Réquiem pour un petit terminal

Le 30 juin, Orange (on ne dit plus “France Télécom”, vous savez, “France”, ça fait ringard…) débranchera le réseau Transpac, l’épine dorsale du Minitel. Les petits terminaux domestiques (il en reste 700.000 en circulation, dont 80.000 restent actifs pour quelque 2.000.000 de connexions par an), qui ont ouvert les portes de la télématique (1) à tous les foyers français seront alors bons pour la casse ou le musée. Personnellement, je garderai le mien, que je n’utilise plus guère mais qui trône toujours à côté du poste téléphonique – encore une antiquité – dans l’entrée de mon appartement, témoignage d’une France que je n’oserais pas de qualifier de plus heureuse, mais certainement de plus créative.

Revenons donc en arrière. En 1974, pour être précis. La France est alors très en retard en matière de téléphonie. Les communications longue distance se font toujours par opérateur. Les lignes sont insuffisantes, le temps d’ouverture de ligne de plusieurs semaines. Valéry Giscard d’Estaing se voit lui même en modernisateur, et donne l’impulsion politique pour un “plan télécom” qui en quelques années dépensera l’équivalent de 80 milliards d’euros. C’est la Direction générale des Télécommunications qui est à la manœuvre. En six ans, les abonnés au téléphone passent de 6 à 20 millions, la France se dote d’un réseau téléphonique moderne couvrant l’ensemble du territoire et offrant un service de qualité à un prix raisonnable. En 1976, la DGT se lance dans les réseaux de données, avec la fondation de Transpac. Après la publication en 1978 du rapport Nora-Minc prônant “d’informatiser la société française”, les dirigeants de la DGT (2) se mettent à la recherche d’idées. Ils trouveront ce qu’ils cherchent au service commun de recherche de la DGT et de l’ORTF (3). Ce sera le Minitel.

Dès le départ, on retrouve dans Minitel tous les éléments de la France jacobine. Le projet est centralisé et c’est l’Etat qui choisit les standards et partage les marchés entre les industriels – tous français. Les coûts d’infrastructure sont mutualisés: le terminal est mis à disposition de tous quasi-gratuitement, les services sont accessibles sans abonnement. Lorsqu’il s’agit de services publics (annuaire, horaires SNCF, renseignements administratifs) ils sont gratuits. Les autres services sont payants, le payement se faisant à travers de la facture téléphonique et l’Etat prélevant sa part (30% du coût). Le standard choisi est ouvert et permet donc aux industriels de développer des services et des équipements autour du nouveau système.

Minitel sera un succès. Un succès méconnu, grâce à cette vieille maladie française qui veut qu’on râle sur tout et qu’on voie dans chacune de nos réalisations le verre à moitié vide. Malgré les invectives des oracles habituels, qui se plairont à expliquer que Minitel est trop cher, trop rustique, trop “franco-français”, trop inexportable, Minitel sera adopté par les français. L’annuaire électronique, RAVEL, le “minitel rose” deviendront des expressions du langage courant pendant vingt ans.

Pourquoi je vous parle de ça ? Parce que l’enterrement discret du Minitel est l’occasion de rappeler quelques réalités de notre histoire qu’il est utile d’avoir en tête. La première, c’est combien il est idiot de penser qu’on peut lutter contre une crise économique en sabrant les investissements. Il faut rappeler que le début des années 1970 est marqué par une suite de crises: ralentissement de la croissance, crise financière qui aboutit à l’abandon en 1971 de l’étalon-or établi par les accords de Bretton-Woods, puis crise économique avec les deux chocs pétroliers. Quelle est la réponse du gouvernement français ? Une politique de rigueur budgétaire… accompagnée d’un énorme programme d’investissements: le programme nucléaire à lui seul se chiffre autour des 100 milliards d’euros, le “plan télécom” se monte à 80 milliards d’euros, la construction du premier tronçon TGV Paris-Lyon (4) coûtera autour de 30 milliards d’euros. Et on pourrait rajouter la construction du réseau autoroutier, le programme Ariane… tous ces investissements sont décidés à un moment de crise. Tous ces projets sont non seulement des succès commerciaux qui ont rapporté de l’argent à l’Etat, mais en plus ils contribueront en plus fortement à la compétitivité de notre appareil économique en donnant à la France des infrastructures qui encore aujourd’hui représentent notre principal attrait pour les entreprises.

La deuxième réalité, est que seul l’Etat a été, dans notre pays, en mesure de lancer ces programmes et de les soutenir dans le long terme. Cela ne veut pas dire qu’il ne faille pas du capital privé. Mais les investisseurs privés sont trop frileux pour investir des sommes énormes sur des longues périodes sans une rentabilité assurée. Et ils exigent des primes de risque qui rendent souvent le financement impossible. L’Etat, parmi tous les acteurs économiques, est le seul en mesure de réduire radicalement le risque puisqu’il contrôle la réglementation. L’appui d’un Etat fort et fiable permet donc de réduire les primes de risque et de rendre ces projets finançables.

Encore faut-il que l’Etat soit fort et fiable, et c’est là la troisième réalité: La politique de paupérisation de l’Etat poursuivie depuis trente ans a privé l’Etat d’une grande partie de ses moyens. Le “saupoudrage” des économies (5), les compressions et réorganisations constantes, le gonflement des services de communication (pour faire savoir ce qu’on fait) et des services de contrôle (pour savoir ce qu’on fait) par rapport aux services qui agissent a réduit la capacité d’intervention de l’Etat à néant. Nous avons aujourd’hui le rêve des libéraux: un Etat-gendarme, réduit à ses fonctions de contrôle. Imaginer qu’aujourd’hui une direction de l’Etat pourrait conduire un programme comme celui du “plan télécom” et du Minitel, c’est se bercer de douces illusions. Pour cela, il faudrait à l’Etat reconquérir des moyens qu’il n’a plus.

Et cela m’amène à la quatrième et dernière constatation: les investissements des années 1960 et 1970 ont été possibles parce que la société était disposée à sacrifier sa consommation pour financer l’investissement. Les “jeunes imbéciles” qui dénonçaient la “société de consommation” n’avaient encore rien vu… et au nom de leurs “idéaux”, on s’est lancé dans une frénésie de consommation et de dépense sociale qui a dévoré la capacité d’investissement (6).

Voilà quelques sujets de réflexion à l’heure où un gouvernement “de gauche” crée un ministère du “redressement productif” privé des leviers essentiels d’action (l’énergie, la recherche, les infrastructures) et conçu comme une sorte d’infirmerie pour entreprises en difficulté. A l’heure aussi où l’on se vante d’avoir obtenu au niveau européen un “plan de relance” de 120 milliards d’euros, une goutte d’eau dans la mer, dont on perçoit bien qu’il s’agit d’un alibi pour faire passer une politique de longues années d’austérité qui toucheront essentiellement les investissements.

Si j’ai a choisir entre la France sociale-compassionnelle qui se passionne pour l’augmentation du SMIC et le budget de la culture mais qui se fout de l’état de délabrement progressif de nos infrastructures (7), et la France du Minitel, d’Ariane, du programme nucléaire et du TGV, et bien, je choisis la seconde. Et oui, je sais, je suis indécrottablement ringard…

Descartes

(1) Le terme “télématique”, qui associait “télécommunications” et “informatique” est tombé depuis longtemps en désuétude, tant l’utilisation de termes français pour désigner les choses est devenue “pas cool”. Si je le ressuscite, c’est parce qu’il fleure bon cette époque où la France n’avait pas de pétrole mais avait des idées, et savait les mettre en œuvre.

(2) Dont Gérard Théry, directeur général des télécommunications entre 1974 t 1981, dont le rôle dans la construction du réseau français de télécommunications est déterminant. Il donnera son impulsion à la modernisation du réseau, à la fondation de Transpac, mais aussi au premier satellite français de télécommunications Télécom 1. Il n’aura pas la reconnaissance qu’il mérite, dans ce pays ou les grands serviteurs de l’Etat restent anonymes. Il sera viré comme un malpropre en 1981, et poursuivra une carrière dans le privé.

(3) Ca fait rêver… imaginez-vous aujourd’hui un “centre commun de recherche” entre France-Télévisions et Orange ?

(4) Les recherches sur un programme TGV avaient commencé en 1966. C’est le gouvernement Messmer qui décide la construction de la première ligne commerciale.

(5) Je trouve l’image qui m’a été proposée par un ami – qui est haut fonctionnaire dans un ministère – pour décrire ce “saupoudrage” est très parlante: “Imaginez que vous êtes gestionnaire d’une flotte de dix camions, et qu’on vous demande de faire 10% d’économies d’entretien. La solution rationnelle serait de vendre l’un des camions et de continuer à entretenir les dix autres. Au lieu de quoi, on préfère déclarer que puisque l’entretien des pneus représente 10% de la facture totale, on ne changera désormais plus les pneus. Ainsi, on évite de virer un chauffeur, mais au bout d’un an aucun camion n’est plus en mesure de rouler”.

(6) Je sais que ce point va faire débat. Mais le fait que la dépense sociale – et notamment la dépense maladie – augmente beaucoup plus vite que le PIB pose un problème. Les budgets sociaux aident les pauvres à vivre. Mais ils aident aussi à vivre un certain nombre de catégories qui ne sont pas si “pauvres” que ça: médecins, pharmaciens, thérapeutes, assistantes sociales… En d’autres termes, je suis loin d’être persuadé de l’efficacité de nos dépenses sociales. Personnellement, je préfère infiniment payer des gens à construire un TGV plutôt que de leur payer le RSA et en plus une assistante sociale pour assurer leur suivi.

(7) Car il ne faut pas se faire d’illusions: nos grands programmes d’équipement datent maintenant de trente ans, et peu de chose a été faite depuis. Nous vivons largement sur des lauriers cultivés par les générations précédentes, et nos “industries d’excellence” sont largement liés aux grands investissements passés. Et si nous ne faisons pas quelque chose rapidement, nous resterons à la traîne…

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6 réponses à Réquiem pour un petit terminal

  1. Trubli dit :

    Du très bon Descartes. 

    Je suis en contact avec certaines instances de l’état sur un sujet comme l’EDI (échange de données informatisée ou electronic data interchange). Et dans un dossier comme celui-ci je regrette
    que l’Etat n’impose pas une norme à tous les acteurs ce qui aurait permis un développement rapide de l’EDI en remplacement de la bonne vieille facture papier. Or comme l’Etat ne légifère pas,
    c’est à la norme qui prendra le pas sur l’autre, or cette lutte peut durer des années. Le problème est que mon entreprise est un grand facturier qui n’a pas envie d’investir dans des
    développements sur différentes normes EDI en fonction du client. C’est trop couteux et donc nous préférons facturer des coûts d’implémentation. L’AIFE (association pour l’informatique financière
    de l’état) ne veut pas payer. Soit, mais alors qu’ils légifèrent. Ainsi nous serons sûr que les développements faits pour l’Etat pourront être amortis sur d’autres clients. 

    Ce que vous dites sur l’investissement est très important. Dans la blogosphère on voit souvent des intervenants écrire que la croissance c’est fini. Chiffres à l’appui ils montrent que depuis les
    années 60 le taux de croissance décroit à chaque décennie. Tous ces malthusiens sont obsédés par la réduction de la population mondiale et la décroissance. 

    Je ne pense pas comme eux. Mon sentiment est que le pays s’est endetté pour consommer plus qu’il ne produit, que les entreprises ont plus privilégié les dividendes versés aux actionnaires au
    détriment de la modernisation de leur appareil productif. Pour qu’il y ait de la croissance il faut des gains de productivité, et pour qu’ils ait gains de productivité il faut retrouver une base
    industrielle qu’on va ensuite s’efforcer de moderniser. Il faut améliorer la productivité du capital humain (formation), du capital [biens d’équipements/ outils de productions,
    infrastructures de transports (ex : canal Rhin-Rhone au gabarit européen) etc.]

    • Descartes dit :

      Soit, mais alors qu’ils légifèrent. Ainsi nous serons sûr que les développements faits pour l’Etat pourront être amortis sur d’autres clients.

      Ah… mais légiférer, ce serait privilégier une norme sur une autre – donc un fournisseur sur un autre – ce qui porterait atteinte à la sacrosainte concurrence. 

      Je ne pense pas comme eux. Mon sentiment est que le pays s’est endetté pour consommer plus qu’il ne produit, que les entreprises ont plus privilégié les dividendes versés aux actionnaires au
      détriment de la modernisation de leur appareil productif.

      Tout à fait. Après la génération des bâtisseurs, qui vivaient chichement et reinvestissaient chaque sou dans l’usine, est venue la génération des héritiers, qui dilapide la fortune sur les tables
      de roulette… Je pense que c’est l’éclairage qui permet le mieux de comprendre la “révolte” de 1968: ce sont les héritiers qui n’ont pas envie d’attendre que la génération précédente soit au
      cimetière pour commencer à toucher l’héritage. Ce n’est pas par hasard si l’arrivée de cette génération au pouvoir coincide avec la chute de l’investissement devant la consommation.

       

  2. Trubli dit :

    Un des reproches fait au TGV ou au Minitel, c’est que nous n’arrivons pas à les exporter. Ils répondent très bien à un contexte national, mais nous ne parvenons pas à leur trouver un marché
    suffisant au-delà de nos frontières.

    On voit que l’Internet, né de la recherche du complexe militaro-industriel américain, a fini par avoir raison du Minitel. Peut-être est-ce parce que la recherche et les développements sur le
    Minitel ont été arrêtés dans les années 80 ? Pourquoi n’a-t-on pas cherché à le miniaturiser, a psser à l’écran couleur ?

    • Descartes dit :

      Un des reproches fait au TGV ou au Minitel, c’est que nous n’arrivons pas à les exporter. Ils répondent très bien à un contexte national, mais nous ne parvenons pas à leur trouver un marché
      suffisant au-delà de nos frontières.

      C’est le résultat logique lorsqu’on développe le produit en fonction des besoins de son public. Comme les publics ont des besoins différents selon les pays, un produit très adapté en France ne
      répond pas forcément aux besoins des autres. De plus, un projet comme Minitel ou le TGV sont avant tout des projets d’ingéniérie sociale. Ils fonctionnent en France parce que l’Etat a pris sur
      lui d’aménager le pays pour eux et en fonction d’eux.

      On voit que l’Internet, né de la recherche du complexe militaro-industriel américain, a fini par avoir raison du Minitel.

      Internet est un protocole de transport de données. Dire qu’Internet a remplacé Minitel est comme dire que les autoroutes ont remplacé les locomotives. C’est l’ordinateur personnel, et non
      “internet”, qui a eu raison de Minitel. Dès lors que le prix des ordinateurs puissants est devenu abordable et que les technologies de transport rapide des données se sont développées, la logique
      du terminal passif à affichage simplifié, qui avait été choisie précisement pour permettre de réduire le prix et donc de le rendre accessible à tous, ne pouvait qu’être substituée. Mais cela
      n’est en rien un “échec”: ce n’est pas parce que les voitures ont remplacé les calèches qu’on peut considérer que Louis XIV a eu tort d’équiper les services de l’Etat en transport hyppomobile.

      Peut-être est-ce parce que la recherche et les développements sur le Minitel ont été arrêtés dans les années 80 ? Pourquoi n’a-t-on pas cherché à le miniaturiser, a psser à l’écran couleur
      ?

      Le choix fondamental du Minitel était double: d’une part, c’était un terminal passif (c’est à dire, qui se contente d’afficher ce qu’il reçoit), et d’autre part, il utilisait un protocole
      (teletext) qui ne permettait pas d’afficher des images. Ces deux choix étaient justifiés à l’époque: la vitesse des réseaux de transmission rendait très coûteuse la transmission d’images
      (l’équivalent américain du minitel, qui avait fait le choix inverse, n’a jamais pu décoller à cause de ce problème), et un terminal actif – en fait, un micro-ordinateur – était trop coûteux à
      l’époque pour qu’il puisse être distribué quasi-gratuitement en masse.

      Je pense qu’il ne faut pas se faire des noeuds au cerveau: Minitel était un fabuleux programme. Il répondait a un besoin donné dans un contexte donné. Quand le contexte a changé, et qu’il a fallu
      satisfaire d’autres besoins, il a été substitué par des technologies plus avancées. Plus que le fait qu’on n’ait pas cherché à “sauver le soldat Minitel”, on peut regreter qu’on n’ait pas lancé,
      lorsqu’on a vu les possibilités d’Internet, un programme national d’équipement de même nature que Minitel. Mais il est vrai que ce genre de programme aurait entré rapidement en conflit avec
      l’Europe de Maastricht.

  3. Marencau dit :

    Salut Descartes,

    Voilà un billet qui fait un peu rêver, je l’avoue. Au fait, est-ce que le minitel s’est montré du coup financièrement rentable ?

    Parce que c’est ce que te reprocherons les libéraux: il n’y avait pas de garantie que le programme ne se casse pas la gueule et ait un avenir – seul les particuliers ont le droit
    de prendre se risque et sont à même de le faire selon le principe que “le cultivateur connaît mieux que l’administration”…

    Ta remarque sur l’Etat qui doit reconquérir ses moyens me fait m’interroger. Quels moyens l’Etat doit-il récupérer et comment ? Je vois plusieurs aspects.

    1) La sortie de l’UE et de sa concurrence libre et non faussée pour pouvoir au moins mener une (vraie) politique de grands investissements, notamment industriels. Ca c’est nécessaire et
    préalable à tout le reste.

    2) Ces investissements doivent se faire en partie via de la planche à billet par la banque centrale, c’est à dire par une inflation modérée de 5/6%. Je ne suis pas économiste, mais cela
    devrait représenter un bon paquet de milliards, sans compter ceux empruntés à taux d’intérêt aux banques privées et qui seront remboursés grâce à la rentabilité des projets
    d’investissement.

    3) Il faut récupérer de l’expertise au niveau de l’Etat. Et à mon avis c’est là un défi bien plus grand. S’il y a pu avoir un temps ou ce genre de fonctions exerçaient du prestige social, on
    ne peut pas vraiment dire que ce soit encore le cas (en tout cas pas au même niveau). Des rémunérations plus conséquentes peut être un premier pas, mais ça restera légèrement insuffisant car à ce
    petit jeu là, c’est le privé qui gagne.

    4) Pour cette relance de l’investissement, comment attirer des investisseurs en France alors que d’autres pays présentent des meilleurs rentabilités, notamment sur le capital ? D’ailleurs, est-ce
    que nous devons absolument le faire ?

    • Descartes dit :

      Au fait, est-ce que le minitel s’est montré du coup financièrement rentable ?

      Très rentable. Le “Kiosque” (le fameux 3615) avait pendant des années financé la presse écrite, et la DGT, qui gardait 30% des recettes, est très largement rentré dans ses frais. Et cela
      sans compter l’effet pédagogique.

      Parce que c’est ce que te reprocherons les libéraux: il n’y avait pas de garantie que le programme ne se casse pas la gueule et ait un avenir – seul les particuliers ont le
      droit de prendre se risque et sont à même de le faire selon le principe que “le cultivateur connaît mieux que l’administration”…

      C’est un mythe qu’il faut combattre. D’une part, les entreprises privées se plantent au moins aussi souvent que les entreprises publiques et les administrations lorsqu’il s’agit d’interpréter les
      besoins des consommateurs. Et d’autre part, il est faux de croire que les privés seraient plus légitimes parce qu’après tout “ils risquent leur argent”. Dans une société complexe, tout risque est
      finalement mutualisé. Lorsqu’un entrepreneur se “plante”, il laisse en général des ardoises chez ses fournisseurs et son banquier, qui “chargent” le coût de la faillite sur les autres emprunteurs
      et clients.

      Ta remarque sur l’Etat qui doit reconquérir ses moyens me fait m’interroger. Quels moyens l’Etat doit-il récupérer et comment ?(…)

      Ta liste correspond à ce que je voulais dire. Disons qu’il y a deux types de moyens: d’un côté, il y a les leviers politiques (politique monétaire, politique de la concurrence…) que l’Etat a
      transféré à des “autorités indépendantes” ou à Bruxelles. De l’autre côté – mais c’est au moins aussi important, si non plus – il y a les moyens intellectuels et matériels. L’expertise publique
      en matière de conduite de projets a été décimée, les corps techniques de l’Etat confinés à une pure fonction de contrôle.

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