. C’est un choix politique, pas un choix religieux. C’est pourquoi l’insistance sur les « racines chrétiennes » me gêne, dans la mesure où cette expression maintient une ambiguité sur le fait de savoir s’il s’agit de « racines » culturelles ou religieuses.
@Descartes
Pourriez-vous, s’il vous plaît, me rappeler où Freud dit cela. Par ailleurs, je ne fais pas partie de ceux qui pensent que les écrits de Freud sont parole d’évangile et vrais une fois pour toute, en particulier dans le domaine de l’anthropologie (“Totem et tabou” contient des théories plutôt fantaisistes). Et vous ?
Vous me parlez de “mes standards” : ne renversons pas la situation, c’est vous qui prônez un mode de vie “standard”.
Si une femme n’aime pas rester à la maison à faire la cuisine et à s’occuper des enfants ? Si elle préfère aller au café ? Que fait-on dans ces cas-là, selon vous : doit-elle se forcer à vivre comme votre grand-mère (et ne me faites pas croire qu’elle ne sera pas malheureuse), et se consoler en se disant qu’il faut bien que “la société fixe les rôles en dehors des individus” ?
D’un côté, vous dites que la société doit fixer les rôles de la femme et de l’homme dans un couple, qu’il est souhaitable que ceux-ci soient interdépendants, et de l’autre vous dites “si cette situation ne leur plaît pas, ils sont bien libres, ils n’ont qu’à briser leur interdépendance”. A mon tour de vous dire “faudrait savoir” !
@luc
Je ne sais que vous répondre… Mais ce que vous dites conforte plutôt ce que je disais concernant le caractère économiquement faible et dominé, globalement, du groupe des musulmans en France.
@ Nana85
[Pourriez-vous, s’il vous plaît, me rappeler où Freud dit cela. Par ailleurs, je ne fais pas partie de ceux qui pensent que les écrits de Freud sont parole d’évangile]
En d’autres termes, vous me demandez une référence tout en me disant que vous n’en tiendrez pas compte ? La question est traitée dans « l’introduction à la psychanalyse ».
[Vous me parlez de “mes standards” : ne renversons pas la situation, c’est vous qui prônez un mode de vie “standard”.]
Peut-être, mais contrairement à vous, je ne me fais pas juge du fait de savoir si cela rend les gens « heureux » ou « malheureux ».
[Si une femme n’aime pas rester à la maison à faire la cuisine et à s’occuper des enfants ? Si elle préfère aller au café ?]
Et si je n’aime pas payer mes impôts ? Et bien, je les paye quand même, où alors j’ai un huissier à ma porte. La vie en société implique que dans beaucoup de situations on ne fait pas ce qu’on aime ou ce qu’on préfère, mais ce qui est nécessaire pour que la société puisse fonctionner.
J’ajoute que le fait de soutenir qu’il faut une division du travail sanctionnée socialement n’implique pas que cette division du travail soit immuable. Dans une société capitaliste avancée, alors que l’économie domestique n’a plus qu’une importance marginale et qu’on a peu d’enfants, il serait irrationnel de confiner la femme dans le domaine domestique. Il y a d’autres formes de division du travail et d’interdépendance à inventer.
[D’un côté, vous dites que la société doit fixer les rôles de la femme et de l’homme dans un couple, qu’il est souhaitable que ceux-ci soient interdépendants, et de l’autre vous dites “si cette situation ne leur plaît pas, ils sont bien libres, ils n’ont qu’à briser leur interdépendance”.]
Non, ce n’est pas ce que j’ai dit. Ce que j’ai dit, c’est que ma grand-mère avait objectivement les moyens de briser cette interdépendance. Et non seulement elle ne l’a pas fait, mais lorsque le destin l’a fait pour elle en emportant son mari, elle ne s’en est jamais consolée. Ce qui pour moi tend à montrer que cette interdépendance n’avait aucune raison de la rendre malheureuse.
« [Si une femme n’aime pas rester à la maison à faire la cuisine et à s’occuper des enfants ? Si elle préfère aller au café ?]
« La vie en société implique que dans beaucoup de situations on ne fait pas ce qu’on aime ou ce qu’on préfère, mais ce qui est nécessaire pour que la société puisse fonctionner » ».
Je rebondis juste sur ce point, faute de temps, vu que professionnellement je suis très prise.
Quant au paiement de ses impôts, pas le choix ! Mais pour ce qui est de gérer sa vie privée, son rôle à jouer au travers son travail, dans son intimité, indépendamment d’être un mec ou une nana, un minimum d’égoïsme s’avère nécessaire, selon moi, pour le bon fonctionnement, de son petit moteur à soi.
Et quand on est bien avec soi-même, en accord avec ses savoirs faire, ses attentes, ses idéaux, la réalisation d’une bonne partie des buts que l’on s’est fixés, on évolue mieux dans la vie, on aime et on donne mieux !
Aucune raison donc pour que le bon fonctionnement de la société en pâtisse.
Bien au contraire, le bien-être (intérieur) tend à rejaillir sur ceux qui partagent de près ou de loin votre vie !
La frustration n’engendre que des pensées négatives et le besoin de jalouser qui a mieux réussi que vous !
Et il n’est pas nécessaire d’avoir réussi au sens économique pour être bien dans sa peau !
Tout dépend à quoi on carbure dans la vie et quand votre nourriture est surtout spirituelle et bien se trouver en phase avec des gens qui apportent de l’eau à votre moulin d’un point de vue intellectuel et philosophique, et bien vous voilà un homme /une femme heureux. Ne dit-on pas que le bonheur est contagieux ?
Donc le mode de vie (en couple/ célibataire/autres…) est très secondaire !
Et puis doit-on généraliser à partir de l’exemple de vos grands-parents ?
@ Femme des années 80
[Quant au paiement de ses impôts, pas le choix ! Mais pour ce qui est de gérer sa vie privée, son rôle à jouer au travers son travail, dans son intimité, indépendamment d’être un mec ou une nana, un minimum d’égoïsme s’avère nécessaire, selon moi, pour le bon fonctionnement, de son petit moteur à soi.]
Mais vous savez, il y a plein de choses dans « sa vie privée, son rôle à jouer à travers de son travail, dans son intimité » qui sont réglés par des normes et des interdits qui sont aussi stricts que n’importe quelle loi fiscale. Pouvez-vous vous balader à poil dans votre jardin ou devant vos fenêtres ? Non. Pouvez-vous y prendre de la cocaïne ? Non. Pouvez-vous avoir des photos pédophiles dans votre ordinateur ? Non. Et la liste est longue…
[Et quand on est bien avec soi-même, en accord avec ses savoirs faire, ses attentes, ses idéaux, la réalisation d’une bonne partie des buts que l’on s’est fixés, on évolue mieux dans la vie, on aime et on donne mieux !]
Ca sonne comme une pétition de principe. Avez-vous des éléments factuels pour appuyer cette affirmation ? Si crois les biographes de Balzac, le grand écrivain ne « donnait » de sa plume que lorsqu’il manquait d’argent…
[Aucune raison donc pour que le bon fonctionnement de la société en pâtisse.]
Ca dépend. Si pour « être bien avec soi même, en accord avec ses savoir faire, ses attentes, ses idéaux et la réalisation des buts qu’on s’est fixés » il faut porter atteinte aux droits des autres, alors la société pâtit indéfectiblement. Vous savez, il y a des escrocs qui ont un grand savoir faire, qui réalisent les buts qu’ils se sont fixés…
[Bien au contraire, le bien-être (intérieur) tend à rejaillir sur ceux qui partagent de près ou de loin votre vie !]
Je trouve très naïve cette idée que le bonheur personnel fait le bonheur social et vice-versa. Vous savez, il y a des gens qui trouvent leur bien-être (intérieur) dans le fait de faire du mal aux autres…
[Et il n’est pas nécessaire d’avoir réussi au sens économique pour être bien dans sa peau !]
Peut-être, mais qu’est ce que ça aide ! Comme disait l’autre, l’argent n’a jamais fait le bonheur de ceux qui n’en ont pas.
[Ne dit-on pas que le bonheur est contagieux ?]
On le dit. Et on a tort…
[Et puis doit-on généraliser à partir de l’exemple de vos grands-parents ?]
Je n’ai jamais dit qu’il fallait « généraliser ». J’ai donné l’exemple de mes grands parents pour réfuter l’affirmation comme quoi le statut de la femme à l’époque « rendait les femmes malheureuses ». Je vous rappelle que pour réfuter une affirmation générale, un seul contre-exemple suffit…
@Nana85
Effectivement,c’est pertinent: le caractère économiquement faible et dominé, globalement, du groupe des musulmans de mon quartier,favorise la pénétration de ce nouvel islam qu’est le wahabisme.
Via les aides du secours islamique,les quelques centaines d’euros attribués aux bonnes musulmanes,,favorisent l’affichage de tenues wahabo-compatibles.Ces financements des oeuvres caritatives musulmanes sont des aumones distribuées prioritairement aux personnes étant dans la mouvance wahabite.
Mais il y a aussi,des non-musulmans pratiquants,dans mon quartier,qui refusent la mode wahabite et ses allocations.
En 2016,dans le collège de mon quaritier,l’intendant compte sur le listing du collège les prénoms non-français(ils sont aux 2/3) et déduit de ce nombre les parts de côtes de porc qu’il servira.Il reporte ce nombre pour l’achat de parts de poissons.Evidemment c’est injuste!
Une majorité de personnes constituant les familles au noms Maghrébins sont athées mais leurs enfants sont obligatoirement considérées comme ne mangeant pas de porcs.Mes amis à qui c’est arrivé sont scandalisés!
A l’inverse je connais un enfant de 13 ans au nom européen,à qui ça ne viendrait pas à l’idée de manger du poisson,car sytématiquement,il a droit à la côte de porc!L’intendant doit éviter les gaspillages et fonctionne avec musulman/non-musulman.
Alors je comprends que pour les gens qui n’ont pas connues les classes populaires des années 50/60/70,l’incompréhension soit totale tant les principes de la république ont été baffouées.
Mais de grâce ,ne confondez pas islam et classe populaire,et réactivez votre mémoire.Un conseil,en visionnant les films de Don Camiilo et pépone.Ce sont d’excellents témoignanges de ce qu’était une certaine Italie,et France aussi,dans les années 50/60/70.
Même dans les grands ensembles où la religion des économiquement faibles et dominés,n’avait aucune (ou presque) importance,le climat était proche.Tous ces gens votaient en masse pour le PCF,dans mon quartier à 60%,au second tour des cantonales de 1973.
Eh bien, c’est gai, la vie, avec vous ! Charmant, cette comparaison de l’ensemble de la vie quotidienne avec les impôts à payer ! Et c’est ça que vous appelez une vie merveilleuse ! A mon tour de dire “hé bé”…
Si je vous ai demandé la référence pour Freud, c’est que je serais très étonnée qu’il ait dit que « la femme est l’immanence et l’homme la transcendance » comme vous l’affirmez. Il ne me semble pas que les notions d’immanence et de transcendance soient des notions freudiennes, ni même psychanalytiques. J’ai un doute sur le fait que Freud ait dit que “la mère est l’incarnation de la sphère privée et le père l’incarnation de la sphère publique”. Mon doute concernant votre affirmation que cela est traité dans “Introduction à la psychanalyse” est confirmé par un coup d’œil au sommaire de cet ouvrage (https://fr.wikisource.org/wiki/Introduction_%C3%A0_la_psychanalyse).
L’exemple de votre grand-mère ne démontre pas qu’il est bon que les rôles de l’homme et de la femme soient fixés par la société. Ce que vous dites, c’est que cette vie lui convenait, à elle. Mais que si ça ne lui avait pas convenu, elle n’aurait eu qu’à changer de vie. Donc finalement, cela revient à dire que vous êtes d’accord avec moi : la société ne fixe rien du tout. Chacun doit vivre comme il l’entend avec son conjoint.
@ Nana85
[Eh bien, c’est gai, la vie, avec vous ! Charmant, cette comparaison de l’ensemble de la vie quotidienne avec les impôts à payer !]
Beh oui. Notre vie est régie pas une masse de normes, de choses qui « se font » ou « ne se font pas ». Des normes aussi fortes que n’importe quelle loi fiscale. Et j’irai même plus loin : sans ces normes, nous serions beaucoup moins heureux. Parce que là où il n’y a pas de norme, on est soumis à l’arbitraire du plus fort ou à la dictature du nombre.
[Et c’est ça que vous appelez une vie merveilleuse !]
C’est vous qui avez écrit « vie merveilleuse », pas moi… mais effectivement, je trouve la vie dans un tissu de normes bien plus « merveilleuse » que celle de la loi de la jungle. Je ne peux que vous recommander de lire Hobbes…
[Si je vous ai demandé la référence pour Freud, c’est que je serais très étonnée qu’il ait dit que « la femme est l’immanence et l’homme la transcendance » comme vous l’affirmez. Il ne me semble pas que les notions d’immanence et de transcendance soient des notions freudiennes, ni même psychanalytiques.]
Je n’ai pas dit qu’elles le fussent. J’ai dit que Freud les avait utilisé, pas qu’il les avait inventées.
[J’ai un doute sur le fait que Freud ait dit que “la mère est l’incarnation de la sphère privée et le père l’incarnation de la sphère publique”.]
Moi non plus. C’est mon interprétation de la formule « la femme est immanence, l’homme est transcendance ».
[Mon doute concernant votre affirmation que cela est traité dans “Introduction à la psychanalyse” est confirmé par un coup d’œil au sommaire de cet ouvrage.]
J’admire votre capacité à décider si une phrase figure ou non dans un ouvrage d’un « simple coup d’œil au sommaire ». Il faudrait que vous m’expliquiez comment vous faites, cela m’économiserait beaucoup de temps.
[L’exemple de votre grand-mère ne démontre pas qu’il est bon que les rôles de l’homme et de la femme soient fixés par la société.]
Ca tombe bien, ce n’était pas le but. Vous aviez affirmé qu’une telle organisation « rendait les femmes malheureuses ». Pour réfuter votre affirmation, il me suffisait d’exhiber un seul exemple. Le cas de ma grand-mère montre qu’on peut parfaitement vivre dans un contexte ou les rôles sont socialement fixés, et être heureux quand même.
[Ce que vous dites, c’est que cette vie lui convenait, à elle. Mais que si ça ne lui avait pas convenu, elle n’aurait eu qu’à changer de vie. Donc finalement, cela revient à dire que vous êtes d’accord avec moi : la société ne fixe rien du tout.]
Ce que la société fixe, c’est les conditions d’entrée dans les institutions qu’elle créé. Bien sur, vous n’êtes pas obligée à vous marier. Mais si vous voulez bénéficier de la protection sociale que le mariage accorde, vous êtes tenu d’obéir aux règles fixées par la société pour ce type d’institution. Si ma grand-mère avait contesté les rôles fixés pour les époux, elle aurait pu divorcer. Mais elle n’aurait pas pu avoir le beurre et l’argent du beurre, être mariée et ne pas être soumise aux obligations de l’épouse.
[Chacun doit vivre comme il l’entend avec son conjoint.]
Ah bon ? Et qui a décidé ça ? Dieu ? A la rigueur, je peux entendre l’idée que chacun a le droit de vivre comme il l’entend avec une autre personne. Mais avec un « conjoint » ? Pour être « conjoint », il faut accepter les règles qui font de vous un « conjoint », non ? Ou alors toute personne qui vit avec une autre devient un « conjoint » ?
@Descartes
Merci,à vous,collectif ou pas,cher Descartes pour la qualité de vos textes et la Maestra,’l’Art’ dont vous faites preuves ici depuis presque plus d’une demi douzaine d’années…
notre vie s’est considérablement enrichie grâce à vous et..à l’invention du Net.
Une grande nostalgie me saisit à la lecture de cette phrase
[Mais l’autochtone veut-il « défendre sa culture » ? ]
En effet,malgré mes activités m’ayant fait quitter ma région,je suis originaire de Gascogne.
Mes grands parents parlaient le patois ,mes parents le comprenant,et moi je l’ai vu mourir.
Aujourd’hui,j’ai le sentiment d’avoir vu s’éteindre des usages bi-millénaires.
A y regarder de plus près,c’est le lot du progrès mais si l’état d’esprit à la Don Camillo/Pépone disparait,pour moi,c’est trop.Et pourtant!
nathalie kosucu morrizet vient de déclarer que les kouffirs doivent être plus discrets!
ne sait elle pas que les Kouffirs sont punis de mort dans le coran?N’est ce pas ce qu’on fait les Daechistes en assassinant la rédaction de Charlie hebdo,les fếtards de la bastille,et les badauds du 14/07 à nice?
Les kouffirs sont,dans la France actuelle, LES victimes,parmi d’autres,comme en Indonésie de 1965,en moindre proportion heureusement..
malheureusement,il y a fort à parier que ce soit les Lepénistes qui relèvent cette bévue.
Permettez que j’utilise le peu de gasconq ue je connaisse:Mille dieu,quelle idiote!Nous voulons vivre au pays ou nous ferons tout sauter.
mille diou,qué pégass!
Volem viure al païs o farem tout pétat?
Vous l’avez compris,mon âme ne souhaite pas que la civilisa
Je suis non violent mais l’adrénaline me prend quand j’imagine le français diparaitre comme le gascon le fit.
Mais heureusement,nous en sommes loin,même si dans mon quartier de nombreuses emburkanées ou barbus feraient mieux de lire autre chose que le Coran….Mais de grâce qu’aucun acte violent anti-musulman ne soit commis..Allah Merci!
J’ai lu beaucoup de livres de psychanalyse à une époque où ça m’intéressait, et je ne vous crois pas quand vous dites que Freud a dit que “la femme est l’immanence et l’homme la transcendance”, c’est tout. Je pense que soit vous confondez, soit vous bluffez.
Et quant à moi je serais très malheureuse si je devais me conformer à un quelconque “rôle de femme” fixé par la société. Je ne vois pas en quoi le fait de ne pas avoir cette obligation fait de moi une partisane de la “loi de la jungle” (et quel animal serais-je ?).
Et qu’est-ce qui vous fait penser que les “normes” dont vous parlez diffèrent de “l’arbitraire” et de la “dictature du plus grand nombre” ?
@luc
Si les gens des quartiers populaires ne votent plus PCF, ce n’est pas la faute des musulmans tout de même.
@ Nana85
[J’ai lu beaucoup de livres de psychanalyse à une époque où ça m’intéressait, et je ne vous crois pas quand vous dites que Freud a dit que “la femme est l’immanence et l’homme la transcendance”, c’est tout.]
Comme je vous l’ai déjà dit, je ne discute pas des croyances. Je vous ai donné une référence, je ne vois pas ce que je peux faire de plus.
[Je pense que soit vous confondez, soit vous bluffez.]
Si vous me pensez capable de « bluffer », je ne vois pas pourquoi vous continuez à échanger avec moi. Je ne supporte pas que ma bonne foi soit mise en question, et c’est donc la dernière fois que je réponds à un commentaire de cette nature.
[Et quant à moi je serais très malheureuse si je devais me conformer à un quelconque “rôle de femme” fixé par la société.]
Et pourtant, vous le faites tous les jours, et sans même vous rendre compte. Je suis étonné que quelqu’un comme vous, qui a « lu beaucoup de livres de psychanalyse », ait oublié le poids qu’à le regard des autres dans la détermination de nos comportements. C’est ce regard qui nous dit « ce qui se fait » et « ce qui ne se fait pas » en fonction de notre âge, de notre statut social, et – last but not least – de notre sexe.
[Je ne vois pas en quoi le fait de ne pas avoir cette obligation fait de moi une partisane de la “loi de la jungle”]
Et pourtant, c’est assez évident. S’il n’y a pas de règle externe pour répartir le travail, les charges, les obligations à l’intérieur du ménage, alors cette répartition se fait nécessairement en fonction d’un rapport de forces.
(et quel animal serais-je ?).]
Je suis trop poli pour répondre à cette question…
[Et qu’est-ce qui vous fait penser que les “normes” dont vous parlez diffèrent de “l’arbitraire” et de la “dictature du plus grand nombre” ?]
De « l’arbitraire » c’est évident, puisque ces règles ne dépendent pas de la volonté de telle ou telle personne. De la « dictature du plus grand nombre », parce que ces règles sont en général sanctionnées par la tradition, ce qui implique non seulement un consensus des personnes vivantes, mais aussi des personnes mortes…
@ Descartes
[nous avons intérêt à soutenir le chiisme plutôt que le sunnisme.]
Les 15 à 20 millions de musulmans ou de personnes d’origine musulmane en France (1) sont sunnites ou d’origine sunnite.
Difficile de croire que ça n’a ou n’aura aucune influence sur la politique étrangère française…
Nous ajouterons à ça notre situation économique désastreuse qui devient de plus en plus difficile à masquer. Donc on ne va pas commencer à se mettre mal avec nos « bienfaiteurs » du Golfe (on ne doit pas avoir trop le choix puisque même les dizaines de Français morts en France depuis moins d’un an n’ont pas interrogé plus de quelques secondes nos dirigeants sur leurs choix géostratégiques (2)).
Bienfaiteurs qui sont également de bons « amis » de nos « inspirateurs » d’outre-Atlantique. Ce qui implique qu’on ne peut pas être en bons termes avec l’ennemi Perse sauf si les US en décident ainsi ou qu’on se fâche avec eux (vu qui sont les « amis » des USA, on n’y croit pas… (3)).
A moins que l’emprise allemande se resserre encore et qu’ils en décident ainsi. Les Allemands ayant l’air de vouloir faire passer le message, visible par quelques propos au sujet du TAFTA notamment (en tout cas ça m’en a donné l’impression.. 😉 ), que la zone euro c’est à eux maintenant. Au moins économiquement dans un premier temps.
Et vu notre faiblesse intérieure absolument sans égal dans l’histoire récente… Vue de notre société actuelle, la France de 1940 ressemble à une machine de guerre ultime en comparaison.
Par exemple si l’on juge de l’assimilation au projet national français par les prénoms (chose qu’on ne choisit pas et donc peut laisser de l’espoir…), on doit être minoritaire sur les moins de 20 ans pour le nombre de prénoms français.
D’autant que si des immigrés récents s’assimilent, le nombre de non-immigrés qui se désassimilent est loin d’être nul (4). Et y a sans doute pas loin à ce qu’il soit supérieur.
A partir de là, commencer à vouloir faire une politique étrangère qui repose sur autre chose que le gain financier à court terme (qui en plus va dans le sens d’un apaisement communautaire), ça demande comme préalable de vaincre les « classes moyennes ». Ce qui, en temps de paix et de règne des grands médias sur les idées ne laisse guère d’optimisme.
Même avec un De Gaulle en vie et des « classes moyennes » faibles, il a fallu la guerre pour avoir la possibilité de continuer la « grande France ».
Qu’est-ce qu’il nous faudrait donc attendre pour espérer un changement…
(1) Estimation d’Azouz Begag : https://www.youtube.com/watch?v=VWjL5RLls_E
Peut-être fausse mais vu la sensibilité du chiffre et l’interdiction qui empêche d’avoir quelque chose de fiable, ça vaut sans doute pas forcément moins que l’INED & co.
Sinon j’en ai vu passer aussi qui disait qu’un bébé sur 2 qui naissait aujourd’hui en France est d’origine africaine. (je ne retrouve plus la référence)
(2) Légion d’honneur pour le prince héritier saoudien en mars 2016 (4 mois après le Bataclan)
(3) : Hollande, Sarkozy, Juppé, etc (https://fr.wikipedia.org/wiki/French-American_Foundation#Personnalit.C3.A9s_fran.C3.A7aises_ayant_particip.C3.A9_au_programme_.C2.AB_Young_Leaders_.C2.BB)
(4) : outre les prénoms US, j’ai remarqué par le canard du coin qui fournit les états-civils des bébés naissant dans ma ville (prénom + nom pour lui et ses parents) qu’un bébé qui naît d’un parent dont le prénom est français et d’un autre dont le prénom est arabe (père ou mère peu importe), hérite d’un prénom arabe. C’est peut-être le hasard ou un biais statistique quelconque…
@ bip
[Les 15 à 20 millions de musulmans ou de personnes d’origine musulmane en France (1) sont sunnites ou d’origine sunnite.]
Je vous conseille de regarder les estimations sérieuses faites par l’INSEE et l’INED, au lieu de propager des chiffres fantaisistes données par des guignols comme Begag.
[Difficile de croire que ça n’a ou n’aura aucune influence sur la politique étrangère française…]
Je ne vois pas en quoi cela serait « difficile à croire ». Il y a en France plus d’une cinquantaine de millions de catholiques, et on ne voit pas que cela influence radicalement notre politique extérieure vis-à-vis des états protestants. Pourquoi en irait-il autrement avec les quatre millions de musulmans ?
[Les Allemands ayant l’air de vouloir faire passer le message, visible par quelques propos au sujet du TAFTA notamment (en tout cas ça m’en a donné l’impression.. 😉 ), que la zone euro c’est à eux maintenant.]
Ca a toujours été le cas. Il n’y a que les naïfs genre Mélenchon qui ne l’avaient pas compris.
[Et vu notre faiblesse intérieure absolument sans égal dans l’histoire récente… Vue de notre société actuelle, la France de 1940 ressemble à une machine de guerre ultime en comparaison.]
Il ne faudrait tout de même pas exagérer. Je sais bien qu’on aime en France noircir le tableau et se frapper la poitrine en criant que tout va de mal en pis, il faut toujours raison garder. Non, en 1940 notre « faiblesse intérieure » était bien plus grande. Entre la saignée de 1914-18, la division d’une société ou une moitié préférait Hitler au Front Populaire et était prête à renverser la République (le 6 février 1934, ça ne vous dit rien), et des institutions paralysées par l’instabilité, la France de 1940 était bien plus faible qu’elle ne l’est aujourd’hui.
[Par exemple si l’on juge de l’assimilation au projet national français par les prénoms (chose qu’on ne choisit pas et donc peut laisser de l’espoir…), on doit être minoritaire sur les moins de 20 ans pour le nombre de prénoms français.]
Ca dépend : comptez-vous comme « prénoms français » Kevin, Loana, Gwen ?
[Même avec un De Gaulle en vie et des « classes moyennes » faibles, il a fallu la guerre pour avoir la possibilité de continuer la « grande France ».]
Tout à fait ! Et avec des classes moyennes fortes, cela est devenu vite impossible.
http://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/19558/dt168_teo.fr.pdf
“Je vous conseille de regarder les estimations sérieuses faites par l’INSEE et l’INED, au lieu de propager des chiffres fantaisistes données par des guignols comme Begag”, bip et le pseudo Descartes. (Franchement, “plus de cinquante millions de catholiques”… même sur le port de Marseille, on n’oserait pas dire des énormités pareilles)
D’autre part, Saint Kevin, Sainte Gwenn et Sainte Hélène (Louane) font partie du martyrologe romain donc ces prénoms sont légitimes si on parle des racines chrétiennes; s’il faut parler de tradition française, cela saute moins aux yeux car nos pères français n’ont pas ou peu porté ces prénoms.
Qu’est-ce qu’un “prénom français”?
celui porté par le plus grand nombre? alors Mohammed sera peut-être bientôt un “prénom français” et sortons le pauvre Robert devenu ringard;
celui porté depuis le plus longtemps? alors Kevin est plus français que Vianney;
celui faisant référence à une personnalité “de souche”? alors exit les estrangers comme Nicolas l’apatride, Martin le Hongrois, Marie la Juive de Nazareth et accueillons les Gwenn, Tugdual et autres Bretons tout aussi Français.
Vous me faites autant rire qu’un Zemmour brandissant son prénom étranger Eric comme sa garantie de pureté gauloise!
@ Descartes
[Je vous conseille de regarder les estimations sérieuses faites par l’INSEE et l’INED, au lieu de propager des chiffres fantaisistes données par des guignols comme Begag.]
Pour y trouver des chiffres aisément interprétables en ce qui concerne des domaines où la pression politique est importante ? Des chiffres qui ne mettent pas sur le même plan, les bébés qui naissent et les centenaires ?
Par exemple, autre domaine, comment expliquez-vous que l’INSEE ne produise aucun résultat sérieux permettant de connaître notre balance commerciale vis-à-vis de l’Allemagne ? Pour connaître ce chiffre, il faut aller voir sur des sites allemands…
Pour Begag, on est d’accord c’est un guignol. Mais un guignol du système qui montre que personne n’en sait quoi que ce soit. Pas même un député (qui n’est pas plus nul que les autres députés, ministres ou présidents). D’où cette petite provocation. 😉
Une autre, mais qui ne peut-être balayée aussi aisément : France Stratégie ( https://fr.wikipedia.org/wiki/France_Strat%C3%A9gie ) c’est des sérieux ou des guignols ?
http://www.lefigaro.fr/economie/le-scan-eco/decryptage/2016/09/20/29002-20160920ARTFIG00321-l-economie-pourrait-gagner-jusqu-a-310-milliards-d-euros-en-reduisant-les-discriminations.php
[Je ne vois pas en quoi cela serait « difficile à croire ». Il y a en France plus d’une cinquantaine de millions de catholiques, et on ne voit pas que cela influence radicalement notre politique extérieure vis-à-vis des états protestants. Pourquoi en irait-il autrement avec les quatre millions de musulmans ?]
Je ne sais pas ce que vous appelez « catholiques » mais je ne crois qu’il y ait « une cinquantaine de millions de catholiques » en France qui refuseraient de manger du filet mignon sans autre raison que ce qu’impose un texte écrit au milieu d’un désert à des milliers de km de France datant d’il y a 1300 ans.
Ce qui laisse penser que tous les Français n’ont pas la même capacité à réfléchir selon des considérations autres que religieuses. Celles de la raison notamment.
Des catholiques ne tuent personne aux cris de « Jésus est grand » en émettant par ailleurs des revendications concernant la politique étrangère de la France.
Le vote pour des considérations communautaristes des électeurs musulmans se distinguent assez fortement de celui des électeurs catholiques (surtout si vous considérez qu’il y a de 50 millions de catholiques en France).
Nos dirigeants politiques n’ayant pour seul but leur élection, ils sont prêts à payer cher pour des voix garanties.
Entre autres choses (politiques d’influence venant de pays sunnites vs venant de pays catholiques (s’il y en a encore qui se considère ainsi)).
[Non, en 1940 notre « faiblesse intérieure » était bien plus grande. Entre la saignée de 1914-18, la division d’une société ou une moitié préférait Hitler au Front Populaire et était prête à renverser la République (le 6 février 1934, ça ne vous dit rien), et des institutions paralysées par l’instabilité, la France de 1940 était bien plus faible qu’elle ne l’est aujourd’hui.]
Une organisation étrangère était-elle capable de recruter une dizaine de « Français » pour qu’ils massacrent des Français innocents et se fassent exploser en plein cœur de Paris ?
Avec pour seule réaction de la population des câlins ?
Mais vous avez peut-être raison, ne rien faire d’autre que d’attendre la suite du programme est sûrement moins faible que de s’engager pour la France et essayer de changer une situation qui sent mauvais. S’engager à tord peut-être, mais le faire pour la France excuse beaucoup.
Et donc malgré « la saignée de 14-18 », des gens étaient encore capables de s’engager pour ce qu’ils pensaient être le bien de la France. Quelle faiblesse !
Aujourd’hui, bien que la France donne beaucoup plus qu’elle ne demande, le nombre de ceux qui qui sont prêts à quelque effort pour elle est ridicule en proportion de cette époque.
Aujourd’hui, dire que la souche principale de nos ancêtres étaient Gaulois suffit à diviser la France. Quelle force !
A l’école française, on se dit fier de ses origines marocaines, kurdes, algériennes, etc. Quand un élève n’a connaissance que d’ancêtres français, il dit « je n’ai pas d’origines ». On apprend aux enfants français qu’ils viennent de nulle part. Quelle force !
L’apprentissage de l’anglais y est une priorité. On en oublie le français. Ça tombe bien, on a fait de la place dans l’enseignement des langues mortes (en prévision de l’avenir?). Quelle force !
Aujourd’hui, on peut se rendre à quelques km de chez soi dans des territoires dont on se demande bien dans quel pays ils se trouvent. Quelle force !
Pour rencontrer des gens venant de la moitié de la planète, il suffit d’aller au Lidl en bas de chez vous.
Chanter que vous « chiez sur la France » et que vous « niquez les Français » fait de vous la gloire de votre quartier.
Aujourd’hui, il y a plus de Français depuis x générations qui adoptent les mœurs de nouveaux arrivants que l’inverse. Quelle force !
Sinon pour les « institutions paralysées », j’aimerais savoir où vous placez des institutions incapables :
– de faire construire un aéroport à cause de 3 punks à chien
– de faire appliquer les lois qui disent qui a le droit d’être en France ou pas
– de décider des lois et des politiques monétaire, économique et budgétaire du pays
– de riposter à une attaque en plein Paris organisée par une organisation étrangère (quelques avions qui empruntent leurs bombes pour faire sauter des bâtiments vides n’est pas une riposte)
?
[comptez-vous comme « prénoms français » Kevin, Loana, Gwen ?]
Je ne connais aucun Français qui, avant les années 60 (au moins), portait un de ces prénoms. Prénoms qui ne sonnent d’ailleurs pas français. Donc clairement non.
[Tout à fait ! Et avec des classes moyennes fortes, cela est devenu vite impossible.]
Donc hormis un cataclysme économique ou un conflit armé, y a peu d’espoir de voir la France ne pas devenir, dans le meilleur des cas, une société avec des quartiers fermés et surveillés pour les « winners » globalisés et le reste du territoire laissé aux différentes communautés qui seraient plus ou moins autorisés à utiliser la violence si l’envie leur en prenait ?
Et n’être vu de l’extérieur qu’un vieux truc soumis à tout ordre venant de quelque chose d’un peu puissant ?
Au moins l’espoir croît. 😉
@ bip
[« Je vous conseille de regarder les estimations sérieuses faites par l’INSEE et l’INED, au lieu de propager des chiffres fantaisistes données par des guignols comme Begag ». Pour y trouver des chiffres aisément interprétables en ce qui concerne des domaines où la pression politique est importante ?]
Je ne vois pas très bien ce qui vous permet d’accuser les vénérables institutions que sont l’INSEE et l’INED de céder à des pressions politiques. Pourriez-vous être plus précis ?
[Des chiffres qui ne mettent pas sur le même plan, les bébés qui naissent et les centenaires ?]
Je vois mal comment un bébé pourrait être « musulman »…
[Par exemple, autre domaine, comment expliquez-vous que l’INSEE ne produise aucun résultat sérieux permettant de connaître notre balance commerciale vis-à-vis de l’Allemagne ? Pour connaître ce chiffre, il faut aller voir sur des sites allemands…]
En cinq minutes de recherche sur le site de l’INSEE j’ai trouvé sans difficulté les informations sur la balance commerciale vis-à-vis de l’Allemagne… voir par exemple : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATTEF08475
[Pour Begag, on est d’accord c’est un guignol. Mais un guignol du système qui montre que personne n’en sait quoi que ce soit.]
Ce n’est pas parce que les guignols genre Begag n’en sait rien qu’il n’existe pas de travaux statistiques et sociologiques sérieux. Bien sur, il y a des marges d’incertitude qui tiennent surtout à la difficulté de définir exactement le sujet d’étude. Définir un « musulman », ce n’est pas si évident que ça.
[Je ne sais pas ce que vous appelez « catholiques » mais je ne crois qu’il y ait « une cinquantaine de millions de catholiques » en France qui refuseraient de manger du filet mignon sans autre raison que ce qu’impose un texte écrit au milieu d’un désert à des milliers de km de France datant d’il y a 1300 ans.]
Possible. Mais ces catholiques refusent toujours de marier à l’église des divorcés en application d’un texte écrit il y a à peu près autant de temps… alors n’allons pas trop vite en besogne. Par ailleurs, il reste que vous ne donnez aucun élément tangible qui montrerait que la politique extérieure de la France soit influencée par le fait que quatre millions de français sont musulmans.
[Le vote pour des considérations communautaristes des électeurs musulmans se distinguent assez fortement de celui des électeurs catholiques (surtout si vous considérez qu’il y a de 50 millions de catholiques en France).]
Pourriez-vous élaborer ? Les résultats ne montrent pas que les considérations communautaires aient une grande influence sur le vote des musulmans. En particulier, les listes « communautaires » se sont partout fait rétamer.
[Une organisation étrangère était-elle capable de recruter une dizaine de « Français » pour qu’ils massacrent des Français innocents et se fassent exploser en plein cœur de Paris ?]
Probablement. Après tout, les attentats anarchistes – par exemple celui qui avait couté la vie à Louis Barthou à Marseille – étaient monnaie courante à une époque. En 1940, ce type d’action était passé de mode, mais rien n’indique que les différentes milices politiques en fussent incapables…
[Avec pour seule réaction de la population des câlins ?]
Quelle avait été la réaction populaire à l’attentat qui a coûté la vie à Barthou ?
[Mais vous avez peut-être raison, ne rien faire d’autre que d’attendre la suite du programme est sûrement moins faible que de s’engager pour la France et essayer de changer une situation qui sent mauvais. S’engager à tord peut-être, mais le faire pour la France excuse beaucoup.]
Je n’ai rien compris.
[Et donc malgré « la saignée de 14-18 », des gens étaient encore capables de s’engager pour ce qu’ils pensaient être le bien de la France. Quelle faiblesse !]
« Des gens » fort peu nombreux, faut-il le rappeler ?
[Aujourd’hui, dire que la souche principale de nos ancêtres étaient Gaulois suffit à diviser la France. Quelle force !]
Je crois que vous confondez « la France » avec la classe politico-médiatique. Je n’ai pas l’impression que « la France » se soit beaucoup divisé sur la question.
[Sinon pour les « institutions paralysées », j’aimerais savoir où vous placez des institutions incapables : (…)]
Vous faites une énorme confusion. Ce ne sont pas « les institutions » qui empêchent de construire Notre Dame des Landes, d’appliquer les lois ou de riposter à une attaque. Ce sont les hommes qui les gouvernent et qui sont incapables de prendre les décisions. Ce n’est pas le couteau qui est émoussé, c’est la main qui le tient qui est sans volonté.
[Donc hormis un cataclysme économique ou un conflit armé, y a peu d’espoir de voir la France ne pas devenir, dans le meilleur des cas, une société avec des quartiers fermés et surveillés pour les « winners » globalisés et le reste du territoire laissé aux différentes communautés qui seraient plus ou moins autorisés à utiliser la violence si l’envie leur en prenait ?]
Je ne sais si « cataclysme » c’est le mot, mais un bouleversement économique et politique, certainement. Tant que nous resterons sur une économie faite par et pour la bourgeoisie et les « classes moyennes », nous irons vers une société fragmentée, qui aboutira à une séparation entre les « communautés ». Et il y aura des communautés de « winners » et des communautés de « loosers »…
@ Descartes
[Je ne vois pas très bien ce qui vous permet d’accuser les vénérables institutions que sont l’INSEE et l’INED de céder à des pressions politiques. Pourriez-vous être plus précis ?]
Je n’accuse personne de « céder »… Je dis juste qu’il y a des domaines sensibles où si vous ne voulez pas de problème, vous présentez les choses d’une certaine manière. Ou vous ne les présentez pas.
Comme partout.
Et je ne mets certainement pas l’INSEE et l’INED dans le même sac. L’INSEE essaye de faire au mieux dans le système de contraintes qui lui est appliqué. L’INED est contaminé par les idéologues. Il n’y a qu’à voir les accusations d’extrêmismes que ses membres se lancent joyeusement (voir Tribalat).
La France connaît le plus grand changement démographique en matière ethnique de son histoire. Si vous jugez que ces institutions ont fourni et fournissent des éléments permettant aux Français de s’appuyer sur des bases solides pour en juger, tant mieux. Ce n’est pas mon cas. Quand 2 yeux sont des outils plus performants que leurs statistiques pour juger d’une réalité sur un plan aussi étendu que la France, c’est dramatique…
Voilà ce qu’en sont réduits à interpréter ceux qui s’intéressent au sujet : http://www.fdesouche.com/769997-drepanocytose-la-carte-du-grand-remplacement-mise-jour-2
[Je vois mal comment un bébé pourrait être « musulman »…]
Pareil… Désolé si je n’ai pas été clair.
Ce que je voulais dire par [Des chiffres qui ne mettent pas sur le même plan, les bébés qui naissent et les centenaires ?] était plus général.
Le choix d’un indicateur statistique pour rendre compte d’un phénomène peut très bien masquer une partie de la réalité qu’on prétend mesurer. Un très bon exemple est l’indicateur du chômage aux USA : quelqu’un en âge de travailler qui ne travaille pas et qui ne recherche pas d’emploi n’est pas considéré comme chômeur (j’admets que les rentiers correspondent à cette définition mais de là à faire passer le taux de 5 à 20…).
Vous citez des études qui estiment le nombre de musulmans entre 4 et 7 millions. Peut-être. Ces études indiquent-elles la proportion de musulmans par tranche d’âge ? Indiquent-elles si le nombre de musulmans augmente ? Si non, pourquoi à votre avis ?
[En cinq minutes de recherche sur le site de l’INSEE j’ai trouvé sans difficulté les informations sur la balance commerciale vis-à-vis de l’Allemagne… voir par exemple : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATTEF08475%5D
Désolé de vous avoir fait perdre du temps… Ma recherche datait d’il y a quelques mois et je n’avais rien trouvé de tel. Je ne sais pas si c’est parce que je me sers mal de leur site (possible…) ou si ma recherche était un peu différente. J’ignorais qu’en France seuls les biens étaient pris en compte dans le calcul de la balance commerciale. Et je cherchais alors ce qu’ils appellent « la balance des biens et des services ». La globalité des échanges avec l’Allemagne donc. Que je ne trouve d’ailleurs toujours pas…
L’équivalent allemand de l’INSEE : https://www.destatis.de/EN/FactsFigures/NationalEconomyEnvironment/ForeignTrade/TradingPartners/Tables/OrderRankGermanyTradingPartners.pdf?__blob=publicationFile
Ce qui, si j’ai bien compris, indique que l’Allemagne importe de France 67 milliards de biens et services.
Selon l’INSEE, la France exporte 71 milliards de biens (sans les services!) en Allemagne.
Ce qui est… surprenant. Je veux bien admettre que ça doit pas être évident à mesurer mais de là à avoir de tels écarts…
Mais bon, l’idée y est. Et en effet l’INSEE donne clairement l’info qu’on se fait faire les fesses par les allemands au niveau économique (moins fortement tout de même que ce que l’institut allemand indique).
Dont acte.
[Définir un « musulman », ce n’est pas si évident que ça.]
Et comme les statistiques ethniques sont interdites, on avance les yeux à demi-fermés… Et un jour des gens ne reconnaissent plus leur pays simplement en se promenant dans leur ville.
[Possible. Mais ces catholiques refusent toujours de marier à l’église des divorcés en application d’un texte écrit il y a à peu près autant de temps… alors n’allons pas trop vite en besogne.]
J’arrive quand même à trouver des explications rationnelles qui justifient qu’on essaye de limiter le nombre de divorce.
Un peu moins qui justifient de ne pas boire d’eau lors d’une journée où il fait 40 degrés…
Alors s’il est nécessaire à certains de croire en Dieu, je sais quelle religion il serait sain de favoriser.
[Par ailleurs, il reste que vous ne donnez aucun élément tangible qui montrerait que la politique extérieure de la France soit influencée par le fait que quatre millions de français sont musulmans.]
En effet… (j’ai un peu déliré dans ma réponse, sans doute piqué par votre référence à « une cinquantaine de millions de catholiques »)
Ce qui a fait qu’on est passé d’une politique traditionnellement basée sur le soutien aux sources de progrès dans le monde arabe à l’exact inverse est sans doute lié en très grande partie à notre affaiblissement économique et la soumission de notre politique étrangère aux USA, soit donc à la politique du chien crevé au fil de l’eau que vous évoquez régulièrement.
En attendant, des dizaines d’agents d’influence (imams notamment) venus du monde sunnite peuvent à loisir s’exprimer sans que ça ait l’air de déranger beaucoup de politiciens qui doivent juger que ça satisfait leurs électeurs…
Je remets donc la phrase initiale de mon premier message : [difficile de croire que ça n’a ou n’aura aucune influence sur la politique étrangère française…]
Le nombre de personnes influencées étant proportion du nombre de sunnites en France (même s’ils sont bien moins nombreux que ce que j’annonçais)..
Faire ce choix de politique extérieure a donc été facile. Revenir dessus risque de l’être beaucoup moins, notamment parce que des cellules organisées politiquement vont militer contre.
Mais il est vrai que ce n’est pas une preuve. Si l’avenir pouvait prouver que c’est faux, j’en serais ravi…
Note : je ne connais pas trop le sujet, mais vous pensez que le traitement politique français du dossier israëlo-palestinien n’est aucunement influencé par le nombre de Français musulmans ?
[Pourriez-vous élaborer ? Les résultats ne montrent pas que les considérations communautaires aient une grande influence sur le vote des musulmans.]
http://www.fdesouche.com/772653-clientelisme-quand-la-mairie-de-sevran-heberge-une-ecole-salafiste
http://www.fdesouche.com/772629-clientelisme-quand-la-mairie-de-paris-finance-une-mosquee-dossier-tabou#
http://russeurope.hypotheses.org/4909
[Probablement. Après tout, les attentats anarchistes – par exemple celui qui avait couté la vie à Louis Barthou à Marseille – étaient monnaie courante à une époque. En 1940, ce type d’action était passé de mode, mais rien n’indique que les différentes milices politiques en fussent incapables…]
Si j’en crois wikipedia, c’est un acte ciblé sur des victimes précises commis par des étrangers avec, certes, des « dommages collatéraux ». Pas un attentat-suicide commis par des Français qui a pour but de tuer un maximum de Français innocents pour le compte d’une organisation étrangère.
[Quelle avait été la réaction populaire à l’attentat qui a coûté la vie à Barthou ?]
D’après wikipedia (je ne connaissais rien à cette affaire) : « des sanctions ont été prises dont la démission d’Albert Sarraut, l’un des plus impopulaires ministres de l’Intérieur de la e République, et celle de M. Berthoin, directeur de la Sécurité Nationale, la mise à la retraite de plusieurs dirigeants et la suspension du Préfet. »
Et : « tandis que dans les rues les ligues factieuses s’agitent ».
Je n’en sais pas plus.
[Je n’ai rien compris.]
Désolé. Je voulais dire que tenter de renverser la République en 1934, c’était certainement une mauvaise chose mais faite pour une bonne raison : ce qu’ils pensaient être l’intérêt de la France. Ce qui peut donc être excusé (vous citez d’ailleurs régulièrement la phrase « Le plus difficile en période troublée n’est pas de faire son devoir, mais de le connaître »).
Au vu du résultat en 1940 du maintien de la République, un mauvais esprit (anachronique?) pourrait se demander si ça aurait été vraiment pire dans le moyen terme…
Tandis qu’aujourd’hui, on attend juste que ça passe. Vous me direz que c’est sans doute la meilleure stratégie… Mais j’ai des doutes sur le fait que ça soit la principale motivation pour ne rien faire. S’occuper uniquement de soi en se foutant du reste (et surtout de la France) me paraît plus en accord avec ce que je vois…
[Je crois que vous confondez « la France » avec la classe politico-médiatique. Je n’ai pas l’impression que « la France » se soit beaucoup divisé sur la question.]
Si en campagne électorale, la quasi-totalité des candidats nient ce fait historique avec force, c’est qu’ils jugent que leur posture ne leur aliénera pas de vote.
Vous me direz que ce sont les « classes moyennes » qui sont principalement visées actuellement. Alors sans doute avez vous raison.
[Vous faites une énorme confusion. Ce ne sont pas « les institutions » qui empêchent de construire Notre Dame des Landes, d’appliquer les lois ou de riposter à une attaque. Ce sont les hommes qui les gouvernent et qui sont incapables de prendre les décisions. Ce n’est pas le couteau qui est émoussé, c’est la main qui le tient qui est sans volonté.]
On a donc des institutions que nous, Français, ne pouvons (savons ?) pas faire fonctionner puisqu’on n’arrive pas à faire de quelqu’un dont la main ne tremble pas notre président. Ça change vraiment beaucoup de chose ?
@ bip
[La France connaît le plus grand changement démographique en matière ethnique de son histoire.]
Je ne vois toujours pas sur quelles données vous vous appuyez pour répéter cette affirmation. Et par ailleurs, je ne comprends pas très bien ce que vous proposeriez. Voulez-vous légaliser les statistiques ethniques ? Vous voyez d’ici le problème : cela suppose définir des critères objectifs permettant de classifier la population par ethnies. Quels sont les critères que vous proposeriez ?
[Voilà ce qu’en sont réduits à interpréter ceux qui s’intéressent au sujet (…)]
Certains utilisent les données qui les arrangent en fonction des thèses qu’ils entendent soutenir. Si vous lisez avec attention l’article, vous verrez qu’il conclue à une incidence de la drepanocytose de 1/1000. Difficile de conclure à un « grand changement démographique »…
[Vous citez des études qui estiment le nombre de musulmans entre 4 et 7 millions. Peut-être. Ces études indiquent-elles la proportion de musulmans par tranche d’âge ? Indiquent-elles si le nombre de musulmans augmente ? Si non, pourquoi à votre avis ?]
Le problème, c’est que le qualificatif « musulman » ne peut reposer que sur une opinion subjective de l’individu lui-même. Il n’existe pas de critère objectif permettant de déterminer qui est « musulman » et qui ne l’est pas. C’est d’ailleurs le même problème avec toutes les religions : on peut déterminer le nombre de baptisés dans la religion catholique, on peut déterminer le nombre de gens qui se disent catholiques, mais aussi longtemps qu’on ne peut lire dans les pensées des gens, on ne peut déterminer le nombre de croyants catholiques.
Les études ne font que mesurer le nombre de gens qui se disent musulmans. Or, les raisons pour lesquelles on se dit musulman peuvent varier avec le temps, avec l’état de la société, avec l’âge. Une personne qui se dit musulman à 20 ans peut ne pas se dire musulman à 40 ans, et viceversa. On ne peut donc pas appliquer les règles normales aux études démographiques en supposant qu’un jeune musulman produira nécessairement un vieux musulman…
[J’ignorais qu’en France seuls les biens étaient pris en compte dans le calcul de la balance commerciale. Et je cherchais alors ce qu’ils appellent « la balance des biens et des services ». La globalité des échanges avec l’Allemagne donc. Que je ne trouve d’ailleurs toujours pas…]
J’ai trouvé rapidement la balance des biens et services globale, mais pas celle avec l’Allemagne. Elle existe certainement mais il est vrai que le site de l’INSEE contient tellement de choses…
[Ce qui, si j’ai bien compris, indique que l’Allemagne importe de France 67 milliards de biens et services. Selon l’INSEE, la France exporte 71 milliards de biens (sans les services!) en Allemagne.]
Dans la référence que vous donnez, il n’est nulle part indiqué qu’il s’agisse de « biens et services ».
[« Définir un « musulman », ce n’est pas si évident que ça. » Et comme les statistiques ethniques sont interdites, on avance les yeux à demi-fermés…]
Mais les « statistiques ethniques » n’arrangeraient rien. Une véritable « statistique ethnique » est impossible, puisque nous sommes dans l’impossibilité de donner une définition objective de ce qu’est une ethnie. Partout où on prétend faire de la « statistique ethnique », on ne fait qu’une enquête d’opinion. Les « statistiques ethniques » américaines ou britanniques reposent sur l’auto-classement des interrogés dans telle ou telle « ethnie » définie arbitrairement.
La « statistique ethnique » est un leurre, une illusion. Elle n’informe pas de la réalité, mais de la perception individuelle.
[Et un jour des gens ne reconnaissent plus leur pays simplement en se promenant dans leur ville.]
Peut-être, mais ça n’a rien à voir avec « l’ethnie ». Paris n’a pas cessé d’être Paris quand les bretons ont colonisé Montparnasse, et les juifs pieds-noirs n’ont pas fait que Marseille cesse d’être Marseille.
[J’arrive quand même à trouver des explications rationnelles qui justifient qu’on essaye de limiter le nombre de divorce. Un peu moins qui justifient de ne pas boire d’eau lors d’une journée où il fait 40 degrés…]
J’imagine beaucoup d’explications rationnelles pour essayer de limiter le nombre de divorces, mais cela n’a aucun rapport avec l’exemple, qui était le refus de remarier des gens déjà divorcés. J’avoue que j’ai beaucoup plus de mal à trouver des justifications pour cette position… autant que pour l’interdiction de boire lorsqu’il fait 40 degrés. Il ne faudrait pas oublier que la religion catholique a aussi ses fanatiques…
[Alors s’il est nécessaire à certains de croire en Dieu, je sais quelle religion il serait sain de favoriser.]
Laissez-moi deviner… la votre ?
[Ce qui a fait qu’on est passé d’une politique traditionnellement basée sur le soutien aux sources de progrès dans le monde arabe à l’exact inverse est sans doute lié en très grande partie à notre affaiblissement économique et la soumission de notre politique étrangère aux USA, soit donc à la politique du chien crevé au fil de l’eau que vous évoquez régulièrement.]
Tout à fait. Et cela a commencé très tôt : en Afghanistan à la fin des années 1970, pour être précis. Si un jour vous avez du temps, allez dans les archives du « Nouvel Observateur » lire les articles lyriques consacrés aux braves « freedom fighters » qui combattaient le communisme athée en faisant sauter les écoles au nom de leurs traditions ancestrales… Comme ces salauds de soviétiques ont choisi de soutenir les progressistes, il fallait bien qu’on soutienne les réactionnaires, non ?
[En attendant, des dizaines d’agents d’influence (imams notamment) venus du monde sunnite peuvent à loisir s’exprimer sans que ça ait l’air de déranger beaucoup de politiciens qui doivent juger que ça satisfait leurs électeurs…]
Sur ces questions, la vision de nos politiques est « pas de vagues ». Tant que l’économie parallèle et les prêches des imams restaient dans les cités et ne perturbait pas la paix sociale, les politiques n’avaient rien à redire. Il y en a même – j’en connais – qui recommandaient aux forces de police et aux services de l’Etat de ne pas perturber les trafics pour ne pas avoir de problèmes…
[Faire ce choix de politique extérieure a donc été facile. Revenir dessus risque de l’être beaucoup moins, notamment parce que des cellules organisées politiquement vont militer contre.]
Mais vous parlez d’un « choix » qui n’existe pas. La France n’a pas choisi les sunnites contre les chiites : en Libye ou au Mali, elle est intervenue contre les sunnites.
[Note : je ne connais pas trop le sujet, mais vous pensez que le traitement politique français du dossier israëlo-palestinien n’est aucunement influencé par le nombre de Français musulmans ?]
Oui, je le pense. Il n’y a qu’à voir, d’ailleurs : la France a une politique plutôt pro-arabe du temps de De Gaulle, quand le nombre de français musulmans était bien plus faible, elle est devenue clairement pro-israélienne sous Sarkozy alors que les musulmans français n’ont jamais été aussi nombreux…
[« Pourriez-vous élaborer ? Les résultats ne montrent pas que les considérations communautaires aient une grande influence sur le vote des musulmans ».]
En réponse à ma question vous donnez trois liens qui n’y répondent nullement. Le fait que certains élus cherchent à se faire des clientèles en finançant des écoles ou des mosquées n’implique nullement que ces tentatives aient un effet.
[Probablement. Après tout, les attentats anarchistes – par exemple celui qui avait couté la vie à Louis Barthou à Marseille – étaient monnaie courante à une époque. En 1940, ce type d’action était passé de mode, mais rien n’indique que les différentes milices politiques en fussent incapables…]
Si j’en crois wikipedia, c’est un acte ciblé sur des victimes précises commis par des étrangers avec, certes, des « dommages collatéraux ». Pas un attentat-suicide commis par des Français qui a pour but de tuer un maximum de Français innocents pour le compte d’une organisation étrangère.
[Désolé. Je voulais dire que tenter de renverser la République en 1934, c’était certainement une mauvaise chose mais faite pour une bonne raison : ce qu’ils pensaient être l’intérêt de la France. Ce qui peut donc être excusé (vous citez d’ailleurs régulièrement la phrase « Le plus difficile en période troublée n’est pas de faire son devoir, mais de le connaître »).]
Compris, je veux bien. Mais « excusé » ? Faudrait-il excuser les thuriféraires de la « révolution nationale » de Vichy sous prétexte qu’ils pensaient être « l’intérêt de la France » ? Faut il excuser les artisans de la « solution finale » au prétexte qu’ils étaient persuadés que c’était dans l’intérêt de l’Allemagne ? Allons, un peu de sérieux. Oui, « en temps troublés le plus difficile n’est pas de faire son devoir, mais de le connaître ». Cela n’excuse nullement ceux qui ne le connaissent pas.
[Au vu du résultat en 1940 du maintien de la République, un mauvais esprit (anachronique?) pourrait se demander si ça aurait été vraiment pire dans le moyen terme…]
Vous voulez dire, si un fascisme français qui se serait allié directement avec Hitler – un peu comme le fit Mussolini – n’aurait pas été préférable ? Je vous laisse la réponse…
[« Je crois que vous confondez « la France » avec la classe politico-médiatique. Je n’ai pas l’impression que « la France » se soit beaucoup divisé sur la question. » Si en campagne électorale, la quasi-totalité des candidats nient ce fait historique avec force, c’est qu’ils jugent que leur posture ne leur aliénera pas de vote.]
Ici, je pense que vous politisez à l’excès. L’immense majorité des français sait d’où il vient – sur le plan réel mais aussi sur le plan symbolique – et n’a pas besoin que les politiciens le lui disent. Ce n’est pas ça qui guidera le vote, c’est tout juste un élément du « roman » que chaque candidat construit autour de lui. A partir du moment ou Sarkozy a dit « blanc », il était évident que tout le reste de la classe politique allait dire « noir ».
[On a donc des institutions que nous, Français, ne pouvons (savons ?) pas faire fonctionner puisqu’on n’arrive pas à faire de quelqu’un dont la main ne tremble pas notre président. Ça change vraiment beaucoup de chose ?]
Oui. Parce que certains cherchent à nous faire croire que tout le problème est dans les institutions, et donc que la solution de tous nos problèmes réside dans une VIème République. Or, quand on regarde les réformes institutionnelles que nous proposent ceux qui ont depuis trente ans défiguré les institutions de la Vème, on s’aperçoit que ce qui nous est proposé est un retour à l’impuissance. En d’autres termes, au prétexte qu’il n’y a pas de main ferme pour le tenir, on nous propose de remplacer le couteau en acier par un couteau en bois.
Le pourquoi de ce discours est transparent : il permet d’absoudre toute notre classe politique de ses pêchés, mortels comme véniels. Comment leur reprocher d’avoir mal gouverné, d’avoir trahi leurs promesses, saccagé l’économie, présidé à la dissolution de la société, puisqu’ils ne pouvaient pas faire autrement dans le « carcan institutionnel » auquel ils sont soumis…
@ Descartes
[Je ne vois toujours pas sur quelles données vous vous appuyez pour répéter cette affirmation.]
Les vôtres par exemple.
Vous estimez à 4 millions le nombre de musulmans en France. Soit environ 6 % de la population française.
En à peine 60 ans, on est passé d’environ 0 % à au moins 6 % de la population française qui est d’origine ethnique non européenne.
A ma connaissance, ça ne s’est jamais vu.
Par exemple, si on traçait la courbe représentant « la proportion d’habitants du territoire occupée aujourd’hui par la France métropolitaine à n’avoir aucun ancêtre connu né hors du continent européen » de Clovis à aujourd’hui, elle ne serait pas plate et proche de 0 jusqu’en 1950 puis strictement croissante jusqu’à aujourd’hui ?
[Et par ailleurs, je ne comprends pas très bien ce que vous proposeriez. Voulez-vous légaliser les statistiques ethniques ? Vous voyez d’ici le problème : cela suppose définir des critères objectifs permettant de classifier la population par ethnies. Quels sont les critères que vous proposeriez ?]
Je sais pas… « De quel continent sont originaires vos ancêtres ? »
Ce que je sais : « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoires ! »
(C’était de Gaulle – Conversation entre de Gaulle et Alain Peyrefitte le 5 mars 1959 suite aux événements d’Algérie)
Alors si on peut mesurer qu’ils ne sont plus une « petite minorité », la conclusion c’est que la France n’est plus la France.
Et alors se poserait le problème suivant : voulons-nous que la France redevienne la France.
[http://www.fdesouche.com/769997-drepanocytose-la-carte-du-grand-remplacement-mise-jour-2]
[Si vous lisez avec attention l’article, vous verrez qu’il conclue à une incidence de la drepanocytose de 1/1000. Difficile de conclure à un « grand changement démographique »…]
Je ne suis pas sûr de comprendre votre remarque… C’est le nombre de dépistages qui est intéressant à regarder.
L’article explique : « En effet, en raison des particularités ethniques de cette maladie, le dépistage en France métropolitaine ne concerne que les enfants à risque en raison de l’origine de leurs parents (alors qu’il est en revanche systématique chez tous les enfants naissant en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à la Réunion, à Mayotte).
Les données disponibles permettent dès lors d’appréhender la réalité du bouleversement démographique en cours en France. »
[Ce qui, si j’ai bien compris, indique que l’Allemagne importe de France 67 milliards de biens et services. Selon l’INSEE, la France exporte 71 milliards de biens (sans les services!) en Allemagne.]
[Dans la référence que vous donnez, il n’est nulle part indiqué qu’il s’agisse de « biens et services ». ]
C’est ce que j’avais déduit (un peu rapidement…) de cette remarque de l’INSEE : « En France la balance commerciale ne couvre que les biens. Les services sont pris en compte dans la balance des biens et des services contrairement à d’autres pays où la balance commerciale couvre les biens et les services. » ( http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/balance-commerciale.htm )
Et de l’écart de mesure :
– l’INSEE dit déficit de 15,3 (71,4 d’exportations de France en Allemagne et 86,7 d’importations).
– Les allemands disent excédent de 36 (102,9 d’exportations d’Allemagne en France et 66,9 d’importations).
Sacrée différence s’ils comparent exactement la même chose…
[La « statistique ethnique » est un leurre, une illusion. Elle n’informe pas de la réalité, mais de la perception individuelle.]
Donc il est impossible de valider ou d’invalider l’idée de remplacement/dilution de la population autochtone en France ?
[J’arrive quand même à trouver des explications rationnelles qui justifient qu’on essaye de limiter le nombre de divorce. Un peu moins qui justifient de ne pas boire d’eau lors d’une journée où il fait 40 degrés…]
[mais cela n’a aucun rapport avec l’exemple, qui était le refus de remarier des gens déjà divorcés.]
Ceux pour qui il est essentiel d’avoir la bénédiction de l’Église à leur union ne divorcent pas ! Et pour que ça le reste, il est impossible de remarier des divorcés sinon ça ferait jurisprudence.
Bon… j’ignore le nombre de personnes concernées et donc l’utilité du truc.
Mais c’était dans ce sens là que je voyais un rapport.
[Il ne faudrait pas oublier que la religion catholique a aussi ses fanatiques…]
En France, cette religion est tout de même plutôt moribonde.
[Alors s’il est nécessaire à certains de croire en Dieu, je sais quelle religion il serait sain de favoriser.]
[Laissez-moi deviner… la votre ?]
Le BlogDeDescartisme ? J’avoue… 😉
Sérieusement, on sait que la France est la France lorsqu’il y a une majorité de chrétiens. Ça fait une grande différence pour moi avec les autres religions.
[Comme ces salauds de soviétiques ont choisi de soutenir les progressistes, il fallait bien qu’on soutienne les réactionnaires, non ?]
Un peu comme ces salauds de russes ont choisi de soutenir le méchant Bachar alors qu’on soutenait officiellement les gentils terroristes (rebelles modérés de leur petit nom) ?
(officieusement il est même bien possible qu’on soutenait aussi les méchants terroristes du daesh… donc tous les terroristes présents quoi)
[Mais vous parlez d’un « choix » qui n’existe pas. La France n’a pas choisi les sunnites contre les chiites : en Libye ou au Mali, elle est intervenue contre les sunnites.]
Tout espoir n’est pas perdu alors. Si c’est conforme à la volonté US et si nos intérêts économiques nous y poussent, on jouera peut-être la carte chiite un jour…
[Compris, je veux bien. Mais « excusé » ? Faudrait-il excuser les thuriféraires de la « révolution nationale » de Vichy sous prétexte qu’ils pensaient être « l’intérêt de la France » ?]
Je fais quand même une différence entre ceux qui pensent l’intérêt de la France dans une volonté d’indépendance vis-à-vis de toute influence étrangère et ceux qui se soumettent à des pouvoirs étrangers, même s’il en va selon eux de l’intérêt de la France. Pouvoirs étrangers qui nous ont fait la guerre qui plus est.
[Faut il excuser les artisans de la « solution finale » au prétexte qu’ils étaient persuadés que c’était dans l’intérêt de l’Allemagne ? Allons, un peu de sérieux.]
En effet… Ma théorie n’est peut-être pas aussi généralisable que ça… D’un autre côté, si je ne les excuse pas, je ne les comprends pas non plus.
[Au vu du résultat en 1940 du maintien de la République, un mauvais esprit (anachronique?) pourrait se demander si ça aurait été vraiment pire dans le moyen terme…]
[Vous voulez dire, si un fascisme français qui se serait allié directement avec Hitler – un peu comme le fit Mussolini – n’aurait pas été préférable ? Je vous laisse la réponse…]
Ah ben, si ça avait donné un pacte « germano-français » et envoyé les nazis à l’est en premier, mille fois oui !
Avec un délai et l’expérience grandeur nature, même notre commandement militaire complètement idiot aurait revu sa doctrine…
Et qui sait, attaqué l’Allemagne à revers et remis la France dans ses frontières naturelles !
Note : d’ailleurs, j’ai lu (mais je sais plus où ni si c’était sérieux) que si les anglo-américains (avec le concours d’une partie de nos élites sans doute) nous ont empêchés d’écraser Hitler en 1933, c’était justement dans l’idée de l’envoyer sur les communistes. Vous en pensez quoi ?
@ bip
[« Je ne vois toujours pas sur quelles données vous vous appuyez pour répéter cette affirmation (« La France connaît le plus grand changement démographique en matière ethnique de son histoire ») » Les vôtres par exemple.Vous estimez à 4 millions le nombre de musulmans en France. Soit environ 6 % de la population française. En à peine 60 ans, on est passé d’environ 0 % à au moins 6 % de la population française qui est d’origine ethnique non européenne. A ma connaissance, ça ne s’est jamais vu.]
C’est quoi une « origine ethnique non européenne » ? Y aurait-il des « ethnies européennes » et des « ethnies non européennes » ? Je pense que vous êtes sur un terrain éminemment glissant. Les habitants actuels de l’Europe sont dans leur immense majorité venus d’autres continents à différents moments de l’histoire – ou de la préhistoire, pour être précis. A quel moment arrêtez-vous les compteurs ? Les colonisateurs grecs qui ont fondé Massilia venaient de l’Asie Mineure. Etaient-ils « d’ethnie européenne » ? Les juifs qui viennent nombreux en France à la fin du moyen-âge sont-ils « une ethnie européenne » alors que leur origine se trouve là aussi au moyen-orient ?
[Par exemple, si on traçait la courbe représentant « la proportion d’habitants du territoire occupée aujourd’hui par la France métropolitaine à n’avoir aucun ancêtre connu né hors du continent européen » de Clovis à aujourd’hui, elle ne serait pas plate et proche de 0 jusqu’en 1950 puis strictement croissante jusqu’à aujourd’hui ?]
Non. Les tribus germaniques auxquelles appartenait Clovis n’étaient pas natives d’Europe. Même si on ne sait pas exactement d’où ces tribus sont originaires, le consensus est qu’elles viennent d’Asie. La population de la France – si on peut utiliser ce terme anachronique pour désigner le territoire actuel – à l’époque de Clovis avait pour sa grande majorité des ancêtres venus d’ailleurs, pour la plupart d’autres continents. Difficile d’identifier une ethnie « native » de France. Je me demande d’ailleurs pourquoi vous faites une distinction entre les « ethnies européennes » et les autres. Après tout, l’Europe est une convention, pas une réalité géographique ou anthropologique. Tiens, pour vous, les slaves sont une « ethnie européenne » ?
[Je sais pas… « De quel continent sont originaires vos ancêtres ? »]
Vos ancêtres à combien de générations ? Et si vous avez un ancêtre venant d’Asie, un d’Amérique, un d’Afrique et un d’Océanie, vous êtes quoi, exactement ? Quid de ceux qui ont fait plusieurs aller-retour ? Tout ça n’a aucun sens…
[Ce que je sais : « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoires ! » (C’était de Gaulle – Conversation entre de Gaulle et Alain Peyrefitte le 5 mars 1959 suite aux événements d’Algérie)]
Tout à fait. Il ne vous aura pas échappé je pense que la France d’aujourd’hui est quand même à plus de 90% « blanche »…
[L’article explique : « En effet, en raison des particularités ethniques de cette maladie, le dépistage en France métropolitaine ne concerne que les enfants à risque en raison de l’origine de leurs parents (alors qu’il est en revanche systématique chez tous les enfants naissant en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à la Réunion, à Mayotte).
Les données disponibles permettent dès lors d’appréhender la réalité du bouleversement démographique en cours en France. »]
Oui mais les données fournies ne montrent aucun « bouleversement »… les dépistages ne concernant qu’une toute petite minorité…
[« La « statistique ethnique » est un leurre, une illusion. Elle n’informe pas de la réalité, mais de la perception individuelle. » Donc il est impossible de valider ou d’invalider l’idée de remplacement/dilution de la population autochtone en France ?]
On peut parfaitement évaluer la population « autochtone » a condition de la définir clairement. C’est quoi un « autochtone » français ? Une personne née en France ? Une personne dont les deux parents sont nés en France ? Une personne dont les quatre grands parents sont nés en France ? Une personne qui peut tracer au moins un ancêtre né en France depuis le XVIème siècle ? Vous voyez que selon la définition, vous aboutissez à des proportions variables entre les « autochtones » et les autres. Mais surtout, cela ne vous fournit aucune information sur les caractères « ethniques ». Vous trouverez des noirs dont tous les ancêtres habitent et sont nés en France depuis le XVIème siècle, des juifs qui peuvent tracer des ancêtres en France depuis le XIIIème siècle…
[Ceux pour qui il est essentiel d’avoir la bénédiction de l’Église à leur union ne divorcent pas !]
Pourquoi ? On peut divorcer sans se remarier…
[Sérieusement, on sait que la France est la France lorsqu’il y a une majorité de chrétiens. Ça fait une grande différence pour moi avec les autres religions.]
Pour moi aussi… mais il faudrait s’entendre sur la nature de cette différence. Je trouve absurde la demande de ceux qui au nom d’une laïcité bien mal comprises demandent qu’on enlève la croix sur les Invalides, parce que cette croix fait partie de notre histoire – qui est aussi celle des français non-chrétiens. Mais en tant que religion, il n’y a pas à lui accorder des privilèges particuliers.
[Tout espoir n’est pas perdu alors. Si c’est conforme à la volonté US et si nos intérêts économiques nous y poussent, on jouera peut-être la carte chiite un jour…]
A mon sens, on aurait intérêt. L’Iran est un pays qui partage beaucoup de choses avec nous, et semble un allié bien plus fiable qu’un certain nombre de pétromonarchies…
[En effet… Ma théorie n’est peut-être pas aussi généralisable que ça… D’un autre côté, si je ne les excuse pas, je ne les comprends pas non plus.]
On peut comprendre sans excuser.
[Note : d’ailleurs, j’ai lu (mais je sais plus où ni si c’était sérieux) que si les anglo-américains (avec le concours d’une partie de nos élites sans doute) nous ont empêchés d’écraser Hitler en 1933, c’était justement dans l’idée de l’envoyer sur les communistes. Vous en pensez quoi ?]
Que c’est très possible. Les anglo-saxons s’étaient déjà grandement opposés à l’intervention française en Allemagne dans les années 1920, et voyaient d’un très bon œil l’arrivée en Allemagne d’un régime violemment anticommuniste qui renforçait le « cordon sanitaire » autour de l’URSS.
Je préfère “Français juif” à “juif français”, merci.
@ Olivier Bouchard
[Je préfère “Français juif” à “juif français”, merci.]
Je comprends votre point, mais j’avoue que je ne suis pas trop dans la logique du “linguistiquement correct”. L’utilisation de la formule “juif français” me semble parfaitement justifiée lorsqu’on veut souligner les différences existantes entre les juifs de différentes nationalités, et celle de “Français juif” lorsqu’on examine les différences entre les catégories de Français. Le fait de mettre un terme devant l’autre n’implique pas établir une hiérarchie entre les appartenances.
@Descartes
Pour en revenir à votre définition des “classes moyennes”, j’ai bien compris que dans votre définition il n’est pas vraiment question de niveau de revenu, mais est-ce que le salaire moyen ne pourrait pas être tout de même un bon indicateur pour estimer grosso modo la limite entre cette classe sociale et les classes populaires ? J’imagine que ceux qui gagnent plus que le salaire moyen vont être plutôt être perdant dans les mécanismes de redistribution des richesses, alors que ceux qui gagnent moins vont plutôt y être gagnant (bien sûr il faut savoir aussi si on parle de net, brut etc). Parce qu’au final ce qui différencie ces deux classes c’est bien l’intérêt qu’elle a, ou pas, à ce qu’il y ait cette redistribution. Sur ce diagramme ça représente environ 30% de la population, donc ça doit correspondre plus ou moins à vos “classes moyennes”
http://www.alternatives-economiques.fr/pics_bdd/article_options_visuel/A690006B.gif
@ Timo
[Pour en revenir à votre définition des “classes moyennes”, j’ai bien compris que dans votre définition il n’est pas vraiment question de niveau de revenu, mais est-ce que le salaire moyen ne pourrait pas être tout de même un bon indicateur pour estimer grosso modo la limite entre cette classe sociale et les classes populaires ?]
D’une manière très générale, oui. Après tout, si les membres des « classes moyennes » arrivent à récupérer la totalité de la valeur produite par leur travail, leur niveau de vie devrait se situer au dessus du revenu moyen (autrement, il faudrait qu’ils aient une productivité vraiment très faible). Mais cela donne encore un éventail de rémunérations très grand, à l’intérieur duquel vous pouvez trouver des bourgeois – c’est-à-dire, des gens ayant du capital suffisant pour exploiter le travail des autres – des membres des « classes moyennes », mais aussi des prolétaires…
[J’imagine que ceux qui gagnent plus que le salaire moyen vont être plutôt être perdant dans les mécanismes de redistribution des richesses, alors que ceux qui gagnent moins vont plutôt y être gagnant (bien sûr il faut savoir aussi si on parle de net, brut etc). Parce qu’au final ce qui différencie ces deux classes c’est bien l’intérêt qu’elle a, ou pas, à ce qu’il y ait cette redistribution.]
Pas nécessairement. Le socialisme n’implique pas l’uniformisation des revenus, mais la disparition de l’exploitation de l’homme par l’homme. Il ne s’agit pas de redistribuer le revenu de ceux qui sont au dessus de la moyenne à ceux qui sont en dessous, mais de redistribuer le revenu des bourgeois et d’eux seulement.
[Sur ce diagramme ça représente environ 30% de la population, donc ça doit correspondre plus ou moins à vos “classes moyennes”]
Approximativement, oui. Mais d’une part ce 30% inclut aussi la bourgeoisie, et d’un autre il laisse de côté certains métiers de « classe moyenne » mais dont la productivité faible ne permet pas d’en obtenir des revenus importants. J’ajoute que le montant des revenus est moins important que leur nature: un rentier, même si sa rente est minuscule, est un bourgeois et a des intérêts communes avec la bourgeoisie.
Bonjour Descartes,
> Le socialisme n’implique pas l’uniformisation des revenus, mais la disparition de l’exploitation de l’homme par l’homme. Il ne s’agit pas de redistribuer le revenu de ceux qui sont au dessus de la moyenne à ceux qui sont en dessous, mais de redistribuer le revenu des bourgeois et d’eux seulement.
Une petite question : s’agit-il de redistribuer le revenu des bourgeois, ou de supprimer la bourgeoisie en tant que fonction ? Quand on parle de “socialiser” les moyens de production, en général, il s’agit de les placer sous l’autorité d’une puissance prétendant peu ou prou représenter l’intérêt général (abstraction vague et à préciser, certes). Dans un monde “socialiste” tel que vous l’imaginez, y a-t-il encore des détenteurs privés de capital productif ?
@ Antoine
[Une petite question : s’agit-il de redistribuer le revenu des bourgeois, ou de supprimer la bourgeoisie en tant que fonction ?]
Les deux sont dialectiquement liés. Pour enlever à la bourgeoisie le « revenu » tiré de l’exploitation du travail d’autrui, on est conduit à faire disparaître sa « fonction ».
[Quand on parle de “socialiser” les moyens de production, en général, il s’agit de les placer sous l’autorité d’une puissance prétendant peu ou prou représenter l’intérêt général (abstraction vague et à préciser, certes).]
Pas seulement « sous l’autorité ». La « socialisation » ne consiste pas seulement à faire diriger les entreprises par une autorité représentant l’intérêt général qui aurait soin de les gérer dans l’intérêt des détenteurs de capital privé, mais de transférer à cette « autorité » la PROPRIETE des entreprises avec tout ce que cette notion comporte, en particulier l’usufruit.
[Dans un monde “socialiste” tel que vous l’imaginez, y a-t-il encore des détenteurs privés de capital productif ?]
Oui. Et cela sous deux formes. La première, c’est celle des entreprises dont la taille ou le caractère non-stratégique ne justifie pas les coûts et les rigidités d’une gestion publique. Est-il intéressant pour la société que les entreprises de plomberie ou les boulangeries soient « socialisées » ? Bien sur, les patrons plombiers ou les boulangers « exploitent » un ou deux employés. Mais avec une législation sociale bien faite on peut maintenir cette « exploitation » dans des limites raisonnables. Et la petite couche « bourgeoise » qu’on laisse subsister ainsi ne représente pas une menace bien considérable pour le fonctionnement d’une société socialiste.
Le deuxième aspect est celui de la formation du capital. Il y a un intérêt social à encourager les citoyens à différer leur consommation en épargnant une partie de leur revenu, puisque cette épargne permet de constituer du capital. Mais pour que cette épargne ait lieu – dans une société socialiste où l’épargne de précaution est très faible puisque la société prend en charge les accidents – il faut une incitation, et donc une rémunération. On pourrait considérer l’épargnant ainsi rémunéré comme une forme de propriété privée du capital. J’ajoute que ce mécanisme a été expérimenté avec succès dans les pays du « socialisme réel » : en URSS comme en RDA, les livrets d’épargne étaient rémunérés.
@Descartes
[ [Parce qu’au final ce qui différencie ces deux classes c’est bien l’intérêt qu’elle a, ou pas, à ce qu’il y ait cette redistribution.]
Pas nécessairement. Le socialisme n’implique pas l’uniformisation des revenus, mais la disparition de l’exploitation de l’homme par l’homme.]
Je n’ai pas bien compris votre réponse, le fait qu’une idéologie postule telle ou telle chose permet pas de déterminer quels groupes sociaux ont des intérêts en communs. Ce que je disais c’est que si les bourgeois et les “classes moyennes” sont plus liberaux-libertaire alors que les classes populaires sont plus jacobins/souverainistes, c’est qu’ils n’ont pas le même intérêt à ce qu’il y ait un État fort et une cohésion nationale qui permette la solidarité et la redistribution des richesses.
[ Il ne s’agit pas de redistribuer le revenu de ceux qui sont au dessus de la moyenne à ceux qui sont en dessous, mais de redistribuer le revenu des bourgeois et d’eux seulement.]
C’est aussi votre opinion qu’il ne faut redistribuer que le revenu de la bourgeoisie ? En tout cas c’est pas ce qu’on comprend quand on lit vos articles. Et d’ailleurs quand les “classes moyennes” hurlent à tout bout de champs “les 1% les plus riches possèdent 50% des richesses” c’est bien pour dire “il y a largement de quoi piocher chez les bourgeois avant de venir piocher chez nous”
[J’ajoute que le montant des revenus est moins important que leur nature : un rentier, même si sa rente est minuscule, est un bourgeois et a des intérêts communes avec la bourgeoisie.]
J’arrive pas bien à voir pourquoi. Qu’une personne gagne par exemple 3000€ par mois en travaillant, et qu’une autre gagne la même chose par la rente, la part de leur revenu qui va aller à la collectivité va être à peu près la même, les deux vont payer plus ou moins les mêmes impôts (mise à part l’ISF), consommer les mêmes choses, habiter dans les mêmes quartiers, leur enfant iront dans les mêmes écoles, etc.. donc je me dis que leurs intérêts vont être les mêmes.
@ Timo
[Je n’ai pas bien compris votre réponse, le fait qu’une idéologie postule telle ou telle chose permet pas de déterminer quels groupes sociaux ont des intérêts en communs.]
Je ne comprends pas très bien ce que l’idéologie vient faire là dedans.
[Ce que je disais c’est que si les bourgeois et les “classes moyennes” sont plus liberaux-libertaire alors que les classes populaires sont plus jacobins/souverainistes, c’est qu’ils n’ont pas le même intérêt à ce qu’il y ait un État fort et une cohésion nationale qui permette la solidarité et la redistribution des richesses.]
Bien entendu.
[« Il ne s’agit pas de redistribuer le revenu de ceux qui sont au dessus de la moyenne à ceux qui sont en dessous, mais de redistribuer le revenu des bourgeois et d’eux seulement. » C’est aussi votre opinion qu’il ne faut redistribuer que le revenu de la bourgeoisie ?]
Mon « opinion » n’est pas en jeu. Vous m’avez posé une question sur le socialisme, pas sur mon opinion. Le socialisme aboutit, en socialisant les moyens de production, à redistribuer ce qui dans un régime capitaliste est le revenu de la bourgeoisie.
[En tout cas c’est pas ce qu’on comprend quand on lit vos articles.]
C’est dommage, parce que c’est bien mon point. L’abolition de l’exploitation aboutit mécaniquement à enlever à la bourgeoisie la plusvalue extraite du travail salarié et donc à la redistribuer.
[Et d’ailleurs quand les “classes moyennes” hurlent à tout bout de champs “les 1% les plus riches possèdent 50% des richesses” c’est bien pour dire “il y a largement de quoi piocher chez les bourgeois avant de venir piocher chez nous”]
D’abord, il ne faut pas confondre patrimoine et revenu. Ensuite, si les « classes moyennes » cherchent à détourner le projecteur sur les « riches », c’est moins de peur qu’on vienne piocher chez elles que pour pouvoir faire croire aux « pauvres » qu’elles sont de leur côté…
[Je ne comprends pas très bien ce que l’idéologie vient faire là dedans.]
Je parlais du socialisme, c’est bien une idéologie non ?
[Mon « opinion » n’est pas en jeu. Vous m’avez posé une question sur le socialisme, pas sur mon opinion. Le socialisme aboutit, en socialisant les moyens de production, à redistribuer ce qui dans un régime capitaliste est le revenu de la bourgeoisie.]
Non, je n’avais pas parlé de socialisme. Peut être que vous dites ça par le fait que j’ai parlé de classes sociales ? Lorsque l’on parle de classes sociales on doit forcément l’entendre au sens que lui donne le socialisme ? Moi je l’entendais au sens d’un groupe social qui a des intérêts en commun
[C’est dommage, parce que c’est bien mon point. L’abolition de l’exploitation aboutit mécaniquement à enlever à la bourgeoisie la plusvalue extraite du travail salarié et donc à la redistribuer.]
Peut être que je ne comprends pas bien ce que vous entendez par “redistribution des richesses” alors. Par exemple dans cet article, vous dites :
« C’est cela qui explique pourquoi nos chères « classes moyennes », qui se pourlèchent déjà les babines à l’idée qu’elles n’auraient plus à payer pour les écoles, les hôpitaux, l’électricité des pauvres, se sont si facilement converties à la vision « séparatiste » de la société.»
Donc si les “classes moyennes” payent pour l’école, les hôpitaux etc des classes populaires, c’est bien qu’elles leur redistribuent une partie de leur richesse ? Et vous préféreriez que ce ne soit plus le cas ?
@ Timo
[Je parlais du socialisme, c’est bien une idéologie non ?]
Non, c’est un mode de production. Diriez-vous que le servage est une « idéologie » ? Je crois qu’il y a ici une confusion entre ce qui relève de la réalité matérielle et ce qui relève de la représentation. Etre « socialiste » – c’est-à-dire, partisan de l’instauration du socialisme – relève de l’idéologie, parce que le choix partisan relève des représentations et implique de s’inscrire dans un cadre idéologique qui dit ce qui est « bon » et ce qui est « mauvais ». Mais le « socialisme », défini comme un mode de production ou la propriété des grands moyens de production et d’échange est socialisée relève d’une réalité matérielle.
[Lorsque l’on parle de classes sociales on doit forcément l’entendre au sens que lui donne le socialisme ? Moi je l’entendais au sens d’un groupe social qui a des intérêts en commun.
Le « socialisme » ne donne aucun sens aux « classes sociales ». Les « classes sociales » sont une construction du marxisme – qui, lui, est une idéologie. Vous pouvez bien entendu donner à cette expression un autre sens, mais si vous le faites vous devez refaire tout le travail théorique, parce qu’il n’y a aucune raison qu’une théorie pensée en donnant un certain sens aux mots continue de marcher lorsque ce sens change. C’est d’ailleurs par ce biais qu’on arrive à faire dire à certains auteurs le contraire de ce qu’ils ont soutenu en leur temps : il suffit de reprendre leur raisonnement mais en changeant le sens des mots.
Définir une « classe sociale » comme « un groupe social qui a des intérêts communs » conduit à une définition trop hétérogène et trop large. Les joueurs de boules qui ont un « intérêt commun » à l’aménagement d’un boulodrome constituent-ils une « classe sociale » ? La définition marxiste est bien plus restrictive : il ne suffit pas d’avoir des « intérêts communs », encore faut-il que ces « intérêts communs » soient structurels, c’est-à-dire, qu’ils soient liés à la position du groupe social en question dans le mode de production.
[« C’est cela qui explique pourquoi nos chères « classes moyennes », qui se pourlèchent déjà les babines à l’idée qu’elles n’auraient plus à payer pour les écoles, les hôpitaux, l’électricité des pauvres, se sont si facilement converties à la vision « séparatiste » de la société.» Donc si les “classes moyennes” payent pour l’école, les hôpitaux etc des classes populaires, c’est bien qu’elles leur redistribuent une partie de leur richesse ? Et vous préféreriez que ce ne soit plus le cas ?]
Votre question est très pertinente. Vous l’avez posée sous d’autres formes au cours de nos échanges, et elle me conduit à réviser par certains côtés ma théorie sur les « classes moyennes ». Je pense que je ferai un papier sur ça, mais pour faire court il y a une incohérence dans ma présentation qu’il faut résoudre :
J’ai bien dit que les « classes moyennes » se caractérisent par le fait qu’elles récupèrent la totalité de la valeur que produit leur travail, contrairement aux prolétaires, qui eux ne récupèrent qu’une partie en laissant le reste – la plusvalue – dans les mains des bourgeois détenteurs du capital. Cette récupération est possible parce que les « classes moyennes » ont un « capital » matériel et immatériel qui leur permet d’échapper à l’exploitation, mais qui n’est pas suffisant pour exploiter les autres. Jusque là, tout va bien.
Mais s’il en est ainsi, les « classes moyennes » seraient indifférentes au maintient du capitalisme. Après tout, si elles touchent la valeur qu’elles produisent – et rien de plus – le passage au socialisme, avec une juste distribution de la valeur produite, ne devrait pas les affecter. Pourtant, nous constatons chaque jour que ce n’est pas le cas : les « classes moyennes » ont pratiquement partout fait alliance avec la bourgeoisie pour perpétuer le système capitaliste, et partout elles ont joué un rôle de premier plan dans la chute des expériences socialistes. Pourquoi ?
Il faut admettre, qu’au-delà de leur positionnement structurel, il existe pour les « classes moyennes » un avantage au maintien du système capitaliste, qui est de l’ordre de la superstructure. Le rôle central des « classes moyennes » dans l’ordre des idées et de la politique fait que la bourgeoisie a besoin de leur soutien. Et ce soutien se monnaye. Les « classes moyennes », qui récupèrent structurellement la valeur que produit leur travail, récupèrent une partie de la plusvalue encaissée par la bourgeoisie pour prix de leur adhésion au système.
Si les « classes moyennes » payent « pour les écoles, les hôpitaux, l’électricité des pauvres », elles le font dans le cadre des systèmes de redistribution d’une partie de la plusvalue extraite, systèmes de redistribution dont la logique est avant tout une logique de cohésion. Ce paiement apparaît – à l’instar de la charité médiévale – comme une opération de légitimation de la plusvalue. Le bourgeois cesse en apparence d’être un exploiteur puisqu’ il retourne une partie de la plusvalue à la communauté, de la même manière que le seigneur naguère légitimait son statut en faisant l’aumône.
Vous me demandez si « je préfererai que ce ne soit plus le cas », en d’autres termes, que les « classes moyennes » ne payent plus « pour les écoles, les hôpitaux, l’électricité des pauvres ». Je vous réponds « oui », sans hésitation. Mon idéal, c’est une société où il n’y ait plus de « pauvres » qui ont besoin que les « riches » payent leurs services…
@Descartes
[ Il faut admettre, qu’au-delà de leur positionnement structurel, il existe pour les « classes moyennes » un avantage au maintien du système capitaliste, qui est de l’ordre de la superstructure. Le rôle central des « classes moyennes » dans l’ordre des idées et de la politique fait que la bourgeoisie a besoin de leur soutien. Et ce soutien se monnaye. Les « classes moyennes », qui récupèrent structurellement la valeur que produit leur travail, récupèrent une partie de la plusvalue encaissée par la bourgeoisie pour prix de leur adhésion au système]
Mais du coup, qu’est-ce qui différencie “les classes moyennes” et la bourgeoisie si leur capital leur permet toutes les deux de récupérer plus que la valeur produite par leur travail ? Parce que leur “rôle central dans l’ordre des idées et de la politique” c’est une forme de capital immatériel non ? C’est là que vous faites la distinction entre la “structure” et la “superstructure” ? (autrement j’attendrai votre billet sur le sujet pour mieux comprendre votre idée)
@ Timo
[Mais du coup, qu’est-ce qui différencie “les classes moyennes” et la bourgeoisie si leur capital leur permet toutes les deux de récupérer plus que la valeur produite par leur travail ?]
J’y vois deux différences. La première, est dans la nature du capital : la bourgeoisie possède un capital matériel, qu’elle peut transmettre librement à ses enfants. Chez les « classes moyennes », la transmission de ce capital nécessite un effort constant et n’est jamais garantie.
La deuxième différence est que les outils qui permettent à la bourgeoisie d’extraire de la plusvalue sont structurels. Ils tiennent à la forme même du mode de production. Les « classes moyennes » n’ont aucun moyen d’extraire directement de la plusvalue, tout au plus d’obtenir de la bourgeoisie une ristourne d’une partie de celle-ci sur la base d’un rapport de forces toujours précaire.
Ces deux différences vous expliquent pourquoi les « classes moyennes » sont obsédées par la conscience de la fragilité de leur position et par la nécessité de la préserver, bien plus que ne l’est la bourgeoisie.
[Parce que leur “rôle central dans l’ordre des idées et de la politique” c’est une forme de capital immatériel non ?]
Je ne sais pas si on peut parler de « capital ». La croyance des gens que les prêtres parlaient directement aux dieux doit-elle s’analyser pour les prêtres en question comme un « capital » ? Ca me parait difficile… C’est certainement un facteur de pouvoir, mais qui se trouve dans le domaine des idées – la superstructure – et non dans celui du mode de production.
Un petit commentaire sur l’affaire Zemmour? Je la trouve symptomatique d’une société qui s’enfonce dans les excès et le communautarisme (je parle des 2 camps)
@ Barbey
[Un petit commentaire sur l’affaire Zemmour? ]
Quelle “affaire Zemmour” ? Vous voulez parler j’imagine des appels du PS local à l’annulation de la conférence que Zemmour doit tenir à Marseille le 22 septembre prochain. Il faut savoir que les socialistes marseillais, battus à plates coutures lors des élections municipales, départementales et régionales, n’ont plus de “caisse” leur permettant de continuer les politiques clientélistes qui sont de tradition dans la région. N’ayant plus de prébendes à distribuer, ils jouent aujourd’hui cyniquement la carte communautariste, espérant exploiter l’agitation autour de l’Islam et de son exposition publique. On en a vu l’illustration avec Menucci affrontant Valls sur la question de la “burkini” et défendant la liberté de porter le vêtement en question, avec le soutien appuyé des personnalités comme Samia Ghali ou Henri Jibrayel.
“L’affaire Zemmour”, qui monte en épingle une conférence qui sans ça serait resté fort confidentielle, fait partie de cette campagne de repositionnement de la part d’élus qui sont prêts à caresser les pires “séparatismes” pour grappiller quelques voix avec l’espoir, on l’espère déçu, d’être réélus à leurs fauteuils.
Merci Descartes pour votre réponse. je n”avais pas entendu parlé de cette affaire là.
Je parlais plus des propos de Zemmour sur France 5. Ce qui m”a surpris c’est que des “bloggeurs” comme Olivier Berruyer arrive à aller dans l’excès inverse.Un peu comme si le racisme et l’anti-racisme était des opposés
@ Barbey
[Je parlais plus des propos de Zemmour sur France 5. Ce qui m”a surpris c’est que des “bloggeurs” comme Olivier Berruyer arrive à aller dans l’excès inverse. Un peu comme si le racisme et l’anti-racisme était des opposés]
Le problème est que notre système médiatique peut transformer un monsieur-tout-le-monde en penseur. Zemmour n’est pas un intellectuel, c’est un passionnel. Il n’a pas de système. Ce n’est pas un Finkielkraut, capable d’analyser la souffrance que lui cause une situation concrète et d’inscrire cette souffrance dans un cadre phylosophique. C’est un monsieur Michu qui pense avec ses tripes. Et du coup on retrouve dans son discours une grande confusion entre des éléments profondément Républicains et un discours de rejet culturel de l’Islam qui rappelle plutôt celui d’une extrême droite chrétienne traditionaliste.
Pour moi, Zemmour n’est intéressant que parce qu’il est un symptôme. Il est à mon sens injuste de l’accuser d’incitation à la haine parce qu’il « n’incite » à rien du tout. Il ne fait que raconter sa propre souffrance. En cela, il fait œuvre utile : dans une société où on est tenu de manifester en permanence son enthousiasme pour tout ce qui est « nouveau » et « inédit » et applaudir à la disparition du « vieux monde » et l’avènement du nouveau à toutes occasions, il n’y a pas tant de gens que ça pour tirer les sonnettes d’alarme, pour rappeler que nous sommes des objets produits historiquement et que nous couper de cette histoire c’est nous couper de nous-mêmes.
Zemmour le fait. Mal. Avec des approximations. Avec une absence totale de rigueur. Avec des contradictions énormes. Mais ce qu’il dit est moins important que le fait de le dire. C’est pourquoi je partage un peu votre perplexité quant à l’idée de Berruyer de créer un « observatoire » consacré à Zemmour. Personne ne prend Zemmour pour un maître à penser. Mais avec ses outrances et ses excès, Zemmour a réussi à casser un consensus bienpensant et mielleux et à poser un certain nombre de débats sur les médias. Et c’est à ces débats qu’il faudrait se consacrer…
(Notez quand même que Rousseau est en grande partie héritier de Descartes…)
Nous sommes tous ici héritiers de Descartes. Nous devrions l’être davantage de Rousseau, de sa philosophie généreuse avec l’humanité et avec la nature, de la féminité qui y affleure et qui s’absente chez Descartes.
(Au contraire : les institutions publiques jusqu’au plus haut niveau défendent des positions qui sont clairement contraires à toute assimilation. C’est le cas de l’école, qui exalte les « différences » et fait injonction aux élèves issus des minorités d’être « fiers » de leurs origines et de leurs histoires, fierté qui est bien entendu refusée à ceux issus de la majorité. C’est le cas des médias, qui ne perdent pas une opportunité d’exalter tout ce qui est « minoritaire » et de cracher sur l’histoire et la culture « majoritaire ». C’est le cas de différentes associations qui ont élevé la logique de la « haine de soi » au niveau des beaux arts.)
Il est vrai que l’on transmet l’idée que la France rassemble dans un creuset commun des gens de diverses cultures. Les institutions publiques n’exaltent pas les différences, comme vous l’écrivez de manière… exaltée, elles tâchent de les rendre compatibles entre elles grâce à la culture du commun, centrée sur les valeurs de la république. Et c’est évidemment bien davantage ce commun qui est mis en avant. Le problème aujourd’hui, c’est que cette culture du commun relève davantage des promesses électorales que de l’horizon des possibles.
J’ai enseigné les Sciences économiques et sociales (dont des bases de sociologie, de science politique et d’une création scolaire récente : l’ ECJS – éducation à la citoyenneté juridique et sociale). Y étaient saupoudrées des références aux différentes cultures d’origine (la sociologie les nomme d’ailleurs « sous-cultures»). Un saupoudrage qui éloigne de l’assimilation pour mieux renforcer l’intégration à la culture commune. Peut-être s’éloigner un peu de Descartes pour se rapprocher de Rousseau…
Quant à la « fierté qui est bien entendu refusée à ceux issus de la majorité », je laisse à la famille Le Pen ce type d’affirmation sans aucun développement… rationnel, que Descartes aurait sans doute désavoué.
(Mais cet accès est « difficile et même très difficile » pour les français de souche, eux aussi. Allez faire un petit tour à Hénin-Beaumont, à Valenciennes, à Longwy et vous verrez qu’il n’y a pas que les jeunes « issus de l’immigration » qui galèrent. Et pourtant, ces jeunes « gaulois » ne foncent pas sur la foule au volant d’un camion, ne mitraillent pas les terrasses des cafés. Pourquoi, à votre avis ? ).
C’est justement ma région d’origine et là se trouvent en effet beaucoup de Français de souche … immigrée ancienne jusqu’aux Celtes. Dans l’accès au travail, au logement, l’accès à l’argent en général, lorsque la rareté relative s’installe, la concurrence se durcit et sépare. Je vois là le principal moteur de la séparation. Tous les témoignages et les enquêtes concordent : lorsque l’on est d’origine africaine et d’une banlieue de Lens ou d’ Evry, face aux sélectionneurs, on n’est un tout petit peu moins bien placé qu’un jeune à la peau plus claire. Le contre-exemple du foot n’est pas en mesure de contredire cette réalité.
La désespérance peut s’installer au fil des décennies. Lorsque l’on a le sentiment durable et profond que l’on n’a pas d’avenir dans le pays dans lequel on est né, on risque fort de surinvestir ses origines fantasmées, de là où on vient et où on ne peut d’ailleurs d’autant pas « retourner » puisque soi-même on n’en vient pas. L’exploitation par les fous de l’Islam de ce sentiment d’être dans une profonde impasse peut trouver écho dans une petite minorité de ces jeunes et aussi dans quelques convertis tout à fait « de souche » comme vous le dites et dont les patronymes ne sont pas forcément Rodriguez, Cavanna ou Da Silva.
Les élèves d’origine maghrebine que j’ai croisés chaque année étaient évidemment très différents mais ils racontaient cette même expérience quotidienne : des regards, des remarques, des gestes plus ou moins racistes qui s’accumulaient au fil du temps et qui constituaient une expérience particulière que nous ne connaissons pas, vous et moi.
Vous n’en tenez aucunement compte de cela dans votre argumentation. Comme si ce contexte-là n’avait pas d’importance et que les comportements des individus et des « communautés » ne devaient s’expliquer que par eux-mêmes et donc qu’aux seuls plans individuel et communautaire. Comme si le regard critique se refusait à porter sur ce qui fabrique cette compétition et cette crise.
Descartes et Rousseau doivent remuer dans leur tombe.
Cela me fait dire parfois que si les appellations historiques gauche/droite tendent à devenir caduques, on pourrait distinguer plus prosaïquement, celles et ceux qui critiquent le système de celles et ceux qui critiquent ceux qui critiquent le système.
Vilipender la bienpensance à gauche comme à droite, pour comprendre et progresser hors les idéologies.
@ Tout petit Rousseau
[Nous sommes tous ici héritiers de Descartes. Nous devrions l’être davantage de Rousseau, de sa philosophie généreuse avec l’humanité et avec la nature, de la féminité qui y affleure et qui s’absente chez Descartes.]
J’avoue que j’ai toujours eu du mal avec Rousseau. Peut-être à cause de son côté idéaliste, de sa vision réactionnaire – au sens stricte du terme – et de sa logique totalitaire. Je m’interroge toutefois sur la « feminité » de Rousseau. En quoi est-il plus « féminin » que Descartes ?
[Il est vrai que l’on transmet l’idée que la France rassemble dans un creuset commun des gens de diverses cultures. Les institutions publiques n’exaltent pas les différences, comme vous l’écrivez de manière… exaltée, elles tâchent de les rendre compatibles entre elles grâce à la culture du commun, centrée sur les valeurs de la république.]
Non. Quand on voit affichée dans le hall d’une école un planisphère, avec les photos des enfants collées dessus leur « lieu d’origine » et pour titre « je suis fier de venir de… », que fait-on sinon exalter les différences ? Et des exemples comme celui-là, je pourrais vous en sortir des dizaines. La « diversité » est aujourd’hui une valeur, et on ne peut faire de la diversité une valeur sans exalter les différences.
[Et c’est évidemment bien davantage ce commun qui est mis en avant. Le problème aujourd’hui, c’est que cette culture du commun relève davantage des promesses électorales que de l’horizon des possibles.]
Quel « commun » ? C’est quoi la « culture du commun » ? Pourriez-vous être plus explicite ?
[Un saupoudrage qui éloigne de l’assimilation pour mieux renforcer l’intégration à la culture commune.]
Encore une fois, c’est quoi la « culture commune » ? D’où vient-elle ?
[Quant à la « fierté qui est bien entendu refusée à ceux issus de la majorité », je laisse à la famille Le Pen ce type d’affirmation sans aucun développement… rationnel, que Descartes aurait sans doute désavoué.]
La « reductio ad lepenium » n’est pas un argument très sérieux. Un acteur peut aujourd’hui se proclamer « fier d’être noir » ou « fier d’être descendant d’immigrés », et sa déclaration sera accueillie avec bienveillance par ceux dont l’opinion compte. Mais quelle réponse obtiendra un acteur qui se revendiquerait « fier d’être blanc » ou « fier d’être français de souche » ? Portez un t-shirt avec l’inscription « black power », et personne ne vous dira rien. Mais mettez un avec la mention « white power », et on vous crachera à la figure… si vous avez de la chance. On voit fleurir dans le métro des affiches vantant les vertus de « BET, la chaine de la culture noire américaine ». Imaginez-vous des affiches vantant « la culture blanche américaine » ?
Il y a une asymétrie réelle entre la manière sont traitées les « identités minoritaires » vis-à-vis de « l’identité majoritaire ». Les premières sont appelées à la fierté et à porter haut leurs couleurs, les secondes à se frapper la poitrine et à faire profil bas. C’est une réalité, et il serait folie de la « laisser » aux Le Pen…
[Dans l’accès au travail, au logement, l’accès à l’argent en général, lorsque la rareté relative s’installe, la concurrence se durcit et sépare. Je vois là le principal moteur de la séparation.]
Mais vous ne répondez pas à la question. Les jeunes « gaulois » d’Hénin-Beaumont souffrent eux aussi les difficultés d’accès au travail, au logement, à l’argent en général, et pourtant ils ne foncent pas au volant d’un camion sur une foule. Il faut donc croire que la « séparation » n’a pas tout à fait les mêmes effets dans les différentes « communautés ».
[Tous les témoignages et les enquêtes concordent : lorsque l’on est d’origine africaine et d’une banlieue de Lens ou d’ Evry, face aux sélectionneurs, on n’est un tout petit peu moins bien placé qu’un jeune à la peau plus claire.]
Pourquoi, à votre avis ? Pourquoi moi, patron, je préfèrais un « jeune à la peau plus claire » fainéant et incompétent plutôt que de recruter un jeune noir travailleur et compétent ? Croyez-vous vraiment que les gens sont prêts à sacrifier leurs intérêts économiques pour satisfaire un préjugé idiot ?
Bien sur que non. Les choses sont plus complexes que ça. Le choix des recruteurs lorsqu’ils préfèrent un jeune « à la peau plus claire » ou dont l’adresse ne se situe pas dans une cité est un choix rationnel, qui s’appuie sur une longue expérience. Une expérience qui leur montre que statistiquement un candidat « blanc » venant d’un quartier tranquille a moins de chance de provoquer des embrouilles qu’un candidat « noir » venant d’un quartier difficile. Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas des escrocs « blancs » et des « noirs » honnêtes et travailleurs. Mais les gens réagissent à des signes qu’ils ont appris à interpréter. Si je vois un homme ivre s’approcher de moi avec un couteau, je me dis naturellement qu’il a peu de chances de me demander l’heure.
J’ai fait pas mal de recrutement dans ma vie. Et bien, lorsque je reçois un candidat qui s’affale dans sa chaise, qui garde sa casquette visée sur la tête, qui porte chaîne et gourmette en or et qui me parle comme si j’étais un copain de teci, et bien, je n’ai pas envie de le recruter. Et à l’inverse, lorsque je reçois un candidat qui a fait l’effort de mettre un costard – même si on sent qu’il n’est pas habitué – qui se tient droit sur sa chaise, qui me donne du « monsieur », qui de toute évidence fait un effort – même maladroit – pour se conformer, et bien j’ai tout de suite un à priori positif. Parce que je sais qu’il partage – ou qu’il fait l’effort de partager – avec moi des signes et des codes qui rendent la communication possible. Ces signes et ces codes, ce n’est que l’assimilation qui peut les donner. Refuser l’assimilation, c’est perpétuer la discrimination que vous critiquez.
[La désespérance peut s’installer au fil des décennies. Lorsque l’on a le sentiment durable et profond que l’on n’a pas d’avenir dans le pays dans lequel on est né, on risque fort de surinvestir ses origines fantasmées, de là où on vient et où on ne peut d’ailleurs d’autant pas « retourner » puisque soi-même on n’en vient pas.]
Admettons. Mais dans ce cas, ce raisonnement s’applique aussi bien aux « gaulois » qu’aux autres. Pourquoi le jeune chômeur « de souche » d’Hénin-Beaumont, qui a autant de raisons de sentir qu’il n’a pas d’avenir dans le pays où il est né que n’importe quel jeune issu de l’immigration, échapperait à ce besoin de « surinvestir ses origines fantasmées » ? Et pourquoi la société devrait faire preuve de compréhension envers les uns et pas envers les autres ?
[Les élèves d’origine maghrebine que j’ai croisés chaque année étaient évidemment très différents mais ils racontaient cette même expérience quotidienne : des regards, des remarques, des gestes plus ou moins racistes qui s’accumulaient au fil du temps et qui constituaient une expérience particulière que nous ne connaissons pas, vous et moi.]
Vous êtes vous demandé pourquoi, alors que vos élèves d’origine maghrébine souffraient des regards, des remarques, des gestes plus ou moins racistes, ils ne faisaient rien pour éviter ce qui pouvait les provoquer ? Parce que, croyez-moi, on jette rarement des regards, on fait rarement des remarques racistes à des jeunes habillés discrètement, qui parlent doucement et en français, qui cèdent le siège ou le passage, qui ne jettent pas des canettes par terre. Il faut savoir ce qu’on veut. Si on veut imposer ses codes, on ne peut pas s’étonner d’être rejeté.
C’est là je crois le nœud de la question. On ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre, les avantages de la France tout en vivant « comme au pays ». Personne n’a un droit acquis à être accepté par les autres. On nous accepte parce que nous acceptons en retour de payer le prix, qui est de nous conformer à certains codes, à certains cadres. On peut toujours se rebeller contre ceux-ci, mais on ne peut pas avoir en même temps la liberté du rebelle et la tranquillité du conformiste.
[Vous n’en tenez aucunement compte de cela dans votre argumentation. Comme si ce contexte-là n’avait pas d’importance et que les comportements des individus et des « communautés » ne devaient s’expliquer que par eux-mêmes et donc qu’aux seuls plans individuel et communautaire. Comme si le regard critique se refusait à porter sur ce qui fabrique cette compétition et cette crise.]
Le problème, c’est que ce « contexte » comme vous dites n’est pas explicatif. En effet, nous avons des populations différentes qui sont soumis au même « contexte » et qui pourtant en tirent des conclusions et des réactions diamétralement opposées. Il me faut donc aller chercher des explications ailleurs que dans le « contexte ».
[Descartes et Rousseau doivent remuer dans leur tombe.]
Ne vous en faites pas, ils en ont vu d’autres…
[Cela me fait dire parfois que si les appellations historiques gauche/droite tendent à devenir caduques, on pourrait distinguer plus prosaïquement, celles et ceux qui critiquent le système de celles et ceux qui critiquent ceux qui critiquent le système.]
La difficulté, c’est qu’il faut savoir de quel « système » on parle. Parce que ceux qui font profession de « critiquer le système » forment aussi un « système ». Pour vous, une organisation comme SOS-racisme est de celles qui « critiquent le système », ou de celles qui « critiquent ceux qui critiquent le système » ?
Je préfère en effet Rousseau plus sensible il me semble à Descartes plus… cartésien.
Si la définition qui est donnée dans ce texte de ce qu’est une communauté dans nos sociétés me parait couvrir le phénomène communautaire, il n’en va pas de même lorsque l’auteur affirme “C’est pourquoi les « communautés » immigrées craignent avant tout l’assimilation…. Les « communautés » développent donc des mécanismes de défense pour empêcher l’assimilation de leurs membres. Et le mécanisme le plus évident est celui qu’on pourrait appeler le mécanisme de séparation.”
Je n’ai pas le sentiment que les parents de ces jeunes qui se font embrigader soient toujours partie prenante de cet empêchement et de la mécanique de séparation. Et surtout, aucune allusion n’est faite au contexte sociétal actuel qui affirme haut et fort sa volonté d’intégration voire d’assimilation des individus d’origine immigrée et qui pratiquement la rend difficile et même très difficile du fait d’une compétition exacerbée pour le travail et pour le logement, deux nécessités vitales et deux éléments fondamentaux de l’ intégration sociale qui sont depuis 30 ans en situation de pénurie. 30 ans, c’est aussi l’âge de ces jeunes terroristes.
Bref, réduire la question aux comportements des communautés, cela peut sembler plus acceptable qu’en rester au niveau exclusif de l’individu, de sa psychologie et de sa responsabilité. Mais la même démarche se retrouve : réduire l’explication à un seul élément, cela ne me semble pas sans présupposé et/ou intention idéologique. A-ton besoin d’idéologie pour tenter de comprendre et d’agir au mieux ?
@ Rousseau
[Je préfère en effet Rousseau plus sensible il me semble à Descartes plus… cartésien.]
Notez quand même que Rousseau est en grande partie héritier de Descartes…
[Je n’ai pas le sentiment que les parents de ces jeunes qui se font embrigader soient toujours partie prenante de cet empêchement et de la mécanique de séparation.]
Je ne saurais pas dire en général. On a relativement peu d’information sur les parents des « radicalisés ». Cependant, dans les rares cas où on les a vus dans les médias, les mères étaient rigoureusement voilées. Ce n’est pas un signe d’assimilation.
[Et surtout, aucune allusion n’est faite au contexte sociétal actuel qui affirme haut et fort sa volonté d’intégration voire d’assimilation des individus d’origine immigrée (…)]
Au contraire : les institutions publiques jusqu’au plus haut niveau défendent des positions qui sont clairement contraires à toute assimilation. C’est le cas de l’école, qui exalte les « différences » et fait injonction aux élèves issus des minorités d’être « fiers » de leurs origines et de leurs histoires, fierté qui est bien entendu refusée à ceux issus de la majorité. C’est le cas des médias, qui ne perdent pas une opportunité d’exalter tout ce qui est « minoritaire » et de cracher sur l’histoire et la culture « majoritaire ». C’est le cas de différentes associations qui ont élevé la logique de la « haine de soi » au niveau des beaux arts.
Je vous mets au défi de trouver dans le « contexte sociétal actuel » une affirmation « haut et fort » d’une volonté d’assimilation. J’attends avec curiosité vos exemples…
Ce que le « contexte sociétal actuel » affirme, c’est bien une volonté « d’intégration ». Mais cela n’a rien à voir avec l’assimilation. L’intégration, dans cette logique, consiste à ce que chacun vive selon sa « culture », et s’abstienne de taper sur les autres. Rien de plus.
[et qui pratiquement la rend difficile et même très difficile du fait d’une compétition exacerbée pour le travail et pour le logement, deux nécessités vitales et deux éléments fondamentaux de l’ intégration sociale qui sont depuis 30 ans en situation de pénurie. 30 ans, c’est aussi l’âge de ces jeunes terroristes.]
Mais cet accès est « difficile et même très difficile » pour les français de souche, eux aussi. Allez faire un petit tour à Hénin-Beaumont, à Valenciennes, à Longwy et vous verrez qu’il n’y a pas que les jeunes « issus de l’immigration » qui galèrent. Et pourtant, ces jeunes « gaulois » ne foncent pas sur la foule au volant d’un camion, ne mitraillent pas les terrasses des cafés. Pourquoi, à votre avis ?
[Bref, réduire la question aux comportements des communautés, cela peut sembler plus acceptable qu’en rester au niveau exclusif de l’individu, de sa psychologie et de sa responsabilité.]
Il faut commencer par observer la réalité. Et la réalité est qu’on observe des comportements individuels qui, curieusement, sont les mêmes pour les membres d’une même communauté et qu’on ne retrouve pas en dehors. Comment analyser ce phénomène en restant « au niveau de l’individu, sa psychologie et sa responsabilité » ? Clairement, c’est impossible. Il faut bien s’interroger donc sur la dynamique communautaire elle-même, et les effets qu’elle a sur le comportement des individus.
[A-t-on besoin d’idéologie pour tenter de comprendre et d’agir au mieux ?]
Sans aucun doute. Sans idéologie, aucune analyse n’est possible…
Ben oui, je ne vous connais pas, je vous rappelle que vous êtes anonyme, je ne sais rien de votre honnêteté intellectuelle. Vous n’avez pas lieu de vous offenser.
Mais tout à fait d’accord pour cesser d’échanger avec vous.
Quand on tape dans google “la femme est immanence, l’homme est transcendance”, on n’obtient que deux pages… du blog de Descartes. Je vois donc que vous aviez déjà employé cette formule dans vos commentaires sur “Baupin dans la fosse aux lions”. Cela me conduit à lire ceci de votre plume :
“On connaît des dizaines de poètes qui ont idéalisé la femme. Peu de poétesses ont idéalisé l’homme. Il semble que cette capacité d’idéalisation soit, elle aussi, sexuée.”
et :
“Les femmes sont aujourd’hui largement représentées parmi les réalisateurs, mais aucune n’a produit quelque chose qui ressemble à « Psychose », à « L’ange bleu », à « Boulevard du crépuscule ». On trouve des réalisateurs qui ont campé des personnages de femme sublimes, mais pour le moment aucune réalisatrice ne nous a donné un personnage d’homme qui sorte de l’ordinaire. C’est d’ailleurs la même chose en littérature : même les plus grandes n’ont finalement donné qu’une littérature du quotidien.”
La tête me tourne en lisant cela. Et dire que j’avais vanté votre article sur Baupin auprès de mon entourage. J’ai honte !
Par ailleurs, la courtoisie est censée être le mot d’ordre de ce blog, mais je me fais traiter de mégère (cf les fines plaisanteries de Marcailloux).
Lors de votre prochain “café politique”, ne vous étonnez plus s’il n’y a que des hommes !
@ Nana85
[Ben oui, je ne vous connais pas, je vous rappelle que vous êtes anonyme, je ne sais rien de votre honnêteté intellectuelle.]
Il faut éviter d’opiner sur des sujets sur lesquels « vous ne savez rien ».
[Mais tout à fait d’accord pour cesser d’échanger avec vous.]
Je vous l’ai déjà dit, vous êtes libre. Si vous voulez écrire, vous écrivez, si vous ne voulez pas, vous n’écrivez pas. Pas la peine de faire proclamer par crieur. Et je vous le répète : vous cherchez depuis un bout de temps à vous faire chasser, et je ne vous donnerai pas cette satisfaction. Si vous partez, vous partirez de votre propre choix.
[Par ailleurs, la courtoisie est censée être le mot d’ordre de ce blog, mais je me fais traiter de mégère (cf les fines plaisanteries de Marcailloux).]
Il n’y a pas manquement à la courtoisie à appeler un chat un chat à condition d’y mettre les formes. Si vous vous permettez des remarques acides ou désagréables, il ne faut pas vous étonner de voir le même type de remarque en retour.
[Lors de votre prochain “café politique”, ne vous étonnez plus s’il n’y a que des hommes !]
Vous voulez dire qu’elles seraient trop bêtes pour y venir ? Permettez-moi d’être en total désaccord.
Une dernière chose, Descartes : j’ai lancé une recherche dans les œuvres complètes de Freud en anglais disponibles en pdf ici :
https://www.valas.fr/IMG/pdf/Freud_Complete_Works.pdf
Pas plus d'”immanence” ni de “transcendence” que de beurre en broche !
Allez, je vous laisse continuer de raconter des bobards pour étayer vos théories, avec votre ton docte et péremptoire, puisque ça vous amuse tellement.
Salut
Cultiver sa différence, si peu qu’on soit conscient de celle-ci, oblige quelque peu à se marginaliser. Du moins à oser exposer son originalité et s’affranchir ainsi du regard éventuellement réprobateur de l’autre, c’est courir le risque d’être incompris,rejeté, mal aimé ou de déplaire, mais c’est surtout devenir un être totalement abouti !
Qu’est-ce qu’être original, concrètement ? C’est avant tout, éloigner toute fadeur de son existence. Donner au plus banal de nos gestes du quotidien, une signification bien plus sophistiquée et complexe, qu’elle pourrait revêtir, en temps normal.
Investir la marge devient une évidence à quiconque ne veut rester « ignoré » dans son fonctionnement particulier, si tant est que son originalité affirmée le conduise à se comporter en adéquation avec son potentiel (non ordinaire) de base.
Le besoin (non pas nécessairement narcissique) d’imprimer sa marque dans la réalité et sur la réalité, que l’on souhaite épouser, ni pour le meilleur, ni pour le pire, mais pour le plaisir d’assumer intégralement qui on est, fondamentalement.
Ce qui est inné chez un individu ne doit en aucun cas être nié, quel que soit le jugement d’autrui porté sur lui ou ses agissements, tant qu’ils ne sont en rien nuisibles au bon fonctionnement de la société.
Ce n’est nullement rejeter les codes de « bonne conduite » édictés par la société (bien pensante ?) et suivis par le plus grand nombre que de se revendiquer d’un autre calibre !
Bien au contraire, ce qui ne vous ressemble pas est autrement plus fascinant et plus à même de combler vos manques.
Et dans une relation amoureuse/amicale, il en va de même de la survie de ladite relation ! Pour cela, la sortie de ce que j’appelle « sa zone de confort » est indispensable ! Vive la complémentarité.
Point de menaces donc à redouter à se retrouver confronté à des personnes échappant aux canons du formatage.
Mieux, avoir mille et une occasions dans sa vie banale de tous les jours, de vibrer au-delà de ce qui vous est, pensez-vous, permis, est on ne peut plus vivifiant.
Je pense que l’égoïsme loin d’être un vilain défaut, est nécessaire. Car avant d’être en capacité de répondre présent aux besoins d’autrui sur un plan donné, il faut déjà que vos propres besoins aient été identifiés, pleinement exprimés et qu’ils aient été reconnus tant par vous-même que par les autres, en tant que puissant moteur de réalisation.
Si vous ne savez pas nager, il ne servira à rien de vous jeter à l’eau pour aller repêcher quelqu’un en train de se noyer. D’où donc l’importance d’être en capacité d’intervenir sinon cela ne fera qu’ajouter du tragique à une situation désespérée.
S’affranchir des convenances, du regard « formaté » de la majorité, est une expérience très révélatrice sur le plan personnel, si peu que l’on soit désireux d’en admettre les retombées tant positives que négatives.
Nul rejet à attendre de la part d’autrui, si votre « originalité » vous habite de manière authentiquement vérifiable, à savoir rester entièrement fidèle à « soi-même », transposable et multi-repositionnable, armé d’une très bonne capacité d’adaptation.
Il n’est point besoin d’être « infréquentable » pour assumer son originalité.
!
Il faut déjà être son meilleur ami avant que de revendiquer de devenir l’ami d’autrui.
Les mal en point tout occupés qu’ils sont à ne pas sombrer, ne sont d’aucun secours pour personne et déjà pas pour eux-mêmes ! Il leur faut donc panser leurs blessures…
Un poète, un musicien, de part l’exacerbation de sa sensibilité, mise à nue, du fait de la démonstration sans retenue de l’expression de ses tourments, esthétiquement transposés, ouvre la voie de la consolation et donc de la guérison.
On peut donc parfaitement se révéler à autrui en assumant totalement sa part de marginalité/originalité (à visée non agressive), essentielle à celui qui brigue, en quelque sorte, un statut d’artiste ou du moins ayant tendance à laisser exploser dans sa vie de tous les jours, le côté créatif/fantaisiste qui est en lui, y compris dans l’exécution, par exemple, d’une activité professionnelle, même partiellement éloignée de ses dispositions naturelles !
La fantaisie parfaitement dosée et exprimée de manière subtile, ne s’oppose ni au sérieux, ni à la rigueur.
Il n’est nul besoin d’avoir une « aura » à portée internationale pour exprimer son art/côté artiste ; il suffit d’être crédible et jugé « authentique » par ceux, qui se reconnaissent à votre contact, aptes à faire naître en eux, mille feux dans les recoins inconnus de leurs pensées, les moins accessibles au commun des mortels.
Fonctionner mieux mais pas nécessairement en roue totalement libre, telle est la devise des idéalistes/marginaux/originaux.
Ce qui est visé n’est certainement pas la chute vertigineuse mais de contourner habilement ce qui est figé.
Devenir un être abouti, privé d’aucun sens qui ne lui soit interdit de développer jusqu’aux limites de ce qui est acceptablement toléré, en société, voilà un défi que tout être libre de ses mouvements, indépendamment de son groupe social d’appartenance, a le devoir de se lancer.
Alors pas n’importe comment. Toujours y mettre les formes !
George Sand, qui s’est efforcée, dans une très large partie de son œuvre et de par sa posture à la marge des mœurs de son époque, de modifier les mentalités de ses contemporains, trouverait donc toute sa place dans ce débat sur l’égalité effective et nécessaire entre les sexes.
Quoi de mieux pour éclairer sa journée, en ce dimanche pluvieux, que de conclure sur l’oeuvre d’une femme de très haute valeur artistique et intellectuelle.
@ Femme des années 80
[Cultiver sa différence, si peu qu’on soit conscient de celle-ci, oblige quelque peu à se marginaliser. Du moins à oser exposer son originalité et s’affranchir ainsi du regard éventuellement réprobateur de l’autre, c’est courir le risque d’être incompris, rejeté, mal aimé ou de déplaire, mais c’est surtout devenir un être totalement abouti !]
D’abord, je pense que vous faites une confusion entre la « différence » entre un individu et un autre, et la « différence » entre un cadre communautaire et un autre. Une femme maghrébine qui porte le voile n’exprime aucune individualité : elle ne fait que se conformer à la règle de sa « communauté », règle qui prétend justement uniformiser les comportements, et non les individualiser. Lorsque je parlais de la « glorification des différences », il ne s’agissait bien entendu pas, dans ce contexte, des différences de choix individuels mais au contraire des différences d’appartenance.
[Ce qui est inné chez un individu ne doit en aucun cas être nié, quel que soit le jugement d’autrui porté sur lui ou ses agissements, tant qu’ils ne sont en rien nuisibles au bon fonctionnement de la société.]
Désolé, mais là vous m’avez perdu. Ce qui est inné ne PEUT être nié. Nier que nous avons deux jambes et deux bras, c’est comme nier que le soleil se lève à l’est. Mais il y a fort peu de chose qui soit « inné » dans l’être humain. Nous sommes essentiellement des êtres culturels et historiques.
[Nul rejet à attendre de la part d’autrui, si votre « originalité » vous habite de manière authentiquement vérifiable, à savoir rester entièrement fidèle à « soi-même », transposable et multi-repositionnable, armé d’une très bonne capacité d’adaptation. Il n’est point besoin d’être « infréquentable » pour assumer son originalité.]
Vous pouvez vous attendre à être rejeté si vous pissez sur les gens, même si « votre originalité vous habite de manière authentiquement vérifiable ». Non, « l’authenticité » ne justifie pas tout, et ne rend pas tout acceptable.
[Un poète, un musicien, de part l’exacerbation de sa sensibilité, mise à nue, du fait de la démonstration sans retenue de l’expression de ses tourments, esthétiquement transposés, ouvre la voie de la consolation et donc de la guérison.]
Pas nécessairement. Pas besoin d’être « tourmenté » pour être un grand artiste. Je pense que vous avez une vision très romantique du monde…
Je me permets de corriger ce passage, qui sans cela, n’appuierait pas assez fort, là où je voulais en venir :
“Devenir un être abouti, privé d’aucun sens qui ne lui soit interdit de développer, bien au-delà des limites (et non pas jusqu’aux limites) acceptablement tolérées, en société, voilà un défi que tout être libre de ses mouvements, indépendamment de son groupe social d’appartenance, a le devoir de se lancer.
Alors pas n’importe comment. Toujours y mettre les formes !”
La dernière étude sortie sur l’opinion des musulmans de France réalisée par l’institut Montaigne ne pousse guère à l’optimisme quant à l’assimilation des populations musulmanes. Il faut bien reconnaitre que de la dérive vers l’affrontement semble inéluctable, tant les divergences avec les populations autochtones se maintiennent, voire s’accroissent. L’immense majorité d’entre eux même les soi-disant laïcs font du hallal un marqueur identitaire, et près de 32% qui déclarent les lois islamiques supérieures à celles de la république. Je suis certain que les chiffres auraient été bien moindres il y a 20 ans. Il ne faut pas désespérer, mais il y a de fortes chances pour que cette situation finisse par un divorce plus ou moins violent à terme.
http://www.lejdd.fr/Societe/Religion/Religion-famille-societe-qui-sont-vraiment-les-musulmans-de-France-810217
@yann
J’ai répondu en grande partie à votre commentaire en répondant à Antoine. Il est en effet malheureux de ne pas disposer d’une étude équivalente faite il y a vingt ou trente ans.
Bonjour Descartes,
Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de l’enquête récemment publiée (IFOP / institut Montaigne) sur les musulmans vivant en France (pas tous des Français, il faut le noter : 25% des enquêtés sont étrangers). Je trouve les chiffres assez inquiétants, et largement supérieurs à ce que j’imaginais : environ un quart des musulmans sont pour le port du voile *intégral*, et une proportion équivalente ont adopté, selon les termes de l’enquête, un “système de valeurs clairement opposé aux valeurs de la République” (ce que les médias ont résumé en disant qu’ils plaçent la charia au-dessus de la Loi française) … La grande majorité se conforme aux interdits alimentaires (le “hallal”), ce qui dénote pour ma part une religiosité plus grande que prévue.
Néanmoins, j’aurais bien aimé des résultats concernant les seuls Français musulmans, sachant que tous les étrangers vivant en France n’ont pas vocation à y rester durablement.
@ Antoine
[Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de l’enquête récemment publiée (IFOP / institut Montaigne) sur les musulmans vivant en France (pas tous des Français, il faut le noter : 25% des enquêtés sont étrangers).]
L’enquête ne porte pas sur « les musulmans vivant en France », ce qui serait impossible puisqu’il n’existe pas de définition objective de ce qu’est un « musulman ». Comment a été constitué l’échantillon ? « L’Ifop a eu recours à un très vaste échantillon national représentatif, de plus de 15 000 personnes, à l’intérieur duquel un sous-échantillon de 1 029 personnes SE DECLARANT DE CONFESSION MUSULMANE ou ayant au moins un parent musulman a été extrait » (c’est moi qui souligne). Ce mode de constitution apport un biais assez évident : les musulmans les plus intégristes auront bien plus tendance à se déclarer eux-mêmes comme tels que les musulmans assimilés qui auront cessé de pratiquer régulièrement et qui auront plus tendance à se considérer comme « non-croyants ».
En d’autres termes, l’étude de l’IFOP est une étude des musulmans se déclarant tels, et non des gens issus de la culture musulmane en général. Et c’est ainsi qu’il faut l’interpréter. Pas étonnant qu’on retrouve un taux de réponses « séparatistes » anormalement élevé, puisque la question qui a servi à définir l’échantillon est elle-même « séparatiste ».
[Je trouve les chiffres assez inquiétants, et largement supérieurs à ce que j’imaginais : environ un quart des musulmans sont pour le port du voile *intégral*, et une proportion équivalente ont adopté, selon les termes de l’enquête, un “système de valeurs clairement opposé aux valeurs de la République” (ce que les médias ont résumé en disant qu’ils plaçent la charia au-dessus de la Loi française) … La grande majorité se conforme aux interdits alimentaires (le “hallal”), ce qui dénote pour ma part une religiosité plus grande que prévue.]
Je ne comprends pas pourquoi cela vous étonne. Cela fait trente ans – une génération – que la doctrine officielle rejette l’assimilation pour lui préférer l’intégration. Et bien, l’intégration, c’est ça. Chacun doit être fier de ce qu’il est, et garder ses valeurs, ses règles de sociabilité, etc. Pourquoi vous étonnez-vous qu’une proportion importante de musulmans suivent ce qui est prescrit officiellement ?
Ces résultats ne peuvent étonner que ceux qui ont cru, contre toute évidence, que l’assimilation est un processus naturel, qu’il suffit de laisser passer le temps pour qu’elle s’accomplisse. Et bien non, ce n’est pas comme ça que ça marche. Sans un effort soutenu, sans une pression constante, chacun fait le choix de facilité qui est de rester comme il est, avec les gens qu’il connaît et qui vivent comme lui.
@Descartes,
> L’enquête ne porte pas sur « les musulmans vivant en France », ce qui serait impossible puisqu’il n’existe pas de définition objective de ce qu’est un « musulman ». Comment a été constitué l’échantillon ?
Je ne comprends pas votre objection. Il s’agit en soi d’une définition objective : est musulman celui qui à la question “êtes-vous de confession musulmane” répond “oui”. Ce protocole semble simple, précis et sans ambiguïté.
Il ne peut y avoir un biais que par rapport à l’objet postulé de l’étude. Or l’étude s’intéresse aux “personnes musulmanes, et issues de familles musulmanes” (notons tout de même la virgule qui implique un “ou” logique, comme le confirme la constitution de l’échantillon : parmi les 1029 personnes, 874 se définissent comme « musulmans » (page 13 du rapport) ).
Sur le plan statistique, il s’agit ici de 7% de l’échantillon représentatif (1029 personnes se déclarant de confession musulmane sur 15000), ce qui correspond à peu près aux autres données connues concernant le nombre de “musulmans” en France, à savoir entre 4 et 5 millions de personnes sur les 65 millions d’habitants de notre pays. Il est probable que ce sous-ensemble de 1029 personnes soit représentatif des 4 à 5 millions de personnes “musulmanes” en France.
Nous avons donc, sur ces 4 à 5 millions de personnes, plus d’un quart qui ont les opinions sus-mentionnées. C’est un nombre considérable, je trouve, beaucoup plus que ce qui est habituellement allégué concernant la proportion soi-disant très minoritaire de tendances communautaristes.
> Pourquoi vous étonnez-vous qu’une proportion importante de musulmans suivent ce qui est prescrit officiellement ?
Je n’ai pas lu qu’il soit prescrit officiellement d’être pour le port du voile intégral. Les lois passées ces quinze dernières années vont dans le sens inverse, et le discours public également (à part une frange minoritaire de la gauche, il n’y a guère de monde pour chanter les mérites du voile intégral : à peu près tous les politiciens du PS au FN sont contre, à des degrés divers d’engagement). Les lois n’ont guère été remises en cause, sauf par des minorités militantes, et aucun candidat déclaré à l’élection présidentielle ne semble décidé à les assouplir.
De même, je vois mal la République actuelle, fût-elle “intégratrice” plutôt qu'”assimilationniste”, prescrire que la charia ait la même valeur ou devienne supérieure aux lois de la République.
Bref, la minorité de musulmans dont il est question va, il me semble, beaucoup plus loin que ce qui est “prescrit officiellement”.
@ Antoine
[Je ne comprends pas votre objection. Il s’agit en soi d’une définition objective : est musulman celui qui à la question “êtes-vous de confession musulmane” répond “oui”. Ce protocole semble simple, précis et sans ambiguïté.]
Il est peut-être simple, précis et sans ambiguïté, mais il n’est pas « objectif » en ce qu’il dépend non pas d’un critère mesurable et vérifiable, mais d’une opinion. Sans une définition précise de ce que constitue un « musulman », on laisse à chacun le choix – en fonction de critères tout à fait personnels et invérifiables – de se qualifier ainsi ou pas. Pour certains, « musulman » implique une vraie croyance. Pour d’autres, une pratique de certains gestes traditionnels. Pour d’autres encore une simple adhésion culturelle. Et pour certains, une simple filiation. Faire un échantillon sur la base de ce que les gens pensent d’eux-mêmes fabrique un groupe très hétérogène. Et surtout, élimine tous ceux qui, tout en croyant ou en pratiquant un certain nombre de gestes traditionnels, ne se considèrent pas « musulmans » parce qu’étant assimilés ils ne font pas de leur religion un caractère identitaire.
[Sur le plan statistique, il s’agit ici de 7% de l’échantillon représentatif (1029 personnes se déclarant de confession musulmane sur 15000),]
Non. Comme vous l’indiquez vous-même, seules 874 se déclarent « musulmanes ». Cela représente seulement 6% de l’échantillon, ce qui représente à peine 3 millions de musulmans sur la population (car il faut compter seulement les français de plus de 15 ans, ce qui ne fait pas 66 millions mais plutôt 52…). Cela tend à montrer que l’échantillon ne compte pas un certain nombre de musulmans, probablement parce qu’étant assimilés ils répugnent à se qualifier comme tels. On peut supposer donc que l’échantillon surestime la représentativité des plus engagés, et si on suppose que les musulmans représentent entre 4 et 5 millions, le chiffre de 3 millions auquel on aboutit montre que la sous-estimation est de l’ordre de 25 à 40%.
[Je n’ai pas lu qu’il soit prescrit officiellement d’être pour le port du voile intégral. Les lois passées ces quinze dernières années vont dans le sens inverse, et le discours public également (à part une frange minoritaire de la gauche, il n’y a guère de monde pour chanter les mérites du voile intégral : à peu près tous les politiciens du PS au FN sont contre, à des degrés divers d’engagement). Les lois n’ont guère été remises en cause, sauf par des minorités militantes, et aucun candidat déclaré à l’élection présidentielle ne semble décidé à les assouplir.]
Je ne suis pas persuadé. Sur le langage officiel, s’il est exact qu’on ne prescrit pas le voile intégral, depuis trente ans on invite les populations immigrés d’être « fières » de leurs origines, de leurs coutumes, de leur sociabilité, de leurs traditions, et on les encourage à les conserver. La logique de « la France métissée » ou chacun est encouragé conserver sa « culture » est depuis trente-cinq ans la tarte à la crème de toutes sortes d’institutions, y compris l’école. Et pour les gens qui sont habitués dans leurs pays ou dans leurs communautés à porter le voile intégral, ce message vaut injonction à le porter.
Je vous rappelle aussi que l’interdiction du voile à l’école n’a pas été une mesure consensuelle : la « gauche plurielle » a tergiversé pendant cinq ans pour ne pas prendre des mesures, et il a fallu le retour de la droite au pouvoir en 2002 pour qu’une loi soit votée. Quant à la loi contre le voile intégral, elle a été contestée par l’ensemble de la classe médiatique, et présentée comme une mesure scélérate du candidat Sarkozy destinée à séduire l’électorat FN. Je vous rappelle aussi qu’avec de très rares exceptions l’ensemble de la classe politico-médiatique a condamné la publication des caricatures du prophète par Charlie-Hebdo – quelquefois dans des termes qui mériteraient d’être mieux connus de tous, maintenant qu’on connaît la fin de l’histoire.
Ces éléments et beaucoup d’autres m’amènent à persister sur mon opinion : notre société transmet – et pas qu’aux musulmans d’ailleurs – un message positif envers les comportements communautaristes, jusqu’à justifier leurs excès au nom de la « culpabilité coloniale » et du « racisme ». Et lorsqu’on répète aux gens qu’il sont des victimes et qu’ils ne peuvent attendre le salut que de leur communauté, on ne peut ensuite s’étonner qu’ils le croient.
[De même, je vois mal la République actuelle, fût-elle « intégratrice » plutôt « qu’assimilationniste », prescrire que la charia ait la même valeur ou devienne supérieure aux lois de la République.]
Et pourtant, là encore, les musulmans ne font que suivre un comportement qui est général. Vous trouverez des militants d’associations à Calais et ailleurs qui aident des migrants en situation irrégulière à échapper à l’expulsion. Pourtant, la loi de la République est très explicite à ce sujet. Et que vous disent-ils lorsque vous leur posez la question ? Et bien, qu’il y a des lois morales – les leurs, bien entendu – qui sont supérieures aux lois de la République. Allez sur la ZAD de Notre Dame des Landes, et demandez aux occupants pourquoi ils s’opposent par la violence à l’exécution des lois de la République. Là encore, ils invoqueront leurs croyances écologistes en les mettant au dessus de la loi. Il ne manque donc pas des minorités qui mettent leurs morale, leur éthique, au dessus des lois de la République. Ces gens-là sont ils condamnés par les institutions ? Non, bien sur que non. Au contraire : nos médias en font des Robin Hood modernes. Alors, pourquoi refuser aux musulmans le même raisonnement ?
Je pense que vous sous-estimez la puissance les messages que notre société transmet. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le passage de l’assimilation à l’intégration coïncide avec la désacralisation de la loi de la République. On trouve dans ce processus la montée en puissance de la vision « libérale-libertaire » qui aboutit à l’omnipotence individuelle contre la loi commune. Dans cette vision, il n’y a plus d’assimilation possible, puisqu’il n’y a plus de « commun » auquel on puisse s’assimiler. Et si chacun fait sa loi, pourquoi pas la Charia ?
@Descartes
> Il est peut-être simple, précis et sans ambiguïté, mais il n’est pas « objectif » en ce qu’il dépend non pas d’un critère mesurable et vérifiable, mais d’une opinion.
Je ne suis pas d’accord. Une opinion n’est pas un critère mesurable, mais la déclaration d’une opinion est bel et bien un critère mesurable et vérifiable (objectivement). Par exemple en posant simplement la question correspondante (ici “êtes-vous de confession musulmane” qui n’appelle que deux réponses : “oui” et “non”).
J’ai l’impression que vous avez du mal à considérer les faits sociaux comme objectifs. L’expression d’une opinion est un fait social. Le fait de voter X ou Y à une élection (c’est-à-dire de dire si l’on préfère X ou Y) est aussi un fait social. Considérez-vous que l’expression d’une préférence politique via le vote ou l’élection n’est pas un critère objectif et qu’il ne saurait être utilisé en sciences sociales ? Qu’on ne saurait, par exemple, faire une étude sur les électeurs PCF (par exemple leurs traits culturels, leur degré d’assimilation, etc.) parce que leur préférence est subjective, et qu’il faudrait plutôt adopter une définition “objective” de ce qu’est un communiste ?
> Faire un échantillon sur la base de ce que les gens pensent d’eux-mêmes fabrique un groupe très hétérogène.
Ne faut-il étudier que des groupes homogènes ? Si le groupe des gens se disant musulmans (ou “de confession musulmane”) s’avère très hétérogène, n’est-ce pas justement un fait digne d’être quantifié – ce que fait l’étude ?
Du reste, avant de savoir si un groupe est homogène ou non (dans les diverses dimensions que l’on se proposer d’étudier), encore faut-il commencer par l’étudier…
> Et surtout, élimine tous ceux qui, tout en croyant ou en pratiquant un certain nombre de gestes traditionnels, ne se considèrent pas « musulmans » parce qu’étant assimilés ils ne font pas de leur religion un caractère identitaire
Il faudrait d’abord que vous prouviez qu’existent ces personnes, et en nombre significatif. À mon avis, il est extrêmement improbable que quelqu’un qui suit les prescriptions et rites de la religion musulmane (respectivement catholique, etc.) réponde “non” à la question “êtes-vous de confession musulmane” (respectivement catholique, etc.).
Vous avez décidé que répondre “oui” à la question “êtes-vous de confession musulmane” donnerait à cette réponse “un caractère identitaire”. Mais je ne vois pas pourquoi ce serait le cas. Si l’on me demande si je suis athée, je réponds “oui” sans y mettre la moindre revendication identitaire et encore moins sécessionniste. En général, on ne ment qu’avec des raisons sérieuses, et je ne vois pas quelle est la raison sérieuse qui pousserait ici quelqu’un à cacher son appartenance religieuse.
> Cela tend à montrer que l’échantillon ne compte pas un certain nombre de musulmans
Désolé, mais je ne vois pas comment vous pouvez dire cela. Si vous décidez que le terme “musulman” n’a pas de définition précise, alors il est impossible de donner crédit à une quelconque quantification précise du nombre de “musulmans” en France, et il est impossible de dire ensuite que l’échantillon ne compterait pas tous les “musulmans”.
Ou alors, c’est que vous pensez, contrairement à ce qu’il m’a semblé, que le terme “musulman” admet une définition précise et suffisamment pertinente (hors de celle basée sur l’auto-déclaration). Dans ce cas, il serait bon que vous la donniez et la justifiiez (peut-être dans un article consacré au sujet ?).
> Ces éléments et beaucoup d’autres m’amènent à persister sur mon opinion : notre société transmet – et pas qu’aux musulmans d’ailleurs – un message positif envers les comportements communautaristes
C’est en partie vrai, mais c’est aussi plus complexe. Il y a *à la fois* un encouragement à la “différence” et une pression croissante à l’assimilation (lois sur le voile, par exemple, mais aussi les polémiques de plus en plus fréquentes où des incidents locaux – souvent rapportés de façon précipitée et très approximative – prennent une forte résonance dans les médias nationaux, ce qui indique une exaspération de la population qui ne peut échapper aux musulmans eux-mêmes).
Injonctions contradictoires dont on peut craindre, par ailleurs, qu’elles ne faciliteront pas la tâche des personnes concernées…
@ Antoine
[Je ne suis pas d’accord. Une opinion n’est pas un critère mesurable, mais la déclaration d’une opinion est bel et bien un critère mesurable et vérifiable (objectivement). Par exemple en posant simplement la question correspondante (ici “êtes-vous de confession musulmane” qui n’appelle que deux réponses : “oui” et “non”).]
Tout a fait. Et de cette réponse je peux déduire OBJECTIVEMENT que celui qui répond « oui » à la question se QUALIFIE lui même comme étant « de confession musulmane ». Mais puis-je déduire qu’il l’est ? Pour cela, il me faut définir exactement quelles sont les caractères définissant une personne comme étant « de confession musulmane ». Seulement, cette définition n’est pas nécessairement la même pour moi et pour la personne interrogée. Et c’est là qu’apparaît la subjectivité. En d’autres termes, lorsque je dis « monsieur X a répondu positivement à la question « êtes vous de confession musulmane ? » » je fais une constatation objective. Lorsque je dis « monsieur X parce qu’il a répondu positivement à la question EST de confession musulmane », je me remets à la subjectivité de monsieur X, dont les critères pour juger s’il est ou non « de confession musulmane » ne sont pas nécessairement les mêmes que les miens – et en plus me sont inconnus.
Je vais vous donner un exemple classique : à la question « êtes vous plus intelligent que la moyenne », 80% des américains répondent « oui ». Voilà donc une constatation « objective ». Mais pouvez-vous en déduire « objectivement » que 80% des américains SONT plus intelligents que la moyenne ? Ce serait fort gênant… parce que vous vous trouveriez avec une constatation qui est en même temps « objective », et fausse ! Là encore, vous avez le même problème que dans notre cas : vous demandez aux gens de s’évaluer eux-mêmes sans que les critères d’évaluation soient objectifs – puisque chacun apprécie son intelligence et celle des autres (ou le fait d’être « de confession musulmane, dans notre cas) en fonction de ses propres critères.
[J’ai l’impression que vous avez du mal à considérer les faits sociaux comme objectifs. L’expression d’une opinion est un fait social. Le fait de voter X ou Y à une élection (c’est-à-dire de dire si l’on préfère X ou Y) est aussi un fait social.]
Je ne sais pas ce qu’est un « fait social ». Un « fait » est un « fait ». Un « fait » n’est d’ailleurs ni objectif ni subjectif, il est. C’est la qualification du fait qui peut être objective ou subjective. Lorsque je constate que X a voté pour Sarkozy, c’est une constatation objective. Lorsque je déclare que puisque X a voté pour Sarkozy on en déduit que X aime Sarkozy, j’exprime une opinion purement subjective, puisque je n’ai aucun moyen « objectif » de mesurer l’amour de X.
[Considérez-vous que l’expression d’une préférence politique via le vote ou l’élection n’est pas un critère objectif et qu’il ne saurait être utilisé en sciences sociales ?]
Le résultat du vote est un élément objectif. Mais l’interprétation qu’on fait en termes de volonté des électeurs est, en l’absence d’autres éléments pour l’objectiver, très largement subjective.
[Qu’on ne saurait, par exemple, faire une étude sur les électeurs PCF (par exemple leurs traits culturels, leur degré d’assimilation, etc.) parce que leur préférence est subjective, et qu’il faudrait plutôt adopter une définition “objective” de ce qu’est un communiste ?]
Prenons cet exemple, il est intéressant. Si je veux faire une étude sur les électeurs PCF, je dois d’abord définir un échantillon. Et pour définir cet échantillon il me faut définir ce que constitue un « électeur PCF ». Est-ce un individu qui a voté pour une liste labellisée « PCF » aux dernières élections ? Aux deux dernières élections ? Aux trois dernières élections ? Dois-je compter ceux qui ont soutenu une liste non labellisée mais conduite par une personnalité connue pour appartenir au PCF ?
Une fois que j’ai défini ces critères, je peux constituer l’échantillon de deux manières. Je peux lui demander succéssivement s’il remplit ces différentes caractéristiques (« avez-vous voté une liste labellisée PCF aux trois dernières élections ? »), et s’il les remplit, le classer OBJECTIVEMENT comme « électeur PCF ». Mais je peux aussi lui demander directement « vous qualifieriez vous d’électeur PCF ? ». Et s’il répond « oui », le mettre dans l’échantillon.
Vous voyez bien que dans le dernier cas le classement est SUBJECTIF,puisque c’est le sujet interrogé qui fixe les critères de qualification, et que ces critères peuvent être différents de sujet à sujet. Certains considéreront qu’il suffit d’avoir voté une fois pour le PCF, d’autres de le faire régulièrement, d’autres d’avoir l’intention de le faire même si on ne l’a jamais fait par le passé…
La subjectivité, je le répète, n’est pas dans le fait qu’on étudie une opinion (par essence subjective) mais dans les fait que le critère d’étude de cette opinion n’est pas fixé objectivement.
[« Faire un échantillon sur la base de ce que les gens pensent d’eux-mêmes fabrique un groupe très hétérogène ». Ne faut-il étudier que des groupes homogènes ?]
Lorsqu’on constitue un échantillon, on cherche l’homogénéité sur un critère. Si on veut savoir ce que votent les français, on ne met pas dans l’échantillon des allemands.
[Si le groupe des gens se disant musulmans (ou “de confession musulmane”) s’avère très hétérogène, n’est-ce pas justement un fait digne d’être quantifié – ce que fait l’étude ?]
Pas s’il s’avère « très hétérogène » sur le critère même sur lequel l’échantillon est constitué. Si l’échantillon inclut beaucoup de non-musulmans (mais se disant musulmans), l’étude ne fournira guère de conclusions valables sur les pratiques des musulmans.
[Du reste, avant de savoir si un groupe est homogène ou non (dans les diverses dimensions que l’on se proposer d’étudier), encore faut-il commencer par l’étudier…]
Lorsque je disais qu’une sélection par auto-qualification fabrique un groupe très hétérogène, je pensais « hétérogène » vis-à-vis du critère de sélection.
[Il faudrait d’abord que vous prouviez qu’existent ces personnes, et en nombre significatif. À mon avis, il est extrêmement improbable que quelqu’un qui suit les prescriptions et rites de la religion musulmane (respectivement catholique, etc.) réponde “non” à la question “êtes-vous de confession musulmane” (respectivement catholique, etc.).]
Je ne vois rien de « improbable » là dedans. Cela dépend beaucoup de la manière et du contexte dans lequel la question est posée. On sait bien par exemple que les enquêtes d’opinion sous-estiment largement le vote FN parce que beaucoup d’électeurs hésitent à confier aux enquêteurs une opinion qui s’écarte de la norme. Je sais que mon père se serait qualifié « de confession juive » par fidélité à la tradition alors qu’il a toute sa vie mangé du porc et mis pied dans une synagogue que pour les mariages et les enterrements. Vous savez, ce n’est pas parce que vous posez une question que les gens répondent ce qu’ils pensent…
Le fait est que ni vous ni moi n’en savons rien, et que l’étude telle qu’elle a été conduite ne permet pas de répondre à cette question.
[Vous avez décidé que répondre “oui” à la question “êtes-vous de confession musulmane” donnerait à cette réponse “un caractère identitaire”. Mais je ne vois pas pourquoi ce serait le cas.]
Je me fonde en cela sur la réaction de mes propres parents, athées convaincus mais qui se seraient qualifiés de « juifs » par fidélité à une tradition si on leur avait posé la question. N’oubliez pas que « musulman » n’est pas seulement, dans le contexte d’aujourd’hui, un qualificatif religieux. Il fait référence à une appartenance culturelle et même, pour certains, à ethnique. Ne parle-t-on chez certains de « racisme antimusulman » ?
[Si l’on me demande si je suis athée, je réponds “oui” sans y mettre la moindre revendication identitaire et encore moins sécessionniste.]
Je ne sais pas quelle religion pratiquaient vos parents et quelles sont vos origines. Mais il est toujours plus facile de se détacher d’une religion lorsqu’on appartient au groupe majoritaire, où la religion n’est pas le seul support de l’identité. Lorsqu’il s’agit de groupes minoritaires – et en plus immigrés – la religion, la culture et l’identité sont souvent très intimement mêlées. Et répondre « athée » apparaît souvent comme une trahison aux ancêtres.
[En général, on ne ment qu’avec des raisons sérieuses, et je ne vois pas quelle est la raison sérieuse qui pousserait ici quelqu’un à cacher son appartenance religieuse.]
Dans un sondage ? Vous rigolez… Les sondeurs savent bien que les sondés mentent beaucoup, et souvent pour des motifs banaux. Le plus classique est de vouloir plaire au sondeur – surtout si c’est une belle fille ou un beau garçon. Avouerez-vous à une charmante interrogatrice que vous votez pour le FN, que vous ne lisez jamais un livre, que vous ne vous intéressez pas à la politique ou que vous battez votre femme ?
[Désolé, mais je ne vois pas comment vous pouvez dire cela. Si vous décidez que le terme “musulman” n’a pas de définition précise, alors il est impossible de donner crédit à une quelconque quantification précise du nombre de “musulmans” en France, et il est impossible de dire ensuite que l’échantillon ne compterait pas tous les “musulmans”.]
Vous avez raison, j’aurais du préciser que j’entendais ici « musulman » au sens culturel du terme (c’est-à-dire, issus de familles ayant pratiqué la religion islamique, qu’ils le pratiquent eux-mêmes ou non).
[C’est en partie vrai, mais c’est aussi plus complexe. Il y a *à la fois* un encouragement à la “différence” et une pression croissante à l’assimilation (lois sur le voile, par exemple, mais aussi les polémiques de plus en plus fréquentes où des incidents locaux – souvent rapportés de façon précipitée et très approximative – prennent une forte résonance dans les médias nationaux, ce qui indique une exaspération de la population qui ne peut échapper aux musulmans eux-mêmes).]
Je ne vois toujours pas où est cette « pression croissante à l’assimilation ». Les lois sur le voile ne constituent pas une « pression à l’assimilation », tout au plus exigent-elles une concession très limitée dans le temps et dans l’espace aux règles de la sociabilité française. Je crois qu’il faut comprendre que la différence entre « intégration » et « assimilation » n’est pas une différence de degré, mais d’essence. L’assimilation – comme son étymologie l’indique – implique « devenir comme l’autre », c’est-à-dire adopter les comportements, les références, les loyautés, les symboles et les faire siens. La simple obéissance aux lois de la République n’y suffit pas. Les lois sur le voile font plus partie de la panoplie de l’intégration que de celle de l’assimilation.
@Descartes,
> j’aurais du préciser que j’entendais ici « musulman » au sens culturel du terme (c’est-à-dire, issus de familles ayant pratiqué la religion islamique, qu’ils le pratiquent eux-mêmes ou non)
Ok, cela éclaircit votre position. Ceci dit, je ne vois pas a priori de raison de penser que cette définition soit meilleure (plus opérante) pour une enquête sociologique que celle utilisée par l’enquête. L’échantillon serait probablement différent, mais serait-il plus intéressant ?
> Je sais que mon père se serait qualifié « de confession juive » par fidélité à la tradition alors qu’il a toute sa vie mangé du porc et mis pied dans une synagogue que pour les mariages et les enterrements.
Si votre père se serait qualifié “de confession juive”, pourquoi lui contesteriez-vous cette qualité ? Êtes-vous mieux placé que lui pour décider à quelle confession il appartient ? J’ai du mal à imaginer pourquoi.
Mes parents se disent catholiques et même croyants alors que je ne les ai jamais vus aller à la messe (en-dehors des mariages et enterrements, comme pour votre père). Je ne vois pas pourquoi je leur contesterais ces appartenances revendiquées : ils sont mieux placés pour moi pour savoir s’ils “croient” au Dieu catholique, quel que soit le sens exact qu’ils donnent à cette expression. Je n’aurais pas de problème à ce qu’ils soient comptés comme “catholiques” dans une enquête sociologique.
> Ne parle-t-on chez certains de « racisme antimusulman » ?
Certains parlent aussi de racisme anti-vieux, anti-pauvres, etc. Le terme “racisme” est utilisé à toutes les sauces, et en dépit du bon sens. Mais je ne vois pas en quoi cela prouverait que les vieux ou les pauvres seraient désormais une appartenance raciale ou ethnique, seulement que le sens des mots s’estompe chez certains.
> Lorsqu’il s’agit de groupes minoritaires – et en plus immigrés – la religion, la culture et l’identité sont souvent très intimement mêlées.
Certes, l’étude ne prétend pas séparer pratiquants et non-pratiquants, croyants et non-croyants. Elle étudie les gens qui se disent “musulmans”. La présentation des résultats est succincte (j’ai l’impression que c’est loin d’être une enquête très fouillée), et une étude des facteurs de revendication de cette “confession musulmane” aurait pu être instructive. Il y manque aussi une discussion de la signification de cette catégorie “musulmans”.
Ceci dit, je continue à trouver les résultats intéressants. Par ailleurs, cela ouvre la voie à d’autres études plus fouillées ou plus pointues sur le sujet.
@ Antoine
[Ok, cela éclaircit votre position. Ceci dit, je ne vois pas a priori de raison de penser que cette définition soit meilleure (plus opérante) pour une enquête sociologique que celle utilisée par l’enquête. L’échantillon serait probablement différent, mais serait-il plus intéressant ?]
Oui, je pense, parce qu’il serait une photographie plus exacte de la « communauté » qui pose problème, et serait moins biaisé envers les secteurs les plus extrémistes de cette communauté.
[« Je sais que mon père se serait qualifié « de confession juive » par fidélité à la tradition alors qu’il a toute sa vie mangé du porc et mis pied dans une synagogue que pour les mariages et les enterrements ». Si votre père se serait qualifié “de confession juive”, pourquoi lui contesteriez-vous cette qualité ?]
Je ne lui « conteste » rien du tout. Je vous signale simplement que moi-même, qui suis objectivement dans la même situation que lui, je ne me serais pas qualifié « de confession juive ». En d’autres termes, j’aurais été exclu de l’échantillon et pas mon père, alors que sa pratique religieuse et la mienne sont exactement équivalentes, et que la seule différence est qu’il a vécu son enfance dans un contexte communautaire, et pas moi. La confection de l’échantillon sur le simple fondement de l’opinion que chacun a de sa propre pratique introduit un biais qui privilégie les individus les plus « communautarisés ».
[« Lorsqu’il s’agit de groupes minoritaires – et en plus immigrés – la religion, la culture et l’identité sont souvent très intimement mêlées ». Certes, l’étude ne prétend pas séparer pratiquants et non-pratiquants, croyants et non-croyants. Elle étudie les gens qui se disent “musulmans”.]
C’était précisément là mon point : l’enquête n’étudie pas « les musulmans », elle étudie « les gens qui se disent musulmans ». Contrairement à ce que le titre de l’enquête laisse penser…
[Ceci dit, je continue à trouver les résultats intéressants. Par ailleurs, cela ouvre la voie à d’autres études plus fouillées ou plus pointues sur le sujet.]
Je n’ai pas dit le contraire. Une étude sur les gens « qui se disent musulmans » peut être très intéressante. Mais on ne peut pas en tirer des conclusions sur le comportement des « musulmans » sans prendre des précautions extrêmes, et notamment sans savoir quels sont les critères qui conduisent « ceux qui se disent musulmans » à se qualifier ainsi.
Voici ce qu’on eput lire dans un article récent de J. Sapir :
“C’est la distinction entre l’intégration, qui est un impératif pour qui veut faire partie du « corps politique » et s’engage à en respecter les principes fondateurs, et l’assimilation qui est, et qui doit, rester un choix individuel.”
Voir ici : http://russeurope.hypotheses.org/5275
N’est-ce pas en contradiction avec ce que vous avancez ici, cher Descartes ?
Une occasion de re-clarifier les deux notions ?
@ Anne Iversaire
[« C’est la distinction entre l’intégration, qui est un impératif pour qui veut faire partie du « corps politique » et s’engage à en respecter les principes fondateurs, et l’assimilation qui est, et qui doit, rester un choix individuel. » N’est-ce pas en contradiction avec ce que vous avancez ici, cher Descartes ?]
Je ne dirais pas une « contradiction », mais certainement une différence d’opinion… 😉
En fait, la différence porte sur les conditions d’appartenance au « corps politique ». Sapir défend une appartenance qui est purement intellectuelle : il suffit de « accepter la culture politique française » sans renoncer à sa culture d’origine pour autant que celle-ci soit « compatible » avec elle. Pour moi, au contraire, la condition d’appartenance au « corps politique » est la solidarité inconditionnelle et impersonnelle entre ses membres, et cette solidarité ne peut exister que si ces membres partagent non seulement une « culture politique », mais aussi une sociabilité, une symbolique, un cadre de référence.
Ce désaccord entre Sapir et moi recouvre en fait une différence importante dans l’idée que nous nous faisons de la genèse de ce « corps politique » national. Pour Sapir, celui-ci se constitue par la mémoire des luttes. Pour moi, il se constitue dialectiquement par la constitution d’un réseau d’intérêts communs et des institutions capables de les défendre en créant des solidarités inconditionnelles et impersonnelles. Sapir en conclut qu’il suffit d’accepter cette « mémoire » pour intégrer le corps politique, alors que pour moi il faut au contraire rentrer dans cette dialectique de la solidarité…
[Une occasion de re-clarifier les deux notions ?]
Lesquelles ? Celles d’intégration et d’assimilation ?
L’intégration est un rapport qui ne s’étend qu’à la sphère publique. L’étranger « intégré » bénéficie de l’ensemble des droits et se considère soumis à l’ensemble des normes obligatoires fixées pour lui par la collectivité d’accueil – y compris lorsque ceux-ci contredisent sa culture d’origine. Mais l’intégration n’a pas d’effet dans la sphère privée : dans celle-ci, l’individu conserve la sociabilité, les règles et les interdits de la culture d’origine.
L’assimilation est un rapport qui dépasse la sphère publique et s’étend à la sphère privée. Non seulement l’assimilé se soumet aux normes obligatoires, mais il fait aussi siennes les prescriptions, les signes, les symboles de nature privée qui relèvent de la sociabilité dans la collectivité d’accueil.
L’intégration est l’établissement d’un rapport juridique, l’assimilation est l’établissement d’un rapport charnel. L’intégré aspire à vivre en paix avec la communauté d’accueil, l’assimilé à en faire partie.
@Descartes
Non, je n’ai fait aucune confusion. J’avoue que les raisons de telle communauté à s’enhardir à brandir voile (quand ce n’est pas la tenue de belphégor intégrale) et autre instrument de propagande, m’insupportent déjà bien assez comme ça pour ne pas avoir l’envie de broder autour de sujets menant tout droit au casse-pipe, si peu que vous développiez un peu trop franchement votre opinion sur le sujet.
Nationaliste-ethniciste l’a excellemment bien fait et ça me suffit de dire que je me rallie à son opinion.
Point non plus de glorification, à mon sens, quant à assumer ses choix individuels !
C’est juste une question de ne se renier sur aucun point, de s’assumer tel que l’on est fondamentalement ! plaire (ou non) aux autres tel que l’on est et que l’on s’est construit, au fil des ans. Ni inférieur, ni supérieur à autrui, juste en phase avec soi et les autres, apprécié (ou non), armé de ses différences !
Il est vrai qu’il est plus simple (et le plus grand nombre s’y plie surtout pour cette raison principale) de se fondre dans la masse et de ne point trop attiser curiosité (malsaine ?) et incompréhension.
En ces temps de pure morosité, je préfère, il est vrai, occuper mes quelques rares heures de pure liberté, à élever mon âme, plutôt qu’à voir le paysage dans lequel j’évolue, obscurci par je ne sais quelles formes hideuses !
Alors vision romantique du monde, dites-vous ? Oui on peut dire ça, quand j’éprouve le besoin de me ressourcer à l’ombre de Hölderlin, par exemple !
Le repli sur soi, le temps nécessaire pour ne pas se perdre de vue, est le seul remède efficace et totalement naturel que je connaisse, quand trop d’éléments extérieurs malfaisants menacent de tarir ma source d’inspiration.
@ Femme des années 80
[C’est juste une question de ne se renier sur aucun point, de s’assumer tel que l’on est fondamentalement !]
Mais porquoi, bon dieu ! Pourquoi voulez-vous inerdire aux gens d’évoluer, de changer, de s’améliorer au contact de l’autre ? Si je découvre que j’ai fait fausse route, pourquoi devrais-je m’interdire de me « renier » ? Pourquoi faut-il s’enfermer dans ce qu’on est « fondamentalement », comme si c’était une essence ?
@Descartes
« Je suis bien un clouscardien. »
Et vous êtes bien le seul, curieusement… Même si certaines orientations de la revue du projet ne doivent pas vous déplaire (cf : http://projet.pcf.fr/