Vous avez remarqué ? Les gens sympathiques, agréables, conformistes, qui suivent l’opinion générale ne sont jamais censurés. Cela n’arrive qu’aux autres, aux pelés, aux galeux, aux reprouvés, à ceux qui dérangent. Voltaire le notait déjà : il n’y a pas de mérite particulier à se battre pour la liberté des gens qui nous ressemblent. Le véritable mérite est de lutter pour la liberté des gens qu’on n’aime pas.
Mais nous vivons dans un univers de moins en moins voltairien. A l’universalisme de l’illustre philosophe et de ses collègues des Lumières se substitue chaque jour plus lourdement une bienpensance qui prétend défendre la liberté… mais seulement pour ceux qu’elle en juge dignes. Tous les autres n’ont qu’à bien se tenir. Lorsque l’infâme Poutine emprisonne les membres du groupe « Pussy Riot » sous prétexte qu’elles ont injurié les croyances des russes en organisant un « happening » provocateur dans une cathédrale, la bienpensance se lève pour protester contre l’atteinte insupportable à la liberté d’expression. Lorsque pendant la messe de noël à l’église de la Madeleine une « femen » monte sur l’autel et mime un avortement avec un morceau de viande sanguinolente, nos dirigeants restent de marbre. Et lorsqu’un humoriste se permet des répliques antisémites, on le censure au nom de l’atteinte « au respect des valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et par la tradition républicaine », pour reprendre les termes utilisés par le juge des référés du Conseil d’Etat.
Allez comprendre. Faire une « quenelle » devant une synagogue, mettre une tête de cochon devant une mosquée, c’est « contraire aux valeurs et principes ». Mimer un avortement sur l’autel de la Madeleine, c’est parfaitement normal et rentre dans le champ de la liberté d’expression. Il y a dans cette dissymétrie quelque chose de profondément choquant pour tout esprit ne serait-ce que moyennement voltairien, dissymétrie qui devient chaque jour plus une caractéristique de notre débat public. Je l’avais déjà souligné dans mon commentaire de la fureur médiatique qui a suivi l’affaire Méric (1). Cela devient flagrant dans l’affaire Dieudonné. Ce n’est pas le fait d’inciter à la haine qui vaut à Dieudonné ses ennuis. C’est d’inciter certaines haines. Car il y a des haines permises, et des haines interdites. Des haines qu’on peut proclamer, et celles qu’on doit impérativement taire. Et comme toujours dans ces affaires, se pose la question cruciale : qui décide quels sont les « valeurs et principes » sacrés ? Il y a là une vision dogmatique qui ne dit pas son nom, mais qui maintenant, grâce au conseil d’Etat, s’impose à nous tous.
Avec cette décision, le Conseil d’Etat démonte la pierre fondamentale qui fonde – fondait ? – la protection de la liberté de réunion et de pressee. Il n’est pas inutile de rappeler l’article premier de la loi du 30 juin 1881, qui proclame : « Les réunions publiques sont libres. Elles peuvent avoir lieu sans autorisation préalable (…) ». Cette dispense d’autorisation préalable n’est pas un détail. On peut la rapprocher de l’article 5 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui énonce un principe semblable : « tout journal ou écrit périodique peut être publié, sans autorisation préalable ni dépôt de cautionnement ». Ces lois, dont on peut admirer le caractère libéral, met fin au régime qui permettait aux autorités de contrôler a priori le discours publics, pour lui substituer un régime de contrôle a posteriori. Si des discours et des écrits contraires à la loi sont proférés, leurs auteurs encourent les peines prévues par celle-ci.
Bien entendu, ces libertés, comme toute liberté, est limitée par le besoin de préservation de l’ordre public, qui reste pour notre droit l’objectif suprême qui subordonne tous les autres. Mais l’interprétation qui était faite par le juge administratif jusqu’à ce triste 9 janvier 2014 était fort libérale. C’est l’arrêt « Benjamin » (CE, 19 mai 1933) qui fait jurisprudence. Voici ce qu’en dit le commentateur du Conseil d’Etat : « M. Benjamin devait donner une conférence à Nevers sur le thème « Deux auteurs comiques : Courteline et Sacha Guitry ». Devant les nombreuses protestations de syndicats d’instituteurs, qui reprochaient au conférencier de les ridiculiser à l’occasion de chacune de ses interventions, le maire de Nevers décida finalement d’interdire la réunion. Cette décision fut annulée par le Conseil d’État au motif que les risques de troubles à l’ordre public allégués par le maire pour interdire cette réunion n’étaient pas tels qu’ils aient pu justifier légalement l’interdiction de cette réunion, alors que la liberté de réunion est garantie par les lois du 30 juin 1881 et du 28 mars 1907 ». L’arrêt est suffisamment intéressant pour que je reproduise ici in extenso son corps :
« Sur la légalité des décisions attaquées : Considérant que, s'il incombe au maire, en vertu de l'article 97 de la loi du 5 avril 1884, de prendre les mesures qu'exige le maintien de l'ordre, il doit concilier l'exercice de ses pouvoirs avec le respect de la liberté de réunion garantie par les lois des 30 juin 1881 et 28 mars 1907 ;
Considérant que, pour interdire les conférences du sieur René Benjamin, figurant au programme de galas littéraires organisés par le Syndicat d'initiative de Nevers, et qui présentaient toutes deux le caractère de conférences publiques, le maire s'est fondé sur ce que la venue du sieur René Benjamin à Nevers était de nature à troubler l'ordre public ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'éventualité de troubles, alléguée par le maire de Nevers, ne présentait pas un degré de gravité tel qu'il n'ait pu, sans interdire la conférence, maintenir l'ordre en édictant les mesures de police qu'il lui appartenait de prendre ; que, dès lors, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen tiré du détournement de pouvoir, les requérants sont fondés à soutenir que les arrêtés attaqués sont entachés d'excès de pouvoir »
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat avait suivi l’adage que « la liberté est la règle, et l’interdiction est l’exception ». L’autorité peut interdire une réunion, mais seulement dans l’hypothèse ou celle-ci pourrait provoquer des « troubles » graves qu’elle n’aurait pas les moyens matériels de contenir, et cela indépendamment de toute considération sur la préservation de « valeurs et principes » quelconques. Le 9 janvier 2014, le Conseil d’Etat a renversé, espérons-le provisoirement, cette jurisprudence libérale qui fait mission à l’autorité de prévenir les « troubles » et rien d’autre, pour lui préférer une vision qui donne à l’autorité publique une mission de prévenir toute atteinte à l’ordre public défini d’une manière extraordinairement large, jusqu’à inclure « le au respect des valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et par la tradition républicaine ». Un paragraphe de la décision du Conseil d’Etat mérite qu’on s’y attarde :
« Considérant (…) qu’au regard du spectacle prévu, tel qu’il a été annoncé et programmé, les allégations selon lesquelles les propos pénalement répréhensibles et de nature à mettre en cause la cohésion nationale relevés lors des séances tenues à Paris ne seraient pas repris à Nantes ne suffisent pas pour écarter le risque sérieux que soient de nouveau portées de graves atteintes au respect des valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; considérant (…) qu’il appartient en outre à l’autorité administrative de prendre les mesures de nature à éviter que des infractions pénales soient commises; qu’ainsi, en se fondant sur les risques que le spectacle projeté représentait pour l’ordre public et sur la méconnaissance des principes au respect desquels il incombe aux autorités de l’Etat de veiller, le préfet de la Loire-Atlantique n’a pas commis, dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative, d’illégalité grave et manifeste »
Par cet arrêt, on revient un siècle et demi en arrière, au temps où l’autorité prétendait contrôler a priori l’expression publique pour s’assurer qu’il était conforme aux « principes et valeurs » dont il s’estimait gardienne. Car que doit faire Dieudonné maintenant s’il veut pouvoir présenter légalement un spectacle ? Il lui faut pouvoir « écarter le risque sérieux que soient portées des graves atteintes au respect des valeurs et principes (…) ». Et comment pourrait-il faire cela autrement qu’en présentant avant le spectacle le script aux autorités ? Sans le dire, le Conseil d’Etat a rétabli le principe de l’autorisation préalable, que la loi de 1881 écarte explicitement.
On en est donc revenu à une logique de contrôle préventif. Dans sa décision, le Conseil d’Etat accrédite l’idée que les autorités puissent « prendre des mesures de nature à éviter que des infractions pénales soient commises » contre un citoyen, le tout fondé sur le simple fait que celui-ci n’offre pas des garanties suffisantes. Le préfet aurait-il donc le pouvoir de jeter en prison tous ceux qui ont un casier judiciaire sous prétexte qu’ils n’offrent pas assez de garanties qu’ils ne commettront pas des infractions pénales à l’avenir ? L’autorité publique aura-t-elle le droit d’interdire à un journaliste condamné pour diffamation ou atteinte à la vie privée de publier un nouvel article ?
Mais il y a plus grave. Par cette décision, le juge rend les autorités de l’Etat responsables non seulement d’assurer le respect de la loi, mais aussi du « respect des valeurs et des principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et par la tradition républicaine ». Cela revient à élever les « valeurs et principes » en question au niveau d’un dogme sacré, qu’il serait interdit de critiquer ou de moquer. Une sorte de délit de blasphème laïque, en quelque sorte.
On dit que le juge doit refléter l’état de la société. Et l’état de la société c’est, sous le couvert d’un discours de tolérance, une intolérance chaque fois plus écrasante. Il n’est pas inutile de rappeler le débat qui a eu lieu au sujet des « caricatures de Mahomet ». Cette affaire avait posé une question fondamentale, celle de la liberté d’offenser. A-t-on le droit de publier des écrits ou des paroles qui « offensent » la sensibilité de tel ou tel groupe ? A l’époque, la justice avait tranché – contre l’avis d’une bonne partie de la bienpensance – du côté de la liberté. Aujourd’hui, le Conseil d’Etat donne la réponse contraire : on n’a pas le droit d’offenser par la parole ou le texte les « principes et valeurs » en question. « Principes et valeurs » qu’on peut d’ailleurs étendre à l’infini. Dans la mesure où la liberté de conscience et de culte est reconnue par la tradition républicaine, peut-on impunément se moquer de la religion dans un spectacle ?
Il peut paraître paradoxal que ceux là même qui proclament vouloir défendre les « valeurs et principes » consacrés par notre tradition républicaine n’hésitent pas à piétiner cette valeur fondamentale qu’est la liberté de réunion et d’expression. Mais le paradoxe est inévitable dans une société ou le raisonnement ad-hoc est devenu la règle, et l’universalisme l’exception. Aujourd’hui, lorsqu’on défend « la liberté », on parle en fait de « sa liberté », celle des gens qui nous ressemblent, qui appartiennent à notre « communauté », qui pensent comme nous. Jamais de la liberté en général qui est toujours celle de l’Autre. La formule attribuée – à tort – à Voltaire « je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous puissiez le dire » n’est plus de saison. Imagine-t-on une féministe se battre pour permettre l’expression d’un discours qu’elle juge « sexiste » ? Un dirigeant du CRAN défendre le droit de publication d’un ouvrage qui met en cause sa vision du monde ? Vous rigolez.
Il reste pourtant quelques voltairiens impénitents, dont l’auteur de ces lignes, qui continuent à défendre la liberté de tous, y compris de ceux qu’ils n’aiment pas. Et ils ne le font pas seulement par noblesse d’âme. Ils le font parce qu’ils comprennent qu’accepter qu’on limite les droits de l’Autre aujourd’hui ouvre la porte à ceux qu’on limite les miens demain.
« Lorsque les nazis sont venus chercher les communistes,
je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.
Lorsqu’ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit,
je n’étais pas social-démocrate.
Lorsqu'ils sont venus chercher les syndicalistes,
je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Lorsqu’ils sont venus me chercher,
il ne restait plus personne
pour protester. »
Aujourd’hui, ils sont venus chercher Dieudonné. La suite, c’est à vous, à nous de l’écrire.
Descartes
(1) Il n’est pas inutile de rappeler ici que l’assassinat à Athènes du rappeur Pavlos Fyssas attribué à des militants du parti d’extrême droite « Aube Dorée » a fait la « une » des journaux bienpensants et l’objet de condamnations diverses et variées, alors que l’assassinat de deux militants de l'Aube Dorée par balle, assassinat attribué cette fois-ci aux milieux d’extrême gauche n’a reçu qu’un écho minimal.
Soutiendriez-vous les arguments que vous présentez ici contre la Loi Gayssot, ou bien pensez-vous qu’il s’agit d’un cadre de censure tout à fait différent ?
@Pyraquadel
[Soutiendriez-vous les arguments que vous présentez ici contre la Loi Gayssot, ou bien pensez-vous qu’il s’agit d’un cadre de censure tout à fait différent ?]
Bien entendu. Notez d’abord que la loi Gayssot est une loi pénale, et qu’en tant que telle elle exclut toute application "préventive". La loi Gayssot permet de punir la négation des crimes contre l’humanité tels que reconnus par les tribunaux de Nuremberg ou les juridictions françaises. Mais pas d’interdire préventivement un spectacle ou une conférence sous prétexte que de tels propos pourraient être tenus.
Maintenant, sur la question de la liberté d’expression. La loi Gayssot restreint, c’est indubitable, la liberté d’expression. Elle établit une vérité officielle qu’il est interdit de contester. De ce point de vue, elle est certainement criticable. En même temps, et compte tenu de la place qu’occupent les crimes nazis dans notre histoire contemporaine, il faut reconnaître qu’il y a un intérêt public à ce que certains débats ne soient pas ouverts. Il y a des domaines dans lesquels je suis prêt à reconnaître qu’une "vérité officielle" est nécessaire. Mais ces domaines doivent être précisement définies par le législateur. On ne peut permettre, comme c’est le cas dans l’affaire Dieudonné, que ce soit un ministre ou un juge qui déterminent ce qu’on peut ou pas dire.
Enfin vous comprenez ce que l’évidence montre depuis le référendum de 2005. Et vous avez très bien compris où cela va nous mener. Le travail rend libre! Et vous savez j’imagine très bien ce qu’il nous reste à faire.
@petites-gens
Je suis désolé, mais je n’ai rien compris.
Cher Descartes,
vous avez résumé à votre manière exactement ce que je pense: elle est parfaite!
Jusqu’au 21 avril 2002, soit lors du premier tour des présidentielles dont on rappelle tous les résultats, j’ai plus ou moins fait parti du camp du "Bien", comme vous l’appelez. J’ai même ressenti de la culpabilité de ne pas avoir voté Jospin au premier tour. Et puis, le temps passant, je me suis mis à réfléchir: comment se fait-il que l’anti-racisme ait pu échouer à ce point pour Jean-Marie Le Pen soit présent au second tour d’une présidentielle? En clair, le discours bien-pensant avait échoué, et il devait se remettre en question, ce qu’il ne fit jamais. J’ai compris par la suite que c’était surtout un discours auto-justificateurs, mais surtout qu’il servait des intérêts. Lesquels, je n’arrivais pas trop à le comprendre. J’ai mis trois ans à trouver la réponse, et elle est venue précisément lors de la campagne sur le référendum sur le TCE. Quand j’ai vu que les bien-pensants et autres oui-ouistes européïstes traitaient leur contradicteurs de racistes, fascistes, factieux et pour les plus charitables, de ringard, de perturbé ou de craintifs, j’ai eu une révélation: pour la première de ma vie, je me suis retrouvé du mauvais côté de la balance… Cette fois-là, on l’a échappé belle, car le NON au TCE avait gagné. J’ai fini par comprendre que le débat politique en France, ainsi que la liberté d’opinion sont devenues des leurres depuis le tournant de l’Europe, soit depuis 1983. J’ai surtout songé à la manière avec laquelle j’avais pu traiter mes contradicteurs du temps où je pensais être "politically correct". Dès lors, quand les commissaires politiques et autres clergé médiatiques détenteurs du bien, du beau, du juste et du vrai m’ont pris pour un facho parce que je n’étais pas d’accord avec la doxa européiste, moi qui avais toujours été à gauche, ça m’a vraiment fait un choc…
Depuis lors, je défends le droit des gens à dire toutes les opinions, mêmes les plus "iconoclastes", dans la mesure où elles ne sont pas injurieuses et qu’elles ne tombent pas sur le coup de la loi. Mais pour cela, il a fallu un long cheminement dont je pense que peu de bobos adeptes de la politique de "gauche" bien-pensantes sont capables, car c’est tellement plus confortable et surtout rassurant d’être du côté du bien, particulièrement lorsque vos idées politiques sont à l’origines de l’appauvrissement et de l’affaissement de votre pays.
Corrigez-moi si je me trompe, mais quelqu’un avait dit qu’il y a pire que la mauvaise conscience: la bonne conscience. Avec Valls et ses collègues écolo-socialistes, on nage en plein dedans…
@CVT
[J’ai mis trois ans à trouver la réponse, et elle est venue précisément lors de la campagne sur le référendum sur le TCE. Quand j’ai vu que les bien-pensants et autres oui-ouistes européïstes traitaient leur contradicteurs de racistes, fascistes, factieux et pour les plus charitables, de ringard, de perturbé ou de craintifs, j’ai eu une révélation: pour la première de ma vie, je me suis retrouvé du mauvais côté de la balance… ]
Je partage tout à fait votre commentaire. Les termes utilisés par les eurolâtres pendant le débat sur le TCE ont atteint un niveau de violence tel, que je me demande si à leurs yeux la sauvegarde des « principes et valeurs » à laquelle fait référence le Conseil d’Etat n’aurait pas justifié que l’on interdise l’expression des adversaires au TCE. C’est pourquoi, j’insiste, il faut défendre la liberté de Dieudonné – aussi déplaisant soit le personnage – de peur que demain les mêmes arguments soient utilisés contre nous.
[J’ai fini par comprendre que le débat politique en France, ainsi que la liberté d’opinion sont devenues des leurres depuis le tournant de l’Europe, soit depuis 1983.]
N’exagérons rien. La liberté d’expression reste très large en France, et les réactions des simples citoyens dans l’affaire Dieudonné montre que les gens voient assez clair dans la tentative de Valls de fabriquer un « diable de confort » au gouvernement. Je doute que cette manœuvre rapporte beaucoup de partisans à notre ministre de l’Intérieur, même si une bonne partie de la classe politique chante ses louanges.
[J’ai surtout songé à la manière avec laquelle j’avais pu traiter mes contradicteurs du temps où je pensais être "politically correct". Dès lors, quand les commissaires politiques et autres clergé médiatiques détenteurs du bien, du beau, du juste et du vrai m’ont pris pour un facho parce que je n’étais pas d’accord avec la doxa européiste, moi qui avais toujours été à gauche, ça m’a vraiment fait un choc…]
Et oui… il n’y a rien de plus terrible que de se regarder dans le miroir que nous tendent les autres. Moi j’ai eu de la chance : je suis né d’un père stalinien à l’époque ou le mythe s’effondrait… cela m’a vacciné durablement contre le dogmatisme et a implanté pour toujours chez moi le doute cartésien…
[Corrigez-moi si je me trompe, mais quelqu’un avait dit qu’il y a pire que la mauvaise conscience: la bonne conscience.]
Je ne vous contredirait pas. Rien n’est plus dangereux qu’une personne convaincue de détenir la vérité…
[ La liberté d’expression reste très large en France, et les réactions des simples citoyens dans l’affaire Dieudonné montre que les gens voient assez clair dans la tentative de Valls de fabriquer un « diable de confort » au gouvernement. Je doute que cette manœuvre rapporte beaucoup de partisans à notre ministre de l’Intérieur, même si une bonne partie de la classe politique chante ses louanges.]
OK, nous ne sommes pas en dictature, et en plus, les Français ont assez vite compris la manip. Mais le problème n’est pas là: même sous la droite, je n’avais jamais vu un tel entêtement à vouloir imposer une opinion, au besoin en violant allègrement la séparation des pouvoirs! On nous aura tout fait, dans cette affaire… Êtes-vous sûr que les Français ont compris que l’affaire Dieudonné M’Bala M’Bala (c’est bizarre, tout le monde redécouvre son nom de famille…) va créer un précédent en matière de délit d’opinion?
Dans combien de temps allons-nous rentrer dans un univers à la ‘Minority Report’, où les gens sont jugés et condamnés pour des crimes qui n’ont pas encore commis, mais dont on prévoit qu’ils vont les perpétrer? Encore un effort, nous n’en sommes plus très loin!
Merci Descartes pour ce billet auquel je souhaite apporter mon soutien avec ce qui suit en complément:
La distinction entre racisme et antisémitisme me posait problème et je viens enfin de trouver la réponse qui pourtant me crevait les yeux: " élémentaire en fait mon cher Watson: les bien-pensants, du bon côté, ont créé et entretiennent cette ambiguïté tout simplement pour discréditer à la base toute critique, non pas contre les juifs, mais contre les politiques sionistes et/ou libéro-capitalistes, ce qui n’est pas la même chose."
Cela ne veut pas dire non plus que l’antisémitisme n’existe pas, au contraire, celui-ci vitaminé auprès des esprits simplistes par les conflits israélo-arabo-palestinien devient à mon avis des plus inquiétant, raison de plus encore une fois pour dissocier clairement anti-sionisme et antisémitisme.
Ces calamités se sont développées et se développeront encore plus tant que l’on refusera d’appeler un chat un chat, feignant l’inexistence des préoccupations légitimes des uns comme des autres.
L’affaire Dieudonné en est le parfait exemple qui nous revient en pleine gueule et celui qui croit que la victoire de M. Valls est une victoire pour la République est bien naîf et se fourre le doigt dans l’œil !
A la différence près que je ne partage pas leur foi, ni même une autre, j’estime que cette vidéo ci-après est FONDAMENTALE pour expliquer une bonne partie de ce qui se passe actuellement dans le monde, et aux moins ceux-la on ne pourra pas les taxer d’antisémitisme !
http://www.youtube.com/watch?v=TGifWkei7Uk
N’en déduisez pas pour autant que je suis convaincu que Dieudonné ne puisse puisse tomber lui-même dans ce piège de l’amalgame. Donc tout dérapage éventuel de sa part, à condition que ce dernier soit incontestablement légalement classable raciste, lui est bien évidemment opposable.
@Jean Mi
[L’affaire Dieudonné en est le parfait exemple qui nous revient en pleine gueule et celui qui croit que la victoire de M. Valls est une victoire pour la République est bien naîf et se fourre le doigt dans l’œil !]
Nos élites postmodernes ont trop tendance à croire que parce qu’on change les mots – ou parce qu’on les censure – on change les choses. L’histoire a montré au contraire que ce n’est pas parce qu’on ferme la bouche des gens qu’on arrive à changer leurs idées.
A la différence près que je ne partage pas leur foi, ni même une autre, j’estime que cette vidéo ci-après est FONDAMENTALE pour expliquer une bonne partie de ce qui se passe actuellement dans le monde, et aux moins ceux-la on ne pourra pas les taxer d’antisémitisme !
Descartes,
c’est très fort ce que vous avez écrivez là !
Bravo et merci !
PS: Je ne serais pas surpris que vous soyez copieusement plagié, mais ça n’arrive qu’aux meilleurs, bravo !
Il est trop fort ce Valls. Grâce à lui on se retrouve à défendre la liberté d’expression d’un pauvre type qui a « la culture politique d’une moule » (comme dirait Didier Porte), ou celle de Soral, mais ça revient au même, et qui diffuse une propagande antisémite digne des années trente à travers toute la France et jusque sur les plateaux de télévision iraniens. On n’attendait pas grand-chose des « socialistes », mais là… en quelque sorte, ils se surpassent.
Merci Descartes pour ces deux billets qui disent l’essentiel (j’ajoute que j’ai trouvé utiles les commentaires de Baruch de S. dans le billet précédent, et le débat qu’ils ont suscité.)
J’ajoute aussi que mimer un avortement fût-ce dans un lieu de culte catholique, ou se demander qui, des juifs ou d’Hitler, « a commencé », « qui a volé l’autre », en ajoutant « j’ai ma petite idée », ce n’est pas comparable à mes yeux (et Dieu saurait, s’il existait, que je ne goûte pas particulièrement la vulgarité des Femen, alors que je défends résolument la loi Veil). Quant à trouver drôle ces extraits du fameux spectacle intitulé « Le mur »…
Cette séquence navrante nous aura quand même permis d’entendre sur Canal+ notre Tatie Danielle (surnom donné par Emmanuel Todd à Finkielkraut dans Après la démocratie, une belle trouvaille) affirmer que, bien sûr, l’anti-sionisme « même le plus militant, le plus radical, me paraît une idéologie légitime », et qu’« on a le droit de non seulement de critiquer la politique d’Israël, mais même de s’interroger sur la légitimité de cet Etat ». Finkielkraut, si réac soit-il devenu, vaut mieux que la caricature qu’on fait de lui. Je trouve d’ailleurs que, face à Plantu à qui il reprochait (à raison à mon avis) de sombrer dans la confusion mentale, il était de loin le plus convaincant. Sauf… sur la question juridique de l’interdiction préalable (lien ci-dessous pour ceux qui ont raté ça).
@Joe Liqueur
[J’ajoute aussi que mimer un avortement fût-ce dans un lieu de culte catholique, ou se demander qui, des juifs ou d’Hitler, « a commencé », « qui a volé l’autre », en ajoutant « j’ai ma petite idée », ce n’est pas comparable à mes yeux (et Dieu saurait, s’il existait, que je ne goûte pas particulièrement la vulgarité des Femen, alors que je défends résolument la loi Veil). Quant à trouver drôle ces extraits du fameux spectacle intitulé « Le mur »…]
Personnellement, je me refuse à entrer dans une taxonomie de la haine et de la bêtise. Savoir si le fait de mimer avec un morceau de viande sanguinolente un avortement pendant une messe de noël est « plus haineux » ou « moins haineux » que de se demander publiquement qui des juifs ou de Hitler a commencé ne m’intéresse pas. Les deux sont des actes imbéciles, qui recherchent le succès du scandale, et qui ne font guère avancer le schmilblick. Les deux constituent des attentats contre les « valeurs et principes républicains ».
[Finkielkraut, si réac soit-il devenu, vaut mieux que la caricature qu’on fait de lui.]
Je ne crois pas que Finkielkraut soit devenu « réac ». J’aime la réplique de Michel Simon, qui disait que ce qui caractérise les réactionnaires, c’est qu’ils veulent garder ce qu’il y a de pire dans le passé. On peut accuser Finkielkraut de passéiste, certainement pas de réactionnaire.
Je sais qu’il est controversé, mais quand même. "Il", c’est ce Monsieur, qui a écrit en 2008 un livre appelé "Après la démocratie". A relire, avant censure.
Très bien cette réplique de Michel Simon… Chez Finkielkraut j’apprécie surtout une vraie rigueur intellectuelle et une vraie capacité au débat… c’est déjà pas mal.
Concernant ta première remarque, je constate qu’on n’est pas d’accord. Je viens de tomber sur le billet de Laurent de Boissieu, que je trouve très juste et qui me permet de te répondre en le citant :
"Bref, il n’y a pas "deux poids deux mesures" entre Dieudonné d’un côté et les Femens ou Charlie Hebdo de l’autre car il ne s’agit pas du tout de la même chose (attaque essentialiste contre un peuple supposé vs attaque existentialiste contre une religion)."
@Joe Liqueur
["Bref, il n’y a pas "deux poids deux mesures" entre Dieudonné d’un côté et les Femens ou Charlie Hebdo de l’autre car il ne s’agit pas du tout de la même chose (attaque essentialiste contre un peuple supposé vs attaque existentialiste contre une religion)."]
Je ne partage pas cet argument. Que les deux situations aient des différences n’implique pas qu’elles n’aient pas aussi des éléments communs qui justifient un même traitement. Dans les trois cas, il s’agit d’expressions provocatrices qui peuvent déranger ou choquer, et qui défient l’ordre public au même titre que les discours de Dieudonné. Pourquoi certaines atteintes à l’ordre public seraient-elles supportables, et pas les autres ? Qui décide ?
Bonjour,
[Les gens sympathiques, agréables, conformistes, qui suivent l’opinion générale ne sont jamais censurés. Cela n’arrive qu’aux autres, aux pelés, aux galeux, aux réprouves, à ceux qui dérangent. Voltaire le notait déjà : il n’y a pas de mérite particulier à se battre pour la liberté des gens qui nous ressemblent. Le véritable mérite est de lutter pour la liberté des gens qu’on n’aime pas.]
Profondément d’accord avec cette introduction, je me demande alors, comment vous pouvez vous inscrire en faux devant le commentaire que j’ai posté sur le billet " Dieudonné fais moi peur ".
J’écrivais:
[Les progrès de l’espèce humaine doivent infiniment plus aux "électrons libres" qu’aux électrons captifs.]
Pensez vous que Voltaire, en 1765, ne constituait-il pas un électrons libre, conspué par la "bienpensance" de son époque?
Et votre réponse:
[Méfiez vous de cette mythologie romantique. Non, l’immense majorité des « progrès de l’espèce humaine » viennent au contraire d’électrons captifs, parfaitement intégrés dans les structures sociales et professionnelles, ayant une excellente formation classique, bien notés par leurs pairs] ,
me semble en totale contradiction avec ce que vous affirmez quelques jours plus tard.
Même en acceptant l’hypothèse d’une certaine maladresse dans la rédaction de mon commentaire, chaque avancée significative – et je ne vise pas uniquement le domaine des sciences et techniques – a été la conséquence d’une proposition, d’une revendication, qui par définition ne rentrait pas précédemment dans les canons de l’orthodoxie. Sans rejeter à priori les "académies" que vous semblez porter au pinacle, je considère qu’elle sont par nature conservatrices et qu’elles ne peuvent, malgré leur utilité, promouvoir des actions de progrès.
J’avais employé à votre égard, le terme péjoratif de "individu de votre espèce", avec guillemets pour souligner, justement votre statut de blogueur contestataire, à celui qu’aurait pu avoir Voltaire si Internet avait existé au XVIIème siècle.
C’est pourquoi, à l’instar de Voltaire, la liberté et ses acteurs les plus avancés, les électrons libres évoqués, et il revient, à chacun qui prétend exercer sa libre conscience, de se doter de capacités de discernement. Les autres sont condamnés au rôle d’esclave.
Puisque nous sommes en début d’année, à l’heure des bilans, et sans le moins du monde exprimer une critique ad hominem, j’ai le sentiment néanmoins que vos réactions spontanées vont plus vers le non que vers le oui, alors même souvent, que les commentaires confortent votre position.
Je livre à votre sagacité cette réflexion d’ Arthur Schopenhauer
"Toute vérité franchit trois étapes. D’abord, elle est ridiculisée. Ensuite, elle subit une forte opposition. Puis, elle est considérée comme ayant été une évidence".
Ridiculisée d’abord par les ignorants et les jaloux, probablement,
Contestée ensuite par les lobbies et les notables, évidemment,
Admise au rang de vérité par les académies, tardivement.
@Marcailloux
[Pensez vous que Voltaire, en 1765, ne constituait-il pas un électrons libre, conspué par la "bienpensance" de son époque?]
Certainement pas. Voltaire était au contraire un homme parfaitement intégré. Ses pièces étaient jouées dans les théâtres officiels, il fut l’ami et le conseiller des princes. Qu’il soit entré en conflit avec certaines institutions ou personnages, oui. Mais cela n’en fait pas un « électron libre ». Voltaire était tout sauf un marginal.
[Même en acceptant l’hypothèse d’une certaine maladresse dans la rédaction de mon commentaire, chaque avancée significative – et je ne vise pas uniquement le domaine des sciences et techniques – a été la conséquence d’une proposition, d’une revendication, qui par définition ne rentrait pas précédemment dans les canons de l’orthodoxie.]
Possible. Mais le fait de formuler « des propositions, des revendications qui ne rentrent pas dans les canons de l’orthodoxie » n’est nullement le monopole des « électrons libres ». En général, quand ces « propositions » et « revendications » valent quelque chose, c’est qu’elles sont formulées au contraire par des gens ayant une formation parfaitement classique et qui sont bien insérés dans les milieux pensants de leur époque. Newton et Darwin, Marx et Freud, Einstein ou Curie, Copernic ou Kepler n’étaient pas des « électrons libres ».
[Sans rejeter à priori les "académies" que vous semblez porter au pinacle, je considère qu’elle sont par nature conservatrices et qu’elles ne peuvent, malgré leur utilité, promouvoir des actions de progrès.]
D’abord, je ne port pas les « académies » au pinacle. Je leur reconnais simplement un grand mérite, et c’est précisément le fait d’être « conservatrices ». Car des « conservateurs », il en faut. On a tendance à relever le conservatisme seulement quand il s’oppose à des idées « nouvelles » qui constituent un progrès. Seulement, toutes les idées ne sont pas bonnes à prendre, et certaines idées « nouvelles » sont destructrices. Le conservatisme des « académies » est peut-être néfaste lorsqu’il s’oppose aux progrès, mais il est certainement fort utile lorsqu’il s’oppose aux régressions…
[Puisque nous sommes en début d’année, à l’heure des bilans, et sans le moins du monde exprimer une critique ad hominem, j’ai le sentiment néanmoins que vos réactions spontanées vont plus vers le non que vers le oui,]
C’est certain : j’ai tendance à consacrer plus de temps à répondre à un commentaire avec lequel je ne suis pas d’accord qu’à un commentaire qui me jette des fleurs. Je trouve ceux qui ne sont pas d’accord avec moi plus intéressants…
[Je livre à votre sagacité cette réflexion d’ Arthur Schopenhauer : "Toute vérité franchit trois étapes. D’abord, elle est ridiculisée. Ensuite, elle subit une forte opposition. Puis, elle est considérée comme ayant été une évidence".]
Oui, l’ennui c’est que certaines personnes en déduisent que toute affirmation qui est d’abord ridiculisée est forcément une « vérité ». C’est inexacte : la plupart des idées qui sont d’abord ridiculisées sont tout simplement ridicules.
@ Rieux
Excusez-moi, votre commentaire m’était-il adressé ? (Je pose la question parce que je citais Emmanuel Todd.)
Des informations supplémentaires sur cette décision du conseil d’Etat
http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/01/11/affaire-dieudonne-le-conseil-d-etat-replique-aux-critiques_4346462_823448.html
"Le fait d’interdire un spectacle ne constitue-t-il pas une atteinte inédite à la liberté d’expression ?
Le Conseil d’Etat s’est prononcé en considération de sa jurisprudence, notamment les arrêts « commune de Morsang-sur-Orge » et « Benjamin », qui ont respectivement 18 et 81 ans d’âge. Il a, avec ce spectacle, été confronté à une situation inédite d’articulation entre la liberté d’expression et ses limites nécessaires dans une société démocratique."
""Qu’entendez-vous par « situation inédite » ?
Le Conseil d’Etat n’a jamais été confronté à des dossiers dont les caractéristiques étaient analogues à celles du spectacle qui a justifié les mesures d’interdiction. En particulier, c’est la première fois que se pose la question de savoir comment prévenir des provocations répétées à la haine et à la discrimination raciale et des propos portant atteinte à la dignité humaine."
"Dans ces affaires, il s’est situé dans la continuité de sa jurisprudence, qui est protectrice des libertés, mais qui a aussi intégré la dignité humaine comme composante de l’ordre public. Lorsqu’il se prononce, il le fait aussi au regard de la convention européenne des droits de l’homme, dont les articles 10 et 11 assortissent les libertés d’expression et de réunion de restrictions nécessaires et proportionnées."
Qu’en pensez-vous ? Un jugement en rupture ou en continuité avec les précédents ?
@dafdesade
[Qu’en pensez-vous ? Un jugement en rupture ou en continuité avec les précédents ?]
Pour moi, il y a rupture. L’idée qu’il faille "prévenir" les délits est certainement très nouvelle dans notre jurisprudence, particulièrement en matière de liberté d’expression.
un commentaire d’un lecteur de l’article (http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/01/11/affaire-dieudonne-le-conseil-d-etat-replique-aux-critiques_4346462_823448.html) retient mon attention :
"Le problème de ce jugement résulte de l’agrégation ou collusion entre le principe du respect de l’ordre public parfaitement déterminé en droit et celui du respect de la dignité de la personne humaine qui est nécessairement indéterminé en droit, dès lors qu’il est l’enjeu d’un débat moral nécessairement ouvert dans une démocratie pluraliste. Associer à un principe de droit une interprétation morale discutable est juridiquement problématique du point de vue du respect des libertés publiques."
@dafdesade
Tout à fait. Le manque de courage de nos politiques fait reposer une charge de plus en plus lourde sur le juge, à qui on demande non seulement d’interpréter la loi – et donc la volonté du législateur – mais aussi de faire des jugements moraux, ce qui n’est pas du tout son rôle.
Un article qui pourra vous intéresser de Serge Sur
Professeur émérite de droit public à l’Université Panthéon-Assas
http://libertescheries.blogspot.fr/2014/01/les-invites-de-llc-serge-sur-jour-de.html
@dafdesade
[Un article qui pourra vous intéresser de Serge Sur]
Pour le juriste amateur que je suis, c’est très satisfaisant de lire sous la plume d’un professeur émérite de droit public une analyse qui finalement ressemble beaucoup à la mienne… Je partage en tous points l’analyse de Serge Sur. Le Conseil d’Etat s’est couvert de ridicule dans cette affaire.
Et bien quel tintamarre…
Tout d’abord une chose, d’où je parle comme on aime le dire. J’apprécie Dieudonné pour des spectacles très bons qu’il a fait (notamment "Mes excuses" " 1905" et la deuxième partie de "J’ai fais le con", la première étant franchement chiante). Ses propos ont été condamnés à plusieurs reprises par des tribunaux. Je ne partage pas du tout son obsession pour les "banquiers esclavagistes juifs". Tu ne seras peut-être pas d’accord mais je pense que le rôle prééminent des marchés financiers dans le financement des économies sont un des éléments qui mettent en danger la souveraineté nationale et qu’il va bien falloir s’en occuper. Donc sa "critique économique" est complètement ridiculisée par ce poncif éculé du juif usurier . Cela discrédite son "antisionisme" et ce qui pourrait être une vulgate (je dis bien vulgate et pas analyse) marxiste de (bas) premier niveau devient de la vulgate antisémite inutile.
Mais paradoxalement, je respecte jusqu’à un certain point l’obstination provocatrice qu’il a contre les associations communautaires et notamment le CRIF dont j’aimerais bien que l’on m’explique pourquoi il est aussi incontournable que cela. Je ne comprends pas. Est-ce à ce poids que tient à se destiner le CRAN ? Pour quels motifs ? Tu pourras m’objecter que Dieudonné s’attaque plus régulièrement au CRIF qu’ au CRAN et je te rejoindrais sur ce point, car dans sa prétendue lutte anti-communautariste il devrait y mettre la même énergie. Alors, pourquoi le fait-il plus pour l’un que pour l’autre ? Difficile à dire. Même si j’ai ma petite idée. Tout comme il sera dorénavant difficile de vouloir faire admettre l’idée que ce lobby communautaire n’a pas le poids que ses détracteurs lui impute.
Il est quand même très très étonnant que PERSONNE, que ce soit homme politique, journaliste ou autre, n’ait trouvé l’appel de trouble à l’ordre public explicite formulé par Mr Klarsfeld (membre du conseil d’etat) déplacé et inquiétant. Donc voilà la situation : un ministre garant de l’ordre public s’attaque à un humoriste au succès youtubiste parce qu’il mettrait en danger la République. De fait, un avocat dont la défense de la politique ségrégationniste d’Israël est de notoriété publique appelle au désordre public pour soutenir la circulaire du ministre de l’intérieur.
Or la bienpensance dit la chose suivante : " il y a un problème avec les théories du complot. Nos citoyens y sont trop sensibles, nous devons faire de la pédagogie pour les combattre". Manuel Valls s’est-il désolidarisé de cet appel ? Non. Ni le CRIF, ni d’autres. Donc je souhaite bon courage pour lutter contre l’idée du complot, ses adversaires travaillant eux-mêmes à lui donner des éléments de véracité. Je tiens à préciser que je décris la situation, je n’adhère pas aux théories du complot que ce soit le 11 septembre (je conseille aux lecteurs de ce blog l’excellent numéro hors série de l’AFIS sur ce sujet) ou autres. Mais la ficelle est tellement énorme que je me dis qu’il faut être sacrément idiot pour la dérouler.
J’ai écouté bien des débats, car je pense que contrairement à d’autres affaires, celle -là n’est pas si insignifiante que cela. Présentons les faits : nous avons un gouvernement qui a la majorité à l’Assemblée Nationale, au Sénat, dispose de toutes les régions sauf l’Alsace et la Corse (je crois), a connu un succès retentissant aux dernières municipales mais qui est dangereusement menacé par la montée d’un nationalisme raciste et antisémite virulent, incarné selon Valls par Dieudonné et Alain Soral. Quels sont les relais institutionnels de cette pensée ? Aucuns. Ah si, le Front National. Nombre de mairies sur 36000 communes ? 50 tout au plus depuis 40 ans ? Nombre de députés ? Nombre de sénateurs ? Donc, un tribun (doué soit dit en passant) et un humoriste suivis par une minorité d’individus (et dont la meilleure solution est de les traiter d’antisémites) mettent en danger la République ? Et pourquoi pas la Pologne pendant que nous y sommes.
Dans tous ces débats aucun des intervenants n’a souligné une chose : la délégitimation déjà conséquente mais de plus en plus abyssale de nos élites politiques. Car l’une des causes du succès de Dieudonné c’est cela et notamment la quenelle vu (et à l’origine c’est bien cela) comme un geste anti-système. Un bras d’honneur. Pourquoi ? Parce que sa critique protéiforme tacle justement un peu partout. Raison pour laquelle justement je ne lui vois pas de destinée politique structurée, mais peut-être que je me trompe.
Bref, trente ans d’européisme béat qui ont conduit à ce qui selon moi, fera date, à savoir le piétinement pur et simple du vote de 2005 par celui de Versailles en 2008. Les anathèmes constamment projetés à la tronche des partisans d’une rupture avec l’euro et l’UE.
Trente ans d’aveuglement économiques, de discours d’impuissance, d’affaiblissement de la souveraineté nationale. Bref, les élites politiques françaises travaillent elles-mêmes à leur délégitimation et je pense qu’une partie du succès de Dieudonné tient là-dedans. En ouvrant la brèche au communautarisme et en s’éloignant considérablement d’idéaux plus universels nos pontes médiatiques et politiques se retrouvent à poil. Alors quand on loue les Femen, les caricatures de Mahomet mais qu’on montre tous les signes possibles pour dire qu’on ne peut plus s’attaquer aux Juifs il ne faut pas s’étonner du retour du bâton. La réponse ? "Plus de pédagogie". Donc citoyens français la Shoah on va encore plus vous l’enseigner et en parler. Et ainsi encore plus vous faire ressentir qu’il y a bien une souffrance au-dessus des autres et alimenter toute cette sphère.
Je partage ton avis sur l’interdiction qui va être contre-productive et qui en plus le fait pour de très mauvaises raisons. Valls a gagné une bataille mais pas la guerre. Et on ne sait pas où tout cela va mener. Mais quelque chose me dit qu’on ne pourra pas trop en rigoler…
@LCH
[Mais paradoxalement, je respecte jusqu’à un certain point l’obstination provocatrice qu’il a contre les associations communautaires et notamment le CRIF dont j’aimerais bien que l’on m’explique pourquoi il est aussi incontournable que cela. Je ne comprends pas. Est-ce à ce poids que tient à se destiner le CRAN ? Pour quels motifs ?]
Pour être honnête, je n’aime pas Dieudonné. Au delà de son antisémitisme obsessionnel, je n’aime pas le genre d’humour qu’il fait. Je n’aime pas les hystériques. Je n’aime pas les gens qui crient. Je n’aime pas les gens qui utilisent un langage ordurier. Et je ne les aime pas même quand ils défendent des idées proches des miennes. J’aime le comique humaniste, j’aime la tendresse, j’aime la poésie. J’aime l’humour de Cabu, de Devos, de Le Luron. Mais la question n’est pas là. Dieudonné ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est le principe de liberté d’expression.
Quant à la question communautaire… l’anticommunautarisme de Dieudonné est à éclipses. Intransigeant lorsqu’il s’agit du CRIF, beaucoup plus discret lorsqu’il s’agit du CRAN. Comme je l’ai signalé dans une autre réponse, Dieudonné tient souvent un langage communautaire, par exemple lorsque dans un entretien il manifeste son désir que ses enfants « aient accès à leur histoire ».
[Alors, pourquoi le fait-il plus pour l’un que pour l’autre ? Difficile à dire.]
Pas si difficile que ça, au contraire… Va falloir vous résigner : Dieudonné est antisémite. On pourra gloser sur les voies par lesquelles il est arrivé à ce résultat, mais le résultat ne fait, à mon avis, aucun doute. A partir de là, pas besoin de sortir de Polytechnique pour comprendre que certaines « communautés » lui soient haïssables, et pas d’autres. Et cela indépendamment de la réalité du pouvoir de tel ou tel « lobby communautaire ».
[Il est quand même très très étonnant que PERSONNE, que ce soit homme politique, journaliste ou autre, n’ait trouvé l’appel de trouble à l’ordre public explicite formulé par Mr Klarsfeld (membre du conseil d’etat) déplacé et inquiétant.]
Ce n’est pas vrai. Certains se sont inquiétés, d’autant plus que Mr Klarsfeld est conseiller d’Etat par la grâce de Sarkozy Ièr, et qu’un tel appel pourrait très bien être considéré une violation du serment de magistrat.
[J’ai écouté bien des débats, car je pense que contrairement à d’autres affaires, celle -là n’est pas si insignifiante que cela. Présentons les faits : nous avons un gouvernement qui a la majorité à l’Assemblée Nationale, au Sénat, dispose de toutes les régions sauf l’Alsace et la Corse (je crois), a connu un succès retentissant aux dernières municipales mais qui est dangereusement menacé par la montée d’un nationalisme raciste et antisémite virulent, incarné selon Valls par Dieudonné et Alain Soral. Quels sont les relais institutionnels de cette pensée ? Aucuns. Ah si, le Front National. ]
Même pas. Comme je l’ai dit dans mon papier, on juge un homme à la qualité de ses ennemis. Dieudonné est un humoriste isolé, qui n’est soutenu publiquement par aucune institution civile ou religieuse, par aucune organisation politique ou syndicale, par aucune ONG ayant un certain poids, qui ne peut compter que sur des soutiens à titre personnel et encore, bref, qui dans une rare unanimité est considéré comme un pestiféré par l’ensemble des élites et des gens qui comptent. Que Valls en soit réduit à ériger un tel individu en « diable de confort » pour être sûr de l’emporter montre à quelle extrémité ce gouvernement en est réduit.
@ Descartes
Quand je disais " j’ai ma petite idée", je pensais à "ça" bien évidemment. Je n’ai pas vu son dernier spectacle mais des amis plus au fait que moi ont été déçus notamment sur la récurrence des saillies antisémite qui, déjà, dans l’avant dernier s’étaient montré plus régulières (notamment le "championnat du monde de la victimisation" bonne idée qui perd de sa superbe en plein vol). Malgré cela, la cabale menée contre ce personnage apprécié encourage à défendre la liberté d’expression et, peut-être à tort, lui avec. La question est jusqu’à quand !
Quant au Front National c’était ironique (cf suite de ma phrase) car non seulement le personnage est trop encombrant mais comme je l’écrivais, je ne vois pas quel genre de ramification efficace ce discours polymorphe et inconséquent peut donner. Maintenant, en spectateur critique, je dois avouer que ce tintamarre m’a un peu remonté et qu’il est quand même effarant d’en arriver à tirer une aussi grosse ficelle, aussi "diable de confort" soit elle. Bon les associations officielles de l’anti-racisme ont de quoi grignoter des subventions pendant longtemps car voilà la menace des cinq prochaines années
Maintenant je ne suis pas sûr qu’il y ait tant de danger que cela pour la liberté d’expression d’opinions, notamment sur l’Europe. Le fonctionnement actuel n’a pas besoin de ça après tout. Tout se fait comme si l’euroscepticisme n’existait quasiment pas. Un mot suffit à disqualifier une construction argumentative. Choisissez : archaïque, nationaliste, protectionniste, nostalgique, passéiste, isolationiste, souverainiste etc etc etc. Bon à partir du moment où par optimisme angélique 85% des médias diffusent ce message avec 85% de la classe politique, je ne vois pas trop comment et sous quel prétexte on tairait cette opinion de manière délictuelle. Sauf si…sauf si le totem est gravement mis en danger par un vrai mouvement populaire plus ou moins international (3-4 nations par exemple) et que de la violence s’y mêle. Si non éclaire moi, car dans le pacifisme relatif de notre époque,il y a déjà les bons moyens pour court-circuiter une idée, la minorer et la ridiculiser : les médias (non pas en pouvoir d’influence mais de délimitation du cadre) ont précisément cette fonction et 2005 devrait suffire à nous le rappeler. Et puis, c’est ma marotte, le premier coup de censure c’était 2008 où on a voulu lavé un "vote sale" et fait taire le suffrage universel. Ce n’est pas un fait d’arme particulier et certainement pas un motif de gloire mais nous n’étions pas beaucoup à Versailles ce jour-là…
Je pense que c’est plus inquiétant sur d’autres sujets. Le communautarisme et la religion par exemple. A mon avis ça se jouera plus là dessus. Et si la Justice, corps institutionnel de médiation, commence à aller dans le sens du pouvoir, je donne pas trop cher des humoristes, écrivains et autres provocateurs. Mais, et c’est peut-être plus philosophique, n’est-ce pas là le point d’arrivée du "libéralisme" qui en consacrant l’extension des droits à l’infini ne nivelle pas par le bas la liberté d’expression au nom d’un droit au respect, à la souffrance, à l’héritage de la souffrance, à la dignité humaine ?
@Descartes,
[J’aime l’humour de Cabu, de Devos, de Le Luron. Mais la question n’est pas là.]
Cabu? Là, vous m’étonnez! Je l’appréciais pas mal dans le temps, mais j’ai plus de mal depuis qu’il s’en prend à ceux qui critiquent la construction européenne en les traitant de facho. C’est d’ailleurs l’un de ses dessins dans Charlie Hedbo qui m’a poussé à ne plus jamais acheter ce torchon…
Cabu incarne l’esprit 68-ard par excellence, avec le mépris du peuple incarné par son désormais célèbre Beauf, incarnation du version négatif du peuple français (franchouillard, devrais-je dire). La seule chose qui fasse que j’apprécie ses dessins, c’est son anti-cléricalisme radical et oecuménique: contrairement à la gauche laïcarde moderne, trouillarde et lâche dès qu’il s’agit de s’attaquer à l’islam et au judaïsme en tant que religion, Cabu n’épargne personne: pas un rabbin, un imam, un bonze ou un prêtre n’a subit un jour les foudres de ses caricatures… Il est l’un des derniers caricaturistes à être cohérent et conséquent dans son anti-cléricalisme. Aujourd’hui, en France, le mot laïc semble être synonyme d’anti-catholique, alors que le pratique religieuse dans notre pays est en train de relever de l’anecdote. Je pense que c’est d’ailleurs l’une des raisons de la multiplication des provocations anti-catholique de ces harpies de Femen, mais également du gouvernement: l’église étant déjà à terre, il est assez facile d’en faire un diable de confort. Par contre, quid des provocations des islamistes qui contrôlent des quartiers entiers, ou pire, qui commencent à imposer des exigences dans certaines universités françaises?
L’acharnement de la gauche bobo (j’exclus donc la gauche républicaine, qui est en voie de disparition), et en particulier du gouvernement, envers les catholiques est surtout un signe de lâcheté, et comme vous le signalez vous-même, à l’image de la vindicte de Valls contre Dieudonné, quand on s’attaque à un adversaire aussi faible, c’est un signe d’extrême faiblesse…
@LCH
[Maintenant je ne suis pas sûr qu’il y ait tant de danger que cela pour la liberté d’expression d’opinions, notamment sur l’Europe. Le fonctionnement actuel n’a pas besoin de ça après tout. Tout se fait comme si l’euroscepticisme n’existait quasiment pas. Un mot suffit à disqualifier une construction argumentative. Choisissez : archaïque, nationaliste, protectionniste, nostalgique, passéiste, isolationiste, souverainiste etc etc etc.]
Ce que vous dites était vrai aussi longtemps que le « souverainisme » ne représentait qu’une petite gêne pour l’establishment eurolâtre, une sorte de piqûre de moustique, qui vous démange certes mais qui ne porte pas à conséquence. On pouvait se permettre de traiter l’affaire par le mépris. Mais cela a changé avec le naufrage du traité constitutionnel. Depuis, le vote « souverainiste » est devenu un véritable danger, et les griffes sont sorties. Lorsque le premier ministre grec déclare qu’il est temps de réprimer « les extrémistes qui veulent la sortie de l’Europe et de l’Euro », cela rappelle quand même des choses.
[Bon à partir du moment où par optimisme angélique 85% des médias diffusent ce message avec 85% de la classe politique, je ne vois pas trop comment et sous quel prétexte on tairait cette opinion de manière délictuelle.]
Faites confiance à au génie inventif de nos politiciens, et au talent du Conseil d’Etat pour les justifier.
[Je pense que c’est plus inquiétant sur d’autres sujets. Le communautarisme et la religion par exemple. A mon avis ça se jouera plus là dessus. Et si la Justice, corps institutionnel de médiation, commence à aller dans le sens du pouvoir, je donne pas trop cher des humoristes, écrivains et autres provocateurs.]
Je partage votre sentiment. C’est sur les questions religieuses et communautaires que le liberticide risque de démarrer – c’est d’ailleurs bien entamé… – mais cela pourrait vite aller dans d’autres domaines. Avec le raisonnement orwellien du genre « l’Europe c’est la paix, l’anti-Europe est donc la guerre », ça peut dégénérer rapidement…
@CVT
[Cabu? Là, vous m’étonnez! Je l’appréciais pas mal dans le temps, mais j’ai plus de mal depuis qu’il s’en prend à ceux qui critiquent la construction européenne en les traitant de facho. C’est d’ailleurs l’un de ses dessins dans Charlie Hedbo qui m’a poussé à ne plus jamais acheter ce torchon… Cabu incarne l’esprit 68-ard par excellence, avec le mépris du peuple incarné par son désormais célèbre Beauf, incarnation du version négatif du peuple français (franchouillard, devrais-je dire).]
Je n’ai pas dit que je partageais les idées de Cabu. Mais j’aime son humour. Il y a toujours dans ses dessins une observation de la réalité qui est souvent très juste, et une grande tendresse pour ses personnages, y compris le « beauf », même si je partage le sens de votre commentaire. Cabu a d’ailleurs fait jusqu’à un certain point son autocritique, puisque son « nouveau beauf » est un « bobo » dépeint d’une manière non moins corrosive.
Je me souviens en particulier d’un dessin de Cabu qui résume un peu son humour. Devant un panneau électoral ou l’on voit l’affiche de Le Pen avec le slogan « Mes idées ? Ce sont les vôtres » une mémé à cabas remarque « tiens, je le croyais plus intelligent que ça !».
@Descartes,
[Je partage votre sentiment. C’est sur les questions religieuses et communautaires que le liberticide risque de démarrer – c’est d’ailleurs bien entamé… – mais cela pourrait vite aller dans d’autres domaines. Avec le raisonnement orwellien du genre « l’Europe c’est la paix, l’anti-Europe est donc la guerre », ça peut dégénérer rapidement…]
Il suffisait de demander :-((( :
http://pcfbassin.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=12514:a-samaras-reclame-linterdiction-des-partis-qui-veulent-sortir-la-grece-de-lue-et-de-lotan&catid=63:grece&Itemid=9
Bonjour Descartes,
Dieudonné n’est qu’un prétexte pour Valls afin d’instaurer un certain climat de terreur. Au travers son cas épinglé par le Conseil d’Etat, c’est nous tous qui allons devoir faire profil bas ! Déjà deux élèves ont dû en subir les frais, suite à la délation de leur professeur ! La moindre insinuation sur un geste ambigu pourra faire condamner quiconque pour "apologie de crime contre l’humanité" ! Les interprétations étant subjectives et les condamnations expéditives, il y a de quoi se faire un sang d’encre !
C’est cela qu’encourage Valls intrinsèquement et ça va sentir de plus en plus mauvais et mettre en avant les plus vils comportements.
Finalement, acculé, Dieudonné pris dans les griffes du loup est obligé de reculer et de proposer un autre spectacle (où on imagine qu’ il critiquera tout le monde sauf les juifs), écrit en seulement trois jours, ne serait-ce que pour pouvoir bouffer, mais il n’est même pas certain que l’interdiction de se produire sera levée ! Parce que la vraie raison de la chasse à l’homme, ce n’est pas son antisémitisme supposé ! Rien ne le prouve à 100 % et vive la confusion avec l’anti-sionisme que l’on propage pour mieux brouiller les esprits !
Quant au tweet de Mélenchon où il exprime sa déception avant que le Conseil d’Etat n’intervienne, il est éloquent et pour le coup c’est moi qui aurait pu être déçue et pas que moi (mais cela fait belle lurette que je ne le calcule plus vraiment), d’autant plus que sur son blog, la liberté d’expression est déjà largement restreinte.
Pour sa défense, certains qui sont encore accrochés à ses basques estiment qu’il ne peut pas faire autrement. Je ne suis pas d’accord, il lui suffisait sans dédouaner Dieudonné, pour autant quant à ses propos que chacun est en droit de bien ou mal considérer, de mettre l’accent sur la défense de la liberté d’expression et sur cela seulement. Ca lui aurait évité de laisser penser qu’il soutenait Valls ou alors il craint tant que ça pour son image ? la peur d’être taxé d’anti-sémistime lui aussi si n’intervenant pas dans le sens de la bien-pensance ?
Toute cette histoire est lamentable et n’augure rien de bon.
Vous-mêmes Descartes, ne craignez-vous pas de ne plus pouvoir un jour tenir votre blog et ce de manière totalement anonyme comme vous le faites en ce moment, sans craindre pour votre emploi ou de sentir une menace portée sur les vôtres afin de vous en dissuader ? La prochaine étape visiblement sera de serrer la vis sur le net et le flicage extrême, en perspective, sur toute la toile comme en Chine ! Barbier en rêve. Y arriveront-ils ?
Hier chez Ardisson, tout ce beau monde sur le plateau énonçait l’éventualité d’interdire aussi les vidéos de Dieudonné sur Youtube !!!
Cordialement
@L’inconnue de l’orient express
[Dieudonné n’est qu’un prétexte pour Valls afin d’instaurer un certain climat de terreur.]
Tout de suite les grands mots… n’exagérons rien. Valls, ce n’est pas Pinochet, et je ne vois pas que les gens aient été trop terrifiés par ses coups de menton.
[Parce que la vraie raison de la chasse à l’homme, ce n’est pas son antisémitisme supposé !]
« Supposé » ? Faut tout de même pas exagérer…
[Rien ne le prouve à 100 % et vive la confusion avec l’anti-sionisme que l’on propage pour mieux brouiller les esprits !]
Faut quand même s’en tenir aux faits. Regretter que Patrick Cohen n’ait pas fini dans les chambres a gaz, ce n’est pas de « l’antisionisme ». Faut arrêter les bêtises et appeler un chat un chat. Dieudonné est indéfendable. Si j’ai fait deux papiers sur cette affaire, ce n’est pas pour défendre Dieudonné, mais pour défendre un principe, celui de la liberté de parole.
[Quant au tweet de Mélenchon où il exprime sa déception avant que le Conseil d’Etat n’intervienne, il est éloquent et pour le coup c’est moi qui aurait pu être déçue et pas que moi]
J’ai remarqué qu’il n’est pas intervenu pour féliciter le Conseil d’Etat d’avoir renversé le jugement…
[Pour sa défense, certains qui sont encore accrochés à ses basques estiment qu’il ne peut pas faire autrement. Je ne suis pas d’accord, il lui suffisait sans dédouaner Dieudonné, pour autant quant à ses propos que chacun est en droit de bien ou mal considérer, de mettre l’accent sur la défense de la liberté d’expression et sur cela seulement.]
Il se serait fait crucifier par ses propres partisans qui, comme vous pouvez l’expérimenter sur son blog chaque jour, ont de la liberté une vision assez restrictive. On l’a déjà vu avec l’affaire Méric : la galaxie gauchiste est foncièrement anti-universaliste. Les droits, les libertés, c’est pour les gens comme nous. Les autres n’ont qu’à bien se tenir.
[Vous-mêmes Descartes, ne craignez-vous pas de ne plus pouvoir un jour tenir votre blog et ce de manière totalement anonyme comme vous le faites en ce moment, sans craindre pour votre emploi ou de sentir une menace portée sur les vôtres afin de vous en dissuader ?]
Je ne sais pas. Peut-être qu’un jour la superbe liberté dont je jouis sera menacée. Rien n’est acquis dans ce bas monde, et ce n’est que par notre vigilance et notre mobilisation qu’on peut protéger nos droits.
Au fait, Descartes, Corbières, vous avez lu ce qu’il en pense de cette histoire Dieudonné, sur son blog ! il veut carrément censurer le net ! ça craint dit donc !
http://www.alexis-corbiere.com/index.php/post/2014/01/07/Affaire-Dieudonn%C3%A9-%3A-Non-au-business-de-l%E2%80%99antis%C3%A9mitisme-!
@L’inconnue de l’orient express
"Pardonnez-les, seigneur, ils ne savent pas ce qu’ils font"…
Même si on ne peut qu’être en désaccord avec certains propos de Dieudonné (puisqu’il nie clairement des faits historiques, à mon sens il est normal d’avoir des interprétations différentes sur des faits historiques mais pas de nier leur existence), il faut effectivement défendre sa liberté à dire n’importe quoi (même si c’est moralement difficilement supportable puisqu’en niant des crimes historiques, il nie la souffrance de personnes). Parce que au-delà de ce cas, nous sentons bien au quotidien qu’une chape de plomb pèse sur nos têtes dès qu’on énonce une opinion qui sort du cadre de la bien-pensance.
Aujourd’hui c’est Dieudonné qui est réduit au silence, hier c’est Zemmour qui fut condamné pour avoir dit que les noirs et les arabes commettaient la plupart des actes de délinquance en France (ce qui pour le coup semblait être une vérité statistique, même s’il est interdit de faire ce genre de statistiques en France), et demain à qui le tour ? Peut-être qu’il sera interdit de proner la sortie de la France de l’UE, comme en Grèce : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/a-samaras-reclame-l-interdiction-141807
Il ne faut pour autant tout de même pas croire que tous ceux qui prennent la défense de Dieudonné sont des super-héros dignes des résistants de la première heure en 1940. Depuis cette affaire, Dieudonné a récolté pas moins de 300 000 "j’aime" sur son compte Facebook. Des petits opportunistes sans aucune envergure peuvent ainsi voir dans la défense de Dieudonné un moyen d’obtenir une petite notoriété et une reconnaissance inespérée. J’en veux pour exemple le député belge Laurent Louis, une nullité intégrale, qui en a profité pour faire une vidéo de soutien à Dieudonné vue par plus de 320 000 personnes http://www.youtube.com/watch?v=DGQlQgtr4II En fait, c’est davantage un soutien pour lui-même, et beaucoup de petits narcissiques m’as-tu-vu, de supers chevaliers du net pourraient avoir la tentation de se servir de cette affaire pour faire le buzz (triste époque).
@Koko
[il faut effectivement défendre sa liberté à dire n’importe quoi (même si c’est moralement difficilement supportable puisqu’en niant des crimes historiques, il nie la souffrance de personnes).]
Enfin, pas tout à fait. La loi punit explicitement le fait de nier les crimes contre l’humanité tels qu’ils ont été reconnus par le tribunal international de Nuremberg et par les juridictions françaises. On peut critiquer cette loi, qui établit de fait un « vérité officielle », mais c’est la loi. Je ne suis pas contre le fait que la loi doive, pour des raisons diverses, apporter des limites à la liberté d’expression. Ce qui me gêne plus, c’est que le jugement moral d’un ministre puisse le faire.
[Peut-être qu’il sera interdit de proner la sortie de la France de l’UE, comme en Grèce : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/a-samaras-reclame-l-interdiction-141807%5D
C’est un risque très réel. Pour ceux qui se souviennent, les accusations qui avaient été proférées par le camp eurolâtre lors du référendum de 2005 contre les partisans du « non » ressemblaient drôlement à celles qu’on entend ces jours-ci dans leur ton sinon dans leur formulation exacte. Là aussi il s’agissait de « violation des valeurs et principes ». Plus près de nous, on se souvient de Mélenchon accusant de « maréchalisme » ceux qui voulaient sortir de l’Euro.
[Il ne faut pour autant tout de même pas croire que tous ceux qui prennent la défense de Dieudonné sont des super-héros dignes des résistants de la première heure en 1940.]
Bien sur que non. D’abord, parce qu’à soutenir Dieudonné on ne risque pas encore la déportation en Allemagne. Et puis en ce qui me concerne, je récuse l’idée que « j’aurais pris la défense de Dieudonné ». J’ai pris la défense d’un principe, celui de la liberté de parole. Aujourd’hui, la violation de ce principe concerne Dieudonné, mais c’est le principe qui m’intéresse, pas la personne.
" Parce que au-delà de ce cas, nous sentons bien au quotidien qu’une chape de plomb pèse sur nos têtes dès qu’on énonce une opinion qui sort du cadre de la bien-pensance.
Aujourd’hui c’est Dieudonné qui est réduit au silence, hier c’est Zemmour qui fut condamné pour avoir dit que les noirs et les arabes commettaient la plupart des actes de délinquance en France (ce qui pour le coup semblait être une vérité statistique, même s’il est interdit de faire ce genre de statistiques en France), et demain à qui le tour ? Peut-être qu’il sera interdit de proner la sortie de la France de l’UE, comme en Grèce : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/a-samaras-reclame-l-interdiction-141807"
Je crois qu’en effet nous sommes sur une très mauvaise pente, très glissante…à ne pas sous-estimer!
Cher Descartes!
Tout d’abord, je tiens à vous signifier que je suis d’accord avec vous sur le fond, même si je trouve que vous poussez un peu sur la fin avec le poème… On n’en n’est pas encore là… Restons vigilants cependant.
Pour ce qui est du droit, il ne s’agit pas réellement d’un revirement de jurisprudence comme on l’entend dire depuis 2-3 jours, cela pour plusieurs raisons :
-Ce n’est qu’une ordonnance du CE et non un arrêt; la portée d’une décision prise par un juge unique n’a que peu de portée.
-Elle a été rendue à la suite d’un référé-liberté, procédure très particulière qui ne revient pas à juger l’affaire au "fond". On pourra parler d’un revirement si l’ordonnance est conforté par un arrêt rendu en formation solennelle.
-Le régime français en matière de réunions publiques n’est pas si libéral que cela, et c’est fallacieusement que beaucoup citent le fameux arrêt Benjamin de 1933 et en omettent d’autres (http://2doc.net/q6mli).
Enfin, les Femen ont commis leur acte éhonté le 20 décembre et non le jour de Noël (ce qui ne le rend pas moins scandaleux…)
@Bruno
[Tout d’abord, je tiens à vous signifier que je suis d’accord avec vous sur le fond, même si je trouve que vous poussez un peu sur la fin avec le poème… On n’en n’est pas encore là…]
On « n’était pas encore là » en Allemagne non plus lorsqu’on est « venu chercher les communistes ». Ou du moins, c’est ce que les gens pensaient à l’époque. Je ne crois pas avoir « poussé » en citant ce poème. Au contraire, je pense avoir été parfaitement fidèle à la pensée de son auteur, qui voulait justement souligner combien il est facile au début d’un processus de croire que les atteintes aux libertés des autres ne nous concernent pas. Chaque fois qu’une liberté se trouve limitée, notre vigilance doit redoubler. Et cela même si la limitation ne concerne que les « réprouvés » (comme l’étaient les communistes lorsqu’on est venu les chercher).
[Pour ce qui est du droit, il ne s’agit pas réellement d’un revirement de jurisprudence comme on l’entend dire (…)]
Oui et non. Il est vrai que ce n’est pas un véritable arrêt, mais une décision en référé. Mais c’est bien un jugement avec des considérations sur le fond, et non simplement sur l’urgence auquel s’est livré le juge unique. Et que cette décision est considérée par les tribunaux administratifs comme faisant à l’heure actuelle jurisprudence, puisque le tribunal de Tours s’y est plié.
Maintenant, on verra ce qui sera dit lors du jugement sur le fond. Pensez-vous que le Conseil d’Etat ira jusqu’à désavouer son juge unique – qui en plus est une personnalité du Conseil, car B. Stirn n’est pas n’importe qui – et le ministre de l’Intérieur d’un seul coup ?
[-Le régime français en matière de réunions publiques n’est pas si libéral que cela, et c’est fallacieusement que beaucoup citent le fameux arrêt Benjamin de 1933 et en omettent d’autres (http://2doc.net/q6mli).]
L’analyse proposée est tellement contradictoire qu’il est difficile de la prendre au sérieux. L’auteur semble plus fasciné par les « moyens modernes de communication » que par la question de droit qui est posée.
Je peux comprendre votre inquiétude, d’autant plus que nous n’en sommes pas au début du "processus" de restriction de notre liberté d’expression. Toutefois je demeure positif pour plusieurs raisons :
-L’affaire a suscité le débat. Beaucoup de personnalités, dont plusieurs que je n’apprécie pas (Lang…), cherchant certainement à se distinguer certes, se sont exprimées en faveur de la liberté d’expression.
-Le Conseil d’État, en formation solennelle et au fond, n’est pas, comme lors des référés "aux ordres" du gouvernement et peut plus facilement exprimer son opinion, plus libérale. Je prends le pari qu’il ira à l’encontre du juge unique, dont la décision importe peu, ce ne serait pas une première. Les fondements juridiques sont très très légers… Il faudrait une nouvelle loi pour "obliger" le Conseil d’État à abonder dans le sens du gouvernement.
-La CEDH a une jurisprudence bien plus libérale que nous concernant la liberté d’expression, les anglo-saxons y régnant en maître. Ils iront à coup sûr contre la France si l’on en arrive jusque là. Ce serait d’ailleurs assez comique en un sens en ce que cela obligerait nos euro-béats du gouvernement à critiquer cette institution supranationale et en rien légitime pour nous donner des consignes…
@Bruno
[(…) Toutefois je demeure positif pour plusieurs raisons :]
On verra ce que diront les juges du fond. Etant donné les délais de jugement du Conseil, cela risque de prendre des années.
[-La CEDH a une jurisprudence bien plus libérale que nous concernant la liberté d’expression, les anglo-saxons y régnant en maître. Ils iront à coup sûr contre la France si l’on en arrive jusque là.]
J’essaye d’être cohérent. Je me suis toujours battu contre l’idée de mettre les juridictions supra-nationales au dessus des juridictions nationales. Je ne vais donc pas aujourd’hui souhaiter que le salut vienne de la CEDH, d’autant plus que reconnaître une quelconque autorité à une éventuelle décision dans cette affaire implique de la reconnaître aussi dans ses décisions contraires au principe de laïcité.
il faut retenir de tout cela c est que la France au lieu d avancer , recule . Avec cet arret inique d un juge ( certainement promu prochainement .. a suivre ;; ) du conseil d ‘Etat , il n existe plus de liberte d expression en France , qui se classe au niveau de Cuba et de la Coree du Nord .La cour europeenne cassera coup sur cet arret , la France sera ridiculisée – on a l habitude – et dieudonné empochera un gros cheque de compensation ..
L’humoriste Allévèques a fait remarquer qu’il’ fera faire la promotion de son prochain spectacle par Valls car alors le succès de sa publicité sera considérable comme pour Dieudonné.’La dérision d’Allévèques visait juste..
Au risque de vous choquer je vais tourner en dérision toute cette gigantesque pantalonnade,me plaçant ce faisant au diapason de l’actualité vaudevillesque qu’Hollansarko nous inflige:
-Dieudonné ?Maintenant,c’est Dieu l’a voulu..Ce n’est plus un humoriste,mais,ainsi soit il,il vend des quenelles..
-Entre la quenelle et la quequette,la France est elle bien barrée ?
-Quels sont les 3 points communs entre Holland et le pape?
Ils s’appellent tous les 2 François,ils dirigent des institutions..et ils croient aux miracles ,à juste raison car ils dirigent toujours..
Aprés Tapie,Sarko,Dsk,Cahuzac et consorts,,Holland s’en sortira très bien:
Il mettra son scooter au garage,Valérie à l’hôpital et Dieudo,avec Lepen au pinacle…
Je ne peux exprimer mon écœurement que par l’humour même si je comprends l’essentiel des arguments présentés ici.
Malheureusement je considère qu’ils sont en deçà de la manipulation éhontée ,antidémocratique vécue par le pays depuis la victoire bafouée du Non au TCE.
Bon courage à tous,cordialement
@caillens
[il faut retenir de tout cela c est que la France au lieu d avancer , recule . Avec cet arret inique d un juge ( certainement promu prochainement .. a suivre ;; )]
Je doute beaucoup que B. Stirn soit "promu" pour cette décision. Tout simplement parce qu’il occupe déjà le degré le plus élevé de la hiérarchie du Conseil, et qu’il est tout proche de la retraite. Plus fondamentalement, je pense que ce mode de raisonnement qui s’appuie sur des suspicions que rien ne vient justifier est détestable. Avez-vous des faits qui vous amènent à penser que B. Stirn a écrit son arrêt en échange d’une promotion ? Non ? Alors les allusions perfides sont hors jeu.
[il n existe plus de liberte d expression en France , qui se classe au niveau de Cuba et de la Coree du Nord]
Heureusement pour vous, le ridicule ne tue pas…
[La cour europeenne cassera coup sur cet arret (…)]
Ah bon ? Les juges européens n’aiment pas les promotions, eux ?
du conseil d ‘Etat , il n existe plus de liberte d expression en France , qui se classe au niveau de Cuba et de la Coree du Nord .La cour europeenne cassera coup sur cet arret , la France sera ridiculisée – on a l habitude – et dieudonné empochera un gros cheque de compensation ..
Comme vous le montrez fort bien, Descartes, le C.E., en l’occurrence, va plus loin que la loi -voire la contredit! -sans que le législateur soit défaillant; ce qui tendrait à conforter mes dires antérieurs sur les évolutions de certaines "hautes instances nationales"(et notamment celle-là).
Certes, c’est un juge unique qui a pris la décision et on peut toujours espérer que dans l’avenir le Conseil en formation collégiale ne confirmera pas cette évolution; mais ne nous leurrons pas trop….
@bovard
[Au risque de vous choquer je vais tourner en dérision toute cette gigantesque pantalonnade, me plaçant ce faisant au diapason de l’actualité vaudevillesque qu’Hollansarko nous inflige:]
Au delà des plaisanteries vaseuses, je profite ici pour réaffirmer une idée qui me tient à cœur. Je me suis insurgé plusieurs fois sur ce blog contre l’antisarkozysme primaire qui conduisait une bonne partie de la gauche à diaboliser le président d’alors et à le charger de tous les maux de la terre. Et je suis cohérent avec cette indignation en m’insurgeant aujourd’hui contre le même type de procès fait à François Hollande.
D’abord, sur ses histoires de cul ou de santé. Ce genre d’affaire relève du personnel et de l’intime, et ne nous concernent en rien. Nous avons élu un président de la République, pas un saint. Ce qu’il fait en tant que président nous concerne, ce qu’il fait dans sa chambre à coucher – ou dans les chambres à coucher des autres – n’est pas nos affaires. S’il ment à sa compagne, c’est une affaire entre elle et lui. S’il bat sa femme, c’est une affaire entre lui et les tribunaux. Pourquoi faudrait-il importer de la culture anglo-saxone cette mode du voyeurisme politique ? Hollande a-t-il dans cette affaire manqué aux devoirs de sa charge ? Non. Alors, cela ne nous concerne pas.
Sur un plan plus politique, on peut reprocher beaucoup de choses à Hollande. Mais Hollande n’est pas seul. Il n’est pas responsable de tout ce qui arrive. La politique n’est jamais dans une démocratie – et dans une dictature non plus, d’ailleurs – le fait d’un seul homme. Si les lois sont mal faites, si les politiques sont mal ficelées, si sur chaque question on fait trois pas en arrière dès qu’un lobby montre son nez, si l’on obéit au doigt et à l’œil aux bonzes de Bruxelles, ce n’est pas l’affaire d’Hollande tout seul. Et c’est un peu trop facile pour beaucoup de socialistes et de gens « de gauche » de se dédouaner sur lui.
Alors de grâce, arrêtons avec des « Hollansarko » et autres choses du même style. Prenons l’habitude de penser les choses en termes de système, et non en termes de jeu de massacre.
Bonjour Descartes,
Je tiens d’abord à vous féliciter pour votre blog, à la fois original, mais riche en références et de haute tenue. Le fait que vous répondiez individuellement aux commentaires le rend très stimulant, et invite à participer. Il attise la curiosité sur les sujets évoqués, et, comme ils sont très divers, il y a beaucoup à étudier (trop même! la grande question est toujours de savoir par où commencer).
Il m’arrive souvent d’être d’accord, régulièrement d’apprendre des choses, mais je me rends compte que je ne suis pas suffisamment armé lorsque je suis en désaccord. D’où mon silence pour le moment. Mais il faut bien tester la controverse…
Je rebondis donc sur ce passage:
[D’abord, sur ses histoires de cul ou de santé. Ce genre d’affaire relève du personnel et de l’intime, et ne nous concernent en rien. (…)]
Il y a quand même deux choses qui me dérangent dans cette histoire:
– La première est subjective: J’ai plus de mal à accepter les frasques d’un président qui ne fait pas, selon moi, du bon travail. C’est personnel (certains pouvant être satisfaits de son travail), mais je trouve plus difficile d’admettre le manque de vertu quand il n’y a pas les résultats. Il aurait une action plus positive (et son gouvernement avec, car comme vous l’avez dit, il n’est pas seul), ça me prêterait plus à sourire qu’aujourd’hui.
– La seconde est qu’il est président de la République, pas ministre ou parlementaire. Donc son attitude affecte l’image de la France. C’est peut-être "culturel" chez nous (et ça renforce notre image chez nos voisins), mais il n’aurait pas pu réussir à cacher ça?
C’était du domaine privé, mais vu sa fonction, et maintenant que c’est sorti, je me demande si ça n’est pas devenu du domaine public.
En fait, et pour le dire mieux qu’avec mes mots, j’ai repris les vôtres: "On est en droit d’exiger des hommes qui nous représentent qu’ils fassent correctement leur boulot. Dès lors qu’ils satisfont à cette obligation, ce qu’ils font dans
leur temps libre n’est pas notre affaire. La seule possible exception est la figure du chef de l’Etat, parce que dans cette fonction on ne se contente pas de représenter, on incarne."
Belle incarnation, non? 🙂
J’ai par ailleurs une question qui n’a rien à voir. Mais je suis intéressé depuis longtemps à la politique (bientôt dix ans, alors que j’ai moins de trente ans, pour situer), et je me forme un peu en autodidacte (lecture, conférences, blogs…).
Mais je me rends compte en vous lisant que, si je peux ainsi avoir des connaissances, il m’est parfois difficile de faire la part des choses, et j’ai un certain manque de rigueur et de méthode. C’est toujours plus facile de voir l’erreur de virgule dans le raisonnement des autres que de puissance dans le sien. Et j’ai l’impression que votre expérience de militant vous a donné cette rigueur.
Je réfléchis donc à m’engager, pour à la fois me former, mais aussi pour être utile à un mouvement proche de mes idées.
La question du où est assez désespérante je dois le dire (ce qui explique que je n’ai pas encore franchi le pas). J’ai pensé au M’pep, mais je trouve que ça fait un peu groupuscule. Le MRC, me semble une bonne piste. Ce qui me fait hésiter est notamment leur soutien au parti socialiste (quoiqu’en lisant l’accord, il est fait mention des désaccords profonds entre PS et MRC), et la petite taille de la structure (a-t-elle les moyens de peser).
Qu’en pense l’ancien militant du PCF?
Cordialement,
@Timodon
[Il m’arrive souvent d’être d’accord, régulièrement d’apprendre des choses, mais je me rends compte que je ne suis pas suffisamment armé lorsque je suis en désaccord. D’où mon silence pour le moment. Mais il faut bien tester la controverse…]
N’hésitez pas à croiser le fer. On prend toujours le risque de dire une bêtise, mais c’est comme ça qu’on apprend et qu’on s’endurcit pour d’autres débats plus durs !
[D’abord, sur ses histoires de cul ou de santé. Ce genre d’affaire relève du personnel et de l’intime, et ne nous concernent en rien. (…)]
[La seconde est qu’il est président de la République, pas ministre ou parlementaire. Donc son attitude affecte l’image de la France. C’est peut-être "culturel" chez nous (et ça renforce notre image chez nos voisins), mais il n’aurait pas pu réussir à cacher ça? C’était du domaine privé, mais vu sa fonction, et maintenant que c’est sorti, je me demande si ça n’est pas devenu du domaine public.]
Voyons la question de l’image de l’homme de gouvernement, d’abord. En quoi le fait de tromper sa femme – ou sa compagne, c’est pareil – devrait donner de lui une « mauvaise image » ? Sommes nous devenus à l’image des américains si puritains qu’on ne ferait plus confiance pour nous gouverner à un homme sous prétexte qu’il trompe sa moitié ?
Je pense que vous avez répondu dans la première partie de votre commentaire. Si nous étions satisfaits de sa politique, les frasques de François Hollande seraient une affaire mineure. Et s’il fait une mauvaise politique, alors son « image » devrait être dégradée de ce fait, sans qu’on ait besoin d’aller voir ce qu’il fait dans son lit ou dans le lit de quelqu’un d’autre. Dans les deux cas, l’affaire est négligeable.
Cela étant dit, le président n’est pas seulement un gouvernant. Comme vous le dites en me citant, il fait plus qu représenter, il incarne. La question est : sommes nous prêts à voir la République « incarnée » par un personnage qui trompe sa compagne ? Je n’ai pas de réponse à cette question. Il faudra attendre le verdict des sondages. Je crains, malheureusement, que la réponse soit positive.
[Je réfléchis donc à m’engager, pour à la fois me former, mais aussi pour être utile à un mouvement proche de mes idées. La question du où est assez désespérante je dois le dire (ce qui explique que je n’ai pas encore franchi le pas). J’ai pensé au M’pep, mais je trouve que ça fait un peu groupuscule. Le MRC, me semble une bonne piste. Ce qui me fait hésiter est notamment leur soutien au parti socialiste (quoiqu’en lisant l’accord, il est fait mention des désaccords profonds entre PS et MRC), et la petite taille de la structure (a-t-elle les moyens de peser). Qu’en pense l’ancien militant du PCF?]
Vous ne trouverez pas de structure qui réponde à 100% à vos idées. Et si vous n’avez pas une certaine formation politique, tant théorique que technique, ne vous faites aucune illusion, vous aurez du mal à peser en interne. L’idée est donc de rejoindre une structure suffisamment proche de vos convictions pour vous sentir confortable, et qui vous offre la possibilité de vous former politiquement. De ce point de vue, les groupuscules ne sont pas forcément une mauvaise idée : c’est souvent là que l’on apprend le mieux les techniques du militant politique (MDE : magouille, débrouille, embrouille). Quant à la formation théorique, malheureusement il n’y a pas beaucoup d’organisations qui forment véritablement leurs militants. Le PCF reste celle où l’on peut apprendre le plus, mais il faut faire soi-même l’effort et aller vers les gens, notamment les vieux militants, pour se former. Le NPA, le PG, la GU sont des églises où l’on vous fera apprendre le dogme, mais ou la MDE est reine. Le M’PEP se vante d’avoir une plus grande ouverture intellectuelle, mais il faut être conscient que c’est un mouvement fondé essentiellement pour « porter » la parole du Gourou Jacques Nikonoff après que celui-ci se soit fait ignominieusement éjecter d’ATTAC pour cause de fraude électorale. Même chose chez les Alternatifs ou l’ADS, sorte d’OGM produite par le croisement des bisounours avec des vautours (ça donne Clémentine Autain).
En conclusion : peu importe au fond le choix de son premier parti, à condition de garder une certaine distance, l’esprit critique et un sain cynisme.
Bonjour,
[…N’hésitez pas à croiser le fer. On prend toujours le risque de dire une bêtise, mais c’est comme ça qu’on apprend et qu’on s’endurcit pour d’autres débats plus durs !…]
Fort bien, mais tout de même!
Certain "débats" semblent n’avoir comme objectif que l’agitation pour l’agitation, le tourbillonnement puéril des poussières du désert.
Et débat constructif ne me paraît pas devoir être confondu avec combat, sinon les positions restent figées, sans produire un quelconque progrès, si ce n’est que de confirmer qu’il y a des gens bornés et chicaneurs avec lesquels il est impossible de débattre. Il ne faut pas confondre débat et affrontement.
Ou alors ne serait ce qu’aux fins de mettre en œuvre une dialectique éristique?
@ Descartes
Soucieux, désormais, de me faire le porte-parole, sur ce blog, de nos gouvernants trop souvent injustement attaqués, j’attire votre attention sur l’interview donnée par notre bien aimé vice-président du Conseil d’État, Jean-Marc Sauvé, au journal Le Monde, dans lequel il réplique à certaines critiques malveillantes et subversives, dont j’ai le regret de vous dire que votre article est un déplorable exemple. Voici ce que dit cet immense juriste :
["Le Conseil d’Etat n’a jamais été confronté à des dossiers dont les caractéristiques étaient analogues à celles du spectacle qui a justifié les mesures d’interdiction. En particulier, c’est la première fois que se pose la question de savoir comment prévenir des provocations répétées à la haine et à la discrimination raciale et des propos portant atteinte à la dignité humaine.
Je voudrais d’ailleurs couper court à des insinuations malveillantes : c’est la loi qui dispose que le juge des référés du Conseil d’Etat est le président de la section du contentieux ainsi que les conseillers d’Etat qu’il désigne à cet effet. En outre, ceux qui critiquent aujourd’hui pour des raisons ignominieuses l’ordonnance rendue jeudi se sont bien gardés de critiquer celle qui a enjoint de ne pas faire obstacle à l’université d’été du Front national à Annecy en 2002. Et pourtant ces deux décisions ont le même auteur. On serait avisé d’y réfléchir."]
Tout cela me paraît très sensé, fort bien dit, et me convainc parfaitement. Toutefois, je me permettrais de signaler très humblement à notre bien aimé haut magistrat, ce qui me semble une toute petite non-conformité, au regard de l’état actuel, fort critiquable, de la Convention européenne des droits de l’Homme, dont il conviendra, bien entendu, d’exiger au plus vite la réforme. En effet, il déclare par ailleurs dans son interview que :
["Le Conseil d’Etat s’est prononcé en considération de sa jurisprudence, notamment les arrêts « commune de Morsang-sur-Orge » et « Benjamin », qui ont respectivement 18 et 81 ans d’âge. Il a, avec ce spectacle, été confronté à une situation inédite d’articulation entre la liberté d’expression et ses limites nécessaires dans une société démocratique. Vous me permettrez de ne pas en dire davantage, car si M. M’bala M’bala demande au fond l’annulation des interdictions de son spectacle, je suis susceptible de siéger en cas de pourvoi en cassation, après examen collégial par le tribunal puis la cour administrative d’appel."]
Or, les ennemis de la Liberté et de la Démocratie pourraient soutenir qu’il lui est, désormais, de toute façon interdit de juger l’immonde Dieudonné M’Bala M’Bala, en vue de le châtier comme il se doit. En effet, il se trouve que l’article 6 de la CEDH dispose, de façon scandaleuse, que tout homme a droit à un tribunal impartial. Or, ayant ainsi pris publiquement la défense de l’ordonnance contestée, de même que du juge l’ayant rendue, et ayant, de plus, qualifié d’"ignominieux" tout questionnement quant à l’impartialité de celui-ci au regard de ses origines juives, il me paraît qu’au cas où M. Jean-Marc Sauvé s’aviserait, désormais, de vouloir sanctionner de ses propres mains l’infâme Dieudonné M’Bala M’Bala, la CEDH pourrait alors remettre en cause sa propre impartialité, donnant ainsi raison aux ennemis de la Liberté et de la Démocratie.
Bien à vous, et espérant ne pas avoir par trop troublé l’ordre public.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/01/11/affaire-dieudonne-le-conseil-d-etat-replique-aux-critiques_4346462_823448.html
@dsk
[Or, les ennemis de la Liberté et de la Démocratie pourraient soutenir qu’il lui est, désormais, de toute façon interdit de juger l’immonde Dieudonné M’Bala M’Bala, en vue de le châtier comme il se doit. En effet, il se trouve que l’article 6 de la CEDH dispose, de façon scandaleuse, que tout homme a droit à un tribunal impartial. Or, ayant ainsi pris publiquement la défense de l’ordonnance contestée, de même que du juge l’ayant rendue, et ayant, de plus, qualifié d’"ignominieux" tout questionnement quant à l’impartialité de celui-ci au regard de ses origines juives, il me paraît qu’au cas où M. Jean-Marc Sauvé s’aviserait, désormais, de vouloir sanctionner de ses propres mains l’infâme Dieudonné M’Bala M’Bala, la CEDH pourrait alors remettre en cause sa propre impartialité, donnant ainsi raison aux ennemis de la Liberté et de la Démocratie.]
Bonne remarque. Sauvé est de toute manière sorti de son rôle en défendant publiquement la décision du Conseil d’Etat. Dans notre démocratie, c’est le Chef de l’Etat qui est le gardien des institutions, et c’est à lui qu’il incombe de les défendre s’il l’estime nécessaire, en donnant par exemple au ministre de la Justice l’ordre d’initier des éventuelles poursuites. C’est d’ailleurs de tradition constante que les magistrats du siège ne défendent jamais leur honneur personnellement en public, laissant à l’institution le soin de le faire.
@Descartes (et CVT)
Votre article dénonce fort justement trois choses :
1/ La discrimination arbitraire entre les haines « permises » et les haines « non permises ».
2/ la remise en cause de [la protection de la liberté de réunion et de presse] et si on suit la CE, le retour [un siècle et demi en arrière, au temps où l’autorité prétendait contrôler a priori l’expression publique]
3/ l’instauration d’ [une sorte de délit de blasphème laïque]
Comme je vous l’écrivais laconiquement dès la parution de votre billet, bravo !
Pour votre info, Philippe Bilger, ancien avocat général à la cour d’appel de Paris, tient des propos très proches des vôtres, sur votre point 2/ (le retour invraisemblable à un contrôle à priori des propos susceptibles d’être tenus dans une réunion publique) émission C dans l’air du 10/01.
Et vous avez également raison de dire, dans vos commentaires, que la réaction [des simples citoyens dans l’affaire Dieudonné montre que les gens voient assez clair dans la tentative de Valls de fabriquer un « diable de confort » au gouvernement], en effet, un journaliste que vous n’hésiteriez probablement pas à classer dans la case « bien pensant », Claude Weill du Nouvel Obs, dit ouvertement : « le Conseil d’Etat sauvant in extremis un gouvernement socialiste avec une décision à la limite de la censure, fait un peu désordre » C dans l’air du 13/01. C’est dire si, sur ce coup, l’opinion publique n’est pas dupe.
Par contre, dans les commentaires de votre billet, l’analogie que fait CVT avec la campagne sur le référendum sur le TCE me semble inadéquate.
Pendant ce fameux référendum sur le TCE, une question a été posée au peuple : Approuvez-vous le projet de loi qui autorise la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe ? La réponse a été NON.
Il n’est pas interdit de penser que parmi les 55% de NON, on retrouvait aussi des citoyens pro-européens motivés par l’espoir d’un meilleur traité.
Les dirigeants ont revu leur copie, revu leur stratégie et la construction de l’Europe, avec la France, s’est poursuivie.
Bien qu’étant personnellement « Oui-Ouiste » (comme dit si « gentiment » CVT) je suis, moi aussi, choqué par le déni de démocratie qu’on a connu à cette époque.
La solution, aujourd’hui, consisterait à enfin voter la loi visant à instaurer vraiment le "référendum d’initiative populaire". (Promesse de Hollande … passée à la trappe ?)
Les nonistes pourraient alors poser une question simple :
Souhaitez-vous que la France retrouve toute sa souveraineté et interrompe son intégration à l’Europe ? On aurait alors enfin une réponse claire et on pourrait avancer ou reculer sur l’Europe en toute légitimité.
Quant aux insultes à l’encontre des souverainistes, n’exagérons rien, elles existent surtout, de la part de certains, à l’encontre du FN, qui a quand même longtemps bâti son succès sur sa victimisation : « On nous diabolise ! ».
Mais je ne pense pas que tous les « nonistes », Mélenchon, Marie-Georges Buffet, Chevènement, Fabius, Montebourg, Dupont-Aignan … est été traité de [ racistes, fascistes, factieux] parc le camp adverse, comme le prétend CVT.
L’analogie avec le traitement de l’affaire Dieudonné me semble donc inadéquate.
@vent2sable
[Pendant ce fameux référendum sur le TCE, une question a été posée au peuple : Approuvez-vous le projet de loi qui autorise la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe ? La réponse a été NON. Il n’est pas interdit de penser que parmi les 55% de NON, on retrouvait aussi des citoyens pro-européens motivés par l’espoir d’un meilleur traité.
Les dirigeants ont revu leur copie, revu leur stratégie et la construction de l’Europe, avec la France, s’est poursuivie.]
Oui, enfin, c’est un peu moins glorieux que ça. Les élites politico-administratives ont certes revu leur stratégie. Elles n’avaient pas le choix, d’ailleurs, puisque la victoire du « non » fermait la porte pour longtemps à tout espoir de constitutionnalisation des traités. Mais ces « élites » n’ont pas révisé leurs objectifs, et se tiennent toujours prêtes a resservir la soupe dès que la situation le permettra.
[Bien qu’étant personnellement « Oui-Ouiste » (comme dit si « gentiment » CVT) je suis, moi aussi, choqué par le déni de démocratie qu’on a connu à cette époque. La solution, aujourd’hui, consisterait à enfin voter la loi visant à instaurer vraiment le "référendum d’initiative populaire".]
Je ne vois pas très bien quel est le problème que le « référendum d’initiative populaire » serait censé résoudre. Au contraire : avec le RIP (l’abréviation est parlante…), la question européenne serait noyée par toutes sortes de questions posées à la chaine.
[Les nonistes pourraient alors poser une question simple : Souhaitez-vous que la France retrouve toute sa souveraineté et interrompe son intégration à l’Europe ? On aurait alors enfin une réponse claire et on pourrait avancer ou reculer sur l’Europe en toute légitimité.]
On ne peut pas faire des référendums sur des questions générales. Pour pouvoir faire un référendum, il faudrait rédiger une loi référendaire, précisant non seulement l’objectif mais détaillant les mesures à prendre. Or, un texte de cette nature est par la force des choses très technique. Je ne suis pas sur dans ces conditions que, quelque soit la réponse au référendum, on aurait une idée claire des raisons qui ont conduit les électeurs à voter.
[Quant aux insultes à l’encontre des souverainistes, n’exagérons rien, elles existent surtout, de la part de certains, à l’encontre du FN, qui a quand même longtemps bâti son succès sur sa victimisation : « On nous diabolise ! ».]
Ce n’est pas vrai. J’ai plusieurs fois cité sur ce blog les choses qui ont été dites non seulement lors du débat sur le TCE, mais déjà lors du débat de Maastricht. Ces choses ne visaient pas seulement – ni même principalement – au FN.
[Mais je ne pense pas que tous les « nonistes », Mélenchon, Marie-Georges Buffet, Chevènement, Fabius, Montebourg, Dupont-Aignan … est été traité de [ racistes, fascistes, factieux] parc le camp adverse, comme le prétend CVT.]
Je pense que vous vous trompez. Le commentaire de Mélenchon sur le « maréchalisme » de ceux qui veulent quitter l’Euro, par exemple, visait ceux qui font cette demande à gauche comme à droite.
@vent2sable,
[Quant aux insultes à l’encontre des souverainistes, n’exagérons rien, elles existent surtout, de la part de certains, à l’encontre du FN, qui a quand même longtemps bâti son succès sur sa victimisation : « On nous diabolise ! ».
Mais je ne pense pas que tous les « nonistes », Mélenchon, Marie-Georges Buffet, Chevènement, Fabius, Montebourg, Dupont-Aignan … est été traité de [ racistes, fascistes, factieux] parc le camp adverse, comme le prétend CVT.
L’analogie avec le traitement de l’affaire Dieudonné me semble donc inadéquate.]
Franchement, vous avez la mémoire qui flanche: je n’ai jamais oublié le jour où, lors d’un meeting socialiste durant la campagne pour le OUI, le premier secrétaire du PS, un certain François Hollande, avait exigé de débattre avec le chef des représentants des nonistes. Le seul qu’il a trouvé pour débattre était selon lui Jean-Marie Le Pen!!!!
Alors, si ça ce n’est pas de l’amalgame et un procédé éminemment détestable, alors je ne sais plus ce que le mot "insulte" signifie! Comme en 1992, la campagne avait atteint des sommets de violence verbale assez impressionnante, surtout celle venant du camp des oui-ouistes…
Sachez que si jamais un référendum était possible pour quitter l’UE, je le voterais sans hésiter! Pour moi, la question est relativement simple: "souhaitez-vous que la France quitte l’Union Européenne?". De plus, la formulation de votre question est spécieuse, car JAMAIS les Français n’ont réclamé une intégration européenne de façon explicite…
Merci pour ce billet, avec lequel je suis parfaitement en accord. Cette histoire est tout de même incroyable: me voilà obligé de reconnaître de la sagesse à Jack Lang (cf son interview dans Le Monde). Où va le monde, je vous le demande?
Je voulais juste signaler un point qui me semble intéressant: le rôle des médias dits ‘sociaux’ dans cette affaire. En particulier, je note que de nombreuses voix s’élèvent, sur des forums, blog, cercles twitter divers, contre la décision du Conseil d’Etat. Ces personnes semblent appartenir d’ailleurs à des courants politiques très différents. Mais quid de la mobilisation ‘in real life’ des citoyens mécontents (dont nous faisons partie, je suppose)? Elle n’existe pas. L’impact de nos indignations numériques est nul. J’en déduis, comme certains l’ont fait pour les printemps arabes, que l’on surestime beaucoup la puissance de ces outils numériques dans l’établissement de nouveaux rapports (de force?) entre citoyens et représentants. Le poème final de votre billet reste d’actualité, et nous ne sommes pas plus à l’abri en 2013 qu’au milieu du 20e siècle de glissements progressifs vers un très net affaiblissement de l’état de droit.
@Kranck
[Merci pour ce billet, avec lequel je suis parfaitement en accord. Cette histoire est tout de même incroyable: me voilà obligé de reconnaître de la sagesse à Jack Lang (cf son interview dans Le Monde). Où va le monde, je vous le demande?]
Le monde ? Ou « Le Monde » ? 😉
J’avoue que cela m’a fait un choc de voir Jack Lang reprendre mon argumentation…
[Mais quid de la mobilisation ‘in real life’ des citoyens mécontents (dont nous faisons partie, je suppose)? Elle n’existe pas. L’impact de nos indignations numériques est nul. J’en déduis, comme certains l’ont fait pour les printemps arabes, que l’on surestime beaucoup la puissance de ces outils numériques dans l’établissement de nouveaux rapports (de force?) entre citoyens et représentants.]
Tout à fait. Il ne faut pas surestimer les réseaux sociaux : ils ne sont que la version moderne de ce qu’était dans le temps le bon vieux zinc du café du commerce, avec l’anonymat en plus. Et si toutes les protestations du café du commerce s’étaient traduites par des rapports de force…
[Le poème final de votre billet reste d’actualité, et nous ne sommes pas plus à l’abri en 2013 qu’au milieu du 20e siècle de glissements progressifs vers un très net affaiblissement de l’état de droit.]
Le problème n’est pas tant l’affaiblissement de l’Etat de droit, que le changement du droit lui même. La conception qui nous vient des Lumières, centrée sur la liberté de pensée, d’expression et d’examen, cède le pas à une conception ou toute expression qui menace « l’unité » est interdite. Sur ce point, on ne peut que rejoindre l’analyse de Slama (in « le siècle de monsieur Pétain ») sur la signification de cette recherche d’unanimisme.
@Descartes,
[Faut quand même s’en tenir aux faits. Regretter que Patrick Cohen n’ait pas fini dans les chambres a gaz, ce n’est pas de « l’antisionisme ». Faut arrêter les bêtises et appeler un chat un chat. Dieudonné est indéfendable.]
Désolée Descartes mais vous oubliez des données dans cette affaire : ce fameux Cohen est justement de ceux qui sont contre la liberté d’expression et qui aimeraient que des listes noires soient dressées (j’ai vu l’émission en question et je n’en rajoute pas) afin d’interdire d’antenne ceux qu’il considère comme indésirables, tel un Dieudonné ou un Soral !
Je ne connaissais pas Dieudonné plus que ça avant tout ce ramdam et je ne suis pas une fan à proprement parler ni de Soral ni de Dieudonné (bien que ce dernier ma fasse plutôt rire que pleurer) mais un Cohen me semble bien moins fréquentable qu’un Dieudonné ! C’est mon point de vue !
[Quant au tweet de Mélenchon où il exprime sa déception avant que le Conseil d’Etat n’intervienne, il est éloquent et pour le coup c’est moi qui aurait pu être déçue et pas que moi..
[J’ai remarqué qu’il n’est pas intervenu pour féliciter le Conseil d’Etat d’avoir renversé le jugement…]
Ah, vous m’étonnez, vous ne le descendez plus maintenant ? Mince alors pile poil au moment où j’ai décidé d’arrêter les frais avec le FDG !
Dimanche, les messages n’allaient pas dans le sens voulu, l’accès aux commentaires a été stoppé sur son blog ! Ca n’a pas plu ce tweet, interprété comme un soutien à Valls, quoi que vous estimiez le contraire !
Bref, vous ne perdez pas une occasion d’habitude sur votre blog pour dire combien Mélenchon n’est pas à la hauteur de ses idées et là vous le prendriez presque sous votre aile protectrice !
De toute façon c’est mort ! Mélenchon n’a pas su faire fructifier ses 4 000 000 de voix, le constat est là ! Alors autant aller voir ailleurs !
@L’inconnue de l’Orient Express
[Désolée Descartes mais vous oubliez des données dans cette affaire : ce fameux Cohen est justement de ceux qui sont contre la liberté d’expression et qui aimeraient que des listes noires soient dressées (j’ai vu l’émission en question et je n’en rajoute pas) afin d’interdire d’antenne ceux qu’il considère comme indésirables, tel un Dieudonné ou un Soral !]
Quelque soient les excès de Patrick Cohen, cela ne justifie pas la remarque de Dieudonné. Rien, absolument rien ne peut justifier la formule que ce dernier a utilisé.
[Ah, vous m’étonnez, vous ne le descendez plus maintenant ? Mince alors pile poil au moment où j’ai décidé d’arrêter les frais avec le FDG ! ]
Franchement, je m’en fous. Mélenchon est devenu depuis quelques mois un personnage sans intérêt, trop occupé à mener des combats d’arrière garde contre ses propres alliés et à cracher son venin contre tout ce qui bouge pour qu’on puisse le prendre au sérieux.
[Bref, vous ne perdez pas une occasion d’habitude sur votre blog pour dire combien Mélenchon n’est pas à la hauteur de ses idées et là vous le prendriez presque sous votre aile protectrice !]
Que voulez-vous, je préfère toujours courir avec le lièvre qu’aboyer avec les chiens…
L’antisémitisme n’est pas une opinion, il me semble, mais un délit. Qui plus est, Dieudonné a déjà été condamné 7 fois pour de tels faits. Quand à son dernier spectacle, il est autorisé. ce n’est donc pas une victime ni un symbole mais un citoyen qui doit répondre de ses actes.
Quant au deux poids, deux mesures, c’est un argument qui d’un point de vue juridique n’est pas recevable. Si je m’amusais à faire l’apologie de l’esclavage ou à expliquer que transformer les musulmans en savonnette serait un grand pas pour l’humanité, je serais poursuivi et condamné. Là où vous avez raison, c’est le traitement médiatique réservé à certaines formes spectaculaires de protestation. Celles-ci sont inversement proportionnelles à leur pouvoir de nuisance vis à vis de la mécanique capitaliste, elles semblent avoir l’immense avantage de réduire à néant la possibilité même de la critique sociale et de faire écho à l’espèce d’idéologie de substitution où baigne l’oligarchie.
Cette idéologie, Clouscard en parlait déjà, c’est le libéralisme au plan économique et le libéralisme sur le plan des mœurs, soit le marché libre et le droit abstrait où sans principe d’arrêt ne règne que le plus braillard, le plus veule ou le plus influent "médiatiquement", où tout se vaut et où l’antisémitisme peut finalement être habillé des oripeaux de la liberté d’expression quand cette même liberté dans sa vision libérale n’est considéré qu’un droit de tous sur tout et où il est interdit d’interdire…
@Durand
[L’antisémitisme n’est pas une opinion, il me semble, mais un délit.]
Il y a des slogans qui, à force d’être répétés, finissent par acquérir le statut de vérité incontestable… mais ils ne deviennent pas vrais pour autant. Non, l’antisémitisme n’est pas un délit. Je vous mets au défi de m’indiquer quel article du Code Pénal, quel texte législatif configure le « délit d’antisémitisme ». Un simple raisonnement devrait vous montrer qu’il est impossible que l’antisémitisme – qui est une opinion – puisse avoir un caractère délictuel.
Dans notre beau pays, on a le droit d’aimer ou de haïr qui on veut. La loi interdit la négation de certains crimes, la discrimination dans certains domaines et sur certains critères, l’incitation à la haine ou l’apologie du délit. Mais elle ne vous oblige pas a aimer qui que ce soit.
[Quand à son dernier spectacle, il est autorisé.]
Ah bon ? Les spectacles ont donc besoin d’autorisation préalable, maintenant ? Ce commentaire met le doigt sur le véritable danger de cette affaire. Dans la logique des lois de 1881, l’expression des idées et les réunions publiques sont libres, et n’ont pas à être « autorisées ». Dans la logique de l’arrêt Benjamin, il était admis qu’elles ne pouvaient être interdites que lorsque l’ordre public matériel était menacé sans que l’autorité publique ait les moyens de faire face à cette menace. Aujourd’hui, vous me parlez de « spectacle autorisé », comme s’il était de la compétence de l’autorité de décider des spectacles que nous pouvons ou ne pouvons pas voir. C’est dire à quel point le cadre a changé dans les dernières semaines…
[ce n’est donc pas une victime ni un symbole mais un citoyen qui doit répondre de ses actes.]
Pardon. Le spectacle de Nantes a été interdit avant d’avoir eu lieu. Et le spectacle « autorisé » dont vous parlez l’a été lui aussi préalablement. Ce n’est donc pas de ses « actes » dont on doit répondre, mais de ses intentions. Et ce n’est pas du tout la même chose. Vous ne semblez pas voir la différence entre un régime où l’on répond a posteriori de ses actes, et un régime ou l’on doit montrer patte blanche a priori.
[Quant au deux poids, deux mesures, c’est un argument qui d’un point de vue juridique n’est pas recevable.]
Vraiment ? Pourtant, il est au cœur du principe d’égalité devant la loi, et c’est lui qui justifie l’idée même de jurisprudence, qui se justifie précisément par la nécessité d’assurer que les situations juridiques identiques reçoivent le même traitement…
[Si je m’amusais à faire l’apologie de l’esclavage ou à expliquer que transformer les musulmans en savonnette serait un grand pas pour l’humanité, je serais poursuivi et condamné.]
Cela dépend. Vous trouverez par exemple des chartes ministérielles s’engageant à promouvoir préférentiellement les femmes qui sont considérées parfaitement « politiquement correctes ». Ecrivez la même en remplaçant « femmes » par « hommes », et vous aurez droit au procès en sexisme avec condamnation à la clé. Faites l’apologie de la « négritude », et vous serez admiré par les élites. Faites l’apologie de la « blanchitude », et vous vous trouverez devant les tribunaux. Vous pouvez en toute tranquillité parler des bienfaits de la colonisation arabe en Espagne et de l’âge d’or du royaume de Grenade. Mais ne vous avisez pas de parler des bienfaits de la colonisation française en Algerie ou de l’âge d’or correspondant, cela vous attirerait de sérieux ennuis judiciaires…
Même s’il ne faut pas exagérer le phénomène, même s’il faut reconnaître que les tribunaux font en général du bon travail – comme par exemple dans l’affaire des caricatures de Mahomet – il faut être conscient des puissants courants qui dans notre société prétendent brider la liberté d’expression par un dogme de ce qui peut ou ne peut pas être dit.
[Cette idéologie, Clouscard en parlait déjà, c’est le libéralisme au plan économique et le libéralisme sur le plan des mœurs,]
Le paradoxe ici, c’est que ce sont bien les « libéraux sur le plan des mœurs » qui sont les premiers à vouloir interdire toute expression qui contrevient leurs canons du « politiquement correct ». Ce sont ceux-là même qui brandissent « l’interdit d’interdire » lorsqu’il s’agit par exemple du mariage des homosexuels qui ensuite prétendent réduire au silence toute expression qui ne rentre pas dans ce qui est acceptable pour eux.
@Descartes
[Vous pouvez en toute tranquillité parler des bienfaits de la colonisation arabe en Espagne et de l’âge d’or du royaume de Grenade. Mais ne vous avisez pas de parler des bienfaits de la colonisation française en Algerie ou de l’âge d’or correspondant, cela vous attirerait de sérieux ennuis judiciaires…]
Quand les historiens parlent de l’apogée de la civilisation arabo-musulmane en al-Andalus et de l’héritage légué à l’occident chrétien, ils se réfèrent aux bâtisseurs, aux savants, philosophes, mathématiciens, arabes et juifs qui se sont distingués dans l’Andalousie des califes musulmans du moyen âge.
Pour « s’installer » dans la péninsule, aux VIIème et VIIIème siècle, les généraux arabes et leurs troupes arabo-berbères avaient vaincu des armées Wisigothes qui elles mêmes, s’étaient installées là, sur les ruines de l’empire romain deux ou trois siècles auparavant.
Quand les historiens mentionnent l’âge d’or de l’islam, je ne pense pas qu’ils parlent [des bienfaits de la colonisation arabe en Espagne].
Vous-même, lorsque vous constatez, non sans une certaine satisfaction, que la France est aujourd’hui un pays de culture gréco-latine, vous ne parlez pas des « bienfaits de la colonisation » de la Gaule par les légions romaines.
Pour ce qui concerne l’Algérie française, faudrait-il parler d’un âge d’or pour l’Algérie ? Alors il faudrait aussi parler de l’âge d’or de l’Amérique du sud après la conquête espagnole, vous pourriez même parler de l’âge d’or de la méditerranée orientale après l’installation des juifs en Israël ! Parce que, et la communication israélienne nous l’a suffisamment rappelé, « ils ont fait de ce désert un jardin ».
L’histoire dira peut-être un jour que la colonisation a apporté des progrès dans tel ou tel territoire, telle ou telle région du monde, mais la colonisation en tant que système doit être condamnée à priori, puisque là ou elle existe, elle installe par la force des rapports de dominants à dominés.
@vent2sable
[Quand les historiens mentionnent l’âge d’or de l’islam, je ne pense pas qu’ils parlent « des bienfaits de la colonisation arabe en Espagne »].
Je ne saisis pas trop. Les arabo-musulmans d’Al-Andalous – fussent-ils des « bâtisseurs, aux savants, philosophes, mathématiciens » n’étaient des vulgaires « colonisateurs ». Ils avaient pris par la force les terres des gentils Wisigoths qui étaient là avant eux. Je vois mal comment on peut parler « de l’âge d’or de l’Islam » dans la péninsule ibérique sans parler du même coup des « bienfaits de la colonisation arabe »…
[Vous-même, lorsque vous constatez, non sans une certaine satisfaction, que la France est aujourd’hui un pays de culture gréco-latine, vous ne parlez pas des « bienfaits de la colonisation » de la Gaule par les légions romaines.]
Bien sur que si ! Et je ne suis pas le seul. Beaucoup de spécialistes notent d’ailleurs combien le « roman national » français est ambigu sur ce point, glorifiant la figure de Vercingétorix tout en vantant les « bienfaits » de la romanisation de la Gaule. Jules Cesar est enseigné dans nos écoles, ses bustes sont exposés dans nos musées. Pourtant, il n’était qu’un vulgaire colonisateur…
[Pour ce qui concerne l’Algérie française, faudrait-il parler d’un âge d’or pour l’Algérie ?]
Si l’on se tient aux faits, oui. Il n’est pas inutile de rappeler que la colonisation française de l’Algérie n’est que la dernière d’une longue liste, puisque la région a été colonisée d’abord par les Romains, puis par les Arabes Omeyyades au VIIème siècle, puis par les Ottomans au XVème… entre autres. Avec la colonisation française arrive la modernité : nouvelles méthodes agronomiques, révolution industrielle, chemin de fer, médecine scientifique. On y construit des écoles et des universités. Qu’est ce qu’il vous faut de plus ?
[Alors il faudrait aussi parler de l’âge d’or de l’Amérique du sud après la conquête espagnole,]
Pas vraiment comparable. Contrairement à ce qui s’est passé en Algérie, les conquistadors n’étaient pas très intéressés par une véritable « colonisation ». Leur priorité était de trouver l’or et les métaux précieux et les embarquer pour l’Espagne. Pas d’importer des techniques pour faire fructifier leur nouveau domaine. Par contre, on peut bien parler d’un « âge d’or » du Brésil au XVIème siècle, lorsque les colons portugais ont importé les techniques agricoles et les animaux de trait pour mettre en valeur les cultures locales (café, canne à sucre, cacao), comme on peut parler d’un « âge d’or » en Virginie pour les mêmes raisons.
[vous pourriez même parler de l’âge d’or de la méditerranée orientale après l’installation des juifs en Israël ! Parce que, et la communication israélienne nous l’a suffisamment rappelé, « ils ont fait de ce désert un jardin ».]
On peut difficilement parler de « la méditerranée orientale » pour un « miracle économique » qui ne concerne qu’Israel tout seul. Mais on peut parfaitement parler d’un « âge d’or » d’Israel dans les années 1950, quand l’importation de techniques modernes et d’une main d’œuvre très qualifiée à « transformé le désert en jardin » et fondé des universités de premier ordre là où il n’y avait auparavant rien de la sorte. Cela ne retire rien aux injustices et aux abus qui ont accompagné la colonisation israélienne, injustices et abus qui ont aussi accompagné la conquête d’Al-Andalous par les arabes.
Ce que je trouve drôle, c’est cette tendance humaine à idéaliser les situations qui nous sont lointaines dans le temps ou dans l’espace. Ainsi, nous pardonnons volontiers aux colonisateurs arabes du XIIème siècle ou romains du Ier ce que nous ne pardonnons pas aux israéliens ou aux français modernes…
[L’histoire dira peut-être un jour que la colonisation a apporté des progrès dans tel ou tel territoire, telle ou telle région du monde, mais la colonisation en tant que système doit être condamnée à priori, puisque là ou elle existe, elle installe par la force des rapports de dominants à dominés.]
Condamner la colonisation « a priori » est à peu près aussi absurde que condamner a priori la respiration ou le fait de boire du lait. Nous sommes tous des colons. Les peuples qui ont toujours vécu là où ils sont, qui n’ont jamais envahi des territoires occupés par d’autres sont une infime minorité, généralement installés sur des îlots isolés ou des jungles impénétrables. Même les colonisés d’aujourd’hui ont été des colonisateurs autrefois…
[Condamner la colonisation « a priori » est à peu près aussi absurde que condamner a priori la respiration ou le fait de boire du lait …]
Bon sang, mais c’est bien sur !
La colonisation est le moteur de tous les progrès ! On se demande bien pourquoi on a cherché des noises aux Afrikaners, eux qui avaient su transformer la terre vierge d’Afrique du sud, peuplée de sauvages, en une puissance industrielle moderne.
En grands progressistes que nous voulons être, reprenons la politique coloniale, reconstituons un empire, reprenons l’Algérie et sauvons-la du marasme dans lequel elle s’enfonce. Reprenons le contrôle partout en Afrique et en Asie du sud-est et, à coup sur, nous ferons faire d’immenses progrès à toutes ces contrées déshérités.
Apportons-leur l’âge d’or auquel elles ont droit.
@vent2sable
[« Condamner la colonisation « a priori » est à peu près aussi absurde que condamner a priori la respiration ou le fait de boire du lait … » Bon sang, mais c’est bien sur ! La colonisation est le moteur de tous les progrès !]
Si vous lisiez ce que les autres écrivent, cela vous éviterait bien des bêtises. Où ais-je écrit que « la colonisation est le moteur de tous les progrès » ? Ce n’était pas du tout ma conclusion. Le fait est que la colonisation est peut-être le fait historique le plus répandu, et que pratiquement tous les peuples sur la terre ont été tour à tour colonisés et colonisateurs. Les peuples qui ont vécu toute leur histoire dans le lieu géographique qu’ils occupent actuellement sont finalement relativement rares. En dehors de quelques peuplades vivant dans des vallées, des îles ou des jungles où ils sont totalement isolés du reste du monde, les autres ont tous bougé, se sont battus avec leurs voisins, et ont pris leurs terres à moins que ce soit l’inverse. C’est triste mais c’est comme ça. Si on établit comme principe général que les colonisés ont droit aux excuses et aux réparations, alors ça va faire pas mal de boulot.
[On se demande bien pourquoi on a cherché des noises aux Afrikaners, eux qui avaient su transformer la terre vierge d’Afrique du sud, peuplée de sauvages, en une puissance industrielle moderne.]
Première nouvelle. Si ma mémoire ne me trompe pas, les « Afrikaners » n’ont rien à voir dans la transformation de l’Afrique du Sud en puissance industrielle, entre autres choses parce qu’ils ont été eux-mêmes colonisés par les anglais au cours des deux guerres des Boers, bien avant que l’Afrique du Sud soit née, et encore moins qu’elle devienne une « puissance industrielle moderne », et qu’ils sont restés plutôt confinés dans l’agriculture et les petits boulots. Ce sont plutôt les anglais, et non les Afrikaners à qui le mérite de l’industrialisation revient… Après, on peut reprocher aux Afrikaners d’être des affreux colonisateurs, mais on peut faire le même reproche aux Xhosas et Zoulous qu’ils ont déplacé, et qui n’étaient pas, eux non plus, les habitants primitifs de la région…
[En grands progressistes que nous voulons être, reprenons la politique coloniale, reconstituons un empire, reprenons l’Algérie et sauvons-la du marasme dans lequel elle s’enfonce.]
C’est un peu ce qu’on est en train de faire, à notre corps défendant. On est intervenu ces dernières années en Côte d’Ivoire, au Mali, en République Centrafricaine, et chaque fois pour empêcher l’effondrement de l’Etat et éviter ou arrêter une guerre civile. Cinquante ans après l’indépendance, l’Algérie s’enfonce dans une crise profonde et une partie importante de la jeunesse algérienne ne demande pas mieux que de venir travailler en France. Dans ces conditions, la question de savoir si la décolonisation a été une bonne affaire pour les peuples concernés ne me paraît pas une question déplacée ni triviale.
Vous savez, l’ironie est un beau recours littéraire. Elle peut introduire une argumentation, mais elle ne peut pas s’y substituer. La vision tiers-mondiste qui faisait des colonisés des « damnés de la terre » n’attendant que le départ du colonisateur pour construire un monde de prospérité, de paix et de fraternité grâce à la récupération des richesses injustement accaparées par le colonisateur a montré ses limites. Un demi siècle plus tard, la plupart de ces pays – pour ne pas dire la totalité – sont dans le meilleur des cas dans une situation économique difficile, dans le pire dans une situation de guerre civile et de collapse de l’Etat. Il ne me semble que ce soit abusif de se demander pourquoi, même si pour cela il faut bousculer les dogmes établis. Dans ce contexte, je trouve que votre terrorisme intellectuel sur le mode « si on met en cause la décolonisation, alors vous êtes des complices des Afrikaners » est particulièrement bête. Ce n’est pas parce que le chœur des bienpensants range la colonisation dans la liste des pêchés capitaux de l’occident qu’il faut le croire.
[Reprenons le contrôle partout en Afrique et en Asie du sud-est et, à coup sur, nous ferons faire d’immenses progrès à toutes ces contrées déshéritées. Apportons-leur l’âge d’or auquel elles ont droit.]
Vous avez raison. Laissons les s’entretuer au Mali, en Côte d’Ivoire, en Centrafrique et ailleurs. Qui sommes nous après tout pour décider qui de la Séléka ou des Balaka ont le droit de tuer l’autre ? Bien entendu, après le génocide sera aussi notre faute. C’est ça le nouveau fardeau de l’homme blanc…
@Descartes,
[Vous avez raison. Laissons les s’entretuer au Mali, en Côte d’Ivoire, en Centrafrique et ailleurs. Qui sommes nous après tout pour décider qui de la Séléka ou des Balaka ont le droit de tuer l’autre ? Bien entendu, après le génocide sera aussi notre faute. C’est ça le nouveau fardeau de l’homme blanc…]
C’est marrant (si je puis dire ainsi…), mais votre remarque me fait penser à l’attitude "un tiers-mondiste, deux tiers-mondain" de l’élite parisienne pendant les massacres du Rwanda, il y a près de 20 ans. En effet, le premier réflexe de ces beaux-esprits (je songe à la famille Glucksmann ou à leurs acolyte Bruckner and co), c’était d’avoir accusé la France de complicité de génocide, faisant écho aux accusations du leader des Tutsis Paul Kagame.
Si je me rappelle, un an plus tôt, la France s’était déjà interposée entre les Tutsi et les Hutus pour éviter que le président légitime Habiarimana ne soit renversé. En 1993, on avait reproché aux Français de faire de l’ingérence, et c’était déjà l’époque où notre pays se désintéressait de l’Afrique pour miser sur la "construction" européenne. Bien des gens connaisseurs du sujet sont d’avis que, si les troupes tutsies avaient été repoussées à ce moment-là vers l’Ouganda, le génocide rwandais auraient pu être évité. Mais là encore, les "tiers-mondistes/deux tiers mondains" (comme on qualifie souvent ces beaux esprits), ont eu un rôle néfaste en imposant le retrait des troupes françaises avant que ne soit sécurisé le Rwanda…
Dans cette affaire du génocide rwandais, ce qu’il y a d’"utile" pour une partie de l’élite française, les francophobes et autres atlantistes, c’est qu’elle a durablement affaibli la position française en Afrique, faisant que dans tous les cas, les Français sont coupables: d’abord, ils sont intervenus pour sauver un dictateur qui maintenait l’ordre: c’était la "Françafrique" dans toute sa splendeur. Par contre, lorsque la France balladurienne (Balladur était peu versé dans les affaires africaines, si mes souvenirs sont exacts) hésite à s’interposer comme en avril 94, alors c’est qu’ils sont complices d’un massacre, voire ils ont formé les assassins et les "bouchers". A l’époque, je n’avais jamais vu une telle campagne de haine envers les intérêts français à l’étranger de la part de nos bien-pensants, qui récidiveront quatre ans plus tard pour réclamer le bombardement de la Serbie, au mépris du droit international. C’est surtout ça, que défend les anti-colonialistes de salon: le droit d’ingérence à la tête du client, et comme par hasard, toujours pour nuire aux intérêts français à long terme…
Vingt ans plus tard, la vérité commence à émerger: on sait désormais que le présent rwandais Paul Kagame est probablement à l’origine de toutes les guerres qui ensanglantent cette région d’Afrique équatoriale, et qu’avec la guerre dans le Kivu, une région de l’ex-Zaïre, il est à l’origine de plusieurs millions de morts, ce dont tout le monde se contrefout éperdument, même nos beaux-esprits anticolonialistes français. Pire, il semblerait qu’au final, la France n’ait pas à rougir de son action au Rwanda, sachant qu’elle n’a pu s’interposer à temps pour éviter les massacres, du fait même de l’inertie provoquée par les "anti-colonialistes"…
@CVT
[C’est marrant (si je puis dire ainsi…), mais votre remarque me fait penser à l’attitude "un tiers-mondiste, deux tiers-mondain" de l’élite parisienne pendant les massacres du Rwanda, il y a près de 20 ans. En effet, le premier réflexe de ces beaux-esprits (je songe à la famille Glucksmann ou à leurs acolyte Bruckner and co), c’était d’avoir accusé la France de complicité de génocide, faisant écho aux accusations du leader des Tutsis Paul Kagame.]
A ce propos, je conseille la lecture du livre « Noires fureurs, blancs menteurs » de Pierre Péan. C’est un livre qui fait froid dans le dos, et qui invite à une certaine prudence quand il s’agit de désigner les « bons » et les « méchants » dans les affaires africaines.
@Descartes
[Pas vraiment comparable. Contrairement à ce qui s’est passé en Algérie, les conquistadors n’étaient pas très intéressés par une véritable « colonisation ». Leur priorité était de trouver l’or et les métaux précieux et les embarquer pour l’Espagne. Pas d’importer des techniques pour faire fructifier leur nouveau domaine.]
Malgré le fait que j’apprécie souvent la justesse de vos analyses, là, mon cher Descartes, je ne suis pas d’accord! N’en déplaise à Hérédia et la vision "vol de gerfauts hors du charnier natal…" que nous nous faisons de la colonisation espagnole, ceux-ci avaient toujours eu une vision Romaine de la conquête (cf. les rapports de Cortès à la couronne, qui émulent clairement le style de De Bello Gallico) qui était radicalement différente du modèle de colonie anglo-saxon ou Portuguais/Hollandais, plus axés sur le commerce. Pour les espagnols, la colonisation donnait lieu à l’assimilation dans "l’empire", et donc au dévelopement et à la consolidation des terres conquises dans leur administration ainsi que la conversion (souvent forcée) des populations.
Pour voir jusqu’à quel point les espagnols avaient un intérêt à développer et cultiver les pays qu’ils conquéraient, il suffit de constater que la première université d’Amérique, l’Université de Santo Tomás de Aquino, à Saint-Domingue (actuelle République Dominicaine), fut fondée en… 1538, soit 46 ans après la découverte du continent! C’est tout de même un tour de force. Celle-ci fut suivie d’une autre université, 20 après, à Santiago de La Paz, aussi basée sur le modèle du "studium generale" de l’Université de Salamanque, qui était une des plus importantes du monde à l’époque.
On y apprécie notamment une volonté humaniste de disseminer la culture parmi les locaux qui n’éxistait pas dans les colonies anglaises; par éxemple, il n’y eut aucune université en tant que telle dans les treize colonies jusqu’à l’indépendance des Etats-Unis, lorsque le collège de Pennsylvanie fut déclaré une université en 1779 (les anglais n’avaient fondé que sept "colleges", les "vraies" universités étant limitées à la métropole…)
Au plaisir de vous lire,
ჯუღაშვილი
@ ჯუღაშვილი
[Malgré le fait que j’apprécie souvent la justesse de vos analyses, là, mon cher Descartes, je ne suis pas d’accord! N’en déplaise à Hérédia et la vision "vol de gerfauts hors du charnier natal…" que nous nous faisons de la colonisation espagnole, ceux-ci avaient toujours eu une vision Romaine de la conquête (cf. les rapports de Cortès à la couronne, qui émulent clairement le style de De Bello Gallico) qui était radicalement différente du modèle de colonie anglo-saxon ou Portuguais/Hollandais, plus axés sur le commerce.]
Que leur modèle fut différent du modèle des comptoirs, c’est certain. L’Amérique n’avait d’ailleurs pas la « profondeur » économique pour alimenter un modèle de commerce. Mais de là à dire que la colonisation espagnole s’est faite sur le modèle Romain… je dois protester énergiquement. Le modèle romain était un modèle d’expansion territoriale. La conquête était assurée par des troupes régulières de l’Etat conquérant, et les terrains conquis étaient partagés avec un système qui visait à assurer l’installation d’occupants romains pour mettre les terres conquises en valeur. Et accessoirement rapporter des impôts au trésor romain.
Pour les espagnols, c’est tout le contraire : la conquête a d’abord pour objectif de rapporter en Espagne les matières premières et avant tout les métaux précieux. Si les indiens sont réduits au servage, c’est avant tout pour travailler dans les mines d’or et d’argent. Ce ne sont pas des troupes régulières payées par l’Etat espagnol, mais des aventuriers privés qui investissent leur fortune et entendent se payer sur la bête. Ceux qui participent à la conquête n’envisagent donc pas de s’installer dans les territoires conquis, mais de revenir riches en Espagne même. Et finalement, la couronne espagnole n’envisage pas de fiscalité sur le pays conquis. Ce n’est qu’à leur importation en Espagne que le fisc prélève sa dîme.
[Pour voir jusqu’à quel point les espagnols avaient un intérêt à développer et cultiver les pays qu’ils conquéraient, il suffit de constater que la première université d’Amérique, l’Université de Santo Tomás de Aquino, à Saint-Domingue (actuelle République Dominicaine), fut fondée en… 1538, soit 46 ans après la découverte du continent! C’est tout de même un tour de force.]
Votre argument est plus persuasif pour ce qui concerne la colonisation des Antilles, qui effectivement est assez précoce et vise à mettre en valeur les ressources locales, notamment la canne à sucre et le tabac. Mais je ne crois pas qu’on puisse étendre le raisonnement à l’ensemble du continent.
[On y apprécie notamment une volonté humaniste de disseminer la culture parmi les locaux qui n’éxistait pas dans les colonies anglaises; par éxemple, il n’y eut aucune université en tant que telle dans les treize colonies jusqu’à l’indépendance des Etats-Unis, lorsque le collège de Pennsylvanie fut déclaré une université en 1779 (les anglais n’avaient fondé que sept "colleges", les "vraies" universités étant limitées à la métropole…)]
Oui, enfin, le terme de « université » est trompeur, et on ne peut véritablement comparer. Les catholiques continuaient à appeler « université » ce qui n’était en fait que des collèges de théologie. Je n’ai pas en tête la date de première fondation d’une université « laïque » en Amérique… mais je doute qu’elle soit très antérieure au XVIIIème siècle, que ce soit chez les anglosaxons ou chez les catholiques…
Bonjour,
" La loi punit explicitement le fait de nier les crimes contre l’humanité tels qu’ils ont été reconnus par le tribunal international de Nuremberg et par les juridictions françaises. On peut critiquer cette loi, qui établit de fait un « vérité officielle », mais c’est la loi. "
Cette loi est abominableet devrait être censurée par le Conseil Constitutionnel. L’Etat n’a pas à imposer une vérité officielle du type la terre est plate. C’est le travail des scientifiques de chercher, tester, contester, corroborer, démontrer.
@Trubli
[Cette loi est abominable et devrait être censurée par le Conseil Constitutionnel. L’Etat n’a pas à imposer une vérité officielle du type la terre est plate. C’est le travail des scientifiques de chercher, tester, contester, corroborer, démontrer.]
Mais la loi n’établit aucune « vérité officielle ». La loi ne dit pas que ces crimes ont existé. Elle interdit de les nier, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Je suis d’accord que la loi n’a pas à établir des « vérités ». Mais je lui accorde la possibilité d’établir des « conventions ». Il serait ridicule que la loi dise « la terre est plate », mais elle peut dire « nous agirons comme si la terre était plate ».
Bien entendu, une telle "convention" bloque la recherche. C’est un problème. Mais c’est aussi un problème que de permettre une mise en cause de certaines conventions. Je pense qu’il faut reconnaître au législateur le pouvoir de peser le pour et le contre.
D’accord avec vous mais je ne saisis pas ce qui motive ce gouvernement : Valls imitant la tactique de Sarkozy à l’Intérieur a-t-il voulu jouer les « gros bras » ? Le gouvernement n’ayant plus que cela à vendre, « réaffirmer ses valeurs de gauche » ? Faire plaisir aux ultras du CRIF ? Ou, tout simplement un gouvernement en perdition et brouillon…
Au-delà, le souvenir de l’affaire du voile à l’école publique qui a empoisonné des années durant la vie des établissements m’induit à penser que le courage législatif n’est pas le lot du PS, en témoigne l’affaire Baby Loup.
Pour Dieudonné M’Bala M’Bala les dispositions légales en vigueur avec mise en action des sanctions prévues auraient été préférables à un arrêté d’exception.
@morel
[D’accord avec vous mais je ne saisis pas ce qui motive ce gouvernement : Valls imitant la tactique de Sarkozy à l’Intérieur a-t-il voulu jouer les « gros bras » ? Le gouvernement n’ayant plus que cela à vendre, « réaffirmer ses valeurs de gauche » ? Faire plaisir aux ultras du CRIF ? Ou, tout simplement un gouvernement en perdition et brouillon…]
Je pense que le gouvernement tombe dans une réaction classique. Tout gouvernement doit montrer sa capacité à résoudre des problèmes s’il veut rester au pouvoir. Et lorsqu’on n’est pas capable de résoudre les véritables problèmes, on se cherche des problèmes à sa taille. Le gouvernement s’est convaincu qu’il est impuissant lorsqu’il s’agit du chômage, la désindustrialisation, la baisse du niveau dans l’éducation, l’insécurité… il lui faut donc trouver un problème à sa taille. Dieudonné sert à ça : à montrer que Valls et au delà de lui le gouvernement et le président peuvent réussir quelque chose.
Vous avez entièrement raison. Il est très inquiétant de voir avec quelle légèreté on renverse une jurisprudence qui était réellement garante, elle, pour le coup, d’un principe fondamental de notre République. Les satisfactions qui s’acquièrent au prix d’un affaiblissement de l’Etat de droit sont bien trompeuses.
Je vous suis particulièrement reconnaissant de mentionner, à propos de l’atteinte à la liberté de culte dont se sont rendu coupables les Femen (qui semblent vouloir faire oublier les exploits passés d’Act Up dans le domaine, et qui, de fait, vont beaucoup plus loin sur l’échelle du mauvais goût et de la violence symbolique), l’assourdissant "silence des grandes voix", pour reprendre le mot de Mgr André Vingt-Trois.
@pienol
[Je vous suis particulièrement reconnaissant de mentionner, à propos de l’atteinte à la liberté de culte dont se sont rendu coupables les Femen (qui semblent vouloir faire oublier les exploits passés d’Act Up dans le domaine, et qui, de fait, vont beaucoup plus loin sur l’échelle du mauvais goût et de la violence symbolique), l’assourdissant "silence des grandes voix", pour reprendre le mot de Mgr André Vingt-Trois.]
Comme je l’ai dit ailleurs, je ne défends ni Dieudonné, ni l’Eglise, ni personne. Je défends un principe, celui de la liberté de réunion et d’expression. Je suis persuadé que les idéologies ad-hoc sont destructrices, et que chaque fois qu’on défend le « droit d’untel » et non pas le « droit » en général, on plante un nouveau clou dans le cercueil de notre République. Je n’aime pas les cathos, et je n’aime particulièrement pas André Vingt-Trois. Je suis le premier à crier « à bas la calotte » et à chasser les crucifix dans les bâtiments publics. Mais je reste persuadé qu’on défend la République lorsqu’on défend le droit des catholiques – ou des juifs, des musulmans, des bouddhistes – à pratiquer pacifiquement leur culte.
@ Descartes,
"Je n’aime pas les cathos"
C’est ton droit. Je fais juste remarquer qu’il est plus facile de dire "je n’aime pas les cathos" que de dire "je n’aime pas les juifs" ou "je n’aime pas les musulmans"… Dans un cas, on est juste catalogué comme "anticlérical", dans l’autre on est taxé d’ "antisémite" ou d’ "islamophobe". Mais "christianophobe", ça fait rire tout le monde.
A mon avis, il y a deux types de catholiques (comme il y a deux types de juifs, de musulmans…): les catholiques républicains, pour qui le catholicisme est confiné dans la sphère privée, et les catholiques qui n’ont pas accepté la laïcisation de la société, et qui espèrent que la religion régisse à nouveau la sphère publique. Mais je pense que beaucoup de catholiques appartiennent à la première catégorie et sont des gens paisibles, qui ne demandent qu’à exercer leur culte en paix. Et il y a des gens bien parmi eux. Après, il est bien évident qu’il faut toujours éviter d’accorder du pouvoir aux prêtres, et je pense qu’il y a un fond d’intolérance inhérent aux monothéistes. Mais, en dépit des procès intentés (et perdus) par certains catholiques contre des "offenses" envers la religion ou le pape, je pense que les chrétiens sont quand même parmi ceux qui, aujourd’hui en France, acceptent le mieux la critique et l’offense. Bien que catholique, j’avoue avoir bien ri de certains sketchs des Guignols qui étaient pourtant très méchants (de manière générale, les dignitaires du Vatican sous Benoît XVI étaient toujours représentés comme des extrémistes ou des pédophiles…). En revanche, j’aimerais que tout le monde soit traité à la même enseigne, or on a l’impression qu’il y a quelques réticences à s’en prendre à l’islam ou au judaïsme. Le catholicisme est "bon client", on ne craint pas grand-chose à lui taper dessus. Je peux comprendre l’exaspération de certains qui sentent qu’il y a des religions critiquables, et d’autres pas. Moi, je suis un catholique laïc, et je défends aussi la liberté des agnostiques et des athées, du moment qu’ils respectent la liberté des gens qui croient. Or l’intolérance la plus grande n’est pas toujours du côté que l’on croit, j’ai eu l’occasion de m’en apercevoir. Pourtant, la France s’est toujours appuyée, après les divisions de la période révolutionnaire, à la fois sur "ceux qui croyaient au Ciel" et sur "ceux qui n’y croyaient pas", pour reprendre le titre d’un très beau poème d’Aragon composé en l’honneur de deux résistants, un catholique et un communiste, si j’ai bonne mémoire. Le CNR est un bel exemple, je trouve, de l’alliance de ces deux France, la catholique conservatrice et la laïque progressiste. Quelque part, la France ne serait plus la France sans l’une des deux composantes. Je suis frappé par exemple par le poids des écrivains catholiques en France au XX° siècle, dans un pays où la pratique connaît déjà un déclin certain.
"je n’aime particulièrement pas André Vingt-Trois"
Est-il indiscret de demander pourquoi? Quoi qu’on pense du catholicisme, il faut reconnaître que les hommes d’Eglise ont une autre éducation et une autre culture qu’un Dieudonné ou qu’une Femen. Dans une époque où la vulgarité est devenue la règle, cette simple qualité force le respect. Je me demande qui de Mélenchon ou de Vingt-Trois a le plus recours aux injures lors de ses discours…
"chasser les crucifix dans les bâtiments publics"
Et cela te prend beaucoup de temps? 🙂 Par contre, je t’invite à lutter contre les revendications communautaires dans les cantines publiques, religieuses (musulmane essentiellement) ou non (végétarienne, végétalienne, végane ou que sais-je encore). Cela te donnera un peu plus de travail.
J’avais bien saisi que vous défendiez le principe de la liberté d’expression et non le discours de Dieudoné. J’avais compris aussi que votre condamnation du happening des Femen pendant la messe de Noël à la Madeleine était une défense de la liberté de culte et non un acte de foi en l’Incarnation.
Vous n’aimez pas "les cathos" ? Quelle phrase puérile. Et bien moi, je n’aime pas les cocos, na !
Plus sérieusement, vous vous trompez d’ennemi (vous n’êtes pas le seul dans le camp "républicain"). Les catholiques pratiquants sont, dans leur grande majorité, très attachés à la République et à ses principes. C’est d’ailleurs, je crois, le fruit positif et en apparence paradoxal de la loi de 1905, combattue avec tant d’acharnement par l’Eglise à l’époque (mais finalement pas pendant très longtemps). L’Eglise est très consciente que la loi de 1905 crée un cadre presque idéal pour elle, garantissant la liberté de culte tout en empêchant que sa liberté de parole et d’action ne soit limitée par un Etat officiellement catholique la subordonnant à ses intérêts propres (voyez la situation pathétique des Eglises orthodoxes, notamment russe). Les cathos, comme vous dites, aiment la France et la France, pour la grande majorité d’entre eux, c’est la République.
Pourquoi n’aimez-vous pas Mgr Vingt-Trois ? Je n’ai rien à répondre, sur le plan intellectuel, à votre aversion pour la foi chrétienne, mais elle ne doit pas vous empêcher d’entendre ce que vous entendez. Ecoutez donc Mgr Vingt-Trois. Sur les libertés publiques, la laicité, la responsabilité politique, le rôle des catholiques dans la cité, et bien sûr la loi de 1905, il est non seulement un républicain, mais un républicain courageux et conséquent. Sa critique du "mariage" homosexuel vous a peut-être déplue, mais je crois que les républicains se trompent gravement lorsqu’ils soutiennent ces innovations juridiques qui relèvent d’une conception anti-universaliste de la loi.
Enfin, je n’ai personnellement jamais vu, en France, de crucifix dans un bâtiment public, sauf évidemment dans les églises antérieures à 1905 appartenant à l’Etat ou aux communes, et que la loi républicaine consacre au culte catholique (pour l’instant du moins, vu les tendances qui s’affirment au Conseil Constitutionnel et au Conseil d’Etat).
@nationalistejacobin
[C’est ton droit. Je fais juste remarquer qu’il est plus facile de dire "je n’aime pas les cathos" que de dire "je n’aime pas les juifs" ou "je n’aime pas les musulmans"… Dans un cas, on est juste catalogué comme "anticlérical", dans l’autre on est taxé d’ "antisémite" ou d’ "islamophobe". Mais "christianophobe", ça fait rire tout le monde.]
Le cas des juifs est un peu particulier, parce qu’il désigne en même temps un peuple et une religion. Si vous dites « je n’aime pas les hassidim » ou « je n’aime pas les ultra-orthodoxes », vous ne risquez pas vraiment de vous voire accuser d’antisémitisme. Mais comme « je n’aime pas les juifs » est une formule ambiguë, et qu’en plus elle a servi de prologue à un génocide, la prudence s’impose. Le cas des musulmans est un peu différent, parce qu’il est clair qu’il s’agit d’une religion. Et sur ce point je suis d’accord avec vous, il y a des religions qui ont le statut de « victime » et les privilèges qui s’y rattachent, et d’autres – notamment la religion majoritaire – qui n’ont pas obtenu ce statut. Ou qui ne l’ont pas encore obtenu, devrais-je dire, parce que de plus en plus ils jouent le jeu ambigu d’invoquer la persécution par les méchants laïcards.
[A mon avis, il y a deux types de catholiques (comme il y a deux types de juifs, de musulmans…): les catholiques républicains, pour qui le catholicisme est confiné dans la sphère privée, et les catholiques qui n’ont pas accepté la laïcisation de la société, et qui espèrent que la religion régisse à nouveau la sphère publique.]
Je pense que mon usage du therme « catho » ne laissait pas d’ambiguïté sur le type de catholiques auxquels je faisais référence. Mais au cas où ce ne serait pas clair, je précise : c’est bien des catholiques qui prétendent imposer leur religion dans la sphère publique que je parle. Autrement, « ne pas aimer les cathos » me conduirait à ne pas aimer la grande majorité de mes concitoyens. Je suis un « laïcard » dans la ligne Ferdinand Buisson. Autant j’exige la stricte neutralité dans l’espace public, autant je défendrai avec la même énergie le droit des catholiques – et des autres – à pratiquer paisiblement leur culte dans la sphère privée. Et je n’ai aucune raison de « ne pas aimer » ceux qui respectent cette séparation.
[je pense que les chrétiens sont quand même parmi ceux qui, aujourd’hui en France, acceptent le mieux la critique et l’offense. Bien que catholique, j’avoue avoir bien ri de certains sketchs des Guignols qui étaient pourtant très méchants (de manière générale, les dignitaires du Vatican sous Benoît XVI étaient toujours représentés comme des extrémistes ou des pédophiles…).]
C’est discutable. Les catholiques français supportent bien la critique et la satire lorsqu’elle touche leur hiérarchie ou leurs institutions. Ils la supportent moins bien lorsqu’il s’agit du dogme. Je ne me souviens pas avoir entendu beaucoup de voix chez les dirigeants chrétiens pour défendre la liberté d’expression lors de la sortie de « La dernière tentation du Christ » ou l’affiche de « Larry Flint ».
[En revanche, j’aimerais que tout le monde soit traité à la même enseigne, or on a l’impression qu’il y a quelques réticences à s’en prendre à l’islam ou au judaïsme. Le catholicisme est "bon client", on ne craint pas grand-chose à lui taper dessus.]
Dans le cas du judaïsme, je pense que c’est un mauvais procès. Ainsi, par exemple, les épisodes de l’ancien testament ont servi à des centaines sinon des milliers de parodies et de satires de toute sorte sans qu’à ma connaissance aucune autorité religieuse juive n’ait jamais protesté. La communauté juive religieuse est en fait assez fermée et est assez indifférente à ce genre de moquerie. Ils n’auraient certainement pas incendié un cinéma pour protester contre un film montrant que Moïse avait un maîtresse. Mais il est vrai que l’ombre de la Shoah fait qu’on évite certaines plaisanteries… sauf paradoxalement lorsque l’humoriste est lui même juif. Ainsi un comédien comme Popeck peut se permettre de jouer sur des stéréotypes qui ne seraient pas admis chez un comédien non-juif. On peut regreter qu’il en soit ainsi, mais cela fait partie de l’histoire.
L’Islam, par contre, c’est une autre affaire. Contrairement aux juifs et aux chrétiens, les musulmans n’ont pas encore admis la séparation des ordres. Le blasphème ou l’apostasie restent pour les musulmans des crimes que l’on doit punir, et non simplement des choix dont chacun est maître. C’est pourquoi les humoristes craignent de plaisanter sur l’Islam, alors qu’avec les chrétiens, qui ont admis depuis longtemps la séparation des ordres, on ne prend guère de risque.
[Or l’intolérance la plus grande n’est pas toujours du côté que l’on croit,]
Bien entendu. Il y a de l’intolérance dans tous les camps. Rien n’est plus terrible que les gens persuadés non seulement de détenir la vérité, mais d’avoir le droit de l’imposer aux autres.
[Pourtant, la France s’est toujours appuyée, après les divisions de la période révolutionnaire, à la fois sur "ceux qui croyaient au Ciel" et sur "ceux qui n’y croyaient pas",]
Même à la période révolutionnaire, la France a été tolérante. L’objectif des républicains n’était pas d’en finir avec la religion – catholique ou autre – mais de mettre des limites au pouvoir clérical. On n’a pas assassiné les prêtres, on leur a imposé un serment constitutionnel. Et ceux qui l’ont prêté n’ont pas été persécutés par la Révolution, même si dans certains cas ils ont eu à souffrir du fanatisme de leurs ouailles. Il faut aussi relire les débats sur la loi de 1905. Les camp laïc en France n’a pas cherché à supprimer la religion, mais à la chasser de la sphère publique. Même les communistes ont en France pratiqué une politique de « main tendue » envers les croyants. La laïcité française est conçue comme une idéologie de tolérance, une indifférence aux religions qui garantit à chacun le droit de pratiquer la sienne.
[Quelque part, la France ne serait plus la France sans l’une des deux composantes.]
Tout à fait d’accord. On n’efface pas mille ans d’histoire d’un trait de plume.
["je n’aime particulièrement pas André Vingt-Trois" Est-il indiscret de demander pourquoi?]
Parce que je vois dans ses discours une volonté de remettre la religion dans la sphère publique. On le voit quand il s’exprime sur les décisions du Conseil d’Etat concernant le port du voile, lorsqu’il revendique la présence des religions « dans l’espace public » ou lorsqu’il appelle les catholiques a faire pression sur leurs élus contre la loi légalisant le mariage homosexuel.
[Quoi qu’on pense du catholicisme, il faut reconnaître que les hommes d’Eglise ont une autre éducation et une autre culture qu’un Dieudonné ou qu’une Femen.]
Franchement, c’est une comparaison absurde. J’ai connu des militants catholiques intégristes aussi grossiers est stupides que Dieudonné ou qu’une Femen. J’ai connu des « hommes d’église » bornés et ignorants. Bien entendu, j’ai fréquenté des jésuites dont la culture encyclopédique n’avait d’égal que le sens de la pédagogie. Il y a de tout chez les « hommes d’Eglise »…
[Dans une époque où la vulgarité est devenue la règle, cette simple qualité force le respect. Je me demande qui de Mélenchon ou de Vingt-Trois a le plus recours aux injures lors de ses discours…]
Mélenchon, certainement. Mais cela tient plus au public auquel ils s’adressent qu’à leurs inclinaisons respectives.
[« chasser les crucifix dans les bâtiments publics ». Et cela te prend beaucoup de temps? :)]
Plus maintenant, mais il fut un temps… je me souviens d’avoir passé un examen administratif qui se déroulait pour des problèmes de logistique dans les locaux d’une école privée. Dans la salle où se déroulait l’examen trônait, à côté du tableau, un crucifix. J’ai exigé que le crucifix soit enlevé ou couvert le temps de mon examen, ce qui fut d’ailleurs fait sans difficulté.
[Par contre, je t’invite à lutter contre les revendications communautaires dans les cantines publiques, religieuses (musulmane essentiellement) ou non (végétarienne, végétalienne, végane ou que sais-je encore). Cela te donnera un peu plus de travail.]
Certainement. C’est malheureux à dire, mais ce genre de revendication est de plus en plus répandue. Les intégristes sont très bons pour répérer les points faibles des institutions, et ont bien compris que les directeurs d’école n’osent pas laisser les enfants sans manger, préférant fermer les yeux.
@pienol
[Vous n’aimez pas "les cathos" ? Quelle phrase puérile. Et bien moi, je n’aime pas les cocos, na !]
Je ne vois pas pourquoi. « Catho » n’est pas synonyme de « catholique ». C’est un type particulier de catholique. Typique de Versailles, si vous voyez ce que je veux dire.
[Plus sérieusement, vous vous trompez d’ennemi (vous n’êtes pas le seul dans le camp "républicain"). Les catholiques pratiquants sont, dans leur grande majorité, très attachés à la République et à ses principes.]
C’est vrai. C’est relativement récent – depuis les années 1950 en fait – mais c’est vrai. Cela étant dit, je n’ai jamais dit que les « catholiques pratiquants » soient mes ennemis. Mes ennemis sont ces catholiques qui en plus de pratiquer prétendent imposer leur religion dans l’espace public. Ce sont eux, les « cathos ».
[C’est d’ailleurs, je crois, le fruit positif et en apparence paradoxal de la loi de 1905, combattue avec tant d’acharnement par l’Eglise à l’époque (mais finalement pas pendant très longtemps).]
Faut pas exagérer. Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, l’Eglise catholique reste nostalgique du concordat et les élites catholiques rejettent la République (« la gueuse »). Quand Pétain prend le pouvoir, l’église catholique croit son heure venue et se compromettra avec le régime de Vichy puis avec la collaboration, au point qu’à la Libération il sera indiqué au cardinal Suhard, archevêque de Paris, que ce n’était pas la peine de se présenter pour le tédéum qui suivit la libération de la capitale. C’est dans les années 1950 que l’église se résigne, cette fois définitivement, au régime de laïcité imposé par la loi de 1905.
[Pourquoi n’aimez-vous pas Mgr Vingt-Trois ? Je n’ai rien à répondre, sur le plan intellectuel, à votre aversion pour la foi chrétienne, mais elle ne doit pas vous empêcher d’entendre ce que vous entendez.]
Je n’ai aucune aversion particulière pour la « foi chrétienne », aussi longtemps qu’on ne prétend pas me l’imposer et qu’elle n’empiète pas sur la sphère publique. Et même si je trouve certaines croyances stupides ou nuisibles et je me réserve le droit de les critiquer et de les combattre, je défendrai le droit de chacun de croire ce qu’il veut. Ce que je n’aime pas chez Vingt-Trois, ce sont ses déclarations qui empiètent sur la sphère publique. Il a le droit de penser ce qu’il veut, et de donner son opinion. Mais lorsqu’il appelle ses fidèles à faire pression sur les élus, il dépasse les limites de l’acceptable.
[Sa critique du "mariage" homosexuel vous a peut-être déplu,]
Elle ne m’a pas le moins du monde déplu, d’autant plus que je partage son opposition au mariage homosexuel, pour des raisons bien entendu différentes des siennes. Vous pouvez vérifier sur ce blog. Par contre, je ne supporte pas qu’il appelle à faire pression sur la représentation nationale comme un vulgaire leader communautaire. Je ne supporterai pas qu’un imam appelle à faire pression sur les députés sur la question du voile, je ne vois pas pourquoi je devrai supporter qu’un curé le fasse.
[Enfin, je n’ai personnellement jamais vu, en France, de crucifix dans un bâtiment public,]
Il m’a été donné de passer un examen dans un bâtiment scolaire privé (qui était donc devenu un bâtiment public pour la journée). J’ai indiqué au président du jury que je n’entendais pas passer un examen sous un crucifix, et j’ai demandé qu’on le couvre, ce qui fut fait. Je ne l’ai jamais regretter, je pense qu’il ne faut jamais laisser passer ce genre de choses.
@ Descartes,
"Je pense que mon usage du therme « catho » ne laissait pas d’ambiguïté sur le type de catholiques auxquels je faisais référence."
Je n’avais pas compris, pardon. Pour moi "catho" est la simple abréviation, un peu péjorative, de "catholique", utilisée (du moins dans ma région) pour désigner les catholiques en général. Nous sommes donc d’accord sur l’essentiel, et mon intervention était sans objet.
"Même à la période révolutionnaire, la France a été tolérante. L’objectif des républicains n’était pas d’en finir avec la religion – catholique ou autre – mais de mettre des limites au pouvoir clérical. On n’a pas assassiné les prêtres, on leur a imposé un serment constitutionnel."
Je ne partage pas cette vision idyllique des choses. D’abord, "les républicains" n’étaient pas tous d’accord, loin s’en faut, sur la question. Il y a eu parmi les révolutionnaires, un vrai courant hostile à la religion, et au catholicisme en particulier. Des édifices ont été saccagés. D’autres républicains, comme Robespierre, n’approuvaient pas ces débordements antireligieux. Mais l’ "anticléricalisme" sous la Révolution a pu prendre des formes qui dépassaient la simple chasse aux prêtres réfractaires, lesquels ont été parfois assassinés, il faut le rappeler. Le clergé, même constitutionnel, n’était pas toujours très à l’aise d’après les témoignages de prêtres de cette époque. La liberté religieuse a pu être bafouée, ici ou là, par des envoyés en mission ou des groupes de fanatiques se réclamant de la République. Par ailleurs, il y a eu une tentative de développer un culte civique alternatif: le culte décadaire et la théophilanthropie sous le Directoire surtout. Ces tentatives ont reçu l’appui des plus hautes autorités (y compris de certains directeurs). Je ne dis pas que les républicains étaient hostiles à la religion en général, mais certains étaient très anticatholiques et auraient souhaité éradiquer le catholicisme, s’ils avaient pu. De ce point de vue, c’est tout de même Napoléon qui ramena une certaine paix religieuse, mais en rendant finalement au catholicisme sa place.
"Même les communistes ont en France pratiqué une politique de « main tendue » envers les croyants"
Sans doute. Mais il y avait aussi, dans certaines manifestations communistes, des mascarades visant à ridiculiser le culte catholique. Tendre la main à des gens qu’on essaie de faire passer pour des imbéciles, pourquoi pas. Cela étant, la photo que j’ai en mémoire date des années 30 ou 50. Les communistes ont peut-être modifié leur discours après que l’Eglise eût entamé un semblant de modernisation lors de Vatican II.
Sur André Vingt-Trois: je suis d’accord avec toi pour dire qu’il sort de son rôle, d’après ce que tu dis. Nous devons combattre ce type de dérive.
"J’ai connu des « hommes d’église » bornés et ignorants."
"Bornés", je ne suis pas étonné. "Ignorants", je le suis un peu plus. Mais on peut être borné et cultivé. Par ailleurs, dans mon commentaire, je ne parlais pas des militants catholiques intégristes qui sont tout simplement des extrémistes, ce que ne sont pas les hommes d’Eglise pour la plupart d’entre eux. On trouve de tout, je suis d’accord. Mais, globalement, le niveau de culture et d’éducation d’un prêtre est sensiblement plus élevé que celui d’un gauchiste, d’après les comparaisons que mon expérience m’a permis de faire.
J’avoue que je suis surpris qu’un militant communiste ait eu l’occasion de rencontrer tant d’hommes d’Eglise sans jamais aller à la messe. La plupart des catholiques que je connais n’ont jamais vu un jésuite par exemple, et toi, tu en as fréquenté plusieurs selon tes dires… De la même façon, au gré de nos discussions, je ‘aperçois que tu connais plein de hauts fonctionnaires, d’enseignants, d’ouvriers, d’ingénieurs, de politiques… Bien sûr, tu es une personne sociable et qui aime discuter. Mais je suis impressionné de l’échantillon de personnes, de tout milieu, que tu as côtoyé. C’est beaucoup pour un seul homme. Quel est ton secret?
@nationalistejacobin
[Je ne partage pas cette vision idyllique des choses. D’abord, "les républicains" n’étaient pas tous d’accord, loin s’en faut, sur la question. Il y a eu parmi les révolutionnaires, un vrai courant hostile à la religion, et au catholicisme en particulier. Des édifices ont été saccagés.]
Oui. Mais ce mouvement tient pour beaucoup à la confusion entre la religion – entendue comme un ensemble de croyances et de rites privés – et l’église en ce qu’elle était une institution dont le pouvoir prétendait s’imposer au corps civil. Je persiste à penser qu’en dehors de quelques excités, l’immense majorité des révolutionnaires n’avaient rien contre la croyance. La question qui se posait a eux était plutôt celle du pouvoir de l’église sur la société civile. Ce n’était d’ailleurs pas un problème nouveau, les rois avaient déjà eu le même. Les révolutionnaires se sont donc divisés selon leurs convictions : certains pensaient qu’on ne pouvait détruire le pouvoir de l’église sans éradiquer les croyances et pratiques religieuses. D’autres pensaient au contraire qu’il fallait à l’Etat une croyance commune pour des raisons morales – c’est le cas de Robespierre ou de Napoléon – mais que le culte doit être soumis à l’autorité de l’Etat. D’autres enfin croyaient possible une séparation telle que nous la connaissons aujourd’hui. Mais encore une fois, je pense que ceux qui souhaitaient – et croyaient possible – d’en finir avec la croyance par la force et qui avaient cela comme objectif en soi étaient ultraminoritaires.
[Mais l’ "anticléricalisme" sous la Révolution a pu prendre des formes qui dépassaient la simple chasse aux prêtres réfractaires, lesquels ont été parfois assassinés, il faut le rappeler.]
Mais si on persécutait la croyance, pourquoi les rabbins et les pasteurs n’ont pas subi le même sort que les prêtres catholiques ? La réponse me semble évidente : Parce que la question était politique, et non philosophique. Parce que ce qui conduit la révolution a entrer en conflit avec le catholicisme, ce n’était pas les croyances, mais le pouvoir politique de l’Eglise. Si l’église catholique était restée neutre en matière politique, comme ce fut le cas des autorités religieuses juives ou protestantes, la question aurait été complètement différente. Mais la Révolution ne pouvait pas laisser subsister une puissance qui prétendait continuer à partager le gouvernement du pays.
Je pense qu’il faut bien faire la différence entre un conflit religieux et un conflit politique. La persécution des prêtres après la Révolution rentre pour moi dans la même catégorie que la prohibition du voile islamique aujourd’hui : c’est l’affirmation par la République qu’elle n’entend pas laisser se constituer un pouvoir clérical qui concurrence le pouvoir civil dans la sphère publique. Cela n’a rien à voir avec la question des croyances.
["Même les communistes ont en France pratiqué une politique de « main tendue » envers les croyants" Sans doute. Mais il y avait aussi, dans certaines manifestations communistes, des mascarades visant à ridiculiser le culte catholique.]
Faut tout de même pas exagérer. Je respecte le droit des gens de croire ce qu’ils veulent, mais j’exige en retour le droit de croire moi aussi en ce que je veux. Je respecte le droit des catholiques au prosélytisme, mais j’exige qu’on me reconnaisse et respecte le même droit. Les catholiques ont le droit, dans leurs publications et leurs cérémonies, de critiquer les incroyants et les vouer à l’enfer. Pourquoi les incroyants n’auraient pas dans ces conditions le droit, eux aussi, de ridiculiser le culte catholique ?
Je voudrais être très clair : je suis pour le respect sourcilleux du droit de chacun à croire ce qu’il veut et à pratiquer en privé les rites attachés à sa croyance, dès lors que ceux-ci ne portent pas atteinte à l’ordre public. Mais respecter le droit à croire n’implique pas le respect des croyances elles-mêmes. Je suis athée, et athée militant. Je pense que le monde serait meilleur si les gens croyaient moins à des dieux et surtout reconnaissaient moins l’autorité des églises. Et de la même manière que je défendrai toujours le droit des gens à pratiquer leurs rites, je défendrai aussi mon droit à les critiquer, à les moquer, à les ridiculiser. La liberté du culte n’est pas pour moi contradictoire avec le droit au blasphème, tous deux dans les limites posés par l’ordre public.
[Tendre la main à des gens qu’on essaie de faire passer pour des imbéciles, pourquoi pas.]
Dans le cas du PCF, cela revenait plutôt à dire « même si vous vous comportez quelquefois comme des imbéciles, cela ne vous empêche pas de lutter avec nous pour un monde meilleur ». En quoi cela vous paraît contradictoire ?
[Cela étant, la photo que j’ai en mémoire date des années 30 ou 50. Les communistes ont peut-être modifié leur discours après que l’Eglise eût entamé un semblant de modernisation lors de Vatican II.]
Pas vraiment. Une fois que la politique de la « main tendue » eut réglé la question de savoir si l’on pouvait être communiste et en même temps croyant et pratiquant, la question religieuse ne s’est plus vraiment posée. Dans le PCF que j’ai connu, la question religieuse était considéré comme strictement privée, et les camarades pouvaient envoyer leurs enfants au catéchisme ou faire leur bar-mitsva et inviter leurs camarades à la fête sans que cela pose de problème. Cela a un peu changé avec l’arrivée du père UbHue aux affaires : une véritable vague de cléricalisme s’est abattue sur le Parti, avec des grands discours sur « communisme et communion » et les chroniques de Gaillot dans l’Huma.
[Mais, globalement, le niveau de culture et d’éducation d’un prêtre est sensiblement plus élevé que celui d’un gauchiste, d’après les comparaisons que mon expérience m’a permis de faire.]
Pas sur. Les gauchistes a temps plein comme Alain Krivine ont souvent une culture et une éducation de choix.
[J’avoue que je suis surpris qu’un militant communiste ait eu l’occasion de rencontrer tant d’hommes d’Eglise sans jamais aller à la messe. La plupart des catholiques que je connais n’ont jamais vu un jésuite par exemple, et toi, tu en as fréquenté plusieurs selon tes dires…
De la même façon, au gré de nos discussions, je ‘aperçois que tu connais plein de hauts fonctionnaires, d’enseignants, d’ouvriers, d’ingénieurs, de politiques… Bien sûr, tu es une personne sociable et qui aime discuter. Mais je suis impressionné de l’échantillon de personnes, de tout milieu, que tu as côtoyé. C’est beaucoup pour un seul homme. Quel est ton secret?]
Si je le racontais, ce ne serait pas un secret… Mais bon, je n’aime pas trop parler de moi, mais puisque tu poses la question, je vais essayer de répondre. J’adore discuter, et j’adore surtout écouter, particulièrement les gens qui ne me ressemblent pas. Pendant des années, j’ai fait du porte-à-porte et j’ai distribué des tracts. Et à chaque fois, j’essayais d’entamer la conversation, particulièrement avec les gens qui de toute évidence n’étaient pas de notre bord. Je vais te raconter une anecdote : a l’époque, on avait notre « table » au marché chaque dimanche, où l’on vendait l’Huma dimanche, les « Cahiers », « La Pensée » et quelques livres, on faisait signer des pétitions, etc. Il y avait un monsieur en blouson de cuir qui passait tous les dimanches et qui nous insultait à voix basse chaque fois qu’il passait près de nous. Une fois, je lui ai demandé pourquoi il m’insultait, je lui ai proposé de boire un café et de nous expliquer. On est allés au troquet, et il m’a raconté son histoire. C’était un ancien colonel parachutiste, qui avait fait l’Algérie, catholique intégriste. Il m’a raconté plein de choses que je ne connaissais pas sur cette période, sur son milieu, sur sa vie, sur ses espoirs, sur ses peurs… je ne pense l’avoir convaincu de rien, et il ne m’a convaincu de rien. Mais je l’ai beaucoup mieux compris. Et au moins, quand il passait le dimanche pour nous insulter, au moins je savais pourquoi il le faisait.
Des histoires comme celle-là, j’en ai des centaines. Quand j’étais en formation, j’allais à l’aumônerie juste pour bavarder avec le prêtre, un jésuite extraordinairement cultivé et disciple de Machiavel. J’ai été à des réunions de tous les partis politiques parce que j’avais envie de voir comment cela se passe. Fasciné comme je le suis par l’histoire, j’ai toujours pris le temps de faire parler les « vieux », que ce soit au Parti, à l’armée, dans mon quartier ou au boulot (et j’ai eu une carrière professionnelle très variée, certains diront chaotique). Tout le monde a des choses intéressantes à dire, le tout est de savoir écouter et de prendre le temps. J’ai beaucoup – trop ? – écouté dans ma vie. Un camarade m’avait dit une fois que j’avais un caractère « contemplatif », et je pense que c’est assez vrai.
@DEscartes
Mais tous ces gens que vous dites avoir « écouté » ne vous ont-ils jamais fait imaginer que les choses sont complexes, qu’elles sont rarement binaires ?
De tous ces gens que vous avez [beaucoup mieux compris] aucun ne vous a jamais ébranlé dans vos certitudes, laisser entrevoir que « La Vérité » peut avoir plusieurs facettes ?
@ Descartes,
"Faut tout de même pas exagérer. Je respecte le droit des gens de croire ce qu’ils veulent, mais j’exige en retour le droit de croire moi aussi en ce que je veux. […] Pourquoi les incroyants n’auraient pas dans ces conditions le droit, eux aussi, de ridiculiser le culte catholique ?"
Tu prêches à un convaincu. Ne te méprends pas: je ne reproche pas aux communistes de s’être moqués de la religion, catholique ou autre. Je trouvais juste surprenant de tendre la main à des gens considérés comme des imbéciles superstitieux. Mais j’entends les arguments que tu exposes.
"Je suis athée, et athée militant."
Eh bien sache que je défends les gens comme toi, contre les catholiques si nécessaires. Rien ne m’exaspère davantage que le discours de certains qui professent qu’ "il manque un petit supplément d’âme à ceux qui ne croient pas". Ce n’est pas vrai. Et j’ajoute que l’athée qui apporte assistance à son prochain sans espérer de récompense dans l’au-delà ne me paraît pas moins méritant, bien au contraire, que le croyant qui fait de même, mais en espérant le Paradis comme récompense.
Je te remercie des précisions que tu as apporté sur ton parcours, qui me paraît passionnant. Je dois te paraître bien indiscret, mais c’est vrai que j’aime bien cerner mon interlocuteur, d’où il vient, ce qui fonde son expérience. N’y vois pas de curiosité malsaine de ma part. Puisque nous parlons du catholicisme, je vais te dire un mot de ma position: né et élevé dans une famille très "tiède" (j’ai quand même eu droit au catéchisme), j’ai longtemps été un sceptique, parfois hostile à l’Eglise. J’ai presque envie de dire que j’ai envie de croire, mais que j’ai du mal, à cause d’une formation à caractère scientifique et d’une vision profondément rationnelle du monde. Je demeure fermement opposé au pouvoir des prêtres. Récemment il est vrai, les hasards de la vie ont fait que je me suis rapproché de l’Eglise. Les raisons, tu les as évoquées à de nombreuses reprises: nous, pauvres humains, avons besoin de donner un sens à notre vie. Et d’autre part, je suis en quête d’une institution qui propose autre chose que le "tout se vaut" que nous vend la bienpensance. Je suis enseignant et je m’aperçois que les institutions d’Etat (dont l’Ecole) sont en déliquescence. Je souhaite leur redressement, mais je crains que ce ne soit pas pour tout de suite. Alors, un peu désemparé, je suis tenté de me tourner vers une institution tenant un discours, disons un tant soit peu solide et structuré. Et comme je suis plutôt conservateur, c’est la religion de mes ancêtres qui m’attire. Ce qui m’intéresse, c’est de trouver des valeurs, des vertus sur lesquelles asseoir une discipline personnelle, un code d’honneur pourrais-je dire. J’insiste sur l’aspect personnel: ce que je cherche dans le catholicisme, c’est pour moi, je ne prétends rien imposer aux autres. Le salut de la France, un thème qui m’est cher tu le sais, ne peut pas venir de la religion selon moi. C’est pourquoi je suis laïc et républicain. Voilà, peut-être t’ai-je ennuyé… mais j’espère avoir enrichi ton échantillon de personnes à écouter. Il est plus agréable de parler de ça autour d’une bière ou d’un café, comme avec ce parachutiste catholique que tu m’as cité, mais on ne peut pas tout avoir :).
@nationalistejacobin
[Récemment il est vrai, les hasards de la vie ont fait que je me suis rapproché de l’Eglise. Les raisons, tu les as évoquées à de nombreuses reprises: nous, pauvres humains, avons besoin de donner un sens à notre vie. Et d’autre part, je suis en quête d’une institution qui propose autre chose que le "tout se vaut" que nous vend la bienpensance.]
Puisqu’on en est aux confidences, je dois te dire que je n’ai jamais ressenti le besoin de me tourner vers l’au-delà pour chercher un « sens ». Je ne me souviens qu’une seule fois avoir eu envie de croire. Je venais de perdre un être très cher, et en entrant dans une église (j’aime bien les églises : souvent elles sont pleines de belles choses, ça sent bon et il y a le silence) j’ai envié la chance de ceux qui peuvent trouver une consolation dans l’idée qu’ils retrouveront l’être cher dans un autre monde. Je crois que ce fut la seule fois dans ma vie que j’ai envié ceux qui ont la foi.
[Alors, un peu désemparé, je suis tenté de me tourner vers une institution tenant un discours, disons un tant soit peu solide et structuré. Et comme je suis plutôt conservateur, c’est la religion de mes ancêtres qui m’attire. Ce qui m’intéresse, c’est de trouver des valeurs, des vertus sur lesquelles asseoir une discipline personnelle, un code d’honneur pourrais-je dire.]
Je comprends. Mais ce faisant, tu donnes la preuve que tu est un vrai athée. C’est l’institution humaine, et non la transcendance que tu recherches…
[Voilà, peut-être t’ai-je ennuyé… mais j’espère avoir enrichi ton échantillon de personnes à écouter.]
Mais pourquoi as-tu l’impression de « m’ennuyer » ? « Je suis humain, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger »…
[Il est plus agréable de parler de ça autour d’une bière ou d’un café, comme avec ce parachutiste catholique que tu m’as cité, mais on ne peut pas tout avoir :).]
Je serais ravi d’en parler avec toi autour d’une bière ou d’un café, je te l’assure… surtout si c’est toi qui paye ! 😉
@vent2sable
[Mais tous ces gens que vous dites avoir « écouté » ne vous ont-ils jamais fait imaginer que les choses sont complexes, qu’elles sont rarement binaires ?]
Toujours. Ecouter les gens donne à peine une idée de la formidable complexité du monde. Vous devriez essayer, de temps en temps.
[De tous ces gens que vous avez [beaucoup mieux compris] aucun ne vous a jamais ébranlé dans vos certitudes,]
Non. Je n’ai jamais eu trop de « certitudes ». Tout au plus des « convictions ». Et une « conviction » se forge petit à petit, justement en intégrant des expériences, des découvertes, des analyses. Maintenant, si votre question est de savoir si les échanges que j’ai eu avec les gens ont pesé sur la formation de mes convictions, je vous dirai que oui, sans aucun doute.
[laisser entrevoir que « La Vérité » peut avoir plusieurs facettes ?]
Je n’ai jamais cru à « La Vérité ». Comment ce qui n’existe pas pourrait avoir « plusieurs facettes » ?
Je n’ai pas accordé "se sont rendues coupables" — ah! l’accord des pp des verbes pronominaux… Vous voudrez bien corriger en mon nom. Merci
Bonjour Descartes.
Je suis votre blog depuis plusieurs mois, dans l’ombre, sans jamais commenter vos articles que je trouve toujours rafraîchissants au possible. J’attends souvent avec impatience vos billets.
Puisque ceci est mon premier commentaire, j’aimerais commencer par vous remercier une bonne fois pour ce que vous faite. Moi qui suis un "jeune" citoyen (26 ans) qui me pose de plus en plus de questions sur notre régime démocratique, je dois avouer que vous êtes le genre de personnage qui me pousse à mettre en doute la légitimité du sacro-saint suffrage universel. En effet, comment admettre – après avoir considéré l’étendue du gouffre qui nous sépare en matière de connaissances tant sur le plan théorique (culture générale en matière d’histoire, de politique, de sciences, de droit) que pratique (années de militantisme, de réflexion) – que nos votes aient la même valeur une fois dans l’urne… Et je parle de mon vote mais ça vaut pour d’autres ! J’ai notamment une cousine, mère de famille, citoyenne intégrée depuis longtemps dans la vie professionnelle, qui serait incapable de me donner le nom du premier ministre… Mais elle vote ! Bref, j’ai beaucoup de respect pour votre parcours et pour certaines idées que vous défendez à "contre-courant" de ce que représente pour moi la "gauche" actuelle (gauche sociétale, bisounours, systématiquement pro-Europe, pro-Minorités, etc.) et je continuerai à vous lire avec intérêt.
Si je me permets de commenter, c’est parce que le sujet Dieudonné me tient à coeur. Cela fait des années que je suis Dieudonné et que je le soutien. J’ai vu tous ses spectacles en DVD et parfois de visu (j’étais au Zénith pour “J’ai fait le con” lorsqu’il a invité Faurisson sur scène, j’ai vu Foxtrot à la Main d’Or), toutes ses vidéos sur le web (dont la fameuse vidéo en Iran) et je confesse que je le trouve excellent comédien, et qu’il me fait beaucoup rire, ce qui nous différencie nettement d’après ce que j’ai pu comprendre. Je suis d’ailleurs moins difficile que vous puisque j’aime beaucoup Devos aussi, qui fait un autre genre pour moi. J’avais aussi pris une place pour aller voir “Le Mur” à Tours. Je trouve que les spectacles de Dieudonné sont très bien écrits, qu’il trouve souvent des formules mémorables, et qu’il est bien au dessus de tout ce qui peut se faire à l’heure actuelle en tant qu’humouriste.
Ceci étant dit, je voulais vous dire que j’ai été un peu déçu que vous admettiez l’antisémitisme de Dieudonné comme une évidence. Que certaines des phrases de Dieudonné puissent être considérées comme antisémites, je le conçois tout à fait, dans le sens ou il fait parfois des raccourcis en parlant “des Juifs”, mais à l’heure actuelle, je ne crois pas du tout que Dieudonné soit un antisémite primaire. Oui, il balance des vannes bien lourdes et caricaturales sur certaines personnalités juives et sur l’holocauste, il mène clairement un combat contre la très grande (trop selon lui) place que prend la Shoah en matière de repentance, cinéma, documentaires, il mène un combat contre la loi Gayssot, contre le soutien indéfectible à Israël que montrent une grande partie des politiques et des médias, mais je ne vois en cela rien d’”antisémite”’. Tout ce que fait Dieudonné à ce sujet est, selon moi, de la provocation pour répondre à sa mort médiatique après son sketch du colon Israëlien, même le coup du “entre les nazis et les Juifs je ne prends pas parti”. Il a d’ailleurs invité des rabins dans son théatre il y a quelques années, Naturei Karta, et a récemment reçu le soutien de Jacob Cohen (l’auteur du printemps des Sayanims) dans une courte vidéo dans laquelle ce dernier fait une quenelle. Je crois que, dans le public de Dieudonné, il y a des gens de confession juive qui le soutienne. Je ne sais pas, évidemment je ne suis pas dans sa tête, mais je continue de penser que Dieudonné est un universaliste anti-raciste et que ses “dérapages” ne sont le fait que de facilité de language ou de perte de tempéramment, un peu comme lorsque l’on dit “Je n’aime pas les américains” pour parler du gouvernement américain ou certaines moeurs américaines. Dieudonné fait de l’humour, grinçant ok, mais de l’humour, comme Claude Sarraute avec sa citation sur la Shoah face à une arménienne (“notre Shoah, on l’a vendue partout, on est couvert d’argent, no est vraiment plus fort que vous” : http://www.youtube.com/watch?v=GYeY7bbVZPw). Peut-être que je ne suis pas un bon citoyen, qu’il devrait être interdit de rire de certaines choses… je ne sais pas, mais vraiment je rigole aux spectacles de Dieudonné, et je n’ai jamais eu l’intention de faire du mal à une personne juive.
Ces derniers temps, j’ai été particulièrement touché par toute la polémique autour de lui et de son dernier spectacle, et notamment par l’unanimité des avis sur Dieudonné dans les médias ainsi que la dose de désinformation massive que l’on a subi. On nous a dit que Dieudonné était raciste (c’est à mourir de rire…), xénophobe (idem), antisémite (ce refrain là on le connaît, il a été condamné c’est vrai pour des propos antisémites mais je ne pense tout de même pas qu’il voue une haine contre l’ensemble de la population juive comme je l’ai dit plus haut), qu’il était négationniste / révisionniste (il a invité Faurisson oui, et lancé des vannes sur les chambres à gaz, et déclaré qu’il ne comprenait pas que l’on ait pas le droit de discuter des camps de manière libre, mais je n’ai aucun souvenir de Dieudonné déclarant qu’il ne croyait pas aux chambres à gaz), que la “quenelle” était un salut nazi inversé (une invention du CRIF et de la LICRA, avec Jacubowitz qui nous sort que c’est un signe pour “sodomiser les victimes de la Shoah”, tout ceci repris en choeur par tous les médias qui nous balancent les photos de quenelles devant les rues du four, à Auschwitz, au mémorial de la Shoah sans jamais imaginer que ces quenelles puissent être dirigées vers la loi Gayssot et toutes les personnalités sionistes qui tournent dans les médias pour lancer l’anathème d’antisémitisme à tout va), qu’il aimerait réouvrir les chambres à gaz (ah bon !? Finalement il y croit alors ! Tout ça pour une grosse vanne bien méchante sorti dans un spectacle à l’encontre de M. Cohen qui avait déclaré qu’il était un “cerveau malade”), etc. Il y a eu une condescendance sans précédent à l’encontre du public de Dieudonné selon moi, et le bon vieux Claude Askolovitch n’a pas manqué de nous insulter (je n’ai plus la référence mais je crois que c’était dans On refait le monde sur RTL.
Ce que je ne comprends pas, c’est que ceux qui défendent soi-disant la lutte contre l’antisémitisme en font une promotion d’enfer. L’affaire Dieudonné est une catastrophe en ce sens. Déjà, elle va radicaliser complètement le public de Dieudonné (je vouais déjà un mépris important à l’UMP et au PS ainsi qu’aux mass médias mais alors là…). De plus, je vois mal comment on pourrait faire comprendre aux gens que les médias et les politiciens ne sont pas sous influence manifeste des intérêts d’Israël ou tout simplement des « Juifs » lorsque l’on voit les déclarations des uns et des autres, toutes plus grandiloquentes à mesure que l’affaire avance. Les vidéos qui tournent aussi n’aident pas, avec le rabin Dynovisz qui sort que Dieudonné est la preuve que l’Homme (« certains hommes du moins ! » selon lui, on repense au peuple élu…) descend du singe (la vidéo à été retirée de Dailymotion mais va revenir j’en suis sûr) où celle ou M. Tesson déclare qu’il approuverait que Dieudonné soit abattu par un peloton d’exécution (au début de cette vidéo : http://rutube.ru/video/b1c8ae6f4d16330aa4eb66e679052ed3/?ref=logo). Dieudonné était à 490 000 « j’aime » sur Facebook il y a encore 10 jours. Il est maintenant à plus de 600 000.
Aussi, je suis probablement trop tolérant envers les propos racistes et antisémites, rien ne me choque et je pense que les gens ont le droit d’exprimer leur ressentiment à l’égard de certaines communauté, tant qu’ils n’appellent pas ouvertement à la violence physique (Dieudonné ne l’a jamais fait, c’est un non-violent, et l’histoire des chambres à gaz contre Cohen est grotesque selon moi, qui propose de résister par la « quenelle ») et au meurtre. Je suis le premier d’ailleurs à rire lorsque l’on caricature et se moque des Français (racistes, collabos, alcooliques, feignants, lâches) et des Portugais (poilus à n’en plus finir, ne parlant que de morue, étant incapable de prononcer un « s » sans le chuinter, ayant un don naturel pour le bâtiment et le ménage, enfin le ménache…) qui sont mes deux origines. J’en rajoute volontiers. Qu’on ne vienne pas me donner de leçons sur ce dont on a le droit de rire ou pas, c’est un peu ce qui m’est venu en tête avec ces histoires de Dieudonné.
Je suis venu à Dieudonné par curiosité, et j’ai découvert par la suite Marc-Edouard Nabe, Alain Soral, fdesouche, etc. Tout un univers que je ne connaissais pas car complètement occulté par les médias traditionnels. J’ai découvert grâce à ceux-ci une autre façon de penser et beaucoup de personnalités intéressantes comme certains économistes qui n’étaient pas pro-euros, etc. D’ailleurs, j’ai connu votre blog grâce à un commentaire sur fdesouche… alors c’est vous dire !
Aussi Descartes, j’aimerai avoir votre avis sur le cas Alain Soral et plus généralement sur son site Égalité et Réconciliation. Pour Alain Soral, je suppose que ce qui fait son charme pour moi est précisément ce que vous ne supportez pas (le côté branleur, les attaques ad hominem, le conspirationnisme à tout va, etc.), mais j’ai parfois l’impression que vos analyses de certains sujet et vos sensibilités ne diffèrent pas toujours énormément. A propos d’Égalité et Réconciliation, j’ai trouvé là beaucoup d’articles intéressants, des vidéos sympathiques qui m’ont fait découvrir Étienne Chouard, Marion Sigaut, Pierre-Yves Rougeyron, etc. Est-ce que vous êtes déjà allé sur ce site ? Est-ce que vous considérez par avance que ce mouvement de « gauche du travail / droite des valeurs » n’est que foutaises puisque crée par Alain Soral ?
Je suis désolé si j’ai écrit un si long message et si certaines parties de celui ci sont un peu confuses ou difficile à suivre. J’attends votre réponse, qui ne manquera pas de me laminer j’en suis sûr, avec intérêt.
Bonne journée !
@Courtial des Pereires
[Puisque ceci est mon premier commentaire,]
Premier commentaire ? Bon, je vais essayer de ne pas être trop méchant…
[je dois avouer que vous êtes le genre de personnage qui me pousse à mettre en doute la légitimité du sacro-saint suffrage universel. En effet, comment admettre – après avoir considéré l’étendue du gouffre qui nous sépare en matière de connaissances tant sur le plan théorique (culture générale en matière d’histoire, de politique, de sciences, de droit) que pratique (années de militantisme, de réflexion) – que nos votes aient la même valeur une fois dans l’urne… Et je parle de mon vote mais ça vaut pour d’autres !]
Mais… tout simplement parce que le droit de peser sur les affaires publiques ne vient pas des connaissances, de la culture ou de la réflexion, mais du fait que dans la mesure où chacun de nous aura à subir les conséquences des politiques qui seront mises en œuvre, chacun de nous a un droit égal à peser sur leur élaboration. Mais je vous rassure : si nous sommes tous égaux au moment du vote, nous ne sommes pas tous égaux en termes de poids politique. Et il faut admettre qu’en France le peuple – et surtout dans les couches populaires – garde un certain respect pour « ceux qui savent » et leur confie un pouvoir qui est loin d’être négligeable.
[Si je me permets de commenter, c’est parce que le sujet Dieudonné me tient à coeur. Cela fait des années que je suis Dieudonné et que je le soutien. J’ai vu tous ses spectacles en DVD et parfois de visu (j’étais au Zénith pour “J’ai fait le con” lorsqu’il a invité Faurisson sur scène, j’ai vu Foxtrot à la Main d’Or), toutes ses vidéos sur le web (dont la fameuse vidéo en Iran) et je confesse que je le trouve excellent comédien, et qu’il me fait beaucoup rire, ce qui nous différencie nettement d’après ce que j’ai pu comprendre.]
Vous avez très bien compris. Personnellement je n’aime pas Dieudonné. Mais cela n’a aucune importance, ce n’est pas le talent de Dieudonné qui est en cause ici. C’est un principe, celui de la liberté d’expression et de réunion. Si on interdisait tous les gens qui n’ont pas de talent, les théâtres seraient bien vides…
Mais puisque vous admettez avoir aimé Dieudonné en ayant assisté à ses spectacles les plus controversés, j’ai envie de vous demander d’expliquer votre perception. Comment avez-vous ressenti la présence de Faurisson sur scène ? Cela vous a fait rire ? Pensez-vous que cela relève de l’humour ?
[Ceci étant dit, je voulais vous dire que j’ai été un peu déçu que vous admettiez l’antisémitisme de Dieudonné comme une évidence. Que certaines des phrases de Dieudonné puissent être considérées comme antisémites, je le conçois tout à fait, dans le sens ou il fait parfois des raccourcis en parlant “des Juifs”, mais à l’heure actuelle, je ne crois pas du tout que Dieudonné soit un antisémite primaire.]
Je ne sais pas s’il est « primaire » ou « secondaire ». Mais je suis un grand partisan du rasoir d’Occam, accessoire indispensable pour toute personne qui a envie d’analyser le réel. Je ne vois aucune raison vraisemblable pour Dieudonné de colporter des idées antisémites s’il n’était personnellement convaincu. Et je ne parle pas seulement de ses raccourcis sur « les Juifs ». Je parle aussi de ses déclarations vouant Patrick Cohen aux chambres à gaz. Dans cette affaire, il n’y a pas la moindre ambiguïté possible.
[Oui, il balance des vannes bien lourdes et caricaturales sur certaines personnalités juives et sur l’holocauste, il mène clairement un combat contre la très grande (trop selon lui) place que prend la Shoah en matière de repentance, cinéma, documentaires, il mène un combat contre la loi Gayssot, contre le soutien indéfectible à Israël que montrent une grande partie des politiques et des médias, mais je ne vois en cela rien d’”antisémite”’.]
S’il se contentait de cela, on pourrait douter de son antisémitisme. Mais, comme je l’ai dit plus haut, son commentaire sur Patrick Cohen ne laisse substister la moindre ambiguïté, pas plus que sa remarque sur « qui des juifs ou de Hitler a commencé ». Dieudonné n’est pas né d’hier, et ces dérapages ne sont pas des lapsus. Ils sont écrits dans son spectacle.
[Tout ce que fait Dieudonné à ce sujet est, selon moi, de la provocation]
La « provocation » ne justifie pas tout. Je n’ai rien contre la provocation, à condition qu’elle soit intelligente et pesée. Si Dieudonné croit qu’en laissant libre cours à son antisémitisme il répond intelligemment à l’ostracisme médiatique auquel il est condamné – pour des raisons que comme vous je trouve mauvaises – il se trompe.
[Il a d’ailleurs invité des rabins dans son théatre il y a quelques années, Naturei Karta, et a récemment reçu le soutien de Jacob Cohen (l’auteur du printemps des Sayanims) dans une courte vidéo dans laquelle ce dernier fait une quenelle.]
Chaque antisémite a un ami juif. Que Dieudonné ait pu trouver des fous juifs pour le soutenir (et il y a des fous dans toutes les confessions, rassurez-vous) ne me surprend pas. Mais cela ne change rien au caractère antisémite de ses déclarations et de ses sketchs.
[Je ne sais pas, évidemment je ne suis pas dans sa tête, mais je continue de penser que Dieudonné est un universaliste anti-raciste]
« Universaliste » ? Certainement pas. J’ai expliqué dans mon papier combien la vision de Dieudonné est au contraire anti-universaliste et étroitement communautariste. Lorsqu’il déclare à propos de l’histoire de l’esclavage qu’il veut que « ses enfants aient accès à LEUR histoire » (c’est moi qui souligne), c’est bien dans ce cadre qu’il se situe.
[et que ses “dérapages” ne sont le fait que de facilité de language ou de perte de tempéramment, un peu comme lorsque l’on dit “Je n’aime pas les américains” pour parler du gouvernement américain ou certaines moeurs américaines.]
S’il s’agissait simplement de déclarations au débotté, on pourrait l’admettre. Mais ses spectacles ne sont pas improvisés, ils sont écrits et préparés à l’avance.
[Peut-être que je ne suis pas un bon citoyen, qu’il devrait être interdit de rire de certaines choses…]
Comme disait un humoriste français, « on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui ». Le message antisioniste de Dieudonné se trouve singulièrement affaibli par son antisémitisme.
[je ne sais pas, mais vraiment je rigole aux spectacles de Dieudonné, et je n’ai jamais eu l’intention de faire du mal à une personne juive.]
J’entends bien. Mais j’avoue que j’ai du mal à comprendre comment on peut applaudir l’apparition d’un Faurisson sur scène lorsqu’on n’a « jamais eu l’intention de faire du mal à une personne juive ». Que certaines plaisanteries antisémites puissent faire rire des gens qui ne sont pas antisémites eux-mêmes montre combien la transmission de la mémoire historique dans notre société est défaillante. Attention, je ne vous jette pas la pierre : vous avez 26 ans dans une société où l’enseignement de ce que fut la Shoah doit plus à l’émotion et au message moral qu’à l’enseignement de l’histoire. Pas étonnant dans ces conditions qu’il y ait une certaine confusion.
[(…) qu’il était négationniste / révisionniste (il a invité Faurisson oui, et lancé des vannes sur les chambres à gaz, et déclaré qu’il ne comprenait pas que l’on ait pas le droit de discuter des camps de manière libre, mais je n’ai aucun souvenir de Dieudonné déclarant qu’il ne croyait pas aux chambres à gaz),]
Faut tout de même pas exagérer. S’il y croit, pourquoi a-t-il invité Faurisson, et en plus pour lui remettre un prix ?
[Tout ça pour une grosse vanne bien méchante sorti dans un spectacle à l’encontre de M. Cohen qui avait déclaré qu’il était un “cerveau malade”), etc.]
Je vous remercie de votre sincérité. C’est toujours intéressant d’avoir le témoignage de ceux qui suivent Dieudonné, ne serais-ce que pour comprendre que tout le monde n’a pas la même lecture de certains épisodes de l’histoire. Mais votre explication pose un sérieux problème : de toute évidence vous n’avez pas conscience de ce qu’a pu être la Shoah comme phénomène historique d’abord, symbolique ensuite. Non, vouer quelqu’un d’origine juive « aux chambres à gaz » n’est pas une « vanne bien méchante », c’est beaucoup plus que ça. D’une manière générale, vouer quelqu’un à la mort m’a toujours paru inacceptable. Lorsque Stéphane Guillon avait été viré de France Inter pour avoir regretté dans un billet humoristique que l’avion de Sarkozy ne se soit pas écrasé, j’ai trouvé cela parfaitement justifié. Mais vouer quelqu’un à une mort qui symboliquement est liée à un génocide, c’est infiniment pire.
[Ce que je ne comprends pas, c’est que ceux qui défendent soi-disant la lutte contre l’antisémitisme en font une promotion d’enfer. L’affaire Dieudonné est une catastrophe en ce sens.]
Tout à fait. Je n’ai jamais cru qu’on puisse tuer l’antisémitisme en faisant taire les antisémites, et encore moins en leur faisant des la publicité.
[Aussi, je suis probablement trop tolérant envers les propos racistes et antisémites, rien ne me choque et je pense que les gens ont le droit d’exprimer leur ressentiment à l’égard de certaines communauté, tant qu’ils n’appellent pas ouvertement à la violence physique (Dieudonné ne l’a jamais fait, c’est un non-violent, et l’histoire des chambres à gaz contre Cohen est grotesque selon moi, qui propose de résister par la « quenelle ») et au meurtre.]
Tout de même, regretter que quelqu’un ne soit pas envoyé aux chambres à gaz peut être sérieusement considéré comme une incitation à la haine et au meurtre. La ligne entre l’expression d’un sentiment de haine et l’incitation à l’imiter est, certes, étroite. Mais Dieudonné l’a dépassé largement en plusieurs opportunités.
[Aussi Descartes, j’aimerai avoir votre avis sur le cas Alain Soral et plus généralement sur son site Égalité et Réconciliation. Pour Alain Soral, je suppose que ce qui fait son charme pour moi est précisément ce que vous ne supportez pas (le côté branleur, les attaques ad hominem, le conspirationnisme à tout va, etc.), mais j’ai parfois l’impression que vos analyses de certains sujet et vos sensibilités ne diffèrent pas toujours énormément.]
Méfiez vous. Deux personnes peuvent dire les mêmes choses à un moment donné pour des raisons diamétralement opposées. Et quelquefois on utilise les mêmes mots que d’autres sans leur donner le même sens. Vous pourrez trouver chez Soral beaucoup d’idées qui sont communes à tous ceux qui s’opposent à la construction européenne libérale et à l’Euro. Mais la coïncidence s’arrête là. Soral et moi partageons une formation politique commune – celle du PCF – et un ennemi commun – l’eurolâtrie. Mais là s’arrêtent nos coïncidences. Soral est un égolâtre comme seuls les années 1980 ont pu fabriquer. Ce n’est pas, du moins je l’espère, mon cas…
Pour tout vous dire, je tiens Soral en piètre estime. Je ne crois pas qu’il y ait chez lui une idée intéressante. C’est un publicitaire qui pique les idées chez les autres et en fait une synthèse qu’il vend ensuite comme un dentifrice.
[Est-ce que vous êtes déjà allé sur ce site ? Est-ce que vous considérez par avance que ce mouvement de « gauche du travail / droite des valeurs » n’est que foutaises puisque crée par Alain Soral ?]
C’est des foutaises, non pas parce qu’il est « crée par Alain Soral », mais parce que c’est des foutaises tout simplement. On ne bâtit pas un mouvement sur une vision paranoïaque tout en prônant la « réconciliation » (entre qui et qui ?).
[[[ Mais puisque vous admettez avoir aimé Dieudonné en ayant assisté à ses spectacles les plus controversés, j’ai envie de vous demander d’expliquer votre perception. Comment avez-vous ressenti la présence de Faurisson sur scène ? Cela vous a fait rire ? Pensez-vous que cela relève de l’humour ? ]]]
Ah Faurisson. Et bien, voilà comment ça c’est passé. Avant ce spectacle, « J’ai fait le con » au Zénith de Paris le 26 décembre 2006, je n’avais jamais entendu parler de R. Faurisson. Avant de le faire monter sur scène, Dieudonné a expliqué au parterre de journalistes et au public que ce qui allait se passer serait la seule chose que les médias retiendraient de cette soirée (ça n’a pas manqué). Faurisson arrive donc, et le régisseur de Dieudonné, Jacky, arrive en pyjama de déporté juif pour lui remettre le « prix de l’infréquentabilité ». Alors, Faurisson a fait un petit discours (disponible sur YouTube) pour se présenter, expliquer qu’il avait été tabasser et laisser pour mort, que l’homme qui l’avait emmené à l’hôpital avait déclaré dans un journal à posteriori qu’il regrettait de l’avoir sauvé, qu’il ne l’aurait pas fait s’il avait su qui Faurisson était.
Bon, après ce spectacle, poussé par la curiosité, j’ai fait des recherches sur R. Faurisson sur internet, et j’ai regardé l’une de ses conférences (je crois de la fin des années 80) puis plus tard le reportage d’Eric Blanrue, « Faurisson, un homme », qui est une version plus moderne, plus longue et plus personnelle (intime disons) de ses anciennes démonstrations. J’ai vu un vieil homme, expliquer ses doutes, expliquer son parcours d’enquêteur sur les chambres à gaz, montrer des plans, avancer ses arguments, donner son avis qu’il s’était forgé au termes de ses recherches. A aucun moment il ne tient de propos haineux à l’égard des juifs, il ne nie pas que des juifs aient été déportés, il présente juste ses thèses selon lesquelles les chambres à gaz n’aurait pas été utilisées comme il est communément admis (que les chambres à Auschwitz était en fait des chambres pour entreposer des cadavres et les brûler par la suite) et, je crois me souvenir, que le nombre de 6 000 000 n’est pas exact.
Pour être honnête, j’ai été très déçu. Déçu de savoir que R. Faurisson, c’était ça. De savoir que dans mon pays, la France, que j’aime et que je tiens en estime, c’est pour avoir présenté ces arguments que ce petit vieux s’était fait éclater le bulbe par une bande, lynché médiatiquement, condamné à de multiples reprises, etc. Des hommes politiques peuvent être condamnés dans des affaires louches, là pas de problème, Bertrand Cantat tue sa femme (involontairement à priori) mais il peut remonter sur scène et avoir une couverture médiatique, des personnalités avouent qu’ils n’ont pas de problèmes avec la sexualité des enfants, toujours ok on les voit à la télé, mais que R. Faurisson explique que selon lui les chambres à gaz n’ont pas été utilisées comme des armes de meurtres de masse et qu’on peut douter des chiffres… hola malheureux mais ça ne va pas de dire des choses aussi immondes !? Au bûcher ! J’ai lu par la suite quelques sites qui argumentent contre les thèses de Faurisson, je ne me suis pas intéressé suffisamment au sujet pour être sûr à 1000% de ce qu’il s’est passé ou pas dans les camps. Les persécutions contre les juifs ont été et les camps furent une horreur : famine, maladies, crimes, chambres à gaz ou pas (et Faurisson semble avoir la même ligne plus ou moins, enfin d’après ce que j’ai vu). La fixation sur ce « détail » des chambres à gaz est curieuse. J’ai été à Auschwitz et j’ai vu la chambre à gaz de Auschwitz-1, et les ruines des chambres à gaz d’ Auschwitz-Birkenau. Bon, à l’heure actuelle vraiment ce n’est pas suffisant pour avoir quelque certitude que ce soit. Birkenau est d’ailleurs dans un état absolument lamentable, avec des tags sur certains bâtiments, etc. Je persiste à croire que les chambres ont existé, mais je suis content d’avoir entendu un autre son de cloche au moins, je considère qu’il est bon d’entendre des avis divergents sur tous les sujets. Aussi, je pense que l’ »histoire officielle » n’est pas toujours une mauvaise chose, rapport au « roman national » qui vous est cher et que je pense utile pour la cohésion d’un peuple de mon côté. Toutefois, je suis vent debout contre la loi Gayssot qui empêche des chercheurs ou des curieux de remettre en cause les conclusions du procès de Nuremberg et autres points d’histoire de la seconde guerre mondiale.
Bref, passons aussi sur le comportement des intervenants dans de vieilles émissions de radio ou Faurisson intervenait. « Je ne répondrai pas à ce monsieur, on ne discute pas avec des gens qui ne partage pas les mêmes valeurs ». En gros c’était ça, c’est sur YouTube aussi il me semble. Bon… voilà le niveau. Je ne comprends pas qu’on interdise par la force (de la loi, et par les menaces physiques) cet homme de dire ce qu’il a a dire, conneries ou pas. Ce serait bien plus efficace de le contrer dans un débat, avec de vrais experts, etc.
Le fait que Dieudonné l’invite sur scène n’était pas de l’humour, c’était d’ailleurs hors spectacle. Après m’être renseigné, je n’ai pas été choqué que Dieudonné ait fait ça et lui ait remis le prix de l’infréquentabilité, à ce vieil homme qui a perdu son travail, qui a pris des cours de boxe thailandaise gratuitement, qui se fait cracher à la gueule depuis vingt ans et qui est considéré comme le pire des dégénérés. Dieudonné l’a fait pour aller plus loin, parce que lui aussi il avait été banni des médias, considéré comme un antisémite, un « fils d’Hitler » (prose de BHL je crois). Alors voilà, c’est du panache. Que ça choque certaines personnes, d’accord, mais c’est parce qu’elles ont des barrières intellectuelles et morales que je n’ai pas dans ce cas (et de plus en plus je me demande si je suis un être sain avec toutes ces histoires…). C’est aussi un immense bras d’honneur au « système » médiatique et antiraciste, indéniablement.
[[[ Je ne sais pas s’il est « primaire » ou « secondaire ». Mais je suis un grand partisan du rasoir d’Occam, accessoire indispensable pour toute personne qui a envie d’analyser le réel. Je ne vois aucune raison vraisemblable pour Dieudonné de colporter des idées antisémites s’il n’était personnellement convaincu. Et je ne parle pas seulement de ses raccourcis sur « les Juifs ». Je parle aussi de ses déclarations vouant Patrick Cohen aux chambres à gaz. Dans cette affaire, il n’y a pas la moindre ambiguïté possible. […] son commentaire sur Patrick Cohen ne laisse substister la moindre ambiguïté, pas plus que sa remarque sur « qui des juifs ou de Hitler a commencé ». Dieudonné n’est pas né d’hier, et ces dérapages ne sont pas des lapsus. Ils sont écrits dans son spectacle. ]]]
Moi je suis partisan de la prudence. Peut-être que Dieudonné est antisémite, je n’en ai ni la preuve ni la certitude. Je comprends tout à fait votre point de vue, vous considérez certaines remarques comme purement antisémites alors que je n’y vois que deux bras d’honneur lancé avec la pointe d’humour grinçant et cynique que Dieudonné utilise depuis le départ. Dieudonné déclare néanmoins ne pas être antisémite ni nazi, voilà. Les coupables avouent rarement me répondrez-vous, et vous aurez raison, mais dans mon fort intérieur je ne décèle pas de haine à l’encontre des juifs en général chez Dieudonné, mais bien certaines élites sionistes / juives d’une très grande arrogance et qui l’ont mis à mort médiatiquement tout en défendant souvent Israël qui pratique une politique que l’humoriste hait par dessus tout. Alors prudence de mon côté, pas de procès d’intention, comme pour les quenelles faites dans les camps ou devant les synagogues que l’on juge antisémites. Celles-ci ne peuvent être, et ne sont probablement, que des clins d’yeux (première fois de ma vie que j’utilise cette expression…) à Dieudonné, un signe de transgression bête et méchant, qui ne dit rien de ce que pense leurs auteurs des juifs, des chambres à gaz, etc. Bon, on ne sera jamais d’accord sur ce point là, ce n’est pas grave :).
Je précise aussi que je lance régulièrement des blagues atroce à mes amis ou bonnes connaissances, qui me le rendent bien d’ailleurs, particulièrement méchantes, racistes, et qui vont parfois jusqu’à les vouer à la mort. C’est peut-être un genre d’humour que vous ne supportez pas ou qui vous est parfaitement étranger et qui expliquerait pourquoi j’aime Dieudonné et pas vous. Quand Dieudonné est en communion avec son public, il sait qu’il peut aller très loin et que les gens vont prendre ce qu’il dit comme une méchanceté gratuite, et c’est d’autant plus attendu si cela concerne une personnalité ou les l’holocauste parce que le public sait que c’est précisément ce qu’il ne devrait pas avoir le droit de dire.
[[[ Chaque antisémite a un ami juif. Que Dieudonné ait pu trouver des fous juifs pour le soutenir (et il y a des fous dans toutes les confessions, rassurez-vous) ne me surprend pas. Mais cela ne change rien au caractère antisémite de ses déclarations et de ses sketchs. ]]]
Vous caricaturez selon moi. Cet argument du « je suis pas raciste j’ai un ami noir » est systématiquement utilisé pour discréditer tout propos sur l’immigration, les problèmes du multiculturalisme, etc. Je le vois toujours dans les commentaires sur Libération, Rue89 et cie. Une fois ceci dit, plus moyen de débattre, c’est un genre de « point Banania ». Il existe des juifs qui soutiennent Dieudonné, et Soral. Ils ne sont pas fous.
[[[ « Universaliste » ? Certainement pas. J’ai expliqué dans mon papier combien la vision de Dieudonné est au contraire anti-universaliste et étroitement communautariste. Lorsqu’il déclare à propos de l’histoire de l’esclavage qu’il veut que « ses enfants aient accès à LEUR histoire » (c’est moi qui souligne), c’est bien dans ce cadre qu’il se situe. ]]]
Oui, j’ai peut-être utilisé une expression maladroite. Je voulais dire qu’il combattait tous les « racismes ». Son public est plutôt « universel », en tout cas. Je n’ai jamais trop suivi Dieudonné sur le terrain de la victimisation de l’esclavage, et je me souviens avoir été déçu lorsqu’il s’est emporté contre un certain M. Bernheim qui l’avait traité de « nègre » sur un plateau de télé suisse sur un ton clairement (selon moi) humoristique. Dieudonné qui fait des leçons d’humour second degré bon… Enfin il a voulu probablement souligner qu’un tel propos à l’égard d’un juif (style : « boaf, c’est un youtre quoi… », en parlant d’un escroc par exemple) aurait déclenché plus de tollé médiatique. Je ne sais pas de quand datent ces déclarations sur la shoah et l’éducation de ses enfants. Quoi qu’il en soit je les trouve absurdes.
[[[ D’une manière générale, vouer quelqu’un à la mort m’a toujours paru inacceptable. Lorsque Stéphane Guillon avait été viré de France Inter pour avoir regretté dans un billet humoristique que l’avion de Sarkozy ne se soit pas écrasé, j’ai trouvé cela parfaitement justifié. Mais vouer quelqu’un à une mort qui symboliquement est liée à un génocide, c’est infiniment pire. ]]]
Vous avez une morale beaucoup plus stricte que la mienne dans ce cas en matière d’expression. Je comprends votre point de vue. Je m’intéresse principalement aux actes, si quelqu’un fait 1000 blagues en souhaitant la mort de quelqu’un sans jamais encourager les gens à le faire ou sans jamais passer à l’acte lui-même, je ne considère pas qu’il prend ce qu’il dit au sérieux. Comme je l’ai dit plus haut, je suis moi-même le pire des salauds par moment quand il s’agit de taquiner, ceci explique peut-être cela… La différence c’est que je ne passe pas à la radio, c’est sûr…
[[[ C’est des foutaises, non pas parce qu’il est « crée par Alain Soral », mais parce que c’est des foutaises tout simplement. On ne bâtit pas un mouvement sur une vision paranoïaque tout en prônant la « réconciliation » (entre qui et qui ?). ]]]
Le principe d’E&R repose sur la réconciliation des français en général d’après ce que j’ai compris, se rassembler autour de l’idée de nation pour dépasser nos origines diverses. Ce site attire d’ailleurs un large public venu de beaucoup d’horizons différents. Communistes, frontistes, jeune de banlieue, catholique, blanc-becs des classes moyennes (mon cas), musulmans, juifs (et oui:p), blablabla.
Il y a ce mouvement, cette chose qui monte on dirait, un genre de rassemblement de personnes très différentes contre l’Union Européenne, la mondialisation sauvage, le capitalisme financier, l’euro, etc. Peut-être aurez vous l’occasion de discuter avec des gens qui fréquentent ce site à l’avenir, tout n’est pas à jeter je trouve. En tout cas, il participe, comme votre blog, à me donner une vision différente de ce à quoi j’aurais accès au premier abord.
J’en profite sur le sujet E&R (qui est plus ou moins lié à Dieudonné, je vous prie de me pardonner le hors sujet) pour vous demander si vous avez ressenti un départ d’anciens militants communistes pour le FN (au delà du cas Alain Soral) ? Comment vous sentez-vous de votre côté, puisque d’après ce que je vois (de très loin je l’admets), le PCF et l’ »extrême gauche » en général n’est pas sur votre ligne du tout en matière de critique de l’euro, etc. ?
P.S : Je dis bravo à E. Lévy, sioniste de première assez hystérique mais qui a le courage d’affronter ses adversaires en face, d’avoir été à la première du « nouveau » spectacle de Dieudonné et d’avoir fait un billet à contre courant de la doxa sur son site causeur (http://www.causeur.fr/dieudonne-dans-les-clous,25812).
@ Courtial des Pereires
J’ai suivi votre conseil, je suis allé lire ce qu’avait écrit Elisabeth Levy à la suite du nouveau spectacle. Elle prend acte du changement.
Je n’ai lu ni une justification, ni une compréhension des dérapages antérieurs, ni une compréhension de l’ambiguïté dont faisaient preuve ses admirateurs, pendant les anciens spectacles.
Voici ce qu’elle dit :
[Pour discutable qu’elle soit sur le principe, la sanction a peut-être fait l’effet d’une douche froide – ça dégrise. Tant mieux parce que depuis dix ans, entre les blagues pourries sur les chambres à gaz, les génuflexions devant Ahmadinejad et l’obsession du pouvoir sioniste, on avait de sérieux doutes … ]
En résumé elle dit que, dans ce nouveau spectacle, Dieudonné ne tient pas de propos qui tombent sous le coup de la loi, qu’il ne fait pas non plus d’allusions au « complot » et que ses spectateurs rient tout autant.
Et que donc, rien n’indiquent que ses spectateurs aient une haine particulière envers les juifs.
Et bien, si Dieudonné fait rire autant, ou même plus de monde, sans laisser penser que lui ou ses fans sont racistes ou antisémites, tant mieux ! L’épisode n’aura pas été inutile.
@Courtial des Pereires
[Pour être honnête, j’ai été très déçu. Déçu de savoir que R. Faurisson, c’était ça. De savoir que dans mon pays, la France, que j’aime et que je tiens en estime, c’est pour avoir présenté ces arguments que ce petit vieux s’était fait éclater le bulbe par une bande, lynché médiatiquement, condamné à de multiples reprises, etc.]
Vous poussez quand même le bouchon un peu trop loin. D’abord, Faurisson ne présente aucun « argument » sérieux. Il se contente de citer des textes et des auteurs totalement discrédités par la recherche historique et de faire référence à une « documentation » inexistante. Ensuite, de faire de Faurisson un honnête scientifique exprimant des doutes est pour le moins abusif. Faurisson est un militant antisémite, qui a entretenu une correspondance suivie avec Paul Rassinnier, et dont les soi disant travaux sur les chambres à gaz ne sont qu’un prétexte à la dénonciation paranoïaque d’un « complot juif ».
[Des hommes politiques peuvent être condamnés dans des affaires louches, là pas de problème, Bertrand Cantat tue sa femme (involontairement à priori) mais il peut remonter sur scène et avoir une couverture médiatique, des personnalités avouent qu’ils n’ont pas de problèmes avec la sexualité des enfants, toujours ok on les voit à la télé, mais que R. Faurisson explique que selon lui les chambres à gaz n’ont pas été utilisées comme des armes de meurtres de masse et qu’on peut douter des chiffres… hola malheureux mais ça ne va pas de dire des choses aussi immondes !? Au bûcher !]
Là encore, vous exagérez. Bertrand Cantat peut remonter sur scène, mais pas tuer une autre femme. Faurisson peut parfaitement remonter à une tribune pour parler de l’élevage des cochons d’Inde si cela lui chante. Pas pour commettre à nouveau le délit pour lequel il a été condamné. Faurisson « n’explique » rien du tout. Il répète une thèse que la recherche historique a discrédité et que la loi interdit de propager. Normal dans ces conditions qu’il aille « au bûcher », comme vous dites.
[La fixation sur ce « détail » des chambres à gaz est curieuse. J’ai été à Auschwitz et j’ai vu la chambre à gaz de Auschwitz-1, et les ruines des chambres à gaz d’ Auschwitz-Birkenau. Bon, à l’heure actuelle vraiment ce n’est pas suffisant pour avoir quelque certitude que ce soit.]
Vraiment ? Et que faites vous des témoignages, que ce soit des déportés qui ont participé aux exécutions mais aussi des SS qui menaient à bien les gazages ? Je vous conseille de lire le témoignage de Rudolf Höss, qui fut le directeur du camp d’Auschwitz et qui consigna ses souvenirs dans un mémoire publié en français sous le titre « le commandant d’Auschwitz parle » (disponible en livre de poche). Cela devrait vous illustrer sur les fait que, contrairement à ce que vous pensez, on peut avoir quelques « certitudes »…
[Aussi, je pense que l’ »histoire officielle » n’est pas toujours une mauvaise chose, rapport au « roman national » qui vous est cher et que je pense utile pour la cohésion d’un peuple de mon côté. Toutefois, je suis vent debout contre la loi Gayssot qui empêche des chercheurs ou des curieux de remettre en cause les conclusions du procès de Nuremberg et autres points d’histoire de la seconde guerre mondiale.]
C’est votre droit. Mais c’est quand même la loi, et le principe républicain commande d’obéir à la loi même lorsqu’on n’est pas d’accord avec elle.
[Je ne comprends pas qu’on interdise par la force (de la loi, et par les menaces physiques) cet homme de dire ce qu’il a a dire, conneries ou pas. Ce serait bien plus efficace de le contrer dans un débat, avec de vrais experts, etc.]
Je suis contre toute forme de « menace physique ». Par contre, je partage l’idée que la loi peut interdire la propagation publique d’une idée, qu’elle soit fausse ou vraie d’ailleurs, lorsque celle-ci met en danger l’ordre public. De la même manière que la loi nous commande de cacher certaines parties de notre corps en public, la loi peut dans des conditions bien précises et cadrées de clore un débat.
[Le fait que Dieudonné l’invite sur scène n’était pas de l’humour, c’était d’ailleurs hors spectacle.]
Et c’était quoi, alors ? Un meeting politique ?
[Après m’être renseigné, je n’ai pas été choqué que Dieudonné ait fait ça et lui ait remis le prix de l’infréquentabilité, à ce vieil homme qui a perdu son travail, qui a pris des cours de boxe thailandaise gratuitement, qui se fait cracher à la gueule depuis vingt ans et qui est considéré comme le pire des dégénérés.]
Non, pas le pire. Mais un dégénéré quand même. Et à juste titre.
[Dieudonné l’a fait pour aller plus loin, parce que lui aussi il avait été banni des médias, considéré comme un antisémite, (…) Alors voilà, c’est du panache.]
Franchement, je ne trouve pas que pour se défendre d’une accusation d’antisémitisme la meilleure technique soit de s’exhiber en compagnie d’un autre antisémite. Heureusement qu’on ne l’a pas accusé de pédophile ou de parricide, dieu sait qui il aurait été capable de faire monter sur scène…
[Que ça choque certaines personnes, d’accord, mais c’est parce qu’elles ont des barrières intellectuelles et morales que je n’ai pas dans ce cas (et de plus en plus je me demande si je suis un être sain avec toutes ces histoires…). C’est aussi un immense bras d’honneur au « système » médiatique et antiraciste, indéniablement.]
C’est bien là le problème. Faire des « bras d’honneur au système » n’est pas en soi une qualité qu’il faut encourager. Parce que tout n’est pas mauvais dans le « système ». Et si le « système » interdit le meurtre, faut-il applaudir ou excuser celui qui tue son voisin sous prétexte qu’il « fait un bras d’honneur au système » ? Je ne le crois pas. A supposer même que l’objectif de Dieudonné soit de « faire un bras d’honneur au système », cela ne justifie nullement qu’il propage des textes antisémites ou négationnistes.
[Dieudonné déclare néanmoins ne pas être antisémite ni nazi, voilà.]
Je ne suis pas obligé de le croire sur parole, et ses actes parlent d’eux mêmes.
[Je précise aussi que je lance régulièrement des blagues atroce à mes amis ou bonnes connaissances, qui me le rendent bien d’ailleurs, particulièrement méchantes, racistes, et qui vont parfois jusqu’à les vouer à la mort.]
Dieudonné fait ce qu’il veut en privé avec ses amis ou ses bonnes connaissances. Mais dans l’espace public, il y a des lois.
[C’est peut-être un genre d’humour que vous ne supportez pas ou qui vous est parfaitement étranger et qui expliquerait pourquoi j’aime Dieudonné et pas vous. Quand Dieudonné est en communion avec son public, il sait qu’il peut aller très loin et que les gens vont prendre ce qu’il dit comme une méchanceté gratuite, et c’est d’autant plus attendu si cela concerne une personnalité ou les l’holocauste parce que le public sait que c’est précisément ce qu’il ne devrait pas avoir le droit de dire.]
Et si Dieudonné tuait un spectateur, les public rigolerait parce qu’il sait que c’est précisément ce qu’il n’a pas le droit de faire ? Vous voyez bien qu’avec ce genre de raisonnement, tout est permis.
[Oui, j’ai peut-être utilisé une expression maladroite. Je voulais dire qu’il combattait tous les « racismes ».]
Vous pensez vraiment que Dieudonné combat l’antisémitisme ?
[Vous avez une morale beaucoup plus stricte que la mienne dans ce cas en matière d’expression. Je comprends votre point de vue. Je m’intéresse principalement aux actes, si quelqu’un fait 1000 blagues en souhaitant la mort de quelqu’un sans jamais encourager les gens à le faire ou sans jamais passer à l’acte lui-même, je ne considère pas qu’il prend ce qu’il dit au sérieux.]
En d’autres termes, vous attendez qu’il y ait mort d’homme pour prendre l’affaire au sérieux ?
[J’en profite sur le sujet E&R (qui est plus ou moins lié à Dieudonné, je vous prie de me pardonner le hors sujet) pour vous demander si vous avez ressenti un départ d’anciens militants communistes pour le FN (au delà du cas Alain Soral) ?]
Non. Il y a une captation par le FN de l’électorat populaire qui était celui du PCF naguère, mais le passage des militants est beaucoup plus rare. Le fossé droite/gauche reste pour l’immense majorité des militants une barrière infranchissable. Notamment pour une question de vocabulaire.
[Comment vous sentez-vous de votre côté, puisque d’après ce que je vois (de très loin je l’admets), le PCF et l’ »extrême gauche » en général n’est pas sur votre ligne du tout en matière de critique de l’euro, etc. ?]
Je me sens bien, merci… et je n’ai aucune envie d’aller au FN non plus.
@ Courtial des Pereires
Je vous conseille la lecture de :
http://jeankoong.unblog.fr/2010/09/14/anthologie-dieudonne-dans-le-texte/#partie11
Quelques extraits :
« Je ne prononce pas le mot juif. Après mes différents procès, j’ai compris qu’il pouvait y avoir interprétation sur ce mot alors que sur sioniste, il n’y a pas d’interprétation possible. […] Pour moi, le raciste contre qui on se bat tous ensemble, qui prend le soin de ne pas dire musulmans mais islamistes, tant mieux : ça veut dire que, lui, il commence à être dressé. Même s’il pense “arabe”, s’il dit “islamiste”, je préfère. Intellectuellement, il se sent obligé de réduire. » (Explication entre Dieudonné et Pierre Tévanian, texte de lesogres.info, 14 juillet 2005)
« Je citerai l’exemple du journal Libération qui a été racheté par le baron de Rothschild, et qui divulgue les infos qui l’intéressent et qui servent les projets de sa formation religieuse avec une haine particulière envers les Noirs et les Maghrébins. Il a le droit de le faire dans une démocratie et moi, je suis pour la liberté d’expression. » (Interview pour le quotidien algérien El Watan, 4 juin 2007)
« Ceux qui vivent le racisme en France, ce sont plutôt les communautés arabe et noire. La plus pauvre, la plus discriminée. Ce sont les sionistes qui organisent ça. » (Interview pour le quotidien algérien L’Expression, 19 février 2005)
« Le sionisme divise l’humanité pour régner. Il essaie de régner en nous soulevant les uns contre les autres. Ils ont organisé toutes les guerres et tous les désordres de la planète. Ils ont été impliqués dans la traite négrière. » (Interview pour la chaîne iranienne Press TV, 7 avril 2010)
« Il faut savoir que 90 % des bateaux qui déportaient les Noirs d’Afrique vers les Antilles appartenaient à des Juifs, et la majorité des marchands d’esclaves étaient des Juifs. De toute évidence, aujourd’hui, les Juifs ne sont pas responsables de ce qui s’est passé, mais c’est une réalité, et c’est, par exemple, quelque chose dont nous ne sommes pas autorisés à parler. [… Des personnes] ont été enlevées d’Afrique, placées dans des bateaux et emmenées aux États-Unis ou aux Caraïbes pour travailler dans les champs, être vendues à des familles qui sont plus tard devenues les Rothschild et les Rockefeller. Jamais nous n’avons eu la chance de voir cette histoire, parce que le lobby très puissant qui domine le monde raconte l’histoire à l’aide d’un cinéma qui lui sert. C’est une propagande. » (Interview pour la chaîne iranienne Press TV, 7 avril 2010)
Bref, le « sionisme » (il y a ambiguïté sur le signifiant de ce mot chez Dieudonné M’Bala M’Bala) mène le monde… L’ambiguïté que je souligne vient d’une prudence apprise par les condamnations pénales dont a fait l’objet l’intéressé comme il l’avoue lui-même. L’équivalence des deux termes – sioniste et juif – pour ce monsieur se révèle particulièrement lors de l’interview du 7/4/10 à la TV iranienne, voir les extraits sur l’esclavage cités plus haut où les deux termes sont utilisés en alternance mais à ce sujet, tout doute doit être levé car à l’époque de la traite des noirs, aucun sionisme n’existait.
Quant aux « 90 % de bateaux etc… », on est à mille lieux des études historiques sérieuses.
Bonjour ami et camarade,
Moi, en gros, Dieudonné je m’en fous. Ses gesticulations sont dérisoires.
Je ne reviendrai pas sur tous les arguments apportés ici.
Celui qui m’intéresse en revanche, c’est Alain Jacubowicz, le président de la Licra.
Récemment interviewé sur sa demande d’interdiction du spectacle de Dieudonné, et en réponse à une question du journaliste, Me Jacubowicz avouait, un peu gêné, du bout des lèvres que, oui… aujourd’hui… dans le contexte… il demanderait peut-être l’interdiction du sketch de Pierre Desproges sur les juifs.
Desproges n’a pourtant jamais été suspect d’antisémitisme.
Alors que dit son sketch (visible en ligne) ? D’abord, il y a l’humour très noir et très grinçant d’un Desproges qui reproche aux juifs d’avoir montré de l’hostilité à l’égard des nazis ; ensuite, à propos d’une célèbre journaliste de télé, juive elle-même et qui avouait à l’époque ne pouvoir épouser qu’un juif, il y a le Desproges plus politique qui attaque durement le communautarisme (juif ou autre) sur le thème plaisant -et très drôle- "Moi qui suis Limousin, je n’aurais jamais du épouser une Vendéenne : ces gens-là ne sont pas comme nous !".
À votre avis, qu’est-ce qui gène le président de la Licra dans le sketch de Desproges ?
L’humour très noir sur la Shoah ? Ou l’attaque contre le communautarisme ?
Je vous laisse en décider.
En tout cas, j’ai entendu hier que notre président avait une fois de plus taxé d’extrémisme et de xénophobie ceux qui luttent contre l’Europe supranationale. Aujourd’hui, je m’interroge : Quel ministre demandera au conseil d’État de valider l’interdiction des meetings souverainistes lors des prochaines élections européennes ?
@Gugus69
[Celui qui m’intéresse en revanche, c’est Alain Jacubowicz, le président de la Licra.
Récemment interviewé sur sa demande d’interdiction du spectacle de Dieudonné, et en réponse à une question du journaliste, Me Jacubowicz avouait, un peu gêné, du bout des lèvres que, oui… aujourd’hui… dans le contexte… il demanderait peut-être l’interdiction du sketch de Pierre Desproges sur les juifs. Desproges n’a pourtant jamais été suspect d’antisémitisme.]
En effet. Gérard Oury, qui était juif, lui, avait déclaré peu avant sa mort qu’il lui aurait été alors impossible de faire « Les aventures du Rabbi Jacob ». Depuis les années 1980 et sous l’influence des idées post-modernes venues des Etats-Unis, nous sommes progressivement tombes dans une « idéologie de l’offense » qui érige le respect des susceptibilités de chaque catégorie au dessus des libertés individuelles. Une idéologie qui dissimule une peur panique des conflits derrière une vision « lisse » ou l’on n’a plus le droit de rire de quoi que ce soit, de peur d’offenser quelqu’un.
[En tout cas, j’ai entendu hier que notre président avait une fois de plus taxé d’extrémisme et de xénophobie ceux qui luttent contre l’Europe supranationale. Aujourd’hui, je m’interroge : Quel ministre demandera au conseil d’État de valider l’interdiction des meetings souverainistes lors des prochaines élections européennes ?]
Bonne question…
Pour infos,vu sur’comité Valmy’
‘La guerre civile froide ?
Par Jacques Sapir
12 janvier 2014
Les dernières péripéties, pour ne pas dire les galipettes, de François Hollande ont eu tendance à masquer un instant le sérieux de la situation dans le pays en ce début d’année. Il est vrai que notre Président casqué se rendant à la nuit dans le lit de sa blonde rejoue, mais sur le mode dérisoire et un peu ridicule, les grands mythes de l’Antiquité. Le fait que ce lit soit dans un appartement d’une personne liée au gang de la Brise de Mer ajoute ici ce qu’il faut de sordide à la parodie. L’important n’est cependant pas là ; mais l’important existe bien.
On peut se demander si, en France, nous ne vivons pas actuellement les prémices d’une guerre civile. Cette question, en apparence absurde, mérite cependant d’être posée à la vue des événements que l’on a connus ces dernières années. Dans une note datant de l’automne 2012, j’évoquais la possibilité de la crise de légitimité du pouvoir. Nous y sommes désormais. L’année 2014 risque fort d’être marquée par une accumulation de mouvement sociaux dont la convergence mettrait directement en cause le pouvoir. Or, la crise de légitimité a ceci de particulier qu’elle pose directement la question non pas de la politique suivie, que l’on peut en fonction de ces opinions considérer comme bonne ou mauvaise, mais du fait que le pouvoir soit habilité à mener une politique. C’est pourquoi il faut s’attendre à ce que la contestation du pouvoir puisse prendre un tour violent dans le cours de cette année.
En fait, l’exercice du pouvoir, la Potestas, dépend de sa légitimité que lui confère l’Auctoritas. Ces notions, habituelles sous la plume des juristes d’inspiration chrétienne, ne sont pourtant nullement liées obligatoirement à cette sphère. On comprend bien, même intuitivement, la nécessité de séparer la capacité à exercer un pouvoir politique de la légitimité, ou de la justesse, qu’il y a à le faire. Il n’est donc pas nécessaire d’être chrétien, ni même de croire en Dieu, pour remarquer la pertinence de la distinction entre Auctoritas et Potestas.
Cette question est d’habitude passée sous silence, parce que nul ne conteste la légitimité du pouvoir, surtout d’un pouvoir issu d’institutions qui sont en théorie démocratiques. Mais, force et de constater que l’opposition au pouvoir, qu’elle vienne de la droite ou de la gauche, est désormais moins une opposition à ce que fait ce pouvoir qu’un opposition à sa capacité même à faire.
La violence politique, fille de l’illégitimité
La vie politique française est en effet marquée depuis quelques années par une incontestable montée du niveau des affrontements, qu’ils soient verbaux, symboliques, et parfois même physiques. Nous vivons, en réalité, l’équivalent des prémices d’une guerre civile « froide », qui menace à chaque instant de se réchauffer. L’ex-Président, Nicolas Sarkozy, en a fait l’expérience durant son mandat, et en particulier à partir de 2009-2010. Il fut l’objet d’attaques dont le caractère haineux ne fait aucun doute, et qui provenaient – ce fait est à noter – tant de la gauche, ce qui peut être compréhensible, que de la droite. On a mis ces attaques sur le compte du « style » imposé par ce Président, dont les dérapages verbaux et les outrances étaient légions, et qui tendait à ramener toute action, et donc tout mécontentement, à lui seul. Ce n’était pas pour rien que l’on parlait d’un « hyper-président », rejetant – au mépris de la constitution – son Premier ministre dans l’ombre. Cependant, l’élection de son successeur, François Hollande, se présentant comme un Président « normal », n’a rien changé à cette situation. On peut, par ailleurs, s’interroger sur le qualificatif de « normal » accolé à Président. La fonction présidentielle est tout sauf « normale ». Que le style de l’homme puisse se vouloir « modeste » est plausible, surtout après les outrances, et les Fouquet’s et Rolex de son prédécesseur. Mais il faut bien constater que rien n’y fit. L’opinion, jamais charmée par l’homme qui dès son élection n’a pas eu « d’état de grâce » comme les autres Présidents, s’en est rapidement détournée. Le voici au plus bas des sondages, voué aux gémonies sans avoir jamais été encensé. Tout est prétexte, à tort ou à raison, à reproches et critiques. Il se voit désormais contester par certains la possibilité même de gouverner. Comme son prédécesseur, il fait l’objet de critiques dévastatrices parfois même dans son propre camp politique qui vont bien au-delà de sa simple personne. Les mouvements sociaux, qui sont naturels dans un pays et dans une société qui sont naturellement divisés, prennent désormais des dimensions de plus en plus violentes et radicales. Après la « manif pour tous », voici les « bonnets rouges ».
On a dit, et ce n’est point faux, que la présence de la crise, la plus significative que le capitalisme ait connu depuis les années 1930, expliquait cette tension. Mais, même si cette crise est exemplaire, le pays en a connu d’autres depuis les années 1980. Il faudrait, pour retrouver ce même état de tension, revenir à la fin des années 1950 et à la guerre d’Algérie. Mais l’on sait, aussi, que la IVème République était devenue largement illégitime. De même, on explique souvent, et pas à tort, qu’Internet est devenu un lieu ambigu, entre espace privé et espace publique, qui est particulièrement propice à la libération d’une parole autrement et autrefois réprimée. Cette explication, même si elle contient sa part de vérité, ne tient pourtant pas face à la spécificité de la crise française. En effet, les effets d’Internet sont les mêmes dans tous les pays développés. Or, du point de vue de la violence politique, pour l’instant essentiellement symbolique, mais dont on pressent qu’elle pourrait se développer en une violence réelle, il y a bien une différence entre la France et ses voisins. Il faut donc aller chercher plus en amont les sources de cette radicalisation et surtout voir qu’au-delà de l’homme (ou des hommes) – aussi ridicule voire haïssable qu’il puisse être – elle touche à la fonction et au système politique dans son entier. Nous vivons, en réalité, une crise de légitimité.
Cette crise se manifeste dans le fait que l’on conteste non plus la politique menée, ce qui est normal en démocratie, mais l’exercice même de la politique tant par l’UMP que par le PS. Désormais la distinction, largement factice la plupart du temps, entre le pouvoir et le pays réel, devient une réalité. Cette opposition n’est pas sans rappeler celle entre « eux » et « nous » (Oni et Nachi) qui était de mise dans les régimes soviétiques lorsque le système a commencé à se bloquer. Toute personne qui a travaillé sur les dernières années du système soviétique, tant en URSS que dans les pays européens, ne peut qu’être sensible à cette comparaison. La perte de légitimité était, là, liée à la combinaison de problèmes économiques (la « stagnation ») et politiques, dont l’origine vient de l’écrasement du réformisme soviétique à Prague en août 1968.
En France, cette perte de légitimité du système politique et du pouvoir, dont nous voyons les effets se déployer de manière toujours plus désastreuse devant nos yeux, a une cause et un nom : le référendum de 2005 sur le projet de constitution européenne. Les référendums sur l’Europe ont toujours été des moments forts. Contrairement à celui sur le traité de Maastricht, où le « oui » ne l’avait emporté que d’une courte tête, le « non » fut largement majoritaire en 2005 avec 55% des suffrages. Pourtant, ce vote fut immédiatement bafoué lors du Traité de Lisbonne, signé en décembre 2007 et ratifié par le Congrès (l’union de l’Assemblée nationale et du Sénat) en février 2008. De ce déni de démocratie, qui ouvre symboliquement la Présidence de Nicolas Sarkozy, date le début de la dérive politique dont nous constatons maintenant la plénitude des effets. La démocratie dite « apaisée », dont Jacques Chirac et Lionel Jospin se voulaient être les hérauts, est morte. Nous sommes entrés, que nous en ayons conscience ou pas, dans une guerre civile « froide ».
La souveraineté, la légitimité et la légalité
Ce déni a réactivé un débat fondamental : celui qui porte sur les empiètements constants à la souveraineté de la Nation et par là à la réalité de l’État. Ces empiètements ne datent pas de 2005 ou de 2007 ; ils ont commencé dès le traité de Maastricht. Mais, le déni de démocratie qui a suivi le referendum de 2005 a rendu la population française plus réceptive à ces questions. Ceci est aussi dû à l’histoire politique particulière de notre pays. La construction de la France en État-Nation est un processus qui remonte en fait au tout début du XIIIème siècle, voire plus loin. On peut prendre comme événement fondateur la bataille de Bouvines (27 juillet 1214), qui a marqué le triomphe d’un roi « empereur en son royaume » face à ces ennemis, les trois plus puissants princes d’Europe (Othon IV de Brunswick, Jean Sans Terre et Ferrand de Portugal). La culture politique française a intégré ce fait, et identifie le peuple et son État. Plus précisément, le processus historique de construction de la souveraineté de la Nation française n’a été que l’autre face du processus de construction de la communauté politique (et non ethnique ou religieuse) qu’est le peuple français1 . À cet égard, il faut comprendre à la fois la nécessité d’une Histoire Nationale, fondatrice de légitimité pour tous les pays, et le glissement, voire la « trahison » de cette histoire en un roman national. Suivant les cas, et les auteurs, ce « roman », qui toujours trahit peu ou prou l’histoire, peut prendre la forme d’un mensonge (du fait des libertés prises par ignorance ou en connaissance de cause avec la réalité historique). Mais ce mensonge est nécessaire et parfois il est même salvateur en ceci qu’il construit des mythes qui sont eux-mêmes nécessaires au fonctionnement de la communauté politique. Toute communauté politique a besoin de mythes, mais la nature de ces derniers nous renseigne sur celle de cette communauté.
La souveraineté est indispensable à la constitution de la légitimité, et cette dernière nécessaire pour que la légalité ne soit pas le voile du droit sur l’oppression. De ce point de vue il y a un désaccord fondamental entre la vision engendrée par les institutions européennes d’une légalité se définissant par elle-même, sans référence avec la légitimité, et la vision traditionnelle qui fait de la légalité la fille de la légitimité. Cette vision des institutions européennes aboutit à la neutralisation de la question de la souveraineté. On comprend le mécanisme. Si le légal peut se dire juste par lui-même, sans qu’il y ait besoin d’une instance capable de produire le juste avant le légal, alors on peut se débarrasser de la souveraineté2. Mais, sauf à proclamer que le législateur est omniscient et parfaitement informé, comment prétendre que la loi sera toujours « juste » et adaptée ? Ceci est, par ailleurs le strict symétrique de la pensée néoclassique en économie qui a besoin, pour fonctionner et produire le néo-libéralisme, de la double hypothèse de l’omniscience et de la parfaite information3. La tentative de négation si ce n’est de la souveraineté du moins de sa possibilité d’exercice est un point constant des juristes de l’Union Européenne. Mais ceci produit des effets ravageurs dans le cas français.
La question de l’identité
Dès lors, une remise en cause de la souveraineté française prend la dimension d’une crise identitaire profonde mais largement implicite, pour une majorité de français. Dans cette crise, les agissements des groupuscules « identitaires » ne sont que l’écume des flots. Les radicalisations, qu’elles soient religieuses ou racistes, qui peuvent être le fait de certains de ces groupuscules, restent largement minoritaires. Les Français ne sont pas plus racistes (et plutôt moins en fait…) que leurs voisins, et nous restons un peuple très éloigné des dérives sectaires religieuses que l’on connaît, par exemple aux États-Unis.
Mais, le sentiment d’être attaqué dans l’identité politique de ce qui fait de nous des « Français » est un sentiment désormais largement partagé. La perte de légitimité de ceux qui exercent le pouvoir, qu’ils soient de droite ou de gauche, peut se lire comme un effet direct de l’affaiblissement de l’État qui découle de la perte d’une partie de sa souveraineté. On mesure alors très bien ce que la légitimité doit à la souveraineté. Non que l’illégitimité soit toujours liée à la perte de souveraineté. Des pouvoirs souverains peuvent s’avérer illégitimes. Mais parce qu’un pouvoir ayant perdu sa souveraineté est toujours illégitime. Or, la légitimité commande la légalité. On voit ici précisément l’impasse du légalisme comme doctrine. Pour que toute mesure prise, dans le cadre des lois et des décrets, puisse être considérée comme « juste » à priori, il faudrait supposer que les législateurs sont à la fois parfaits (ils ne commettent pas d’erreurs) et omniscients (ils ont une connaissance qui est parfaite du futur). On mesure immédiatement l’impossibilité de ces hypothèses.
Pourtant, considérer que le « juste » fonde le « légal » impose que ce « légal » ne puisse se définir de manière autoréférentielle. Tel a d’ailleurs été le jugement de la cour constitutionnelle allemande, qui a été très clair dans son arrêt du 30 juin 2009. Dans ce dernier, constatant l’inexistence d’un « peuple européen », la cour arrêtait que le droit national primait, en dernière instance, sur le droit communautaire sur les questions budgétaires. Il est important de comprendre que, pour la cour de Karlsruhe, l’UE reste une organisation internationale dont l’ordre est dérivé, car les États demeurent les maîtres des traités4, étant les seuls à avoir un réel fondement démocratique. Or, les États sont aujourd’hui, et pour longtemps encore, des États-Nations. C’est la souveraineté qu’ils ont acquise qui leur donne ce pouvoir de « dire le juste ». Bien sûr, un État souverain peut être « injuste », ou en d’autres termes illégitime. Mais un État qui ne serait plus pleinement souverain ne peut produire le « juste ». De ce point de vue, la souveraineté fonde la légitimité même si cette dernière ne s’y réduit pas.
Ceci permet de comprendre pourquoi il faudra revenir sur ces trois notions, Souveraineté, Légitimité et Légalité, à la fois du point de vue de leurs conséquences sur la société mais aussi de leur hiérarchisation. Ces trois notions permettent de penser un Ordre Démocratique, qui s’oppose à la fois à l’ordre centralisé des sociétés autoritaires et à l’ordre spontané de la société de marché. Il peut d’ailleurs y avoir une hybridation entre des deux ordres, quand l’ordre planifié vient organiser de manière coercitive et non démocratique le cadre dans lequel l’ordre spontané va ensuite jouer. C’est d’ailleurs très souvent le cas dans la construction de l’Union européenne dont la légalité est de plus en plus autoréférentielle. La notion d’Ordre Démocratique assise sur la hiérarchisation des Souveraineté, Légitimité et Légalité aboutit à une critique profonde et radicale des institutions européennes. Mais le problème ne s’arrête pas là. En effet, il nous faut aussi penser ces trois notions hors de toute transcendance et de toute aporie religieuse, car la société française, comme toutes les sociétés modernes, est une société hétérogène du point de vue des croyances religieuses et des valeurs. C’est pourquoi, d’ailleurs, la « chose commune », la Res Publica, est profondément liée à l’idée de laïcité, comprise non comme persécution du fait religieux mais comme cantonnement de ce dernier à la sphère privée. Voici qui permet de remettre à sa juste place le débat sur la laïcité. Cela veut aussi dire que la séparation entre sphère privée et sphère publique doit être perçue comme constitutive de la démocratie, et indique tous les dangers qu’il y a à vouloir faire disparaître cette séparation. Mais, parce qu’il a renié les principes de cette dernière, parce qu’il vit en réalité dans l’idéologie du post-démocratique, notre Président est bien le dernier qui ait le droit de s’en offusquer.
1.On se reportera ici au livre de Claude Gauvart, Histoire Personnelle de la France – Volume 2 Le temps des Capétiens, PUF, Paris, 2013. [↩]
2.Maccormick, Neil, Questioning Sovereignty, Oxford, Oxford University Press, 1999 [↩]
3.Sapir, Jacques, Les trous noirs de la science économique, Paris, Albin Michel, 2000. [↩]
4.M-L Basilien-Gainche, L’Allemagne et l’Europe. Remarques sur la décision de la Cour Constitutionnelle fédérale relative au Traité de Lisbonne, CERI-CNRS, novembre 2009, http://www.sciencespo.fr/ceri/sites/sciencespo.fr.ceri/files/art_mbg.pdf
Jacques Sapir
Ses travaux de chercheur se sont orientés dans trois dimensions, l’étude de l’économie russe et de la transition, l’analyse des crises financières et des recherches théoriques sur les institutions économiques et les interactions entre les comportements individuels. Il a poursuivi ses recherches à partir de 2000 sur les interactions entre les régimes de change, la structuration des systèmes financiers et les instabilités macroéconomiques. Depuis 2007 il s’est impliqué dans l’analyse de la crise financière actuelle, et en particulier dans la crise de la zone Euro.’
Potestas est un terme latin qui signifie « puissance », « pouvoir ». Il désigné plus particulièrement les pouvoirs d’un magistrat romain, notamment sous la République romaine, selon le droit romain. Theodor Mommsen précise que « la puissance publique est appelée, chez les Romains, à la fois imperium et potestas1 ». On parle aussi de potestas pour le pouvoir du pater familias.
Sommaire
1 La potestas chez les magistrats
2 La potestas à l’époque impériale
3 Survivance de la potestas dans les royaumes romano-germaniques et au-delà
3.1 Bibliographie
3.2 Notes et références
La potestas chez les magistrats
Chaque magistrat républicain détient certains pouvoirs constitutionnels (potestas), qui comprennent l’imperium, la coercitio et l’auspicia (pouvoirs religieux). Ces pouvoirs sont équilibrés par plusieurs contraintes constitutionnelles, incluant la collégialité (collega), le droit des citoyens d’en appeler au peuple (provocatio) et une division constitutionnelle des pouvoirs (provincia).
La potestas est le pouvoir général de tous les magistrats, aussi bien ceux détenteurs de l’imperium (on dit aussi bien consularis potestas que consulare imperium), que ceux qui ne détiennent pas l’imperium : les tribuns de la plèbe (tribunicia potestas), les censeurs (censoria potestas), les édiles (ædilicia potestas) et les questeurs (quæstoria potestas)1. Bien qu’on mette parfois en opposition l’imperium et la potestas, le premier induit le second, et seuls les hauts magistrats (consuls, préteurs et magistrats extraordinaires) possèdent les deux. Dans la langue courante, par abus, on désigne les magistrats supérieurs par cum imperio (avec imperium) et les magistrats inférieurs par cum potestate (avec potestas)1.
Chaque magistrat romain est investi d’une partie plus ou moins importante du pouvoir, et ainsi tous les magistrats ont un certain rang de pouvoir (maior potestas ou « pouvoirs majeurs »)2. Les magistrats avec plus de pouvoir surpassent ceux qui en ont moins. Les dictateurs possèdent plus de pouvoirs que n’importe quel autre magistrat. Après le dictateur, c’est le censeur, puis le consul, le préteur, l’édile et enfin le questeur. Chaque magistrat peut seulement bloquer par son veto une action prise par un magistrat de rang égal ou inférieur au sien. Par conséquent, aucun magistrat ne peut s’opposer par son veto aux décisions du Sénat ou des assemblées1.
Chaque magistrat ordinaire peut faire obstruction (veto) à une action qui est prise par un magistrat d’un rang égal ou inférieur. Si cette obstruction se produit entre deux magistrats ayant les mêmes pouvoirs (comme deux préteurs), on appelle alors cela par potestas3. Cette forme d’obstruction n’est pas un veto, c’est alors une opposition pure et simple. Si cette obstruction se produit contre un magistrat ayant moins de pouvoir (tel un consul agissant contre un préteur), on appelle alors cela l’intercessio3. Dans ce cas, le magistrat oppose son pouvoir supérieur (maior potestas) pour annuler les actes d’un magistrat inférieur1.
La maior potestas du consul est illustrée par douze licteurs qui accompagnent chaque consul4. Les consuls ont un pouvoir suprême à la fois en ce qui concerne les domaines civil et militaire. Le pouvoir suprême du consul est une conséquence du fait qu’aucun magistrat ordinaire ne détient un plus haut rang de maior potestas que le consul (autre que le censeur, qui n’a pas d’imperium)1.
La potestas à l’époque impériale
Lorsque l’Empire est instauré, l’imperium proconsulaire donne à l’empereur l’autorité sur l’appareil militaire romain et ses pouvoirs tribuniciens (potestas tribunicia) lui procurent les pouvoirs sur l’appareil civil romain5.
À partir des réformes de Dioclétien et de Constantin, qui ont pour conséquence de militariser la fonction publique romaine, l’exercice de la Potestas est matérialisé par le port du Cingulum, ceinture portée au départ par les commandants de troupes uniquement6.
Survivance de la potestas dans les royaumes romano-germaniques et au-delà
Les Regna germaniques légalement installés sur les terres publiques de l’empire sont totalement intégrés dans le système romain de la Potestas. Administrateurs, au nom du Princeps, de la Belgique Seconde, Chilpéric et son fils Clovis disposent des pouvoirs consulaires dans cette provinces, et à ce titre, ils disposent, comme représentants du Princeps et donc porteurs du Cingulum, de la Potestas Principalis sur cette province7.
L’Auctoritas principis est, dans la Rome antique, une « autorité » (cette traduction du terme latin reste en effet "pauvre") conférée à l’empereur romain en raison de son titre de princeps (« premier » citoyen de Rome).
L’auctoritas principis complète l’imperium et la potestas qui représentent son pouvoir judiciaire, militaire et administratif.
En vertu de l’auctoritas patrum, le Sénat a le pouvoir de confirmation des lois sous la République.
Moyen Âge
Innocent III soutient l’idée que le pape détient seul l’entière souveraineté (l’auctoritas des Romains). Les princes ne possèdent que la potestas, c’est-à-dire la puissance politique qui leur est donnée directement par Dieu.
@bovard
C’est un bon article… mais vous savez, ce n’est pas la peine de le recopier. Il suffit de mettre le lien…
Bonjour
Cette interdiction est surprenante au regard du droit et de la politique.
Mais le débat continue et Dieudonné a maintenant une base importante de soutien. Il est beaucoup plus connu.
http://www.blogactualite.org/2014/01/dieudonne-interdit-le-debat-continue.html
Pas de rapport direct avec votre billet, mais je viens de trouver cette carte de l’Europe que proposent les verts, je l’ai trouvée sur le site "Commun, commune" .
Vous devriez aller y voir,peut-être est-ce une manipulation, mais il y a de tels indices qui font penser que cela peut être un projet possible pour ces individus que personnellement j’en reste atterrée.
http://a133.idata.over-blog.com/0/32/46/53/Cartes-pays-2/europe-carte-verts.jpg
@Baruch
Eh oui… et dire qu’il y en a encore qui pensent que les écolos ne sont pas dangereux…
On pourra remarquer que la Germanie, elle, soit remplit touts les critères obligatoires, soit est le modèle idéal de cette Europe. Mais tout ça, ça tire bien court ; au moins les nazis avaient-ils un projet d’une Bourgogne indépendante, apparemment en souvenir de Charles le Téméraire… Comme le fait remarquer Baruch, ces gens-là ne connaissent décidément pas "nos pays"…
@Bolchokek
Eh oui… c’est étrange de voir que la "germanie", pays divisé tout au long de son histoire en petites principautés et royaumes indépendants chacun ayant son histoire, sa langue et ses coutumes apparaît comme un tout uniforme, alors que la France apparaît divisée. Mais bon, il ne faut pas voir dans cette carte autre chose que l’expression de la monumentale ignorance historique de ses auteurs…
PS: Enfer et damnation! ils ont oublié qu’il y avait un parti indépendantiste Franc-comtois, nenni ma foi, qui a sa permanence à Besançon, cela n’apparaît pas sur leur carte, et ils mettent la Gascogne au nord en pays gavache et ils ont oublié la Navarre, nouste Henric le III de chez nous mais le IV en France ne doit pas être content !