« On peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant “L’Europe ! L’Europe ! L’Europe !” mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien. (…) On ne fait de la politique qu’avec des réalités » (Charles de Gaulle, 1965)
Il y a quelques semaines, un article du « Monde » avait appelé mon attention. L’article, intitulé « Caresser des chiens ou des lapins : quand les universités misent sur les rencontres animales pour déstresser leurs étudiants » (1) aurait pu passer pour un poisson d’avril si on n’était pas en janvier qui, il est vrai, se situe plutôt dans la saison des bêtisiers. Dans l’article en question, on explique doctement comment des universités françaises ont recours à la « médiation animale » (sic) pour combattre le stress chez leurs étudiants. Une association animalière amène ainsi depuis 2019 des animaux – chiens, lapins, cochons d’inde – pour que les étudiants puissent les toucher et les caresser. Il paraît que cela permet de combattre la terrible pression que nos universités-prisons exercent sur ces pauvres étudiants sans défense. L’idée, comme d’habitude, vient des Etats-Unis, comme tant de choses inutiles. Et avant que vous posiez la question, la distribution de doudous aux étudiants n’est pas encore prévue, mais cela pourrait venir.
J’ignore si la crème de la défense et de la sécurité européenne réunie en conférence à Munich du 14 au 16 février dernier se sont vus proposer de caresser un lapin ou un cochon d’inde. Mais les raisons de stresser ne manquaient pas. Lorsque vous vous êtes installé dans une parfaite bonne conscience, lorsque vous avez pris l’habitude de vous ériger en autorité suprême de ce qui est « bien » et de ce qui est « mal » et de donner des leçons au reste du monde, il est toujours très désagréable de se voir expliquer – qui plus est, par un péquenot venu de l’Ohio – que vous avez, vous aussi, des choses à vous reprocher.
Il faut dire que ces dernières années, l’Union européenne a pris de bien mauvaises habitudes. En politique étrangère d’abord, les grands discours sur le respect du droit international ne l’ont pas empêché de participer au bombardement de la Serbie pour la forcer à rectifier ses frontières – exactement ce qu’elle condamne en Ukraine. L’Union a regardé en spectateur la destruction de Gaza et les crimes contre l’humanité qui y ont été commis, ce qui place les grands discours européens sur les droits de l’homme en perspective. Et tout en se remplissant la bouche du mot « démocratie », ses dirigeants hésitent de moins en moins à contourner le verdict des urnes, quand ils ne l’ignorent pure et simplement. Le « fair play » politique, qui implique d’adhérer à l’esprit des institutions plutôt qu’à leur lettre – tout ce qui est permis n’est pas nécessairement à faire – a tendance à disparaître lorsqu’un traité rejeté par référendum ressuscite miraculeusement par la voie parlementaire.
La récente annulation du scrutin présidentiel en Roumanie mérite de ce point de vue d’être rappelée. Le premier tour de l’élection ayant placé en tête du scrutin un candidat ouvertement eurosceptique, l’élection a été annulée au motif d’une ingérence de la Russie, qui aurait financé des faux comptes et autres « influenceurs » pour promouvoir la candidature de Calin Georgescu via les réseaux sociaux. Au-delà de la réalité ou non de l’accusation, cette annulation pose un problème de fond : si les électeurs aujourd’hui votent ce que leur disent les réseaux sociaux, si quelques centaines de milliers de dollars investis dans ces derniers permettent de changer le vote des citoyens, est-ce que les procédures démocratiques ont encore un sens ? Derrière l’affaire roumaine, se profile l’idée que le peuple est bête, et que son vote doit être surveillé voire « corrigé » par les élites intelligentes qui savent ce qui est bon pour lui.
Mais surtout, l’annulation de l’élection en Roumanie pose une question encore plus intéressante. Comment et pourquoi un candidat inconnu, qui n’a fait qu’une toute petite campagne, peut arriver en tête du scrutin battant au passage des personnalités infiniment mieux connues et qui ont occupé des hautes fonctions gouvernementales ? Comment se fait-il que les citoyens n’aient pas peur de confier leur avenir à un personnage inconnu, dont les capacités à diriger le pays peuvent raisonnablement être mises en doute ? N’est-il pas étrange, dans ce monde où l’on exige d’un professionnel toutes sortes de preuves avant de lui confier ses enfants, qu’on soit prêt à confier leur avenir à un inconnu ?
La réponse à cette question est très simple. Si l’électeur est prêt à donner sont vote à n’importe qui, c’est parce qu’il ne croit pas que sont vote va changer quelque chose. Alors autant se faire plaisir en votant pour le plus beau, ou pour le plus amusant, ou – et c’est ce qu’on observe un peu partout – pour celui qui ne ressemble pas aux « autres », à ces candidats interchangeables que propose l’establishment. Parce que les électeurs ont pu faire l’expérience. Ils ont voté à droite, ils ont voté à gauche, ils ont voté au centre, et à chaque fois on arrive au même résultat puisque « il n’y a pas d’alternative ». Difficile dans ces conditions de prendre la démocratie au sérieux. Les élections deviennent de plus en plus des concours de beauté, parce que les électeurs savent que l’élection présidentielle ou législative a autant de chances de changer quelque chose de fondamental que l’élection de Miss France.
L’élection de Donald Trump ne change rien sur le fond. La politique américaine reste la même, à savoir, une politique faite en fonction des intérêts des Etats-Unis. Mais la brutalité de la forme met à nu une réalité que bien de commentateurs – dont l’auteur de ce blog – crient dans le désert depuis de longues années. Et cette réalité, c’est que l’Union européenne et ses partisans inconditionnels vivent dans un monde d’illusion. Illusion démocratique, illusion économique, illusion de puissance.
L’illusion démocratique d’abord. Alors qu’on se gargarise d’une Europe qui serait le parangon de la démocratie dans le monde, on a tout fait pour dégrader la démocratie de l’intérieur, en organisant systématiquement l’impuissance du politique. Les véritables décisions, celles qui font notre vie quotidienne comme celles qui nous engagent sur le long terme, sont de moins en moins prises par les autorités élues après des débats ouverts, et de plus en plus dans des cénacles bruxellois sans contrôle démocratique, par des autorités indépendantes qui ne rendent compte à personne, par des juges qui s’érigent en législateurs. Pour ne donner qu’un exemple, nos décideurs sont contraints par le principe de la supériorité du droit européen sur les droits nationaux, principe à valeur quasi-constitutionnelle et qui pourtant n’a jamais été soumis au débat parlementaire, mais qui résulte de décisions de justice, celle de la Cour de justice des communautés européennes d’abord, celles de nos cours souveraines ensuite.
L’électeur sait aujourd’hui que son vote ne change rien. Qu’il élise un homme de gauche ou un homme de droite, qu’il mette au pouvoir un ultra-compétent ou un incompétent, cela ne changera les choses qu’à la marge. Pas étonnant dans ces conditions que les campagnes électorales se déroulent dans le plus grand désintérêt, au point que les médias sont obligés de transformer les émissions politiques en shows people
Ce n’est pas la montée des populismes qui menace la démocratie. C’est au contraire, la dégradation de la démocratie, l’impuissance organisée du politique qui provoque la montée des populismes et des égo-politiciens. Parce que, quand le vote ne change rien, on n’a aucune raison de le réserver aux candidats raisonnables. En 1960, un homme sans expérience politique et administrative comme Emmanuel Macron n’aurait eu aucune chance d’être élu – pas plus que Trump d’ailleurs. Mais avec la révolution néolibérale, les politiques sont devenus des pantins dont la fonction est de tenir la tribune pendant qu’ailleurs on gouverne. Alors, qu’est ce que ça change de voter un pantin plutôt qu’un autre ?
Pire encore que l’illusion démocratique, l’illusion économique est un cancer qui dévore l’Union européenne. Pendant des années, dans les couloirs de la Commission, on était persuadé d’être en train de construire l’économie la plus compétitive, la plus performante de la terre. L’Euro allait non seulement nous protéger des fluctuations mondiales, mais allait faire exploser la croissance et, qui sait, remplacer le Dollar comme monnaie de réserve. La réalisation du « marché unique », nouveau Graal, allait libérer les énergies du secteur privé contraint par les frontières nationales et relancer la production de richesses. La « concurrence libre et non faussée » allait faire fleurir l’innovation, baisser les coûts et placer l’Europe en tête dans les marchés mondiaux.
Ceux qui ont pris la peine de lire des rapports Letta et Draghi – dont on ne peut raisonnablement suspecter les auteurs d’euro-scepticisme – ne peuvent tirer de leur lecture qu’une conclusion : les promesses n’ont pas été tenues. Et non pas pour des raisons conjoncturelles, mais parce que les politiques mises en œuvre sont structurellement mauvaises. La « concurrence libre et non faussée » implique une atomisation des marchés qui empêche l’apparition de « champions », c’est-à-dire, d’entreprises dont la taille permet de profiter des économies d’échelle. La concurrence « libre et non faussée » tend à réduire les marges, et empêche donc de dégager des surplus suffisants pour financer la recherche et l’innovation, par ailleurs impossible lorsque les acteurs n’ont pas la taille critique. Par ailleurs, la libre circulation provoque la mise en concurrence sociale et fiscale entre les pays, et pousse donc les finances publiques dans le rouge, privant les Etats des moyens pour soutenir leurs infrastructures et provoquant le délitement du tissu social.
Enfin, il faut dire deux mots de l’illusion de puissance. Parce qu’elle incluait des pays qui sont en eux-mêmes des puissances – grandes ou moyennes, le débat reste ouvert – on s’est imaginé que l’Union européenne pouvait tenir en tant que telle une place dans les affaires du monde. Mais l’intégration politique n’additionne pas les forces, au contraire : l’ensemble tend à être aussi faible que le plus faible de ses intégrants. Pour peser de son poids économique et démographique, l’Union devrait avoir une unité d’objectifs et de vision, ce qui suppose – désolé d’insister – une solidarité inconditionnelle entre européens. Sans cette solidarité inconditionnelle, il est illusoire d’imaginer que les citoyens puissent se sentir appelés à soutenir cette vision inconditionnellement, y compris au péril de leur vie.
Cette solidarité inconditionnelle entre européens n’existe pas et n’est pas près d’exister, parce que l’Europe n’est pas une nation. Les discussions ouvertes entre la Russie et les Etats-Unis nous ramènent à la réalité : ce sont les nations, et elles seules, qui sont les acteurs de la politique internationale. C’est pourquoi, lorsqu’il s’agit de discuter de l’avenir du monde, Trump préfère discuter avec le dirigeant d’une nation qui n’a que 150 millions d’habitants et un PIB de 4.000 Md$ plutôt qu’avec les dirigeants d’un ensemble de 450 millions d’habitants et un PIB cinq fois plus important. Parce que quand bien même elle est censée représenter un « ensemble de 450 millions de citoyens », Von der Leyen n’aura jamais la légitimité d’un dirigeant national. Un chef d’Etat a reçu de leur peuple constitué en nation un mandat qui lui permet, si nécessaire, d’engager la vie et les biens de ses concitoyens. Ursula Von der Leyen, quelles que soient les plumes de paon qu’elle prétend revêtir, n’est mandatée que pour distribuer de l’argent. Si la Russie était attaquée, les 120 millions de citoyens russes se lèveront en masse pour défendre leur mère patrie, au-delà des divisions politiques – ils l’ont amplement montré en 1941. Si le territoire français était attaqué, les Français iraient – du moins on l’espère – défendre leur pays. Si les Américains occupaient demain le Groenland, je doute que les 450 millions d’européens iraient se mobiliser pour défendre une « mère patrie » européenne. Beaucoup d’hommes sont morts pour le drapeau français, allemand, britannique ou américain. Personne n’est mort pour le drapeau bleu aux étoiles, et ce n’est pas demain la veille que cela arrivera.
Et ce n’est pas ça le pire. Non seulement l’Union européenne ne pèse rien en politique internationale, mais en enfermant les états membres dans une logique de concertation obligatoire et à l’obligation morale de « parler d’une seule voix », elle a émasculé les états membres. La France avait une voix qui portait lorsqu’elle parlait pour elle-même. On l’avait vu lorsqu’elle s’était opposée à l’invasion de l’Irak, faisant fi du consensus européen. Plus maintenant, puisque depuis le traité de Lisbonne il existe un service diplomatique européen, et que les états membres sont censés ne parler que pour refléter le consensus mou construit à Bruxelles. On répète depuis trente ans que « la voix de la France est plus forte grâce à l’Europe ». C’est exactement l’inverse: la voix d’une nation sera toujours plus puissante, pèsera toujours plus lourd que la voix d’un conglomérat, tout simplement parce que, comme le disait Sun Tzu, la victoire n’appartient pas à l’armée la plus nombreuse, mais à l’armée la plus décidée. Et si les représentants d’une nation ont un mandat qui leur permet de l’engager totalement, ceux qui administrent le conglomérat européen n’ont pas ce mandat, tout simplement parce qu’il n’existe pas de « peuple européen » pour le leur donner.
Les institutions européennes vivent dans le monde des bisounours. A force de répéter que les Américains étaient des « amis » qui « défendaient l’Europe », on a oublié pourquoi ils la défendaient. Ce n’était pas par grandeur d’âme, ou par générosité désintéressée, mais par intérêt. Quand l’URSS était l’adversaire stratégique, et que les anciennes puissances européennes pesaient dans le monde, empêcher les soviétiques d’accroitre leur influence sur ces dernières, et les maintenir dans le giron du « monde libre » était essentiel. Mais l’URSS n’est plus, les anciennes puissances européennes se sont retirées du monde en confiant les clés de leur politique à Bruxelles et celles de l’industrie aux Chinois. Et puis, Trump en est convaincu, l’adversaire stratégique aujourd’hui, c’est la Chine. Pour les Etats-Unis, empêcher la Russie de tomber sous l’influence chinoise est aujourd’hui plus important que de soustraire les pays baltes à l’influence russe ou de gagner la bienveillance de Londres ou de Paris. On pourrait même imaginer un quid pro quo avec des concessions importantes à la Russie en Ukraine en échange de sa participation au « containment » de Pékin. Et tant pis pour les Ukrainiens, qui devraient méditer la formule attribuée à Kissinger : « être l’ennemi des Etats-Unis peut être dangereux, être leur ami peut être fatal ».
Le réalisme brutal de Trump aura peut-être un avantage, celui de nous ouvrir les yeux sur nous-mêmes. Peut-être verrons-nous maintenant l’Union européenne telle qu’elle est, c’est-à-dire, un club de commerçants, une réunion d’états-nations sous la coupe d’institutions qui se sont évertuées, avec la complicité des élites nationales, à réduire les états à l’impuissance. Un ensemble habité par des citoyens qu’on a tout fait pour transformer en consommateurs. Un ensemble administré – on n’ose pas dire gouverné – par une bureaucratie sans âme et des politiciens complètement déconnectés des réalités du monde.
Peut-être prendrons nous aussi conscience du fait que nous vivons dans un monde dangereux, dans lequel la force prime toujours, qu’on le veuille ou non, non seulement sur le droit mais aussi sur la morale. Et que si nous voulons défendre ce que nous avons et peser dans le monde, nous devons d’abord compter sur nous-mêmes. Sur nos capacités, sur notre effort, sur notre organisation. Et ne pas attendre des solutions qui viendraient d’ailleurs – de nos « amis » européens, ou de nos « alliés » américains. Personne, dans ce bas monde, ne fait des cadeaux désintéressés, et en politique pas plus qu’en économie, il n’existe pas de diner gratuit.
Ce n’est qu’avec cette prise de conscience que la politique redeviendra quelque chose de sérieux, et même de tragique. Et le retour de la tragédie est une bonne chose, parce que c’est en pensant la tragédie qu’on sortira de l’idéalisme bébête dans lequel nous nous sommes enfermés. C’est par le sentiment du tragique que les électeurs cesseront d’imaginer qu’on peut confier les rênes de l’Etat à n’importe qui, que le débat politique deviendra véritablement une affaire sérieuse.
En attendant, on peut toujours caresser des lapins et des cochons d’inde pour calmer nos nerfs… il paraît que c’est efficace.
Descartes
(1) « Le Monde », 9 janvier 2025, consultable ici : https://www.lemonde.fr/campus/article/2025/01/09/caresser-des-chiens-ou-des-lapins-quand-les-universites-misent-sur-les-rencontres-animales-pour-destresser-leurs-etudiants_6488967_4401467.html
Bonsoir Descartes,
[Le réalisme brutal de Trump aura peut-être un avantage, celui de nous ouvrir les yeux sur nous-mêmes.]
Je crois que je viens de me réveiller d’un (très) long rêve, très bizarre. Un rêve où Donald Trump, après son premier mandat a été battu par un certain Joe Biden, pour ensuite redevenir président des États-Unis dans des conditions parfaitement rocambolesques. Je passe sur les détails (particulièrement fournis) tant de la scène nationale qu’internationale de ce rêve.
Mais non, c’est vrai que nous sommes en février 2017, que la campagne des élections présidentielles commence à battre son plein. L’ancien ministre des finances de Hollande, désormais candidat à la magistrature suprême propose de construire « l’Europe puissance » afin de faire face à la désormais hostile Amérique trumpienne (il propose accessoirement aussi de terrasser la « lèpre populiste »).
@ François
[Mais non, c’est vrai que nous sommes en février 2017, que la campagne des élections présidentielles commence à battre son plein. L’ancien ministre des finances de Hollande, désormais candidat à la magistrature suprême propose de construire « l’Europe puissance » afin de faire face à la désormais hostile Amérique trumpienne (il propose accessoirement aussi de terrasser la « lèpre populiste »).]
Retour vers le futur ?
Non, Un Jour sans Fin.
Puisque vous reprenez cette question de la légitimité d’élections, de la faiblesse de nos démocraties, et des leçons que s’autorisent à vouloir leur donner l’équipe TRUMP, je vous reposte une réflexion déjà proposée :
Je ne comprends pas qu’une démocratie (ancienne comme celle des USA) permette que participent à une élection des gens (comme Trump) annonçant d’avance que l’élection serait obligatoirement faussée s’ils ne la gagnaient pas. Je ne jouerai jamais aux cartes avec quelqu’un qui me dirait d’avance que les ‘atouts’ (traduction de ‘trump’) seront obligatoirement dans sa main, faute de quoi la table de jeu serait renversée.
Je ne comprends pas non plus que vous vous honoriez de soutenir, comme donneurs de leçons démocratiques, des réseaux internationaux d’influenceurs et manipulateurs exploitant les logarithmes les plus divers et les plus complexes à leur profit, au détriment de nos intérêts peut-être vitaux.
Quant au repli national-isolationniste obstiné dans lequel vous pensez vous (et nous) mettre à l’abri du monde (et même de l’UE !), il reste étonnant de la part de quelqu’un aussi conscient que vous de la largesse de ses vues.
@ Claustaire
[Je ne comprends pas qu’une démocratie (ancienne comme celle des USA) permette que participent à une élection des gens (comme Trump) annonçant d’avance que l’élection serait obligatoirement faussée s’ils ne la gagnaient pas.]
Je vous ai déjà répondu rapidement, mais je vais développer un peu la question. En fait, ce genre de logique se développe de plus en plus dans l’ensemble des « démocraties », qu’elles soient « nouvelles » ou « anciennes ». L’affirmation selon laquelle « nous ne pouvons pas perdre, sauf fraude/ingérence » revient assez systématiquement, explicite ou implicitement. Pensez par exemple à l’élection présidentielle en Roumanie, dont l’ensemble des « vieilles démocraties » européennes a salué l’annulation. Là aussi, on retrouve le raisonnement trumpien : « l’élection a donné la victoire aux affreux, donc elle ne peut qu’être faussée ». On avait vu le même raisonnement chez les partisans du « Remain » en Grande Bretagne : pour eux, le « oui » au Brexit ne pouvait qu’être faussé par les promesses mensongères de l’autre camp, il fallait revoter…
Tous ces exemples vous montrent que l’idée que le cas Trump n’est qu’un exemple extrême d’un phénomène général. Un phénomène pour lequel j’ai proposé une explication : le système démocratique ne fonctionne qu’aussi longtemps que le décalage entre les rapports de force économiques et les rapports de force électoraux ne sont pas trop décalés. Lorsque ce décalage devient grand, certains groupes peuvent avoir la tentation de renverser la table électorale. Et c’est exactement ce qui arrive aujourd’hui.
[Je ne comprends pas non plus que vous vous honoriez de soutenir, comme donneurs de leçons démocratiques, des réseaux internationaux d’influenceurs et manipulateurs exploitant les algorithmes les plus divers et les plus complexes à leur profit, au détriment de nos intérêts peut-être vitaux.]
S’il vous plait, pas d’amalgames. Je ne « m’honore » de « soutenir » rien du tout. Je constate simplement que si l’on croit que les « influenceurs » peuvent, à l’aide des « algorithmes », faire ou défaire les élections, alors de deux choses l’une : ou bien on interdit les « influenceurs » et les « algorithmes » (mais alors TOUS les influenceurs et TOUS les algorithmes, parce qu’il n’y a aucune raison de distinguer entre les « bons » influenceurs et les mauvais), ou bien on se dit que les élections ne sont plus un moyen fiable de désigner nos dirigeants. On ne peut pas à la fois considérer l’électeur comme facilement manipulable et lui donner le droit de vote.
Personnellement, je ne crois pas au pouvoir de ces « réseaux internationaux d’influenceurs ». Je pense qu’il s’agit d’hommes de paille, de diables de confort qu’on s’invente pour ne pas aborder le véritable problème. Et le véritable problème est que les élections ont cessé d’être importantes. Les citoyens se sont aperçus que voter à gauche, à droite, au centre ne change rien en profondeur, qu’à la fin on se retrouve avec la même politique. Le dernier exemple en date nous est fourni par notre propre système politique : alors qu’une majorité nette s’est prononcé pour une rupture avec les politiques macronistes, ce sont toujours les affidés de Macron qui gouvernent le pays. Or, si les élections ne sont plus une question importante, alors on peut se permettre de voter n’importe quoi. Si mon vote ne change rien, je peux voter un Milei ou un Trump parce que c’est une manière de cracher au visage de l’establishment.
C’est cette désespérance, cette résignation qui donne un pouvoir énorme aux influenceurs et autres réseaux sociaux. Mais au lieu de s’attaquer au problème de fond, celui d’une démocratie qui n’a de démocratie que le nom, puisque le choix du peuple n’est pas pris en considération, on essaye de casser le thermomètre en faisant des « influenceurs » et des « algorithmes » des boucs émissaires.
[Quant au repli national-isolationniste obstiné dans lequel vous pensez vous (et nous) mettre à l’abri du monde (et même de l’UE !), il reste étonnant de la part de quelqu’un aussi conscient que vous de la largesse de ses vues.]
Vous me surprenez encore une fois en m’attribuant des idées qui ne sont pas les miennes. Je ne me souviens pas d’avoir jamais proposé un « repli national-isolationniste ». Au contraire : je veux une France qui parle au monde. Et qui parle au monde DIRECTEMENT, sans se soumettre au carcan de l’UE. Une France qui échange et qui collabore avec le monde. Mais qui échange et collabore avec le monde DIRECTEMENT, sans être contrainte par le carcan de l’UE. Je veux une France qui cherche elle-même ses solutions, et qui n’attend pas que tel ou tel problème soit « résolu au niveau européen » pour s’y attaquer. J’ai du mal où cette vision mériterait le qualificatif que vous lui réservez.
En fait le résultat du premier tour de l’ élection présidentielle roumaine vient d’une manipulation interne de la classe politique où le parti PNL a favorisé la candidature de Calin Georgescu en espérant mettre en difficulté le candidat adverse du PSD qui a trop bien réussi. Même la candidate du PNL a admis la manipulation et s’est retirée de la course. Le président sortant vient de démissionner et de nouvelles élections vont avoir lieu en mai où le candidat Georgescu s’il n’est pas interdit de candidater a de bonnes chances d’être élu étant donné la situation qui n’a pu que déplaire fortement aux Roumains. Il faut se souvenir des propos de Barroso “Il n’y a pas de démocratie contre les traités européens”. J’ajoute que tous les pays candidats à l’UE doivent être totalement pro-UE. Il est interdit d’être euro-critique ou eurosceptique. Ce qui explique le cas géorgien où le candidat élu a préféré une politique étrangère compatible avec son environnement géopolitique donc non hostile à la Russie. D’autre façon la Serbie candidate à l’UE est très mal vue pour des raisons identiques. Quant à la Roumanie il ne faut pas oublier qu’il y a une des plus grande base militaire américaine de l’OTAN contre la Russie.
Quant à l’UE que Trump méprise parce que c’est une union bureaucratique d’états désunis à l’heure où son élection sonne comme le retour de l’état-nation contre les bureaucraties internationales et le multilatéralisme qui enserrait son pays l’empêchant de faire prévaloir totalement ses propres intérêts. Déjà lors d’une visite de Macron accompagné de sa duègne en Chine les dirigeants avaient traité Madame von der Leyen sans aucun respect de sa fonction et comme un sous-dirigeant, d’un machin non étatique. récemment à Munich le vice-président JD Vance a fait la leçon aux dirigeants européens qui ont bien du mal à avaler l’élection de Trump qui bouscule complètement leur petit monde. Ce dernier en bon real-politique a compris que la guerre en Ukraine était perdue et est en train de négocier avec Poutine une paix en Ukraine sans Zelenski ni les dirigeants européens, même pas à un strapontin. L’effacement européen est aussi mondial dans la mesure où l’UE est surtout une bureaucratie productrice de normes contre elle-même mais favorables au reste du monde en bref tout sauf une puissance mondiale qu’elle pourrait être si elle et ses dirigeants en avaient la volonté politique. Pour cela il aurait fallu qu’elle soit un état et une nation ce qui n’est pas prêt d’arriver. Quant à la France c’est tellement pitoyable que je préfère ne pas en parler.
@ Cording1
[Le président sortant vient de démissionner et de nouvelles élections vont avoir lieu en mai où le candidat Georgescu s’il n’est pas interdit de candidater a de bonnes chances d’être élu étant donné la situation qui n’a pu que déplaire fortement aux Roumains.]
Possible. Mais il ne reste pas moins qu’on aura annulé un scrutin présidentiel – rien que ça – simplement parce que le résultat déplaisait aux élites europhiles, et que cette annulation a été applaudie par la grande majorité des gouvernements des états membres de l’Union européenne. Tout ça n’est pas neutre, et illustre parfaitement la dégradation des processus démocratiques européens. Il n’y a pas si longtemps, l’expression de la volonté du peuple souverain dans les urnes avait un caractère quasi-sacré. Au point par exemple que le Conseil constitutionnel s’interdisait d’examiner la conformité d’un texte validé par référendum. Depuis, avec la construction européenne on a progressivement désacralisé cette expression. Ainsi, lorsque le peuple a « mal voté », on ne s’interdisait plus de le faire revoter jusqu’à ce qu’il donne la « bonne » réponse. C’est ce qu’on a fait lors de la ratification du traité de Maastricht au Danemark. Mais à l’époque, on y a mis des formes, faisant revoter sur un texte avec des options de retrait, et notamment celle de ne pas participer à l’Euro. Plus tard, on s’autorise même à ratifier un texte rejeté par référendum par la voie parlementaire, comme on l’a fait en France pour le traité de Lisbonne. L’expression de Juncker – que vous attribuez à tort à Barroso – va tout à fait dans ce sens. A la question « Comment l’Europe démocratique doit-elle traiter un pays qui décide démocratiquement de sortir du rang? », Juncker avait répondu : «Il ne peut pas y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». Voilà donc où se situe la racine du mal…
[Ce qui explique le cas géorgien où le candidat élu a préféré une politique étrangère compatible avec son environnement géopolitique donc non hostile à la Russie. D’autre façon la Serbie candidate à l’UE est très mal vue pour des raisons identiques.]
Surtout, il ne faut pas oublier que les manifestations en Georgie ou en Serbie marquent une division entre les classes intermédiaires urbaines, qui ont tout à gagner d’une adhésion à l’UE, et les couches populaires qui ont tout à y perdre. C’est pourquoi les gouvernements eurosceptiques sont élus, puis font face à des manifestations et des tentatives de renversement dans les villes… souvenez-vous de « euromaïdan ».
[Déjà lors d’une visite de Macron accompagné de sa duègne en Chine les dirigeants avaient traité Madame von der Leyen sans aucun respect de sa fonction et comme un sous-dirigeant, d’un machin non étatique.]
Et c’est parfaitement logique. Macron a une investiture qui lui permet d’engager totalement la vie et les biens de soixante-six millions de Français. Madame Von der Leyen a tout au plus le pouvoir de prendre des mesures commerciales, et encore, pour toute décision du poids elle doit recueillir une majorité parmi les états membres. On répète à l’envie que la France pèse plus dans le monde grâce à l’Europe. C’est faux : la voix d’une nation pèse bien plus lourd en direct que diluée dans celle d’un conglomérat. Parce que la voix d’une nation vaut engagement, et celle du conglomérat non.
[Ce dernier en bon real-politique a compris que la guerre en Ukraine était perdue et est en train de négocier avec Poutine une paix en Ukraine sans Zelenski ni les dirigeants européens, même pas à un strapontin.]
Je ne pense pas que les Américains partent de l’hypothèse que « la guerre en Ukraine est perdue ». Je pense surtout qu’ils ont compris que la victoire en Ukraine aurait un coût très important. Et pas seulement en termes financiers. Acculer la Russie, c’est prendre le risque de renforcer la coopération entre la Russie et la Chine (sans compter des puissances régionales comme l’Iran ou la Corée du Nord). Exactement ce que les Etats-Unis redoutent. Par ailleurs, je trouve toujours surprenante la difficulté des européens de se mettre à la place de l’autre. Les dirigeants européens nous parlent en permanence du besoin de se garantir contre les visées agressives de la Russie. Mais symétriquement, on pourrait comprendre que la Russie cherche à se garantir contre les visées agressives du système UE/OTAN. Vous me direz que comme nous sommes les gentils, la Russie peut dormir sur ses deux oreilles dans l’assurance que jamais au grand jamais les occidentaux ne chercheraient à l’attaquer. Seulement voilà, les précédents yougoslave, serbe ou irakien montrent que les gentils peuvent très aisément devenir méchants…
Les « réalistes » sont revenus au pouvoir à Washington, alors que les « idéologues » sont toujours aux manettes en Europe. Les « idéologues » ne sont prêts à accepter que la solution où l’Ukraine récupère ses frontières – Crimée comprise, où l’Ukraine rentre dans l’UE et dans l’OTAN, où la Russie paye les dégâts de guerre et où Poutine est jugé à La Haye. Toute autre solution est inacceptable, et c’est le commissaire à la défense de l’UE qui le dit, dans un entretien au « Monde » ce matin. Les « réalistes » à Washington ont compris que cette solution est impraticable, et que plus généralement la réintégration de la Russie et son maintien dans le « camp occidental » vis-à-vis de la Chine passe par une révision du système de sécurité européen qui rassure la Russie quant aux intentions occidentales, par exemple en démilitarisant progressivement la zone de friction en Europe centrale.
[L’effacement européen est aussi mondial dans la mesure où l’UE est surtout une bureaucratie productrice de normes contre elle-même mais favorables au reste du monde en bref tout sauf une puissance mondiale qu’elle pourrait être si elle et ses dirigeants en avaient la volonté politique. Pour cela il aurait fallu qu’elle soit un état et une nation ce qui n’est pas prêt d’arriver.]
Ce n’est pas seulement une question de « volonté politique ». La construction d’un Etat-nation repose souvent sur une volonté, mais est aussi le fruit d’une histoire. Rêvons un peu : si les dirigeants européens avaient consacré leur énergie à bâtir une solidarité inconditionnelle entre citoyens européens plutôt qu’à construire le règne de la « concurrence libre et non faussée », serions-nous aujourd’hui plus proches d’une « nation européenne » ? Les obstacles étaient énormes : déjà il a été difficile de construire une « solidarité inconditionnelle » dans l’espace germanique, alors que les citoyens allemands partagent une langue, une culture, un droit commun. Un Etat-nation franco-allemand aurait déjà été une gageure. Quant à intégrer 27 nations toutes différentes…
[Quant à la France c’est tellement pitoyable que je préfère ne pas en parler.]
Oui, et c’est dommage, parce que par certains côtés la situation nous favorise. Le désengagement américain affaiblit la position des pays les plus atlantistes et renforce la position du seul pays européen qui – merci De Gaulle – détient l’arme nucléaire en propre et peut se passer du parapluie nucléaire américain. Les Allemands sont dans la merde, en partie du fait des mauvais choix de politique énergétique – choix qu’ils ont essayé de nous imposer à travers Bruxelles – et en partie du fait de la fragilité du modèle exportateur dès lors que leur principal marché se tourne vers le protectionnisme. Mais Macron n’est pas l’homme de la situation. D’une part, parce qu’il n’y connaît rien à la politique internationale et qu’il n’aime pas travailler avec les gens qui s’y connaissent, et d’autre part parce qu’il est incapable de penser en dehors du carcan européen…
@ Descartes
[Mais Macron n’est pas l’homme de la situation. D’une part, parce qu’il n’y connaît rien à la politique internationale et qu’il n’aime pas travailler avec les gens qui s’y connaissent, et d’autre part parce qu’il est incapable de penser en dehors du carcan européen…]
Aussi parce que les urnes françaises l’ont désavoué, et qu’en conséquence il a perdu – même s’il s’obstine effrontément à l’admettre et à en tirer les conséquences – la légitimité issue du peuple que vous évoquez. Politiquement, il ne pèse plus, que ce soit en France ou à l’étranger. Le qualificatif de “roquet” que vous aviez utilisé lui sied bien (ça a toujours été le cas d’ailleurs).
@ Bob
[“Mais Macron n’est pas l’homme de la situation. D’une part, parce qu’il n’y connaît rien à la politique internationale et qu’il n’aime pas travailler avec les gens qui s’y connaissent, et d’autre part parce qu’il est incapable de penser en dehors du carcan européen…” Aussi parce que les urnes françaises l’ont désavoué, et qu’en conséquence il a perdu – même s’il s’obstine effrontément à l’admettre et à en tirer les conséquences – la légitimité issue du peuple que vous évoquez.]
Je pense que la question est plus complexe que ça. Il y a deux “légitimités” qui s’affrontent ici. D’un côté, il y a la légitimité “formelle”, et de ce point de vue Macron est pleinement légitime puisqu’il a été élu pour exercer un mandat de cinq ans qui ne se terminera qu’en 2027, et qu’aucun des mécanismes institutionnels prévus pour mettre fin à ce mandat de manière anticipé n’ont abouti. De l’autre côté, il y a une légitimité “substantielle”, qui tient au rapport permanent, quotidien, entre le dirigeant et son peuple, à la confiance et/ou l’adhésion à ses propositions que le peuple peut ressentir, et qu’il exprime par les différentes voies que nos institutions prévoient: les élections certes, mais aussi la manifestation ou l’expression publique. Et de ce point de vue, il est bien plus difficile – comme vous le signalez – pour Macron d’invoquer une quelconque légitimité.
Maintenant, il arrive qu’un dirigeant qui a perdu la légitimité substantielle mais garde une légitimité formelle arrive à reconquérir – par exemple, à la merci d’une crise bien gérée ou d’une initiative heureuse – une forme de légitimité substantielle. Les crises peuvent en effet révéler un dirigeant, l’aider à rétablir avec le peuple une relation très dégradée. Mon point est que Macron n’a pas les qualités pour opérer un tel rétablissement en profitant de la crise ouverte par le virage trumpien. Peut-être n’est-il même pas intéressé à le rétablir, ou conscient de cette nécessité. Chaque fois qu’il a eu à s’exprimer sur cette question, il n’a laissé aucune ambiguïté sur le fait que pour lui seule la légitimité formelle compte.
@ Descartes
Très belle explication de ces deux versants de la légitimité. Vous avez raison, Macron n’accorde de valeur qu’au versant formel ; peut-être parce que ça l’arrange, peut-être parce qu’il manque simplement de toute hauteur de vue et de recul.
@Descartes
” Et le véritable problème est que les élections ont cessé d’être importantes. Les citoyens se sont aperçus que voter à gauche, à droite, au centre ne change rien en profondeur, qu’à la fin on se retrouve avec la même politique.”
Pas faux ( la forte abstention en témoigne par ex) mais à nuancer, De plus, nous nous accorderons, je pense, à le déplorer mais il est vrai que la quasi totalité de (veuillez m’excuser du terme) de « l’offre » politique y a largement contribué ce qui ne devrait pas étonner vu le ralliement de ceux-ci (de LFI à RN) à l’Union Européenne donc à son dogme de concurrence libre et non faussée,
Lorsqu’on pense que la grande majorité des lois dans notre pays ne sont que des transpositions de directives européennes ou s’il y a des velléités, elles sont contrecarrées par les règles de l’UE y compris la cour européenne de justice (entre autres) dont les décisions sont d’application obligatoire.
” Le dernier exemple en date nous est fourni par notre propre système politique : alors qu’une majorité nette s’est prononcé pour une rupture avec les politiques macronistes, ce sont toujours les affidés de Macron qui gouvernent le pays.”
En même temps, si l’on dit « que les élections ont cessé d’être importantes » cela signifierait d’une forme d’indifférence relative au groupe au pouvoir.
D’autre part, je crois que le phénomène n’est pas nouveau, il y a toujours une crainte de ce qui n’est pas familier, routinier (trouvez le bon terme).. que l’on aime ou non.
” puisque le choix du peuple n’est pas pris en considération, on essaye de casser le thermomètre en faisant des « influenceurs » et des « algorithmes » des boucs émissaires.”
Permettez moi de nuancer ici encore : ces derniers peuvent avoir aussi leur force dans un désert d’alternatives. Les moutons de Panurge ont leur réalité mais dans les circonstances que vous décrivez.
Par ailleurs, je pense que nous serons d’accord pour n’avoir aucune amitié avec Trump, qui est, comme le précédent, mais à sa manière un défenseur des intérêts du capitalisme américain et si je rejette moi aussi l’idéologie woke (voile de fumée protégeant des intérêts bien concrets) accompagnant la campagne de K, Harris, je souscris avec sourire au dessin du Canard Enchaîné lors de l’accession de Trump au pouvoir : un type à caquette US électeur du précédent, disant : « C’est le plus grand évènement depuis que la terre est plate ! ».
@ Claustaire
Si vous me permettez : vouloir sortir de l’UE pour ne plus subir ce carcan pour les peuples ne signifie nullement une autarcie par ailleurs impossible (et c’est heureux!) car aussi loin que l’humanité existe, des échanges sont là et parfois même avec des contrées fort éloignées..
Des coopérations tous azimuts en fonction d’intérêts communs peuvent intervenir en conservant la souveraineté au sein des nations.
@ morel
[« Et le véritable problème est que les élections ont cessé d’être importantes. Les citoyens se sont aperçus que voter à gauche, à droite, au centre ne change rien en profondeur, qu’à la fin on se retrouve avec la même politique. » (…) De plus, nous nous accorderons, je pense, à le déplorer mais il est vrai que la quasi-totalité de (veuillez m’excuser du terme) de « l’offre » politique y a largement contribué ce qui ne devrait pas étonner vu le ralliement de ceux-ci (de LFI à RN) à l’Union Européenne donc à son dogme de concurrence libre et non faussée,]
Il y a là une dialectique. Si les politiques de centre, de droite et de gauche ont fait les mêmes politiques, ce n’est pas nécessairement de gaîté de cœur. Certains – je pense à Bérégovoy – ont même mis fin à leur vie en regardant ce qu’ils étaient devenus. D’autres hantent les émissions de télévision ou écrivent des livres dans une tentative désespérée de montrer combien leurs intentions étaient pures. S’ils ont une responsabilité personnelle, il faut aussi tenir compte des énormes contraintes qui s’exercent sur eux. Le « there is no alternative » thatchérien peut être lu de deux manières : comme une constatation, ou comme une menace.
Et puis, l’impuissance du politique entraîne presque mécaniquement une dégradation du personnel politique. Autrefois entraient en politique les plus brillants, les mieux formés, les plus ambitieux. Aujourd’hui, ces mêmes profils vont plutôt dans les affaires, dans un secteur privé qui offre bien plus de moyens, de pouvoir, de gratifications. Restent dans les couloirs de nos institutions les médiocres. La formule « hier nous étions gouvernés par des énarques, maintenant on est gouvernés par ceux qui ont raté le concours de l’ENA » n’est pas tout à fait fausse. Cherchez à l’Assemblée une personnalité de moins de cinquante ans qui soit respectée par sa compétence, son sérieux, sa profondeur humaine… et vous ne trouverez pas. Regardez qui sont les présidents de groupe, sans aller plus loin…
[« Le dernier exemple en date nous est fourni par notre propre système politique : alors qu’une majorité nette s’est prononcé pour une rupture avec les politiques macronistes, ce sont toujours les affidés de Macron qui gouvernent le pays. » En même temps, si l’on dit « que les élections ont cessé d’être importantes » cela signifierait d’une forme d’indifférence relative au groupe au pouvoir.]
Et c’est bien ce qu’on observe. Les électeurs pensent de moins en moins, lorsqu’ils expriment leur vote, au fait que celui qu’ils élisent aura à exercer le pouvoir. Sans cela, le RN ou LFI seraient encore à l’état groupusculaire – comme l’ont été les extrêmes pendant la plus longue partie de notre histoire. Le pompon, on le trouve à l’élection de juillet dernier, où l’électorat a voté en majorité pour le « front républicain » en sachant parfaitement que ce rassemblement hétéroclite n’avait aucune chance de pouvoir gouverner ensemble.
C’est cette « indifférence relative au groupe au pouvoir » qui rend la situation si dangereuse. Hier, les électeurs faisaient très attention avant de confier les manettes à tel ou tel mouvement politique. C’est pourquoi les propositions « originales » avaient quelquefois des sondages favorables trois ou quatre mois avant l’élection, mais s’effondraient sur la ligne d’arrivée : l’électorat pouvait sympathiser avec telle ou telle proposition, mais in fine votait pour ceux qu’il estimait capables de gouverner raisonnablement. Aujourd’hui, parce qu’on est convaincu que notre vote ne changera rien, on est prêt à voter pour n’importe qui, sans filtre. Trump ou Milei sont de bons exemples de cette dérive. Chez nos vieilles démocraties européennes, les digues sont plus solides, mais elles commencent à céder…
[D’autre part, je crois que le phénomène n’est pas nouveau, il y a toujours une crainte de ce qui n’est pas familier, routinier (trouvez le bon terme).. que l’on aime ou non.]
Bien entendu. L’inconnu fait peur – et c’est logique, c’est une peur qui tend à conserver un état connu. Mais je ne comprends pas très bien le lien que vous faites avec mon commentaire. La « rupture avec les politiques macronistes » n’implique pas nécessairement un saut dans l’inconnu. Pensez par exemple à l’abrogation de la réforme des retraites. En quoi cela nous ferait sortir de la « routine » ?
[Permettez moi de nuancer ici encore : ces derniers peuvent avoir aussi leur force dans un désert d’alternatives.]
Mais c’était bien là mon point ! Si les « influenceurs » et les « réseaux sociaux » sont dangereux, ce n’est pas parce qu’ils le sont intrinsèquement, mais parce qu’ils opèrent dans un « désert d’alternatives ». Alors, peut-être faudrait-il consacrer moins d’efforts à réguler leur expression, et plus d’efforts à transformer ce désert en un verger…
[Par ailleurs, je pense que nous serons d’accord pour n’avoir aucune amitié avec Trump, qui est, comme le précédent, mais à sa manière un défenseur des intérêts du capitalisme américain]
Tout à fait. Je n’ai aucune sympathie particulière pour le personnage, pas plus que pour l’idéologie qu’il porte. Ce qui n’empêche pas de regarder avec lucidité les travers de ses adversaires et de ses critiques. Ou d’admettre que ce n’est pas parce que Trump ou ses affidés déclarent qu’il fait jour à midi qu’il faut dire ou penser le contraire.
La victoire de Trump est celle d’une droite décomplexée. Et parce qu’elle est décomplexée, elle exprime tout haut des choses que d’autres gardaient soigneusement sous le tapis. C’est en ce sens là que leur discours peut avoir un effet secondaire positif, celui de dissiper un certain nombre d’illusions qui empêchent de voir la réalité en face. C’est le cas par exemple en ce qui concerne la Palestine, où le discours sur « la solution à deux états » occultait le fait que les puissances – les Etats-Unis mais aussi l’Europe – regardaient sans rien faire l’Etat d’Israel préparer le nettoyage ethnique de Gaza et de la Cisjordanie, à Gaza en rendant la vie des habitants aussi difficile que possible, en Cisjordanie par le mitage du territoire et le harcèlement des habitants arabes. Maintenant, les masques tombent. Est-ce un mal ? Je ne sais pas, mais j’en doute. Le discours de Biden nous permettait peut-être à tout le monde de mieux dormir la nuit. Celui de Trump obligera tout le monde à prendre une position claire.
[Des coopérations tous azimuts en fonction d’intérêts communs peuvent intervenir en conservant la souveraineté au sein des nations.]
Tout à fait. D’ailleurs les exemples ne manquent pas. Concorde ou Airbus ne sont pas des entreprises communautaires, mais des projets élaborés par la négociation entre états en pleine souveraineté. Le CERN est un grand succès qui ne doit rien à l’Union européenne, mais qui là aussi résulte de traités entre états sans le moindre sacrifice de souveraineté.
@ Descartes
[“C’est pourquoi les propositions « originales » avaient quelquefois des sondages favorables trois ou quatre mois avant l’élection, mais s’effondraient sur la ligne d’arrivée : l’électorat pouvait sympathiser avec telle ou telle proposition, mais in fine votait pour ceux qu’il estimait capables de gouverner raisonnablement. Aujourd’hui, parce qu’on est convaincu que notre vote ne changera rien, on est prêt à voter pour n’importe qui, sans filtre. Trump ou Milei sont de bons exemples de cette dérive.”]
Je sais bien que Donald Trump n’arrive sans doute pas à la cheville de Fabien Roussel, votre candidat ‘pro-viande” préféré pour la présidentielle de 2022, mais le Trump de 2024 n’était tout de même pas ce “n’importe qui” incapable de “gouverner raisonnablement” qu’il pouvait paraître en 2016. Entre-temps, il avait effectivement gouverné somme toute “raisonnablement” durant 4 ans, et surtout, il avait réussi à prendre totalement le contrôle du parti républicain, ce qui faisait désormais de lui, me semble-t-il, un candidat on ne peut plus sérieux et crédible. Au fait, veuillez accepter toutes mes condoléances pour le récent crash électoral de Louis Boyard, le candidat soutenu par le PCF à Villeneuve St Georges 😉
@ dsk
[Je sais bien que Donald Trump n’arrive sans doute pas à la cheville de Fabien Roussel,]
Vous allez un peu vite en besogne. Si vous évaluez les gens à leur capacité à gagner des élections ou de l’argent. Alors Roussel n’est certainement pas au niveau de Trump. Mais personnellement j’ai d’autres critères…
[votre candidat ‘pro-viande” préféré pour la présidentielle de 2022, mais le Trump de 2024 n’était tout de même pas ce “n’importe qui” incapable de “gouverner raisonnablement” qu’il pouvait paraître en 2016. Entre-temps, il avait effectivement gouverné somme toute “raisonnablement” durant 4 ans,]
Sur cette question, les avis diffèrent. Si tout le monde juge qu’il a effectivement gouverné entre 2016 et 2020, le jury délibère encore sur la question de savoir s’il l’a fait « raisonnablement ». Certains considèrent par exemple que son comportement lors de l’attaque contre le capitole ou la manière dont il a cherché à contester le résultat de l’élection de 2020 échappent très largement au domaine de la Raison…
[et surtout, il avait réussi à prendre totalement le contrôle du parti républicain, ce qui faisait désormais de lui, me semble-t-il, un candidat on ne peut plus sérieux et crédible.]
« Crédible », au sens qu’il peut gagner une élection, possiblement. Mais je ne vois pas en quoi le fait de prendre le contrôle du parti républicain fait de vous un candidat « sérieux ». Là encore, il me semble que nous n’avons pas les mêmes critères pour juger du « sérieux »…
[Au fait, veuillez accepter toutes mes condoléances pour le récent crash électoral de Louis Boyard, le candidat soutenu par le PCF à Villeneuve St Georges]
Pourquoi des condoléances ? Le crash de Boyard me remplit au contraire d’aise. Je peux regretter que sa candidature ait empêché un candidat communiste bien implanté de reprendre la mairie, mais ma douleur s’arrête là.
« Si les politiques de centre, de droite et de gauche ont fait les mêmes politiques, ce n’est pas nécessairement de gaîté de cœur. «
C’est bien pourquoi la « cible » n’est pas les individus en soi mais la politique qu’ils impulsent en rapport aux intérêts qu’ils défendent consciemment ou non. Cela dit, certains de ces politiques sont d’une arrogance telle qu’ils ne peuvent que déclencher des réactions épidermiques même s’il nous faut nous en garder dans notre réponse.
« l’impuissance du politique entraîne presque mécaniquement une dégradation du personnel politique. Autrefois entraient en politique les plus brillants, etc, »
Oui, ce phénomène touche aussi, hélas, le personnel syndical.
« Mais je ne comprends pas très bien le lien que vous faites avec mon commentaire. La « rupture avec les politiques macronistes » n’implique pas nécessairement un saut dans l’inconnu. Pensez par exemple à l’abrogation de la réforme des retraites. En quoi cela nous ferait sortir de la « routine » ? «
Songez que cette abrogation touche aussi les « tables de la loi » européistes (le déficit des comptes publics ET sociaux ne doivent pas excéder 3 % du PIB – critère de Maastricht).
Même si cela ne sortirait pas de la « routine » il faut trouver un autre poste dans la même veine à trancher.
A ce sujet, une évidente convergence entre le groupe LR et les macronistes des différentes obédiences avec le fait d’un refus souvent réciproque RN/NFP de mêler ses voix dans une motion de censure (et c’est peut-être là où « L’inconnu fait peur » pour nombre de nos compatriotes?),
@ morel
[C’est bien pourquoi la « cible » n’est pas les individus en soi mais la politique qu’ils impulsent en rapport aux intérêts qu’ils défendent consciemment ou non. Cela dit, certains de ces politiques sont d’une arrogance telle qu’ils ne peuvent que déclencher des réactions épidermiques même s’il nous faut nous en garder dans notre réponse.]
Tout à fait. Même s’il faut être conscient des contraintes qui limitent la liberté d’action des politiques, ceux-ci gardent quand même une marge de manœuvre, surtout dans l’expression. J’ai plus de respect pour un Montebourg qui a essayé – même s’il a échoué – que pour un Hollande qui s’est coulé dans le moule.
@Descartes
Une question qui peut apparaitre comme faussement naïve, mais qui n’en est pas moins une vraie interrogation, car je sais que vous saurez y répondre de manière précise :
Je crois savoir que c’était vrai jusqu’au traité de Lisbonne, mais que, depuis le traité de Lisbonne, il y a bel et bien une supériorité du droit européen qui a, juridiquement, été gravée dans le marbre d’un traité ratifié par notre Parlement.
Est-ce exact ? Ou cette supériorité ne repose-t-elle, encore aujourd’hui, que sur des décisions prétoriennes ?
@ Vincent
[Je crois savoir que c’était vrai jusqu’au traité de Lisbonne, mais que, depuis le traité de Lisbonne, il y a bel et bien une supériorité du droit européen qui a, juridiquement, été gravée dans le marbre d’un traité ratifié par notre Parlement. Est-ce exact ? Ou cette supériorité ne repose-t-elle, encore aujourd’hui, que sur des décisions prétoriennes ?]
Je vais essayer de vous répondre précisément. Non, il n’y a pas de supériorité du droit européen « gravé dans le marbre d’un traité ». La mention ne figure pas dans le texte du traité de Lisbonne, et la question n’est abordée que dans une déclaration annexée au traité, déclaration qui se contente de rappeler la jurisprudence de la CJUE sans prétendre à la moindre valeur normative. Voici le texte exact de la déclaration en question :
17. Déclaration relative à la primauté
La Conférence rappelle que, selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne, les traités et le droit adopté par l’Union sur la base des traités priment le droit des États membres, dans les conditions définies par ladite jurisprudence.
En outre, la Conférence a décidé d’annexer au présent Acte final l’avis du Service juridique du Conseil sur la primauté tel qu’il figure au document 11197/07 (JUR 260):
Avis du Service juridique du Conseil du 22 juin 2007
Il découle de la jurisprudence de la Cour de justice que la primauté du droit communautaire est un principe fondamental dudit droit. Selon la Cour, ce principe est inhérent à la nature particulière de la Communauté européenne. À l’époque du premier arrêt de cette jurisprudence constante (arrêt du 15 juillet 1964 rendu dans l’affaire 6/64, Costa contre ENEL [1], la primauté n’était pas mentionnée dans le traité. Tel est toujours le cas actuellement. Le fait que le principe de primauté ne soit pas inscrit dans le futur traité ne modifiera en rien l’existence de ce principe ni la jurisprudence en vigueur de la Cour de justice.
[1] “Il [en] résulte (…) qu’issu d’une source autonome, le droit né du traité ne pourrait donc, en raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu’il soit, sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté elle-même.”
Comme vous pouvez le constater, il ne s’agit que d’un simple rappel de jurisprudence. Le principe garde donc son caractère prétorien. Vous noterez par ailleurs que la jurisprudence Costa, telle que formulée par la CJUE, affirme la primauté du droit européen sur “un texte interne QUEL QU’IL SOIT”, donc y compris la constitution de chaque état. Une prétention que notre Conseil constitutionnel a rejeté, et qui créerait un curieux paradoxe: un traité ratifié dans les formes prescrites par la Constitution serait… supérieur à la Constitution!
[Derrière l’affaire roumaine, se profile l’idée que le peuple est bête, et que son vote doit être surveillé voire « corrigé » par les élites intelligentes qui savent ce qui est bon pour lui.]
C’est donc la mort de l’esprit des Lumières, fondement de la démocratie, qui postulait qu’un citoyen éclairé serait à même de faire les bons choix. Vous êtes un des seuls à le souligner.
@ maleyss
[C’est donc la mort de l’esprit des Lumières, fondement de la démocratie, qui postulait qu’un citoyen éclairé serait à même de faire les bons choix.]
Ca va beaucoup plus loin: non seulement on dénie la capacité du citoyen éclairé à faire les “bons choix” – ce qui suppose d’avoir des citoyens éclairés, ce qui n’est pas évident – mais on lui dénie même le droit à faire le choix, principe qui sous tend toute la logique démocratique.
Je vous remercie pour cette admirable synthèse. Il n’y a pas une virgule à changer. C’est réconfortant, aussi, en ces temps troublés, de voir qu’il existe des êtres qui partagent aussi intimement ses propres convictions profondes.
Ressentez-vous comme moi depuis quelques jours une jubilation malsaine devant l’éclatement des dernières façades du village Potemkine européen ?
Qu’avez-vous pensé devant les larmes de l’organisateur de la conférence de Münich ?
Personnellement, je me suis dit que ces gens étaient finalement peut-être sincères malgré l’énormité des bêtises accumulées depuis des décennies. Ça n’a pas diminué ma jubilation.
Mais cette jouissance, qui est teintée de vanité, est malsaine. Parce que, honnêtement, je ne vois pas d’issue favorable pour nous, Français comme Européens, ni sur le court, ni sur le moyen, ni sur le long terme.
Les éléments qui ont mis à mal nos démocraties, institutionnels, économiques, idéologiques, sont extrêmement puissants et solidement ancrés. Personne dans le système n’est capable de se remettre un seul instant en cause : le mécanisme de déni, que j’ai pu observer directement à de multiples reprises, ayant quelques connaissances dans les institutions européennes, est total. La puissance des illusions que vous décrivez si bien est immense. Et l’animosité latente entre les États membres, surtout entre l’Allemagne et la France, n’a jamais été aussi élevée.
Il est vrai que la situation pourrait paraître superficiellement favorable à la France, qui a gardé quelques reliques utiles de son passé, mais avec Macron aux commandes il n’y a strictement rien à espérer. L’opportunité de reprendre l’initiative sera perdue.
Je sais que vous êtes de nature optimiste, contrairement à moi. Peut-être voyez-vous des portes entrouvertes que je ne distingue pas.
Personnellement, je pense plus à fuir qu’à combattre. En attendant, je vais peut-être aller m’acheter un cochon d’inde.
@ Franck
[Ressentez-vous comme moi depuis quelques jours une jubilation malsaine devant l’éclatement des dernières façades du village Potemkine européen ?]
Oui, je l’avoue. Mais la Schadenfreude a certaines limites. Après quelques moments de joie, je vous avoue que je suis surtout très inquiet. Bien sûr, tout cela ne me surprend pas. Je suis convaincu depuis longtemps que la politique est une affaire tragique, et que nous vivons dans un monde dangereux. Mais comme disait je ne sais plus qui, « le savoir est une chose, et le croire c’en est une autre ».
[Qu’avez-vous pensé devant les larmes de l’organisateur de la conférence de Münich ?]
Qu’il n’y avait pas assez de lapins et de cochons d’Inde à caresser ?
Plus sérieusement, il semblerait que les « larmes » en question du diplomate allemand Christoph Heugen tenaient plutôt à son émotion de quitter la présidence de la conférence (qu’il exerçait depuis 2022) qu’aux termes de la déclaration de Vance. Mais quoi qu’il en soit, je vous avoue que je n’apprécie que très moyennement la sentimentalité en public.
[Personnellement, je me suis dit que ces gens étaient finalement peut-être sincères malgré l’énormité des bêtises accumulées depuis des décennies. Ça n’a pas diminué ma jubilation.]
Leur sincérité n’est à mon avis pas en cause. Les véritables cyniques sont relativement rares, et la plupart des gens – hommes politiques compris – ont une grande capacité d’auto-conviction qui les fait finalement croire sincèrement aux idées qui les arrangent. La plus part des atlantistes croient sincèrement qu’on peut compter sur la parole des Etats-Unis, et sont les premiers choqués de constater que ce n’est pas le cas.
[Mais cette jouissance, qui est teintée de vanité, est malsaine. Parce que, honnêtement, je ne vois pas d’issue favorable pour nous, Français comme Européens, ni sur le court, ni sur le moyen, ni sur le long terme.]
Vaut-il mieux vivre dans l’illusion, ou bien se confronter à la réalité ? « Where ignorance is bliss, it is folly to be wise » écrivait John Gray. Mais personnellement je trouve que le simple fait que ceux qui sont appelés à prendre des décisions soient obligés à les prendre en fonction de la réalité et non d’une illusion est quand même un considérable progrès. Ceux qui – et c’est mon cas – se battent pour que notre pays reprenne en main les instruments de sa souveraineté – sur le plan institutionnel et juridique, mais aussi sur le plan économique, social et industriel – auront moins de mal à faire valoir leur point de vue. Ce n’est pas négligéable.
[Les éléments qui ont mis à mal nos démocraties, institutionnels, économiques, idéologiques, sont extrêmement puissants et solidement ancrés. Personne dans le système n’est capable de se remettre un seul instant en cause : le mécanisme de déni, que j’ai pu observer directement à de multiples reprises, ayant quelques connaissances dans les institutions européennes, est total. La puissance des illusions que vous décrivez si bien est immense.]
Tout à fait. C’est pourquoi tout ce qui peut contribuer à déchirer le voile de l’illusion, tout ce qui peut forcer à sortir du déni, tout ce qui impose des remises en cause ne peut être que bénéfique. Trump ne résoudra probablement aucun problème – et certainement aucun de NOS problèmes – mais si son action nous permet d’en prendre conscience, c’est déjà pas mal.
[Il est vrai que la situation pourrait paraître superficiellement favorable à la France, qui a gardé quelques reliques utiles de son passé, mais avec Macron aux commandes il n’y a strictement rien à espérer. L’opportunité de reprendre l’initiative sera perdue.]
Oui. Mais Macron n’est pas éternel…
[Je sais que vous êtes de nature optimiste, contrairement à moi. Peut-être voyez-vous des portes entrouvertes que je ne distingue pas. Personnellement, je pense plus à fuir qu’à combattre.]
Pas moi. J’aime trop le combat, peut-être…
[En attendant, je vais peut-être aller m’acheter un cochon d’inde.]
Dépêchez-vous, à la vitesse ou ça va, il n’y en aura pas pour tout le monde…
@ Descartes
Un peu hors sujet – quoique ce ne soit pas si sûr puisque vous évoquez la démocratie : que pensez-vous de l’arrêt forcé de la chaine de télé C8 ?
@ Bob
[Un peu hors sujet – quoique ce ne soit pas si sûr puisque vous évoquez la démocratie : que pensez-vous de l’arrêt forcé de la chaine de télé C8 ?]
Je pense que c’est une mesure de salubrité publique. La liberté d’expression n’est pas le droit de dire n’importe quoi, et comme l’a signalé l’ARCOM – et le Conseil d’Etat a validé son analyse en rejetant le recours présenté contre sa décision – C8 dérape régulièrement, et viole systématiquement les conditions légales de son autorisation d’émettre, s’imaginant que ses niveaux d’audience la mettent à l’abri de toute sanction. Il n’est pas inutile de rappeler de temps en temps que personne n’est au dessus des lois, pas même Cyril Hanouna.
@ Descartes
A ce point-là ? Je pense qu’une chaine (en fait surtout un animateur, car c’est bien Hanouna qui dérange) qui invitait les gilets jaunes, les laissait s’exprimer, ou bien ne relayait pas benoitement les messages – avec le recul, mensongers – du gouvernement durant l’épisode du covid-19, et qui est en effet très populaire, irrite au plus haut point.
Quelles conditions légales ont été violées ?
@ Bob
[A ce point-là ? Je pense qu’une chaine (en fait surtout un animateur, car c’est bien Hanouna qui dérange) qui invitait les gilets jaunes, les laissait s’exprimer, ou bien ne relayait pas benoitement les messages – avec le recul, mensongers – du gouvernement durant l’épisode du covid-19, et qui est en effet très populaire, irrite au plus haut point.]
Possible. Mais ce n’est pas cela qui motive la décision de l’ARCOM, qui liste les violations des conditions légales de diffusion. Voici quelques exemples d’affaires sanctionnés par l’ARCOM (ce qui laisse de côté les infractions mineures, probablement beaucoup plus nombreuses):
Juillet 2019: diffusion d’un reportage falsifié (Dans « Enquête sous haute tension », plusieurs scènes ont été présentées comme ayant été filmées à Méru (Oise), alors qu’elles se déroulaient en dehors de cette ville et en renvoyaient une image négative): violation de l’obligation d’honnêteté et d’indépendance de l’information.
Mars 2019: en février 2019, a été diffusé le match entre le Stade de Reims et l’Olympique de Marseille alors qu’il était initialement programmé sur Canal+ Premium, et ce malgré l’opposition du CSA quelques jours auparavant: non-respect de la convention sur l’encadrement des déprogrammations.
Mai 2017: Cyril Hanouna a réalisé un canular homophobe en piégant des personnes LGBTQ+ par téléphone. Violation du principe de respect de la vie privée, obligation de lutter contre les discriminations.
Mai 2017: Dans « TPMP », en décembre 2016, Cyril Hanouna a posé la main de la chroniqueuse Capucine Anav sur son sexe alors qu’elle avait les yeux fermés.
Février 2021: Dans « TPMP » et « La Grande Darka », en septembre 2019, Cyril Hanouna a fait la promotion de la compagnie aérienne Skyline Airways. Volation des obligatios des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainage et de téléachat.
Octobre 2021: Sur C8, en août 2021, a été diffusé en prime time “Unplanned”, un film qui délivre un message hostile à l’interruption volontaire de grossesse. Violation des règles de programmation, heure de programmation du film non adaptée.
Novembre 2022: Dans « TPMP », en octobre 2022, Cyril Hanouna a appelé à plusieurs reprises à un procès expéditif et à une condamnation à perpétuité automatique dans l’affaire du meurtre de la jeune Lola.Violation de l’obligation de traiter avec mesure une affaire judiciaire en cours.
Décembre 2022: Pour l’année 2021, C8 a effectué sept dépassements du temps maximal de publicité autorisé. Violation du temps maximal de publicité autorisé.
Février 2023: Dans « TPMP », en novembre 2022, Cyril Hanouna a tenu, de façon répétée, des propos injurieux face au député de La France insoumise Louis Boyard. Violation de l’obligation de respect des personnes.
Juin 2023: Dans « TPMP », en mars 2023, quatre invités ont été présentés à tort par Cyril Hanouna comme appartenant à la BRAV-M, alors qu’ils ne faisaient pas partie de cette unité, selon la Préfecture de police de Paris. Violation de l’obligation d’honnêteté et de rigueur dans la présentation et le traitement de l’information.
Juillet 2023: Dans « TPMP », en mars 2023, un invité a évoqué la consommation par certaines personnalités d’adrénochrome, une substance présentée à l’antenne comme étant issue de sang d’enfants kidnappés et sacrifiés. Violation de l’obligation d’honnêteté et de rigueur dans la présentation et le traitement de l’information, obligation de maîtrise de l’antenne.
Janvier 2024: Dans « TPMP », en janvier 2023, des propos violents, grossiers et dépréciatifs ont été proférés à l’encontre de la fille mineure de Johnny et Laeticia Hallyday. Violation de l’obligation de maîtrise de l’antenne.
Mars 2024: Dans « TPMP », en février, l’ancienne star de télé-réalité a raconté son viol, avec des difficultés d’élocution qu’elle attribuait à son traumatisme. Les chroniqueurs ont continué à lui poser des questions intrusives alors qu’elle était dans une situation de grand malaise. Violation de l’obligation de retenue dans la diffusion d’images susceptibles d’humilier les personnes, obligation de maîtrise de l’antenne.
Juillet 2024: Dans les émissions, « PAF avec Baba. Ouvert à tous », en septembre 2023, et « Face à Hanouna », en février 2024, des personnes en plateau portaient des baskets dont la marque était identifiable et apparaissait en gros plan dans plusieurs séquences. Violation de l’obligation des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainage et de téléachat
Février 2020: Dans « TPMP », en octobre 2018, ont été diffusées des photos dénudées de l’animatrice Karine Ferri lorsqu’elle avait 18 ans alors que la justice avait interdit, en 2004, la diffusion de ces clichés vendus à son insu. Violation du principe de respect de la vie privée
Est-ce que cette sélection vous suffit, ou dois-je continuer ?
A mon sens, ces violations continues justifient à elles seules le retrait de l’autorisation à émettre. Pas besoin d’aller chercher on ne sait quel complot politique.
L’un des critères utilisés par l’ARCOM pour attribuer les fréquences est effectivement l’évaluation du respect par les éditeurs sortants des principes de pluralisme, d’honnêteté et d’indépendance de l’information. Il me semble qu’il y avait également un critère de viabilité économique du projet et un autre de diversité des opérateurs. Or C8 n’est pas rentable et il se trouve par ailleurs que le groupe Bolloré, propriétaire de C8, possède également Cstar, Cnews ainsi que Canal+ et ses déclinaisons.
Bref, il y a suffisamment d’éléments objectifs pour penser que le dossier présenté par C8 ne devait pas être très bon, ou en tous cas être de moins bonne qualité que ceux de RéelsTV et Ouest-FranceTV qui ont été retenus.
@ CZ
[L’un des critères utilisés par l’ARCOM pour attribuer les fréquences est effectivement l’évaluation du respect par les éditeurs sortants des principes de pluralisme (….)].
A cette aune, il faut sur-le-champ fermer quasiment toutes les antennes du service public (télé et radio) qui ne “roulent” que pour la bienpensance à gauche.
Il suffit de voir la différence de traitement que la “journaliste” star de la maison, à savoir Léa Salamé (au passage en couple avec R. Glucksmann, mais cela ne pose apparemment aucun problème “d’indépendance de l’information” à l’ARCOM), réserve à ceux à gauche du spectre et au RN…
[le dossier présenté par C8 ne devait pas être très bon, ou en tous cas être de moins bonne qualité que ceux de RéelsTV et Ouest-FranceTV qui ont été retenus.]
Pas bon ? Mais qui est le juge ? Le comité politique qu’est l’ARCOM ? S’il faut se faire l’arbitre des élégances, je vous le concède, Hanouna n’est pas le meilleur candidat. Les téléspectateurs en revanche placent C8 au 1er rang de la TNT, loin devant les “bonnes” émissions de France 2. Mezzo est une “bonne” chaine, elle attire peu de téléspectateurs cependant, un peu comme Arte je crois.
J’ai hâte de voir la “qualité” que proposera Ouest-France TV.
Hanouna n’est pas vraiment mas tasse de thé, mais – comme Trump et les clashs qu’il génère – il oblige à remettre certaines choses en cause, il “secoue le cocotier”, et c’est une bonne chose.
[il se trouve par ailleurs que le groupe Bolloré, propriétaire de C8, possède également Cstar, Cnews ainsi que Canal+ et ses déclinaisons.]
Allons au bout de la démarche et fermons ces chaines-ci par la même occasion.
PAr ailleurs, j’ai du mal à voir en quoi fermer une chaine permet un meilleur pluralisme.
@ Bob
[« le dossier présenté par C8 ne devait pas être très bon, ou en tous cas être de moins bonne qualité que ceux de RéelsTV et Ouest-FranceTV qui ont été retenus. » Pas bon ? Mais qui est le juge ? Le comité politique qu’est l’ARCOM ?]
L’autorité administrative qu’est l’ARCOM, sous le contrôle du juge administratif, en l’espèce, le Conseil d’Etat. Je serais curieux de savoir quel serait le système que vous proposeriez pour attribuer les canaux disponibles sur la TNT.
[Les téléspectateurs en revanche placent C8 au 1er rang de la TNT, loin devant les “bonnes” émissions de France 2.]
Vous voulez dire que dès lors qu’une chaîne est placée « au premier rang », elle aurait le droit d’ignorer la loi et les termes de la convention qu’elle a signée pour pouvoir émettre ?
[Hanouna n’est pas vraiment mas tasse de thé, mais – comme Trump et les clashs qu’il génère – il oblige à remettre certaines choses en cause, il “secoue le cocotier”, et c’est une bonne chose.]
Certainement. Avant, je croyais que tous les hommes étaient des êtres doués de raison. Maintenant, j’en doute… Non, Hanouna ne secoue aucun « cocotier ». Hanouna est un démagogue grossier, une sorte de Bernard Tapie du XXIème siècle.
@ Descartes
La liste peut sembler longue, mais les premiers reproches remontent à 2017. Une dizaine d’écarts – admettons même qu’il y en ait quelques autres – en 8 ans, pour une chaine qui passe des heures de direct chaque jour, je ne trouve pas cela si impressionnant in fine. Certains sont discutables, par exemple le cas de L. Boyard, cet ancien dealer devenu député, qui était clairement venu faire de la provocation.
Cette chaine, et Hanouna en particulier, a le mérite de proposer de vrais débats, sur les sujets de société comme sur la politique. Certains dégénèrent, sur la forme et sur le fond, c’est indéniable, mais faut-il y préférer des médias qui mettent les “vrais sujets”, ceux qui fâchent, sous le tapis ? Si on veut une télé remplie des clones de LCP, où seules existent les émissions où les gens pensent pareil (souvent la bienpensance d’ailleurs) comme “C à vous” ou tous les “faux débats” sur France 5, aucune obligation légale ne sera violée, c’est vrai, on sera entre gens de “bonne compagnie”. Hanouna, souvent vulgaire, a sans aucun doute un côté détestable, mais comme Trump, au moins il met les pieds dans le plat. Je pense que c’est cela qu’on veut lui faire payer.
Sur le principe de fermeture d’une chaine de télé à présent. Il ne faut pas être naïf ; sans tomber dans le complotisme, qui peut sérieusement croire qu’un “comité” tel que l’ARCOM ait, seul dans son coin, eu l’audace de fermer la 1ère chaîne de la TNT ? Allons… L’ARCOM est une instance politique “par délégation”, il suffit de voir comment ses membres sont choisis : par nomination du président de la République, de l’Assemblée nationale, du président du Sénat, du vice-Président du Conseil d’État. Évidemment que des pressions politiques se sont exercées.
En outre, la seule “régulation” par ce type de comité me pose problème. Si ce qui est dit ou fait sur les plateaux tombe sous le coup de la loi, la justice doit le sanctionner. Mais qu’une instance politique ait le pouvoir de décider, hors de tout jugement judiciaire, ce qui peut ou ne peut pas passer à l’antenne, eh bien, j’ai du mal à voir en quoi cela ne peut être qualifié de censure. Je pense que dans ce domaine rien n’est pire que la censure.
Les députés LFI se sont rendus coupables de nombreux débordements et outrages à l’Assemblée nationale – et ils ont souvent été sanctionné pour cela – , pourquoi une “autorité indépendante” n’a-t-elle pas décidé, comme pour C8, de fermer leur crèmerie ?
Aviez-vous aussi applaudi à la fermeture de Sputnik et RT France ?
@ Bob
[La liste peut sembler longue, mais les premiers reproches remontent à 2017. Une dizaine d’écarts – admettons même qu’il y en ait quelques autres – en 8 ans, pour une chaine qui passe des heures de direct chaque jour, je ne trouve pas cela si impressionnant in fine.]
En fait, il y a une soixantaine d’écarts sanctionnés par l’ARCOM, et cela n’inclut pas les écarts réels mais qui n’ont pas justifié l’ouverture d’une procédure. Pire : certains écarts pourraient être considérés comme des accidents s’ils étaient isolés. Mais quand un écart se reproduit systématiquement (je pense par exemple aux violations des règles sur la publicité déguisée), il faut bien conclure qu’il s’agit d’un choix délibéré de ne pas respecter la loi.
[Certains sont discutables, par exemple le cas de L. Boyard, cet ancien dealer devenu député, qui était clairement venu faire de la provocation.]
Je ne vois pas ce qui est « discutable ». D’abord, ce n’est pas comme si L. Boyard avait vu la lumière et était rentré. Il a été invité par la chaîne. Ensuite, ce n’est pas parce que Boyard fait de la provocation qu’il faut y répondre par des injures publiques. Et enfin, lorsqu’on regarde la séquence, on ne voit pas où se situe la « provocation ». Ce qui a déclenché les injures d’Hanouna, ce fut la mention par Boyard des « cinq hommes les plus riches de France » et de leur action néfaste en Afrique, et parmi eux, de Vincent Bolloré, propriétaire de la chaine.
[Cette chaine, et Hanouna en particulier, a le mérite de proposer de vrais débats, sur les sujets de société comme sur la politique.]
Je ne partage nullement ce point de vue. Un « vrai débat » implique un panel équilibré et un échange ordonné d’arguments, chaque intervenant ayant la possibilité de présenter ses arguments dans un contexte respectueux. Ce qu’Hanouna propose, c’est un pugilat qui fait appel non pas à la raison, mais aux pires émotions.
[Certains dégénèrent, sur la forme et sur le fond, c’est indéniable,]
Non. Ces confrontations sont programmées pour dégénérer. C’est sur cela que C8 fait son beurre. Plus c’est vicieux, plus c’est violent, plus c’est excessif, et plus on fait de l’audience. Je vous conseille vivement de regarder le film d’Elia Kazan, « un homme dans la foule ». Je pense que vous verrez Hanouna sous un autre jour…
[mais faut-il y préférer des médias qui mettent les “vrais sujets”, ceux qui fâchent, sous le tapis ?]
Non, je préfère les médias qui mettent les « vrais sujets » en débat avec des invités qui s’y connaissent, et un animateur qui se fixe comme objectif de créer un climat d’échange bienveillant et intelligent. Pour moi, occulter un « vrai sujet » ou le banaliser jusqu’au ridicule, c’est tout aussi nuisible.
[Hanouna, souvent vulgaire, a sans aucun doute un côté détestable, mais comme Trump, au moins il met les pieds dans le plat. Je pense que c’est cela qu’on veut lui faire payer.]
Insulter ses invités, diffuser de la publicité clandestine, torturer cette pauvre Loana, raconter des bobards c’est « mettre les pieds dans le plat » ? Désolé, mais s’il s’agit de mettre les pieds dans le plat, on peut le faire sans vulgarité, sans ce côté détestable. Et si c’était le cas chez Hanouna, il aurait droit à tout mon soutien. Mais je ne vois pas l’intérêt de maintenir une chaine qui, au prétexte qu’elle mettrait « les pieds dans le plat » se place au-dessus des lois.
[Sur le principe de fermeture d’une chaine de télé à présent. Il ne faut pas être naïf ; sans tomber dans le complotisme, qui peut sérieusement croire qu’un “comité” tel que l’ARCOM ait, seul dans son coin, eu l’audace de fermer la 1ère chaîne de la TNT ?]
Si vous ne voulez pas « tomber dans le complotisme », regardez les motivations de la décision de l’ARCOM et posez-vous une question simple : si c’était à VOUS de juger, estimez-vous que les violations invoquées justifient la décision de retrait de l’autorisation d’émettre ? Moi, je pense que c’est le cas. Autant d’infractions, dont certaines se répètent au point qu’elles ne peuvent être accidentelles, cela justifie la décision à mon avis. Mais si vous ne partagez pas ce diagnostic, alors expliquez-moi quelle serait l’infraction à la loi qui pourrait justifier une telle mesure… ou pensez-vous peut-être que parce qu’Hanouna « met les pieds dans le plan » tout devrait lui être toléré ?
[Allons… L’ARCOM est une instance politique “par délégation”, il suffit de voir comment ses membres sont choisis : par nomination du président de la République, de l’Assemblée nationale, du président du Sénat, du vice-Président du Conseil d’État. Évidemment que des pressions politiques se sont exercées.]
Sauf que la décision de l’ARCOM a été validée par le Conseil d’Etat statuant au contentieux. Pensez-vous que « des pressions politiques » soient derrière sa décision aussi ? Franchement, votre position est du complotisme pur. Vous n’avez aucun élément factuel pour affirmer que l’ARCOM ait retiré l’autorisation à C8 répondant à des « pressions politiques », ou que le Conseil d’Etat ait validé par complaisance. Votre seul argument est « Il faut pas être naïf », « qui peut sérieusement croire que… ». Ce n’est pas sérieux.
Je vous repose donc la question : ayant connaissance des infractions commises par C8, de leur caractère systématique et répétitif, quelle aurait été VOTRE décision ? Auriez-vous prolongé la licence de C8 (en concurrence avec d’autres projets) au motif que malgré toutes ses infractions « elle met les pieds dans le plat » ?
[En outre, la seule “régulation” par ce type de comité me pose problème. Si ce qui est dit ou fait sur les plateaux tombe sous le coup de la loi, la justice doit le sanctionner. Mais qu’une instance politique ait le pouvoir de décider, hors de tout jugement judiciaire, ce qui peut ou ne peut pas passer à l’antenne, eh bien, j’ai du mal à voir en quoi cela ne peut être qualifié de censure. Je pense que dans ce domaine rien n’est pire que la censure.]
Je pense que vous confondez deux questions. D’un côté, il a la question de la répartition des fréquences. Il y a un nombre limité de canaux sur la TNT, et il faut donc bien une autorité qui évalue les différents projets et accorde l’autorisation d’émettre sur les différents canaux. Quelle procédure proposeriez-vous ?
La seconde question est celle des pouvoirs de sanction de l’ARCOM. Ce n’est pas le seul cas d’un organe habilité à prononcer des sanctions administratives. L’inspection du travail, l’autorité de sûreté nucléaire, la direction de la concurrence et la répression des fraudes… et des dizaines d’autres ont l’avantage d’être constitués d’experts de leur domaine, et peuvent donc distinguer ce qui relève de l’accident et ce qui est au contraire sanctionnable. Mais si l’ARCOM peut prononcer des sanctions, elle ne peut « décider hors de toute procédure judiciaire ce qui passe à l’antenne ». D’une part parce que les sanctions de l’ARCOM ne peuvent être prononcées qu’à posteriori (il n’y a aucun contrôle a priori sur les émissions, contrôle qui serait d’ailleurs contraire à la constitution) et d’autre part parce que toutes les décisions de l’ARCOM peuvent être déférées devant le juge administratif. J’ajoute que les décisions de sanction à l’encontre de C8 ont plusieurs fois été déférées. Une seule fois la chaîne a eu gain de cause devant le Conseil d’Etat.
[Les députés LFI se sont rendus coupables de nombreux débordements et outrages à l’Assemblée nationale – et ils ont souvent été sanctionné pour cela – , pourquoi une “autorité indépendante” n’a-t-elle pas décidé, comme pour C8, de fermer leur crèmerie ?]
Je crois que vous n’avez pas compris la nature de la décision prise à l’encontre de C8. Si C8 a envie de continuer à produire des émissions et les diffuser sur les réseaux câblés, rien ne l’empêche. Mais les canaux de la TNT sont en nombre limité, et par conséquent il s’agit d’évaluer les projets des différents candidats à l’octroi d’un canal. Et dans l’évaluation, les garanties de respect des obligations prévues dans la convention d’émission est un élément important. L’ARCOM n’a donc pas pris la décision de « fermer la crémerie » C8, elle a pris la décision de lui préférer un autre projet.
[Aviez-vous aussi applaudi à la fermeture de Sputnik et RT France ?]
Non, parce qu’à ma connaissance ni Sputnik ni RT France n’ont manqué aux obligations légales ou conventionnelles. Ce n’est pas le cas de C8…
Comme l’a dit quelqu’un plus haut, pas une virgule à changer. Et revient d’une manière lancinante, après quelques élans jubilatoires, une forme de déprime, de désespoir, tant la situation est inversement proportionnelle au niveau professionnel et intellectuel du personnel politique (massivement déplorable, sans espoir d’amélioration !). Alors, ce soir même, on nous explique par 100 canaux divers (même les rézosossios !), qu’il serait possible que la France (et la Perfide Albion) seraient sur le point d’envoyer des avions et des bateaux de guerre (c’est l’idée que je retiens). Macron doit aller aux USA la semaine prochaine, certainement pour essayer de convaincre Trump de faire jouer l’article 5 de l’OTAN (on ne sait jamais, sur un malentendu…).
Eh oui ! Lorsqu’une situation s’embourbe à ce point, qu’elle devient ingérable, tellement ingérable que les “Zélites” risquent d’être éjectés par l’Histoire, bah, alors une petite (croient-ils) guerre, rien de mieux, pour effacer l’addition, pour épurer (apurer ?) les écuries, pour faire regarder ailleurs, pour que les sans-dents soudain regardent le doigt au lieu de la lune…
Franchement, vu la situation au bord de l’incontrôlable, j’avoue que j’ai peur (comme on a peur de regarder des enfants jouant avec les allumettes juste à côté d’une bouteille de gaz). Petite remarque subsidiaire : nous voyons le grand manège des US se dérouler sous nos yeux : par principe, ne jamais leur faire confiance, et juger strictement que sur pièce. On verra.
@ Sami
[Comme l’a dit quelqu’un plus haut, pas une virgule à changer. Et revient d’une manière lancinante, après quelques élans jubilatoires, une forme de déprime, de désespoir, tant la situation est inversement proportionnelle au niveau professionnel et intellectuel du personnel politique (massivement déplorable, sans espoir d’amélioration !).]
Si vous voulez trouver une raison de vous flinguer, regardez l’enregistrement du débat sur la motion de censure socialiste de cette semaine. On a honte pour eux.
[Macron doit aller aux USA la semaine prochaine, certainement pour essayer de convaincre Trump de faire jouer l’article 5 de l’OTAN (on ne sait jamais, sur un malentendu…).]
Franchement, j’en doute. D’abord, l’article 5 qu’on brandit à tout bout de champ est beaucoup moins explicite qu’on le croit généralement. Voici le texte exact :
« Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord. »
Autrement dit, la mise en œuvre de l’article 5 oblige chaque état signataire à « prendre (…) telle action qu’elle jugera nécessaire ». Ça ne va pas très loin. On peut supposer d’ailleurs que chaque état prendrait « telle action qu’elle juge nécessaire », traité ou pas…
Ce déplacement de Macron montre confirme un élément de mon commentaire : les acteurs de la politique internationale, quand on en arrive au fond des choses, ce sont les états souverains, et eux seuls. Si Macron veut parler avec Trump, Trump le reçoit rapidement. Je doute que Von der Leyen ou Costa auraient le même accueil, quand bien même ils « représentent un marché de 450 millions de consommateurs ».
[Eh oui ! Lorsqu’une situation s’embourbe à ce point, qu’elle devient ingérable, tellement ingérable que les “Zélites” risquent d’être éjectés par l’Histoire, bah, alors une petite (croient-ils) guerre, rien de mieux, pour effacer l’addition, pour épurer (apurer ?) les écuries, pour faire regarder ailleurs, pour que les sans-dents soudain regardent le doigt au lieu de la lune…]
Malgré le battage médiatique, malgré les articles et reportages remplis de pathos, on ne peut pas dire que l’affaire ait pris. La meilleure preuve en est que les scrutins qui ont eu lieu dans les différents pays européens – y compris les élections des députés européens – se sont jouées essentiellement sur des questions de politique intérieure. Rares ont été les candidats qui ont fait de la question ukrainienne ou la menace russe un élément important de leur campagne.
[Franchement, vu la situation au bord de l’incontrôlable, j’avoue que j’ai peur (comme on a peur de regarder des enfants jouant avec les allumettes juste à côté d’une bouteille de gaz).]
Le parallèle me parait particulièrement pertinent…
[Et tout en se remplissant la bouche du mot « démocratie », ses dirigeants hésitent de moins en moins à contourner le verdict des urnes, quand ils ne l’ignorent pure et simplement. Le « faire play » politique, qui implique d’adhérer à l’esprit des institutions plutôt qu’à leur lettre – tout ce qui est permis n’est pas nécessairement à faire – a tendance à disparaître lorsqu’un traité rejeté par référendum ressuscite miraculeusement par la voie parlementaire.]
Tout a fait d’accord avec vous,, mais si j ai bonne mémoire vous justifiez dans une de vos réponses le fait que Sarkozy se soit assis sur le referendum de 2005 car il avait été élu et que ca faisait parti de son programme présidentiel
[Si les électeurs sont prêts à voter pour n’importe qui, c’est parce qu’ils ne croient pas que leur vote va changer quelque chose…. Parce que les électeurs ont pu faire l’expérience. Ils ont voté à droite, ils ont voté à gauche, ils ont voté au centre, et à chaque fois on arrive au même résultat puisque « il n’y a pas d’alternative ». ]
Le problème a mon avis c’est surtout qu un politicien raconte n’importe quoi pour être élu et une fois élu évidement renie ses promesses. Ça a commence avec Mitterrand en 82 (le tournant de la rigueur qui était en opposition complet avec ses promesses pour être élu) puis continué avec Chirac (la fracture sociale qui était en fait juste une couverture pour dézinguer Balladur). Alors évidement quand est élu une personne dont le seul but est d’être élu et qui une fois élu a comme seule boussole d’être réélu il va pas se passer grand-chose (ce qui dans un certain sens est déjà positif car il va éviter de faire de grosses catastrophes visible a court terme)
[L’élection de Donald Trump ne change rien sur le fond. La politique américaine reste la même, à savoir, une politique faite en fonction des intérêts des Etats-Unis. ]
La je crois que vous vous trompez
Déjà Trump ou Biden n’ont pas du tout la même definition des intérêts des USA (pour simplifier on va dire que pour Trump l intérêt des USA se mesure avec des $ (d ou des propositions aussi délirantes que de transformer gaza en cote d’azur ou de faire des hôtels de luxe en Corée du nord durant son premier mandat). Sur le plan intérieur, Trump est un ploutocrate qui va favoriser les plus riches alors que Biden avait un positionnement pro syndicat (sapé par le positionnement woke des démocrates certes)
Ensuite les dirigeants (pas que Trump) ont une influence énorme sur le long terme. Pour mettre ça en évidence, projetons nous en France dans les années 30. Si les gouvernements de l époque n avait pas englouti tout le budget de la défense dans la ligne Maginot ou réagit quand Hitler a remilitarisé la Rhénanie en violation du traité de Versailles on aurait évité une défaite 10 ans plus tard. On peut reproduire le même schema avec l économie (il aurait fallu faire une relance keynésienne après la crise de 29) …
Vous allez me dire que la période était différente et que les états/économies en 1930 etaient bien plus indépendant que maintenant. Certes mais je suis persuade que Trump va avoir une influence énorme sur le siècle qui vient (il n y a qu a voir l impact de son premier mois : déportation des palestinen de Gaza, confrontation/lâchage avec les allies (Ukraine, Europe, Canada, Mexique). Sur le plan économique ploutocratie et développement des cryptos (à mon avis le futur subprime) )
[En 1960, un homme sans expérience politique et administrative comme Emmanuel Macron n’aurait eu aucune chance d’être élu]
Ça tient surtout au fait qu’ a l époque les médias faisaient l élection. Aujourd hui les journaux n’ont que peu dd’influence et l age moyen des spectateurs du journal TV est de près de 70 ans. Internet (tikTok, facebook …) permet a un inconnu comme le candidat roumain de se faire connaitre rapidement et pour pas cher sans passer par le filtre de notre caste politico/médiatique
Et n’oubliez pas qu un inconnu en 62 a fait 15% face à De Gaulle : Lecanuet
Si on fait un peu de science-fiction, qui auront nous en 2027 comme candidat ? uniquement de personnes qui ne soulèvent aucun enthousiasme : Marine Le Pen/Melanchon/Wauquiez/Philippe voir Hollande (mais si, il y pense). Qu un nouveau Coluche se présente et ses chances sont loin d’être nulles (et il fera certainement un score supérieur a un politicien expérimenté comme Melanchon ou un ex premier ministre)
[Sans cette solidarité inconditionnelle, il est illusoire d’imaginer que les citoyens puissent s’être appelés à soutenir cette vision inconditionnellement, y compris au péril de leur vie.]
Je pense que le sentiment d’appartenir à une nation n’a pas grand-chose à voir avec cette notion de solidarité inconditionnelle. En 1914 il n’y avait aucun des mécanismes de solidarité que nous connaissons aujourd hui (sécurité sociale, retraite, impôt sur le revenu) et pourtant les français de l époque se sont pas dérobés (le taux de désertion était bien plus faible que celui escompte par l état major).
[Cette solidarité inconditionnelle entre européens n’existe pas et n’est pas près d’exister, parce que l’Europe n’est pas une nation…. Personne n’est mort pour le drapeau bleu aux étoiles, et ce n’est pas demain la veille que cela arrivera.]
Vous supposez ici que la nation est l évolution ultime. Avant la nation les gens se battaient et mourraient pour une religion, un dirigeant (roi/empereur (la nation et le roi n a rien a voir. Pensez a Hanovre et le roi d Angleterre) ou tout simplement pour l argent (le mercenariat était la norme avant 1789). Est-ce que la nation restera ou sera remplace par autre chose, je n en sais rien mais vu les tensions dans chaque nation (pas qu aux USA) on ne peut pas exclure d autres formes d organisations
[comme le disait Sun Tzu, la victoire n’appartient pas à l’armée la plus nombreuse, mais à l’armée la plus décidée]
Il y a 2500 ans surement. Aujourd hui ca reste a prouver. Pour rester en Chine, un petit contingent de Français et d anglais a mit en déroute une armée bien plus nombreuse et au moins aussi motivée durant les guerres de l opium. Pourquoi ? Parce que la guerre c’est devenu surtout de la technologie (fusils français contre lances chinoises) et de l’industrie (pouvoir fabriquer en masse).
[A force de répéter que les Américains étaient des « amis » qui « défendaient l’Europe », on a oublié pourquoi ils la défendaient. Ce n’était pas par grandeur d’âme, ou par générosité désintéressée, mais par intérêt.]
Partiellement vrai. Il est évident que les USA ont des intérêts en Europe, mais ca n explique pas tout. L histoire et la culture sont aussi une raison de ce lien USA/Europe. C est pour ces raison par ex que la France s implique plus pour le Liban que pour la Syrie ou la Jordanie
[Et puis, Trump en est convaincu, l’adversaire stratégique aujourd’hui, c’est la Chine.]
C est pas nouveau, la bascule des USA date d Obama. On peut sur ce point critiquer tous nos dirigeants qui n ont rien fait avant que Trump nous tire le tapis sous les pieds. En ce qui concerne les idées de Trump, je pense que c est « America First ». Autrement dit l Europe ne compte pas mais Taiwan a aussi du souci a se faire car en cas d invasion chinoise il est loin d être sur qu’ il les aide.
[Un ensemble (UE) administré – on n’ose pas dire gouverné – par une bureaucratie sans âme et des politiciens complètement déconnectés des réalités du monde.]
On peut dire la même chose de la France : bureaucratie et politiciens déconnectés ca ne manque pas chez nous
[C’est par le sentiment du tragique que les électeurs cesseront d’imaginer qu’on peut confier les rênes de l’Etat à n’importe qui, que le débat politique deviendra véritablement une affaire sérieuse.]
Pour cela il faudrait qu il y a ait une offre. Nos parti politique ne sont que des écuries présidentielles et n’ont aucune réflexion de fond ou même d’idée sur la direction que la France devrait emprunter. Quant aux candidats ils sont juste mus par leur ego et sont prêt a raconter n’importe quoi pour se faire élire. La plupart d’ailleurs pensent que leur principal atout n’est pas eux même mais la répulsion de Marine Le Pen (si j’arrive au second tour, je gagne car l’électeur votera contre MLP)
@ cdg
[Tout a fait d’accord avec vous,, mais si j ai bonne mémoire vous justifiez dans une de vos réponses le fait que Sarkozy se soit assis sur le referendum de 2005 car il avait été élu et que ça faisait partie de son programme présidentiel]
Pas tout à fait. Si ma mémoire ne me trompe pas, j’avais surtout insisté sur le fait que le texte du traité de Lisbonne n’était pas tout à fait équivalent au TCE (puisqu’il n’avait plus un caractère « constituant »), et que de ce fait on pouvait difficilement considérer que la ratification était juridiquement attaquable. Mais je ne me souviens pas d’avoir soutenu que la décision était politiquement juste. Si je l’ai fait, j’ai eu tort.
[« Si les électeurs sont prêts à voter pour n’importe qui, c’est parce qu’ils ne croient pas que leur vote va changer quelque chose…. Parce que les électeurs ont pu faire l’expérience. Ils ont voté à droite, ils ont voté à gauche, ils ont voté au centre, et à chaque fois on arrive au même résultat puisque « il n’y a pas d’alternative ». » Le problème a mon avis c’est surtout qu un politicien raconte n’importe quoi pour être élu et une fois élu évidement renie ses promesses.]
Je ne suis pas d’accord. La figure du politique qui fait des promesses à la tribune et les oublie une fois élu est aussi vieille que la démocratie. La figure du « démagogue » qui promet tout ce que les électeurs veulent pour être élu figure déjà dans les textes antiques. Et les électeurs n’ont d’ailleurs jamais été dupes : ils savaient que les promesses électorales doivent être considérées comme un acte de séduction, et non comme des promesses fermes. Comme l’amoureux qui promet à sa Dulcinée de lui décrocher la lune… ni l’un ni l’autre pense qu’il va VRAIMENT la décrocher.
Même si naguère les politiques ne tenaient pas leurs promesses, ils mettaient en œuvre des politiques différentes, prévisibles en fonction de la trajectoire du politicien et de son parti, et de la composition de son électorat. Quand on élisait un politicien de droite, on avait une politique de droite, quand on élisait un politicien de gauche, on avait une politique de gauche. Elire Blum ou Laval, ce n’était pas la même chose. Ce qui a changé, c’est qu’aujourd’hui quelque soit le politicien au pouvoir vous avez la MEME politique. Au point que les politiques deviennent interchangeables. Avoir à Matignon Castex ou Attal, Philippe ou Borne, quelle différence ? Le style peut être différent, mais la politique est la même.
[Ça a commence avec Mitterrand en 82 (le tournant de la rigueur qui était en opposition complet avec ses promesses pour être élu)]
Certes. Mais si Mitterrand n’a pas ténu ses promesses, il a fait la politique que son électorat – les classes intermédiaires et la bourgeoisie urbaine – attendaient de lui, et qui n’était du tout celle qu’avaient fait ses prédécesseurs, ou qu’auraient fait ses adversaires. Mais c’est pendant la présidence Mitterrand que la transformation se fait : Mitterrand est le dernier président à avoir en main l’ensemble des leviers. Pensez-y : quand Mitterrand arrive à l’Elysée, l’Etat contrôle la politique monétaire et budgétaire et l’ensemble du crédit. Il a en main tous les leviers de la politique industrielle, y compris la régulation de la concurrence. Il a le contrôle des frontières et de la politique d’immigration. Par le biais du secteur nationalisé, il contrôle des pans entiers de l’économie. Lorsque Mitterrand quitte le pouvoir quatorze ans plus tard, tout cela est parti. Tous se successeurs seront des « présidents diminués », condamnés à administrer le pays plutôt qu’à le gouverner. Et contraints, quelque soient par ailleurs leurs convictions, à faire les mêmes politiques.
[« L’élection de Donald Trump ne change rien sur le fond. La politique américaine reste la même, à savoir, une politique faite en fonction des intérêts des Etats-Unis. » Là je crois que vous vous trompez
Déjà Trump ou Biden n’ont pas du tout la même définition des intérêts des USA (pour simplifier on va dire que pour Trump l’intérêt des USA se mesure avec des $ (d’ou des propositions aussi délirantes que de transformer gaza en côte d’azur ou de faire des hôtels de luxe en Corée du nord durant son premier mandat).]
Oui, mais au-delà des « propositions délirantes », il n’a fait aucun hôtel de luxe en Corée du Nord, que je sache. L’élection de Trump changera certainement beaucoup de choses du point de vue du langage, mais en termes de politique internationale, je doute que cela change profondément les positions américaines. En Palestine, Trump dira tout haut ce que l’administration Biden pensait tout bas, mais pensez-vous vraiment que sur le fond cela changera quelque chose ? En Ukraine, je pense que les démocrates auraient cherché une sortie de la même manière que Trump : après trois ans de guerre, il est clair que la prolongation du conflit joue en faveur de la Chine, dont la Russie devient de plus en plus dépendante, mais aussi de l’Iran et d’autres affreux que les Américains n’ont pas envie de voir remis en selle.
[Sur le plan intérieur, Trump est un ploutocrate qui va favoriser les plus riches alors que Biden avait un positionnement pro syndicat (sapé par le positionnement woke des démocrates certes)]
J’aurais du préciser que je parlais de politique internationale. Je ne connais pas assez la politique intérieure américaine pour avoir un avis.
[Ensuite les dirigeants (pas que Trump) ont une influence énorme sur le long terme. Pour mettre ça en évidence, projetons nous en France dans les années 30. Si les gouvernements de l’époque n’avaient pas englouti tout le budget de la défense dans la ligne Maginot ou réagit quand Hitler a remilitarisé la Rhénanie en violation du traité de Versailles on aurait évité une défaite 10 ans plus tard.]
Je ne suis pas sûr que les décisions dont vous parlez aient été le fait des « dirigeants » seuls. Le pacifisme était un courant très puissant dans la France de l’entre-deux-guerres. Ce ne sont pas « les dirigeants » mais l’opinion publique elle-même qui a poussé à une politique défensive – dont la ligne Maginot n’est qu’un élément. C’est l’opinion publique qui était absolument opposée à « mourir pour Dantzig », et qui a soutenu massivement la capitulation de Munich. C’est l’opinion publique qui n’imaginait pas un instant les armées françaises traverser le Rhin pour s’opposer à la remilitarisation. Dans une démocratie, les « dirigeants » sont-ils coupables lorsqu’ils ne font que mettre en œuvre les souhaits de leurs électeurs ? Vous avez quatre heures…
[On peut reproduire le même schema avec l économie (il aurait fallu faire une relance keynésienne après la crise de 29) …]
Autrement dit, violer les libéraux ? Décréter que les marchés ne sont pas capables de s’auto-réguler et que l’Etat doit intervenir dans l’économie ? Je ne crois pas mes yeux…
[Vous allez me dire que la période était différente et que les états/économies en 1930 etaient bien plus indépendant que maintenant. Certes mais je suis persuade que Trump va avoir une influence énorme sur le siècle qui vient (il n y a qu a voir l impact de son premier mois : déportation des palestinen de Gaza, confrontation/lâchage avec les allies (Ukraine, Europe, Canada, Mexique). Sur le plan économique ploutocratie et développement des cryptos (à mon avis le futur subprime) )]
Mais pensez-vous que si demain Trump passait sous un camion, cela changerait l’histoire ? Personnellement, j’en doute. Le nettoyage ethnique est un vieux projet israélien, qui se réalise pas à pas depuis plus de vingt ans. Le lâchage d’un certain nombre « d’alliés » devenus inutiles dans la nouvelle configuration du monde est, là aussi, un processus en cours depuis des années. Quant au développement de la ploutocratie… Je persiste : Trump pourra « déchirer le voile d’illusion » avec son langage cash, peut-être accélérera un petit peu le mouvement, mais je ne pense pas qu’il changera vraiment les choses. Il s’inscrit simplement dans un mouvement qui le dépasse largement.
[« En 1960, un homme sans expérience politique et administrative comme Emmanuel Macron n’aurait eu aucune chance d’être élu » Ça tient surtout au fait qu’ a l’époque les médias faisaient l’élection.]
Si les médias avaient fait l’élection, De Gaulle n’aurait pas été élu en 1965… je ne pense pas que les médias avaient autant de pouvoir que vous leur prêtez. Je pense surtout qu’à l’époque c’étaient les partis politiques qui faisaient les candidats, et qu’un candidat devait donc passer par un mécanisme de sélection autrement plus sérieux.
[Si on fait un peu de science-fiction, qui auront nous en 2027 comme candidat ? uniquement de personnes qui ne soulèvent aucun enthousiasme : Marine Le Pen/Melanchon/Wauquiez/Philippe voir Hollande (mais si, il y pense). Qu’un nouveau Coluche se présente et ses chances sont loin d’être nulles (et il fera certainement un score supérieur a un politicien expérimenté comme Melanchon ou un ex premier ministre)]
C’était bien mon point : qui peut penser que le choix entre Mélenchon, Wauquiez, Philippe ou Hollande – je laisse de côté Marine Le Pen, qui contient encore une inconnue – est un choix entre différentes politiques ? Personne. Dans ces conditions, pourquoi ne pas porter à l’Elysée « un nouveau Coluche » ? Il ne fera pas pire que les autres, puisque les vraies décisions se prennent ailleurs. Le problème n’est pas tant le fait que les candidats putatifs « ne soulèvent pas l’enthousiasme ». C’était déjà le cas dans le passé : pensez à la confrontation Pompidou/Poher. Le problème réside dans le fait qu’on ne pense plus que choisir X plutôt que Y changera vraiment quelque chose, parce que quel que soit l’élu, il n’aura aucune marge de manœuvre Dans ces conditions, autant voter pour Loana ou pour le crocodile du Zoo.
[« Sans cette solidarité inconditionnelle, il est illusoire d’imaginer que les citoyens puissent s’être appelés à soutenir cette vision inconditionnellement, y compris au péril de leur vie. » Je pense que le sentiment d’appartenir à une nation n’a pas grand-chose à voir avec cette notion de solidarité inconditionnelle. En 1914 il n’y avait aucun des mécanismes de solidarité que nous connaissons aujourd hui (sécurité sociale, retraite, impôt sur le revenu) et pourtant les français de l’époque se sont pas dérobés (le taux de désertion était bien plus faible que celui escompte par l état major).]
Je pense que vous avez mal compris ce que j’entends par « solidarité inconditionnelle ». Pour moi, cette solidarité ne se manifeste pas nécessairement par des mécanismes de redistribution. La « solidarité inconditionnelle » c’est le mécanisme qui fait que vous trouvez tout à fait acceptable et naturel de sacrifier votre intérêt personnel au bénéfice d’un « autre ». Ainsi, par exemple, si demain un tremblement de terre touchait Marseille, vous trouveriez normal et naturel que l’argent de vos impôts soit utilisé pour les aider. Les « poilus » creusois de 1914 trouvaient parfaitement normal d’aller mourir dans les tranchées de la Somme, sachant que d’autres toucheraient les bénéfices de leur sacrifice. Cette disponibilité pour sacrifier son intérêt à celui d’un autre sans lui poser des conditions, à un autre qu’on ne connaît pas – c’est pourquoi j’accole au mot « inconditionnelle » le mot « impersonnelle » est pour moi l’élément constitutif de la nation.
[« Cette solidarité inconditionnelle entre européens n’existe pas et n’est pas près d’exister, parce que l’Europe n’est pas une nation…. Personne n’est mort pour le drapeau bleu aux étoiles, et ce n’est pas demain la veille que cela arrivera. » Vous supposez ici que la nation est l’évolution ultime. Avant la nation les gens se battaient et mourraient pour une religion, un dirigeant (roi/empereur (la nation et le roi n’a rien à voir. Pensez a Hanovre et le roi d’Angleterre) ou tout simplement pour l’argent (le mercenariat était la norme avant 1789).]
En fait, ceux qui mourraient pour autre chose que leur intérêt personnel étaient très rares. Même pour persuader les gens d’aller à la croisade il a fallu leur promettre la rémission de tous les péchés, l’équivalent d’un ticket de 1ère classe pour le paradis. L’essentiel des soldats étaient des mercenaires, dont l’activité était rémunérée par une solde mais aussi par une participation aux bénéfices sous forme de droit de pillage. Seuls les officiers, aristocrates, étaient tenus par la logique de l’honneur et prêts à se sacrifier « pour un roi »… et encore : ce sacrifice servait les intérêts de la « lignée », encore une structure dont les membres sont liés par une solidarité « inconditionnelle » (mais non « impersonnelle »).
La nation d’une certaine manière est « l’évolution ultime » de cette notion de lignée. Les citoyens doivent solidarité inconditionnelle à leurs concitoyens de la même manière que les membres d’une même famille doivent solidarité inconditionnelle aux autres membres, au seul motif qu’ils ont des ancêtres communs. Vous noterez d’ailleurs que les nations se constituent souvent des ancêtres communs symboliques – pensez à « nos ancêtres les gaulois »… la grande rupture, c’est que la solidarité dans la lignée est « personnelle », au sens qu’elle réunit des gens qui se connaissent, alors que la solidarité entre citoyens est « impersonnelle » : elle s’applique même envers des gens qu’on ne connaît pas et qu’on ne connaîtra jamais personnellement.
[Est-ce que la nation restera ou sera remplacée par autre chose, je n’en sais rien mais vu les tensions dans chaque nation (pas qu aux USA) on ne peut pas exclure d’autres formes d’organisations]
Bien sûr. Mais je vois mal comment on peut constituer une collectivité politique dont les membres ne soient pas liés par une solidarité inconditionnelle et impersonnelle. Autrement dit, si une autre mode d’organisation apparaît, il sera a-national ou a-politique. Peut-être que l’avenir appartient à des collectivités a-politiques comme l’Union européenne. On ne peut savoir.
[« comme le disait Sun Tzu, la victoire n’appartient pas à l’armée la plus nombreuse, mais à l’armée la plus décidée » Il y a 2500 ans surement. Aujourd’hui ça reste à prouver. Pour rester en Chine, un petit contingent de Français et d’Anglais a mis en déroute une armée bien plus nombreuse et au moins aussi motivée durant les guerres de l’opium.]
Mais qu’est ce qui vous permet de dire que l’armée mise en déroute par les corps expéditionnaires Français et Anglais était « aussi décidée » (vous parlez de « motivation », ce n’était pas ce que j’avais écrit…) ces derniers ? Et plus près de nous, l’armée américaine était largement plus puissante que l’armée du Vietnam du nord, et j’ajoute, bien mieux équipée. Ca n’a pas marché. Et ce n’était pas il y a 2500 ans…
[« A force de répéter que les Américains étaient des « amis » qui « défendaient l’Europe », on a oublié pourquoi ils la défendaient. Ce n’était pas par grandeur d’âme, ou par générosité désintéressée, mais par intérêt. » Partiellement vrai. Il est évident que les USA ont des intérêts en Europe, mais ça n’explique pas tout. L’histoire et la culture sont aussi une raison de ce lien USA/Europe.]
Pourriez-vous m’indiquer une décision américaine vis-à-vis de l’Europe d’une certaine importance qui ne soit pas « explicable » sans avoir recours à « l’histoire et la culture » ?
[C’est pour ces raison par ex que la France s’implique plus pour le Liban que pour la Syrie ou la Jordanie]
Ah bon ? Ne serait-ce plutôt parce qu’il y a au Liban une communauté chrétienne qui nous permet d’exercer une influence et de favoriser nos intérêts, alors qu’une telle communauté n’existe pas en Jordanie ou en Syrie ? A contrario, la France a participé au bombardement de la Serbie, malgré des liens étroits et anciens avec ce pays…
[« Et puis, Trump en est convaincu, l’adversaire stratégique aujourd’hui, c’est la Chine. » C’est pas nouveau, la bascule des USA date d Obama. On peut sur ce point critiquer tous nos dirigeants qui n ont rien fait avant que Trump nous tire le tapis sous les pieds.]
C’était bien mon point. Trump n’a pas changé les choses sur le fond, il s’est contenté de formuler sa position brutalement. Alors que ses prédécesseurs retiraient le tapis petit à petit, lui l’a retiré d’un coup. Et personnellement, je trouve que ce n’est pas une mauvaise chose. Cela donne une opportunité à nos dirigeants d’enfin faire une culbute, et de se réveiller.
[En ce qui concerne les idées de Trump, je pense que c’est « America First ». Autrement dit l’Europe ne compte pas mais Taiwan a aussi du souci a se faire car en cas d’invasion chinoise il est loin d’être sûr qu’il les aide.]
Sur ce point, je n’ai pas le moindre doute. Taiwan restera pour Trump un casus belli, non pour une question de principe, mais parce qu’affaiblir la Chine reste une priorité.
[« Un ensemble (UE) administré – on n’ose pas dire gouverné – par une bureaucratie sans âme et des politiciens complètement déconnectés des réalités du monde. » On peut dire la même chose de la France : bureaucratie et politiciens déconnectés ca ne manque pas chez nous]
Je ne suis pas d’accord. Un préfet, un commissaire de police, un directeur d’hôpital, un professeur, un directeur de centre des impôts restent infiniment plus proches des réalités du terrain que n’importe quel fonctionnaire à Bruxelles. Vous oubliez que la structure bureaucratique des Etats a certes des fonctions centrales, mais que celles-ci s’articulent avec le service du terrain. Ce n’est pas le cas de la bureaucratie européenne, qui n’a aucune interaction directe avec les citoyens. Et on peut dire la même chose des politiques. Un ministre français est obligé d’aller sur le terrain, et se prend souvent des tartes. Un commissaire européen est bien plus isolé dans sa tour d’ivoire.
[« C’est par le sentiment du tragique que les électeurs cesseront d’imaginer qu’on peut confier les rênes de l’Etat à n’importe qui, que le débat politique deviendra véritablement une affaire sérieuse. » Pour cela il faudrait qu’il y a ait une offre. Nos parti politique ne sont que des écuries présidentielles et n’ont aucune réflexion de fond ou même d’idée sur la direction que la France devrait emprunter.]
C’est une dialectique complexe. Pour qu’il y ait une offre, il faut qu’il y ait des alternatives. Si la fonction du politique se réduit à appliquer sagement la seule politique possible, à quoi cela pourrait servir de formuler des « propositions » qui n’ont aucune chance de pouvoir être mises en œuvre ? La transformation des partis en écuries électorales tient aussi à l’impuissance organisée du politique. Pourquoi se préparer à gouverner alors qu’on n’aura pas l’opportunité de le faire ?
La fin des illusions, c’est souvent un moment difficile, mais aussi une opportunité de voir la réalité sous un nouvel angle. J’aime la manière dont le sujet est abordé, entre lucidité et questionnement. Parfois, perdre ses illusions, c’est aussi gagner en clarté et en force. Merci pour cette analyse !
Bonjour,
[Franchement, j’en doute. D’abord, l’article 5 qu’on brandit à tout bout de champ est beaucoup moins explicite qu’on le croit généralement. Voici le texte exact :
« Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord. »]
Tiens, je n’avais jamais eu la curiosité d’aller le lire, mais comme ça précise en Europe ou Amérique du Nord, en fait ça pose la question de la Turquie. Est-ce qu’il faut l’entendre comme « la Turquie est en Europe » ou « en cas d’attaque, la Turquie se démerde » ? J’imagine que la formule est volontairement ambigüe, mais je trouve ça intéressant.
De même, si des pays actuellement partenaires (Australie, au hasard) souhaitaient rejoindre l’alliance, ça impliquerait que l’article 5 ne pourrait même pas s’appliquer… Une des conclusions, c’est que c’est un indice de plus pour les russes pour considérer que l’alliance est bien dirigée contre eux.
@ никто
[Tiens, je n’avais jamais eu la curiosité d’aller le lire, mais comme ça précise en Europe ou Amérique du Nord, en fait ça pose la question de la Turquie. Est-ce qu’il faut l’entendre comme « la Turquie est en Europe » ou « en cas d’attaque, la Turquie se démerde » ? J’imagine que la formule est volontairement ambigüe, mais je trouve ça intéressant.]
La lecture du texte est intéressante parce qu’elle montre combien l’esprit des institutions dépasse de très loin la lettre. Le traité de l’Atlantique nord est en effet très vague et peu contraignant. Du fait de son histoire et de sa communication, les gens s’imaginent que le traité en question est une alliance défensive en bonne et due forme, obligeant les états signataires à assister un membre attaqué. Mais ce n’est pas le cas…
Le discours de JD Vance a fini de me convaincre de l’insignifiance des états européens. Travaillant dans la tech, je remarque une tendance à vouloir s’exporter principalement aux US, pratique encouragée par la BPI. Ces entreprises qui se veulent internationales (y compris TPE !) parlent anglais en interne. Je pense que les cadres dirigeants de ces entreprises ont compris que la région Euro est en déclin démographique et que les actifs du fait des politiques de dévaluation interne n’ont plus suffisament de revenus disponibles pour former une base de consommateurs qui leur permettront des marges équivalentes à celles des US. Bruxelles parle anglais. Les langues nationales sont devenus des patois marqueurs d’une sédentarité subie et donc de paupérisation. Tout comme a l’époque le patois était un marqueur d’une urbanisation non complétement aboutie. J’ai l’impression que le discours médiatique dominant m’amène à voir que ceux qui ont des sentiments nationalistes sont les péquenauds d’aujourd’hui, fiers de leurs traditions obsolètes.
Concernant votre passage au sujet de mourir pour la France, en premier lieu, le nationalisme c’est la guerre ! En second lieu, sérieusement cette fois-ci, lors d’une audition Bruno le Maire affirma vouloir redefinir les prerogatives de l’état, passant de l’état-providence à l’état-protecteur. Permettez à mon tour de redéfinir unilatéralement le contrat social et les prerogatives du citoyen-soldat en celui du citoyen-protecteur. Je ne mourerai pas pour un état qui a eu par exemple pour président un homme qui a traité avec des terroristes et utilisé les plaques tournantes du Moyen-Orient pour acheminer l’argent de ces derniers (sous entendu notre classe politique est parfaitement consciente de ce système financier “clandestin” puisqu’ils l’utilisent eux-même, autre exemple: un ministre des finances avec un très ancien compte en suisse puis singapourien). Néanmoins, je le protégerai, dans le périmètre revu après consultation des partenaires sociaux, pèrimètre qui n’est autre que le cadastre de ma maison. Je peux vous reformuler mon propos si j’ai manqué de pédagogie.
@ Snell2025
[Les langues nationales sont devenus des patois marqueurs d’une sédentarité subie et donc de paupérisation. Tout comme a l’époque le patois était un marqueur d’une urbanisation non complétement aboutie. J’ai l’impression que le discours médiatique dominant m’amène à voir que ceux qui ont des sentiments nationalistes sont les péquenauds d’aujourd’hui, fiers de leurs traditions obsolètes.]
Tout à fait. Les langues nationales, les cultures nationales, le sentiment national sont des obstacles au développement du capitalisme mondialisé. C’est pourquoi celui-ci s’y attaque frontalement…
[Concernant votre passage au sujet de mourir pour la France, en premier lieu, le nationalisme c’est la guerre !]
Oui. Et le tribalisme c’est la guerre. Et le communautarisme, c’est la guerre. Et la compétition entre les multinationales, c’est la guerre. En fait, la guerre est présente un peu partout. Mais le fait est que les états-nations tendent à réguler les guerres bien mieux que les autres structures…
[En second lieu, sérieusement cette fois-ci, lors d’une audition Bruno le Maire affirma vouloir redéfinir les prérogatives de l’état, passant de l’Etat-providence à l’état-protecteur.]
En fait, la « redéfinition » de Le Maire c’est un retour à Bismarck…
[Permettez à mon tour de redéfinir unilatéralement le contrat social et les prérogatives du citoyen-soldat en celui du citoyen-protecteur. Je ne mourrai pas pour un état qui a eu par exemple pour président un homme qui a traité avec des terroristes et utilisé les plaques tournantes du Moyen-Orient pour acheminer l’argent de ces derniers (sous entendu notre classe politique est parfaitement consciente de ce système financier “clandestin” puisqu’ils l’utilisent eux-même, autre exemple: un ministre des finances avec un très ancien compte en suisse puis singapourien).]
D’abord, on ne meurt jamais pour un « Etat », on meurt pour une nation, c’est-à-dire, pour une collectivité constituée. Ce n’est pas du tout la même chose. Ensuite, je vois mal en quoi les qualités morales de tel ou tel de vos concitoyens devrait changer la solidarité que vous devez ou pas à l’ensemble de vos concitoyens. Ce n’est pas parce que j’apprends que ma concierge, mon boulanger ou mon président de la République ont manqué à la morale que je vais changer mes sentiments envers la collectivité à laquelle je dois d’être qui je suis.
Pour les abonnés au Monde.fr, voici in extenso le discours de Vance et la contextualisation de certains des passages les plus ‘approximatifs’ ou les plus polémiques.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/02/21/derriere-les-mots-de-j-d-vance-a-munich-le-decryptage-d-un-discours-historique_6557887_3232.html
Sur le fond, la question du cadre de la liberté d’expression est, en effet, posée. Selon notre constitution, la liberté d’expression est à la fois totale… MAIS cadrée par les lois particulières qui la limitent (loi Pleven de 1972 interdisant l’expression de haines racistes, loi Gayssot de 1990 interdisant le négationnisme du génocide nazi antijuifs, loi des années 2000 interdisant la négation du génocide turc antiarméniens, etc.).
Même question posée par la modération (ou non) de tout ce qui peut se dire ou s’échanger sur les réseaux dits sociaux.
Toutes ces légitimes tentatives d’empêcher que soient confondues liberté d’expression et licence provocatrice ou haineuse devraient échapper à tout procès en censure ou en totalitarisme liberticide.
Mais le peuvent-elles ?
@ Claustaire
[Pour les abonnés au Monde.fr, voici in extenso le discours de Vance et la contextualisation de certains des passages les plus ‘approximatifs’ ou les plus polémiques.]
Pardon, mais l’article en question n’est en rien une « contextualisation ». Comme son auteur le dit explicitement en introduction, il s’agit de fournir des « éléments d’explication ». Ce n’est pas du tout la même chose. Et certaines « explications » sont très amusantes. Par exemple, concernant la déclaration de Thierry Breton se réjouissant de l’annulation des élections en Roumanie et menaçant d’une annulation similaire en Allemagne, « Le Monde » critique la formulation adoptée par Vance et finit avec cette formule : « Réponse de l’ancien commissaire au milliardaire : l’UE n’a le pouvoir d’annuler aucune élection dans les pays membres. ». Mais alors, pourquoi Breton déclare « On l’a fait en Roumanie, il faudra évidemment le faire si c’est nécessaire en Allemagne. » ? C’est qui ce « on » qui l’inclut, puisque la décision a été prise par les Roumains sans la moindre interférence extérieure ?
[Sur le fond, la question du cadre de la liberté d’expression est, en effet, posée. Selon notre constitution, la liberté d’expression est à la fois totale… MAIS cadrée par les lois particulières qui la limitent (loi Pleven de 1972 interdisant l’expression de haines racistes, loi Gayssot de 1990 interdisant le négationnisme du génocide nazi antijuifs, loi des années 2000 interdisant la négation du génocide turc antiarméniens, etc.).]
Non. Selon notre constitution la liberté d’expression n’est en rien totale. D’abord, parce que les libertés en général sont limitées : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. ». C’est déjà une limitation considérable. Pour ce qui concerne plus spécifiquement la liberté d’expression, « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » On est loin d’une « liberté totale »…
Le discours de Vance fera date.
Ce matin je suis tombé par hasard sur l’émission de C. Ockrent à la radio, clairement les doctes et “raisonnables” incités l’avaient encore en travers de la gorge ; auparavant c’était P. De Villiers sur Europe1 qui lui aussi a consacré une grande partie de son heure d’antenne aux propos de Vance.
Trump, Gorbatchev, guillotine et salsifis
Voilà un papier dont je trouve le message assez byzantin (pour dire le moins). En premier lieu, il passe avec trop de générosité à côté du sens de l’histoire. En second lieu, il exonère les élites européennes de leurs responsabilités dans le naufrage que nous connaissons aujourd’hui. Je commence par ce second point. Que ces élites européennes aient bâti un univers parallèle, une illusion, oui. Qu’elles aient presque fini par y croire elles-mêmes, peut-être. Mais elles n’ont jamais perdu de vue leur intérêt (individuel et collectif), ni quel maitre (l’ami américain) elles servaient. Laisser supposer que cette classe toxique vit dans le royaume des Bisounours revient à lui donner l’absolution par anticipation. C’est d’ailleurs très précisément ce que font nos médias depuis des lustres : à chaque crise de l’Union européenne, à chaque fois que le réel avec son sale museau est impossible à maquiller, on ressort l’argument des « élites européennes bisounours ».
Désolé, mais non. Sortir de l’illusion sans sortir la guillotine, cela n’arrivera pas. On passe en effet difficilement d’un cycle historique à un autre sans avoir au préalable donné un coup de balai et benné les impuretés, au moins les plus voyantes (hélas pas forcément les plus délétères, mais ne nous égarons pas). En d’autres termes, vu l’ampleur du naufrage, la responsabilité de ces élites sera recherchée, et l’argument de la naïveté apparaitra pour ce qu’il est, une blague. Par analogie, on peut penser ce que l’on veut de l’épuration dans l’après-guerre, mais épuration il y a eu, politique et judiciaire, parce qu’il s’agissait de solder une époque, au moins symboliquement (mais pas que, c’est en tout cas mon opinion).
Sur Trump et ce qu’il représente, au-delà du personnage, je pense que vous minimisez de manière assez spectaculaire son effet. Que, comme ses prédécesseurs, il serve les intérêts de son pays, je pense que tout le monde est à peu près au courant. Schématiquement, avec une brutalité et une vitesse inouïes, il solde la fin de l’empire (à ne pas confondre avec le pays et sa volonté de puissance, intacte), la fin du néo-conservatisme straussien (avec sa guerre perpétuelle), la fin du capitalisme financier mondialisé. Entre autres. Pardon, mais en français courant, cela s’appelle une révolution. On verra si Trump aura la même destinée que Gorbatchev. Il a déclenché une telle tectonique des plaques que, potentiellement, ses effets pourraient littéralement le submerger, lui et ses objectifs.
Quant à l’Union européenne, qu’elle s’écroule dans ses mensonges, sa duplicité et son impotence comme s’est écroulée l’URSS. Le plus tôt sera le mieux.
@ jojo
[Trump, Gorbatchev, guillotine et salsifis]
Pardon ?
[Voilà un papier dont je trouve le message assez byzantin (pour dire le moins). En premier lieu, il passe avec trop de générosité à côté du sens de l’histoire. En second lieu, il exonère les élites européennes de leurs responsabilités dans le naufrage que nous connaissons aujourd’hui.]
Je ne comprends pas très bien à quel papier vous faites référence. S’il s’agit du mien, je pense que vous avez très mal lu. Et s’il s’agit d’un autre… vous avez oublié de mettre le lien !
[Je commence par ce second point. Que ces élites européennes aient bâti un univers parallèle, une illusion, oui. Qu’elles aient presque fini par y croire elles-mêmes, peut-être. Mais elles n’ont jamais perdu de vue leur intérêt (individuel et collectif), ni quel maitre (l’ami américain) elles servaient. Laisser supposer que cette classe toxique vit dans le royaume des Bisounours revient à lui donner l’absolution par anticipation.]
Je ne suis pas très intéressé à trouver des coupables ou à donner des absolutions. Ce qui m’intéresse, c’est de comprendre comment la machine fonctionne, et pourquoi les gens font ce qu’ils font. Je laisse les condamnations aux moralistes. J’ai toujours trouvé que les cyniques, ceux qui assument jusqu’au bout le fait qu’ils servent leurs intérêts, sont finalement l’exception et non la règle. La plupart des gens se fabrique un monde imaginaire qui justifie leurs actions moralement. Et c’est pourquoi je pense, oui, que ces gens vivent largement dans un monde de Bisounours qu’ils se sont eux-mêmes fabriqués.
[Désolé, mais non. Sortir de l’illusion sans sortir la guillotine, cela n’arrivera pas. On passe en effet difficilement d’un cycle historique à un autre sans avoir au préalable donné un coup de balai et benné les impuretés, au moins les plus voyantes (hélas pas forcément les plus délétères, mais ne nous égarons pas). En d’autres termes, vu l’ampleur du naufrage, la responsabilité de ces élites sera recherchée, et l’argument de la naïveté apparaitra pour ce qu’il est, une blague.]
Vous savez, c’est déjà arrivé qu’on guillotine des « naïfs »… et qu’on épargne des cyniques. Et c’est souvent pour les remplacer par d’autres tout aussi « naïfs », mais dont la « naïveté » consiste à croire à un autre discours de justification…
[Par analogie, on peut penser ce que l’on veut de l’épuration dans l’après-guerre, mais épuration il y a eu, politique et judiciaire, parce qu’il s’agissait de solder une époque, au moins symboliquement (mais pas que, c’est en tout cas mon opinion).]
Il est très possible qu’il faille quelques sacrifices humains pour marquer le passage de l’idéologie européiste à autre chose. Mais encore une fois, l’histoire montre que dans ces circonstances ceux qui partent en fumée ne sont pas forcément les plus coupables.
[Sur Trump et ce qu’il représente, au-delà du personnage, je pense que vous minimisez de manière assez spectaculaire son effet. Que, comme ses prédécesseurs, il serve les intérêts de son pays, je pense que tout le monde est à peu près au courant. Schématiquement, avec une brutalité et une vitesse inouïes, il solde la fin de l’empire (à ne pas confondre avec le pays et sa volonté de puissance, intacte), la fin du néo-conservatisme straussien (avec sa guerre perpétuelle), la fin du capitalisme financier mondialisé. Entre autres. Pardon, mais en français courant, cela s’appelle une révolution.]
Et comme souvent, cette « révolution » ne fait que traduire dans les institutions un rapport de forces déjà établi dans les faits.
[“Et comme souvent, cette « révolution » ne fait que traduire dans les institutions un rapport de forces déjà établi dans les faits.”]
J’aime beaucoup à ce titre la remarque de Kissinger sur ce que représente Trump, de mémoire : “I think Trump may be one of those figures in history who appear from time to time to mark the end of an era and to force it to give up its old pretences.”
Je trouve que ça résume pas mal le personnage à bien des égards et la trace que j’imagine qu’il laissera dans l’histoire.
@ Ruben
[Je trouve que ça résume pas mal le personnage à bien des égards et la trace que j’imagine qu’il laissera dans l’histoire.]
Kissinger avait l’art de trouver la formule juste pour résumer une situation.