Le gauchisme a encore frappé

Vous savez, mes chers lecteurs, que je prête toujours une oreille attentive aux commentaires qui sont faits sur ce blog, dont le but est, je le répète, d’ouvrir le débat. L’un des vous, ayant lu mon papier sur les “diables de confort” imaginaires ou réels, m’a signalé amicalement l’apparition dans mes textes d’un “diable de confort” personnel: le gauchisme.

 

Bien entendu, devant une telle critique – fort civile au démeurant – j’ai fait mon examen de conscience. Et à l’issue de ce pénible travail, ou j’ai passé en revue tous mes pêchés politiques, je me présente devant vous pour vous le dire: quelque soient les vices dont je suis coupable, je suis innocent de celui-là. Le “gauchisme” n’est pas un “diable de confort” que j’aurais créé pour avoir un épouvantail à disposition. C’est une néfaste réalité. Une réalité suffisamment présente pour qu’en 1920 Lénine éprouve le besoin de dénoncer dans le “gauchisme” une “maladie infantile du communisme” en termes d’une violence extrême. Mais je pense qu’il est plus intéressant d’aller chercher des exemples dans notre actualité plutôt que dans la Révolution russe. Et justement, l’actualité nous fournit un exemple comique de simplicité.

 

Avez-vous lu le dernier papier de Jean-Luc Mélenchon sur son blog ? Intitulé “Les riches et les puissants,TF1 et le CSA“, il aborde un sujet fort étrange dans la bouche d’un rationnaliste: la démonstration “scientifique” que les riches seraient moins “moraux” que les pauvres. Voici comment la question est annoncée:

 

C’est de cette façon aussi que je reçois ce papier que j’ai découvert avec gourmandise dans le journal « Le Monde ». Une hirondelle, en quelque sorte. Il est paru sous la signature de Stéphane Foucart. Ce n’est pas seulement son contenu qui me réjouit. C’est qu’il soit paru. C’est qu’il ait ce titre. C’est que le journal l’ait publié. Toute une époque commence ! Le titre sonne comme celui d’un tract maoïste des années 70 : « Plus on est riche, moins on a de morale, c’est prouvé ».

 

Oui, vous avez bien lu, “toute une époque commence” parce que le journal de référence publie un titre “qui sonne comme un tract maoïste des années 70”. Mais le plus drôle ici est que Mélenchon traite comme s’il était sérieux un article du style “incroyable mais vrai” dont le ton ironique ne devrait échapper à aucun commentateur sérieux. Que Mélenchon voit dans la publication d’un tel papier le début d’une nouvelle ère nous dit beaucoup sur sa vision du monde est surtout sur l’envie de croire qui le pousse à voir dans tout signe l’annonce de la venue du messie.

Et Mélenchon enfonce le clou:

 

Je pense à cet instant à ces tracts où les amis de « La Cause du Peuple » prétendaient que le notaire de Bruay-en-Artois était l’assassin du fait de sa position sociale et du fait qu’il avait fait son repas d’un très gros steak.

 

Passons sur les amitiés étranges de Mélenchon, pour nous intéresser plutôt à la référence au notaire de Bruay en Artois. L’affaire de Bruay en Artois est en effet une illustration presque académique des énormes dangers contenus dans la vision gauchiste de la politique (1). On peut s’interroger sur le commentaire de Mélenchon associant “toute une époque commence” à une affaire aussi sordide, où pour se faire de la publicité un groupe gauchiste détruisit la vie d’un paisible notable de province. Et Mélenchon continue:

 

Mais là, c’est du sérieux et scientifique. « Dans un climat politique où il est tant question d’opposition entre les “élites” et le “peuple”, commence Stéphane Foucart, voici une étude qui devrait faire couler beaucoup d’encre. Et pour cause : des chercheurs américains et canadiens documentent, dans l’édition du lundi 27 février de la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), l’existence d’une relation inverse entre élévation dans la hiérarchie sociale et éthique du comportement individuel. C’est-à-dire, exprimé de manière un peu plus directe, que plus vous êtes riche, plus vous êtes susceptible de vous comporter de manière moralement lamentable. L’équipe américano-canadienne menée par Paul Piff (université de Californie à Berkeley) a quelques arguments. Les chercheurs ont mené pas moins de sept protocoles expérimentaux différents, qui concluent tous dans le même sens. »

 

En fait de “sérieux et scientifique”, l’étude ne fournit pas grande chose. D’abord, on peut s’interroger sur une étude qui prétend donner un caractère scientifique aux questions d’éthique. Une étude scientifique peut établir une corrélation entre tel ou tel niveau social et tel ou tel comportement défini objectivement. Mais le fait de qualifier ce comportement “d’ethique” est un choix personnel qui n’a rien de “scientifique”. Pour arriver à la conclusion que lui attribue Stéphane Foucart, les auteurs de l’étude sont obligés de décider ce qu’est un comportement “éthique”. On n’est plus dans la “science”, mais dans la philosophie. 

 

Mais le problème principal de cette étude – comme souvent des études comportementalistes américaines – est qu’elle ne vaut rien pour des raisons méthodologiques. Foucart nous décrit deux des “sept protocoles” – le chiffre sept ne vous dit rien ? – utilisés dans cette expérience. Voici les deux premiers:

 

« Le premier est simple : il s’est simplement agi de se poster à un carrefour et d’observer les véhicules pris en flagrant délit de refus de priorité. La deuxième expérience, très semblable, a, quant à elle, consisté à relever les situations dans lesquelles un piéton engagé sur un passage ad hoc se fait couper la route par une voiture. Dans les deux cas, les chercheurs ont classé les véhicules en cinq catégories, des épaves roulantes (groupe 1) aux berlines de luxe (groupe 5). Résultat : près de 30 % des véhicules du groupe 5 forcent le passage aux voitures prioritaires, un taux quatre fois supérieur aux groupes 1 et 2, et trois fois supérieur aux groupes 3 et 4. Corrélation quasi identique pour le respect dû aux piétons… (2)

 

Les biais de ces deux expériences sont évidents. D’abord, parce qu’il presuppose une corrélation linéaire entre la voiture que vous conduisez et votre place dans l’échelle sociale, ce qui est pour le moins aventureux. Ensuite, parce que le résultat de l’expérience dépend assez fortement de votre choix du carrefour d’observation. Les gens qui conduisent des Porche ou des Mercedes à la Cité des 4000 à La Courneuve n’occupent pas le même étage de l’échelle sociale – et n’ont pas du tout la même “éthique” – que ceux qui les conduisent à Neuilly. Il y a aussi un biais qui tient au fait que les amendes étant fixes, et non proportionnelles au revenu, elles sont proportionnellement plus lourdes pour un smicard que pour un millionnaire... Mais les auteurs ont complété avec un autre protocole, moins subjectif:

 

les chercheurs ont complété ces deux expériences par d’autres, menées en laboratoire. A chaque fois, une centaine d’individus ont été invités à prendre connaissance de divers scénarios ou situations : atteinte d’un objectif au prix d’une entorse à la morale, captation d’un bien de manière indue au détriment d’un tiers, mensonge au cours d’une négociation, caution d’une faute dans le cadre professionnel. Puis les participants ont rempli un questionnaire répondant à la question de savoir dans quelle mesure ils seraient prêts à reproduire ces comportements. A chaque fois, une corrélation entre le statut social des participants et leur capacité à enfreindre l’éthique est mise en évidence. »

 

Ici, la phrase importante est “à chaque fois, une centaine d’individus…“. Un échantillon un peu petit, n’est ce pas ? On imagine qu’un tel échantillon ne peut contenir beaucoup de “riches”. Avec un tel échantillon, on peut à la rigueur tirer des conclusions sur les comportements des couches populaires et des classes moyennes basses, qui domineront statistiquement l’échantillon (3). Et cela rend très hasardeuse la conclusion qu’en tire Mélenchon:

 

Cette affaire ira loin. Car comment s’en remettre aux riches, à leur « patriotisme » où quoique ce soit de semblable, comme le suggère le « not dangerous » François Hollande, pour gérer les intérêts communs de la société ?

 

Et qu’il explicite:

 

Ainsi il est prouvé que les riches sont spontanément mauvais et enclins à l’abus de pouvoir. Pour sauver les riches et les protéger d’eux-mêmes, une seule solution : la taxation qui les soulage de la surcharge pondérale qui les pousse au vice a-social !

 

Pour enfin recommander:

 

je recommande d’utiliser abondamment cette étude. Elle me paraît être une juste réponse au mépris ordinaire des élites médiacrâtes qui ne manquent jamais une occasion de stigmatiser le peuple, la bassesse supposée de ses passions, et ainsi de suite.

 

Cette lecture par Mélenchon de l’article de Foucart et ses conclusions sont passionnantes à l’heure de comprendre ce que le candidat du Front de Gauche a dans la tête. On y voit que pour lui, la question sociale n’est pas une question de conflit entre les intérêts des travailleurs et ceux de la bourgeoisie. C’est une question morale, entre des travailleurs “éthiques” et des bourgeois vicieux et corrompus. Pour justifier son combat, il ne suffit pas à Mélenchon que la répartition de la richesse soit injuste, il lui faut aussi qu’elle soit immorale. Comme ses “amis” de La Cause du Peuple, Mélenchon est un moraliste d’abord et un “révolutionnaire” ensuite. Son combat n’est pas de l’ordre de la justice, mais de l’ordre du Bien contre le Mal. Et le Bien, naturellement, réside dans le “peuple” dont on “stigmatiserait les passions”. Et la conclusion de Mélenchon est limpide: on peut faire confiance au patriotisme de l’ouvrier – ou du professeur agrégé – mais pas à celui du “riche”. Et s’il faut taxer les “riches”, c’est pour les “sauver” moralement. Car les riches sont des “handicapés moraux”. Si manger des gros steaks était la preuve “scientifique” que Pierre Leroy avait tué Brigitte Dewevre, conduire une voiture de luxe est la preuve qu’on refuse les priorités (4)

 

Paradoxalement, Mélenchon ne reprend pas la formulation exacte des résultats “scientifiques”: “une relation inverse entre élévation dans la hiérarchie sociale et éthique du comportement individuel”. Il ne s’agit donc pas simplement d’une dichotomie “riches contre pauvres”, mais d’une hiérarchisation dans laquelle le SDF serait en quelque sorte plus “éthique” que le professeur agrégé, le jeune de “teci” plus “moral” que l’inspecteur des impôts. Que Mélenchon ne tire des conclusions que pour ce qui concerne les “riches” et ignore celles qu’on pourrait tirer quant à la moralité des classes moyennes n’est certainement pas une coïncidence. 

 

Ce papier ne prétend pas attaquer Mélenchon en particulier. Son tort est de dire haut, et de façon caricaturale, ce que d’autres pensent tout bas et de manière plus diffuse. Le gauchisme est aujourd’hui l’idéologie dominante de la “gauche radicale”, ce qui n’est pas nouveau pour LO, le NPA ou d’autres groupuscules “alternatifs”, mais représente une véritable révolution culturelle au PCF. Ce gauchisme se caractérise par une vision de la lutte politique posée comme une guerre civile, par une confusion de la sphère privée et de la sphère publique, et – et c’est l’exemple ici – par une vision des conflits politiques exclusivement à travers du prisme moral – et moralisant.

 

Est-ce grave, docteur ? Oui, c’est très grave. Le gauchisme est une idéologie qui confine politiquement la “gauche radicale” dans les catégories moyennes aisées, l’empêchant de “mordre” sur l’électorat populaire. Elle empêche l’apparition de toute véritable réflexion ancrée sur le réel et ouvre au contraire la porte à une vision moralisante-paranoïaque qui dans certaines circonstances (je pense à Bruay en Artois, mais aussi à Action Directe) peut conduire au pire.

 

 

Descartes

 

 

(1) Pour ceux qui ne connaissent pas l’affaire, voici un petit résumé: le 6 avril 1972, le corps de Brigitté Dewevre, 17 ans, est découvert par des enfants. L’affaire est confiée au juge Pascal, qui inculpe Pierre Leroy, notaire et notable local, et sa maîtresse, sans preuve matérielle mais sur un “faisceau de présomptions” fondé surtout sur les contradictions dans son récit et la fragilité de son alibi. Le groupe maoïste “la Cause du Peuple” se saisit de l’affaire pour en faire un exemple: le notaire Pierre Leroy est présenté sous les traits d’un bourgeois lubrique violant et tuant une fille du peuple et trainé dans la boue jour après jour. Bien sur, le journal n’a aucune preuve de sa culpabilité, tout le discours est fondé sur l’immoralité soi disant intrinsèque des “bourgeois”, exemplifié, comme le rappelle Mélenchon, par le fait qu’il prenait pour ses repas “des gros steaks”. Pierre Leroy fut innocenté lorsqu’un camarade de classe de Brigitte Dewevre s’accusa lui même du meurtre, mais il eut sa vie brisée par l’affaire. A ma connaissance, aucun des acteurs de la campagne de dénigrement – on dirait aujourd’hui harcèlement – dont la figure la plus notable fut Serge July n’exprima des excuses à son égard.

 

(2) Ce “protocole” m’a donné envie de faire moi-même une expérience: dix minutes d’observation aux tourniquets du métro, station Opéra, heure de pointe. Curieusement, je n’ai pas vu beaucoup de femmes en manteau de fourrure ou d’hommes en costard cravate sauter les contrôles. Par contre j’en ai compte une bonne vingtaine de “laskars” de cité, quelques clochards… je vous laisse tirer les conclusions “scientifiques” de cette petite expérience.

 

(3) Car c’est là le plus amusant: une étude sur un échantillon aussi petit ne nous dit pas grande chose sur les “riches”, puisque ceux-ci représentent une partie trop petite de l’échantillon. La conclusion de cette étude, à supposer qu’on puisse résoudre tous les autres biais, conduirait à admettre que les classes moyennes sont moins “morales” que les couches populaires. Curieusement, Mélenchon ne tire pas cette conclusion, préférant extrapoler aux “riches”… étonnant, non ?

 

(4) La proximité de ce discours avec le récit catholique n’aura échappé à personne. Là aussi, c’est “bienheureux les pauvres”, perçus comme une source de renouveau moral face à des élites corrompues.

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38 réponses à Le gauchisme a encore frappé

  1. Joe Liqueur dit :

    @ Descartes

     

    Il semble que ta dernière phrase ne soit pas terminée.

     

    Personnellement je déduis de la fameuse étude “scientifique” que le citoyen Mélenchon, sénateur puis député européen, est forcément un personnage d’une assez grande bassesse morale (la
    conférence vers laquelle renvoie ce lien est assez instructive et drôle, en dépit de son titre racoleur qui pourrait légitimement faire fuir). D’ailleurs cela se confirme très vite, à voir avec
    quelle désinvolture (le mot est faible) le petit timonier évoque cette abominable erreur judiciaire. Heureusement qu’il ne conduit pas !

     

    Mélenchon faisait jusqu’ici partie des candidats pour lesquels j’envisageais de voter par défaut, je me demande si je ne vais pas le rayer de ma liste tout simplement.

    • Descartes dit :

      Il semble que ta dernière phrase ne soit pas terminée.

      Merci, j’ai corrigé…

      la conférence vers laquelle renvoie ce lien est assez instructive et drôle,

      Je pense que tu t’est trompé de lien… Lapsus révélateur !

  2. stu dit :

    J’ai jeté un oeil à l’article scientifique et je te trouve un peu sévère. Les trois premières études de l’article ont sans doute des biais et montrent plus des corrélations que des relations de
    causalité, mais les autres études semblent un peu plus solides. Tu critiques le fait qu’il n’y aurait pas beaucoup de riches dans leurs échantillons, sauf que par exemple dans les statistiques de
    l’étude 6 ils disent que l’intervalle de confiance est de plus de 95% pour la corrélation entre classe sociale et tricherie (en prenant en compte de possible biais religieux, politique…). Ça me
    semble statistiquement significatif.

    Après comme tu le dis leurs échantillons sont petits. Il faut voir si d’autres personnes arrivent à reproduire ces résultats. Je suis d’accord qu’on ne peut pas déduire de l’article qu’il y a un
    lien de causalité entre le statut socio-économique et la cupidité. Cependant peut-être qu’un tel lien de causalité existe vraiment et si on arrive à le prouver je vois pas pourquoi on ne pourrait
    pas s’en servir comme argument politique.

    • Descartes dit :

      mais les autres études semblent un peu plus solides

      Pas suffisamment. Le problème de ces études est qu’ils sont fondés sur des dilemmes qui sont connotés socialement. Rien n’est plus difficile que commettre une transgression qu’on est incapable de
      se représenter ou de commettre. Demander à un analphabète s’il serait capable de faire un faux en écritures rend la réponse très prévisible.

      Tu critiques le fait qu’il n’y aurait pas beaucoup de riches dans leurs échantillons, sauf que par exemple dans les statistiques de l’étude 6 ils disent que l’intervalle de confiance est de
      plus de 95% pour la corrélation entre classe sociale et tricherie (en prenant en compte de possible biais religieux, politique…). Ça me semble statistiquement significatif.

      Significatif, oui. Mais de quoi ? Qu’il y ait une “corrélation entre classe sociale et tricherie” (encore faudrait-il savoir ce qu’on entend par “classe”… et ce qu’on entend par “tricherie”)
      c’est une chose. Que de cette corrélation établie pour les couches représentées dans l’échantillon on puisse déduire des choses concernant des groupes non représentés – ou peu représentés – c’est
      une autre affaire.

      Prenons un exemple si tu veux bien. Imaginons que je fasse un échantillon de cent personnes, et que j’essaie d’établir une corrélation entre le niveau d’études et le candidat pour qui ils
      entendent voter. Une telle étude peut me fournir de précieuses informations sur ce que votent les bacheliers ou les titulaires d’une maîtrise… mais qu’est ce que j’obtiendrai comme information
      sur les choix des polytechniciens ou des énarques ? Rien du tout, puisque dans un échantillon de cent personnes, il y a des grandes chances qu’il n’y ait aucun représentant ni des uns, ni des
      autres. Et quand même il y aurait un, il n’y aurait aucune raison pour qu’il soit représentatif du vote de son groupe.

      Cependant peut-être qu’un tel lien de causalité existe vraiment et si on arrive à le prouver je vois pas pourquoi on ne pourrait pas s’en servir comme argument politique.

      C’est là le point essentiel du débat. Imaginons un instant qu’on puisse établir le résultat inverse – c’est à dire, que les pauvres sont plus enclins à la tricherie que les riches. Est-ce que
      cela rendrait moins légitimes leurs revendications ? Faudrait-il moduler les augmentations de salaire en fonction de la “vertu” de chacun ?

      Le noeud du problème est de décider si la politique doit viser à la justice où la morale. Dans le premier cas, il s’agit de donner à chacun ce qui lui est du sans aucune référence à ses qualités
      morales. C’est la vision des Lumières: les droits et les devoirs sont égaux pour tous les citoyens, quelque soient leurs qualités morales. Mais on peut aussi avoir de la politique une vision
      “moralisante”, dans laquelle la justice doit céder la place à une vision où la vertu est recompensée et le vice puni.

      Personnellement, je suis un fervent Républicain, et je défend la première vision. La justice prime pour moi sur la morale. Et je défend cette position parce que je sais ce qui est arrivé chaque
      fois qu’un régime politique a raisonné non pas en termes d’égalité et d’équité, mais en termes de bien et mal. Cela a donné invariablement de mauvais résultats.

  3. Trubli dit :

    La justice n’a-t-elle pas un lien avec la morale ? 

    Si un état de droit décide que le crime sera puni, cette condamnation n’a-t-elle pas un fondement moral ? A savoir que tuer c’est mal !

    • Descartes dit :

      La justice n’a-t-elle pas un lien avec la morale ?

      Aucun. La justice est la conformité avec une norme sociale, générale et impersonnelle, alors que la morale est un choix personnel et individuel. Il y a autant de normes morales que d’individus,
      mais il n’y a qu’une norme sociale. Pense au divorce ou à l’avortement: un acte permis par la justice, mais qui pour certains est un acte “immoral”…

      Si un état de droit décide que le crime sera puni, cette condamnation n’a-t-elle pas un fondement moral ?

      Certainement pas. Si c’était le cas, l’Etat ne pourrait pas en même temps admettre la guerre ou la peine de mort. La norme morale est absolue, et n’admet pas de dérogation pour convenance
      personnelle.

      A savoir que tuer c’est mal !

      Ce n’est pas ce qu’on enseigne à l’Ecole Militaire…

  4. Trubli dit :

    Pense au divorce ou à l’avortement: un acte permis par la justice, mais qui pour
    certains est un acte “immoral”..

    Justement l’avortement a été longtemps condamné et l’est dans beaucoup de pays du monde. Et il est condamné dans beaucoup de pays parce que le corps social dans sa grande majorité considère que
    c’est mal. Ainsi l’état bras armé du corps social interdit l’avortement. Mais que les mentalités évoluent et alors ce qui était considéré comme répréhensible hier ne le sera plus demain. 

    S’il n’y a pas de lien entre justice et morale, qu’est-ce qui motive les hommes a édicter des lois prétendant que tel acte est mauvais ou que l’autre ne l’est pas ? Quelle est l’origine des
    normes sociales ? Je n’en vois que trois possibles : la morale, la raison et l’intérêt.

  5. morel dit :

    N’en croyant pas mes yeux, je suis allé sur le blog de JL Mélenchon pour
    me faire une opinion.

    Effarant ! Une telle idéologie lie étroitement dangerosité et
    appartenance de classe à l’instar du célèbre « classe laborieuse, classe dangereuse ».

    Quant à l’étude, il y a des choses qui ne s’inventent pas
    « L’équipe américano-canadienne
    menée par Paul Piff »

    Le problème n’est pas le comportement individuel qui est généralement plus divers mais le droit de propriété de grands moyens de production dans un système dont la logique propre est
    l’accumulation du capital qui plus est dans un cadre où les freins législatifs et réglementaires tombent les uns après les autres.

    Une nouvelle « gauche morale » ou un changement de l’environnement dans lequel s’exerce l’activité économique avec pour but d’offrir à chacun un vrai travail et un vrai
    salaire ?     

  6. Mohican dit :

    Concernant un des amis de la Cause du Peuple, je vous recommande (si vous ne le conaissez pas déjà) un petit livre jubilatoire : Longévité d’une imposture-Michel Foucault, par Jean-Marc Mandosio,
    aux éditions de l’Encyclopédie des Nuisances.

  7. Trubli dit :

    Ce n’est pas le gauchisme qui me fait peur en ce moment mais plutôt l’Union Européenne.

    Dans ce nouvel épisode on apprend que la France abandonne à l’UE représentée par Catherine Ashton la co-présidence de l’Union pour la méditerranée.

    “Désormais, les réunions des Ministres des Affaires étrangères relèveront donc
    de la Haute Représentante, Madame Ashton, et les réunions ministérielles techniques, des Commissaires européens. Du fait de cette capitulation en catimini de la France, de ce renoncement à
    l’intergouvernemental, de ce basculement au profit des procédures communautaires”

    http://www.observatoiredeleurope.com/notes/Abandon-de-la-presidence-francaise-de-l-Union-pour-la-Mediterranee-colere-des-souverainistes_b3946134.html

    encore quelques années comme ça et la France est morte.

    • Descartes dit :

      Ce n’est pas le gauchisme qui me fait peur en ce moment mais plutôt l’Union Européenne.

      Bien sur, il y a une hiérarchie des peurs. Moi, la maladie de ma mère me fait bien plus peur en ce moment que l’Union Européenne et le gauchisme réunis. Mais la politique est une globalité, et on
      ne peut pas se défausser des problèmes dits “mineurs” au nom des autres. Le gauchisme est un risque important, parce qu’il stérilise la gauche dite “radicale”.

      Dans ce nouvel épisode on apprend que la France abandonne à l’UE représentée par Catherine Ashton la co-présidence de l’Union pour la méditerranée.

      L’Union pour la Méditerrannée était un beau projet – conçu d’ailleurs par Henri Guaino, rendons honneur à qui honneur est dû – qui voulait créer un contrepoids à la “construction européenne” en
      inserant la France dans un autre ensemble de coopérations. Mais pour conduire un tel projet, il faut une véritable volonté politique, et cette volonté n’a jamais été véritablemt là. A droite,
      l’UPM a été vue par Sarkozy comme un joujou diplomatique, et quand il a compris qu’il y avait bien plus de coups à prendre que d’opportunités photo, il s’en est désintéressé. Les libéraux
      pro-européens, de droite comme de gauche, y ont vu – à raison – une menace pour leur dada et l’ont saboté sans pitié. L’UPM constitue en effet une alternative dangereuse à l’idée complaisamment
      véhiculée par les eurolâtres que l’Europe est notre (unique) avenir. Et la gauche, finalement, n’en a pas voulu par tropisme antisarkozyste.

      La mort de l’UPM ayant été constatée, il restait à remettre le corps aux pompes funèbres pour qu’il reçoive un enterrement digne de lui. Nous pouvons tout à fait faire confiance à Catherine
      Ashton et aux services bruxellois pour jouer ce rôle.

  8. Torsade de Pointes dit :

    En ce qui concerne plus
    exactement ces messieurs-dames de la haute finance et de la bourgeoisie d’affaires, point n’est besoin d’études « scientifiques » ou d’expérimentations sur la voie publique pour savoir
    que sa moralité, ou son sens de la justice, comme on voudra, n’est pas trop développée. Il suffit de les juger par leur actes et par les résultats de leur action: enrichissement personnel
    délirant au détriment du plus grand nombre, accumulation pathologique de capital, exploitation éhontée de pauvres gens dans les manufactures du tiers monde, guerre néo-coloniales meurtrières,
    etc. Je ne parle évidemment pas des notaires et encore moins des classes moyennes; il s’agit de ceux qui restent quand on a retranché les 99% chers au mouvement Occupy. Mais immoralité
    n’est sans doute pas le terme exact: c’est par amoralité qu’il faudrait désigner leur disposition d’esprit, et plus largement la froide logique du capital, en ce sens que seule compte la
    rentabilité financière, toute norme morale n’étant ni transgressée délibérément ni rejetée, mais tout simplement hors sujet. On est par-delà le bien et le mal.

     

    À propos de guerres coloniales justement, et au risque de m’écarter un peu du sujet de votre billet, ce qui me frappe aussi chez Mélenchon (et peut-être d’autres ici l’ont-ils relevé
    avant moi), c’est le peu de place qu’occupe la politique étrangère dans son blogue p.ex. Dans son dernier billet, il manifeste comme en passant, en rapport avec Hollande, son opposition au
    maintien de la France dans l’OTAN, mais c’était la première fois depuis au moins une dizaine de billets qu’un sujet de politique étrangère, autre qu’européenne du moins, était évoqué, et cela
    alors que des choses potentiellement très graves sont en train de se passer et de se concocter à l’heure actuelle. Je croyais que la politique étrangère était l’apanage du président de la
    république sous la cinquième – mais est-ce encore le cas?  Il semble que ces matières aient été déléguées une fois pour toutes au niveau européen, à
    Mme la baronne Ashton et ses officines, et aux hauts gradés de l’OTAN, leur bras armé. Précisément, concernant les guerres néo-coloniales récentes, en cours ou à venir, où la France s’est
    malencontreusement engagée et illustrée ou s’apprête à le faire, il me semble que Mélenchon ait perdu une occasion de ne pas se taire. Si, comme vous l’affirmez, Mélenchon reste sous l’emprise
    des sempiternelles manies gauchistes, comment expliquer que la lutte anti-impérialiste, vieux dada des gauchistes pourtant, n’ait pas été enfourché par le candidat du FG? Que n’a-t-il à tout le
    moins repris le traditionnel flambeau du pacifisme et dénoncé vigoureusement toutes les aventures guerrières récentes? Qu’est-ce qui se cache derrière ce mutisme et ce
    non-engagement?

    • Descartes dit :

      En ce qui concerne plus exactement ces messieurs-dames de la haute finance
      et de la bourgeoisie d’affaires, point n’est besoin d’études « scientifiques » ou d’expérimentations sur la voie publique pour savoir que sa moralité, ou son sens de la justice, comme
      on voudra, n’est pas trop développée. Il suffit de les juger par leur actes et par les résultats de leur action: enrichissement personnel délirant au détriment du plus grand
      nombre,

      Desolé de te decevoir… mais je peux t’assurer que si les pauvres n’arrivent
      pas à un “enrichissement personnel délirant au détriment du plus grand nombre”, ce n’est pas faute de le vouloir. D’ailleurs, beaucoup de “messieurs dames de la haute finance et de la bourgeoisie
      d’affaires” ont commencé pauvres… il faut donc croire que pauvreté et moralité ne vont pas forcément de pair.

      Je ne parle évidemment pas des notaires et encore moins des classes
      moyennes;

      Meuh bien sur que non… tout le monde sait bien que les classes moyennes sont
      extrêmement morales, et qu’elles n’agissent que pour le plus grand bien de l’humanité en général…

      Si, comme vous l’affirmez,
      Mélenchon reste sous l’emprise des sempiternelles manies gauchistes, comment expliquer que la lutte anti-impérialiste, vieux dada des gauchistes pourtant, n’ait pas été enfourché par le candidat
      du FG?

      Il a été enfourché, au
      contraire, mais sous une autre forme chère aux gauchistes: celui de la fascination pour les “socialismes exotiques”. Vous trouverez sans difficulté dans le blog de Mélenchon toutes sortes de
      références à l’Amérique Latine et aux camarades Chavez, Morales ou Kirchner… ou bien au conflit israélo-palestinien. Les gauchistes français ne se sont jamais trop intéressés à la
      Libye…

  9. Jibal dit :

    “Mélenchon faisait jusqu’ici partie des candidats pour lesquels j’envisageais de voter par défaut, je me demande si je ne vais pas le rayer de ma liste tout simplement. ” Hé hé ! Bien joué, M.
    Descartes : Et encore un que Mélenchon n’aura pas ! J’ai beaucoup apprécié vos articles “Marine Le Pen, Seule Contre Tous” et “Le beau Discours du Citoyen Sarkozy” effectivement complètement dénués
    de… “gauchisme” ! Désolé, je vous avais pris pour quelqu’un d’autre mais me voilà suffisamment éclairé à présent sur votre véritable nature: Je vous dis donc adieu…

    • Descartes dit :

      “Mélenchon faisait jusqu’ici partie des candidats pour lesquels j’envisageais de voter par défaut, je me demande si je ne vais pas le rayer de ma liste tout simplement. ” Hé hé ! Bien joué,
      M. Descartes : Et encore un que Mélenchon n’aura pas !

      Vous exagérez beaucoup mon pouvoir…

      Par ailleurs, je n’ai fait dans mon article que renvoyer aux écrits de Jean-Luc Mélenchon lui même. Si après les avoir lu Joe Liqueur décide de changer son vote, est-ce ma faute ? N’est-ce plutôt
      celle du candidat, qui écrit n’importe quoi ? Je trouve très drôle que vous me reprochiez un article qui ne fait que reprendre les paroles du candidat. Qu’est ce que vous me demandez, exactement
      ? D’occulter ses textes ? De m’abstenir de les diffuser ? La vérité ne serait-elle plus “révolutionnaire” ?

      Si à une étape de ma vie j’ai pu céder à la tentation de soutenir de manière acritique un candidat – je ne le pense pas, mais je suis ouvert au reproche – ce n’est certainement plus le cas
      aujourd’hui. J’ai la plus grande estime personnelle pour Mélenchon. Mais cela n’implique pas qu’il faille cacher ses bourdes ou nier ses égarements.

      J’ai beaucoup apprécié vos articles “Marine Le Pen, Seule Contre Tous” et “Le beau Discours du Citoyen Sarkozy” effectivement complètement dénués de… “gauchisme” ! Désolé, je vous avais
      pris pour quelqu’un d’autre

      J’en suis désolé pour vous. Si vous m’aviez pris pour quelqu’un qui critique les fautes de l’autre camp mais qui refuse d’amettre celles du sien, alors vous m’avez effectivement pris pour
      quelqu’un d’autre. C’est ce genre de “critique sélective” qui a permis à la gauche de mettre au pouvoir un ancien collabo, ministre de la torture en Algérie, partisan de l’Algérie Française qui a
      ouvert la France au libéralisme. Je n’ai pas envie qu’on refasse cette erreur. Si vous avez besoin d’un dieu vivant pour pouvoir le voter, c’est votre problème.  

      mais me voilà suffisamment éclairé à présent sur votre véritable nature: Je vous dis donc adieu…

      En d’autres termes, vous ne pouvez supporter qu’on critique votre idole. C’est votre droit, bien entendu. Mais le jour ou vous découvrirez que votre dieu vivant n’en est pas un – et croyez moi,
      ce jour arrive à chaque fois – ne dites pas qu’on vous a menti, qu’on vous a trompé, comme le font à chaque fois les “déçus” de tel ou tel projet. Vous vous serez menti et trompé vous même.

       

  10. Jean-Mi 41 dit :

    Suite à mes bugs de messagerie, je retente ma chance ayant réussi à retrouver des références que je recherchais depuis un bon moment:

    “La peine de mort est abolie. Nul ne peut être condamné à une telle peine ni exécuté”, proclame l’article 2 – 2 de la Charte des droits fondamentaux de
    l’Union européenne.

    Mais par la grâce du traité de Lisbonne::

    La prohibition de la peine de mort est rendue caduque par “l’explication” suivante : “La mort n’est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d’un recours à la force rendu absolument nécessaire : pour (…), pour
    réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection” (article 2 – 2 de la Convention européenne des droits de
    l’homme) et “Un Etat peut prévoir dans sa législation la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre ou de danger imminent de guerre ; une telle peine ne sera appliquée que
    dans les cas prévus par cette législation et conformément à ses dispositions” (article 2 du protocole no 6 annexé à la
    CEDH).

    Saviez-vous cela et qu’en pensez vous tous, notamment concernant l’hypocrisie qui consiste à vouloir se donner en fait le droit de tuer des opposant et d’autre part (même si cela pose un réel
    problème) de faire des leçons de morale à Bachar alors que l’on rêve en secret de pouvoir faire la même chose en toute impunité ?

    • Descartes dit :

      Vous posez un point de droit assez technique. En fait, “l’explication” ne modifie en rien le sens premier de l’article 2-2 de la CDFUE. Mais il faut lire l’article avec attention: “La
      peine de mort est ablie. Nul ne peut être condamné à une telle peine ni exécuté”. Il est clair que cet article fait référence à la mort infligé
      à titre de peine par le système judiciaire. Or, lorsque la mort “résulte d’un recours à la force rendu nécessaire pour réprimer…”, elle ne peut être considérée comme une “peine”, pas plus
      qu’elle n’est le résultat d’une “condamnation”.

      “L’explication” ne fait que préciser qu’aux fins de l’application de l’article en question les morts qui résulteraient du recours à la force “rendu absolument nécessaire pour réprimer une émeute
      ou une insurrection” ne sont pas considérés comme ayant été “condamnés à la peine de mort” ou “exécutés”. Cela n’implique pas que de telles morts soient légales: leurs auteurs
      peuvent parfaitement être recherchés et condamnés en vertu du droit interne des Etats. La seule chose que la “l’explication” apporte, est qu’un Etat ou se dérouleraient de pareils faits ne serait
      pas en violation de la Charte.

      Par ailleurs, l’exception permettant de prévoir dans sa législation la peine de mort “en temps de guerre” ne me paraît pas disproportionnée.

      Saviez-vous cela et qu’en pensez vous tous, notamment concernant l’hypocrisie qui consiste à vouloir se donner en fait le droit de tuer des opposant

      Mais ou voyez-vous qu’on “se donne le droit de tuer les opposants” ? Je vous le repète: le fait que la Charte ne considère pas le fait de “tuer les opposants” en situation d’émeute comme
      une violation du principe d’abolition de la peine de mort n’implique nullement qu’un tel acte soit “autorisé” ou qu’on ait le droit de le faire. La Charte n’est pas le seul texte qui s’occupe de
      la question: à côté d’elle il y a toute une série de textes qui règlent en droit interne les conditions et les limites d’utilisation de la force par l’Etat.

      Il faut lire les textes dans leur contexte. L’article 2-2 de la Charte s’occupe exclusivement de la question de la peine de mort. Il n’autorise nullement les Etats à faire un usage indiscriminé
      de la force pour autant.

       

  11. Jean-Mi 41 dit :

    Après ma question  en apparté sur le droit de tuer les foules, retour au gauchisme:

    “Le gauchisme est une idéologie qui stérilise le combat politique en l’orientant vers une  vision du monde aberrante d’où rien de progressiste ne peut sortir.”

    Il me semble aussi que vous avez aussi dit quelque chose du genre “les gauchistes ont été financés par les USA (CIA?)”, ce qui ne me parait pas impossible, mais Lénine n’a-t-il pas voyagé et eu
    des contacts divers et variés et à une époque ne roulait-il pas en Rolls ? Personnellement je pense que s’il est utile d’ utiliser même indirectement les moyens de l’adversaire contre lui, (en
    l’occurence le poignon du capitalisme conte le capitalisme), il ne faut pas se laisser annilier par une espèce de pureté morale excessive et illusoire et contraire au but recherché, après tout
    prendre de l’argent c’est pas non plus tuer quelqu’un !

    Donc en conclusion, suivant votre vision, les gauchistes, soit se (nous) tirent des balles dans les pieds, soit sont animés d’intentions contraires à nos désirs d’amélioration de la société et
    des travailleurs. En admettant cette dernière hypothèse, je pose la question que l’on pose en matière policière (ils passent en ce moment Hercule Poirot à la TV): mais alors quel est donc le
    mobile du crime ???

    • Descartes dit :

      Il me semble aussi que vous avez aussi dit quelque chose du genre “les gauchistes ont été financés par les USA (CIA?)”,

      Je ne me souviens pas d’avoir jamais dit pareille chose. Ce n’est pas le genre d’argument que j’utilise habituellement. Et même si cela a pu être vrai – on pense en particuler au financement de
      certains syndicats “gauchistes” en qui les services américains voyaient des alliés tactiques contre la CGT et le PCF – il faudrait analyser ce type d’affaires au cas par cas. Comme vous le
      signalez justement, il n’est pas toujours mauvais d’utiliser les moyens de l’adversaire contre lui.

      mais Lénine n’a-t-il pas voyagé et eu des contacts divers et variés et à une époque ne roulait-il pas en Rolls ?

      Je ne crois pas qu’il ait beaucoup roulé en Rolls. Et s’il a beaucoup voyagé, on n’a jamais prétendu qu’il l’ait fait avec de l’argent payé par un quelconque service secret. Le seul épisode dans
      lequel il a obtenu une aide de ce type fut le célèbre “train plombé” mis à sa disposition par le gouvernement allemand pour lui permettre de retourner en Russie. Les services allemands voyaient
      en lui – avec raison – un agitateur qui pouvait sérieusement compromettre l’effort de guerre russe à un moment délicat pour les alliés.

      Personnellement je pense que s’il est utile d’ utiliser même indirectement les moyens de l’adversaire contre lui, (en l’occurence le poignon du capitalisme conte le capitalisme), il ne faut
      pas se laisser annilier par une espèce de pureté morale excessive et illusoire et contraire au but recherché

      Certainement. Mais il faut aussi se poser des questions sur les motivations de l’adversaire lorsqu’il met si généreusement des moyens à votre disposition. Car lui aussi doit espérer quelque chose
      pour sa peine.

      Donc en conclusion, suivant votre vision, les gauchistes, soit se (nous) tirent des balles dans les pieds, soit sont animés d’intentions contraires à nos désirs d’amélioration de la société
      et des travailleurs. En admettant cette dernière hypothèse, je pose la question que l’on pose en matière policière (ils passent en ce moment Hercule Poirot à la TV): mais alors quel est donc le
      mobile du crime ???

      Comme souvent… c’est le bas intérêt matériel. Les gauchistes sont l’expression de classes moyennes qui ne veulent surtout pas que les choses changent. Et pour cela, deux stratégies: la
      réactionnaire, qui s’oppose frontalement aux forces progressistes, et la gauchiste, qui constiste plutôt à les étouffer par la surenchère en se présentant comme les seuls, les uniques
      révolutionnaires. Dans les deux cas, il s’agit de garder le statu-quo et empêcher surtout les classes populaires de concurrencer leurs propres enfants. Et pour cela, quoi de mieux que la stratégi
      du Guépard: “tout changer pour que rien ne change” ?

  12. Torsade de Pointes dit :

    En quoi Chávez, Morales ou
    Kirchner sont-ils exotiques ? D’où vous vient ce mépris? Seraient-ce vos ascendances espagnoles qui vous portent à cette attitude de dédain à l’égard d’anciennes colonies de
    l’Espagne? Je ne vous soupçonnerai pas de juger sur le faciès, puisque vous avec eu la prudence d’adjoindre le nom de Kirchner aux deux autres. Il vous resterait à les taxer de populistes, ce qui
    vous permettrait d’ajouter le populisme à votre panoplie de «diables de confort».

     

    Mais ce n’est pas là où je voulais en venir. Il se passe en ce moment des choses extrêmement graves au proche orient: préparatifs de guerre, ou guerres secrètes déjà en cours,
    alliances de l’occident, y compris de la France, avec la pire canaille pour renverser des régimes en place, menaces d’aggression militaire sous de faux prétextes etc. – tout cela avec un
    potentiel de millions de morts, et devant quoi on se sent impuissant en tant que citoyen oridinaire. C’est de cela qu’il serait urgent que Mélenchon, et toute la gauche, parle enfin. Il faudrait
    se renseigner, enquêter, retracer les processus de prise de décision, nommer les décideurs, établir l’organigramme de cette machine infernale, décrire ses rouages, ses motifs, à l’effet de
    dénoncer et de mettre hors d’état de nuire les fauteurs de guerre, ces personnages dont vous avez osé affirmer qu’ils n’étaient, finalement, pas pires que les classes moyennes. Face à cette
    situation, les démêlés du sieur Mélenchon avec les journalistes, exposés à longueur de billet sur son blogue, franchement, on s’en fiche un peu.

    • Descartes dit :

      En quoi Chávez, Morales ou Kirchner sont-ils exotiques ?
      D’où vous vient ce mépris?

      En ce qu’ils sont “extérieurs à notre pays”, qui est la définition exacte du mot
      “exotique”. Contrairement à ce que vous croyez, le mot “exotique” n’a rien de “méprisant”. Dire que l’ananas est un fruit exotique veut tout simplement dire qu’il ne pousse pas en France. Et je
      doute fort que le système politique français puisse produire un Chavez…

      Seraient-ce vos ascendances espagnoles qui vous portent à cette attitude de
      dédain à l’égard d’anciennes colonies de l’Espagne?

      Mes “ascendances espagnoles” ? Désolé de vous décevoir, mais il n’y a pas à ma
      connaissance le moindre espagnol dans mon arbre généalogique. Cela ne me gênerait pas le moins du monde d’en avoir, mais j’en ai pas. Vous devriez faire preuve d’un peu plus de prudence avant de
      parler de ce que vous ne connaissez pas.

      Je ne vous soupçonnerai pas de juger sur le faciès, puisque vous avec eu la
      prudence d’adjoindre le nom de Kirchner aux deux autres.

      Vous voulez dire que si je n’avais pas “eu la prudence d’adjoindre Kirchner”, je
      serais moins suspect a vos yeux ? Franchement, vous dites n’importe quoi.

      Il vous resterait à les taxer de populistes, ce qui vous permettrait
      d’ajouter le populisme à votre panoplie de «diables de confort».

      Je trouve que le populisme de Chavez, Morales ou Kirchner ne fait pas le moindre
      doute. Mais l’objet de mon papier était de caractériser l’admiration que certains secteurs en France ont pour ce genre de “socialisme”, et non la question du populisme. Maintenant, si le sujet
      vous intéresse, on peut en parler… tiens, j’aimerais connaître votre avis. Pensez-vous que ces trois éminents dirigeants soient “populistes” ?

      Mais ce n’est pas là où je
      voulais en venir.

      Pourquoi alors consacrer la
      moitié de votre message, si “ce n’est pas là que vous vouliez en venir” ? Vous auriez pu commencer par aller au fond, au lieu de perdre votre temps à faire des hypothèses sans queue ni tête sur
      mes ancêtres…

      Il se passe en ce moment
      des choses extrêmement graves au proche orient: préparatifs de guerre, ou guerres secrètes déjà en cours,

      Si vous êtes au courant, elles
      ne doivent pas être si “secrètes” que ça…

      alliances de l’occident, y
      compris de la France, avec la pire canaille pour renverser des régimes en place, menaces d’aggression militaire sous de faux prétextes etc. – tout cela avec un potentiel de millions de
      morts,

      Vous ne trouvez pas que vous
      exagérez un tout petit peu ?

      C’est de cela qu’il serait
      urgent que Mélenchon, et toute la gauche, parle enfin.

      Bof.

  13. Jean-Mi 41 dit :

    “Comme souvent… c’est le bas intérêt matériel. Les gauchistes sont l’expression de classes moyennes qui ne veulent surtout pas que les choses changent. (…). Dans les deux cas, il s’agit
    de garder le statu-quo et empêcher surtout les classes populaires de concurrencer leurs propres enfants. Et pour cela, quoi de mieux que la stratégie du Guépard: “tout changer pour que rien ne
    change” ?”

    Ce qui d’après toi revient à dire ici qu’ils vont tout faire pour perdre les élections. Si j’ai bien tout compris, il me semble que la stratégie du Guépard est plus subtile car elle anticipe sur
    un point de non-retour inéluctable dont les conséquences sont à minimiser autant que faire se peut.

    Ton explication serait plausible si ces classes moyennes et de surcroit gauchistes étaient menacées mais cela n’est pas franchement le cas à notre époque. Au pire, qui est
    réellement menaçé aujourd’hui et en plus ne veut pas que ça change ? Pas grand monde et encore moins chez les gauchistes et encore moins chez ceux qui n’ont rien du tout ! Par contre,
    effectivement, je pense qu’en 1789, certains nobles et privilégiés intuitifs ou mieux informés ayant senti venir la tempête ont préféré anticiper en acceptant ou même en proposant des concessions
    de manière à conserver la noblesse et leur roi ainsi que le maximum possible au lieu de se faire découper avec des faux et des piques (pour commencer de façon improvisée en attendant la
    mécanisation).On sait qu’ils n’ont pas obtenu le résultat escompté à court terme. Mais à ma connaissance personne n’a encore eu l’idée de les qualifier de gauchistes.

    • Descartes dit :

      Ce qui d’après toi revient à dire ici qu’ils vont tout faire pour perdre les élections.

      Pas forcément. Contrairement à Le Pen, qui comprend très bien que le passage par le pouvoir lui serait fatal et que son influence est en grande partie issue de son statut d’éternel opposant, les
      gauchistes ne craignent pas le pouvoir, au contraire. Mais lorsqu’ils ont le pouvoir, ils se débarrassent rapidement des oripeaux prolétariens pour défendre partout et toujours les intérêts des
      couches moyennes. Je ne pense pas que les gauchistes fassent ce qu’il faut pour perdre les élections. Ce que je pense, c’est que s’ils les gagnaient, ils nous referaient du Mitterrand bis.

      Si j’ai bien tout compris, il me semble que la stratégie du Guépard est plus subtile car elle anticipe sur un point de non-retour inéluctable dont les conséquences sont à minimiser autant que
      faire se peut.

      C’est un peu le même problème pour les classes moyennes. Elles ont très bien compris depuis la fin des années 1960 que la dynamique des “trente glorieuses” était en train de s’épuiser, que le
      monde allait changer et qu’il fallait accompagner ce changement pour en minimiser les conséquences. En coinçant l’ascenseur social, en réduisant le pouvoir de l’Etat méritocratique, en se
      réservant toute sorte de rentes, elles ont réussi à passer la tempête avec un minimum de dommages.

      Ton explication serait plausible si ces classes moyennes et de surcroit gauchistes étaient menacées mais cela n’est pas franchement le cas à notre époque.

      Bien sur que si. Les classes moyennes sont toujours “menacées” parce que leur place dans le système économique est précaire, et dépend d’un rapport de force dans la société qui leur permet de se
      “vendre” à la bourgeoisie comme force d’appoint. Dans la mesure où les couches populaires ne font plus peur à la bourgeoisie, celle-ci n’a plus aucune raison de partager le gâteau. La “peur du
      déclassement” est un réflet de cette menace.

       

       

  14. Jean-Marc dit :

    Pour ma part la seconde partie de l’étude me parait plutôt sérieuse.

    C’est la conclusion qui est un peu rapide.

    On n’est pas amoral, tricheur, voleur, menteur, profiteur parce qu’on est riche.

    Mais statistiquement, difficile de devenir riche (ou de le rester quand on a hérité) si on n’est pas un peu plus amoral, tricheur, voleur, menteur et profiteur que la moyenne. Il y a juste une
    inversion de causalité.

    • Descartes dit :

      Mais statistiquement, difficile de devenir riche (ou de le rester quand on a hérité) si on n’est pas un peu plus amoral, tricheur, voleur, menteur et profiteur que la moyenne.

      Et pourquoi ça ? Point n’est besoin d’être amoral, tricheur ou voleur pour devenir riche. Il suffit d’avoir un papa qui fasse cela pour toi. N’oublie pas que la grande majorité des “riches” sont
      des héritiers. A l’inverse, on peut défendre la théorie qu’il est beaucoup plus difficile de survivre sans mentir, tricher ou voler lorsqu’on est pauvre que lorsqu’on est riche, et on aboutit
      dans ce cas au résultat inverse.

      La deuxième partie de l’étude, que tu trouves sérieuse, est affectée d’un biais important: les infractions à l’éthique et à la morale sont elles mêmes socialement connotées. Le faux en écriture
      chez les analphabètes est rare, comme est rare l’abus de bien sociaux chez les ouvriers ou le vol d’outillage chez les cadres. Il est difficile de trouver un “dilemme ethique” qui ait la même
      signification pour toutes les couches sociales. Toute étude statistique qui consiste à confronter les sujets d’étude à des situations posant des dilemmes éthiques ont ce problème. Poser la
      question “bruleriez-vous un feu rouge ?” n’a pas le même sens pour celui qui a une voiture et pour celui qui n’a que ses pieds pour marcher.

  15. Jean-Marc dit :

    Je ne vois pas très bien en quoi le fait de tricher sur le résultat d’un jet de dés pour gagner une grosse somme est marqué socialement.

    A moins de considérer que les riches ont plus de temps pour jouer aux dés ou aux cartes que les pauvres …

    • Descartes dit :

      Je ne vois pas très bien en quoi le fait de tricher sur le résultat d’un jet de dés pour gagner une grosse somme est marqué socialement.

      Par exemple, parce que “une grosse somme” ne commence pas au même niveau pour les uns et pour les autres…

  16. Ivan Zicavo dit :

    Bonjour Descartes,

    Avez-vous eu accès à l’article scientifique en question ?

    • Descartes dit :

      Bien entendu. Je n’ai pas l’habitude de commenter des textes que je n’ai pas lu. Pour ceux que cet article intéresse (et qui lisent la langue de Shakespeare) vous le trouverez ici.

  17. stu dit :

    Pas suffisamment. Le problème de ces études est qu’ils sont fondés sur des dilemmes qui sont connotés socialement. Rien n’est plus difficile que commettre une transgression qu’on est
    incapable de se représenter ou de commettre. Demander à un analphabète s’il serait capable de faire un faux en écritures rend la réponse très prévisible.

    Les pauvres ne seraient alors pas capables de se représenter la tricherie pour augmenter leurs chances de gagner de l’argent ? L’étude n°4 est un bon argument pour rejeter cette critique. Petit
    rappel de l’étude 4 : On demande aux participants de se comparer soit à quelqu’un d’une classe inférieure à la sienne, soit à quelqu’un d’une classe supérieure à la sienne. Ça induit chez eux une
    perception de supériorité ou infériorité. On voit qu’à statuts socio-économiques égaux, ceux qui s’étaient comparés avec des gens de classe sociale inférieure ont plus tendance à dire qu’il
    commettraient des actes malhonnêtes et prennent plus de bonbons destinés à des enfants. Donc si ça se vérifie avec des échantillons plus grands, ta critique n’est pas valide car juste en
    suggérant à la personne qu’il appartient à une classe sociale supérieure elle peut plus facilement se représenter et peut-être commettre un acte malhonnête. 

    Significatif, oui. Mais de quoi ? Qu’il y ait une “corrélation entre classe sociale et tricherie” (encore faudrait-il savoir ce qu’on entend par “classe”… et ce qu’on entend par
    “tricherie”) c’est une chose

    Dans l’expérience avec les dés c’est assez simple. “tricherie” c’est quand on gonfle son score pour avoir plus de chances de gagner de l’argent et leurs catégories sociales sont basées sur des
    critères socio-économiques, mais on a pas les détails.

    Que de cette corrélation établie pour les couches représentées dans l’échantillon on puisse déduire des choses concernant des groupes non représentés – ou peu représentés – c’est une autre
    affaire.

    Je ne comprends pas ta critique, les auteurs de l’article ne font pas ce que tu décris. Si des gauchistes le font, je partage tes critiques.

    C’est là le point essentiel du débat. Imaginons un instant qu’on puisse établir le résultat inverse – c’est à dire, que les pauvres sont plus enclins à la tricherie que les riches. Est-ce que
    cela rendrait moins légitimes leurs revendications ? Faudrait-il moduler les augmentations de salaire en fonction de la “vertu” de chacun ?

    J’ai du mal à voir la relation entre le lien causal entre pauvre-tricherie (1) et les augmentations de salaire en fonction de la “vertu” (2). Ça me parait plus sensé de dire : comme il y a (1),
    le fisc va surveiller un peu plus ce que font les pauvres que ce que font les riches. Le lien causal riche-cupidité pourrait lui être un argument contre les gens qui disent qu’il ne faut pas
    taxer les riches car de toute façon ils reversent leur argent à des organismes de charité. Imaginons qu’on prouve qu’il y a un lien causal entre le fait de gagner 10 millions d’euros par an et le
    fait de devenir un psychopate très dangereux pour la société. Ça serait pour moi un bon argument pour le salaire maximum.

    Je ne sais pas si en disant ça je tombe du côté de la morale ou si je reste du côté de la justice.

    • Descartes dit :

      Les pauvres ne seraient alors pas capables de se représenter la tricherie pour augmenter leurs chances de gagner de l’argent ? L’étude n°4 est un bon argument pour rejeter cette critique.
      Petit rappel de l’étude 4 : On demande aux participants de se comparer soit à quelqu’un d’une classe inférieure à la sienne, soit à quelqu’un d’une classe supérieure à la sienne. Ça induit chez
      eux une perception de supériorité ou infériorité. On voit qu’à statuts socio-économiques égaux, ceux qui s’étaient comparés avec des gens de classe sociale inférieure ont plus tendance à dire
      qu’il commettraient des actes malhonnêtes et prennent plus de bonbons destinés à des enfants.

      Si “à statut socio-économiques égaux” on obtient des résultats différents entre ceux qui “se sont comparés à une classe inférieure” et ceux qui “se sont comparés à une classe sociale supérieure”,
      la conclusion évidente est que le comportement ne dépend pas du statut socio-économique. Ce qui détruit la conclusion même de l’étude…

      si ça se vérifie avec des échantillons plus grands, ta critique n’est pas valide car juste en suggérant à la personne qu’il appartient à une classe sociale supérieure elle peut plus
      facilement se représenter et peut-être commettre un acte malhonnête. 

      Mais dans ce cas on serait obligé de conclure que la probabilité de commettre un acte malhonnête ne dépend pas de la classe sociale à laquelle la personne appartient
      effectivement. Paradoxalement, cette expérience montre un biais supplémentaire: les gens agissent non pas en fonction de leur appartenance de classe réelle, mais
      en fonction d’une représentation de ce qu’est le comportement des différentes classes, au point qu’il suffit de “suggérer” à une personne qu’elle appartient à telle ou telle classe pour obtenir
      d’elle le comportement anticipé…

      “Que de cette corrélation établie pour les couches représentées dans l’échantillon on puisse déduire des choses concernant des groupes non représentés – ou peu représentés – c’est une autre
      affaire.” Je ne comprends pas ta critique, les auteurs de l’article ne font pas ce que tu décris.

      Effectivement. Mais je ne critiquais pas les auteurs de l’article. Je critiquais les conclusions que Mélenchon en tire, et qui pour moi sont un exemple de pensée “gauchiste”.

      J’ai du mal à voir la relation entre le lien causal entre pauvre-tricherie (1) et les augmentations de salaire en fonction de la “vertu” (2).

      Mon point était que la pensée gauchiste tend à justifier le combat ouvrier non pas à partir d’un raisonnement fondé sur la justice (il est injuste que le capital s’approprie une partie de la
      valeur produite par le travail) mais à partir d’un raisonnement moral (les riches sont vicieux, les pauvres sont honnêtes). D’où les questions réthoriques sur la légitimité de leurs
      revindications au cas ou l’on arriverait – hypothétiquement – à prouver que les pauvres sont moins honnêtes que les riches.

      Imaginons qu’on prouve qu’il y a un lien causal entre le fait de gagner 10 millions d’euros par an et le fait de devenir un psychopate très dangereux pour la société. Ça serait pour moi un
      bon argument pour le salaire maximum.

      Certainement. Mais alors, il vous faudrait admettre que si le fait de gagner 10 millions ne fait pas devenir un psychopate dangereux, alors le salaire maximum ne se justifie pas…

      Je ne sais pas si en disant ça je tombe du côté de la morale ou si je reste du côté de la justice.

      En fait, ni l’un ni l’autre. Vous ne fondez votre action ni sur la morale (la psychopatie n’est pas une altération morale, c’est une maladie mentale) ni sur la justice. Vous la fondez sur un
      troisième principe, qui est celui de l’ordre public.

  18. Torsade de Pointes dit :

    « Mes “ascendances
    espagnoles” ? (…) Vous devriez faire preuve d’un peu plus de prudence avant de parler de ce que vous ne connaissez pas.»

    Stupide de ma part,
    effectivement, veuillez m’en excuser. J’avais relevé plus d’une fois dans vos billets des faits de langage que je croyais ne pouvoir attribuer qu’à l’influence de l’espagnol, au moins à une forte
    pratique de cette langue. Il m’avait échappé qu’il existe une autre langue voisine, très proche de l’espagnol. (Vous n’êtes pas obligé de répondre à cette provocation.)

     

     « Je trouve que le populisme de Chavez, Morales ou Kirchner ne fait pas le moindre doute.»

    Manifestement, le diable de
    confort fonctionne déjà à plein régime. La seule question qui vaille est de savoir si Correa, Morales, Lula, Chávez etc. ont su corriger une situation sociale et économique caractérisée par
    des îlots de richesse entourés d’un océan de misère noire. Les indicateurs statistiques portent à penser qu’ils y parviennent, lentement, mais les choses évoluent dans le bon sens. Quant au
    reste… bof.

     

    « Si vous êtes au courant,
    elles ne doivent pas être si “secrètes” que ça…»

     

    Ces guerres ont été voulues
    secrètes, mais, semble-t-il, cela a raté.

    « Vous ne trouvez pas que
    vous exagérez un tout petit peu ? »

    Certes non. Le nombre de morts
    en Irak donne une indication de la possible hécatombe que provoquerait p.ex. une guerre de l’«Occident» contre l’Iran. Le ratage dont question ci-haut ainsi que l’attitude ferme de la Russie et
    de la Chine ont fort heureusement rendu moins probable l’éventualité d’une telle catastrophe.

    « Bof »

     

    Exactement. C’est un non-sujet dans la présente campagne présidentielle, qui n’est même pas jugé digne d’un petit paragraphe sur le blogue d’un candidat à la présidence de la
    république. Il est vrai que les populations concernées par ces aggressions sont plutôt exotiques, n’est-ce pas. C’est mon plus grand reproche envers Mélenchon, et ma plus grosse déception, loin
    derrière les critiques que par ailleurs vous avez formulées à juste titre. Je crains qu’il ne faille chercher l’explication de ce mutisme dans quelque obscène calcul électoral, aller à
    contre-courant du grand concert mainstream ayant dû sans doute apparaître (à tort ?) contre-productif. Mais de façon plus générale, il n’y a pas eu en France, ni dans aucun autre
    pays occidental impliqué, de mouvement de protestation de quelque envergure contre ce qui ne peut se qualifier autrement que comme des entreprises néo-coloniales de pillage et de destruction. Où
    est donc passé le pacifisme de gauche?

    • Descartes dit :

      Manifestement, le diable de confort fonctionne déjà à plein régime. La seule
      question qui vaille est de savoir si Correa, Morales, Lula, Chávez etc. ont su corriger une situation sociale et économique caractérisée par des îlots de richesse entourés d’un océan de misère
      noire. Les indicateurs statistiques portent à penser qu’ils y parviennent, lentement, mais les choses évoluent dans le bon sens. Quant au reste… bof.

      Libre à vous de considérer que les gouvernements doivent être jugés en fonction
      de leurs résultats, et non des moyens qu’ils utilisent pour y parvenir. J’attire votre attention tout de même sur le fait que dans les années 1930 on signalait combien Mussolini et Hitler avaient
      “su corriger une situation sociale et économique… etc.”. L’histoire a plus tard montré que le prix de ce succès avait peut-être été sous-estimé.

      Il y a une longue histoire de dirigeants “populistes” en Amérique Latine –
      continent ou j’ai passé quelques années de ma vie, d’où peut-être votre erreur de m’attribuer des ancêtres espagnols – à commencer par Peron. Ils ont tous quelques éléments en commun: ils
      surgissent tous dans des économies de rente (pétrolière dans le cas vénézuelien, gazière en Bolivie, agro-alimentaire en Argentine). Ils achètent une popularité en distribuant cette rente aux
      plus pauvres. Jusque là, rien de bien critiquable. Le problème, c’est que cette distribution sacrifie souvent l’avenir au présent. Pour utiliser à contrario une célèbre image, ces “populistes”
      distribuent au peuple des poissons mais ne leur aprennent pas à pêcher. Et finalement ces populismes s’effondrent dès qu’un choc économique réduit la valeur de la rente disponible. Ainsi, par
      exemple, Peron avait pu distribuer à caisse ouverte aussi longtemps que l’Europe détruite par la guerre a eu besoin des blés et viandes argentins. Lorsque l’agriculture européenne recommença à
      produire fermant progressivement les marchés européens, Peron n’eut plus rien à distribuer et le système plongea dans une crise jusqu’à son renversement en 1955. Quelque chose de très voisin
      faillit arriver à Chavez lorsque les prix du pétrole ont commencé à baisser, et il eut beaucoup de chance que la baisse en question fut seulement passagère…

      « Si vous êtes au courant, elles ne doivent pas être si “secrètes” que
      ça…» Ces guerres ont été voulues secrètes, mais, semble-t-il, cela a raté.

      Cela ne vous étonne pas ?

      « Vous ne trouvez pas que vous exagérez un tout petit peu
      ? » Certes non. Le nombre de morts en Irak donne une
      indication de la possible hécatombe que provoquerait p.ex. une guerre de l’«Occident» contre l’Iran.

      Le nombre de morts en Irak, selon les estimations les plus pessimistes, donne
      quelque 200.000 morts. On est tout de même très loin de vos “millions de morts”…

  19. stu dit :

    Si “à statut socio-économiques égaux” on obtient des résultats différents entre ceux qui “se sont comparés à une classe inférieure” et ceux qui “se sont comparés à une classe sociale
    supérieure”, la conclusion évidente est que le comportement ne dépend pas du statut socio-économique. Ce qui détruit la conclusion même de l’étude…

    Non, à moins que tu considères qu’il n’y a aucun lien entre le fait de se perçevoir comme étant d’une classe supérieure et le fait d’appartenir dans les faits à cette classe supérieure. Tu
    connais beaucoup de SDF qui croient qu’ils font partie de la bourgeoisie ? C’est juste que la relation causale entre le fait d’appartenir à une classe sociale et la morale (si elle existait)
    serait un peu plus complexe dans le détail, mais ça n’invaliderait pas l’existence de la relation causale.

    Certainement. Mais alors, il vous faudrait admettre que si le fait de gagner 10 millions ne fait pas devenir un psychopate dangereux, alors le salaire maximum ne se justifie pas…

    Ça peut juste être un argument parmis d’autres pour le salaire maximum. C’était simplement un exemple où pour moi des études de ce genre peuvent être utilisées de façon pertinente. Ce qui n’a pas
    grand chose à voir avec ce que font les gauchistes de ces études.

    En fait, ni l’un ni l’autre. Vous ne fondez votre action ni sur la morale (la psychopatie n’est pas une altération morale, c’est une maladie mentale) ni sur la justice. Vous la fondez sur un
    troisième principe, qui est celui de l’ordre public.

    Je sais pas si c’est de ma faute, mais je trouve pas ça très clair. Pour un utilitariste, ce que tu appeles l’ordre public va à peu près se confondre avec la morale et la justice. Ce que tu dis
    est peut-être pas faux, mais il faudrait préciser ce que tu entends pour chaque terme. Ce qui nous amènerait peut-être un peu trop loin.

    • Descartes dit :

      Non, à moins que tu considères qu’il n’y a aucun lien entre le fait de se perçevoir comme étant d’une classe supérieure et le fait d’appartenir dans les faits à cette classe supérieure.

      Pas tout à fait. Il n’est pas nécessaire qu’il n’y ait “aucun” lien. Il suffit qu’une partie significative de l’échantillon ait une perception faussée ou plus simplement qu’ils préfèrent se
      situer plus haut – ou plus bas – dans l’échelle sociale qu’ils ne le sont vraiment. Si toutes les petites filles qui se disent princesses l’étaient réellement, il y aurait beaucoup plus de
      princesses qu’il n’y en a en réalité.

      Tu connais beaucoup de SDF qui croient qu’ils font partie de la bourgeoisie ?

      Non, mais je doute fortement qu’il y ait beaucoup de SDF dans l’échantillon. Selon l’article, l’échantillon pour cette étude est constitué “de 129 étudiants de l’Université de
      Californie-Berkeley”. On peut donc raisonnablement penser que l’échantillon est totalement dominé par les classes moyennes. Or, on sait par expérience que les classes moyennes tendent à s’estimer
      plus misérables qu’elles ne le sont réellement.

      C’est juste que la relation causale entre le fait d’appartenir à une classe sociale et la morale (si elle existait) serait un peu plus complexe dans le détail, mais ça n’invaliderait pas
      l’existence de la relation causale.

      On peut oublier la “relation causale”. Pour établir une telle relation, il ne suffit pas de démontrer que deux evennements sont corrélés. Je peux t’assurer que chaque matin, lorsque mon reveil
      sonne, le concierge ouvre sa loge. Et pourtant, il n’y a aucune relation causale entre ces deux faits… Pour établir une relation causale, il faut en plus décrire un mécanisme, ce que l’étude ne
      fait pas et ne prétend pas faire.

      Si l’on ne montre pas que la perception quant à son appartenance a un niveau social déterminé correspond à la réalité, alors on ne peut pas déduire d’une corrélation entre la classe social perçue
      et un comportement une corrélation entre l’appartenance réelle et ce même comportement.

      Je sais pas si c’est de ma faute, mais je trouve pas ça très clair. Pour un utilitariste, ce que tu appeles l’ordre public va à peu près se confondre avec la morale et la justice.

      Certainement pas. La morale est la règle des comportements privés. Elle ne peut jamais se confondre avec “l’ordre public”. La justice pourrait éventuellement recouvrir l’ordre public dans une
      optique purement utilitariste, mais je n’adhère pas nécessairement à une telle optique.

       

  20. stu dit :

     

    Pas tout à fait. Il n’est pas nécessaire qu’il n’y ait “aucun” lien. Il suffit qu’une partie significative de l’échantillon ait une perception faussée ou plus simplement qu’ils préfèrent se
    situer plus haut – ou plus bas – dans l’échelle sociale qu’ils ne le sont vraiment. Si toutes les petites filles qui se disent princesses l’étaient réellement, il y aurait beaucoup plus de
    princesses qu’il n’y en a en réalité.

    Je ne nie pas le fait que certaines personnes se trompent sur leur classe sociale. Ça me rappelle une étude où des personnes assez aisées avaient tendance à surévaluer leur richesse ou leur
    position sociale, je me souviens plus très bien. Maintenant, ça me semble être l’hypothèse par défaut de supposer que la majorité des gens d’une classe sociale sont au courant de leur propre
    classe sociale. Quand on est pauvre, par la force des choses on est obligé de se restreindre. Ce serait assez bizarre que ces personnes croient quand même être riches. Mais c’est peut-être pas
    impossible, l’hypothèse est peut-être fausse, en particulier pour certaines classes sociales. Faut voir. J’avoue que n’ayant pas plus d’informations j’en reste à l’hypothèse de base pour
    l’instant.

    On peut donc raisonnablement penser que l’échantillon est totalement dominé par les classes moyennes

    Sauf que l’effet est statistiquement significatif (marge d’erreur inférieure à 5%)… Ce qui implique que pour cet échantillon, il y avait suffisamment de personnes de classes sociales
    différentes. Sinon le pourcentage d’erreur aurait été bien plus élevé. Je trouve ça surprenant de ta part. Tu es très attaché aux faits en général et là tu préfères supposer que l’échantillon
    n’était pas assez hétérogène. Ou alors je me suis trompé quelque part ? Bien sûr, je suis tout à fait d’accord pour dire que cet échantillon est insuffisant pour prouver quoi que ce soit.

    Certainement pas. La morale est la règle des comportements privés

    Ok, merci d’avoir précisé. J’avais juste en tête un sens plus large du genre : “c’est moral/juste de tuer 1 personne pour en sauver 10”.

     

    • Descartes dit :

      Maintenant, ça me semble être l’hypothèse par défaut de supposer que la majorité des gens d’une classe sociale sont au courant de leur propre classe sociale.

      C’est une hypothèse très aventureuse. Particulièrement aux Etats-Unis, où la majorité des ouvriers se qualifient spontanément de “classe moyenne”. Ce débat me fait penser à la célèbre étude que
      citait toujours mon professeur de statistisque: on posait à une population la question “pensez-vous être plus ou moins intelligent que la moyenne” ? A quoi 90% des gens répondent invariablement
      “plus”.

      Quand on est pauvre, par la force des choses on est obligé de se restreindre. Ce serait assez bizarre que ces personnes croient quand même être riches.

      Quand on est riche, aussi. La richesse est une notion relative: Charlemagne était “riche” et il n’avait ni eau courante, ni éclairage électrique, ni chauffage la nuit… La sensation de richesse
      est souvent un rapport entre l’étendue de nos désirs et les moyens dont on dispose pour les satisfaire. Il y a des gens qui se sentent “riches” avec un niveau de vie qui pour d’autres serait
      signe de pauvrété. Or la question posée dans l’étude est fondée sur la perception subjective, justement.

      Sauf que l’effet est statistiquement significatif (marge d’erreur inférieure à 5%)… Ce qui implique que pour cet échantillon, il y avait suffisamment de personnes de classes sociales
      différentes. Sinon le pourcentage d’erreur aurait été bien plus élevé.

      L’effet est statistiquement significatif sur l’échantillon. Cela n’implique pas qu’il serait aussi “significatif” au bout de l’échelle sociale si l’échantillon était plus important. La “marge
      d’erreur” dépend en effet de la représentativité dans l’échantillon: dans un sondage électoral, la marge d’erreur est plus grande pour Nathalie Artaud que pour Nicolas Sarkozy…

      Je trouve ça surprenant de ta part. Tu es très attaché aux faits en général et là tu préfères supposer que l’échantillon n’était pas assez hétérogène.

      Je ne “suppose” rien du tout, je me fonde sur les faits. Dans un échantillon aléatoire de 200 personnes, il n’y aura normalement aucun “riche”, tout simplement parce que les “riches” ne
      représentent pas 0,5% de la population. De plus, il est indiqué que l’échantillon n’est pas aléatoire, mais qu’il a été choisi parmi les étudiants de Berkeley, ce qui, compte tenu de la
      sociologie universitaire, implique qu’il soit dominé de manière écrasante par les classes moyennes.

       

       

       

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