C’était ce jeudi dans l’émission « C’est dans l’air ». La discussion a tourné vers l’éternel sujet de l’apprentissage. Avec les discours germanolâtres habituels – normal, Elie Cohen était sur le plateau – sur le thème « tout le monde le sait, tout le monde est d’accord, l’apprentissage est la voie de l’avenir ». Et chaque invité d’y aller de son commentaire sur le thème « en France, les parents continuent à orienter leurs enfants sur la voie de l’enseignement classique, alors que l’apprentissage enseigne un véritable métier ». Et tout le monde de conclure qu’il est essentiel d’élargir l’apprentissage et convaincre les parents.
Si j’avais pu, j’aurais posé aux invités présents sur le plateau – tous des représentants éminents des classes moyennes – une question très simple : qui d’entre vous a mis ses propres enfants en apprentissage ? A votre avis, qu’aurait répondu ce cher Elie Cohen, économiste médiatique ? Qu’aurait répondu Michel Chassaing, représentant de l’union des professions libérales ? Qu’aurait répondu Mathilde Cassan, économiste à la banque HSBC, et d’autres invités dont je n’ai pas retenu le nom mais dont je peux vous assurer qu’aucun n’était ouvrier métallurgiste ?
Cette émission, c’était la caricature des classes moyennes prêchant le « faites ce que je dis, pas ce que je fais ». L’apprentissage, c’est merveilleux, c’est entendu. Mais c’est merveilleux pour les enfants des autres, jamais pour les siens. C’est bon pour les enfants d’ouvrier, qu’il est urgent de pousser dans ce sens pour libérer les places sur les filières générales. Et qui bénéficiera des places ainsi libérées ? Vous avez tout compris…
Si nos ministres, nos économistes, nos journalistes veulent relancer l’apprentissage, il y a à mon avis une méthode infaillible : donner l’exemple. Si l’ensemble de nos élites envoyait publiquement et massivement ses enfants à l’apprentissage, les français verraient certainement combien l’apprentissage est bon pour leurs enfants…
Elle n’est pas bonne, mon idée ?
Descartes
Bonsoir Descartes,
votre coup de gueule mérite d’être recyclé (je sais bien que vous n’êtes pas un fan de l’écologie, mais là, c’est pour la bonne cause…)!
Tiens, à mon tour, maintenant: pourquoi ne pas l’appliquer au discours du "métissage" et du "vivrensemble"? Combien des bobos qui somment les Français des couches populaires d’accueillir toujours plus d’immigrés inassimilables et à surtout à vivre à leurs côtés, sont prêts à en faire autant?
J’attends d’autres suggestions de la part des commentateurs de votre blog sur le thème "faites ç’que j’dis, pas ç’que j’fais": que la fête commence, je crois qu’on va s’amuser!
@CVT
[Tiens, à mon tour, maintenant: pourquoi ne pas l’appliquer au discours du "métissage" et du "vivrensemble"? Combien des bobos qui somment les Français des couches populaires d’accueillir toujours plus d’immigrés inassimilables et à surtout à vivre à leurs côtés, sont prêts à en faire autant?]
Votre remarque ouvre une question très intéressante. En France, l’habitat urbain créé par la bonne bourgeoisie haussmannienne était un habitat intégré, mélangeant pauvres et riches dans une ségrégation verticale : les bourgeois se réservaient les étages « nobles », les plus bas – avant l’invention de l’ascenseur, ce n’était pas négligéable – alors que les pauvres vivaient dans les étages plus hauts et dans les soupentes. La prise de pouvoir par les classes moyennes a transformé cet habitat en imposant une ségrégation horizontale : il y a les immeubles des riches et les immeubles des pauvres… et bientôt ces immeubles se regroupent pour faire les quartiers des riches et les quartiers des pauvres, pour aboutir enfin à une ségrégation entre villes de riches et villes de pauvres. La promotion sociale ne se traduit plus par un changement d’étage, mais par un changement de quartier, de ville et peut-être bientôt de région…
Il s’ensuit une bien moindre brassage des couches sociales, qui se connaissent bien moins entre elles que cela pouvait être le cas au XIXème siècle. En fait, les classes moyennes ont détruit un à un toutes les institutions qui permettaient aux classes sociales de se brasser et de se connaître : l’école, qui ne peut que reproduire la ségrégation par quartier, le service militaire… et on comprend bien pourquoi : pour les classes moyennes, le brassage est une menace. La bourgeoisie a une position assurée par son contrôle du capital, et les classes populaires ne peuvent pas entrer en compétition avec elle. Mais les classes moyennes ont une position bien plus précaire, d’où leur tendance à mettre des frontières et à tirer sur tous ceux qui s’approchent…
Mettons que l’on traite la question du point de vue des entreprises. Est-il vrai ou non qu’il y a un manque d’apprentis ?
Et même si c’était le cas, les postes vacants ne pourraient être occupés que par une infime minorité des chômeurs actuels. Les débats sur ce sujet sont donc une diversion du problème du chômage.
@ Jonhathan R. Razorback
[Mettons que l’on traite la question du point de vue des entreprises. Est-il vrai ou non qu’il y a un manque d’apprentis ?]
Bien sur que non. Ce dont les entreprises manquent, c’est de main d’œuvre bon marché. On le voit bien dans le fonctionnement de l’apprentissage : lorsque l’Etat subventionne le dispositif au point que les patrons trouvent dans l’apprentissage une main d’œuvre à des prix défiant toute concurrence, le système décolle. Dès que l’Etat enlève le biberon, les entreprises cessent de jouer le jeu.
[Et même si c’était le cas, les postes vacants ne pourraient être occupés que par une infime minorité des chômeurs actuels. Les débats sur ce sujet sont donc une diversion du problème du chômage.]
On fait au sujet de l’apprentissage la même erreur de raisonnement qu’on fait sur la question des diplômes. Une erreur qui peut se résumer ainsi : « tous les polytechniciens trouvent un emploi, il suffit donc de donner à tous les jeunes le diplôme de polytechnique pour que le chômage des jeunes disparaisse ». Il est parfaitement vrai que les diplômés trouvent plus facilement du travail que les non-diplômés, et que les apprentis trouvent plus facilement du travail que les jeunes issus des filières techniques. Mais cela tient à leur rareté, et non à une magie qui multiplierait les postes en fonction des diplômes détenus par les gens. Le patronat proclame qu’il y a un demi-million de postes vacants pour lesquels on ne trouve pas de candidat. Et c’est vrai. Mais ce demi-million, ce ne sont pas des postes très qualifiés. Ce sont des postes peu qualifiés pour lesquels les rémunérations offertes sont si faibles que personne ne veut les prendre. Pour remplir ces postes, il n’y a que deux solutions : soit augmenter les rémunérations – ce que le patronat ne veut pas, et à juste titre puisque ce sont souvent des postes ou la productivité est trop faible pour payer plus – soit convaincre les jeunes d’accepter des rémunérations minimes.
"soit augmenter les rémunérations – ce que le patronat ne veut pas, et à juste titre puisque ce sont souvent des postes ou la productivité est trop faible pour payer plus – soit convaincre les jeunes d’accepter des rémunérations minimes."
Il y a une troisième solution: faire venir des immigrés…
@ nationalistejacobin
[Il y a une troisième solution: faire venir des immigrés…]
La pensée m’avait traversé, mais je n’en ai pas fait mention pour ne pas relancer une polémique…
Ton papier est trop court. De ta part, on attendrait quand même un peu plus d’argumentation. On sent que tu as des choses à dire et que tu ne les développe pas, c’est dommage.
Je n’ai pas d’avis particulier sur l’apprentissage, outre que mon expérience personnelle m’a montré que c’était une voie de garage parce que les parents* – qui ont un poids énorme dans l’orientation des élèves, mais je n’omets pas les professeurs – avaient décidé que ça l’était : on envoie un gamin en apprentissage parce qu’il est nul. C’est également vrai lors de l’orientation en lycée pro ou général, ou lors du choix des filières. Un gamin qui a en seconde 19 de moyenne en français et 14 en maths se verra poussé vers la filière S, celui qui a 13 en français et 8 en maths ira en L ou en STG. Au final, j’ai un peu l’impression que les filières les plus dépréciées ne seront pas revalorisées tant que l’on gardera cette attitude vis-à-vis des clie.. pardon, des parents, qui par leur choix qu’il faut bien appeler de consommation, définissent l’avenir d’un service public.
Si c’est ce que tu voulais dire, je suis d’accord ; j’aurais juste aimé que ton papier soit un peu plus explicite. Le sujet le mérite.
*Enfin, ceux qui savent négocier – et ont le temps pour le faire – avec le personnel enseignant, notamment via des associations, bien sûr…
@ BolchoKek
[Ton papier est trop court. De ta part, on attendrait quand même un peu plus d’argumentation. On sent que tu as des choses à dire et que tu ne les développe pas, c’est dommage.]
Je ferai un autre papier sur la question. Celui-ci n’était qu’un coup de gueule !
[Je n’ai pas d’avis particulier sur l’apprentissage, outre que mon expérience personnelle m’a montré que c’était une voie de garage parce que les parents* – qui ont un poids énorme dans l’orientation des élèves, mais je n’omets pas les professeurs – avaient décidé que ça l’était : on envoie un gamin en apprentissage parce qu’il est nul.]
Excusez moi, mais je me méfie de ce discours. Si l’on envoie les enfants à l’apprentissage « parce qu’ils sont nuls », il doit bien y avoir une raison. Sauf à croire que tous, parents, enseignants, élèves aussi, sont des imbéciles. Et cela toutes classes confondues. Pensez-vous vraiment que si les métiers manuels sont dévalorisés et les métiers intellectuels valorisés, c’est juste par préjugé ?
L’apprentissage a une histoire, qui plonge ses racines dans le monde corporatif. Ce n’est pas par hasard d’ailleurs si les pays ou l’apprentissage est roi soient aussi ceux où les institutions féodales sont survécu le plus longtemps, et où les structures sociales sont les plus rigides. Car l’apprentissage est un mécanisme de reproduction. L’apprenti acquiert le métier non pas par compréhension de ce qu’il fait, mais par imitation des gestes que font ses aînés. Ce qui fait qu’il est plus rapidement opérationnel, mais aussi qu’il est moins flexible lorsqu’une technologie change et que les gestes appris ne sont plus opérationnels. Une formation théorique de qualité est au contraire la garantie d’une capacité d’adaptation. Ce n’est pas par hasard si la France forme les meilleurs généralistes du monde, alors que l’Allemagne forme les meilleurs spécialistes.
[C’est également vrai lors de l’orientation en lycée pro ou général, ou lors du choix des filières. Un gamin qui a en seconde 19 de moyenne en français et 14 en maths se verra poussé vers la filière S, celui qui a 13 en français et 8 en maths ira en L ou en STG. Au final, j’ai un peu l’impression que les filières les plus dépréciées ne seront pas revalorisées tant que l’on gardera cette attitude vis-à-vis des clie.. pardon, des parents, qui par leur choix qu’il faut bien appeler de consommation, définissent l’avenir d’un service public.]
Mais encore une fois, demandez vous pourquoi les parents font ce choix. Pourquoi sont-ils si mécontent de voir leur enfant aller vers des filières techniques ou vers l’apprentissage, et pourquoi ils visent chaque fois qu’ils le peuvent la filière S ? Soit on déclare que les parents sont idiots, soit on essaye de comprendre pourquoi ils sont si attachés à certaines orientations et si méfiants envers les autres.
Je remarque en tout cas que tous ceux qui se répandent en discours sur « l’intelligence de la main » et la revalorisation du travail manuel ont choisi, pour eux-mêmes et pour leurs enfants, les formations et les métiers les plus intellectuels. De quoi se poser des questions, non ?
Je me rends compte en me relisant que je me suis mal exprimé. Comme tu le dis à propos de ton papier, mon commentaire "est un coup de gueule" ! Et je me suis certainement laissé digresser sans expliquer ce que je voulais dire.
>Si l’on envoie les enfants à l’apprentissage « parce qu’ils sont nuls », il doit bien y avoir une raison. <
>Pensez-vous vraiment que si les métiers manuels sont dévalorisés et les métiers intellectuels valorisés, c’est juste par préjugé <
Je ne conteste pas. Je mentionne juste ce que j’avais perçu comme une dérive, qui est l’attitude clientéliste de l’Éducation Nationale vis-à-vis des parents. Cela n’est pas déterminant, mais peut révéler certains comportements ; notamment la tartufferie qu’est devenue de système de filières, au point que dans le général, pour déterminer les orientations, les matières enseignées sont très secondaires : un élève qui est excellent en français et en histoire et qui prévoit de devenir journaliste ou avocat sera envoyé en S bien souvent. Alors que l’existence de filières est sensé permettre de dispenser un enseignement qui prépare les élèves aux études supérieures, on est face à des pratiques qui délégitiment leur existence. Soit donc on revalorise les autres filières par le niveau d’enseignement et les exigences (ce que je pense difficile à faire), soit on supprime ce système de filières et on met en place un tronc commun, auquel cas on n’aura alors à faire face qu’à des différences de niveau entre classes, mais étant donné qu’elles existent déjà, nous aurions plus de clarté.
> Pourquoi sont-ils si mécontent de voir leur enfant aller vers des filières techniques ou vers l’apprentissage, et pourquoi ils visent chaque fois qu’ils le peuvent la filière S ? <
Parce que le niveau est meilleur, globalement. Mais il ne faut pas s’y tromper : dans mon ancien lycée, la S était tellement demandée qu’il y avait douze classes S pour trois ES, deux L et quatre STG. Le résultat est qu’on avait deux très bonnes classes de S, huit classes au niveau moyen, et deux qui étaient franchement mauvaises. On retrouvait à peu près la même chose en STG, avec une classe assez bonne et les trois autres qui à elles seules faisaient plonger le taux de réussite au bac de l’établissement. Il y a donc bien une sélection non-dite au niveau des filières, et je pense qu’on y verrait plus clair en les supprimant, ne serait-ce que pour les matières à fort coefficient qui sont enseignées dans les filières sinistrées.
Je me rends bien compte que je parle de ce que je connais, le lycée général. Je ne sais pas ce qu’il en est de l’apprentissage. Mais je remarque que mes amis du collège qui ont pris cette filière ne s’en sortent pas trop mal du point de vue de l’emploi, et que c’est très correct également dans le lycée pro. D’un autre côté, c’est assez difficile pour ceux qui ont été médiocres au lycée général… Loin de moi l’idée de faire des études supérieures ou du général la cause de tout cela, d’ailleurs. Il me semble juste assez logique que lorsqu’on envoie beaucoup de monde en général, beaucoup à la sortie soient chômeurs, mais à mon avis ce n’est pas le général qui est à blâmer. La raison serait plutôt que comme peu de gens suivent les filières professionnelles, qui sont généralement spécialisées, la demande en travailleurs coïncide avec l’offre. Envoyer plus de gens dans l’apprentissage ne résulterait à terme qu’à des apprentis au chômage. Et il est plus facile de se reconvertir avec un Bac même L ou STG…
@ BolchoKek
[Je ne conteste pas. Je mentionne juste ce que j’avais perçu comme une dérive, qui est l’attitude clientéliste de l’Éducation Nationale vis-à-vis des parents.]
Vous avez raison. Mais il faut aller plus loin et essayer de comprendre le pourquoi de ce « clientélisme ». Mon analyse, est que cette demande des parents a toujours existé. Si l’Education Nationale pouvait y résister, c’est parce qu’il y avait dans le corps enseignant une conscience institutionnelle. L’institution avait ses règles et ses objectifs, dont les enseignants se sentaient investis, et l’institution leur conférait une légitimité sociale pour les imposer aux parents comme aux élèves.
Après quarante années de bombardement idéologique contre les institutions, l’Education nationale n’a plus aucune légitimité sociale à invoquer. Elle est obligée de se justifier en termes de résultats. Elle ne peut plus dire « c’est comme ça parce que c’est ma mission », elle est obligée de dire « c’est comme ça parce que ainsi votre enfant aura un emploi ». On est donc dans un rapport client-fournisseur, et pas dans un rapport institutionnel.
[Cela n’est pas déterminant, mais peut révéler certains comportements ; notamment la tartufferie qu’est devenue de système de filières, au point que dans le général, pour déterminer les orientations, les matières enseignées sont très secondaires : un élève qui est excellent en français et en histoire et qui prévoit de devenir journaliste ou avocat sera envoyé en S bien souvent. Alors que l’existence de filières est sensé permettre de dispenser un enseignement qui prépare les élèves aux études supérieures, on est face à des pratiques qui délégitiment leur existence.]
Je ne partage pas votre analyse sur ce point. Le but de la formation secondaire est d’abord de former les structures de la pensée formelle. Et pour cela, les matières, les disciplines ne sont que des prétextes. L’enseignement général n’a pas à être « professionnalisant », au point qu’on enseignerait les mathématiques à ceux qui se destinent au métier d’ingénieur et la littérature à ceux qui se destinent au journalisme et pas l’inverse. L’expérience montre d’ailleurs que les bons élèves sont généralement bons partout. Qu’un élève qui se destine à la profession d’avocat ou de journaliste reçoive une formation scientifique ne me paraît en rien scandaleux : la formation scientifique est la meilleure école du raisonnement.
Personnellement, si je devais proposer une réforme, ce serait de réduire drastiquement les filières pour le bac général, et d’organiser celles qui restent autour d’un « tronc commun » scientifique fort. Je mettrais aussi dans les examens des planchers éliminatoires par matières, pour empêcher que les matières à fort coefficient « tuent » les autres. En quoi être très fort en mathématiques devrait « compenser » une méconnaissance totale de la géographie ?
[Je me rends bien compte que je parle de ce que je connais, le lycée général. Je ne sais pas ce qu’il en est de l’apprentissage. Mais je remarque que mes amis du collège qui ont pris cette filière ne s’en sortent pas trop mal du point de vue de l’emploi, et que c’est très correct également dans le lycée pro.]
C’est très vrai au départ, ne serait-ce que parce que les filières d’apprentissage et les lycées pro sont à l’écoute des besoins de l’économie. Le problème, c’est qu’il faudrait suivre les gens issus de ces filières tout au long de leur vie professionnelle. Car si ces formations sont très adaptées aux demandes de l’économie à un moment donné, les problèmes apparaissent quand les mutations technologiques rendent leurs connaissances obsolètes. L’avantage d’une formation générale étendue, c’est précisément une plus grande adaptabilité à des conditions nouvelles. Les formations techniques sont trop souvent trop spécialisées pour cela.
[D’un autre côté, c’est assez difficile pour ceux qui ont été médiocres au lycée général… Loin de moi l’idée de faire des études supérieures ou du général la cause de tout cela, d’ailleurs.]
Mais pourquoi admettre cette « médiocrité » comme une punition divine ? Est-elle une fatalité ? Franchement, je ne le crois pas. Les contenus enseignés au lycée général ne sont pas si difficiles qu’ils ne puissent être assimilés que par une élite. Ils sont à la portée de tous. Seulement, pour les assimiler, il faut bosser. Il faut des méthodes et une systématique du travail. Et on voit bien d’ailleurs que dans les couches sociales qui ont encore la force d’imposer à leurs rejetons ce type de disciplines, les résultats sont au rendez-vous.
Pour moi, la réflexion fondamentale sur l’éducation devrait porter sur la manière dont l’école peut transmettre et imposer cette systématique à une génération nourrie de playstation et de parents qui n’assument pas leur autorité.
>Et pour cela, les matières, les disciplines ne sont que des prétextes. L’enseignement général n’a pas à être « professionnalisant », au point qu’on enseignerait les mathématiques à ceux qui se destinent au métier d’ingénieur et la littérature à ceux qui se destinent au journalisme et pas l’inverse<
C’est pour cela que je dis qu’il y a une certaine tartufferie dans ce système. D’un côté on nous explique que les filières sont une première orientation pour les études supérieures, et dans la pratique il s’agit de sélectionner selon le niveau. Il y a un décalage énorme entre le discours et la pratique, et je trouve que l’enseignement est quelque chose de trop important pour que l’on puisse le tolérer.
>Qu’un élève qui se destine à la profession d’avocat ou de journaliste reçoive une formation scientifique ne me paraît en rien scandaleux <
Moi non plus, mais tu peux noter que ce n’est pas ce que je critique. Le discours de l’éducation nationale pour justifier l’existence des filières est bien celui de la formation. Pour les filières autres que S, on se lamente un peu de leur faible niveau, mais ça s’arrête là. A partir du moment où on assume que le but réel des filières est de séparer les élèves selon leur niveau, l’existence des filières devient difficilement justifiable.
>Personnellement, si je devais proposer une réforme, ce serait de réduire drastiquement les filières pour le bac général […] En quoi être très fort en mathématiques devrait « compenser » une méconnaissance totale de la géographie ?<
Mais… nous sommes parfaitement d’accord.
>Pour moi, la réflexion fondamentale sur l’éducation devrait porter sur la manière dont l’école peut transmettre et imposer cette systématique à une génération nourrie de playstation et de parents qui n’assument pas leur autorité.<
Encore une fois d’accord. En "mettant l’élève au cœur du système", on ouvre un boulevard à une sélection sociale qui fait la part belle aux élèves dont les parents peuvent tirer ce qu’ils veulent du système et qui savent faire travailler leurs enfants. Demander son avis à un ado de quinze ans sur ce qu’il aimerait faire en cours, ce n’est vraiment pas lui rendre service…
@ BolchoKek
[C’est pour cela que je dis qu’il y a une certaine tartufferie dans ce système. D’un côté on nous explique que les filières sont une première orientation pour les études supérieures, et dans la pratique il s’agit de sélectionner selon le niveau. Il y a un décalage énorme entre le discours et la pratique, et je trouve que l’enseignement est quelque chose de trop important pour que l’on puisse le tolérer.]
Tu as tout à fait raison. On se donne l’illusion qu’il n’y a plus de sélection, que chacun choisit sa filière en fonction de sa vocation. Ce n’est pas par hasard : une sélection publique, avouée, permet un débat sur les critères de sélection, et conduit en France à une sélection au mérite. Une sélection cachée, par contre, peut se faire sur des critères choisis par ceux qui la font en fonction de leurs intérêts et ceux de leur classe…
[Demander son avis à un ado de quinze ans sur ce qu’il aimerait faire en cours, ce n’est vraiment pas lui rendre service…]
100% d’accord. Je remercie chaque matin mes parents et mes maîtres de ne pas m’avoir demandé ce que je voulais, mais de m’avoir enseigné ce qui pour eux était important que j’apprenne. Même s’ils se sont trompés, il se sont trompés beaucoup moins que moi je ne me serais trompé à cette époque…
Contrairement à l’Allemagne, l’éducation nationale française a dévalorisé le travail manuel. Si la France manque d’artisans, c’est bien parce que cette profession souffre d’un problème d’image. En revanche, notre pays ne manque pas d’ingénieurs sans expérience, souvent déconnectés du concret et qui pondent par méconnaissance des choses techniquement aberrantes. C’est bien la tête qui commande les mains ?
Beaucoup de très bons artisans n’ont pas un niveau d’étude élevé, ça ne les prive pas de bien raisonner, d’être pourvus de bon sens et « d’avoir de la culture », en revanche, je serais plus critique avec une partie des technocrates qui manquent singulièrement d’humilité et dont on pourrait facilement se passer… Notre économie se meurt des normes, il serait temps de revenir à la simplicité. La vraie valeur ajoutée réside dans l’utile et le beau, mais qui souhaite vraiment produire en France ?
@ Olivier
[Contrairement à l’Allemagne, l’éducation nationale française a dévalorisé le travail manuel.]
Et pourquoi, à votre avis ? Et comment se fait-il que notre pauvre éducation nationale, qui n’arrive pas à faire passer ses messages sur d’autres sujets, arrive à convaincre la quasi-totalité des parents sur celui-là ?
J’ignore si vous avez vous-même des enfants. Mais si vous en avez, posez-vous en toute sincérité la question : quel type de formation souhaiteriez-vous, dans l’idéal, les voir suivre ? Quelle profession voudriez-vous, toujours dans l’idéal, leur voir embrasser ? Le problème vous apparaîtra alors dans toute sa splendeur. Si le professeur principal de votre enfant vous annonce qu’il a les notes requises pour passer en section « S », diriez-vous « non, je veux qu’il fasse un CAP plutôt » ? Si votre enfant vous annonçait qu’il quittait ses études de médecine, sa grande école de commerce ou l’école polytechnique pour faire un CAP de plomberie, seriez-vous ravi pour lui ?
Faut arrêter de se raconter des histoires. Le travail manuel est « dévalorisé » parce qu’il est en général plus dur et moins rémunérateur que le travail intellectuel. Il faut arrêter de faire comme si cette réalité n’existait pas. Et ne nous racontons pas d’histoires, nulle part les classes supérieures ne voient avec joie leurs rejetons faire un métier manuel. Pas plus en Allemagne qu’en France le médecin ou l’ingénieur ne sont transportés de joie de voir leur enfant devenir artisan sur les chantiers de BTP. Si l’on a l’illusion que le travail manuel est moins dévalorisé en Grand Bretagne ou en Allemagne que chez nous, c’est parce que ce sont des sociétés corporatives, ou l’idéologie de la reproduction sociale est extraordinairement forte, et où l’ascenseur social n’a jamais vraiment existé. Pour l’ouvrier britannique, le fait que son fils sera ouvrier va de soi. Ce n’est pas le cas en France.
[Si la France manque d’artisans, c’est bien parce que cette profession souffre d’un problème d’image.]
« D’image » seulement ? Croyez-vous vraiment que les jeunes refusent d’aller vers des métiers agréables et rémunérateurs seulement parce qu’ils ont une mauvaise « image » ? Croyez-vous que parents, enseignants et étudiants – car tout le monde est d’accord sur ce point – boudent ces métiers seulement à cause de leur « image » ? Soyons sérieux : si les jeunes sont dissuadés d’aller vers les métiers manuels, ce n’est pas « l’image » qui en est la cause, c’est la réalité. Ce sont des métiers durs, répétitifs, et peu rémunérateurs.
[En revanche, notre pays ne manque pas d’ingénieurs sans expérience, souvent déconnectés du concret et qui pondent par méconnaissance des choses techniquement aberrantes. C’est bien la tête qui commande les mains ?]
Je trouve très drôle cette mythologie de « l’ingénieur déconnecté du concret qui pondent des choses aberrantes » opposée à l’artisan qui, ayant « l’intelligence de la main » et étant plein de bon sens concret ne fait que des bonnes choses. Curieusement, c’est une mythologie que beaucoup de gens propagent mais à laquelle personne ne croit. Sinon, comment expliquez vous que l’immense majorité de nos concitoyens préfère pour leur rejeton un diplôme d’ingénieur déconnecté du concret plutôt qu’un CAP de plombier-zingueur plein de bon sens ? Croyez-moi, il doit y avoir une raison…
[Beaucoup de très bons artisans n’ont pas un niveau d’étude élevé,]
Beaucoup de très mauvais non plus… car il y a de très mauvais artisans, n’est ce pas ?
[ça ne les prive pas de bien raisonner, d’être pourvus de bon sens et « d’avoir de la culture », en revanche, je serais plus critique avec une partie des technocrates qui manquent singulièrement d’humilité et dont on pourrait facilement se passer…. Notre économie se meurt des normes, il serait temps de revenir à la simplicité.]
Je ne sais pas si vous réalisez à quel point ce discours anti-élitiste, devenu classique maintenant, est réactionnaire au sens strict de ce mot. Admettons qu’on puisse, sans avoir un niveau d’étude élevé, « bien raisonner, être pourvu de bon sens, avoir de la culture », et qu’il n’y ait que cela qui compte. Dans ce cas, à quoi peut bien servir de faire des études de haut niveau ? A quoi bon entretenir des universités, des écoles, des instituts, des laboratoires et de bibliothèques si tout ça n’apporte finalement rien, si on peut faire mieux sans qu’avec ?
Il ne vous aura pas échappé que depuis le début de la révolution industrielle, ce ne sont pas les artisans qui ont conçu et construit les chemins de fer, les ports, les bateaux, la radio, la télévision, les fusées, les centrales électriques, et toute la longue liste de choses qui ont fait que la vie du plus humble des travailleurs est plus sûre, plus agréable et plus longue que celle de bien de rois du temps jadis. Alors, c’est quoi pour vous « revenir à la simplicité » ? Revenir à la France de Sully, celle des « élevages et pâturages » ?
Mais alors, comment expliquez-vous que lorsqu’il s’agit de réfléchir à l’avenir de leurs enfants, ces « très bons artisans » soient eux-mêmes enclins a encourager leurs enfants à devenir des « technocrates » ?
[La vraie valeur ajoutée réside dans l’utile et le beau, mais qui souhaite vraiment produire en France ?]
Sans indiscrétion, vous faites quel métier ?
1. J’ai deux enfants.
2. Comme je souhaite leur bonheur, j’aimerais qu’ils trouvent et exercent leur passion.
3. Ils veulent être médecins ? Pourquoi pas ? Mais s’ils souhaitent être boulangers ou mécaniciens, ça m’ira aussi. L’importance c’est de trouver sa voie (et si on peut en vivre, c’est encore mieux !). Ces trois métiers sont « utiles », ce sont de « beaux » métiers, tous « difficiles » et « rémunérateurs » si l’on sait gérer son business (oui, je sais, lorsque l’on est docteur, on a des patients, pas des clients…).
4. Oui, je serais ravi que mon fils ou ma fille m’étonne, monsieur ! J’admire la complexité des métiers de l’artisanat. Je les côtoie, j’ai besoin de leur savoir-faire, de leur talent comme celui d’un bon médecin ou d’un bon dentiste d’ailleurs (pour moi, un dentiste est un artisan, c’est un travailleur manuel en blouse blanche !).
5. Vous avez raison, travailler c’est dur…
6. Je connais des artisans qui n’ont pas à se plaindre financièrement, c’est bizarre ? Ils prennent des vacances aussi. C’est étrange ?
7. Je ne suis pas contre les Hautes Études supérieures communales monsieur Descartes, seulement, je constate paysan que je suis que des usines à gaz sont mises en marche tous les jours pour produire plus de contraintes que d’offrir de véritables bénéfices. La plupart de nos énarques ne sont pas aussi intelligents qu’ils voudraient nous le faire croire. Chirac et son principe de précaution ralentit la France, mais n’empêche pas le monde de tourner. Je suis pour la science, donc je crois aux savants, mais je sais aussi qu’une fusée ne décolle pas sans col bleu.
8. Le chaumage est bien réel dans notre pays. Le manque de main-d’oeuvre compétente et surtout motivée est aussi une réalité. Les peuples de l’Est ont plus faim que les Français au chômage pour faire les pénibles travaux saisonniers de l’agriculture (mal rémunérée). Mais cette situation sera-t-elle tenable longtemps ?
9. J’entends par « revenir à la simplicité » = rabaisser les normes qui pèsent sur l’industrie. On va finir par avoir plus de contrôleurs en France que de gens qui produisent vraiment. Ça ne vous gêne pas ?
10. Je suis viticulteur, probablement un imbécile qui aurait dû suivre plus d’études selon vous ? Un architecte, ça, c’est utile et ça rend notre quotidien plus joli ! Et vous, vous faites quoi comme métier, monsieur Descartes? Avec un nom pareil, vous êtes au moins mathématicien ou philosophe !
11. Maintenant que je suis démasqué, en toute honnêteté, j’aimerai apprendre mon métier à l’un de mes enfants (ou les deux on peut rêver !), mais je devrais me faire une raison si par malheur, ils aspirent seulement à devenir contrôleurs des impôts… Le métier de paysan, c’est aussi transmettre son patrimoine à sa famille, nous les agriculteurs, nous sommes vraiment des salauds de capitalistes !
12. Merci pour vos réponses toujours très pertinentes.
@ Olivier
["Beaucoup de très bons artisans n’ont pas un niveau d’étude élevé, ça ne les prive pas de bien raisonner, d’être pourvus de bon sens et « d’avoir de la culture », en revanche, je serais plus critique avec une partie des technocrates qui manquent singulièrement d’humilité et dont on pourrait facilement se passer…"]
Cela s’explique par le blocage actuel de l’ascenseur social: beaucoup de vos "très bons artisans" auraient eu, en réalité, la capacité intellectuelle de faire d’excellents "technocrates", tandis qu’un grand nombre de "technocrates" médiocres, généralement issus de ces fameuses "classes moyennes" chères à Descartes, auraient fait de bien meilleurs artisans… 😉
@ Olivier
[3. Ils veulent être médecins ? Pourquoi pas ? Mais s’ils souhaitent être boulangers ou mécaniciens, ça m’ira aussi.]
On dit ça… je me rappelle d’une tante à moi qui, en bonne mère juive, répétait à qui voulait l’entendre « moi, si mon fils épousait une goï, ça ne me dérangerait pas, l’important c’est qu’il soit heureux ». Le jour ou son fils lui a amené une goï, je te raconte pas la crise…
[4. Oui, je serais ravi que mon fils ou ma fille m’étonne, monsieur ! J’admire la complexité des métiers de l’artisanat.]
Je note qu’on a glissé subrepticement de « métiers manuels » aux « métiers de l’artisanat ». De nos jours, l’immense majorité des métiers manuels ne sont pas des métiers artisanaux. Et ceux qui voudraient importer le modèle d’apprentissage tel qu’il est pratiqué en Allemagne ne pensent pas à l’artisanat, mais à l’industrie et aux services.
[Je les côtoie, j’ai besoin de leur savoir-faire, de leur talent comme celui d’un bon médecin ou d’un bon dentiste d’ailleurs (pour moi, un dentiste est un artisan, c’est un travailleur manuel en blouse blanche !).]
Ou celui d’un bon éboueur. Mais je suspecte que si votre enfant était orienté vers ce métier, vous ne seriez pas très content.
[5. Vous avez raison, travailler c’est dur…]
Oui, mais c’est plus dur dans certains métiers que dans d’autres.
[6. Je connais des artisans qui n’ont pas à se plaindre financièrement, c’est bizarre ? Ils prennent des vacances aussi. C’est étrange ?]
Pourquoi voulez-vous que ce soit « étrange » ? Cela étant dit, si l’artisanat est aussi rémunérateur que la médecine, qu’on travaille dans des conditions aussi agréables qu’un médecin, qu’on prend des vacances autant qu’un médecin, comment expliquez-vous que parents, enseignants et étudiants soient tous d’accord pour préférer la médecine à la plomberie ?
[7. Je ne suis pas contre les Hautes Études supérieures communales monsieur Descartes,]
On ne le dirait pas. Si, comme vous le dites, on n’a pas besoin de faire des études pour être intelligent, pour réfléchir, pour travailler, à quoi peuvent-ils bien servir ?
[seulement, je constate paysan que je suis que des usines à gaz sont mises en marche tous les jours pour produire plus de contraintes que d’offrir de véritables bénéfices.]
Paysan, vous ne pouvez que constater que la productivité à l’hectare et à l’heure de travail a franchi plusieurs ordres de grandeur en un siècle. Ce qui tendrait à prouver que les « usines à gaz » en question ne sont pas totalement inutiles.
[La plupart de nos énarques ne sont pas aussi intelligents qu’ils voudraient nous le faire croire.]
Qu’est ce que vous en savez ? Il y a quelque 3000 énarques en fonction aujourd’hui. Combien en connaissez vous ? Qu’est ce qui vous permet de tirer des conclusions sur « la plupart » des énarques ? Ce que vous énoncez ici n’est qu’un préjugé.
[Chirac et son principe de précaution ralentit la France, mais n’empêche pas le monde de tourner. Je suis pour la science, donc je crois aux savants, mais je sais aussi qu’une fusée ne décolle pas sans col bleu.]
Et alors ? Je ne vois pas très bien ce que vous voulez démontrer. Il ne s’agit pas ici de faire du mérite comparé, ou de savoir qui est nécessaire et qui ne l’est pas. La question était de savoir pourquoi parents, élèves et enseignants communient dans l’idée qu’il vaut mieux faire un métier en « col blanc » qu’en « col bleu ». C’est un fait : les « cols bleus », les voitures ne rouleraient pas et les fusées ne décoléraient pas. Mais c’est un fait aussi que les « cols blancs » sont mieux considérés, mieux rémunérés, et ont des meilleures conditions de travail. Et que ce sont ces critères, et non l’utilité abstraite du métier, qui détermine le choix des parents et des étudiants.
[8. Le chômage est bien réel dans notre pays. Le manque de main-d’oeuvre compétente et surtout motivée est aussi une réalité.]
Je ne vois pas ce qui vous permet de dire qu’il manquerait de la « main d’œuvre compétente ». Quant à la « motivation », elle est étroitement liée au salaire. Payez de bons salaires, et vous aurez de la main d’œuvre « motivée » comme s’il en pleuvait.
[Les peuples de l’Est ont plus faim que les Français au chômage pour faire les pénibles travaux saisonniers de l’agriculture (mal rémunérée). Mais cette situation sera-t-elle tenable longtemps ?]
Vous voulez dire que bientôt les chômeurs français auront suffisamment faim pour accepter de faire les travaux « mal rémunérés » ? Ce sont les patrons qui vont être contents…
[9. J’entends par « revenir à la simplicité » = rabaisser les normes qui pèsent sur l’industrie. On va finir par avoir plus de contrôleurs en France que de gens qui produisent vraiment. Ça ne vous gêne pas ?]
Oui, ça me gêne. Mais il faut savoir ce qu’on veut. On ne peut pas vouloir un niveau élevé de protection de l’environnement et du consommateur, et en même temps « revenir à la simplicité ». Du temps ou l’on n’avait pas toutes ces normes, il y avait bien plus d’intoxications alimentaires, de voitures dangereuses et des accidents de toutes sortes.
[10. Je suis viticulteur, probablement un imbécile qui aurait dû suivre plus d’études selon vous ?]
Je me garderai bien de vous considérer un imbécile, ne sachant pas quelles sont les raisons qui ont fait que vous n’avez pas poursuivi des études. Mais j’ai la faiblesse de penser que si vous aviez suivi des études complètes d’agronomie, cela vous aurait aidé dans votre travail d’agriculteur. Maintenant, si vous me dites que ce n’est pas le cas, alors il faudrait, pour être cohérent, exiger la fermeture de toutes les facultés et de toutes les écoles d’agronomie. Si les études d’agronomie ne servent pas à améliorer l’agriculture, à quoi peuvent-elles servir ?
[Et vous, vous faites quoi comme métier, monsieur Descartes? Avec un nom pareil, vous êtes au moins mathématicien ou philosophe !]
J’en ai fait beaucoup, certains manuels, d’autres intellectuels. Depuis quelques années, je suis dans un poste de conception dans le domaine de l’énergie. Je n’en dirais pas plus étant tenu au devoir de réserve.
[11. Maintenant que je suis démasqué, en toute honnêteté, j’aimerai apprendre mon métier à l’un de mes enfants (ou les deux on peut rêver !), mais je devrais me faire une raison si par malheur, ils aspirent seulement à devenir contrôleurs des impôts… Le métier de paysan, c’est aussi transmettre son patrimoine à sa famille, nous les agriculteurs, nous sommes vraiment des salauds de capitalistes !]
Pourquoi « salauds » ? Ce n’est pas une question morale. Si vous possédez votre terre, vos machines, vos stocks, et bien, vous avez un capital et vous êtes un capitaliste. Pas de quoi avoir honte, pas plus que d’être fier. Maintenant, lorsque vous parlez de « transmettre votre métier à vos enfants », s’agit-il de leur transmettre un métier – par exemple pour qu’ils soient ouvriers agricoles employés d’un autre patron – ou bien de leur transmettre l’affaire familiale ?
[12. Merci pour vos réponses toujours très pertinentes.]
Merci à vous de participer à ces débats.
[Je connais des artisans qui n’ont pas à se plaindre financièrement,]
Dans l’absolu, il est vrai que certains n’ont pas à se plaindre. Mais rapporté à leur temps de travail ?
>Il ne s’agit pas ici de faire du mérite comparé, ou de savoir qui est nécessaire et qui ne l’est pas. <
Tu vois, quand tu écris des papiers plus conséquents, tu n’as pas – ou très peu- à répondre à ce genre de commentaire.
>Vous voulez dire que bientôt les chômeurs français auront suffisamment faim pour accepter de faire les travaux « mal rémunérés » ? <
Allons, ce sont des paysans, ils ont une très-sainte authenticité, et les ouvriers agricoles qui se plaindraient sont des idiots qui n’ont pas compris l’avantage de travailler la vigne ou l’oranger plutôt que l’acier ou les plastiques. Ils ne méritent vraiment pas leurs conventions collectives, s’ils ne comprennent pas que nos paysans leur veulent du bien… Car les conditions de travail sont bien meilleures, hein ? huit heures en plein cagnard, qui s’en plaindrait…
@xc
[Dans l’absolu, il est vrai que certains n’ont pas à se plaindre. Mais rapporté à leur temps de travail ?]
Et il n’y a pas que ça. Il faut aussi regarder les conditions de travail, la sécurité de l’emploi, la protection en cas d’accident ou de maladie… Je pense qu’il faut faire confiance au marché: si les rapport "coût/avantages" des métiers artisanaux était supérieur à celui des "cols blancs", et bien tout le monde pousserait ses enfants à se faire artisans, tous les étudiants envisageraient une orientation vers ces métiers. Le fait que personne ne veuille y aller laisse penser que ce n’est pas le paradis.
« Voilà votre métier, dont vous parlez en amant tout à fait heureux. Quant à moi, je n’en connais qu’un, qui n’en est pas un, puisqu’il est essentiellement niable, que tout homme, s’armant d’une plume, peut se targuer d’en être maître; et je ne dis le connaître que pour m’être fait un sens toujours plus exquis, et comme ombrageux, de ses difficultés – et presque – de son impossibilité.
Mais, de cette expérience particulière, j’ai du moins retiré une grande révérence pour toute personne qui sait faire quelque chose, et une singulière considération pour celles qui nous montrent par leur exemple que l’exercice d’une profession peut valoir à son homme un autre avantage que son traitement ou son salaire, son avantage ou son renom; mais un accroissement et une édification de son être. Si j’aimais, plus que je ne fais, les termes considérables, je dirais que tout métier, même très humble, ébauche en nous une éthique et une esthétique, tellement que, à partir de l’obligation de «gagner sa vie » au moyen d’un travail bien défini, quelqu’un peut s’élever à une possession de soi-même et à un pouvoir de compréhension en tous genres, qui surprennent parfois celui qui les observe chez des individus dont il n’eût pas attendu des remarques d’artiste ou des sentences de philosophe, exprimés en termes semi-pittoresques, semi-professionnels. »
Valéry. Métier d’homme. Œuvres II. La Pléiade, p. 1108.
@ dafdesade
[Valéry. Métier d’homme. Œuvres II. La Pléiade, p. 1108.]
Très joli texte… que certains considéreront très réac, à l’égal de son auteur. Valéry expose ici une conception presque « mystique » du travail, une vision aristocratique qui s’oppose avec force à la vision « bourgeoise » dont Marx, dans le « manifeste », illustre parfaitement la logique. Valéry regrette un monde – et je dis regrette car de son temps ce monde commençait à disparaître – ou tout ne se ramène pas encore à la mesure unique qu’est le « payement au comptant »…
Si je puis me permettre, je souhaiterais apporter mon témoignage. J’ai quelques conseils de classe de 3ème à mon actif, et c’est souvent à ce moment que se pose pour la première fois la question de l’apprentissage. Je précise que les établissements où j’ai travaillé sont de petits collèges ruraux, dans une zone qui connaît des difficultés sociales importantes (car la pauvreté à la campagne, ça existe).
Ma première remarque est la suivante: assez peu d’élèves, y compris issus des milieux défavorisés, optent pour l’apprentissage. Pour deux raisons: d’abord, l’Education nationale en fait peu de publicité, parce que, précisément, la politique en France est de pousser les jeunes à faire le plus d’étude possible. Comme le rappelle Descartes, statistiquement, les plus qualifiés trouvent plus facilement du travail. Ensuite, il faut bien comprendre le type de métier où l’on recourt à l’apprentissage: boucher, boulanger, plombier pour les garçons, coiffeuses pour les filles et je caricature à peine. Quand on est boulanger et boucher, on peut très bien gagner sa vie, mais c’est un dur labeur: il faut se lever tôt, il faut porter les carcasses. Je me souviens d’un fils de boulanger, en 6ème, qui m’avait dit: "vous savez, Monsieur, mon père regrette d’avoir arrêter ses études si jeune, car se lever tous les matins à 4h, il en a un peu marre…". Mon boucher, un homme d’une cinquantaine d’années, me dit qu’il est fatigué, qu’il arrêterait bien s’il le pouvait. N’ayons pas une vision trop idéalisée de ces métiers. Moi qui suis fils d’enseignant, je sais très bien que mon père aurait été fort déçu que je devienne plombier ou boucher. Il espérait que je sois ingénieur ou chercheur. Comment lui en vouloir? Et il est probable que je souhaiterai la même chose pour mes enfants si j’en ai. Maintenant, s’ils choisissent la chaudronnerie, eh bien, je m’inclinerai. Mais là encore, il faut privilégier les filières longues: bac pro plutôt que CAP. Plus on a une formation longue et complète, plus on a de cordes à son arc.
Je ne pense pas qu’il soit utile d’envoyer une foule de jeunes en apprentissage. En revanche, ce qui me pose problème, c’est qu’on envoie une foule de jeunes en seconde générale alors qu’on les sait incapables de réussir (nous recevons l’année suivante leurs bulletins de lycée). Aujourd’hui, on envoie en Première S des élèves avec 8 de moyenne en maths et en physique, en donnant foi à une vague promesse de "se mettre au travail".
Il ne faut pas tomber dans l’excès inverse: tout le monde n’a pas besoin d’aller en apprentissage certes, mais tout le monde ne sera pas non plus ingénieur ou vétérinaire. Et parfois, l’institution a du mal à tenir un langage de vérité… particulièrement devant les parents issus des "classes moyennes" justement, qui sont convaincus que leur petit génie a ce qu’il faut pour y arriver, mais qu’il est brimé par les enseignants qui l’ont évidemment pris en grippe, le petit chéri… A contrario, certains enfants de milieu populaire, avec de bons résultats, ont dû mal à entrevoir un autre avenir qu’une filière professionnelle. Nous peinons parfois à les convaincre de faire une seconde générale, surtout dans les campagnes, car l’éloignement du lycée, le coût de l’internat pèsent aussi dans la décision des familles.
@ nationalistejacobin
[Ma première remarque est la suivante: assez peu d’élèves, y compris issus des milieux défavorisés, optent pour l’apprentissage. Pour deux raisons: d’abord, l’Education nationale en fait peu de publicité, parce que, précisément, la politique en France est de pousser les jeunes à faire le plus d’étude possible.]
Et, insistons là-dessus, c’est une bonne politique. Contrairement aux postulats de l’idéologie « libérale-libertaire », les études, ce n’est pas une perte de temps. S’il est vrai que beaucoup d’élèves ne profitent pas assez du temps qu’ils passent sur les bancs des écoles, des collèges et des lycées, la solution n’est pas de raccourcir les études, mais de faire en sorte que les gens en profitent mieux.
[Aujourd’hui, on envoie en Première S des élèves avec 8 de moyenne en maths et en physique, en donnant foi à une vague promesse de "se mettre au travail".]
Je pense que c’est là le problème essentiel. On – et quand je dis « on », c’est des élèves que je parle ici – ne travaille pas assez à l’école, au collège et au lycée. Non seulement on perd un temps infini dans toutes sortes de gadgets pédagogogiques, on a des vacances trop longues et on ne donne pas assez de devoirs, mais le temps passé en classe est souvent gâché par une capacité d’attention insuffisante.
[Il ne faut pas tomber dans l’excès inverse: tout le monde n’a pas besoin d’aller en apprentissage certes, mais tout le monde ne sera pas non plus ingénieur ou vétérinaire.]
Je suis un ancien de l’enseignement technique, et je dois dire que je m’interroge sur l’utilité de donner à tout le monde – y compris aux élèves qui se destinent aux enseignements les plus abstraits et aux professions les plus intellectuelles – un minimum de formation technique et manuelle. Bien utilisé pédagogiquement, apprendre à fabriquer une pièce au tour, à construire une étagère, à installer un interrupteur électrique, à faire du béton ou à souder deux pièces ensemble permet non seulement de développer une certaine attitude envers les disciplines du travail, mais aussi à poser des questions intéressantes pour introduire des enseignements théoriques, que ce soit en économie, en philosophie, en sciences…
Si j’étais ministre de l’éducation, je rajouterais deux demi-journées par semaine de travail en atelier – oui, je sais, cela suppose de doter collèges et lycées d’ateliers, de recruter des profs d’atelier, etc. etc…
[A contrario, certains enfants de milieu populaire, avec de bons résultats, ont du mal à entrevoir un autre avenir qu’une filière professionnelle. Nous peinons parfois à les convaincre de faire une seconde générale, surtout dans les campagnes, car l’éloignement du lycée, le coût de l’internat pèsent aussi dans la décision des familles.]
Oui, et c’est regrettable, parce que c’est dans ces cas là que l’école peut jouer véritablement son rôle de promotion sociale.
@ nationalistejacobin
Bonjour,
Vous écrivez :
« Aujourd’hui, on envoie en Première S des élèves avec 8 de moyenne en maths et en physique, en donnant foi à une vague promesse de "se mettre au travail". »
Je m’étonne, pour ma part, du nombre et de la proportion (ne serait-ce qu’en relation avec les autres bacs « classiques ») sans cesse croissants de bacheliers scientifiques et je m’interroge : ont-ils réellement le niveau ou ne serait-ce pas une politique délibérée des ministères successifs en « sous-objectif » des fameux 80% d’une tranche d’âge etc… ? N’étant pas de la partie, je vous remercie de bien vouloir me donner votre point de vue.
@Descartes
L’enseignement et les stratégies scolaires des petits bourgeois, c’est un monde que j’ai découvert lorsque mon aînée devait passer au collège. C’est un directeur d’école qui a réalisé ma première initiation : il m’a demandé d’inscrire la petite hors secteur en jouant sur des options spécifiques. Selon lui, elle bénéficierait d’un enseignement de qualité dans le meilleur collège de la ville. Très sincèrement, j’en tombais des nues…Avec ma femme nous hésitions, pris entre faire le mieux pour notre fille et de ne pas marcher dans des combines de passe-droits. Bon, il a fini par emporter le morceau.
Pas la fin de mes surprises au collège : j’appris alors que les sections d’excellence étaient les sections musique (je n’ai toujours pas compris pourquoi…). J’en apprenais plus encore lors des réunions provoquées par l’administration du collège. L’intervention de certains parents (mon enfant ! mon enfant !) avec l’aisance et parfois l’impertinence des gens bien lotis. Je me tenais coi. Passons sur tout ceci. Le bouquet fut la venue en fin d’année scolaire de 3ième des proviseurs des lycées (et j’avoue avoir été choqué de les entendre « se vendre ») de ma ville : telle parente faisait une scène car sa fille apprenait le violon depuis l’âge tendre et que le « meilleur » lycée n’ouvrait pas de section S violonistes. Tel autre son fils voulait poursuivre ses activités théâtre que le même lycée ne proposait pas en option….
C’était, me semble-t-il l’argent du contribuable mis à leur disposition.
Pire, un responsable connu localement d’un syndicat enseignant a pollué la réunion au motif qu’un lycée faisait un test de sélection en même temps que le voyage à l’étranger de la classe de son fils obligeant le pauvre chéri à choisir…
Je pourrais écrire des pages et des pages sur le jeu des options, les pressions pour être dans la classe du « bon » professeur etc… Écœurant.
@morel
[L’enseignement et les stratégies scolaires des petits bourgeois, c’est un monde que j’ai découvert lorsque mon aînée devait passer au collège. C’est un directeur d’école qui a réalisé ma première initiation : il m’a demandé d’inscrire la petite hors secteur en jouant sur des options spécifiques. Selon lui, elle bénéficierait d’un enseignement de qualité dans le meilleur collège de la ville. Très sincèrement, j’en tombais des nues…Avec ma femme nous hésitions, pris entre faire le mieux pour notre fille et de ne pas marcher dans des combines de passe-droits. Bon, il a fini par emporter le morceau.]
Ce n’est pas moi qui irai vous le reprocher. Je ne crois pas que dans une société injuste, il soit possible d’avoir des comportements individuels conformes à notre vision de la justice. On n’a pas le droit de sacrifier l’avenir de son enfant au nom de la pureté idéologique, et ceux qui reprochent aux autres d’utiliser ce genre de passe-droit sur le mode « plus pur que moi tu meurs » sont généralement des hypocrites. Nous, les êtres humains, sommes condamnés à commettre des injustices et à les regretter. Cela fait partie de notre tragédie.
Les faits que vous racontez sont passionnants mais, hélas, trop courants. Beaucoup d’amis enseignants m’ont aussi raconté le niveau d’égocentrisme des parents des classes moyennes qui se comportent non pas en citoyens mais en clients. Mais on peut sentir derrière ces comportements un parfum de terreur. Les classes moyennes vivent terrorisées à l’idée que leurs enfants ne puissent pas bénéficier d’une position sociale équivalente à la leur. Or, contrairement aux capitalistes, les classes moyennes n’ont pas un capital à léguer. Ce capital est immatériel, et doit être reconstruit à chaque génération…
Bonjour et merci pour votre réponse,
« Je me garderai bien de vous considérer un imbécile, ne sachant pas quelles sont les raisons qui ont fait que vous n’avez pas poursuivi des études. Mais j’ai la faiblesse de penser que si vous aviez suivi des études complètes d’agronomie, cela vous aurait aidé dans votre travail d’agriculteur. Maintenant, si vous me dites que ce n’est pas le cas, alors il faudrait, pour être cohérent, exiger la fermeture de toutes les facultés et de toutes les écoles d’agronomie. Si les études d’agronomie ne servent pas à améliorer l’agriculture, à quoi peuvent-elles servir ? »
Je dirais qu’il m’a fallu plus de 10 ans pour commencer à être « à l’aise » dans mon métier. J’ai obtenu un BTS est n’en possède aucune fierté. J’ai vraiment appris surtout de l’expérience, du temps passer à travailler, à faire. Il m’a fallu du temps, du recul pour apprécier mes actions. Lorsque l’on plante un pied de vigne, c’est pour 30 ans. Il y a des choix techniques à intégrer, un déboucher économique, prendre une décision c’est faire un compromis entre les contraintes et les avantages des différents éléments à mettre en place. Bien sûr, l’école m’a dressé un tour d’horizon, une vue d’ensemble, mais c’est sur le terrain que j’ai vraiment appris mon métier. C’est en essayant de rester modeste, en écoutant ceux qui travaillaient déjà sur l’exploitation, les salariés, les autres viticulteurs, les pépiniéristes, les techniciens de la chambre d’agriculture, les techniciens des coopératives, des techniciens du négoce. Paysan, j’ai appris que l’on ne pouvait pas être catégorique, j’ai constaté que ce qui marche chez moi ne marche pas forcément chez mon voisin, les paramètres sont nombreux et l’on subit les caprices de la nature. Les études classiques sont nécessaires, mais pas indispensables. On peut apprendre tout au long de sa vie. Il existe dans ce pays des autodidactes qui sont intelligents (je ne parle pas de moi !) et qui gagnent très bien leur vie. L’école ne suffit pas, c’est l’envie de faire et d’apprendre. Les stages, les formations continues, la lecture de revue et de livre, les échanges avec les autres sont aussi d’autres moyens pour apprendre.
« Oui, ça me gêne. Mais il faut savoir ce qu’on veut. On ne peut pas vouloir un niveau élevé de protection de l’environnement et du consommateur, et en même temps « revenir à la simplicité ». Du temps ou l’on n’avait pas toutes ces normes, il y avait bien plus d’intoxications alimentaires, de voitures dangereuses et des accidents de toutes sortes. »
C’est exact. Mais aujourd’hui les politiques, les administrations pondent tous les jours de nouvelles normes inutiles. Tout le monde cherche à se protéger. On ne peut plus se servir d’une échelle pour cueillir une pomme dans un verger en France ! C’est une réalité des normes inutiles impactent notre productivité. On veut faire mieux que les autres : résultat, des entreprises ferment et on importe des biens que l’on n’aurait pas le droit de produire sur notre territoire.
« Paysan, vous ne pouvez que constater que la productivité à l’hectare et à l’heure de travail a franchi plusieurs ordres de grandeur en un siècle. Ce qui tendrait à prouver que les « usines à gaz » en question ne sont pas totalement inutiles . »
Quand je dénonce les usines à gaz, je ne parle pas des avancées techniques, de l’augmentation des connaissances, je m’insurge contre les contraintes administratives (la paperasse, des normes environnementales inutiles et contre productives [la prétendue lutte contre le réchauffement climatique] qui repose justement sur le principe de précaution et qui freine l’innovation [exemple, le rejet des OGM en France].
Des agronomes médiatiques comme Claude Bourguignon ou Marc Dufumier prétendent nourrir les populations avec un retour à une agriculture artisanale, ceux sont des anti-pesticides et anti-OGM convaincus : sont-ils prêts eux à revenir à la binette pour redécouvrir le mal de dos ? Ils s’imaginent qu’un équilibre parfait est possible par la maitrise des parasites par d’autres auxiliaires, j’attends de voir, en attendant, je ne connais pas une vigne dans ma région qui soit capable de donner suffisamment de raisin et de façon qualitative quelque soit le mode de production [bio ou conventionnelle] sans avoir recours aux pesticides.
Autre exemple : les subventions pervertissent les comportements humains [j’en sais quelque chose…]. Les politiques compliquent tout. Oui, bien souvent on manque de simplicité. Tel élu va créer un poste qui n’apporte rien de mieux et qui pèse sur le fonctionnement, ce sont des arrangements entre amis. La réforme territoriale est un bon exemple, on parle de fusion entre régions pour diminuer les couts, c’est passionnant et on voit apparaître des mouvements de contestations qui donnent naissance à des mobilisations importantes : le désir de se voir rattacher ou pas à d’autres départements. C’est très bien, mais si l’on s’attaquait à réduire les doublons et les charges en commençant par regrouper les petites communes [intercommunalité], ce serait plus logique, mais certainement moins mobilisateur. Combien de maires de petite commune souhaitent que l’on supprime leur mairie et leur salaire ?
Sources :
Jean de Kervasdoué « Ils ont perdu la raison » , « Les prêcheurs de l’apocalypse », « Pour en finir avec le principe de précaution », « L’imposture hydrologique ».
Maurice Tubiana « Arrêtons d’avoir peur ! »
Liens :
Sur le développement durable, par Bernard Beauzamy
http://www.alambic-city.com/article-pouvons-nous-defendre-notre-droit-a-l-activite-123007742.html
Sur le réchauffement climatique, par Bernard Beauzamy
http://www.alambic-city.com/2014/07/le-rechauffement-climatique-mystifications-et-falsifications.html
Sur les normes…
Parole d’un arboriculteur :
Mal « normer » les choses, c’est ajouter aux malheur du monde.
http://www.daniel-sauvaitre.com/2014/05/mal-normer-les-choses-c-est-ajouter-aux-malheurs-du-monde.html
Parole d’un agronome :
Produisons français, qu’ils disaient !
http://laurent.berthod.over-blog.fr/article-produisons-fran-ais-qu-ils-disaient-101081167.html
@ Morel,
"ont-ils réellement le niveau ou ne serait-ce pas une politique délibérée des ministères successifs en « sous-objectif » des fameux 80% d’une tranche d’âge etc… ?"
Ah! Tout dépend de quel "niveau" on parle… Ils auront le niveau d’user leur fond de culotte près du radiateur jusqu’en terminale. Et ils auront en général le niveau de décrocher le baccalauréat mention "passable", sinon à la première, du moins à la deuxième (parfois à la troisième!) tentative. Maintenant, si votre question est: "ont-ils le niveau de devenir médecin, vétérinaire, physicien, chimiste ou biologiste?", la réponse est aussi simple que claire: non.
Le problème du ministère est le suivant: nos têtes pensantes de l’Education nationale sont parties d’un constat, qui est que les filières scientifiques peinent à attirer de bons étudiants (d’un autre côté, vu la technophobie et la méfiance latente vis-à-vis du progrès scientifique qu’on rencontre dans les discours "à la mode" des écolos-bobos, mais aussi parmi certaines élites, est-ce étonnant? C’est tellement plus "classe" d’être intermittent du spectacle que spécialiste de physique nucléaire…). Mais la réponse apportée n’est pas la bonne: on a gonflé les effectifs des sections scientifiques du lycée général en abaissant les exigences de recrutement. Qui peut croire que cela suffira à former le prochain prix nobel de Physique ou de Chimie, ou le prochain médaillé Fields en mathématiques?
@ Olivier
[Je dirais qu’il m’a fallu plus de 10 ans pour commencer à être « à l’aise » dans mon métier. J’ai obtenu un BTS est n’en possède aucune fierté. J’ai vraiment appris surtout de l’expérience, du temps passer à travailler, à faire. Il m’a fallu du temps, du recul pour apprécier mes actions.]
On dit que l’expérience est la meilleure école, mais aussi la plus chère. L’avantage d’une formation poussée, c’est réduire ce coût. Un ingénieur pourrait en théorie apprendre à construire des ponts par essai et erreur… mais il vaut mieux qu’il apprenne à l’université pourquoi les ponts du passé sont tombés au lieu de faire lui-même l’expérience.
[C’est exact. Mais aujourd’hui les politiques, les administrations pondent tous les jours de nouvelles normes inutiles. Tout le monde cherche à se protéger. On ne peut plus se servir d’une échelle pour cueillir une pomme dans un verger en France !]
Je vous rejoins sur ce point. Notre société a une tolérance au risque de plus en plus faible, et cela a un coût en termes de productivité mais, aussi, en termes de liberté.
[Sources : Jean de Kervasdoué « Ils ont perdu la raison » , « Les prêcheurs de l’apocalypse », « Pour en finir avec le principe de précaution », « L’imposture hydrologique ».
Maurice Tubiana « Arrêtons d’avoir peur ! »]
Très bonnes lectures…
@ nationalistejacobin
[Le problème du ministère est le suivant: nos têtes pensantes de l’Education nationale sont parties d’un constat, qui est que les filières scientifiques peinent à attirer de bons étudiants (d’un autre côté, vu la technophobie et la méfiance latente vis-à-vis du progrès scientifique qu’on rencontre dans les discours "à la mode" des écolos-bobos, mais aussi parmi certaines élites, est-ce étonnant? C’est tellement plus "classe" d’être intermittent du spectacle que spécialiste de physique nucléaire…).]
Il y a de ça, certainement. Mais il y a aussi un autre facteur : le rapport qualité/prix des formations scientifiques a dégringolé ces dernières années. En dehors des formations d’élite (Ingénieur grande école…) la baisse des investissements de recherche, la désindustrialisation, la prise du pouvoir par les juristes et les financiers réduit sensiblement les débouchés et les possibilités de carrière. Les débouchés des formations scientifiques sont très sensibles à la conjoncture économique et à la santé de l’appareil industriel.
[Mais la réponse apportée n’est pas la bonne: on a gonflé les effectifs des sections scientifiques du lycée général en abaissant les exigences de recrutement. Qui peut croire que cela suffira à former le prochain prix nobel de Physique ou de Chimie, ou le prochain médaillé Fields en mathématiques?]
Sans aller jusqu’au prix Nobel, je peux certifier que les stagiaires de formation scientifique que j’accueille aujourd’hui au niveau BAC+2 de compréhension et de mobilisation des connaissances très faible. Quand on voit que le problème de mathématiques section S de cette année a provoqué une levée de boucliers – avec pétition des étudiants et, horresco referens, consignes de sur-notation de la part du ministère – alors qu’il était en fait assez facile…
@ nationalistejacobin
Merci pour votre réponse
« Mais la réponse apportée n’est pas la bonne: on a gonflé les effectifs des sections scientifiques du lycée général en abaissant les exigences de recrutement. Qui peut croire que cela suffira à former le prochain prix nobel de Physique ou de Chimie, ou le prochain médaillé Fields en mathématiques? »
Vous me faites penser que notre pays s’en sort pas si mal en matière de médaillés Fields, preuve sans doute qu’au-delà du bac S, il existe encore de vraies filières d’élite. A ce propos pourquoi l’Allemagne n’y brille pas ? Filière apprentissage mathématiques 🙂 ?
@Descartes
Nombre de ceux qui ont débuté en étant « arpète » vous diront le « bien » qu’ils en pensent. Il y en a dans ma famille et, à ce titre, n’aspiraient pas à cette situation pour leurs enfants. Ont-ils le tort d’être crispés sur un modèle disparu ? Pas sûr.
Plus le salarié sera instruit, moins il se fera rouler (j’ai trop d’exemples via les conseillers prud’homaux). Simple constat.
Bonjour,
Que vous ressentiez le besoin impératif de pousser un coup de gueule suite à C dans l’air de jeudi, soit. Elie Cohen, Mathilde Cassan et les autres jouant les avocats de la classe dirigeante des affaires, ne fait aucun doute.
Mais tout de même ! Votre pugnacité à dénoncer les turpitudes de la « classe moyenne » associée à votre matérialisme marxien vous amènent à observer cet important processus d’acquisition des connaissances avec une superficialité à laquelle vous ne nous aviez pas habitué.
A vous lire, à la lutte des classes se substitue la guerre des castes.
Ce que vous dénoncez comme avidité à occuper les situations les plus enviées n’est après tout qu’une ambition naturelle chez tous les individus et il n’est pas étonnant que chacun emploie les outils à sa disposition pour en faire bénéficier d’abord ses enfants, ensuite sa parentèle, puis les amis………….,tiens cela me rappelle certains discours propres à JMLP.
La notion de progrès, à laquelle nous vous savons très attaché, est indissociable de la différentiation des situations, et c’est à chacun, de là où il se trouve, de faire l’effort nécessaire pour combler l’écart qui le sépare de ses ambitions. Et l’ambition n’a-t-elle que des visées matérielles de rémunération ?
Vos enfants, si vous en avez, n’auront pas le même chemin à parcourir pour accéder à un niveau de réflexion approfondie, que ceux d’un couple inculte et indifférent à la culture. Comment pourriez-vous décréter l’égalité des chances dans ces conditions ?
Enfin, l’apprentissage. Votre propos est particulièrement réducteur avec pour image récurrente celle du plombier. Bien d’autres métiers, dont certains qualifiés d’intellectuels –ingénieur par exemple- sont accessibles par la voie de l’apprentissage. D’autre part, de nombreuses professions issues de ce processus, voient leurs acteurs mieux rémunérés que bien des bac+4 ou +5 qui se sont fourvoyés dans des formations –pardon, des enseignements supérieurs- cul de sac.
De nombreuses méthodes sont appliquées pour le plus grand bien de leurs bénéficiaires. Vos exemples sont par trop caricaturaux.
Les Français puisent sans doute beaucoup leurs racines dans l’humus platonicien et devraient plus souvent les laisser s’évader du côté d’Aristote. René Descartes n’est pas complètement innocent dans cet état des choses.
Témoignage personnel : j’ai trois petits fils dont l’ainé vient de réussir son bac. Il s’engage pour 5 à 7 ans chez les compagnons du devoir. Eh bien sachez, que malgré notre appartenance à l’engeance honnie, cette décision a été accueillie avec joie, car il aura là l’occasion de se forger une personnalité qu’il n’aurait peut-être pas eu sur les bancs d’une faculté quelconque. Et s’il veut se cultiver au sens large, de nombreux moyens sont maintenant à sa portée, dont entre autres, des blogs comme le vôtre, sur une multitude de sujets. Evidemment, il faut s’accrocher, mais le progrès peut-il être obtenu à un autre prix ?
@Marcailloux
[Ce que vous dénoncez comme avidité à occuper les situations les plus enviées n’est après tout qu’une ambition naturelle chez tous les individus et il n’est pas étonnant que chacun emploie les outils à sa disposition pour en faire bénéficier d’abord ses enfants, ensuite sa parentèle, puis les amis………….,tiens cela me rappelle certains discours propres à JMLP.]
Je n’ai pas dit le contraire. Je n’ai pas non plus « dénoncé » l’avidité à occuper les situations les plus enviées et d’en faire bénéficier sa famille. Si j’ai « dénoncé » quelque chose, c’est l’hypocrisie qui consiste, pour une certaine élite politico-médiatique issue des classes moyennes, à recommander aux autres des parcours qu’elle ne souhaiterait pas pour ses propres enfants.
[La notion de progrès, à laquelle nous vous savons très attaché, est indissociable de la différentiation des situations, et c’est à chacun, de là où il se trouve, de faire l’effort nécessaire pour combler l’écart qui le sépare de ses ambitions.]
C’est un peu trop facile. La différentiation des situations ? Oui, je suis d’accord. Je ne crois pas à l’utopie d’une société d’égaux, du moins pas dans un horizon concevable. Mais une fois ce principe posé, encore faut-il choisir le mécanisme de différentiation. Permettre que cette différentiation se fasse en laissant chacun partir « de la où il se trouve » sans chercher à corriger la différence des points de départ, c’est imaginer une société qui, dans l’idéal, ne fait que reproduire la hiérarchie sociale de départ. Ce n’est certainement pas mon idéal. Je préfère imaginer une société qui corrigerait l’inégalité des points de départ, de manière à ce que deux individus qui fournissent le même effort arrivent au même endroit, quelque soit leur point de départ respectif.
On ne peut pas vouloir une société méritocratique et en même temps une société ou chacun pourrait profiter librement de son héritage. Récompenser le mérite, dans une société à faible croissance, implique nécessairement sanctionner son absence. Au risque de me répéter : pour que le fils d’ouvrier puisse devenir médecin, il faut que le fils de médecin puisse devenir ouvrier. Si chacun est assuré de conserver son « point de départ », la société ne peut que reproduire la hiérarchie existante.
[Et l’ambition n’a-t-elle que des visées matérielles de rémunération ?]
En dernière instance, oui. Une fois la transcendance chassée de notre horizon, il ne nous reste que le matériel pour motiver l’homme.
[Vos enfants, si vous en avez, n’auront pas le même chemin à parcourir pour accéder à un niveau de réflexion approfondie, que ceux d’un couple inculte et indifférent à la culture. Comment pourriez-vous décréter l’égalité des chances dans ces conditions ?]
Seulement si la société – par l’intermédiaire d’institutions telle que l’école ou les médias – donne aux enfants d’un « couple inculte et indifférent à la culture » un apport qui puisse, ne serait-ce qu’en partie, compenser cette différence. Ce qui implique que les « couples cultivés et sensibles à la culture », qui sont aussi ceux qui ont les moyens économiques en général, soient prêts à payer des impôts qui permettront d’aider les enfants des « couples incultes et indifférents à la culture » à concurrencer leurs propres enfants. Et c’est là que se trouve le problème.
Vous me direz qu’on ne peut raisonnablement demander à une couche sociale – ici les classes moyennes – de scier la branche sur laquelle elle est assise. Soit. Mais à minima, on peut dénoncer ce discours hypocrite qui consiste à proclamer en permanence la détestation des inégalités tout en détruisant systématiquement les mécanismes qui permettaient jusqu’à il n’y a pas si longtemps de rétablir une certaine égalité.
[Enfin, l’apprentissage. Votre propos est particulièrement réducteur avec pour image récurrente celle du plombier. Bien d’autres métiers, dont certains qualifiés d’intellectuels –ingénieur par exemple – sont accessibles par la voie de l’apprentissage.]
C’est vrai. D’ailleurs, l’ENA était dans l’esprit de ses fondateurs et reste largement aujourd’hui une école d’apprentissage. Michel Debré, le fondateur de l’institution, soutenait en effet que l’apprentissage du métier de haut fonctionnaire ne pouvait se faire que par un contact étroit avec ceux qui l’exerçaient, et c’est pourquoi la scolarité à l’ENA consiste essentiellement de longs stages en administration ou l’apprenti fonctionnaire travaille en contact étroit avec un haut fonctionnaire en poste. Le reste de la scolarité étant constitué par des cours faits, là aussi, par des hauts fonctionnaires en poste et non par des enseignants professionnels.
Mais en dehors de ces cas atypiques, lorsqu’on parle de l’apprentissage on parle d’un système pensé et construit pour enseigner essentiellement des métiers manuels et les métiers d’exécution. Et on comprend bien pourquoi : on peut apprendre à clouer deux planches par observation et imitation. Mais pensez-vous qu’en regardant un ingénieur résoudre une équation différentielle on puisse apprendre à le faire ? Non, bien sur que non.
[D’autre part, de nombreuses professions issues de ce processus, voient leurs acteurs mieux rémunérés que bien des bac+4 ou +5 qui se sont fourvoyés dans des formations –pardon, des enseignements supérieurs- cul de sac.]
Mieux rémunérés à égalité de conditions de travail ? Vous en connaissez beaucoup ? Et bien, il faudra alors m’expliquer pourquoi les étudiants, leurs parents, leurs enseignants préfèrent toujours les « fourvoyer dans des formations cul de sac » plutôt que de leur proposer un CAP de plombier. Sont-ils tous idiots ?
Je ne crois pas que les gens soient tous des imbéciles. L’expérience montre que lorsqu’un métier est bien payé – et parler de « bien payé » implique bien entendu de mettre en rapport le salaire payé avec l’effort fourni – il attire les candidats. Les métiers mal payés et prestigieux restent rares, tout comme les métiers bien payés et boudés. Si les métiers manuels sont « dévalorisés », c’est parce que ce sont souvent des métiers très durs. Ils sont quelquefois, comme vous le dites, payés au dessus de beaucoup de métiers bac+5, mais pour un effort – et une usure physique – sans proportion.
[De nombreuses méthodes sont appliquées pour le plus grand bien de leurs bénéficiaires. Vos exemples sont par trop caricaturaux.]
Vraiment ? Pourriez-vous être plus précis, au lieu de lancer ce genre d’attaques à la cantonade ?
[Témoignage personnel : j’ai trois petits fils dont l’ainé vient de réussir son bac. Il s’engage pour 5 à 7 ans chez les compagnons du devoir. Eh bien sachez, que malgré notre appartenance à l’engeance honnie, cette décision a été accueillie avec joie, car il aura là l’occasion de se forger une personnalité qu’il n’aurait peut-être pas eu sur les bancs d’une faculté quelconque.]
Comme beaucoup de membres de l’engeance honnie, vous avez tendance à confondre le particulier et le général. Explorons votre exemple : les « compagnons du devoir » ne sont pas n’importe quel apprentissage. C’est l’apprentissage d’élite. Ceux qui ont suivi cette formation n’iront pas travailler en usine ou dans les chantiers de travaux publics ordinaires. Les « compagnons du devoir » forment de véritables artistes, qui iront exercer leur talent dans des ateliers très spécialisés, pour fabriquer des instruments de musique, tailler les pierres lors de la restauration de monuments historiques, et ainsi de suite. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard si cette formation s’adresse aux bacheliers.
Si au lieu d’aller chez les « compagnons du devoir » votre enfant avait quitté ses études générales pour embrasser un CAP de mécanicien avec pour perspective le travail à la chaîne chez Peugeot, je me demande si votre « joie » aurait été si pure…
Bonsoir,
[De nombreuses méthodes sont appliquées pour le plus grand bien de leurs bénéficiaires. Vos exemples sont par trop caricaturaux.]
[Votre réponse: Vraiment ? Pourriez-vous être plus précis, au lieu de lancer ce genre d’attaques à la cantonade ?]
Tout d’abord, je reprends une de vos phrases du texte initial:
« L’apprentissage, c’est merveilleux, c’est entendu. »
Cette forme ironique donne d’emblée la tonalité du billet, la dérision.
Je n’ai à aucun moment de cette émission, constaté que l’un ou l’autre des intervenants glorifiait la voie de l’apprentissage. Alors pourquoi donner cette impression à ceux qui n’auraient pas eu l’occasion de la suivre ?
L’apprentissage, c’est-à-dire l’acquisition d’une compétence professionnelle par l’intervention de maitres dans le cadre de l’entreprise ne mérite pas cet excès d’indignité.
Les citoyens, libres en France depuis plus de deux siècles, n’ont pas à être systématiquement introduits dans le tuyau unique d’un système qui selon de nombreux experts ainsi que de l’avis après tout légitime sinon éclairé des citoyens, ne brille pas particulièrement par l’excellence de ses résultats.
Beaucoup trop de jeunes gens sont exclus ou s’excluent eux même de tout processus éducatif pour ne pas favoriser et même encourager des initiatives susceptibles d’en ramener une certaine proportion dans le sens du progrès personnel, fut ce au moyen de méthodes moins conventionnelles que celles de l’éducation nationale.
Les hommes ne sont pas des robots que l’on peut contraindre physiquement et endoctriner par je ne sais quelle évangile étatique.
Plutôt que de faire un mauvais procès à l’apprentissage – malgré les nombreuses imperfections et dérives qu’il peut recéler – j’aurais préféré lire un réquisitoire contre la « médiocrisation » de nos sociétés dont un des indicateurs significatifs est le niveau en déclin d’une majorité des impétrants au baccalauréat. Et ce n’est qu’un exemple.
Concernant ce que vous considérez des « attaques à la cantonade », je vous trouve bien susceptible.
Dans votre billet, vous n’abordez pas la question de l’apprentissage dans son ensemble, avec ses avantages et ses inconvénients sous une forme objective, cartésienne dirais-je. Il n’est question que d’ouvriers métallurgistes, ensuite de plombiers, de bouchers, etc.
N’en exagérez pas les conditions, pour le plus grand nombre, insupportables de travail. Nous ne sommes plus au temps de Zola. Et ne pensez-vous pas que nombre de diplômés du supérieur ont une vie professionnelle sous l’emprise d’un stress excessif, de pressions insupportables de la hiérarchie, d’une ambiance de travail délétère, de burn out même.
Mais au fait, un avocat, un expert-comptable, un interne en médecine, un enseignant même – maintenant et ce n’est pas trop tôt – ont, avant d’exercer pleinement leur profession, une période d’apprentissage sur le terrain, au contact de leurs maîtres. Et bien d’autres exemples pourraient s’y ajouter.
Voyez-vous, je pense plutôt, qu’avec la formidable progression des moyens d’acquisition des connaissances, nos systèmes éducatifs conventionnels sont déboussolés et n’ont pas encore trouvé les adaptations nécessaires pour assumer leur mission de manière satisfaisante.
Un apprenti et son maître ne sont et ne seront plus des individus isolés, coupés des sources de la connaissance et sans contact possible avec des pédagogues, des spécialistes, des experts, et ce dans tous les domaines du savoir.
Condamner l’apprentissage me parait un combat d’arrière garde.
@ Marcailloux
[Tout d’abord, je reprends une de vos phrases du texte initial: « L’apprentissage, c’est merveilleux, c’est entendu. » Cette forme ironique donne d’emblée la tonalité du billet, la dérision. Je n’ai à aucun moment de cette émission, constaté que l’un ou l’autre des intervenants glorifiait la voie de l’apprentissage. Alors pourquoi donner cette impression à ceux qui n’auraient pas eu l’occasion de la suivre ?]
Alors, nous n’avons pas entendu la même émission. Je me souviens encore qu’en conclusion l’un des participants au débat à déclaré « de toute manière tout le monde est d’accord que l’apprentissage c’est l’avenir ». Comme personne n’a contesté cette affirmation, il me semble raisonnable de supposer qu’elle était partagée. Par ailleurs, aucun des intervenants n’a exprimé la moindre critique par rapport à l’apprentissage.
[L’apprentissage, c’est-à-dire l’acquisition d’une compétence professionnelle par l’intervention de maîtres dans le cadre de l’entreprise ne mérite pas cet excès d’indignité.]
L’apprentissage n’est pas simplement « l’intervention de maîtres dans le cadre de l’entreprise ». C’est surtout une transmission fondée sur l’observation et l’imitation. On regarde faire et on fait. Ce n’est pas le « cadre » de l’entreprise qui fait l’apprentissage.
[Les citoyens, libres en France depuis plus de deux siècles (…),]
« Libres » de quoi ? J’avoue que je ne comprends pas ce que fait ce lyrisme dans notre discussion.
[n’ont pas à être systématiquement introduits dans le tuyau unique d’un système qui selon de nombreux experts ainsi que de l’avis après tout légitime sinon éclairé des citoyens, ne brille pas particulièrement par l’excellence de ses résultats.]
Je ne comprends pas ce que vous voulez démontrer. Pensez-vous qu’il faille finir avec la scolarité obligatoire ? Dès lors qu’il y a une obligation scolaire, l’introduction « systématique » dans le système me paraît inévitable.
[Beaucoup trop de jeunes gens sont exclus ou s’excluent eux même de tout processus éducatif pour ne pas favoriser et même encourager des initiatives susceptibles d’en ramener une certaine proportion dans le sens du progrès personnel, fut ce au moyen de méthodes moins conventionnelles que celles de l’éducation nationale.]
Je ne comprends pas de quoi vous voulez parler. D’abord, si les jeunes « s’excluent d’eux-mêmes », alors ils ne font qu’user de la « liberté » dont vous chantez les louanges plus haut. En quoi faudait-il dès lors s’inquiéter ? Ensuite, de quelles « méthodes moins conventionnelles » ramenant « une certaine proportion dans le sens du progrès personnel » voulez-vous parler ?
[Les hommes ne sont pas des robots que l’on peut contraindre physiquement et endoctriner par je ne sais quelle évangile étatique.]
Bien sur que si. Comment pouvez-vous affirmer une chose aussi contraire à l’expérience quotidienne ? Nous sommes « contraints physiquement et endoctrinés par l’évangile étatique » chaque jour de nos vies. Et c’est très heureux qu’il en soit ainsi. Autrement, nous serions encore réduits à nos comportements animaux. Pensez vous vraiment que l’obéissance aux commandements « tu ne tueras point » et « tu ne voleras point » est naturelle ? Bien sur que non : ce sont des siècles de « contrainte physique » et « d’endoctrinement étatique » qui ont accompli ce miracle et nous permet de vivre dans des sociétés où nous pouvons espérer des autres un niveau de respect minimal de nos vies et de nos biens.
Mais admettons un instant votre théorie. Pourquoi alors obliger les jeunes à aller à l’école ? Après tout, s’ils ont envie de rester ignorants, de quel droit faudrait-il les forcer à apprendre à lire et à écrire, obligation qui après tout n’est qu’une partie de cet « évangile étatique » que vous rejetez ? Vous le voyez bien, votre discours « libertaire » aboutit forcément à la dissolution sociale. Le vivre ensemble est rendu possible parce que nous sommes capables de déléguer à des institutions le pouvoir de nous contraindre et de nous éduquer. Relisez Hobbes.
[Plutôt que de faire un mauvais procès à l’apprentissage – malgré les nombreuses imperfections et dérives qu’il peut recéler]
Je vous fais remarquer que je n’ai pas fait le « procès à l’apprentissage ». J’ai fait le procès des gens qui disent « l’apprentissage c’est super », mais seulement pour les enfants des autres. Ne pensez-vous pas qu’il y a dans ce discours une formidable hypocrisie ?
[Dans votre billet, vous n’abordez pas la question de l’apprentissage dans son ensemble, avec ses avantages et ses inconvénients sous une forme objective, cartésienne dirais-je. Il n’est question que d’ouvriers métallurgistes, ensuite de plombiers, de bouchers, etc.]
Dans mon billet, je n’aborde pas la question de l’apprentissage. J’aborde la question de l’hypocrisie d’une couche sociale qui chante les louanges de l’apprentissage tout en faisant des pieds et des mains pour que ses propres enfants continuent sur la voie généraliste. C’est cette contradiction que je voulais aborder. Vous ne pouvez tout de même pas rejeter mon papier sous prétexte qu’il ne touche pas le sujet qui vous intéresse vous !
[N’en exagérez pas les conditions, pour le plus grand nombre, insupportables de travail. Nous ne sommes plus au temps de Zola.]
Je n’ai pas parlé de « conditions insupportables ». Mais même si nous ne sommes plus au temps de Zola, le travail manuel reste dur, et s’exerce généralement dans des conditions de bruit, de poussière, de chaleur, de risque aussi bien plus pénibles que le travail de bureau, et généralement pour une rémunération moins attractive. Sans prendre conscience de ce fait, il est difficile de comprendre pourquoi nos jeunes boudent le travail manuel. Et on peut le rappeler sans tomber pour autant dans un misérabilisme qui n’a jamais été mon propos.
[Et ne pensez-vous pas que nombre de diplômés du supérieur ont une vie professionnelle sous l’emprise d’un stress excessif, de pressions insupportables de la hiérarchie, d’une ambiance de travail délétère, de burn out même.]
Oui. Mais le stress, les pressions de la hiérarchie, l’ambiance de travail délétère existent aussi dans les professions manuelles. La différence est que lorsqu’un cadre fait une dépression du fait de ses conditions de travail, on appelle cela un burn-out. Lorsqu’un ouvrier présente les mêmes symptômes, on dit qu’il a « pété les plombs ». Je vous le répète : si les conditions de travail et de vie du travailleur manuel étaient bien meilleures que celles du « diplômé », les gens feraient la queue pour suivre les carrières « manuelles ». Le fait que ce soit l’inverse devrait vous conduire à la conclusion inévitable : malgré le stress, malgré les pressions de la hiérarchie, malgré le risque de « burn out », il fait meilleur aujourd’hui être cadre qu’ouvrier.
[Mais au fait, un avocat, un expert-comptable, un interne en médecine, un enseignant même – maintenant et ce n’est pas trop tôt – ont, avant d’exercer pleinement leur profession, une période d’apprentissage sur le terrain, au contact de leurs maîtres. Et bien d’autres exemples pourraient s’y ajouter.]
J’avais moi-même donné un exemple encore plus net, celui de l’enseignement dispensé à l’ENA, qui fait référence explicitement – et depuis la fondation de cette vénérable institution – à « l’apprentissage sur le terrain au contact de leurs maîtres ». Cependant, on peut douter que le jeune énarque, l’interne en médecine ou l’enseignant soient véritablement des « apprentis » lorsqu’ils observent leurs maîtres. « L’apprentissage » est un mode d’acquisition de connaissances reposant essentiellement sur l’observation et l’imitation. L’apprenti n’a pas à comprendre le pourquoi, il n’a à se soucier que du comment. La méthode du maître marche, et c’est tout ce qu’il y a à savoir. L’énarque, l’interne ou l’enseignant ont une formation théorique et ils sont invités non seulement à assimiler les méthodes de leurs maîtres, mais à les analyser et à les comprendre.
[Voyez-vous, je pense plutôt, qu’avec la formidable progression des moyens d’acquisition des connaissances, nos systèmes éducatifs conventionnels sont déboussolés et n’ont pas encore trouvé les adaptations nécessaires pour assumer leur mission de manière satisfaisante.]
Encore une fois, j’aimerais que vous illustriez de quelques exemples ce genre d’affirmations. Où est la « formidable progression des moyens d’acquisition des connaissances », franchement ? J’ai du mal à voir. Internet est un formidable moyen de mise à disposition d’informations – vraies ou fausses, d’ailleurs. Mais pour « acquérir des connaissances », franchement, je ne vois pas beaucoup de « moyens » nouveaux…
[Un apprenti et son maître ne sont et ne seront plus des individus isolés, coupés des sources de la connaissance et sans contact possible avec des pédagogues, des spécialistes, des experts, et ce dans tous les domaines du savoir.]
Et ?
[Condamner l’apprentissage me parait un combat d’arrière garde.]
Où avez-vous vu une « condamnation de l’apprentissage » ? S’il vous plait, ne transférez pas sur moi vos propres fantasmes…
@ Descartes,
Tout à fait d’accord avec vous Descartes quant au fait de tout faire pour pousser ses enfants à poursuivre le plus loin possible ses études, sauf à avoir un enfant qui n’a pas les moyens intellectuels de poursuivre des études longues, tout le monde ne naissant pas avec le cerveau d’Einstein, malheureusement et sachez que même chez des gens d’un bon niveau culturel, et bien leurs rejetons peuvent avoir un ralentissement intellectuel pour x raisons, qui ne leur permettra pas de faire en sorte de satisfaire leurs parents dans le sens voulu.
Bien que baignant dans un milieu dit "cultivé", ils peuvent se trouver en situation de ne pas être en mesure par goût personnel et par ralentissement intellectuel, de suivre la voie royale, toute tracée des parents ! (certes ce sont des situations exceptionnelles) !
Mais il est vrai que tout parent "responsable" se doit de viser le meilleur pour son enfant (d’où le fait de ne pas en avoir 36 quand on sait qu’on sera incapable de l’aider à gravir l’ascenseur social) afin de lui permettre de pouvoir vivre heureux, sans problèmes matériels. L’argent ne fait peut être pas le bonheur (dans le sens philosophique du terme) mais quand il vient à manquer, il fait véritablement le malheur des gens, au quotidien ! et compter sur les allocations familiales n’est pas la bonne solution ! en avoir qu’un ou deux et pouvoir se sacrifier quand on est d’un milieu modeste plutôt que d’être responsables de l’échec de ses enfants qu’on a voulu en trop grand nombre, sans même se poser la question de leur avenir ! Il est là aussi le problème majeur en France, l’appât des allocations familiales (pour ma part, je serais pour limiter les allocations à trois enfants) ! je sais les gauchistes crient au scandale quand on leur sort ça, c’est très mal vu mais encourager (via les allocs) des gens à faire 5/6 enfants quand ceux-ci n’auront aucune chance de s’en sortir, vu le peu de niveau intellectuel des parents bien souvent (statistiquement, ne ne sont pas les médecins ou les cadres sup qui pondent des marmailles alors qu’eux en auraient les moyens de leur offrir des perspectives d’avenir de part leur relations déjà et leur bons salaires), c’est faire aller les choses dans le sens négatif pour tous !
Je parle juste un peu de moi en passant : mon fils vient d’avoir son bac avec mention bien (et j’en suis très fière). Et là il se dirige vers un BTS plutôt orienté finances (bon en math, pas au point d’avoir visé une carrière scientifique cependant, ce que j’aurais aimé) mais je lui fais confiance pour la suite !
Après les études ne sont pas tout Descartes, avoir son bac (surtout aujourd’hui) ne signifie pas tant que ça mais c’est le précieux sésame qui permet l’ouverture des portes suivantes ! sans le bac, point de salut et vie de merde assurée parce que chômage obligatoire ou boulots ingrats au bout de la route, à moins de développer certaines petites astuces personnelles permettant de s’en sortir par d’autres biais (après tout l’intelligence et la réflexion de bonne facture ne sont pas forcément liées au niveau d’étude) !
Seulement voilà, des travailleurs manuels, il en faudra toujours cependant et donc une partie des citoyens ne pourra donc pas échapper à occuper des emplois durs et peu rémunérateurs et vous le savez très bien sinon c’est nous tous qui seront pénalisés si tout le monde devient ingénieurs ou architectes ! et alors doit-on juger ces gens négativement ou inférieurement, qui oeuvrent, de par leur emploi dit manuel, au bien être de tous ? une coiffeuse niveau bac pro, qui tiendra son salon, et qui permettra à monsieur ou madame X de se sentir mieux dans sa peau après être passé entre ses mains expertes, ça fait aussi partie des petits bien êtres dont on ne peut se passer !
Le mépris de certains face à des gens qui exercent des professions manuelles est à gerber !
Il faut de tout pour faire un monde et quand en tant que parent, on a la chance d’avoir des enfants qui ont les capacités de poursuivre leurs études et bien oui, on ne va pas les inciter à se diriger vers l’apprentissage ! Ca coule de source ! mais pour en avoir vécu l’expérience autour de moi, boucher la route d’un jeune qui a juste momentanément un mauvais cap à passer en ne lui permettant pas de suivre une filière générale ! heureusement les bac pro sont là pour permettre au jeune recalé par l’EN, de prouver, en étant le premier de sa classe, qu’il avait les capacités et que ce n’était que mauvaises circonstances et incompétences de certains professeurs ! Oui, il faut aussi le dire, l’école privée a du bon vu le niveau actuel du public mais pour ça faut pas avoir 10 bouches à nourrir : le sacrifice qu’on peut faire pour un ou deux gosses, on ne pourra pas le faire pour 10 (toucher les allocs n’y suffira pas) !
Cette société en déresponsabilisant, infantilisant les gens en permanence, ne peut conduire qu’au chaos !
@ l’inconnue de l’Orient Express
[Tout à fait d’accord avec vous Descartes quant au fait de tout faire pour pousser ses enfants à poursuivre le plus loin possible ses études, sauf à avoir un enfant qui n’a pas les moyens intellectuels de poursuivre des études longues,]
Je ne pense pas que ce soit la bonne manière de poser le problème. La question n’est pas la « longueur » des études, mais leur contenu. Je trouve que la politique éducative qui consiste à spécialiser les élèves est une politique à courte vue. Si elle fournit des travailleurs adaptés aux demandes du marché de l’emploi hic et nunc, elle risque de produire des individus incapables de s’adapter aux changements technologiques et sociaux. L’avantage d’une formation généraliste, insistant autant sur les contenus que sur les mécanismes, est de produire des individus capables d’analyser un contexte et de s’adapter. Mais « généraliste » et « longue » ne sont pas des synonymes. On trouve des formations longues qui sont hyper-spécialisées, et des formations courtes et générales.
[en avoir qu’un ou deux [enfants] et pouvoir se sacrifier quand on est d’un milieu modeste plutôt que d’être responsables de l’échec de ses enfants qu’on a voulu en trop grand nombre, sans même se poser la question de leur avenir ! Il est là aussi le problème majeur en France, l’appât des allocations familiales (pour ma part, je serais pour limiter les allocations à trois enfants) !]
Faudrait pas trop exagérer. La France n’est plus, et cela depuis le début du XXème siècle, dans un contexte de natalité incontrôlée. Les parents – et le fonctionnement de l’ascenseur social fondé sur l’école n’est pas étranger au phénomène – ont fait leur le raisonnement que vous prônez et aujourd’hui, en dehors de quelques populations d’immigration récente, on dépasse rarement les deux enfants. Pour l’immense majorité des ouvriers français, ce n’est pas le trop d’enfants qui est un obstacle à la promotion sociale.
[encourager (via les allocs) des gens à faire 5/6 enfants quand ceux-ci n’auront aucune chance de s’en sortir, vu le peu de niveau intellectuel des parents bien souvent (statistiquement, ne ne sont pas les médecins ou les cadres sup qui pondent des marmailles alors qu’eux en auraient les moyens de leur offrir des perspectives d’avenir de part leur relations déjà et leur bons salaires), c’est faire aller les choses dans le sens négatif pour tous !]
Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. Si les pauvres ont beaucoup d’enfants, c’est surtout par calcul économique. Pour des gens qui n’ont pas de patrimoine qui garantisse leurs vieux jours, de nombreux enfants capables de gagner un salaire et donc d’aider leurs vieux parents, c’est une garantie. Les régimes de sécurité sociale, de protection vieillesse, et un ascenseur social qui permet aux enfants de monter de classe et donc de gagner beaucoup plus que leurs parents sont les meilleurs moyens de faire baisser la natalité…
[Seulement voilà, des travailleurs manuels, il en faudra toujours cependant et donc une partie des citoyens ne pourra donc pas échapper à occuper des emplois durs et peu rémunérateurs et vous le savez très bien sinon c’est nous tous qui seront pénalisés si tout le monde devient ingénieurs ou architectes ! et alors doit-on juger ces gens négativement ou inférieurement, qui oeuvrent, de par leur emploi dit manuel, au bien être de tous ?]
Bien sur que non. Où m’avez-vous entendu dire qu’il faille « juger négativement ou inférieurement » les emplois manuels ? Mais je ne peux que constater les faits : pour l’essentiel de l’opinion, ces métiers sont vus négativement. Les parents, y compris ceux qui font ces métiers, préféreraient souvent voir leurs enfants installés dans un métier « intellectuel ». Si les gens réagissent ainsi, c’est qu’il doit y avoir une raison…
[Il faut de tout pour faire un monde et quand en tant que parent, on a la chance d’avoir des enfants qui ont les capacités de poursuivre leurs études et bien oui, on ne va pas les inciter à se diriger vers l’apprentissage !]
En d’autres termes, il ne faut pas mépriser les métiers manuels, mais si on peut éviter que nos enfants aient à les exercer, on évite ? Ne trouvez-vous pas qu’il y a une petite contradiction ?
[Ca coule de source ! mais pour en avoir vécu l’expérience autour de moi, boucher la route d’un jeune qui a juste momentanément un mauvais cap à passer en ne lui permettant pas de suivre une filière générale ! heureusement les bac pro sont là pour permettre au jeune recalé par l’EN, de prouver, en étant le premier de sa classe, qu’il avait les capacités et que ce n’était que mauvaises circonstances et incompétences de certains professeurs !]
Là, je ne vous suis plus. D’un côté vous prêchez la noblesse des métiers manuels, et maintenant vous vous élevez contre l’injustice implicite qu’il y aurait à écarter un jeune de l’enseignement général… il va falloir vous décider !
Il y a dans votre discours une contradiction non résolue. D’un côté vous soutenez qu’il ne devrait pas y avoir de hiérarchie entre l’enseignement professionnel et l’enseignement général, d’un autre côté vous semblez affirmer que tout ceux qui sont en mesure de suivre un enseignement général devraient pouvoir le faire, les jeunes « récalés par l’EN » vers l’enseignement technique n’ayant d’autre but que de « prouver qu’ils avaient les capacités » de le suivre.
Cette contradiction est la conséquence inévitable d’un égalitarisme mal compris. Que les hommes soient libres et égaux en droits n’implique pas qu’ils doivent tous faire les mêmes choses, poursuivre les mêmes buts, ni qu’ils soient prêts à faire les mêmes sacrifices. Dans une société égalitaire, certains choisiraient probablement les métiers manuels et autres les métiers intellectuels en fonction de leurs goûts, leurs aspirations, l’envie ou pas de faire des investissements d’efforts pour gagner plus dans le long terme. Et il est probable que dans une telle société les écarts de rémunération entre les différents métiers seraient moindres, puisqu’un métier dont la rémunération serait trop forte attirerait plus de candidats et par le jeu du marché verrait la rémunération ajustée.
Mais dans une société inégalitaire, cela ne fonctionne pas comme cela. Les métiers « intellectuels » ne sont peut-être pas plus ou moins dignes que les métiers manuels, mais ils donnent de toute évidence un plus grand pouvoir de négociation. Pouvoir d’autant plus grand que les couches sociales qui y ont accès font tout ce qu’ils peuvent pour barrer la route à d’éventuels concurrents. Ces métiers deviennent donc, à juste titre, plus « désirables » que les métiers manuels auxquels tout le monde peut prétendre et qui de ce fait payent moins.
Cette situation est un défi pour la vision égalitariste, qui se trouve à proclamer une doctrine de « l’égale dignité des métiers » qui n’est en pratique partagée – ni pratiquée – par personne.
[Oui, il faut aussi le dire, l’école privée a du bon vu le niveau actuel du public]
Disons plutôt que le niveau du public a été ajusté pour que l’école privée ait du bon. Les classes moyennes ont trouvé là un moyen supplémentaire de se réserver la connaissance en restant « entre soi ».
Suite,
Une précision tout de même ! il ne s’agit pas de laisser à penser qu’il faille absolument être issu d’un milieu aisé pour permettre à sa progéniture de réussir ses études et donc sa vie !
C’est juste avoir le sens des responsabilités avant tout, quel que soit le milieu d’où l’on vient, et ce d’autant plus quand on sait que rien ne sera simple pour les siens, sans appuis et sans aisance matérielle assurée.
Les parents responsables sont pour moi ceux qui ayant conscience de leurs limites (intellectuelles, matérielles etc…) sont tout de même suffisamment capables d’insuffler à leurs enfants le goût de l’effort et surtout de leur faire comprendre qu’ils doivent être fiers d’être ce qu’ils sont ! Le devenir de leurs enfants accaparent leur esprit, les priorités seront mises en place d’emblée et les sacrifices qui vont avec. Ces enfants là ont toutes les chances, même issus d’un milieu modeste,, de s’en sortir, parce que leurs parents auront cru en eux !
Les irresponsables que je pointe du doigt et qu’encourage cette politique de distribution d’allocations familiales à volonté, sans que les parents n’aient le moindre devoir à l’égard de leurs enfants à rendre, ne favorisera que le rejet des plus faibles, économiquement parlant !
Rien de pire pour un enfant pas bien nés, d’être de surcroit affublé d’une famille le diminuant chaque jour davantage, de par leur manque de croyance en ses possibilités de progresser et donc de s’en sortir !
Rien de pire, en effet, que de voir se dresser devant soi une porte fermée à double tour, pour un humain, qui forcément n’aspire qu’à fuir le négatif d’une vie de merde, déjà toute tracée à l’avance !
Ca me fait penser à Henri Laborit avec son "éloge de la fuite" et son histoire de rat qui malgré l’adversité (pour lui la décharge électrique), continuait à être en en très bon état de santé, tant que la possibilité de fuir la fatalité lui était offerte ! la porte fermée, il meurt à petit feu, bourré de stress et incapable de rebondir !
C’est cela qu’affligent à leurs enfants ces familles nombreuses irresponsables, qui ne voient pas plus loin que le montant des allocations qui leur sont versées tous les mois et qui ne se sentent même pas coupables de ne même pas donner l’once d’un début d’éducation à leurs enfants !
Mais les gauchistes diront pour les défendre que ce n’est pas de leur faute ! si ce n’est pas de leur faute, alors faudrait peut être que l’on se mêle davantage de les aider dans cette tâche d’être parents parce que le fric, sous forme d’allocations, ne peut être suffisant, sans être accompagné de mesures efficaces, porteuses d’avenir plus heureux pour ces mômes qui seront sinon forcément condamnés à l’échec perpétuel !
@ l’inconnue de l’Orient Express
[Une précision tout de même ! il ne s’agit pas de laisser à penser qu’il faille absolument être issu d’un milieu aisé pour permettre à sa progéniture de réussir ses études et donc sa vie !]
Mais le moins qu’on puisse dire, c’est que ça aide pas mal. Comme disait l’autre, l’argent ne fait pas le bonheur… de ceux qui n’en ont pas.
[C’est juste avoir le sens des responsabilités avant tout, quel que soit le milieu d’où l’on vient, et ce d’autant plus quand on sait que rien ne sera simple pour les siens, sans appuis et sans aisance matérielle assurée.]
Vous simplifiez un peu trop. On peut être de toute condition, et essayer d’aider ses enfants à « réussir ses études et donc sa vie ». Mais les probabilités de ne pas y arriver, malgré tous les efforts et le « sens de responsabilité » est beaucoup plus élevé lorsqu’on est de condition modeste. Imaginer qu’il suffirait aux pauvres de faire preuve de « sens des responsabilités » pour sortir de leur condition est un raccourci un peu trop facile. Responsabiliser les gens, en leur expliquant qu’ils ont un certain contrôle sur leur destin, c’est très bien. Mais il ne faut pas tomber dans l’excès inverse, qui est le discours de la toute-puissance.
[Les parents responsables sont pour moi ceux qui ayant conscience de leurs limites (intellectuelles, matérielles etc…) sont tout de même suffisamment capables d’insuffler à leurs enfants le goût de l’effort et surtout de leur faire comprendre qu’ils doivent être fiers d’être ce qu’ils sont !]
Je suis en total désaccord. Je trouve déjà assez ridicule cette idée qu’il faille « être fier de ce qu’on est ». Comme disait mon grand père, qui en savait quelque chose, « être pauvre n’est pas une honte, mais il n’y a pas non plus de quoi être fier ». On peut être fier de ce qu’on a fait, de ce qu’on a construit, de ce qu’on veut construire, mais certainement pas de ce qu’on est. En plus, cette « fierté » est le plus puissant frein au progrès. Si je suis « fier de ce que je suis », pourquoi chercherais-je à devenir autre chose ?
Je voulais dire inflige et non afflige mais bon tout le monde aura compris !
[en dehors de quelques populations d’immigration récente] le "quelque" est un peu en dessous de la réalité et il ne sert à rien de minimiser les faits ! ce sera toujours des familles de trop qui laisseront leur progéniture sur le carreau, qui profiteront du système et qui créeront du désordre social car des gens sans avenir deviennent forcément agressifs et avides d’en découdre avec ceux qu’ils estiment, à tord, pour des privilégiés, juste parce que eux se sont donné de la peine pour voir le bout du tunnel, pour peu qu’on leur ait donné leur chance et qu’ils aient su la saisir !
C’est exact que dans les familles responsables, y compris modestes, on ne fait pas plus de 3 enfants parce qu’on sait le coût, aides comprises, que cela implique de payer des études à un enfant et parce qu’ils ont avant tout des enfants par amour et non pas par intérêt ! On peut donc constater que c’est donc bien chez les familles issues de l’immigration (récentes ou non) que le processus s’inverse ou plus généralement chez les cas sociaux (Il ne faut pas avoir peur des mots ou maux ) ! Utiliser le terme " cas social" n’est pas un gros mot pour moi ni du mépris ! La réalité est ce qu’elle est et des gens incapables de vivre ne société, ça existe aussi !
Je fais une différence entre ceux que les aides sociales aident à bien élever leurs enfants et les autres, ceux qui raflent la mise, si modeste peut-elle paraitre au vu des exactions des voyous en col blanc (banquiers, hommes politiques…) et qui n’assument même pas le minimum syndical en tant que parents !
Et non je n’émet pas de louanges envers ceux qui exercent un métier manuel spécialement ! Moi même, j’ai fait en sorte d’ être exonérée le plus possible des tâches manuelles (y compris des tâches ménagères que je réduis à l’essentiel, au diable le repassage par exemple et pourtant je n’ai jamais rien de froissé (rire))
Disons que ces gens existent et ils méritent d’être considérés à leur juste mérite ou valeur autant que de grands pontes ! on est tous utiles sur terre, chacun à son niveau ! certes certains plus que d’autres de par des talents ou compétences exceptionnelles ! Mais les ordinaires ont bien droit aussi à leur part du gâteau, non ? et si ils l’avaient, le climat social serait plus sain à l’heure actuelle !
Cependant voilà, on ne peut pas transformer un "manuel" en intellectuel et l’inverse est vrai aussi ! chacun ne peut faire qu’avec son potentiel de base et je le conçois, il y a énormément de différences entre les êtres humains ! du génie à l’imbécile fini, il y en a des profils divers et variés !
La bonne solution, utopiste seulement parce qu’elle suppose une grosse évolution des mentalités, de l’organisation de la société, de ce qui la rend plus ou moins juste, mais pas utopiste dans l’absolu, c’est-a-dire qu’il est facile d’imaginer une société la mettant en oeuvre, sans sortir de l’économie de marché…, bref, la bonne solution, disais-je, utopiste d’un certain point de vue, mais pas tant que cela dans le fond : ce serait que les études se donnent PLUSIEURS objectifs, a savoir, d’une part permettre d’avoir un travail, et d’autre part permettre de s’epanouir ; et qu’en consequence, on crée des filieres qui s’adressent a des jeunes qui revent a la fois d’avoir un travail dans l’artisanat, mais qui ne sont pas des bourrins, et qui donc, en meme temps, veulent faire des etudes qui les epanouissent ; par exemple, des etudes a la fin desquelles on a a la fois un CAP en boulangerie ou metallurgie ou autre, avec les annees d’apprentissage qui vont avec, et un diplome universitaire dans une discipline choisie uniquement pour son cote epanouissant, comme l’Histoire, la philosophie, le sport ou autre… Il faudrait donc qu’un jeune puisse se dire : je vais faire des etudes en boulangerie et en Histoire, par exemple.
@samuel
[bref, la bonne solution, disais-je, utopiste d’un certain point de vue, mais pas tant que cela dans le fond : ce serait que les études se donnent PLUSIEURS objectifs, a savoir, d’une part permettre d’avoir un travail, et d’autre part permettre de s’epanouir ; et qu’en consequence, on crée des filieres qui s’adressent a des jeunes qui revent a la fois d’avoir un travail dans l’artisanat, mais qui ne sont pas des bourrins, et qui donc, en meme temps, veulent faire des etudes qui les epanouissent ; par exemple, des etudes a la fin desquelles on a a la fois un CAP en boulangerie ou metallurgie ou autre, avec les annees d’apprentissage qui vont avec, et un diplome universitaire dans une discipline choisie uniquement pour son cote epanouissant, comme l’Histoire, la philosophie, le sport ou autre…]
Former des gens qui iront pétrir la pâte ou souder des poutrelles au niveau d’un véritable « diplôme universitaire », cela coûte cher. Très cher, contrairement à ce que les gens croient. Si la société française investit pour former un historien, un médecin ou un ingénieur, c’est pour qu’ils exercent ce métier, pas pour qu’ils aillent cuire le pain ou serrer des boulons.
Ton raisonnement ignore le coût réel des formations. Un peu comme si cette question était marginale, et qu’il suffisait de vouloir pour que tout le monde puisse choisir une discipline et atteindre dans celle-ci un niveau de « diplôme universitaire ». C’est beaucoup plus compliqué que cela. La plupart des gens qui cuisent le pain et serrent des boulons le font parce qu’ils n’ont pas les moyens ou l’envie d’étudier autre chose.
Il y a, c’est vrai, des boulangers et des ouvriers qui, dans leur temps libre, font l’effort de lire et d’étudier et qui atteignent quelquefois un niveau universitaire dans le domaine qui les passionne. Mais ils sont extrêmement minoritaires…
[Je suis en total désaccord. Je trouve déjà assez ridicule cette idée qu’il faille « être fier de ce qu’on est ». }
Etre fier de ce que l’on est en tant que personne "unique", Descartes et je ne faisais pas référence au statut ! on peut être quelqu’un de valable humainement que l’on soit fortuné ou non (sa seule fortune bien souvent vient de soi et de ce fameux potentiel à exploiter, en dépit des barrières dressées devant soi) !
Mais il est vrai que dans la configuration actuelle, c’est celui qui a le sou à profusion qui a tous les avantages et qui a toute la considération d’autrui, indépendamment de la valeur réelle ou non de la personne en question !
Qui nait pauvre, à moins d’avoir un talent exceptionnel à développer (ou du moins une certaine habilité à savoir se mettre en valeur par un biais quelconque et arriver à détourner la fatalité), aura bien des obstacles à abattre avant d’arriver à un certain résultat mais si il y a volonté de ne pas plier l’échine devant l’adversité, alors tout est permis à celui qui a conscience de sa valeur personnelle, certes sans facilité aucune mais quelle revanche sur le destin hein et quelle fierté pour soi et pour les siens quand après tant d’efforts, la récompense arrive !
Le défaitiste, lui, celui qui plie comme un roseau sitôt qu’on lui dit qu’il ne vaut rien (en terme plus crû qu’il est une merde) et qui ne parvient pas à redresser la tête à temps, ne sera à jamais qu’un soumis, considéré "sans valeur" propre aux yeux des autres !
Alors oui être fier non pas d’être issu d’un milieu de prolos, Descartes (tout comme on n’a pas être fier d’être fils de bourges) mais de ce qu’on l’on est intrinsèquement à l’intérieur de soi (de la valeur qu’on s’attribue et la place qu’on estime mériter dans la société) et des trésors d’ingéniosité que l’on sera capable de déployer tout au long de sa vie pour se prouver qu’être fils ou fille de prolos ne conduit pas forcément à l’enfouissement de sa dignité d’homme ou de femme.
C’est de cette fierté là dont je parlais Descartes et elle n’est pas un frein mais un moteur car elle permet de ne pas se laisser dégommer par le mépris de ceux, bien mieux nés qu’eux et qui ne valent pas forcément plus !
@ l’inconnue de l’Orient Express
[« Je suis en total désaccord. Je trouve déjà assez ridicule cette idée qu’il faille « être fier de ce qu’on est ». » Etre fier de ce que l’on est en tant que personne "unique", ]
C’est bien ce que j’ai compris. Mais pourquoi faudrait-il être « fier de ce que l’on est en tant que personne unique » ? Après tout, cela arrive à tout le monde, et sans le moindre effort. C’est un peu comme être fier que le soleil se lève à l’est ou que les choses tombent de haut en bas. Ce n’est pas moi qui ai choisi d’être « une personne unique », c’est comme ça. Et même si je souhaitais le contraire, ce serait comme ça tout de même. Alors, pourquoi serais-je « fier » ?
[Descartes et je ne faisais pas référence au statut ! on peut être quelqu’un de valable humainement que l’on soit fortuné ou non]
Là n’est pas la question. On peut être « fier » de ce que l’on fait, et cela quelque soit notre état de fortune. L’ouvrier qui cultive son petit bout de jardin peut être légitimement « fier » de ce qu’il y fait pousser, et cette « fierté » est aussi légitime que celle du chatelain qui fait construire un jardin à la française. Mais la question que vous posiez n’est pas celle d’être fier de ce que l’on FAIT, mais fier de ce que l’on EST, alors même qu’on n’a aucun contrôle sur ce dernier paramètre.
[Mais il est vrai que dans la configuration actuelle, c’est celui qui a le sou à profusion qui a tous les avantages et qui a toute la considération d’autrui, indépendamment de la valeur réelle ou non de la personne en question !]
N’exagérons pas tout de même. Pierre et Marie Curie sont rentrés au Panthéon, et je ne pense pas que Tapie ou Niel, malgré leurs millions, soient près de recevoir cette preuve de considération. L’argent achète beaucoup de choses, mais ni l’amitié, ni l’amour, ni la considération.
[Qui nait pauvre, à moins d’avoir un talent exceptionnel à développer (ou du moins une certaine habilité à savoir se mettre en valeur par un biais quelconque et arriver à détourner la fatalité), aura bien des obstacles à abattre avant d’arriver à un certain résultat mais si il y a volonté de ne pas plier l’échine devant l’adversité, alors tout est permis à celui qui a conscience de sa valeur personnelle,]
« Tout » ? Là encore, il faut raison garder. Qui naît pauvre peut, avec de la volonté et du travail, s’élever socialement. C’était très vrai entre le dernier quart du XIXème siècle et le dernier quart du XXème, cela l’est beaucoup moins aujourd’hui du fait du blocage de l’ascenseur social par les classes moyennes. Mais cela reste tout de même possible. Mais de là à dire que « tout est permis » ? Non. Lorsqu’on a des origines modestes, pour arriver à certaines places la volonté, l’effort et le travail ne suffisent pas. Il faut aussi une énorme dose de chance.
[Alors oui être fier non pas d’être issu d’un milieu de prolos, Descartes (tout comme on n’a pas être fier d’être fils de bourges) mais de ce qu’on l’on est intrinsèquement à l’intérieur de soi (de la valeur qu’on s’attribue et la place qu’on estime mériter dans la société) et des trésors d’ingéniosité que l’on sera capable de déployer tout au long de sa vie pour se prouver qu’être fils ou fille de prolos ne conduit pas forcément à l’enfouissement de sa dignité d’homme ou de femme.]
Ce n’est donc pas la fierté de ce qu’on EST mais la fierté de ce qu’on FAIT. Nous sommes d’accord.